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UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 1)

- Où vas-tu encore ce soir, Raissa ?


- Mais quelle est cette question que tu me poses, Stanley ? Je suis de garde ce soir et tu le sais.
- Je t’ai pourtant dit de négocier avec ton patron pour ne travailler uniquement qu’en journée ;
- Il m’a dit que c’est impossible. Je suis Sage-femme et l’accouchement peut survenir à tout
moment; jamais mes collègues n’accepteront qu’il me fasse cette faveur. Tout le monde déteste le
travail de nuit; alors nous sommes obligées de faire avec.
Stanley, mon mari, ne me répond plus; il se dirige vers la cuisine et prend un verre d’eau qu’il
avale sans mot dire.
Je prends mon sac, donne des instructions à ma femme de ménage qui m’aide en même temps à
m’occuper des enfants; j’en ai trois, toutes des filles.
Lorsque je serai de retour demain, elles seront déjà parties à l’école; même Stanley aussi serait
déjà au boulot; je ne les verrai que le soir et le lendemain, jour de repos que je prends lorsque j’ai
été de garde la veille.
Le métier de Sage-femme m’a toujours passionné ; je trouve noble le fait d’aider à donner la vie.
La profession de sage-femme est une profession médicale spécifique réglementée par le code de la
santé publique.
En tant que sage-femme, je suis une spécialiste des grossesses normales.
Je suis les femmes enceintes dont j’ai la charge, du diagnostic de la grossesse, jusqu'au jour de
l'accouchement.
Au fil des mois, j’anime des séances de préparation à la naissance, je prescris et effectue tous les
examens nécessaires.
Responsable du déroulement de l’accouchement, je pose le diagnostic du début du travail, dont je
suis l’évolution.
J’assure seule la plupart des accouchements. Si des complications surviennent, j’agis très vite
pour faire appel au gynécologue-obstétricien ou au chirurgien.
Après l’accouchement, je m’occupe du nouveau-né, vérifie qu’il est en bonne santé et j’accomplis
les gestes de réanimation si nécessaire.
Je surveille aussi le rétablissement de la mère, puis je la conseille sur l’allaitement et l’hygiène du
bébé. Parfois, j’assure également le suivi gynécologique (prescription de contraceptif, pose de
stérilet et implant...).
Mon rôle de Sage-femme ne se limite donc pas à la grossesse puisque je dispose aussi des
compétences nécessaires pour assurer au quotidien le suivi gynécologique des femmes
(contraception, diagnostic de grossesse, rééducation périnéale)...
Ma profession implique de lourdes responsabilités et des conditions de travail souvent difficiles:
horaires irréguliers, gardes de nuit, stress, pour ne citer que celles-là. Une grande résistance à la
fatigue physique est donc nécessaire car je me dépense beaucoup.
A cause de mes gardes nocturnes, je ne passe pas toujours les nuits auprès de Stanley. Je sais qu’il
aurait voulu le contraire mais je n’ai pas d’autre choix pour le moment ; dans tous les cas, il se
montre compréhensif jusque-là ; il fait d’ailleurs partie de ceux qui m’ont encouragé à embrasser
ce métier car j’adore les enfants.
C’est toujours un bonheur pour moi d’aider un bébé à voir le monde pour la première fois.
Personnellement, j’ai toujours voulu expérimenter ce mode d’accouchement naturel pour mesurer
l’ampleur des sensations qu’une femme pouvait ressentir !
Mais hélas ! Comme à chaque fois, la taille du bébé est trop élevée par rapport à la taille de mon
bassin, j’ai toujours accouché mes filles par césarienne.
La césarienne est une pratique chirurgicale pour sortir le bébé du ventre de la maman lorsque c’est
dangereux ou impossible par voies basses.
L’avantage de la césarienne est que la mère sera en très bonne forme pour l’arrivée du bébé, car
elle aura fait moins d’efforts qu’au cours d’un accouchement par voies basses. Comme la
cicatrisation dure de six mois à un an, j’observais toujours deux ans avant d’avoir un autre enfant.
Cette vie se révèle être mon quotidien: boulot et famille sont mes principales occupations.
J’avais peu de temps pour la distraction ; il m’arrive de bavarder avec mes collègues quand je
travaille en journée; mais la nuit, je suis en général seule avec le Gynécologue de garde dans la
section maternité. S’il n’y avait aucune femme à surveiller, j’en profitais pour dormir mais c’est
vraiment rare; il y a toujours un bébé qui choisit la nuit pour se montrer.
Stanley, quant à lui est Ingénieur Agronome. Les compétences de l'ingénieur agronome sont
variées. L'une des qualités principales de l'ingénieur agronome est sa polyvalence. Cette fonction
exige ainsi qu'il soit un scientifique spécialisé.
Fort de cette formation multiple et polyvalente, il s'agit pour l'ingénieur agronome de travailler au
service d'une optimisation de l'usage des systèmes de production agricole. Seulement dans nos
pays, les Ingénieurs restent au bureau pendant que l’agriculture souffre de manque de moyens de
production et que la population a faim.
Stanley non plus n’a pas vraiment de distraction; la plupart de ses amis ont quitté le pays, ce qui
fait que généralement, il rentre tôt et est à la maison peu de temps après sa sortie du bureau.
Mes filles vouent un attachement sans bornes à leur père ; cela ne m’étonne pas car Stanley est un
bon père ; il est présent pour ses enfants. Il les aime et le leur fait ressentir.
Dans ses dépenses, il donne la priorité à leurs besoins. Mais il sait se montrer ferme quand c’est
nécessaire.
Être un bon père, ça commence par le fait d'être disponible pour ses enfants pour pouvoir les
aimer, éduquer et communiquer avec eux car la majorité des parents sont pris par le quotidien à
savoir le stress du travail. Il ne faut pas que nos enfants puissent nous dire plus tard "vous n'étiez
pas là pour nous".
Pour tout résumer, ma vie est paisible et l’ambiance est bonne à la maison. Il ne pouvait en être
autrement car je n’ai pas choisi Stanley au hasard.
Je l’ai rencontré alors que je finissais ma première journée de l’examen du baccalauréat ; il était
alors venu chercher son petit frère qui passait aussi le même examen; nos regards se sont croisés
et cela a été le début de l’histoire; six ans après, l’amour était toujours au rendez-vous et je suis
devenue sa femme.
Depuis lors, nous menons une vie de couple tranquille sans incidents majeurs. De petites disputes
viennent casser la monotonie de temps en temps; mais rien de bien grave. Tous les couples se
disputent.
Un matin, après que mes deux premières filles soient parties à l’école ( la dernière ayant à peine
deux ans), je me couche pour rattraper le sommeil ; comme d’habitude, après une nuit de garde, je
dors en journée jusqu’à une certaine heure ; à peine, me suis-je couchée ce jour-là que ma
collègue Anne-Marie me téléphone :
- Allô
- Salut Raissa.
- Anne-Marie, j’allais juste dormir ; parle vite pour que le sommeil ne parte pas ;
- Raissa, il faut que tu me sauves ;
- Comment cela ? Qu’est-ce qui se passe ?
- Je suis de garde ce soir mais je ne peux pas ; j’ai un imprévu et je dois effectuer un voyage tout
de suite ; le directeur de l’hôpital ne me comprendrait pas, parce que la semaine dernière, j’avais
déjà sollicité une permission.
- Que veux-tu exactement ?
- Pour l’amour du ciel Raissa, remplace-moi ;
- Non Anne-Marie, je suis trop fatiguée ; j’ai fait quatre accouchements durant la nuit ;
- Je t’en prie Raissa, tu es mon dernier espoir ; je te le revaudrai ; s’il te plaît.
Je fais la moue; en effet, je n’étais vraiment pas au meilleur de ma forme; je me sens incapable de
travailler encore cette nuit.
- Allô, Allô, Raissa, tu es là ?
- Oui, Anne-Marie, je ne peux vraiment pas te……
Je n’ai même pas fini de parler quand j’entends Victor, son mari s’adresser à moi.
- Ecoute Raissa, Anne-Marie a vraiment besoin de toi; allons, je t’en prie, aide-nous. Elle
t’expliquera plus tard.
Je me dis qu’alors si Victor intervient, c’est que c’est vraiment important pour eux. Je connais
Victor parce qu’il vient souvent déposer au travail Anne-Marie qui ne sait pas conduire ; elle ne
veut d’ailleurs faire aucun effort.
Victor et moi nous limitons juste à des salutations cordiales, il ne m’a jamais rien demandé. Alors,
je fus obligée d’accepter.
- D’accord, Victor, mais j’accepte parce que c’est toi qui me le demandes.
- Merci Raissa, c’est très important pour nous.
- Je t’en prie, Victor.
Cette conversation téléphonique a effectivement fait disparaître l’envie de dormir ; il faut pourtant
que je dorme ; surtout que ce soir, je dois retourner à l’hôpital.
Lorsque l’on dort, notre corps se régénère et se répare, nos apprentissages se consolident et un
grand ménage se fait dans nos émotions.
Bien dormir est donc une des habitudes de vie déterminantes pour maintenir une bonne santé
physique et mentale.
Je m’allonge et j’essaie de dormir mais je n’y arrive toujours pas; pour trouver le sommeil
rapidement, je place un écouteur à mon téléphone et j’écoute une musique douce et apaisante
plutôt que de prendre des somnifères qui augmentent le risque de mort prématurée.
Je me réveille en forme et totalement reposée. J’écoutais les enfants me raconter leur journée à
l’école quand Stanley rentre ; alors elles recommencent tout le récit pour que leur père entende
aussi.
Après un moment de bavardage avec les filles, je me lève pour me préparer pour ma garde ; je
donne des instructions à la femme de ménage et je me dirige vers ma chambre ; je prends un bain
et je m’habillais quand Stanley rentre dans la chambre.
- Où vas-tu ?
- A l’hôpital ;
- Mais comment ça ! Tu étais de garde hier et tu es censée te reposer aujourd’hui, n’est-ce pas ?
- Ma collègue Anne-Marie m’a demandé de la remplacer ; elle avait un imprévu.
- Et naturellement, sans me consulter, tu as accepté ;
- Non, j’ai voulu refuser mais son mari me l’a demandé personnellement.
- Très bien.
Stanley était visiblement fâché ; effectivement, j’aurais dû lui en parler juste après ; comme c’est
moi la fautive, j’entreprends de détendre l’atmosphère ; il ne fallait pas laisser durer cette colère ;
alors, je lui adresse la parole.
- Ne te fâche pas mon chéri, je n’ai vraiment pas eu le choix ; et puis entre collègues, il faut
s’entraider ; je pourrai aussi avoir besoin d’elle un jour ;
Il ne répond pas ; il s’est juste allongé sur le lit et a tourné son regard vers le mur.
En bonne conquérante, voulant le décolérer, je m’assois sur le lit et je commence à lui caresser le
dos. Ces câlins semblent le pénétrer et peu de temps après, nous nous retrouvons à faire une partie
de « ça va, ça vient ».
Oh Stanley ! Un vrai étalon ! Je le sens jusque dans mes os.
Je savourais encore ce moment de délices quand j’entends toquer à la porte de notre chambre à
coucher.
Certainement l’une de mes filles.
Heureusement que la porte était fermée ! Quand ces enfants ne dorment pas, on ne peut pas être
tranquille. Je lui demande de revenir ; je saute du lit et reprends un bain.
- A demain chéri.
Stanley me répond par un large sourire, signe qu’il n’est plus fâché. Ce beau moment d’amour a
baissé l’adrénaline qui montait en lui.
Moi-même, j’étais heureuse que la tension soit dissipée. Je prends ma voiture, direction hôpital.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 2)
Stanley me répond par un large sourire, signe qu’il n’est plus fâché. Ce beau moment d’amour a
baissé l’adrénaline qui montait en lui. Moi-même, j’étais heureuse que la tension soit dissipée.
Je prends ma voiture, direction hôpital. Je reste de bonne humeur durant le trajet; évidemment,
c’est ainsi !
Les femmes sont toujours heureuses après une bonne séance de câlins. Faire l’amour est bon pour
le moral et préserve du stress; mais il ne faut pas oublier que ce bonheur n’est permis que dans le
cadre du mariage. Autrement, c’est la fornication.
J’arrive à l’hôpital et ma collègue Juliette qui devait me passer le témoin s’impatientait. Elle avait
déjà été avertie par Anne-Marie que c’est moi qui devrais assurer la garde ce soir.
- Dis donc Raissa, tu en as mis du temps ;
- Je suis désolée Juliette, je suis là maintenant.
- Ok, voici la situation: il y a une dame en travail, elle va accoucher si tout va bien dans deux
heures. Elle s’appelle Mairi. Il y a une autre qui a un début de travail, son prénom est Béatrice. Je
l’ai mis sous perfusion pour accélérer le travail.
- Très bien ;
- Ok, Raissa, bonne garde et à tantôt.
Je rentre dans la grande salle où nous avons l’habitude d’installer les femmes en travail ; je fais un
examen rapide à Mairi qui est proche d’accoucher, puis à Béatrice, en début de travail.
Mairi dont le travail est déjà avancé, pousse de grands cris à chaque contraction: « ooooh ! ma
maman ééééééé ! qui m’a même envoyé ? Abdoulaye ééééé ! où es-tu ? Ce que nous avons fait
ensemble me fait mal ooooh ! Abdoul ééééé ! Abdoul ééééé !»
En même temps que ces soupirs me font rire, je la comprends ; l’étape du travail dans un
accouchement fait vraiment mal; les contractions sont douloureuses au fur et à mesure que le col
de l’utérus s’ouvre. Je l’examine encore et je constate qu’elle a froid aux mains et aux pieds. Elle
se plaint aussi de nausées et de bouffées de chaleur.
J’ai envie de l’aider à surmonter la douleur mais la technique de péridurale n’est pas encore
offerte chez nous ; d’ailleurs, personnellement, je trouve que la femme devrait faire un effort.
Dieu n’a-t-il pas dit que nous enfanterons dans la douleur ?
Pendant que ma patiente souffre et appelle sa maman et Abdoulaye, ma deuxième future maman
rit puis s’énerve.
Au fur et à mesure que sa voisine de salle pousse des cris, elle devient irritée et réagit vivement:
- Mais, madame, contrôlez-vous; n’est-ce pas la même chose que je ressens ? Pourtant je
supporte;
Sa remarque me fait sourire; elle n’a rien compris ; elle est encore au début; quand elle sera à la
même étape, je verrai si elle pourra encore me montrer ses dents.
Néanmoins, je lui réponds:
- Béatrice, calme-toi, tu n’as pas encore traversé la rive et tu te moques de celui qui se noie ?
- Excusez-moi, Sage-femme, mais elle me casse le tympan avec ses cris.
- Ma chérie, patience; ton tour arrive. J’espère juste que tes cris ne seront pas plus perçants.
- Jamais, moi, je suis courageuse.
- On verra bien; maintenant tais-toi.
Peu de temps après, j’examine à nouveau ma première patiente ; le col s’est suffisamment dilaté
pour qu’elle accouche ; je lui demande de monter sur la table d’accouchement.
Quelques minutes après, un beau garçon naît. Il est robuste et en bonne santé ; je mets le bébé sur
le ventre de la mère un instant; c’est une pratique que nous les Sage-femmes observons à chaque
fois.
Ce contact peau à peau du bébé et de la mère à la naissance, favorise sa découverte et le sécurise.
Le contact peau à peau aide aussi le corps de la mère à libérer l’ocytocine, une hormone qui
permet à l’utérus de se contracter, ce qui diminue les risques de saignements excessifs.
Ce contact est aussi bénéfique pour le bébé, car il aide à stabiliser sa respiration et sa fréquence
cardiaque après l’accouchement, tout en le gardant au chaud.
Je vérifie l’état général de la nouvelle accouchée puis je m’occupe du bébé. C’est désormais une
routine pour moi.
En apportant le bébé à sa mère, je le contemple: quel beau bébé ! J’aurais également voulu avoir
un garçon parmi mes enfants mais Dieu en a décidé autrement.
Je vais avertir les parents qui attendaient sur la cour de l’hôpital que le bébé est né ; des cris de
joie fusent et ils demandent s’ils peuvent les voir.
- Je vais vous amener le bébé ici; vous devriez attendre qu’une chambre soit attribuée à la mère
avant de la voir.
Je vais chercher mon nouveau-né et je le montre aux parents accompagnateurs de sa mère; un
jeune homme s’élance et me le prend des mains. Je suis sûre que c’est le père ; je suis habituée à
pareille scène.
Je le laisse contempler son fils un moment, puis je l’interroge:
- C’est vous, Abdoulaye ?
- Oui, Sage-femme, il y a un problème ?
- Votre femme criait votre nom tout à l’heure.
- Eh ! Mairi !
Nous éclatons de rire. La grand-mère du bébé et un autre parent s’empressaient aussi pour prendre
le nouveau-né ; après quelques minutes, je demande à repartir avec le bébé mais ils ne voulurent
pas ; je l’arrache de leurs mains et je rentre dans la salle pour le remettre à sa mère qui a d’ailleurs
trouvé qu’il est parti trop longtemps.
- Ah je vois ! Mairi, Maintenant que tu es libérée, tu as la bouche pour parler.
Elle sourit et répond:
- Sage-femme, je suis trop fière de mon bébé ; j’ai trop souffert pour l’avoir.
- Eh oui ! Il y a de quoi être fière ; les enfants sont un don de Dieu. J’ai vu Abdoulaye dehors ; je
lui ai dit que tu as crié son nom !
- Oh Sage-femme, fallait pas; maintenant, il ne va plus arrêter de me taquiner.
Soudain, j’entends des cris « oooh ! j’ai mal ! » ; c’est ma deuxième patiente, Béatrice, qui crie.
Sûrement que les contractions s’intensifient. Elle va maintenant comprendre ce que Mairi
ressentait.
Je vais l’examiner et je constate qu’elle est encore loin de la fin ; néanmoins, j’essaie de la
réconforter.
Une femme dans ces circonstances a besoin de l’attention et du réconfort. Mais hélas ! Dans nos
hôpitaux du pays, plutôt que de comprendre et de réconforter la femme, on l’insulte, on lui dit des
mots durs.
Certaines collègues vont jusqu’à dire
«quand tu t’accouplais avec ton homme, c’était doux non ? Maintenant, supporte et arrête de crier
dans mes oreilles ».
Mes collègues pensent que mettre des bébés au monde est certes un métier fantastique, mais
lorsqu’il s’agit de supporter chaque jour, des femmes hurlant toute leur souffrance de mettre un
gamin au monde, cela peut devenir lassant, voire agaçant.
Pour ma part, j’ai toujours été contre cette façon de traiter nos femmes enceintes ; j’en parle à mes
collègues mais elles ne veulent pas me comprendre. Moi j’ai eu la chance de faire un stage de
quelques mois en Europe ; j’ai pu alors apprendre à traiter la femme enceinte en travail avec
douceur et respect.
Je réconforte ma Béatrice en souffrance du mieux que je peux tout en surveillant le nouveau-né et
Mairi ; tout semble aller bien. Si cela continue ainsi, je lui trouverai une chambre en maternité.
Je la questionne:
- Alors, Mairi, tu te sens bien ?
- Oui, Sage-femme.
- Dans ce cas, une chambre te sera attribuée en maternité car ton Abdoulaye est impatient de te
voir.
Elle sourit.
Je fais les formalités en ce qui concerne la nouvelle maman puis je m’étends sur un lit non loin de
ma patiente en travail ; je commence à somnoler ; j’étais dans cet état quand j’entends des cris: «
oh ! Sauvez-moi ».
Je me lève rapidement pour aller à la rencontre de la nouvelle patiente. Elle allait vraiment mal !
Elle était accompagnée d’une dame. Je l’installe rapidement sur la table de consultation et je
l’examine ; elle est bien dilatée et pourrait accoucher dans une heure à peu près ; je lui demande
son carnet mais elle n’est pas une de nos patientes ordinaires; elle ne suivait pas sa grossesse chez
nous. Je lui pose des questions afin de remplir son carnet mais la douleur fait qu’elle ne me
répond pas.
Je sors voir la dame qui l’a accompagné au dehors pour avoir les informations car je ne pouvais
pas l’autoriser à rentrer dans la salle d’accouchement.
- Bonsoir Madame.
- Bonsoir Sage-femme.
- C’est votre parente ?
- Non, une amie ;
- Son prénom ;
- Sonia;
- Son nom;
- Gamoué ;
- Son âge;
- 26 ans ;
- Est-ce son premier geste ?
- Non, le second.
- Dans quel hôpital suivait-elle sa grossesse ?
- A la clinique Saint Pierre.
- Pourquoi a-t-elle choisi de venir ici alors?
- Nous sommes venues, elle et moi rendre visite à ma sœur pour rester avec elle pendant deux
jours ; le travail l’a prise en pleine nuit, il pleut et ce centre est le plus proche ; elle ne nous a pas
vite averti et il a été difficile de trouver un taxi ; nous ne pouvons donc aller jusqu’à l’autre
clinique cette nuit ;
- Vous habitez où normalement ?
- A trente kilomètres d’ici ;
- Ok,
- Où se trouve son mari ?
- Elle n’est pas mariée ;
- Elle a un enfant et s’apprête à avoir le second ; et tu me dis qu’elle n’est pas mariée ?
- Pas vraiment, elle est fiancée. Son premier enfant est d’un autre homme ;
- Ok, donne-moi le prénom du père car tous ces renseignements doivent figurer sur la fiche de
naissance.
- Le père du futur bébé ou le père de Sonia ?
- Je parle du père du bébé ;
- Ok, il s’appelle Stanley.
- Très bien, donnez le nom de famille aussi.
- Gobi
Je relève la tête et le stylo avec lequel j’écrivais les renseignements, tombe de mes mains.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 3)
- Le père du futur bébé ou le père de Sonia ?
- Je parle du père du bébé;
- Ok, il s’appelle Stanley.
- Très bien, donnez-moi le nom de famille.
- Gobi.
Je relève la tête et le stylo tombe de mes mains. Je m’adresse de nouveau à la dame
accompagnatrice. Il semble que mes oreilles ont mal entendu.
- Madame, répétez-moi le nom s’il vous plaît; je n’ai pas bien entendu.
- Stanley Gobi, selon ce qu’elle m’a dit.
Je reprends mon souffle; il se peut que ce soit une coïncidence ; plusieurs personnes peuvent
porter le même nom. En plus mon mari n’est pas un coureur de jupons ; non, mon Stanley est très
sérieux.
Cela fait treize bonnes années que je le connais et sept ans que nous vivons ensemble comme mari
et femme. Je n’ai jamais eu à le soupçonner.
Mon homme ne fait pas ces bêtises-là. Ce n’est certainement pas lui.
Alors, je fais l’effort de ne rien laisser paraître; mais mieux vaut complètement s’en assurer; alors
je continue de poser les questions à la dame:
- Quelle est sa profession ?
- Elle est Secrétaire.
- Ok, quelle est la profession du fiancé ;
- Ingénieur Agronome je crois, en tout cas, il est dans l’agriculture selon ce qu’elle m’a dit.
Là, je deviens toute pâle ; est-ce encore une coïncidence ? Il ne faut pas surtout que mes
appréhensions se transforment en certitude.
Je m’adresse à nouveau à la dame:
- Je voudrais avoir le numéro de téléphone du fiancé pour le mettre dans les dossiers;
En fait, je n’avais pas besoin du numéro; c’est juste pour être certaine que cette histoire n’a rien à
voir avec mon mari.
L’accompagnatrice de Sonia me répond:
- Je ne sais pas ; laissez-moi voir dans son téléphone portable, en espérant qu’elle n’a pas mis un
code.
Elle fouille le téléphone de Sonia et lentement mais sûrement, je l’entends énumérer les huit
chiffres que comprend le numéro de téléphone de mon mari.
Là, je suis complètement bouleversée. Je m’excuse auprès d’elle et je rentre dans la salle.
Mon regard croise celui de Sonia qui haletait toujours. Je la dépasse et me retire un moment dans
les toilettes pour être seule.
J’ai comme l’impression que je suis dans un rêve. Je passe ma main au visage, puis dans mes
cheveux.
Non, ce n’est pas un rêve : Stanley Gobi, Ingénieur Agronome et numéro de téléphone 10203040 !
C’est bien lui !
Franchement, je ne comprends rien ; mon regard se trouble ; je commence à voir flou. C’est un
rêve ; je crois que je vais bientôt me réveiller.
Assise sur le pot des toilettes, je reste pensive ; mille questions s’entrechoquent dans ma tête.
Stanley et moi n’avons aucun problème; nous venons même d’avoir une séance d’amour très
plaisante. Pourquoi voyait-il une autre femme dehors ? Mon Dieu ! Je pensais que cela n’arrivait
qu’aux autres.
J’entendais Sonia qui criait toujours et m’appelait au secours. Le bébé qu’elle porte est celui de
mon mari ! Et elle m’appelle pour l’accoucher !
Non, je ne vais pas faire cet accouchement ! Peu m’importe s’il lui arrivait quelque chose ! Je
m’en fiche et alors là, royalement.
Je reste muette aux cris de Sonia. Elle commence vraiment à m’agacer. Je m’avance vers elle et je
lui crie dessus !
- Tais-toi, bordel ! Je veux entendre.
Sonia surprise, se tait un instant.
J’imagine qu’elle est étonnée que la Sage-femme gentille qui vient de l’accueillir ait changé de
ton aussi brusquement.
Oui, les données ont changé ; il suffit d’un instant pour que cela change ; pourquoi et comment
pourrais-je être gentille avec elle ? Elle est la maîtresse de mon époux! Elle va même lui donner
un bébé ; et tout à l’heure même ! Je ne ferai jamais un tel accouchement ! Elle est une proie
venue se livrer dans la gueule du loup. Je ne vais pas la rater.
Je m’éloigne d’elle à nouveau puis des larmes de rage commencent à couler.
Heureusement que Anne-Marie m’a demandé de tenir la garde cette nuit ; autrement, je n’aurai
jamais su ; jamais Stanley n’a abordé pareil sujet ; il sort le matin et revient vite les soirs ; alors, à
quel moment voyait-il une autre femme ?
Eh les hommes ! Stanley ! Stanley ! Je te jure que tu me le paieras. A cette pensée, je pleure
encore.
Oh ! Pourquoi est-ce à moi que cela arrive ? Je lui ai donné trois filles ; qu’est-ce qu’il veut encore
?
Il m’a pourtant toujours fait comprendre que peu importe le sexe, qu’un enfant est toujours le
bienvenu et qu’il se contenterait de nos trois filles.
Il m’a juré que jamais il ne me rendra malheureuse. Mais, en ce moment, je suis la femme la plus
malheureuse de la terre ; j’ai mal, très mal, hyper mal.
Qu’est-ce qui n’a pas marché ? A quel moment Stanley a commencé ce jeu ? Et pourquoi ? En
plus, une femme qui a déjà un enfant !
Est-ce sa beauté qui l’a attiré ? Car oui, il faut le reconnaître, Sonia est très jolie. Elle est grande et
a de longs membres droits et fins. Sa bouche est filiforme et rose comme une framboise. Elle peut
séduire facilement.
Je prends courage et je me dirige vers la cour pour interroger la dame de Sonia ; c’est le moment
de profiter pour avoir des informations.
- Dites-moi, Madame, son fiancé est-il joignable actuellement ?
- Est-ce qu’il y a un problème Sage-femme ?
- Répondez-moi.
- C’est compliqué, il me serait difficile de l’appeler en pleine nuit.
- Mais votre voisine va lui donner un enfant et il serait difficile pour vous de l’appeler en pleine
nuit ?
- Sage-femme, le problème, c’est qu’il est marié ;
Ah ! Donc Sonia le savait ! Je m’adresse de nouveau à l’accompagnatrice.
- Il est marié ? Et pourquoi se met-elle avec un homme marié ?
- Sage-femme, vraiment, je ne sais pas ; elle a déjà fait un faux pas avec un homme qui ne l’a pas
épousé ; et puis, c’est sa vie, elle a le droit d’en faire ce que bon lui semble.
- Ah oui ? Cela veut dire que la situation matrimoniale de l’intéressé ne l’a pas gêné ; voilà,
maintenant, tu ne peux même pas le joindre.
Elle hausse les épaules et répond:
- Sage-femme, elle veut bien être la seconde épouse; et l’intéressé a promis l’épouser.
L’épouser ! je reste silencieuse un moment puis je reprends la parole:
- Vous le connaissez ?
- Je l’ai vu à peine une fois; c’est souvent la nuit qu’il lui rend visite.
La phrase de cette dame résonne dans ma tête sans arrêt. L’épouser ! L’épouser !
Sonia n’a rien compris ; il faut qu’elle vive pour être ma coépouse non ? C’est la table
d’accouchement qui va être son terminus. Jamais je ne procéderai à cet accouchement ; je la
regarderai souffrir jusqu’à la fin.
Ainsi, délibérément, elle veut être l’autre femme. Et elle pense que moi je vais l’aider à l’être !
Elle se leurre.
Si le père de son premier enfant ne l’a pas épousé, c’est sur mon mari qu’elle va se rabattre ? Elle
se trompe lourdement.
Qu’est-ce qui est arrivé à Stanley ? Que lui ai-je fait de mal ? Je lui aurais donné le bon Dieu sans
confession. Jamais, je n’ai douté de son amour et de sa fidélité. Quelle idiote j’ai été !
Ainsi donc, pendant que je suis de garde, Monsieur venait se la couler douce chez Sonia. La
femme de ménage doit sûrement savoir qu’il sort en mon absence.
La relation de Stanley avec Sonia est si avancée au point où elle lui donne un enfant. A cette
pensée, mes larmes coulent à flots. Je me sens trahie.
J’avais le cœur brisé et je ne savais pas quoi faire. Stanley a trahi ma confiance et piétiné mes
sentiments. C’est si difficile pour moi de découvrir cela.
Pourquoi l'amour si beau au début finit par faire souffrir ?
J’aurais aimé ne pas découvrir la double vie de mon mari de cette manière ; le pire, c’est que la
maîtresse, objet de mon amertume du moment, attend que je la délivre.
Je ne me sens pas du tout disposée à faire cet accouchement.
J’ai plutôt envie d’en finir avec elle, de la laisser souffrir jusqu’à épuisement. Je vivais en paix
dans mon couple ; voilà que des problèmes vont commencer bientôt parce qu’elle sera l’autre
femme et certainement bien aguerrie pour me créer des ennuis.
Manque de chance pour elle car elle est dans mes mains et je peux en faire ce que je veux. Mes
larmes ne cessent de couler ; je pleure abondamment.
Mes yeux sont devenus lourds ; je commence à ressentir une forte migraine.
Je me lève et je vais chercher un comprimé effervescent d’Efferalgan que je dissous dans un
demi-verre d’eau.
Aussitôt fondue, je bois mon eau d’un trait, espérant me sentir mieux.
Je me mets encore à réfléchir ; comment Stanley peut me faire cela et se comporter comme si de
rien n’était ?
Une femme est enceinte de mon mari jusqu’à terme et je ne sais même pas ; franchement, je
réalise que l’ennemi n’est pas celui qui te fait face avec une épée à la main mais c’est la personne
qui est à côté de toi avec un poignard dans le dos.
Oui, je peux dire que Stanley m’a poignardé dans le dos. Avait-il peur de m’informer ? Je n’ai
rien fait de mal, pourquoi éprouve t-il le besoin de faire un enfant avec une autre ?
Cette pensée déclenche encore en moi un torrent de larmes, signe de la grande douleur morale que
je ressens en ce moment.
Je réalise que la vie est pleine d’imprévus et d’embûches. J’ai trop fait confiance à Stanley. Je n’ai
même rien soupçonné.
Fortement absorbée par mes pensées, j’entends Sonia qui commence à crier de nouveau.
En entendant ses cris, mon cœur s’enflamme à nouveau ; j’espère que cette idiote qui veut
s’inscruster dans mon foyer n’espère pas que je vais la délivrer !
La colère de l'amour trahi n'ayant point de bornes, je me lève, m’approche d’elle et lui dit :
- Arrête de miauler comme un chat affamé ;
- Sage-Femme, j’ai très mal et j’ai envie de pousser.
- Ça fait ton problème.
J’ignore ses plaintes et je me retire à nouveau dans le petit bureau aménagé pour les gardes de
nuit; mon cœur saigne.
Je me sens comme une idiote ; je suis à la fois en colère et triste. La douleur morale est plus
déchirante que la douleur physique.
Rien n’est plus terrible que de se sentir trahir après avoir eu une confiance aveugle. Il n’est pire
trahison que de trahir l’être aimé.
Je brûle en silence ; j’ai envie de crier de douleur mais je fais l’effort de me retenir.
Mon sang chauffe. J’ai perdu ma gaieté de tout à l’heure. Tout se bouscule dans ma tête.
J’entends encore Sonia crier et je passe par une période de réflexion terrible.
En effet, je me demande si je dois-je l’aider à être délivrée ? Ou dois-je la laisser ainsi jusqu’à ce
que le pire arrive ?
Est-ce que je dois respecter le serment que j’ai prêté ou il vaut mieux pour moi protéger mes
intérêts, vu qu’avec la naissance de cet enfant, c’est mon foyer et ma tranquillité qui sont menacés
?
Oh mon Dieu, que dois-je faire ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 4)
J’entends encore Sonia crier et je passe par une période de réflexion terrible. En effet, je me
demande si je dois-je l’aider à être délivrée ? Ou dois-je la laisser ainsi jusqu’à ce que le pire
arrive ?
Est-ce que je dois respecter le serment que j’ai prêté ou il vaut mieux pour moi protéger mes
intérêts, vu qu’avec la naissance de cet enfant, c’est mon foyer et ma tranquillité qui sont menacés
?
Oh mon Dieu, que dois-je faire ?
Je lutte pour maîtriser un sentiment de colère mêlé d’impuissance. Cette douleur me transperce le
cœur. Je le ressens au plus profond de moi.
Je suis dans une véritable confusion; j’ai envie d’achever cette poufiasse ; mais en même temps, je
ne suis pas méchante; la méchanceté, c’est la faiblesse des imbéciles qui se croient forts ; mais le
problème est que si je l’aide, j’aide ainsi une femme à devenir ma coépouse et à avoir une place
dans la vie de mon mari. Je ne vais quand même pas prendre mes propres mains pour m’attirer
mon malheur !
Comme elle a déjà fait un premier faux pas avec un homme, elle s’arrangera cette fois-ci pour
rester dans la vie de mon mari.
Je savais que la colère est mauvaise conseillère et nuisible.
Je pense à nouveau au jour où j’ai prêté serment. Je réfléchis puis je décide de ne pas la laisser
mourir quoi que ce n’est pas l’envie qui me manque ; toutefois, je ne me sens pas en état de faire
cet accouchement.
Je décide d’appeler ma collègue la plus proche, Safiétou. Quoi qu’il fasse nuit, il faut qu’elle
m’aide car je ne peux vraiment plus toucher cette idiote de Sonia. Je ne m’en sens pas capable.
Je compose le numéro de Safiétou que je lance mais l’appel va directement sur le répondeur ;
j’essaie à nouveau et c’est pareil.
J’essaie d’appeler ma collègue Juliette qui m’a passé le témoin ; cela sonne mais elle ne décroche
pas ; elle l’a certainement mis sous silencieux pour dormir.
Que dois-je faire ? Appeler le gynécologue? Mais il me dira qu’il n’y a pas nécessité de
césarienne; et je ne vais quand même pas expliquer au Médecin que je ne veux pas accoucher ma
potentielle future coépouse. Je n’aime pas exposer ma vie privée à n’importe qui.
Le Médecin n’est pas mon ami mais un supérieur hiérarchique et je n’ai pas à lui raconter mes
déboires.
Le temps passait et Sonia criait de douleur ; ses cris m’énervent davantage et augmentent ma
fureur ; je m’avance vers elle avec une grande colère.
