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UNIVERSITE MOHAMMED V - RABAT

COURS DE DROIT COMMERCIAL

Semestre 2 DROIT

PROFESSEUR Chakib EL OUFIR

Le présent cours polycopié est dédié gratuitement aux étudiants des Facultés de
droit, toute utilisation frauduleuse et toute mise en vente commerciale seront
susceptibles de poursuites judiciaires.
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

INTRODUCTION
Alors que l’économie est la science d’observation des phénomènes du monde
des richesses (modes de production et de circulation des richesses), le droit est la
discipline qui le réglemente.
Le droit est directement lié aux sciences économiques, car les activités
économiques ne peuvent s’exercer dans le désordre, il faut qu’elles soient
réglementées. Le droit va établir des règles qui vont régir les activités économiques. Il
sera au service des économistes puisqu’il va réglementer tout ce qui concerne la
production et la circulation des richesses.
Ce qui nous interesse directement de ces règles, ce sont celles qui concernent
la production et la circulation des richesses, les règles qui régissent le monde
économique, celui de la spéculation, de la recherche du profit. L’ensemble de ces
règles forme le droit commercial.
Qu’est ce que le droit commercial ? Quelles sont ses particularités ? Quelles sont
ses sources ? Quelles en sont les juridictions compétentes ? Et qu'est ce qu'il
réglemente ?

I - DEFINITION ET PARTICULARITES DU DROIT COMMERCIAL


C’est un droit qui fait partie du droit privé, qui régit les opérations de production
et de circulation des richesses effectuées par les commerçants, soit dans leurs
relations entre eux, soit dans leurs rapports avec leurs clients.
Pourquoi élaborer un droit commercial distinct du droit civil ?
On aurait pu se contenter d’appliquer les règles du droit commun qui régissent
aussi les actes juridques relatifs aux biens tels que la vente, le louage, le dépôt ; de
même pour le transport , les sociétés, etc.
C’est que le droit commercial présente un certain particularisme apte à faciliter le
développement économique et à suivre la rapidité du monde des affaires dans son
évolution.
Vu la nature du monde des affaires, le droit commercial se distingue du droit civil
tantôt par son formalisme, tantôt par sa souplesse.
A - LE FORMALISME DU DROIT COMMERCIAL
Ce formalisme est très utile pour assurer la sécurité du crédit dans les
opérations commerciales.

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Le crédit constitue le noyau de toutes les relations commerciales ; un vendeur


doit accorder des délais de paiement à ses acheteurs, et ces derniers font le plus
souvent des achats qui dépassent leur trésorerie.
Le crédit nécessite donc l’établissement de relations de confiance et de
sécurité entre les commerçants. Pour cela, le crédit doit être entouré d’un formalisme
plus rigoureux que celui éxigé par le droit civil. C’est ce qui explique le formalisme
exigé par le législateur s’agissant des institutions du droit commercial. Exemples :
- le formalisme spécifique aux effets de commerce ;
- la présomption de la solidarité entre les commerçants ;
- le formalisme rigoureux pour la constitution des sociétés commerciales ;
- le formalisme de la vente et du nantissement du fonds de commerce ;
- la rigueur de la procédure de redressement et de liquidation judiciaires, qui
donne aux créanciers du commerçant des garanties de paiement plus solides que
celles qu’offre la procédure du droit civil.
B - LA SOUPLESSE DU DROIT COMMERCIAL
Elle s’explique, quant à elle, par la rapidité que nécessite la réalisation des
opérations commerciales. Ainsi, et contrairement aux règles rigides du droit civil, en
droit commercial on admet le principe de la liberté de la preuve entre les commerçants.
C’est ce qui permet à ces derniers de conclure leurs contrats par les moyens
les plus rapides (téléphone, fax ou même verbalement) sans avoir à se soucier, au
préalable, du formalisme des écritures qu’exige le droit civil.
Ainsi, dans la mesure où le commerce est connu par son particularisme, il doit
avoir des règles spécifiques qui régissent son domaine. C’est toute la question des
sources du droit commercial.

II - LES SOURCES DU DROIT COMMERCIAL


Avec la rapidité de l’évolution du monde des affaires, on ne peut se permettre
de compter uniquement sur les sources écrites ; c’est pourquoi les sources non écrites
y jouent un rôle fondamental.
A- LES SOURCES ECRITES
Dans cette catégorie il existe des sources nationales et d’autres internationales.

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a - LES SOURCES NATIONALES


1/ Le code de commerce et la refonte du droit des affaires
Depuis le protectorat, la zone française du Maroc était régie par le code de
commerce du 12 août 1913. Après l'indépendance il a été généralisé à tout le
Royaume. Ce code était largement inspiré du code de commerce français de 1807.
Apparut alors la nécessité d’élaborer un nouveau code. Il ne s’agissait pas
d’apporter une simple réforme au droit commercial, mais de procéder à un mouvement
de refonte de tout notre droit des affaires :
L’économie mondiale connaissait, vers la fin du siècle dernier, un tournant
capital avec : la globalisation du commerce international, le développement des
intégrations régionales, et une concurrence sans précédent sur le marché mondial.
Pour que l’économie marocaine puisse se forger une place dans ce nouveau
contexte international, il devenait impérieux de faire régner un climat de confiance en
mesure d’encourager les investissements nationaux, et surtout internationaux.
D'où la nécessité d’élaborer une législation moderne en mesure de créer un
climat de sécurité. Il ne s’agissait plus d’apporter de simples réformes au droit
commercial « stricto sensu », mais de procéder à un mouvement de refonte de tout
notre droit des affaires.
Le code de 1913 fut enfin remplacé par un nouveau code de commerce en
vertu d'un dahir n° 1-96-83 du 1er août 1996 portant promulgation de la loi 15/95
formant code de commerce1.
Le droit des affaires a connu en effet une refonte dans son ensemble durant
ces dernières années, elle a concerné notamment : la comptabilité commerciale2, le
domaine bancaire3, les sociétés anonymes4, les autres sociétés commerciales5, les

1
B.O. n° 4418, du 3 octobre 1996, pp. 568-634. V. le site du Secrétariat Général du
Gouvernement pour consulter les B.O.: www.sgg.gov.ma
2
Dahir 25/12/1992 portant promulgation de la loi 9/88 relative aux obligations comptables des
commerçants (B.O. n° 4183 du 30/12/1992, p.623).
3
Dahir du 14/2/2006 portant promulgation de la loi n° 34-03 relative aux établissements de
crédit et organismes assimilés, appelée « loi bancaire » (B.O. n°5400 du 2-3-2006).
4
Ddahir n° 1-96-124 du 30 août 1996 portant promulgation de la loi 17/95 relative aux sociétés
anonymes (B.O. n° 4422, du 17 octobre 1996, pp. 661-704).
5
Dahir n° 1-97-49 du 13 février 1997 portant promulgation de la loi 5/96 sur la société en nom
collectif, la société en commandite simple, la société en commandite par actions, la société à
responsabilité limitée et la société en participation (B.O. n° 4478 du 1 er mai 1997, p. 482).

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tribunaux de commerce6, la loi sur la liberté des prix et de la concurrence7, la loi relative
à la protection de la propriété industrielle8, la loi relative à la protection des
consommateurs9.
2/ Le D.O.C. :
Le D.O.C. est notre code civil (Dahir formant code des obligations et contrats
également du 12 août 1913).
En tant que code de droit privé marocain, le D.O.C. constitue ce qu'on appelle
le droit commun. Par conséquent, en cas de lacune des règles commerciales, ce sont
ses règles qui s’appliquent.
À ce propos, le nouveau code de commerce stipule dans son article 2 : « il est
statué en matière commerciale, conformément aux lois, coutumes et usages du
commerce ou au droit civil, dans la mesure où il ne contredit pas les principes
fondamentaux du droit commercial ». Même les lois relatives aux sociétés renvoient à
l'application des règles du DOC lorsqu'elles ne sont pas contradictoires avec elles.
b - LES SOURCES INTERNATIONALES
Il s’agit des conventions internationales qui constituent une source
fondamentale du droit commercial.
Ces conventions peuvent être bilatérales se limitant à régler certaines questions
entre deux États signataires ou entre un État et un groupement économique régional
(par exemple l’accord d’association entre le Maroc et l'UE).
Il existe aussi des conventions internationales, par exemple les traités
internationaux ratifiés par le Maroc tels que ceux sur les transports maritime,
ferroviaire, routier et aérien ; les accords du GATT ; les conventions internationales
portant lois uniformes (les conventions de Genève du 7 juin 1930 sur la lettre de
change et le billet à ordre et du 19 mars 1931 sur le chèque).
Le droit commercial n’a pas que des sources écrites, il en a d’autres
importantes, même non écrites.

6
Dahir n° 1-97-65 du 12 février 1997 portant promulgation de la loi 53/95 instituant des
juridictions de commerce (B.O. 15 mai 1997, n° 4482, p. 520).
7
Loi n° 06-99 promulguée par Dahir n° 1-00-225 du 5 juin 2000, Bulletin Officiel n° 4810 du
Jeudi 6 Juillet 2000.
8
Loi n°17-97 promulguée par Dahir N° 1-00-19 du 15 Février 2000. (B.O. n° 4778 DU
16/3/2000, p. 135)
9
Loi n°31-08 édictant des mesures de protection des consommateurs, promulguée par dahir
n°1-11-03 du 18 février 2011, B.O. n°5932 du 7/4/2011

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B- LES SOURCES NON ECRITES


Il s’agit des usages, de la jurisprudence et de la doctrine.
a - LES USAGES COMMERCIAUX
Bien que le droit commercial soit codifié, les usages commerciaux continuent
d’en constituer une source fondamentale ; car la législation, avec sa lenteur, est
incapable de suivre l’évolution rapide du monde des affaires.
Les usages sont des règles générales non écrites issues de pratiques
professionnelles constantes et tacitement acceptées par les commerçants à l’occasion
des négociations ou de l’exécution de leurs opérations commerciales.
Ce sont les pratiques qui créent des règles par la force de l’habitude
professionnelle.
C’est à l’occasion de la conclusion des contrats et de leur exécution que le rôle
des usages intervient, par exemple, en matière de ventes commerciales ce sont les
usages de chaque profession qui fixent les délais, les modalités et les modes de
paiement, les délais de livraison, la charge de la livraison et ses frais, la charge des
frais de courtage et leur taux, les risques des défauts des marchandises, etc.
Les usages peuvent réglementer toute une institution nouvellement créée, par
exemple le leasing était, avant le nouveau code, presque exclusivement régis par les
usages.
L’article 2 code de commerce dispose désormais « qu’il est statué en matière
commerciale conformément aux lois, coutumes et usages du commerce, ou au droit
civil, dans la mesure où il ne contredit pas les principes fondamentaux du droit
commercial », ce qui donne la priorité à l'application de la coutume et usages même
sur la loi civile
b - LA JURISPRUDENCE
C’est la solution donnée par un ensemble de décisions concordantes rendues
par les juridictions sur une question de droit.
Ce sont les précédents judiciaires qui servent de guide aux décisions des
juridictions à travers la pyramide judiciaire, l’unification de la jurisprudence se réalise
d’ailleurs par le biais des voies de recours.
Il n’est pas besoin d’insister sur le rôle de la jurisprudence en matière
commerciale ; c’est aux tribunaux qu’il revient d’interpréter les lois et les contrats
conclus entre commerçants, de fixer les usages auxquels ils se réfèrent, de déterminer
le statut des institutions nouvelles créées par la pratique.

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c – LA DOCTRINE
C'est l'ensemble des écrits portant les interprétations et les opinions des juristes
(les universitaires, les avocats, les magistrats, etc.). Ces écrits sont publiés sous forme
d'ouvrages ou d'articles dans différentes revues juridiques.
La doctrine, par son analyse juridique et ses recherches scientifiques, a pour rôle
d'éclairer le législateur (à l'occasion de l'élaboration des textes) et les tribunaux (lors de
l'application de la loi).

III– LES JURIDICTIONS DE COMMERCE


Il n’existait pas au Maroc de juridictions spécialisées en matière commerciale ;
ce sont les juridictions de droit commun qui connaissaient des affaires commerciales.
Les juridictions de commerce n’ont été instituées que récemment par le dahir du 12
février 1997 portant promulgation de la loi 53/95 ; il s’agit des tribunaux de commerce
et des cours d’appel de commerce.
A – LES TRIBUNAUX DE COMMERCE 10
a – COMPOSITION
A la différence de la France, où les juges des tribunaux de commerce sont élus
parmi les commerçants, le Maroc a opté pour des magistrats de carrière.
Le tribunal de commerce tient ses audiences et rend ses jugements par trois
magistrats, un président et deux assesseurs, le parquet y est représenté.
b – COMPETENCE
Les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des actions
relatives aux contrats commerciaux, des actions entre commerçants à l’occasion de
leurs activités commerciales, des actions relatives aux effets de commerce, des
différends entre associés d’une société commerciale et des différends à raison de
fonds de commerce.
Dans sa rédaction initiale, l'article 6 de la loi relative aux tribunaux de commerce
prévoyait que les tribunaux de commerce connaissent en premier et dernier ressort
des demandes dont le principal ne dépasse pas la valeur de 9 000 dhs et en premier
ressort de toutes les demandes d’une valeur supérieure à ce montant.

Il existe actuellement 8 tribunaux de première instance de commerce: Agadir, Marrakech,


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Meknes, Fes, Oujda, Tanger, Rabat et Casablanca.

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Cet article a été modifié par une loi n° 18-02 promulguée par dahir du
13/6/200211. Désormais, cet article est ainsi formulé : "les tribunaux de commerce sont
compétents pour connaître des demandes dont le principal excède la valeur de 20 000
dirhams…".
B – Les cours d’appel de commerce 12
a – COMPOSITION
La cour d’appel de commerce comprend un premier président, des présidents
de chambres et des conseillers, un ministère public composé d’un procureur général
du roi et de ses substituts, un greffe et un secrétariat du ministère public.
Elle tient ses audiences et rend ses arrêts par un président de chambre et deux
conseillers, assistés d’un greffier.
b – COMPETENCE
La cour d’appel de commerce connaît des appels contre les jugements rendus
par le tribunal de commerce.
L’appel doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la date de la
notification du jugement du tribunal de commerce.

IV – LA MATIERE DU DROIT COMMERCIAL


Quelle est la matière du droit commercial ? Est-ce le commerçant ou l’acte de
commerce ? Autrement dit, que régit le droit commercial, le commerçant ou les actes
de commerce ?
C’est que nous sommes en présence de deux conceptions du droit commercial :
l’une subjective, l’autre objective.
Le système subjectif : Dans ce système, le droit commercial est le droit des
commerçants ; l’acte de commerce se définit par l’activité commerciale de son auteur.
Autrement dit, c’est le commerçant qui donne la qualification commerciale aux actes
accomplis par lui. Par exemple, lorsqu’un acte est effectué par un commerçant, c’est
un acte de commerce ; si le même acte est exercé par un non-commerçant, il est civil.
Les actes de commerce sont donc, dans ce système, strictement l’œuvre des
commerçants et nul ne peut accomplir un acte de commerce s’il n’exerce pas une
profession commerciale.

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(B.O. n° 5030 du 15/8/2002)
12
Il existe actuellement trois cours d'appel de commerce: Casablanca, Fes et Agadir

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Le système objectif : Dans ce système c’est l’inverse qui se produit, c’est l’acte
de commerce qui donne la qualité commerciale à celui qui l’exerce. Le droit
commercial est le droit des actes de commerce et non celui des commerçants, on parle
du code de commerce et non du code des commerçants ; lorsque la loi qualifie un acte
de commercial, toute personne, même un non commerçant, qui accomplirait un tel
acte serait assujettie au droit commercial.
Ce système repose exclusivement sur l’acte effectué, indépendamment de la
personne de son auteur.
La position du législateur : Le code de commerce de 1913, à l’instar du code
français de 1807, se voulait adopter les deux systèmes. Le nouveau code de
commerce de 1996 annonce la même position en disposant dans son article 1er que
«la présente loi régit les commerçants et les actes de commerce ».
Mais malgré cette apparence qui laisse entendre que notre code adopte les
deux systèmes, il ressort des diverses dispositions de ce dernier que la tendance
objective y a le maître mot; l'article 6 par exemple, définit le commerçant de la manière
suivante : la qualité de commerçant s’acquiert par l’exercice habituel ou professionnel
des activités commerciales qu’il énumère. Donc pour être commerçant il faut exercer
l'une des activités énumérées par l'art 6 c com., ce sont donc ces activités qui donnent
la qualité de commerçant à celui qui les exerce.
Néanmoins, quelque soit le système adopté, nous pouvons considérer que la
matière du droit commercial est double : ce sont les activités commerciales et les actes
du commerce qui en constituent l’objet et le commerçant le sujet.

Plan du cours :
Chapitre I – L'objet du droit commercial
Chapitre II – Le sujet du droit commercial
Chapitre III – Le fonds de commerce

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CHAPITRE 1 - L’OBJET DU DROIT COMMERCIAL


Actuellement, l’art. 6 du code de 1996 parle d’activités commerciales, alors que
l’art. 2 du code de 1913 parlait d’actes de commerce, ceci a poussé certains juristes à
dire que le législateur marocain a adopté le système subjectif, qu'en est-il vraiment et
quelle différence y a – t – il entre ces deux notions ?
Pour comprendre la différence nous allons revenir au code de commerce de
1913 qui, dans son art. 2, énumérait un certain nombre d’actes appelés : actes de
commerce par nature. Il s’agit d’actes qui sont réputés de commerce par la loi (Art.
2) et qui sont donc commerciaux par eux-mêmes, indépendamment de la qualité des
personnes qui les utilisent. Par conséquent, ce sont ces actes qui servaient de base
pour qualifier le commerçant.
Au sein de ces actes de commerce (A.C.) par nature on distinguait dans ce
code :
- Les A.C. à titre isolé : c.à.d. qui sont commerciaux (donc soumis au droit
commercial) même s’ils sont accomplis par occasion (une ou quelques fois), exp.
l’achat d’un objet pour le revendre, le courtage …
- Les A.C. par entreprise : ces actes ne sont commerciaux que s’ils sont
effectués en entreprise, c.à.d. par répétition de ces actes dans le cadre d’une
profession (une organisation préétablie), d’une manière constante et régulière, donc
de façon professionnelle et habituelle. Exp. l’entreprise de manufacture, l’entreprise
de transport, l’entreprise de commission, l’entreprise de fournitures, etc.
Mais cette distinction s’est révélée inopérante et sans intérêt pratique dans la
mesure où tous les actes, même à titre isolé, n’étaient considérés commerciaux que
s’ils étaient exercés professionnellement.
Le code de 1996 en a tiré les conséquences et a fait disparaître les A.C. à titre
isolé. Par conséquent, il n’était plus question de continuer de parler de leurs
corollaires : les A.C. par entreprise. L’art. 6 a été alors contraint de changer de
terminologie et d’employer le concept d’ « activités » qui suppose par définition une
répétition ou un exercice professionnel ou habituel. Ceci ne veut guère dire que le
législateur de 1996 a adopté le système subjectif (v. supra)
Le législateur de 1996 parle donc actuellement d’activités commerciales
(section 1), mais qui se distinguent de ce que le code de commerce appelle les actes
de commerce (section 2).

