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La confiance en soi
Couverture
Titre
Plan d’autoformation
Exergue
Introduction
◗ Savoir relativiser
◗ Être combatif
◗ Se préparer
◗ L’enfant excessif
◗ Le désir
◗ L’accoutumance
◗ L’ambiance
3.3 La tranquillité
2. Devenir adulte
2.2 Le self
◗ Aire aveugle
◗ Aire cachée
◗ Aire inconnue
4. Susciter la confiance
◗ Pouvoir rebondir
◗ Responsabiliser
◗ Le complexe d’insécurité
◗ Niveau atteint
Conclusion
La confiance en soi
EXERCICE 5. Se déculpabiliser
CORRIGÉS
Corrigé de l’exercice 1
Corrigé de l’exercice 2
Corrigé de l’exercice 3
Corrigé de l’exercice 4
Corrigé de l’exercice 5
Corrigé de l’exercice 6
Corrigé de l’exercice 7
Corrigé de l’exercice 8
Corrigé de l’exercice 9
Corrigé de l’exercice 10
Corrigé de l’exercice 11
Corrigé de l’exercice 12
Lexique
Bibliographie
Copyright
Comment tirer le meilleur parti de cet ouvrage ?
Cet ouvrage a pour vocation de vous accompagner dans votre développement personnel et
professionnel.
Pour profiter au mieux des ressources de cet ouvrage, l’auteur a conçu un plan
d’autoformation personnalisé qui vous conduira, étape par étape, à la maîtrise du sujet
traité. Ce plan d’autoformation se trouve page suivante.
Bien entendu, vous pouvez également choisir de découvrir cet ouvrage de façon habituelle,
en vous appuyant sur la table des matières que vous trouverez en page 5.
ous espérons que cet ouvrage vous rendra les meilleurs services dans vos activités
N professionnelles et personnelles. N’hésitez pas à nous écrire pour nous faire part
de vos remarques, critiques et suggestions :
ESF éditeur – Service Lecteurs
SAS Cognitia
20, rue d’Athènes
75009 Paris
Plan d’autoformation
Pendant que les grands groupes s’emparent de la confiance pour nourrir leur
communication institutionnelle et consolider leur image, il n’est pas moins paradoxal
d’observer que le commerçant indé-pendant ou l’artisan n’a guère d’autre ressource que
d’établir avec son client un rapport de confiance s’il veut exister en fidélisant une
clientèle de plus en plus convoitée. La confiance est devenue le nerf des affaires pour
tous les acteurs, puissants ou isolés.
Dans la vie sportive le facteur confiance est aussi au centre de toutes les
préoccupations : confiance entre les joueurs ou les athlètes, confiance dans
l’entraîneur, confiance des dirigeants, tout indique qu’un rapport étroit est à
prévoir entre niveau de confiance et chances de réussite.
Au plus haut niveau, un coach comme Gérard Houllier, ex-manager de Liverpool, ex-
coach de l’équipe de Lyon, multiple championne de France, est représentatif de cette
génération d’entraîneurs qui a travaillé inlassablement à créer les conditions de la
confiance, convaincus qu’ils sont que la confiance, le « mental », est une clé décisive
des succès dans la haute compétition.
Au forum de Davos en 2007, les experts ne pouvaient que constater la contestation qui
monte en Occident contre une redistribution de plus en plus inégalitaire des fruits de la
croissance. Klaus Schwab, créateur du World Economic Forum déclarait : « Nous vivons
dans un monde schizophrène, de plus en plus complexe, difficilement
compréhensible ».
Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS notait début 2007 : « Les Français ne
croient pas du tout au discours patronal »13.
Un sondage réalisé par TNS Sofres pour Altedia montrait en 2009 qu’une cassure était
en train de se produire entre les salariés français et leurs employeurs : perte de
confiance dans les dirigeants, mais aussi perte de confiance dans les syndicats. Le
malaise semblait plus aigu dans les grandes entreprises que dans les PME. Selon
Xavier Lacoste, les incompréhensions sont telles que la rupture paraît consommée.
Symptômes associés : désin-vestissement du collectif, repli individualiste, même si les
rapports avec les managers de proximité sont moins en cause. Le sentiment d’injustice
dégrade la confiance : 73 % des salariés pensent que les écarts de salaire entre
dirigeants et employés sont injustifiés14. Faut-il ajouter que le contexte de crise qui s’est
installé en France et en Europe n’a rien arrangé ? Un autre sondage IFOP-Le Monde de
janvier 2010 stigmatisait la défiance qui transcende les clivages sociaux et politiques en
France et au Royaume-Uni, notamment à cause du désamour entre les banques et
l’opinion. L’affaire des super bonus a laissé des traces15…
La confiance a donc des leviers : elle est enracinée dans la volonté, elle
est une affaire d’état d’esprit mais aussi de méthode et de rigueur. On n’est
pas à n’importe quel prix son meilleur allié. Elle est sûrement un
phénomène moins mystérieux qu’on se plaît à le dire. Elle est aux antipodes
d’une fatalité. Travailler en confiance et avec confiance apparaît ni plus, ni
moins comme un élément fort et significatif de notre capital personnalité.
Bref, notre singularité tient en grande partie à notre manière d’être en
confiance, de susciter la confiance, de la partager et de la maintenir.
« Moi, c’est clair, je préfère le combat », avoue Raphaël Ibanez, ex-capitaine de l’équipe
de France de rugby, vainqueur en 1998 du Grand Chelem dans le tournoi des Cinq
Nations. « J’ai toujours voulu être rassembleur et prendre sur moi. Mais je ne suis pas si
inquiet […] C’est peut-être grâce à mon éducation. On m’a appris à toujours avoir
confiance. Je suis tout à fait conscient de nos limites […] J’ai évidemment réfléchi à la
façon d’aborder les nouvelles échéances sportives. Je vais changer deux ou trois
choses […] Le reste fait partie de la vie et je suis optimiste en général […] Mon objectif
prioritaire, ce n’est pas d’être aimé […] On joue pour gagner, gagner est une joie25. »
Près de dix ans plus tard, en janvier 2007, Raphaël Ibanez demandait à ses équipiers
d’être « francs dans le combat » avant d’affronter et de vaincre les Irlandais. Et il
avouait : « Aujourd’hui, il y a plus de maturité chez moi, même si à l’intérieur ça
bouillonne toujours. Disons que j’essaie de mieux me contrôler devant mes
partenaires26. » Devenu entraîneur de l’UBB (Union Bègles Bordeaux) depuis 2012, il
marche toujours à la confiance, l’orgueil et la fierté. En 2016 après une 7e place en
championnat, il défendra son équipe face aux critiques des journalistes et après avoir
boudé les conférences de presse, Raphaël Ibanez se livrera à l’exercice musclé de
quelques mises au point pour rétablir des vérités. L’homme derrière le manager est
resté pugnace.
« J’ai toujours eu un fusible de protection dans la tête : s’ils ne veulent pas de moi ou
me virent au bout de quelques semaines, je m’en fiche, je reviens en France faire le film
que j’ai envie de faire. Et bien sûr c’est comme ça qu’on décroche presque malgré soi
les boulots les plus impossibles (...)
Dans cette aventure américaine, j’aurais appris à me battre de la même façon mais
puissance 1000. Je suis devenu comme un chien qui ne lâche pas son os. Pour cela, j’ai
appris le jeu d’échec hollywoodien, le sens du mot “pouvoir”, appris à rester positif
contre tout, contenir l’émotionnel, à me forger des nerfs en acier trempé, à résister aux
pressions les plus fortes, à survivre aux rumeurs et aux mauvaises nouvelles
quotidiennes à ne jamais renoncer, à argumenter, à ruser. Bref, j’aurais appris pourquoi
tous les metteurs en scène hollywoodiens sont des tyrans. Et tout ça dans le but de
préserver coûte que coûte sa vision et ses propres exigences de qualité. »
magique, parce qu’on croit que cela peut venir tout seul, que cela se
fait tout seul ;
fatal, parce qu’on ne dit pas comment ça fonctionne, que le secret de
la réussite est bien protégé et qu’on a l’impression que certains en
détiennent les clefs sans pouvoir s’expliquer alors que d’autres
semblent subir les événements.
En fait, le mental tient pour une bonne part à la plus ou moins bonne
gestion de notre capital confiance. Une des pistes sérieuses est à coup sûr la
confiance en soi. Pour tout dire sommes-nous notre meilleur allié ? Car, on
l’a dit, la pression des enjeux, la nature des défis à relever, la remise en
cause des acquis, les avancées de la concurrence, les troubles sur les
marchés parfois en récession ou en crise, obligent à être vigilant, actif et
« costaud » dans nos têtes.
Il faut « aller chercher » ce qui ne vient pas à nous facilement.
Reste à regarder du dedans si nous sommes prêts à fonctionner dans un
monde qui durcit et change ses règles du jeu, exige toujours plus et
autrement. Il s’agit de garder les commandes et de choisir un cap tant pour
se défendre que pour saisir les nouvelles opportunités qui se présentent.
On peut compter sur soi à sept conditions. Il faut y voir autant de
chemins pour être vraiment son meilleur allié, c’est-à-dire pour mettre le
plus d’atouts et donc de garanties possibles dans son jeu, un jeu qui s’inscrit
dans un monde d’incertitudes mais aussi de riches potentialités pour qui
saura les saisir. La partie est donc à jouer. Mais c’est d’abord dans nos têtes
qu’il faut s’y préparer.
◗ Savoir relativiser
La tentation n’est pas rare de trop vite généraliser. Nous avons tendance à
partir de presque rien pour en déduire que nous sommes bons ou pas bons.
Ainsi, on généralise trop vite nos premières expériences. Pensons à cette
personne prenant pour la première fois la parole en public : elle éprouve des
difficultés et s’en sort mal à ses yeux. Résultat, elle estime qu’elle n’est pas
faite pour ça. Idem pour un découragement trop rapide lors des premiers
cours d’une langue étrangère.
Observons également cet élève qui ne se remet pas d’une mauvaise note
lors d’un premier test.
Gardons-nous aussi de croire qu’une première expérience réussie nous
met à l’abri pour la suite. On connaît des gens illusionnés par un premier
bon résultat qui ont tendance à rater toutes leurs tentatives ultérieures. à
croire que « c’est arrivé », on se trompe sur soi !
Au total, relativiser c’est se dégager du cycle euphorie-déprime. Pas de
panique !
Il s’agit de faire preuve de lucidité.
Relativiser ce n’est pas se contenter d’une vision nuancée trop « eau
tiède ». On sait que les moyennes ne veulent rien dire ; relativiser c’est
apprendre à faire la part des choses, voir vraiment ce qui va bien et ce qui
ne va pas. C’est se réalimenter à des penseurs comme Senèque : « il n’y a
pas de bien sans quelque mal ». Tout n’est pas rose mais tout n’est pas noir.
Dans un monde flou, incertain, parfois confus, nous perdons des repères
et nous sommes ainsi tentés de généraliser, c’est-à-dire d’exagérer.
Appelons un chat un chat : il n’est pas bon de crier avant d’avoir mal.
La lucidité se conquiert, elle conduit à relativiser en faisant la part des
choses. Les médecins au cours d’une épreuve de guérison savent observer
le patient qui relativise : il sait tenir compte des progrès et les apprécier à
leur juste valeur, il sait admettre le chemin à parcourir pour progresser.
Relativiser, c’est prendre de la distance, lever la tête du guidon. C’est
aussi oser regarder les choses en face pour, peut-être, mieux se préparer à
agir ou réagir.
On attend des dirigeants qu’ils sachent avant tout relativiser. à l’instar du
capitaine d’un navire, ils ne s’effraient pas à la moindre houle, ni ne se
laissent abuser par une mer trop calme.
Relativiser c’est être un acteur vigilant qui voit de quoi est faite la
réalité : cela lui permet d’anticiper, de prendre les meilleures décisions
(pourquoi prendre tant de risques pour un si faible profit ou pourquoi tant
attendre quand tout indique qu’il faut y aller !).
Arriver à relativiser, c’est apprendre à être son meilleur allié : ni
paniquer, ni s’enflammer trop vite, d’emblée. C’est par l’accoutumance
qu’on y arrive, après la prise de conscience et les enseignements tirés.
Quand nous ne savons pas ce que nous voulons et ce que nous allons
faire, nous ne sommes pas bien. On « gamberge ». à trop hésiter on se
détruit. Tergiverser lézarde la confiance.
Pour nous mobiliser et faciliter la concentration, gage de réussite dans
l’action, il est nécessaire de prendre le soin de fixer nos objectifs.
On a peu de chance d’arriver quelque part quand on n’a pas décidé où on
allait ! dit un proverbe.
On s’est aperçu que les gens costauds dans leur tête savent ce qu’ils
veulent. Ils ont fait le tri dans leurs intentions et ont su en transformer
quelques-unes en vrais objectifs :
⬥ Qu’est-ce qu’une intention ? C’est une idée que nous avons, comme
nous en avons tous (souvent des « bonnes intentions » !) Mais cela reste une
chose à laquelle on pense (la nuit, parfois) et qui à force d’y trop penser
peut nous traumatiser (il faut que je fasse des économies, il faut que je fasse
du sport, il faut que je fasse un peu plus de prospection…). Les gens
dépressifs ont des tas d’intentions dont ils parlent souvent mais ils vivent
avec de façon frustrante, sans pouvoir choisir les intentions qui pourraient
devenir justement des objectifs clairs capables de les mobiliser.
⬥ Qu’est-ce qu’un vrai objectif ? C’est une intention qu’on a traduit en
critère mesurable et échéancé. Exemple : il faut que je maigrisse devient :
« mon objectif est de perdre 3 kilos pour le 30 juin » ; faire un peu plus de
prospection commerciale devient : « mon objectif est de visiter trois
prospects nouveaux chaque semaine ».
Être son meilleur allié, c’est aussi dans cet ordre d’idée se bâtir un plan
d’action, c’est-à-dire se donner des objectifs de moyen : consacrer une
heure chaque mardi aux exercices, relire chaque jour de cours les théorèmes
appris, etc.
Se fixer des objectifs c’est bâtir son avenir, c’est être l’architecte des
efforts à réaliser mais pas n’importe comment. Pour aller plus loin, il reste à
hiérarchiser les objectifs : cela donne accès aux priorités (je sais que j’ai
trois priorités classées dans cet ordre pour ma semaine : terminer le projet
X, démarrer les réunions Z, rencontrer Madame B.).
Pour être son meilleur allié et avoir confiance, nous avons besoin de
structurer l’avenir immédiat par des priorités et des plans d’action. C’est
pourquoi traduire nos intentions en objectifs clairs est nécessaire. Sinon on
se disperse, on commence tout, on ne finit rien, on s’en veut, on s’énerve ou
on se décourage.
Il y a un temps pour réfléchir (choisir quelle intention traduire en
objectifs et selon quelle priorité ?) et un temps pour passer à l’acte (agir
selon des objectifs de moyen et un plan d’action).
Dernière observation : retarder la clarification d’objectifs c’est se laisser
aller à « essayer, envisager, s’efforcer, voir et revoir les problèmes… »
L’heure n’est plus à « essayer ». Il s’agit de faire. Pensons au pilote
d’avion qui n’essaie pas d’atterrir… au chirurgien qui n’essaie pas
d’opérer : l’un atterrit (selon un plan d’action : les procédures) l’autre opère
(selon un protocole mûrement répété).
Il y a un peu de violence à se faire pour se fixer des objectifs clairs
(chaque jour, chaque semaine, chaque mois…) et profiter des bénéfices :
une meilleure concentration et plus d’efficacité.