Je pense que j’ai changé d’avis et que je vais plutôt lui régler son compte ; ainsi, elle saura que
regarder le mari d’autrui peut conduire à sa propre perte. Je le ferai sans trace ; l’amie de Sonia
dehors m’a dit qu’elle a juste vu Stanley une fois ; et elle ne sait pas que je suis la femme de ce
Stanley ; donc je ne cours aucun risque. Toutes les cartes sont en main pour que je me venge.
Je continue d’avancer vers Sonia avec rage. C’est ici que va se terminer le parcours de cette
voleuse de mari.
Quand je fus à son niveau, je lui demande d’aller s’installer sur la table d’accouchement.
Elle avait de la peine à se lever ; elle réclame mon aide :
- Aide-moi, Sage-femme, je n’arrive pas à me lever.
- T’aider ! Tu es vraiment malade. C’est mon frère qui t’a mise enceinte ? lève-toi et vas-y vite ; si
tu ne peux pas, reste-là et accouche l’enfant toi-même.
Je la regarde faire de pénibles efforts pour quitter le lit; elle marchait difficilement ; je sentais
qu’elle souffrait et qu’elle était au summum de la douleur.
Mais pour elle, je n’avais pas de pitié ; ne me jugez pas ; comprenez-moi; aider la maîtresse de
mon mari à faire naître le bébé illégitime et tout cela je viens de le découvrir ! Il faut avoir
vraiment du cœur pour ne pas faire une crise cardiaque ; c’est aujourd’hui que j’ai compris que
j’étais forte mentalement. C’est vrai que tout ce qui ne tue pas rend plus fort.
Fortement éprise par la colère, j’ignore les gesticulations de Sonia ; je prends le téléphone pour
appeler encore Safiétou une dernière fois. Avant même de lancer son numéro, j’entends Sonia
pousser un grand cri ; je jette un regard dans sa direction et je vois que le bébé s’est engagé. Que
faire ?
Voici que celle qui va me pourrir la vie est entre mes mains; j’ai mon ennemi qui m’est livré sur
un plateau d’argent. J’ai le choix de décider ; suis-je prête à prendre le risque de la laisser vivre
pour ensuite m’enquiquiner ? Où dois-je comme un éclair profiter pour effacer toute trace d’elle
sur cette terre ?
Je me souviens de mon cours de déontologie lorsque j’étais en formation et particulièrement d’une
séance où le professeur nous faisait comprendre qu’étant du corps médical, nous devons sauver
tout malade même s’il s’avère être notre ennemi car nous n’avons pas le droit de toucher à la vie
d’autrui. Certains camarades avaient protesté ; j’étais de celles qui ce jour-là avaient donné raison
au professeur.
Voilà qu’aujourd’hui, je me retrouve devant la situation et je prends une autre résolution. Oui, la
théorie est facile, mais la pratique est très difficile. Après tout, nous sommes faits de chair et
d’émotions.
Déontologie ou pas, en ce moment, mon cœur saigne et j’ai envie de donner une bonne leçon à
cette garce de Sonia, qui délibérément veut d’un homme marié.
Sonia continue de crier car, vu que le bébé a commencé à s’engager, elle a du mal à continuer sa
pénible marche vers la table d’accouchement. Si je ne fais pas vite, assurément, elle perdra le bébé
et si je le veux, je peux œuvrer pour qu’elle-même s’en aille avec lui.
Alors, qu’est-ce que je décide vraiment ?
C’est dans ces moments-là que notre véritable personnalité se révèle à nous. Si nous sommes
méchants, nous appuyons sur la gachette de la cruauté sans aucun remords ; mais si au contraire,
nous avons du cœur et de l’amour, nous décidons de faire le bien quoi qu’il en adviendra, même si
nous devons en souffrir plus tard.
Sonia n’arrive pas à monter sur la table d’accouchement d’elle-même car le bébé est engagé. Si je
ne l’aide pas, elle ne pourra pas. Je la fusille du regard ; elle m’énerve ; j’ai envie de l’étrangler et
d’en finir avec elle ; mais ma véritable personnalité prend le dessus et je l’aide à monter sur la
table ; à ce moment, de grosses larmes s’échappent de mes yeux car je me vois obligée de porter
secours à ma rivale et qui sait si ce n’est mon futur bourreau ; celle qui va commencer à me créer
tous mes ennuis dans mon foyer.
Malgré tout, je l’aide à monter sur la table et je commence à l’accoucher.
- Pousse.
Elle ne pousse pas fort comme le font beaucoup de femmes à cause de la douleur ; généralement,
contrairement à mes collègues, je les comprends et je les encourage.
Je leur fais comprendre qu’elles sont en train de faire courir un risque pour leur bébé si elles ne
poussent pas vite. Mais elle, au lieu de la comprendre, je lui assène une gifle en lui ordonnant à
nouveau de pousser. Elle s’exécute ; le bébé sort.
Un nouveau choc à la vue du sexe: c’est un garçon et moi je n’ai que des filles.
Oh Dieu ! Que t’ai-je fait pour mériter cela?
J’emmène l’enfant pour la toilette et au moment où je me retrouve seule avec lui, j’eus des envies
pas très saines envers lui; mais non, je ne peux pas faire cela. Plutôt que d’en finir avec lui, je
décide de lui donner des fessées proprement; mais, je me dis que ce petit être, ce petit trésor, ne
m’a rien fait. Il n’est pas responsable des choix de ses parents ; ce n’est pas lui qui a demandé à
Stanley de me tromper ni à sa mère de vouloir s’introduire dans mon foyer ; non, ce petit ange ne
m’a rien fait ; je n’ai pas le droit de punir un innocent.
Peu importe ma douleur, ce bébé ne mérite pas une punition ; même si je sens déjà qu’il prendra la
place de mes filles dans le cœur de leur père, je décide de le laisser tranquille.
Tout en pleurant mon sort, je prends courage et lui fait sa toilette comme je l’ai toujours fait pour
les autres bébés.
Je l’observe attentivement pour voir si j’y retrouverai les traits de Stanley ; c’est encore trop tôt.
Je l’emballe chaudement mais je ne le ramène pas à sa mère ; je reviens vers elle pour vérifier son
état général, avec désinvolture et négligence. Je ne l’examine pas comme il se doit car elle
m’énerve.
Pourquoi devrais-je prendre soin d’elle ? J’ai déjà fait l’immense effort de l’accoucher malgré ma
colère. Alors, je ne vais pas me gêner pour l’examiner correctement. Me voyant revenir sans son
fils, Sonia m’adresse la parole.
- Sage-femme, où est mon bébé ?
- Ton bébé ? il dort ;
- Quel est son sexe ?
- Tu n’as pas fait des échographies avant la naissance ?
- Oui, mais je n’ai jamais voulu savoir le sexe : je voulais la surprise.
Je ne lui réponds pas ; je change de sujet:
- Au fait, où est son père ?
- S’il n’est pas là, c’est que personne ne lui a fait appel.
- Comment cela ! Il ne vit pas avec toi ?
- Non, en fait, il est en voyage ; mais il va venir dès qu’il apprendra que j’ai accouché.
Sonia a menti ; mais pourquoi ? Certainement qu’elle était gênée de me dire que c’est un homme
marié ; elle s’adresse à nouveau à moi :
- Sage-femme, je peux voir le bébé ?
- J’ai dit qu’il dort, ne m’énerve pas madame.
- Mais Sage-femme, il y a un problème ?
Vous m’avez bien accueilli au début puis après vous avez changé de ton. Je vous ai fait quelque
chose ?
Je ne la gère pas ; je ne prends même pas la peine d’aller dire à la dame accompagnatrice que
Sonia a accouché.
Pour Sonia, je ne ferai plus de faveur ; c’est déjà un grand sacrifice de l’avoir accouché.
Je repars voir le bébé pour enfin le montrer à sa sotte de mère toujours couchée sur la table
d’accouchement et qui ne cessait de réclamer son fils ; au moment de prendre le bébé, je remarque
qu’il respirait à peine.
Je le prends et je cours à la pédiatrie ; il faut que ce bébé soit sauvé ; autrement, quand cela se
saurait que c’est moi qui ait procédé à cet accouchement, personne ne va me comprendre ; ils vont
penser que j’ai tué le bébé parce qu’il est l’enfant de mon mari et surtout parce que c’est un
garçon; je le confie au pédiatre qui commence à s’en occuper immédiatement. Je reviens et Sonia
me demande encore où est son bébé.
- Je l’ai emmené à la pédiatrie, il n’allait pas bien.
- Quoi ! Qu’est ce qu’ il a ?
- Pardon jeune femme, ferme ta bouche; tu me tapes sur les nerfs.
En temps normal, jamais je ne lui aurai servi ces réponses. Car la femme qui vient d’accoucher est
encore fragile. Il ne faut pas que sa tension artérielle monte.
Sonia toujours surprise par mes réactions, s’adresse à nouveau à moi :
- Sage-femme, pour l’amour du ciel, pouvez-vous me prêtez votre portable pour que j’appelle
mon mari ?
Elle veut appeler son mari ! La fille-ci a du culot de parler de Stanley comme de son mari. Mais
en fait, c’est une bonne idée ! J’aurais alors l’occasion d’écouter la voix de Stanley et de noter sa
réaction.
J’avais envie de lui crier dessus mais je prends sur moi l’endurance et la patience pour atteindre
mon objectif.
Alors, je lui réponds:
- J’irai plutôt te chercher le tien chez ton amie ou prendre le sien;
Je vais chercher son téléphone chez son amie qui me demande si tout va bien. Je lui réponds oui.
Je reviens dans la salle et je tends le téléphone à Sonia en disant :
- Je veux que tu mettes la conversation sur mains libres ;
- Pourquoi Sage-femme ?
- Tu es vraiment culottée, tu fais ce que je te dis et point barre ; d’ailleurs ne sais-tu pas que tu
n’as pas le droit de prendre un appel en salle d’accouchement ?
Or, c’était pour voir la réaction de Stanley que j’avais fait cette proposition.
Elle compose le numéro et lance l’appel ; après quatre sonneries, Stanley décroche:
- Allô
C’est bien la voix de Stanley que j’entends.
Elle lui répond :
- Oui chéri ; j’ai accouché ;
- Mais pourquoi tu ne m’as pas averti que tu es à l’hôpital ? Je serai venu aussitôt. Et le bébé ? il
va bien ? une fille, un garçon?
- Jusque-là je n’en sais rien.
Je lui souffle à l’oreille que c’est un garçon et elle le lui répète.
- Super, enfin, j’ai un fils ! Un héritier ! Je suis enfin comblé ;
- Oui, mais il ne va pas très bien ; il est à la pédiatrie ;
- Ecoute, je me dépêche, j’arrive ;
- Ok, mais je ne suis pas à l’hôpital Saint-Pierre ;
- Et tu es où ?
- Hôpital Belle Santé ;
- Quoi ! Qui est la sage-femme qui t’a accouché ?
Je souris intérieurement et je souffle à l’oreille de Sonia ; je m’appelle Roukiya.
- Elle s’appelle Roukiya.
- Roukiya ?ok, peux-tu me la passer ?
Je secoue la tête.
Sonia lui répond:
- Non, elle est occupée.
- Ok ;
- Mais dis-moi, qui t’a accompagné ?
- C’est une amie.
- Laquelle ?
- Tu ne la connais pas ;
- C’est ce que je te refuse toujours Sonia ; tu as trop d’amies ; si quelque chose t’arrivait, vers qui
allais-je me tourner ? au fait, pourquoi n’es-tu pas allée à l’hôpital Saint-Pierre ?
- Comme tu m’avais dit que tu serais occupée toute cette semaine, je suis allée chez la sœur de
mon amie avec elle car je m’ennuyais; c’est là que le travail a commencé.
- Très bien ma chérie; je te rappelle.
Immédiatement après le coup de fil passé par Sonia, mon téléphone sonne; c’est Stanley ; je
regarde sonner ; je sais que c’est pour vérifier si j’étais encore à l’hôpital et par quelle magie c’est
une certaine Roukiya qui a fait la garde à ma place.
Je ne sais pas si je dois décrocher ou si je laisse sonner.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 5)
Immédiatement après le coup de fil passé par Sonia, mon téléphone sonne; c’est Stanley ; je
regarde sonner ; je sais que c’est pour vérifier si j’étais encore à l’hôpital et par quelle magie c’est
une certaine Roukiya qui a fait la garde à ma place. Je ne sais pas si je dois décrocher ou si je
laisse sonner.
Il savait que par nuit, c’est une seule Sage-femme qui est de garde. Alors, c’est sûr qu’il est
troublé et ne comprend plus rien.
Je laisse sonner le téléphone ; il rappelle encore ; là, je décroche.
- Allô
- Où es-tu ?
- Quelle question ! Où veux-tu que je sois ?
- Dis-moi, normalement c’est une Sage-femme pour la garde la nuit ou vous avez changé de
politique?
- Oui, c’est toujours le cas. Pour la section maternité, c’est une sage-femme, un Gynécologue et
une fille de salle. Pourquoi ?
- Pour rien, juste une question de curiosité ; la nuit a été paisible ?
- Plus ou moins ;
- Pas de femme qui ait accouché ?
- Mais pourquoi tu me poses des questions aussi étranges ?
- Juste pour faire la conversation ; tu rentres à quelle heure ?
- A la même heure que d’habitude.
- Ok, je serai parti au boulot à ton arrivée. A ce soir donc ; une fois à la maison, fais-moi signe.
Stanley demande que je lui fasse signe une fois à la maison pour ainsi venir à l’hôpital voir Sonia;
il attendra mon signe longtemps.
Les cris aigus de ma troisième patiente me poussent à rentrer dans la salle des femmes en travail.
Je ne suis pas de bonne humeur, alors je l’agresse verbalement:
- Pourquoi cries-tu si fort Béatrice ? Tu m’énerves.
- J’ai trop mal Sage-femme ;
- Tu as mal ! n’est-ce pas, tu te moquais de l’autre dame quand elle criait ?
- Oh Sage-femme, pitié !
Je l’examine ; elle est prête à accoucher; je l’aide à s’installer sur la table d’accouchement ; tout
s’est vite passé avec elle: un beau bébé de trois kilos huit cent grammes pointe son nez.
Je le nettoie puis revient vers sa mère chez qui les cris ont déjà fait place à la joie. Je n’ai eu que
des garçons ce soir.
Mais mon cœur continue de chauffer ; les larmes viennent et je les refoule ; comment Stanley peut
me faire cela ?
Il l’appelle même « chérie » ; il dit qu’il a enfin son héritier et qu’il est comblé ; et pourtant,
Stanley m’avait toujours dit que ses trois filles faisaient déjà son bonheur.
Oh Stanley! Quel hypocrite! Cet enfant sera une menace pour moi et mes filles.
Je jette encore un regard vers Sonia, toujours sur la table d’accouchement; elle a les yeux fermés ;
c’est normal, elle vient de fournir un grand effort. Mais pendant que mon cœur est en tourment,
elle se repose paisiblement ?
Je ne vais pas la laisser tranquille ; alors, je m’approche et je la réveille brutalement en lui disant:
- Tu ne sais pas ce qui est arrivé à ton bâtard de fils et tu dors !
- Je t’ai posé la question mais tu m’as dit de fermer ma bouche. Pourquoi traites-tu mon fils de
bâtard ? Il a bien un père et je viens de lui parler au téléphone.
Je la toise et je m’éloigne d’elle.
J’examine à nouveau Béatrice qui vient d’accoucher; j’avais à peine fini avec elle quand une de
mes collègues arrive ; comme à l’accoutumée, je lui fais le point de la situation:
- Bonjour Raissa.
- Bonjour Adèle; comme tu es la première venue, je te fais le point ; j’ai accouché trois patientes ;
les bébés sont tous mâles ; la première, c’est Madame Mairi Diallo épouse Camara, elle est dans
la chambre numéro 04 en maternité ; la seconde, c’est Sonia Ata ; elle n’a jamais suivi sa
grossesse chez nous; la voilà sur la deuxième table d’accouchement; son bébé est en pédiatrie et
respire difficilement; la troisième, c’est Béatrice Lou ; elle vient à peine d’accoucher ; le bébé est
bien portant.
- Bien noté Raissa ; rentre bien.
Je me change ; mais avant de partir, je fais un tour en pédiatrie m’enquérir des nouvelles du bébé
de Sonia; il ne va toujours pas bien et le pédiatre ne donne pas bon espoir. Il m’a dit qu’il a une
insuffisance cardiaque. J’espère juste qu’il ne va pas mourir ; mais pourquoi je m’en fais ? Peu
m’importe, ce n’est pas moi qui l’aurais tué.
Je rentre chez moi et j’éteins mon portable. Je ne veux pas que Stanley arrive à me joindre. Je
savais aussi qu’il allait téléphoner à la femme de ménage pour s’assurer que je suis rentrée ; alors
j’entreprends de débrancher le téléphone fixe. S’il veut être sûr de ma position, qu’il revienne à la
maison.
Comme je l’avais prévu, Stanley n’arrivant pas à me joindre est effectivement rentré; je n’arrivais
même pas à dormir ; j’étais allongée sur le lit et je versais des chaudes larmes; dès que j’entends
le bruit de sa voiture, je me lève vite et me débarbouille pour qu’il ne remarque pas que j’ai
pleuré. J’avais décidé de ne rien lui dire et d’attendre voir son comportement. C’est un propre à
moi, je n’agis jamais en me précipitant ; je prends tout mon temps.
Stanley est surpris de me voir éveillé ; il me salue en m’embrassant ; il me dégoûte. Mais je fais
comme si de rien n’était.
- Je te croyais endormie ;
- Je me suis réveillée pour aller aux toilettes ;
- Je t’ai pourtant dit de me faire signe en rentrant ;
- J’ai oublié ;
- Je t’appelle et ton téléphone est éteint ;
- Il a dû se décharger ;
- Le téléphone fixe non plus ne marche pas ;
- Les enfants en s’amusant s’en sont peut-être approchés.
Je sens que mes réponses l’apaisent.
Il reprend :
- Je suis venu alors vérifier si tout allait bien.
Je me dis dans mon cœur « Menteur ! tu es venu t’assurer que je suis à la maison afin de pouvoir
te rendre tranquillement à l’hôpital».
Il m’adresse à nouveau la parole:
- A qui as-tu passé le témoin avant de partir ?
Je comprends la question ; il craignait de tomber sur une collègue qui le connait en allant voir
Sonia. Il est si troublé qu’il a oublié que dans la journée, la plupart des Sage-femmes sont là ;
c’est pour la garde qu’on passe le témoin. Alors je lui donne la réponse pour l’empêcher de s’y
rendre.
- En journée, il y a au moins quatre Sage-femmes ; j’ai juste fait le point à la première venue ;
- Dis-moi, as-tu une collègue qui s’appelle Roukiya ?
Je ris dans mon cœur;
- Oui; elle a même assuré la garde avec moi cette nuit, pour ne pas dire que c’est elle qui s’est
tapée tout le boulot ;
- Et pourquoi ?
- J’étais trop fatiguée ; alors je l’ai appelé ; finalement j’ai dormi toute la nuit ; mais pourquoi
veux-tu savoir ? Où as-tu entendu parler de Roukiya?
- T’inquiète ; juste qu’un ami la connaît. Je retourne au travail.
Un vrai menteur ce Stanley ! Il ne laisse rien paraître ; mais il ne perd rien pour attendre. Rira bien
qui rira le dernier.
Aussitôt Stanley reparti, je me replonge dans mes pensées ; tantôt je regrette de ne pas avoir fini
avec cette Sonia, tantôt je me dis que j’ai eu la bonne attitude ; je ne sais même plus quoi penser.
J’étais dans cet état quand la femme de ménage vient m’annoncer une visite:
- Qui est-ce ?
- C’est tata Safiétou ;
- Ok, dis-lui que j’arrive.
Qu’est-ce que Safiétou peut bien faire ici à pareille heure alors qu’elle est censée être au travail ?
Je me dirige vers le salon.
- Safi, que fais-tu ici à pareille heure ?
- Aucun de tes téléphones ne répond ; ni le cellulaire, ni celui du domicile.
- Ah autant pour moi ; tu as raison; qu’est-ce qui t’emmène ?
- Tu as accouché une dame du nom de Sonia ; on n’arrive pas à joindre son mari car le nom et le
contact ne sont pas mentionnés sur les renseignements que tu as notés.
- Elle était accompagnée par une dame, il fallait l’interroger.
- Effectivement, mais la dame s’est enfuie en courant lorsqu’on lui a dit qu’elle est décédée.
- Elle est quoi !
- Décédée.
- Comment cela ? Que s’est-il passé ?
- Sa tension était très élevée ; en plus, elle a beaucoup saigné et les gynécologues n’ont pas pu la
récupérer.
Je ne comprends rien ; j’espère que ce n’est pas de ma faute parce qu’il faut avouer que je n’ai pas
pris soin d’elle comme il faut ; je l’ai négligé.
Je lui ai aussi crié dessus ; je ne lui ai donné aucune nouvelle rassurante de son bébé ; j’ai été
agressive avec elle et je suis consciente que toutes ces attitudes auraient pu monter sa tension.
Aussi, je ne l’ai pas examinée correctement, autrement j’aurais constaté qu’elle saignait.
Oh mon Dieu ! La colère a encore eu raison de moi une fois; et pourtant, si je l’ai accouchée ,
c’est que je n’avais aucune intention de la laisser mourir.
C’est Safiétou qui me sort de ma torpeur.
- Raissa, tu vas bien ?
- Oui, oui ça va.
- On dirait pas ; c’est le décès de cette dame qui te met dans cet état ?
- Oui Safi.
- Voyons, Raissa, tu es du corps médical ; ce genre de choses arrive tout le temps ; l’important est
que ta conscience soit dégagée ; tu l’as bien soigné, n’est-ce pas?
- Oui, j’ai ce qu’il fallait ; mentis-je.
- Donc, c’est Dieu qui a décidé. Faut pas que cela t’affecte.
- C’est juste qu’elle était sympathique avec moi, Safi. Mais au fait, pourquoi alors me cherchez-
vous ?
- Nous avons besoin de savoir si tu as par hasard le numéro d’un contact car il paraît que tu as
emmené son fils à la pédiatrie.
- Je me change et je te suis, on va à l’hôpital.
Je rentre dans ma chambre me changer ; pendant que je m’habille, je commence à penser aux
conséquences de ma négligence. J’aurais dû bien l’examiner.
J’espère que sa mort n’est pas de ma faute. Plutôt que ce décès me réjouisse, il me cause des
tourments antérieurs.
Que va-t-on penser quand cela se saurait que c’est moi qui l’ai accouchée ? C’est évident, on va
dire que je l’ai tué, exprès.
Oh Sonia ! Pourquoi a-t-il fallu qu’elle meure ? En mourant, elle risque de m’attirer des ennuis car
maintenant Stanley sait qu’elle a accouché ainsi que le nom de l’hôpital.
Je me rends à l’hôpital avec Safiétou; la dame qui avait accompagné Sonia n’est plus revenue.
Sonia a été emmenée à la morgue ; on espère qu’un parent viendra réclamer le corps; ou même
Stanley ; je me demande même s’il sait que Sonia est morte; il semble qu’apparemment, il évite
de venir dans l’hôpital de peur d’y rencontrer mes collègues.
Avant de rentrer, je fais un tour à la pédiatrie; toujours le statut quo pour l’enfant.
Je reviens à la section maternité ; au chevet de la table où Sonia a accouché, je remarque un objet ;
je m’en approche et je me rends compte que c’est son téléphone portable. Je regarde de gauche à
droite pour voir si quelqu’un me surveille puis je prends le téléphone que je fourre dans mon sac.
Je voulais juste vérifier si Stanley l’avait entre temps rappelé ; je me retire encore dans les
toilettes et je commence à fouiller le téléphone.
Je constate près de dix appels en absence de Stanley ; après je vire dans la messagerie pour lire les
messages qu’ils s’envoyaient ; oh ! j’en ai lu de toutes les couleurs !
Au fur et à mesure que je lisais les mots doux d’amour que Stanley employait avec elle, mes
larmes coulent, on dirait que je coupais un oignon. Décidément ! Cette garce semblait illuminer la
vie de Stanley. Si ce n’était pas la nouvelle situation, il allait m’entendre !
Malheureusement, Sonia est morte, me condamnant au silence ; car si je parle, c’est grave. Je serai
accusée de meurtre. Il n’y a rien à faire.
Et au fond, ce serait à juste titre car j’ai contribué à faire monter sa tension par les agressions
verbales et je ne l’ai pas examiné afin de prévenir tout saignement.
Seulement, j’étais animée par la colère, je ne l’avais pas fait dans le but de provoquer sa mort.
D’une certaine façon, je me sens coupable. Mais trop tard, je ne peux plus rien dire et Stanley ne
doit jamais le savoir.
J’efface tous les messages de Stanley et je retire la carte sim que je mets dans le W.C puis je tire
l’eau. Je sors des toilettes, dépose le portable sans sim là où je l’ai pris, puis j’entreprends de
rentrer chez moi.
Je sortais ma voiture de l’hôpital quand je vois Stanley arriver. Il était surpris de me croiser car
pour lui, je dormais paisiblement dans notre lit à la maison.
Je gare ma voiture et je descends; Stanley fait de même.
Je m’adosse à la portière de la voiture et je l’observe s’avancer vers moi, complètement troublé.
Je souris intérieurement: comment va-t-il m’expliquer sa présence en ce lieu ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 6)
Je sortais ma voiture de l’hôpital quand je vois Stanley arriver. Il était surpris de me croiser car
pour lui, je dormais paisiblement dans notre lit à la maison. Je gare ma voiture et je descends ;
Stanley fait de même. Je m’adosse à la portière de la voiture et je l’observe s’avancer vers moi,
complètement troublé.
Je souris intérieurement: comment va-t-il m’expliquer sa présence en ce lieu ?
Stanley se râcle la gorge puis s’adresse à moi:
- Mais Raissa, que fais-tu ici ?
- N’est-ce pas l’hôpital où je travaille ? Qu’est-ce qui t’étonne ?
- Mais je pensais que tu serais en train de dormir à la maison !
- Safiétou est venue me chercher pour un problème; et toi, que fais-tu ici ?
- Je suis venu voir un malade.
- A oui ? Tu as un malade ici et tu ne me dis pas ?
- C’est un collègue; tu es Sage-femme et non Médecin que je sache. En plus, je ne voulais pas te
déranger, vu que tu reposais.
- Ok, allons voir ton malade ensemble.
Stanley est du coup embarrassé; puis il dit:
- Ok, allons-y.
- Dans quelle salle et dans quelle section est-il ?
- Je vais demander à la réception; d’ailleurs, tu es là, tu vas m’aider.
Comme il veut jouer, je rentre dans son jeu.
- Comment s’appelle t-il ?
- Ebenezer Soulou.
Je vais me renseigner et il n’y avait aucun patient de ce nom. Stanley fait l’étonné ;
- Il est peut-être déjà rentré.
Je le regarde étrangement. En ma présence, il fut obligé de repartir.
Avant d’entrer dans sa voiture, il m’interroge ;
- Au fait, pourquoi es-tu revenue à l’hôpital ?
- Il y avait une situation; je te raconte ce soir, je te laisse retourner au travail;
- A ce soir.
Pendant le trajet du retour, je réfléchissais ; Stanley me montre un double visage ; un véritable
hypocrite.
Je repense encore aux messages qu’il échangeait avec Sonia et mon cœur se serre. Elle était sa «
reine, son cœur, sa lumière, son bébé d’amour ».
Mes larmes coulent à nouveau ; j’aurais tellement aimé lui demander des explications mais hélas !
Je suis obligée de me taire, du moins pour le moment; je ne veux pas aller en prison abandonnant
mes filles. Alors bouche cousue !
Mon cœur n’arrête pas de culpabiliser. J’aurais dû m’approcher du Gynécologue et tout lui
expliquer. Cela m’aurait évité de toucher Sonia. Mais je voulais juste protéger ma vie privée et
m’épargner cette honte car mes collègues et mes supérieurs hiérarchiques ont beaucoup de respect
pour Stanley. En plus, le Gynéco intervient pour la césarienne.
J’ai pourtant essayé de joindre Safiétou et Juliette sans succès. J’espère juste qu’avec la sim
enlevée, personne ne saura qu’elle était en relation avec Stanley ; autrement, le lien serait vite fait.
Béatrice était en salle de travail et j’étais seule avec Sonia en salle d’accouchement. J’avais donc
la certitude que personne n’a entendu quand je lui criais dessus et personne n’était là pour
constater que j’ai négligé de bien la surveiller après l’accouchement.
Toutefois, je me demande pourquoi l’amie de Sonia a fui. Heureusement qu’elle ne sait pas qui je
suis.
A qui allons-nous remettre le bébé s’il se rétablissait ? Du coup, je commence à avoir pitié de ce
petit Être qui à peine né, commence déjà à subir les affres de cette vie: il est malade et perd sa
mère; son père ne le sait pas même pas encore.
Je rentre et je prends un bain. Je pense encore au décès de Sonia; nulle doute que c’est ma
négligence qui l’a envoyé au séjour des morts. Je ne l’ai pas fait exprès. Qui peut accoucher la
maîtresse de son mari en souriant ? C’est normal que je perde mon sang-froid ! Après tout, je suis
un être humain.
Si au moins, Stanley m’avait dit qu’il avait une autre femme dehors, je n’aurais pas été si
surprise !
J’avais toute confiance en lui et il n’avait jamais donné de raison de douter de lui. Je n’arrive
même pas à manger le plat de macaroni que la femme de ménage vient de me servir. En tout cas,
j’espère que le bébé se rétablira.
Les enfants ne vont plus tarder ; en attendant, je m’amuse avec ma benjamine. Les deux premières
rentrent et me racontent leur journée ; je les écoute par formalité car mon cœur est ailleurs.
A l’heure habituelle, Stanley rentre; cela se voyait qu’il n’était pas à l’aise et que quelque chose le
troublait. Il se change et nous rejoint, les filles et moi. Chacune a droit à un bisou.
Il se tait un instant puis m’interroge:
- Alors, tu m’expliques pourquoi tu es retournée à l’hôpital ?
Je lui lance la nouvelle toute crue.
- Une nouvelle accouchée est décédée.
- Décédée ? Quand est-ce qu’elle a accouché ?
- Cette nuit; par ma collègue Roukiya; comme officiellement c’est moi qui était de garde, on m’a
fait appel parce que dans les renseignements que j’ai mentionnés, il n’y avait pas le nom et le
contact de son mari.
Stanley fronce les sourcils et m’interroge:
- Personne n’était avec elle ?
- Une dame mais elle est partie ;
- Et pourquoi est-elle partie ?
- Je n’en sais rien ;
- Aucun parent ne s’est présenté ?
- Non, le corps a été mis à la morgue.
- Ah ! Et comment elle s’appelle ?
- Mais Stanley, le nom d’une patiente t’intéresse pourquoi ?
- Mais tu viens de me dire que le nom de son mari n’était pas inscrit; on ne sait jamais ; peut-être
que quelqu’un à qui je vais raconter l’histoire peut la connaître.
Je sens que Stanley a peur; c’est sûr qu’il n’a pas réussi à joindre Sonia de la journée: en effet, j’ai
vu dix appels en absence de sa part. Alors, il veut s’assurer que ce n’est pas d’elle que je parle.
Mais je lui réponds:
- Très bien, elle s’appelle Sonia.
Après avoir entendu le nom, Stanley devient blême. Il passe sa main au visage plusieurs fois, il
commence à transpirer. C’est ainsi, quand la conscience tourmente l’être humain.
- Mais Stanley ! Que t’arrive t-il ?
- Rien de grave ; j’ai juste envie d’aller aux toilettes ; je reviens.
Ah oui ! Il y a même de quoi avoir la diarrhée ; je comprends qu’il ait besoin de se retirer seul !
J’imagine ce qu’il ressent en ce moment. Il n’y a rien de pire que de ne pas trouver de réponse à
ses interrogations intérieures.
Je me demande pourquoi il a agi ainsi ; en quoi ai-je failli ? Le pire, c’est qu’il me le cache ; il se
montre exemplaire alors qu’il mène une double vie.
Je ne vais pas être la seule à souffrir ; qu’il ait également sa part de souffrance. Car au fond, c’est
de sa faute tout ce qui arrive ! Il aurait dû me dire qu’il avait mis une femme enceinte.
Stanley dure tellement aux toilettes que j’entreprends d’aller voir ce qui se passe avec lui. Je le
retrouve dans notre chambre à coucher, allongé sur le lit et réfléchissant à je ne sais quoi.
- Je pensais que tu étais encore aux toilettes !
- Non, j’ai la migraine, j’ai préféré me coucher.
- Mais Stanley ! On dirait que tu as pleuré !
- Pas du tout Raissa, pleurer pourquoi ?
Tu m’as déjà vu pleurer depuis que tu me connais. En plus, pour quel motif vais-je pleurer ?
- J’ai eu l’impression que tes yeux ont larmoyé, Stanley.
- C’est l’effet de la migraine. Raissa laisse-moi tranquille, je veux me reposer.
Pendant la nuit, je ne réussis pas à dormir ; Stanley non plus d’ailleurs ; mais je fais comme si je
dormais ; nous étions tous deux tourmentés; l’oreiller le plus confortable n’est rien d’autre qu’une
conscience tranquille et ni lui ni moi ne l’avons pas en ce moment.
Stanley s’est levé plusieurs fois au cours de la nuit. Je le surveillais du coin de l’œil; il vient
encore de se lever ; je guette ses mouvements ; il a pris des habits et est sorti de la chambre ; peu
après, j’entends le garage s’ouvrir; où va t-il en pleine nuit ?
Certainement à l’hôpital se renseigner sur le bébé et sur Sonia de façon discrète. Il préfère alors
aller en pleine nuit pour ne pas éveiller les soupçons. Je sors en trombe de la chambre et me presse
vers le garage. Il voulait déjà fait sortir la voiture.
- Mais Stanley ! Que fais-tu ? Où vas-tu à quatre heures du matin ?
Il hésite un moment, cherche sa réponse et déclare:
- Je vais à la pharmacie.
- Et pourquoi ?
- La migraine n’a pas cessé ;
- Il fallait m’en parler quand tu t’es décidé à prendre un comprimé ; j’ai des cachets. Viens je te
donne.
Je suis sûre qu’en ce moment, j’énerve Stanley; n’a-t-il pas voulu se jouer de moi? Pourquoi ne
peut-il pas m’avouer la vérité maintenant ? S’il le fait, cela me donnerait aussi le courage de tout
lui narrer en espérant qu’il ne va pas se plaindre à la police.
N’ayant plus un autre argument, il revient à l’intérieur du bâtiment. Nous nous recouchons.
Stanley me demande:
- Au fait, l’histoire que tu m’as racontée m’a beaucoup touché ; et le bébé de la dame ?
- Il avait une insuffisance cardiaque et il a été admis à la pédiatrie; demain, je verrai ce qu’il en
est.
Stanley est abattu et en peine; mais il ne peut pas l’exprimer ; puisque pour lui, je ne sais rien. S’il
se pointe ouvertement à l’hôpital, il sait que je serai informée. Alors, il est dans l’impasse.
Mais j’avoue que Stanley m’étonne ; j’avais cru que pour le bébé, il oserait parler. Puisqu’il faut
bien qu’il le récupère. Mais il ne dit rien alors qu’il sait maintenant que Sonia est décédée et que
le bébé n’a aucun parent si ce n’est lui. Je me dis qu’il finira par le faire, il n’aura d’ailleurs pas le
choix.
Le lendemain tôt, je repars à l’hôpital; je me rends à la pédiatrie pour voir le bébé de Sonia.
- Bonjour docteur ;
- Ah Madame Gobi, comment vous vous portez ?
