LE DOMAINE BANCAIRE
Christophe Godowski
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Col,rp'[aluffÉ - CoNrnôr.B - Auprr / Tome l0 - Volume 2 - Décembre 2004 (p. 179 à l9Q
C,brrisophe Gommlc
180 r.t DyNrAMrerJE D'AssIMIr-{noN DEs ÂppRocHEs plRAcrrvrrÉs DANs LE DoMAINE BANIcAIRE
Cette contribution s'inscrit dans un plan de recherche dont I'objectif est d'expliquer et de
comprend"re le processus de diffirsion des innovations managérides. Plus précisément, I'objet est déla-
borer un cadre conceptuel robuste avec pour ambition de pouvoir en extraire des préconisations en
matière de pratiques managériales visant à implanter des instrumentations de gestion. Même si cet ære
de recherche a fait l'objet de publications (Moisdon, 1997 ; David, 1998) dans les décennies précé-
dentes, il peut être considéré cornme récent, et donc peu développé. En effet, les recherches ont ssen-
tiellement porté sur des expériences denueprises visant à enregistrer les pratiques des acteurs sur le
terrain et à proposer une explication locale valide dans un cadre théorique spécifié (V'acheux, 1996).
Le processus d'accumulation des connaissances est à un tel stade qu'il semble opporrun de passer à des
analpes de moyenne porté€ afin de construire des savoirs sur une catégorie de problèmes empiriques
et théoriques. Dans cette perspective, une recherche a été menée visant à étudier la diffirsion des
approches par acrivités (APA) dans le secteur bancaire frangis. Is
avantages pour les établissements
de crédit à utiliser les APA semblent nombreux, IDur autant des études montrent qu il rfexiste pas
d'application probante de ces approches dans le domaine bancaire (Nalleau et Rouach, 1998). C,ette
situation soulève un dilemme qui peut êue formulé sous la quesdon suivante: Pourquoi une organi-
sation faite d activit& rencontre-t-elle autant de difficult& à adopter une représentation par activités?
Par l'intermédiaire de deux sections, I'artide tente d'apporter quelques éléments de réponse.
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Cbrisophe Gopcnvsrs
NDNAMIQI,JE D,ASSIMIANONDESÂPPRO.:HES PARACIIVTTÉS DANS LE DoMAINE MNCAIRE 18I
Figure 1
[a scission coûÊ financiers/coûB de gestion
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Au sein du compte de résulat, les frais généraux, et en paniculier les frais de personnel, ont un
impact substantiel sur la rentabilité des établissements de crédic Cette imporance n'est pas liée au
poids des frais généraux parce qu'ils sont beaucoup moins importants que les cota financiers et ce
quelle que soit la nanue de la banque (banque commerciale ou banque d'affaira). I^es frais généraux
constituent une variôle d'action imporante sur la rentabilité parce q" I t" différence do cotts finan-
ciers, les établissemena de crédit en ont un contrôle quasi-toal, iest-àdire que leur gestion n'est pas
soumise à des déas relatifr à des interventions entérieures comme celles des autorités monétaires. À ce
titre, leur identiÊcation et leur affectation elrx segments stratégiques conditionnent le suivi des perfor-
mances et de la rentabilité. Lintérêt d'une comptabilité analydque fine est d'autant plus fort que le
règlement CRBF 97-02 sw le contrôle interne, eu ûavers de fartide 20, précise gue u h sébæion des
ophations dz réditdnit tenir compte dz lzur renubilité m iaswrant que I'arulyse prêaisionnellz dzs charges
a prodaits, directs a indirects, soit Iz plus æhaustiae possiblz d porte notamTnent sur les coûts opêation-
des
nek et dz firuncemntt... >. Llne grande majorité d'établissements de crédit n'ont pas attendu ce r$le-
ment et se sont dotés d'un système de coûts dès le début des années quatre-vingts. Notre enquête
montre que 85 o/o des établissemenr en possèdent un. La plupan du temps, ce demier prend apprri sur
un découpage de I'organisation en Sections Homogènes ou en âlières de productio" (Cf Tablzau 1).
