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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Remerciement
Nous tenons à exprimer nos sincères
expressions de remerciements, de gratitude et de
respect, envers Mr. ZERHOUNI Laqrib Youness,
pour son encadrement et son soutien qu’il a
déployé tout au long de la réalisation du présent
travail. Ainsi que pour ces précieux conseils qui,
sans eux, nous nous ne serions pas pouvoir arriver
à réussir ce travail.

Nos remerciements vont également à tous nos


enseignants.

Notre profonde gratitude à nos familles, amis et


tous ceux qui, de prés ou de loin, nous ont aidé à
réaliser ce modeste travail.

1
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Sommaire 
Introduction générale
Chapitre 1 : présentation de la finance islamique
Section 1 : l’histoire de la finance islamique
Section 2 : définition de la finance islamique, ses ressources et
ses principes

Chapitre 2 : la finance islamique une alternative de la finance


conventionnelle
Section1 : les instruments de financement bancaire
Section2 : les modes de financement des institutions non
bancaires

Chapitre 3 : les perspectives de la finance islamique


Section 1 : actualités et enjeux de la finance islamique
Section2 : les défis de la finance islamique

Conclusion

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Introduction
générale

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Le monde est depuis trois années sous l'emprise d'une crise financière, la pire depuis
celle de 1929. Ses effets se sont fait sentir dans l'économie réelle et la mondialisation a
accéléré sa propagation en effet domino à travers le monde entier. Cette crise, initialement
axée sur des titres financiers américains obsolètes, n'a pas cessé de s'étendre. Ainsi, les
bourses internationales ont essuyé des pertes colossales, des piliers de la finance mondiale se
sont effondrés du jour au lendemain. Les pertes réelles ne sont pas encore cernées par les
autorités politiques et monétaires mondiales. Pour limiter les effets de cette crise, plusieurs
pays développés ont adoptés des politiques d'austérité, ce qui n'a pas empêché de connaitre
une quasi-faillite de certains états réputés solides du point de vu économique.

En revanche, cette crise financière a eu le mérite de mettre en évidence la fragilité du


système capitaliste face aux dérives spéculatifs et face à la spirale de la dette. Le fort impact
qu'a eu la crise financière sur les économies des pays développés et émergents a poussé
plusieurs économistes et analystes à se pencher sur les raisons de la crise, ses conséquences,
ainsi que les moyens qui doivent être mis en place afin d'éviter que cela se reproduise.

A ce titre, la commission d'experts de l'ONU, réunie à New York sous la présidence de


Joseph Stiglitz, met en exergue la nécessité vitale de réformer les principes qui gouvernent les
systèmes monétaires et financiers pour éviter de nouvelles crises. Parmi les lignes directrices
de cette commission, une nouvelle porte a été ouverte pour s'inspirer des principes propres à
la finance islamique. Ainsi, grâce à sa remarquable ascension ces dernières années, le système
financier Islamique a particulièrement intéressé l'ensemble des analystes économiques dans le
monde. En effet, la finance islamique est estimée, à l'horizon 2010, à près de 1000 milliards
de dollars d'actifs, et sa croissance dans les cinq prochaines années est annoncée comme deux
fois plus rapide que celle de la finance conventionnelle, autour de 15 % par an
(financialislam.com, 2010).

Il s'agit d'un système de finance éthique, qui se base sur des valeurs morales tirées du
Coran et plus globalement de la Sharia, la loi islamique. On compte parmi ses principaux
fondements l'interdiction de la pratique de l'intérêt, l'interdiction des pratiques spéculatives, le
principe de partage des profits et des pertes, l'obligation de l'asset-backing ou encore
l'interdiction d'investir dans des sociétés dont les activités sont jugées illicites dans l'Islam.

C'est dans le cadre de ce mémoire que nous allons aborder la problématique de la crise
financière, ses origines et ses issues. Nous allons ensuite étudier les fondements de la finance
islamique. Le rapport tentera d'analyser les caractéristiques de ce système et évaluer les

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

possibilités de transposer quelques uns de ses atouts positifs dans le système conventionnel
pour lui donner plus de crédibilité et de solidité face à d'éventuelles crises dans le futur

Intérêt de sujet
Ce sujet veut d’apporter sa contribution à une meilleure connaissance de la finance
islamique, aussi bien sur le plan théorique que pratique, ainsi qu’un aperçu de son évolution
dans quelque pays.

Il nous est apparu important d’aborder ce sujet d’actualité au combien important pour la
finance moderne de nos jours dans la résolution et la prévention de ses crises, compte tenu des
pistes de développement qu’elle suggère quand à sa stabilité, tiré de ses principes, mais aussi
des potentialités de croissance et de développement qu’elle représente aux yeux des pays en
voie de développement .

Problématique  :
Face a ce contexte caractérisé d’un coté, par une crise mondiale causée par les dérives
du capitalisme et d’un autre coté, une situation assez stable sur e plan économique et
financière dans la zone du golf e grâce a l’intégration dans leur système économique de la
finance islamique, la question légitime qui pourrait alors se poser est :

Est-ce que la finance islamique est une


alternative à la finance conventionnelle ? Et
dans quelle mesure elle est ?
De cette problématique découleront alors les interrogations suivantes :

 Qu’est ce que la finance islamique ?


 Quels sont les modes de fonctionnement de chacun de ces deux systèmes
financiers ?
 Quels sont les enjeux et les défit de la finance islamique ?

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Chapitre 1 :
Présentation de
la finance
islamique
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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

A chaque fois que j’évoque le terme « finance islamique », ça passe rarement inaperçu.
En effet, il s’agit pour les uns de pure démagogie, de jeux de mots voire une tentative de
retour en arrière par des pratiques médiévales incompatibles avec la modernité. Pour les
autres, il s’agit d’un concept sacré, ou carrément divin faisant partie du culte et qui doit être le
seul système en place dans les pays musulmans, en rejetant toute autre forme différente.

Cependant, nous essayerons tout au long de ce papier d’éviter de rentrer dans des
discussions purement idéologiques ou religieuses, chose qui est très possible, juste en
reconnaissant l’appartenance de cette finance à un concept plus large qu’est l’économie
islamique, qu’il s’agisse tout de même d’une doctrine économique, qui, comme toutes les
autres doctrines (capitalisme, communisme, socialisme…) diffère par son propre système de
valeurs.

C’est ce système de valeurs, universelles à la fin, qui fait la particularité de la finance


islamique. En effet, outre la nécessité de répondre aux exigences et contraintes réglementaires
exigées par les lois en vigueur (lois bancaires, sécurité financière, lois sur les sûretés…), les
institutions financières islamiques sont tenues de se conformer à des exigences et à des règles
propres à ce système de valeurs, et qui trouvent leurs origines dans la loi musulmane ou la «
Chariaa ».

Loin des craintes et polémiques que pourrait susciter ce mot, nous nous référons ici à un
ensemble de principes qui privilégient des relations saines, transparentes et équitables.

En effet, la finance islamique est avant tout une finance éthique, qui privilégie un
système de valeurs bâti sur la nécessité d’éviter ce qui est interdit, sur un équilibre entre
l’intérêt personnel et l’intérêt public, mais aussi sur les valeurs de l’équité, la transparence, la
sincérité.

Section 1 : L’histoire de la finance islamique

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

L’islam régit tous les aspects de la vie du musulman, allons de la vie humaine, la
morale, jusqu’aux sujets critiques comme le mariage et l’héritage, on passant par l’économie
et le commerce.

Les racines et principes de la Finance Islamique sont aussi vieux que la religion elle-
même. En effet, Fiqh Al Mouamalat donne depuis des siècles un cadre structuré des
transactions financières des musulmans mais ce n’est que vers la fin du XXe siècle que le
système financier islamique s’est assez développé pour être considéré comme un modèle
distinct permettant aux musulmans (et non musulmans) de mener des activités financières
conformes aux percepts de l’islam.

I. Le système financier islamique avant 2000


La finance islamique est relativement jeune, mais il s'agit d'un domaine de la finance qui
s’est rapidement développé ces derniers temps. L’industrie bancaire et l’investissement
conformes à la Shari’a telle qu'on la connaît aujourd'hui n’a réellement décollé que dans les
années soixante.1

En réalité, et durant des siècles, il n’y pas eu de système financier islamique complet. Il
n’y eu que l’interdiction du riba mais sans la moindre proposition d’un mode de financement
alternatif.

Le développement de la finance islamique a été stimulé essentiellement par un regain de


vitalité de la religion musulmane, et par l’importance des ressources financières de certains
pays musulmans suite aux chocs pétroliers des années soixante-dix. Et aussi à la possibilité
qu’a donnée la finance islamique aux musulmans de se démarquer de l'époque coloniale du
dix-neuvièmes siècle et de la première moitié du vingtième siècle, période durant laquelle le
système bancaire occidental dominait ces pays concernés, et aussi la possibilité pour les
institutions financières islamique de prendre le relais du secteur bancaire conventionnel. 2

En outre, l’introduction des réformes macroéconomiques et structurelles (libéralisation


des mouvements des capitaux, privatisation…) ont favorisé l’expansion de cette industrie.3

Dans ce qui va suivre, les grandes dates de la finance islamique vont être traitées :4

1
1- André MARTENS, « La finance islamique : fondements, théorie et réalité», L'Actualité économique, vol. 77, n° 4, 2001, p6.
2
- Elyès JOUINI, Olivier PASTRE, « enjeux et opportunités du développement de la finance islamique pour la place de paris », Paris, 2008,
p42.
3
- André MARTENS, op cit, p6
4

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

 Le premier essai pour la création d’une finance islamique date des années 40,
cet essai qui a été un échec c’est déroulé en Malaisie. Une deuxième tentative a été procédée
par le Pakistan en 1950, ce deuxième essai a vu les mêmes résultats que son précédant.5

 Les premières expériences modernes dans le domaine de la finance islamique


datent des années 1960 avec l’expérience des caisses rurales Mit Gammar en Egypte crée par
Dr Ahmad Elnagar, et du « Piligrim’s Management Fund » (Tabung Hadjji) en Malaisie. Le
principal objectif de ces institutions était de réduire l’exclusion bancaire et de promouvoir le
développement des couches de population défavorisées.6

 En 1970, la création de l’Organisation de la conférence Islamique (OCI)


regroupant un grand nombre de pays musulmans remet les préceptes économiques de l’Islam
à l’ordre du jour, et lance l’idée de la banque islamique.7

 En 1973, l’OCI décide de créer la Banque Islamique du Développement (BID).


Basée à Djeddah, et comprenant 56 pays membres, cette institution à pour vocation d’apporter
son concours aux pays membres sous forme d’aide au développement, et avec des techniques
de financements islamiques, qu’il s’agisse de financer le commerce extérieur, de lutter contre
la pauvreté, de financer certaines infrastructures (routes, Barrages hydro-électrique..) et
certains projets sociaux comme la construction d’écoles ou de centre de santé.89

 En 1975, naissances de la Dubaï Islamic Bank, première banque islamique


universelle et non gouvernementale. Durant la même période, le nombre de banques
islamiques similaires a connu une expansion rapide : La Kuwait Finance House et la Banque
Fayçal en Egypte en 1977, la banque islamique de Jordanie en 1978, ainsi que la banque
islamique du Bahreïn en 1980. De plus, un groupe de banques d’investissement spécialisées a
été crée, notamment, la société d’investissement de Nassau en 1977, la société
d’investissement du Golfe basée à Sharjah également créée en 1977 et la Sharia Investment
Services basée à Genève en 1980.10

 En 1979, l’apparition de la première compagnie d’assurances islamique,


Islamic Insurance Company of Soudan.11

 Au cours de la décennie suivante, le nombre des institutions financières


islamiques et le volume de leurs actifs ont vécu une croissance continue, et leurs activités

5
-Moussa Yabré, «Banques islamiques : Les principes de base et les modes de financement islamiques proposés aux PME (la BIS en exemple) »,
Master finance 2007-2008, ISM, p14
6
- Elyès Jouini, Olivier Pastré, op cit, p42.
7
- Elyès Jouini, Olivier Pastré, op cit, p42.
8
- http://www.doctrine-malikite.fr/Definition-et-historique-de-la-finance-islamique_a116.html
9

10
- Conseil Déontologique des Valeurs Mobilières, « La finance islamique », Maroc, octobre 2011, p7.
11
- Elyès JOUINI, Olivier PASTRE, op cit, p42.

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

s’étendent au-delà des frontières physiques du Moyen Orient (en Asie de Sud-est, dans un
premier temps, vers l’Afrique de Nord par la suite). Les banques islamiques continuent à
consolider leur base de dépôts et les différents opérateurs profitent des innovations financières
afin d’élargir leur offre de produits.1213

 Dans les années 1990, nombreux sont les pays islamique du Golfe et de l'Asie
qui ont suivi la vague (Arabie saoudite, l’Emirat, Indonésie, Malaisie...). En effet la Malaisie
et l’Indonésie sont deux pays précurseurs en la matière, en plus de la création d’institutions
bancaires islamiques, ils se sont dotés d’instruments de réguler et d’assurer la pérennité de
leur secteur financier.14

II. Le système financier islamique après 2000

Cette croissance se poursuit au cours des années 2000, et l’intérêt pour la Finance
Islamique dépasse les frontières géographiques du monde musulman pour atteindre l’Europe
et les Etats Unis, devenant ainsi un enjeu mondial.15

Selon les estimations du FMI, il existe actuellement plus de 300 institutions islamiques
opérant dans plus de 75 pays. Selon les mêmes statistiques, l’industrie a connu une croissance
annuelle moyenne d’environ 15% pendant les dix dernières années. Leurs prévisions
indiquent que cette tendance devrait continuer à connaitre même une accélération durant les
années à venir en fonction des pratiques réglementaires qui seraient mises en place.

L'expansion rapide de la finance islamique comme un modèle alternatif de


l’intermédiation financière reflète sa capacité à répondre à l'évolution structurelle de la
demande des consommateurs ainsi que des entreprises, sa compétitivité et sa capacité à
résister à un environnement difficile et en mutation.16

Le dynamisme de ce marché a été ressenti dans les centres traditionnels de la finance


islamique et dans un certain nombre d'autres marchés. Selon la Bank Negara Malysia (Banque
Centrale de la Malaisie), le nombre des filiales de banques islamiques en Malaisie a augmenté
de 126 en 2004 à 766 en 2005 (+508%).17

Ailleurs, un nombre important de nouvelles institutions financières islamiques


(IFI) a été mis en place rapidement dans les marchés traditionnels de cette industrie plus
précisément dans les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG).
12
- Elyès JOUINI, Olivier PASTRE, op cit, p42.
13

14
- http://www.doctrine-malikite.fr/Definition-et-historique-de-la-finance-islamique_a116.html
15
- Elyès JOUINI, Olivier Pastré, op cit, p43.
16

17
- KPMG ; Growth and Diversification in Islamic Finance

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

La finance islamique est également en croissance dans de nouveaux marchés tels que la
Syrie, le Liban, le Royaume-Uni, la Turquie et le Canada. A titre d’exemple, au Royaume-
Uni, plusieurs banques islamiques ont vu le jour, tels que la Islamic Bank Of Britain et la
Européen Islamic Investment Bank.

Cette évolution a généré un grand intérêt de la part des acteurs mondiaux de la finance
conventionnelle dans les économies développées qui ont essayé d’augmenter leurs
participations dans les marchés financiers islamiques. Avec la libéralisation accrue, le système
financier islamique est devenu plus diversifié et a gagné de plus en plus de profondeur. Par
conséquent, la finance islamique semble être actuellement un des segments les plus
dynamiques de l’industrie internationale des services financiers. D’autres pays
majoritairement musulmans, commencent aussi à s’intéresser à ce secteur, en particulier ceux
de l’Afrique du Nord.18

La très forte demande des produits islamiques et leur popularité croissante étaient
principalement poussées par une masse considérable de liquidité en provenance des
pétrodollars dans la région du Golfe persique ainsi que par les nouvelles configurations
géopolitiques. Ce mode de financement est devenu une partie intégrante du système financier
mondial.

Le paysage financier islamique a été transformé de manière remarquable avec un


nombre d’acteurs élevé et une gamme étendue de produits et services. Plusieurs raisons
pourraient expliquer l’importante croissance des actifs islamiques.

 La première raison est la date du 11 septembre 2001, qui a laissé une empreinte
indélébile sur l’ensemble du monde musulman, a marqué également un tournant important
dans le développement de la finance islamique. La croissance de celle-ci s’est fortement
accélérée au cours des dernières années sous l’impulsion de deux phénomènes :

- le rapatriement de certains capitaux des investisseurs musulmans après le 11


septembre 2001
- le gonflement de l’épargne des pays du Proche-Orient.

Ces deux facteurs expliquent, aujourd’hui, l’apparition de poches d’épargne


considérables dans les pays musulmans.

 La deuxième raison est le renouveau spirituel et religieux qui a crée un appétit


croissant pour des produits conformes à la Charia.

 Une troisième raison pourrait être l’augmentation de la concurrence bancaire au


Moyen Orient. Cette concurrence s’est intensifiée et est devenue plus visible suite à
l’intégration de ces pays à l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce). Ceci a poussé les
banques de petites tailles à chercher une alternative via la spécialisation en tant que banques
18

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

islamiques. Les banques de taille importantes avaient le choix entre conversion en IFI ou
ouvrir des « fenêtres » islamiques afin de diversifier leurs portefeuilles et de profiter de cette
niche en développement.19

Aujourd’hui, les institutions financières islamiques continuent à consolider leur base de


dépôts et les différents opérateurs profitent des innovations financières afin d’élargir leurs
offres de produits. Elles sont actuellement présentes dans plusieurs régions du monde : Moyen
Orient, Asie du Sud, Europe, Amérique, Afrique du Nord, etc.20

Section 2 : Définition de la finance islamique, ses ressources et ses


principes

Il n’existe néanmoins pas de définition unique de la finance islamique mais ce terme est
aujourd’hui largement utilisé pour désigner les activités financières et commerciales qui
respectent les principes du droit et de la jurisprudence islamique, plus communément désignés
sous le vocable« charia ». Le respect de tels principes permet ainsi d’investir et de réaliser des
profits en conformité avec les règles du droit musulman.

I. Définition
La compréhension de la finance islamique n’est pas aisée pour des personnes évoluant
dans des économies basées sur un modèle conventionnel21

En effet, le système financier islamique se nourrit de fondements éthiques et religieux


puisés dans les livres saints musulmans.

Afin d’améliorer notre compréhension, il est nécessaire d’expliquer les caractéristiques


de ce système financier, que nous allons traiter brièvement :22

1. Une finance éthique et responsable


Plusieurs courants de pensée, issus des pays les plus divers et depuis bien longtemps,
ont soulignés que la recherche du profit ne devait pas négliger le respect de valeur. Cette
vision des choses a pris de l’importance ces dernières décennies au point que l’on a pu parler
de finance éthique, et d’économie socialement responsable. C’est dans ce courant que l’on
peut placer la finance islamique du fait du caractère fondamentalement moral des principes
qu’elle impose au droit, à l’économie et à la finance islamique.
19
- Standard & Poor’s ; Les Habits neufs de la Finance Islamique ; mai 2007
20

21
- Pour des raisons de simplification nous appellerons « conventionnel » tout élément se rapportant à la finance non-islamique. La finance
conventionnelle est définie selon Vernimmen comme « l’ensemble des activités qui rendent possible et organisent le financement des agents
économiques ayant des besoins de capitaux (comme par exemple les entreprises ou les états) par les agents ayant des surplus (typiquement les
ménages épargnants). »
22

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La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

En effet, la finance islamique est une composante de la finance éthique : c’est une
finance qui n’obéit pas à la seule loi du profit mais qui répond à des critères tels que le
développement durable, l’environnement et la gouvernance. Ce système est construit autour
d’une subtile conjugaison entre l’économie, l’éthique et la loi musulmane.

Il s’agit, en quelques mots, d’un ensemble de normes et de règles jurisprudentielles qui


régissent les transactions de l’homme avec ses semblables ainsi que son comportement en
société et envers la nature.

Elle s’inscrit ainsi dans le cadre plus général des produits financiers éthiques. Elle
s’adresse à tous ceux qui souhaitent une finance plus responsable et qui intègrent dans leurs
décisions d’investissements un certain nombre de critères extra-financiers, notamment
l’honnêteté, la bonne foi, la confiance, la franchise… Bref, ce sont plusieurs millions
d’individus, indifféremment de leurs convictions, qui pourront trouver une réponse à leurs
attentes, le seul dénominateur commun étant l’éthique, loin des considérations purement
religieuses ou financières.

De manière général, les produits et instruments financiers comptables avec la Charia


visent à offrir une alternative éthique viable aux outils de financement traditionnels.

2. Une finance équitable

Pour la plupart des musulmans, l’islam, d’où la finance islamique tire ses racines, puise
son essence même dans l’esprit de justice, de solidarité, en un solidarité, en un mot dans
l’équité qui doit régner au sein de la communauté, entretenant, par là même, la bonne entente
entre les membres de celle-ci. Cela signifie que chacun doit gagner sa vie de manière morale
et honnête.

Ainsi, une rémunération n’est juste que si elle est la contrepartie d’un véritable travail :
elle ne doit pas résulter par exemple de la monopolisation, de la thésaurisation, d’un revenu
perçu en absence d’activité, du hasard ou encore du temps qui passe. Sont ainsi prohibés
notamment, les manipulations, l’abus de position à l’encontre d’une contrepartie
inexpérimentée, le prélèvement sur les ressources de la communauté au détriment de ceux qui
sont dans le besoin et le système de l’intérêt qui conduit à l’usure et donc à l’exploitation du
prochain. L’économie musulmane est fondée sur l’équilibre, l’échange et donc sur la justice
distributive chère à Aristote : à chacun son dû selon son effort.

3. Une finance au service de l’économie réelle

Selon la théorie économique islamique, d’où est issue la finance islamique, les grands
objectifs de l’activité économique sont les suivants :
 L’augmentation de la richesse, définie comme l’accroissement du capital productif, le
moteur de cette croissance étant l’esprit d’entreprise ;

13
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

 L’augmentation de l’emploi, celle-ci étant favorisée par la participation de tous les


intéressés à la mise en place et au bon fonctionnement des projets de production ;
 La distribution équitable de la richesse et de revenus, celle-ci étant renforcée par la
pratique obligatoire de la zakat, ou aumône légale (selon le principe d’équité mentionné
précédemment)
 L’absence du gaspillage sous la forme, par exemple, de la thésaurisation.