- Je vais bien docteur ; le bébé de la défunte va mieux ?
- Oui, il reprend de la forme ; mais jusque-là, aucun parent ne s’est présenté ; je pense que nous
allons faire une annonce à la radio, peut-être que des parents se manifesteront.
J’acquiesce pour l’idée; je vais voir le bébé ; il est tellement mignon ! Je me prends subitement
d’affection pour lui.
Que voulez-vous ? J’adore les enfants ; et il en est un ; peu importe comment il est né. Et j’ai
encore plus pitié de lui maintenant que sa mère ne vit plus.
J’entends la voix du pédiatre qui s’adresse à moi.
- C’est triste pour ce petit; jusque-là, le père n’est pas venu. C’est quand même étrange ! Elle doit
aussi avoir des parents mais où sont-ils ?
- C’est une dame qui l’a accompagné ici ; elle dit être son amie et que la défunte est Secrétaire
mais je ne sais dans quelle entreprise.
Selon ces propos, elle vit dans un appartement de location, seule ; son prétendu fiancé passe de
temps en temps. Docteur, si personne ne vient réclamer ce bébé, comment allons-nous faire ?
- Nous en déciderons en réunion de comité de direction.
Je repars voir le nouveau-né et je lui prépare moi-même son lait.
J’interroge une aide-soignante qui travaillait dans la section pédiatrie.
- Est-ce que ce bébé mange bien ?
- Oui, il prend son lait assez souvent mais pleure beaucoup la nuit ;
- Comme tous les bébés d’ailleurs.
- Vivement qu’un parent de sa mère se présente vite ! Si seulement on avait le contact de son
père !
- Il finira par se manifester, ne vous inquiétez pas;
- Non, Sage-femme, ce n’est pas sûr ; nous avons pris le téléphone de la défunte pour fouiller son
répertoire ; la sim n’y était pas mais la mémoire du téléphone contenait le répertoire ; nous avons
appelé les personnes inscrites mais aucune d’elles ne connaissent son mari. C’est quand même
bizarre ! Il y a juste eu un homme qui dit être le père de sa fille. Mais il nous a expliqué que
n’étant plus avec elle, il ne peut chercher son corps; toutefois, il a promis venir aujourd’hui ou
demain. Ce qui m’étonne, c’est qu’aucun des hommes dans ses contacts n’était le père du bébé;
n’avait-elle pas son numéro ?
Je hausse les épaules; seule moi avait la réponse à cette question; elle a bien son numéro sauf que
je l’ai effacé du répertoire. Mais ça, je ne peux le dire à personne.
Je réponds à l’aide-soignante:
- C’est étrange en effet ;
- Celle qui l’a accompagné ne vous a donné aucun nom, Sage-femme ?
- Je n’ai pas eu le temps de mentionner tous les renseignements obligatoires car il fallait vite la
délivrer.
- Malgré tout, cette dame est morte ; dommage ! mais moi, je pense que son père est inconnu,
sinon il se serait présenté.
Je ne réponds plus ; je prends le bébé dans mes bras et je le dorlote pour qu’il dorme. Lorsqu’il est
profondément endormi, je le dépose et je m’en vais.
Lorsque je reviens à la maison le soir, Stanley, certainement pertubé, aborde encore l’évènement.
- Tu sais l’histoire de la dame décédée m’a tellement touché que j’en ai parlé à certaines
personnes qui la connaissent par hasard.
- Ah oui ?
- Oui, elle est Secrétaire et vit seule ; ses parents ne sont plus vivants ; elle est fille unique et elle a
une fille de deux ans récupérée par son père; elle ne fréquente pas la grande famille. Il y a donc
peu de chance que quelqu’un vienne réclamer son corps et le bébé. Dans ces genres de cas, que
faites-vous ?
Je souris intérieurement. Stanley me raconte l’histoire de Sonia parce qu’il la connaît bien ; il me
prend pour une idiote certainement ; je l’ignore.
Mais au fond Stanley me dégoûte ! Quel homme ! Il met une femme enceinte, elle meurt en
donnant la vie à son fils et il n’a même pas le courage d’assumer et d’en parler, juste pour ne pas
montrer qu’il est un homme infidèle !
Sonia, de là où elle se trouve, n’en reviendrait pas ! Puisqu’il ne veut pas parler, compte t-il laisser
le bébé à l’hôpital ?
Je verrai bien ce qu’il a l’intention de faire. Je n’approuve pas son comportement mais je pensais
que pour la mémoire de sa maîtresse et surtout pour son fils, il aurait enfin le courage de parler.
Stanley soupire un instant puis me pose à nouveau la question qui lui brûlait les lèvres:
- Et si personne ne vient réclamer le bébé? Que ferez-vous ?
Monsieur s’inquiète pour son fils ; alors je lui réponds:
- Je ne sais pas ; ce n’est pas moi qui décide. Ce serait le comité de direction.
- Mais Raissa, si une personne se présente comme son parent, exigera-t-on des pièces d’identité ?
Je n’arrive pas à croire que Stanley veuille récupérer l’enfant en cachette. Comment compte t-il
l’élever alors ?
De toute façon, quand il se retrouvera dos au mur, il n’aura d’autre choix que de tout avouer. Mais
quand se décidera t-il à m’en parler ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 7)
- Et si personne ne vient réclamer le bébé? Que ferez-vous ?
Monsieur s’inquiète pour son fils; alors je lui réponds:
- Je ne sais pas; ce n’est pas moi qui décide. Ce serait le comité de direction.
- Mais Raissa, si une personne se présente comme son parent, exigera-t-on des pièces d’identité ?
Je n’arrive pas à croire que Stanley veuille récupérer l’enfant en cachette. Comment compte t-il
l’élever alors ?
De toute façon, quand il se retrouvera dos au mur, il n’aura d’autre choix que de tout avouer. Mais
quand se décidera t-il à m’en parler ?
Je réponds néanmoins à sa question:
- Toi aussi Stanley ! que t’arrive t-il ? On ne va quand même pas remettre l’enfant à n’importe
qui. Comment allons-nous justifier si un jour les vrais parents se montraient ? Ou encore si la
dame qui l’avait accompagnée revenait ?
Je savais là où Stanley voulait en venir; il est en train de réfléchir à la possibilité d’envoyer un ami
ou quelqu’un de sa famille chercher le bébé; mais en même temps, il se dit que si des pièces
d’identité sont exigées, je saurai qui a récupéré le bébé, ce qui peut faire remonter jusqu’à lui. Je
ne comprends pas qu’il ne veuille rien me dire malgré la situation. Pour quelles raisons ?
Si Stanley ne me fait pas confiance, je ne peux pas prendre le risque de tout lui raconter ; il se
pourrait qu’il ne me comprenne pas ; je commence même à me poser des questions sur l’homme
que j’ai épousé: est-ce que je le connais vraiment ?
Aujourd’hui, Sonia est morte et le bébé est seul ; pourtant Stanley s’obstine à garder son secret. Je
ne comprends pas. J’ai même peur de lui.
Toute la nuit, je réfléchis à la situation ; quand bien même ce bébé est le fruit de l’infidélité de
mon mari, je n’ai pas envie qu’il soit abandonné; je suis une mère aussi ; mais dans le même
temps, j’ai peur d’être arrêtée si Stanley connaissait la vérité.
Comme il m’a raconté l’histoire de Sonia et dit qu’il y avait peu de chance que quelqu’un vienne
réclamer le bébé, alors je décide de le récupérer à l’insu de Stanley ; S’il ne veut pas assumer ses
responsabilités, j’aurais au moins eu le mérite d’avoir aidé ce petit garçon.
Avec l’attitude que Stanley me montre, je suis de plus en plus convaincue qu’il ne faut pas qu’il
sache la vérité pour la sécurité de mes filles et pour la mienne; car si cette histoire se savait, je
serai accusée d’avoir tué exprès Sonia par jalousie. Ma vie paisible se transformerait alors en
cauchemar. Je ferai la prison et mes filles en souffriront.
Plus personne ne condamnerait la trahison de Stanley ! C’est moi qui serais accusée de meurtre
par préméditation alors que je ne suis qu’une victime.
Je réfléchis pendant quelques jours; comme je travaillais à l’hôpital, je m’arrange pour convaincre
les décideurs à me laisser le bébé.
Je vais voir le directeur de l’hôpital:
- J’ai une amie qui vient d’accoucher et qui a perdu son bébé ; elle doit encore avoir du lait; je
propose qu’on la lui confie en attendant qu’un parent ne vienne réclamer l’enfant. J’en serai
responsable alors.
Le Directeur posa le problème au comité de direction qui n’y trouva aucun inconvénient et le bébé
me fut confié.
Jusque-là, Stanley n’a pris aucune initiative; il ne faisait que me demander comment se portait le
bébé: c’est tout; je me souviens pourtant que quand Sonia lui avait annoncé le sexe de l’enfant il
avait jubilé. Alors pourquoi aujourd’hui, il tient plus à sa réputation qu’à son fils ?
Quel genre d’homme ai-je épousé ?
Le peu d’amour que j’avais encore pour lui commence à disparaître. Je n’ai plus aucune envie de
rester près de lui. Depuis cette garde de nuit, je me sens mal car ma vie est devenue mensonge sur
mensonge.
Je décide de prendre le bébé avec moi deux jours après que le comité de direction m’ait donné
l’autorisation, le temps qu’il soit complètement en forme. Je n’avais aucune envie de l’emmener
chez moi.
Comme j’avais déjà tout planifié, je me rends immédiatement dans un village où j’avais travaillé
lors de mes débuts d’activité en tant que Sage-femme ; j’y avais tissé de bonnes relations. C’est un
village à peu près à soixante-dix kilomètres de la ville que j’ai dû quitter parce que je devais me
marier et rejoindre Stanley.
J’entre dans la maison de Dame Ayabavi, à qui j’étais attachée dans le temps. C’est une vieille de
soixante-dix ans qui m’aimait beaucoup et qui était très attristée de mon départ du village; je lui
avais promis de revenir la voir, il y a de cela sept ans et j’ai tenu ma promesse une fois. Mais
depuis, je ne l’ai plus revu. Je priais juste pour qu’elle soit toujours en vie et habite toujours au
même endroit.
- Bonjour maman Ayaba.
- Bonjour jeune dame…….oh, oh, oh ! c’est toi Raissa ? Comme tu as changé !
Elle se lève et m’embrasse ; cela fait si longtemps que je ne l’ai pas vu.
- Mais ma fille, tu m’as complètement oublié ;
- Non maman Ayaba, ce sont les occupations ; et la vie de famille n’est pas facile ;
- Tu as d’autres enfants en dehors de ta fille avec laquelle tu étais venue ?
- Oui, je suis mère de deux autres filles, ce qui fait trois.
- Ah, c’est bien ;que Dieu les protège! Pense à les emmener me saluer un jour.
- Avec plaisir maman, quand bien même leur père n’aime pas s’en éloigner.
- Que veux-tu ? C’est son patrimoine.
Nous en rions puis je reprends.
- Maman, où sont tes enfants ?
- La dernière s’est mariée il y a quelques mois et est partie.
- Voilà, maman ma venue n’est pas anodine ; j’ai besoin de ton aide.
- Je t’écoute ma fille.
- J’ai donné naissance à un bébé dont la mère est décédée.
- Oh ! Que s’est-il passé ?
- Dieu seul sait ; mais jusque-là, aucun parent n’est venu ;
- Quoi ! Et le père du bébé ?
- Il ne s’est pas présenté à l’hôpital.
Comme c’est moi qui l’ai accouché, je me sens un peu concernée et je voudrais aider ce bébé
jusqu’à ce qu’un parent vienne le réclamer.
- C’est normal.
- Oui, sauf que maman Ayabavi, je n’ai pas le temps ; avec mes filles et mes gardes de nuit, c’est
déjà pas facile. Alors, je me souviens que c’est toi qui gardais tes petits-enfants ; je suis venue te
solliciter afin que tu m’aides à garder le bébé jusqu’à ce que je te le reprenne. Je vais fournir le
nécessaire.
- Pas de problème ma fille ; je suis là ; je ne fais rien ; ce sera un plaisir.
- Merci maman Ayabavi, je l’emmène dans deux jours.
Deux jours après, j’emmène le bébé de Sonia et de Stanley chez Dame Ayabavi.
Etant du corps médical, je me suis arrangée pour sa fiche de naissance avec laquelle je lui ferai les
formalités d’acte de naissance. Je m’inscris en tant que sa mère et Stanley comme son père. Au
bébé, je donne le prénom Chris.
Je laisse de l’argent à Dame Ayabavi ainsi que des boîtes de lait pour nourissons, des couches
pour le changer et plein d’affaires nécessaires aux soins d’un nouveau-né. Dame Ayabavi a de
l’expérience, elle saura s’en occuper.
De retour à la maison, j’annonce à Stanley que le bébé était mort. Encore un mensonge pour tout
voiler.
De toute façon, jusque-là, il n’a pas eu le courage de le récupérer. Alors, autant qu’il le croit mort
puisqu’il préfère soigner son image ; il a honte que l’hôpital sache que c’est lui le père.
Suite à cette nouvelle du bébé mort, Stanley est devenu pâle ; il n’arrive même plus à manger ; il a
même pris quelques jours au boulot pour se reposer. Je savais de quoi souffrait mon mari: du
remords ; il avait mauvaise conscience ; il se demande certainement si ce n’est pas de sa faute si
l’enfant est mort ; il a manqué de courage pour me dire la vérité et pour aller récupérer le bébé.
Quelle irresponsabilité !
- Stanley, qu’est-ce que tu as au juste?
- Rien, Raissa, je vais aller mieux;
Je le laisse à son trouble. Deux semaines plus tard, j’annonce aussi au comité de direction que le
bébé n’a pas survécu, afin qu’un jour, on ne vienne pas me le réclamer. Je sais que c’est mal
d’agir ainsi mais je préfère que cette histoire soit réellement classée.
De toute façon, le mensonge est un cycle infernal ; quand on commence à mentir, on s’enfonce
encore et encore jusqu’à ce qu’un jour, on réalise qu’on aurait pas dû prendre pareille voie.
Depuis ce temps, je m’arrangeais pour aller voir Chris assez souvent; j’y allais deux fois par mois.
Chris grandissait bien; il a pris du poids et est très beau. Je me surprends à me prendre d’affection
pour ce petit ange. J’aimais lui rendre visite.
La vie continuait son cours. Je n’ai jamais raconté l’histoire à personne car ma tranquillité en
dépendait. Stanley non plus n’a pas parlé.
Avec lui, je faisais comme si de rien n’était mais nos relations se sont sérieusement dégradées ;
nous vivons Stanley et moi comme un frère et une sœur, pas comme mari et femme ; je ne
supportais plus qu’il me touche. Mais je ne voulais pas divorcer pour l’équilibre de mes filles.
Toutefois, je ne lui faisais plus confiance et il ne comprenait pas pourquoi ; mais je ne pouvais pas
parler sans être accusée de meurtre.
Alors, je suis obligée de garder tout au fond de mon cœur ce si lourd secret.
Je me demande encore comment Stanley a pu abandonner cet enfant, sachant qu’il n’avait
personne ? S’il a pu abandonner son propre fils, il peut bien m’envoyer en prison.
Une année est passée et Chris a grandi. Je commence à réfléchir à comment le prendre sans
soupçon, tellement je me suis attachée à lui; on dirait mon propre fils. Finalement, j’ai trouvé une
idée.
J’explique à Stanley que comme nous n’avons pas un enfant mâle, j’aimerais bien en adopter.
Mon mari s’y oppose.
- Si tu veux un garçon, fais le toi-même.
- Comme si je pouvais décider du sexe d’un enfant.
Stanley était catégorique ; pour lui faire changer d’avis, je décide d’aller en douceur ; nos
relations se sont dégradées mais je peux toujours arriver à le faire fléchir sur ce plan; ne dit-on pas
que ce que femme veut, Dieu le veut ?
Lentement mais sûrement, je suis arrivée à faire accepter cette idée d’adoption à Stanley.
Je continue toujours le cycle du mensonge en lui disant que l’enfant était dans un orphelinat; c’est
ainsi qu’un samedi matin, je suis allée chercher Chris pour le faire venir chez nous; il avait alors
bientôt deux ans;
Dame Ayabavi était triste de s’en séparer et je promis lui rendre visite par moments avec Chris.
- Il ne faut plus disparaître cette fois-ci, Raissa ;
- C’est promis, maman Ayabavi.
- Mais Raissa, quand tu auras au moins une journée de libre, passe me voir ; je souhaiterais que
nous discutions sérieusement à propos de cet enfant.
- Est-ce qu’il y a un problème ?
- Non, pas vraiment, je veux juste qu’on parle à propos ; mais j’ai vraiment besoin que tu sois
disponible afin que nous ayons tout notre temps.
- Ok, maman Ayabavi ; je ferai le programme et je reviendrai.
J’installe Chris à l’arrière de la voiture et je démarre. Je me demande ce que dame Ayabavi veut
bien me dire au point où elle me demande d’être totalement disponible.
Les gazouillis de Chris viennent interrompre mes pensées. Il est heureux, il n’a pas de soucis.
Comme je l’envie ! L’enfance trouve son paradis dans l’instant présent.
En effet les enfants n’ont pas de passé, la pureté et l’innocence font leur force.
A l’entrée de la ville où j’habite, je m’arrête à une station pour prendre de l’essence. Chris
commence à pleurer. Je pense qu’il a faim; ce n’est pas un problème car j’avais prévu du yaourt
pour lui.
J’avance légèrement pour garer la voiture pour descendre et lui donner le yaourt. Je m’installe à
l’arrière pour le faire.
J’avais à peine fini quand je remarque une dame à la station qui prenait de l’essence dans sa moto.
J’ai l’impression de l’avoir déjà vu mais je ne sais où; je commence à la fixer et nos regards se
croisent ; soudain, elle détourne son regard de manière étrange. La peur se lisait sur son visage.
Elle paie le pompier et démarre sa moto en trombe.
Mais pourquoi cette dame que je semble avoir déjà vu me fuit ?
Soudain, mes souvenirs reviennent: c’est l’amie de Sonia qui l’avait accompagné lors de
l’accouchement. Mais je me demande pourquoi elle a paniqué en me voyant.
Bref, je ne vais pas me faire du mauvais sang ; elle ne sait même pas qui je suis. Elle a
certainement pensé que si je la reconnaissais, j’allais lui demander pourquoi elle avait quitté
l’hôpital à l’annonce de la mort de Sonia.
Je ne trouve pas Stanley à la maison à notre arrivée mais dès qu’il vient, je lui fais savoir que
Chris est déjà dans notre foyer.
J’explique à Stanley que je me suis déjà arrangée en ce qui concerne les paperasses liées au petit;
il ne chercha pas trop à creuser cette histoire; il n’était pas intéressé; je savais qu’il voulait juste
me faire plaisir, en vue d’améliorer nos relations. Mais il y a longtemps que moi, j’ai cessé de
l’aimer. Je ne peux pas aimer un homme qui abandonne son propre fils juste pour préserver sa
réputation.
Les gens disent que l’amour ne disparaît jamais; mais chez moi, il est bien fini.
- Stanley, le petit est déjà là ; je suis désormais sa mère et toi son père;
- Pffff ! Rien à foutre.
- Il dort en ce moment ; les filles sont très heureuses d’avoir un petit frère et toi aussi, tu dois faire
un effort pour l’accepter ;
- Tu voulais l’enfant, tu l’as eu Raissa, alors arrête de m’ennuyer.
- Il sera le garçon que tu n’as pas eu;
- Mes trois filles me suffisent déjà;
Quel hypocrite ! Stanley a beaucoup changé; où alors, il était tel et c’est moi qui ne le connais pas
bien. Il faut dire que de mon côté, je ne faisais aucun effort pour que les choses aillent mieux ; je
suis juste restée avec lui par convenance et pour ne pas que mes filles souffrent d’une séparation
avec leur père.
Le lendemain matin, la femme de ménage s’occupe de Chris puis l’emmène au Salon; Stanley
était là et lisait un journal; il savait que l’enfant était là depuis hier mais il ne lui accorde même
pas un regard.
Le petit Chris s’approche de lui et va même le toucher; là, Stanley fut obligé de relever sa tête
plongée dans la lecture de son journal.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE
Le lendemain matin, la femme de ménage s’occupe de Chris puis l’emmène au Salon; Stanley
était là et lisait un journal; il savait que l’enfant était là depuis hier mais il ne lui accorde même
pas un regard.
Le petit Chris s’approche de lui et va même le toucher; là, Stanley fut obligé de relever sa tête
plongée dans la lecture de son journal. Dès qu’il vit Chris, son regard s’illumine. Il lui sourit et lui
tend les bras.
- Viens mon petit, comme tu es beau!
Seul moi comprenait ce qui se passait ! C’est le sang qui parlait; Oh ! Les liens de sang sont
terribles.
Certains n’y croient pas et pourtant c’est bien réel. Il y a comme une sorte d’attirance entre eux.
Mais Stanley lui-même ne pouvait pas comprendre ce qui lui arrivait. Il prit Chris dans ses bras et
commença à jouer avec lui. Je les observais sans mot dire.
Depuis l’arrivée de Chris dans notre maison, Stanley a changé; cela se voit qu’il porte ce petit
dans son cœur. Moi-même je prenais soin de Chris comme s’il était mon propre fils.
Je ne nourrissais aucune rancœur envers lui. Mes filles l’adorent; c’est le petit frère de la maison,
le coq de la basse-cour. C’est dans cette atmosphère que Chris vivait. Stanley s’est véritablement
attaché à lui.
Par contre, nos relations Stanley et moi, allaient de mal en pire; je n’étais pas tranquille; je me
disais qu’il a peut-être une autre « Sonia » en ville et qui sait s’il n’a pas d’autres enfants.
Je me refusais pratiquement à lui tout le temps; en fait, le dégoût a remplacé l’amour. Mais dans
tous les cas, comme je l’avais dit, je ne voulais pas aller au divorce pour ne pas déstabiliser
l’équilibre de mes enfants.
Nous sommes alors dans ce climat quand Stanley de lui-même me parle un soir, trois mois après
l’arrivée de Chris:
- Ecoute Raissa, la relation entre nous devient invivable ; je ne sais même plus si j’ai une épouse
chez moi; je pense que le mieux serait de se quitter ;
- Crois-moi Stanley, si je suis encore là, c’est à cause des enfants; pour leur équilibre, je pense
qu’il vaut mieux qu’on évite cette solution.
- On va leur expliquer ; moi je n’ai plus du tout envie de vivre de cette façon ;
- Que proposes-tu alors?
- Si tout redevient comme avant, je peux reconsidérer ma décision;
- Malheureusement Stanley, tout ne peut plus être comme avant ; tu m’as déjà trahi et je n’arrive
pas à oublier.
- De quoi parles-tu, Raissa ?
Oups ! J’ai parlé trop vite ! Alors que personne ne doit savoir et surtout pas Stanley. Il faut que je
fasse attention à ma langue. Alors, je gribouille en guise de réponse.
- Oui, tu m’as trahi ; j’apprends en ville que tu as une maîtresse.
- Donne-moi les preuves alors.
- Je n’en ai pas malheureusement pas.
- Alors, si tu n’en as pas, pourquoi le crois-tu ?
Si seulement je pouvais lui dire ! Si seulement il pouvait savoir que la preuve palpable, c’est Chris
! Si seulement il pouvait savoir que je sais de quoi je parle !
Malheureusement, pour l’instant, je ne peux rien dire.
Il faut dire que j’étais consciente qu’un divorce n’arrangerait pas nos enfants. Et plus que tout
autre chose, je tenais à leur équilibre psychologique.
Les enfants de parents divorcés sont plus perturbés et plus agressifs que les autres. En effet on
remarque qu’ils présentent plus de troubles caractériels. Mes enfants sont trop attachés à leur père.
Pour eux, je suis capable d’accepter l’inacceptable. Néanmoins, je demande à Stanley de me
donner encore un mois pour y penser.
Je ne savais plus comment faire pour que Stanley ne divorce pas; voilà qu’il dit que la seule
condition est que tout redevienne comme avant; seulement moi je ne le supporte plus. Je résolus
d’en parler à mon amie Safiétou pour avoir son avis.
Safiétou est ma collègue la plus proche et avec le temps, nous sommes devenues de grandes
amies. Safiétou est mariée et a quatre enfants. Elle est pondérée et pourrait peut-être me
conseiller. Je me rends chez elle un de mes jours de repos.
- Salut Safi ;
- Tu n’as pas l’air très gai Raissa.
- Je suis dans un dilemme ;
- Que se passe t-il?
- Avec Stanley, ça ne va plus du tout.
- Ah oui ? Mais tu ne m’en as jamais parlé. Que se passe t-il exactement ?
- J’ai découvert qu’il m’a trompé ;
- Tu l’a surpris en flagrant délit ?
- En quelque sorte ?
- Et quelle explication t’a-t-il donné ?
- Aucune, puisque je ne lui en ai pas parlé ; mais depuis, ce temps, sa trahison m’a pertubé et je ne
l’aime plus comme avant ;
- Pourquoi ne lui en as-tu pas parlé ?
- Je ne préfère pas, pour l’instant.
A cause de mes enfants, je ne voulais pas divorcer, juste pour les préserver d’un déséquilibre
moral éventuel.
- Dans ce cas, où est le dilemne ?
- Stanley ne supportant plus mon comportement veut divorcer. Mais si je consens à ce que tout
redevienne comme avant, il veut bien abandonner cette idée; le problème est que moi je ne le
supporte plus et tout ne peut plus être comme avant.
Je n’ai pas voulu raconter la vraie histoire à Safiétou. Elle est mon amie, mais je ne veux prendre
aucun risque. Tout secret partagé n’est plus vraiment un secret ; il faut s’attendre à tout moment à
ce que cela se sache.
Je ne veux pas me retrouver en prison parce que j’ai fait confiance à une amie. Nous disons nos
secrets à nos amies mais elles ont des amies aussi. Et c’est ainsi que de bouche à oreille, le secret
se répand.
Et puis, si je n’arrive pas à garder moi-même mon secret, comment attendre des autres qu’ils le
fassent ?
Safiétou soupire un instant puis me répond:
- Honnêtement Raissa, si c’est seulement pour l’infidélité de Stanley que tu ne l’aimes plus, je
doute fort que tu l’aies jamais aimé ; ne sais-tu pas que les hommes sont des prédateurs ?
J’ose croire que l’homme parfait existe mais je ne l’ai pas encore rencontré. On ne brise pas un
mariage à cause d'une infidélité. C'est juste le signe que quelque chose d'autre ne va pas. As-tu
cherché à savoir ce qui l’avait poussé à faire cela ? Tu aurais dû lui en parler.
Les hommes deviennent plus tendres lorsqu'on leur a pardonné une infidélité de passage.
Sache que si tu ne l’aimes plus à cause de l’infidélité, la fidélité est la qualité la plus rare que tu
trouveras chez un autre homme; leur penchant pour la nouveauté et l’aventure facile est
prononcé ; c’est décevant mais c’est la réalité.
- Tu veux dire par là qu’il n’y a pas d’hommes fidèles ?
- Il en existe mais par les temps qui courent, c’est rare de les trouver; on en rencontre parmi les
hommes qui croient en Dieu et qui veulent faire sa volonté; et même là encore, ils ne sont pas
fidèles par amour pour leur femme, mais pour plaire à Dieu.
Alors, autant que tu prépares ton cœur sinon tu feras un infarctus !
- Ce qui m’a le plus blessé, c’est qu’il fait comme si de rien n’était et comme s’il était très sage.
- C’est juste un professionnel ; tu voulais qu’il te le dise ? Moi je trouve qu’il ne veut pas te briser
le cœur ; il veut apparaître comme un époux parfait pour toi et son entourage.
- J’ai ressenti ce coup comme une haute trahison.
- Et moi alors ? Qu’est-ce que je vais dire ? Mon mari est polygame ; cela veut dire que son
infidélité est même officielle ; pourtant, je suis là. Ce que je veux que tu comprennes est qu’une
femme ne quitte son mari que pour des raisons sérieuses.
- Encouragerais-tu la polygamie ?
- Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire ; Si vraiment tu l’as aimé, tu devrais oublier cet épisode et
donner de la vie à ton ménage. A mon avis, il faut que tu lui en parles.
- Et s’il s’avère qu’avec le temps, tu découvres un côté obscur de ton mari, que ferais-tu Safi ?
- Cela dépend de ce dont il s’agit ; ce qui est sûr, nous avons chacun un côté obscur et il suffit
d’un rien pour nous le faire découvrir. Alors pourquoi condamner l’autre dans ce cas alors que
dans la même situation, on aurait fait pire que lui ?
- Merci Safiétou, je verrai ce que je peux faire pour améliorer le climat entre Stanley et moi.
Honnêtement, la discussion avec Safiétou ne m’a pas été utile ; elle souhaite que je dise à Stanley
ce qui ne va pas ; malheureusement, je ne peux dire la vérité à Stanley puisqu’ il y a eu mort dans
cette histoire et je serai la première suspecte.
En plus, j’ai déjà commencé à mentir en disant que le bébé est mort. Mais je ne peux blâmer Safi
car je ne lui ai pas exposé le problème comme il fallait.
En revenant de ma visite chez Safiétou, je me souviens que j’ai promis à Dame Ayabavi de
revenir la voir. Je programme cette visite pour se dérouler un jour de repos.
Le jour prévu, je me rends au village chez elle:
- Tu en as mis du temps, Raissa; maintenant que Chris n’est plus ici, tu as cessé de venir;
- Ce n’est pas cela, maman Ayabavi ; il faut dire que j’ai oublié ;
- Comment vont tes filles ainsi que mon garçon ?
- Tout le monde se porte bien ; voilà, je suis là comme promis.
- Tu as bien fait ; en fait, je voulais m’entretenir avec toi ;
- Je vous écoute maman Ayabavi.
- Raissa, tu sais, j’ai de l’âge et de l’expérience. A mon âge, je n’ai plus rien à perdre; sache que
ce qu’un jeune ne pourra jamais voir debout, un vieillard peut le voir assis. Si mon cœur me parle,
c’est que je dois t’aider.Me comprends-tu?
- Oui maman Ayabavi mais où voulez-vous en venir ?
- Je veux que tu me racontes la vraie histoire de Chris; surtout, ne me cache rien.
Je suis très étonnée de la requête de Dame Ayabavi.
Je garde le silence un instant avant de lui répondre:
- Mais maman Ayabavi, je vous ai déjà dit que j’ai accouché sa mère qui est décédée.
- C’est l’argument que tu m’as servi; mais Raissa, je te le demande à nouveau; que s’est-il
réellement passé ? Généralement dans ce genre de cas, l’enfant est confié à un orphelinat ou aux
religieux. Mais toi, tu es si gentille, si magnanime que tu as voulu le prendre ! C’est trop beau;
qu’est-ce qui te tracasse vis-à-vis de cet enfant ? De quoi te sens-tu coupable ?
Dame Ayabavi a vu juste; mais je ne voulais partager mon secret avec quiconque, du moins pour
l’instant.
Mon interlocutrice reprend:
- Tu sais, Raissa, la jeunesse est le temps d’étudier la sagesse; mais la vieillesse est le temps de la
pratiquer. Je sais de quoi je parle. Ouvre ton cœur et libère-toi.
Je ne dis rien, je la regarde puis je baisse les yeux en fixant le sol. Elle met la main sous mon
menton pour soulever mon regard vers elle et me dit:
- Raissa, je sens que tu es dans une impasse et tu as besoin d’aide. Je pouvais le lire dans ton
regard à chaque fois que tu venais voir le petit. Mais je ne voulais pas t’embarrasser en te posant
des questions. Je peux aisément deviner que ton âme cache un secret; ne t’en fais pas; dis-moi
tout; je garderai ton secret bien au chaud dans mon cœur; et tu auras l’avantage de recevoir des
conseils qui te seront très utiles.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 9)
- Raissa, je sens que tu es dans une impasse et tu as besoin d’aide. Je pouvais le lire dans ton
regard à chaque fois que tu venais voir le petit. Mais je ne voulais pas t’embarrasser en te posant
des questions. Je peux aisément deviner que ton âme cache un secret; ne t’en fais pas; dis-moi tout
; je garderai ton secret bien au chaud dans mon cœur; et tu auras l’avantage de recevoir des
conseils qui te seront très utiles.
Pour toute réponse, je commence à pleurer. Dame Ayabavi s’adresse de nouveau à moi:
- Je pense que pleurer t’aidera à évacuer ton stress.
Elle se lève puis m’apporte un verre d’eau que je vide d’un trait.
Puis elle poursuit:
- Raissa, sache que l'âme n'a point de secrets que la conduite ne révèle. Il faut que tu mettes de
l’ordre à l’intérieur de toi-même; et mettre de l’ordre passe par la confession; qu’importe le
problème, on trouvera toujours la solution; raconte-moi tout maintenant.
Je garde le silence, hésitant entre parler et me taire.
Dame Ayabavi poursuit:
- Raissa, la chance n’a qu’un seul cheveu; profite de cet instant car tu ne sais pas si tu en auras
encore l’occasion. Vas-y, parle, ne sois pas têtue.
Je prends mon courage à deux mains et je commence:
- Un matin, alors que je venais à peine de rentrer après une garde de nuit, je reçois le coup de fil
d’une collègue qui voulait que je la remplace. Au cours de cette garde de nuit, une femme est
venue accoucher et il s’avère qu’elle était enceinte de mon mari.
Je poursuis en relatant à Dame Ayabavi les évènements exactement comme ils se sont déroulés,
depuis l’accouchement de Sonia jusqu’au jour où je lui parlais.
Dame Ayabavi m’écoute avec attention jusqu’à la fin de mon récit. Puis, elle se prononce:
- Raissa, ta première erreur est d’avoir procédé à cet accouchement; tu croyais que tu aurais eu la
force et la maîtrise de soi nécessaires ? Tu n’es qu’un être humain qui comme tout le monde a des
limites; tu aurais dû expliquer le problème au Gynécologue même si cela signifiait que ta vie
privée soit exposée; est-ce ta faute si Stanley a décidé de se comporter ainsi ?
Pourquoi devrais-tu avoir honte à sa place ? Mais, hélas, ce qui est fait, est fait. Paix à l’âme de
cette femme. Courir après le mari d’autrui l’a conduit dans la tombe.
Avant d’aborder ta deuxième erreur, laisse-moi te dire une chose: même si je ne suis pas du corps
médical, les agressions verbales que tu as eues envers la dame ne peuvent pas la tuer, je n’en suis
pas sûre; C’est peut-être le saignement et même là encore, cela m’étonne que l’on ait pas pu la
récupérer; si tu veux mon avis, elle avait un autre mal. Je te suggère de chercher à voir son dossier
au sein de l’hôpital où elle suivait sa grossesse.
Si tu ne trouves rien d’anormal, cherche à retrouver l’amie qui l’avait accompagnée; son attitude
n’est pas claire; pourquoi a t-elle fui à l’annonce de sa mort ?
- Je me suis dite qu’elle ne voulait pas qu’on lui facture les soins et qu’on lui confie le corps.
Parlant d’elle, je l’ai revu il y a peine trois mois et elle a encore fui.
- Cherche d’abord à vérifier les antécédents de Sonia en matière de santé.
Ta deuxième et plus grave erreur est d’avoir cherché à dissimuler ce qui s’est passé et surtout à
ton mari. Tu aurais dû lui dire que tu as tout découvert; le silence est le pire ennemi d’un couple;
on ne se tait pas sur ce genre de choses.
- J’avais peur qu’on ne me traite de meurtrière.
- Peur de quoi ? ne sais-tu pas que la peur est la chambre noire où les idées négatives se
développent ?
Raissa, sache que qui craint de souffrir, souffre déjà de ce qu’il craint. Tu ne traverseras jamais
l’océan si tu as peur de perdre de vue le rivage.
