ISSN : 2028-4098
Volume : No 9 (2021)
Salma BOUKAIRA
Doctorante, FSJES Ain Chock – Casablanca
Mohamed DAAMOUCH
Professeur FSJES Ain Chock – Casablanca
Résumé
Cet article éclaircit la notion d’épistémologie, de paradigmes épistémologiques, ainsi que les
méthodologies de recherches qui se présentent aux chercheurs en sciences économiques et de
gestion.
Abstract
"Epistemological reflection is essential for any researcher wishing to carry out serious research
because it helps to establish the validity and legitimacy of a research". Perret & Séville, 2003.
The choice of epistemological posture influences the path taken by the researcher to produce
scientifically valid knowledge. It guides the object of research, the strategy of research, the
choice of scientific method, the logical forms, and the theories mobilized.
This article clarifies the notion of epistemology, epistemological paradigms, and the different
research methodologies available to economic researchers.
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Introduction
La recherche est «une action organisée, systématique, critique qui prend naissance par un
questionnement scientifique concernant un problème sous investigation dans un objectif de
trouver des réponses et de trouver des solutions ou bien de développer des nouvelles théories
et connaissances à partir de l’analyse d’un objet de recherche. » (Ben Aissa 2001).
Celle-ci pour être qualifiée de scientifique, doit s’inscrire dans une posture épistémologique.
Un objet de recherche quel qu’il soit, ne peut être propre à un paradigme épistémologique :
c’est le mode d’accès à l’objet qui caractérise un positionnement épistémologique et non l’objet
de recherche lui-même.
L’objet de cet article est de faciliter aux chercheurs débutants le choix de la posture
épistémologique et de la méthodologie appropriées en éclaircissant l’ensemble des termes et
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liaisons existantes entre ces derniers ainsi que les fondements qui influencent et guident le choix
du positionnement épistémologique du chercheur.
1. Revue de littérature
1.1. Définition de l’épistémologie de recherche
Le mot épistémologie vient du mot grec épistémê1, il revient au début du 20ème siècle. Il est
défini comme étant le "discours sur la connaissance", c’est une discipline qui guide la
production des connaissances scientifiques. Et qui « étudie la constitution des connaissances
valables » (Piaget 1967)2. Elle désigne aussi, «une branche de la philosophie spécialisée dans
l’étude des fondements de la connaissance et des théorie, puisqu’elle s’interroge sur ce qui est
la réalité, la vérité, la connaissance, la cause, la loi…» (Gavard-Perret et al 2012).
Elle se définit aussi comme «l’étude des méthodes employées pour produire les connaissances»
(Avenier & Gavard-Perret, 2012). Elle concerne la pertinence et la validité du processus de
production des connaissances par rapport à l’objectif de recherche poursuivi (Piaget, 1967).
Pour déterminer son positionnement épistémologique, un chercheur doit se poser des questions
par rapport à la connaissance (J.-L. Le Moigne) à savoir :
Qu’est ce que la connaissance? : répondre à la question « quoi ? » qui conduit soit à considérer
l’organisation comme une « chose » d’ordre ontologique, ou la considérer comme un processus
d’ordre phénoménologique.
1
Connaissance, science.
2
Cité par (Gavard-Perret et al 2012)
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Ces questions permettent d'enregistrer les travaux de recherche dans un cadre épistémologique
approprié et de collecter les informations nécessaires pour augmenter l'efficacité de la
recherche.
En sciences économiques et de gestion, tout travail scientifique de recherche doit s’inscrire dans
l’un de ces paradigmes : positivisme, constructivisme ou interprétativisme.
Le premier paradigme épistémologique est le Positivisme qui a été adopté en premier pour les
recherches en sciences exactes, et par la suite pour les études en sciences Humaines,
économique et sociales. Le deuxième est le courant inter-prétativiste, qui se voulait substituer
le positivisme dans les sciences sociales. Puis le troisième paradigme est « le
constructivisme »qui domine ces dernières années le champ des sciences sociales et
principalement celles de gestion en Europe occidentale (Velmuradova, 2004).
Le positivisme vise à expliquer la réalité en lui donnant une essence propre. Celle-ci est conçue
différemment par les prôneurs du positivisme : la réalité représente parfois les lois de la nature
qui régissent le monde : «elle reflète la structure des choses, l’ensemble des lois immuables qui
régissent le monde, alors que le réel, c’est ce qu’on ne peut pas changer, qu’il faut constater,
même s’il heurte nos désirs… (Brachet, 1998 : 41-42). Alors que dans d’autres travaux la réalité
désigne le monde qui nous entoure, qui parfois est nommé « le réel ».C’est cette double
utilisation des termes qui provoque une certaine ambigüité chez les chercheurs débutants, et
déclenche des oppositions quelques fois fallacieuses entre les ‘partisans’ de ce paradigme.