II. Les ressources de la finance islamique

La finance, ou l’économie islamique en général est guidée par les valeurs de l’Islam.
Dans une économie islamique l’homme n’est pas dans une position de distribuer les
ressources de la façon qu’il veut. Il existe une limitation morale sérieuse imposée par le Saint
coran et la Sunnah sur les pouvoirs des individus imprégnés par les valeurs de l’islam.

Pour expliquer la dynamique de la loi islamique et son adaptabilité à tous les temps il
est essentiel de parler des sources et des bases de cette loi. Le droit musulman, Shari’a, est un
système de droit dont les principes et le contenu dérivent du Coran, parole de Dieu révélée à
son prophète Mohammed (paix et salut sur lui), des actions, conduite et paroles du prophète
(la Sunnah et les hadiths). Ces sources sont à leur tour développées par le consensus (ijmâ) et
la raison (Ijtihad). Le droit musulman se conçoit comme un système de conduite dans le
domaine rituel, social, économique et personnel.23

A partir de là, on peut dire que les sources de la finance islamique se divisent en deux ;
les sources principales et les sources secondaires.

1. Les sources principales

Il existe deux sources principales :

1.1. Le Coran

C’est le livre saint de l'Islam qui rend compte du message de Dieu tel que révélé au
Prophète Mohammed –paix et bénédictions d'Allah sur lui-, il constitue la première source en
termes de loi. Tout élément tiré d'autres sources juridiques doit impérativement être en totale
conformité avec la parole de Dieu dans le Coran.

Il a un niveau d’éloquence en dehors des capacités humaines d’où son inimitabilité. Il


est une obligation de le suivre et de se conformer à toutes ses injonctions. C’est le premier
niveau de la législation musulmane et sa psalmodie est une adoration.
L’intégralité du Coran est en arabe. IL fut révélé par Allah - Exalté soit-Il – en langue
arabe dans sa forme comme dans son sens. L’exégèse du Coran ou sa traduction dans une
autre langue ne sont pas du Coran.

23
- Sofia BENNAMARA, op cit, p7.
- Sofia BENNAMARA, op cit, p8
14
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Le Coran fût transmis de génération en génération .Il fait preuve d’autorité légale, sa
transmission est authentique et aucun doute ne pèse sur sa légitimité.24
25

Le Coran traite tout les aspects de la société, la vie humaine, la morale, l’économie, le
commerce, l’héritage, le mariage, la justice,… sont tous des sujets traités par le Coran.26

1.2. La sunnah

La Sunnah est un recueil des traditions établies à partir du comportement et des paroles
du prophète Mohammed –paix et bénédictions d'Allah sur lui- et rapportées par ses
compagnons.27

La Sunnah vient immédiatement après le Coran en rang dans les sources de la


législation. Elle comporte l'explication de ce qui y est concis, l'élucidation de ce qui y est
vague, la restriction de ce qui y est absolu et traite ce qui n'y est pas évoqué.

La Sunnah est donc une source indépendante de la législation en ce sens qu'elle peut
comporter des préceptes et des règles qui ne sont pas évoqués dans le Coran.

La distinction entre la Sunnah et le hadith est que ce dernier est narratif, rapportant ce
que le prophète a dit, fait, approuvé ou désapprouvé. Alors que la Sunnah est la pratique du
prophète - paix et salut sur lui-, c’est les normes comportementales.

2. Les sources secondaires


Même si les solutions de tous les problèmes, qu’ils soient présent ou à venir, se trouvent
dans les deux sources fondamentales citées précédemment, il existe deux sources
secondaires ; l’ijmâ et l’ijtihad.

1.1. El Ijmâ

C’est l’unanimité des érudits de la religion, à une époque donnée à partir des
compagnons du prophète, sur une règle légale islamique précise. Ce consensus est la
résultante de la compréhension, de l’interprétation et de l’application du Coran et de la
Sunnah. C’est un mécanisme permettant d’entreprendre des législations collectives pour
suivre les évolutions et les changements. C’est la troisième source de législation se situant
après la Sunnah. En pratique, l'Ijmâ n’intervient que si aucun élément du Coran ou de la
Sounna ne permet de trancher sur un cas.28

Même si, théoriquement, El Ijmâ représente une source moins importante que le Coran
et la Sunnah, sa valeur pratique reste élevée, car c’est dans les livres où sont exposées les

24
- Lachemi SIAGH, « L’islam et le monde des affaires », édition d’organisation, paris, 2003, p21.
25

26

27
- François GUERANGER, « finance islamique ; une illustration de la finance éthique », Dunod, paris, 2009, p27.
28
- Sofia BENNAMARA, op cit, p10.

15
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

solutions consacrées par El Ijmâ que le juge va chercher les motifs de la décision qu’il va
prendre.29

1.2. El Ijtihad

El Ijtihad, étymologiquement « l’effort », est l’exercice de la raison et du jugement


personnel par les savants de l’Islam. Il englobe l’opinion (ra’ y), et l’analogie (qiyas) 30…
C’est un élément important assurant la dynamique de la Chari’a.31

III. Les principes de la finance islamique

1. La Riba (l’intérêt)

De toutes les religions monothéistes, l’Islam est la seule à avoir garde la prohibition de
l’intérêt. Celle-ci n’est pas née avec l’Islam mais remonte au culte juif dont des passages du
Deutéronome et de l’Exode32 mentionnent qu’un juif ne peut prêter avec intérêt qu’a un non-
juif :

« De l'étranger tu peux exiger un intérêt, mais de ton frère tu n'en exigeras point, afin
que l'Éternel ton Dieu te bénisse dans tout ce que tu entreprendras dans le pays où tu vas
entrer pour en prendre possession. »
« Si tu prêtes de l'argent à mon peuple, au pauvre qui est avec toi, tu ne te comporteras
point avec lui en usurier ; vous ne mettrez point sur lui d'usure. Moise »

L’application de cette prohibition uniquement au sein de la communauté juive permit


aux Israelites de prospérer en développant des activités de crédit jusqu’au 16eme siècle
(période qui coïncide avec l’arrivée de penseurs pro-intérêt comme Calvin comme nous le
verrons plus loin). En effet, jusqu'a cette date, les Juifs ainsi que les Lombards 33 étaient les
seules communautés à pouvoir pratiquer le prêt avec intérêt.34

Dans la Grèce Antique, il existe aussi des traces d’un mépris pour toute forme de
rémunération de l’argent prêté. En effet, Aristote35 évoque déjà dans ses Politiques :
«Il est tout à fait normal d’haïr le métier d’usurier du fait que son patrimoine lui vient
de son argent lui-même et que celui-ci n’a pas été inventé pour cela. Il a été fait pour

29
- François GUERANGER, op cit, p28.
30
- Le Qiyas (raisonnement par analogie) : cette technique consiste à affecter, sur la base d'une caractéristique sous-jacente commune, la
règle juridique d'un cas existant trouvée dans les textes du Coran, de la Sounna et/ou de l'Ijmâ à un nouveau cas dont la règle juridique n'a
pas pu être clairement identifiée. Ceci tout en restant fidèle à l'esprit des sources traditionnelles du droit musulman. D’après ;
http://fr.financialislam.com/la-sharia.html.
- Sofia BENNAMARA, op cit, p10.
31
- Deutéronome, 23 :19,20 ; Exode, 22 : 25
32
- Philosophe grec qui vécu au Ve siècle av. J.-C.
33
-Aristote, La Politique, livre 1, Chapitre 3.

34

35

16
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

l’échange, alors que l’intérêt ne fait que le multiplier. Et c’est de là qu’il a pris son nom : les
petits, en effet, sont semblables à leurs parents, et l’intérêt est de l’argent né d’argent. Si bien
que cette façon d’acquérir est la plus contraire à la nature.»36
La religion chrétienne, au travers du Nouveau Testament interdit aussi l’intérêt, mais
cette fois de manière implicite :
« Si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quel crédit est-ce cela pour vous ?
Même les pécheurs prêtent aux pécheurs pour qu’ils puissent recevoir en retour un montant
égal. Mais aime tes ennemis, et fais le bien, et prête, sans ne désespérer personne… »37

Ce n’est qu’en 1515 que la religion catholique autorise l’intérêt par le biais du Concil de
Latran V38.

Par ailleurs, durant cette période, des réformateurs comme Calvin autorisent l’intérêt,
sans toutefois permettre l’usure. Calvin s’oppose au prêt aboutissant à un appauvrissement du
débiteur, mais il demeure favorable à l’enrichissement de ce dernier. Il défend le prêt à intérêt
non usuraire lorsqu’il est applique aux riches. Si dans la religion Chrétienne des réformateurs
ont favorise l’intégration de l’intérêt, ce n’est pas le cas de la religion musulmane comme
nous le verrons dans le prochain chapitre.
39

 Prohibition de l’intérêt en Islam

La finance islamique se caractérise par son aspect contraignant par rapport à la finance
conventionnelle. En effet, un certain nombre de mesures prises par les institutions religieuses
islamiques visent à appliquer les principes de l’Islam à la finance contemporaine. L’une des
principales exigences est la prohibition de l’intérêt.

Le passage suivant est tire du Coran et est à la base de l’interprétation de l’interdiction


de l’intérêt dans la religion musulmane.

« Ceux qui se nourrissent de l'usure ne se dresseront au jour du jugement que comme se


dresse celui que le Démon a violemment frappé. Il en sera ainsi parce qu’ils disent : la vente
est semblable à l'usure. Mais Dieu a permis la vente et il a interdit l'usure. Celui qui renonce
au profit de l'usure, dès qu'une exhortation de son Seigneur lui parvient gardera ce qu'il a
gagné. Son cas relève de Dieu. Mais ceux qui retournent à l'usure seront les hôtes du Feu où
ils demeureront immortels. (...) Ô vous qui croyez! Craignez Dieu! Renoncez si vous êtes
croyants à ce qui vous reste des profits de l'usure. Si vous ne le faites pas attendez-vous à la
guerre de la part de Dieu et de son prophète »40.

Cependant, il est important de préciser que dans la religion musulmane, l’intérêt et


l’usure sont conjointement associes sous le nom Riba, alors que conventionnellement, le
premier terme signifie la somme que l’on paie pour l’usage de l’argent et le second traduit un
délit commis par celui qui prête de l’argent a un taux excessif41.

36
- Luc, 6 : Sourate 34,65
37
-Cours de M. Turbé à la HEG le 21.12.2007
38
- II, verset 275 au verset 281.
39
- LE PETIT LAROUSSE ILLUSTR‫ة‬, Librairie Larousse, (1987)
40

41

17
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

42

L’origine de l’interdiction de l’intérêt en Islam tient du fait qu’à l’époque les bailleurs
de fonds appliquaient des taux usuraires et profitaient donc de la misère des pauvres. Par
ailleurs, l’idée principale qui détermine la prohibition de l’intérêt par les musulmans est le fait
que, selon cette religion, l’argent n’est pas du capital. Il ne le deviendra qu’après
transformation par le travail et l’effort. D’après Iqbal et Mirakhor (2006), «  l’argent n’est que
du capital potentiel et il ne deviendra réellement capital qu’après son association avec une
autre ressource afin d’entreprendre une activité productive ». L’argent n’a donc aucune utilité
intrinsèque et n’est qu’un moyen d’échange de biens non fongibles. Un dollar ici vaut un
dollar ailleurs, de telle sorte qu’il est impossible de réalisera un bénéfice sur son echange43.

La religion musulmane interdit donc toute forme d’intérêt paye sur un prêt quelle que
soit la nature ou la grandeur. D’après les juristes et économistes musulmans, « la Chari’a
interdit le retrait par le prêteur d’un quelconque avantage de son prêt, sauf si cet avantage
est librement accordé par l’emprunteur après remboursement du prêt et sans en constituer
une condition tacite ou explicite (Saadallah, 1996, p.17) ».

Les jurisconsultes musulmans en donnent plusieurs explications. La première est le fait


que l’intérêt est une rémunération fixe et connu ex-ante. La deuxième dénote l’injustice entre
les risques que subissent le préteur et le débiteur. Selon leurs interprétations, l’emprunteur
assume une part majoritaire du risque du au fait que la rémunération qu’il devra céder au
bailleur de fond n’est pas fonction du résultat de l’actif finance44.
45

Le créancier est donc assure d’un gain sur le prêt alors que le débiteur est assure du
remboursement du prêt. En d’autres termes, si A prête 1000 CHF a B pour développer son
activité et qu’A prélevé un intérêt de 10%. Si B obtient un rendement inferieur a 10% du prêt
(en l’occurrence 100 CHF), celui-ci payera plus d’intérêt qu’il n’a de profit d’ou l’injustice
mentionnée plus haut. A contrario si le rendement est supérieur à 10 % c’est A qui subit une
injustice car B se sera enrichi sur son dos.

2. Le principe de Partage des Pertes et Profits (PPP/3P) ou Profit &


Loss Sharing (PLS) 46
La notion de partage des pertes et profits est un des éléments clés dans le concept de
finance islamique car elle est le reflet des valeurs que l’Islam transmet à ses fideles, a savoir
justice, égalité sociale et fraternité. Ce système est défini par KHAN (1984) comme étant « un
mécanisme financier qui lie le capital financier à l’industrie et au commerce sans utiliser un
intérêt ».

Il s’agit donc d’un procède qui permet aux techniques de financements islamiques
d’établir des échanges commerciaux en empêchant l’intérêt et ceci dans les règles de la
Chari’a. Cette technique permet en outre le partage des risques entre entrepreneur et
investisseur. Effectivement, ce dernier est directement lie au bon déroulement des affaires lors
42

43
- La réalisation d’un bénéfice sur deux monnaies différentes n’est pas proscrite.
44
- Le risque de défaut est assumé entièrement par le bailleur de fond mais celui-ci peut se protéger à l’aide de garanties.
45
- Traduction anglaise de : partage des pertes et profits.
46

18
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

de la transaction basée sur le principe des 3P alors que lors d’un prêt à intérêt le risque est en
partie transfère au demandeur de fond.

Le principe de partage des pertes et profits est utilise dans plusieurs techniques de
financements islamiques tels que le Mudharaba ou la banque va financer entièrement le projet
et l’entrepreneur va fournir son travail afin de faire fructifier le montant investi. Les profits
sont partages tandis que les pertes sont entièrement assumées par la banque. Ou encore le
Musharaka, transaction qui permet a la banque et l’entrepreneur de s’associer pour un projet
et partager les pertes et profits. Ces méthodes de financement se rapprochent du capital
risque47 ou l’investisseur va financer la phase post-amorçage de l’entreprise. Elles favorisent
le développement des entreprises et donc de la croissance économique.

Nous comprenons rapidement que ce système suppose des risques supérieurs car,
contrairement aux banques conventionnelles, la rémunération d’un type de financement
dépend directement du rendement de l’opération et donc de la gestion du projet par
l’entrepreneur. Le financement islamique ne peut donc être viable qu’avec des clauses
contractuelles strictes permettant à la banque de s’assurer du bon fonctionnement des affaires.
Sans quoi la direction de l’entreprise partenaire pourrait maquiller ses résultats financiers afin
de diminuer la rétribution a la banque.

De plus, dans un tel système, les critères de sélection d’un projet par la banque ne sont
plus bases sur des questions de solvabilité mais plus sur la rentabilité anticipée, laquelle est
très difficilement estimable.

Dans le prochain sous-chapitre, nous traiterons d’une autre contrainte imposée par la
Chari’a, la thésaurisation.

3. La thésaurisation

« La thésaurisation est un terme technique économique décrivant une accumulation de


monnaie soit pour en tirer un profit ou soit par absence de meilleur emploi, et non par
principe d'économie ou d'investissement productif48 »
49

Il est important de faire la distinction entre épargne et thésaurisation. Cette dernière


notion induit l’idée de non-productivité du capital. Par exemple, un compte d’épargne ne
générant pas d’intérêt n’est pas une forme de thésaurisation car ce capital est utilise par la
banque a des fins productives (Gaillard et Tullier, 1965).

Le Coran prohibe la thésaurisation car dans l’Islam l’argent ne doit pas constituer une
source de puissance. De plus, si un croyant musulman thésaurise ses avoirs cela signifie, dans
47
- Le capital de risque est une forme de financement avec prise de participation et incluent également le financement de redressement,
le rachat d'entreprise par les cadres et la fusion-acquisition. RESEAU CAPITAL http://www.reseaucapital.com/Association/Definition.html
(consulté le 13.08.2008)

- WIKIPEDIA. http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9saurisation. (Consulté le


20.08.2008)
48

49

19
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

cette religion, qu’il ne participe qu’à son enrichissement personnel et ne fait pas profiter
l’économie en général. Le passage du Coran ci-dessous condamne rigoureusement cet acte.

«  À ceux qui thésaurisent or et argent sans les dépenser dans la voie de Dieu, fais
l’annonce d’un supplice douloureux. Un jour, ces métaux rendus incandescents au feu de
l’enfer, leur seront appliqués sur le front, leurs flancs et leurs dos –et on leur dira-voici ce
que vous amassiez, pour vous-même, savourez donc ce que vous avez thésaurisé.50 »

Il est évident que cette contrainte encourage l’investissement, cependant, elle oblige les
IFI à ne pas conserver trop de liquidités durant une longue période. Apres interprétation des
fouqahas et afin de satisfaire cette obligation, les banques islamiques tolèrent un ratio de cash
allant jusqu'a 49%.
La thésaurisation est souvent assimilée a de la spéculation, acte qui est également prohibe par
l’Islam. Dans le prochain sous-chapitre, nous traiterons plus en détail cette interdiction.

4. L’interdiction de l’incertitude des ventes et de la spéculation (Gharar


et Maysir)

Le terme Gharar signifie littéralement  « incertitude, hasard » et sa prohibition sous-


tend le principe suivant : un musulman doit tout faire pour qu’il ne résulte de ses actes aucun
conflit ni aucune tension. C’est la raison pour laquelle il ne doit pas effectuer de bay’oul
Gharar (achat avec incertitude) dont la transaction englobe une part non négligeable
d’ambigüité, d’incertitude et de hasard sur les caractéristiques du bien échange telles que son
prix, sa taille, sa couleur, la date de livraison, les échéances ainsi que les montants de
remboursements. Selon Karich (2002, p.44), la source de cette prohibition découle du hadith
suivant :

« Le Prophète a interdit l’achat d’un animal non né dans la matrice de sa mère, la


vente du lait dans la mamelle sans mesure, l’achat du butin de guerre avant sa distribution,
l’achat des dons de charité avant leur réception, et l’achat de ce qu’a récolté un pêcheur
avant sa pêche ».

Le terme Maysir signifie jeu de hasard et sa prohibition découle du verset du Coran


suivant :
« O vous qui croyez, l'alcool, le jeu de hasard, les pierres dressées et les flèches
divinatoires ne sont qu'impureté, relevant du fait du diable. Préservez-vous en, afin de
réussir. Le diable ne veut, par le biais de l'alcool et du jeu de hasard, que jeter l'inimitié et la
haine entre vous, et vous détourner du souvenir de Dieu et de la prière […] »5152

Dans la finance conventionnelle, certaines transactions sont manifestement empreintes


d’incertitudes et leurs espérances de rendements sont souvent spéculatives, notamment les
swaps, les options, les futurs ou forwards ainsi que toutes formes d’assurances. Les options
par exemple, donnent le droit mais non l’obligation à un investisseur d’acheter ou de vendre
(s’il s’agit respectivement d’une option call ou put), à un prix fixe a l’avance, le titre sous-
jacent a l’échéance. Les gains / pertes que l’investisseur encaissera/payera dépendront donc en
50
- Sourate le repentir, verset 34.
51
- Coran, verset 5/90-91
52

20
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

partie du prix du sous-jacent (une action par exemple) a la maturité. Imaginons une option call
dont le prix du sous-jacent a l’échéance serait supérieur au prix prévu dans le contrat.

L’investisseur pourra acheter son action au prix fixe au préalable et sera bénéficiaire.
Par contre, la contrepartie qui a bien voulu lui vendre cette option se retrouvera déficitaire.
Nous nous retrouvons donc dans une situation ou ni l’investisseur ni la contrepartie ne pouvait
déterminer son gain ou sa perte et démontre l’incertitude qui existe dans ce genre de
transaction.

Par ailleurs, dans un autre contexte, celui des contrats d’assurance, si un assure est
affilie a une assurance mais dont aucun sinistre n’est survenu, celui-ci devra s’acquitter de
primes pour lesquelles il ne percevra aucune contrepartie. Par contre, certains clients
profiteraient d’un remboursement d’assurance alors même qu’ils viennent de souscrire à
l’assurance.

5. Les activités illicites (haram)

A l’instar de la finance éthique, le système financier islamique proscrit tout


investissement dans certaines activités illicites. Nous pouvons mentionner les distilleries,
l’industrie pornographique, les jeux de hasard, les charcuteries, l’armement et les banques
commerciales classiques. En effet, celles-ci utilisent l’intérêt, que ce soit pour prêter ou pour
emprunter.

Afin de pallier ce problème, les principales banques conventionnelles ont créé des
fenêtres islamiques leur permettant de proposer des produits conformes a la Chari’a tout en
gardant leurs activités conventionnelles. Nous pouvons mentionner HSBC, UBS, Citibank,
Goldman Sachs, BNP et la Deutsche Bank par exemple.

Dernier principe fondamental qui met un cadre stricte au système financier islamique est
celui de la Zakat (impôt religieux) que nous proposons d’expliquer dans la prochaine partie.

6. La Zakat

La Zakat est un impôt religieux annuel que chaque musulman a l’obligation de régler
pour autant qu’il en ait les moyens. Ce devoir fait partie des cinq piliers de l’Islam53 et est
prélevé afin d’aider les plus démunis, permettant d’équilibrer les richesses. Une banque
islamique a donc la nécessité de créer une caisse de la Zakat. Le montant à payer est connu et
représente 2.5% des actifs liquides (argent, titres etc.). Cet impôt est aussi prélève sur le
bétail, les marchandises, les minéraux extraits du sol et enfin les fruits et les céréales.

Afin de satisfaire cette exigence, les banques islamiques ont conçu des Comites de la
Zakat charges de prélever l’impôt ecclésiastique ainsi que de gérer des fonds conformément
aux principes de la Chari’a. De plus, ce Comite est rattache a la haute direction de
l’entreprise.