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Section I - LES ACTIVITES COMMERCIALES


Le code de 1996, comme son prédécesseur, a employé le même procédé de
l’énumération des activités commerciales (Art. 6). C’est qu’en réalité, il est impossible
d’élaborer une définition exacte et rationnelle de l’acte de commerce qui engloberait
toutes les activités commerciales.
Ce procédé d’énumération présente l’avantage pour le législateur de délimiter
les activités qu’il veut considérer commerciales et de faire écarter, partant, celles qu’il
n’entend pas intégrer dans le domaine commercial.
En revanche, l’inconvénient de ce procédé est qu’il présente une liste limitative.
Or, le domaine commercial est un domaine très dynamique et la pratique voit de jour
en jour se créer des activités nouvelles qu’il est impossible au législateur de prévoir à
l’avance ; il devient alors difficile pour la jurisprudence de les intégrer dans le champ
commercial.
C’est pourquoi le nouveau code, tout en dressant la liste des activités
commerciales, a laissé la voie ouverte par son art. 8 qui prévoit que « la qualité
de commerçant s’acquiert également par l’exercice habituel ou professionnel de
toutes activités pouvant être assimilées aux activités énumérées aux art. 6 et 7 ».
Mais la question est de savoir comment faire pour commercialiser telle ou telle
activité ? Comment savoir qu’une activité donnée peut être « assimilée » à celles
énumérées par le code et sur la base de quels critères ? C’est tout le problème des
critères de la commercialité.
Traditionnellement, la doctrine et la jurisprudence dégagent ces critères de la
liste même des actes énumérés par le code. Ces critères sont de deux sortes: les uns
d’ordre économique, les autres de nature juridique.
* Les critères économiques : Il s’agit de la spéculation et de l’entremise dans
la circulation des richesses.
- Le critère de la spéculation : C’est la recherche du profit, du bénéfice. C’est
un critère qui s’applique effectivement à toutes les activités énumérées par le code.
Ce critère permettrait certainement de mettre hors des frontières du droit
commercial tous les secteurs économiques qui s’exercent en dehors de la recherche
du profit. Il en est ainsi du secteur social (les coopératives, les mutuelles, les
associations)

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Mais ce même critère risque d’impliquer dans le domaine commercial toutes les
activités que le législateur a délibérément écartées de la commercialité et qui sont
pourtant animées par le profit. C’est le cas de l’agriculture, de la pêche, des
professions libérales …
Ce critère, à lui seul, est insuffisant pour caractériser la commercialité.
- Le critère de l’entremise dans la circulation des richesses :
Suivant ce critère, tout acte qui s’interpose dans la circulation des richesses
entre la production et la consommation est un acte de commerce.
C’est en vertu de ce critère que sont exclues les activités de production telles
que celles de l’extraction des richesses comme l’agriculture et la pêche. Mais
l’entremise reste aussi insuffisante pour qualifier l’activité commerciale car :
+ D’une part, actuellement le droit commercial ne se limite plus à l’entremise, il
s’est étendu même à certaines activités de production comme l’exploitation des mines
depuis 1951 et l’exploitation des carrières avec le code de 1996.
+ D’autre part, un acte d’entremise effectué sans intention de spéculation reste
en dehors des frontières du droit commercial, exemple : les coopératives des affaires
sociales des différents secteurs administratifs et économiques (des ministères, des
banques, des offices …).
L’entremise est donc bien un critère de la commercialité, mais il est, comme le
critère de la spéculation, insuffisant à lui seul ; d’où le recours à d’autres critères, qui
sont juridiques cette fois.
* Les critères juridiques : Ils sont au nombre de 2, le critère de l’entreprise et
celui du fonds de commerce.
- Le critère de l’entreprise : Pour qu’un acte soit commercial, il faut qu’il soit
réalisé en entreprise, c.à.d. une répétition professionnelle d’actes qui repose sur une
organisation préétablie.
Ce critère se base sur un argument textuel très solide surtout que les art. 6 et 7
ont fait disparaître les actes de commerce à titre isolé. Pour être commerciales, toutes
les activités énumérées par ces articles doivent être exercées de manière
professionnelle ou habituelle, donc par entreprise.
Cependant, il ne faut pas oublier qu’il existe un certain nombre d’activités qui
sont exercées en entreprise et qui ne sont pas commerciales pour autant, telles que
les activités agricoles et les professions libérales qui sont des entreprises, mais

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civiles. (Sauf si elles sont exploitées dans le cadre d’une société commerciale par la
forme).
- Le critère du fonds de commerce : De ce critère on a surtout pris en
considération l’élément fondamental du fonds de commerce, la clientèle.
L’acte de commerce serait celui qui est accompli par un professionnel qui réunit
autour de son activité une clientèle maintenue et développée grâce aux autres
éléments de son commerce et à son art professionnel.
Cependant il faut noter qu’il n’y a pas que le commerce qui a pour base la
clientèle, même les activités civiles reposent sur la clientèle comme les professions
libérales (les avocats, les médecins …).
En définitive, aucun de ces critères, qu’il soit économique ou juridique, ne
permet à lui seul de qualifier les activités à commercialiser et le législateur s’est, encore
une fois, contenté de donner une énumération des activités commerciales. Cependant,
tout en laissant la possibilité à la jurisprudence d’ « assimiler » des activités à celles
qu’il a énumérées, il s’est abstenu de mettre à sa disposition le moindre critère pour
s’y faire. Nous en déduisons que la jurisprudence continuera, comme par le passé, de
procéder par la combinaison de ces différents critères suivant les cas d’espèce qui se
présenteront à elle.
Mais ces critères, même s’ils s’avèrent être tous réunis, ne doivent en aucun
cas permettre la commercialité des domaines exclus délibérément par le législateur.
La détermination de l’objet du droit commercial reste une question d’opportunité
pour le législateur et qui est fonction de l’impact des données et des circonstances
économiques environnantes du moment.

L’article 6 du nouveau code a donc énuméré un grand nombre d'activités


commerciales que nous pouvons ranger dans trois secteurs :
- les activités de production ;
- les activités de distribution ;
- et les activités de services.

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§ 1 - LES ACTIVITES DE PRODUCTION


Ce sont des activités dont l’exploitation n’est pas précédées d’une circulation
antérieure, autrement dit les exploitants ne vendent que leur propre production et ne
spéculent pas sur des produits qu’ils achètent. Le critère d'exclusion de ces activités
n'est autre que celui de l'absence d'entremise dans la circulation des richesses.
Actuellement, les seules activités de production de caractère commercial, sont
la recherche et l’exploitation des mines et des carrières13 (art. 6-4°), c’est à dire les
industries extractives14.
On remarquera que l’agriculture et la pêche, qui sont aussi des activités de
production, sont restées dans le domaine civil.
Concernant l'agriculture, il ne peut s’agir bien entendu que des exploitations
agricoles traditionnelles ; les cultivateurs et les éleveurs traditionnels ne sont pas des
commerçants même s’ils achètent leurs produits comme les semences, les engrais ou
les animaux qu’ils revendent ; par contre, les exploitations agricoles modernes
(d’agroalimentaire ou d’élevage industriel) ne peuvent être exclues du domaine
commercial.
Il en est de même en ce qui concerne la pêche traditionnelle qui ne peut être
inclue dans le commerce.
Fait partie également du domaine civil la production intellectuelle (les créations
de l’esprit). Restent donc toujours régis par le droit civil les auteurs d’ouvrages, les
créateurs de nouvelles inventions (les inventeurs de logiciels par exemple), le
compositeur d’une œuvre musicale, l’artiste peintre… qui vendent les produits de leur
création. Il en est de même pour les professions libérales (les médecins, les avocats,
les architectes, etc.)
§ 2 – LES ACTIVITES DE DISTRIBUTION
La distribution est l’ensemble des opérations par lesquelles les produits sont
répartis entre les consommateurs.
Cependant, la distribution peut avoir lieu, soit de manière instantanée : c’est
tout simplement l’activité d’achat pour revente, soit de façon périodique ou continue :
c’est ce qu’on appelle la fourniture.

13
- Exemples des mines : fer, cuivre et tous les métaux, phosphate, charbon, etc. Les carrières
sont de sable, de marbre, de pierres, d’ardoise, d’argile, etc.
14 - La recherche et l’exploitation des mines est commerciale depuis le dahir 16 avril 1951,
alors que la recherche et l’exploitation des carrières ne l’est que par le nouveau code de 1996.

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Deux activités de distributions se dégagent donc de l'art. 6 : l’achat pour revente


et la fourniture.
A - L’ACHAT POUR REVENDRE
L’article 6 code de commerce consacre cette activité dans deux alinéas
différents, suivant l’objet de l’activité : le 1°/ concerne les meubles, le 3°/ concerne les
immeubles.
Qu’il s’agisse de meubles ou d’immeubles, le code exige trois conditions pour
que l’activité soit commerciale. Il faut :
- un achat initial ;
- que l’achat porte sur des biens meubles ou immeubles (l’objet) ;
- et avoir l’intention de les revendre soit en nature, soit après transformation.
1 - L’achat :
C’est toute acquisition à titre onéreux. Elle doit avoir lieu en contrepartie d’un
équivalent monnayable (au moyen d’un prix ou d’un échange).
2 - L’objet
Désormais, il s’agit non seulement de l’achat de meubles pour les revendre,
mais aussi des immeubles.
2-1 - Les meubles
Le code de 1996, dans son article 6-1°, vise « les meubles corporels ou
incorporels ».
- Les meubles corporels sont ceux qui ont une consistance physique, un corps
matérialisé : le cuir, le bois, le tissu, les montres, les vêtements…
- Les meubles incorporels sont des biens dépourvus de la matérialité
physique : les fonds de commerce, les brevets d’invention, les marques de fabrique,
les actions, les obligations des sociétés, etc.
2-2 - Les immeubles
L’article 6-3° considère désormais comme activité commerciale « l’achat
d’immeubles en vue de les revendre ».
La spéculation immobilière ne pouvait plus rester en dehors du droit
commercial, d’autant plus que les enjeux dans le domaine immobilier sont
considérables, il suffit de penser aux risques encourus, surtout par les fournisseurs
dépourvus de garanties, en cas de cessation de payement.

15
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

3 - L’intention de revendre en l’état ou après transformation


Cette condition comprend 2 éléments :
3-1 - L’intention de revendre
Les opérations d’achat des biens meubles ou immeubles ne peuvent constituer
une activité commerciale que lorsqu’elles sont effectuées avec l’intention de les
revendre ; le code dit « en vue de les revendre »15. Ceci implique 2 conséquences :
* L’intention de revendre doit être le motif de l’achat, ce qui exclue les achats
pour usage personnel.
* L’intention de revendre doit exister au moment de l’achat : c’est-à-dire
- d’abord, peu importe que la revente ait lieu ou non (exemple les produits
périssables) ;
- ensuite, peu importe que la revente soit faite sans bénéfices (les ventes à
perte) ;
- enfin, peu importe que la vente précède l’achat (ventes sur commande).
3-2 - La revente en l’état ou après transformation
- En ce qui concerne les meubles
L’article 6-1° considère comme activité commerciale l’achat de meubles « en
vue de les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en œuvre ».
Il s’agit dans ce dernier cas tout simplement des industries de transformation,
exemples : la filature, le tissage, la confection, etc. Ainsi, nous pouvons intégrer dans
ce secteur, aussi, certaines petites entreprises comme la menuiserie, la boulangerie
ou la pâtisserie.
- En ce qui concerne les immeubles
L’article 6-3° stipule que les immeubles peuvent être revendus « soit en l’état,
soit après transformation ».
Ce qui signifie qu’est commerçant, soit celui qui a pour profession l’achat des
terrains nus ou des bâtiments en vue de les revendre tels qu’ils sont, soit celui qui
achète des terrains nus et y édifie des bâtiments en vue de les revendre.
La distribution comprend donc l’activité d’achats pour reventes, mais aussi
l’activité de fourniture.
Mais si le contrat de vente est un contrat à exécution instantanée, le contrat de
fourniture est un contrat à exécution successive.

15
- Quant à la location elle sera étudiée dans le cadre des services.

16
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B - LA FOURNITURE
C’est le contrat par lequel le fournisseur s’engage, moyennant un prix, à délivrer
des produits qu’il se procure (achète) préalablement aux livraisons ou à effectuer des
services à ses clients, de manière périodique ou continue. C’est pourquoi le contrat de
fourniture est un contrat à exécution successive.
La fourniture peut concerner et les biens (les produits alimentaires ou
industriels, l’eau, l’électricité et le gaz) et les services, fournis de manière périodique
et régulière (les services d’entretien et de réparations des appareils, machines,
véhicules, les services rendus en matière de postes et télécommunications, le service
de gardiennage…)
§ 3 - LES ACTIVITES DE SERVICES
Il s’agit d’activités qui consistent à exécuter un travail au profit des clients ou de
mettre à leur disposition l’usage temporaire de certains biens.
Trois catégories d’activités de services se dégagent de l’art. 6.
A - LES SERVICES DE L’INTERMEDIATION
L’objet de ces activités réside seulement dans l’information, le conseil et
l’assistance aux tiers cocontractants.
Ce sont en l’occurrence, suivant l’article 6-9°, le courtage, la commission et
toutes autres opérations d’entremise. Il s’agit aussi des bureaux et agences
d’affaires auxquels on assimile les agences de voyages, d’information et de
publicité (article 6-13°).
Précisons au préalable que les activités d’intermédiation sont commerciales
quelle que soit la nature du contrat qui sera conclu entre les parties. Même si l’objet
du contrat est civil, l’activité d’intermédiation est commerciale (par exemple :
l’intermédiation dans le domaine agricole).
a - Le courtage
C’est l’activité par laquelle une personne (le courtier) met deux personnes en
relation en vue de la conclusion d’un contrat.
Par conséquent, le courtier n’intervient d’aucune manière dans le contrat conclu
entre les personnes qu’il rapproche.
Certains courtiers sont régis par des textes spéciaux, ils sont appelés
« courtiers privilégiés », par exemple le courtage de marchandises et le courtage
maritime.

17
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Les autres secteurs du courtage sont soumis à la réglementation générale du


courtage prévue par les articles 405 à 421 du nouveau code de commerce.
b - La commission
Le contrat de commission est une variété de mandat en vertu duquel le
commissionnaire s’engage à réaliser des opérations tels que des achats ou des ventes
pour le compte du commettant, mais en son nom personnel.
À la différence du simple mandataire qui traite au nom de son mandant, le
commissionnaire contracte avec les tiers en son nom personnel. Les tiers (les
cocontractants) ne connaissent que le commissionnaire.
Dans la pratique, les commissionnaires sont désignés par des dénominations
techniques suivant leurs domaines de spécialisation :
- les intermédiaires de la bourse (ou agents de change en France),
- les commissionnaires de transport,
- les transitaires de douane,
- les mandataires des halles, etc.
c - Les bureaux et agences d’affaires :
Ce sont des activités qui consistent à administrer les affaires des autres et de
gérer leurs biens, moyennant rémunération.
Ces activités sont très variées, il peut s’agir du courtage, du recouvrement des
créances, de la direction de procès en justice, de la rédaction des contrats, de la vente
de fonds de commerce, des transactions immobilières …(les agents immobiliers qui
sont des courtiers, se chargent souvent aussi de la gestion des immeubles de leurs
clients).
Les agences d’affaires peuvent même être spécialisées dans certains
domaines ; ces spécialités ont même été prises en considération par le nouveau code
qui cite expressément dans son art. 6-13° les agences de voyages, les agences de
publicité et les agences d’information 16.
Commercialité : Les agents d’affaires, comme d’ailleurs les
commissionnaires, agissent en qualité de mandataires ; or il est de principe en droit

16 Ces dernières sont appelées en pratique les agences de renseignements commerciaux ;


elles sont spécialisées dans l’ingénierie financière, le marketing et tous les services destinés
à faciliter la création et le développement des entreprises.

18
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commercial que celui qui agit pour le compte d’autrui n’est pas commerçant. Mais le
code de commerce a considéré quand même commerciales ces activités afin
d’accorder aux créanciers (leurs mandants, qui sont généralement leurs clients) la
sécurité et les garanties qu’offre le droit commercial aux créanciers des commerçants
et principalement des procédures de redressement et de liquidation judiciaire à côté
de la publicité au registre de commerce et de la solidarité.
Mais les services en matière commerciale ne consistent pas seulement dans
l’intermédiation.
B - LES SERVICES FINANCIERS
C’est l’ensemble des activités qui ont pour objet la spéculation sur l’argent.
L’alinéa 7 de l’article 6 mentionne la banque, le crédit et les transactions
financières, mais il faut aussi ajouter les assurances (al. 8) qui visent d’ailleurs la
spéculation sur l’argent (les primes d’assurance).
Il est vrai qu’on assiste actuellement à une imbrication de ces activités entre les
différents établissements financiers : les banques, les sociétés de financement, les
établissements financiers publics et semi-publics… Or, ce que vise le code de
commerce, ce sont les activités commerciales et non pas les institutions. C’est
l’exercice de ces activités financières qui est pris en considération pour la
commercialité de tel ou tel organisme financier, qu’il soit privé ou public. Ces activités
sont commerciales quel que soit l’organisme qui les exerce :
Ainsi, le caractère public de certaines institutions et organismes financiers ne
les met pas hors des frontières du domaine commercial : l’émission des billets de
banque par DAR AS-SIKKA ou, de manière générale, l’exercice des opérations
bancaires par BANK AL-MAGHRIB sont bien des activités commerciales. Il en est de
même de la Trésorerie Générale du Royaume, d'Al Barid Bank (qui est une filiale du
groupe Poste Maroc depuis le 8 juin 2010) bien qu’ils soient soumis au contrôle directe
de l’Etat.
Ajoutons à ceux-là les organismes financiers spécialisés qui sont des banques
à statuts spéciaux soumises actuellement au contrôle de Bank Al-Maghrib : le Crédit
Populaire du Maroc (ex Banque Populaire), le Crédit Agricole, le Crédit Immobilier et
hôtelier (le C.I.H.) dont les activités bancaires et financières sont également
commerciales.
Quant aux établissements de crédit qui sont régis par la loi bancaire de 2006,
ce sont les banques et les sociétés de financement.

19
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a - La banque
D’après la loi bancaire17, les activités bancaires principales sont :
- la réception de fonds du public ;
- les opérations de crédits ;
- et la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement ou leur
gestion.
Quant aux activités bancaires connexes, ce sont par exemple :
- les opérations de change;
- les opérations sur or, métaux précieux et pièces de monnaie ;
- le placement, la souscription, l’achat, la gestion, la garde et la vente des
valeurs mobilières ou de tout produit financier ;
- le leasing ou crédit –bail ;
- le conseil et l’assistance en matière de gestion financière, l’ingénierie
financière (ou engineering en anglais)18 et, d’une manière générale, tous les services
destinés à faciliter la création et le développement des entreprises.
b - Le crédit
Le crédit consiste, d’après la loi bancaire, en trois opérations, qui doivent toutes
être effectuées à titre onéreux19 en vertu desquelles une personne :
- met ou s'oblige de mettre des fonds à la disposition d'une autre
personne, à charge pour celle-ci de les rembourser : ce sont là deux opérations
différentes visées par la loi, il faut entendre par "mettre" les fonds à la disposition des
clients le crédit classique, et par "s'obliger de mettre" des fonds à la disposition des
clients les opérations telles que les ouvertures de crédit, les facilités de caisse, etc.
- ou prend dans l'intérêt d'une autre personne, un engagement par
signature sous forme d'aval, de cautionnement ou de toute autre garantie, c’est

17
Dahir n° 1-14-193 du 24 décembre 2014 portant promulgation de la loi n° 103-12 relative aux
établissements de crédit et organismes assimilés, B.O. n° 6340 du 5 mars 2015 (cette loi a abrogé la loi
bancaire de 2006).
18
- L’ingénierie est l’ensemble des études qui permettent de déterminer, pour la réalisation d’un
programme d’investissement, les meilleures tendances et modalités de conception, les
conditions de rentabilité optimales, les matériels et les procédés les mieux adaptés.
19- C’est une condition essentielle, car les prêts concédés à titre gratuit ne sont pas considérés

du crédit.

