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10/06/2016 | par Nicolas Polubocsko | Toute l'actualité
©Nini La Caille
Tout praticien intervenant sur des questions d’urbanisme a déjà été confronté (ou le sera rapidement) à la
situation particulièrement délicate qui surgit lorsqu’une demande d’autorisation de construire (déclaration
de travaux, permis de construire ou permis d’aménager) porte sur des travaux prévus sur une
construction existante illégale. Faut-il faire table rase du passé et instruire la demande en oubliant
l’illégalité de la construction initiale ? Ou bien l’illégalité de la construction constitue-t-elle un obstacle
insurmontable à la délivrance de l’autorisation ? Tout dépend en réalité de ce qui a rendu la construction
illégale.
Si la construction est illégale depuis son origine, l’autorisation d’urbanisme peut être accordée si elle a
pour effet de régulariser la totalité de la construction.
Il ne saurait être question d’autoriser des travaux sur une construction illégale sans remédier à
l’illégalité dans son ensemble.
Mais les choses ne sont pas toujours aussi simples puisque le législateur et la jurisprudence sont venus
nuancer cette règle de conduite lorsque la construction illégale est dotée d’une certaine ancienneté.
initiale ne peut pas être utilisée par la collectivité pour refuser une autorisation d’effectuer des travaux sur
ce qui existe déjà. Seule la question de la conformité des travaux par rapport à la règle d’urbanisme en
vigueur devra guider la collectivité dans le choix de sa réponse à la demande dont elle est saisie. Pour le
dire autrement : lorsque la construction est terminée depuis plus de dix ans, il faut raisonner comme si elle
avait été édifiée régulièrement même si, en réalité, ce n’est pas le cas…
Toutefois, ce droit à l’oubli dont bénéficient les propriétaires de constructions anciennes ne s’applique
pas dans certaines hypothèses, décrites par l’article L.421-9 du code de l’urbanisme.
La régularisation voulue par le législateur n’est pas possible lorsque la construction expose les tiers ou ses
occupants à un danger avéré, lorsqu’elle est située dans une zone faisant l’objet d’une protection
particulière (parc naturel, site classé, zone rendue inconstructible par un plan de prévention des risques
naturels), ou bien si elle a été implantée illégalement sur le domaine public.
De même, si une action en démolition de la construction initiale est en cours au moment où le délai de dix
ans est arrivé à expiration, la règle posée par l’article L.421-9 ne s’applique pas.
La dernière exception à cette règle mérite d’être soulignée car elle concerne les constructions réalisées
illégalement sans permis de construire : même âgées de plus de dix ans, elles ne peuvent bénéficier du
régime de faveur prévu par l’article L.421-9 du code de l’urbanisme. Si leur propriétaire veut effectuer
des travaux dessus, il devra solliciter un permis de construire ayant pour effet de régulariser la totalité de
la construction par application de la jurisprudence Thalamy. À défaut, la demande de permis devra être
refusée.
En 2011, le Conseil d’État a précisé qu’en cas de construction ancienne implantée sans permis, même si
elle ne peut plus être régularisée (4), l’autorité peut tout de même autoriser l’exécution de travaux
lorsqu’ils ont pour but la préservation du bâtiment ou bien sa mise en conformité avec des normes de
construction plus récentes.
Toutefois, il ne s’agit là que d’une simple faculté pour la personne publique, celle-ci devant peser les
intérêts en présence avant de prendre sa décision : « dans l’hypothèse où l’autorité administrative envisage
de refuser le permis sollicité parce que la construction dans son entier ne peut être autorisée au regard des
règles d’urbanisme en vigueur à la date de sa décision, elle a toutefois la faculté, dans l’hypothèse d’une
construction ancienne, à l’égard de laquelle aucune action pénale ou civile n’est plus possible, après avoir
apprécié les différents intérêts publics et privés en présence au vu de cette demande, d’autoriser, parmi les
travaux demandés, ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes, alors même que
son édification ne pourrait plus être régularisée au regard des règles d’urbanisme applicables (5) ».
L’autorité peut tout de même autoriser l’exécution de travaux lorsqu’ils ont pour but la
préservation du bâtiment.
Concrètement, cette jurisprudence vise les constructions anciennes qui ne peuvent plus être contestées en
justice et qui ne peuvent pas être régularisées par un permis ; leurs propriétaires peuvent être autorisés à
y effectuer des travaux de confortation, de sécurisation ou bien de mise aux normes mais seulement cela.
Si la construction est devenue illégale en raison de l’évolution de la règle d’urbanisme : le permis peut
être délivré s’il ne méconnaît pas la règle nouvelle.