53
- Les cinq piliers de l’Islam sont la profession de foi, la prière, la Zakat, le jeûne du mois de ramadan et le pèlerinage à la Mecque.

21
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Chapitre 2 : la
finance islamique
une alternative
de la finance
conventionnelle

22
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

La finance islamique et la finance conventionnelle ont la même finalité qui est de


proposer des solutions de financement qui répondent aux besoins des investisseurs. Cependant
leurs règles de fonctionnement et leurs principes sont différents. Si la finance conventionnelle
est axée sur l’optimisation du couple Risque/Rentabilité, la finance islamique ne considère pas
la profitabilité comme seul critère de décision.

Le nombre de produits financiers islamiques a invariablement augmenté au cours des


trente dernières années. Si la plupart des produits financiers islamiques répondent aux mêmes
besoins que les instruments financiers traditionnels, ils s'appuient sur des mécanismes
financiers élémentaires propres à la finance islamique. L'essentiel des instruments financiers
islamiques est structuré en utilisant des combinaisons différentes de ces mécanismes.

Section 1 : les instruments de financement bancaire


Depuis le lancement de la première banque islamique en 1963 en Egypte, les banques
islamiques ont essaye d’appliquer les concepts de la Chari’a a la finance. Il en résulte des
organisations, des opérations financières et des fonctionnements spécifiques. Dans le tableau54
ci-dessous, nous proposons une synthèse des principales distinctions entre banques islamiques
et banques traditionnelles.

Banques islamiques Banques traditionnelles


Comptes courants
 Les avis divergent  Les dépôts des clients
concernant apportent une manne
l’importance importante pour la
de ces dépôts dans les banque traditionnelle.
ressources de la banque  Génère un intérêt
islamique. Pour produit mais les
certains, cette manne services bancaires sont
ne constituerait qu’une pour la plupart payants.
infime partie des  Si la banque
ressources des banques traditionnelle octroie
islamiques (Siagh, un prêt, elle le transfère
2001 p.30). Pour sur le compte de son
d’autres, il s’agirait client et se rémunère

54
-karim CHERIF, la finance islamique : Analyse des produits financiers islamiques, Mémoire de Bachelor en finance d’entreprise, Genève,
2008, p.22-28 .

23
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

d’une importante avec un intérêt.


ressource allant même
jusqu'à 75% des
ressources mobilisées
pour certaines IFI
(BID, 2002. p.118).
 Ne génère aucun
intérêt en contrepartie
de la gratuite de
certains services
(chèques, transferts de
fonds etc.)
 Lorsque la banque
islamique prête de
l’argent a ses clients en
vue de l’acquisition
d’un bien, elle ne passe
pas par le compte
courant du client mais
directement par le
vendeur. La banque se
rémunère avec une
marge sur la vente du
bien.
 Dans le cas ou le client
de la banque souhaite
un prêt pour une cause
urgente (mariage,
décès), la banque
passe par un compte
spécial ne prélevant
pas d’intérêt. En arabe,
ces prêts se nomment
Qard Hassan.

Compete d’investisement  Le déposant accepte  Dans le bilan des


ou Profit Sharing que la banque gère son Banques
Investment Account argent en contrepartie conventionnelles, il
(PSIA) : selon de frais de gestion n’existe pas
l’Accounting and appelé frais de d’équivalent aux
Auditing Oraganisation Mudarib comptes PSIA.
for Islamic Finance qui vient de Mudaraba, Cependant, il est a
Institute (AAOIFI), il ce qui veut dire partage noter que dans tout
existe deux sortes de des pertes et profits en compte traditionnel le
PSIA. Le premier est arabe. Ces frais sont capital est suppose être
nommé compte « restreint fonction du profit de la garanti. La banque doit
» car il permet à son banque. Avec donc pouvoir
détenteur de définir l’ensemble des dépôts, rembourser une partie
24
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

l’allocation de ses la banque crée un ou du capital de tous ses


actifs. Le second est plusieurs fonds déposants à tout
appelé non-restreint car il d’investissements dans moment. Ce qui n’est
délègue l’entière gestion lesquels le dépositaire pas le cas du PSIA.
de ses actifs à la banque. n’a aucun droit de
regard et de gestion
pour le compte non
restreint alors qu’il peut
décider de l’allocation
de ses fonds avec un
compte restreint.
 Ni le capital ni le taux
de rendement ne sont
garantis.
 Selon la BID55, (2002.
p. 169), les normes de
Bale II56 sont
applicables dans le cas
des banques
islamiques. En
revanche, la
pondération des risques
des actifs des banques
islamiques diffère
sensiblement des
banques
conventionnelles. Cela
est notamment le cas
pour le calcul des fonds
propres réglementaires
des comptes PSIA. Il
est donc préférable
pour les IFI d’utiliser
des techniques de
rating interne
préconisées par les
directives de Bale II.
 La durée des dépôts
varie entre 1 mois et 5
ans. Si le détenteur du
compte se retire avant
la fin de l’échéance il
partage les pertes, mais
pas les profits que le
55
-BANQUE ISLAMQUE DE DEVELOPPEMENT (BID). INSTITUT ISLAMIQUE DE RECHERCHE ET DE FOMATION (IIRF). « La gestion des
risques : l’analyse de certains aspects liés à l’industrie de la finance islamique ». Jeddah.2002. p196
56
-Accords de Bale II : Accords portant sur l’adéquation en fonds propres des banques, ériqés par le Comite de et traitant du Contrôle
bancaire ; ils sont en vigueur depuis le 01.01.2007.

25
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

fond aura pu générer


57
(Standards & Poors,
2006, p.13).

Compte d’épargne  Le client, a l’instar  Dans un compte


d’un d’épargne classique les
PSIA non-restreint, montants déposes
partage les pertes et peuvent être retires a
profits et n’a aucun tout moment.
droit de regard et de Généralement, il
gestion sur ses fonds. génère un taux d’intérêt
 L’unique différence fixe et connu d’avance.
avec un PSIA non
restreint réside dans le
fait que le capital est
garanti in-fine.

Relation client-banquier  Dans une banque  Les banques


islamique, le déposant traditionnelles ont, avec
est partenaire et non leurs clients, des relations
créancier. Il pourra de créanciers / débiteurs.
s’agir d’un partage des
risques pour le
déposant sur un compte
PPP ou d’un partenariat
de la banque pour un
prêt non rémunère
Qard Hassan.

Rôle et opérations des  La banque islamique a  La banque


Banques une fonction traditionnelle a un rôle
d’intermédiaire d’intermédiaire
commercial car financier. Elle collecte
l’ensemble des des fonds et les utilise
transactions financières dans des opérations de
sous-tend un actif prêts.
tangible et lie acheteur
et vendeur.

Banque centrale  Si le système financier  Sur le marche


islamique ou prêteur de islamique veut être traditionnel les banques
dernier recours (pdr) et complet il doit se munir centrales ont plusieurs
marché interbancaire de banques centrales fonctions : émission de
islamiques. billets, régulation du
L’instrument majeur de marche monétaire,
la politique monétaire banque des banques.
est le taux d’intérêt, Le marche
57
-STRANDARDS & POORS. Islamic Finance Outlook 2006, S&P Brochure, Sept. 2006, p.13.
26
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

outil qui n’est pas interbancaire permet


conforme a la Chariaa. aux banques de placer
Il resterait cependant ou de refinancer
aux banques centrales respectivement leurs
islamiques les excédents ou leurs
instruments du taux de déficits de liquidités.
réserve, la persuasion
morale et les
techniques d’Open
Market.
 De plus, le rôle de
préteur de dernier
recours attribue aux
banques centrales est
difficilement applicable
dans un contexte
islamique, toujours
pour des questions de
rémunération illicite de
l’argent prêté.
 Il n’existe par ailleurs
pas de marche
interbancaire
islamique.
En cas d’excédent de
liquidité a court terme
les banques islamiques
ne peuvent ni recevoir
ni payer d’intérêts.
Pour
l’instant, il n’existe que
peu d’instruments
monétaires liquides
islamiques.

Dans le mode de financement islamique, on distingue deux grandes familles appartenant


aux deux principaux modes de financement en finance conventionnelle : le financement en
capital et la dette ou autrement dit des financements basés sur le partage des risque et le
transfert d’actifs. Le poids relatif de ces deux classes d'instruments financiers est également
proche de la répartition que l'on peut observer dans un système financier classique.

I. Les modes de financement en capital 58


58
- www.cdvm.ma

27
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Ces instruments reposent sur le principe de partage de bénéfices et de pertes ainsi que
sur une hypothèse de prise de risque commerciale par le financier.

1. La Mousharaka
Il s’agit d’un contrat de partage de profits et de pertes selon lequel l’entrepreneur et le
financier participent à l’apport du capital et à la gestion de l’affaire. Similaire à une joint
venture, l’apport en capital est réalisé selon des pourcentages définis au préalable ainsi les
profits sont distribués selon des ratios définis contractuellement. Ces profits peuvent différer
de la proportion du capital investi par chaque partie mais les pertes sont toujours réparties au
prorata de l’apport en capital réalisé.

En pratique, la Mousharaka est souvent gérée par une des parties moyennant des frais.
Cet instrument est fréquemment utilisé dans le cadre du financement de projets à long terme,
tel qu’une joint-venture pour l’acquisition d’un bien spécifique, le développement d’un
nouveau projet d’entreprise. Les Mousharakas peuvent être structurées de diverses manières.

Source : Sharia-finance.lu

2. La Mousharaka décroissante

Il s’agit également d’une joint venture, similaire au mécanisme de la Mousharaka,


impliquant un principe de partage de profits et de risque. Le partenariat comporte le gérant
(un moudarib) qui sera chargé de placer les fonds pour le compte des investisseurs (Rab-al
mal) dans le projet sans aucun apport en capital de sa part.

28
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Les profits sont répartis selon des ratios définis contractuellement mais à la différence
de la Mousharaka, les pertes sont supportées uniquement par les investisseurs. Ce principe
repose sur l’idée que la contribution du gérant, ses efforts et son expertise ont une valeur, à
l’exception du cas ou celui-ci commet une erreur grave ou ne respecte pas les termes du
contrat.

En pratique, la Moudaraba est souvent employée dans le monde de la finance islamique


pour gérer des liquidités (p.ex. comptes d’investissement avec partage des profits et pertes
dans le cadre desquels la banque islamique agit en tant que moudarib et l’investisseur en tant
que (rab-al-mal). Cet instrument est également utilisé pour mettre en place d’autres structures
de financement islamique syndiqué.

Source : sharia-finance.lu

II. Les modes de financements de dettes 59


Il existe en finance islamique des instruments financiers dont le fonctionnement est
proche de celui de la finance conventionnelle mais avec toutefois des différences
fondamentales. Les instruments de dette islamiques, qui sont en réalité des instruments
d’échange, prévoient une répartition du risque spécifique et exclut la rémunération sous forme
d’intérêt. Les contrats de financement islamiques les plus répandus sont :

1. Mourabaha : financement basé sur le principe du coût majoré

Dans le contrat Mourabaha classique, un financier acquiert un actif pour le compte de


son client et le lui revend ensuite moyennant des paiements souvent échelonnés sur une
période donnée. En pratique, le prix de revente est égal au coût d’acquisition majoré d’une
59
-www.cdvm.ma

29
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

marge, convenue entre les parties. Les modalités de paiements à terme ainsi que les prix de
revente et les marges associées sont convenues et acceptés au préalable par les deux parties.
Les principales différences entre la mourabaha et un contrat de dette classique :

 Dans une Mourabaha, le financier demeure propriétaire de l’actif et assume le risque


sous-jacent, (même pour une période courte) jusqu’à la revente de l’actif au client. Il
ne s’agit donc pas d’un prêt mais d’une opération de vente à crédit.

 Il n’y a pas de référence à un taux d’intérêt. Le financier se rémunère par le biais


d’une commission qui ne compense pas la valeur intrinsèque de l’argent mais
correspond plutôt à la récompense du service rendu par la banque.

Cette technique de financement est très largement utilisée, notamment dans le cadre de
financements export, de financements immobiliers, de financements d’acquisition et de
financements avec effet de levier (LBO).

Source : sharia-finance.lu

2. Mourabaha inversée : financement des acquisitions de matières


premières

Cet instrument est un des contrats financiers islamiques les plus populaires. Le recours à
ce mode de financement est nécessaire pour répondre aux besoins en trésorerie des clients. La
transaction se décompose en plusieurs étapes (en pratique quasi simultanées) 60 :

 Le client (A) demande à la banque de lui vendre à terme une certaine quantité
de biens tangibles, pour un prix déterminé au préalable ;
 La banque acquiert les biens demandés d’un intermédiaire (1) et les revend en
différé par la suite au client (A) ;
 Une fois acquis par le client (A), les biens sont vendus à un intermédiaire (2)
au prix du marché. Pour des raisons de compatibilité avec la Charia, cet
intermédiaire doit être différent du premier (1). Les revenus de cette dernière
60
-Source : Agefi

30
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

transaction permettent au client (A) de disposer des liquidités requises par son
besoin de financement.

A la fin de la transaction, le client se retrouve avec des liquidités et une dette à l’égard
de la banque, laquelle peut être réglée en plusieurs versements. Concernant l’actif sous-jacent,
il s’agit le plus souvent d’une matière première librement négociable et conforme à la Charia
(fréquemment le cuivre). L’or et l’argent ne peuvent être utilisés dans la mesure où la Charia
les considère comme des devises et non comme des matières premières. Les Mourabaha
peuvent être structurées de façon similaire à un crédit syndiqué.

Source : Sharia-finance.lu

3. L’Ijara : le crédit bail basé sur le principe du coût majoré

Ijara simple

L’Ijara est l’équivalent d’un contrat de bail ou le cas échéant d’un contrat de location-
vente. Il s’agit d’un instrument souvent utilisé pour financer les actifs mobiliers et
immobiliers ainsi que pour le financement des projets d’infrastructure long termes. Le
financier (la banque) demeure le propriétaire de l’actif et supporte tous les risques qui y sont
associés. Dans ce mode de financement, l’actif n’est pas revendu au client mais est plutôt
donné en location en contrepartie du versement de loyers.
Quelques différences distinguent cet instrument d’un contrat de crédit bail classique :

 L’Ijara ne prévoit pas de pénalités en cas de retard ou défaut de paiement.


 Un contrat Ijara ne permet pas de rééchelonner les paiements, toute modification des
termes contractuels ne peut se faire qu’à travers un nouveau contrat.

31
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

 Les paiements dans un contrat Ijara ne peuvent pas se faire avant la livraison réelle du
bien contrairement à un contrat de crédit bail classique.
 Dans un contrat d'Ijara, il est possible de déterminer le montant de chaque paiement
non pas préalablement mais à la date où la livraison de l'actif sous-jacent est prévue.
Cette flexibilité rend cet instrument particulièrement utile dans le cas de financement
de projets, une activité où l'incertitude sur la rentabilité future d'un projet
d'investissement peut être importante.

De plus, contrairement à un crédit-bail conventionnel, le financier islamique est


contraint d’assumer une partie des risques commerciaux associés à la location. Pendant toute
la durée de l’opération, le financier doit notamment assurer l’actif, s’acquitter des impôts et
taxes liés à la détention de la propriété de l’actif et se charger de sa maintenance. En pratique,
ces obligations seront souvent prises en charge par le client lui-même, qui agit alors en qualité
de mandataire, en contrepartie d’une rémunération prise en compte dans le calcul du montant
du loyer.

Source : Sharia-finance.lu

L’Ijara wa-Iqtinaa

Le même principe que l’Ijara simple avec une seule différence c’est que ce contrat est
attaché à une option d’achat. En effet, dans ce type de contrat, le client a la possibilité
d’acquérir le bien en location à échéance. Il est important de noter que cette option est
équivalente à une promesse d’achat et de vente qui est facultative mais qui est néanmoins
intégrée dans le prix de ce produit. Ceci implique que le client a un intérêt économique à
exercer cette option. Dans le cas d’une défaillance du client et lorsque ce dernier ne respecte
pas la promesse d’achat, le financier pourrait mettre en vente le bien à la fin du contrat.

32
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Source : Sharia-finance.lu

4. Crédit bail anticipé : L’jara Mawsufah Fi Dimmah


Toujours le principe de l’Ijara mais cette fois-ci, ce produit permet aux financiers d’être
rémunérés avant que l’actif sous-jacent ne soit disponible pour l’Ijara elle-même (forward
lease). Naturellement, les loyers anticipés sont pris en compte dans le calcul des montants des
autres loyers qui seront payés lors de la phase de location. Cet instrument est utile dans les
financements de projets en particulier lors de la phase de construction.
Techniquement, les paiements doivent être remboursés si le bailleur ne met pas les
actifs à la disposition de son client au jour de l’achèvement de la construction.

5. Vente à terme : La Vente Salam


Il s’agit d’une vente à terme qui consiste à payer en avance des biens qui seront livrés à
terme.
Le bien vendu à terme doit être conforme à la Charia mais il peut ne pas exister au
moment de la signature du contrat. Cependant, ce contrat ne pourrait en aucun cas s’appliquer
sur un bien qui a une durée de vie inférieure à l’échéance du contrat.

Cet instrument est très utile dans le financement des activités agricoles mais également
dans certaines activités commerciales et industrielles lors des phases antérieures à la
production ou à l’exportation.

Un paiement intégral anticipé permet souvent au financier de faire l’acquisition de


l’actif à un prix réduit. Le prix est calculé sur la base d’un indice de référence (tel que le
LIBOR) auquel s’ajoute une marge. Au moment de la livraison, le financier peut ainsi vendre
l’actif à son client pour un prix plus élevé ou conclure en parallèle un contrat Salam avec un
tiers (aux termes d’un contrat distinct) afin de revendre l’actif à un prix supérieur.

33
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Source : Sharia-finance.lu

6. L’Istitnaa
Il s’agit également d’un contrat à terme mais qui diffère du contrat Salam dans les
modalités de paiement. En effet, ce type d’instrument permet une flexibilité de paiements qui
pourraient s’effectuer à la signature du contrat en comptant, graduellement ou même à terme.
Les paiements peuvent même être effectués en fonction de l’avancement du projet. Il est à
noter que dans ce type de produit, la date de la livraison du bien n’est pas déterminée à
l’avance mais les modalités de paiement doivent être spécifiées dans le contrat.

Une autre particularité de l’Istitnaa concerne la nature du bien financé. En effet, cet
instrument s’applique uniquement sur les biens qui sont construits ou fabriqués ce qui
explique sa popularité dans les financements de projets de construction ou de développement
d’actifs.

Source : Sharia-finance.lu

34
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

7. Qard al Hassan 61

Il s’agit d’un instrument de dette « gratuit » qui se rapproche plus d’une aide financière
que d’un crédit commercial. C’est en effet un prêt sans intérêt qui pourrait être utilisé dans des
situations spécifiques. Par exemple, lorsqu’une entreprise ou un individu est en difficulté ou si
on souhaite favoriser le développement d’un nouveau secteur.

Section 2 : Les modes de financement des institutions non


bancaires
I. Le Sukuk
Selon l’IIFM (International Islamic Financial Market), le Sukuk est un certificat
d’investissement qui pourrait être vu comme étant l’équivalent islamique des obligations
conventionnelles avec néanmoins des différences fondamentales. L’AAOIFI 62 définit les
Sukuks comme étant des « certificats de valeur égale représentant des parts indivises dans la
propriété des actifs tangibles, usufruit et service ou dans la propriété des actifs d’un projet ou
d’une activité d’investissement ». Les Sukuks permettent alors aux investisseurs de détenir
des participations dans les actifs sous-jacents avec une rémunération qui sera fonction de la
performance de ces actifs.63

Les Sukuks peuvent être émis à l’initiative des gouvernements et des entreprises
privées. Il existe plusieurs types de Sukuks. Leurs montages diffèrent selon le type de l’actif
sous-jacent. Les montages les plus utilisés sont :

 Sukuk Salam : Rappelons que le Salam est un contrat de vente à terme. Sukuk Al-
Salam est un certificat d’investissement émis dans l’objectif de mobiliser des fonds
Salam qui seront destinés à financer un bien qui sera livré à terme (principe du contrat
Salam) mais avec un paiement au comptant. L’émetteur du Sukuk est le vendeur du
bien alors que les détenteurs des certificats sont en effet les investisseurs (acheteurs
du bien à financer). Ces investisseurs paient en avance (levée des fonds) dans un SPV
(special purpose vehicule- une entité ad hoc) en contrepartie d’une promesse de
livraison à une date ultérieure (paiement spot avec livraison à terme). Les biens sont
généralement vendus après livraison et la rémunération des investisseurs est dans ce
cas constituée du bénéfice réalisé par l’écart entre le prix d’achat et le prix de revente.

 Sukuk Istitna : Il est à noter que l’Istitna est également un contrat de vente à terme.
Une entité ad-hoc (SPV) émet les Sukuks pour lever les fonds qui seront destinés à
financer un projet. Il s’agit en général de lourds projets industriels, manufacturiers ou
immobiliers. En pratique, l’entrepreneur ou le développeur du projet cède les titres de
propriété à l’entité SPV durant la phase de construction. Une fois le projet est achevé,
61
- www.cdvm.ma
62
-Accounting and Auditing Organization for Islamic Financial Institution,. www.aaoifi.com
63
-International Islamic Financial Markets; Sukuk Report: A Comprehensive study of
the international Sukuk Market; Février 2010

35
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

deux scénarios se présentent : soit le projet est revendu à l’entrepreneur à un prix


déterminé à l’avance avec des modalités de paiements différées, soit il est loué en
crédit bail avec un contrat Sukuk Al Ijarah. Les investisseurs sont rémunérés après la
livraison du bien et sa revente ou sa location grâce au bénéfice réalisé.

 Sukuk Mourabaha : Un certificat d’investissement émis dans le but de financer


l’achat d’un bien ou d’une marchandise à travers une transaction Mourabaha. Une
convention cadre est établie entre le SPV et le Client selon laquelle le SPV émet des
certificats d’investissement auprès des investisseurs. Les fonds levés sont utilisés
pour acquérir des biens de la part d’un fournisseur au prix de marché. Les biens sont
revendus par la suite au client en différé à un prix majoré. La marge bénéficiaire
payée par le client constitue la rémunération des investisseurs.