20
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

le cas de la CAISSE MAROCAINE DES MARCHES (C.M.M) 20


et de DAR AD-
DAMANE 21
.
En outre la loi assimile au crédit certaines opérations tels que le
crédit-bail ou de location avec option d'achat, les opérations d'affacturage22,
etc.
c - Les transactions financières
Il s’agit en fait de l’activité des sociétés de financements telles que définies par
l’article 10, al.3 de la loi bancaire, comme les sociétés de crédit à la consommation :
ASSALAF CHAABI, BMCI CREDIT CONSO, CETELEM MAROC, DAR SALAF,
FINACRED, SALAFIN, TASLIF, EQDOM, ACRED, WAFASALAF, etc. Ces
sociétés ne peuvent exercer des activités bancaires que celles qui sont précisées dans
les textes les concernant, à savoir certains crédits bien déterminés.
C’est donc pour ce genre d’établissements que l’article 6 du code de commerce
a réservé ce concept de transactions financières qu’il a délibérément séparées des
autres concepts de la banque et du crédit.
d - L’assurance
Enfin, le code de 1996 a dûment rendu commerciales les opérations
d’assurances «à primes fixes », c'est-à-dire les assurances du secteur commercial,
pour les distinguer des assurances mutuelles.
En pratique, les sociétés d’assurances commerciales adoptent la forme de la
S.A., ce qui implique leur commercialité, aussi, par la forme23.
La mutuelle est une assurance à but non lucratif, qui regroupe un certain
nombre d’adhérents, appartenant généralement à une même catégorie
socioprofessionnelle, qui versent une prime variable en fonction des résultats de
l’exercice annuel. C’est-à-dire que, suivant la quantité et la gravité des sinistres
survenus au cours de l’exercice, les adhérents seront amenés soit à ajouter un
complément à la prime initiale, soit à recevoir une ristourne du reliquat des primes
après l’arrêt des comptes (il ne s’agit pas de bénéfices). En pratique les mutuelles

20 Arrêté n° 1300-96 du 14 safar 1417 (1er juillet 1996)


21 Arrêté n° 2958-94 du 18 joumada I 1415 (24 octobre 1994)
22
L'affacturage est une convention en vertu de laquelle un établissement de crédit s'engage à
recouvrer et à mobiliser des créances commerciales, soit en acquérant lesdites créances, soit
en se portant mandataire du créancier (article 5, loi bancaire).
23 - L’article 44 al. 2 de la loi 5/96 leur interdit de se constituer sous forme de SARL.

21
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

établissent aussi des montants fixes calculés en fonction de la loi de la statistique,


mais sans avoir à rechercher de profits comme le secteur commercial.
Exemples de mutuelles : la M.A.E.M. (Mutuelle d’Assurances des Enseignants
du Maroc), M.A.M.D.A. (Mutuelle Agricole Marocaine d’Assurance).
Ajoutons à ce secteur les différents organismes de prévoyance sociale ou à
caractère social.
Les organismes de prévoyance sociale24, qui sont des sociétés mutualistes,
sont également à but non lucratif qui mènent, au moyen de cotisations de leurs
membres, des actions de prévoyance, de solidarité et d’entraide au profit de ces
derniers ou de leurs familles afin de couvrir les risques pouvant atteindre leur
personne. Par exemple, la M.G.P.A.P.M. (Mutuelle Générale du Personnel des
Administrations Publiques du Maroc), la M.G.E.N. (la mutuelle générale de l’éducation
nationale).
S’ajoute à cette catégorie d’autres organismes à caractère social telles que la
CNSS (caisse nationale de la sécurité sociale) et la CIMR (caisse interprofessionnelle
marocaine de retraite).
Puisque les assurances mutuelles et ces organismes de prévoyance sociale ne
cherchent pas à réaliser de bénéfices, elles ne sont pas commerciales ; ce qui n’est
pas le cas du secteur commercial des assurances à primes fixes.

(L’Etat : Dans un but de protection des assurés, l’État contrôle les


activités d’assurances et de réassurance.
L’organisme chargé de cette fonction au Maroc est la Direction des
Assurances et de la Prévoyance
Sociale (Ministère des Finances). L’État intervient également pour
imposer obligatoirement certaines
assurances.
Les sociétés d’assurances : Ce sont les preneurs du risque qui
encaissent les primes et paient les sinistres.
Au Maroc, on distingue 4 formes de sociétés d’assurances :

24
Qui sont régis par le dahir du 12/11/1963 portant statuts de la mutualité.

22
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

les sociétés commerciales


les mutuelles
les organismes de prévoyance sociale
les organismes d’assistance
Les intermédiaires d’assurance

Les sociétés commerciales sont des sociétés à but lucratif. Elles


doivent avoir un capital minimum
légalement exigé. Elles sont dirigées par un Conseil
d’Administration. Elles peuvent pratiquer toutes les
branches d’assurance, n’ont pas de limitation territoriale au Maroc
et travaillent avec des intermédiaires
(agents généraux et courtiers).
Les mutuelles d’assurance Ce sont des associations. Les
cotisations sont toujours variables. Elles ne
peuvent donc jamais pratiquer d’opérations impliquant une gestion
en capitalisation. Elles ne travaillent
jamais avec des intermédiaires.
Les organismes de prévoyance sociale dont on distingue : Les
mutuelles de prévoyance sociale telles
que : Caisse Mutuelle Interprofessionnelle Marocaine (CMIM),
Caisse Nationale des Organismes de
Prévoyance Sociale (CNOPS) et d’autres. Et Les autres organismes
à caractère social : La CNSS : Caisse
Nationale de Sécurité Sociale, La RCAR : Régime Collectif
d’Assurance et de Retraite, La CIMR : La Caisse
Interprofessionnelle Marocaine de Retraite

23
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Les organismes d’assistance Ce sont des sociétés spécialisées,


ayant pour seule vocation l’assistance des
personnes en cas de blessures, maladies graves, décès et des
véhicules en cas de panne, de vol ou
d’accident on peut citer : ISAAF Mondial Assistance et Maroc
Assistance Internationale.
Les Intermédiaires en assurances parmi eux on a :
Les agents généraux d’assurances, c’est une personne physique
mandataire d’une seule société
d’assurances qu’il représente dans une région déterminée en vertu
d’un traité de nomination, L’agent
général n’est pas un commerçant. Il exerce une profession libérale
et est rémunéré par des commissions.
Les courtiers ; Le courtier est le mandataire de l’assuré. Il n’est lié à
aucune société d’assurances. Il place
les contrats de ses clients auprès des sociétés de son choix. Il est
rémunéré par des commissions de
courtage qui varient selon les branches
Les Actuaires ce sont des personnes de niveau universitaire
(Sciences Mathématiques et Actuarielles) qui,
chez les assureurs, effectuent des calculs de probabilité notamment
en Assurance-vie et Capitalisation
(espérance de vie, valeurs de rachat, valeurs de réduction, etc.). Les
actuaires s’occupent aussi des
statistiques dont ils tirent des conclusions pour l’élaboration des
tarifs toutes branches.

Actuellement, le secteur des assurances au Maroc connaît de


profondes mutations et se trouve

24
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

ainsi confronté à de grands et importants défis (libéralisation,


concentration, assurance maladie
obligatoire, bancassurance...) qui vont certainement affecter le
processus de sa croissance, des défis qui

Réalisé par : -BELBAIDA Sara


-ELHAIRACHE Elghalia
une fois relevés, le secteur sortira certainement plus solide et plus
apte à mener à bien sa principale
mission, qui est celle de permettre à l'économie marocaine à
mieux s'adapter aux exigences
internationale.)

C - LES AUTRES SERVICES


Quatre activités prévues par l'article 6 peuvent être rangées dans ce cadre.
1 – L'activité industrielle
L’art. 6-5° parle d’activité industrielle. Il s’agit de toute activité qui consiste à
effectuer des travaux sur des biens meubles25 ou immeubles.
Mais à la différence de l'achat pour revente après transformation où il y a achat
de la matière première qui sera transformée pour être revendue (qui est une activité
de distribution), l'article 6 désigne par activités industrielles celles où les produits ou
matières premières sont fournis à l'industriel par ses clients à charges pour lui de les
leur restituer après transformation (l'industriel offre seulement son service).
Mentionnons enfin dans le cadre des autres services, l'extension de la
commercialité pour la première fois à l’artisanat26, l’imprimerie et l’édition, le bâtiment
et les travaux publics.

25
- Certaines activités telles que la blanchisserie peuvent entrer dans cette catégorie.
26
- Ce qui inclue aujourd’hui tous les petits artisans comme le coiffeur, le tailleur, le plombier,
l’électricien, le maçon ; actuellement même les chauffeurs de taxis indépendants, qui étaient
jadis assimilés aux artisans, sont soumis au droit commercial.

25
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

L’activité industrielle peut également avoir pour objet les immeubles (les
entreprises ayant pour objet d’effectuer des travaux sur des immeubles tels que le
nivellement et le terrassement et qu’on appelait les manufactures immobilières).
2 - La location de meubles
En vertu de l’art 6 - 1° et 2° toute location des biens meubles (voitures,
machines, bijoux, équipements pour l’organisation des fêtes …) est une activité
commerciale.
Le législateur de 1996 n'a pas commercialisé les opérations de location des
immeubles. L’achat d’immeubles en vue de leur location demeure donc une activité
civile.
3 - L’exploitation de locaux à usage public
Au sein de l’article 6 on dénombre trois sortes de ces établissements. Il s’agit
de :
✓ l’exploitation des salles de ventes aux enchères publiques des marchandises ; Le
nouveau code a employé cette expression moderne de vente aux enchères publiques
pour remplacer celle d’« établissements de vente à l’encan », qui date du XIXème
siècle, utilisée par l’ancien code.
Il s’agit de l’exploitation de salles de ventes aux enchères publiques des
marchandises négociées en gros. La vente au détail de produits neufs est interdite en
principe.
Bien entendu, les ventes qui se déroulent sous l’égide des tribunaux, dans le
cadre d’une liquidation successive à une déclaration de liquidation judiciaire, sont
exclues du champ de la commercialité.
✓ l’exploitation des magasins généraux et entrepôts publics :
- Les magasins généraux sont des entrepôts dans lesquels les marchandises sont
déposées contre remise de titres négociables, appelés récépissés - warrants, qui
permettent la vente ou le nantissement de ces marchandises sans leur déplacement.
Le code de 1996 a désormais prévu expressément la commercialité des
magasins généraux qui restent toutefois organisés par le dahir du 6 juillet 1915. Le
nouveau code a seulement abrogé les articles 13 à 26 de ce dahir, qui régissent le
récépissé - warrant, qu’il a réglementé lui-même par ses articles 341 à 354.
- Les entrepôts sont également des locaux de dépôt de marchandises mais, avec
remise de simples reçus qui ne bénéficient pas des vertus des récépissés - warrants.

26
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Exemple : les entrepôts des ports ou des aéroports, les entrepôts frigorifiques, les
garde-meubles, les garages de voitures…
✓ Il s'agit enfin de l’organisation de spectacles publics à caractère commercial,
c'est à dire dans un but lucratif (théâtre, cinéma, salles de conférences et lieux des
manifestations sportives professionnelles). Par contre, lorsque l’organisation du
spectacle est faite dans un but intellectuel, ou de bienfaisance, ou lorsqu’il s’agit d’un
spectacle sportif amateur, elle est exclue du domaine du droit commercial.
Quant à l’industrie hôtelière (l’hôtellerie et la restauration), on ne peut soutenir
qu’il s’agit d’une activité civile du moment qu'il s'agit d'exploitation de locaux à usage
public.
4 - Le transport
La commercialité du transport se base sur le fait qu’il participe à la circulation
des richesses, l’art. 6-6° s’est contenté de prévoir le « transport » pour englober tous
les modes de transport et éviter ainsi toute énumération, qu’il s’agisse du transport des
personnes ou des marchandises et quel que soit le mode de transport (aérien, terrestre
ou maritime).
5 – La domiciliation
L'article premier de la loi 89-17 du 9 janvier 201927 a ajouté à l'article
6 du code de commerce un alinéa 19 par lequel il a ajouté la domiciliation.
La domiciliation est donc devenue une activité commerciale à part
entière.

D'après l'article 544-1 du code de commerce "la domiciliation de


l'entreprise est le contrat par lequel une personne physique ou morale,
dénommée domiciliataire, met le siège de son entreprise ou son siège
social à la disposition d'une autre personne physique ou morale,
dénommée domiciliée pour y établir le siège de son entreprise ou son
siège social, selon le cas".

27
B.O. n° 6788 du 20/6/2019.

27
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Autrement dit le siège de l'entreprise d'une personne physique ou le


siège sociale d'une personne morale (le domiciliataire) va servir de siège
d'une autre entreprise personne physique ou de siège sociale d'une autre
personne morale (le domicilié).

Le domiciliataire est donc devenu commerçant dont le siège est


désormais appelé "centre d'affaires".28

Section II - LES ACTES DE COMMERCE


Les actes de commerce ne confèrent pas la qualité de commerçant à celui qui
en fait usage, néanmoins ils donnent lieu à l’application des règles du droit commercial.
Rentrent dans cette catégorie les actes de commerce par la forme (art.9), les
actes de commerce par accessoire (art.10) et les actes mixtes (art.4).
§ I - LES ACTES DE COMMERCE PAR LA FORME
Les actes de commerce par la forme sont des actes qui sont toujours
commerciaux quelle que soit la qualité des parties (commerçants ou non
commerçants) et quel que soit l’objet de l’opération qui leur donne naissance
(commerciale ou civile).
Ces actes sont la lettre de change et les sociétés commerciales (la S.A., la
SARL, la société en nom collectif, la société en commandite simple et la société en
commandite par actions).
A - LA LETTRE DE CHANGE :
Du fait que le L.C. soit un acte de commerce par la forme, il résulte les
conséquences suivantes :
1°/ Les personnes qui s’obligent par L.C. sont soumises aux règles du droit
commercial : Mais ceci ne veut pas dire que celui qui signe habituellement des L.C.
acquiert la qualité de commerçant. Il est tout au plus assujetti aux règles commerciales
de la capacité et de la compétence judiciaire.

28
V. à ce sujet EL OUFIR (Ch), "la domiciliation d'entreprises : une réglementation au service de
l'administration", REMALD, n° 153, juillet-août 2020, pp.109 -115.

28
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

2°/ La L.C. est commerciale quelle que soit la cause pour laquelle elle a été
signée : Exemple : l’achat par un non commerçant d’un téléviseur à crédit au moyen
de lettres de change : bien que la cause de la L.C. pour ce consommateur est civile,
la L.C. reste commerciale.
B - LES SOCIETES COMMERCIALES
En principe, les sociétés devraient, comme les personnes physiques, obéir aux
mêmes critères de la commercialité, c’est-à-dire qu’une société serait civile ou
commerciale suivant l’objet de son activité.
Cependant, la SA, la société en commandite par actions et la SARL, même
ayant un objet civil, sont devenues des sociétés commerciales par la forme depuis la
législation du protectorat. De son côté, la loi 5/96 a rendu commerciales par la forme
même la société en nom collectif et la société en commandite simple.
Il faut dire que, dans les annales de l’histoire juridique, le scandale en France
de la Companie du Canal de Panamà a été déterminant dans la commercialité
objective des sociétés. Cette société était civile puisque son objet était civil :
l’exécution de travaux publics immobiliers (construction du canal de Panamà). Par
conséquent, elle n’obéissait pas aux règles du droit commercial et notamment la
faillite, ce qui a causé d’énormes préjudices à ses créanciers qui devaient désormais
agir individuellement suivant la loi civile pour récuperer leur dû.
§ II - LES ACTES DE COMMERCE PAR ACCESSOIRE
L’article 10 du nouveau code stipule : «sont également réputés actes de
commerce, les faits et actes accomplis par le commerçant à l’occasion de son
commerce» ; ce sont donc les actes de commerce par accessoire.
Ces actes sont en réalité de nature civile et, lorsqu’ils sont effectués par un
commerçant pour les besoins de son commerce, ils acquièrent la qualité d’actes de
commerce. Exemple, le commerçant qui achète un camion pour livrer ses
marchandises, ou du mobilier pour son agence d’affaires ou des machines pour son
usine, etc.29

29
- On peut encore citer les crédits que le commerçant contracte pour le développement de
son entreprise, les contrats d’assurance relatifs aux opérations commerciales (les assurances
contractées en vue de l’obtention de crédits bancaires, les assurances relatives aux transports
des marchandises ou du personnel), les contrats d’assurance relatifs aux biens de
l’entreprise (assurance incendie des magasins, entrepôts), les contrats de travail conclus entre
le commerçant et ses employés, l’achat ou la location d’immeubles pour l’exercice du
commerce, etc.

29
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Signalons enfin que l’article 9 de la loi 53/95 a attribué au tribunal de commerce


la compétence pour connaître de l’ensemble du litige commercial qui comporte un
objet civil et, donc, des actes de commerce par accessoire.
§ III - LES ACTES MIXTES
Ce sont des actes qui sont commerciaux pour une partie et civils pour l’autre.
Exemple : un consommateur qui achète des produits ou de la marchandise chez un
commerçant ; cet acte a une double qualité : il est civil pour le consommateur et
commercial pour le commerçant.
C’est le cas pour toutes les ventes au détail ou ventes à la consommation :
l’acte est commercial pour le vendeur et civil pour le consommateur.
Mais il arrive que l’acte soit commercial pour l’acheteur et civil pour le vendeur,
c’est le cas notamment du commerçant qui achète les produits agricoles d’un
agriculteur.
L'article 4 du code de 1996 dispose que «lorsque l’acte est commercial pour
un contractant et civil pour l’autre, les règles du droit commercial s’appliquent à la
partie pour qui l’acte est commercial ; elles ne peuvent être opposées à la partie pour
qui l’acte est civil sauf disposition spéciale contraire ».
Par conséquent, les solutions qui s'appliquent en la matière sont les suivantes :
1 - La compétence judiciaire
Actuellement, avec la création des tribunaux de commerce, la loi a confié au
commerçant de convenir avec le non commerçant d’attribuer la compétence au
tribunal de commerce pour connaître des litiges pouvant les opposer à l’occasion
de l’exercice de l’activité du commerçant.
Ce qui laisse, en principe, le choix au non commerçant d'assigner le
commerçant devant le tribunal civil ou commercial ; alors que le commerçant n'a
pas d'autre choix que de poursuivre le non commerçant devant le tribunal civil.
Or, actuellement, avec la prolifération des contrats d'adhésion attribuant
compétence aux tribunaux de commerce, c'est le consommateur qui n'a désormais
plus de choix.
2 - La preuve
La jurisprudence a appliqué le principe suivant lequel le régime des preuves
s’apprécie en fonction de la personne contre laquelle la preuve doit être faite.
Par conséquent, dans un acte mixte :

30
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- le commerçant ne peut invoquer la liberté de la preuve contre le non


commerçant, il ne peut établir la preuve à l’égard de ce dernier qu’en se conformant
aux règles du droit civil (nécessité d'un écrit lorsque l’opération excède 10 000 dhs30).
- inversement, lorsque le non commerçant doit fournir la preuve contre le
commerçant, la preuve sera libre pour lui (c’est-à-dire même par témoins).
3 - La prescription
Avant le code de 1996 il était fait application des règles du D.O.C. qui prévoyait
deux prescriptions :
- une prescription de 5 ans, s’agissant d’obligations contractées entre
commerçants pour les besoins de leur commerce, et une prescription de 2 ans et
parfois de 1 an s’agissant de certaines obligations particulières entre commerçants et
non commerçants ;
- la prescription en matière civile de 15 ans.
Actuellement, avec le nouveau code, lorsqu’il s’agit des actes mixtes, cette
prescription est unifiée ; l’article 5 a prévu désormais une seule prescription de 5 ans,
qu’il s’agisse de relations entre commerçants à l’occasion de leur commerce ou de
relations entre commerçants et non commerçants.
Maintenant que nous avons étudié l’objet du droit commercial, nous devons
analyser le sujet de ce droit à savoir, le commerçant.

CHAPITRE II - LE SUJET DU DROIT COMMERCIAL


Si les activités commerciales et les actes de commerce constituent l’objet du
droit commercial, le commerçant reste le sujet de ce droit.
Nous devons donc procéder à la définition du commerçant (section 1) pour
aborder sa condition juridique (section 2) et déterminer ses obligations légales (section
3).

Section I - DEFINITION DU COMMERÇANT

30
Dahir du 30 novembre 2007 portant promulgation de la loi 53/05 relative à l'échange
électronique de données juridiques. B.O. 5584 du 6/12/2007, p. 1357. V. l'exception à cette
règle au chapitre suivant.