Les gens qui réussissent le mieux dans les périodes difficiles fonctionnent
comme des radars : ils écoutent et observent ; bref, ils sont ouverts sur
l’extérieur.
En effet, le mal le plus profond, c’est l’isolement, l’exclusion, le repli sur
soi. Pour avoir confiance en soi, il faut rester branché sur les autres et sur le
monde.
Égoïsme et égocentrisme sont de redoutables freins pour le capital
confiance en soi. À rester centré sur soi, on s’inquiète et on se méprend. Ce
qui se passe autour de nous, nous est nécessaire pour nous construire. Les
« je sais tout » sont en général de grands inquiets souvent victimes de
déboires.
Les gens qui ont confiance en eux interrogent, posent des questions. La
curiosité, au sens d’intelligence active et parfois naïve (ce n’est pas inutile
de se faire répéter quelques évidences en guise de conseils), est la meilleure
alliée de la confiance en soi. Interroger c’est s’informer, s’informer c’est
réduire l’incertitude. Réduire l’incertitude permet d’anticiper donc de
maîtriser de façon plus volontariste les changements comme les
événements, au lieu de les subir.
Certains voyageurs quand ils arrivent dans une ville, interrogent le portier
de l’hôtel, feuillettent des guides, causent avec le chauffeur de taxi : ils
travaillent pour eux parce qu’ils se « nourrissent » d’informations utiles.
C’est à ce prix qu’on gagne de l’assurance et qu’on joue pour soi (un
homme averti en vaut deux ! dit le dicton).
S’ouvrir aux autres c’est développer notre sociabilité (a-t-on toujours sur
soi notre carte de visite disponible… et facilement accessible !). La
sociabilité c’est oser provoquer des contacts, avoir un entregent suffisant.
C’est aussi décloisonner, partager, inviter des amis à sa table, boire un
verre. Bref, écouter la différence, aller voir ailleurs, lever la tête, sourire,
solliciter les contacts, aider, proposer ses services.
On a un mental costaud, quand on sait exister pour les autres : les
interroger, les entendre, leur parler, leur dire ce qu’il faut. On va mieux
quand on partage. Quand on cause, on s’aperçoit qu’on n’est pas seul à
avoir mal dans le dos, à être fatigué… ou gêné par les impôts. Çà n’a l’air
de rien mais cela rééquilibre par rapport à quelqu’un qui intériorise et ne dit
rien ! (on connaît le conseil : quand je m’écoute je me désole, quand je me
compare, je me console !).
Les coachs savent bien qu’il faut écouter et parler avec un champion en
phase de préparation. On devrait être plus présent auprès de quelqu’un qui
rencontre des difficultés. On oublie combien un simple coup de fil peut
faire du bien.
Bref, la confiance des autres est le meilleur aiguillon de la confiance en
soi : écouter, parler, échanger dans une juste mesure constituent les
passages obligés d’une bonne ambiance, d’un bon climat.
Si le ton est là : bonne humeur, optimisme, voire humour, c’est encore
mieux. Il arrive que ce soit le malade qui remonte le moral à l’entourage !
En tant que dirigeant nous nous devons de développer un parti pris
d’optimisme : c’est un carburant pour nos équipes et un stimulant pour ceux
qui en ont besoin.
S’ouvrir aux autres est nécessaire au moral et utile pour éviter les
malentendus. Il est illusoire à terme de croire que ne rien dire, tout cacher,
garder pour soi, puissent être la bonne voie.
Dans les affaires, en période difficile, il s’agit de retrouver pour tout le
monde, le goût et l’intérêt du terrain : vivre en réseaux, multiplier les
contacts, être présent partout, aller au devant, sortir… C’est seul dans son
bureau qu’on se fait peur…
◗ Être combatif
Les gens combatifs ont ainsi confiance en eux parce qu’ils savent qu’une
situation n’est sûrement pas définitivement perdue. Ils savent qu’ils ont une
qualité de réponse positive quand ça va mal, que le sort est contre eux ou
que l’adversité prend le dessus.
Être combatif, c’est savoir qu’on peut s’impliquer plus et prendre du
plaisir à résoudre, à se battre, à renverser une tendance. C’est rechercher le
challenge avec soi-même (ce projet qui a pris du retard, cela me stimule).
Les gens qui sont costauds dans leur tête, savent qu’ils ont des ressources
disponibles : j’ai de la réserve et je peux faire plus.
Une certaine accoutumance à la difficulté forge un moral de vainqueur
car l’adversité ne fait pas peur : elle incite à agir. Des périodes trop faciles,
une éducation trop « protectrice », un management trop « assistant » ont pu
parfois éroder le potentiel de combativité. Il n’est pas facile de retrouver la
« niaque »28, le « fighting spirit » ou tout simplement l’enthousiasme
nécessaire.
C’est comme dans le sport : que se passe-t-il quand on perd 1 à 0, quand
on joue à 10 ou qu’on a raté ses deux premiers essais ou manqué sa
première descente ? Inhibition (baisser les bras) ou sublimation (se
dépasser) ?
Avoir confiance en soi, suppose une vision forte et positive (tant qu’il y a
de la vie, il y a de l’espoir) et une approche pragmatique (voir le verre
plutôt à moitié plein qu’à moitié vide).
Les gens combatifs se focalisent sur ce qui marche et ce qui réussit. Ils
ont la passion de résoudre, de trouver la panne (à l’instar du mécano
automobile) pour que ça reparte. Bref, ils se dégagent des états d’âme parce
qu’ils ont horreur de perdre ou de commettre des négligences. Un bon
niveau d’exigence avec soi-même et les autres confèrent de la sécurité, de la
marge de manœuvre et donc de la confiance en soi.
C’est bon signe de ressentir que la difficulté nous stimule. Le plaisir et la
satisfaction sont au bout ; nous nous administrons ainsi la preuve que la
confiance est là : en relevant nos défis et en atteignant nos objectifs malgré
les contraintes et les courants défavorables.
À coup sûr les gens costauds, qui ont un mental fort exercent souvent
leur propre libre arbitre.
Il y a une grande différence entre tenir compte des autres et du contexte
et dépendre des autres et du contexte. Si nous sommes trop influençables et
vulnérables nous ressentons de plein fouet les contradictions, les injustices,
les provocations d’un monde assez chaotique et versatile.
L’actualité véhicule son cortège d’événements et pèse sur notre
inconscient : sans le savoir nous intégrons plus ou moins bien les peurs, les
menaces, les tentations, les drames surmédiatisés notamment par le fait
télévisuel des images qui défilent en boucle.
Ainsi, au quotidien, nous sommes plus ou moins sensibles au discours de
notre client, de notre voisin, de notre garagiste, de notre entourage familial,
de notre médecin…
Nous avons souligné que les gens costauds dans leur tête ne se replient
pas et s’ouvrent aux autres. Mais il y a un grand pas entre tenir compte des
autres et dépendre des autres (penser et faire comme eux… ou par rébellion
le contraire systématiquement).
C’est un beau voyage que d’exercer son libre arbitre, c’est-à-dire se faire
son opinion à soi : c’est un travail sur soi qui donne confiance. Nous avons
pu vérifier qu’il valait mieux suivre notre première idée que d’échouer avec
l’idée d’un autre… qui nous aurait influencé.
La morosité est malheureusement contagieuse… comme l’optimisme ou
la confiance. à trop entendre que le monde doute, à trop lire les sondages
qui établissent qu’une grande proportion de gens ont des craintes sur
l’avenir, à trop voir les titres des journaux on en arrive à penser comme tout
le monde.
Les critiques fusent plus nombreuses que les encouragements, le doute se
partage plus que l’optimisme. Bref, nous sommes très sollicités : on nous
donne à penser… et le prêt à penser peut nous anesthésier si on n’y prend
pas garde.
Nous avons nos chances pour nous faire notre idée à nous, nous en tenir à
nos objectifs, nous inciter à aller de l’avant et prendre le risque de
convaincre. Écartons-nous du discours des gens qui démobiliseraient un
régiment !
◗ Se préparer
La septième condition pour avoir un mental fort nous ramène sur un
terrain encore plus concret : la préparation.
Dans un monde hyperactif où on privilégie l’action, un danger nous
guette : ne pas investir assez de temps dans la préparation.
Difficile d’avoir confiance en soi quand on sait qu’on n’a pas ouvert son
dossier, quand on a mal préparé un entretien important, quand on n’a pas lu
le compte rendu de la précédente réunion ou que l’on a égaré l’ordre du
jour…
Se préparer c’est se respecter et en même temps accorder de l’estime aux
autres : c’est la preuve que l’on attache de l’importance à la rencontre.
Il serait dommage de ne pas profiter de notre expérience et de notre
expertise parce qu’on aurait été négligent dans la préparation.
Pour être à l’aise, avoir confiance en soi, se préparer peut aller jusqu’à
faire une répétition : se mettre « en bouche » ce que l’on va dire, tester les
slides de notre présentation « PowerPoint », s’entraîner à préparer quelques
objections, etc.
Pour le reste, mieux prévoir du temps pour préparer et inscrire ce temps
dans son agenda.
Quand on est en retard, mal organisé, c’est-à-dire mal préparé on n’est
pas au mieux de ses moyens, on gaspille des compétences, on doute… et on
fait douter son entourage. Dans le sport au plus haut niveau, la préparation
se conçoit quasi scientifiquement et participe largement à la qualité du
résultat.
En guise de conclusion, on peut affirmer qu’une bonne part de notre
réussite comme de nos éventuels échecs ne relèvent pas de la fatalité. On
peut même dire que plus l’adversité et la difficulté sont au rendez-vous plus
nous devons compter avant tout sur nous mêmes, être notre meilleur allié ;
seulement la confiance ne va pas de soi. On a vu qu’on pouvait vraiment
créer les meilleures conditions afin de « jouer à notre meilleur niveau ».
La dimension humaine de nos comportements n’échappe à personne.
Nous faisons avec nos forces et nos propres freins. Nous pouvons prendre
conscience de la réelle part qui nous revient dans notre capacité à lancer des
défis ou à défendre nos intérêts, comme assurer la pérennité des
organisations dont nous faisons partie.
Comme le suggère Sophie Pèters dans un billet du Monde, il faut
s’habituer désormais à « pouvoir compter sur soi ». Pourquoi : « parce
qu’on ne peut plus guère compter sur un monde extérieur qui se délite et
devient complexe à appréhender, il nous faut nous soutenir de l’intérieur et
compenser ce que le monde extérieur ne nous fournira plus, moins ou moins
bien. Il s’agit désormais d’apprendre à viser juste et de faire fructifier nos
patrimoines intérieurs (valeurs, ressources, compétences, talents…)… La
vocation de chacun est unique, tout comme sa façon de la réaliser… D’où
notre responsabilité de faire avec le présent, puisque le passé ne peut pas
être changé… Chacun a à choisir ce dont il veut être responsable29 ».
Et pour vivre en bonne intelligence avec nous-même et les autres, on peut
penser comme le suggère Marcel Proust, le célèbre auteur de À la recherche
du temps perdu :
« Il n’y a pas de réussites faciles,
il n’y a pas non plus d’échecs définitifs ».
progression ;
solidarité ;
initiative ;
maîtrise de soi.
3.2 Croire dans le dialogue : quand il est de bonne qualité, il installe la confiance
C’est ainsi qu’ils s’adressent au preneur d’otage alors que la situation est
intense au plan émotionnel. Par le dialogue, ils résolvent deux tiers des
affaires dans lesquelles ils interviennent. Preuve que la confiance mérite
d’être expérimentée plutôt que la violence… ou le laisser-faire.
Pour donner confiance, il faut faire passer quelque chose d’humain, c’est-
à-dire de l’espoir. Napoléon disait : « Je fais mes plans de bataille avec les
rêves de mes soldats. » La confiance vient dans un groupe quand on a créé
du lien, ce qui signifie qu’il y a des choses mises en commun, partagées,
sans soumission et dans le respect des différences. Pas facile, mais on peut
y croire.
Pour bien dialoguer, il convient d’assurer un réel effort d’écoute, un souci
de questionnement et de la vigilance à parler plutôt moins et après l’autre. Il
est bon de prendre soin de vérifier si on s’est bien compris. Et de ne pas
oublier que dialoguer, ce n’est pas chercher à avoir raison à tout prix ni
s’évertuer à vouloir montrer que l’autre a tort.
Une personne donne d’autant plus confiance qu’elle nous paraît légitime
dans son rôle. Et la légitimité à la base, c’est un mélange d’expérience, de
compétence reconnue et de résultats obtenus.
Si elle est évidente et flagrante dans certains cas (pour les sportifs, c’est
souvent le palmarès qui parle), il se peut qu’elle soit remise en cause ou
prise en défaut suite à des erreurs ou à des échecs.
La légitimité pour s’installer a besoin de deux leviers en attendant le
recours à la confirmation par les résultats :
la sincérité ;
la cohérence.
En conclusion, on peut confirmer que pour les managers, la confiance est un combat qui
vaut la peine d’être mené. La confiance, quand elle est là, est libératrice. Elle permet
une meilleure utilisation des ressources. Elle récompense le souci de l’humain avant
tout et favorise les ambitions de réussir quelque chose ensemble.
Il aurait été préférable de lui laisser faire une expérience (tout en contrôlant la situation
si le risque était vraiment grand). Ainsi l’enfant aurait vu de quoi il était capable : il aurait
vécu une épreuve pour son moi via une réalité toute banale. Et pourtant l’enjeu en terme
de construction du moi et les conséquences pour la confiance en soi constituent les
événements marquants au quotidien qui vont assurer l’étayage du moi. La force de
l’enfant, la confiance dans son corps, son agilité, sa souplesse, le plaisir du recours
possible à une conduite de détour, comme aller chercher un tabouret, bref le vécu de sa
propre intelligence de la situation, constituent des repères pour fonder la confiance en
soi. « Je vois que je peux y arriver si je veux l’objet. Si je ne peux pas je vais demander
de l’aide ». L’enfant expérimente ses talents et ses limites, sans drame.
Nous avons vu que la force du moi en devenir alimente au cours des trois
premières années de la vie la confiance en soi, celle-ci devenant la face du
moi exposée aux autres au quotidien. Le moi va s’éprouver dans la friction
au réel. Entre 3 et 6 ans, notamment à travers le nouvel univers de l’enfant,
l’école maternelle, les derniers étayages vont se réaliser : c’est la première
période intense de socialisation.
À 6 ans on peut dire que les vraies bases de la confiance en soi seront en
place. Cela peut surprendre, car pour le sens commun, on fait de la
confiance en soi chez l’adulte une sorte de produit, de conséquence, de
résultat lié à l’expérience ou à la maturité. « On pense mal » dit Arlette
Mucchielli. De 3 à 6 ans, l’enfant vit l’achèvement de la genèse de la
confiance en soi : tout ce qu’il va vivre est important. C’est au cours de
cette période que vont se forger les attitudes face aux savoirs, aux
apprentissages, aux relations de pouvoir. Quand un adulte développe un fort
rejet pour les études, un manque d’intérêt pour apprendre, on en retrouve
les origines ancrées dans cette phase sensible d’achèvement du moi. Ça
s’est mal passé !
L’enfant au contact de l’école aurait-il conscience de sa confiance en lui ?
À vrai dire non, pas lui-même et seul. En revanche, oui, si l’entourage sait
lui poser les bonnes questions. Quand le moi est constitué, l’enfant saura
répondre à des questions du genre : « es-tu sûr de ce que tu dis ? » Si dans
son milieu on sait tenir un discours « méta » (dire ce qu’on ressent), il y a
des chances pour qu’il puisse dire ce qu’il éprouve : parler de ses joies, de
ses peines, de son étonnement. Cela lui permettra d’être au plus près de ses
émotions. Mieux vaut donc l’habituer à parler de ses sentiments (au lieu de
les ignorer, de les étouffer ou de les contrarier). À charge pour les
éducateurs et les parents d’être à l’écoute et d’oser se demander si l’enfant
comprend bien ce qu’on lui demande.