Les positivistes tentent d'expliquer ces lois et de comprendre les relations sous-jacentes. Par
conséquent, l'objet de recherche est « indépendant du processus ayant conduit le chercheur à
son élaboration» (Ben Aissa 2001).
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Descartes a déclaré que grâce à l'étude de la loi de cause à effet, l'homme deviendra le maître
et le propriétaire de la nature.
-Principe d’objectivité : la réalité doit être dépourvue de tout lien avec le sujet qui cherche à
l’appréhender (l’objet de recherche est indépendant du chercheur).
-Principe de la logique naturelle : dans sa recherche des lois des phénomènes naturels, cette
logique s’appuie sur des axiomes mathématiques 4(Compte, cité par Le Moigne, 1990).
Ainsi, les positivistes estiment que toute proposition de loi naturelle qui ne se fie pas à cette
logique naturelle, ne pourra pas être envisagée comme purement scientifique (Le Moigne,
1990).
Toutes fois, il ne faut surtout pas penser que la logique naturelle est le seul outil positiviste
permettant d’atteindre un objectif de recherche, le positivisme s’appuie aussi bien sur le
décodage des signes (Velmuradova, 2004), surtout pour le domaine social où les mathématiques
ne permettent d’examiner et d’analyser profondément tous les angles du problème qui doit être
3
D’après Le Moigne (1995)
4
Le plus puissant que l’esprit humain puisse employer
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étudié dans son contexte et compte tenu de son évolution historique. Auguste Comte souligne
dans un « cours de philosophie positive », la certitude de la prééminence philosophique de la
sociologie sur la mathématique, la logique des mathématiciens s’étant montrée, par ailleurs,
impuissante à résoudre les problèmes humains, car elle ignore la filiation historique. », Il
propose à cet égard, dans son système de politique positive« la formation d’unelogique positive
faisant coopérer les trois logiques, celle des sentiments, celle des imageset celle des signes »
(« Positivisme », Encyclopédie Universalis, 1995)5.
Le positivisme logique7 :
- L'objectif étant de déterminer les lois qui existent déjà et la relation entre les phénomènes,
c'est-à-dire de s’intéresser au "comment" au détriment du « pourquoi ».
-Le chercheur étant séparé et indépendant de l’objet de recherche, il est ainsi neutre et objectif.
Afin de générer des connaissances, les positivistes logiques s’appuient sur un raisonnement
inductif; ils partent de «l’observation des faits particuliers pour remonter à des lois générales
» (Gavard-Perret et al 2012). Aussi, ils recommandent des méthodes expérimentales et des
méthodes de vérification d'hypothèses par des tests statistiques (Gavard-Perret et al., 2012).
5
Cité par Velmuradova, 2004.
6
Cité par Le Moigne (1995).
7
Appelé aussi néo-positivisme ou empirisme logique
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De même, pour les positivistes, le chercheur étant isolé de l'objet de recherche qui de même
doit être isolé de son contexte (Gavard-Perret et al., 2012), ce qui n'est pas toujours possible,
notamment quand l'objet de recherche est « l’être humain » qui doit être étudier dans son
contexte, aussi l’extériorité du chercheur n’est pas toujours possible.
Le post-positivisme8 :
Les post-positivistes critiquent le raisonnement inductif qui, selon Popper, peut induire les
chercheurs en erreur et optent pour la méthode hypothético-déductive. En outre, ils se basent
sur la « corroboration » par de multiples tentatives de « réfutation » échouées, pour «vérifier»
les connaissances, plutôt que sur la vérification empirique adoptée par les positivistes.
Le réalisme scientifique: pour ce courant, les connaissances scientifiques peuvent être « vraie »
mais non pas « vraie avec certitude ». Pour Hunt, il s’agit d’une « connaissance digne de
confiance », qui doit ensuite être validé et prouvé par la réfutation mais aussi par les résultats
positifs des tests empiriques.
Dans ce sens les réalistes scientifiques optent pour les méthodes quantitatives et s’appuient
donc sur des outils statistiques et mathématiques.
8
Appelé positivisme aménagé, il s’agit d’une réforme du positivisme logique.
9
Cité par Gavard-Perret et al 2012).
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Le réalisme critique : selon les réalistes critiques, pour chaque connaissance, il existe trois
réels : le réel profond qui correspond aux lois et règlements qui guident le réel actualisé, et le
réel empirique qui correspond à la perception des événements connaissables par les humains.