31
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

La définition du commerçant résulte expressément de l’article 6 du nouveau


code qui stipule que la qualité de commerçant s’acquiert par l’exercice habituel ou
professionnel des activités commerciales.
Toutefois cette condition est insuffisante pour définir le commerçant, une autre
condition s’impose, à savoir l’exercice des activités commerciales pour son propre
compte.
§ I - L’EXERCICE HABITUEL OU PROFESSIONNEL DES ACTIVITÉS COMMERCIALES
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que le commerçant est celui qui exerce
les activités commerciales, mais de manière habituelle ou professionnelle.
Qu’est-ce que l’habitude et qu'est-ce que la profession ?
- L’habitude : veut dire une répétition régulière de l’activité commerciale,
autrement dit, l’exercice par entreprise des activités de l’article 6 ; en conséquence,
l’exercice occasionnel de ces activités ne peut plus qualifier un commerçant. D’ailleurs,
il ne faut pas oublier la condition supplémentaire de l’article 6 concernant la publicité
au registre du commerce.
- La profession : doit consister dans l’exercice d’une activité qui procure le
moyen de satisfaire aux besoins de l’existence de celui qui l’exerce.
Encore faut-il qu’il le fasse pour son propre compte.
§ II - L’EXERCICE POUR SON PROPRE COMPTE
Il s’agit là d’une règle qui connaît néanmoins des exceptions.
A – LA RÈGLE
La qualité de commerçant s’acquiert en définitif par l’exercice habituel ou
professionnel des activités commerciales, mais pour son propre compte. Autrement
dit, la règle en la matière est la suivante : celui qui exerce des activités commerciales,
même s’il en fait sa profession habituelle, n’est pas un commerçant tant qu’il le fait
pour le compte d’autrui.
Le commerce suppose une indépendance totale dans l’exercice de la
profession. Il suppose aussi un certain risque : le commerçant peut faire des bénéfices
mais il peut aussi subir des pertes ; d’où la règle : tous ceux qui exercent le commerce
pour le compte d’une autre personne et ne subissent pas de risque ne sont pas des
commerçants.
Rentrent dans cette catégorie les employés, dans la mesure où ils sont
subordonnés à leurs employeurs par un contrat de travail et restent indifférents aux
risques du commerce, et les mandataires qui ne font que représenter leurs mandants

32
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

dans le commerce (exemples les représentants de commerce et les dirigeants des


sociétés commerciales).
B - LES EXCEPTIONS
Certaines personnes, bien qu’elles agissent pour le compte d’autrui, sont
considérées des commerçants alors qu’elles ne remplissent pas la condition
d’indépendance corrélative au risque.
a - Les commissionnaires
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que le contrat de commission est une
sorte de mandat ; à ce titre, le commissionnaire ne devrait pas, en principe, être
considéré commerçant puisqu’il est un simple mandataire qui traite pour le compte
d’autrui, son commettant.
Nous avons vu aussi que le commissionnaire, à la différence du mandataire,
traite en son propre nom. Cependant, ce n’est pas pour cette raison que le
commissionnaire est un commerçant, mais parce qu’il exerce une activité commerciale
à part entière prévue par l’article 6-9° : la commission.
b - Les prête-noms
Le prête-nom est celui qui prête son nom dans des actes où le véritable
cocontractant ne peut ou ne veut pas voir figurer le sien.
C’est donc en apparence seulement que le prête-nom exerce le commerce,
c’est en apparence qu’il contracte avec les tiers en son nom et pour son compte alors
qu’en réalité, il le fait pour le compte d’autrui ; à ce titre, il ne devrait pas être considéré
commerçant.
Pourtant, vu l’importance accordée en droit commercial à la théorie de
l’apparence, le prête-nom est, sans hésitation, qualifié commerçant.
Il est ainsi clair que la définition du commerçant subit une grande influence de
l’activité commerciale de ce dernier et donc du système subjectif, un autre aspect de
cette influence se retrouve au niveau de la condition juridique du commerçant.

Section II - LA CONDITION JURIDIQUE DU COMMERCANT


Un commerçant doit satisfaire à des conditions relatives à la capacité
commerciale et à des conditions ayant trait aux restrictions à l’exercice du commerce.
§ I - LA CAPACITE COMMERCIALE
1* Le mineur est celui qui n’a pas atteint l’âge de la majorité.

33
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

La majorité légale est désormais fixée dans notre pays à 18 années


grégoriennes révolues depuis la modification de l’ancien code de statut personnel par
le dahir du 24 mars 200331, prévu actuellement par l’article 209 du nouveau Code de
la famille.
Le mineur est considéré incapable jusqu'à sa majorité ; dès sa naissance, il est
frappé d'une incapacité d'exercice générale, néanmoins, le Code de la famille prévoit
deux atténuations à cette règle, qui permettent au mineur d’accéder à la capacité.
- L’autorisation d’expérience de la maturité ‫االختبار‬
L’article 226 CF dispose que le mineur doué de discernement "peut (être
autorisé à) prendre possession d’une partie de ses biens pour en assurer la gestion à
titre d’essai".
Le mineur habilité ainsi à gérer une partie de ses biens, reste en principe
incapable ; mais pendant la période d’expérience, qui est généralement d'une année
renouvelable, il est considéré, à l'égard des biens qui lui sont remis et qui sont
mentionnés dans son autorisation, comme ayant pleine capacité. Il peut même ester
en justice à propos des actes de sa gestion (art. 226 in fine).
- L’émancipation par déclaration de majorité ‫الترشيد‬
Cette émancipation est réglementée par l’article 218 alinéas 3 et suivants du
CF qui prévoit que le mineur qui a atteint l’âge de 16 ans, est admis à requérir son
émancipation du tribunal.
De même son représentant légal, s’il le juge apte à être émancipé, il peut en
faire la demande au tribunal32.
Il résulte de l’émancipation que le mineur :
- prend possession de tous ses biens ;
- qu’il est entièrement affranchi de la tutelle,
- qu'il est relevé de son incapacité, ce qui revient à dire qu’il acquière la pleine
capacité pour la gestion et la disposition de son patrimoine ;
- quant aux droits extra patrimoniaux, notamment le droit au mariage, ils
restent soumis aux textes qui les régissent.

31
B.O. n° 5096 du Jeudi 3 Avril 2003.
32
Art 218 "Le représentant légal peut demander au tribunal d’émanciper le mineur qui a atteint
l’âge précité, lorsqu’il constate qu’il est doué de bon sens… Dans tous les cas, les personnes
précitées ne peuvent être émancipées que lorsqu’il est établi devant le tribunal, à l’issue des
démarches légales nécessaires, qu’elles sont douées de bon sens".

34
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

La question qui se pose maintenant est de savoir dans quelle mesure ces deux
exceptions permettent – elles au mineur d'exercer le commerce ?
Sous l'ancienne législation, il n'était guère question de capacité commerciale
pour le mineur autorisé à titre d'expérience ; quant au mineur émancipé, il ne pouvait
gérer ses biens que dans le domaine civil. Pour pouvoir exercer le commerce, une
autorisation spéciale de son tuteur était nécessaire afin de procéder à son inscription
au registre du commerce.

Selon M. Ahmad CHOUKRI SOUBAI le nouveau code de commerce a marqué


le divorce avec cette législation, il a eu pour objectif d'unifier les règles de la capacité
commerciale et civile33. Selon M. CHOUKRI SOUBAI il n'est donc plus question
aujourd'hui de capacité commerciale; ce qui veut dire que le mineur de 16 ans une fois
émancipé et que même celui de 12 ans une fois autorisé à titre d'expérience, peuvent
automatiquement exercer le commerce sans avoir besoin d’autorisation d’exercer le
commerce.

Quant à M. DRISSI MACHICHI ALAMI Mohamed34, tout en confirmant l'opinion


de M. SOUBAI, il nous apprend, qu'il s'agisse de l'autorisation d’expérience de la
maturité (à 12 ans) ou de la déclaration judiciaire anticipée de majorité (à 16 ans) elles
doivent être inscrites au registre de commerce. Ce qui laisse entendre que dans les
deux cas les mineurs ont le droit d'exercer le commerce à condition d'inscrire leurs
documents respectifs au registre de commerce.

Imaginons donc la réaction au tribunal face à un mineur de 12 ans ou même de


16 ans qui se présentent pour se faire immatriculer au registre de commerce, le
premier avec son autorisation d'expérience, et même le second avec sa déclaration
d'émancipation ! Pourquoi ? Voilà ce que prévoit le code de commerce de 1996 ?

On constatera que si l'article 12 de la version française du code de commerce


stipule que : "sous réserve des dispositions ci-après, la capacité pour exercer le

242‫ ص‬،2001 ،‫ المعارف الجديدة‬،‫ الرباط‬،‫ الجزء الثاني‬،‫ الوسيط في النظرية العامة في قانون التجارة‬33
34
DRISSI MACHICHI ALAMI Mohamed, Droit commercial fondamental au Maroc, Rabat,
Imprimerie Fédala, 2006, pp. 188 et suiv.

35
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

commerce obéit aux règles du statut personnel", sa traduction en arabe ne fait guère
allusion à l'exercice du commerce et parle seulement de la capacité :

"‫لقواعد األحوال الشخصية مع مراعاة األحكام التالية‬ ‫"تخضع األهلية‬


Néanmoins, l'article 13 du code de commerce stipule clairement dans les deux
langues que "l'autorisation d'exercer le commerce par le mineur et la déclaration
anticipée de majorité prévues par le code du statut personnel, doivent être inscrites
au registre du commerce". Et, en arabe également les termes utilisés ne laissent pas
de doute quant à l'exigence des deux documents :

‫"يجب أن يقيد اإلذن باإلتجار الممنوح للقاصر وكذا الترشيد المنصوص عليهما في قانون األحوال الشخصية في السجل‬
."‫التجاري‬

Désormais, cette formulation de l’article 13 ne réconforte aucunement la


position de nos éminents professeurs.
L’article 13 ne s’est donc nullement écarté de l’ancien code, il exige toujours les
mêmes conditions pour que le mineur puisse exercer le commerce, à savoir :
- l’émancipation, or celle-ci ne peut être accordée au mineur qu’à l’âge de 16
ans ; ce qui écarte de facto le mineur de 12 ans autorisé à titre d’expérience ;
- l’autorisation d’exercer le commerce qui est accordée par le tuteur et qui est
strictement liée, selon le texte, à l’émancipation.
Par conséquent, et légalement parlant, sans ces deux documents prévus par
le texte de l’article 13, le mineur ne peut être inscrit au registre de commerce.
2* Concernant les mineurs étrangers, le code de 1996 dans ses articles 15 et
16 les a soumis à l’âge de la majorité requis par la loi marocaine. Ces articles prévoient
deux hypothèses :
- A l’âge de 20 ans, tout étranger est réputé majeur et peut exercer le commerce
même si sa loi nationale prévoit un âge supérieur à 20 ans.
- A moins de 20 ans, même s’il est réputé majeur par sa loi nationale, un
étranger ne peut exercer le commerce qu’après autorisation du président du tribunal
du lieu où il entend exercer le commerce. Bien entendu, cette dernière doit être inscrite
au registre du commerce.

36
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

3* La femme mariée, quant à elle, depuis le nouveau code de commerce, n'est


désormais plus soumise à l'autorisation maritale pour exercer le commerce35.

§ II - LES RESTRICTIONS A LA LIBERTE DU COMMERCE


La liberté du commerce est un principe fondamental de notre droit, consacré
désormais par la constitution36.
Toutefois, cette liberté du commerce est limitée par certaines restrictions.
Le non-respect de ces restrictions est puni, suivant les cas, par des sanctions
disciplinaires administratives et même, le cas échéant, pénales.
En outre, les opérations commerciales effectuées par le contrevenant sont
considérés valables et peuvent le soumettre aux règles du droit commercial,
notamment celles relatives aux procédures de redressement et de liquidation
judiciaires.
Cette règle est maintenant consacrée expressément par l’article 11 du code de
commerce qui dispose que «toute personne qui, en dépit d’une interdiction, d’une
déchéance ou d’une incompatibilité, exerce habituellement une activité commerciale,
est réputé commerçant ».
Dans notre droit il existe des restrictions qui concernent les personnes et
d'autres qui concernent les activités
A - Les restrictions concernant les personnes

a – Les incompatibilités
Il arrive que certaines personnes exercent certaines professions, et cela ne les
empêche pas d’exercer le commerce en parallèle. Mais cette faculté n’est pas toujours
possible, car le législateur estime, pour différentes raisons, que certaines professions
sont incompatibles avec l’exercice du commerce :
- soit parce qu’il considère que l’exercice du commerce est contraire à la dignité
de la profession qu’ils exercent : exp. les médecins, les avocats, les notaires, les
adouls…
- soit parce qu’il estime que ceux qui occupent certaines fonctions doivent rester
indépendants : c’est-à-dire qu’ils ne doivent pas se compromettre par les risques du

35
- V. à ce sujet notre article paru au journal L’opinion du 21 mars 1996, pp. 1 et 4 intitulé :
« La restauration du droit de la femme mariée à la liberté d’exercer le commerce ».
36
- L’article 35 de la constitution de 2011 dispose que l'Etat garantit la liberté d’entreprendre
et la libre concurrence.

37
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

commerce et ne pas se laisser distraire par la recherche du profit ; exp. les


fonctionnaires (Art. 15 dahir 24/2/1958 portant statut général de la fonction publique).
b – Les déchéances
Il s’agit d’une autre restriction à l’exercice du commerce qui vise les
commerçants ou les postulants au commerce, c’est-à-dire les personnes qui ont fait
l’objet de certaines condamnations pénales (pour vol, escroquerie, abus de confiance,
émission de chèque sans provision, infractions fiscales ou douanières, banqueroute,
etc.) ou d’une liquidation judiciaire.
En outre, la déchéance commerciale emporte interdiction de diriger, toute
entreprise ayant une activité économique (art 711 code de commerce).
B – Les restrictions concernant les activités

a – Les interdictions
Au titre de cette restriction, le commerçant n’a pas le droit de postuler à
l’exercice de certaines activités commerciales :
- lorsque ces activités sont interdites par le législateur : par exemple
l’interdiction du commerce de la fausse monnaie (art. 335 C.P.), l’interdiction du
commerce lié aux jeux de hasard (art. 282 C.P.), l’interdiction du commerce des objets
et images contraires aux mœurs (art. 59 dahir 15/11/1958 formant code de la presse)37,
le commerce des stupéfiants ;
- ou lorsque ces activités constituent un monopole de l’Etat : par exemple la
recherche du pétrole et du gaz, l’exploitation et le commerce des phosphates, le
transport ferroviaire, etc.
b – Les autorisations
Dans certains cas, une autorisation administrative, sous forme d’agrément ou
de licence, est nécessaire avant l’ouverture du commerce ou l’exercice de certaines
activités commerciales, par exemple :
- la vente des boissons alcooliques (qui est soumise, suivant le cas, à une
licence ou à une autorisation),

37 Article 59 : Sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de 1.200 à
6.000 dirhams quiconque aura fabriqué ou détenu en vue d'en faire commerce, distribution,
location, affichage ou exposition tous imprimés, écrits, dessins, gravures, films
pornographiques, photographies contraires à la moralité et aux mœurs publiques. DAHIR N°
1-02-207 du 3 octobre 2002 portant promulgation de la loi n°77-00 modifiant et complétant le
Dahir n°1-58-378 du 15 novembre 1958 formant code de la Presse et de l'Édition -2003-

38
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- les activités cinématographiques sont soumises à une autorisation du C.C.M.,


- les agences de voyages (qui doivent être autorisées par le ministère du
tourisme),
- le transport public des personnes (soumis à des agréments du ministère du
transport), etc. 38
Dans d’autres cas l’existence de ces autorisations s’explique par des exigences
de la profession, par exemple l’ouverture d’une pharmacie nécessite d’être titulaire
d’un diplôme de pharmacien, les banques et les sociétés d’assurances doivent être
inscrites sur les listes de ces professions, etc.
Il faut ajouter que certaines activités ne peuvent être exercées que par des
personnes morales, par exemple les activités bancaires.

Section III - LES OBLIGATIONS DU COMMERCANT


En plus des obligations communes à toutes les entreprises économiques (les
obligations sociales, les obligations fiscales…), le commerçant est soumis à des
obligations spéciales, les unes nouvelles, les autres traditionnelles.
§1 – LES OBLIGATIONS NOUVELLES
En effet, dans le but d’assurer un meilleur contrôle fiscal, le code de 1996 a
institué de nouvelles obligations à la charge des commerçants, il s’agit de :
- l’obligation pour le commerçant, pour les besoins de son commerce, d’ouvrir
un compte dans un établissement bancaire ou dans Al Barid Bank qui est une filiale
du groupe Poste Maroc depuis le 8 juin 2010. (art.18) ;
- et l’obligation de payer par chèque barré ou par virement bancaire, toute
opération entre commerçants pour faits de commerce d’une valeur supérieure à 10000
dhs.
L’inobservation de cette règle est passible d’une amende qui ne peut être
inférieure à 6% de la valeur payée autrement que par chèque ou virement bancaire ;
les deux commerçants, c’est-à-dire le créancier et le débiteur, sont responsables
solidairement du paiement de cette amende.
Mais ici surgissent 2 problèmes pratiques:

38 Le transport des marchandises n'étant désormais plus soumis à agrément

39
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Le 1er : concerne le chèque barré


Les commerçants acceptent bien les paiements par chèques barrés qu'ils se
contentent d'endosser pour éviter leur comptabilisation; ce qui est tout à fait légal du
moment que la loi n'exige pas que le chèque soit non endossables.
Comment ce problème a été réglé?
C'est en se basant sur l'article 311 al. 2 du code de commerce que, depuis le
1er février 2011 un règlement interbancaire (du GPBM) a instauré l'obligation des
chèques pré-barrés et non endossables pour les clients patentés des banques (les
personnes morales, les entreprises individuelles et les professions libérales).
L'article 311 dispose que: "Tout établissement bancaire… peut délivrer des
formules de chèques barrés d'avance et rendues, par une mention expresse de
l'établissement bancaire, non transmissibles par voie d'endossement, sauf au profit
d'un établissement bancaire ou d'un établissement assimilé"
 Le 2ème problème concerne le fractionnement des factures
Du moment que la loi ne sanctionne pas le fractionnement des factures rien
n'empêche les commerçants d'éviter les paiements par chèque en fractionnant
leurs factures.
 Comment ce 2ème problème a été réglé?
La loi de finance 2016 a modifié l’article 11 CGI relatif aux charges non
déductibles en prévoyant:
Comment le 2ème problème a été réglé?
La loi de finance 2016 a modifié l’article 11 CGI relatif aux charges non
déductibles en prévoyant:
« Ne sont déductibles du résultat fiscal que dans la limite de 10 000 dhs par jour
et par fournisseur à hauteur de 100 000 dh par mois (càd 10 factures par mois et par
fournisseur dans le but de lutter contre la vente des factures fictives), les dépenses
afférentes aux charges visées à l’article 10 dont le règlement n’est pas justifié par
chèque barré non endossable, effet de commerce, moyen magnétique de paiement,
virement bancaire, procédé électronique ou par compensation avec une créance à
l’égard d’une même personne… »
§2 – LA PUBLICITE AU REGISTRE DE COMMERCE
Le R.C. a pour rôle de faire connaître les commerçants, son objectif est
d’organiser une publicité juridique (non commerciale) sur le commerçant ; il fournit aux

40
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

tiers, qui sont en relation avec le commerçant, des informations relatives à sa situation
juridique et à ses activités commerciales.
C’est pour cette raison que le code de commerce a fait du R.C. un document
public ; toute personne peut se faire délivrer une copie ou un extrait certifié des
inscriptions qui y sont portées ou un certificat attestant l’inexistence d’une inscription
ou qu’une inscription a été rayée.
A - LE FONCTIONNEMENT DU R.C.
Comment est-il organisé ? Quelles sont les personnes assujetties à
l'immatriculation ? Et quelles sont les différentes inscriptions ?
a - L’organisation du R.C.
Le R.C. est constitué par des registres locaux et un registre central :
Les registres locaux sont actuellement institués auprès de chaque tribunal de
commerce ou de première instance le cas échéant ; ils sont tenus par le secrétariat-
greffe et leur fonctionnement est surveillé par le président du tribunal ou par un juge
désigné par lui.
Le registre central du commerce est tenu à l’office de la propriété industrielle à
Casablanca. Il a pour but :
- de centraliser toutes les déclarations contenues dans les registres locaux que
lui transmettent les secrétaires greffiers des tribunaux ;
- et de délivrer les certificats relatifs aux inscriptions portées sur le registre.
b - Les personnes assujetties
Toutes les personnes physiques et morales (sociétés commerciales, GIE), de
droit privé ou de droit public, marocaines ou étrangères exerçant une activité
commerciale sur le territoire marocain sont tenues de se faire immatriculer au R.C. du
tribunal où est situé leur siège.
L’immatriculation est également obligatoire lors de l’ouverture d’une succursale
ou d’une agence d’entreprise marocaine ou étrangère.
c - Les inscriptions au R.C.
Ces inscriptions sont au nombre de trois :
1 - Les immatriculations
Il existe trois sortes d’immatriculations.