Tableau I
Nature du système de coûts bancaires antérieur aux APA
Sections Homogènes
Filières de production
M"lgré un degré de sophistication éleyé (Bessire, 1998), les contrôleurs de gestion interrog& émet-
tent des critiques sur les résultats obtenus avec les qrstèmes de cots uaditionnels. Les limites énon-
cées sont l'impossibilité de calculer la rentabilité, son manque de précision dans le cdcul et son carac-
tère non tranwersal (Cf Tabhau ).
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olo
lmposibilité de calculer la rentabilité d'un produit t4 61
Manque de précision 8 35 Vo
o/o
Système lourd 4 17
IJorigine des dysfonctionnements des systèmes canoniques de cotts est à rechercher dans la
proportion croissante de charges indireces dans les charges bancaires de fonctionnement. Il est diffi-
cile de chifter précisément la répanition des charges enre directes et indirectes. il s'agit de données
internes aux banques sur lesquelles elles communiquent rarement Selon les témoignages de profes-
sionnels et cerraines études académiques, il est admis que les charges indirectes sont prépondémntes
sur les charges direcres. Selon la nature de la banque, Bensoussan et Cdlandret (1994) ont chifté la
part des charges indirectes enue 50 etTO o/o des charges totales. Ces charges étant prépondéranæs Par
rapporr aux charges directes, leur affectation ne peut plus reposer sur les unit& dæuvre, qui étaient
utilisées lonque les charges directes étaient supérieures aux charges indirectes.
Les approches par activités constituent à ce titre une opportunité de changement permeûânt de
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CbLristophe Gooovslo
l DYI{AMIQUE D'ASSIMNANON DES APPROCHES PARACTTVITÉS DANS LE DOMAINE BANQ{IRE 183-
pallier a Priod les limites des qrctèmes canoniques de cotts. En plaçant une interface enrre les
ressources et les objets de cotts, la,méthode Aaiaity-Based Coaingdoitpermenre une meilleure répar-
tition des charges indirectes. Les activités ont lx>ur principal avantage de rendre moins arbiuaire faÊ
fecation de ces dernières dans la mesure où elles sont considérées comme des élémena déclenchant
les consommations de ressources. Audelà de cette caracéristique technique, des éléments contextuels
plaident pour une adoption des APA par les établissemena bancaires. En effet, les banques frangises
pr6ententlapanicularité de posséderles mêmes caractérhtiques que les entreprises indusaielles ayant
réussi l'implanetion de cette innovation de gestion. Comme le montre l'étude de Sephton et Tevor
(1990), elles interviennent sur des marchés hautement compétitG caractéris& par une diversité des
produits et des dienrc. Par ailleurs, les Ëais généraux sont significatifs et difficilemenr ranachables à
des unités de production. Il semble ainsi légitime pour les banques d'utiliser les approches par acdvi-
t&. Ce point de vue est confomé par une analpe théorique. Pour une organisation, il .st primordial
que le qrtème de production soit en cohérence avec le système de cotrs (Mevellec, 1996).Iæ qntème
de production bancaire se situant dans une phase transitoire entre le modèle de la variété et le modèle
de la râctivité (Godowski, 2000), le qrstème de cotts doit prendre appui sur un découpage de l'or-
ganisation en activités ou processus pour que cette cohérence eniste.