Écouter, interroger, dans la mesure, bien sûr, où les questions restent
simples, accessibles, appropriées (bref, de l’ordre de notre « humanitude »
comme disait Albert Jacquard), apparaît comme la bonne voie pour la mise
en place de la confiance en soi chez l’enfant vers 6 ans. Les habiletés
langagières déjà présentes feront le reste et confirmeront de bons indices de
mise en place. Être invité à s’exprimer tôt, en toute liberté et avec une
certaine aisance, sur le vécu et l’éprouvé, constitue pour l’enfant, à
l’évidence, un des plus sérieux ciments de la confiance en soi.
Reste à observer cette lente mise en place dans l’univers de l’enfant.
Certains symptômes peuvent renseigner parents, éducateurs et entourage
quant à la qualité de la force du moi et ses faits d’extériorisation à travers la
confiance en soi.
On en citera quatre :
◗ L’enfant inhibé
Il n’ose pas agir, faire, dire. Tout risque crée de l’angoisse ; l’enfant a dû
être conditionné négativement (« ne fais pas ci, ne fais pas ça… »). Il reste
en retrait, en réserve, en marge.
◗ L’enfant excessif
Plus on va, plus on fait confiance à l’enfant à l’école et c’est tant mieux. C’est cela qui
est important. On le fait parler, se raconter. Les enseignants mettent l’enfant en situation
d’apprendre : « Là je ne sais pas faire mais je veux bien apprendre, maîtresse ».
L’essentiel consiste donc à mettre les enfants (ou les adultes) dans la
bonne situation pour apprendre. La rechercher est plus important que dire
comment faire. C’est réussi d’ailleurs quand l’enfant prévient : « Ne me dis
pas comment faire, je vais apprendre ! » Pour être, apprendre à être, il a
fallu faire l’expérience d’apprendre soi-même. Dire « c’est moi qui ai
appris à… », c’est parler de sa confiance en soi sans le savoir.
C’est pourquoi nous pensons que tout éducateur qui privilégie les
moments d’appropriation des savoirs et des manières d’apprendre dans le
système éducatif œuvre pour la confiance en soi. Il y a des vérités simples à
redécouvrir : c’est en faisant qu’on apprend et c’est en procédant ainsi
qu’on développe sa confiance en soi. C’est en ce sens que le « comment
éduquer ? » est en rapport direct avec la confiance en soi.
Quant à l’adulte qui n’arrive pas à atteindre l’aisance qu’il souhaite dans
une langue étrangère, à l’utilisation d’un ordinateur, à la maîtrise de la
comptabilité ou de la gestion (« je suis fâché avec les chiffres »), et cela
malgré les tentatives de lecture ou les cours pris, c’est qu’il n’a pas pu
trouver les conditions qui lui convenaient pour apprendre. Quand on se sent
bien pour apprendre, ça va tout seul. Trouver le déclic demande du temps et
de la patience. On veut souvent aller trop vite, trop donner, trop fournir
« clés en mains » ; on ne prend pas la précaution de préparer le terrain, de
trouver le bon moment. Bref on veut trop en faire ; en tout cas, notre
exigence est mal placée. L’éducateur se crispe trop sur le contenu à faire
assimiler, le niveau à atteindre, les moyens de contrôler l’acquisition et
moins sur le choix de la situation d’apprentissage, le moment et le rythme,
le feed-back des sentiments éprouvés.
Autre attitude à évacuer, sur le mode « ne pas vouloir trop en faire » : ne
pas croire que tout aille nécessairement dans le bon sens et comme on
voudrait au sein de la famille.
Il en va bien ainsi dans le rapport parents-enfant. On a dit que la
confiance en soi des enfants n’est pas insensible aux facteurs ambiants :
climat familial, mode de vie, habitudes, etc. Il ne faudrait pas croire qu’en
la matière on puisse tout maîtriser, être parfait. La perfection peut être
décrite mais pas atteinte. Le couple vit des relations affectives qui devraient
être bonnes. Elles ne sont jamais idéales. Les inconscients parentaux ne sont
pas toujours à l’unisson. On aurait tort de développer une culpabilité par
rapport à ce décalage entre l’espéré et le vécu, au risque d’alourdir le
« climat » ressenti par l’enfant ou l’adolescent et d’altérer un peu plus les
périodes sensibles de construction du moi. Et cela d’autant plus que par
définition, les inconscients parentaux œuvrent en silence, à l’insu des
protagonistes.
On trouve ainsi le travail inconscient d’un parent qui insiste auprès de
l’enfant pour réussir là où il a lui-même échoué. Cette forme d’exigence
quasi inconsciente (en tout cas jamais avouée ou bien « habillée » et
réinterprétée à l’aide de justifications d’un autre ordre) n’est rien d’autre
qu’une réparation pour soi d’un échec (blessure narcissique) sans rapport
avec la réalité de l’enfant en question. À ce titre il est possible qu’elle soit
peu appropriée et crée des troubles sérieux. Sur un autre versant, on citera
l’exemple de ce père dont l’inconscient travaille de façon telle que
l’influence exercée empêche le fils de le dépasser, ce qui lui serait
insupportable. De telles situations complexes à la mesure des dimensions
cachées à l’œuvre, ne peuvent déboucher que sur des crises et des conflits
(parent-adolescent).
Il y a mille manières de vouloir, consciemment ou pas, trop en faire
quand il s’agit d’éduquer, que l’on soit enseignant ou parent. D’où la
nécessité d’une bonne connaissance des mécanismes dits éducationnels et
simplement émotionnels et interactionnels à l’œuvre si on veut que la
confiance en soi ne soit pas entravée et plutôt favorisée.
Poser cela comme hypothèse c’est évacuer l’idée qu’on pourrait manquer
totalement de confiance en soi ou qu’on pourrait avoir totalement confiance
en soi. Nous écartons aussi l’idée qu’on pourrait avoir à moitié confiance en
soi.
Tout dépend des expériences qu’on a laissé faire à l’enfant et des
conditions dans lesquelles elles se sont déroulées.
On citera l’exemple de cet enfant confronté à un père autoritaire. Il créait une véritable
terreur autour des exercices de calcul et d’orthographe, inhibant littéralement son fils
« sauvé » par une mère qui faisait à sa place pour calmer le mal sans pour autant
favoriser l’apprentissage. En revanche, cet enfant, fils d’un ingénieur autodidacte se
révéla très tôt être très habile pour construire en mécano divers objets et machines de
plus en plus complexes. Il bénéficiait du soutien du père qui s’amusait lui-même à être
ingénieur, en construisant des objets et des machines en mécano, le soir, créant ainsi
inconsciemment des situations d’apprentissage pour son fils. Sur ce terrain leur
collaboration et leur coopération étaient totales, l’enfant apprenait tout seul des choses
complexes, sans crainte, sans pression, avec admiration. Adulte il deviendra un
maquettiste de talent doué dans ce domaine d’une confiance en lui remarquable, alors
que c’est loin d’être le cas dans la vie en général.
celle des gens à moi solide mais dont la confiance en soi n’est pas
sans « couacs » et surtout pas uniforme ;
celles des gens à moi fragile mais dont la confiance en soi aura été
capable de se réfugier dans un coin replié, un secteur de leur vie
plutôt marginal en apparence.
Un autre exemple concerne cette personne à l’aise avec elle-même, avec un bon profil
de réussite personnelle et professionnelle mais toujours en difficulté quand il s’agit de
partir à l’étranger et d’utiliser une langue étrangère.
Cette période narcissique est marquée par une préoccupation extrême pour le corps,
l’image sociale et le souci de renforcer les traits de féminité ou de virilité. L’adolescent
s’efforcera d’être singulier, original en tout. En accédant au stade de la logique formelle
il prend du plaisir à remettre en question points de vue et théories, à critiquer les façons
de penser.
On aura compris que la confiance en soi chez l’adulte est intimement liée
à la force du moi, elle-même résultat d’une construction particulièrement
sensible dès les premières années, puis mise à l’épreuve lors de
l’adolescence. Nous pouvons nous interroger sur les façons dont se
manifeste la confiance en soi, une fois mise en place. Comment l’adulte qui
a confiance en lui fonctionne-t-il ? La confiance en soi est-elle là une fois
pour toutes, est-elle stable, peut-elle s’altérer ?
Ainsi Arlette Mucchielli raconte-t-elle que, si elle a été toujours sûre de son désir et de
son talent de pédagogue (« toute petite, j’enseignais à mes poupées »), elle avait moins
confiance dans son aptitude à la recherche. Elle ne se sentait pas assez intuitive, pas à
l’aise quand il s’agissait d’aller jusqu’au bout, pas assez rigoureuse. Ses enfants lui
ouvrirent une première voie en expliquant cela par son « complexe de fille d’artisan »
(ne pas pouvoir accéder à ce niveau à cause de ses origines).
Comment a-t-elle vaincu cette résistance ? « En étant appelée par des collègues
universitaires à participer à des jurys de thèses, j’ai observé comment des professeurs
réputés dirigeaient la recherche de leurs étudiants. Cela m’a servi de modèle et je me
suis dit que je pouvais faire aussi bien si ce n’est mieux que certains ; du coup, le travail
de recherche m’a plu, intéressée et pas du tout rebutée. Maintenant ça va bien… »
La vie nous fait trop tôt sélectionner des situations d’échec et de réussite.
On croit à partir de presque rien qu’on est « bon » ou « pas bon » pour ceci
ou cela. Ce sont les épreuves de la vie qui peuvent nous faire changer de
point de vue. Mais pour être ouvert et disponible à ce changement, encore
faut-il assumer le présent, c’est-à-dire reconnaître, accepter et dépasser ses
limites. Dans ces conditions on peut avec confiance en soi, vivre des
épreuves initiatiques à la manière des chevaliers du Moyen Âge. On n’a pas
peur d’aller au devant de la question « Qu’est-ce que je vaux dans ce
domaine ? » On peut vivre une expérience initiatique à 70 ans ! C’est bon
pour la confiance en soi.
◗ Le désir
Faire des choses qu’on aime, faire ce dont on a envie, sans réserve ni
arrière-pensée, écouter ses appétits, donner suite à ses tentations
apparaissent comme autant d’opportunités pour lesquelles les chances sont
élevées de se faire plaisir, d’être content. Cette manière d’alimenter le moi
devrait contribuer à créer en nous une forme de paix, de satisfaction. Ce
moi « comblé » a toute chance d’entretenir la confiance en soi (refaire du
sport, donner libre cours à un hobby, se remettre à la musique, faire un
grand voyage depuis longtemps attendu, écrire un livre, fonder une
association…). Quand l’espoir devient réalité, que le désir est satisfait, la
confiance en soi est comme réactualisée. En ce sens, suivre ses désirs c’est
entretenir sa confiance en soi.
◗ L’accoutumance
◗ L’ambiance
Passionné de football depuis l’âge de 10 ans, il joue dans un club, fréquente avec
assiduité tous les entraînements, se montre appliqué et progresse. Il tente des gestes
difficiles, prend plaisir à jouer, s’investit, « mouille » le maillot. Bon joueur, bon
camarade, il aide les autres, encourage. Né dans un milieu très défavorisé, il a eu une
scolarité très difficile mais s’est toujours éloigné de la délinquance. Dans le monde du
travail, il n’arrive pas à trouver sa voie, accumule les « petits boulots », se heurte aux
patrons, se décourage ou s’obstine sans succès. Ce qu’on lui fait faire ne lui plaît pas.
Ça va mal pour lui. Tout change le jour où il entre dans une petite entreprise dont le
patron, dirigeant sportif lui-même, lui offre une « ambiance » qui lui convient. Remis en
selle, le travail l’intéresse. Même si ses handicaps le limitent au plan des compétences
et des responsabilités, il retrouve espoir, un peu d’aisance et un certain apaisement,
d’où une certaine confiance en lui pour parler, décider, oser dans son travail. Retrouvant
un début d’unité, ses comportements sur un terrain et dans l’entreprise sont moins
différents. Il dit lui-même avoir retrouvé un peu de confiance en lui.
3.3 La tranquillité
L’adulte qui a confiance en lui ressent une certaine tranquillité. C’est
particulièrement sensible notamment quand il est sollicité dans son
angoisse, que ce soit de parent, de dirigeant, d’éducateur, de salarié, de
membre d’une communauté, de médecin ou de policier…
Pour être plus tranquille, il faut avoir :
C’est le sens du propos de Descartes dans sa Lettre à Breggy (15 janvier 1650) : « Je
ne désire que la tranquillité et le repos qui sont des biens que les plus puissants rois de
la terre ne peuvent donner à ceux qui ne les savent prendre d’eux-mêmes ».
C’est peut-être dans l’un des plus beaux traités de Plutarque connu sous
son titre latin De tranquillitate animi, que l’on trouve les meilleures
descriptions de la conscience tranquille7.
Selon le professeur Jean Dumortier, l’œuvre de Plutarque évoque :
« quiétude, équilibre de l’âme, sérénité, paix intérieure, joie, vie heureuse
même ».
Pour Plutarque, la conscience tranquille c’est d’abord l’art du bonheur
apaisé, la maîtrise des passions funestes, la capacité à jouer des « bonheurs
présents ». On est loin de l’austère rigueur du stoïcisme et l’humeur joyeuse
de Plutarque fit dire du sage philosophe grec qu’il était « une cigale sur
l’arbre de Platon ». En tout cas, on retiendra cette idée d’humeur joyeuse
associée à celle de conscience tranquille. La confiance en soi se traduit par
une sorte d’apaisement dans les relations interpersonnelles. Ce calme,
solide et riche de potentialités d’écoute et d’attention apparaît comme un
atout dans un univers marqué par de fortes tensions et de multiples frictions.
Il permet d’aborder mieux des situations délicates et de supporter les
excès et les éclats d’éventuels adversaires. La conscience tranquille nous
tient à l’écart des risques de trop fréquentes dérives dans l’euphorie et la
déprime.
« Car si nous sommes, avertit Plutarque, devant la vie, sans savoir ni réflexion, comme
des malades incapables de supporter ni le froid, ni la chaleur, nous serons exaltés par la
réussite, déprimés par l’adversité, mais nous aurons l’âme troublée par les deux, ou
plutôt par nous-mêmes, et cela ne sera pas moins vrai dans les circonstances dites
favorables ».
Selon Plutarque, la tranquillité nous viendrait aussi par cette capacité que nous avons
de relativiser les événements qui nous concernent afin d’en dégager les aspects positifs
pour nous : « Ainsi pour parvenir à la sérénité, il sera bon, face aux événements
contraires, de ne pas perdre de vue ce qu’ils peuvent comporter pour nous de plaisant
et d’agréable : tempérons le mauvais par le bon afin qu’en tout le bon l’emporte [...] Oui,
c’est une folie de se lamenter sur ce qu’on a perdu au lieu de se réjouir de ce qui nous
reste ».
1 Ce chapitre est adapté d’une interview d’Arlette Mucchielli, juillet 1992. Arlette Mucchielli
est l’auteur dans cette même collection du livre Apprendre à coopérer, ESF éditeur, Paris,
1999.