Contrairement à l’hypothèse précédente, la situation évoquée est celle d’une construction régulièrement
édifiée mais qui est devenue non conforme à la règle d’urbanisme en raison de la modification de cette
dernière. Régulière à l’origine, la construction est devenue non conforme sans que le propriétaire n’ait
levé le petit doigt…
Si celui-ci dépose une demande pour être autorisé à effectuer des travaux, faut-il opposer
systématiquement un refus au motif que sa construction est devenue irrégulière ? Doit-on au contraire
faire droit à sa demande en considérant que le bâtiment a été implanté en toute légalité et que cela a créé
des droits au profit du pétitionnaire ? Comme souvent, la réponse va s’efforcer de concilier les intérêts de
la collectivité avec ceux du propriétaire. La première étant tenue de faire respecter la réglementation
d’urbanisme, y compris à l’égard des constructions implantées avant son édiction, il n’est pas question de
soustraire celles-ci à la nouvelle règle d’urbanisme, fussent-elles implantées régulièrement. Mais il n’est
pas non plus question d’interdire au propriétaire d’effectuer la moindre intervention sur son bien au motif
que la réglementation d’urbanisme a changé.
Il n’est pas question de soustraire des constructions implantées avant son édiction la nouvelle
règle d’urbanisme.
C’est le recours à la jurisprudence « Seckler » qui va permettre à la collectivité de concilier ces deux
impératifs. Selon cette jurisprudence (6), si une construction est devenue illégale en raison de l’apparition
d’une règle d’urbanisme nouvelle, son propriétaire peut être autorisé à y réaliser des travaux dans deux
hypothèses.
D’une part, et c’est logique, l’autorisation de construire peut être accordée si elle a pour but d’améliorer la
conformité de la construction par rapport à la règle nouvelle. On ne saurait interdire à un propriétaire de
vouloir adapter sa construction avec la règle d’urbanisme la plus récente.
D’autre part, l’autorisation de construire peut être délivrée si les travaux envisagés sont « étrangers »
aux dispositions nouvellement instaurées, c’est-à-dire s’ils portent sur une thématique qui n’a pas été
affectée par l’évolution de la réglementation d’urbanisme. Par exemple, si la règle relative au nombre de
places de stationnement devant être créées en fonction de la surface construite est modifiée, une demande
de permis portant sur des travaux de rénovation n’entraînant aucune augmentation de la superficie devra
être favorablement accueillie, quand bien même la construction dans son ensemble ne comprendrait pas le
nombre de places de stationnement requis par la règle nouvelle (7).
L’autorisation de construire peut être délivrée si les travaux envisagés sont « étrangers » aux
dispositions nouvellement instaurées.
Cela étant, la jurisprudence « Seckler » ayant une portée supplétive, la personne publique compétente peut
poser dans son document d’urbanisme des règles différentes. Notamment, le document d’urbanisme local
peut prévoir que la règle nouvelle ne s’appliquera pas aux demandes de permis portant sur une
construction existante ne respectant pas ses dispositions. Ainsi, les propriétaires d’une construction
légalement implantée mais devenue non conforme en raison de l’évolution de la règle d’urbanisme
pourront être autorisés à s’affranchir des nouvelles normes… si la collectivité le veut bien.
Note
(02)V. pour un exemple : CE, 26 mai 2014, Commune de Caugé, req. n° 361212. - Retourner au texte
(04)L’hypothèse vise très clairement celle des bâtiments implantés dans des zones inconstructibles : leur
régularisation dans leur totalité s‘avère impossible. - Retourner au texte
Nicolas Polubocsko
4 commentaires
Pour avoir eu un courrier du Procureur de la République indiquant le bien irrégulier, 2 ans plus tard
un permis modificatif vise par architecte a quand meme ete accordée par la mairie, sur une parcelle
considérée comme agricole. (...)
j"ai heriter d"un terrain avec un batiment de 15 metre carré la construction date de plus 30 ans la
mairie peut elle me la faire demonter vu que je n"ai pas de preuves de demande de construction de
l"epoque .merci de votre reponse
Bonjour, Mon père à réaliser illégalement un garage véhicule d’une surface inférieur à 20 m2,
Quelle sont les risques encourus maintenant que je dois hériter du bien ou cette construction est bâti
? Ce garage et une construction entièrement indépendante de la maison. Ce garage ne me sera
d’aucune utilité et j’envisage sa destruction. Quelles sont les risques si j’entreprends de détruire
cette construction ? Me faut il une autorisation de démolition? Je vous remercie pour votre réponse.
Bonjour à vous, Je suis propriétaire d'un chalet édifié en 1962 avec une autorisation de construire
délivrée par la Mairie. Cette autorisation vaut-elle permis de construire. Par ailleurs ayant effectué
des travaux avec autorisation de la même Mairie, cette autorisation de travaux regularise -t-elle
l'absence de permis initial? Quid de la jurisprudence Thalamy? Merci de vos bon soins. Michel
MATHIEU
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