Le paradigme positiviste s’appuie sur l’idée que les faits réels peuvent être observés de manière
empirique et expliqués avec une analyse logique. C’est donc plutôt le raisonnement déductif
qui est adopté, le principe de validation empirique des hypothèses, pour qu’ils puissent être
acceptés ou réfutés.
En revanche, de nombreux travaux avancent que ce positionnement est loin d’être adapté et
pertinent pour une recherche dans le domaine des sciences sociales, économiques et de gestion.
Ces constats sont ainsi résumé par Le Moigne (1990 : 98-99) : «… peut-on sérieusement tenir
pour une discipline positive une science qui se définit par un objet chimérique, la gestion, qui
n’a aucune réalité tangible, qui ne présente guère de régularités stables (les mêmes causes ne
produisant pas toujours les mêmes effets!); un objet dont la description se modifie au fur et à
mesure que l’observateur le décrit(l’observateur assurant lui-même qu’il se transforme au fil de
sa propre observation) ; un objet qu’il n’est jamais possible d’analyser sans le transformer… ;
un objet qui ne se prête guère à une manière uniforme de raisonnement, en particulier, lorsqu’on
souhaite le traiter par logique disjonctive…. »10.
10
Cité par Velmuradova, 2004.
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Dans ce paradigme, la réalité n’est plus considérée comme objective (puisqu’elle reste
inatteignable), mais interprétative (conçue à travers nos représentations ou interprétations).
Les prôneurs de ce paradigme estiment que « la réalité reste inconnaissable dans son essence
puisque on n’a pas la possibilité de l’atteindre directement » (Perret, Séville in Thiétart et coll.,
2003).
Pour l’interprétativisme comme pour le constructivisme «la connaissance n’est plus considérée
comme la représentation iconique d’une réalité ontologique, mais plutôt comme la recherche
de manière de se comporter » (Le Moigne, 1990, cité par Velmuradova, 2004).
– Ce qui est connaissable est le vécu de la personne et donc l’expérience (Husserl, 1970)11.
– La connaissance produite est liée à son contexte et au chercheur, et ainsi on ne peut faire
que des représentations.
Les interprétativistes prônent des processus de recherches plus flexibles et relatives aux
expériences des chercheurs (Carson, Gilmore, Perry, &Gronhaug, 2001). Ils cherchent à
comprendre et interpréter un comportement humain plutôt que de prédire des causes et des
effets (Hudson & Ozanne, 1988).
Ce paradigme opte pour une approche compréhensive et non explicative. Il cherche en effet à
interpréter les significations d’un comportement, ses raisons et les autres expériences
subjectives liées au temps et au contexte (Neuman, 2007).
11
Cité par (Al. 2012)
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La recherche constructiviste « n’est plus définie par son objet, mais par son projet » (Le
Moigne, 1995), nécessitant ainsi des méthodes d’évaluation non pas de son objectivité, mais de
sa projectivité (Velmuradova, 2004).
«La réalité constructiviste reste inconnaissable dans son essence puisque l’on n’a pas la
possibilité de l’atteindre directement » (Perret, Séville, 2003)12. Et ils soutiennent ainsi que
la réalité résulte de l'intelligence humaine et des expériences du monde réel.
En outre, le chercheur et l’objet de recherche sont inséparables et leur interaction génère des
connaissances. Aussi, la réalité produite n’est pas absolue, mais plutôt relative à l’expérience
du chercheur : d’où l’inexistence d’une seule réalité mais une multitude de réalités construites
par le mentale individuelle ou collective qui est susceptible de changer au fil du temps.
12
In Thiétart et coll
13
Raisonnabilité
14
Cité parVelmuradova, 2004
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Dans ce modèle, la production de la connaissance ne s’appuiera pas sur l’authenticité, mais sur
lafaisabilité. Dans ce sens, «un objet existe si on peut le construire, d’en exhiber un exemplaire
ou de le calculer explicitement» (Largeault, 1993).
Le paradigme constructiviste radical se base sur trois hypothèses fondamentales, soulevées des
travaux de Glasersfeld (2001), Le Moigne (1995-2007) &Riegler (2001) :
15
Il est conceptualisé par Glasersfeld (1988 ; 2001) et théorisé par Le Moigne (1995 ; 2001 ; 2007).
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A partir de cela, on constate que le constructivisme radical indique que le chercheur ne peut
explorer parfaitement la réalité au-delà de l’expérience qu’il en a (Glasersfeld, 2001).