Et donc, quelle que soit la peur, il faudra la dépasser pour aller de l’avant ; sinon, cette histoire te
rattrapera au moment où tu t’y attendras le moins.
Ta grande erreur a été de vouloir gérer ce problème seule alors que tu as un Dieu à qui tu aurais
pu t’adresser; mais je suis certaine, que tu n’as jamais pensé à recourir à Lui. Tu n’as pas impliqué
Dieu dans ton foyer. Il t’aurait donné le courage nécessaire pour passer aux aveux. Pourquoi as-tu
menti que l’enfant est mort ?
- Maman Ayabavi, si je proposais de le garder immédiatement, Stanley saurait que c’est son fils et
j’ai eu peur qu’il ne l’aime plus que mes filles.
- Tu as eu tort. Mais je te comprends; tu as raisonné par toi-même et tu as cherché des solutions
par ta propre force en oubliant Celui qui t’a créé et qui a permis que tu découvres l’infidélité de
ton mari.
- Que dois-je faire maintenant, maman Ayabavi ?
- Rétablir la vérité ; si tu ne me crois pas, avec le temps, tu découvriras que tu n’avais guère le
choix.
- Et si Stanley me dénonce à la police ?
- Il est mal placé pour te juger; n’a-t-il pas abandonné son bébé juste pour préserver son image
d’homme sérieux ?
Rétablis la vérité et tu verras qu’après tu seras à l’aise. Il ne fera rien de mal contre toi car tu es la
mère de ses enfants et elles ont encore besoin de toi. Et même s’il te dénonçait à la police, mieux
vaut la liberté d’esprit que la liberté physique. Car moralement tu es dans une prison et ainsi, tu ne
t’épanouiras pas ; ta vie ne sera pas heureuse.
- J’ai peur de lui parler toute seule, maman Ayabavi; aidez-moi.
- Je viens pourtant de te dire que la peur ne donne rien de bon; ne laisse pas la peur prendre des
décisions à ta place.
D’accord, je vais t’aider; viens me chercher le samedi prochain ; je saurai comment parler à ton
mari. Il faut que cet abcès soit creusé et en lui parlant, je suis certaine qu’il aura aussi des choses à
dire ; jusque-là, aucun parent ne s’est présenté pour Sonia ?
- Non, Stanley m’avait dit que ses parents ne vivent plus et qu’elle est fille unique ; c’est
seulement le père de son premier enfant qui s’est présenté mais il disait n’être pas en droit de
récupérer le corps.
- Pauvre fille ! Si dans le séjour des morts, il y a une autre vie, elle aurait déjà compris que sortir
avec quelqu'un de déjà pris officiellement n'est pas une partie de plaisir. Je me demande pourquoi
il a fallu qu’elle tombe sur toi.
- Et depuis, elle a gâché ma vie ;
- Non, Raissa, tu t’es laissée gâcher la vie ; et tu as empiré la situation par tes mensonges ; sinon
la vie est très intéressante et avec l’âge, j’ai appris que certaines de nos grandes douleurs
deviennent nos plus grandes forces.
Je suis heureuse que tu aies décidé de tout révéler et ainsi de n’être plus esclave de ce secret.
Je ressens un grand soulagement après cette discussion avec dame Ayabavi.
Enfin ! Cette histoire va se dénouer ; toute seule, je n’aurais pas pu parler.
La situation n’est pas encore décantée et pourtant je me sens déjà légère du fait d’avoir au moins
partagé ce secret avec une personne.
Comme convenu, je me rends chez Dame Ayabavi le samedi pour la chercher ; je découvre sa
maison bondée de monde et les gens dans un calme étonnant ; je remarque certains de ses enfants
que je connaissais et je m’approche d’eux pour m’enquérir de ces nouvelles.
A ma grande surprise, on m’annonce que ma chère dame Ayabavi s’en est allée au cours de la
nuit.
- Je l’ai vu le weekend dernier, qu’est-ce qui s’est passé ?
- Nous n’en savons rien, même hier dans la journée, elle était bien portante.
Pauvre de moi ! Pour une fois que j’ai un début de solution, l’espoir a tôt fait de disparaître.
Je rentre chez moi toute abattue.
Heureusement que j’ai déjà récupéré Chris. Je me dirige vers ma chambre et je m’allonge sur mon
lit, mon avant-bras sur mon front en signe de réflexion.
Dame Ayabavi savait qu’elle n’allait pas être là et me demande de venir ! Mais sait-on le jour où
on part ?
La mort, c’est comme l’amour: elle ne prévient jamais. Autant garder le silence devant ce mystère
de la mort. Je me dis que j’ai de la chance d’avoir eu une discussion avec elle car il faut le dire
elle m’a donné du courage.
Peut-être devrais-je suivre le conseil de dame Ayabavi en me remettant à Dieu !
Parlant de cela, je n’ai jamais eu une relation spéciale avec Lui ; je ne doute pas de son existence,
je sais qu’Il a créé le ciel et la terre mais sans plus ; je n’ai jamais été vraiment enclin vers la
religion; quand j’étais jeune, j’allais à l’église juste parce qu’il fallait y aller ; depuis que j’ai
grandi, je fais peu cas des croyances religieuses. D’ailleurs, Dieu n’est pas un être humain ;
comment pourrais-je lui parler et savoir qu’Il m’écoute ?
Dame Ayabavi m’avait dit qu’Il peut me donner la force nécessaire dont j’ai besoin pour avancer.
Mais elle a oublié de me dire la manière dont je dois procéder. Je suis en ce moment perdue à
force de trop penser.
Je finis par m’endormir sans m’en rendre compte. Lorsque je me réveille, la lumière du jour cédait
déjà sa place à l’obscurité.
Il faut que je participe ne serait-ce par reconnaissance aux obsèques de Dame Ayabavi; elle a
gardé Chris pendant plus d’une année ; je lui dois bien cela. Les jours passent jusqu’à l’arrivée de
celui des funérailles.
Je m’y rends et je prends place au milieu des nombreuses personnes venues rendre un dernier
hommage à Dame Ayabavi.
Je commence à méditer: nous oublions trop souvent que toute vie s’arrête un jour et quand ce jour
arrivera. A quoi bon d’ailleurs y penser ? Puisque cela ne dépend pas de notre volonté.
Les souvenirs de notre discussion, il y a de cela deux semaines me reviennent en esprit. En peu de
mots, elle m’aurait fourni des réponses et donné la piste à suivre.
Je pense bien que je suivrai ses conseils en ce qui concerne le fait d’en savoir plus sur le dossier
médical de Sonia.
L’accouchement a semblé bien se passer et je ne comprends pas d’où venait le saignement. J’ai
vraiment besoin d’avoir la certitude que je ne suis peut-être pas responsable du décès de Sonia. Si
tel est le cas, j’en serai ravie car cette culpabilité que je ressens tout au fond de moi, me ruine.
Toutefois, je ne veux pas me faire d’illusions.
Je pense à nouveau à ce qu’elle m’avait dit sur le fait de recourir à Dieu ; je prends la décision de
commencer à prier peu importe la manière.
Il y a des moments où l'on éprouve un désir terrible de revoir les êtres que l'on a perdus ; Oh
Dame Ayabavi ! Comme j’aurais aimé qu’elle m’aide à parler à Stanley avant de t’en aller !
Pourquoi ne m’a-t-elle pas demandé de m’ouvrir à elle depuis longtemps ? Je réalise que l’on ne
se rend compte de l’importance d’une personne que lorsqu’on la perd.
Ainsi, c’est lorsque nous le désirons le moins que nous nous voyons dans l’obligation de regarder
à travers cette vie qui s’éteint.
Il se peut qu’il soit déjà trop tard, et que la peine qu’engendre cette perte nous fasse pleurer de
façon inconsolable face à cette vie qui a pris fin.
Si nous nous arrêtons quelques instants pour réfléchir, nous nous rendons compte que nous
sommes parfois incapables de reconnaître l’essentiel de notre vie et ce dont nous avons réellement
besoin.
J’avais une mine de sagesse pour me guider et je ne m’en étais point aperçue car je m’étais
solidement enfermée dans mon secret jusque-là jalousement gardé.
Une larme s’échappe de mes yeux suite à cette pensée.
J’étais encore fortement absorbée par mes pensées quand soudain, j’aperçois une jeune dame qui
fait son entrée.
Je suis étonnée de la rencontrer à un tel endroit. Comme on dit, le monde est vraiment petit.
Elle doit certainement être une connaissance aux enfants de Dame Ayabavi. Je la suis du regard ;
elle salue de nombreuses personnes avant de s’asseoir. Elle semble bien familière aux gens ici.
Comme elle ne m’a pas vu, je compte bien lui dire bonjour. Je me lève de ma place et me dirige
vers elle ; peu avant que je ne sois à ses côtés, nos regards se croisent et elle écarquille les yeux de
surprise.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 10)
J’étais encore fortement absorbée par mes pensées quand soudain, j’aperçois une jeune dame qui
fait son entrée. Je suis étonnée de la rencontrer à un tel endroit. Comme on dit, le monde est
vraiment petit.
Elle doit certainement être une connaissance aux enfants de Dame Ayabavi. Je la suis du regard ;
elle salue de nombreuses personnes avant de s’assoir. Elle semble bien familière aux gens ici.
Comme elle ne m’a pas vu, je compte bien lui dire bonjour. Je me lève de ma place et me dirige
vers elle ; peu avant que je ne sois à ses côtés, nos regards se croisent et elle écarquille les yeux de
surprise.
- Bonjour ma chère; est-ce que tu me reconnais ?
- Comment vous oublier Sage-Femme ?
- Ah c’est bien ! Comment va ton bébé ?
- Il a grandi et je suis même déjà enceinte d’un autre ; j’ai deux mois de grossesse.
- Félicitations; tu n’as pas trop traîné; c’est mieux ainsi, tu finis vite et tu passes à autre chose.
- En effet, c’est mon plan; bientôt, je vais commencer les consultations; toujours dans votre
hôpital; vous travaillez toujours là-bas ?
- Oui.
- Tant mieux alors; je vais sûrement vous croiser quelques fois.
- Certainement; alors, Dame Ayabavi est une parente pour toi ?
- Non, mais son fils aîné est un de nos voisins au quartier et est un des amis de mon mari ; en fait,
je ne l’ai même jamais vu ; mais mon mari est en voyage et m’a demandé d’assister aux
funérailles.
- Je te pose la question parce que je t’ai vu saluer beaucoup de gens et j’ai pensé que tu étais
familière à la famille ;
- Pas vraiment Sage-Femme, les personnes que j’ai saluées sont les autres voisins venus aux
obsèques.
- Rappelle-moi ton prénom ;
- Béatrice. Mais Sage-Femme, comment faire pour que ce soit vous qui me recevez en
consultation ?
- Si tu arrives un jour où je ne suis pas là, tu seras reçue par une autre Sage-Femme.
- Mais comment faire pour être certaine que c’est votre jour de travail ? Vous êtes la plus gentille
des Sage-Femmes, je veux que ce soit vous qui m’examinez à chaque fois ;
- Merci Béatrice ; je vais te laisser mon numéro ; appelle-moi quand tu seras prête et je te ferai
savoir le moment où je serai à l’hôpital.
- D’accord Sage-Femme.
Les obsèques de Dame Ayabavi se déroulent bien et nous l’accompagnons à sa dernière demeure.
Je suis infiniment reconnaissante pour ces bons conseils qu’elle m’a donné avant de passer de
l’autre côté.
Je reprends la voie du retour pour rentrer chez moi. Je me sens fatiguée ; désormais, pour les
longues distances, il va falloir que je me fasse conduire. Je pense à elle, durant tout le trajet.
Il faut que je suive ses conseils ; je dois parler à Stanley ; mais je veux bien m’apprêter pour cette
révélation ; pourquoi n’irais-je donc pas vers Dieu comme la vieille Ayabavi me l’a
recommandé ?
Je prends la résolution de voir un homme de Dieu avant la fin de la semaine. Je lui demanderai de
prier pour moi et pour mon avenir ainsi que pour mes enfants; car si Stanley me dénonçait,
l’affaire irait loin. Mais comme Dame Ayabavi a eu à me le dire, je n’aurai plus peur de rien afin
d’éviter que les idées négatives m’envahissent l’esprit.
Je dois reprendre ma vie en main et savoir ce qui m’attend ; je ne vais pas vivre le restant de mes
jours sur le qui-vive.
Comme décidé, je me rends le weekend suivant chez un homme de Dieu et je lui expose tout le
problème sans complexe, ni honte. Ce qui me paraissait hier comme ignoble ne l’est plus ; j’ai
compris que j’ai plutôt besoin d’aide pour sortir de cette impasse ; à la fin de mon récit, mon
interlocuteur me dit:
- Je suis parfaitement d’accord, un seul mensonge découvert suffit pour créer le doute sur chaque
vérité exprimée ; cette vieille dont tu m’as parlé, t’a bien conseillé ; tu dois parler à ton mari avant
qu’il ne soit trop tard. Et par la même occasion d’ailleurs, il devra t’expliquer pourquoi il a
abandonné son propre fils. Tant que tu ne sauras pas la raison, tu auras du dégoût pour lui.
- Est-ce que vous allez m’aider à le faire ?
- Non, tu devras l’affronter seule.
Néanmoins, je vois que le diable a pris contrôle de tes pensées jusque-là.
Pour ne pas qu’il continue à s’introduire dans ta vie, tu ne pourras rien dire à Stanley avant
quelques jours ; je te recommande d’observer un temps de prière avant ce moment car ton avenir
se jouera après cette conversation avec ton mari; n’y va pas alors seul, mais va avec Dieu.
- Homme de Dieu, Dieu nous aide-t-il vraiment ? Puis-je lui faire confiance ? N’est-il pas un
esprit installé au loin dans son ciel ? Quand Dieu veut nous parler, comment le fait-il ? J’ai besoin
de savoir.
- Dieu nous parle à travers un rêve, à travers une vision, à travers une pensée, à travers un
événement qui se produit, à travers une lecture, à travers une chanson, à travers un ami, un parent
ou n’importe quel autre être humain et enfin à travers les écritures saintes.
Raissa, je pense que Dieu t’aime beaucoup car quand bien-même, tu n’as pas eu recours à Lui, Il
t’a envoyé des pistes à suivre. Certaines personnes comme toi savent que Dieu existe mais ne
l’ont pas vraiment accueilli dans leur vie de tous les jours. D’autres font leur vie sans Lui.
Dieu nous aide toujours, mieux encore quand nous le Lui demandons ; Il n’est pas installé au loin
dans un ciel mais Il est là, près de nous ; Il est omniscient et omnipotent. Et la vraie attitude pour
déclencher son action est la foi que nous mettons en Lui, indépendamment de notre religion. C’est
Lui seul qui est habilité à nous aider ; en effet personne d’entre nous n’est parfait, à commencer
par moi, alors que Dieu, par nature, n’a aucun mal en Lui. Quelle religion pratiques-tu ?
- Ma mère, paix à son âme, était musulmane et mon père est chrétien ; quant à moi, je suis neutre.
- Je t’ai posé la question parce qu’il est important de comprendre que ce n’est pas une religion
qu’il faut suivre mais Dieu Lui-même; c’est l’adoration de Dieu qui se manifeste à travers la
religion; c’est-à-dire que la religion est une manière d’adorer Dieu ; la religion nous enseigne les
préceptes divins mais c’est à Dieu que tu dois t’adresser en cas de besoin; ce n’est pas ta religion
qui te rendra agréable à Dieu mais ta foi en Lui et ton obéissance à ses recommandations ; car
Dieu ne regarde pas aux pratiques religieuses, mais à ce qui est dans le cœur de l'homme.
- Merci, homme de Dieu; je pense que je vais m’employer à mettre de l’ordre dans ma vie en
commençant par éliminer les mensonges. J’ai besoin pour cela que Dieu me donne la force de le
faire.
- Il faut que tu comprennes que tu peux t’adresser à Dieu pour toutes préoccupations: quel métier
choisir? Quelle femme ou quel homme épouser? Comment résoudre un problème ? Ou encore
toute autre question de la vie quotidienne.
Aucune question n'est trop grande ou trop petite pour que Dieu n'intervienne. Mais n’oublie pas
qu’il y a des questions auxquelles nous pouvons trouver de réponse nous-mêmes; Dieu nous a
donné une intelligence qui doit nous inciter à ouvrir un parapluie quand il pleut et ne pas attendre
un signe spécial de Lui pour cela !
Après la discussion avec l’homme de Dieu, j’ai pris conscience qu’il y avait un vide entre moi et
Dieu, une séparation que je dois résorber. J’ai compris que je pouvais m’adresser à Lui pour tout,
petites ou grandes choses, comme à un ami qui écoute.
Je réalise alors que la force mentale pour surmonter mes faiblesses et aller de l’avant ne viendra
que de Dieu: merci Dame Ayabavi de m’avoir ouvert les yeux, que la terre te soit légère!
Je commence effectivement à prier en m’adressant à mon Créateur comme aime si bien l’appeler
Dame Ayabavi.
Je Lui parlais comme je me serai adressée à un ami, en croyant de tout cœur qu’Il m’écoute et en
Lui demandant la force de pouvoir tout dire à Stanley.
Je me rends également à l’hôpital où Sonia suivait sa grossesse; étant du corps médical, je n’ai pas
eu grand mal à accéder à son dossier car mes consœurs Sage-Femmes ont compris quand je leur ai
expliqué que la mort de Sonia m’avait intrigué et que je voulais en savoir plus sur sa santé.
Après lecture attentive du dossier médical, je ne découvre rien qui soit alarmant. Quelques jours
plus tard, comme convenu, Béatrice me téléphone pour me prévenir de son arrivée pour sa
première consultation pré-natale.
A sa venue, je la fais entrer en salle d’examen, je la pèse et je note son poids puis je lui fais un
check-up rapide: examen du coeur, des poumons, prise de la tension artérielle.
Ensuite, je lui demande de se rendre aux toilettes pour me rapporter un jet d’urine; ceci me
permettra de rechercher la présence d'albumine et de sucre dans ses urines; en effet, le sucre peut
évoquer la présence d'un diabète tandis que l'albumine permet de mesurer le bon fonctionnement
des reins.
Je poursuis ma routine pour toute femme enceinte en procédant à une palpation de ses seins afin
de détecter la présence de nodules et à un toucher vaginal pour vérifier l'état du col de l'utérus.
A cette étape, Béatrice gesticule en se rétractant et en exprimant un faible gémissement; je la
rappelle immédiatement à l’ordre:
- Que fais-tu, Béatrice? Tu crois que ce sont les mains de ton mari ?
Elle sourit et répond:
- Sage-Femme, que dis-tu là? Je ne suis pas lesbienne.
Nous rions tous deux de cet incident puis je lui demande de descendre de la table d’examen.
Ayant constaté que Béatrice était anémiée, je lui prescris du fer.
Comme elle a déjà son dossier médical au sein de l’hôpital, je fouille pour reporter son groupe
sanguin dans son nouveau carnet de santé ; je termine en lui prescrivant une prise de sang afin de
rechercher également une éventuelle affection ; je n’oublie pas de lui demander de faire une
échographie qu’elle me rapportera lors de la prochaine consultation.
Béatrice, contente de son examen me remercie avec enthousiasme.
- Sage-Femme, merci beaucoup ; puis-je connaître votre nom ?
- Raissa Gobi ;
- Joli prénom ; je vous appelerai désormais Tata Raissa ; j’espère que cette fois-ci mon enfant sera
une fille ;
- Je te le souhaite aussi.
Elle sort de la salle de consultation et je la raccompagne. Avant d’accéder à la cour de l’hôpital, il
faut passer devant la salle d’accouchement.
Dès que nous arrivons à ce niveau, elle s’arrête et me demande :
- Tata Raissa, c’est la seule salle d’accouchement dont vous disposez dans cet hôpital ?
Je trouve sa question intrigante ; alors je cherche à en savoir la cause.
- Pourquoi tu me poses cette question ?
- Parce que je n’aimerais pas accoucher dans cette salle ;
- Ah oui ? Et pourquoi n’aimerais-tu pas accoucher dans cette salle ?
- J’y ai vécu quelque chose de désagréable la dernière fois lors de mon accouchement ;
- Je me souviens t’avoir accouché moi-même; alors, qu’y avait-il de désagréable ?
- Laissez tomber Tata Raissa ; c’est moi qui suis compliquée ; je trouve toujours à redire sur tout.
Merci Tata et à la prochaine.
Je trouve cette réflexion de Béatrice bien étrange mais je ne m’attarde pas là-dessus ; j’avais plein
de choses à faire.
Après quelques jours de prière, je me sens prête pour parler à Stanley.
Je choisis un samedi soir pour l’inviter dans un restaurant au bord de la plage afin que nous
soyons tranquilles pour discuter.
Il faut dire qu’entre temps, ayant suivi les conseils de Safiétou, les choses ont commencé à
s’améliorer entre nous ; mais ce n’était plus comme avant.
Stanley et moi nous installons confortablement dans une salle pour deux du restaurant que j’avais
pris le soin de réserver deux jours à l’avance.
Stanley paraît surpris:
- Que fêtons nous Raissa ?
- Rien du tout, juste une occasion de discussion sérieuse ;
- Il y a si longtemps que nous n’avons pas parlé en tête à tête, Raissa.
- Ce sera un moment de grande discussion, Stanley.Tu sais que depuis deux ans, cela ne va pas ;
notre couple bat de l’aile ; mais avant, commandons d’abord nos plats ;
Une fois, les plats commandés, j’entame la discussion en posant une question à Stanley.
- Dis-moi, Stanley, suis-je une bonne épouse ou pas ?
- Pourquoi cette question ?
- Je voudrais savoir où j’ai failli, Stanley ;
- Mais Raissa, que cherches-tu à insinuer?
- Si je n’ai failli nulle part, pourquoi m’as-tu trompé ?
- C’est la deuxième fois que tu m’accuses d’infidélité en peu de temps; sur quoi te bases-tu ?
- Sonia Gamoué, ce nom te dit quelque chose ?
Stanley sursaute.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 11)
- Sonia Gamoué, ce nom te dit quelque chose ?
Stanley sursaute. Il garde le silence un instant avant de répondre:
- Hmmm; excuse-moi Raissa, je vais aux toilettes; je reviens.
Oui, il va aux toilettes pour reprendre son souffle et qui sait, réfléchir et me sortir un mensonge
peut-être; dans tous les cas, je suis prête à crever l’abcès et tout avouer; Stanley non plus n’y
échappera pas; c’est étrange mais sachant que Dieu est avec moi, je ressens une paix intérieure et
quelle que soit l’issue de mon aveu, je ne crains plus rien car je sais que Dieu a un plan pour moi,
même s’il faut que je traverse une période difficile.
Lorsque le Créateur est notre boussole, nous avançons avec assurance et Il nous oriente dans les
pires épreuves.
Dame Ayabavi avait raison de me dire que qui craint de souffrir souffre déjà de ce qu’il craint.
Que Stanley fasse tout le temps qu’il veut aux toilettes, nous allons nous parler face à face.
Après environ une quinzaine de minutes, Stanley revient. Je l’interroge:
- Tu en as mis du temps aux toilettes; ou bien es-tu allé réfléchir à la réponse que tu vas me
servir ?
- Très bien, va droit au but; qu’as-tu à me dire à propos de Sonia ?
- Je veux que tu me parles de la relation qui te liait avec elle.
Stanley baisse la tête puis la relève et me dit en haussant le ton:
- Je comprends tout maintenant ; on a dû te dire que je sors avec elle; et après que ta collègue l’ait
accouché, tu es passée par derrière pour la tuer par jalousie; c’est bien cela ?
- Personne ne me l’a dit; j’ai eu les informations le soir où elle devait accoucher par son amie qui
l’accompagnait; et je sais aussi que tu es le père de son enfant, ne le nie pas; tu as eu une
conversation avec elle au téléphone et tu étais content d’avoir un fils ; j’ai tout entendu car je lui
ai demandé de mettre le téléphone sur mains libres. Il n’y a jamais eu de Roukiya, c’est moi-
même qui l’ai accouché.
- Je vois, tu l’as tué et tu as aussi tué l’enfant.
- Je n’ai tué personne ; j’ai juste été agressive avec elle et j’ai négligé de bien l’examiner après
l’accouchement car j’étais furieuse.
Parlant de l’enfant, tu es mal placé pour me juger ; n’est-ce pas que tu es son père, pourtant tu l’as
abandonné à son sort ?
Stanley se lève et me demande de l’excuser un instant. Il revient dix minutes plus tard et poursuit:
- Il y a des choses que tu ne peux pas comprendre ; si tu ne te reproches rien, pourquoi est-ce que
c’est maintenant que tu parles ? Je reconnais avoir été infidèle mais je n’aurais jamais imaginé que
je vivais avec une criminelle ;
- Rien ne prouve que c’est par ma faute que Sonia est décédée; et si c’est le cas, alors ce n’est pas
intentionnel ; si j’avais voulu la tuer, je n’aurais jamais procédé à cet accouchement.
- Tu me négliges les nuits ; tu préfères ton travail à moi ; une autre femme me console et me
donne ce que tu n’as jamais pu me donner ; tu as tout découvert, au lieu de te remettre en question
et de m’en parler pour qu’on trouve une solution, tu tues la mère et l’enfant.
- Stanley, je n’ai tué ni la mère, ni l’enf……
Stanley ne me laisse pas terminer ma phrase et me coupe brutalement.
- Tais-toi criminelle ; assassin ; je n’ai voulu rien te dire pour ne pas que tu souffres ; je voulais te
protéger de cette douleur parce que malgré tout, je t’aimais; tu dis que j’ai abandonné l’enfant ;
mais c’est faux ; je savais qu’à l’hôpital, il était en de bonnes mains ; j’étais donc confiant et je
prenais du temps pour réfléchir sur la manière de tout avouer ; le jour où je me suis décidé à tout
te raconter, afin qu’on prenne l’enfant, tu es venue m’annoncer sa mort ; alors, je me suis dit que
ce serait inutile de te blesser en t’avouant tout ; j’ai beaucoup souffert quand tu m’as annoncé que
le bébé était mort et j’en suis même tombé malade.
Tu te souviens ? Moi je suis peut-être un traître, mais toi, tu es une criminelle et jamais je ne te
pardonnerai cet acte ignoble.
A peine Stanley a t-il fini de parler que je vois deux policiers s’approcher de nous; Stanley leur dit
:
- C’est elle ;
Je le regarde étonné; il s’adresse à moi:
- Tu me regardes pour quoi ? Quand je me suis levé tout à l’heure, j’ai appelé la police pour te
dénoncer et je leur ai indiqué ce restaurant; j’ai demandé qu’ils viennent te chercher ; il est hors de
question que je rentre avec une meurtrière.
Les policiers me menottent et m’emmènent avec eux ; j’étais dépassée par la réaction de Stanley ;
mon propre mari et père de mes enfants me fait arrêter ; il ne m’a même pas laissé le temps de lui
dire que je n’ai pas tué le bébé et que c’est Chris.
J’aurais dû comme Dame Ayabavi me l’avait fait remarquer, tout dire dès la découverte de cette
trahison; cela avait été une grande erreur; car voilà aujourd’hui, alors que c’est moi la victime, je
suis accusée de meurtre.
Je comprends que plus on attend avant de régler une situation, plus elle devient difficile à régler.
Je n’aurais pas dû mentir à Stanley que l’enfant était mort ; car aujourd’hui, je découvre qu’il
prenait son temps parce qu’il se disait qu’à l’hôpital, l’enfant était en sécurité.
Il n’avait donc pas l’intention de l’abandonner ; il prenait juste du temps pour réfléchir; l’homme
de Dieu avait raison de me dire que le jour où je parlerai avec Stanley, je découvrirai pourquoi il a
abandonné le bébé.
Je reconnais mes erreurs mais quel que soit ce qui se passe, Stanley n’a pas le droit de me faire
arrêter comme un vil individu. Est-ce parce que le Commissaire est son ami qu’il s’est permis de
donner l’ordre de m’arrêter ?
J’étais ici pour qu’on parle entre adultes et voilà que je prends le chemin du Commissariat. Que
vont devenir mes filles et que va-t-il leur dire ?
Pendant le trajet du restaurant au Commissariat, je ne faisais que réfléchir encore et encore ; mais
je sais maintenant que Dieu est avec moi, j’endurerai cette période difficile avec confiance.
En effet n’est-il pas écrit « quand je marche dans la vallée de la mort, je ne crains aucun mal car Il
est avec moi » ?
Je suis une personne gentille et tolérante ; voilà qu’aujourd’hui, c’est moi qu’on emmène en
prison, un endroit ou jamais je n’aurais imaginé me retrouver dans ma vie.
Sonia est peut-être décédée par ma faute et il fallait que je paie pour cela; ce n’est pas grave ;
j’apprendrai à supporter cette souffrance.
Au Commissariat, on me met dans une cellule où je suis toute seule ; le lendemain, je fus
présentée au procureur qui ordonne que l’on me défère en prison en attendant qu’une procédure
d’enquête soit ouverte; on m’autorise à appeler deux personnes et j’ai opté de téléphoner à mon
unique frère puis à l’homme de Dieu que j’ai connu récemment.
En aucun cas, je ne suis découragée ; j’avais confiance ; ce n’est qu’un moment difficile à
traverser. J’attendrai alors d’être jugée.
Je reçois très vite la visite de l’homme de Dieu ainsi que celle de mon frère ; ils sont arrivés au
même moment, aussi rapidement qu’un éclair.
Mon frère est totalement désemparé:
- Raissa, que s’est-il passé?
- Abdoulaziz, je suis accusée pour meurtre ;
- Hein ! Toi ! Non, ce n’est pas vrai ; tu ne peux faire du mal à une mouche ; raconte moi de quoi
il s’agit.
En présence de l’homme de Dieu, je raconte toute l’histoire à mon frère.
- Pourquoi tu as gardé cette histoire tout ce temps Raissa ? Il fallait au moins m’en parler ; bien,
ce n’est pas grave ; je vais te trouver un bon avocat. C’est la seule chose qui nous reste à faire ;
mais ton Stanley là, il va m’entendre !
Comment peut-il envoyer la mère de ses enfants en prison comme si tu avais pris un fusil pour
tuer sa maîtresse?
L’homme de Dieu me demande d’avoir la foi et de ne pas m’inquiéter.
Voici cinq jours à présent que je suis enfermée ici. Cinq jours, ou plutôt cinq jours et cinq nuits.
Les nuits ont été pour moi bien plus éprouvantes que les journées.
Pendant le jour, les conditions m’ont semblé moins terribles que je ne l’avais imaginé.
Je suis placée pour la semaine, dans le secteur dit des « nouveaux arrivants ». C’est une cellule
sans lumière et sans toilettes. Elle est remplie des détritus laissés par les prisonnières qui
m’avaient précédé.
Malgré tout, je bénis le Seigneur car mon esprit est libre; Dame Ayabavi m’avait dit que mieux
vaut la liberté d’esprit que celle physique; Ma chère dame Ayabavi, même morte, elle continue de
me réconforter à travers les paroles qu’elle m’a laissées.
Mes enfants me manquent beaucoup; quand je parle de mes enfants, il s’agit aussi bien de mes
filles que de Chris; j’ai fini par aimer ce petit garçon comme s’il était le mien, tellement il est
attachant. Mais j’évite de trop y penser pour ne pas déprimer. Mais c’est vraiment dur d’être gaie
quand on a de multiples raisons d’être triste.
Banalement, je viens de passer trois semaines en prison sans que Stanley ne me rende visite. Il n’y
a que mon frère, l’homme de Dieu, Safiétou et quelques collègues qui ont cherché à me voir.
J’avoue que Safiétou m’a beaucoup surprise dans cette situation; elle m’apportait à manger tous
les jours afin de m’éviter d’avaler les mets insipides que l’on nous sert en prison.
A chaque visite, elle devait subir une longue fouille et goûter la nourriture apportée. Cela a dû être
une véritable corvée pour elle.
Avec elle, je me rends compte que les amitiés les plus solides ne reposent pas sur l'intérêt; au
contraire, elles se fondent sur le sacrifice; je me souviens encore de la première visite que Safiétou
m’a rendu en prison et de notre discussion:
- Raissa, comment vas-tu?
- Bien, je tiens le coup; qui t’a informé de ma présence ici?
- N’arrivant pas à te joindre, je me suis rendue chez toi; et c’est là où Stanley m’a dit que tu es en
prison car tu es une criminelle; j’ai voulu en savoir davantage mais il m’a accusé d’avoir monté ce
coup avec toi, vu que nous sommes des amies;
- Je n’arrive pas à croire que Stanley me fasse arrêter;
- Ma chère, ce n’est pas pour rien qu’un penseur a dit que l’être humain est ondoyant et divers.
Stanley te montre son vrai visage ; mais dis-moi, pourquoi ne m’as-tu jamais raconté cette
histoire?
- J’avais peur et je ne voulais pas que cela se sache;
- Je suis ton amie, je t’aurais aidé à trouver une solution; bref, le vin est tiré, il faut le boire; as-tu
déjà un avocat?
- Oui, mon frère m’a déjà trouvé un;
- J’espère qu’il est brillant car il te faut un avocat excellent pour ce procès.
- Je ne l’ai pas encore vu;
- Au fait, une de nos patientes est arrivée te manquer; elle s’appelle Béatrice; j’ai dû lui dire que tu
as été enfermée mais je ne lui ai pas précisé la cause; je lui ai demandé de ne plus compter sur toi
pour le suivi de ta grossesse;
- Tu as bien fait Safiétou, mes enfants me manquent; peux-tu me les emmener?
- Avec la manière dont ton mari m’a parlé la dernière fois, je doute qu’il me laisse les prendre;
cependant, je vais essayer.
Contrairement aux autres prisonnières, j’étais mieux lotie car j’avais des gens pour me visiter, me
réconforter et aussi pour m’apporter à manger. Même si la souffrance est une croix personnelle
qu’il faut porter seul, elle est mieux gérée quand la peine est partagée avec des personnes qui nous
consolent.
Je finissais donc de déguster un des plats apportés par Safiétou quand l’on m’annonce que j’ai de
la visite. Je fus conduite dans la salle de visite où m’attendait l’inconnue.
C’est une très belle femme, qui se tenait là pour me voir.
- Bonjour Madame Gobi, je suis Maître Justine Assaba, l’avocate commise à votre défense.
Je suis étonnée car je m’attendais à un homme comme Avocat.
- Bonjour Maître Justine, ravie de faire votre connaissance ;
- Moi de même Madame Gobi ; mais on dirait que vous paraissez surprise de me voir ;
- En fait, lorsque mon frère m’avait dit qu’il me trouverait un Avocat, j’ai pensé que ce serait un
homme.
- Vous êtes déçue ?
- Non, pas du tout ;
- N’ayez aucune crainte, je gagne toujours mes procès. Maintenant, racontez-moi toute l’histoire ;
ne dites rien que la vérité car on ne ment pas à son Avocat.
Je lui raconte tout sans omettre le moindre détail. Elle m’entretient encore quelques minutes par
des paroles de réconfort:
- Madame Raissa, vous devez garder le moral haut et vous dire que bientôt, vous serez libre ; ceci
n’est qu’une étape de votre vie ; et cette vie nous réserve parfois de grandes souffrances ; mais
chacune de ces expériences nous aide à grandir; il faut donc apprendre à en tirer le positif. Je vous
souhaite beaucoup de courage. Etes-vous croyante ?
- Oui, je le suis ;
- Alors dites-vous que Dieu est plus fort que tout ce qui peut vous arriver et que chaque difficulté
est une opportunité de lui faire confiance.
- Merci Maître Justine pour le réconfort ;
- Bien, je vais partir et commencer à travailler sur votre dossier ; je vous rendrai visite aussi
souvent que c’est nécessaire. A très bientôt.