 Sukuk Moudarabah : L’émetteur de ces certificats est le Moudarib (le gérant), les
souscripteurs sont les bailleurs de fonds qui apportent le capital Moudarabah qui sera
destiné à construire ou à développer un projet. Les souscripteurs (détenteurs des
certificats) sont propriétaires des actifs de la Moudarabah et ont droit à recevoir une
part des revenus. Une fois complétée, la propriété du projet pourrait être transférée à
l’entrepreneur. Les pertes seront supportées par les souscripteurs uniquement.

 Sukuk Mousharakah : Les certificats représentent des parts égales dans un projet
géré et financé sous une base Mousharakah. Les certificats sont émis dans le but
d'utiliser les fonds mobilisés pour établir un nouveau projet ou de développer un qui
existe déjà. Selon le principe de la Mousharakah, toutes les parties apportent du
capital ce qui implique un partage de risques et de profits selon des ratios déterminés.

 Sukuk Ijarah : les plus populaires et les plus répandus dans le monde aujourd'hui-
où les sommes récoltées des porteurs de Sukuks servent à faire l’acquisition, pour le
compte de ces derniers, d’actifs définis pour les mettre en location au profit de
l’entreprise devant bénéficier de l’actif. Cette propriété leur donne droit à une part du
loyer perçu, mais les rend également responsables des éventuels dépenses engagés
pour la maintenance de l’actif. De même, les investisseurs sont soumis au risque de
pertes liés à une mauvaise ou une absence de performance des actifs : c'est le cas par
exemple dans une opération immobilière où il y a aurait des locaux non loués. Puis,
terme, les actifs sous jacents sont vendus et le montant obtenu alors est reversé aux
investisseurs.

Un élément fondamental qui caractérise les Sukuks est en relation avec leur
négociabilité sur le marché. En effet, certains Sukuks peuvent être négociables sur le marché
secondaire alors que d’autres ne le sont pas, et sont conservés par les investisseurs initiaux
jusqu’à maturité. Selon la Charia, seulement les Sukuks ayant comme sous-jacent un actif
tangible, corporel tel qu’une participation dans une entreprise ou un portefeuille
d’investissement peuvent être négociables sur le marché secondaire (Sukuk Ijarah,
Mousharakah ou Moudarabah). Les Sukuks qui représentent des cash-flows futurs tels que
Sukuk Salam ou Sukuk Mourabaha, ne sont pas négociables (Sukuk Salam, Istitna ou
Mourabaha).

36
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Il est par ailleurs important de distinguer les Sukuks des produits de titrisation classique.
Lors d’une titrisation, le porteur de part est exposé au risque de crédit du cash-flow titrisé,
étant donné que l’émetteur ne fait que transférer le risque de crédit sous jacent aux différents
investisseurs. De plus, dans la mesure où les ABS sont cotés, ils peuvent facilement avoir une
meilleure note que les actifs sous-jacents grâce aux différentes méthodes de rehaussement de
crédit.

Les Sukuks sont structurés de manière à ce qu’ils soient cotés sur les marchés financiers
et sont en principe adossés à des actifs sans recours. En effet, leurs détenteurs sont exposés
aux pertes encourues sur les actifs sous-jacents auxquels est adossé l’instrument. Toutefois, en
pratique, pour des raisons commerciales, les structures de type Sukuks incluent
habituellement dans leur stratégie de sortie (exit strategy) une clause par laquelle le promoteur
du projet s’engage à racheter les actifs sous-jacents dans certaines circonstances déterminées.

Selon les statistiques récentes de Standard & Poor, le marché des Sukuks est actuellement
aux alentours de 100 milliards de dollars comparé à moins de 500 millions en 2001.

64

SUKUK OBLIGATION
Les actifs sous-jacents titrisés dans une L’obligation peut être émise pour financer
émission de sukuk doivent être licites au presque n’importe quel type d’activité tant
regard de la Shari’a qu’elle est légale dans sa juridiction
Les détenteurs de titres sukuk sont liés aux Les détenteurs d’obligations ne sont pas
dépenses et aux risques relatifs aux actifs concernés par les dépenses et les risques sur
sous-jacents les actifs sous-jacents de l’émetteur
Dans les sukuk, on ne retrouve pas de Dans une obligation, la relation entre
relation classique « créancier/débiteur » mais l’émetteur et le souscripteur est quasi
les porteurs de sukuk s’exposent aux risques identique à celle d’un créancier et d’un
liés aux actifs titrisés débiteur (prêt d’argent) dans laquelle il y a
versement d’intérêts (riba)
Ni le capital, ni le rendement ne peuvent être Le capital et le rendement sont
garantis contractuellement contractuellement garantis
Les sukuk représentent des participations Les obligations représentent des dettes pures
dans des actifs existants et / ou bien définis dues par l’émetteur
La vente d’un sukuk représente en général la La vente d’une obligation est essentiellement
vente d’une part d’un actif la vente d’une dette. C’est un titre de créance
représentatif d’un emprunt

II. Takaful versus Assurance


Le Takaful est largement pratiqué en deux formes : le takaful familial et le takaful
général. Le takaful familial est l'équivalent islamique de l'assurance vie classique, il implique
une solidarité entre un groupe d'individus et leurs familles visant à protéger l’assuré et les
personnes à sa charge contre un incident imprévu, comme un accident ou une invalidité
permanente. Cependant, le Takaful général vise à assurer autre chose que la vie humaine (ex :

64
-www.cdvm.gov.ma

37
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

assurance incendie, automobile, etc.). Ce domaine de l'assurance fonctionne aussi comme une
garantie conjointe selon laquelle tous les participants apportent mutuellement leurs parts des
primes dans un pool qui sert à indemniser tout participant souffrant d’une perte.

Dans ces deux types d’assurances et selon la nature des relations entre l'opérateur du
Takaful et les participants, il existe différents modèles pour la gestion et le placement des
fonds : le modèle moudarabah, la Wakala et le modèle mixte.

Dans le modèle Moudarabah, les opérateurs du Takaful divisent généralement les


contributions en deux parties, à savoir, les fonds nécessaires pour répondre aux pertes des
participants et l'autre partie pour l'investissement.

Selon ce modèle, l’opérateur du Takaful est un Moudarib et assume donc le rôle d’un
entrepreneur en charge de la gestion de l’entreprise sur la base de la Moudarabah (partage de
bien). Les participants sont des apporteurs de capitaux.
Page 22 www.cdvm.gov.ma
Les rendements sur l'investissement des fonds de participants Takaful sont distribués sur
le principe Moudarabah entre les participants et les opérateurs Takaful selon les termes
déterminés au préalable.

Dans le modèle Wakala, la relation mandant-mandataire est utilisée pour la souscription


et le placement. Dans la souscription, l’opérateur Takaful agit en tant que mandataire des
participants pour gérer les fonds. Tous les risques sont supportés par le fonds et tout excédent
appartient aux participants. L’opérateur ne participe pas directement au risque supporté mais
reçoit en revanche une commission fixe qui rémunère sa gestion de l’opération et est
généralement un pourcentage des cotisations payées. La rémunération de l’opérateur peut
aussi inclure une commission de performance, déduite de l’excédent éventuel, comme
incitation à une gestion efficace du fonds Takaful. Le placement du fonds Takaful s’appuie
également sur un contrat wakala où l’opérateur facture aux participants une commission pour
services rendus.

Dans le modèle mixte (combinaison entre les contrats wakala et moudarabah), le


contrat wakala est adopté pour la souscription, et le contrat moudarabah est utilisé pour les
placements du fonds Takaful. Cette approche semble être favorisée par certaines organisations
internationales et est en pratique largement adoptée par les sociétés Takaful.

38
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

65
Figure :- moudarabah-based takaful

1. Les assurés règlent leur prime qui est portée au compte du fonds mutuel de garantie.

2. Les assurés et une société gestionnaire de takaful conviennent d’un accord de


moudarabah dans lequel la société gestionnaire est moudarib alors que les assurés sont rab
almaal ; les assurés doivent alors bénéficier d’une représentation adéquate au conseil des
directeurs du gestionnaire de takaful de manière à pouvoir surveiller les comptes et les
investissements.

3. Les associés de la société gestionnaire de takaful créent un fonds appelé fond des
associés distinct du fonds mutuel de garantie des assurés.

4. Le gestionnaire de takaful, en tant que moudarib, investit les ressources du fonds


mutuel de garantie en respectant le droit islamique.

5. Les profits générés par l’investissement des ressources du fonds mutuel de garantie
sont partagés entre les assurés et la société gestionnaire de takaful, selon l’accord de
moudarabah, par crédit respectivement du fonds de garantie mutuel des assurés et du fonds
des associés, sur lequel s’imputent les charges relatives aux opérations d’investissement.

Ces deux fonds peuvent, d’ailleurs, être gérés ensemble pour peu qu’une comptabilité
adéquate permette de faire la part des choses. Les pertes éventuelles sont imputées au fonds
mutuel de garantie des assurés.

6. Les sinistres font l’objet d’une indemnisation conformément aux règles du takaful ; si
le fonds mutuel de garantie dégage une perte technique (sinistres supérieurs aux primes), le
gestionnaire de takaful (moudarib) doit, de lui-même, effectuer un prêt gratuit (Qard hasan)
pour maintenir la gestion.

65
-finance islamique, une illustration de la finance éthique, p 192 ./www.dunod.com
39
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

7. Périodiquement, le surplus du fonds mutuel de garantie (primes diminuées des


sinistres) est distribué aux assurés qui se voient demander une contribution complémentaire
dans le cas contraire ; cette rétrocession peut aussi se faire sous la forme de primes moins
élevées l’année suivante ; dans certains cas, la rétrocession n’est pas versée si le participant a
connu un sinistre ou encore si le montant du sinistre excède le montant de la rétrocession. Il
peut aussi ne pas y avoir de distribution mais report sur l’année suivante ou encore
constitution de réserves distribuables ultérieurement ou non distribuables si les primes sont
considérées comme des dons.

III. Zakat et waqf

1. La Zakat 
1.1. Définition

La Zakat représente le troisième pilier de l'Islam qui en compte cinq. Elle peut être
définie comme étant un devoir religieux qui interpelle tout musulman ayant éteint le nissab66 à
purifier sa richesse et ses revenus en payant périodiquement 67, en nature ou en espèces, un
montant déterminé qui sera affecté à des ayants droit bien précis dans le Coran.

A ce titre, il y a lieu de distinguer la Zakat de l'impôt moderne. Pour ce qui est du volet
"recouvrement", alors que l'impôt concerne essentiellement les revenus, la Zakat est
imposable et sur les revenus et sur la richesse. Dans ce cas, l'avantage de la Zakat est
apparent: un impôt élevé sur les revenus et faible, voire nul sur la richesse aboutit à maintenir
les fortunes existantes au sein d'un même groupe de personnes d'une part, et freine l'accès à ce
groupe de nouveaux venus, d'autre part.

Concernant le volet "affectation", l’impôt alimente le budget de l'Etat et n'a pas


d'affectation spécifique. La Zakat, en revanche, s'apparente beaucoup plus de la parafiscalité

66
- Le nissab est un seuil qui, lorsqu'il est atteint; le détenteur d'un patrimoine devient redevable de l'impôt Zakataire. Il est égal à 85g d'or
pur. En Algérie par exemple, chaque année le nissab est calculé et affiché dans toutes les mosquées par le Ministère de Affaires religieuses
et du Waqf.

67
-* Concernant les richesses accumulées (encaisse sous forme d'argent liquide ou de métaux précieux immobilisée pendant une année
lunaire (354 jours) et plus, il y a lieu de payer un taux Zakataire de 2,5% par an.
* Concernant les revenus, la périodicité du payement dépond de l'activité:
-les premiers jours de l'année du calendrier musulman pour ce qui concerne le revenu annuel des activités industrielles et commerciales
ainsi que les professions libérales.
- le moment de la récolte pour ce qui est des activités agricoles, même si celle-ci se renouvelle plusieurs fois par an.
- la fin du moi pour ce qui concerne les salariés.
* Concernant les activités agricoles, la zakat est calculée comme suit:
- 5% sur les produits agricoles irrigués artificiellement.
- 10% sur les produits agricoles à irrigation naturelle (sous pluie)
- 20% sur les produits du sous-sol appelés al-Rikaz.
- Le patrimoine animal (cheptel ovin, bovin, etc.) est lui aussi soumis à la Zakat selon des seuils fixés par le Prophète Mohamed
(SAWS) et contenus dans les livres du fiqh.

40
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

où les prélèvements opérés sont affectés à des organismes distincts de l’Etat, dans un but
économique ou social.

Notons enfin que pour ce qui est de la Zakat, les taux de prélèvement ont été établis par
le Prophète Mohamed (SAWS) et ne peuvent être changés par aucune autorité. Ces taux
varient en fonction de la nature et de l'origine de la matière imposable. Le taux le plus fiable
concerne les revenus de travail autres que les bénéfices agricoles et est de l'ordre de 2,5%. Les
produits agricoles non irrigués sont taxés de 10%, alors que ce taux est abaissé de moitié (soit
5%), si des efforts d'irrigation interviennent. Le taux le plus élevé concerne les richesses du
sous-sol (20%). Nous sommes ainsi en présence d'un impôt Zakataire à taux proportionnel,
mais comportant une certaine dose de progressivité selon les secteurs d’activité. En imposant
moins les revenus du travail, l'Islam privilégie la préservation du capital humain. Car dans la
conception islamique, l'homme a deux sources de nourritures : le produit de son travail et/ou
les 'fruits' d'Allah sur terre ; cela se comprend du verset coranique : " Afin qu'ils mangent de
Ses fruits, et de ce que leurs mains fabriquent".68Comme si le degré d'imposition Zakataire est
une fonction inverse de l'effort investi. Encore une fois, on voit l'intérêt accordé par l'Islam au
maintien de la force de travail.

Sur un plan purement sémantique, l’impôt est considéré comme une diminution de la
richesse, alors que le mot Zakat signifie en langue arabe accroissement (Namaä) en plus du
sens purification. L'acquittement de la Zakat ne diminue pas la richesse du contribuable, au
contraire celle-ci est vouée à l'accroissement par la bénédiction divine," Dieu réduit à néant le
profit usuraire et accroît les aumônes". 69Le terme aumône ici signifie Zakat. On trouve cette
interchangeabilité des termes Zakat et Sadaqa (aumône) dans plusieurs versets coraniques. A
ce titre, un éminent érudit de l'Islam al-Mawardi dit :"l'aumône est une Zakat et la Zakat est
une aumône, les termes diffèrent mais le sens est le même".70

Après ce bref survol consacré à la signification de la Zakat en tant que troisième pilier
de l’Islam, nous essaierons dans les paragraphes qui suivent de démontrer comment la Zakat
contribue au développement économique à travers son impact sur l'activité économique.

I.2 Impact de la Zakat sur l'activité économique

Nous aborderons dans cette section plusieurs aspects économiques de la Zakat.

 Zakat et soutien à l'investissement:

L'investissement étant le moteur du développement, la Zakat exerce un effet stimulant à


la production et décourageant à l'épargne stérile comme on le verra plus tard.

Les actifs immobilisés qui représentent l'outil de production des entreprises ne sont pas
soumis à la Zakat. Seuls sont imposables les actifs circulants comprenant les valeurs
d’exploitation, c'est-à-dire les stocks, les valeurs réalisables (créances et effets à recouvrer) et

68
- Sourate 36 Ya Sin, verset 35.
69
-Sourate 2 al-Baqara, verset 276.
70
-cité par Kawthar al-Abji in «  comptabilisation de la zakat et des impots », Dar al-Kalam d’édition et de diffusion, Dubai, E.A.U, 1987,
p.83 .

41
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

les disponibilités monétaires. On peut voir dans cette disposition le souci de préserver la
capacité productive des entreprises bien avant que se développe dans les économies modernes
la notion d'amortissement qui n'est autre qu'un mécanisme de réduction des impôts sur les
bénéfices en vue de stimuler les investissements en permettant aux entreprises de renouveler
leur capacité productive.

L'impact de la Zakat ne se limite pas à l'exonération des moyens de production, mais il


s'étend aux débiteurs en difficulté en leur réservant une part de la collecte. On voit dans cette
disposition une certaine logique dans le système islamique qui n'a pas de pair dans les
systèmes économiques contemporains : une personne qui détient une entreprise en bonne
santé est tenue de s'acquitter de la Zakat. En revanche, cette même personne est non
seulement exempte de l'impôt zakataire, mais elle reçoit de l'aide si elle est en proie à une
crise financière et se trouve dans l'incapacité d'honorer ses engagements. Cela se comprend de
l'affectation d'une part de la collecte de la Zakat aux gharimine ou personnes surendettées.

Une autre forme de soutient de la Zakat à l'investissement se manifeste dans la manière


dont les fonds sont affectés aux pauvres et aux besogneux capables de travailler.

En effet, les foqahas recommandent la dotation de ces personnes de moyens leur


permettant de mettre en œuvre leur savoir-faire. Le montant à distribuer doit être, dans ce cas,
fonction du métier et de la qualification du bénéficiaire. Sur ce sujet, l'Imam an-Nawawi dit :
"pour ce qui est de l'artisan, il faut lui donner de quoi exercer son métier, en lui achetant, au
besoin, les outils nécessaires, quelle que soit la valeur, grande ou petite. Le montant à allouer
doit permettre aux bénéficiaires de générer des revenus assez suffisants pour se prendre en
charge; cette allocation dépend du métier financé, du lieu et place, et des personnes..."71

Cependant, le soutient des investissements est intimement lié à l'existence d'une


demande assez conséquente pour permettre aux entreprises d'entretenir leur effort de
production. Nous essaierons d'étudier, dans le paragraphe qui suit, le rôle de la Zakat dans le
soutient de la demande des biens et services.

 Zakat et soutien de la demande:

Le soutien de la croissance économique est conditionné par la stimulation de la


demande de biens et services. L'apport de l'économiste britannique Keynes est significatif
dans ce cas, car il est le premier à avoir inversé le raisonnement développé par les
économistes classiques qui admettaient que l'offre crée sa propre demande.72

En économie d'abondance, le problème ne se pose pas en termes d'offre mais en termes


de demande. Justement la Zakat agit dans ce sens en promouvant la consommation des
pauvres jusqu'à ce qu'ils atteignent un niveau de vie décent.

71
-An-Nawawi dans son oeuvre "Al-Madjmouä", cité par Yousef al- Qaradawi in "Fiqh al-Zakat", Librairie Rahab, Alger, 20è ed., 1988,
p.572
72
-Cf. les écrits de l'économiste français Jean Baptiste Say et sa fameuse " Loi des débouchés" où l'offre crée sa propre demande.

42
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

La politique de redistribution des revenus et de la richesse par le recours au levier


Zakataire permet de réduire les inégalités en dotant les couches défavorisées d'un pouvoir
d'achat indépendamment du statut social de chaque individu, qu'il soit chômeur, inapte au
travail ou salarié dont le revenu ne lui permet pas d'atteindre le minimum d’aisance (had al-
kifaya). Cette redistribution crée une demande de biens et services d'aisance favorable au
maintien de l'activité des entreprises qui s'engagent à produire cette catégorie de biens. Ainsi,
comme la propension à consommer chez les personnes à faible revenu est plus forte que celle
des personnes à revenu élevé, une modification de la répartition en faveur des pauvres stimule
le niveau de consommation globale. Eu égard à la faiblesse des taux zakataires, la ponction
des revenus élevés n'aura pas d'influence significative sur la propension marginale à investir.
Au contraire, elle peut réduire la propension à consommer des biens de luxe et encourager
l'investissement dans les secteurs de biens de subsistance et/ou d'aisance. Ainsi, la Zakat a un
impact positif sur la demande globale.

 Zakat et soutien de l'offre :

En stimulant la demande par le mécanisme de redistribution des revenus et de la


richesse, la Zakat contribue indirectement à la promotion des activités de production de biens
et services d'aisance, ou production de masse.

Comme l'action zakataire est continuelle, cela a pour effet d'inciter les entreprises de
production de masse à élever leur niveau de productivité (en optant par exemple, pour les
économies d'échelle) en adoptant la stratégie du "pile it bigger, sell it cheaper". Le résultat
sera alors la réalisation de profits plus élevés issus d'une offre dont les débouchés sont
garantis par les transferts sociaux opérés par le mécanisme zakataire. Cette stimulation de
l'offre, soutenue par l'existence d'une demande de biens d'aisance, incite les entreprises à
investir davantage et à moderniser leurs processus de production. La ponction des revenus
générés née des prélèvements zakataires permet à ces entreprises de renouveler leur cycle de
production de la façon décrite précédemment.

Le soutien de l'offre et de la demande issu de l'action zakataire se traduit nécessairement


par un soutien de l'emploi.

 Zakat et soutien de l'emploi:

Ce soutien se manifeste tant du côté "recouvrement" que du coté "affectation".


Concernant le recouvrement, la Zakat peut constituer un facteur de la politique de l'emploi.
Ainsi, par exemple, certains foqahas préconisent un taux d'imposition zakataire de 2,5% sur
les revenus du travail dans la mesure où :

- Le montant économisé atteint le nissab.


- Le revenu couvre largement les besoins essentiels.
-L'individu ne soit pas endetté.73

73
-On peut citer, pour ce qui est des tenants de cet avis, Hamed A.Derraz.
43
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Eu égard à la faiblesse du taux sur les revenus du travail, la Zakat ne peut avoir d'effet
inverse sur la motivation des riches au travail. Cette attitude est en parfaite harmonie avec
l'approche islamique qui consiste à préserver le capital humain. Les revenus provenant de
l'effort humain sont beaucoup moins imposables que ceux provenant des ressources naturelles
(Ses fruits).

La proportionnalité des taux zakataires contribue elle aussi à promouvoir l'emploi du


fait qu'elle a le mérite d'encourager l’innovation et l'investissement en ce sens que le taux de
prélèvement marginal est égal aux taux de prélèvement initial. Les avantages de la
proportionnalité sont beaucoup plus lucides si on compare la Zakat à l'impôt progressif
appliqué par les états modernes. En effet, celui-ci comporte le risque de substitution du travail
productif au loisir du fait que la progressivité pousse le contribuable à travailler moins, pour
gagner moins, et payer moins d'impôt.