On peut ainsi dire que le constructivisme se fonde sur l’interaction sujet-objet. Il s’appuie sur
l’idée que la réalité est produite par l'intelligence humaine en interaction avec l'expérience du
monde réel. Nous ne connaissons donc que la « réalité subjective », une représentation 16
de la réalité dans notre conscience.
Et donc «dès que vous avez inclus l'activité mentale humaine dans le processus de connaissance
de la réalité, vous avez accepté le constructivisme», (David, 2000).
16
Interprétation
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Chaque paradigme diffère des autres, de par sa vision des connaissances, du processus de sa
production et de la finalité du travail de recherche : le positiviste cherche d’expliquer la réalité
à travers les lois naturelles, l’interprétativiste a l’intention de la comprendre à travers
l’interprétation de la « réalité perçue », alors que le constructiviste va encore plus loin et opte
pour la construction de la réalité (Girod-Séville et Perret, 2003).
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L’approche quantitative vise la confirmation d’un fait ou d’une relation entre faits, puisqu’elle
s’appuie sur les tests d’hypothèse et des théories. Le chercheur ainsi formule en premier ses
hypothèses, puis les teste avec des données empiriques pour les confirmées ou infirmées.
Alors que la recherche qualitative est une méthode exploratoire, qui se base sur l’observation
afin de produire de nouvelles hypothèses et théories. Elle est utilisée lorsqu’on veut approfondir
nos connaissances sur un sujet sur lequel on ne sait que peu.
Ainsi, le chercheur à le choix soit de mener son étude sur peu de cas mais en profondeur
(approche qualitative, plongement dans le contexte), ou bien de s’appuyer sur beaucoup des
cas mais plutôt sur la surface (approche quantitative, argumentation ou démonstration par
dénombrement) (Velmuradova, 2015). Dans ce sens, on ne peut nier l’importance de l’approche
qualitative et la nécessité d’y opter pour parfaire sa collecte de données quelques soit la méthode
choisie (quantitative ou qualitative). Mais lorsque la population générale étudiée est assez large
(tels par exemple l’étude du comportement des citoyens) ce sont les démarches quantitatives
qui permettent de s’accaparer de plus d’informations à travers des outils tels le questionnaire,
et des modes d’analyse tels les tests d’hypothèse pour déceler les différents faits qui impactent
le comportement des citoyens. Et ainsi pour cet exemple c’est plutôt la démarche quantitative
qui permet d’étudiée en profondeur un tel sujet de recherche.
Cette enquête réalisée par le biais de deux entretiens collectifs a été menée du 1 Septembre
2020 au 1 Octobre 2020 au Maroc. Le premier entretien s’adressait à 50 doctorants en sciences
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Nous jugeons que notre échantillon sélectionné selon la méthode des quotas reflète largement
la réalité des choix épistémologiques des thésards Marocains, ce qui valide la bonne
représentativité de la population cible et donc la pertinence de cette étude.
2.2. Résultats
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Sciences de
Sciences de
gestion;
gestion; 24%
25%
Sciences
économiques Sciences Positivisme
économiques; 26% Post-positivisme
25%
Sciences Néo-positivisme
Sciences
économiques; Constructivisme
Sciences de économiques;
gestion; 23% 18% 22% Interprétativisme
Sciences
Sciences de
économiques;
gestion;
9% 23%
Sciences de
gestion; 5%
Ces choix épistémologiques des répondants se justifient pour les deux filières par en premier
l’objectif et la finalité du travail : les chercheurs déterminent les objectifs principaux de leur
recherche (28% pour les sciences économiques, 24% pour les sciences de gestion). Puis en
fonction de leur choix méthodologique (quantitatif ou qualitatif) (25% pour les sciences
économiques et 23% pour les sciences de gestion). Suivi du mode de raisonnement (inductif,
abductif, déductif ou hypothético-déductive) adopté par le chercheur pour l’étude de sa
problématique (21% pour les sciences économique ainsi que pour les sciences de gestion). La
spécificité et la nature des théories mobilisées se présentent aussi comme l’une des raisons qui
influencent le choix de la posture épistémologique (17% pour les sciences économiques et 20%
pour les sciences de gestion). Puis, on trouve la maîtrise des outils et la compétence du
chercheur en la matière qui oriente faiblement ces choix épistémologique (5% pour les sciences
économiques, et 8% pour les sciences de gestion. Et le champ de recherche vient à la fin avec
à peine 4% pour chacune des filières. Cependant l’influence des directeurs de thèse et des
structures de recherche n’ont aucun impact sur le positionnement épistémologique des
répondants (Voir graphe 3).