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Cbristophe Gooovslc
l$/L IÂ DYI.{AMIQUE D'ASSIMIIÂNON DESAPPROCHES PARACTTYTTÉS DANS LE DOMAINE MNCAIRE
Figure 2
Résultats généraux de I'enquête
107 établissements
27 établirsements répondants non-répondans
l8 banques
9 banques adoptantes non-adoptantes
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Une analyse plus fine des questionnaires de la population des établissements ayant adopté les
approches par activités révèle un taux de mise en Guwe faible. Seulement 3 des 9 établissements âyant
débuté un projet d'implantation des APA les utilisent de manière concrète, iest-àdire comme un
insrrument à destination du contrôle de gestion $ratégique (Cf Figare 2. Ni la dirnension spatide
(taille de I'entité concernée par I'implantation), ni la dimension temporelle (date de début du projet)
riappoment d'explications à ce constat de difficile mise en æuvre pour les 6 autres établissements. Il
apparait même que les 6 riutilisant pas de manière concrète les APA ont débuté le projet dimplanta-
tion avant ou en même temps que les 3 ayantterminé l'implantation. À I'instar de l'étude de Ness et
Caanzza, (1995) et de celle de Krumwiede (1998), notre enquête met en &idence fexistence d'un
problème de diffirsion au sein de forganisation. Il s'agit plus dun problème d'assimilation de l'ins-
trumenrarion par I'organisation que d'un problème de diffirsion de l'idée. Ce constat incite à identi-
fier les obstades qui existent porrr mettre en æuvre les approches par activit& dans les banques fran-
gises.
Même si fenqu&e n'est pas la méthodologie la plus adaptée pour émdier les choix techniques en
marière de qrstèmes de cots* et même si la faiblesse de l'éc.hantillon limite la validité externe de
l'émde, l'exploitation des questionnaires recueillis fait nalue des expériences percepilelles (Blaug,
1994). Concernant les caracéristiques des q/stèmes de cotts par activités mis en place, les expériences
perceptuelles doivent être interprét& avec prudence pour deux raisons. D'une part, le questionnaire
constitue un inconvénient vis-à-vis de la véracité des déclaratifs. Les établissements udlisateurs des
APA donnent-ils tous la même signification à cette terminologie ? Afin de limiter ce risque, nous
avons joint à notre questionnaire un lexique3 définissant précisément ce que nous entendions Par
systèmes de cotts par activités et nous avons posé des questions sur les caractéristiques techniques
CordptrABûJrÉ - CoNrRôt E - AuDrr / Tome l0 - Yolume 2 - Décembre 2004 (p. 179 L 196)
Ckistophe Gooovsrc
r DYNAMIQUE D',ASSIMnÂIION DES Â?PROCHES PARACTTVTIÉS DANS LE DOI4AINE BANO{IRE 185
(nombre de processus, dactivités, d'inducteurs). D'autre part, bien que convenôle
F)ur une enquête
par voie posale, le taux de réponse de 20 o/o ne nous a permis de recueillir que 27 questionnaires4, ce
qui constitue un échantillon restreint poru en tirer des condusions.
Tableau 3
Objeaifs assignés lors de I'adoption des approches par activités
La question a été posée aux 9 établisemenB ayant adopté les approcha par activit6 et au( 1 1 envisageant de le faire
Corlp'renurrÉ - C-oxrnôt.t -Arprr / ïbme 10 -Volume 2 - Décembæ 2004 (p. 179 t l9Q
C,bristophe Gooowre
186 I"A, DYI{AMIQUE D',ASSTMIT-ÀnON DES APPROCHES PARACrIVTrÉS DANS LE DOMAINE BANCÆRE
Pour 20 observations, nous avons obtenu 98 réponses, soit en moyenne pratiquement cinq objec-
tifr par prqet (Cf TableauJ). Compte tenu des critiques formulées à I'encontre des systèmes cano-
niques des cotts (impossibilité de calculer la rentabilité selon faxe produit, manque de précision dans
le calcul), on pouvait supposer que I'objectif assigné au projet dimplantation des APA était de calcu-
ler le cott de renient des produits et des seryices. En éablissant le rappon entre le nombre de citations
pour un objectif et le nombre d'observations, on constate que 80 o/o des établissements donnent
cornme objectif à cette insmrmentetion de calculer des cotts et des marges. Cependant, ce constat
doit être relativisé. En reprenant la spécification des us€es des APA dressée par Bescos et aL (1999)
différenciant la maluise des cotts et des marges, du pilotage et de l'amélioration de forganisation, il
est possible de classer les objectifs en eutant de catégories (Cf Tabhau 4).