Par ailleurs, le soutien de la Zakat à l'emploi peut être apprécié par le 'timing' du
recouvrement. En effet, celui-ci ne doit intervenir qu'une fois l'entreprise commence à générer
des cash flow positifs. A cet effet, le Coran est clair : "C’est Lui qui à créé les jardins
treillagés et les non treillagés, et les dattiers; et la culture aux récoltes diverses; l'olive et la
grenade, semblables ou différents, mangez-en du fruit lorsqu'il fructifie, et acquittez-en les
droits, le jour de la récolte: et pas d'excès ! Dieu n'aime pas les sur consommateurs".74 Ainsi,
et par analogie, tant que le processus de production ne génère pas de 'fruits', il n’y a pas lieu
d'exiger la Zakat. Comme si, un délai de grâce est accordé afin de permettre aux entreprises
de prospérer, donc de créer plus d'emploi.

L'effet de la Zakat sur l'emploi est beaucoup plus significatif lorsqu'on prête une
attention particulière à l'affectation des fonds zakataires.

La dotation des pauvres et des besogneux en mesure de travailler du capital nécessaire à


l’exercice de leur métier est une manière de promouvoir l'emploi. Dans le même ordre d'idées,
l’aide octroyée aux personnes endettées les encourage à maintenir leur activité et à honorer
leurs engagements. La prise en charge des voyageurs en détresse, quelle que soit leur situation
dans leur lieu de résidence, leur permet de regagner leur poste de travail dans les meilleures
conditions possibles.

D’autre part, la distribution des fonds zakataires aux pauvres ne pouvant pas travailler
pour diverses raisons (handicap, chômage forcé ou même les travailleurs dont le revenu ne
leur permet pas d'atteindre le minimum d'aisance) aide à soutenir la consommation, donc à
assurer un débouché aux produits des entreprises engagées dans la production de masse. La
consommation de produits et services d’aisance, constitue en elle même un facteur principal
de la reconstitution de la force de travail.

L'action de la Zakat ne se limite pas au soutien de l'emploi, mais elle s'étend, comme on
l'a vu précédemment, au soutien des investissements qui sont eux-mêmes conditionnés par la
mobilisation de capitaux vers des emplois productifs.

 Zakat et inflation :
74
-Sourate 6 Al-Anaâm, verset 141.
44
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

La faiblesse des taux zakataires est de nature à atténuer les tendances inflationnistes.
Les économies modernes accusent les forts taux d’imposition d’être facteurs d’inflation
puisque les commerçants ont tendance à reporter sur les prix toute augmentation des charges
fiscales. Inversement, leur réduction exerce une action favorable à la baisse des prix.
Par ailleurs, la Zakat ne peut s’apparenter aux charges déductibles puisqu'elle est payée
sur le produit net réalisé en fin d’exercice.

On peut apprécier la dimension non-inflationniste de la Zakat en mesurant les bénéfices


escomptés nés du climat social sain que la Zakat aide à promouvoir. La structure de la
répartition zakataire n’est pas le résultat de conflits entre ceux qui disposent de la richesse et
ceux qui n’en ont pas. Elle est le fruit d’un acte volontaire favorable à une harmonie sociale
pour le bien de l'ensemble de la société. Les économistes sont unanimes à admettre que "les
conflits intenses ont généralement un impact inflationniste important, alors que les sociétés
dans lesquelles règne un meilleur consensus social ont une croissance du niveau général des
prix le plus souvent inferieure".75 C’est pour cette raison qu’il est souhaitable que les Etats
musulmans modernes s’empressent à promouvoir l’application de la Zakat qui demeure
l’unique pilier de l’Islam qui lie la fois à la pratique. Alors que les gouvernements modernes
n’arrivent pas à trouver de solutions adéquates au problème de l’évasion fiscale, bon nombre
de musulmans fortunés, et dans tous les pays sans exception, paient de façon régulière leur
Zakat sans que personne ne les oblige à le faire, sauf leur foi en Dieu. Cela ne veut nullement
dire que l’application de la Zakat se fera sans obstacles majeurs, mais les problèmes auxquels
les gouvernements auront à faire face seront certainement beaucoup mois épineux que ceux
induits par les régimes fiscaux positifs. L'Europe, et la France en particulier qui abrite la plus
grande communauté musulmane, ont intérêt à faciliter la mise en place de structures
institutionnelles pour assurer de manière systématique le recouvrement et la répartition de la
Zakat.

 Zakat et décentralisation de la répartition :

Les fonds provenant de la Zakat sont répartis là où ils ont été collectés. Cette politique
de redistribution des revenus est beaucoup plus rationnelle qu’une politique de répartition
centralisée. En effet, nul ne connait véritablement les nécessiteux d’une société mieux que les
personnes qui les côtoient. Le Trésor Central n’intervient que dans le cas où les fonds
collectés excèdent les besoins locaux. L’action du Trésor se limiterait dans ce cas à transférer
les surplus vers les régions qui comptent des pauvres et des nécessiteux, voire vers l’étranger
si besoin est. Un des problèmes épineux auquel font face les Etats modernes est la détection
des vrais nécessiteux de ceux qui ne le sont pas. La décentralisation de la répartition de la
Zakat demeure donc un moyen convenable d’affectation des fonds aux différents ayants droit
cités le Coran. " Cette forme de décentralisation répond aux besoins locaux dans la mesure où
le sens des flux est inversé. Ce n’est plus le Trésor Central qui finance le budget du Trésor
local, mais c’est l’inverse. La distribution entre prélèvements locaux et nationaux évite toute
possibilité de conflit entre les deux cas comme on le constate dans les économies modernes
".76

75
-Citation de Janine Bremond et Alain Gélédan in "Dictionnaire des théories et mécanismes économiques Hatier, Paris, 1984, p .393.
76
-Lahcen Daoudi "Place de la Zakat dans le système islamique" papier, Dakar 1994, séminaire sur la Zakat, p.2.
45
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Nous estimons que les avantages exposés ci-dessus méritent que l'on s'intéresse, en
France comme en Europe à la zakat qui constitue une composante essentielle du tissu
institutionnel du système financier islamique.

2. Le waqf 

2.1. Définition

Il existe plusieurs définitions du Waqf ou Habs, mais nous retiendrons celle du feu
Cheikh Mohamed Abu Zahra qui, en peu de mots, a su résumer l’essentiel : « immobilisation
d’un bien tout en faisant largesse de son usufruit ».77

On remarque que cette définition met l’accent sur l’immobilisation d’un bien qui ne
peut plus faire l’objet de vente, d’hypothèque, de donation ou de succession. Quant à
l’usufruit ou bien les revenus générés par le bien mis en waqf, ils sont destinés à des œuvres
de bienfaisance telles que définies par le Waqif (donateur-bienfaiteur). Dans un sens général,
le Waqf signifie une inaliénabilité de la propriété d’un bien et une aliénation de l’usufruit de
ce bien au profit d’une tierce personne.

Le Waqf est donc synonyme d’un acte de charité durable qui, pour le musulman, cela le
rapproche de Dieu. Le Waqf tire sa licéité du Coran, de la Sunna et de la pratique des
compagnons du Prophète Mohamed (SAWS). Les versets qui exhortent à la charité sont
nombreux dans le Coran.78

Etant un engagement contractuel volontaire, le Waqf, pour être validé, doit répondre
aux quatre conditions suivantes :
1. L’existence d’un donateur (al-Waqif)
2. L’existence d’un bien mis en waqf
3. L’existence d’une partie qui en bénéficie
4. L’existence d’une formule qui consacre l’acceptation de faire acte du waqf.

Par ailleurs, et selon la finalité et l’intention du donateur, il existe trois catégories de


Waqf : 1. Al- Waqf al dhorri ou bien Al-Waqf al-Ahli qui renvoie au Waqf privé ou familial ;
2. Al-Waqf al- Khaïri ou Waqf public ; 3. Al-waqf al-Moushtarak ou Waqf mixte ou hybride
qui rassemble les deux formes de Waqf précédentes à la fois.79

Mais au-delà de ces aspects juridiques et fiqhiques, ce qui nous intéresse dans ce
colloque c’est le rôle des fondations pieuses sous forme de Waqf dans le développement
économiques. En effet, comme nous l’avons vu au début de ce papier, les économies
modernes telles que les Etats-Unis accordent une importance au secteur philanthropique qui le
qualifient de third sector (troisième secteur) par opposition au secteur public et secteur privé.
En effet, ce secteur contribue à plus de 6% du PIB américain avec 9,2 % du total des emplois
77
-Mohamed Abu Zahra, Cours de Waqf, p.44
-Cf. par exemple Sourate 2, versets 3, 215, 219, 254, 261, 262, 265, 267, 274 ; Sourate 3, versets 117, 134 ; Sourate 4, versets 34, 38 ;
Sourate 8, verset 34 ; Sourate 9, verset 53 ; Sourate 22, verset 35, Sourate 28, verset 54, Sourate 32, verset 16, Sourate 42, verset 42,
Sourate 25, verset 67, Sourate 57, verset 10.
78
-Pour plus de détails sur les notions fiqhiques du Waqf, Cf. Layachi Feddad, Fiqh al-Waqf in La Zakat et le Waqf : Aspects historiques,
juridiques, institutionnels et économiques, IIRF, BID, 2è ed. 2001.
79

46
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

salariés. Historiquement, le Waqf a joué un rôle important dans la civilisation musulmane.


L’enseignement, la santé, la construction de mosquées, d’écoles coraniques, et bien d’autres
édifices publics étaient financés par le Waqf.

2.2. Types de waqf 

Le waqf se divise en trois catégories

 Le waqf public 

C’est le waqf dont les revenus sont destinés à des œuvres de bienfaisances qu’elles
soient représentées par des personnes déterminées comme les pauvres et les besogneux, ou
par des services publics tels que les hôpitaux, les écoles, etc.

 Le waqf familial ou - privé - 

En langue arabe, il est aussi connu sous le nom de waqf dhorri, ou la rente des biens
waqf est destinée successivement au waqif, à ses enfants puis à des œuvres de bienfaisances
ininterrompues. Cette forme de waqf mérite que l’on s’y attarde un peu en raison de son
importance.

 Le waqf hybride 

C’est le waqf dont les revenus sont destinés simultanément aux descendants et aux
œuvres de bienfaisance. On lit dans al-Moghni ; « … celui qui met en waqf sa maison au
profit de deux parties telles que ses enfants et les pauvres, moitié fois moitié ou 1/3 fois 2 / 3
ou autres, cela est permis. La destination finale du bien mis en waqf peut bien être les
descendants, les pauvres ou bien une partie autre que les deux précédentes. »80
Al-bahuti écrit : « Celui qui met en waqf son bien que ce soit une maison un livre ou
autre, au profit de ses enfants et des pauvres, la jouissance profiter équitablement aux deux
parties. »81

On lit dans la revue ‘ al-ahqam al-chari’a al-hanbaliya’, article 667 « Il est parfaitement
correct de mettre en waqf la maison au profit de deux parties déférentes telles que les enfants
et les pauvres »82 , D’ailleurs c’est ce qui se comprend de façon implicite à travers les écrits
des foqahas lorsqu’ils traitent des différents types de waqf, sans parler ouvertement de la
forme hybride.83 Les lois positives réglementant la pratique du waqf dans certains pays

80
- Qudama, al-moghni,vol.8,p.233 .Ibn
81
-AL-Bahuti,Kishaf al-kinaa,vol.4,p.258.
82
-Cf. AL-Qari,Majallat al-ahqam al-shari’a,p.279 .
83
-Cf.Burhanuddine Tarabulsi,al-Isaaf,p.139-140 et suite
47
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

musulmans font mention de cette forme commune de waqf c’est le cas avec la loi soudanaise
dans son article (907) de la loi jordanienne dans son article (223).84

1.3. Les objectifs de waqf 

 Un objectif moral 

Celui de se rapprocher de Dieu par un acte de sadaqa (aumône), particulièrement


lorsque cet acte contribue à l’édification d’une mosquée, ce lieu de lumière au niveau de
l’éducation des âmes et des esprits.

 Un objectif social 

Par l’aide des catégories pauvres et nécessiteux, des malades, des handicapés, des
vieillards, de manière à confirmer le principe de takaful (solidarité), qui est le soubassement
social de l’islam.

 Un objectif culturel 

Celui de pouvoir par l’édification des écoles waqf agréger dans la formation de
l’homme musulman, la science et la conscience. Le prolongement naturel des lieux de
cultures a été tout naturellement les écoles coraniques d’abords, ensuite multidisciplinaires,
pour devenir enfin spécialisés dans les différentes sciences.

 Un objectif économique 

La redistribution des revenus d’une manière statistique, et d’investissement social d’une


manière dynamique. Une forme d’éducation en matière de comportement économique du
musulman doit apparaitre d’une part, et d’autre part une intégration de l’économie islamique
doit pouvoir se réaliser d’autre part, peut servir, à créer des banques islamiques, comme ce fut
le cas de Banque Fayçal AL islam en Egypte par les Awqaf en Egypte, et de Bank
Attadamoun AL islam en soudan, et la société islamique du Luxembourg par les Awqaf des
Emirats Arabes Unis.

84
-Cf.AL-Nasri, Etude des lois et systémes de waqf au Soudan, p.145 .
48
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

49
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Chapitre 3 : les


perspectives de la
finance islamique

La finance Islamique gagne du terrain, le nombre de banques islamiques augmente


d’une année à l’autre et leur actif se diversifie et devient de plu en plus important ; leurs
activités se multiplient et s’étendent à l’ensemble du globe y compris aux pays non
musulmans.

Pourtant, malgré sa croissance rapide, la finance islamique reste une activité limitée
dans la plupart des pays et n’occupe qu’une place minuscule dans le système financier
mondial. A cause des nombreux obstacles et des défis relevés qui sont lourds et risquent de
compromettre cet essor ou du moins de l’affaiblir.

Il est clair que cette industrie de la finance islamique présente un grand enjeu autant
pour les économies modernes que pour les pays en développement.

Section 1 : actualités et enjeux de la finance islamique

I. Etat actuel du système financier islamique

50
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

1. Taille du marché
La taille actuelle du marché financier musulman est assez difficile à mesurer. Le
nombre d'institutions bancaires totalement islamiques était estimé à plus ou moins 200 unités
en 1999 par le magazine spécialisé Private Banker, alors que le Président de l'Abu Dhabi
Islamic Bank, Al Nassiri parlait déjà d'une augmentation de 34 en 1983 à 194 banques
islamiques en 1997.85

D'après le Miraj International Investîmes, un fonds d'investissement islamique basé au


Canada, les institutions financières islamiques disposent à l'heure actuelle d'investissements
totalisant 140 milliards de dollars dans plus de 40 pays, un chiffre qui croît à un rythme
annuel allant de 15% à 20%195, alors que Ibrahim Warde évalue le total des actifs des
banques islamiques à plus de 230 milliards de dollars dans plus de 75 pays 196.86

Le dernier recensement officiel des institutions bancaires islamiques a été effectué en


1996 par l'Association Internationale des Banques Islamiques. Malgré que les chiffres de cette
enquête ont inévitablement augmenté en six années de temps, les graphiques et tableaux qui
en ressortent permettent d'obtenir une idée relativement claire da la taille et de la structure
actuelles du marché.

Le nombre de banques islamiques était alors estimé à environ 90, hormis les banques du


Pakistan, de l'Iran et du Soudan où la totalité du système bancaire a été islamisée. En 1996, la
valeur totale de l'actif qui était géré par ces banques s'élevait à 28 milliards d'USD alors
qu'elle est évaluée en 1998 à plus ou moins 50 milliards d'USD.

Les différents tableaux présentés ci-dessous sont directement repris des différentes
enquêtes menées en 1996 par l'Association des Banques Islamiques basée à Jeddah en Arabie
Saoudite.

2. Analyse des performances du marché

2.1. Répartition par région

Le tableau suivant nous donne la répartition des banques islamiques à travers le monde:

Institutions Financières Islamiques par Région87

Région Nombre d'institutions Pourcentage

85
-« yahoo », actualités Economique, 14 novembre 1999
86
-www.islamic-fbanking.com
87
- DOW JONES INDEXES. http://www.djindexes.com/mdsidx/?event=showIslamic

51
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Asie du Sud et du Sud-Est 36 42,4

Pays du Golfe 19 22,4

Autres Pays du Moyen-Orient* 13 15,3

Afrique 9 10,6

Europe et Amérique 8 9,4

Total 85 100

Source : www.dowjonesindex.com

* Cette catégorie inclut la Turquie.

Ces chiffres montrent que le plus grand nombre d'institutions financières islamiques se
trouvent en Asie, suivi par les pays du Golfe et les autres pays du Moyen-Orient. Bien que ces
chiffres nous offrent une première idée sur l'étendue et la répartition du marché financier
islamique par région, ils ne nous permettent pas d'évaluer le poids de différentes régions sur le
marché. Une répartition de la valeur des actifs gérés par région résout ce problème.

Valeur des fonds gérés par Région 88

Région Fonds gérés Pourcentage

(en millions de USD)

Asie du Sud et du Sud-est 2250,7 8,2

Pays du Golfe 17834,5 64,7

Autres Pays du Moyen-Orient 5430,1 19,7

Afrique 334,5 1,2

Europe et Amérique 1 723 6,2

Total 27573 100

Source : www.dowjonesindex.com

88
-DOW JONES INDEXES. http://www.djindexes.com/mdsidx/?event=showIslamic
52
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Grâce à ce dernier tableau, il est facile de voir qu'une très grande partie de l'activité
bancaire islamique est gérée au Moyen-Orient, dans les Pays du Golfe. Cette région compte,
en effet, plus de 84% des totalités fonds qui sont gérés par les institutions bancaires et
financières islamiques.

2.2 Répartition par taille

La taille est une variable importante pour pouvoir déterminer l'efficacité d'une banque.

Tableau 3: Institutions Financières Islamiques par taille de l'actif 89

Actifs (en millions d'USD) Distribution fréquentielle

0-50 39

51-100 13

101-200 4

201-300 3

301-400 8

401-500 1

500-1000 3

> 1000 7

Total 78

Source : www.dowjonesindex.com

D'après les données de ce tableau, nous pouvons constater que la majorité des banques
islamiques se trouvent en dessous du seuil d'efficacité fixé à 500 millions d'USD. Seules 10
banques sur les 80 dont les données sont disponibles publiquement atteignent ce seuil. La
petite taille adoptée par la majorité des banques islamiques est souvent justifiée comme une
manière de minimise!": le risque à travers une diversification de leur portefeuille d'actifs.

89
- DOW JONES INDEXES. http://www.djindexes.com/mdsidx/?event=showIslamic
53
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Institutions financières islamiques par taille du capital 90

Capital (en millions d'USD) Distribution fréquentielle

0-25 55

26-50 10

51-75 5

76-100 2

101-150 2

151-200 2

201-300 2

Total 78

Source : www.dowjonesindex.com

Ce tableau nous permet de constater que seulement 8 institutions ont atteint ce niveau
d'optimalité.

Des résultats qui sont dégagés de ces différents tableaux, on peut conclure que seul un
nombre restreint d'institutions financières islamiques a atteint les différents niveaux
d'optimalité. Ces résultats peu encourageants sont, de manière générale, à imputer au très
jeune âge de la plupart de ces institutions. Au demeurant, il est de notoriété publique qu'un
haut niveau de capital facilite l'appel à de nouveaux fonds puisqu'il reflète l'intérêt que portent
des actionnaires à la société.

II. Les enjeux de la finance islamique 


Compte tenue de l’importance grandissante de la finance islamique de nos jours, elle revêt
d’importants enjeux, en sens qu’elle représente notamment une opportunité d’accès à des
fonds de plus en plus rare du fait des récentes crises, mais elle est également présentée comme
une alternative possible aux dérivés de la finance conventionnelle, de même qu’elle permettre
d’accroitre le niveau de bancarisation majoritairement dans les pays ou ce taux est très faible.
90
-DOW JONES INDEXES. http://www.djindexes.com/mdsidx/?event=showIslamic

54
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

1. Une alternative à la finance conventionnelle

L’émulation dont jouit la finance islamique en Europe depuis la crise des subprimes
marque un tournant dans l’appréhension du modèle économique libérale. Les faillites de
banques, cumulées aux crises de la dette en Europe, succèdent à une baisse fréquente des taux
d’intérêt des banques centrales et à une injection massive de capitaux dans les fonds propres
des banques conventionnelles. Le dynamisme des finances dites alternatives qui sont
impulsées par des préoccupations éthiques font contrepoids au fonctionnement du capitalisme
classique et appellent les consciences à un regain d’équité au sein du système financier. Micro
crédit, investissement socialement responsable ou social banking, marquant la tendance
financière de ces dernières années.

Certains économiques islamiques avancent l’idée qu’un système financier basé sur les
principes de l’islam, et notamment sur la prohibition de la riba, aurait pu éviter certains des
plus grands désastres financiers des cinquante dernières années. Dans la crise de la dette des
pays émergents, une partie au moins de la responsabilité revient aux banques qui ont attribué
des crédits facilement et sans beaucoup de discernement. Dans un système financier basé sur
le partage des profits et des risques, une telle situation ne pourrait se produire, car les
investisseurs, en l’occurrence les banques, ont une forte incitation à mieux contrôler le
déroulement du projet d’investissement.

C’est dans ce contexte qu’est apparu un intérêt fort pour la finance islamique. La
conceptualisation de cette finance, qui proscrit notamment l’intérêt et qui appelle au principe
du partage des pertes et des profits, se présente comme le « modèle économique éthique le
plus abouti ».

En s’inscrivant donc dans une dimension éthique et socialement responsable, la finance


islamique, présente l’avantage de s’adresser à un public de consommateurs potentiels
dépassent largement la sphère islamique.

2. Un catalyseur d’I.D.E (investissement direct d’étranger)


S’appuyant sur l’argument religieux et profitant de l’abondance des ressources
financières dans les pays du golfe persique, la finance islamique connait une évolution
fulgurante accentuée par les fréquentes et profondes crises que connait la finance
conventionnelle.

Sur le plan opérationnel, la finance islamique trouve accès à de vaste gisement de


dépôts bon marché et stable. De 800 à 1100 milliards 91 d’euros : c’est l’estimation de ce que
pèsent aujourd’hui les fonds islamiques dans le monde. « un marché encore discret »
rappellent le experts financiers, qui notent au passage les enjeux de développement que sous-

91
-sources : BMB islamic, Global Islamic Finance Report 2010.
55
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

tendantes fonds, prêts à être employés dans le cadre d’investissements conforme aux règles
islamiques.