41
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

1°/ L’immatriculation principale


Tout commerçant, personne physique ou morale, doit se faire immatriculer au
R.C.; la demande d’immatriculation doit avoir lieu dans les 3 mois de l’ouverture de
l’établissement commercial ou de l’acquisition du fonds de commerce pour les
personnes physiques, et dans les trois mois de leur constitution pour les personnes
morales.
Mais il ne peut y avoir qu’une seule immatriculation. Il s’agit de la première
immatriculation au R.C. qu’on appelle immatriculation principale.
Ainsi, un commerçant (personne physique ou personne morale) ne peut avoir
qu’un seul numéro d’immatriculation à titre principal car, l’immatriculation a un
caractère personnel, c’est-à-dire qu’elle est rattachée au commerçant, non à son
activité commerciale ou à ses établissements de commerce. S’il est établi qu’un
commerçant possède des immatriculations principales dans plusieurs registres locaux
ou dans un même registre local sous plusieurs numéros, il peut être sanctionné et le
juge peut procéder d’office aux radiations nécessaires.
2°/ Les inscriptions complémentaires
Si le nouvel établissement se trouve dans le ressort du tribunal où la personne
assujettie a son immatriculation principale, il y a lieu seulement à inscription
complémentaire, il ne s’agit pas d’une immatriculation mais uniquement d’une
inscription modificative.
3°/ Les immatriculations secondaires
Si le nouvel établissement se situe dans le ressort d’un autre tribunal que celui
de l’immatriculation principale, il y a lieu à demander une immatriculation secondaire
au tribunal du lieu de la succursale ou de l’agence ou de la création de la nouvelle
activité, avec indication de l’immatriculation principale. Dans ce cas, une inscription
modificative doit également être portée au R.C. de l’immatriculation principale.
Ces inscriptions sont nécessaires à l’occasion, et dans les 3 mois, de l’ouverture
des succursales ou agences ou de la création d’une nouvelle activité par le
commerçant déjà immatriculé au R.C., c’est-à-dire ayant au préalable une
immatriculation principale.
Quant à la succursale, agence de sociétés commerciales ou de commerçants
dont le siège social ou l’établissement principal se trouve à l’étranger, et la
représentation commerciale ou agence commerciale de collectivités ou
établissements publics étrangers, elles doivent requérir une immatriculation principale

42
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

au R.C. du tribunal du lieu où le fonds de commerce est exploité (Art. 41) dans les 3
mois de leur ouverture (Art. 75). En cas de pluralité de fonds exploités, il est procédé
suivant le cas, à inscription complémentaire ou à immatriculation secondaire (Art. 41).
2 - Les inscriptions modificatives
Tout changement ou modification concernant les mentions qui figurent sur le
R.C. doit faire l’objet d’une demande d’inscription modificative (art. 50) dans le mois
suivant le changement.
Par exemple, pour les personnes morales les décisions modifiant les statuts de
la société (l’augmentation ou la diminution du capital social, la forme juridique de la
société, la dénomination sociale), la nomination de nouveaux gérants, des membres
des organes d’administration, etc.
3 - Les radiations
La radiation est le fait de rayer l’immatriculation du commerçant du R.C. par
exemple en cas de cessation totale de l’activité commerciale, en cas de décès du
commerçant, en cas de dissolution d’une société, etc. 39
Les radiations peuvent être requises par les intéressés eux-mêmes, soit
opérées d'office par ordonnance du président du tribunal.
Il est désormais possible de s'immatriculer au registre de commerce
et même de créer les entreprises en ligne.
B - CRÉATION EN LIGNE DE L’ENTREPRISE
La loi n° 88-17 qui prévoit la création d'entreprises par voie
électronique est désormais publiée au B.O. n°6745 du 21 janvier 2019,
mais son entrée en vigueur est prévue dans un délai d'un an après la
publication des textes d'application 40. Or ces textes n'ont toujours pas vu
le jour.

39
- V. art. 51 à 57 code de commerce.
40
Il sera question de trois textes réglementaires: un relatif à la définition des
administrations concernées par la création d’entreprises, un deuxième sur les
modalités de présentation de la demande et de la délivrance par voie électronique des
documents. Le troisième texte définit les documents devant être joints à la déclaration
de création d’entreprises et les modalités de leur dépôt et de leur traitement par voie
électronique (art.2, 5 et 11 de la loi). (V. L'économiste Edition N°:5591 du 12/09/2019. V.

43
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Grâce à ce texte il sera possible de créer les entreprises en ligne à


travers une plateforme électronique gérée par l'O.M.P.I.C. en
accomplissant toutes les formalités de création des entreprises jusqu'à
l'immatriculation au registre de commerce et les inscriptions postérieures
ainsi que les publicités légales.
Une autre loi n° 89-17 publiée au B.O. n° 6788 du 20/6/2019,
modifiant le code de commerce, a prévu la création d'un registre
électronique de commerce à travers lequel sont tenus les registres locaux
et le registre central par le biais de la plateforme de l'O.M.P.I.C.; toute
immatriculation, inscription modificative et radiation devront être
effectuées à travers cette plateforme.
En effet, il ne sera plus indispensable de déposer les documents
nécessaires à la création auprès des administrations concernées.
Il sera même possible de retirer à travers la plateforme tous les
certificats et attestations en ligne y compris les extraits des inscriptions au
registre de commerce etc.
Même les rémunérations des services rendus par les
administrations relatives à la création de l'entreprise par voie électronique,
à l'immatriculation au registre de commerce ainsi que les taxes seront
payés en ligne.

C - LES EFFETS DE L’IMMATRICULATION


a - Les effets à l'égard des personnes physiques
L’absence d’effets de l’immatriculation en vertu du dahir du 1 er septembre 1926
avait poussé la jurisprudence à juger que «la seule inscription au R.C. ne suffit pas
pour donner à la personne inscrite la qualité de commerçant »41. L’immatriculation au
R.C. ne constituait nullement une présomption d’être commerçant.

déjà le décret n°2.20.956 du 5 avril 2021 pris en application des dispositions relatives à
la publicité au registre de commerce électronique, B.O. n° 6992 du 3 juin 2021.
- TPI d’Oujda, 24 mai 1961, Revue Marocaine de Droit du 1/11/1961, pp. 415 - 417.
41

44
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

1 - La présomption de commercialité
Désormais, avec le nouveau code de commerce, toute personne immatriculée
au R.C. est présumée avoir la qualité de commerçant.
Néanmoins, il faut souligner que le nouveau code ne s’est pas «aventuré »
jusqu’à donner à l’immatriculation l’effet d’une présomption irréfragable (ou absolue),
il s’est contenté de lui accorder une présomption simple, c’est-à-dire susceptible de
preuve contraire.
Ce qui veut dire que, sous l'ancien code, il appartenait au commerçant de
prouver qu'il est commerçant ; actuellement, c'est à l'adversaire de démontrer qu'il
n'est pas commerçant.
2 - Les effets du défaut d’immatriculation
En vertu de la politique du nouveau code de commerce, lorsque le commerçant
n'est pas immatriculé au registre de commerce :
- d’une part, il se voit privé de tous les droits dont bénéficient les commerçants,
par exemples : il ne peut produire ses documents comptables en justice pour faire
preuve, ni invoquer la prescription quinquennale à l’égard des non commerçants, ni
revendiquer le droit à la propriété commerciale, etc.
- d’autre part, il se trouve soumis à toutes les obligations des commerçants, par
exemple, quand c’est dans son intérêt, il ne peut invoquer le défaut d’immatriculation
pour se soustraire aux procédures de redressement ou de liquidation judiciaires qui
sont spéciales aux commerçants.
Enfin, le code de commerce sanctionne d’une amende de 1 000 à 5 000 dhs :
1°/ Tout commerçant, gérant ou membre des organes d’administration, de
direction ou de gestion d’une société commerciale, tout directeur d’une succursale ou
d’une agence d’un établissement ou d’une société commerciale, tenu de se faire
immatriculer au R.C. qui ne requiert pas dans les délais prescrits les inscriptions
obligatoires.
Cette amende concerne toutes les mesures d’inscription : le défaut
d’immatriculations, d’inscriptions complémentaires ou modificatives et le défaut de
radiation.
2°/ La même amende est encourue lorsque l’assujetti prend plusieurs
immatriculations principales.

45
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

3°/ Elle frappe aussi tout manquement à l’obligation de mentionner le numéro


et le lieu de l’immatriculation au R.C. dans les documents de commerce (factures,
lettres, bons de commandes…).
b - Les effets à l’égard des personnes morales
Dans notre ancienne législation, l’immatriculation au R.C. n’était pas une
condition pour l’acquisition de la personnalité morale, une société commerciale
jouissait de la personnalité morale dès sa constitution, indépendamment de
l’immatriculation au R.C.
Actuellement, avec les nouvelles lois relatives aux sociétés, celles-ci ne
jouissent de la personnalité morale qu’à partir de leur immatriculation au R.C.
§ 3 - LA TENUE D’UNE COMPTABILITE
L’utilité de la comptabilité n’est plus aujourd’hui à démontrer, tant
dans l’intérêt du commerçant (bonne gestion et moyen de preuve) que de
celui des tiers (informations sur la situation du commerçant) ou de l’Etat
(contrôle des déclarations fiscales).
La tenue des livres de commerce était réglementée par le code de
commerce de 1913, cette réglementation s’est révélée dépassée par
l’évolution des pratiques commerciales et comptables.
Pour se mettre à jour par rapport à cette évolution, le législateur a
du intervenir par la loi 9-88 relative aux obligations comptables des
commerçants, promulguée par dahir du 25 décembre 199242.
A - LES LIVRES ET DOCUMENTS COMPTABLES
Désormais, notre législation actuelle ne dispense plus aucun
commerçant, aussi modeste que soit son commerce, de la tenue de la
comptabilité commerciale. L’article 1er de la loi 9-88 impose en effet à
toute personne, physique ou morale, ayant la qualité de commerçant de
tenir une comptabilité dans les formes qu’elle prescrit.
Dans ce but trois livres comptables sont obligatoires pour tous les
commerçants, à savoir :

- B.O. 30/12/1992, n° 4183 bis, p. 623.


42

46
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- le livre journal : C’est un registre où sont enregistrées


chronologiquement opération par opération et jour par jour les
mouvements affectant les actifs et les passifs de l’entreprise. On y
enregistre par exemple toutes les ventes et tous les achats de la journée,
les factures payées, les salaires versés…
- le grand livre : C’est un livre où sont reportées les écritures du
livre - journal ; il a pour objet de récapituler et d’enregistrer ces écritures
suivant le plan de comptes du commerçant. Il s’agit en quelque sorte d’un
recueil de tous les comptes ouverts par l’entreprise commerciale.
- et le livre d'inventaire : L’art. 5 de la loi impose aux commerçants
de dresser un inventaire des éléments actifs et passifs de l’entreprise au
moins une fois par exercice ; à cette fin, le commerçant doit tenir un livre
d’inventaire sur lequel il doit transcrire le bilan et le C.P.C. (compte des
produits et charges) de chaque exercice.
En outre, elle oblige les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel
est supérieur à 10.000.000 dhs43 d’établir un certain nombre de documents
comptables supplémentaires tels que le manuel, l’état des soldes de
gestion (l’E.S.G.), le tableau de financement, l’état des informations
complémentaires (ETIC) et les états de synthèse annuels (ES).
B - LES REGLES RELATIVES À LA TENUE DE LA COMPTABILITE ET
LEURS SANCTIONS
Analysons d’abord ces règles, ensuite leurs sanctions.
a - Les règles

Afin de veiller sur l’authenticité des écritures comptables et la


sincérité des opérations effectuées par les commerçants, l’article 22 de la
loi exige que les documents comptables soient établis «sans blanc ni

43
Article 4 de la loi modifié par l'article 1er de la loi n° 44-03 promulguée par
le dahir n° 1-05-211du 14 février 2006 ; B.O. n° 5404 du 16 mars 2006
47
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

altération d’aucune sorte », c’est-à-dire qu’il est interdit de laisser des


blancs susceptibles d’être remplis en cas de besoin ou de biffer des
écritures, celles-ci doivent, le cas échéant, tout simplement être rectifiées
par d’autres écritures en sens inverse, autrement dit procéder à la contre-
passation.
C’est d’ailleurs pour les mêmes raisons que l’article 8 dispose que
le livre journal et le livre d’inventaire sont cotés et paraphés sans frais par
le greffier du tribunal du siège de l’entreprise. Chaque livre reçoit un
numéro répertorié par le greffier sur un registre spécial. Ne sont pas
tenues à cette obligation les personnes physiques dont le chiffre d'affaires
annuel n'excède pas deux millions de dirhams (2.000.000 DH), à
l'exception des agents d'assurances44.
Par ailleurs, l’article 22 exige des commerçants de conserver leurs
documents comptables et leurs pièces justificatives pendant 10 ans.
L’article 26 du code de commerce les oblige, de son côté, de classer et
conserver pendant 10 ans, à partir de leur date, les originaux des
correspondances reçues et les copies de celles envoyées.
➢ Pourquoi la conservation de 10 ans ?

Ce délai s’explique par le fait que pour effectuer un contrôle fiscal,


l’administration peut souvent remonter au-delà de 4 ans pour vérifier les
justificatifs concernant un crédit de TVA, un déficit fiscal ou encore la
variation de stocks car il y a toujours un lien entre les exercices .

➢ Que faut-il garder?

▪ Les doubles des factures de vente ou des tickets de caisse


▪ Les pièces justificatives des dépenses et des investissements

44
Loi n° 44-03

48
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

▪ Les fiches des clients et des fournisseurs, ainsi que tout autre
document prévu
par la législation ou la réglementation en vigueur
▪ Tout document nécessaire au contrôle fiscal ou peut servir comme
preuve commerciale.

➢ Où les garder?

Les documents comptables doivent être gardés au siège social pour


les personnes morales ou le domicile fiscal pour les personnes physiques.

➢ La perte des documents comptables :

En cas de perte des documents comptables, pour quelque cause


que ce soit, les contribuables doivent en informer l'inspecteur des impôts,
selon le cas, de leur domicile fiscal, de leur siège social ou de leur principal
établissement, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans
les quinze (15) jours suivant la date à laquelle ils ont constaté ladite perte.
Ce délai est porté à trente (30) jours, en cas de force majeure (Art 211 du
CGI).

a-1 Compatibilité entre l’application des règles juridiques et la


comptabilité informatisée :

➢ Tenue d’une comptabilité électronique :

Selon l’article 145 du CGI, les contribuables doivent tenir leur


comptabilité sous format électronique selon les critères fixés par voie
réglementaire. Ainsi, Ils sont tenus de délivrer à leurs acheteurs ou clients
des factures ou mémoires pré-numérotés et tirés d’une série continue ou
édités par un système informatique selon une série continue.

49
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt sur


le revenu au titre des revenus professionnels déterminés selon le régime
du résultat net réel ou du résultat net simplifié ainsi que ceux assujettis à
la taxe sur la valeur ajoutée, doivent se doter d’un système informatique
de facturation qui répond aux critères techniques déterminés par
l’administration.

Les contribuables soumis à l’impôt sur les sociétés et à l’impôt


sur le revenu, au titre des revenus professionnels déterminés selon le
régime du résultat net réel ou du résultat net simplifié ainsi que ceux
assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée, doivent détenir une adresse
électronique auprès d’un prestataire de service de certification
électronique, conformément à la législation et à la réglementation en
vigueur, permettant l’échange électronique entre l’administration fiscale et
les contribuables.

a-2 Présentation et conservation des documents


comptables sous format électronique

En cas de tenue de comptabilité par procédé électronique


conformément aux dispositions de l’article 145-I du CGI, les contribuables
doivent conserver les documents comptables précités sur support
électronique.
Cette obligation est applicable essentiellement en cas de contrôle
fiscal. Elle concerne les contribuables qui tenaient déjà leur comptabilité
sous format électronique avant le 1er janvier 2018, de même que les
contribuables assujettis à cette mesure en 2018
Les documents comptables à présenter sur support électronique
sont ceux nécessaires au contrôle fiscal - visés à l'article 211 du CGI, le

50
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

grand livre, le livre d'inventaire, les inventaires détaillés non recopiés


intégralement sur ce livre, le livre-journal et les fiches des clients ainsi que
des fournisseurs, aux côtés de tout autre document prévu par la législation
ou la réglementation en vigueur.
Soulignons que, par support électronique, la Direction Générale des
Impôts entend tout dispositif de stockage de données numérisées: CD,
clé USB,…

a-3 La tenue des livres côtés et paraphés est elle


nécessaire à l’ère informatisé?

Donc, après la généralisation des télé-procédures depuis 2017 et


l’obligation de tenir une comptabilité informatisée, le livre coté et paraphé
devrait être logiquement supprimé pour être remplacé par une application
informatique en ligne qui assure le même niveau de sécurité et
d’authentification que la télé-déclaration .

b - Les sanctions

Les sanctions de ces formalités sont d’ordre fiscal et pénal.


1 - Les sanctions fiscales
Comme les documents comptables servent de base à
l’établissement des déclarations fiscales, ils peuvent faire l’objet de
vérification de la part des inspecteurs des impôts. Aussi, lorsque ces
documents ne respectent pas les normes prescrites par la loi 9-88, l’article
23 de cette dernière laisse la faculté à l’administration des impôts de les
rejeter et d’établir une imposition forfaitaire. Elle peut même appliquer, le
cas échéant, des sanctions pécuniaires (majorations, indemnités de
retard, etc.)
➢ Amendes fiscales :

51
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Est punie d’une amende de 5000dhs à 50000dhs, toute personne qui


utilise l’un des moyens suivants :

• Délivrance ou production de factures fictives,

• Production d’écritures comptables fausses ou fictives,

• Vente sans facture de manière répétitive,

• Soustraction ou destruction de pièces comptables légalement


exigibles,

• Dissimulation de tout ou partie de l’actif de la société, ou


augmentation d’une manière frauduleuse de son passif en vue
d’organiser son insolvabilité.

En cas de récidive :
• Avant l’expiration d’un délai de 5 ans, qui suit un jugement de
condamnation à l’amende précitée, ayant acquis l’autorité de la
chose jugée, le contrevenant est puni, outre de l’amende ci-dessus
d’une peine d’emprisonnement de (1) à (3) mois.

➢ Rejet de comptabilité

L’administration fiscale peut rejeter les comptabilités qui ne sont pas


tenues dans les formes prescrites par la loi, Article 23 de la loi 9-88 relative
aux obligations comptables des commerçants.
➢ Sanctions pour fraude ou complicité de fraude

Une amende égale à 100% du montant de l'impôt éludé est


applicable à toute personne ayant participé aux manœuvres destinées à
éluder le paiement de l’impôt, assisté ou conseillé le contribuable dans
l’exécution desdites manœuvres, indépendamment de l’action
disciplinaire si elle exerce une fonction publique.
➢ Sanctions pour infractions aux dispositions relatives à la
présentation des documents comptables sur support
électronique

52
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Une amende égale à 50 000 dhs, par exercice, est applicable aux
contribuables, qui tiennent une comptabilité par procédé électronique, et
qui ne présentent pas les documents comptables sur support
électronique, dans le cadre du contrôle fiscal (Art 191 bis du CGI)

2 - Les sanctions pénales


S’il s’avère que le commerçant a falsifié les livres et documents
comptables, il peut être poursuivi pour banqueroute ou pour fraude fiscale
ou pour faux en écriture du commerce.
D’un autre côté, en cas d’ouverture d’une procédure de traitement,
les dirigeants d’une entreprise individuelle ou à forme collective risquent
d’être poursuivis pour banqueroute45 lorsqu’il se révèle qu’ils ont tenu une
comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de
l’entreprise ou de la société ou s’ils se sont abstenus de tenir toute
comptabilité prescrite par la loi.
Par ailleurs, la loi de finances 1996-1997 a, pour la première fois,
incriminé la fraude fiscale ; cette loi prévoit cinq faits qui peuvent constituer
la fraude fiscale, parmi lesquels la production d’une comptabilité fausse
ou fictive et la soustraction ou la destruction des documents comptables46.