Maître Justine allait s’en aller quand Béatrice entra dans la salle.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 12)
- Bien, je vais partir et commencer à travailler sur votre dossier ; je vous rendrai visite aussi
souvent que nécessaire. A très bientôt.
Maître Justine allait partir quand Béatrice entra dans la salle.
Elle arbore une mine triste en me saluant:
- Bonsoir Tata Raissa, qu’est-ce qui s’est passé pour que vous vous retrouviez ici ?
- Laisse tomber Béatrice, c’est une longue histoire.
- Racontez-moi cette histoire s’il vous plaît.
- Ok, mais avant, laisse-moi te présenter à mon Avocate; Maître Justine Assaba,c’est Béatrice, une
de mes patientes.
Maître Justine répond:
- C’est intéressant, Raissa ! Une de tes patientes qui vient te voir en prison ! Cela veut dire qu’elle
t’apprécie ; elle pourra alors témoigner sur ta bonne moralité. Et s’il existe d’autres patientes qui
peuvent témoigner, ce serait bien.
De toute façon, la procédure de ton arrestation est tout sauf normale; les policiers n’ont pas à
t’arrêter sans preuve en ne tenant compte que des dires de ton mari; en principe, il devrait porter
plainte et c’est suite à cela que des enquêtes vont s’ouvrir; c’est seulement à ce moment que tu
peux être incarcérée en attendant le procès. J’ai donc l’intention de demander une mise en liberté.
Je reviens dans deux jours pour qu’on en discute. Au revoir;
Madame Béatrice, laissez-moi vos contacts, j’aurai à vous appeler.
Béatrice donna son numéro de téléphone et Maître Justine l’enregistre automatiquement.
Aussitôt qu'elle soit partie, Béatrice m’interroge de nouveau et je lui réponds:
- Béatrice, je suis ici parce que mon mari m’accuse d’avoir tué sa maîtresse.
- Quoi !
- C’est cela même ;
- Jésus, Marie, Joseph ! C’est quoi cette histoire ? Que s’est-il passé entre vous et la soi-disant
maîtresse ?
- Elle était venue accoucher et c’est là que j’ai découvert que c’est mon mari l’auteur de sa
grossesse; cela m’a rendu furieuse et j’ai été agressive avec elle ; après son accouchement, j’ai
négligé de bien l’examiner ; je suis rentrée et c’est quelques heures plus tard qu’on m’a annoncé
sa mort.
- Quelle histoire pathétique !
Vraiment Tata Raissa, vous êtes forte; si c’était moi, je ne peux jamais faire un tel accouchement ;
je vais même la tuer sur place et on en parle plus.
- Ne raconte pas des bêtises, Béatrice. Je n’ai pas le crime dans le sang et je prie que Dieu m’en
épargne; si elle est effectivement morte par ma faute, ce n’est en aucun cas une préméditation.
- Je suis vraiment sidérée ! Votre mari est vraiment sadique ; non content de vous avoir trompé, il
se permet le luxe de vous envoyer en prison. Quel cynisme !
Donnez-moi son nom ; afin que je sache que toute personne de la même famille que lui doit être
évitée comme la peste.
- Ne parle pas ainsi Béatrice, mes enfants portent son nom. Pourtant, je ne pense qu’elles soient de
mauvaises personnes ;
- Mais, tata Raissa, qu’en est-il du bébé ?
- Je l’ai confié à une dame et après je l’ai récupéré et je m’en occupais jusqu’à venir ici ;
- Qu’est-ce qui ne va pas alors avec votre mari ? Vous prenez la peine de prendre soin du fruit de
sa trahison et il ose encore vous envoyer en prison ?
- En fait, Béatrice, il ne le sait pas; il faut dire que j’ai aussi commis certaines erreurs comme le
fait de garder le secret et de lui dire que l’enfant est mort. Donc pour lui, j’ai tué sa maîtresse et
son enfant.
- Et même si ? Il n’avait pas ce droit; en plus, pourquoi avez-vous suivi les policiers ? Ils ne
peuvent pas vous arrêter sans preuves ;
- Il est ami avec un Commissaire. Il a dû l’appeler pour qu’il donne des ordres.
- Voilà ; dans ce pays les lois sont élaborées juste pour le décor ; personne ne les respecte.
Comment se fait-il que quelqu’un se lève et parle, et puis l’autre est arrêtée ? Bref, il faut que nos
dirigeants commencent à prendre conscience de ce fléau. Notre pays s’illustre de manière très
particulière dans le non-respect des lois de la République.
Si notre pays est actuellement à ce niveau de sous-développement, ce n’est pas seulement les
problèmes que nous connaissons et qui ont pour noms: pauvreté, délestage, chômage etc… qui en
sont à la base ; mais essentiellement le non-respect de nos lois, des normes que nous nous sommes
librement fixées.
Que l’on soit simple citoyen ou autorité, le respect des textes et lois de la République devrait être
pour nous, un devoir mais en même temps, une exigence.
- Ne t’inquiète pas pour moi, Béatrice, tout ira bien.
- Mais Tata, quand est-ce que tout ceci s’est passé ?
- La nuit où tu as accouché ;
- Quoi !
- Tu te souviens de la femme grande et claire qui était sur la seconde table ?
- Oui, très bien même ;
- C’est elle.
- Oh !
- Quand elle est venue, tu étais en travail dans la seconde salle ;
- Je m’en souviens mais j’ai pas vraiment fait attention car je souffrais beaucoup ; après, vous
m’avez fait venir dans la salle d’accouchement ; elle avait déjà accouché en ce moment mais est
restée sur la table jusqu’à votre départ avant de mourir ;
- C’est cela l’histoire ; j’ai fini par tout raconter à mon mari et voilà là où il m’a envoyé.
Béatrice garde le silence et soupire ; elle avait un air étrange.
- Tout va bien, Béatrice ?
- Oui, Tata Raissa ; mais dis-moi, si tu n’arrives pas à prouver que tu es innocente, tu seras
condamnée, c’est cela ?
- Oui ; je me demande même comment je peux prouver cela ; j’ai fouillé dans le dossier médical
de cette dame et tout est correct. Alors, tout porte à croire que je suis peut-être à l’origine de son
décès.
Béatrice affiche un air pensif puis déclare:
- Je dois partir Tata Raissa, je reviendrai te voir.
- Mais tu viens à peine d’arriver Béatrice.
- Je dois vraiment y aller Raissa.
Beaucoup de courage. A très bientôt ;
- C’est gentil d’être venue me voir, Béatrice.
Je trouve l’attitude de Béatrice étrange mais je me dis qu’elle doit avoir ses propres occupations ;
pour l’heure, je n’ai besoin que d’une seule chose, c’est de voir mes enfants.
A la prochaine visite de mon Avocate, je lui demanderai s’il n’y a pas un moyen pour qu’on
m’autorise à les voir; mes filles doivent bien souffrir ; même Chris ; jamais je n’ai passé deux
jours loin de mes enfants ; Dieu seul sait ce que Stanley est en train de leur raconter pour les
calmer.
Stanley ! Je pense à lui et j’en conclus définitivement que je ne le connais pas ; si on m’avait dit
qu’il me tromperait, je n’allais jamais croire ; si on m’avait prédit qu’il me jetterait un jour en
prison, j’en mettrai ma main au feu. Je prie juste pour être libérée le plus tôt possible.
Deux jours après la visite de Béatrice, l’un des geôliers vient m’annoncer encore une nouvelle
visite:
- Madame Raissa, je me demande si vous êtes vraiment une criminelle ; vous recevez tellement de
visites ! Apparemment, tout le monde vous aime.
- En tout cas, si je suis une criminelle, c’est que je le suis par accident. Jamais de ma propre
volonté, je ne vais tuer une personne dans ma vie.
- Vous avez encore quelqu’un qui veut vous voir.
Je le suis jusque dans la salle où il m’enlève les menottes ; c’est ainsi ici ; à chaque sortie de la
cellule, je suis menottée ; mais je supporte toute cette souffrance avec confiance que ce n’est
qu’une étape difficile qui va bientôt devenir un lointain souvenir. Une fois dans la salle, je
découvre avec étonnement mon visiteur: c’est le directeur de l’hôpital où je travaille.
- Vous, ici ?
- Oui, pourquoi es-tu si surprise Raissa ?
- En fait, je ne m’y attendais pas.
- Comment tu vas ?
- Bien, monsieur le Directeur.
- Je sais que ce n’est pas facile. Je n’avais rien appris ; il a fallu hier que ton Avocate vienne me
voir pour que je sois informé ; sinon, je serais venu depuis.
- Merci, Monsieur le Directeur, c’est vraiment gentil à vous.
- Raissa, l’Avocate m’a narré le problème ; sans même être là, je sais que tu ne peux pas avoir
planifié la mort de cette dame; dis-moi que je ne me trompe pas.
- Monsieur le Directeur, au début, j’étais vraiment furieuse ; je ne voulais même pas procéder à
son accouchement ; j’ai appelé deux collègues qui malheureusement n’ont pas décroché ; j’ai
hésité à aller informer le Gynécologue de garde car ce n’était pas un cas de césarienne et j’allais
exposer ma vie privée ; vous imaginez donc dans quel état d’esprit j’ai fini par faire accoucher
cette dame ; naturellement, après l’accouchement, j’ai pris soin du bébé et j’ai fait à la mère un
examen rapide, je le reconnais avec désinvolture ; mais je n’avais aucune intention de provoquer
sa mort.
- Je te crois, Raissa ; et je trouve vraiment aberrant que ton propre mari ne veuille pas te
comprendre ; dans tous les cas, j’ai promis à l’Avocate que je témoignerai en ta faveur lors du
procès.
- Merci beaucoup Monsieur le Directeur.
- Tu aurais dû faire appel au gynécologue de garde ; et tu n’aurais pas dû mentir que le bébé est
mort ; mais l’erreur est humaine et je ne suis pas là pour te blâmer mais pour t’apporter mon
soutien ;
- C’est gentil ;
- Quand j’ai appris que le bébé de la dame vit avec toi, j’ai été très heureux; tu n’es pas une
mauvaise personne Raissa; c’est juste que tu n’as pas su gérer cette affaire. Je vais devoir partir ;
tiens bon et beaucoup de courage ; je passerai chaque fois que le temps me le permettra.
- Merci infiniment.
Je dois avouer que je suis surprise par mon séjour en prison car je reçois des visites inattendues ;
je me rends compte que beaucoup de personnes me portent dans leur cœur sauf la principale
personne pour qui je devais être la plus importante.
Lors de la seconde visite de l’Avocate, je lui exprime mon désir de voir mes enfants ;
- Ne crains rien pour cela Raissa ; en tant que ton Avocate, j’ai le droit de prendre une autorisation
pour te les emmener ; je suis une mère aussi ; mais si tu veux mon avis, ce n’est pas bien que tes
enfants viennent te voir en prison ; au moment de leur départ, elles auront mal et tu auras mal ; je
te demande de patienter car dans quelques jours, tu seras libre !
- Quoi !!!! Etes-vous sérieuse ?
- Bien sûr ; je suis en train d’œuvrer pour que tu jouisses d’une liberté provisoire en attendant le
procès ; tu as été arrêtée sans preuves; mais du fait que tu as avoué devant le procureur
qu’effectivement tu as accouché la maîtresse de ton mari et que tu as gardé le secret te rend
présumée coupable.
Mais la procédure est en bonne voie et tu vas pouvoir être libérée sous caution ;
- Maître Justine, c’est quoi être libérée sous caution ?
- La mise en liberté sous caution est la permission écrite d'un tribunal qui autorise une personne
accusée d'une infraction criminelle à sortir de prison en attendant son procès ou une autre décision
dans son dossier;
- Je comprends; est-ce vraiment sûr que cela me sera accordé ?
- Ton casier judiciaire est vierge ; ne crains rien.
- Oh Maître, je dois vraiment être ignorante ; c’est encore quoi un casier judiciaire ?
- Non, tu n’es pas ignorante car le droit n’est pas ton domaine ; et tu fais bien de poser des
questions pour te cultiver car c’est bon de savoir; le casier judiciaire est un document délivré par
le tribunal recensant les condamnations pénales du demandeur ; quand il n’y a aucune
condamnation antérieure, on dit que le casier judiciaire est vierge, ce qui est ton cas.
Rassure-toi, je connais mon boulot, dans quelques jours, tu seras libre et tu pourras attendre ton
procès avec sérénité.
- Merci Maître ;
- Même si tu as menti à tout le monde au début, tu as quand même sauvé la vie au bébé illégitime
et tu en prends bien soin; tous ces actes plaident en ta faveur.
J’ai demandé la permission de fouiller dans le dossier médical de dame Sonia dans son hôpital de
base ;
- Je l’avais déjà fait aussi et je n’ai rien trouvé ;
- C’est effectif; j’ai également interrogé le directeur de l’hôpital, certains Médecins et la plupart
de tes collègues.
- Et alors ?
- Tous, sans exception ont fait un bon témoignage ; tu as bonne presse auprès d’eux ; ils ont même
été surpris ; ils ont tous conclu que si cette dame est décédée par ta faute, c’est que c’est un
accident et rien d’autre.
- Ok, c’est tant mieux pour moi.
- Maintenant, en dehors de tes collègues, as-tu quelques patientes vers qui je pourrai aller ?
- Pas vraiment, vu que je ne garde aucun contact personnel avec les femmes que je suis durant la
grossesse ; mais, il y en a une, Béatrice ; celle dont vous avez enregistré le numéro de téléphone ;
- Ah oui ! J’allais t’en parler; elle n’a même plus attendu que je l’appelle ; elle a cherché mon
contact elle-même et ce matin, alors que je venais ici, elle m’a téléphoné ; elle veut me voir.
- Ah bon ?
- Oui, je lui ai dit que j’allais lui faire signe au cours de la journée.
- Ok ;
- Alors, s’il n’y a plus rien, je vais partir ; prends-bien soin de toi dans cette jungle ; s’il plaît à
Dieu, ma prochaine visite sera pour apporter la décision de justice conduisant à ta libération
provisoire.
- Je croise les doigts, Maître Justine.
- Tout ira bien ; à très bientôt.
A peine, me suis-je séparée de l’Avocate que l’on m’annonce encore de la visite:
- Mais, Geôlier, je pensais qu’il y avait des heures fixes pour les visites ; il est bientôt quatorze
heures ;
- Oui, mais ce visiteur est spécial et on ne peut pas l’empêcher de te voir.
Je souris et réponds;
- Est-ce le Président de la République ?
- Madame, on ne dirait pas que vous êtes une prisonnière ; vous avez de l’humour alors que vous
souffrez !
- Je ne souffre point car c’est Dieu ma force ; pourquoi devrais-je être triste si je sais que bientôt,
je serai hors d’ici ?
- C’est bien, j’admire cette sérénité ; allons voir votre visiteur.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 13)
- Je ne souffre point car c’est Dieu ma force ; pourquoi devrais-je être triste si je sais que bientôt,
je serai hors d’ici ?
- C’est bien, j’admire cette sérénité; allons voir votre visiteur.
Nous nous rendons dans la salle de
visite et je vois un homme que je ne semble pas connaître mais dont j’ai déjà vu le visage une fois.
- Bonjour Madame Raissa ;
- Bonjour Monsieur ;
- Vous ne me reconnaissez pas ?
- Non, nous nous sommes déjà rencontrés ?
-Oui, à une cérémonie et Stanley nous avait présenté;
- Ah ! je vois, vous connaissez donc Stanley ?
- Oui, nous avons fait le collège ensemble; j’étais aussi présent à votre mariage civil;
- Ok, que puis-je pour vous ?
- Je suis venu juste voir comment vous allez ; vous avez dû constater que malgré les conditions
déplorables de vie, vous êtes placée dans l’une des meilleures cellules et que vous êtes seule.
C’est moi qui ai donné cet ordre; Ses propos m’intriguent.
Je ne comprends pas alors je
l’interroge:
- Eh bien ! Je n’ai pas visité les autres cellules pour savoir si la mienne est la meilleure. Et
comment se fait-il que vous donnez d’ordre ici ?
- C’est moi le Commissaire que Stanley a appelé pour venir vous arrêter; ce soir-là, je devais
prendre un vol car j’avais une formation d’un mois à suivre en Suède. C’est pour cela que c’est
maintenant que je viens vous voir.
A cette révélation, ma mine change.
- Monsieur le Commissaire, pourquoi venez-vous me voir ? Est-ce normal ce que vous avez fait ?
Vous avez envoyé vos éléments m’arrêter sans preuves ; juste parce que vous êtes l’ami de
Stanley !
- Raissa, si vous me permettez de vous appeler ainsi; c’est justement parce que Stanley est mon
ami que j’ai envoyé des policiers vous chercher en même temps; non pas pour vous faire du mal
mais pour votre bien.
-Comment ça pour mon bien ? Le Commissaire soupire.
- Tel que Stanley m’a parlé au téléphone, je me devais pour votre sécurité d’agir immédiatement;
en fait, je ne devrais pas le faire sans preuves. Mais le connaissant, j’ai jugé bon d’outrepasser la
loi pour votre propre sécurité; sinon, si vous rentrez avec lui, il pourrait vous tuer;
- Vous plaisantez j’espère, Monsieur le Commissaire ;
- Non, je connais Stanley depuis longtemps et c’est pour cela que je ne le fréquente pas; est-ce que
vous m’avez jamais vu lui rendre visite ?
Je me contente d’être son ami à distance et même là aussi, c’est parce que j’ai une dette morale
envers sa défunte mère, qui a un certain moment de ma vie m’a porté secours; quand Stanley est
en colère, il a des attitudes imprévisibles; c’est d’ailleurs ce qui lui a fait faire la prison par le
passé.
- Quoi ! Stanley a fait la prison dans sa vie?
- Oui, deux fois quand nous étions au collège puis quand il était à l’université;
Cette conversation devient intéressante.
J’interroge le Commissaire:
- Et pour quelles raisons a-t-il séjourné en prison ?
- La première fois, pour un viol et la deuxième fois, pour coups et blessures graves.
- Quoi !
- Oui, tout ce que je vous dis est vrai; avez-vous un Avocat ?
-Oui ;
- Envoyez-le vers moi ; je vais lui donner tous les éléments pour prouver que Stanley est de
mauvaise moralité; d’ailleurs votre Avocat n’a qu’à demander à avoir accès à son casier
judiciaire.
- Commissaire, je n’arrive pas à le croire.
- Raissa, je pense que je vous ai aidé du mieux que je peux.
A bientôt; si vous avez besoin de
moi, n’hésitez pas. Surtout, ne dites jamais à Stanley que je vous ai donné de telles informations.
Je rejoins ma cellule, très dépitée; si le Commissaire dit la vérité, c’est que j’ai vécu pendant des
années avec un inconnu; Stanley ne m’a jamais dit qu’il a séjourné en prison pour viol et pour
violences sur la personne d’autrui.
Quelles facettes cachées de mon mari ! Un véritable hypocrite !
Jusqu’à cette nuit où je rencontrais Sonia, j’avais toujours pensé que Stanley était un bon père et
un mari exemplaire. Si c’est ainsi, alors que Dieu soit loué de ma présence ici !
Autrement, comme le Commissaire le dit, il aurait pu me tuer ! Alors que je pensais qu’être ici
était un malheur, Dieu savait que c’était pour me protéger.
Décidément ! On ne peut prétendre connaître quelqu’un ! Il n’y a que Dieu qui sonde les cœurs et
c’est pour cela qu’il m’a fait découvrir Sonia afin de me révéler une face cachée de l’homme que
j’ai épousé ; malheureusement, je n’ai pas su me contrôler.
Je suis impatiente que Maître Justine arrive. Ça, c’est ce qu’on appelle révélations Scoop !
Stanley a un passé si sale et il veut me faire la morale ! Je suis bien meilleure que lui ! Mais
qu’importe !
Mon but n’est pas d’être meilleure que les autres, mais d’être meilleure que la personne que j’étais
hier. Ce qui est intéressant dans cette histoire, ce sont des informations qui ne vont pas à
l’avantage de Stanley.
Cela fait quatre jours que Maître Justine m’a parlé de la libération sous caution; vivement que la
procédure s’accélère !
J’attendais la visite de Maître Justine avec impatience ; à son arrivée, c’est donc avec beaucoup
d’empressement que je lui annonce tout ce que j’ai appris du Commissaire.
- Maître Justine, j’ai quelque chose de très important à vous dire.
- Ah oui ?
- Mon mari a fait la prison deux fois dans sa vie.
Maître Justine ouvre grandement ses yeux et se prononce:
- Qui t’en a parlé ?
- Son ami le Commissaire qui a envoyé les policiers m’arrêter. Je lui rapporte exactement ce que
ce dernier m’a révélé.
Maître Justine répond:
- Je vais demander à accéder à son casier judiciaire; et j’en saurai plus sur cette affaire; il est de
mauvaise moralité et il ose t’accuser ! Il a déjà perdu d’avance. Je remercie le Seigneur d’avoir
mis ses éléments en ma possession.
Maintenant, j’ai une bonne nouvelle pour toi.
- Laquelle ?
- Je viens de déposer ta décision de libération sous caution à l’administration de la police; d’ici
deux jours, tu seras libre.
Je saute de joie. Je suis si contente ! Je vais enfin voir mes enfants.
-Maître Justine, je n’ai aucune envie de retourner dans la maison de Stanley ;
- Je ne te le conseille d’ailleurs pas;
- Mais je fais comment pour mes enfants?
- J’ai également obtenu l’autorisation pour que tu les voies autant que tu veux; mais pour ta
sécurité, il vaut mieux que tu sois souvent accompagnée; ou que je te les emmène à ton lieu de
résidence puisque j’en ai reçu l’autorisation.
- Merci pour tout.
- Je t’en prie ; je ne fais que mon travail.
Par contre, je n’arrive plus à joindre ta patiente Béatrice ; son téléphone est fermé ;
- Et pourquoi ?
- Je ne sais pas ; mais j’ai comme l’impression qu’elle a des choses à dire.
Sais-tu où elle habite ?
- Non mais je peux remonter à elle. Elle est la femme d’un ami à un des fils d’une vieille dame
que je connais; si j’arrive à retrouver ce fils, je pourrai avoir des informations sur elle.
- Ok, dans tous les cas, les bons puzzles se mettent en place pour ta défense;
- Je ne vois encore rien de consistant; mais bon j’ai confiance; l’homme de Dieu qui me visite
souvent m’a dit qu’avoir la foi, c’est monter la première marche, même si on ne voit pas tout
l’escalier ;
- C’est une citation de Martin Luther King, un pasteur baptiste afro-américain qui a été jusqu’à sa
mort un militant non violent pour les droits civiques des Noirs aux Etats-Unis, pour la paix et
contre la pauvreté.
J’aurais souhaité que le corps de dame Sonia soit encore disponible afin que je fasse faire une
autopsie.
- Et pourquoi parlez-vous au conditionnel Maître ?
- Le corps a déjà été enterré ;
- Par qui ?
- Tu n’es pas sans ignorer que dans notre pays, un corps non réclamé peut être inhumé par l’Etat à
travers ses services compétents, lorsque la famille ne s'est pas manifestée dans les trente jours qui
suivent le décès.
Dans son cas, elle a été mise dans le lot enterré dernièrement. Si tu avais parlé dès son décès,
l’autopsie aurait pu être faite. Mais ce n’est pas grave ; maintenant que tu es en liberté provisoire,
je vais œuvrer pour faire traîner le procès afin de disposer du temps nécessaire
pour rassembler les éléments nécessaires à ta défense.
- Merci Maître Justine.
- Surtout continue de prier ton Dieu, Raissa, Il est le meilleur Avocat.
Deux jours après, mon frère Abdoulaziz vient me chercher et me conduit chez lui. C’est là où, je
vais habiter pour un moment ; ayant obtenu l’autorisation de rendre visite à mes enfants, je me
rends chez Stanley, accompagnée par mon frère.
Je ne le trouve pas à la maison; je
ne trouve que la femme de ménage, qui manifeste sa joie de me revoir.
- Bienvenue Madame ; je suis contente de vous revoir ;
- Merci bien, où sont les enfants ?
- La grande est dans sa chambre ; les autres sont au salon devant la télévision ;
- Comment vont les filles ?
- Elles sont très tristes madame ;
- Et Chris ?
- Je m’occupe bien de lui. Mais il pleure beaucoup parce qu’il veut vous voir. Je continue et je me
dirige vers le salon.
Je vois mes deux dernières filles et Chris sagement assis dans les canapés; dès que les enfants me
voient, ils se lèvent précipitamment pour s’agripper à moi et manquent même de me renverser. Je
ne sais même pas qui prendre en premier ; cet instant d’émotion fait échapper des larmes de mes
yeux.
Ma deuxième fille âgée de sept ans s’adresse à moi:
- Mais, maman, depuis quand voyages-tu sans nous prévenir ? Tu ne nous téléphones même pas.
Et la dernière ajoute:
- C’est vrai, maman, tu n’es pas gentille.
C’est donc ce que Stanley a raconté aux enfants. C’est tant mieux d’ailleurs, je n’aurai pas aimé
que les enfants sachent que j’ai été en prison.
Je leur réponds:
- Il n’y avait pas de téléphone là où je suis partie et j’y suis allée de façon imprévue; mais
maintenant je suis là sauf que je ne vais pas rester ici.
- Comment ça maman ?
-Je vous expliquerai ; allons voir votre grande sœur d’abord;
Je me dirige dans la chambre de ma fille ainée, suivie des autres enfants; elle a eu dix ans la
semaine dernière et je m’étais arrangée avec mon frère pour qu’un cadeau lui soit offert de ma
part.
Une fois dans sa chambre, je ne la vois pas et je remarque le cadeau déposé au bas de son lit; elle
ne l’a pas ouvert. Je sens de l’eau coulée dans la salle de bains et je comprends qu’elle y était.
Je décide de lui faire une surprise
en m’asseyant sur son lit. Les autres enfants s’installent près de moi et ne veulent plus me lâcher.
Cinq minutes plus tard, ma fille sort et me voit.
Elle était surprise mais ne manifesta aucune joie; je m’étonne et l’interpelle:
- Carine, tu n’es pas contente de me revoir? Elle ne me répond pas.
Je me lève et m’avance vers elle.
Je touche son épaule. Elle réagit vivement:
- Ne me touche pas, criminelle.
Mon Dieu ! Quel choc ! Je suis totalement bouleversée; néanmoins, je garde mon sang-froid et je
lui parle:
- Carine ; je suis ta mère ; pourquoi tu me parles ainsi ?
- Mon père m’a dit que tu as tué deux personnes, une femme et son bébé ; je ne veux plus que tu
sois ma mère et je n’aurai plus aucun respect pour toi;
Je mets ma tête entre mes deux mains ; Stanley a monté ma fille contre moi; je la regarde hébétée,
ne sachant pas quoi dire, tellement j’étais dépassée !
Elle s’adresse encore à moi:
-Papa ne veut pas que mes sœurs le sachent mais à moi il a dit la vérité; maintenant tu as fait de
moi la fille d’une criminelle et après ton jugement, mes camarades me pointeront du doigt et se
moqueront de moi. Reste loin de moi.
Entendre ma fille prononcer des paroles aussi dures me fend le cœur; Stanley est allé loin, très
loin.
Comment peut-il raconter des choses pareilles à un enfant de dix ans ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 14)
Entendre ma fille prononcer des paroles aussi dures me fend le cœur; Stanley est allé loin, très
loin.
Comment peut-il raconter des choses pareilles à un enfant de dix ans? C’est un véritable choc
pour moi; je fais un effort surhumain pour tenter de raisonner ma fille aînée.
- Carine, tu ne devrais pas croire ce que ton père raconte ;
- Alors maman, dis-moi ce que tu faisais en prison; ou n’étais-tu pas en prison ?
Ma seconde fille s’introduit dans la discussion:
- Mais maman, papa nous avait dit que tu étais en voyage ! Je ne savais plus quoi répondre à ces
petites filles!
Comment me défendre et comment
leur expliquer pour qu’elles comprennent?
Malgré toute ma déception, j’essaie quand même de gribouiller une réponse.
- Mes enfants, vous êtes encore trop petites pour comprendre certaines réalités de la vie; je vais
partir mais je reviendrai vous voir.
Les deux dernières ainsi que Chris se collent à moi et commencent à pleurer. J’avais également
les larmes aux yeux mais je m’interdisais d’en rajouter à leur peine; mon rôle est plutôt de les
rassurer.
- Ne pleurez pas mes enfants; je reviendrai très bientôt vous voir.
- Non maman, répond ma deuxième fille; je veux partir avec toi.
Abdoulaziz dut se mettre dans la
danse pour les calmer. La femme de ménage aussi vient à mon secours; finalement, elles finissent
par sécher leurs larmes en me faisant promettre de revenir le lendemain.
Lorsque j’arrive au niveau du portail, j’entends la femme de ménage m’appeler en pressant les pas
pour se rapprocher de moi.
Elle me dit:
- Madame, je voulais vous dire que je n’ai pas cru Monsieur quand il m’a dit que vous avez tué
une femme et son bébé.
Je suis restée dans cette maison par amour pour les enfants et par reconnaissance pour votre bonté;
alors, si vous avez besoin de moi, n’hésitez surtout pas. Je suis de votre côté.
Ces paroles de la femme de ménage me touchent énormément.
Alors, je saisis sa main tendue:
- Merci, oui j’aurai besoin de toi, j’ai besoin que tu essaies d’ôter de la tête de Carine que je suis
une criminelle.
- Je ferai de mon mieux, Madame.
Pendant le trajet qui mène de la maison de Stanley à celle de mon frère, les larmes longtemps
retenues devant les enfants commencent à couler. Quand je
regarde le passé, je ne vois rien qui justifie tout ce qui m’arrive.
Mon frère me console:
- Arrête de pleurer, Raissa.
- C’est plus fort que moi ;
- Tout s’arrangera avec le temps; quand tu es face à un problème, nul besoin d'en faire une
montagne de douleur; soit il y a une solution et tu finiras bien par la trouver; soit il n'y a aucune
solution et dans ce cas rien ne sert de te torturer.
Stanley pense qu’il est rusé mais il se trompe.
L’Avocate que je t’ai prise est très compétente; si la preuve de ton innocence est cachée au fond
d’un trou, elle ira trouver.
- Abdoulaziz, je ne crains rien de ce côté-là; elle m’a assez rassuré; mais comprends que j’ai mal
au cœur de voir ma propre fille me traiter de criminelle. Stanley lui a fait un lavage de cerveau.
Pourquoi mêle-t-il les enfants à ce problème ?
- Dans le temps, maman t’avait dit de ne pas épouser le gars-ci mais tu étais aveuglée et tu ne l’as
pas écouté.
- Comment aurais-je pu écouter maman ? Il était exemplaire, rien à lui reprocher.
- Mais malgré cela, notre défunte mère avait senti qu’il n’était pas une bonne personne;
l'apparence est trompeuse; elle t’avait demandé de prier pour votre union mais tu l’avais trouvé
ringarde et vieux jeu; les parents nous donnent toujours des
conseils avisés mais on ne les écoute pas en pensant tout savoir.
Mais bon, l’expérience est la
meilleure des conseillères.
- Comme j’aimerais que maman soit encore là !
- On devrait se rendre compte de l’importance des gens dans nos vies quand ils sont à nos côtés,
pas
quand ils sont partis.
- Tu as raison mon frère, nous devons apprendre à apprécier ce que nous avons aujourd’hui avant
que le temps ne nous fasse regretter ce que nous avions hier.
Une semaine après ma libération, je
fais un tour à l’hôpital.
Je vais d’abord saluer et remercier le directeur de l’hôpital pour sa sollicitude à mon égard lors de
mon séjour en prison; je passe ensuite à la maternité voir mes collègues.
Elles étaient ravies de me revoir ; les commentaires allaient bon train.
- La plus gentille des Sages-femmes est de retour, dit l’une de mes collègues !
- Tellement gentille qu’elle n’a pas pu régler son compte à la maîtresse de son soi-disant mari,
réplique une
autre ;
- Non mais Raissa, tu déçois ! Tu n’as
même rien fait et tu vas en prison; si c’était moi, j’expédie rapidement cette dame et son bébé,
ajoute encore une autre collègue.
- Tu as été bête, complète la quatrième.
- Ah bon ? Et le serment que vous avez prêté ? répondis-je.
- Raissa, tu es de retour avec tes idioties; si tu n’as rien à dire, il faut circuler.
Mes collègues me font vraiment marrer; au fond, elles parlent seulement.
Dans la réalité, elles ne pourront pas faire ce qu’elles disent; elles ne sont pas si sauvages ; en tout
cas, c’est ce que je crois.
Je papote avec elles un moment puis demande à partir.
L’une d’elles m’interroge:
- Et ton idiot de mari ?
- Je n’ai pas de ses nouvelles; l’autre jour, quand je suis allée voir mes enfants, il n’était pas là ;
- Je comprends alors que tu n’habites plus là et tu as bien fait.
Un repris de justice qui joue au saint.
Ce qui est sûr, nous témoignerons toutes en ta faveur.
- Merci à vous toutes ;
- Raissa, tu n’as pas l’air très gai ; arrête de souffrir ; tout ira bien ;
- Je sais, c’est juste que mes enfants me manquent beaucoup ;
- Ecoute Raissa, tu devrais enlever les deux «F» qui sont dans le mot souffrir ; cela donne quoi ?
- Sourire. Et là, elles ont réussi à me faire sourire ; c’est vraiment une chance pour moi d’avoir des
collègues qui m’apprécient.
Tout ceci m’aide à supporter ma peine car quand je pense à ma fille aînée, mon chagrin est si
profond qu’il peut m’engloutir.
Je pense que pour me changer les
idées, il vaut mieux que je reprenne le boulot.
Les jours passent et j’attends toujours le procès ; pour voir mes enfants, je n’ai plus voulu
retourner chez Stanley ; j’envoie mon Avocate les chercher ; au début, Stanley a voulu s’opposer
mais la décision de justice à cet effet, l’a ramené à l’ordre.
Seules mes deux dernières filles et Chris acceptent de me voir; Carine refuse catégoriquement.
Maître Justine m’a fait comprendre que lorsque mon innocence serait prouvée, ma fille reviendrait
à de meilleurs sentiments.
Quelle qu’en soit l’issue, je refuse que l’on traumatise une fillette de son âge
avec une histoire pareille. Elle n’est même pas encore adolescente ! Pourquoi il a fallu que
Stanley mêle l’enfant à ce problème ?
A cet âge, Carine n’est pas capable de gérer ses propres émotions. Elle n’en sera que désorientée,
et cela va la plonger dans le désarroi.
Jamais ma fille ne m’a manqué de respect ; Stanley a dû lui mettre plein de choses dans la tête. Je
pensais à tout ceci, assise dans la cuisine de la maison de mon frère quand sa femme Colette me
fit sentir sa présence.
- À quoi penses-tu, Raissa ?
- À Carine ; je n’arrive pas à croire que Stanley veuille traumatiser cette fillette en lui bourrant le
cerveau ; j’en perds même les mots et je ne sais quoi dire;
- Justement, Raissa, lorsqu’il n’y a plus de mots, ne cherche plus à parler ; le silence aussi a toute
son éloquence ; garde silence et observe et tu verras comment tout va se régler; le temps, est le
second nom de Dieu.
- Depuis le jour où je suis tombée sur cette Sonia, ma vie n’a plus été la même.
Je me rends compte que se trouver à un certain endroit, à une certaine date et à une certaine heure
peut complètement
bouleverser la trajectoire d’un individu.
Ma collègue Juliette ne m’aurait pas demandé de la remplacer cette nuit-là, que je n’aurai peut-
être jamais vu le vrai visage de Stanley.