Alors que l’économie mondiale se remet peu à peu de la crise financière, ce secteur
représente une réelle source d’I.D.E pour les pays ou elle s’y trouve vu les valeurs inhérentes
(préoccupation sociale, bannissement de la dette…) qu’elle clame, face à un capitalisme qui a
pris froid, faisant éternuer tous les marchés mondiaux.

3. Un levier du niveau de bancarisation


Un autre enjeu de le finance islamique tient à l’apport d’une épargne « fraiche » dans le
circuit bancaire qui restait jusqu’alors hors de celui-ci, « sous les matelas »92. A une opinion
critique fort répandue selon laquelle l’épargne islamique n’est qu’un déplacement du compte
des comptes des banques usuraires (conventionnelles) vers les nouveaux guichets des banques
islamiques, le président de la banque Fayçal, du Caire, répondait :

« 70% de nos clients traitent pour la première fois avec le secteur bancaire. Nous avons
un million trois cent mille (1300000) comptes (…) et la valeur de nos dépôts atteint un
milliard six cent millions de dollar (1600000000), dont 70% sous forme de comptes de moins
de 5000 livres égyptiennes. Nous sommes une banque de pauvres et nous ne nous fondons pas
sur une minorité de riches93.

En prime, le déposant devient associé à des investissements dans des projets qui font de
lui un participant au développement de sa communauté.

4. Un apport socio-économique des produits alternatifs au Maroc


En introduisant des produits bancaires islamiques, le Maroc voulait que ces derniers
contribuent au développement du pays, surtout au niveau social et économique, et comme ça
conserver l'équilibre social et économiques que l'Etat se batte depuis toujours pour le
stabiliser.

4.1. Conserver l'équilibre social 94

Comme beaucoup de pays du tiers monde le Maroc connaît une grande crise d'habitat,
que les crédits traditionnels, n'ont pas pu résoudre, et encore plus, les banques sont même
soupçonnés de l'accentuer notamment par la spéculation , et par des crédits qui ne répondent
pas aux demandes d'un grand nombre de clients, qui ont des convictions religieuses contraires

92
-J. CHARBONNIER, Islam : Droit, Finance et Assurance, Editions larcier, 2011, p.132.
93
-J-FR .RYCX, Islam et dérégulation financière, Centre D’études et de Documentation Economique, Juridiques
ET Sociales,1988, p.79.
94
- Bank Al-Maghreb. (2008), «la Finance Islamique au Maghreb», Paris.
96
- Bank Al-Maghreb. (2008), «la Finance Islamique au Maghreb», Paris.

56
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

aux principes sur lesquelles ces crédit sont basées, surtout les taux d'intérêts prohibés par les
préceptes de la charia ( 42% de ceux qui refusent les crédits bancaires au Maroc c'est pour des
motifs religieux) selon une étude faite par une association spécialisé dans la matière.

Donc l'introduction de ces produits va certainement encourager cette catégorie de


citoyen, pour acheter leurs propres maisons, par des produits bancaires comme «Miftah Al
Kheir» et «Miftah Al Fath», qui répondent à leurs attentes, et de cette façon on va remédier au
moins partiellement à ce fléau qui peut engendrer des problèmes sociaux, qui menace la
stabilité sociale du pays, notamment les bidonvilles que le Maroc combatte avec voracité.

D'autre part la finance islamique en interdisant l'intérêt, il va empêcher le favoritisme du


capital par rapport au travail, le capital doit par conséquent profiter à son détenteur et à celui
qui le profite par son travail. Et d'une autre côté elle vise à empêcher la formation au sein de
la société d'une classe détentrice des capitaux et d'une autre misérable qui travaillerait pour le
bien être de la première, et c'est le but de la moucharakah qui va créer une complémentarité
entre ces deux classes pour le bien de la société toute entier.

Enfin il vaut mieux signaler qu'en acceptant la commercialisation de ces produits, l'Etat
marocain va rompre la route contre toute éventuelle utilisation politique de ces modes de
financement, surtout par l'opposition islamique, et de cette manière il n'y aura aucun
changement sur le niveau sociopolitique interne. Et d'ailleurs c'est la principale cause qui a
poussé l'Etat pour autoriser la commercialisation des produits bancaires islamiques.

4.2. Contribuer au développement économique du pays95

Selon Omar al katani l'expert économique marocain, les produits alternatifs auront un
impact positif sur l'économie marocaine, et cela va apparaitre dans plusieurs domaines : tous
d'abord et selon une étude faite par l'association de M. katani 6% des entreprises marocaine
refuse de nouer des relations avec les banques pour des raisons religieuses, et 20% veulent
changer leurs modes de financement par un autre islamique, donc c'est une grande partie
d'entreprise qui ont maintenant ce qu'elles cherchaient depuis longtemps pour leur
épanouissement .

Il y a aussi l'intérêt financier du fait que ces produits ; vont certainement contribuer dans
le processus de bancarisation que le Maroc poursuit ces derniers années, car d'une part les
banques auront plus de produits à présenter, et d'autre part elles cibleront une nouvelle
catégorie de clients, qui' ont été négligé auparavant.

Il faut aussi signaler que les produits islamiques, vont aider beaucoup ceux qui
pratiquent des métiers libéraux, comme les médecins, les avocats, les notaires pour équipier
leurs bureaux, par ijara ou mourabaha, notamment ceux qui ont des convictions religieuses.

95

57
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Il y' a aussi un autre intérêt de plus grande importance, qui est l'épanouissement du
secteur de l'immobilier, car en donnant plus de crédits conformes aux préceptes de l'islam, en
va encourager beaucoup de gens à acheter des logements ce qui va se répercuter sur ce secteur
qui est liée avec plusieurs secteurs économiques majores.

Enfin l'intérêt économique de ces produits réside aussi dans le fait, que c'est une
manière qui va attirer plus d'investisseurs des pays de golf, qui vont amener avec eux plus de
devises et créeront de ce fait plus d'emplois. Mais toutefois il reste de savoir si tous ces
apports sont palpables sur la pratique, ou seulement de simples spéculations théoriques.

III. Actualités de la finance islamique 

1. Attijariwafbank compte accélérer son offre de finance islamique 96


Depuis l’adoption du projet de loi sur la finance islamique par le gouvernement le 16
janvier dernier, les banques classiques étaient restées muettes sur leurs ambitions, alors que
celles-ci s’étaient dites à plusieurs reprises intéressées. On se doutait bien qu’elles étaient en
train de réfléchir à leur plan d’attaque.

Aujourd’hui, c’est Attijariwafabank Bank qui sort du silence. Le groupe bancaire


marocain « renforcera son offre de finance islamique dès que le parlement aura approuvé le
projet de loi », a déclaré le 04 mars 2014 son directeur général, Ismail Douiri, dans un
entretien avec Reuters. En effet, l’approbation du parlement représente la dernière étape avant
l’ouverture effective des banques islamiques au Maroc.

Pour transformer Dar Essafaa (la filial d’Attijariwafabank consacrée aux produits
alternatifs ndlr), en banque participative, « nous aurons besoin d’augmenter son capitale de
150 millions de dirhams et les investissements ultérieurs  répondront de la manière dont le
marché se développera », a expliqué M. Douiri.

2. Selon S&P, la finance islamique dispose d’un fort potentiel en Afrique


du nord 97
La finance islamique dispose d’un fort potentiel en Afrique du nord, estime Standard
and Poor’s dans un rapport publié le 18 février 2014 intitulé « la finance islamique pourrait
faire une percée en Afrique du nord », rapporte le site CPI Financial. « Nous avons surtout
constaté ces avancées au Maroc, en Tunisie et en Egypte, où les gouvernements ont
récemment pris des mesures pour la mise en œuvre des politiques visant à soutenir le

96
-www.yabiladi.com/Attijariwafabank/articles,actualités.
97
-www.yabiladi.com/finance islamique/articles, actualités.
58
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

développement de la finance islamique », explique Mohammed Damak spécialiste des


marchés bancaires dans la région MENA au sein de S&P.

 la société, de plus en plus conscientes des apports de la finance islamique

En effet, le royaume chérifien a justement entériné le projet de loi sur la pratique de se


type de finance le 16 janvier 2014. La Tunisie quant à elle, envisage démettre des sukuks pour
attirer une nouvelle classe d’investisseurs, au moment où l’Egypte a mise en place de
nouveaux cadres réglementaires pour l’émission de sukuks. En Maghreb en outre, les
professionnels régionaux s’activent dans ce sens, avec la création en novembre 2013 de la
ligue maghrébine de la finance islamique.

L’agence de notation américaine note également une plus grande conscience des apports
de la finance islamique au sein de la société nord-africaine. Cet aspect se vérifie au Maroc où
la grande majorité de la population (94%) est désormais favorable à l’idée d’épargner dans un
établissement fondé sur les principes de la charia. En témoigne une étude réalisée en 2012 par
le cabinet français IFAAS.

 Le facteur prix, très décisif

Le rapport de S&P sera encourageant pour les investisseurs, du Golfe en l’occurrence,


qui attendent depuis longtemps d’étendre leurs activités en Afrique du Nord. D’autant plus
que les experts ont souvent déploré la lenteur avec laquelle la finance islamique évolue dans
ces pays majoritairement musulmans. Aujourd’hui avec la crise qui a frappé le monde
économique et financier ces dernières années, la plupart des Etats sont en quête de leviers qui
leur permettront de stimuler leur économie et relever leur croissance.

Mohammed Damak estime toutefois que « la finance islamique doit démontrer sa valeur
ajoutée économique » en Afrique du Nord. Cela pourrait  « se concrétiser par un accès à une
nouvelle classe d’investisseurs ou de clients ou encore par l’offre de produits alternatifs à des
coûts comparables avec ceux de leurs homologues classiques », a- t-il expliqué. Car, nous
pensons que le succès dépendra de leur capacité à offrir des produits à un coût compétitif avec
les activités bancaires classiques a-t- il ajouté.

Et c’est justement à ce niveau que se trouve le défi pour les nouveaux entrants. Car
même si on s’attend à une attaque agressive de leur part, certains établissements bancaires
classiques, au Maroc notamment, envisagent de se lancer prochainement dans la finance
islamique.

 Une source de financement pour les gros projets

D’après S&P, les pays maghrébins auraient tout à gagner en investissement à fond dans
la finance islamique. « Cela peut être un bonne source de financement des projets, puisque les
banques classiques manquent souvent de la capacité de financement à long terme requise pour

59
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

certains projets de grande envergure », estime M.Damak, faisant allusion aux projets
d’énergies renouvelables au Maroc notamment.

A ce jour, le total actif du marché de la finance islamique dans le monde s’élève à 1,4
milliard de dollars. Il ne cesse de croitre dans les pays du Golfe et dans certains pays
occidentaux comme la Grande Bretagne dont la place de Londres vise le leadership mondial.
Si l’essor attendu en Afrique du Nord se confirme, la finance islamique fera certainement un
grand pas supplémentaire.

3. Finance islamique : quand Londres ambitionne d’en être l’une des


capitales mondiales, certains pays musulmans trainent encore le pas.
98

Londres abrite, l’année dernière, la neuvième édition du forum économique du monde


islamique baptisé Davos islamique. Une première pour un pays non musulman. Le premier
ministre britannique, David Cameron, a annoncé, à l’occasion, le lancement d’un indice
islamique sur la place londonienne. Le but est de faire de Londres, l’une des capitales
mondiales de la finance islamique. Pendant ce temps, certains pays musulmans qui, pourtant,
ne manquent pas de vanter les atouts d’une telle activité, trainent encore le pas.

4. France : premières assurances-vie compatibles avec la charia


islamique99
La finance islamique gagne des points en France. Entre l’automne et le début du mois
de janvier, deux contrats d’assurance-vie qui respectent les préceptes de la loi islamique
(charia) sont devenus effectifs. Les intéressés qui veulent souscrire à ces assurances doivent
respecter les interdictions prévues par la loi islamique, ne pas investir en obligations ou dans
des entreprises exerçant des activités « haram », mais aussi avoir l’autorisation d’une autorité
religieuse.

Tandis que Londres tente de s’imposer comme l’une des capitales mondiales de la
finance islamique en Europe, la France, elle, essaie de suivre. Entre l’automne et le début de
mois de Janvier, les sociétés Swiss Life et Vêtis Life ont mis en place dans l’hexagone deux
contrats d’assurance-vie qui respectent les préceptes de la loi islamique.

Le contrat Salam est effectif depuis l’automne dernier chez Swiss Life, sa mise de
départ minimum est fixée à 3000 euros. Du coté de Vêtis Life, une compagnie
luxembourgeoise propriété d’investisseurs qataris, pour la première fois en France, les
résidents peuvent souscrire au contrat Amane Exclusive Life. Amane exige une souscription
de départ substantielle plus élevée, qui est de 250000 euros minimum.

98
-www.yabiladi.com/Londres/articles,actualités.
99
-www.yabiladi.com/France /articles,actualités.
60
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Section 2 : les défis de la finance islamique 


I. Défis d’ordre général

1. Recherche de profit et conformité à la Charia


La finance islamique a pour objectif la mobilisation de ressources et leurs allocations
entre les différents projets d’investissement. C’est la raison d’être du système financier
classique. Mais s’il y’a convergence d’objectifs, les principes régissant le système de
fonctionnement différent. La finance islamique s’organise autour de mécanismes,
d’institutions et de produits qui doivent respecter l’ensemble des principes fondamentaux
édictés par la charia :

- L’interdiction du Riba. L’utilisation d’un taux d’intérêt prédéterminé, et le transfert de


l’ensemble des risques à un projet d’investissement sur le seul débiteur ;

- La condamnation de la spéculation. La charia tout en acceptant la prise du risque,


interdit l’incertitude dans les termes et dans les relations contractuelles ;

- Toute transaction doit être adossée sur un actif tangible. L’argent doit être utilisé pour
créer des valeurs réelles, il ne doit pas être considéré comme objet d’échange en soi-
même ;

- La finance islamique interdit l’investissement dans certaines activités jugées nuisibles


pour l’être humain (haram : l’industrie des jeux d’argent, l’alcool, la prostitution, la
vente de drogue…).

Ces principes fondamentaux sont partagés universellement, mais dans la pratique ils ne
font pas l’unanimité.

Depuis les années soixante dix, les institutions financières islamiques se sont dotées de
conseils consultatifs islamiques (charia board), composé de spécialistes en loi islamique qui
valident la conformité aux règles coraniques des produits proposés ; or, les mécanismes
financiers ne sont pas définis par des règles précises et immuables. Ils sont déterminés plutôt
par l’appréciation de cette sharia scholars.

A noter que les interprétations ne sont pas uniformes d’un pays à un autre et d’un
comité à un autre. C’est que plusieurs écoles d’interprétation règnent dans différents pays.
Globalement l’Arabie Saoudite se montre moins tolérant que les pays d’Asie du Sud Est. La
création d’instruments islamiques de type obligatoire (au cours des années quatre vingt en
Malaisie) a été d’abord condamnée, puis copié par les pays du moyen Orient. Hétérogénéité
qui explique la diversité des instruments islamiques.

Aux départs, orientés vers le développement de manière plus diversifiée et plus


décentralisée, à l’image du monde musulman, se développe dans un petit nombre de pays
61
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

(Arabie Saoudite, Égypte et Pakistan). Au cours des années quatre vingt quatre vingt dix,
l'extension se fait vers de nouveau pays d’Asie du Sud Est mais également dans un nombre de
pays occidentaux à forte concentration de la communauté musulmane; les objectifs de ces
institutions financières évoluent ainsi progressivement et le système de financement islamique
n’est plus un simple outil de développement, il doit répondre aux besoins de vastes couches
sociales et aux contraintes environnementales de son application ; les banques islamiques
acquièrent le statut d’intermédiaires financiers à part entière, l’objectif de maximisation des
profits devient ainsi une priorité.

Sous l’impulsion d’une demande de plus en plus sophistiquée et dynamique, la finance


islamique devient plus pragmatique et ses objectifs convergents progressivement avec celles
de la finance traditionnelle.

Parallèlement, la finance islamique revendique sa spécificité en l’existence des «


Charia board » qui servent de garant du caractère islamique de ces instruments financiers.

Un défi que doit relever la finance islamique de manière permanente est la recherche du
profit maximum tout en respectant la charia sous la contrainte de la compétitivité.

1.1. La nécessité de la réorientation de l’investissement

En l’espace de seulement cinq ans, les revenus tirés des exportations de pétrole ont
presque doublé dans les pays exportateurs de pétrole, dont les pays du Proche Orient.
Situation qu’on a constatée également avec les deux chocs pétroliers en 1973 et 1979.
Cependant elle en diffère profondément au moins sur deux points :

- L’allocation des capitaux investis à l’étranger par les pays exportateurs de pétrole s’est
profondément modifiée ;

- Les IDE (Investissements Directs à l'Étranger) et les investissements de portefeuilles


représentent en 0115 près de la moitié de l’excédent du compte courant des pays
producteurs de pétroles. Or dans les années quatre-vingt, la part des actifs était
insignifiante dans les flux de capitaux extérieurs des pays pétroliers.

Par ailleurs, les tensions sur le plan politique qui ont suivi le 11 septembre 100, ont poussé
les investisseurs musulmans à rapatrier une partie de leur épargne ou, au moins, à modifier la
composition de leur portefeuille de placement.

1.2. Gérer des passerelles financières et trouver des dossiers


d’investissements

Le champ d’action traditionnel était la banque de détail, l’orientation actuelle étant


l’investissement dans de nouveaux territoires dont principalement les pays musulmans.

100
- Le 11 septembre 2001, c’est la date qui a laissé une empreinte indélébile sur l’ensemble du monde musulman, a marqué également un
tournant important dans le développement de la finance islamique .

62
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Un premier handicape qui peut être à l’origine d’un échec, tel celui des investissements
emblématiques en Tunisie, comme le dossier « Berges du Lac », et le privilège de
l’investissement rentable en hôtellerie au lieu des autres secteurs défaillants, nécessaires pour
le développement du pays de réception.

Le véritable enjeu pour les années à venir serait donc de trouver des cibles
d’investissement ; le marché financier des pays musulmans actuel n’est pas capable d’aborder
le surplus d’épargne émanant des investisseurs musulmans, ces marchés devraient être
développés, à la fois par voie de privatisation et par voie de cotation d’entreprises privées.

Par ailleurs, il faut accompagner le développement du marché des petites et moyennes


entreprises, en créant et en renforçant les fonds propres des PME.

1.3. Une création des « passerelles financières »

Afin de permettre une meilleure allocation des actifs islamiques, de nombreux pays sont
sur bancarisés (trop de banque) et sont en même temps sous bancarisés (pas assez de services,
notamment en matière d’ingénierie financière). La création des institutions financières
spécialisées (fonds de private equity, banques d’affaires…) permettrait de détecter les
opportunités d’investissement et à sécuriser les montages financiers.

1.4. L’obligation d’assurer une meilleure standardisation des produits

Afin de jouer un rôle significatif sur le marché financier global et permettre le


financement des économies nationales, les standardisations des produits deviennent
nécessaires. La standardisation n’aurait pas de sens non plus pour les principes sous-jacents
des produits. Mais dans un marché globalisé, la standardisation devient indispensable quant
aux concrétisations techniques des produits.

Des tentatives sont menées dans ce sens comme l’AAOIFI101 (Acounting and Auditing
Organisation for Islamic Financial Institutions) qui élabore des normes comptables
concernant des opérations financières islamiques et sur les grands principes de conduite de
cette activité.

Cependant, ces initiatives demeurent au mieux régionales, et ont un caractère plus


consultatif que normatif.

2. L’identification d’un cadre institutionnel


La promotion financière islamique suppose l’amélioration nécessaire du cadre
institutionnel dans lequel opèrent ces institutions. L’absence d’informations homogènes et
comparables est un handicape majeur empêchant le développement des fonds
d’investissements islamiques et en particulier des fonds d’action. Or pour le choix et la
décision d’allocation de leurs fonds, ces institutions ont besoin d’informations financières
101
- AAOIFI. www.aaoifi.com

63
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

traditionnelles sur les sociétés cibles, mais également des informations particulières
permettant de vérifier la trésorerie, en plus de la nature des activités halals ou non.

La création d’indices boursiers sharia-compiliant est un premier pas dans cette direction
mais il ne suffit pas.

Se pose également le problème de traitement réglementaire des institutions financières


qui sont traitées au même titre que les autres banques. Ils sont assujettis aux mêmes normes
prudentielles et aux mêmes règles que les autres. Or, il est plus rationnel d’accorder à ces
institutions un traitement spécial, ce qui n’est pas toujours admis par les opposants à cette
position, qui argumentent que la segmentation serait néfaste pour la concurrence entre les
différentes institutions financières.

Au fait, la plupart des instruments financiers islamiques ont une contrepartie dans la
finance classique, bien qu’ils ne s’imbriquent pas parfaitement dans les régimes
réglementaires existants. Ils comportent des techniques de contractualisation spécifiques et
répartissent les risques différemment entre les parties prenantes. Ainsi, du point de vue de la
propriété et du contrôle, la supervision actuelle, sur une base consolidée, est critiquable pour
les banques islamiques. Un autre exemple, l’absence de garantie des dépôts pour les banques
islamiques, qui revêt peu d’importance dans un environnement global favorable, peut devenir
une préoccupation centrale si la conjoncture économique et bancaire se dégraderait ;
hypothèse qui devient, depuis l’éclatement de la crise des « subprimes » de plus en plus
vraisemblable.

3. Développement de la formation
Des compétences doubles sont exigées des cadres des institutions financières islamiques
: des connaissances approfondies dans le domaine financier, mais également dans le domaine
de la charia, d’où la nécessité d’organiser des cycles de formations adaptées. Le recours aux
experts au niveau international suppose la mobilité des ressources humaines et l’élaboration
de programmes de formations spécifiques au système financier et au pays dans lequel il serait
appliqué. La Malaisie encourage fiscalement et sur le plan du droit de travail les experts en
finance islamique étrangers à travailler en Malaisie et à former les cadres autochtones. Une
solution louable qui peut être généralisée et améliorée par tous les pays adoptant la finance
islamique.