C - LA PREUVE PAR LES DOCUMENTS COMPTABLES


L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et non des
moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des autres
commerçants.

45
- La sanction encourue est l’emprisonnement de 1 à 5 ans et une amende de 10 000 à
100000 dhs ou l’une de ces deux peines seulement. Ces peines sont portées au double
lorsque le banqueroutier est dirigeant d’une société dont les actions sont cotées en bourse.
46
- La sanction prévue est l’amende de 5 000 à 50 000 dhs qu’il s’agisse de l’IS, de l’IGR ou
de la TVA (Art. 12, 13 et14 LF) ; en cas de récidive, le contrevenant est passible, en plus de
cette amende, d’un emprisonnement de 1 à 3 mois. (Il faut rappeler que l’emprisonnement ne
peut être prononcé que contre les personnes physiques, s’il s’agit d’une personne morale, il
s’appliquera à ses dirigeants). Ajoutons que ces infractions doivent être constatées par deux
inspecteurs des finances par procès-verbal.

53
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Si les principes techniques de la comptabilité ont été réglementés par la loi 9-


88, les règles relatives à la preuve sont demeurées prévues par le code de commerce
dans ses articles 19 à 26.
Deux sortes de questions se posent à ce sujet : l’une relative à la force probante
des documents comptables, l’autre concerne les modes de production de ces
documents en justice.
a - La force probante des documents comptables
En ce qui concerne la preuve, il y a lieu de distinguer deux hypothèses, suivant
que les documents comptables sont invoqués contre le commerçant qui les tient ou
qu’ils sont invoqués par lui contre les tiers.
1 - Les documents comptables sont invoqués comme preuve contre le
commerçant qui les tient
Cette hypothèse se présente de la manière suivante : un détaillant achète de la
marchandise de chez son fournisseur mais il prétend ne pas l’avoir reçue, pourtant,
dans les livres de ce détaillant, il est fait mention de sa réception. Dans ce cas, le
fournisseur peut-il invoquer les livres du détaillant comme preuve contre ce dernier
d’avoir reçu la marchandise ?
En réalité, ces écritures constituent un aveu du commerçant. C’est pourquoi
l’article 20 du nouveau code de commerce a prévu expressément que les tiers peuvent
opposer au commerçant le contenu de sa comptabilité ; mieux encore, cette
comptabilité peut servir de preuve contre lui alors même qu’elle soit « irrégulièrement
tenue ».
2 - Les documents comptables invoqués comme preuve par le commerçant
qui les tient
L’un des intérêts de la tenue de la comptabilité pour le commerçant, et non des
moins importants, est qu’elle peut lui servir de preuve à l’égard des tiers. Néanmoins,
il convient de distinguer, suivant que le tiers est un commerçant ou un non-
commerçant.
2-1/ La preuve est dirigée contre un commerçant
Des dispositions de l’article 438 DOC47 on a déduit une règle générale suivant
laquelle nul ne peut se constituer une preuve à soi-même.

47
- V. art. 433 et suiv. D.O.C.

54
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

L’article 19 du code de commerce déroge cependant à cette règle en admettant


qu’une comptabilité régulièrement tenue est admise par le juge pour faire preuve entre
les commerçants à raison des faits de commerce.
Par conséquent, en cas de litige entre commerçants à propos de leurs affaires
commerciales, chacun peut invoquer ses propres documents comptables pour faire
preuve contre l’autre, à condition qu’ils soient régulièrement tenus.
2-2/ La preuve est dirigée contre un non commerçant
Contrairement à l’hypothèse précédente où les commerçants se trouvent à
égalité des preuves, les documents comptables d’un commerçant ne peuvent, en
principe, revêtir une force probante à l’égard d’un non-commerçant. En plus du fait que
ce dernier n’a pas de moyens de défense pour faire face aux documents du
commerçant, il faut rappeler qu’en matière d’actes mixtes les règles du droit
commercial, notamment celle de la liberté de la preuve, ne peuvent être opposées au
non-commerçant (art. 4) ; ceci sans oublier que les documents du commerçant sont
des preuves de sa propre création.
Néanmoins, on peut trouver une atténuation à ce principe dans la disposition
de l’article 433 DOC qui a été reprise par l’article 21 du code 1996 suivant laquelle
« lorsque les documents comptables correspondent à un double qui se trouve entre
les mains de la partie adverse, ils constituent pleine preuve contre elle et en sa
faveur ».
Il faut déduire de cet article qu’il suffit que le non-commerçant détienne une
copie de ces documents, pour que celle-ci constitue une preuve contre lui ou en sa
faveur48.
La question se pose en pratique à propos des relevés de comptes établis par
les banques à l’intention de leurs clients non commerçants. La jurisprudence tantôt
leur refuse la force probante, tantôt y puise un commencement de preuve, tantôt enfin
elle leur reconnaît une force probante49.

48
- Rappelons cependant que les tiers, commerçants ou non, peuvent invoquer en leur faveur
la comptabilité d’un commerçant sans avoir à en détenir un double (art. 20 code de commerce).
49
- V. dans ce dernier sens, à titre d’exemple, TPI Casablanca, section commerciale, du
15/10/1987, aff. BCM c/ Barich Omar, n° 2547, RMD, 1987, n° 15, p. 306 qui a jugé que dans
la mesure où le relevé de compte établi par la banque est extrait de ses livres et registres
régulièrement tenus, sa contestation non appuyée par des moyens de preuve est insuffisante
à lui retirer sa valeur probante.

55
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Mais le législateur, par principe, n’a pas fait d’exception à la règle de l’art. 4
relative aux actes mixtes ; bien au contraire, il a adopté une position explicite à ce sujet
en décidant que les relevés de comptes établis par les établissements de crédit ne
sont admis comme moyens de preuve qu’entre eux et leurs clients commerçants.
b - Les modes de production en justice
Les documents comptables peuvent donc être invoqués en justice comme
preuve de leurs allégations soit par le commerçant qui les tient, dans ce cas il les
mettra de sa propre volonté entre les mains de la justice, soit par les tiers, et la loi met
à leur disposition deux procédés : la communication et la représentation. Mais le juge
peut ordonner d’office l’un ou l’autre de ces procédés, c’est-à-dire sans que ce soit
requis par les parties.
1 - La communication
« La communication est la production intégrale des documents comptables ».
Elle consiste donc pour le commerçant de mettre toute sa comptabilité à la disposition
de la partie adverse. L’article 24 laisse toutefois aux parties de décider de la manière
dont la communication doit être établie - notamment la remise des documents à un
expert - et à défaut d’accord, de les déposer au secrétariat-greffe du tribunal.
C’est dire le danger que présente la communication pour le commerçant qui
verra tous les secrets de son commerce dévoilés à son adversaire.
C’est pourquoi l’article 24 du code de 1996 a prévu des cas exceptionnels où la
communication peut être ordonnée en justice, à savoir « les affaires de succession, de
partage, de redressement ou de liquidation judiciaire et dans les autres cas où ces
documents sont communs aux parties ».
On remarquera donc que la communication se justifie dans ces affaires par
deux raisons : soit que les adversaires ont le même droit sur ces documents
(succession, partage de société, etc.), soit par la cessation de l’activité du commerçant
(redressement ou liquidation judiciaire, le commerçant ne courant plus aucun danger
à dévoiler sa comptabilité).
2 - La représentation
« La représentation consiste à extraire de la comptabilité les seules écritures
qui intéressent les litiges soumis au tribunal » (art. 23 code commerce).
Aussi, la représentation se distingue-t-elle de la communication en ce que :

56
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- seules les parties de la comptabilité qui concernent le litige en question sont


produites en justice ;
- les documents sont examinés par le juge lui-même ou par un expert nommé
par lui afin d’y extraire les écritures concernant le procès, ils ne peuvent donc être
confiés à l’adversaire ;
- enfin, et par conséquent, la représentation n’est pas limitée aux situations
énumérées par l’article 24.
Il reste à signaler que si le commerçant refuse, sur injonction du juge, de
produire sa comptabilité, ou s’il déclare ne pas avoir de comptabilité, le juge peut
déférer le serment à l’autre partie pour appuyer ses prétentions (art. 25).
Si cette dernière prête ce serment dit supplétoire50, elle sera alors crue sur sa
parole et gagnera son procès au détriment du commerçant qui a refusé de produire sa
comptabilité ou qui a déclaré ne pas en avoir.
Une nouvelle catégorie de commerçants est désormais dispensée de
l'obligation de tenir une comptabilité et de l'obligation de s'inscrire au registre de
commerce, ce sont les nouveaux auto–entrepreneurs.

Section IV – L'auto-entrepreneur
La loi 114/1351 a instauré un nouveau statut des auto-entrepreneurs. Son
objectif est de lutter contre l'informel pour deux raisons: limiter la concurrence livrée
par l'informel et surtout élargir l'assiette fiscale.
Au sens de la loi, l'auto-entrepreneur est toute personne physique exerçant, à
titre individuel, une activité industrielle, commerciale ou artisanale, ou prestataire de
services, dont le chiffre d'affaires annuel encaissé ne dépasse pas :

50
- Ce serment est appelé ainsi dans la mesure où il supplée à la production de preuve en
faveur de celui auquel il est déféré ; autrement dit, en cas d’absence de preuve, le serment lui
est déféré.
51
- Dahir n°1-15-06 du 29 rabii II 143 6 (19 février 2015) portant promulgation de la loi n° 114-
13 relative au statut de l'auto-entrepreneur. B.O. n° 6344 du 19 mars 2015.V. aussi le décret
n°2-15-257 du 10 avril 2015 fixant la composition et les modalités de fonctionnement du
conseil national de l'auto-entrepreneur; le décret n°2-15-258 du 10 avril 2015 pris en
application des articles 5, 6 et 8 de la loi n°114-13 relative au statut de l'auto-entrepreneur
fixant les modalités d'inscription au registre des auto-entrepreneurs et le décret n°2-15-263 du
10 avril 2015 relatif à l'exclusion des contribuables exerçant certaines professions, activités et
prestations de service du bénéfice du régime fiscal applicable à l'auto-entrepreneur, B.O.
n°6358 du 7/5/2015.

57
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

• 500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales ;


• et 200.000 dirhams pour les prestations de services.
La liste des activités industrielles, commerciales et artisanales et la liste des
prestations de services sont fixées par voie réglementaire.
Plusieurs avantages sont associés à ce régime, notamment:
- du côté social, la population concernée devrait bénéficier d'une couverture
sociale;
- du point de vue formel, un allègement est prévu concernant la contrainte de
la domiciliation, puisque les auto-entrepreneurs peuvent exercer leurs
activités dans leur propre lieu de résidence ou dans un local partagé entre
plusieurs entreprises;
- sur le plan comptable, l'auto-entrepreneur est dispensé des lourdes
obligations comptables classiques, il est seulement tenu à une comptabilité
simplifiée de caisse, càd de tenir un registre des achats et des ventes qui
doit être visé par le responsable du service d'assiette du lieu de son domicile
fiscale52 ;
- sous l'angle fiscal, déjà la loi de finances de 2014, càd avant l'adoption du
projet de loi par le parlement, a prévu un taux de taxation très allégé (1% du
chiffre d'affaires pour le commerce, l'industrie et l'artisanat et 2% pour les
prestations de services53. Il convient de noter que c'est un impôt libératoire
de l'impôt sur le revenu;
- du point de vue juridique l'auto-entrepreneur est désormais dispensé de
l'obligation d'immatriculation au registre de commerce, ce dernier est
remplacé par un registre national des auto-entrepreneurs; la gestion de ce
registre est confiée à Barid Al Maghrib pour le compte de l'Etat. Poste Maroc
est chargée des inscriptions mais aussi de la réception des déclarations du
chiffre d'affaires, de collecter les impôts et les cotisations sociales54.
➢ On constatera cependant que le texte n'évoque nulle part les effets
juridiques de l'inscription au registre national des auto-entrepreneurs
à l'instar du code de commerce concernant le registre de commerce

52
- V. la circulaire de la direction générale des impôts concernant le régime fiscal 2014
appliqué aux auto-entrepreneurs, L'ECONOMISTE du 30 janvier 2014, P. 16
53
- Il convient de noter que c'est un impôt libératoire de l'impôt sur le revenu.
54
V. L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2

58
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

! La question reste, faute d'inscription au registre de commerce est-


ce que l'auto-entrepreneur est quand même un commerçant ? En tout
cas puisqu'aucune réponse à cette question ne figure dans le texte,
légalement parlant, l'auto-entrepreneur ne peut guère prétendre au
statut de commerçant.
➢ cependant, en cas de dettes liées à son activité, tous ses biens
meubles et immeubles peuvent faire l'objet d'une saisie à l'exception
de sa résidence principale.

La radiation de l'auto-entrepreneur doit être opérée dès le dépassement des


seuils fixés par la loi55 durant deux exercices.
Dans ce cas, l'auto-entrepreneur devra muter en entreprise individuelle ou en
S.A.R.L. à associé unique avec toutes les contraintes que cela comporte.
Un observateur nous fait remarquer que "certains seront tentés de faire en sorte
de revenir au plafond pour continuer à payer des taux réduits, on poussera encore les
gens vers le noir"56

Une fois tous les actes de commerce et les activités commerciales étudiés en
tant qu’objet du croit commercial et la question relative au sujet du droit commercial
élucidée, une interrogation se pose automatiquement dans notre esprit : pourquoi
distinguer le domaine commercial du domaine civil ? C’est toute la question de leur
régime juridique.

Section V – LE REGIME JURIDIQUE DU DOMAINE COMMERCIAL


Les particularités des règles de droit commercial sont diverses. A ce niveau de
notre étude, on dégagera seulement à titre d'exemples quelques règles générales du
droit commercial qui se distinguent foncièrement de celles du droit civil. On distinguera
ces particularités suivant qu’il s’agit des règles de fond ou des règles de forme.

55
-500.000 dirhams pour les activités industrielles, commerciales et artisanales et 200.000
dirhams pour les prestations de services.
56
- L'ECONOMISTE du 23 janvier 2015, p.2.

59
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

§ I - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FOND


1°/ La solidarité
Il y a solidarité entre les débiteurs lorsque chacun d’eux est personnellement
tenu de la totalité de la dette. Face à plusieurs débiteurs d’une même dette, le
créancier a le choix de réclamer à chacun d’eux, individuellement ou collectivement,
le paiement de la totalité de la dette.
En droit commun, c’est-à-dire dans les contrats civils «la solidarité entre les
débiteurs ne se présume pas » (art. 164 D.O.C.), elle doit être expressément stipulée
dans le contrat.
Mais en matière commerciale la solidarité est de droit : l’article 335 du code
1996 dispose : « en matière commerciale la solidarité se présume » (V. aussi art. 165
D.O.C.). Par conséquent, et contrairement au droit civil, pour écarter l’application de
la solidarité entre les commerçants une clause spéciale doit être stipulée dans le
contrat.
2°/ Le mandat
En matière civile le mandat est présumé gratuit, « à moins de convention
contraire » dit l’article 888 DOC.
Par contre, en matière commerciale la gratuité n’est pas présumée lorsque le
mandat est donné entre commerçants pour affaires de commerce (article 888, 2°
DOC). Par conséquent et inversement, pour que le mandat soit gratuit en matière
commerciale, une clause expresse doit être stipulée dans le contrat.
En outre, en matière de mandat, le pouvoir d’action des mandataires est
fondamentalement distinct en droit commercial par rapport au droit civil.
Dans le domaine civil, l’article 898 D.O.C. prévoit que lorsque plusieurs
mandataires sont nommés par le même acte et pour la même affaire, ils ne peuvent
agir séparément, s’ils n’y sont expressément autorisés.
Le même article prévoit que dans le mandat donné entre commerçants pour
affaires de commerce, l’un des mandataires peut agir valablement sans l’autre, si le
contraire n’est exprimé. Cette particularité du droit commercial se justifie parfaitement
par le souci de rapidité qu’exigent les transactions commerciales.
3°/ La stipulation d’intérêts
Il convient tout d’abord de préciser que selon l’art. 870 D.O.C. la stipulation
d’intérêts entre musulmans est formellement interdite !

60
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

« Dans les autres cas » précise l’art. 871, c’est-à-dire dans les cas où les
musulmans ne sont pas parties au contrat, les règles relatives à la stipulation d’intérêts
sont les suivantes :
- En matière civile, les prêts sont censés être accordés sans intérêts ; ils ne sont
donc pas présumés. L’art. 871 dispose dans ce sens que « les intérêts ne sont dus
que s’ils ont été stipulés par écrit ». Par conséquent, n’étant pas de droit, la stipulation
d’intérêts en matière civile doit être expressément mentionnée dans le contrat.
- Par contre, en matière commerciale, le même article dans son alinéa 2 prévoit
que « cette stipulation est présumée lorsque l’une des parties est un commerçant ».
Cette règle a pour fondement le fait que les opérations commerciales ont toujours pour
objectif de réaliser des bénéfices ; donc le commerçant qui a profité d’un prêt doit payer
des intérêts même si le contrat ne stipule pas d’intérêts.
4°/ La capitalisation des intérêts (ou l’anatocisme)
- En matière civile : l’art. 874 D.O.C. interdit aux parties de stipuler que les
intérêts non payés seront, à la fin de chaque année, capitalisés avec la somme
principale et seront productifs eux-mêmes d’intérêts. Ce qui indique une interdiction
formelle de l’anatocisme dans le domaine civil.
- En revanche, dans le domaine commercial : si la capitalisation des intérêts est
permise par l’art. 873 D.O.C., elle ne peut se faire, même en matière de compte
courant, qu’à la fin de chaque semestre. Mais la coutume bancaire fait échec à cette
disposition de l’art. 873 du D.O.C. puisque, dans la pratique, la capitalisation des
intérêts est opérée à la fin de chaque trimestre.
§ II - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FORME
Les règles de forme sont celles qui gouvernent l’organisation judiciaire, le
fonctionnement de la justice, les actes de procédure, le déroulement du procès, la
preuve, les décisions judiciaires, les recours, etc. Les règles du droit commercial se
distinguent aussi dans ce domaine par rapport à celles du droit civil à bien des égards.
1°/ Le redressement et la liquidation judiciaires
Ces procédures sont particulières au droit commercial. Elles ont remplacé la
procédure de la faillite prévue par l'ancien code de commerce. Elles constituent une
garantie qui a pour but de protéger les créanciers contre leurs débiteurs commerçants
défaillants.
Lorsque la cessation de paiement du commerçant est dûment constatée, ses
créanciers doivent engager à son égard une procédure collective ; ils ne peuvent

61
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

poursuivre le débiteur de manière individuelle. Ils doivent se grouper dans leur action
et se faire représenter par un syndic. Tout d’abord, une procédure de redressement
est tentée et, en cas d’échec, il est procédé soit à la cession (vente de l’entreprise),
soit à la liquidation des biens du commerçant.
Par contre, un non commerçant qui refuse de payer ses dettes, ne peut être
assujetti à ces procédures collectives, il est déclaré en état de déconfiture. Chaque
créancier exerce son action de manière individuelle. Celui qui l’assignera en paiement
le premier, sera payé en priorité, après avoir exercé ses droits sur le patrimoine du
débiteur (c’est pourquoi on parle dans ce domaine du prix de la course).
2°/ La compétence judiciaire :
Avant 1997 il n’existait pas de tribunaux de commerce au Maroc ; les tribunaux
de droit commun connaissaient de toutes les affaires, qu’elles soient civiles ou
commerciales…
Depuis, la loi 53/95 a créé des tribunaux de commerce et des cours d’appel en
matière commerciale (V. supra en introduction) mais qui ne connaissent désormais
que des affaires commerciales dont le montant dépasse 20 000 dh.
3°/ La preuve :
- En droit civil, la règle en matière de preuve est clairement exprimée par l’art.
443 D.O.C. qui exige la preuve par écrit pour toute demande en justice qui dépasse
la somme de 10 000 dh57.
- En droit commercial, le principe est la liberté de la preuve. C’est-à-dire que
dans les affaires qui opposent les commerçants, il n’est pas nécessaire d’établir la
preuve par écrit, la preuve testimoniale suffit. Ce qui s’explique par le fait que les
commerçants s’occupent plus de la rapidité de la réalisation de leurs transactions que
du formalisme.
L’art. 334 du code 1996 stipule en effet qu’en matière commerciale la
preuve est libre. Cependant, si une disposition législative ou une clause
conventionnelle l’exigent, la preuve doit être rapportée par écrit (par exp. la loi exige
un écrit en matières de vente et de nantissement du fonds de commerce, des contrats
de sociétés, des effets de commerce…).