2 L’homme comme nature.
3 L. Binswanger, Discours, parcours et Freud, Trad. fr. Paris, Gallimard, 1970.
4 E. Fromm, Bouddhisme Zen et psychanalyse, Paris, L’épi.
5 Roger Mucchielli, Analyse existentielle et psychothérapie phénoméno-structurale,
Bruxelles, Dessart, 1967 (épuisé). Réédité aux éditions EAP sous le titre : Analyse et
Liberté.
6 D’après Y. Rispal cité par N. Sillamy, Dictionnaire de psychologie, Paris, Bordas, 1980.
7 Plutarque, La conscience tranquille, traduit du grec par Myrto Gondicas, Paris, Arléa,
1991.
8 Alexander Lowen, Gagner à en mourir, Paris, Hommes et Groupes Éditeur, 1987.
9 Voir dans cette même collection, du même auteur, le livre Des prises de paroles
captivantes, Paris, ESF éditeur, 2015.
10 Olivier Dessibourg, L’amitié chez le chimpanzé, un pacte de confiance, Le Temps,
Lausanne, 20 janvier 2016.
11 Voir aussi le documentaire concernant les recherches de l’Institut Max Planck diffusé sur
ARTE le 26 février 2016 (Vers un monde altruiste ?) de Sylvie Gilman et Thierry de
Lestrade.
CHAPITRE 3
La confiance en soi vue sous l’angle
psychanalytique
1. Le mythe de Narcisse
D’entrée on peut établir que la confiance en soi est en rapport étroit avec
la problématique narcissique de l’individu.
Il semble que ce soit dans une note de 1910 complétant les Trois essais
sur la théorie de la sexualité que Freud ait utilisé pour la première fois le
terme de narcissisme, et cela en relation avec l’homosexualité. Rappelons
que, selon la légence grecque, Narcisse dédaignait l’amour des nymphes,
dont notamment celui de la Nymphe Echo, pour se consacrer au culte de sa
propre image que lui renvoyait le miroir d’un étang. À sa place pousse la
fleur qui porte son nom (Narcisse).
S’il est juste que Freud ait d’abord évoqué le narcissisme à propos d’une
perversion, il en fit très vite vers 1914, un stade sans doute « inévitable » au
cours du développement, tout en constatant que certaines personnes y
resteraient fixées de façon prolongée.
Ainsi prend naissance la thèse freudienne qui fait du narcissisme un
moment de l’évolution de la libido entre l’auto-érotisme et l’amour
objectal : l’individu en voie de développement rassemble en une unité ses
instincts sexuels qui, jusque-là, agissaient sur le mode auto-érotique afin de
conquérir un objet d’amour, et il se prend d’abord lui-même, il prend son
propre corps pour objet d’amour avant de passer au choix objectal d’une
personne étrangère. En 1913, dans Totem et tabou, Freud insistera sur le fait
que l’homme reste toujours, dans une certaine mesure, narcissique même si
c’est par un relatif détachement du narcissisme qu’il peut faire des choix
hétérosexuels (et donc se dégager de l’amour de soi et de l’homosexualité).
Après 1914, Freud introduira définitivement le concept de narcissisme
dans la théorie psychanalytique. Il posera le narcissisme comme étant
présent de façon permanente dans l’individu. Le narcissisme doit alors être
compris comme l’investissement libidinal du Moi. Freud distinguera :
Quand Marie Cardinal raconte dans Les mots pour le dire, un fragment d’une
psychanalyse elle rapporte des propos qui vont dans ce sens : aller plus loin,
comprendre la personne :
La fille s’identifie avant toute chose à sa mère. Vu sous l’angle psychanalytique, la fille
doit renoncer à être sa mère pour posséder son père. Tout un jeu subtil se met plus ou
moins en place pour lui permettre de devenir femme et faire le deuil de la mère. Et cet
apprentissage peut fonctionner correctement ou pas. Le garçon, lui, ne renonce jamais
à sa mère. Il choisit une femme pour remplacer la mère et il doit s’identifier au père pour
avoir accès aux femmes via sa mère. Aussi, selon Gilles Amado, « l’humanité est moins
faite d’adultes, mais plutôt de mères et de fils ». Preuve que les renoncements ne sont
jamais établis tout à fait.
Au moment où nous prenons des virages dans notre vie, il faut toujours
renoncer à quelque chose qui nous appartient. Le danger réside plus à
l’intérieur de nous alors qu’on croit le voir toujours plutôt à l’extérieur.
Quand la solidité du moi n’est pas au rendez-vous, ce genre d’épreuve est
difficile et la confiance en soi fait alors cruellement défaut.
Mais renversons la proposition en admettant que l’expérience intérieure
et l’appréhension de la réalité telle qu’elle est peuvent nous aider à
récupérer une bonne dose de confiance en soi et de tranquillité. À une
condition : celle énoncée à sa manière joyeuse par Plutarque : « Pour vivre
dans le contentement, il faut se prendre autant que possible pour objet
d’examen, ainsi que ce qui nous échoit9 ». L’écoute de soi et de son propre
cheminement à travers les réussites, les échecs et les détours de la vie en
général, apparaît comme une opportunité pour s’assurer d’atouts
supplémentaires du côté de la confiance en soi. « Il ne peut y avoir de
transformation radicale que lorsque nous comprenons notre
conditionnement » constate Jiddu Krishnamurti. Voilà qui pose en
particulier le problème de la dépendance. Quand on passe sa vie à tenter
désespérément de faire concorder la réalité de soi-même avec des
représentations du monde qui nous entoure, nourries par les mythes sociaux
et les croyances, nous courons les pires risques de décalage et de
frustration. Seul un moi assez fort et une bonne dose de confiance en soi
nous autorisent à trouver un délicat équilibre entre des forces conflictuelles
telles que les besoins, les désirs, les buts, les responsabilités, les obligations,
les droits, les attentes des autres.
Dans cet ordre d’idée, la confiance en soi serait à assimiler à la discipline
du renoncement. Vue sous cet angle, la confiance en soi rend possible
l’élargissement du moi. En effet, en acceptant et en faisant l’expérience du
renoncement, on intègre le principe selon lequel on gagne toujours plus que
ce à quoi on renonce.
« La dépendance peut apparaître comme de l’amour parce que c’est une force qui
oblige des gens à s’attacher farouchement l’un à l’autre. Mais en fait ce n’est pas de
l’amour ; c’est une forme d’anti-amour qui prend sa source dans le manque d’amour
parental et perpétue le manque. Il cherche à recevoir plutôt qu’à donner. Il nourrit
l’infantilisme plutôt que l’évolution. Il œuvre pour piéger et restreindre plutôt que pour
libérer. Et, enfin, il détruit plutôt qu’il ne construit des relations10. »
Pour Scott Peck, l’amour peut être tout à fait autre chose :
« Ce n’est pas simplement donner : c’est donner avec discernement mais aussi parfois
ne pas donner ; c’est encourager judicieusement, mais aussi critiquer. C’est argumenter,
se battre, exiger, pousser, retenir, en plus de réconforter. C’est diriger. Judicieusement.
Et judicieusement implique un esprit de discernement qui demande plus que de
l’instinct : de prendre des décisions parfois douloureuses, en tout cas toujours
attentionnées et réfléchies ».
À coup sûr, un moi solide autorise que l’amour s’exprime comme une
sorte de travail d’attention, d’écoute, et de choix, donc d’indépendance dans
la relation non sans gestion des risques. Y compris celui de perdre, de
refuser. L’amour engage dans une confrontation. En contrepartie, l’amour
apparaît comme un facteur de bonne santé mentale, d’équilibre et sûrement
capable, quand il est bien compris de confronter, voire de nourrir le moi, et
par conséquent d’entretenir la confiance en soi. Le docteur et psychiatre
Scott Peck est à ce titre un des représentants inconditionnels du lien amour
et santé mentale. En opposition à toute une partie du courant
psychanalytique freudien qui postule la distance et le détachement au cours
de la cure, Scott Peck voit dans la psychothérapie une sorte de « processus
de reprise parentale ». Il pose comme hypothèse que « pour pouvoir être
guéri par la psychothérapie, le patient doit recevoir de son
psychothérapeute, au moins en partie, l’amour véritable dont il a été privé ».
Par extension, nous pouvons dire que la confiance en soi peut trouver
pour s’étoffer, voire progresser, un puissant allié dans un milieu aimant.
Moyennant bien sûr que l’amour réciproque soit vécu loin de toute
dépendance excessive. Ainsi aimer et être aimé devrait favoriser chez
l’adulte la confiance en soi, à la condition que les déficits du moi dus à
l’élaboration de la personnalité dans la toute petite enfance ne soient pas
trop lourds.
« C’est que le besoin de devenir un être distinct est aussi urgent que le désir de
fusionner à jamais. Du moment que c’est nous, et non notre mère, qui amorçons le
processus de séparation, du moment que notre mère reste là et que nous pouvons
compter sur elle, il semble possible de prendre le risque de se tenir debout seul, voire
d’y prendre plaisir11. »
Il est sûr que la confiance en soi s’élabore en même temps que se déroule
« l’accession au self séparé » selon un processus de découverte progressive.
Ensuite, le jeu des identifications se met en marche et le moi s’exprime à
travers un « je » qui, de plus en plus fréquemment, procède du principe
« être comme, devenir comme, faire comme ». Ce jeu sera-t-il réussi ? Tout
dépendra de la façon dont seront vécues les pertes que chaque identification
occasionne. Car aller d’identifications en identifications c’est faire
l’expérience du renoncement, voire du deuil.
La confiance en soi est là quand, dans l’adversité, nous avons fait un bout
de chemin en délimitant nos désirs et en recherchant exclusivement la
spécificité de notre personnalité. C’est ainsi apprendre à conquérir
indépendance et autonomie histoire d’échapper « au sentiment de venir en
second et de devoir tirer l’autre pour l’emporter sur lui17 ».
3.4 La triangulation de la vie
« C’est en s’identifiant d’une manière objective à cette force redoutée et admirée que le
garçon peut évoluer vers son autonomie. C’est en sentant cette force paternelle comme
inaccessible à son désir que la fille peut en faire son “deuil”21. »
1. Du moi au soi
Nous ne le pensons pas. Et cela d’autant plus que le moi n’est sûrement
pas constant selon les âges, les instants, les situations et les environnements.
Cette observation de William James3 est d’autant plus juste qu’on la
rapproche du moi conçu comme processus de maturation en direction de
son être, en bref de son devenir-adulte. On retiendra l’idée de W. James :
celle de la conscience définie comme un « flux de vécu » (« stream of
consciousness ») et celle d’un moi assimilé à un sujet empirique et corporel
affecté par les mouvements affectifs de la conscience qui reflète toutes les
modalités subjectives des faits de conscience reconnus pour « miens ».
La définition du moi de Henri Ey est encore plus riche et ambitieuse. Le
moi c’est « l’être conscient de Soi constitué en personne » et capable de
« saisir tout à la fois sa construction, son dynamisme et ses rapports avec le
champ de conscience [...] la structure du moi est essentiellement unificatrice
de sa temporalité, de ses valeurs et de son expérience : elle est la durée, la
continuité jusqu’à sa fin de la personne4 ».
Il y a donc bien éclosion du moi et individualisation progressive. Le moi
prend possession de lui-même comme objet singulier. C’est à travers une
série d’étapes et de crises que le moi s’élabore.
Pour simplifier et en résumé, on retiendra les phases suivantes :
– jusqu’à 18 mois, l’enfant s’il ne se reconnaît pas encore dans un miroir, est capable de
s’auto-désigner à l’attention des autres (se taper sur la poitrine).
2. Devenir adulte
On connaît l’expression self made man. Elle désigne une personne qui
s’est faite elle-même. Elle a retenu l’attention notamment du courant de la
psychologie humaniste21 qui affirme la capacité de l’homme à se
transcender (liberté, responsabilité, historicité, développement de la
personne).
En se faisant « à la force du poignet », en dépassant les obstacles, le self
made man réussit ce que Abraham Maslow nommera une self-actualization,
c’est-à-dire un développement, le meilleur possible, de ses capacités et de
ses talents personnels.
Vouloir être soi serait ainsi le résultat d’une évolution opérée par le moi
lui-même vers sa maturité, son autonomie et son épanouissement. En ce
sens le soi pourrait se définir comme la conscience d’« être moi en
devenir », une sorte d’« être moi à réaliser » qui combinerait :
2.2 Le self
Certains travaux33 soulignent que le soi social serait le résultat d’une mise
en mémoire des fragments de connaissance de soi correspondant aux
diverses expériences enregistrées lors de confrontations à la réalité. Ainsi, le
soi social en mémoire serait constitué d’un agrégat plus ou moins
hiérarchisé et un réseau de perceptions de soi en situation.
Du soi on pourrait donner la métaphore d’un nœud. Cet ensemble
complexe apparaîtrait alors comme une agglomération hiérarchisée de
concepts de soi spécifiques aux souvenirs des réponses apportées à des
situations particulières et mémorisées. L’individu aurait alors parfaitement
conscience d’une grande sensibilité et d’une grande flexibilité du soi, se
traduisant par des comportements variés selon les contextes abordés.
Cela expliquerait que, très empiriquement, certaines personnes décrivent
leur confiance en elles comme très variable : « J’ai confiance en moi quand
je connais bien les gens auxquels je m’adresse, quand j’ai bien préparé mon
dossier, quand je me sens motivée, quand c’est moi qui décide d’une
démarche, etc. En revanche, je manque de confiance en moi quand on me
demande d’aller vite, d’avoir des résultats tout de suite, de défendre une
idée en réunion face à des gens que je connais mal, de solliciter quelqu’un
qui n’est pas demandeur, etc. »
Une telle conception d’un soi à tiroirs et actualisable semble exagérée.
Elle autoriserait à présenter la confiance en soi comme un concept à
géométrie totalement variable. Il semble que des tendances lourdes
s’imposent en liaison avec la constitution d’un moi assez consistant et
présent pour créer les conditions d’une confiance en soi plus ou moins forte.
En revanche, on peut admettre que la mémorisation et l’encodage de types
de réponses à des contextes puissent induire des « confiance en soi »
situationnelles ou localisées (dans le bon sens comme dans le mauvais
sens). Et cela d’autant plus que la mémorisation de tout ce qui se rapporte
directement à soi, paraît forte. Les travaux de Grennwald et Banaji34 le
confirment et incitent les auteurs à définir le soi comme « un corps de
connaissance évaluativement polarisé, hautement familier et organisé, ces
propriétés prédisposant les événements en rapport à soi à être effectivement
mieux encodés et plus aisément rappelés ».
Ainsi l’importance, la fréquence et la vigueur du phénomène de référence
à soi joueraient largement pour agir sur la confiance en soi, dans la mesure
où quand elle se manifeste, c’est toujours en rapport direct avec des faits
autobiographiques en prise sur la personne et son sort : réussite à un
examen, problème avec un proche, vie amoureuse, prise de décision,
renoncement, épreuve personnelle, maladie, prise de risque, initiatives
diverses, projets…
Selon G. E. Myers et M.T. Myers38, qui sommes-nous, comment les autres nous voient-
ils, quel(s) rôle(s) jouons-nous devant chacun, quels sont nos besoins et nos valeurs ?...
« [Ce] sont des questions fondamentales parce que notre façon d’y répondre détermine
nos actions et les rôles que nous choisissons de jouer.
De plus, qui nous pensons être est déterminé par les réponses à nos comportements
que nous obtenons des autres [...]. Notre comportement est aussi le produit de
sentiments complexes exprimés par les interrogations suivantes : qui il faut être, quel
rôle il faut jouer et quelles sont les transactions interpersonnelles qu’il faut faire. Tous
ces “il faut” représentent nos valeurs. »
Le concept de soi nous fournit les matériaux de ce que nous croyons être
et qui nous croyons être est en retour influencé par la façon dont les autres
répondent à nos comportements et nos actes.