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2.3. Discussion
En approfondissant notre discussion avec les doctorants, nous trouvons que pour la plupart
d’entre eux le choix du positionnement épistémologique, du mode de raisonnement (déduction,
abduction, induction) et de la méthodologie reste étroitement lié et donc adoptent une idée pour
laquelle l’induction est réservé aux recherches qualitatives ; alors que la déduction est utilisé
uniquement dans le cas des études quantitatives.Cette affirmation est loin d’être en cohérence
avec le contexte actuel de la recherche qui a tant progressé et donc nécessite des progrès en
termes de méthodologie et de raisonnement à suivre. Cette idée a été critiqué par plusieurs
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travaux antérieurs (Thiétart et coll., 2003 ; Becker, 200417 et autres), qui invitent à dépasser
cette ‘conjoncture obligatoire’.
Ils s’appuient ainsi sur des exemples intéressants afin de prouver qu’il est quasiment possible
de se baser sur l’induction dans une étude quantitative ; et vise versa, il est tout à fait possible
de s’inscrire dans une logique déductive pour une étude qualitative afin de valider une
affirmation conceptuelle déduite sur le terrain qualitatif (à travers une étude de cas par
exemple).
Cependant rare sont les travaux quantitatifs qui s’appuient sur une démarche inductive et vice-
versa très peu d’études qualitatives suivent un raisonnement déductif ou encore hypothético-
déductif, et c’est ce qui est aussi prouvé par l’étude des choix épistémologique et
méthodologique des doctorants de l’Université Hassan II présenté antérieurement : à peine 4%
des répondants suivants une approche qualitative optent pour la déduction et seulement 2% des
répondants s’appuyant sur une méthode quantitative optent pour l’induction.
D’autre part, l’idée selon laquelle « les outils de recherche “ quantitatifs ” sont réservés
uniquement aux “ positivistes ” et le “ qualitatifs ” pour les travaux “ constructivistes ” ou “
interprétativistes ” » est à abandonner. En effet, il n’y a aucune règle qui imposent aux
chercheurs d’utiliser uniquement les outils qualitatifs dans les paradigmes constructiviste et
interprétativiste et des méthodes quantitatives dans le paradigme positiviste, d’où un chercheur
peut se servir dans des recherches constructivistes ou interprétatives des outils quantitatifs, et
inversement des outils qualitatifs dans des recherches positivistes.
De même l’idée pour laquelle les outils quantitatifs (tel le questionnaire,…) sont réservés aux
chercheurs quantitatifs et inversement pour les outils qualitatifs est à abandonner : une étude
17
Cité par Velmuradova, 2004
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quantitative peut s’appuyer sur des outils qualitatifs et inversement une étude qualitative peut
s’appuyer sur des méthodes quantitatives.
Une méthode ne doit absolument pas être attribuée à une nature d’étude au détriment des autres.
Et donc une méthode qualitative peut être utilisé dans une étude quantitative, ainsi qu’une étude
qualitative peut opter pour des moyens quantitatifs, sans pour autant être obligé de passer par
une approche mixte pour pouvoir en utiliser.
Conclusion
Les développements de cet article mettent en évidence les bases à appréhender avant de
s’engager dans toute recherche ou étude scientifique. Ils mettent en relief les spécificités de
chaque paradigme afin d’éclairer et orienter les chercheurs à faire les choix épistémologique
convenants à l’objectif et à la finalité de leurs travaux de recherche.
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Bibliographie
Aissa, H.B., n.d. Quelle méthodologie de recherche appropriée pour une construction de la
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Bertacchini, Y., n.d. Petit Guide à l’usage de l’Apprenti-Chercheur en Sciences Humaines &
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ANNEXE : Questionnaire
Informations générales
1. En quelle année du cycle doctoral vous êtes ?
En troisième année
En quatrième année
En cinquième année
En sixième année
2. Quelle est votre filière de recherche ?
Sciences économiques
Sciences de gestion
Positionnement épistémologique
3. Quel est le positionnement épistémologique de votre recherche ?
Positivisme
Post-positivisme
Néo-positivisme
Interprétativisme
Constructivisme
4. Quelles sont les principales raisons du choix du positionnement épistémologique de
votre recherche ?
Objectif de la recherche
Théories mobilisées
Champs de votre recherche
Vos maîtrises et compétences
Orientation du directeur de thèse ou votre structure de recherche
Positionnement méthodologique
Mode de raisonnement
5. Quel raisonnement avez-vous adopté dans votre recherche ?
Déduction
Induction
Abduction
Hypothético-déductif
6. Quelle est l’approche méthodologique de votre recherche ?
Les méthodologies qualitatives
Les méthodologies quantitatives
Les méthodologies mixtes
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