Tableau 4
Classification des objectifs assignés aux APA
Obiecdfs organisadonnels
- calcul des coûts des produits - Analpe des activités - Outil de pilotage
- calol des cotE des activités - ChangemenB organisation- - Benchmarking
- Mise en conformité avec la nels - ldentification de tableaux de
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Fréquence/au
nombre de chations
Le fait de distinguer les objectG techniques des objectG organisationnels et managériaux permet
de constater que ces derniers prévalent statistiquement à ceux dordre technique. En effet, on constate
que les objectiÊ suatégiques sont cit6 à hauteur de 42.9 o/o alors que les objecdfs techniques ne le sont
qtià hauteur de 35.7 o/o. Il ressort de cette analpe que le cott ne repr&ente un intérêt que s'il sert à
accomplir un objectif qui dépasse le simple calcul. Il doit exister une phase complémentaire à celle qui
permer de déterminer le cott de revient. Cette phase complémentaire est reladve à I'utilisation du
système de cotts dans une optique de contrôle visant à orienter les décisions stratégiques. Lors de la
phase d'adoption des APA, il apparalt que I'instrument peut avoir d'autres utilisations que la simple
fonction méuologique. Cette idée de faire des APA un moyen de déclinaison de la stratégie en actions
opérationnelles est précisée par la nature que les établissemenÉ donnent au qrstème de cotts prenant
appui sur les activités. Par l'implantation des APÀ les établissements à 66.6 o/o ne cherchent pas à
remplacer I'ancien système de cotts mais à en faire un s;rstème complémentaire. Iæs 3 éablissemena
cherchant à remplacer le système sont des entreprises ne possédant pas de qrstème de cotts antérieu-
rement à la décision dimplanter les APA
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Cbrisophe Gooovsre
IÂDY}IÂMIQIJE D'ASSIMIIÂNONDESÂPPROCHES PARACTTWTÉS DANIS LEDoMAINEMNCÂIRE I87
ffi sysrÈMEs À sAsr D'AcrrvrrÉs ET DrFFrcrLliÉs pouR DÉcRrRE
LORGANISATION ET ATTEINDRE LES OBJECTIFS MANAGÉruEUX
Plusieun questions nous laissent supposer que les établissements de crédit sonr enrrés dans les APA
par la porte de la méthode Aaiaity-Based Costing. Une première question sur les caractéristiques tech-
niques du système rêsultant de I'implantation des approches par activités a permis d'identifier le
nombre de processus, le nombre d'activités et le nombre d'induceurs (Cf Tablzaug. Dans 55.5 o/o
des cas, la cartographie repose sur un nombre inférieur à 20 activit& et dans 78 o/o dæcas à un nombre
inférieur à 50. Compte tenu de la complexité de I'entreprise bancaire, on peur considérer que le
niveau de granuloméuie est grossier.
Tableau 5
Gractéristiques des systèmes de coûts bancaires fondés sur les activités
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De surcrolt, le fait que le nombre d'inducreurs soit proche du nombre d'activités utilisées pour
découper l'organisation tend à rapprocher I'architecnrre des qrstèmes mis en place de celle des
systèmes à base d'activités décrits par Mwellec et Iæbas (1999). Enfin, la description des difficultés
rencontrées par les porteurs du projet d implantation met en évidence des difficultés essentiellement
techniques (Cf Tabhau 6).