Ainsi nos comportements ne sont pas seulement influencés par
l’accumulation de nos expériences antérieures mais aussi de façon
importante par les significations personnelles que nous attachons à ces
expériences. Nous agissons selon la façon dont nous pensons que les autres
nous voient et non selon comment ils nous voient.
Voilà qui fonde une idée de soi tout à fait transactionnelle : à la fois filtre
et cycle complexe parfois vicié. Nous vivons d’interprétations et de
confirmations plus ou moins réussies.
S’il en est ainsi, on peut suggérer que la confiance en soi, n’échappant
pas au processus transactionnel du soi, sera soumise en plus ou moins
grande partie aux interactions.
Par exemple, l’arrivée dans notre entourage d’une personne nouvelle et
chez laquelle nous ressentirons une grande estime et une forte confiance en
nous serait susceptible d’influencer notre propre capital confiance en soi.
Cela peut être perceptible dans l’entreprise (un nouveau chef) comme dans
la vie sportive (un nouvel entraîneur).
Si, de plus, des événements et la qualité de nos performances viennent
s’ajouter positivement à ces « impressions », il est largement possible de
vérifier qu’un certain niveau de confiance en soi va s’installer. Une femme
ou un homme peut jouer ce rôle dans la vie.
L’estime de soi est le sentiment que nous ressentons quand les processus
de validation nous apportent des réponses agréables et congruentes.
Si ce que pensent les autres de mon travail correspond à mon
appréciation personnelle et que cet ensemble se rapproche de l’idée la
meilleure que je m’étais faite dans mon imagination (version idéale
anticipée), tout va bien. Cette congruence est une source d’estime de soi,
c’est-à-dire un courant de sentiments positifs à l’égard de soi. Il semble
qu’avec l’estime de soi, on tienne là un fameux allié de la confiance en soi.
En effet, l’estime de soi nous amène à nous accepter avec réalisme et
lucidité, si tant est que l’idéal du moi inscrit en soi n’est pas hyper-exigeant
au point d’être irréaliste (réussir l’impossible, atteindre la perfection, etc.).
Encore faut-il pour créer les conditions d’accès à l’estime de soi, accepter
les confrontations au réel, accepter de s’exposer sans tricher d’une part, et
d’autre part, analyser les rétroactions des autres avec lucidité (qui me dit ça
et pourquoi ?).
Beaucoup de gens jouent la comédie, créent de fausses impressions,
masquent des parties d’eux-mêmes. En conséquence, ils récupérent des
feed-back qu’ils savent injustifiés et qui ne les consolident ni ne les
rassurent pas en profondeur. Bref, plus on se crée un personnage autre que
soi- même et un langage faux, plus on perd contact avec la réalité et plus on
perd confiance en soi, du fait des décalages difficiles à supporter. C’est bien
en acceptant une certaine qualité d’ouverture de soi que l’on peut alimenter
de façon saine et authentique l’estime de soi et produire des effets heureux
pour la confiance en soi.
Il est bon de rappeler ici la place que A. Maslow39 accorde à l’estime de
soi dans sa théorie des besoins fondamentaux. Les besoins d’estime
n’apparaîtraient qu’après que les besoins physiologiques, de sécurité et les
besoins sociaux (appartenance, amitié, acceptation) soient satisfaits et avant
les besoins d’actualisation et de réalisation de soi (accomplissement,
expression créative).
Pour Maslow les besoins d’estime (capables de donner lieu à des
comportements appropriés tant qu’ils ne sont pas complètement satisfaits)
se décomposeraient en :
◆ besoin d’estime de soi, caractérisé justement par un désir de confiance
en soi, de respect de soi et des sentiments de réussite, de compétence et
d’indépendance ;
◆ besoin d’estime des autres, caractérisé par la recherche de la
reconnaissance des autres, leur appréciation et l’accès au prestige, au statut,
etc.
Ainsi le respect des collègues au travail peut jouer autant, si ce n’est plus,
que les compliments de la hiérarchie pour développer estime de soi et
confiance en soi et donner lieu à des comportements d’assurance et de prise
d’initiative.
Dans cette perspective, le contexte social est considéré comme largement
agissant sur le potentiel de confiance en soi, via la satisfaction des besoins
d’estime.
On peut en conclure, si on suit Maslow, que lorsque l’environnement a
répondu favorablement aux attentes, le besoin est satisfait. La confiance en
soi est là et bien là. Les rétroactions dans ces conditions deviendraient
moins nécessaires. L’équilibre restant toutefois fragile si on n’admet qu’un
moi régulateur prenne le relais.
Fenêtre de Johari
◗ Aire publique
C’est le soi public, tout ce qui est connu de soi et des autres dont le nom,
l’état civil et divers renseignements.
Plutôt neutre la divulgation de ces informations ne pose pas problème en
général. Cependant, une certaine anxiété peut accompagner l’annonce de
l’âge, lors d’un entretien de recrutement, ou l’énoncé du nom lorsque celui-
ci peut prêter à moquerie.
◗ Aire aveugle
◗ Aire cachée
◗ Aire inconnue
C’est la partie qui correspondrait à l’inconscient, le domaine des
significations profondes peu accessibles aux autres et pas à un stade de
conscience de soi clair (besoins profonds, mobiles, peurs…).
Par l’ouverture de soi, on peut augmenter l’aire libre et diminuer l’aire
cachée, par la rétroaction acceptée, on peut diminuer l’aire aveugle et ainsi
augmenter encore l’aire libre.
On peut poser l’hypothèse que prendre des risques d’ouverture (se livrer,
s’exposer) et aller au-devant des rétroactions (témoignages, impressions et
sentiments des autres sur soi) devrait contribuer à rendre nos relations plus
significatives. Mais pas à n’importe quel prix. La nécessité d’un moi bien
étayé, on l’a vu, s’impose si l’on veut tirer le meilleur parti de relations
libres et authentiques. Aller au-devant de renseignements sur nous-mêmes
nous fera progresser si nous sommes capables d’intégrer ces données, de les
traiter et de les faire participer à ce devenir-adulte, à ce vouloir être soi, ce
projet que l’on peut vouloir libre. On peut dire dans cet ordre d’idée
qu’avoir confiance en soi devrait se traduire par le sentiment de se sentir
libre que les gens sachent qui on est, comment on se sent et ce que l’on
pense.
Au total, l’ouverture de soi dans un processus d’acceptation mutuelle
bien compris serait une condition favorable pour la confiance en soi. En
gardant trop le silence sur soi, on reste un étranger pour les autres et on ne
bénéficie pas d’informations en retour. De plus, l’ouverture de soi qui
amène l’autre à s’ouvrir aussi plus volontiers, nous permet le contact avec
la réalité. On découvre que les autres ont aussi des problèmes, des désirs,
des vulnérabilités, des réussites, des échecs.
Voilà qui incite à ne pas s’en tenir aux références d’idéal du moi par trop
exigeantes et de ce fait possiblement paralysantes. Relativiser est une bonne
chose pour la confiance en soi.
Il reste que l’ouverture de soi doit se faire dans des conditions plutôt
appropriées, sinon elle peut faire des dégâts.
Conseils
– s’ouvrir aux autres dans la mesure d’une certaine réciprocité ;
– s’amorcer au cours d’une relation déjà bien engagée (donc pas ponctuelle, ni
occasionnelle) ;
– s’en tenir à partager ce qui se joue entre soi et l’autre au moment où on choisit de
s’ouvrir ;
– se faire graduellement ;
– se développer dans un climat de confiance ;
– se justifier par le souci réciproque d’améliorer la relation ;
– se faire à un moment opportun, favorable, quand l’autre est disponible ;
– s’éloigner de toute idée de forcer la main à l’autre pour obtenir quelque chose.
Ces analyses vont dans le sens des opinions qui font de notre
« machinerie sociale » un pur et simple système de reproduction, de
« copie », au sens de P. Bourdieu et J.-C. Passeron46. Mais ce serait oublier
les capacités de résistance à cet apprentissage conditionnant. C’est en fait
dans un contexte conflictuel que tout ceci se déroule. C’est au cœur de ce
débat que la confiance en soi continue à se forger ou… se détériorer selon la
tournure des événements et le jeu plus ou moins réussi des identifications
(dans la réalité et fantasmatiquement) entre les images de soi et leurs
valorisations, et les images parentales (point de vue partagé, on l’a vu, par
Gilles Amado).
En conclusion de cette section, on soulignera qu’il est nécessaire de
relativiser les effets d’un trop grand déterminisme social et même de
relativiser les effets de l’interactionnisme pour comprendre les orientations
du soi et donc les vicissitudes de la confiance en soi. Le contexte existe
mais « nous ne sommes pas programmés » pour autant totalement comme le
rappellent magnifiquement Richard C. Lewontin, Steven Rose et Léon J.
Kamin47. L’interactionnisme sépare toujours trop unilatéralement sujet et
objet, confond trop organisation sociale et addition des normes de réaction
individuelles.
De plus, les hommes peuvent changer les circonstances. « Demain est à
faire, aimait à dire Albert Jacquard, demain est un projet à réaliser, non une
fatalité à subir48 ». Voilà qui pose la question de la liberté. « Ce qui
caractérise le développement et les actions de l’homme, c’est qu’ils
résultent d’un immense ensemble de causes qui interagissent et interfèrent.
Nos actions ne sont pas aléatoires ou indépendantes par rapport à la totalité
de ces causes comme système en interaction, car nous sommes des êtres
matériels dans un monde causal. Mais dans la mesure où elles sont libres,
nos actions sont indépendantes de ces multiples trajectoires causales (ou
d’un ensemble d’entre elles, même petit) : telle est la signification précise
de la liberté dans un monde causal49 ».
Au total, nous pensons que la confiance en soi ne peut que profiter de la
prise de conscience de cet espace de liberté par rapport au contexte, même
si le soi s’imprègne du social, il sait par le travail du moi le contourner, le
défier, voire le mystifier. L’erreur serait de le nier. Nous nous souviendrons
que la confiance en soi ne peut s’exprimer et être « viable » sans un rapport
ouvert au réel et aux autres.
4. Susciter la confiance
Dans l’idée de confiance en soi, il y a l’idée du soi et nous avons vu que
son exploration relève d’un travail jamais vraiment achevé, ni satisfaisant,
mais il y a aussi l’idée de confiance.
Plus proches de nous, les variations sur la confiance montrent bien qu’il
s’agit là de la pierre angulaire des relations humaines. De Gaulle dans Le
Fil de l’Épée avoue que « la confiance des petits50 exalte l’homme de
caractère », quand L.-F. Céline avertit dans Semmelweis que « faire
confiance aux hommes c’est déjà se faire tuer un peu ».
La confiance semble partout désirée, appelée mais toujours comme en
pointillés, comme instable et volatile.
Pourtant dans le sens commun les expressions intégrant la notion de
confiance ne manquent pas :
confiance en soi ;
relation de confiance ;
confiance en l’avenir ;
confiance en les autres ;
confiance dans le groupe ou l’équipe ;
confiance dans l’épreuve ou la difficulté ;
confiance dans la justice, les lois ;
climat de confiance ;
confiance dans l’homme ;
personne de confiance ;
confiance mutuelle ;
confiance totale.
– nous nous engageons dans un comportement de confiance sans être certain que
l’autre fera de même ; chacun doit prendre un risque ;
– ni nous, ni l’autre personne ne nous laissons aller à suivre nos impulsions à exploiter
ou à tirer avantage de l’autre ; nous n’interprétons pas les comportements de confiance
de l’autre comme des gestes de naïveté ou de faiblesse ;
Nous ne pensons pas que la confiance en soi puisse nous être donnée de
l’extérieur. En revanche, on peut établir que si l’hypothèse d’un moi
construit engendre certains niveaux de confiance en soi, ce moi en
interaction avec les autres, n’est pas imperméable aux influences du milieu.
On pourrait envisager l’hypothèse d’un flux de confiance dont les
caractéristiques seraient les suivantes :
Quand les gens disent : « il a confiance en lui », qu’est-ce que cela veut
dire ? Quand quelqu’un dit : « j’ai confiance en moi », qu’est-ce que cela
signifie ?
L’expérience quotidienne confirme une impression générale qui dit que la
confiance en soi est plus souvent définie d’une part, en parlant des autres et
d’autre part, en évoquant son absence (« je manque de confiance en moi, il
manque de confiance en lui »).
Pour le sens commun, manquer de confiance en soi pour les adultes,
c’est :
se sentir timide ;
crier au secours en plein milieu de l’eau quand on a perdu pied ;
buter sur une pierre ;
vouloir toujours prouver, démontrer quelque chose ;
avoir besoin que les autres disent qu’on est bon pour être sûr qu’on
l’est ;
faire des complexes ;
avoir peur de l’autre ;
avoir peur de la mort ;
ne pas oser « y aller » ;
ne pas oser s’exprimer ;
se méfier tout le temps ;
se tenir sur sa réserve ;
ne pas oser refaire un truc qu’on a raté ;
ne pas réussir à faire ce qu’on a envie de faire…
Pour certains, la confiance en soi apparaît avant tout basée sur des
croyances.
C’est le point de vue d’Hubert Jaoui4 : « Ma confiance en moi s’est affermie pendant
mon service militaire. J’avais auparavant été élève au Lycée Carnot à Tunis, dans un
milieu relativement élitiste. J’étais habitué à être l’un des meilleurs de la classe. De plus,
ma mère m’avait programmé pour le succès. En effet, la tradition ethnique et religieuse
forte chez les mères juives les amène à penser que leur fils est peut-être le messie.
Aussi pour certaines, elles entretiennent une attention et une dévotion sans cesse
répétées pour leur fils : “Tu es formidable…” Ma mère m’avait convaincu que ça allait
bien se passer. Le service militaire, en me mêlant à toutes les couches de la population
et notamment à la France dite “profonde”, me donnera l’occasion de renforcer ma
croyance en ma possibilité de réussir. En effet, inévitablement on se compare, on
cherche à se situer. Et par rapport aux autres, j’eus vite la confirmation que je m’en
tirerais bien, comme pour donner du sens au fameux dicton : “Quand je me regarde je
me désole, quand je me compare je me console” ».
« En amenant des sujets à rencontrer une personne dont les caractéristiques sont ou
non, socialement désirables, les auteurs conduisent la moitié d’entre eux à se croire en
compétition avec elle pour l’obtention d’un emploi. Les résultats révèlent que selon les
caractéristiques, désirables ou indésirables, de la personne rencontrée, les sujets,
quelle que soit la nature de la situation – compétitive ou non – modifient la perception
qu’ils ont d’eux-mêmes en augmentant ou en diminuant leur estime de soi ».
Dans l’expérience, des gens entraient dans un ascenseur où d’autres personnes (des
compères du réalisateur) se tenaient dos aux portes (ce qui ne procède pas d’une
habitude ou d’une règle sociale). Grâce à la caméra cachée, on pouvait observer la forte
tendance à l’imitation : les nouveaux arrivants se tenaient aussi dos aux portes.
Selon L. Festinger7, lorsque quelque chose fait que les gens doutent de
leurs propres opinions ou actions, ils se tournent vers les autres pour obtenir
de l’information. Ainsi les gens affineraient leurs perceptions du monde en
s’engageant dans un processus de comparaison sociale.