II. défis d’ordre juridique


La finance islamique propose le mariage de l’économique, du droit et de la charia, ce qui
l’expose à des difficultés techniques dues aux contraintes que la morale islamique lui impose.
Les défis sont de plusieurs ordres :

- L’insécurité juridique, le droit islamique se superpose aux droits nationaux qui sont
souvent d’inspirations doctrinales différentes ;

64
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

- Dans la pratique, apparaissent des difficultés de mise en œuvre de certaines règles


juridiques islamiques spécifiques ;

L’évaluation et l’appréciation que doivent apporter les déposants et investisseurs doivent se


baser sur des données générales et comptables souvent non homogènes, les empêchant de
juger de la performance de ces institutions.

1. L’insécurité juridique de la finance islamique


La jurisprudence doctrinale sunnite n’étant pas uniforme, plusieurs écoles de droit sont
nées au sein de la même famille sunnite, avec bien sûr des divergences qui apparaissent dans
la formulation des divers produits entre certains juristes du Golf Persique et certains juristes
de Malaisie.

Or il est incontestable que l’insécurité juridique constitue un véritable obstacle au


développement de la finance islamique, il importe de citer ici quelques exemples à titre
illustratif :

1.1. L’autonomie de la volonté

La question de l’autonomie de la volonté apparaît très importante lors qu’on la lie aux
règles qui régissent le système contractuel ; or les différentes écoles ne sont pas unanimes sur
la question et sur le système des clauses adjointes.

 Les positions des écoles juridiques

Ainsi, pour les hanafites, la volonté à elle seule n’est pas génératrice de droits et
d’obligations. La formation de contrat suppose l’existence de deux déclarations concordantes,
c'est-à-dire un état d’esprit favorable au contrat (rida) assimilable à la capacité au moins
psychologique de contracter : l’intention (qasd) nécessaire pour déclencher le processus.

L’accord (rida) est nécessaire pour la validité du contrat, à défaut il y’a existence de
vice qui peut être évoqué par chacune des parties qui demanderait la nullité du contrat.

Pour l’école malikite, la volonté des parties est essentielle, car elle insiste sur le motif
qui a amené les parties à contracter. Ainsi dans le cas de vice de consentement, le contrat est
nul et sans effet ipso facto (pas seulement susceptible d’être annulé).

Les hanbalites prônent la souveraineté de l’autonomie de la volonté et admettent que les


individus sont parfaitement libres d’insérer dans un acte juridique des clauses et stipulations
qui ne sont pas en contradiction avec les règles

65
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

de la charia, ce qui signifie que tout ce qui n’a pas été expressément interdit par la
charia est autorisé102. C’est une formulation proche de celle de l’autonomie de la volonté,
limitée simplement par l’ordre moral.

La possibilité d’ajouter des clauses en convenance avec les désirs des contractants est
par conséquent très limitée, cela est illustré par les clauses adjointes.

 Les clauses adjointes

Ce sont des clauses contractuelles qui s’ajoutent aux dispositions spécifiques du contrat
type. Or l’existence de ces clauses est à l’origine d’un nombre de controverses doctrinales.

En théorie, ces clauses sont inefficaces, elles réduisent le champ de liberté contractuelle,
au nom du principe fondamental de l’unité interne du contrat, or il est fondamental pour
certains de n’avoir un contrat dans le contrat. Les écoles ont au fait, des points de vue nuancés
sur la question.

Les chaféites et les malékites admettent l’existence de ces clauses dans le contrat, alors
que les hanafites ne font que les tolérer. Un point de vue inspiré par l’école dhahirite (école
peu représentée actuellement dans le monde musulman),

« Il n’est pas permis à la volonté humaine de façonner à sa guise les actes juridiques et
d’en fixer le contenu […], il n’y a pas de place dans le fiqh pour l’autonomie de la volonté
»103.

Même dans le cas de leur acceptation, elles subissent des limitations pour ne retenir que
celles relatives à la morale et aux textes religieux. Ainsi, par exemple, il n’est pas permis de
réunir un prêt et une vente, ce qui revient à stipuler deux conditions dans une vente et vendre
ce que l’on ne possède pas actuellement104.

Ces controverses rendent difficiles la mise au point des contrats même sur les sujets
relativement simples, et surtout, elles accroissent l’insécurité juridique des relations d’affaires.

La liberté contractuelle apparaît ainsi très limitée, la règle générale étant que « tout
accord de volonté est efficace pourvu qu’il ne déroge pas aux principes préétablis » 105. Or les
modalités de réalisation des contrats sont strictement encadrées par la loi, ce qui rétrécit le
domaine d’action supposé être libre.

2. Les difficultés
102
-cf. Comar Obaid, les contrats en droit musulman des affaires, p.39
103
- ibid p.36
104
- Sanhoury, T.III, p166, cité par Comar Obeid, op.cit. p.39
105
-Chehata ch, Essai d’une théorie générale de l’obligation en droit musulman, op, cit., p.105
66
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Les difficultés d’interprétation s’étendent aussi bien à la définition des produits islamiques
qu’aux concepts utilisés et aux principes d’interprétation.

2.1. Les produits

On expose ici à titre illustratif les divergences concernant les produits salam et mourabaha.

 La vente Salam

L’école hanafite très exigeante quant à l’existence de la chose objet de la vente, de la


conclusion du contrat à la livraison. Pour les hanafites enfin, l’objet doit être largement défini
et il peut être présent au moment de la livraison.

Pour l’école chaféite, si la chose est bien déterminée, bien qu’elle ne soit pas présente au
moment de la vente, le contrat est valable.

L’école malikite quant à, considère que la vente peut porter sur tout objet qui se pèse ou se
mesure. La présence de l’objet n’est pas nécessaire lors de la conclusion de contrat, et même
le paiement peut être différé jusqu’à la livraison.

 La mourabaha

C’est la technique la plus utilisée. Elle fait cependant l’objet d’un nombre de critiques :

- Les promesses d’achat et de vente sont illicites dans la mesure où elles imposent des
obligations incontrôlables puisque l’acheteur promet d’acheter un bien qu’il n’a pas
encore vu et que le vendeur promet de vendre alors qu’il n’en dispose pas ;
- Si le prix différé est plus élevé que le prix au comptant, cela reviendrait à la
rémunération d’un prêt, une pratique entaché de riba ;
- En pratique, des pénalités sont facturés en cas de retard de paiement alors que le
débiteur devrait en être exonéré;
- En définitive, le mourabaha permet un contournement de la Shari’a, c’est une
opération de crédit déguisé, le montant de l’échéance est fixé à l’avance, et la marge
est certaine au défaut de paiement près.

A ces critiques, s’ajoutent les discussions sur la pratique du double Mourabaha,


opération largement pratiquée par les banques islamiques et qui font, pourtant l’objet de
controverses doctrinales.

En quoi consiste la double mourabaha ?

Sur proposition d’un client, la banque achète une marchandise pour la revendre à ce
client moyennant un paiement au comptant du prix (1ère mourabaha). Le client cède alors
immédiatement la même marchandise à la même banque, mais le paiement se fera cette fois à
une échéance ultérieure et le prix de la marchandise sera plus élevé (seconde mourabaha). Le

67
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

client perçoit donc à terme un montant plus élevé que celui qu’il a versé au comptant en
échange d’une immobilisation de ses fonds pendant une certaine période.

Certains y voient une vente au comptant pris à crédit, c'est-à-dire un placement à terme
de trésorerie rémunéré par un intérêt.

Une conférence à Dubaï en 1979 a mis en exergue les divergences des points de vue,
mais la majorité l’a considéré comme licite. Au fait, lors de l’achat de la marchandise, le
client ne s’engage pas à la racheter. Il s’agit plutôt d’une double promesse d’achat source
donc d’une part de risque de contrepartie puisque le client peut faire défaut.

Par ailleurs, la banque connue par le fournisseur, peut bénéficier d’un prix plus bas que
celui dont pourrait bénéficier le client.

Ainsi l’opération présenterait les deux caractéristiques de la finance islamique : la prise


de risque et le travail effectué.

Il est possible de raffiner l’opération en y insérant un ou deux intermédiaires : le client


demande à la banque d’acheter une marchandise pour son compte en tant qu’agent, celle-ci
s’adresse à un premier fournisseur qui vend la marchandise au client, ce dernier cède alors les
biens en question à la banque qui les revend à un tiers. Formulation bien que complexe, elle
est plus conforme au droit islamique des affaires106.

2.2. Les fictions juridiques

Tous les droits y ont recours, les procédés extérieurs au droit musulman sont utilisés à
condition qu’ils ne soient pas en contradiction avec lui. La coutume ne peut autoriser ce qui
est interdit ou défendre ce qui n’est pas autorisé, mais elle peut interdire ce qui est blâmable
ou rendre obligatoire ce qui est possible ;

Cependant, certains profitent du vide textuel pour parfois introduire des pratiques
appelées ruses (Hiyal) qui permettent d’amoindrir la rigidité des règles.

Ces ruses ne sont pas défendues par toutes les écoles, elles sont admises par les écoles
hanafites et chaféites. Des montages juridiques sont ainsi construits permettant de résoudre
des problèmes précis.

 Conséquence au niveau de la pratique

L’ouverture sur l’extérieur et la recherche du compromis parfois impossible avec le


droit commercial positif, pousse certaines banques à adopter de formulations douteuses, ce
qui met en jeu la crédibilité de la Finance Islamique et sème la confusion chez les fidèles. On
cite à titre d’exemples :

106
-Cf. Francois Guéranger, Finance islamique, Dunod, Paris2009.
68
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Bien que la clause de la promesse qui oblige ne soit pas admise par les quatre écoles
islamiques, elle a été retenue par l’AAOIFI et appliqué par l’ensemble des banques islamiques
à l’exception de celles du Soudan, Bayt Tamwil Al Koweiti et en Arabie Saoudite, le courant
conservateur. On avance que les Malikis l’ont admise, ce qui n’est pas vrai puisqu’ils ne
l’admettent que dans les cas des dons (Tabarrou').

 L’application des majorations et pénalités pour non réalisation de la promesse dans les
délais, bien que prohibée par les quatre écoles, elle est pratiquée par la majorité des
Banques Islamiques, à l’exception du courant conservateur. Bien que les recettes qui
sont généralement affectées aux actes de bienfaisance, un tel choix est non-conforme à
la Shari’a.
 Selon certains plus de 85% des Sukuk sont illicites, parce que généralement ou bien ils
ne sont pas adossés, ou bien leurs propriétaires sont complètement détachés des biens
fongibles que représentent ceux-ci. La propriété des actifs sous-jacents, explicites et
tangibles, favorisée par les règles de la Charia devraient renforcer la position des
investisseurs en Sukuk en cas de liquidation ou de scénario de défaut de paiement,
mais dans la structuration de la plupart des Sukuk, les droits et les règles de transfert
(dans les contrats de Sukuk asset-based) ne fournissent pas contractuellement une
propriété robuste des sous-jacents aux investisseurs. L’objectif de l’émetteur reste de
répliquer de manière islamique une forme de dette conventionnelle107.
 Parfois, ils représentent des parts des Sociétés qui ne font pas de distinction dans leurs
activités entre Haram et Halal. Ils sont déconnectés de leurs actifs sous-jacents en
termes d’appréciation du risque, conduisant les Banques à investir massivement dans
des produits risqués ou prohibés, non admis par la Charia, mais très rémunérateurs108.
 Le financement de la liquidité (Tawarruq) est une opération prohibée par la Charia
pour les quatre écoles, alors qu’elle prend de plus en plus de l’ampleur au niveau
mondial. Elle conduit à des opérations de spéculations qui ne diffèrent en rien de la
finance classique.

A ces difficultés internes à la législation, s’ajoutent des problèmes des droits des États
nationaux.

3. Le droit interne des États islamiques


Les pays recevant l’investissement islamique ne sont pas soumis intégralement au droit
islamique. La coexistence d’un droit musulman et un droit laïque est la réalité qui couvre une
trentaine d’États à majorité musulmane regroupant plus de un milliard de musulmans.

107
-Cf. Anouar HASSOUNE, Sukuk : principes de structuration et opportunités pour l'État de
l’UEMOA, Dakar, janvier 2010.
108
Voir Farid MASSOUDI et Tarik BELABED, la Finance Islamique dans le contexte de la crise financière : opportunités et défis, Fiance.
Note pour Capmena, mars 2010.

69
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Pour réaliser le compromis, certains pays ont désigné des commissions chargées de
remplir cette mission, c’est le cas du Conseil de Surveillance de la Constitution en Iran et d’un
comité ad hoc au Pakistan.

Au cours du 19ème siècle et 20ème siècle, on a pu observer deux phénomènes dans


l’évolution du droit des États musulmans : d’abord l’occidentalisation d’une grande partie du
droit, ensuite la codification des matières qui avaient échappé à cette occidentalisation.

La vague de codification a touché plusieurs pays qui adoptèrent le code napoléon.


L’empire ottoman représentant le monde musulman à cette époque s’en est inspiré pour
faciliter ses activités commerciales avec l’Europe en 8151, mais pas en matière du droit civil.
La révolution Kemalienne va adopter par la suite une codification helvétique grâce à des
collaborateurs formés en Suisse.

En Égypte, le législateur s’est fortement inspiré du droit français, les fortes relations
entre les deux pays au 19ème siècle marquerait profondément ce changement.

Dans les pays du Maghreb, le colonialisme français a joué un rôle déterminant dans la
codification du droit dans ces pays.

La cohabitation des deux droits d’inspirations différentes est généralement difficile, ce


qui fait que les codes actuellement en vigueur dans les pays musulmans se référent
essentiellement à la Shari’a. Ce qui se matérialise par une séparation du droit civil du droit
commercial ; un droit civil applicable aux citoyens attachés à leur islamité, et un droit
commercial applicable au monde des affaires. Ce qui permettra d’adopter des règles qui sont
conformes aux habitudes internationales dans certains pays (cas du Koweït, d’Émirats Arabes
Unis, d’Oman) où la jurisprudence précise abondement les modalités d’application du droit de
commerce.

Parallèlement les banques islamiques sont tenues de respecter le droit islamique dans
leurs opérations financières. La souplesse devient la règle dans le droit islamique grâce au
recours à la coutume.

III. défis de la finance islamique dans le cas du Maroc


Le Maroc reste à notre connaissance le seul pays arabo musulman qui n’a pas vécu
l’expérience de l’installation des banques islamiques sur son territoire. A l’exception de
l’admission de certains produits « alternatifs » que les banques classiques ont offert de façon
très timide, au moment où la finance islamique est en plein essor, et où le surplus du
pétrodollar pourrait facilement être orienté vers le Maroc fort de sa stabilité politique et très
favorable par rapport aux autres pays arabes impactés par le printemps arabe.

1. Les divers handicapes

70
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Malgré la faible bancarisation et le souhait proclamé des citoyens marocains 109 de voir
l’installation des banques islamiques dans leur pays, les trois produits alternatifs 110 autorisés
au Maroc ont eu peu de succès.

1.1. Les prix bancaires chers

Le financement alternatif est plus cher de 26% pour la Mourabaha et de 86% pour le
produit Ijara comparativement au financement classique. En s’intéressant aux deux formules
commercialisées à savoir la Mourabaha et la Ijara wa Iqtinaa immobilière, en reprenant les
simulations faites par deux chercheurs marocains111, il s’avère que pour la Mourabaha, le
surcroît fiscal est de 4,5% et que le surcroît bancaire est de 48% (95% marge bancaire, 89%
frais d’assurance et 68% frais de gestion de Mourabaha).

Cherté du financement Mourabaha112

Montant en DH Financement Crédit Différence Différence Niveau


alternatif classique mensuelle Totale 20 du
ans surcoût
Financement 750.000 750.000
Salaire maximum 40% 50%
de remboursement
Période de 240 mois 240 mois
remboursement
Taux Marge Taux fixe
commerciale 5,5%
Mensualité HT 5.666,66 5373,69 292,97 70.312,80 44,76%
TVA (10% 254,16 224,87 29,30 7.031,28 4,48%
Mourabaha et
10%classique)
Mensualité TTC 5.920,82 5598,56 322,26 77.344,08 49,23%
(3=1+2)
Frais d’assurance 22.500,00 Incluse dans 22500,00 14,32%
la
mensualité
Frais gestion 57.250,00 ------------- 57.250,00 36,44%
Mourabha
157.094,08 100,00%

Pour l’Ijara wa iqtinaa, le coût est majoré de 86% par rapport au produit classique avec
une TVA de 20% appliquée sur le capital et sur la marge locative.

Cherté du financement Ijara wa Iqtinaa113


Montant en DH Financement Crédit Différence Différence Niveau du

109
Une étude récente du cabinet de Consulting Islamic Finance Advising and Assurance Services » (IFAAS) sur les opportunités du marché
marocain montre que 94% de la population marocaine est intéressée par les opérations islamiques, cf. www.ifaas.com
110
La Mourabaha, l’Ijara wa iqtinaa et la Moucharaka.
111
El OMARI ALAOUI Sidi Mohamed et MAFTAH Souhail, La finance islamique au
Maroc, Imrimerie El Maarif Al Jadida-Rabat 2012
112
Cf El OMARI ALAOUI Sidi Mohamed et MAFTAH Souhail, La finance islamique au
Maroc, Imrimerie El Maarif Al Jadida-Rabat 2012,p. 29.
113
-Cf El OMARI ALAOUI Sidi Mohamed et MAFTAH Souhail op.cit p.31
71
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

alternatif Ijara Classique mensuelles totale Surcroit


Taux Marge locative Taux fixe
5,50%
Mensualité HT 6.181,16 5.373,69 807,47 197.792,58 37,89%
TVA 20% (Ijara 1.236,23 224,87 1011,36 242.726,62
wa
Iqtinaa) et 10%
(classique)
Mensualité TTC 7.417,39 5598,56 ---- ----
Valeur résiduelle 75.000,00 0,00 ---- 75.000 14,66%
(10%)
511.519,9 100,00%
3

Le surcroît total de Ijara wa Iqtinaa = 86,16% : (511.519,93/593.654,16)

Cout total sur Ijara : Crédit Différence : Surcout


20 ans 1105174,08 classique : 511.519,93 86,16%
593.456,16
Surcroit mensuel (réel) 511.519,93/240mois = 2.131,33

La cherté de ces produits alternatifs est due en partie à la marge bancaire très élevée, ce
qui nous pousse à nous demander sur les raisons de cette excessivité qui nous parait
irrationnelle du point de vue économique. Et nous poserons la question suivante : quel est
l’intérêt dans la présentation de ces nouveaux produits s’ils ne sont pas compétitifs ou du
moins qu’ils présentent les mêmes conditions concurrentielles ? Les banques qui offrent ces
produits existaient déjà avec tous leurs équipements et infrastructure en place, aucune autre
dépense n’est venue s’ajouter avec l’adoption de ces nouveaux produits ! Et les risques
d’usage de ces produits sont presque inexistants du moins en l’absence d’utilisation du produit
Moucharakah (non adoptée jusqu’à présent au Maroc). D‘autant plus qu’ils sont orientés
particulièrement vers les opérations d’acquisition de biens immobiliers et des biens de
consommation, des opérations à risque presque nul.

Par ailleurs, la TVA supposée neutre ne l’est plus avec ces produits. En effet, au début,
les autorités fiscales ont considéré ces produits nouveaux comme faisant partie des activités
commerciales bancaires, par la suite ils ont été considérés comme des possibilités offertes
pour l’acquisition de biens mobiliers ou immobiliers.

Dans le cas d’Ijara wa Iqtinaa, il est retenu comme assiette de la taxe, la marge
bénéficiaire et le capital, ce qui rend l’assiette imposable plus importante - la TVA supportée
est donc impérativement beaucoup plus élevée.

Ainsi dans le cas d’acquisition de bien immobilier par Ijara wa Iqtinia, étant donné que
l’acquéreur est engagé dès le départ à acheter le logement pourquoi ne pas assimiler en
matière fiscale cette opération à une vente. La législation fiscale prévoit des réductions
d’impôts sur le revenu dans le cas d’acquisition, ce qui n’est pas admis dans le cas de l’Ijara

72
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

wa Iqtinaa, les mensualités sont considérées comme des loyers non déductibles de l'Impôt sur
le Revenu.

Par ailleurs, si le logement a été détenu pendant plus de 6 ans (LF 2013), le cessionnaire
bénéficie de l’exonération de l'Impôt sur le Revenu / profit immobilier. Par contre le recours à
l'Ijara wa iqtinaa par le cessionnaire est considéré comme une opération de location, le
cessionnaire ne bénéficierait donc pas de cette exonération.

2. La motivation religieuse
Si le choix de ces produits n’est pas motivé par des incitations économiques et fiscales,
il l’est encore moins du point de vu moral et religieux. L’offre des produits (alternatifs)
islamiques par les banques classiques n’est pas convaincante pour les pratiquants qui ont
l’impression d’acheter de la viande supposée halal à un boucher qui vend du porc.

Bank Al Maghreb, en interdisant l’utilisation dans la compagne publicitaire de


l’argument religieux ne fait que renforcer cette impression ; d’autant plus que la publicité
destinée à ces produits est presque inexistante.

L’absence de « Majliss Ouléma » dans le domaine de l’information, en prenant des avis


clairs quant à la conformité à la charia des produits financiers classiques et celles de la finance
islamique sème la confusion, et rend indécis le citoyen marocain.

3. Le faible engagement des autorités gouvernementales


La loi bancaire114 permet à Bank al Maghreb d’exercer un contrôle sur l’entrée et sortie
du marché bancaire, l’article 4 de cette loi autorise seulement les opérations bancaires dont
l’exercice n’est pas de nature à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence. Ave
l'introduction de la finance islamique, il y’a le risque d’introduction de banques géantes ce qui
peut déséquilibrer le marché bancaire national selon certains. Mais le risque est couru plutôt
par les quelques familles qui monopolisent le marché de la finance au Maroc est non par
l’économie marocaine qui a un besoin énorme en devises et en investissements.