- Tu as raison chère belle-sœur, il y a de ces choses qui changent à jamais votre vie.
Malheureusement, on a pas toujours le pouvoir d’influer sur ces choses.
- Trois filles Colette ! J’ai fait trois filles avec cet homme ! Je n’avais jamais imaginé dans ma vie
divorcer et faire vivre mes enfants dans une famille monoparentale.
Même tout en découvrant la relation de Stanley avec Sonia, j’ai tout fait pour éviter ce divorce,
juste pour préserver l’image et l’équilibre psychologique des enfants ; mais là, maintenant, il
s’agit de sécurité.
- Ne pourrais-tu pas récupérer les enfants?
- Non, parce que je suis une présumée accusée. Je n’ai le droit que de les voir. C’est une épreuve
pour moi ; malgré toute ma confiance en Dieu, parfois, je suis découragée et je me sens seule,
Colette.
- Tout s’arrangera Raissa ; dans l’épreuve, sois patiente, face au découragement, sois fort. Dans la
solitude, prends courage, Dieu est avec toi.
- Merci Colette et merci pour l’hospitalité que toi et Abdoulaziz m’offrez.
- Que dis-tu, Raissa ? Aziz est ton frère ; s’il ne t’épaule pas, qui va le faire ?
- Je sais, mais tu aurais pu l’en empêcher ; si tu n’étais pas d’accord, il n’allait jamais m’accueillir
; tout le monde sait que la nuit qui porte conseil, c’est la femme qui parle à son mari.
- Oui, je sais qu’une femme peut influencer le cœur de son mari quand ils s’aiment vraiment.
Si Dieu a donné l’autorité à l’homme, il a accordé l’influence à la femme, les deux vont ensemble.
Mais toi-même, tu sais que jamais, je ne lui donnerai de mauvais conseils car la pensée de Dieu
est restée inchangée pour chaque couple et chaque femme aujourd’hui: être une aide, un soutien
pour un homme ; en retour, l’homme doit
être une sécurité et un réconfort pour sa femme.
Le couple qui adopte ce fonctionnement, laissant s’épanouir le rôle de chacun, accomplit à
merveille la volonté de Dieu.
- Tu as toujours été très vertueuse et croyante, Colette; sais-tu que je t’en veux?
- Tu m’en veux ma belle-sœur ? Et pourquoi ?
- Tu es très croyante, mais jamais tu ne m’as parlé de la foi;
Colette sourit et répond:
- Tu n’étais pas très réceptive Raissa; tu m’évitais et à la limite, je dirai que tu ne m’apprécies
guère. Par exemple, tu me rends visite seulement quand j’accouche où quand tu veux voir ton
frère.
Et quand je viens chez toi, tu n’es jamais heureuse de me voir. Alors, je n’ai pas voulu forcer pour
devenir ton amie et m’incruster dans ta vie; mais je vais t’avouer un secret: j’ai toujours prié pour
toi, pour que tu découvres le plan de Dieu pour ta vie. Tu n’avais pas mis ton mariage dans les
mains de Dieu;
- Tu l'as fait toi avant de te marier ?
- Oh que oui; j'ai trop prié avant d'épouser ton frère; mais je suis très contente aujourd’hui que tu
aies compris que quand tu es faible, Dieu est ta force; quand tu as péché, il te pardonne et quand
tu es découragé, il te relève.
- Tu devrais surveiller ton repas au feu, Colette, il va brûler.
Nous rions tous les deux de cette blague et Colette reprend:
- Tu devrais reprendre le boulot, Raissa. Cela te changera les idées et tu pourras attendre ton
procès patiemment.
- J’y ai pensé aussi; je pense reprendre dès le début de la semaine prochaine.
J’espère juste que…… Je parlais encore quand le gardien de la maison de mon frère entre dans la
cuisine et s’adresse à Colette.
- Madame, vous avez de la visite ;
- Qui est-ce ?
- Elle dit qu’elle s’appelle Mademoiselle Hermione;
- Ah oui, répond Colette ; c’est la petite sœur à une amie ; elle devait passer me remettre de
l’argent que lui a confié sa sœur ; Raissa, s’il te plaît, pourrais-tu me surveiller le repas ?
- Avec plaisir.
Colette quitte la cuisine ; je m’approche de la cuisinière ; je soulève le couvercle de la marmite et
le ragoût de pommes de terre que préparait Colette bouillonnait; je
goûte et je constate que le repas est fade; elle a sûrement oublié d’ajouter du sel ; je regarde dans
le placard où elle range ses épices et je ne trouve pas le sel ; je réduis l’intensité du feu et je me
dirige vers le salon afin de lui demander où elle a rangé la boîte de sel.
Je traverse l’allée qui sépare la cuisine du salon mais dès que je franchis le seuil de la salle, je
m’arrête net pour mieux observer la visiteuse de loin; je voulais être sûre que c’est la personne
que j’imagine.
Mais oui ! C’est bien elle !
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 15)
Je traverse l’allée qui sépare la cuisine du salon mais dès que je franchis le seuil de la salle, je
m’arrête net pour mieux observer la visiteuse de loin; je voulais être sûre que c’est la personne
que j’imagine.
Mais oui ! C’est bien elle !
L’amie de Sonia qui l’avait accompagnée;
Maître Justine m’avait dit que son attitude n’était pas claire et que cela aurait été bon de
l’interroger; mais
malheureusement, je ne connais ni son nom ni où elle vit.
Je pense que c’est Dieu qui est à l’œuvre; il ne faut pas que je me montre. Cette femme avait
paniqué la dernière fois qu’elle m’a vu; je revenais alors de chez dame Ayabavi en étant allée
chercher Chris. A son départ, j’en discuterai
avec Colette.
Mais je ne perds point le temps; avec les évènements de la vie, j’ai voulu être pro-active.
Je prends mon téléphone et je compose le numéro de Maître Justine.
- Allô !
- Bonsoir Maître Justine.
- Bonsoir Raissa; que puis-je pour toi ?
- Maître, la femme que nous recherchons est ici ; qu’est-ce que je fais ?
- Béatrice ?
- Non, l’amie qui avait accompagnée Sonia le jour de l’accouchement.
- Ah bon ? Mais qu’est-ce qu’elle fait chez ton frère ?
- En fait, elle est la sœur à une amie de la femme de mon frère ;
- Ok, ne te montre surtout pas; je suppose que ta belle-sœur connaît au moins chez son amie pour
que nous puissions après la retrouver.
- J’espère.
- Dans tous les cas, ne te montre pas sinon elle risque encore de fuir et de commencer à se méfier
dans les tous prochains jours;
- Ok.
- Ne t’avais-je pas dit d’avoir la foi ? je suis sûre qu’elle pourra nous faire avancer. Tout au moins
grâce à elle, on n’en saura plus sur Sonia et sur
ses fréquentations.
- A très bientôt, Maître Justine.
Dès que Colette revient à la cuisine, je m’empresse de la questionner:
- Dis-moi, Colette, tu connais bien la femme qui t’a rendu visite ?
- Oui, pourquoi ?
- Est-elle déjà partie ?
- Oui Raissa, il y a un problème ?
- Pas vraiment ; juste que mon Avocate aimerait bien lui poser des questions.
- Ton Avocate ? Je ne comprends rien; explique-moi plutôt;
- Cette jeune femme est celle qui accompagnait Sonia lors de l’accouchement ;
- Ah ! C’est elle qui a fui ?
- Oui; en plus je l’ai rencontré par hasard une autre fois et elle a paniqué.
Maître Justine pense qu’il est capital de la trouver car elle pourrait nous en dire plus sur Sonia et
nous expliquer pourquoi
elle a fui.
- Dieu est grand; si ce n’est que cela, sois tranquille; je connais très bien sa sœur et je la fréquente;
Hermione n’habite pas avec sa sœur mais vient par moments passer des weekends avec elle.
- Je vais en parler à Maître Justine; mais je t’en prie, ne dis rien à sa sœur;
- Toi aussi ! Je ne peux rien dire car cela peut la faire fuir.
- En fait, j’ai constaté que le ragoût n’a pas de sel;
- Oh zut ! Le sel est fini.
- Ce n’est pas grave, Colette; trop de sel entraîne des effets néfastes sur la santé ; alors, ne pas en
consommer une fois en passant ne peut qu’être que bénéfique;
- Hum ! Ton frère ne va jamais accepter de prendre un repas sans sel; parfois même, il trouve que
ce n’est pas assez salé et en rajoute.
- Ce n’est pas bien; cela peut le rendre hypertendu; l'hypertension est un puissant facteur de
maladies cardio-vasculaires, première cause de mortalité.
Tu devrais commencer à le sensibiliser; souvenez-vous que, même si votre santé est bonne pour le
moment et que vous ne souffrez pas d'hypertension ou d'autres problèmes de santé, les effets de
l'abus de sel peuvent prendre plusieurs années avant de se manifester. Il n'est jamais trop tôt pour
faire attention à son corps.
Mieux vaut prévenir que guérir!
- Là, c’est un agent de santé qui parle;
- C’est cela, moque-toi bien.
Colette éclate de rire; au fond, je me rends compte que cette femme
que je n’ai jamais apprécié est très ouverte et très sympathique; il faut s’approcher des gens pour
mieux les connaître; le problème avec moi est
que je n’ai jamais voulu faire cet effort; je voulais qu’Abdoulaziz épouse ma meilleure amie à
l’époque; cela n’a malheureusement pas été le cas car mon frère a rencontré et préféré Colette.
Alors, je haïssais Colette rien que pour cela.
Aujourd’hui, je me rends compte que j’ai eu tort de l’avoir gardé à distance. Elle est très vertueuse
et m’aurait sûrement guidé vers le chemin divin.
Si j’avais été croyante, je n’aurais pas géré la découverte de Sonia de cette manière et je ne serai
pas aujourd’hui inculpée pour ce dont je ne suis peut-être pas l’auteur.
On dit souvent qu’un moment de patience dans un moment de colère nous épargne des moments
de regrets. En tout cas c’est une leçon que je retiendrai à vie.
Aujourd’hui, j’attends la visite de Maître Justine avec impatience ; en effet, elle doit venir me
chercher pour que nous nous rendions chez Hermione, l’amie de Sonia; entre temps, Colette nous
a indiqué chez son amie où Hermione passait ses fins de semaine.
Je regarde sans cesse ma montre ; pourquoi Maître Justine met autant de temps ? Je suis vraiment
impatiente ; je téléphone mais elle ne décroche pas ; le temps me paraît très long ; l'attente d'une
chose ardemment désirée donne au temps une longueur extrême ; l’attente est plus dure à
supporter pour le feu.
Je commence sérieusement à angoisser. Colette fait la remarque et me réconforte:
- Cesse de te faire du souci, Raissa ; elle viendra ; c’est sûrement l’embouteillage sur la voie;
- Mais dans ce cas, pourquoi elle ne décroche pas ?
- Calme-toi, même si à cause d’un empêchement, Maître Justine ne venait pas aujourd’hui, ne sois
point ébranlée; dis-toi, qu’enfin de compte, tu ne sortiras pas perdante de cette histoire; en tout
temps, sois optimiste et garde toujours le moral car un croyant ne panique pas; quelle que soit
l’orientation du vent, il sait que tout finira bien pour lui car tout concourt au bien de ceux qui
aiment Dieu.
C’est l’optimisme qui conduit à la victoire. Ton inquiétude n’enlèvera pas ton problème ; au
contraire, elle t’enlève ta paix ; en tout temps, sois sereine car Dieu comme source de ta force
devrait te donner l’assurance suffisante que tu peux passer par quoi que ce soit.
Colette n’a même pas fini de parler quand le gardien vient nous annoncer que Maître Justine
venait d’arriver ;
Colette reprend:
- Ne t’ai-je pas dit ?
Allons vers elle ; Nous nous avançons toutes les deux vers Maître Justine.
- Bonsoir Maître Justine; vous n’êtes pas du genre à être en retard;
- Je suis désolée Raissa ; un accident avait eu lieu sur la voie et la circulation a été bloquée ;
- Je vous ai téléphoné en vain ;
- Justement, la précipitation pour ne point être en retard a fait que j’ai oublié mon téléphone
portable au Cabinet ; je ne l’ai donc pas sur moi.
- Ah ! Je comprends.
Intérieurement, je ris de moi-même et de toute l’angoisse que j’avais ressentie; Dame Ayabavi
avait raison de me dire que la peur ne conduit à rien de bon sauf qu’à développer les idées noires.
En effet, si je fais vraiment confiance au Créateur, pourquoi devrais-je paniquer ? Je dois essayer
de lui faire confiance en toute circonstance car Il est au contrôle. Avec mon Avocate, nous nous
rendons par surprise au domicile de la sœur de Hermione.
Pendant le trajet, je l’interroge:
« Dieu est grand ; Maître Justine, pensez-vous que cette dame pourrait avoir quelque chose avec
cette histoire ?
-A priori non ; mais je le saurai après avoir discuté avec elle ; dans tous les cas, elle nous parlera
de Sonia et certaines informations pourraient nous faire avancer ; dans ce genre de dossier, aucune
information n’est à négliger car c’est souvent un petit détail qui est
l’élément capital.
Nous arrivons au lieu et sommes reçues par la sœur de Hermione au prime abord.
C’est Maître Justine qui introduit:
- Bonjour madame ; je suis Maître Justine Assaba; je souhaiterais m’entretenir avec votre sœur
nommée Hermione.
- Y a-t-il un problème Maître ?
- Non, pas vraiment; j’ai juste besoin d’elle pour élucider un dossier.
- Prenez place; je l’appelle.
Hermione mit une éternité à apparaître ; je la comprends ; elle devrait sûrement s’inquiéter quand
sa sœur lui aurait dit qu’une Avocate voudrait s’entretenir avec elle; c’est certain qu’elle s’est
posée mille et une questions. Finalement, elle se décide à nous recevoir.
Dès que Hermione me voit, son regard change ; elle passe du stress qui se lisait clairement à la
panique; elle se contenait à peine; je ne sais pas si j’ai bien vu mais j’ai eu l’impression qu’elle
tremblait.
Maître Justine prend les devants pour la rassurer.
- Bonsoir mademoiselle Hermione. Je suis Maître Justine Assaba et je suis là pour vous poser
quelques questions dont les réponses me seront très utiles pour l’avancement d’un dossier.
- Ok ; que voulez-vous savoir ?
- Asseyez-vous ; Sa sœur nous demande si elle peut assister à l’entretien ; Maître Justine répond
négativement ;
- Quand nous aurons besoin de vous Madame, nous vous ferons appel ; pour le moment, il vaut
mieux que votre sœur soit seule avec nous; mais n’ayez crainte, c’est rien de grave.
Après que la sœur d’Hermione se soit retirée, Maître Justine commence:
- Madame ou Mademoiselle ?
- Mademoiselle ;
- Ok, Mademoiselle Hermione, je suis là pour vous interroger sur Dame Sonia Gamoué, décédée
depuis bientôt deux ans.
Elle devient agressive:
- Qu’est-ce que j’ai à y voir ?
- Soyez à l’aise et détendue, Mademoiselle Hermione ; je veux juste votre aide pour avancer dans
ce dossier ; reconnaissez-vous avoir accompagné Dame Sonia à l’hôpital pour son
accouchement ?
- Oui, c’est exact ;
- Ok, quelle était la relation entre vous ?
- Sonia était une amie.
- Depuis quand la connaissez-vous ?
- Disons, une année avant son décès;
- Où travaillait-elle ?
- Elle était Secrétaire aux entreprises Colmax et fils.
- N’avait-elle pas de parent pour l’emmener à l’hôpital ?
- Elle est orpheline; en fait, je suis venue ici avec elle parce qu’elle était en congé de maternité et
s’ennuyait; nous n’avions pas prévu qu’elle accoucherait ce soir-là;
- Ok ; était-elle mariée ?
- Non ;
- Connaissez-vous l’auteur de sa grossesse ?
- Connaître est trop dire ; je l’ai juste vu une fois, la nuit et je ne pense pas que je le reconnaîtrai si
je le rencontrais.
- Très bien ; connaissez-vous cette dame?
Maître Justine me désignait; Hermione répond:
- Oui, c’est la Sage-femme qui s’était occupée de Sonia à son arrivée.
- Ok; pourquoi alors avez-vous fui lorsqu’on vous a annoncé son décès ?
Cette question était apparemment celle que redoutait Hermione ; son regard change
automatiquement.
Elle soupire et instinctivement passe sa main sur sa tête, signe de panique.
Maître Justine reprend :
- Mademoiselle Hermione, répondez à la question s’il vous plaît. Elle se lève précipitamment et
nous demande de l’excuser un moment parce qu’elle se sentait mal.
Dès qu’elle disparaît, j’interroge
Maître Justine:
- Pourquoi panique t-elle autant ?
- Ce qui est sûr, qu’elle prenne tout son temps. Elle finira par répondre à la question ;
- Oui, mais elle peut mentir;
- T’en fais pas, j’ai de l’expérience, si elle ment, je saurai; sois tranquille ; l’essentiel est de l’avoir
retrouvé. Ce dont je suis certaine, c’est qu’elle cache une information. Au moins, nous savons
maintenant où Sonia travaillait.
Nous attendions le retour d’Hermione quand sa sœur vient vers nous:
- Que se passe t-il avec ma sœur, Maître ?
- Rien du tout ; pourquoi cette question ?
- Elle se sent mal ; elle vomit ; elle dit qu’elle ressent des crampes au niveau du ventre; je sens
que ça ne va pas. Cela ne m’étonne pas ;
Hermione avait visiblement trop peur; en tant qu’agent de santé, je savais qu'une grosse frayeur
pouvait parfois provoquer des crampes d'estomac.
Maître Justine pour répondre à la sœur d’Hermione, l’interroge:
-N’avez-vous pas interrogé votre sœur ?
-Oui, mais elle ne m’a pas répondu;
- Où est-elle ?
- Dans la salle de bains; comme elle s’est salie, elle prend un bain ;
Maître, s’il y a un problème, dites-le moi.
- Nous étions juste en train de lui poser des questions quand elle s’est excusée un moment ; c’est à
propos du décès d’une de ses amies, Sonia Gamoué.
- Ah oui ; je m’en souviens ; paix à son âme ; c’est de cette maison qu’elle se sont rendues à
l’hôpital pour qu’elle puisse accoucher ; malheureusement, elle n’a pas survécu.
- C’est effectif; mais votre sœur avait fui quand on le lui avait annoncé ; et je cherche à savoir
pourquoi ?
Visiblement, la sœur d’Hermione, à voir l’attitude qu’elle vient d’adopter n’était pas informée.
Elle s’étonne.
- Fuir ? Vous en êtes sûre ?
- Bien sûr ;
- Mais, pourquoi aurait-elle fui ?
- Apparemment, vous n’en saviez rien, Madame.
Elle ne nous donna aucune réponse; cela se voyait qu’elle se remettait à peine de sa stupéfaction.
Elle se lève brusquement et se dirige à l’intérieur du bâtiment. Pourvu qu’elle n’aille pas
demander à Hermione de dissimuler la vérité !
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 16)
Elle ne nous donna aucune réponse ;
cela se voyait qu’elle se remettait à peine de sa stupéfaction.
Elle se lève brusquement et se dirige à l’intérieur du bâtiment. Pourvu qu’elle n’aille pas
demander à Hermione de dissimuler la vérité !
Je m’adresse à Maître Justine:
- Maître, je pense que sa sœur veut l’obliger à tout lui raconter ; et si c’est grave, elle peut vouloir
la protéger.
- Reste cool; dans tous les cas, si elle ne veut pas coopérer, il y a d’autres moyens de ne pas perdre
sa trace; ne sais-tu pas que lorsque nous les Avocats avons un dossier en main, nous faisons tout
ce qui est humainement possible pour avoir tous les éléments nécessaires à la défense de nos
clients ?
- Que voulez-vous dire ?
- Nous nous faisons beaucoup de relations que nous mettons à contribution; nous ne lésinons pas
sur les investissements financiers pour parvenir à nos fins; c’est pour cela que les Avocats coûtent
cher; je te donne un exemple: si je ne veux pas perdre la trace d’un suspect, je peux faire recours
aux services d’un détective; ne t’inquiète pas donc ; j’ai déjà mis ma machine en branle; même si
elle fuit par une porte, je la retrouverai.
L’essentiel était d’avoir mis la main sur elle.
- Mais que peut-elle donc cacher ?
- Je ne sais pas; elle finira par le dire.
Soudain, la sœur d’Hermione revient sur la terrasse où nous étions installées en tirant Hermione
par le bras.
Elle s’adresse à Maître Justine.
- Maître, je ne sais pas ce que ma
sœur cache ; je n’ai jamais été informée qu’elle avait fui de l’hôpital à l’annonce de la mort de sa
copine.
Je lui ai posé des questions tout à l’heure mais elle n’a rien voulu me dire.
Maître Justine répond en s’adressant à Hermione.
- Mademoiselle Hermione, il faut que vous nous dites ce que vous savez sur cette affaire; c’est
très sérieux ; si non vous pourriez être considérée comme suspecte.
-Maître, commence Hermione ; j’aimerais bien mais je ne peux pas ; je préfère encore aller en
prison que d’ouvrir la bouche ;
- Comment !!!!!!!! Tu préfères aller en prison que d’ouvrir ta bouche ?
- Oui, au moins en prison c’est ma liberté que je vais perdre avec l’espoir de la retrouver un jour ;
mais si je parle, c’est ma vie que je vais perdre.
Là, nous étions toutes hébétées; Hermione vient de nous certifier qu’elle sait quelque chose ; mais
elle ne peut rien nous dire de peur de perdre sa vie. Quelle situation !
Une personne qui préfère aller en prison plutôt que de parler sera difficile à convaincre.
Maître Justine soupire longuement ;
elle vient certainement de comprendre que nous sommes confrontées à un obstacle sérieux ;
Elle s’adresse à nouveau à Hermione ;
- Cette Sage-femme qui a accouché Sonia, la voici ; c’est elle qui vous avait reçu et tu l’as
confirmé ; aujourd’hui, elle est accusée d’avoir tué Sonia ; si tu sais quelque chose et que tu ne dis
rien, elle ira en prison et tu auras la conscience gênée ;
- Maître, dans tous les cas, je n’ai aucune envie de mourir et si je parle, c’est ce qui arrivera
certainement.
Pour la tirer d’affaire, je ne peux pas sacrifier ma vie.
- Nous allons te protéger Hermione ;
- Vous ne pouvez pas ;
- Je comprends que vous avez été témoins d’un fait et que vous avez été menacés ;
- Ne vous gênez pas, Maître ; je ne dirai rien ;
- Ok, par contre dis-moi une chose ; pourquoi as-tu fui la deuxième fois que tu as croisé la Sage-
Femme à une station d’essence ?
- Je ne voulais pas qu’elle me pose
des questions ;
- Quelles questions pourrait-elle te
poser si tu ne te reproches rien ?
- En fait, je me suis mal exprimée ; je ne voulais pas qu’on me voie avec elle ;
- Et pourquoi ?
- On sait jamais ; si on nous voit ensemble, on pourrait penser que je
suis en train de tout dévoiler ; ma vie serait alors en danger.
- Ok, comme tu ne veux rien nous dire, nous sommes obligées de partir ; Mais si tu changes
d’avis, voici mon numéro de téléphone ; appelle-moi ;
- Ok, c’est compris ;
Maître Justine et moi prenons congé d’Hermione et de sa sœur ; j’étais déçue de savoir que
Hermione détenait une information qu’elle s’obstinait à cacher ; mais en même temps, j’étais
heureuse d’apprendre qu’il se pourrait que la mort de Sonia ne soit pas due à ma négligence; j’ai
donc une chance de m’en sortir ; je suis la première à aborder le sujet :
- Maître Justine, pensez-vous que Hermione changera d’avis ?
-Oui .
- En êtes-vous sûre ?
-Sûre et certaine si nous le voulons ;
- Je ne saisis pas le sens de ce que vous dites ;
- Mets-toi sur tes genoux avec foi et je ferai de même ; ce n’est pas à nous qu’est le combat mais à
Dieu ; Il fera fléchir son cœur et nous aurons gain de cause ; il y a des situations qui ne se règlent
pas
humainement mais spirituellement.
- On dirait que Dieu vous aide beaucoup dans votre travail, Maître;
- En tout cas, sache que qui croit en Dieu ne croit plus au hasard mais à la providence et j’ai foi
que s’il a permis que nous retrouvions Hermione, c’est qu’Il est capable de la faire parler; c’est
juste une question de temps ; ne te mets en souci pour rien mais en toute chose, expose tes besoins
à Dieu;la prière est une force; je constate parfois des doutes en toi ; sois positive car chacune de
tes pensées positives est une prière silencieuse.
Sache que nos doutes nous
envahissent et sont à l’origine de nos échecs. Nous manquons l’objectif que nous voulons
atteindre par crainte seulement de ne point l’atteindre.
Qui doute de sa victoire l’a perdu d’avance. Là où règne la confiance en Dieu, disparaît la peur et
le doute.
-Vraiment, on dirait que Dieu a décidé de me prendre en main ; partout où je passe, on me parle
de Dieu ; Dame Ayabavi, l’homme de Dieu, Colette et maintenant
Maître Justine ; je suis encerclée par les paroles divines ; elles sont bien ancrées dans ma tête et
s’envoleront difficilement.
A partir de ce soir-là, je me suis vraiment consacrée à la prière ; il m’était indispensable que
Hermione parle; mais quel secret peut-elle détenir qui soit aussi grave au point qu’elle ait peur
pour sa vie et préfère aller en prison ? Oh mon Dieu ! Si seulement elle pouvait briser son
silence !
Pendant quelques jours, j’ai même oublié la situation tendue avec ma fille Carine pour ne me
concentrer que sur Hermione; j’avais maintenant l’assurance que tout se règlera mais quand ?
La date prévue pour reprendre le boulot étant là, c’est avec enthousiasme que je recommence à
travailler ; compte tenu de la situation spéciale que je traverse, le directeur de l’hôpital pour ma
sécurité m’a exempté des gardes de nuit.
J’ai continué avec la prière et Maître Justine, avec ses investigations; elle a d’ailleurs tout fait
pour influer sur la date du procès et le repousser loin.
Entre temps, elle s’est rendue dans l’entreprise où Sonia travaillait et a reçu pas mal
d’informations concernant ses habitudes, ses fréquentations et autres.
Béatrice est toujours injoignable et je n’ai pas réussi à retrouver le fils aîné de Dame Ayabavi.
Malgré le tableau sombre, je gardais espoir car je reconnais que mon Dieu peut tout pour moi et
que rien ne lui est impossible.
Un dimanche après-midi, le second fils de mon frère se plaignait des maux de ventre. Abdoulaziz
et Colette n’étaient pas à la maison.
Je laisse les enfants de mon frère à la domestique et décide d’aller à la pharmacie prendre un
médicament pour calmer les coliques du malade ; je suis agent de santé donc je savais quoi faire
pour le soulager.
Je sortais de la pharmacie quand je
croise Stanley qui y entrait.
Nous nous regardons un long moment puis je brise le silence.
- Bonjour Stanley ;
- Bonjour Raissa; tu vas bien ?
Sérieux ! Le gars-ci me demande si je vais bien comme si mon bien-être le préoccupait.
Je choisis de ne pas répondre à cette question et je change de sujet.
- Ce que tu fais à Carine est criminel; tu as bourré le cerveau de cet enfant juste pour ton égo; tu
crois peut-être me faire du mal mais tu seras le premier à récolter les pots cassés.
Il ignore mes remarques et poursuit :
- Je pensais même déjà à t’appeler mais ton ancien numéro de téléphone ne passe plus; ton
Avocate n’a pas voulu me donner ton contact.
- Qu’est-ce que toi et moi pouvions bien avoir à nous dire pour que tu éprouves le besoin de
m’appeler ?
- Pourquoi tu t’énerves ?
Parle-moi avec courtoisie; je voulais juste te demander de passer retirer le reste de tes affaires
chez moi; je ne veux avoir aucun souvenir d’une criminelle mais vois-tu comme je suis gentil, je
n’ai pas voulu faire passer ce message par ton Avocate.
Tu peux prendre même Dieu comme Avocat Raissa; il ne réussira pas à te défendre car tu es
plongée jusqu’au cou ; comment pourrais-tu prouver que tu n’as pas tué cette pauvre femme et
mon bébé? Tu ne pourras jamais t’en sortir; fais un programme et viens ramasser le reste de tes
chiffons chez moi.
Profite bien de ta liberté provisoire avec tes enfants car quand tu seras condamnée, tu ne les
reverras plus jamais. Et puis parlant d’enfant,mieux vaut que tu viennes chercher Chris ; ce n’est
pas mon fils ; j’aime bien ce petit mais il n’est pas de mon sang ; je vais divorcer et épouser une
nouvelle femme qui me donnera des fils, des véritables Gobi.
J’étais enragée ; je n’arrive pas à croire que c’est Stanley qui me parle ainsi. Je me demande si cet
homme m’a jamais aimé ; j’étais si en colère que j’ai failli lui cracher qu’il était mal placé pour
me juger, lui qui était un ancien détenu pour viol et violences physiques.
Mais je me souviens qu’un moment de patience dans un moment de colère nous évite plein de
regrets.
Alors je me calme ; en effet, si sous l’effet de la colère, je lui parle ainsi, Stanley saura que nous
avons des informations sur lui et les données peuvent changer.
C’est au tribunal qu’il saura que je connais son passé et que Chris est ce bébé qu’il croit mort et
qu’il me demande de reprendre. Mieux vaut me maîtriser et me dire que rira bien qui rira le
dernier.
Je ne dis plus rien et continue mon chemin ; en plus, il a du toupet de me dire que même si Dieu
est mon Avocat, je ne m’en sortirai pas.
Je savais que Stanley n’a jamais été croyant mais je ne savais pas que c’était à ce point. Pendant
que je marchais jusqu’au niveau de ma voiture, j’avais si mal que je m’écrie: « oh Dieu, Maître
Justine m’avait dit que Tu es le meilleur des Avocats ; montre à Stanley que si Tu es mon Avocat,
je peux m’en sortir. »
Je pense que nos relations se sont
complètement détériorées; je ne crois plus pouvoir vivre un jour avec ce type. S’il plaît à Dieu, je
vais gagner ce procès ; je lui prendrai tous les enfants.
Je retourne chez mon frère et j’administre le remède à mon neveu. Mais inutile de vous dire que
j’ai passé un sale après-midi.
Les mots de Stanley résonnent encore dans ma tête. Non seulement, il me fait arrêter mais il me
nargue en plus.
Le lendemain, je passe par le Cabinet de Maître Justine pour lui raconter ma brève entrevue avec
Stanley :
- Calme-toi, Raissa ; ne t’afflige point mais réjouis-toi ; il vient de mettre Dieu au défi ; alors, ne
crains rien ; il comprendra bientôt que sur cette terre, devant ce Maître de l’univers, tout genou
fléchit.
- Je compte effectivement aller ramasser mes affaires;
- Non, ne tombe pas dans ce piège ; autrement, le divorce serait prononcé à tes torts ce qui ne
t’arrange pas car on dira que c’est toi-même qui as abandonné le domicile conjugal en ramassant
toutes tes affaires ; cela pourrait influer sur le
jugement concernant la garde des enfants ;
- Ah ! donc c’est un piège !
- Oui, tout à fait; reste tranquille ; ne pose aucun acte qui pourrait te défavoriser.
A propos, il a déjà introduit une demande de divorce et me l’a fait parvenir en tant que ton
Avocate ; je compte lui faire savoir que tu ne m’as pas choisi comme Avocate pour le divorce.
- Stanley est vraiment incroyable !
- Laisse-le se défouler Raissa, il est dans un grand rêve ; il se réveillera bientôt.
- Je regrette d’avoir épousé cet homme, Maître ;
- Ne regrette rien Raissa car il fut un temps où c’est exactement ce que tu voulais. N’aie jamais de
regret ; si c’est bien, c’est tant mieux mais si c’est mauvais, c’est une expérience.
Raissa, ne regarde plus en arrière, les yeux pleins de regrets, mais regarde en avant, le regard plein
d’espoir. Il y a une longue route devant toi alors n’aie aucun regret pour le passé et aie une
confiance inébranlable en l’avenir.
Je peux t’assurer d’une chose: si ton mari décide de divorcer, un jour, je ne sais pas quand, mais
un jour, lorsque Stanley te regardera, il verra celle avec qui il était, regrettera celle qu’il a perdu et
alors réalisera la valeur de celle qu’il n’aura plus
jamais.
- Vous n’êtes pas qu’Avocate Maître, mais vous êtes aussi un bon thérapeute moral.
Nous rions toutes les deux puis je prends congé d’elle pour me rendre au boulot ; dès que j’y
arrive, une surprise m’attendait.
En effet, je vois Béatrice assise dans le hall d’attente. Dès qu’elle me voit, elle sourit et me salue:
- Bonjour Sage-Femme.
-Béatrice ? Tu as disparu.
- Hum ; je n’ai pas disparu ; j’ai juste observé une petite retraite car il le fallait; je suis contente de
te voir ici ; je suis allée au Commissariat mais on m’a dit que tu étais libre.
- Oui, j’ai obtenu une libération sous caution en attendant mon jugement.
- J’ai appelé l’ancien numéro en vain ; je suis donc venue ici avec l’espoir de te voir et tes
collègues ont demandé de t’attendre.
- Bien, je suis là ; et à vrai dire, je te
cherchais aussi. J’aimerais que nous ayons une discussion mais pas ici.
- Ok, choisissez un lieu de rendez-vous.
Je réfléchis un instant et je décide d’appeler Maître Justine.
Je demande à Béatrice de m’excuser un instant ; je m’éloigne et je lance le numéro:
- Allô.
- Maître Justine, je viens d’arriver à l’hôpital et j’ai croisé Béatrice qui
m’attendait ; je lui ai fait savoir qu’il faut que nous ayons une discussion et elle me demande de
choisir le lieu de rendez-vous ;
- C’est dommage que j’étais en train de me rendre au procès d’une autre cliente sinon je viendrai
tout de suite; il ne faut pas la lâcher, ne laisse pas passer cette occasion, saisis ta chance de
l’instant car elle pourrait disparaître à nouveau; excuse-toi à l’hôpital et retourne avec elle chez
ton frère ; ce serait plus sécurisé pour la discussion. Surtout n’oublie pas de lui demander où elle
habite.
- C’est compris, Maître.
Je m’avance vers Béatrice pour lui proposer de me suivre chez mon frère immédiatement.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 17)
Je m’avance vers Béatrice pour lui proposer de me suivre chez mon frère immédiatement. Nous
montons dans la voiture et jusqu’à destination nous parlons de tout et de rien.
Notre conversation tourne entre autres autour de sa grossesse qui était bien visible maintenant.
Elle m'annonce avoir fait l'échographie et porter des jumeaux. Je suis très contente pour elle.
Dès que nous entrons chez mon frère, Béatrice me fait savoir qu'elle avait faim. Je demande à la
domestique de Colette de lui faire une omelette accompagnée de pain .
Je laisse Béatrice déguster avec avidité son plat. Elle avait un appétit d'ogre.
Je suis sidérée par la façon dont certaines femmes enceintes ont de l'appétit. Moi, je n'arrivais
même pas à manger. Je rencontrais de grandes difficultés à manger correctement.
Je ne buvais que du lait que je rejetais la minute d'après. Mes grossesses me
faisaient souffrir. Et dire que je faisais tout ce sacrifice pour Stanley! Un véritable ingrat. Mais
bon j'exagère! Car les enfants sont aussi une partie de moi.
D'ailleurs, je me rends compte que
dans ce fichu mariage, c'est en définitive ce qu'il y a eu de bien car les enfants sont un trésor; en
avoir est une richesse et une grande grâce. Je n’ai donc pas à m’en plaindre.