Muzafir Sherif a été l’auteur de l’une des plus saisissantes
démonstrations des effets de la comparaison sociale (présentation d’un
point lumineux dans une salle noire et impact de l’effet d’optique, à savoir
impression de mouvement de ce point lumineux sur des gens pris
individuellement, puis en groupe8). Il apparaît que les jugements reposent
bien sur la comparaison avec les informations fournies par d’autres
personnes. De plus, on a pu observer que la comparaison avec des gens
similaires augmente la confiance des gens dans ce qu’ils croient voir ou
penser.
Vue sous cet angle, la confiance en soi consiste à croire en soi
positivement, du double fait d’une éducation valorisante et encourageante et
d’une confrontation avec des expériences vécues et des comparaisons
sociales dont on se sortirait sans trop de dommage, donc plutôt rassuré et
conforté. A contrario, souligne Hubert Jaoui, l’hyperprotection « fabrique »
des gens fragiles, la culpabilisation produit des gens mal dans leur peau, et
surtout les jugements de valeur radicaux (« tu es nul, tu es un bon à
rien… »). L’éducation peut contribuer à édifier des croyances négatives et
aboutir à « programmer l’échec », à l’instar de la fameuse histoire du Petit
Chose : « Fais attention tu vas casser la cruche, elle est fragile… »
Résultat : il la casse.
Basée sur des croyances, la confiance en soi se confirme être une
construction historique. À partir du moment où elle est en place, les
événements vont la justifier et inversement.
Quel est le poids de l’enfance dans l’édification de la confiance en soi ?
Pour Jaoui, beaucoup de choses se jouent avant 6 ans mais pas tout : « Peut-
on perdre confiance en soi ? Oui, suite, par exemple, à une forte émotion. Si
on suit le point de vue de l’analyse transactionnelle on peut admettre que la
confiance en soi, conçue comme basée sur des croyances, est de l’ordre du
“parent” alors que l’émotion est du ressort de “l’enfant”9. On peut penser
qu’une émotion très (trop) forte peut faire perdre foi dans ses croyances
(“foi”, étymologiquement renvoie à confiance) ».
Ainsi la confiance en soi est replacée sous le règne de l’inconscient, de
l’irrationnel, des premiers étayages affectifs, des pulsions, malgré les
consolidations opérées via les croyances façonnées au contact du milieu
(parents et société). En dernière instance c’est le plan affectivo-émotionnel
qui fait la différence. Bien des avis convergent en ce sens, mais nous
retrouvons bien là la problématique de la confiance en soi : elle serait
enracinée dans la période de la formation du moi et configurée, à l’instar
d’une sculpture, par les multiples impacts des croyances en élaboration au
contact de la société.
Hubert Jaoui cite l’exemple de la rupture avec une femme ayant fait
l’objet d’un sur-investissement, ayant servi à la fois de repère et de
référence et de la déstabilisation temporaire ou définitive qui peut en
découler, au point de se manifester en termes de perte de confiance en soi.
Cet exemple montre aussi la prudence avec laquelle nous devons utiliser
la notion de confiance en soi. En effet, s’agit-il dans le cas ci-dessus
véritablement d’une perte de confiance en soi ?
Il semble que pour le sens commun bien des symptômes ou des
manifestations comportementales, des états d’âme même, soient assimilés à
la confiance en soi, plus souvent d’actualité que la confiance en soi tout
court, comme nous l’avons déjà signalé.
On peut citer : le désarroi, le doute, l’inquiétude, le dépit, la peur, la
crainte… Il nous paraît préférable, comme nous cherchons à le faire dans
cet ouvrage, de tenter de mieux cerner la confiance en soi afin de resserrer
sa vraie identité en tant que phénomène participant à la vie du moi
proprement dit. Ceci bien que la confiance en soi semble mêlée à de
multiples titres aux faits de la vie affective comme de la vie sociale, la
scolarité constituant semble-t-il une période très sensible pour l’étayage de
la confiance en soi.
◗ Pouvoir rebondir
Autant d’indices qui sembleraient prouver que les gens créatifs procèdent
comme quelqu’un qui aurait une bonne dose de confiance en soi. C’est
pourquoi la formation à la créativité, en inculquant des méthodes qui
augmentent la puissance pour inventer, créer, innover, alimenter, sollicite ou
en tout cas appelle au « rendez-vous » la confiance en soi. En chemin on
retrouve cette évidence : le manque de confiance en soi c’est se croire
impuissant, chose fatale quand il s’agit de créer, mais aussi au regard de
l’agir comme du décider. Chez les créatifs, il y a toujours de la
ressource20 comme chez les gens qui croient en leur étoile. Être heureux, ne
serait-il pas affaire de décision personnelle (happiness en anglais, fortunato
en italien) dans le sens de prendre les choses qui arrivent du bon côté. Un
proverbe britannique dit : « If live gives you lemon’s make lemonade21 »,
preuve que l’on peut toujours « positiver » une situation selon l’expression
passée dans le sens commun. Incontestablement, il y a un rapport étroit
entre confiance en soi, ressource, puissance et capacité de dépassement.
Nous sommes le lieu stratégique de croyances « limitantes » ou
« potentialisantes » (limiting believes ou empowering believes). Ainsi il se
confirmerait que nous ayons un énorme pouvoir sur notre vieillissement, au
sens de pouvoir fortement l’infléchir favorablement ou défavorablement à
travers les manifestations de la vie intellectuelle, sexuelle, physique.
Comprise comme une croyance potentialisante, source de créativité, la
confiance en soi apparaît sous cet angle comme une ressource à « gérer »
comme on dit volontiers aujourd’hui. Reste à créer les conditions de son
épanouissement. Si à l’origine, comme nous l’avons vu, les messages
parentaux, l’école, l’entourage ont pu jouer un rôle dans l’étayage de la
confiance en soi, en se faisant les alliés d’un moi en construction, d’autres
enjeux dans la vie de l’adulte vont venir consolider (ou altérer) cette
construction.
◗ Responsabiliser
Les gens qui manquent de confiance en eux ont tendance à mettre leur
vie sur des rails. Ils manquent de flexibilité mentale et cèdent au poids fatal
des logiques déductives (il y a ceci, donc il va se passer cela, donc je ne
ferai pas telle chose…). On se gardera de confondre rigidité et assurance.
Les gens créatifs qui ont une bonne dose de confiance en soi font leurs
preuves quand les chemins se resserrent ou risquent de déboucher dans une
impasse. On peut avancer que la vraie confiance en soi, c’est dans la
solitude qu’on l’éprouvera avec le plus de certitude. En effet, la vraie
confiance en soi range l’adulte dans la catégorie des personnalités
autotelliques22, c’est-à-dire de celles qui se fixent elles-mêmes des objectifs
et qui savent qu’elles vont y arriver (à l’instar d’Archimède, Christophe
Colomb ou Pasteur…).
En revanche les personnalités exotelliques préfèrent se rattacher à des
objectifs qui leur viennent de l’extérieur, marquant ici la dépendance de leur
destinée en quelque sorte (quelle emprise a-t-on sur son sort ?). De plus les
personnalités autotelliques semblent se libérer plus volontiers du jugement
des autres. Enfin, elles ont une appréciation juste et lucide de leurs moyens
et capacités.
À coup sûr les frères David et Tom Kelley, fondateurs d’une agence de
design les plus réputées du monde (IDEO a imaginé la première souris
d’Apple et Steve Jobs a été l’un de leurs plus célèbres clients) font partie de
ces personnalités autotéliques. Dans leur livre « creative
confidence »23 publié aux Etats-Unis en 2014, ils se sont passionnés comme
Hubert Jaoui pour les rapports entre confiance et créativité. Ils définissent la
notion de « confiance créative » comme le fait de « croire en sa propre
capacité à changer le monde qui nous entoure. Il s’agit d’être convaincu que
l’on peut réaliser le projet que l’on a conçu. Nous considérons que cet
aplomb, cette croyance en sa capacité créative, est au cœur de
l’innovation ». Les deux frères Kelley ont décidé d’écrire leur livre sur la
confiance créative et de faire ensemble un tour du monde, après que David
soit assuré de la rémission d’un cancer, pour faire partager leur expérience
que l’on peut gagner en confiance et inventer sa vie ou la réinventer.
David en 2005 a créé à Standford l’école « d.school » pour enseigner le
« design thinking » aux futurs entrepreneurs. Sensibles aux travaux d’Albert
Bandura, théoricien de « l’auto-efficacité », ils s’appuient sur un constat :
ceux qui pensent pouvoir changer ont plus de chance d’accomplir ce qu’ils
se sont fixé. Les frères Kelley ont donc repris à leur compte le point de vue
de l’éminent professeur de psychologie canadien, A. Bandura24, concernant
le concept d’auto-efficacité selon lequel les personnalités considérées
comme autotéliques « visent plus haut, testent plus, sont plus persévérantes
et font preuve d’une plus grande résilience face à l’échec25.
La confiance créative est une manière intrinsèquement optimiste de
considérer ce qui est possible. Se centrer sur l’humain est au cœur du
processus d’innovation. Les frères Kelley racontent l’histoire d’un des
ingénieurs de la société Healthcare, Doug Dietz qui a imaginé la
transformation des gros appareils IRM en navire de pirates pour moins
effrayer les enfants confrontés à l’hôpital à une séance de résonnance
magnétique dans de grosse machine bruyantes et angoissantes. Et le résultat
de cette opération réussie de « design thinking » fut probant. Clé :
l’empathie : il convient pour être créatif de se connecter aux besoins, aux
désirs, aux émotions des vraies personnes concernées et autres que soi.
C’est ainsi que vient l’inspiration et que la confiance créative peut
fonctionner.
Pour les frères Kelley qui ont reconnu chez leur client devenu ami Steve
Jobs, un profond sens de la confiance créative, tout tient à l’idée qu’on n’est
pas limité à ce qu’on a déjà fait. C’est cette « peur » qu’il faut dépasser pour
être capable « d’ouvrir une brèche dans l’univers ». Un des signes forts de
la confiance créative c’est la levée d’un obstacle majeur : la peur de l’échec.
Ceux qui font preuve de confiance créative, tentent, osent, ne savent pas si
ça va marcher, mais persévèrent. Il y a du courage dans la confiance
créative et un grand détachement vis-à-vis du processus destructeur de la
comparaison. La confiance créative intègre l’idée d’une construction
singulière et inédite qui ne craint pas d’emprunter aux autres pour trouver
sa voie. Les innovateurs pensent comme des voyageurs, sont curieux,
attentifs, plutôt détendus (pas toujours), ils observent, posent beaucoup de
questions commençant par pourquoi, se constituent des réseaux pour
confronter, partager, croient dans le hasard des rencontres et des
rapprochements.
Pour le sens commun, il est admis que la chance il faut la provoquer : qui
ne tente rien n’a rien. Dans une certaine mesure, la confiance en soi, c’est
croire en son étoile. On trouve une belle expression de cette hypothèse dans
le film Les ailes du désir. Wim Wenders a voulu illustrer ce mythe selon
lequel chacun de nous aurait un ange qui le protégerait. La croyance dans
une telle force occulte, au cœur même de la confiance en soi, dépasserait
largement les talismans ou autres objets de superstition (grigris des sportifs,
des artistes ou des candidats à un examen…) qui apparaissent plus comme
des motifs de réassurance (« les béquilles » de la confiance en soi).
Au contraire, croire dans son étoile renvoie résolument à un regard
tranquille et optimiste sur la vie et au statut de l’idée de bonheur dans notre
conscience.
Il n’est pas contestable que tout un courant de l’église catholique a mis en
exergue l’idée de malheur dans nos sociétés : « Plus vous en baverez, plus
vous avez des chances d’aller au paradis ». De quoi conditionner les
masses ; ce qui peut se comprendre dès que l’Église est devenue une
religion d’État, donc associée au pouvoir en place (pape, cardinaux, rois,
princes…).
Hindouisme et bouddhisme n’inspirent sur ce plan guère plus confiance : la vie est
racontée à travers une succession de malheurs, de catastrophes, de sortilèges. Les
épreuves apparaissent comme autant d’étapes vers la sainteté (voir les Japonais et leur
idéologie littéralement masochiste avec leurs kamikazes et la coutume du hara-kiri…). À
l’inverse, les cultures polythéistes grecques, la culture juive et celle des premiers
chrétiens ne sont pas doloristes.
C’est quand tout va mal que cette croyance en sa bonne étoile est le plus
vivement ressentie. Certains parleront de foi, foi dans la vie, si ce n’est en
un dieu (comprise alors comme une vertu, un habitus de l’âme, en bref « le
commencement du salut de l’homme », concile du Vatican I). Au sens
philosophique, cette foi serait plutôt de l’ordre d’une adhésion ferme de
l’esprit, d’une conviction dans notre liberté d’être à la vie. Cette bonne
étoile ramènerait alors chacun à soi : elle permet de croire en soi sans
ombre, ni entrave extérieure, sans craindre que du mal nous serait réservé.
Bref, que l’on peut exister et être l’auteur de son propre chemin et que nous
seuls, sans nous mentir, pouvons apprécier la qualité du chemin.
ne pas parler ;
baisser le regard ;
hésiter ;
ne pas oser ;
être compassé ;
ne pas se livrer…
atmosphère conviviale ;
principe de non-compétition ;
exercice répétitif (60 % de VO2 Max) ;
intensité régulière et faible.
Quand le moi est fort, que la confiance en soi est là, l’individu regarde
l’échec autrement. Il n’a pas cessé de croire en lui. Attaqué par les critiques,
Beethoven répliquera « Je veux prendre le destin à la gueule ; cette musique
n’est pas pour vous, elle est pour les temps à venir ». Face à l’échec, quand
on se sent costaud, on regarde d’une part, la réalité, on cherche à mieux la
connaître, à évaluer le vrai niveau (souvent complexe) de difficultés que
l’on a affronté, et d’autre part, on n’évite pas d’évaluer exactement ses
moyens à soi et de sentir où étaient les limites. Ce double mouvement
d’intelligence et de maturité dans l’échec amène à tirer profit de l’adversité
en même temps que de l’échec et à se consolider dans l’épreuve.
Pour faire au mieux avec soi, il est utile de confronter avec un certain
recul quatre niveaux :
niveau d’aspiration ;
niveau de réalisation ;
niveau des possibilités ;
niveau de réussite.
- définir les buts à court terme et à long terme que l’on veut atteindre (exemple : devenir
plus indépendant et moins impulsif à court terme et accéder à un poste précis de
responsabilité à long terme), faire en sorte que les buts exprimés soient en rapport avec
les buts plus ou moins conscients ;
Faire au mieux avec soi, c’est accepter le présent, apprendre à rester près
de soi, consentir à être soi et à aimer cet être soi, malgré ces « pré-
construits » que semblent être les complexes, notamment les conduites
d’échec et la culpabilité.
◗ Le complexe d’insécurité
Ceci ne peut être que le fait d’un moi bien construit, souple et nourri par
l’amour, si ce n’est entretenu. L’amour conçu ainsi consiste en une attitude,
une orientation personnelle qui nous permet de nous affirmer en ne formant
qu’un, tout en restant deux, sans se perdre dans l’autre mais au contraire en
réussissant mieux à se trouver. En ce sens, on peut dire que l’amour affermit
la confiance en soi et qu’un bon niveau de confiance en soi est nécessaire
pour engager, avec des chances de succès, une relation amoureuse.
Dans la pratique, l’amour conçu comme un art exige de la discipline, de
la patience et de la concentration (sensibilité à soi). C’est à ce prix qu’on
arrivera à s’éloigner de l’orientation narcissique qui porte à n’éprouver
comme réel que ce qui existe en nous, tandis que les phénomènes extérieurs
sont vidés de leur réalité propre et ne sont vécus qu’en fonction de l’utilité
ou du danger qu’ils présentent.