57
Dahir du 30 novembre 2007 portant promulgation de la loi 53/05 relative à l'échange
électronique de données juridiques. B.O. 5584 du 6/12/2007, p. 1357

62
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

4°/ La prescription :
Il s’agit de la prescription dite extinctive ou libératoire.58 Cette prescription est
un mode de libération ou d’extinction d’une obligation. Elle éteint toute action née d’une
obligation après l’écoulement du délai fixé par la loi.
Cette prescription est, en fait, une sanction du créancier qui, par sa négligence
et son inaction, laisse passer le délai prévu par la loi sans réclamer sa créance.
- Dans le domaine civil, le délai de cette prescription est de 15 ans (Art. 387
et 375 D.O.C.).
- Mais en matière commerciale ce délai n’est que de 5 ans, s’agissant
d’obligations nées entre commerçants à l’occasion de leur commerce. (Art. 5 code
1996 et 388 D.O.C.). Ce court délai s’explique :
* d’une part, par l’application du principe de la liberté de la preuve entre les
commerçants ;
* d’autre part, par le fait que, par la tenue de leur comptabilité, les commerçants
sont en mesure de se rendre compte de l’état de leurs créances. Par conséquent, le
délai de 5 ans est largement suffisant pour pouvoir les réclamer.
Telles sont les données sur les activités commerciales et les actes de
commerce qui constituent dans le nouveau code de commerce l’objet du droit
commercial. Partant de ces données, il nous est possible de porter l’analyse sur le
fonds de commerce.

CHAPITRE 3 - LE FONDS DE COMMERCE


Nous examinerons, d’abord, les éléments du F.C., ensuite les contrats qui
portent sur le F.C. et les règles destinées à le protéger et enfin la nature juridique du
F.C.

Section 1 - LES ELEMENTS DU F.C.


Ces éléments sont traditionnellement divisés en deux catégories, suivant leur
nature, en éléments corporels et d’autres incorporels.

58
- Par opposition à la prescription acquisitive qui a pour effet de faire acquérir un droit réel
(exp. le droit de propriété) à celui qui en bénéficie après l’écoulement du délai de prescription.

63
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

§ I - LES ELEMENTS CORPORELS


Il s’agit du mobilier commercial (les bureaux, les fauteuils, les chaises, les
comptoirs…), des marchandises (objets destinés à la vente) et du matériel et l’outillage
(les appareils et machines, les moyens de transport…)
Il faut noter cependant que ces éléments corporels n’ont pas toujours une
importance dans un F.C., par conséquent, bien que ces éléments corporels fassent
partie du F.C., l’acquéreur du F.C. peut parfaitement se passer du matériel, outillage
et mobiliers anciens.
Par ailleurs, il existe bien des F.C. qui n’ont pas de marchandises tels que les
fonds des courtiers et agents d’affaires…
Il reste que, ce sont les éléments incorporels qui confèrent son importance au
F.C.
§ II - LES ELEMENTS INCORPORELS
Ce sont les éléments les plus divers du F.C. et les plus importants.
1 - La clientèle : La clientèle est la faculté de grouper les clients habituels au
commerce. C’est l’élément le plus important du F.C. ; d’ailleurs, en vertu de l’art. 80 du
code de commerce, la clientèle est devenue un élément obligatoire du F.C. Ce dernier
ne peut exister sans la clientèle.
Il ne s’agit donc pas de l’ensemble des clients d’un commerce, car le
commerçant ne possède pas la clientèle, il n’en a pas le monopole et il suffit d’une
mauvaise gestion pour la perdre.
2 - Le nom commercial : C’est l’appellation empruntée par le commerçant pour
l’exercice de son commerce, exp. Établissement Ben Chekroun59, Garage El Bahja…
Le nom commercial doit être inscrit au registre de commerce lors de l'immatriculation
du commerçant personne physique ou société.
3 - L’enseigne : C’est un signe distinctif qui sert à individualiser un
établissement commercial : exp. la coquille de Shell, le petit homme de neige de
Michelin, Hôtel au Lion d’Or, 1000 chemises, Au Rabais, CTM…
L’enseigne dispose en droit français d’une définition juridique prévue par la loi
du 29 décembre 1979 relative à la publicité, enseignes et préenseignes. Selon l’article
3 de cette loi, « constitue une enseigne toute inscription, forme ou image apposée sur
un immeuble et relative à une activité qui s'y exerce ». Elle permet en outre de localiser

59 - Le nom patronymique est hors du commerce, c’est-à-dire ne peut être cédé.

64
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

géographiquement le fonds de commerce du fait de son exposition directe à la clientèle


à l’extérieur du local d'exploitation.
Dans la pratique, devant la complexité de distinction entre ces différentes
notions ayant trait à l'individualisation des entreprises et devant l'absence de
définitions légales, la jurisprudence s’est chargée de proposer des définitions des
différents signes distinctifs employés pour désigner le fonds de commerce 60. En ce
sens peut être retenue une décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de
Paris61 qui en plus de souligner l’importance de faire une distinction entre ces termes
prend la peine de les définir un à un en commençant par la dénomination sociale
« comme « le nom qui individualise la personne morale prise en elle-même », le nom
commercial comme « la dénomination qui désigne l’entreprise ou le fonds de
commerce envisagé comme une entité ne se confondant pas avec l’exploitant »,
l’enseigne comme « un signe désignant un établissement industriel ou commercial
pris dans sa localisation même », et la marque comme « un signe devant distinguer
les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises »62 63.

4 - Les licences : L’art. 80 parle des licences, mais il s’agit aussi des
autorisations et des agréments. Elles sont accordées par les autorités administratives
concernées pour l’exploitation de certains F.C., suivant le domaine d’activité :
tourisme, transport, hôtellerie, restauration, cinéma, vidéo, boissons alcooliques…
5 - Le droit au bail : Ce droit n’a d’intérêt que dans le cas où le commerçant
n’est pas propriétaire du local dans lequel il exerce son commerce. Il est désigné dans
la pratique par l’expression de « propriété commerciale », ce qui exprime la protection
accordée par le législateur aux locataires de locaux à usage commercial contre les
éventuels abus des propriétaires des murs qui pourraient avoir des conséquences
néfastes sur le commerçant. De plus, il est difficile de concevoir une vente d’un F.C.
sans local.

60
A. Mendoza, Les noms de l’entreprise, Presses Universitaires d’Aix-Marseille – PUAM,
2003, no 48, p. 74.
61
TGI Paris 29 novembre 1984, PIBD 1985, no 375, III, 250.
62
A. Mendoza, Les noms de l’entreprise, Presses Universitaires d’Aix-Marseille – PUAM,
2003, no 48, p. 74.
63
Mamouni D., La liberté contractuelle en droit des sociétés, Thèse, UMV, FSJES Rabat,
2018, p. 34

65
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Le droit au bail est actuellement réglementé par la loi n° 16.96 promulguée par
dahir du 18 juillet 2016 (B.O. n° 6490, 11/8/2016), ses règles assurent au commerçant
le droit au renouvellement du bail et, à défaut, le droit à une indemnité.

6 - Les droits de propriété industrielle :


L’art. 80 dresse toute une énumération de ces droits ; il s’agit des brevets
d’invention, des marques de fabrique, de commerce et de service, des dessins et
modèles industriels…

Section 2 - LES CONTRATS PORTANT SUR LE FONDS DE


COMMERCE
Le F.C. peut être vendu (§1) ou apporté à une société (§2), affecté en
nantissement (§3), des règles communes ont cependant pour but la protection des
droits du vendeur et du créancier nanti (§4), enfin le FC peut être mis en location (§5).
§ I - LA VENTE DU FONDS DE COMMERCE
Vu ses particularités commerciales, la vente du F.C. a fait l’objet d’une
réglementation spéciale par le code de 1996.
Elle prévoit en effet des conditions particulières au contrat de vente du F.C. et
partant, des effets spéciaux.
A - LES CONDITIONS DE LA VENTE
Comme tout contrat, la vente du F.C. doit obéir aux conditions de fond
générales en la matière : le consentement, la capacité commerciale, l’objet de la
vente et le prix.
Quant aux conditions de forme, et afin de protéger l’acquéreur, l’article 81 du
code de commerce impose la rédaction d’un écrit.
Mais l’écrit ne doit pas prendre obligatoirement la forme authentique, il peut être
seulement sous seing privé64.
B - LES EFFETS DE LA VENTE
Si la vente du F.C. fait l’objet d’une réglementation spéciale, c’est justement
pour protéger tous les intérêts en présence.

64
L'article 57 de la loi 17-04 portant code du médicament et de la pharmacie (B.O 5080 du
07/12/2006) impose l'intervention d'un notaire en cas de cession d'une officine de pharmacie.

66
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

a - Les règles protectrices des droits de l’acquéreur


Il s’agit d'abord des règles de droit commun de la vente qui posent certaines
obligations à la charge du vendeur : qui doit transférer la propriété du F.C. à l’acheteur,
garantir l’acheteur contre les vices cachés du F.C. en plus de l’obligation de non
concurrence.
En outre le code de 1996 a imposé au vendeur d'inscrire un certain nombre de
mentions obligatoires destinées à la protection de l’acquéreur (v. art. 81)
b - Les règles protectrices des droits du vendeur
L’acheteur du FC a pour obligation principale le paiement du prix convenu.
Devant l’importance de l’investissement, un crédit est souvent consenti par le
vendeur à l’acquéreur du FC ; aussi, le législateur offre des garanties légales au
vendeur du FC.
1 - Le privilège du vendeur
Pour pouvoir bénéficier de ce privilège, le vendeur doit l’inscrire au RC. Le
vendeur doit, à peine de nullité, procéder à cette inscription dans les 15 jours de la
date de l’acte de vente.
L’inscription de ce privilège fera alors bénéficier le vendeur d’un droit de suite
et d’un droit de préférence (V. infra §4).
2 - L’action résolutoire
Au moment de l’inscription de son privilège65, le vendeur peut, en plus et en
même temps, opter pour l’action résolutoire dans la perspective de récupérer son FC
dans le cas où il y verrait un intérêt. A défaut de paiement, elle lui permettra d’obtenir
l’effacement rétroactif du contrat de vente du FC pour inexécution par l’acquéreur de
son obligation de payer le prix.
c - Les règles protectrices des droits des créanciers du vendeur
Un commerçant doit normalement, préalablement à la vente de son FC,
procéder à l’apurement de sa situation vis- à- vis de ses créanciers ; ce qui n’est pas
toujours le cas. C’est en prévision de certaines pratiques malhonnêtes que le
législateur a instauré des règles pour protéger ces créanciers.
Dans ce but, trois mécanismes complémentaires sont mis au point par le
législateur :

65
- C'est-à-dire dans les 15 jours de l'acte.

67
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

1 - La publicité
- Dépôt : Pour que les créanciers soient mis au courant de l’opération de vente
du FC, l’art. 83 du nouveau code impose tout d’abord, une fois l’acte de vente
enregistré, de déposer une expédition de l’acte notarié ou un exemplaire de l’acte
sous seing privé dans les 15 jours de sa date au secrétariat-greffe du tribunal.
- Publication au RC : Ensuite, un extrait de cet acte doit être publié au RC.
- Publications au BO et journaux d’annonces légales. : Enfin, une double
publication doit être entreprise :
* Une première publication de tout l’extrait inscrit au RC est effectuée sans délai
par le secrétaire-greffier au BO et dans un journal d’annonces légales aux frais des
parties.
* Cette publication doit être renouvelée par l’acquéreur entre le 8ème et le 15ème
jour après la première insertion.
- La sanction : Etant destinés aux créanciers, le défaut de dépôt et de publicité
a pour conséquence que la vente du FC leur est inopposable et l’acheteur reste tenu
des dettes du vendeur (Art. 89). La jurisprudence est claire à ce sujet, elle considère
que l’acquéreur du fonds « n’est pas libéré vis-à-vis des tiers créanciers. Il demeure
susceptible d’être actionné par les créanciers du vendeur »66. En outre, il reste
redevable même à l’égard de l’administration fiscale.
2 - L’opposition
Une fois la seconde publicité accomplie, les créanciers du vendeur, même si
leur dette n’est pas encore exigible, ont un délai de 15 jours pour former opposition au
tribunal.
Il ne s’agit pas d’une opposition à la vente du FC, mais au paiement de son prix
au vendeur. Par conséquent, le prix de vente doit rester consigné entre les mains de
l’acheteur pendant le délai de l’opposition et même après ce délai au cas où des
oppositions seraient formées; s’il passe outre cette consignation et paie quand même
le vendeur, il ne sera guère libéré vis-à-vis des tiers (Art . 89).
Afin de remédier à cette situation de blocage du prix de vente, l’art. 85 permet
au vendeur, après l’écoulement d’un délai de 10 jours de l’expiration du délai des
oppositions, de saisir en référé le président du tribunal afin de l’autoriser à percevoir

66
- Trib. Casablanca, 27 février 1937, G.T.M. 10/4/1937, p. 111.

68
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

son prix à condition de verser à la caisse du tribunal une somme suffisante, fixée par
le président, pour désintéresser les créanciers opposants.
3 - La surenchère
Tout créancier, qui se rend compte que le prix de vente déclaré est insuffisant
pour désintéresser les créanciers opposants ou inscrits, a la possibilité de formuler
son désir d’acheter lui-même le FC en se déclarant surenchérisseur67 et proposer de
payer le prix déclaré majoré d’un sixième du prix des éléments incorporels.
Lors de la surenchère, à défaut d’un plus fort enchérisseur, le fonds est adjugé
au créancier surenchérisseur du sixième.
§ II - L’APPORT DU FC EN SOCIETE :
Le propriétaire d’un FC, au lieu de le vendre, peut décider, pour différentes
raisons, d’en faire un apport en société.
Les règles relatives à cette opération qui étaient contenues dans l'art. 7 du dahir
du 31/12/1914 sont reprises, avec quelques modifications et certaines précisions par
les art. 104 et 105 du code de 1996.
La publicité de l’apport du FC en société est semblable à celle de la vente :
dépôt de l’acte au tribunal, inscription d’un extrait au RC et sa première publication au
BO et dans un journal d’annonces légales par les soins du greffier, ensuite une
deuxième publication par la société, comme pour l’acquéreur en cas de vente.
Elle en diffère par contre quant à la procédure spéciale accordée aux créanciers
de l’apporteur et quant aux mesures de protection de leurs droits.
A - LA PROCEDURE DE DECLARATION DE CREANCES :
En contrepartie de son apport en société, le propriétaire du fonds perçoit une
part du capital, sous forme de parts sociales ou d’actions par exemple, qui ne peut en
principe faire l’objet ni d’une opposition de la part de ses créanciers comme s’il
s’agissait du prix payé en espèce, ni d’une procédure de surenchère du sixième.
En prenant en considération cette situation, le législateur a institué une
procédure spéciale en vue d’assurer la protection des intérêts des créanciers de
l’apporteur appelée « procédure de déclaration de créances ».
En effet, dans les 15 jours après la deuxième publication, ces créanciers doivent
faire une déclaration au secrétariat-greffe du tribunal qui a reçu l’acte pour faire

67
- En réalité, cette procédure a pour objectif de lutter contre les pratiques de dissimulation du prix réel de la
vente.

69
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

connaître les sommes qui leur sont dues et un récépissé de la déclaration leur sera
délivré par le greffier.
Cette déclaration a pour objectif de porter à la connaissance des coassociés de
l’apporteur le passif qui grève le fonds objet de l’apport.

B - LA PROTECTION DES DROITS DES CREANCIERS :


Dans les 30 jours qui suivent la seconde insertion (ce qui laisse un délai effectif
de 15 jours après le délai de 15 jours fixé pour les déclarations des créanciers), l’art.
105 prévoit deux hypothèses :
* ou bien les coassociés ou l’un d’entre eux forme une demande au tribunal :
- soit en annulation de la société : dans ce cas, il faut entendre que la société
est dans le stade de sa constitution, auquel cas elle ne peut être valablement
constituée faute d’apport et le juge doit en prononcer l’annulation ;
- soit en annulation de l’apport : dans ce cas, la société est supposée déjà
constituée et continuera d’exister en dépit de l’annulation de l’apport par le juge.
* ou bien, à défaut de cette demande en annulation, ou alors tout en étant faite,
l’annulation n’a pas été prononcée par le juge, « la société est tenue solidairement
avec le débiteur principal au paiement du passif déclaré et dûment justifié ».
Autrement dit :
- soit que le tribunal, pour une raison ou pour une autre, ne prononce pas
l’annulation de la société ou de l’apport demandée par les associés ;
- soit que ces derniers n’aient pas formé cette demande, auquel cas ils sont
censés avoir accepté l’apport du fonds avec son passif ;
Dans les deux cas le FC est intégré dans le capital social avec ses dettes, à
condition qu’elles soient déclarées et dûment justifées, mais l’apporteur du fonds reste
le débiteur principal et la société ne sera considérée que comme une caution solidaire
au paiement de ces dettes.
§ III - LE NANTISSEMENT DU FC
Le code de commerce réglemente le nantissement du FC sans déposséder le
commerçant qui continue de l’exploiter.
A - LES CONDITIONS
Tous les éléments du FC énumérés à l’art. 80 sont susceptibles d’être compris
dans le nantissement à l’exclusion des marchandises, le législateur entend garder cet
élément du fonds aux créanciers ordinaires.

70
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

B – LES FORMALITES
Exactement comme pour l’acte de vente, le nantissement du FC doit être dressé
par un acte authentique ou sous seing privé et déposé au tribunal dans lequel le fonds
est inscrit dans les 15 jours de sa date.
Ce dépôt sera suivi de l’inscription d’un extrait de l’acte au RC.
Cette inscription du nantissement au RC doit, à peine de nullité, être prise à la
diligence du créancier gagiste dans les 15 jours de l’acte constitutif, autrement dit, à
défaut de cette inscription, le nantissement sera purement et simplement inopposable
aux autres créanciers du propriétaire du FC. Cette inscription conserve le privilège
pendant 5 ans et doit être renouvelée à l’expiration de ce délai, sinon son effet prend
fin et il est procédé à sa radiation d’office par le greffier (Art. 137).
§ IV - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DU FC
En dehors de l’action résolutoire qui est propre au vendeur du FC, le législateur
a institué des règles communes à la vente et au nantissement qui ont pour effet de
protéger les droits du vendeur et du créancier nanti ; il s’agit en l’occurrence du droit
de suite et du droit de préférence.
A - LE DROIT DE SUITE
En vertu du premier alinéa de l’art. 122 c.com. « les privilèges du vendeur et du
créancier gagiste suivent le fonds en quelques mains qu’il passe ».
Il s’agit donc de ce droit qui permet aux créanciers privilégiés inscrits et non
payés de saisir le FC entre les mains de n’importe quelle personne et à quelque titre
que ce soit, qu’il s’agisse du propriétaire ou d’un nouvel acquéreur en vue de le faire
vendre aux enchères publiques.
B - LE DROIT DE PREFERENCE
Ce droit permet aux créanciers privilégiés, suite à la vente du FC aux enchères
publiques, de se faire payer sur le prix de la vente par priorité sur les autres créanciers.
§ V - LA GERANCE LIBRE
La gérance libre (ou gérance location) permet au propriétaire de donner la
gérance du fonds à une personne en vertu d’un contrat de location moyennant un
loyer. Dans ce cas, le gérant locataire bénéficie de la qualité de commerçant et assume
seul les risques de l’exploitation.
Ayant la qualité de commerçant, le gérant libre doit se faire immatriculer au RC.
Mais la publicité dont il est question ici a pour objectif de faire connaître aux tiers que
la propriété du fonds n’appartient pas au gérant.