Tableau 6
Les problèmes d'implantation des APA
48o/o des établissements mettent en avant des problèmes d'affecation et de répanition des charges
enue les activit& ainsi que des complications liées à l'informatique. Ces difficultés et les caracéris-
tiques techniques sont r&élauices d'un qrstème de cotts à vocation computationnelle. En effet, l'im-
pératif de calcul riautorise pas une cartographie uop détaillée des activités sous peine de construire
une usine ù9.b risque est dors de ne pas parvenir à alimenter le dispositif en informations du fait
d'une catence de capteurs au sein du système d'information. Les établissements bancaires auraient
alors fait le choix de procéder à des regroupements d'activités (en macro-activités). Le calcul s'en
rrouve simplifié mais I'affectation et lâ répanition entre destinataires perdent en précision pârce que
les cotts de la macro-accivité ne forment pas nécessairement un ensemble stable et solidaire; il en
résulte une homogénéité approximative, manifestée par une corrélation entre le cott d'une activité et
l'unité d'æuvre choisie (Bouquin, 2000).
Les 6 établissements n'ayant pas achevé l'implantation des APA mettent par ailleun en avant la
difficulté qu'ils ont à utiliser les APA comme un outil de pilotage. Lorsqu on les interroç sur les
inconvénienæ a postaiori, ces derniers parlent de difficile mise en (ruwe. Ils entendent par-là que les
objecdfs managériaux sont dimciles à aaeindre provoquant I'enlisement du projet.
Corr'rpmmrrÉ - CoNrRôLE- AuDrr / Tome l0 -Volume 2 - Décembre 2004 (p. 179 à l9Q
C[rristophe GoDovsr(
Iâ D}î{AMTQUE D',ASSrMrrÂnON DES APPROCHES PARACTTVTTÉS DANS LE DOMATNE BANCATRE 189
fonctionner qu'avec un compte courant. Ces produia, dont l'eristence séparée n apparait qu après un
stade du processus de uansformation, donnent lieu à des cotts jornts (common costs). Ces cotts s'avè-
rent difficiles à répefiir enûe les produits. Les méthodes traditionnelles prévoyaient deux modes de
répartition: par les quantités produites ou selon le critère de la valeur marchande. Mais, comme le
souligne G€r%is (2000), ces deux tyges d'imputation présentent un inconvénient majeur. L tép"rti-
tion des cota joints sur la base des quantitês, conduit à imputer I'essentiel du cott joint au produit à
quantités importantes et à faible valeur marchande. La répartition prenant appui sur la valeur
marchande conduit dans le cas de coûts spécifiques élevés par rappoft à la valeur marchande, à des
rentabilités négatives. I^a méthode ABC propose comme solution au problème de la répanition des
cotts joints la pertinence des inducteurs de cota. Ces derniers permettraient de mieux répartir les
cotts sur la base de I'existence de causes. Cela suppose implicitement que la consommation des
ressouroes e$ due à une cause principde. Or, par le biais d'un modèle économétrique, Thenet (1996,
1998) a démonué que le traitement des ûurgo en milieu bancaire infirme cette oonception. Létude
montre que le processr$ de consommation de ressources n'est pas imputable à un critère mais à un
<faisceau> de critères. Cette remarque peut également être appliquée au traitement des cotts
communs, iest-àdire aux chalges des services centraux. Au final, I'imputation de ce qpe de cotts
demeure un problème délicat et omplexe auquel laméthodeABC rfapporte qu'une réponse panielle
par le biais de la notion d'induceur de cott.