Quand Béatrice termine son plat, elle prend un demi-litre de jus de fruit sur le repas.
- Béatrice, tu as vraiment bien mangé ;
- Sage-femme, ce n'est pas moi qui mange mais les jumeaux.
Cette réponse me fait rire.
J'interroge maintenant Béatrice:
- Alors dis-moi, pourquoi voulais-tu me voir ?
- J'ai observé une longue pause; en fait j'ai pris des congés et j'ai fermé mon téléphone habituel
pour ne pas être perturbée dans mes réflexions. Et cette attitude concerne la mort de Sonia.
Je dresse bien mes oreilles pour que rien de ce qu'elle dira ne m'échappe.
Béatrice poursuit:
- J'avais décidé de ne jamais parler de cette histoire. Mais comme tu as été accusée, ma conscience
a commencé à me tourmenter.
Finalement j'ai décidé de parler mais
malheureusement, je ne pourrai témoigner publiquement lors de ton procès.
- Dis-moi d'abord de quoi il s'agit et après nous verrons le reste.
- Tu te souviens quand tu m’avais accouché, Sonia n’était pas toujours descendue de la table
d'accouchement .
Elle y est d’ailleurs restée jusqu'à la fin.
- Oui ?
- Moi, fatiguée après mon accouchement j’ai dormi. Tu étais alors seule au four et au moulin. Je
ne maîtrisais plus ce qui se passait. Je me souviens juste qu'à un certain moment, je me suis
réveillée. J’ai juste ouvert les yeux et je n’ai pas bougé; alors, j’ai aperçu deux personnes auprès
de l’intéressée Sonia.
- Tu as aperçu deux personnes, tu dis ?
- Oui Sage-Femme ;
- Et moi, j’étais où ?
- Je ne sais pas mais je ne t’avais plus vu dans la salle. Je ne t’ai d’ailleurs plus vu jusqu’à ce que
je sois installée dans une chambre en maternité avec mon bébé.
- Effectivement, quand je partais, tu dormais encore, je m’en souviens ; continue ton récit,
Béatrice. Quelles sont ces deux personnes que tu as vues auprès de Sonia ?
- Je ne les connais pas ; mais c’était deux femmes.
- Deux femmes ?
- Oui dont une de tes collègues ;
- Comment cela, une de mes collègues ?
- C’était une Sage-Femme puisqu’elle était en blouse.
- C’est laquelle des Sage-femmes ?
- Je ne sais pas ; je ne connais pas vos noms.
- Ok, qu’as-tu vu exactement ?
- En fait, je n’ai rien vu concrètement, j’ai juste surpris leur conversation. Alors, j’ai fermé les
yeux comme si je dormais mais j’ai tout écouté.
A ces propos de Béatrice, les battements de mon cœur accélèrent; je n’aurais jamais cru que la
mort de Sonia était entourée de tant de mystère.
J’étais impatiente de savoir ce qui s’est passée mais en même temps, j’avais peur de ce que j’allais
entendre.
Néanmoins, j’interroge Béatrice:
- Qu’est-ce que ces deux personnes se sont dites alors ?
- La Sage-femme demandait à l’autre personne de sortir de la salle et de ne point ouvrir sa bouche
sous peine d’être éliminée.
- Quoi !
- En tout cas, c’est ce que j’ai entendu.
- Tu es sûre que c’est ce que tu as entendu ?
- Sûre et certaine, Raissa.
- Ok, continue.
- La personne à qui la Sage-femme s’adressait sanglotait en promettant que jamais, elle ne dira
rien. Je ne sais pas ce qu’elles se sont dites avant mon réveil; mais c’est à partir de là que j’ai
entendu leur conversation; la Sage-femme s’adressa à nouveau à la dame en disant: « de toute
façon, si tu parles, je coule et tu coules aussi; mais en plus de cela, toi, je vais m’occuper de toi;
un seul ordre que je donne et tu feras partie du passé ».
La personne répond: «la Sage-femme qui l’a accueilli m’a vu, si je pars, elle risque de s’étonner
quand elle apprendra que mon amie une fois morte, je l’ai abandonné.»
La Sage-femme lui avait demandé si elle t’avait dit son nom. Cette dernière répondit que non. Elle
lui demanda alors de partir sur le champ.
- Béatrice, tu as entendu tout cela ?
- Mais oui ; je gardais mes yeux bien fermés pour ne pas qu’elles sachent que je les entendais; car
j’avais compris que si jamais, cette Sage-femme savait que j’ai tout entendu, je ne ressortirai pas
de là, vivante.
- Ok, qu’as-tu entendu d’autre ?
- Plus rien ;
- Peux-tu me décrire cette Sage-femme ?
- Malheureusement non ; parce qu’à mon réveil, je l’ai à peine observé et comme je les entendais,
j’ai refermé mes yeux ; quand j’ai osé enfin les ouvrir, il y a avait déjà quatre Sage-femmes dans
la salle et peu après, des brancardiers sont venus chercher le corps de Sonia; j’ai alors compris
qu’elle est morte.
Une des Sage-femmes m’a examiné et m’a transféré dans une chambre en maternité.
J’étais renversée par un tel récit. Qui peut bien être cette collègue ?
En partant ce jour-là, ma collègue Adèle était la première venue; c’est à elle que j’ai passé le
témoin ; en journée, il y a souvent quatre Sage-femmes. Voilà que Béatrice ne peut pas
reconnaître celle dont il s’agit.
Mais pourquoi une de mes collègues tuerait Sonia ? Et pour quelles raisons ? L’affaire-ci devient
compliquée et inquiétante. Cela me donne même froid au dos.
J’ai vite compris que la seconde personne était Hermione.
Et avec le récit de Béatrice, il n’y a que Hermione qui puisse nous dire de quelle Sage-femme il
s’agit et nous relater exactement ce qui s’est passé; l’ont-elles tué ensemble ? Que s’est-il
réellement passé ? C’est quoi cette histoire de fous ?
J’entends Béatrice qui s’adresse à nouveau à moi:
- Raissa, j’avais décidé ne plus suivre ma grossesse dans cet hôpital ; mais quand je t’ai rencontré
à l’enterrement de Dame Ayabavi, je me suis dite que je pouvais le faire si c’est uniquement toi
qui me suis.
- C’est vraiment dommage que tu ne peux reconnaître cette Sage-femme.
- Oui, vraiment dommage ! Par contre, je peux reconnaître sa voix.
- Ah, c’est aussi une piste ; mais le problème est que nous sommes six et quatre en journée ; les
Sage-femmes d’une journée ne sont pas toujours les mêmes ; voilà que quand tu viendras en
consultation, je ne peux pas demander à mes collègues de parler pour que tu les entendes. Ce
serait vraiment étrange.
A moins que ce soit un sacré coup de chance.
- Au moins Raissa, tu es avancée ; tu sais au moins qu’une certaine amie de la dame Sonia est
impliquée ; elle pourrait t’éclairer si tu arrivais à mettre la main sur elle.
Oui, Béatrice a raison ; seule Hermione peut décanter cette situation. Il faut avouer que cette
révélation m’a troublé. Il me serait impossible de travailler aujourd’hui ; je ne peux même plus
raccompagner Béatrice ; comme il est presque midi, je vais appeler Colette ou Abdoulaziz pour
que l’un ou l’autre profite de leur pause pour la conduire chez elle.
C’est une femme enceinte, je ne veux pas la laisser prendre un taxi-moto.
Aucun des numéros de mon frère et de sa femme ne passe. Je propose à Béatrice de demander à
son mari de venir la chercher. Elle réagit énergiquement.
- Non, Sage-femme, j’ai raconté cette histoire à mon mari et il m’a interdit formellement de
parler; il se dit que ma sécurité pourrait être menacée; alors, il s’étonnera de ce que je fais ici,
dans votre maison ; c’est également la raison pour laquelle je ne peux témoigner publiquement.
- Ok, je comprends ; ce n’est pas grave ; je ferai alors l’effort de te conduire moi-même.
Je dépose Béatrice puis je me dirige directement dans le cabinet de Maître Justine avant de me
souvenir qu’elle était à un procès ; alors, je reste devant son cabinet et je commence à prier
ardemment Dieu ; j’en avais besoin car cette situation me dépasse.
Ma tête ne sait plus quoi penser ! Sonia tuée ? Et moi qui pensait que ma négligence en est la
cause ! je n’aurais pas dû procéder à cet accouchement que j’aurais été lavée de toute soupçon ; la
question qui me préoccupe le plus en ce moment, c’est de savoir pourquoi une de mes collègues
ferait cela !
Je reste dans la voiture environ trois heures de temps avant que Maître Justine ne revienne ; dès
que j’aperçois sa voiture, je sors immédiatement ;
- Raissa ? Que fais-tu ici ?
- Je vous attendais Maître Justine.
- Tu as l’air troublé ; que se passe t-il?
- J’ai discuté avec Béatrice tel que convenu ;
- Ok, allons dans mon bureau.
Je la suis dans son bureau et elle me demande de prendre place. Elle me sert de l’eau fraîche
qu’elle sort du réfrigérateur installé dans la pièce.
Cette eau est la bienvenue et je la bois d’un trait. Elle m’apaise.
Maître Justine m’interroge:
- Alors, Raissa, que t’a dit Béatrice ?
Je lui rapporte tous les propos de Béatrice sans oublier le moindre détail.
- Je le pressentais ! Je savais que cette Sonia n’est pas morte des suites de ta négligence ; par
contre, tu m’avais dit qu’elle est décédée suite à des saignements, n’est-ce pas ?
- C’est ce que l’on m’a dit aussi. Je n’étais pas là;
- Qui te l’a dit ?
- Ma collègue Safiétou ; ne pouvant me joindre ce jour-là par téléphone, elle est venue me
chercher à mon domicile ;
- A quelle collègue as-tu passé témoin ce jour-là avant de partir ?
- Adèle. Elle était la première venue.
- Logiquement, si Adèle est la première venue et que les autres Sage-femmes arrivent, c’est
qu’elle ne sera plus seule dans la salle ;
- En principe ;
- Or Béatrice a bien dit que la Sage-femme était seule avec Hermione.
- Oui Maître ;
- Dis-moi, la collègue que tu avais remplacé cette nuit est-elle venue le lendemain ?
- Non, parce qu’elle était en voyage.
- Très bien ; j’avais interrogé toutes tes collègues pour en savoir plus sur ta personne ; je vais les
interroger à nouveau avec une attention particulière et spécialement Adèle et Safiétou.
- Safiétou est très proche de moi; c’est pour cette raison que c’est elle qui est venue me chercher ;
- Oui j’ai bien compris qu’elle t’aime beaucoup.
Dans tous les cas, j’interrogerai à nouveau tes collègues. Il faut que j’ai assez d’éléments pour
prouver ton innocence. Même si on ne découvre pas le coupable, il faut que tu sois innocentée;par
contre, un problème se pose.
- Laquelle ?
- Nous devons convaincre Béatrice de témoigner au procès.
- Elle m’a déjà dit que non, Maître. Je n’ai pas de chance ;
- Non Raissa, il n’y a personne qui soit née sous une mauvaise étoile ; il n’y a que de gens qui ne
savent pas lire le ciel ; souviens-toi de tout ce que je t’ai dit sur la confiance en Dieu et sur le
doute.
- Je m’en rappelle ;
- Ok, s’il te plaît, j’espère que tu ne dis rien sur nos investigations à tes collègues. Il ne faut pas
que quelqu'un sache que nous avons rencontré Hermione.
- Oui vous me l’aviez interdit alors je n’ai rien dit ; il n’y a que mon frère et sa femme qui le
savent.
- Ok, sois très prudente. La prudence ne prévient pas de tous les malheurs ; mais le défaut de
prudence ne manque jamais de les attirer. On dit souvent que prudence est mère de sûreté.
- Bien noté, Maître ;
- J’ai une nouvelle pour toi, Raissa ; je n’ai pas pu cette fois-ci repousser encore la date de ton
procès ; elle est définitivement fixée.
Plaise à Dieu que nous ayons tous les éléments nécessaires à ta défense avant cette date.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 18)
- J’ai une nouvelle pour toi, Raissa; je n’ai pas pu cette fois-ci repousser encore la date de ton
procès; elle est définitivement fixée.
Plaise à Dieu que nous ayons tous les éléments nécessaires à ta défense avant cette date.
- Dieu pourvoira ;
- Voilà, c’est ainsi que j’aime t’entendre parler; avec assurance et confiance.
Nous attirons à nous tout ce sur quoi nous focalisons nos pensées, alors reste sereine.
- C’est compris, je vais maintenant rentrer.
- Ok, je vais appeler Béatrice au cours de la semaine.
- D’accord Maître ; je voulais aussi vous dire que je compte aller chercher effectivement Chris.
- Pourquoi ?
- Mais Stanley m’a demandé de venir le chercher; et à vrai dire, à défaut d’avoir tous les enfants
avec moi pour le moment, Chris sera là;
- Tu parles comme s’il était véritablement ton fils;
- Il l’est; il n’a pas demandé à naître et il ne mérite pas de vivre auprès d’un père comme Stanley;
alors, comme il m’en a donné l’occasion, j’irai le chercher.
- Raissa, j’aimerais bien voir sa tête au tribunal quand il apprendra que tu n’as pas tué le bébé et
que c’est Chris. Je vais œuvrer pour qu’il perde la garde de tous les enfants, y compris Chris.
- Que Dieu vous entende ; à bientôt Maître Justine;
Je repars chez moi ce soir-là en pensant encore à quelle collègue Béatrice faisait allusion.
Je décide d’appeler Safiétou; je gare quelque part et lance l’appel vers son numéro;je change
d’avis et je prends la route pour me rendre chez elle; elle se repose de sa garde aujourd’hui. Elle
serait donc chez elle.
J’ai bien senti que Maître Justine suspectait Safiétou mais moi je n’arrive pas à l’imaginer; il est
vrai nous ne connaissons jamais totalement les autres; déjà que nous ne nous connaissons pas
nous-mêmes en entier, comment prétendre connaître autrui ?
Mais, je pense que Safiétou ne ferait pas un coup pareil; pour quelles raisons d’ailleurs ? J’ai bien
vu comment elle m’a soutenu lors de mon court séjour en cellule.
Je débarque chez mon amie et je la croise sur la cour de sa maison, assise sur un banc en bois, un
pagne noué jusqu’à la poitrine, en train de déguster un plat de pâte de maïs et de sauce gluante
précisément la sauce crincrin; la voir
manger me donne de l’appétit et je lui demande de me servir car j’adore ce plat spécial de mon
pays; c’est un vrai régal.
- Safiétou, je vois que je suis bien arrivée comme on dit chez nous,c’est ce que tu manges et tu
grossis sans arrêt ;
- C’est pas vrai, ma prise de poids est génétique, tout le monde grossit dans ma famille ;
- C’est cela oui, la bonne excuse, sers-moi, je ne peux pas rater ça;
- Tu es ici chez toi, va te servir toi-même.
Je rentre dans sa cuisine et je me sers correctement. D’ailleurs avec les va-et-vient d’aujourd’hui,
je n’ai pas eu le temps de manger.
Je lave mes mains car je me servirai de celle de la gauche pour déguster mon plat. A la première
bouchée, je savoure; ce mets est vraiment bien cuisiné ; le goût est exquis. Je me régale
correctement.
Je lave mes mains à nouveau et je passe la main sur mon ventre en signe de
satisfaction. Safiétou me regarde et sourit.
- On dirait que tu avais faim, Raissa;
- Je ne te le fais pas dire;
- Alors, c’était comment au boulot ?
- Je ne n’y suis pas allée;
- Pourquoi ?
- Oh, j’avais des courses à faire et après je suis passée chez mon Avocate;
- Ok, des éléments nouveaux?
- Pas vraiment, mais dis-moi Safiétou, tu étais présente quand Sonia est décédée ?
- Non, lorsque je suis venue ce jour-là, il y avait Adèle, Silicatou et Rosalie.
Sonia était déjà décédée mais les brancardiers n’étaient pas encore venus la chercher ; c’est devant
moi que son visage a été couvert par le drap blanc.
- Mais tu m’avais dit que c’est suite à des saignements qu’elle est décédée, le temps que le
gynécologue n’arrive.
- C’est ce que les collègues m’ont dit aussi à mon arrivée ; je n’ai fait que te rapporter ce qu’elles
m’ont dit.
- Mais qui a constaté le saignement ?
- Est-ce que j’ai demandé ? Ce n’était plus nécessaire. Le pire était déjà arrivé.
- Si je comprends bien, tu es la dernière à arriver au boulot ce jour-là;
- Oui, bien sûr. Mais pourquoi ?
- Je voulais juste mieux comprendre;
Je change de sujet car j’ai tôt fait de comprendre que Safiétou n’en était pour rien. Je lui fais
savoir que j’ai rencontré Stanley;
- Il ne manque pas d’air ce Stanley ; il te nargue ?
Mieux, il défie Dieu ? Pour qui se prend-il ?
- Il m’a demandé de venir chercher Chris. Et je vais le faire. Je vais appeler la domestique pour
qu’elle apprête sa valise.
- N’y va pas seule surtout ; si tu veux dis-moi, je t’accompagne;
- Non, j’irai avec Abdoulaziz ; comme c’est un homme, Stanley va se tenir à carreau.
Maintenant, je dois rentrer. On se voit demain au bureau.
Je repars de chez Safiétou le cœur plus tranquille la concernant.
Une fois rentrée, je téléphone à la
femme de ménage qui s’occupe de mes enfants afin qu’elle s’occupe d’apprêter la valise de Chris
pour que je vienne le chercher dans deux jours.
Effectivement, deux jours plus tard, je me rends chez Stanley avec mon frère pour chercher Chris;
Stanley était là mais comme j’étais accompagnée de mon frère, il n’a pas osé m’embêter; cela
vaudrait mieux pour lui car Abdloulaziz cherchait une occasion de lui « casser la gueule ».
Je profite pour embrasser et bavarder avec mes deux dernières filles car Carine ne veut toujours
pas me voir; dès que je suis arrivée, elle s’est retirée dans sa chambre.
Je n’ai pas insisté à lui parler non plus car comme Maître Justine me l’avait dit, en temps
opportun, elle reviendra à de meilleurs sentiments; mais ça fait mal quand même.
Je prends Chris sous le regard plein d’envie de mes deux dernières filles qui voulaient aussi me
suivre.
- Ne vous en faites pas mes chéries, je pars avec Chris parce qu’il est encore petit; mais vous allez
le revoir souvent.
Ma deuxième fille m’interroge:
- Mais maman, que se passe t-il exactement et pourquoi tu ne vis plus ici ?
C’est vraiment affreux de voir des enfants poser de telles questions. Que vais-je leur répondre que
leurs cœurs d’enfants pourraient bien comprendre ?
Je parviens quand-même à articuler une réponse.
- Je vous ai déjà dit que vous étiez trop petites pour comprendre; un jour, je vous expliquerai et
également un jour, je pourrai vivre de nouveau avec vous.
Ma fille reprend:
- Est-ce que tu as un problème avec papa?
- Non, pas du tout; c’est compliqué, vous ne pouvez pas juste comprendre. A très bientôt mes
chéries.
Je les embrasse et je sors de la maison de Stanley. Je me rappelle encore des paroles de Dame
Ayabavi quand elle me disait que la peur ne conduit à rien de bon; elle a raison; si je n’avais pas
gardé ce secret par cœur, il y a longtemps que j’aurais compris que je n’étais pas à la base du
décès de Sonia et mieux, qu’une collègue en détenait le mystère.
La situation aurait été réglée depuis et alors, à l’heure actuelle, je serais avec mes enfants.
Mais qu’est-ce qui nous a conduit à tout ceci si ce n’est l’infidélité de Stanley ?
C’est quand même étrange ! Un homme est infidèle et sa femme paie les pots cassés ! Mais ma
vie était bien limpide ; il fallait un évènement comme celui-là pour que je me rende compte qu’il
fallait que j’introduise le Créateur dans ma vie.
Je croyais un peu trop en moi sans croire en Lui ; or c’est le fait de croire en Dieu qui devrait nous
faire croire en nous et nous donner de l’assurance.
J’aurais dû compter dès le début sur ce Dieu puissant et je ne serai pas à l’heure actuelle si épuisée
par des situations que je me suis moi-même créé sans vraiment le vouloir.
Je me rends compte que Dieu est comme de l’oxygène; nous ne pouvons pas Le voir mais nous ne
pouvons pas vivre sans Lui correctement. En effet, un être humain peut-il vivre sans oxygène ? Il
a tôt fait de s’asphyxier.
Mais à présent, je n’ai plus peur et j’ai confiance ; comme Maître Justine le dit, l’essentiel c’est
que mon innocence soit prouvée même si le coupable n’est pas retrouvé; ce sera à la police de
continuer ses enquêtes.
Dans mon analyse logique et non professionnelle, je viens d’écarter Safiétou ; alors il reste les
autres; j’ai au total six collègues: Safiétou, Adèle, Juliette, Rosalie, Silicatou et Anne-Marie.
Safiétou est ma collègue la plus proche, voire même très amie ; nous nous fréquentons et nous
partageons des petits secrets de femmes.
Adèle est la première venue à qui j’ai passé le témoin le jour de mon départ. Nous avons de
bonnes relations professionnelles.
Juliette, est celle qui m’a passé le témoin pour la garde ce soir-là. Elle est souvent impulsive de
caractère mais très gentille.
Rosalie est d’un naturel calme et pondérée; elle ne se mêle jamais de ce qui ne la regarde pas et
accomplit son travail avec dévouement.
Silicatou est la plus sévère d’entre nous et n’est pas du tout courtoise envers nos parturientes.
C’est celle avec qui je m’entends le moins. Toujours à vouloir jouer à l’experte.
Anne-Marie est celle-là qui m’a demandé de la remplacer. Elle n’était même pas en ville au
moment du drame.
Je défile calmement chacune dans mon esprit afin d’essayer d’imaginer qui d’entre elles peut
avoir le cœur à tuer.
A quoi bon me tracasser, vu que l’apparence est souvent trompeuse ?
Je laisse tomber très vite cette idée.
Autant utiliser mon énergie à prier pour qu’Hermione parle enfin car c’est ce dont j’ai besoin en
ce moment pour tout clore.
Mon frère et moi arrivons à destination; Chris s’est endormi ; je le couche sur mon lit. Je prends
mon bain du soir puis je m’allonge à mon tour.
Mais comme vous pouvez l’imaginer, le sommeil ne vient pas.
Le dernier enseignement que l’homme de Dieu qui prie avec moi a donné me
revient en esprit; il disait je cite:
« Notre foi emporte notre prière jusqu’à Dieu; si vous saviez ce qu’est la foi, rien ne vous serait
difficile. La foi déplace les montagnes. Elle est en nous la force divine et surnaturelle qui crée là
où il n’y a rien et qui trouve là où il n’y a rien de créé.
Comment celui qui n’est pas sûr que Dieu lui accordera veut-il recevoir ? Le doute est une des
plus grandes armes du diable; quand on se trouble devant un obstacle, on se prépare une chute
certaine ».
Maître Justine aussi me reproche souvent de me laisser envahir par le doute; alors,
automatiquement, je me lève et je prie avec ferveur et précision ; je savais ce que je voulais de
Dieu ; je voulais qu’il démontre au grand jour mon innocence. Avais-je d’ailleurs d’autre choix
que de m’adresser à Lui ?
Le combat est spirituel avant d’être physique.
Le lendemain, je me rendais au travail quand je me rends compte qu’il y avait un embouteillage
monstre sur la voie principale. C’est un accident.
Au lieu de vite alerter les secours et d’apporter assistance à la personne en danger, les gens
s’évertuaient plutôt à prendre des photos. C’est le genre de choses qui m’exaspèrent.
Un être humain en danger a besoin de secours et non de photos à partager sur les réseaux sociaux.
Je gare rapidement ma voiture sur le trottoir et je compose le numéro des ambulanciers afin
qu’une ambulance soit rapidement dépêchée ; en attendant leur arrivée, je m’avance pour porter
secours à la personne étendue; je suis Sage-femme mais je suis avant tout agent de santé et je
connaissais les gestes de premiers secours.
Selon les rumeurs, il paraîtrait que c’est une voiture qui l’aurait renversée et qui s’est enfuie.
Etant près de l’intéressée, je me rends compte que c’est une femme.
Je m’en approche. Je constate avec stupéfaction de qui il s’agit ; oh non ! Pas possible ! Pas elle !
Je demande à deux hommes de m’aider à la transporter jusqu’à ma voiture ; son état est critique et
je ne peux attendre l’arrivée des ambulanciers; nous ne sommes pas en occident ici, l’ambulance
peut parfois mettre trop de temps et il sera trop tard.
Avec l’aide de deux gros bras, je l’installe à l’arrière de la voiture ; elle saignait mais elle était
encore consciente ; elle souffrait beaucoup.
Je démarre en trombe car chaque minute comptait.
À suivre

UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 19)


Avec l’aide de deux gaillards, je l’installe à l’arrière de la voiture; elle saignait mais elle était
encore consciente; elle souffrait beaucoup.
Je démarre en trombe car chaque
minute comptait. J’arrive à l’hôpital avec une vitesse d’éclair.
Malgré ma rapidité, elle sombre dans un coma profond avant mon arrivée. Dès que les médecins
sont informés, elle est prise en charge sans tarder. Il ne fallait pas qu’elle perde la vie.
En effet, c’était Hermione qui était dans un état inconscient; heureusement que je passais par là
sinon le temps que les gens ne finissent de faire des photos et de commenter l’accident avant
d’appeler l’ambulance, elle serait morte.
Dès que Hermione est installée aux urgences de l’hôpital, je téléphone à Maître Justine.
- Allô.
- Maître, c’est grave.
- Calme-toi Raissa ; qu’est-ce qui est grave ?
- C’est Hermione;
- Qui est Hermione ?
- L’amie de Sonia qui refuse de parler;
-Ah ok ! Que se passe t-il avec elle ?
- Elle a fait un accident et est dans un état critique.
- Ah ! Comment est-ce arrivé ?
- J’aurais vraiment aimé venir au Cabinet tout vous expliquer mais je ne peux pas;
- Pourquoi ?
- Je préfère rester ici, surveiller pour être certaine que l’on s’occupe bien d’elle.
- Ecoute Raissa, voici ce que tu vas faire; appelle Colette pour qu’elle prévienne sa sœur ; puis tu
viens me voir ici; et conduis prudemment car c’est inutile de t’affoler; Hermione survivra;
- Comment pouvez-vous en être si sûre ?
- Viens me voir maintenant.
La réaction de Maître Justine m’étonne.
Comment peut-elle garder son sang-froid face à une telle situation ?
Néanmoins je fais exactement comme elle a dit; je préviens Colette puis je me rends au cabinet
d’avocat.
La Secrétaire me faire patienter un moment car Maître Justine recevait une personne; pendant que
je patientais, j’implorais Dieu de faire survivre Hermione ; il le fallait ; quelques minutes plus
tard, un homme d’environ la quarantaine sort de son bureau et la Secrétaire me fait entrer.
- Bonjour Maître Justine ;
- Bonjour Raissa ; alors, Hermione est dans un état critique ?
- Oui, quel malheur !
- Sois sereine ; elle survivra ;
- Etes-vous Médecin ? Vous ne l’avez même pas vu.
- En tout cas Raissa, je ne sais pas pour toi; mais moi j’ai prié Dieu plusieurs fois la concernant et
je pense que c’est la réponse à mes prières. Donc, il n’y a pas de raison pour qu’elle meure.
- Je ne saisis toujours pas ;
- Réfléchis un instant; Hermione fait un accident et comme par hasard tu passes par là pour la
sauver; c’est le plan de Dieu pour qu’elle te soit redevable; tu lui as sauvé la vie et par gratitude,
elle va vouloir te rendre la pareille; c’est simple.
Je commence à comprendre et à me
rappeler ma prière précise d’hier soir. C’est vrai, c’est une réponse à mes prières; en effet, sans
m’en rendre compte, j’ai sauvé Hermione.
- Maître, je pensais que c’est peut-être celui qui la menace qui a voulu la faire tuer et j’ai paniqué;
- C’est possible mais j’en doute; on en saura plus bientôt ;
- Comment ?
- Tu as vu l’homme qui est sorti de mon bureau pour que tu y entres ?
C’est le détective qui est sur l’affaire; il ne lâche pas Hermione d’un pouce; alors si une voiture la
suivait pour causer cela, il l’aurait compris;
- Le conducteur a fui, paraît-il;
- Oui, sauf que le détective a eu le temps et la présence d'esprit de relever sa plaque; il vient
d’ailleurs de me donner toutes les informations.
Avec cela, nous pouvons retrouver l’intéressé ; mais de toi à moi, cela
m’étonnerait que ce soit celui qui le menace; c’est un pur hasard que nous allons appeler
providence de Dieu afin qu’Hermione puisse accepter de parler.
-Je me suis souvenue d’un enseignement sur la foi et j’ai fortement prié hier soir;
- Je faisais de même, Raissa. Je suis confiante que Hermione, une fois rétablie, parlera. Sa vie
qu’elle avait tant peur de perdre, tu le lui as sauvé ; Dieu est puissant.
Maintenant je souris ; je n’ai effectivement plus à m’inquiéter ;Hermione s’en sortira.
Maître Justine poursuit:
- J’ai interrogé à nouveau toutes tes collègues ;
- Oui, Safiétou m’en a parlé ;
- Ok, je ne suis pas Dieu, mais par expérience, je suspecte deux d’entre elles ; je les tiens donc à
l’œil.
- Qui suspectez-vous ?
- Excuse-moi Raissa, mais pour ta propre sécurité et pour ton propre bien, il vaut mieux que je ne
dise pas certaines choses; on ne sait jamais, tu pourrais en parler sans savoir que tu fais mal. Tu
sauras tout cela en son temps.
- Bien Maître, maintenant que j’ai le cœur tranquille, j’y vais.
Effectivement, quelques jours plus tard, Hermione reprend ses esprits. Colette me donnait des
nouvelles qu’elle prenait de sa sœur.
Maître Justine m’avait conseillé de ne pas du tout l’approcher car on ne sait pas si la personne qui
la menace nous observe; surtout que c’est une collègue.
Alors, je me tiens bien loin d’elle pendant son séjour à l’hôpital. Maître Justine négocia avec le
directeur de l’hôpital pour que Hermione soit transférée dans un autre hôpital pour y poursuivre le
reste de ses soins.
Le Directeur n’a pas trop compris pourquoi mais il a accepté. Il fallait être plus prudent que
jamais.
Hermione a déjà appris que c’est moi qui lui ai sauvée la vie. Elle en aurait été très surprise.
Lorsqu’elle sort de l’hôpital, nous convenons de ne pas la voir mais de lui parler au téléphone ; on
ne sait jamais, l’autre complice pourrait nous espionner.
Je sais que nous étions surveillés comme du lait sur le feu.
La date de mon procès approche à grands pas ; rien ne se dessine encore du côté de mes deux
principaux témoins, Béatrice et Hermione. Mais je garde espoir et je reste optimiste.
Ne dit-on pas que l’optimisme est
la foi qui mène à la réussite ?
Trois jours plus tard, c’est avec beaucoup de bonheur et de reconnaissance à Dieu que j’ai appris
que Béatrice est prête à témoigner au procès et à raconter tout ce qu’elle a entendu.
Je me rappelle encore du moment où mon Avocate me l’annonçait:
- J’ai une bonne nouvelle pour toi, Raissa ;
- Laquelle ?
- Devine ;
- Tout est prêt pour ma défense!
- Mieux encore !
- Je ne vois rien d’autre.
- Béatrice s’est décidée.
- Quoi !
- Effectivement, Dieu est formidable; c’est Lui qui fait fondre les cœurs en notre faveur. Mais
nous avons besoin du témoignage d’Hermione pour que cela soit plus complet ;
- J’ai espoir aussi de son côté ; mais Hermione vous a-t-il relaté les faits ?
-Malheureusement non ; elle ne veut toujours rien dire ;
- Mais pourquoi ?
- C’est sa décision et je veux la respecter; en attendant qu’elle change d’avis ;
- Et si quelque chose lui arrivait entre temps ?
- N’aie pas d’idées négatives; de toute façon, elle m’a même demandé si toutes tes collègues
seront au procès et témoigneront en ta faveur.
- Mais pourquoi ne veut-elle rien dire malgré le fait que je lui ai sauvé la vie? Cela m’inquiète ;
- Tu fais une bonne action et tu attends une récompense ! Oublie ça.
La vraie philanthropie consiste à faire le bien sans attendre une récompense.
Je t’ai déjà dit d’être sereine ; nourris ta foi de la parole de Dieu et ta peur va mourir de faim. Ce
n’est pas à Hermione, ni à moi que tu dois faire confiance,mais à Dieu. Elle ne veut pas encore
parler. Alors, on attend, Raissa.
- Mais le procès approche. C’est dans une semaine !
- Béatrice témoignera pour que nous puissions démontrer au Juge que Sonia a été envoyée dans
l’au-délà et que ce n’est pas ta faute si elle est morte; c’est largement suffisant; le témoignage
d’Hermione aurait été plus complet et servirait juste à connaître son complice.
Parlons maintenant du dossier de divorce; j’ai rencontré hier l’Avocat de Stanley ; il voudrait que
le divorce soit prononcé à tes torts et réclame la garde de tous les enfants sauf celui adopté.
Il ne veut même pas que tu aies un droit de visite vu que tu es une criminelle ; j’ai fait comprendre
à son Avocat que tu n’es pas encore déclarée coupable donc il n’a qu’à calmer ses ardeurs;
Stanley devra donc attendre le procès.
- Le grand jour de ma victoire arrive ; on verra bien ; lui qui pense que même avec Dieu pour
Avocat, je ne m’en sortirai pas.
- Ce qui est sûr, quand on défie Dieu, on est couvert de honte et d’ignominie; il ne sait pas que le
respect de Dieu est la base de la sagesse.
- Maître, je ne le calcule même plus. Mon problème est d’être innocentée et que ma fille aînée
revienne à de meilleurs sentiments.
- As-tu une autre patiente qui pourrait
publiquement témoigner pour toi, à part Béatrice ? Si tu peux avoir une deuxième patiente, ce
serait bien.
- Oui, je pense à une autre dame que j’ai accouché ce soir-là ; j’ai son adresse exacte et son
numéro de téléphone dans nos dossiers.
- Ok, comment elle s’appelle pour que je puisse la contacter ?
- Mairi Diallo épouse Camara.
- Je vais donc la contacter ; en attendant le procès dans une semaine, mange bien, dors bien,
relaxe-toi et prie beaucoup.
- Merci Maître Justine.
- Alors, comment se porte le petit Chris ?
- Très bien, il est très content d’être avec moi.
- Continue de bien en prendre soin ; ne tiens pas compte du fait que c’est l’enfant de Stanley et de
Sonia.
Dieu te récompensera abondamment ;
- Justement, je n’en tiens pas compte, sinon je ne serai pas aller le chercher ; il est le fils que je
n’ai pas eu ; il croit que je suis sa mère.
-C’est très bien ; au fait, nous avons pu arrêter le chauffard qui a cogné
Hermione et a provoqué l’accident ;
- Qui est-ce ?
- Un certain Monsieur Semondzi Ezéchiel ; il a été interrogé à la police ;
- Est-il suspect ?
- Non, c’est même pas lui au volant mais son fils et il a fui.
La voiture appartenait au père.
Finalement, nous avons négocié à l’amiable ; d’ailleurs, Monsieur
Semondzi a décidé de rembourser toutes les dépenses de la famille d’Hermione relatives à ses
soins.
Mais apparemment, c’est un pur hasard; Monsieur Semondzi est un homme respectable et chef
d’entreprise ; ce n’est en aucun cas un tueur ; son fils vient à peine d’avoir son permis de
conduire; ce dernier a pris l’une des voitures de son père à son insu.