71
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

Pour ce faire, un extrait du contrat de gérance libre doit être publié dans les 15
jours de sa date au BO et dans un journal d’annonces légales, ensuite procéder aux
formalités relatives au RC. Il reste qu’il est dans l’intérêt du bailleur du fonds d’effectuer
ces publicités dans la mesure où il demeure responsable solidairement avec le gérant
des dettes contractées par ce dernier à l’occasion de l’exploitation du fonds (art. 155).

Section 3 - LA NATURE JURIDIQUE DU F.C.


Le mérite de doter le F.C. d’un statut juridique revient au nouveau code de
commerce qui a mis fin aux discussions doctrinales.
§1 - LES THESES DOCTRINALES
En effet, la doctrine est partagée à propos de la nature juridique du F.C. entre
deux principales thèses, celle de l’universalité juridique et celle de l’universalité de fait.
A - LA THESE DE L’UNIVERSALITE JURIDIQUE

Les partisans de cette thèse, qui sont pour la plupart des commercialistes
allemands, ont pour fondement l’union de l’ensemble des éléments du F.C, celui-ci est
une universalité juridique.
Ces éléments forment un patrimoine à part, avec un actif et un passif dit
patrimoine d’affectation : le F.C. Celui-ci constitue une universalité juridique (un
groupement), une unité juridique indépendante (par rapport au patrimoine personnel
du commerçant), avec ses propres créances et dettes.
Cette théorie, qui est en harmonie avec le système allemand, reste incompatible
avec notre droit positif qui consacre plutôt le principe de l’unité du patrimoine (ou
indivisibilité du patrimoine). Suivant notre principe la responsabilité du commerçant
n’est pas limitée au seul F.C., elle s'étend à la totalité de ses biens.
B - LA THESE DE L’UNIVERSALITE DE FAIT

Les partisans de cette thèse avancent que le F.C. ne constitue pas une
universalité juridique, mais seulement une universalité de fait (un groupement de fait),
c’est-à-dire que cette union des éléments du F.C. n’est qu’une union de fait ayant pour
but commun l’exploitation d’un commerce. Ce qui a pour conséquence que chaque
élément conserve sa propre caractéristique et peut être cédé indépendamment des
autres.
§2 - LA POSITION DU NOUVEAU CODE DE COMMERCE
L’art. 79 du code de 1996 a finalement adopté une position conforme à nos
principes juridiques : le F.C. est désormais légalement défini comme étant « un bien

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

meuble incorporel constitué par un ensemble de biens mobiliers affectés à l’exercice


d’une ou de plusieurs activités commerciales ».
A - LE F.C. EST UN BIEN MEUBLE

En effet, le F.C. ne peut être considéré comme un bien immeuble ; constitué de


biens de nature mobilière, le F.C. ne peut être qu’un bien meuble. L’intérêt en est que,
du point de vue juridique, le F.C. se distingue des règles qui régissent les immeubles ;
par exemple, en tant que meuble, le F.C. ne peut faire l’objet d’une hypothèque mais
d’un nantissement.
B - LE F.C. EST UN BIEN MEUBLE INCORPOREL

C’est ce qui se dégage de la composition même du F.C. ; ce dernier est en effet


principalement composé d’éléments incorporels, qui sont les plus importants dans un
F.C. et notamment la clientèle68.
Du fait que le F.C. soit considéré un meuble incorporel, il résulte que la règle
« en fait de meuble la possession vaut titre » ne lui est pas applicable, car cette règle
ne s’applique qu’aux meubles de nature corporelle. Par conséquent, en cas de litige
entre deux acquéreurs successifs d’un F.C., la préférence est donnée à celui dont le
contrat d’acquisition est le premier en date et non à celui qui a été mis en possession
du F.C. le premier.
Ajoutons que le F.C. est de nature commerciale. L’intérêt de cette précision
réside dans la distinction avec les activités non commerciales qui ont aussi une
clientèle69. Car, effectivement, on ne peut parler d’un F.C. que si la profession exercée
est commerciale.

- Nous avons pu constater qu’un FC peut se passer de ses éléments corporels.


68

- CHANIOT WALINE (M.), La transmission des clientèles civiles, Paris, LGDJ, 1994.
69

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

BIBLIOGRAPHIE
I – THEORIE GENERALE DE DROIT COMMERCIAL
A – DROIT MAROCAIN
- CHOUKRI SOUBAI (A), Traité de droit commercial marocain et comparé, Rabat,
Imprimerie Al Maarif Al Jadida, (en arabe) :
* T I, Théorie générale de l'évolution du commerce et du droit commercial et les
actes de commerce par nature, 4ème éd., 1994,
* T III, Les entreprises commerciales, les actes de commerce maritimes, les
actes de commerce par accessoire, les actes mixtes, le commerçant individuel ses
obligations et ses droits, 1993,
- DECROUX (P), Les sociétés en droit marocain, Rabat, Éditions LA PORTE, 3ème éd.,
1987.
- DRISSI ALAMI MACHICHI (M), Droit commercial fondamental au Maroc, Imprimerie
de fedala, Rabat, 2006.
- MARTIN (D), Droit civil et commercial marocain, Casablanca, Al Madariss, 3 ème éd.
1985.
- MOTIK (M), Droit commercial marocain, Rabat, Imp. AL MAARIF AL JADIDA, 2001.
- ZEROUAL (A.), Droit commercial, Cour policop. 3ème année de licence droit public,
Faculté de droit, Rabat, sans date.
B – DROIT FRANCAIS
- BALLOT-LENA (A) et DECOCQ (G), Actes de commerce, commerçants, fonds de
commerce, baux commerciaux, concurrence, consommation, contrats commerciaux,
8e édition, Paris, Dalloz, 2017
- GROSSI (I) , MERLAND (L), MESTRE (J), et autres, Droit commercial, Contrats,
sûretés et moyens de paiement, Fonds de commerce et droits intellectuels, Commerce
international, Prévention et traitement des difficultés, Tome 2, Paris LGDJ, 30e édition,
2018.
- GUYON (Y), Droit des affaires, T 1, Droit commercial général et sociétés, 6 ème éd.,
Economica, 1990.
- HAMEL (J), LAGARDE (G), et JAUFFRET (A), Droit commercial, 2 ème éd., T I, Volume
I, Paris, Dalloz, 1980.

74
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- de JUGLART (M) et IPPOLITO (B), Cours de droit commercial, Volume I, 9 ème éd.,
Montchrestien, 1988.
- LUCAS (F-X), PORACCHIA (D), Manuel de droit commercial, Paris, Presses
Universitaires de France - P.U.F., 2018
- LUCAS (F.X), Droit commercial : actes de commerce, commerçant, fonds de
commerce, Paris, Montchrestien, 1998, Coll. Focus droit.
- MERCADAL (B) et MACQUERON (P), Le droit des affaires en France – Principes et
approche pratique du droit des affaires et des activités économiques, à jour au 1er août
1995, Paris, Ed. Francis LEFEBRE, 1995.
- PEDAMON (M), Droit commercial. Commerçants et fonds de commerce.
Concurrence et contrats du commerce, Paris, Dalloz, 1994.
- PIEDELIEVRE (A), PIEDELIEVRE (S), Actes de commerce, commerçants, fonds de
commerce, 2ème éd. Paris Dalloz, 1999.
- RIPERT (G) et ROBLOT (R), Traité élémentaire de droit commercial, TI, 12 ème éd.,
Paris, LGDJ, 1986.
- RIPERT (G) et ROBLOT (R), Traité élémentaire de droit commercial, TII, 14 ème éd.,
Paris, LGDJ, 1994.

II - LE FONDS DE COMMERCE
A – DROIT MAROCAIN
- TIJANI (A), La gérance libre du fonds de commerce, in travaux de la journée
d'études du 24 mai 1997 : Les innovations du code de commerce et leur impact sur
l'entreprise marocaine, Publications de la Faculté des Sciences Juridiques
Économiques et Sociales de Rabat - Souissi, Série Colloques n° 2, p. 15.
- BENSETTI (A), La publicité dans le code de commerce (fonds de commerce
et autres), in travaux de la journée d'études du 24 mai 1997 : Les innovations du code
de commerce et leur impact sur l'entreprise marocaine, Publications de la Faculté des
Sciences Juridiques Économiques et Sociales de Rabat - Souissi, Série Colloques n°
2, p.15, (en arabe).
- DOUMOU (Omar), Le nantissement du fonds de commerce, mémoire de DES,
Faculté de droit, Rabat, 1980.

75
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

- MCHKAKA (R), Lecture à travers le code de commerce (3/ observations sur


le fonds de commerce), in travaux de la journée d'études du 24 mai 1997: Les
innovations du code de commerce et leur impact sur l'entreprise marocaine,
Publications de la Faculté des Sciences Juridiques Économiques et Sociales de Rabat
- Souissi, Série Colloques n° 2, p. 104, (en arabe).
ERRHAIMINI (MA), Le fonds de commerce : textes, jurisprudence et doctrine
(France et Maroc), Mémoire de licence, Fac droit Rabat, 1999.
B – DROIT FRANCAIS
- BALLOT-LENA (A) et DECOCQ (G), Actes de commerce, commerçants, fonds
de commerce, baux commerciaux, concurrence, consommation, contrats
commerciaux, 8e édition, Paris, Dalloz, 2017
- BARRET (O.), Les contrats portant sur le fonds de commerce, Paris, LGDJ,
2001.
- DELLATOLAS (J), Pratique des actes de vente de fonds de commerce, Paris,
Sirey, 1990.
- DERRUPPE (J), Le fonds de commerce, Paris, Dalloz, 1994, Coll.
Connaissance du droit.
- GROSSI (I) , MERLAND (L), MESTRE (J), et autres, Droit commercial,
Contrats, sûretés et moyens de paiement, Fonds de commerce et droits intellectuels,
Commerce international, Prévention et traitement des difficultés, Tome 2, Paris LGDJ,
30e édition, 2018.

76
Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ............................................................................................................. 2
I - DEFINITION ET PARTICULARITES DU DROIT COMMERCIAL ............................................ 2
A - LE FORMALISME DU DROIT COMMERCIAL ............................................................................. 2
B - LA SOUPLESSE DU DROIT COMMERCIAL ................................................................................. 3
II - LES SOURCES DU DROIT COMMERCIAL ............................................................................... 3
A- LES SOURCES ECRITES ............................................................................................ 3
a - Les sources nationales .......................................................................................................................... 4
1/ Le code de commerce et la refonte du droit des affaires ................................................................. 4
2/ Le D.O.C. : ...................................................................................................................................... 5
b - Les sources internationales................................................................................................................... 5
B- LES SOURCES NON ECRITES ................................................................................... 6
a - Les usages commerciaux ...................................................................................................................... 6
b - La jurisprudence ................................................................................................................................... 6
c – La doctrine ........................................................................................................................................... 7
III– LES JURIDICTIONS DE COMMERCE....................................................................................... 7
A – LES TRIBUNAUX DE COMMERCE ........................................................................ 7
a – Composition ......................................................................................................................................... 7
b – Compétence ......................................................................................................................................... 7
B – Les cours d’appel de commerce ................................................................................ 8
a – Composition ......................................................................................................................................... 8
b – Compétence ......................................................................................................................................... 8
IV – LA MATIERE DU DROIT COMMERCIAL ............................................................................... 8

CHAPITRE 1 - L’OBJET DU DROIT COMMERCIAL .................................................................. 10

SECTION I - LES ACTIVITES COMMERCIALES ............................................................................ 11


§ 1 - LES ACTIVITES DE PRODUCTION ..................................................................... 14
§ 2 – LES ACTIVITES DE DISTRIBUTION ................................................................... 14
A - L’ACHAT POUR REVENDRE........................................................................................................ 15
1 - L’achat : ....................................................................................................................................... 15
2 - L’objet .......................................................................................................................................... 15
2-1 - Les meubles ............................................................................................................................................15
2-2 - Les immeubles ........................................................................................................................................15
3 - L’intention de revendre en l’état ou après transformation ........................................................... 16
3-1 - L’intention de revendre...........................................................................................................................16
3-2 - La revente en l’état ou après transformation ..........................................................................................16
B - LA FOURNITURE............................................................................................................................ 17
§ 3 - LES ACTIVITES DE SERVICES ............................................................................ 17
A - LES SERVICES DE L’INTERMEDIATION................................................................................... 17
a - Le courtage ................................................................................................................................... 17
b - La commission ............................................................................................................................. 18

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

c - Les bureaux et agences d’affaires : .............................................................................................. 18


B - LES SERVICES FINANCIERS ........................................................................................................ 19
a - La banque ..................................................................................................................................... 20
b - Le crédit ....................................................................................................................................... 20
c - Les transactions financières.......................................................................................................... 21
d - L’assurance .................................................................................................................................. 21
C - LES AUTRES SERVICES ................................................................................................................ 25
1 – L'activité industrielle .................................................................................................................................25
2 - La location de meubles...............................................................................................................................26
3 - L’exploitation de locaux à usage public.....................................................................................................26
4 - Le transport ................................................................................................................................................27
5 – La domiciliation.........................................................................................................................................27
SECTION II - LES ACTES DE COMMERCE ..................................................................................... 28
§ I - LES ACTES DE COMMERCE PAR LA FORME ................................................... 28
A - LA LETTRE DE CHANGE : ............................................................................................................ 28
B - LES SOCIETES COMMERCIALES ................................................................................................ 29
§ II - LES ACTES DE COMMERCE PAR ACCESSOIRE .............................................. 29
§ III - LES ACTES MIXTES ........................................................................................... 30

1 - LA COMPETENCE JUDICIAIRE ................................................................................................ 30

2 - LA PREUVE ..................................................................................................................................... 30

3 - LA PRESCRIPTION........................................................................................................................ 31

CHAPITRE II - LE SUJET DU DROIT COMMERCIAL ............................................................... 31

SECTION I - DEFINITION DU COMMERÇANT .............................................................................. 31


§ I - L’EXERCICE HABITUEL OU PROFESSIONNEL DES ACTIVITÉS COMMERCIALES ... 32
§ II - L’EXERCICE POUR SON PROPRE COMPTE .................................................... 32
A – LA RÈGLE ....................................................................................................................................... 32
B - LES EXCEPTIONS ........................................................................................................................... 33
a - Les commissionnaires .................................................................................................................. 33
b - Les prête-noms ............................................................................................................................. 33
SECTION II - LA CONDITION JURIDIQUE DU COMMERCANT .................................................. 33
§ I - LA CAPACITE COMMERCIALE ........................................................................... 33
§ II - LES RESTRICTIONS A LA LIBERTE DU COMMERCE...................................... 37
A - Les restrictions concernant les personnes ................................................................ 37
a – Les incompatibilités ..................................................................................................................... 37
b – Les déchéances ............................................................................................................................ 38
B – Les restrictions concernant les activités................................................................... 38
a – Les interdictions........................................................................................................................... 38
b – Les autorisations .......................................................................................................................... 38
SECTION III - LES OBLIGATIONS DU COMMERCANT................................................................ 39
§1 – LES OBLIGATIONS NOUVELLES ........................................................................ 39
§2 – LA PUBLICITE AU REGISTRE DE COMMERCE ................................................ 40

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

A - LE FONCTIONNEMENT DU R.C. ................................................................................................. 41


a - L’organisation du R.C. ................................................................................................................. 41
b - Les personnes assujetties.............................................................................................................. 41
c - Les inscriptions au R.C. ............................................................................................................... 41
1 - Les immatriculations ..................................................................................................................................41
2 - Les inscriptions modificatives....................................................................................................................43
3 - Les radiations .............................................................................................................................................43
B - CRÉATION EN LIGNE DE L’ENTREPRISE ................................................................................ 43
C - LES EFFETS DE L’IMMATRICULATION .................................................................................... 44
a - Les effets à l'égard des personnes physiques................................................................................ 44
1 - La présomption de commercialité ..............................................................................................................45
2 - Les effets du défaut d’immatriculation ......................................................................................................45
b - Les effets à l’égard des personnes morales .................................................................................. 46
§ 3 - LA TENUE D’UNE COMPTABILITE .................................................................... 46
A - LES LIVRES ET DOCUMENTS COMPTABLES .......................................................................... 46
B - LES REGLES RELATIVES À LA TENUE DE LA COMPTABILITE ET LEURS SANCTIONS 47
a - Les règles ...................................................................................................................................... 47
b - Les sanctions ................................................................................................................................ 51
1 - Les sanctions fiscales .................................................................................................................................51
2 - Les sanctions pénales .................................................................................................................................53
C - LA PREUVE PAR LES DOCUMENTS COMPTABLES ............................................................... 53
a - La force probante des documents comptables .............................................................................. 54
1 - Les documents comptables sont invoqués comme preuve contre le commerçant qui les tient .................54
2 - Les documents comptables invoqués comme preuve par le commerçant qui les tient ..............................54
b - Les modes de production en justice ............................................................................................. 56
1 - La communication ......................................................................................................................................56
2 - La représentation ........................................................................................................................................56
SECTION IV – L'AUTO-ENTREPRENEUR ............................................................................................... 57
SECTION V – LE REGIME JURIDIQUE DU DOMAINE COMMERCIAL ...................................... 59
§ I - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FOND ............................................... 60
1°/ La solidarité ...............................................................................................................................................60
2°/ Le mandat ..................................................................................................................................................60
3°/ La stipulation d’intérêts .............................................................................................................................60
4°/ La capitalisation des intérêts (ou l’anatocisme)........................................................................................61
§ II - LES PARTICULARITES DES REGLES DE FORME ............................................ 61
1°/ Le redressement et la liquidation judiciaires .............................................................................................61
2°/ La compétence judiciaire : .........................................................................................................................62
3°/ La preuve : .................................................................................................................................................62
4°/ La prescription : .........................................................................................................................................63

CHAPITRE 3 - LE FONDS DE COMMERCE .................................................................................. 63

SECTION 1 - LES ELEMENTS DU F.C. ............................................................................................. 63


§ I - LES ELEMENTS CORPORELS .............................................................................. 64
§ II - LES ELEMENTS INCORPORELS ......................................................................... 64

1 - LA CLIENTELE : . .......................................................................................................................... 64

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Droit commercial – S2 – Droit Professeur Chakib EL OUFIR

6 - LES DROITS DE PROPRIETE INDUSTRIELLE : .................................................................... 66

SECTION 2 - LES CONTRATS PORTANT SUR LE FONDS DE COMMERCE .............................. 66


§ I - LA VENTE DU FONDS DE COMMERCE ............................................................. 66
A - LES CONDITIONS DE LA VENTE ................................................................................................ 66
B - LES EFFETS DE LA VENTE .......................................................................................................... 66
a - Les règles protectrices des droits de l’acquéreur.......................................................................... 67
b - Les règles protectrices des droits du vendeur .............................................................................. 67
1 - Le privilège du vendeur .............................................................................................................................67
2 - L’action résolutoire ....................................................................................................................................67
c - Les règles protectrices des droits des créanciers du vendeur ....................................................... 67
1 - La publicité.................................................................................................................................................68
2 - L’opposition ...............................................................................................................................................68
3 - La surenchère .............................................................................................................................................69
§ II - L’APPORT DU FC EN SOCIETE : ....................................................................... 69
A - LA PROCEDURE DE DECLARATION DE CREANCES : ........................................................... 69
B - LA PROTECTION DES DROITS DES CREANCIERS :................................................................ 70
§ III - LE NANTISSEMENT DU FC ............................................................................... 70
A - LES CONDITIONS........................................................................................................................... 70
B – LES FORMALITES ......................................................................................................................... 71
§ IV - LES REGLES COMMUNES A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DU FC .... 71
A - Le droit de suite ................................................................................................................................. 71
B - Le droit de préférence ........................................................................................................................ 71
§ V - LA GERANCE LIBRE ............................................................................................ 71
SECTION 3 - LA NATURE JURIDIQUE DU F.C. ............................................................................. 72
§1 - LES THESES DOCTRINALES ................................................................................ 72
a - La thèse de l’universalité juridique .................................................................................................... 72
b - La thèse de l’universalité de fait......................................................................................................... 72
§2 - LA POSITION DU NOUVEAU CODE DE COMMERCE ...................................... 72
a - Le F.C. est un bien meuble ................................................................................................................. 73
b - Le F.C. est un bien meuble incorporel ............................................................................................... 73
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................... 74

‫وهللا ولي التوفيق‬

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