Allons plus loin : aimer dans la vie c’est être dans un état constant
d’intérêt actif vis-à-vis de l’objet extérieur. L’amour est une activité, un état
d’éveil intense, dont on a la liberté de commande. La confiance en soi est
évidemment concernée en ce sens qu’elle ne peut qu’être d’une part
sollicitée, voire dynamisée, par l’entreprise amoureuse.
sous-estimation de la difficulté ;
mauvaise évaluation des moyens nécessaires à mettre en œuvre ;
surestimation des capacités personnelles ;
manque de vigilance pendant le déroulement de l’action ;
évitement de toute forme de préparation.
C’est le cas de l’élève trop sûr de lui qui ne consacre pas assez de temps à la révision
d’un programme lors d’un examen, de joueurs qui ne prennent pas au sérieux la
préparation d’une rencontre sportive contre un adversaire de moindre standing, d’un
responsable commercial, trop sûr de son « métier » qui ne prend pas le soin de répéter
son intervention orale en public.
◗ Niveau atteint
surcompensation ;
sublimation ;
dépassement de soi.
Tout un courant parcourt la pensée humaine qui pose que le sens de la vie
réside dans l’être et non dans l’avoir. Pour la notion orientale de
« Libération » ou « Délivrance », il ne fait pas de doute que le mur de la
prison est en nous, le gardien de la prison est en nous. La recherche du
bonheur à tout prix contraint plus tyranniquement les hommes à agir
qu’aucun despote ne l’a jamais fait pour ses esclaves.
Arnaud Desjardins dans Les chemins de la sagesse61, inspiré par son
guide hindou Shri Swani Prajnanpad (1891-1974) propose une approche de
la sagesse qui postule que le sage est libre du désir parce qu’il a vaincu la
dépendance de l’extérieur. Comment ? En dénouant les nœuds, en dissipant
les mensonges, en relâchant les tensions. Le processus est une lente
croissance vers la connaissance parfaite de soi et de l’Absolu (atma et
brahman). Seule la sadhana, une sorte d’ascèse, de discipline spirituelle,
peut y conduire. But : ne plus être attiré par quoi que ce soit dans le monde
(en sanscrit vairagya signifie disparition des désirs et des intérêts). Le sage
n’a plus d’intérêt pour rien. La libération, le satori, c’est-à-dire l’éveil
définitif, ne peuvent faire irruption que dans un être mûr.
Dans l’Hindouisme, particulièrement le vedanta, la voie est une
transformation, une métamorphose. Le sage est affranchi du mental, il vit
dans la conscience de l’unité.
Pour les hindouistes, la vraie raison de l’incompréhension est que les
hommes s’en tiennent à la surface des événements. Il faut pénétrer les
mécanismes profonds. Pour le sage toute distinction d’échec ou de réussite
personnel a disparu. Il cherche à trouver en lui-même son point d’appui, et
fait preuve de neutralité.
Une des leçons pour l’occident qu’Arnaud Desjardins en tire, tient au
pari sur l’objectivité plutôt que sur l’émotion dans l’éducation des enfants :
« L’enfant ne se sentira libre de tout raconter que si les parents l’écoutent et lui
répondent toujours sans émotion, sans montrer de préférences individuelles avec une
attitude que j’appellerai scientifique : voici les faits que l’enfant ignore encore, voyons
ensemble ce qu’il en est, quelles sont les causes de ce que l’enfant rapporte, quelles en
sont les conséquences. Ce n’est pas autre chose d’ailleurs que l’attitude d’un maître
avec un disciple62. »
Si la confiance en soi est bien inscrite dans le sujet, on peut penser que
les moyens et les méthodes qui permettent de mieux connaître sa
conscience, méritent l’attention. C’est le cas de la sophrologie qui offre une
sorte de synthèse entre le courant phénoménologique et mystique de l’orient
et le courant pragmatique et expérimentaliste de l’occident (du zen à la
méditation transcendantale jusqu’aux techniques héritées de l’hypnose ou
de la relaxation de Schultz).
La sophrologie65 prône le dialogue intérieur dans le calme d’où l’idée de
la relaxation. La relaxation dynamique de Caycedo vise la découverte en soi
d’un ensemble fort d’unité, de cohérence, de stabilité et d’équilibre, puis la
prise de conscience de notre subjectivité à travers le jeu des accords et
d’unisson, d’appartenance et d’alliance avec le monde. Mais par la
relaxation, la sophrologie veut aller plus loin que le monde, jusqu’à une
non-situation dans un espace sans références, ni repères pour demeurer
immobile et « écouter le silence ». Les travaux de Caycedo bouclent le
travail par un retour au quotidien : quand le regard sur soi a changé, le
regard sur les autres et le monde s’en trouve normalement modifié.
Cette recherche d’harmonie prend en compte le moi et sa manifestation,
la confiance en soi. Le pari d’unité et d’harmonie fait à travers la pratique
de la relaxation peut constituer un chemin à emprunter pour dialoguer au
calme avec soi-même.
Roger Mucchielli
« Dans les rues de Tanaka », écrit Maraini, « ce n’était pas la misère qui faisait
impression mais le fait que les Japonais gardaient la tête haute même dans les
circonstances les plus désespérées, alors que les « éta » se comportaient comme des
gens sans fierté, humiliés, écrasés par des millénaires de mépris. Je ne pourrai jamais
oublier les regards furtifs et méfiants des habitants pauvres de Tanaka. Ils faisaient
penser aux chiens errants qui fuient même la caresse, croyant voir derrière chaque
geste le bâton ou le piège. Un des qualificatifs méprisants appliqués aux « éta » est
kokonotsu, c’est-à-dire 0,9. Ils ne sont pas des unités, des individus, mais des êtres
incomplets, des fractions d’homme. Un autre mot les qualifiant est yotsu, c’est-à-dire 4,
mot prononcé avec un geste de la main montrant quatre doigts, allusion aux animaux
quadrupèdes… »
Sous ce personnage artificiel, structuré autour d’un phallus fantasmatique, contraint par
la surcompensation à aller toujours plus loin vers les limites du « macho » incontesté, à
jouer les « mauvais garçons » pour être plus sûr d’être garçon, se cache une fissure de
la personnalité, une vie construite « à côté » du Moi, un Moi réel mais refusé, un Moi
idéal mais artificiel et inauthentique, et en tout état de cause, un désespoir profond
d’être ce qu’elle ne veut pas être.
… Elle vient pour une recto-colite qui dure depuis quatre ans, qui a « résisté » à toutes
les thérapeutiques, et que les gastro-entérologues consultés déclarent « nerveuse »…
« Cher père, tu m’as demandé un jour pourquoi je prétendais avoir peur de toi. Comme
d’habitude, je ne savais alors quoi te répondre en raison même de la peur que tu
m’inspirais… Assis sur ton fauteuil, tu gouvernais le monde. Seule ton opinion était
juste, toute autre était folle, excessive, toquée, anormale… Le courage, la décision, la
confiance, la joie que j’éprouvais au contact de telle ou telle chose ne résistaient pas
quand tu y étais hostile ou que je supposais seulement ton hostilité. Devant toi, j’avais
perdu la confiance en soi-même et assumé en retour un immense sentiment de
culpabilité… »
« Voici deux nuits de suite que je crache du sang ; je pourrais dire que je me suis
déchiré moi-même. La menace violente mais vaine que mon père avait coutume de
proférer contre moi Je te déchiquèterai comme un poisson…, cette menace se réalise à
présent indépendamment de lui-même… »
◆ Les maladies et altérations par excès. Il semble abusif d’insinuer
ainsi qu’il y a des excès pathologiques de la confiance en soi. Le sens
commun serait plutôt porté à soutenir, après ce qui vient d’être dit, qu’on
n’a jamais trop confiance en soi. Pourtant l’expérience commune admettra
que la prétention, l’orgueil, la suffisance, l’autovalorisation, sont autres
choses que la confiance en soi. Ce sont là des formes qui, apparemment,
supposent une certaine confiance en soi, mais qui dépassent pourtant la
juste estime de soi, et qui sont affichées comme « en façade », sans nous
renseigner exactement sur le vrai degré de confiance en soi de la personne
concernée.
Le monde est plein de gens dont l’apparente confiance en soi confine à
l’impudence, dont l’affirmation personnelle s’étale souverainement, qui
soutiennent les opinions les plus subjectives et les plus douteuses avec une
admirable assurance. Ils tranchent avec une autorité qui impressionne…
Thiers déclarait péremptoirement aux débuts du chemin de fer que les
passagers étoufferaient dans les tunnels en projet. Je ne sais plus quel expert
soutenait en 1920 que les avions ne pourraient jamais voler à plus
de 8000 m d’altitude. De nombreux et sentencieux pronostiqueurs ont
annoncé la pénurie d’énergie par l’épuisement des mines de charbon, à
l’époque du charbon… Les leaders politiques et syndicaux sont caractérisés
par une tendance superbe à « définir la situation » dans laquelle se trouvent
les humains, au moment (toujours historique), où ils parlent. Leurs suiveurs
avalent les définitions de la situation distillées par chaque leader, et
manquent suffisamment de confiance en soi (sinon seraient-ils suiveurs ?)
pour s’en faire une idée plus personnelle.
Chose étrange, il ne semble pas que la santé mentale soit nécessaire à la
confiance en soi. L’histoire est pleine de prophètes qui ont régulièrement
annoncé la fin du monde pour une date déterminée, en précisant même
quelle ville allait échapper à l’Apocalypse (ce qui a provoqué à certaines
époques d’énormes déplacements de population, avec famine et épidémies).
L’histoire récente est pleine de chefs de sectes, de toute évidence atteints
d’une psychose non encore identifiée, imposant son destin à leur groupe,
par les seules forces de leur imperturbable affirmation, par leur conviction
profonde d’incarner la Vérité.
Nous avons tendance à retourner le problème et à incriminer la faiblesse
d’esprit de leurs adeptes, l’hystérie de leur public, les aberrations du
« besoin de croire » dans une société trop rationalisée…, mais le fait est là
de toute façon : ces illuminés ont une confiance en eux-mêmes à toute
épreuve.
Sur ce point (la santé mentale ne semble pas nécessaire à la confiance en
soi), je crois utile de faire une distinction entre psychose et névrose. Je n’ai
jamais rencontré chez les névrosés une confiance en soi intacte, du moins
chez les névrosés qui sont conscients de leur malaise (ce qui élimine les
névroses de caractère). Leur Moi, comme l’a souligné Binswanger, est
éteint, sans unité, sans capacité de prises satisfaisantes sur la réalité et sur
l’avenir. C’est un Moi en conflit intérieur, menacé, angoissé, parfois
submergé. Par contre, dans certaines formes de psychoses où le Moi semble
avoir perdu ses limites par rapport au non-Moi, la confiance en soi prend
des dimensions cosmiques ; l’affirmation de soi a pris la place et le poids de
l’affirmation du monde extérieur chez les gens normaux ; le Moi n’a plus
pour objet que lui-même, mais un « lui-même » devenu objet.
Il n’est donc pas étonnant, dans cette perspective, que le narcissisme ait
paru à Freud la caractéristique de la psychose (« la névrose narcissique ou
psychose met en évidence la possibilité pour la libido de réinvestir le Moi
en désinvestissant l’objet », écrivent Laplanche et Pontalis, op. cit., p. 261).
En fait, il ne faut pas comprendre le narcissisme psychotique (qu’il
convient, bien évidemment, de distinguer du narcissisme au sens commun,
ou complaisance à soi-même) comme un « auto-érotisme » (définition de
Karl Abraham, acceptée par Freud) car le Moi, dans ce genre de maladie, ne
correspond plus du tout à ce que nous entendons habituellement par ce
concept. Un Moi différent et nouveau a surgi, confondu avec ce qui était le
Monde. L’objet est devenu sujet tout autant que le sujet est devenu objet.
Bien différents sont les excès de la confiance en soi dans les formes
caractérielles défensives que nous rencontrons au hasard des relations
sociales ; elles sont les surcompensations plus ou moins accusées des divers
complexes énumérés ci-dessus. La description des conduites rigides
d’« hyperconfiance en soi » suffit à désigner le manque qu’elles cachent,
puisque aussi bien elles en sont les contradictoires, comme l’insolence par
rapport à la timidité.
La volonté de domination et les conduites d’hyperpuissance, le complexe
de supériorité et la recherche systématique de « l’être-en-vedette », la
recherche effrénée du succès et de la gloriole, la possessivité affective et la
quête obsédante du « contact », de l’accord ou de l’amour, les conduites
d’affirmations morales intransigeantes et le rigorisme persécuteur,
pourraient être retrouvés, à l’état pur ou combiné, dans toutes les formes
del’hyperconfiance en soi étalée au niveau de la « façade sociale ». Sans
doute le caractère, au sens de René Le Senne, intervient-il dans ces
altérations pathologiques comme une « canalisation » spécifique de
l’enflure. Si ceci est vrai, alors le EAS ou « Passionné » aurait plus de
chances d’être autocratique, le EnAP ou « Nerveux » aurait plus de
prédisposition à la vanité, le EAP serait attiré par la glorification de lui-
même, Le EnAS ou « Sentimental » par la possessivité affective, le nEAS
ou « Flegmatique » par le rigorisme intransigeant lorsqu’ils
« surcomposent ».
Après cette évocation des maladies et altérations diverses, par manque ou
par excès, la saine confiance en soi apparaîtrait à mi-chemin entre le doute
et l’orgueil. « S’estimer soi-même d’une juste estimation, intermédiaire
entre la surestime et la mésestime », écrit Vladimir Jankélévitch (dans
Traité des vertus, p. 324), « rend possible une espèce de positivisme qui
implique l’appréciation mesurée de sa propre valeur… Pourquoi te
promènes-tu comme si tu avais avalé un obélisque ? En effet, de quoi tous
ces polissons sont-ils si fiers ? Exposer sa sécurité, ce n’est pas exhiber son
plastron ou sa chemise brune… ».
Selon toute vraisemblance, c’est cette dernière issue qui paraît positive et
« normale ». Et pourtant…
◆ La confiance en soi ne se réduit pas à l’acceptation des limites et
des déterminations du Moi. Tant qu’elle existe, la confiance en soi exclut
la résignation tout comme elle exclut le découragement. Lorsqu’il en est
autrement, c’est-à-dire lorsqu’elle se rétrécit comme une peau de chagrin au
fur et à mesure que les limites s’imposent, elle se perd brusquement à un
moment donné et même, peut-être, est-elle déjà perdue au premier
rétrécissement. À sa place se développe le renoncement à la vie, et dans
certains cas la résignation fait place au désir de mort.
Que la confiance en soi puisse persister (et même quelquefois être
stimulée) dans la conscience des limitations, surgie de l’expérience de
l’échec, la preuve nous en est fournie par tous ceux qui, infériorisés par leur
origine ou leur appartenance, mutilés par accident ou de naissance, trahis ou
abandonnés, aux prises avec des difficultés matérielles ou morales qui
ruinent habituellement le goût de vivre, ont trouvé ou trouvent en eux-
mêmes des ressources insoupçonnées pour faire face au malheur et réaliser
l’impossible. Il serait facile d’évoquer ici les Robinson Crusoë de beaucoup
de naufrages et de perditions dans les îles, les déserts ou les glaces, les
personnalités exceptionnelles qui se sont révélées dans les camps de la mort
et dans d’autres « situations limites » où l’humain fait place au surhumain.