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CorrmA$l.rrÉ - CrNrRôt.n - AuDrr / Tome l0 - Volnme 2 - Décembre 2004 (p. 179 à 196)
Chrisophe Gooomrc
r90 I,A DYI{AMIQIJE D'ÀSSIMIIÂNON DES APPROCIIES PARACTWTTÉS DÂI.IS LE DOMAINE BANCÆRE
d implantation ds approches par activités. Rappelons que les expériences perceptuelles ont rér'élé une
implantation des APA par I'intermédiaire d'une application ABC (Cf paragraphe 1.3.4. Laverty
(1997) met en évidence que la métfiode Aaiaity-Based Costing*l'Actiaity-Based Marugemtnt srint
deux instrumenæ se différenciant par leur logique. Il s'oppose à la séquence historique d'implantation
visant à adopter fABC puis étendre I'application à fABM telle que la propose la plupart des tentes
consacrés aux approches par activités (Cokins, 1999). Une telle logique ne supg)fte pas la critique
dans la mesure otr pour éviter de tomber sur l'écueil de I'usine à gaa l'adoption de la méthode ABC
implique une cartognphie d'activités peu détaillées. À I'inverse, en tant que pratique de management
visant à l'amélioration des performances par la conception et le pilotage des produia, I'ABM nécessite
un niveau de granulométrie uès Ên. En conséquence, en irnplantant d'abord I'ABC puis en poursui-
vant par I'ABM, le concepteur du qrstème se doit de restrucnrrer la cartographie des activités en écla-
tant les macro-activités utilisées pour affecter les charges de manière moins arbiuaire en activités
élémenaires. Liobjectif est dors de les étudier en déail et de s'intéresser aux mécanismes de coordi-
nation existant entre les différentes activités. L*tty Q99n considère donc qu il est préférable d'in-
verser la logique d'implantation en profitant de l'investissement en collece et structuration des
données à laquelle conduit I'ABM pour simpliÊer et rationaliser la réalité. Cet effort de rationalisation
est le prâable à la conception dun qrctème de calcul capable de uaduire la complexité. Les cotæ de
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'
Une interprétation de I'assimil,ation des APA
dans le domaine bancaire
Notre enquête auprès des éablissements de crédit a mis en évidence un problème de diffirsion intra-
organisationnelle, c'est-à-dire qu il existe des difficultés pour transformer fidée en une réalisation
conaète. De nombreux établissements de crédit ne parviennent pas à faire des approches par activit& un
oudl à desdnation du contrôle de gestion snatégique. Le fait douwir la boite noire que constituent les
APA offre une grille dinterprétation des difficult6 renconuées par cercaines banques pour les implanter.
Idntifcation du niaeau
de découpage dc lbrganisatîon
Nivcan tec.hnique
Lors de la conception du qrstème de cotts, la première étape est de définir le niveau principes de
gestion, iest-à-dire les fonctionnalités que fon donne au qntème de cotts. Lors de l'implantation du
qrstème de cotts bancaires, I'objectif était de répondre à la question u combien ? u, c'est-à-dire de
connaître le cott des produits et services délivrés. À partir de ce but, un niveau organisation a été
défini. Il consiste à découper forganisation en sections homogènes ou en filières de production. Enfin,
un niveau technique a été mis en place afin de déterminer une règle d'affectation des charges. Cene
demière affecre les charges indirectes en utilisant la corrélation.
IJémergence des APA a constitué une opporrunité de changement du système canonique initié au
début des années 1980. Dès lors, la modification du système de cotts doit suiwe une démarche
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C,bLristophe Gooomre
192 t.e Dy\IAMIeuE D'AssIMIIânoN DEs AppRocHEs pARAcrrvTTÉs DANs LE DoMATNE BANcATRE
Conclusion
Par cette contribution, nous evons mis en évidence que le problème de diffirsion des instrumentations
de gestion se devait d'êue traité plus largement qu'au simple niveau inter-organisationnel. I-e cas des
APA dans le secteur bancaire français révèle des problèmes intra-organisationnels dassimilation. Dans
cette perspective, il est impératifde ne plus considérer finstrumentation de gestion comme une bolte
noire mais comme un ensemble déléments en interaction qu'il convient de meme en cohérence. À
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4. Compte tenu des biais pouvant exister entre le BouQtrw H. (I99n, Contpabilité dz gestiaa Paris,
Sir.y.
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Col,s,remJrÉ - CoNrRôlE - Àrorr / Tome l0 - Volume 2 - Décembre 2004 (p. 179 à l9O
C,bristophe Gooovsrc
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