L’absence d’étude profonde préparant l’engagement des autorités gouvernementales


décourage toute initiative et plonge aussi bien l’opinion publique que des autorités dans un
climat de doute et d’hésitation. Ce qui fait perdre au Maroc des opportunités énormes qui
pourraient favoriser son décollage économiques : le printemps arabe, la crise financière
occidentale et le recyclage du pétrodollar en excès grâce à la hausse des prix des
hydrocarbures et la réorientation des courants des placements financiers au niveau mondial.
Au niveau du parlement, on ne sent pas de force significative de l'engagement et de la volonté
de soutenir ce mode de financement ; à l’exception d’actes isolés et de simples lettres
adressées dans ce sens, et même le projet de loi des établissements de crédit prévoyant

114
Dahir n° 1-05-178 du 14 février 2006 Moharem 1427 portant loi n°34-03 relative aux établissements de crédit et organismes
assimilés .l’art.12 de cette loi interdit l’exercice à toute banque non agrée en qualité d’établissement de crédit.

73
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

l’introduction de la fiance islamique, demeure très timide et trop passif pour accorder les
encouragements nécessaires à la finance islamique115.

4. Le défi de l’introduction de la finance islamique au Maroc


Le Maroc doit tirer des enseignements des expériences des autre pays en adoptant un
système dualiste où cohabiteraient les deux modes de financement, ce qui ne l’empêcherait
pas de se glisser progressivement vers un système totalement islamique.

En Malaisie par exemple, où cohabitent les deux systèmes, on a vu le nombre des


banques islamiques augmenter de 2 à 11 banques entre 2001 et 2007.

Inversement le nombre de banques classiques a régressé de quatorze à sept. Le nombre


d’agence est monté de 800 à 807 durant la même période.

Le total des actifs a augmenté au cours de la même période en passant de 8,22% à


12,80%. Le total des financements a augmenté de 6,53% à 13,96% et les dépôts se sont
élevés116 de 9,50% à 14,02%.

Dans les autre pays tels, Bahreïn, l’Arabie Saoudite, et même dans les pays occidentaux,
la finance islamique connaît un essor énorme. Souvent les deux systèmes cohabitent sans
danger l’un pour l’autre, chacun présentant ses propres produits et certains présentant les deux
à la fois, et chacun à ses propres clients.

5. Créer un environnement favorable


Le gouvernement en Malaisie a proposé une panoplie de mesures attractives notamment
en matière fiscale en exonérant les revenues des experts étrangers en finance islamique, en
admettant la déductibilité fiscale des frais d’étude en finance islamique. De même en droit de
travail, il a été admis la possibilité de recrutement d’experts en finance islamique sans aucune
restriction, tout en créant un fond pour la recherche en finance islamique. Ce qui montre
l’engagement ferme de l’autorité gouvernementale et sa volonté de faire réussir ce mode de
financement.

De même en Europe, la dernière crise financière a piqué sur le vif certains pays,
convaincus de l’apport positif de ce mode financement. Ils ne se sont pas contentés d’observer
et d’attendre l’offre étrangère du système financier islamique, ils ont engagé un nombre
d’études et organisé des tables rondes, des colloques et des réunions avec des experts de la
finance islamique – ce qui les a convaincu de la nécessité de l’harmonisation des cadres
juridiques et fiscaux de leurs pays pour les accueillir.

La G.B a commencé cette harmonisation depuis le début des années quatre vint dix, une
avance de 10 ans par rapport aux autres places financières de l'Europe qui lui vaut une

115
Projet de loi relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, juillet 2012.
116
Cf El OMARI ALAOUI Sidi Mohamed et MAFTAH Souhail op.cit. p.56

74
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

installation de 22 banques islamiques en plus de cinq d’investissement et une banque de détail


entièrement conformes à la Shari’a.

La G.B a procédé à l’abrogation de multiples taxes d’enregistrement et de timbres sur


les hypothèques islamiques (L.F 2003), des mesures destinées à effacer les différences de
taxation entre les banques conventionnelles et les banques islamiques.

Elle a également introduit des dispositions visant à mettre les produits islamiques au
même pied d’égalité avec les produits classiques (LF 2005 et 2006). Avec la LF 0117, il y’a
eu clarification du cadre fiscale des Sukuk.

Sur le plan réglementaire, dès 0119, il y’a eu approbation de la Financial Service


Authority ; ainsi il a été élaboré un cadre réglementaire approprié dont notamment un
dispositif législatif pour la réglementation des Sukuk (décembre 2008), permettant ainsi de
faire un rapprochement entre les instruments de financement classiques et ceux de la finance
islamique. Des incitations normatives portant sur les principes comptables de l’Organisation
Internationale des Commissions de Valeurs (OICV) ont été introduites pour les adapter aux
pratiques de la finance islamique.

Cette réussite a séduit d’autres pays dont principalement la France pour qui, le
développement de l’industrie de la finance islamique est devenu une priorité. Le ministère de
l’économie de l’industrie et de l’emploi a ainsi, créé dans cet objet le « Haut Comité de la
Place » en 2007, et il a adopté une série de mesures accompagnant l’investissement et la
finance islamique en France.

Le Maroc n’a qu’à faire le Benchmarking, la réussite du modèle de transition de la


Malaisie peut être prise comme exemple et la prise de l’initiative de l’adoption du système en
Grande Bretagne et en France comme argument convaincant de l’apport positif de celui-ci, en
ces circonstances de crise de la finance au niveau international.

IV. Autres inconvénients de la finance islamique


Nous avons vu que la finance islamique possédait de réelles qualités pour endiguer les
crises. Cependant, elle comporte de réels inconvénients que nous allons étudier.

1. Manque le métrise sur le système actuel


La finance islamique est très jeune. Elle reste très minoritaire dans les opérations
financières qui s'effectuent chaque jour. Ainsi on peut voir qu'elle n'a aucune maitrise sur les
opérations de finance traditionnelle. En effet si une banque islamique n'a pas le droit d'investir
dans des CDO, la banque traditionnelle, quant à elle, n'est pas soumise à cette interdiction.
Elle n'a pas encore assez de poids par rapport à la finance conventionnelle.

Par ailleurs, on peut voir que la finance islamique ne prend pas en compte l'inflation.
Ainsi, on observe qu'en France, par exemple, les taux de rémunération sont fixés en fonction

75
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

de l'inflation. Les livrets se rémunèrent par rapport au livret A (l'actif sans risque), pour lequel
le taux dépend en partie de l'inflation. L'inconvénient que cela suppose est que lorsqu'un client
dépose une somme X sur son compte bancaire à une date T et qu'il récupère cette somme à
une date T+1, il perd de l'argent. Ceci étant dû au fait que les prix ont augmenté entre T et
T+1. Il perd donc du pouvoir d'achat. Ainsi la finance islamique ne permet pas de conserver
sa capacité d'achat sur une durée. Il faut noter que cette finance, restant minoritaire ne permet
pas non plus d'endiguer l'inflation. Effectivement, cette dernière est en partie causée par le
coût de l'argent sur les marchés monétaires. Or si l'on est une banque islamique on ne peut
empêcher les autres banques de se refinancer sur les marchés.

Enfin même si nous avons observé que le cadre juridique français se positionnait en
faveur de la finance islamique, nous ne pouvons pas dire que la législation soit adaptée à cette
dernière. En effet le cadre juridique de la loi de 1905 définissant les rapports entre l'Eglise et
l'Etat est peu compatible avec la charia.

Ainsi son statut de finance embryonnaire ne lui permet pas d'avoir un poids nécessaire
pour faire pression sur les banques classiques.

2. Le développement moins rapide que celui des banques


conventionnelles
L'un des aspects négatifs d'une banque islamique est sa faible capacité à se développer
rapidement. Cela s'explique par la structure de son bilan. Ainsi, nous pouvons voir que
l'essentiel des fonds propres d'un de ces établissements est constitué des dépôts des clients.
Ainsi une banque islamique, n'ayant pas le droit d'utiliser les leviers du refinancement, sera
contrainte de restreindre sa vitesse de développement. Ceci est pourtant en désaccord avec la
réalité. En réalité, nous pouvons constater, une croissance conjoncturelle de cette finance
extrêmement rapide. Cependant le rapport Arthuis, montre que cette croissance est
entièrement due à l'évolution des cours pétrole (dépendance à la filière financée).

De plus, on notera que dans le cadre de la gestion actif/passif, la banque islamique aura
du mal à pallier le risque de liquidités. En effet, le fait qu'elle n'utilise pas de produits de
refinancement (qui sont ribawi), l'empêche de couvrir ce risque. Ainsi, dans l'hypothèse où
tous les clients d'une même banque venaient à retirer leurs dépôts en même temps, la banque
islamique aurait des difficultés à les servir. Là aussi, la réalité nous fait mentir, cependant,
Anouar HASSOUN117 a affirmé dans un rapport sénatorial de mai 2008 : « bénéficiant à
l'origine des surliquidités du golfe persique liées au pétrole et renforcées par les effets du 11
septembre, la finance islamique, s'est orientée vers les années 1990 vers les particuliers ».
Cela montre bien qu'elle doit s'orienté vers une nouvelle cible pour pouvoir générer des
liquidités.

Ensuite, nous dirons que la finance islamique prévoit la fin du trading haute fréquence.
Comme nous avons pu le souligner les spéculateurs sont des « market markers ». Ils
117
- Anouar HASSOUN, les fonds propres des banques islamiques face aux exigences règlementaires, Paris

76
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

participent à la liquidité des marchés et les rendent plus attrayant pour les investisseurs. Ils ont
donc une utilité économique et financière. L'inconvénient de la finance islamique est donc
qu'elle freine l'évolution des marchés.

D'autre part, il est important de comprendre que le modèle économique des banques
françaises, est composé environ à 60% de la marge d'intermédiation (différence entre les
intérêts perçus et les intérêts versés). Elle représente une vraie source de revenus pour les
banques. Or la finance islamique ne permet pas la prise ou le versement d'intérêts. Cela
signifie qu'une banque islamique doit se priver d'une recette importante. Or on sait qu'une
banque qui fait des bénéfices peut investir, embaucher, prêter (grâce au renforcement des
fonds propres du à l'intégration des bénéfices dans les réserves) et payer son impôt sur les
sociétés. En résumé une entreprise bénéficiaire est une bonne chose au niveau économique.
On peut donc considérer la finance islamique comme étant un frein à l'économie, mais aussi
un frein au développement de ses institutions financières.

3. Elle n’est pas immunisée face à d’autres risques


Bien que la finance islamique soit immunisée contre les risques systémiques
directs« elle ne constitue en rien la panacée »118. En effet, elle n'est pas immunisée contre
certains risques.

Elle est, par exemple, exposée aux risques de concentration. Cela signifie qu'elle
s'expose à la défaillance d'une région, une filière, ou toute une profession. D'autre part, étant
donné qu'elle n'autorise pas l'investissement dans des activités haram. Elle ne peut pas se
diversifier autant qu'une banque conventionnelle afin de lisser ses risques. L'exemple est très
parlant, lorsque l'on sait que la finance islamique est très corrélée à la filière pétrolière. Ainsi
comme nous avons pu le voir l'activité financière (70%) islamique trouve l'essentiel de son
développement dans les pays du moyen orient qui sont exportateurs de pétrole. Or on a pu
constater que lorsque les volumes exportés par ces Etats augmentent les capitaux placé dans
des banques islamiques augmentent eux aussi119.

Par ailleurs, les institutions financières islamiques peuvent être exposées au risque
d'image. En effet elle reste minoritaire et peine à être prise au sérieux. D'autre part, son nom
évoque clairement ses fondements religieux. Ceci peut lui être préjudiciable, car cela lui
donne une image obsolète, décarrelée de la modernité du monde. Ainsi il est possible que cet
élément lui incombe à terme. Au demeurant, comme nous l'avons évoqué l'islam est une
religion qui souffre aujourd'hui d'une mauvaise image. Ceci étant dû, notamment, à
l'amalgame qui se fait (à tort) entre islam et terrorisme, depuis le 11 septembre 2001.

Enfin les risques que doivent supporter les banques islamiques sont très spécifiques.
Effectivement, la nature des prestations qu'elles servent influe sur les risques pris. Ainsi, si on
prend l'exemple du contrat moucharakah, on peut voir que la banque prend à la fois un risque

118
HASSOUN Anouar conférence à l'IAE de Lyon le 20 novembre 2009 : « cartographie de la finance islamique »
119
PASTRE Olivier et GECHEVA  Krassimira: « La finance islamique à la croisée des chemins »

77
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

de préteur mais aussi un risque entrepreneurial. Ainsi en fonction du contrat elle prendra un


risque différent.

De plus, on notera que le risque opérationnel est renforcé pour une banque islamique.
Ainsi, du fait de sa jeunesse et des contraintes juridiques qu'elle doit subir, les processus
établis ne sont pas assez usités pour avoir un recul suffisant sur leur efficacité. Afin de pallier
cette contrainte l'IFSB (Islamic Financial Service Board) tente d'établir des standards
internationaux. Ainsi l'AAOIFI (Accounting and Auditing Organization of Islamic Financial
institution), prévoit l'harmonisation des normes comptables internationales.

La finance islamique est un système qui cherche à endiguer certains aspects de la


finance conventionnelle. Cependant, nous avons pu voir qu'elle n'était pas forcément adaptée
à la finance classique. Par exemple, elle ne prend pas en compte l'inflation. En effet, nous
pourrons voir qu'à l'instar du système libéral (qui fonctionne uniquement dans un contexte de
concurrence pure et parfaite), la finance islamique ne pourrait fonctionner que dans un
contexte où la finance classique (qui représente la majeure partie des échanges) n'existerait
pas. Ce paradigme comporte ses avantages et ses inconvénients. En réalité, même s'il occulte
certains inconvénients spécifiques aux crises que l'on évoqués, il en comporte d'autres.

78
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Conclusion

79
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

La finance islamique a pour objet de développer des services bancaires et des produits
financiers compatibles avec la chari’a. Le caractère islamique d’un produit financier, ou d’une
transaction financière, est établi dès lors que le respect des cinq principes de la finance
islamique a été vérifié par un conseil de conformité à la chari’a.

Née dans les années 70, la finance islamique connait aujourd’hui un important essor à
travers le monde et s’impose de plus en plus comme une concurrente de la finance
conventionnelle:

- Le taux de croissance annuel de l’activité bancaire islamique est estimé


entre 10 et 15% ;
- Le total des actifs gérés par les banques et les compagnies d’assurance se
serait élevé à 1000 milliard de dollars fin 2009 ;

Devant cette croissance phénoménale et la multiplication des articles et débats autour du


sujet, de par le monde, il nous a été primordial d’étudier, dans son cadre générale, la finance
islamique.

Cette étude s’est, donc, intéressée aux bases et à l’essentiel de la finance islamique, elle
ne pouvait pas être exhaustive. Notre but était d’analyser les principaux mécanismes de la
finance islamique et de les comparer avec leurs analogues conventionnels.

Dans un premier temps, nous avons commencé par l’historique de la finance islamique
en mettant en exergue les phases de développement conceptuel et pratique de cette branche de
la finance éthique, et nous avons examiné les principes sur lesquels se base la finance
islamique en les recensant à cinq: trois interdictions (interdiction de la ribaa, du gharar et du
maysir et interdiction du secteur illicite <<haram>>), et deux obligations (obligation des 3P,
et d’adossement à un actif tangible). A travers le respect de ces principes, la finance islamique
peut concurrencer la finance conventionnelle dans la mesure où elle dépasse le seule rôle
d’intermédiation financière et reste attaché à l’économie réelle (et la dernière crise financière
en témoigne).
80
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Ensuite, nous nous sommes penché à étudier en profondeur les différents modes de
financement islamiques même les moins fréquents, en analysant leurs mécanismes de
fonctionnement. Ainsi, nous sommes passé par les produits basés sur le principe de partage
des pertes et profits (moudharaba et moucharaka), les produits basés sur le principe du coût
plus marges (mourabaha, ijarah, salam et istisnaa).

Et comme la taille du marché de l’assurance islamique « takaful » et les obligations


islamiques « sukuk »représente une part non négligeable dans le marché de la finance
islamique, respectivement 13.9 et 50 Milliard USD en fin 2010.

Dans un troisième temps, nous avons réalisé l’inventaire des risques en finance
islamique. D’une part, nous avons traités les défis d’ordre général comme la recherche de
profit et conformité à la shari’a, le développement de formation et l’identification d’un cadre
institutionnel, aussi les défis d’ordre juridique comme l’insécurité juridique de la finance
islmaique…D’autre part nous avons étudié les défis de le finance islamique dans le cas de
Maroc et autres difficultés qui peuvent être empêcher le système financier islamique comme
le développement moins rapide des banques islamiques par rapport aux banques
conventionnelles qui s’explique par la structure de bilan et tout banque islamique n’ayant pas
le droit d’utiliser les leviers de refinancement. Ainsi, la finance islamique n’est pas immunisée
contre certains risques comme des risques de concentration et l’interdiction de
l’investissement dans les activités illicites.etc.

Ce qu’il faut marquer c’est que la finance islamique n’est pas seulement un ensemble de
techniques remplaçant de manière « mécanique »certains techniques de la finance classique,
c’est surtout un esprit, une éthique, une moralisation du comportement de l’homme et une
prise de conscience plus accrue de notre mission sur terre comme elle a été définie dans le
Coran pour un future meilleur et pour une prise en compte plus systématique du long terme
dans toutes nos stratégies et dans tous nos comportements.

81
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Bibliographie
 Ouvrages

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http://www.doctrine-malikite.fr/Définition-et-historique-de-la-finance-islamique_a116.html .

Table des
matières
85
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

Remerciement 1
Sommaire 2
Introduction générale 3
Chapitre 1: représentation de la finance islamique 6
Section 1 : l’histoire de la finance islamique 7
I. le système financier islamique avant 2000 8
II. le système financier islamique après 2000 10
Section 2 : définition, ses principes et ses ressources 12
I. définition : la relation entre la finance, religion et morale 12
1. une finance étique et responsable 12
2. une finance équitable 13
3. une finance au service l’économie réelle 13
II. les ressources de la finance islamique 13
1. les sources principales 14
1.2. Le Coran 14
1.3. La sunnah 14
2. les sources secondaires 15
1.4. El Ijmâ 15
1.5. El Ijtihad 16
III. les principes de la finance islamique 16
1. la riba 16
 Prohibition de l’intérêt en Islam 17
2. Le principe de Partage des Pertes et Profits (PPP/3P) ou 18
Profit & Loss Sharing (PLS)
3. La thésaurisation 19
4. L’interdiction de l’incertitude des ventes et de la spéculation 20
(Gharar et Maysir)
5. Les activités illicites 21
6. La zakat 21
Chapitre 2: la finance islamique une alternative a la finance conventionnelle 22
Section 1: les instruments de financement des institutions bancaires 23
I. les modes de financements en capital 27
1. la mousharaka 27
2. la mousharaka décroissante 28
II. les modes de financements par dette 29
1. la mourabaha: financement basé sur le principe du cout 29
majoré
2. Mourabaha inversée : financement des acquisitions de 30
matières premières
3. L’Ijara : le crédit bail basé sur le principe du coût majoré 31
Ijara simple 31
L’Ijara wa-Iqtinaa 32
4. Crédit bail anticipé : L’jara Mawsufah Fi Dimmah 33
5. Vente à terme : La Vente Salam 33
6. L’Istitnaa 34
34
86
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

7. Qard al Hassan 35
Section 2: les instruments de financement des institutions non bancaires 35
I. sukuk versus obligations 37
II. takaful versus assurance 40
III. zakat et waqf 40
1. la zakat
40
1.2. Définition 41
41
I.3 Impact de la Zakat sur l'activité économique
42
 Zakat et soutien à l'investissement
43
 Zakat et soutien de la demande
43
 Zakat et soutien de l'offre
44
 Zakat et soutien de l'emploi
 Zakat et inflation 45
 Zakat et décentralisation de la répartition 46
2. le waqf 46
2.3. Définition 47
2.4. Types de waqf  47
 Le waqf public  47
 Le waqf familial ou - privé -  47
 Le waqf hybride  48
1.6. Les objectifs de waqf  48
 Un objectif moral  48
 Un objectif social  48
 Un objectif culturel  48
 Un objectif économique  49
Chapitre 3: les perspectives de la finance islamique 50
Section 1: actualités et enjeux de la finance islamique 50
I. état actuel du système financier islamique 50
1. taille du marché 51
2. analyse des performances du marché 51
2.2. Répartition par région 52
2.2 Répartition par taille 54
II. les enjeux de la finance islamique 54
1. une alternative a la finance conventionnelle 55
2. un catalyseur d’I.D.E 55
3. un levier de niveau de bancarisation 56
4. un apport socio-économique des produits alternatifs au
Maroc 56

4.3. Conserver l'équilibre social 57


58
4.4. Contribuer au développement économique du pays
58
III. actualités de la finance islamique
58
1. Attijariwafabank compte accélérer son offre de finance

87
La finance islamique et la finance conventionnelle, étude comparative

2. Selon S&P, la finance islamique dispose d’un fort potentiel 60


en Afrique du nord 
3. Finance islamique : quand Londres ambitionne d’en être
l’une des capitales mondiales, certains pays musulmans 60
trainent encore le pas
4. France : premières assurances-vie compatibles avec la 60
charia islamique 60
Section 2: les défis de la finance islamique 60
I. défis d’ordre général 62
1. Recherche de profit et conformité à la Charia 62
3.1. La nécessité de la réorientation de l’investissement
3.2. Gérer des passerelles financières et trouver des 63
dossiers d’investissements 63
3.3. Une création des « passerelles financières »
63
3.4. L’obligation d’assurer une meilleure standardisation
64
des produits
64
2. L’identification d’un cadre institutionnel
65
3. Développement de la formation
65
II. défis d’ordre juridique
65
1. L’insécurité juridique de la finance islamique
65
2.1. L’autonomie de la volonté
66
 Les positions des écoles juridiques
66
 Les clauses adjointes
66
2. Les difficultés
67
2.1. Les produits
68
 La vente Salam
68
 La mourabaha
69
2.2. Les fictions juridiques
70
 Conséquence au niveau de la pratique
70
3. Le droit interne des États islamiques
70
III. défis de la finance islamique dans le cas du Maroc
72
1. Les divers handicapes
73
5.1. Les prix bancaires chers
73
2. La motivation religieuse
74
3. Le faible engagement des autorités gouvernementales
75
4. Le défi de l’introduction de la finance islamique au Maroc
75
5. Créer un environnement favorable
76
IV. autres inconvénients de la finance islamique
1. Manque le métrise sur le système actuel
77
2. Le développement moins rapide que celui des banques
79
conventionnelles
82
3. Elle n’est pas immunisée face à d’autres risques
Conclusion
bibliographie

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