En ce qui concerne les handicaps physiques, nous évoquerons tous ceux
qui, comme Ellen Keller dans son livre sur sa vie d’aveugle ou comme
Patrick Segal dans L’homme qui marchait dans sa tête ont eu à lutter, et ont
lutté avec succès, pour simplement exister. Des « peintres de la bouche et
du pied » réalisent leur vocation en dehors des voies et moyens ordinaires,
et dans la joie. Les « enfants de la thalidomide », nés sans bras il y a déjà
vingt ans, ont réussi (certains seulement, et c’est là le mystère) à faire du
sport, des études, des créations esthétiques, qui forcent l’admiration.
Dans un autre champ d’expériences, nous évoquerons des hommes et des
femmes qui, partis de rien et manquant de tout, ont surmonté tous les
handicaps économiques, sociaux et culturels, et « ont fait quelque chose de
leur vie ». Il existe aux États-Unis un « Prix Horatio Alger » récompensant
(disent les statuts de cette Fondation) « ceux qui se sont élevés de la misère
à la gloire par leur initiative, leur résistance aux épreuves de la vie, leur
intégrité, leurs qualités personnelles et leur travail créateur ». Je citerai au
hasard, sur la liste des lauréats depuis l’institution du Prix : le Dr Ralph
Bunche, Noir et ancien portier, devenu PrixNobel de la Paix…, le pasteur
Norman Vincent Peale, ancien liftier devenu auteur littéraire…, Michel de
Bakey, fils d’un immigrant libanais sans ressources et devenu un des as de
la transplantation d’organes… La biographie de l’explorateur Stanley est
une illustration plus connue du même genre.
On est porté naturellement à évoquer l’ambition ou d’autres motivations
puissantes, mais de ces innombrables efforts, les plus obscurs ne sont pas
les moins grands et l’ambition, si elle existe, mérite un autre nom quand elle
est ambition d’être. On inclinera aussi vers une « explication » faisant état
d’une petite enfance privilégiée par un climat d’amour maternel et de
confiance paternelle, mais Lagache (pourtant psychanalyste, comme on le
sait) a tiré de son expérience clinique la constatation que certains êtres
réagissent démesurément à de petits chocs ou à de petites carences, même
dans l’enfance, alors que d’autres, victimes de traumatismes objectivement
importants ou de carences affectives primitives indéniables, ont résisté.
Dans la crise de confiance en soi, l’issue qui consiste en un
« réajustement » de l’idée du Moi après l’épreuve de l’échec, ou en une
« limitation des ambitions » n’est donc qu’un acte de la raison et au mieux
qu’un progrès de la connaissance de soi. Ce n’est en aucun moment un acte
de la confiance en soi. Si celle-ci subsiste et tant qu’elle subsiste, elle est,
d’une manière ou d’une autre, négation de la limite. L’annulation du réel, la
compensation, la surcompensation même, semblent des actions de défense
de l’idée du Moi, comme si le Moi avait besoin, pour croire en lui-même,
de nier toute atteinte ou tout écart, de surmonter l’échec ou l’obstacle.
Si l’on ne cède pas à la tentation de « chosifier » l’idée du Moi sous la
forme d’une « instance intrapsychique », il apparaît que « l’idée du Moi »
n’est pas une simple image de soi, un reflet (que le narcissisme prendrait
plaisir à contempler), mais une projection du Moi en avant de lui-même,
projection d’un désir d’être dont la source serait dans le dynamisme du Moi
comme élan et comme projet…, une sorte de vouloir être, bien différent
d’un vouloir-paraître.
En résumé
De ces diverses réflexions, il ressort que le Moi ne semble pas pouvoir être réduit à
la somme de ses déterminations ou à la résultante des influences qu’il a subies (et
pas plus d’ailleurs qu’il ne peut se réduire à son système d’opinions ou à ses rôles
sociaux). « Que nous soyons vécus par les influences puissantes de la vie », écrit
Binswanger, « ce n’est là qu’un aspect de la vérité ; l’autre aspect, c’est que nous
nous déterminons comme notre destin » (dans Discours, parcours et Freud, trad. fr.,
p. 200). La confiance en soi ne serait pas relative à une juste appréciation denos
limites, puisqu’elle est aussi une volonté de se réaliser malgré les limites.
METTRE EN PRATIQUE
EXERCICE 1
Aller au-devant de soi
désirs ;
aspirations ;
traits de caractères ;
aptitudes ;
talents.
Ainsi, chacun des groupes travaillera sur l’un des versants d’une même
question : comment définir la confiance en soi ?
On recommandera aux participants de conserver les nuances et les
divergences de leurs impressions et de leurs propositions, au cours de leur
reformulation.
L’exercice se poursuit par un debriefing collectif.
Définition : Définition :
Corrigé p. 203
EXERCICE 3
Le jeu des identifications
Même si les pulsions forgent la personnalité très tôt, il est admis que les
échanges (mieux, les interactions) sensibles (visuels, auditifs, etc.)
langagiers, affectifs, intellectuels, contribuent à façonner la personnalité.
La vie pulsionnelle infantile (voir Françoise Dolto, psychanalyste et
pédiatre, Paris, éditions du Seuil) a pu déjà jeter les bases des talents, des
inhibitions, des défauts, des qualités, des humeurs, des tendances du
caractère. Ainsi, selon Françoise Dolto, ce serait au stade oral (1-2 ans) que
se formerait ou pas le caractère plus ou moins égoïste.
Pour le reste, la personnalité est bien le fruit d’identifications avec
l’entourage. Ces identifications contribuent à la constitution du moi. Quand
elles sont réussies, une certaine unité règne, en même temps que la
tranquillité : on s’accepte comme on est ou comme on a cherché à être ou
devenir.
Les déséquilibres ou les décalages nous exposent à des troubles.
On notera les réponses par écrit et on établira une base de dialogue sur
les faits et souvenirs rapportés.
Corrigé p. 204
EXERCICE 4
Mesurer l’estime de soi
J’aime discuter avec des gens même quand je suis en désaccord avec eux 7 5 3 1
J’aime bien regarder les gens dans les yeux quand je leur parle 7 5 3 1
Total général
Corrigé p. 204
EXERCICE 5
Se déculpabiliser
Tout à En Rarement
fait partie
TOTAL
Corrigé p. 204
EXERCICE 6
Le cas Marcel
À partir du cas suivant, engager une discussion pour établir le lien entre
construction du moi, confiance en soi et rapport aux parents.
Le père de Marcel était métallurgiste dans un chantier naval au Havre. Peu instruit, il
restera simple ouvrier sableur, un métier ingrat et dur qui lui vaudra d’attraper une
maladie pulmonaire à caractère professionnel du type silicose.
Militant syndical convaincu, il participe à toutes les grèves entre 1950 et 1970. Il
inculque à sa famille les valeurs de camaraderie (renforcées durant une captivité en
Allemagne), de respect des autres, du travail et de l’argent durement gagné. Marcel y
est particulièrement sensible. Le père de Marcel effrayé par les responsabilités, inhibé
devant ses chefs, refusera toute maigre responsabilité. Comme honteux et déçu par son
échec, il fera partager à Marcel son mépris pour la réussite sociale individuelle (« ces
ingénieurs en blouse blanche qui ne savent rien et qui commandent »). Marcel, dirigé
vers un lycée technique (« là où on fait de l’atelier pas de la philo ») traverse les études
avec un certain succès mais tourne le dos aux écoles d’ingénieurs, se refusant
inconsciemment à « trahir » son père. Il choisit des études supérieures littéraires, par
défi, prend la revanche de son père « dans la rue » en mai 68, et se dirige vers
l’enseignement pour former les autres. Terriblement ambitieux, il restera longtemps en
retrait, sans aller vers des responsabilités, comme à nouveau pour ne pas trahir son
père, lequel aspire pourtant au succès de son fils. Le succès viendra pourtant pour
Marcel dans l’accomplissement des valeurs parentales d’amour des autres, du travail,
du partage, du mérite, et c’est l’enseignement, l’éducation et la formation qui
constitueront le seul champ possible d’expression en harmonie avec la problématique
parentale d’origine.
Corrigé p. 205
EXERCICE 7
Se remettre en selle
Corrigé p. 207
EXERCICE 10
Prendre rendez-vous avec soi-même
La confiance en soi suppose que l’on s’accepte, que l’on se respecte, bref
que l’on prenne attention pour soi.
Dressez la liste de toutes les choses que vous auriez envie de faire (ou de
refaire)
Ensuite, choisissez des priorités et fixez-vous des délais pour les réaliser.
En groupe, discutez les raisons qui freinent ou entravent le soin consacré
à soi.
Tirez des enseignements.
Corrigé p. 207
EXERCICE 11
Confiance en soi et échec scolaire
L’échec scolaire n’est pas une fatalité. Pourquoi les enfants échouent ? La
question est banale. Elle mérite le respect… et un certain recul.
Constituez deux équipes pour lister les causes d’échecs scolaires. Notez,
en les hiérarchisant, les principales causes. Sont-elles inéluctables ?
En lisant le livre On achève bien les écoliers de Peter Gumbel (Grasset,
Paris, 2010), on ira plus loin pour comprendre comment le manque de
confiance peut expliquer les échecs scolaires.
À quoi cela tient-il ? Comment réagir et renverser la tendance ?
Comment créer les conditions favorables de la réussite ?
Corrigé p. 208
EXERCICE 12
Trop de confiance en soi nuit
Corrigé de l’exercice 1
Corrigé de l’exercice 2
Corrigé de l’exercice 3
Corrigé de l’exercice 4
Corrigé de l’exercice 5
Corrigé de l’exercice 6
Corrigé de l’exercice 7
Corrigé de l’exercice 8
Corrigé de l’exercice 9
Toujours = 5 ;
Souvent = 3 ;
Rarement = 1.
Selon le total obtenu on pourra mesurer l’ampleur du déséquilibre
travail/vie personnelle. Si votre score est compris :
Corrigé de l’exercice 10
La liste des « bonnes choses » pour soi est évidemment très personnelle.
À titre d’exemple, on fournira les pistes suivantes, histoire de réveiller
certains « appétits » :
Corrigé de l’exercice 11
Corrigé de l’exercice 12
9 h – 10 h 15 - De moi au soi.
- La notion de soi et le devenir adulte.
- Exposé et travaux de sous-groupes.
10 h 15 – 10 h 30 - Pause.
10 h 30 – 11 h 30 - Le soi social et le contexte.
- Travail en sous-groupes : l’influence du contexte.
11 h 30 – 12 h 30 - Jeu avec la fenêtre de Johari.
- Comment se situe-t-on ?
- Représentations de soi et sentiment de valeur de soi.
- Témoignages et expériences personnelles.
12 h 30 – 14 h - Déjeuner.
14 h – 15 h 30 - Travail en sous-groupes sur les multiples manifestations de
la confiance en soi (chapitre 5, section 1).
- Enseignements tirés.
- Points communs, limites, contradictions.
- Les différentes facettes de la confiance en soi.
15 h 30 – 15 h 45 - Pause.
15 h 45 – 17 h 45 - L’autonomie.
- Comment créer les conditions d’une bonne autonomie :
- Travail en sous-groupes (chapitre 5, section 2)
- Faire le point sur :
- - se dégager de la confusion ;
- - s’affermir en éprouvant de l’intérieur ;
- - surmonter le danger des abstractions ;
- - faire avec nos limites ;
- - aider la chance ;
- - aider à se déculpabiliser ;
- - prendre en charge les risques.
17 h 45 – 18 h - Bilan personnel.
- Points sensibles à observer.
- Faire les tests des exercices 4, 5, 10.
Authenticité : Marque la recherche d’une sincérité avec soi et les autres, refuse la
manipulation, la langue de bois, le paraître. L’authenticité entretient un rapport fort et direct
avec le vrai : on ne triche pas, ni avec soi-même, ni avec les autres.
Autopunition : Peine que l’on s’inflige à soi-même pour sanctionner une faute dont on
s’accuse. Les comportements autopunitifs naissent d’une tension entre le moi et un surmoi
hyper-exigeant.
Elle élimine par conséquent, comme négligeables, les aspects subjectifs et considère le moi
comme un épiphénomène.
Elle n’est pas la certitude, peut avoir des fondements « légers » ou irrationnels (« on dit »).
Empathie (grec empatheia) : Se rapprocher d’autrui pour le connaître en tant que tel, entrer
dans sa logique, en restant soi mais en faisant « comme si » par une attitude de tolérance,
d’écoute active (C. Rogers).
Étayage : Terme utilisé par Freud pour désigner la relation étroite qui existe primitivement
entre la pulsion sexuelle et certaines grandes fonctions physiologiques essentielles à la vie.
Moi : C’est une des instances psychiques, tel qu’il est décrit par Freud dans sa deuxième
topique. Le moi aurait un rôle médiateur dans le maintien de l’unité subjective de l’individu,
et un rôle opérateur dans les mécanismes de défense. Plus classiquement, en psychologie,
le moi désigne l’ensemble des vécus de la conscience. En métaphysique, le moi renvoie à
l’âme en tant que principe actif permanent. Plus généralement, le moi concerne la
conscience de l’identité personnelle et des caractéristiques différentielles par rapport à
autrui.
Narcissisme : Le narcissisme est une perturbation psychologique qui se manifeste par une
complaisance abusive avec soi-même, le repliement sur soi, l’abus de l’auto-analyse,
l’indifférence à autrui. Par narcissisme on entend globalement amour de soi-même.
Œdipe : Selon Freud, il s’agit d’un complexe lié au stade conflictuel infantile (abordé
vers 5 ans) où se mêlent l’amour sexualisé du parent de sexe opposé et la haine du parent
de même sexe. Quand ce stade n’est pas dépassé, il constitue le point de départ des
névroses. Le complexe d’Œdipe est donc l’ensemble organisé de désirs amoureux en
même temps qu’hostiles que l’enfant éprouve à l’égard des parents.
Pattern : Mot anglais désignant une configuration, un modèle, une structure.
Plaisir : Le principe de plaisir chez Freud correspond à l’attitude primitive déterminée par
l’attrait exclusif de la jouissance immédiate, indépendamment des exigences de la réalité,
ce principe de plaisir ayant selon lui pour suite le principe de réalité, qui consiste à différer
le plaisir sous la nécessité de la situation réelle, et pour éviter de plus grands dommages.
Au sens psychanalytique, la projection est un des systèmes de défense du moi par lequel
celui-ci attribue à autrui ses propres pulsions refoulées.
Self : Mot anglais signifiant le « sujet conscient », agent de ses décisions et actions, le Moi
comme volonté.
Soi : Le « soi » est globalement synonyme du « ça » chez Freud : il désigne l’ensemble du
psychisme primitif dont une part est maintenue dans l’inconscient.
Pour C. Jung (1944) le soi désigne le conscient, « infiniment plus que le moi » ; il est le
terme du processus d’individuation, une conquête de la personne incluant le monde et les
autres. En philosophie et pour Kant, la « chose en soi » est la chose telle qu’elle est
absolument et non telle qu’elle nous apparaît. Le « pour soi », c’est la conscience. « Être
soi-même » peut s’entendre d’un refus du conformisme, d’un souci d’authenticité, ou du
refus de se contrôler et de se discipliner.
Surmoi : Dans la conception freudienne, le surmoi désigne l’instance « morale » qui serait
l’introjection (assimilation, incorporation) des interdits parentaux et sociaux, une fonction
punitive et culpabilisante de la conscience morale. Le surmoi est contraignant ; c’est la
« grosse voix » du père. La morale est le produit de l’activité du surmoi (lequel surmoi
intériorise toutes les pressions culturelles). Quand l’idéal du moi est bien assimilé, devenu
personnel et voulu, il facilite l’intégration sociale.
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75009 Paris
www.esf-scienceshumaines.fr
ISBN 978-2-7101-3939-3
ISSN 0768-2026