D’ailleurs, Monsieur Semondzi viendra d’un instant à l’autre.
Comme quand on parle du loup, on voit sa queue, Monsieur Semondzi se présente à peine que
nous ayons fini de parler de lui. Bel homme, très stylé, il a la classe.
Jusque-là, je me disais que c’est la personne qui menace Hermione qui a
provoqué l’accident mais quand je l’ai vu, j’ai compris que je me trompais. C’est une personne
qui inspire le respect. Son fils l’a juste jeté dans les problèmes.
Monsieur Semondzi nous salue ; Maître Justine lui demande de prendre place.
Je me propose de les laisser discuter mais mon Avocate s’y oppose.
- Non, Raissa, reste, il n’y a rien de confidentiel à dire ici ;
- Merci Maître Justine.
- Monsieur Semondzi Ezéchiel, je vous présente Madame Raissa Gobi ;
Le beau Monsieur tourne le regard vers moi, sourit légèrement et me tend la main. Il est vraiment
mignon avec sa silhouette élancée et svelte. Sa fière allure ne laisse pas de marbre.
- Ravi de faire votre connaissance, Madame ; vous pouvez m’appeler Ezéchiel, tout simplement.
- Le plaisir est partagé, Ezéchiel.
Ezéchiel s’adresse à nouveau à Maître Justine.
- Voilà, Maître comme convenu, un chèque couvrant toutes les dépenses de Mademoiselle
Hermione.
- Merci, je le lui remettrai. Votre fils nous a vraiment fait paniquer.
- Je m’excuse encore pour l’incident, comme je vous l’avais expliqué, il a profité de mon absence
pour prendre la voiture ; oh cet enfant va me montrer de toutes les couleurs !
- Il finira par s’assagir, c’est l’adolescence ;
- Je le souhaite vivement ; il vient à peine d’avoir dix-huit ans et il a la fougue de la jeunesse.
J’interviens dans la discussion:
- Demandez à sa mère de lui parler ; elle saura s’y prendre.
- Malheureusement, elle n’est plus dans notre monde depuis des années maintenant.
- Oh ! Je suis désolée ;
- Vous voyez que je suis père et mère.
Merci Maître pour l’accueil, je vais devoir m’en aller ;
Ezéchiel sort du bureau et je reprends ma conversation avec Maître Justine.
- Ce monsieur a l’air bien éduqué ;
-Oui, dès ma première entrevue avec lui, je l’ai constaté.
Bien, à partir de demain, nous allons commencer à travailler ton attitude au procès; comment tu
dois répondre aux questions posées par le Juge, etc…
Tu diras les choses telles qu’elles se sont passées ; tu restes positive surtout. Je te donnerai des
détails demain.
- D’accord Maître Justine ; à demain donc.
Je quitte le cabinet et je me dirige chez mon frère.
Malheureusement pour moi en chemin, la voiture s’arrête au beau milieu de la route: un souci
mécanique.
Je descends et des gens m’aident à pousser la voiture sur le trottoir ; je compose le numéro de
mon mécanicien et l’appel ne fonctionne pas.
J’essayais encore à nouveau quand une personne s’adresse à moi:
- Sage-femme, qu’est-ce qui ne va pas ?
Je tourne la tête et je constate que c’est le directeur de l’hôpital où je travaille.
- C’est ma voiture qui a un problème, Monsieur le Directeur;
- As-tu appelé ton mécanicien ?
-C’est ce que j’essaye de faire sans succès.
- Ok, si cela ne marche pas, je peux t’appeler le mien ;
- Non, Monsieur, je ne veux pas vous déranger.
- Je t’en prie, c’est un plaisir pour moi de t’aider.
Mon directeur téléphone à son mécanicien qui vient assez
diligemment et s’occupe de la voiture ; comme cela allait prendre du temps, le directeur me
propose de me déposer chez moi. J’accepte et je donne mon contact au mécanicien qui
m’apportera la voiture, une fois réparée.
Le directeur de l’hôpital m’a assuré que je peux faire confiance à son mécanicien.
Pendant le trajet, le directeur me parle de façon familière et me donne beaucoup de courage pour
le procès ; jusque-là ce sont des relations professionnelles qui nous
lient; jamais nous n'avons conversé en privé; au cours de notre discussion, j’ai l’occasion
d’apprendre qu’il est veuf avec
deux enfants.
Décidément, j’ai rencontré deux veufs au cours de cette journée ! L'un très beau, l'autre très gentil.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 20)
Pendant le trajet, le directeur me parle de façon familière et me donne beaucoup de courage pour
le procès; jusque-là ce sont des relations professionnelles qui nous lient; jamais nous n'avons
conversé en privé;au cours de notre discussion, j’ai l’occasion d’apprendre qu’il est veuf avec
deux enfants. Décidément, j’ai rencontré deux veufs au cours de cette journée !
L'un très beau, l'autre très gentil.
Le Directeur de l’hôpital me dépose chez mon frère; je le remercie:
- Merci Monsieur le directeur, c’est très gentil à vous.
- Je t’en prie, je n’ai fait qu’assister une de mes collaboratrices dans le besoin ; je ne pouvais pas
vous voir au bord de la route et vous dépasser.
- Lorsque j’ai été enfermée, vous étiez venu me rendre visite, plusieurs fois d’ailleurs; j’ai été
énormément touchée par votre bienveillance;
- C’est tout à fait normal surtout qu’il s’agit de vous;
- Ah oui ? Suis-je si spéciale ?
- Oui, vous êtes une Sage-femme très appréciée et qui fait son travail avec amour et conscience;
malheureusement, l’être humain n’étant pas parfait, il y a eu des aspects négatifs mais cela se
comprend;
- Merci beaucoup pour la compréhension ;
- Parlant du procès, votre Avocate m’a dit que ce serait dans une semaine; elle m’a rappelé que je
devrais témoigner sur votre moralité et sur la façon dont vous exercez votre profession. Sachez
Sage-femme, que je le ferai avec beaucoup de plaisir.
- Merci d’avance, monsieur le directeur ;
- Comment vont vos enfants ? J’espère que vous tenez le coup ;
- Dieu me donne la force de vivre sans mes filles même si elles me manquent ; je vais y aller
maintenant.
- Ok, ce fut un plaisir de vous avoir conduit chez vous.
Je descends de la voiture et fais un signe de la main en guise d’au revoir à mon patron; je connais
le directeur depuis cinq ans qu’il a été nommé comme directeur de cet hôpital.
C’est mon troisième directeur en neuf ans. Je dois avouer qu’il a bonne presse auprès de tout le
personnel; il est Médecin de profession. Il est assez réservé et ne se mêle pas de ce qui ne le
regarde pas ; il traite ses collaborateurs avec sympathie et équité, même s’il est adepte de la
rigueur. La plupart du temps, je ne le vois que quand je le croise dans un couloir ou dans la cour
de l’hôpital où encore quand il fait une rencontre spéciale avec les Sage-femmes.
Personnellement, je suis allée le voir une fois pour être exemptée des gardes de nuit mais il n’avait
pas accédé à ma requête. Il estimait que cela serait perçu comme une mesure de favoritisme vis-à-
vis de moi.
Selon lui,toutes les Sage-femmes, les Médecins, Infirmiers etc… doivent être soumis aux gardes
de nuit sauf pour des raisons de santé assez pertinentes.
Mon directeur s’appelle Franck Callo mais nous l’appelons tous «Directeur ».
Je rentre dans la maison de mon frère et comme d’habitude, je suis accueillie chaleureusement par
ses enfants et Chris ; j’aime bien être ici malgré tout.
Mon frère et sa femme font tout pour que je me sente à mon aise.
Après un court moment de plaisanterie avec mes neveux, je rentre dans ma chambre me changer.
Je rejoins Colette à la cuisine. Une bonne sauce d’épinards mijotait au feu.
- Bonsoir Colette ;
- Salut Raissa, comment était ta journée?
- Pas mal ; je prépare tout doucement le procès;
- Tout ira bien par la grâce de Dieu. Je n’ai pas entendu le bruit de ta voiture.
- Ah ! j’ai eu une panne en route ;
- Je vois ; tu as appelé le mécanicien puis tu as pris taxi ;
- Non, je n’ai pas pu le joindre ; au même moment le directeur de l’hôpital passait par là ; il m’a
proposé de faire appel à son mécanicien qui est venu sans tarder; ensuite, il m’a déposé.
- Oh ! Il est bien gentil, lui.
- Je le constate aussi ; Abdoulaziz n’est pas encore rentré ?
- Non, il m’a dit qu’il allait rentrer tard.
- J’espère que tu ne vas pas nous obliger à l’attendre pour manger car j’ai faim.
Colette sourit et répond:
- Non, pas du tout, tu pourras manger de même que les enfants; moi, je vais l’attendre;
- Madame la bonne épouse.
Nous nous esclaffons toutes les deux puis Colette me sert un jus de fruits frais que je savoure avec
délectation.
Une fois le repas prêt, je mange et je me retire avec Chris dans ma chambre. Il apprend à
prononcer des mots et cela m’amuse. Quel dommage que son père soit aussi mauvais ! Je vais
bientôt être jugée pour avoir provoqué la mort d’une femme dont je prends soin du fils. Quelle
ironie ! De toute façon, enfant adultérin ou pas, il a droit à la vie et à une bonne prise en charge.
Il n’a pas demandé à naître ; que Dieu me préserve de vouloir du mal de ce petit être innocent !
Avant de m’endormir je pense à nouveau à ce que Maître Justine m’a dit concernant mes deux
collègues qu’elle suspecterait ; j’aurais vraiment aimé savoir de qui il s’agit. Mes pensées vont sur
Adéle et sur Silicatou.
Adèle du fait qu’elle soit la première venue ce jour-là et Silicatou parce que c’est la plus rigide
d’entre nous.
Mais ce qui me préoccupe le plus, c’est la raison pour laquelle elles auraient agi ainsi ? Je ne peux
même pas dire que c’est pour me nuire car pour ce faire, c’est qu’elles connaissent Sonia et savent
qu’elle a une liaison avec Stanley ; mais
même dans ce cas, comment sauront-elles qu’elle viendra accoucher cette nuit et dans l’hôpital où
je travaille ?
Je pense qu’il y a des données que je
ne maîtrise pas. Mieux, j’enlève mes pensées de là. Ce qui compte, c’est qu’avec le témoignage de
Béatrice, je suis quitte. Merci mon Dieu !
Je somnolais déjà quand mon téléphone sonne ;
- Allô.
- Bonsoir Madame ; je suis devant votre portail ;
- Qui êtes-vous ?
- Le mécanicien ;
Je m’étonne de ce qu’il ait connu la maison mais je comprends qu’il a dû appeler mon Directeur
qui le lui a indiqué. Je sors le rencontrer ; il me fait rentrer la voiture à l’intérieur et me remet les
clés;
- Combien je dois ?
- Monsieur Callo m’a dit que c’est lui qui doit payer.
- Comment ? Non, dites-moi combien cela fait ; je vous paie moi-même ;
- Je ne peux pas prendre ; à bientôt Madame.
Le mécanicien me laisse et s’en va. Je ne comprends pas pourquoi le Directeur devrait payer la
réparation de ma voiture; il est décidément trop généreux.
Je retourne dans ma chambre. Avant de m’endormir, je prie comme c’est mon habitude
maintenant depuis quelques mois.
Je prends le livre Saint pour lire une partie que j’ouvre au hasard; le livre s’ouvre sur une page et
mes yeux se focalisent sur ce paragraphe :
«Ne crains rien, car je suis avec toi; Ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu; Je
te fortifie, je viens à ton secours, Je te soutiens de ma droite triomphante. Voici, ils seront
confondus, ils seront couverts de honte, Tous ceux qui sont irrités contre toi; Ils seront réduits à
rien, ils périront, Ceux qui disputent contre toi.… »
Je sais que c’est une coïncidence mais je dois admettre que cette lecture me réconforte
énormément ; c’est comme si Dieu me parlait s’agissant du procès ; c’est comme s’il me
promettait de me secourir et de couvrir Stanley de honte.
Coïncidence ou pas, je prends cette parole pour moi.
Je me réveille le lendemain toute rassurée ; je prends mon téléphone après avoir prié et je
compose le numéro de Béatrice qui m’assure à nouveau de son soutien ; j’appelle Mairi qui me
certifie avoir été contactée par l’Avocate ; elle
m’a promis témoigner sur ma moralité et la façon dont je me suis occupée d’elle lors de son
accouchement.
Je m’apprête et me rends au boulot. Avant même de me rendre à la maternité, je fais un saut dans
le bureau du directeur.
- Bonjour patron.
- Bonjour Sage-femme ; ça va bien ce matin ?
- Oui; merci de tout cœur pour hier ; mais vous savez, vous n’auriez pas dû payer le mécanicien ;
- Et pourquoi pas ? On prend soin de ce qui nous est précieux.
- Pardon ?
- C’est une façon de parler; c’est juste pour dire que vous êtes une bonne collaboratrice donc j’ai
du plaisir à prendre soin de vous.
- C’est très aimable à vous. Bonne journée de travail.
Je me rends à la section Maternité et je croise Safiétou qui venait d’arriver:
- Alors, ma copine, on dit quoi ce matin ?
- Ça va, et toi ?
- Ça va aussi chez moi, tu venais d’où comme cela ?
- Du bureau du directeur ;
- Il y a un problème ?
- Non, c’était juste pour lui dire merci;
- De quoi ?
Je raconte à Safiétou comment notre chef m’a assisté hier. Elle répond:
- Cela ne m’étonne pas ;
- Comment !
- Ce directeur t’a toujours admiré; c’est toi qui ne l’as pas remarqué;
- Quoi ! Safiétou, arrête de dire des bêtises.
- Mais non, je t’assure.
- Il ne m’a jamais rien dit, ni rien fait de déplacé ;
- Il ne ferait jamais une telle chose ; le directeur est un homme sérieux ; je connais un peu son
histoire ; tu étais une femme mariée, jamais il n’allait te faire des avances.
- Je suis toujours une femme mariée, Safiétou.
- Prrr ; mariée à qui? ok, tu as raison, tu es mariée sur papier. Pour peu de temps oui. Dieu merci
c'est seulement le mariage civil que tu as fait. Tu as bien fait d'attendre pour le religieux.
- Arrête, Safiétou.
Elle rit aux éclats et nous joignons nos deux mains dans un claquement en continuant de nous
marrer.
Safiétou reprend :
- Alors, tu es prête pour le procès ?
- Est-ce que j’ai le choix ?
- Tout ira bien, j’en suis sûre. Avez-vous des éléments nouveaux ?
- Non.
Safiétou est mon amie et j’aurais bien aimé lui dire mais Maître Justine m’a formellement interdit
de parler de nos démarches à qui que ce soit. Ce n’est pas que je n’ai pas confiance en Safiétou,
mais pour ne pas regretter demain d’avoir trop parlé, autant respecter les consignes de mon
Avocate.
La preuve, on s’est déjà au cours de
notre vie, tous une fois, trompés sur une personne qu’on croyait sincère ; Stanley en est un
exemple.
Même les amis les plus proches peuvent devenir un jour nos ennemis. Mon Avocate par
expérience sait exactement ce qu’il faut que je fasse, alors je suis ses instructions.
Pendant que Safiétou et moi bavardons, je sens un individu s’approcher de nous ; il s’arrête à
notre niveau et s’adresse à nous.
- Bonjour mesdames ;
Nous lui répondons ; en le regardant, je me rends compte que nous nous sommes déjà vues ;
précisément hier.
- Madame Raissa ?
- Oui, Monsieur Ezéchiel ; que faites-vous ici ?
- C’est encore mon fils ; ce petit va finir par me rendre fou ;
- Que se passe t-il avec lui ?
- Il est sorti avec des amis hier soir sans rien me dire ; pendant que je dormais, il est sorti
discrètement ; au retour, celui qui a conduit a tellement bu qu’ils ont eu un accident ; ils ont été
emmenés ici.
Alors, je suis venu le voir et j’allais à la pharmacie pour acheter des
médicaments ordonnés par le Médecin.
- Oh ; désolée pour vous, Ezéchiel ; il est en Médecine ?
- Non, aux urgences ; mais le Médecin m’a dit qu’il va s’en sortir.
- Quel est son nom ? Je vais le voir.
- Semondzi Luc ;
- Ok, mais tu t’étais arrêté à notre niveau, c’était pour quoi ?
- Je voulais savoir si l’hôpital disposait d’une pharmacie ?
- Oui mais tous les médicaments ne s’y retrouvent pas ;
- Merci bien Raissa, si je peux me permettre.
- Beaucoup de courage Ezéchiel. A tout à l’heure.
Après qu’Ezéchiel nous ait quitté, Safiétou attaque:
- Mais où as-tu fait la connaissance de ce beau type ? Walaye, si je n’étais pas mariée, je ferai
quelque chose ; il est super beau.
- Safi, tu me fais rire.
- Tu fais des rencontres deh !
- Safi, laisse-moi tranquille ; allons travailler, les femmes sont nombreuses à nous attendre.
Plus tard, comme promis, je me rends aux urgences pour voir le fils d’Ezéchiel. Son état est stable
et il va s’en sortir avec les soins. Je discute aussi avec lui un moment et lui donne du courage.
Je reviens à la maternité pour finir ma journée ; lorsque je m’apprête à partir, Adèle ma collègue
me fait attendre pour me parler ;
- Raissa, j’ai le regret de te faire savoir que je ne serai plus disponible pour témoigner à ton procès
dans quelques jours.
Je fronce les sourcils, étonnée ; je l’interroge:
- Mais Adèle, pourquoi ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 21)
Je reviens à la maternité pour finir ma journée; lorsque je m’apprête à partir, Adèle ma collègue
me fait attendre pour me parler;
- Raissa, j’ai le regret de te faire savoir que je ne serai plus disponible pour témoigner à ton procès
dans quelques jours.
Je fronce les sourcils, étonnée; je l’interroge:
- Mais Adèle, pourquoi ?
- Ma mère est malade depuis deux jours; je vais prendre un congé et me rendre à son chevet au
village.
- Oh, désolée, c’est si grave ?
- À vrai dire non, les maladies de vieillesse ; mais en dépit de tout cela, il faut dire que cela fait un
moment que je n’ai pas vu ma mère; on se parle au téléphone uniquement.
- Ok ; je te comprends; mais tu sais que c’est important que tu témoignes; plus il y a de gens qui
attestent de ma bonne moralité, plus j’ai des chances de ne pas être accusée. Si la maladie de ta
mère n’est pas si grave, pourrais-tu, s’il te plait, aller la voir après le procès ? C’est dans cinq
jours ;
- Ah Raissa, c’est ce que je me disais aussi que j’allais faire; mais j’ai eu une discussion avec
Rosalie et elle m’a dit quelque chose qui m’a troublé; alors je ne suis plus tranquille.
- Qu’est-ce qu’elle a bien pu te dire pour te faire changer d’avis si ce n’est pas indiscret ?
- Elle m’a dit que ma mère est vieille; et que la mort ne prévient pas; qu’il vaut mieux que j’aille
la voir très vite et rester près d’elle quelques semaines pour ne pas avoir à le regretter.
- Vu dans ce sens, Rosalie a raison. Dommage pour moi;
- Non Raissa, garde la foi; avec ou sans mon témoignage, si Dieu le veut, tu seras déclarée
innocente.
- Merci Adèle ;
- Ma mère est dans le Nord, c’est loin, sinon j’allais revenir juste pour témoigner et repartir;
- Aucun problème Adèle, j’ai compris tes motivations. Ne te fais pas de souci pour moi ; comme
tu l’as dit, Dieu sera au contrôle.
Quand bien même j’ai compris les raisons avancées par Adèle, je me suis posée des questions ;
j’espère juste qu’elle n’est pas coupable; je sais que la coupable est parmi mes six collègues;
j’exclus d’office Juliette car elle n’était pas là, c’est elle qui était de garde et m’a passé le témoin;
Anne-Marie était en voyage; j’ai d’ailleurs fini par comprendre ce voyage brusque; c’était la mère
de
son mari qui était souffrante au village et on les a appelé car la vieille était dans un état critique.
Elle a d’ailleurs finir par mourir.
Je ne sais pas pourquoi mon cœur exclut aussi Safiétou. Il reste donc Adèle, Rosalie et Silicatou.
Si je dois raisonner humainement, c’est Adèle la plus suspecte car après que je lui ai passé le
témoin, elle était seule dans la salle en attendant que les autres n’arrivent; je suppose qu’à
l’arrivée des autres, c’est qu’Adèle est déjà là donc les autres n’auraient pu rien faire; or, Béatrice
a bien dit que ma collègue était seule avec Hermione.
Logiquement, c’est Adèle et voilà qu’elle ne peut même plus témoigner. J’espère que sa mère est
réellement souffrante. Quel manque de chance pour moi que Rosalie lui ait suggéré de partir tôt.
Rosalie est la moins bavarde d’entre nous mais elle est très proche d’Adèle comme je le suis de
Safiétou.
Dans tous les cas, c’était déjà une déception pour moi de savoir que l’une de mes collègues est
une criminelle ; j’ai en même temps la chair de poule.
Après avoir écouté Adèle, il faut que j’appelle Maître Justine pour l’informer.
Je lance son numéro et elle décroche très vite:
- Oui, Raissa.
- Bonjour Maître ; j’espère que la journée a été bonne ;
- Oui, fatigante mais concluante; j’ai gagné un procès;
- Félicitations Maître; en fait j’appelais pour vous porter une information.
- Je t’écoute Raissa.
Je lui résume ma conversation avec Adèle. Maître Justine répond:
- On ne peut pas l’obliger à témoigner en ta faveur; tu as déjà beaucoup de témoins; ne crains rien;
garde juste ton moral haut et aie la foi.
- Merci Maître; des nouvelles du côté de Hermione ?
- Non, mais avec Béatrice et une pléthore de témoignages de bonne moralité, je peux déjà
aisément atteindre mon résultat ;
Je ne doute pas des capacités de mon Avocate; à force de la côtoyer et de la voir gagner des
procès, j’ai compris que mon frère ne m’a pas choisi n’importe qui.
J’ai compris avec elle que pour exceller dans un métier, il faut en avoir la passion; Maître Justine
est passionné; cela se sent que plus qu’un boulot pour gagner sa vie, ce métier est une véritable
passion pour elle.
Elle ne peut qu’y exceller car elle se lève tous les jours pour faire ce qu’elle aime; c’est une
vocation professionnelle.
En plus, elle est croyante; elle a l’habitude de dire « Recommande à l'Eternel tes
oeuvres, et tes projets réussiront.»
Elle est sans doute l’une des plus brillantes Avocates de notre pays.
Dès que je raccroche, je vais voir le directeur de l’hôpital pour solliciter une permission; en effet
je compte ne plus venir au boulot trois jours avant mon procès.
-Bonsoir monsieur le directeur.
- Sage-femme, asseyez-vous; que puis-je pour vous ?
- Voilà, mon procès aura lieu dans cinq jours; je souhaite obtenir une permission pour cesser de
venir à compter de mercredi. J’ai déjà fait une demande écrite que j’ai déposée à l’administration.
Je souhaite que la réponse soit favorable.
-C’est tout à fait normal Sage-femme, vous avez besoin d’aérer votre esprit et de vous préparer
psychologiquement au procès. La réponse sera favorable; vous avez tout mon soutien.
- Merci directeur; j’apprécie énormément votre gentillesse; que Dieu vous bénisse !
- Amen!
- A demain.
En sortant du bureau du directeur de l’hôpital, je me dirige vers la section des urgences pour voir
Luc, le fils d’Ezéchiel avant de partir; son état s’améliore et si tout va bien, au plus tard le
lendemain, une chambre lui serait attribuée en médecine.
J’en profite pour échanger un moment avec Ezéchiel. Sa sœur était venue l’assister et était
quasiment là tout le temps, ce qui lui permettait d’aller et venir.
- Merci encore d’être passée par ici, Raissa ;
- C’est tout à fait normal ; dans ces moments, nous avons besoin d’assistance morale ;
- Merci ; je n’ai rien mangé depuis le matin et j’allais au restaurant ; tu veux bien
m’accompagner ?
- Dommage ; je ne pourrai pas; je dois rentrer ;
- Une autre fois alors.
- Oui, certainement.
En fait, l’invitation d’Ezéchiel me plaisait bien mais je ne pouvais pas accepter; je le connaissais à
peine et pour moi, il serait inconvenant d’aller m’asseoir autour d’une table avec un homme que
j’ai croisé juste hier.
Nous avançons ensemble vers le parking de l’hôpital pour entrer dans nos voitures.
Nous poursuivons la discussion:
- Alors, Raissa, tu travailles ici depuis longtemps ?
- Oui, bientôt dix ans. Dans cette ville, je n’ai travaillé que dans cet hôpital;
- J’apprécie la qualité des soins ;
-Vous aviez l’habitude de venir ?
- Pas l’habitude; mais quand mon fils ou moi avons un souci de santé, c’est ici que nous venons;
je préfère que tu me tutoies.
- Pas de problème; cela ne doit pas être facile de gérer un enfant tout seul;
- Quand il était petit, oui, c’était pas très facile; mais à présent, il est grand. Il est autonome; tu as
des enfants Raissa ?
- Oui, trois filles et un garçon.
- Dis donc ! Tu en as quatre ! On dirait pas;
- Pourquoi ?
- Tu es encore jeune et très belle.
Les compliments d’Ezéchiel me caressent les oreilles; j’ai aimé les entendre même si je fais
l’effort de ne rien laisser paraître; il me fixait avec une telle intensité que je me sens mal à l’aise.
Assurément, ce type me fait de l’effet; c’est grave ! Comment est-ce que cela peut m’arriver ?
Quelle idiote je suis ! Au lieu de me concentrer sur mon procès, je suis là à désirer un homme
comme une
adolescente qui découvre le monde féérique des sentiments; pourtant, je
suis encore mariée !
Oh Dieu ! Donne-moi la force de me concentrer sur l’essentiel et non sur l’accessoire. Mon procès
et rien d’autre!
Je n’avais pas envie de me séparer d’Ezéchiel, mais je fais l’effort de mettre un terme à la
discussion, une fois que nous étions arrivés à l’endroit où étaient garées nos voitures.
- Bien, Ezéchiel, je vais devoir te laisser;
- Merci pour ta sollicitude, Raissa. Rentre bien.
J’étais en train d’ouvrir la portière de mon véhicule quand une mercedez gare tout juste à côté de
la mienne.
Je connais bien l’homme qui en sort.
Il avait le regard terne et fatigué; il a peut-être fait beaucoup de courses. Il doit être venu voir une
personne ici; l’hôpital est un lieu où on rencontre tout le monde ; c’est une croisée de chemins.
Etrangement, le nouvel arrivant connaissait aussi Ezéchiel puisqu’ils se saluent chaleureusement.
Le monde est petit, pensais-je dans ma petite tête.
Après avoir fini de saluer Ezéchiel, il tourne la tête sur le côté et se rend compte que c’est moi qui
suis assise dans la voiture, voulant démarrer.
- Raissa ! Que fais-tu ici ?
- C’est ici que je travaille; et toi alors?
- Mon petit frère a fait un accident hier soir; il était avec des amis en voiture. Il est ici depuis hier
soir.
- Ah ! les jeunes d’aujourd’hui.
Ezéchiel intervient:
- Je parie qu’il était avec mon fils alors dans la même voiture. Ils ont tous été emmenés ici;
- Vraiment ! Ces jeunes ! Toujours à n’en faire qu’à leur tête;
- Je vais infliger une bonne punition à mon fils quand il sortira d’ici ;
- Il suffira de lui parler ; ce monde juvénile est difficile à cerner ;
- Les idées défendues par nos aînés méritent d’être rappelées à une jeunesse qui est un peu perdue
aujourd’hui; alors cher ami, je vois que tu connais bien Raissa;
- Oui, c’est la femme à un ami, enfin, si je peux l’appeler ainsi.
- Et pourquoi pas ? demanda Ezéchiel.
- C’est un pauvre con qui jette sa femme en prison pour soi-disant avoir tué sa maîtresse et son
fils!
- Quoi !
Je suis gênée par cette déclaration; je suis toute retournée. C’est comme si j’étais exposée; je
n’aime pas ça !
Comment peut-il parler de façon aussi crue et me rendre nue comme un ver de terre aussi
brusquement ?
Une légère sueur froide perle de mon front. Je suis décontenancée.
Mais qu’est-ce qui prend ce Commissaire de parler de cette affaire à Ezéchiel qui est encore
presque un inconnu!
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 22)
Une légère sueur froide perle de mon front. Je suis décontenancée.
Mais qu’est-ce qui prend ce Commissaire de parler de cette affaire à Ezéchiel qui est encore
presque un inconnu!
A ma grande surprise, la déclaration du Commissaire n’a pas du tout troublé Ezéchiel qui s’écria:
- C’est qui ce con qui te met en prison ? Je te connais à peine Raissa, mais je peux sentir que tu es
une femme fascinante et j’adorerais mieux te connaître. Tu dégages une bonne aura.
J’avais du mal à y croire; j’étais si impressionnée par la réaction d’Ezéchiel que je ne sais quoi
répondre. Devant cette attention inespérée, mon malaise disparaît et j’accepte continuer la
conversation ;
Ezéchiel reprend:
- Si je comprends bien, tu es en liberté provisoire ;
- Oui;
- Je comprends alors que Maître Justine Assaba est ton Avocate ;
- En effet ;
- Et c’est pour quand le procès ?
- Dans cinq jours.
- S’il plaît à Dieu, mon fils serait alors guéri; je viendrai te soutenir. Tu es croyante ?
- Oui Ezéchiel;
- Dans ce cas, recommande ton sort au Dieu Tout-Puissant et Il agira en
ta faveur. Je vais te porter dans mes prières afin que tout se passe bien;
même si je ne sais pas encore de quoi il s’agit, je suis persuadée que tu n’es pas coupable. Et si tu
l’es, c’est sûrement de façon involontaire.
Les mots d’Ezéchiel accroissent encore mon admiration pour lui. Je suis toute émue qu’un
inconnu croit autant en moi.
- Je suis désolée que tu sois en train de discuter avec une ex-détenue; ce sont des choses qui
arrivent.
- Mais non Raissa, ne te sens pas embarrassée ; et n’utilise pas des termes de ce genre pour te
qualifier ! Même si tu étais coupable, personne n’est saint; tout le monde commet des erreurs et la
plupart du temps, ce sont les erreurs qui marquent un nouveau départ; moi
qui te parle, je suis devenu un grand chef d’entreprise parce que j’avais eu à séjourner en prison
pendant deux ans; c’est là que j’ai pris conscience et c’est là que j’ai connu la Puissance de Dieu.
J’étais sidérée par tout ce qu’Ezéchiel me disait. Moi, qui ne voulait pas qu’il soit informé !
- Tu es très fervent alors !
- Très fervent, je ne sais pas; mais, je sais une chose, je crois en un Dieu Puissant et je sais que
toute chose concourt au bien de ceux qui l’aiment. La vie de Dieu nous est donnée pour que nous
règnons sur la
terre. Aucune situation ne doit nous émouvoir.
Plus d’inquiétude à avoir ; sois sereine. La honte ne sera pas ton partage.
- Merci Ezéchiel, c’est très aimable à toi. Tu ne peux pas imaginer à quel point tu me réconfortes !
Le Commissaire s’introduit dans notre discussion:
- Au fait, Raissa, j’étais avec ton mari il y a deux jours;
- Cela ne m’intéresse pas;
-En tout cas, il est certain d’une chose: c’est que tu ne peux être innocentée.
- Je me demande ce sur quoi il compte pour avoir une telle assurance; on dirait même qu’il est
heureux de me voir condamnée ;
- C’est exactement l’impression que j’ai eue.
Ezéchiel intervient à nouveau:
- Un homme normal ne peut pas se réjouir de voir son épouse et la mère de ses enfants, enfermée
même si elle a commis une faute grave; il y a quelque chose que tu ne sais pas, Raissa, et tu dois
chercher à le savoir. Cette chose nourrit la haine dans le cœur de ton mari.
Bref, si nous avons l’occasion de nous revoir dans d’autres circonstances, nous
irons dans les détails; là, je commence à avoir très faim.
- Merci pour la discussion ; ravie de vous avoir croisé Commissaire ; vous serez au procès ?
- Naturellement.
- Ok, au revoir à vous deux.
Pendant le trajet qui doit mener jusqu’au domicile de mon frère, je pense encore à l’attitude du
Commissaire ; un vrai bavard mais je ne dois pas être ingrate car il faut avouer que sa langue
pendue m’a été
bénéfique; d’abord, cela m’a permis de découvrir un passé sombre de Stanley qui me servira
énormément dans la garde de mes enfants et même au procès, qui sait?
Ensuite, cette langue déliée a permis à
Ezéchiel d’être informé de l’affaire car je ne lui aurais jamais dit, du moins pas en ce moment.
Ses paroles m’ont réconforté et donné de l’assurance. J’ai aussi compris à travers son récit que
nous ne devons pas avoir honte de notre passé quel qu’il soit car c’est de ses erreurs qu’on bâtit
son futur.
A quoi bon vouloir cacher le passé s’il ne peut être effacé ? Autant l’assumer et y puiser les leçons
nécessaires pour bien construire son avenir; ainsi, notre passé doit être constamment pour nous un
lieu de référence pas un lieu de résidence.
Mon téléphone sonne; je ne voulais pas décrocher étant en route mais la personne insiste. Je
regarde l’écran: c’est Safiétou.
- Allô
- Oui Safiétou, parle-vite je suis au volant;
- Rien de grave ; juste te dire que tu as oublié ton porte-monnaie dans le bureau de la maternité.
- Oh zut !
- Je voulais savoir si tu reviens chercher où s’il vaut mieux que je rentre avec et te l’apporte
demain.
- Prends cela avec toi; je viens chez toi chercher; si je viens avant toi, je t’attendrai.
Heureusement que Safiétou m’a prévenu sinon ma petite trousse aurait passé la nuit à l’hôpital et
la Sage-femme de garde serait tombée là-dessus. Nous les femmes, on se connaît; elle sera
curieuse de voir ce qu’il y a l’intérieur ; or j’ai à l’intérieur une carte mémoire qui contient
des enregistrements d’entrevues avec Béatrice et Hermione;
Maître Justine n’est pas informée, mais j’avais pris cette précaution à titre préventif et il m'a été
été suggéré par
Abdoulaziz. Si jamais la Sage-femme de nuit était la coupable, ce serait une information
intéressante pour elle.
Je tourne au prochain carrefour pour prendre le chemin du domicile de
Safiétou ; dès que je vais récupérer mon porte-monnaie, la carte-mémoire est la première des
choses que je vais vérifier.
J’arrive chez Safiétou en peu de temps et elle arrivait presque au même moment. Elle m’invite à
rentrer à l’intérieur ; j’accepte ; dès que nous sommes installées, elle me remet le porte-monnaie ;
je pousse un ouf de soulagement.
Safiétou me questionne:
- Pourquoi tu soupires ?
- Non, pour rien, je suis juste contente que tu me l’aies pris ;
- Même si cela restait à l’hôpital, tu allais le retrouver ; à moins que tu n’aies des millions à
l’intérieur.
- Tu sais qu’il n’y a pas grand-chose, Safi;
- Et comment l’aurais-je su Raissa ? Tu n’imagines pas que je fouillerai ta trousse quand-même !
Safiétou l’a dit avec un air énervé.
- Mais Safi, ne t’énerve pas pour si peu.
- Raissa, honnêtement, nous sommes des amies mais tu ne me connais pas ; tu ne me fais pas
confiance.
- Safi, d’où sors-tu de telles bêtises ?
- Tu te méfies de moi; tu me caches des choses même quand je te les demande.
-Pourquoi tu parles ainsi Safi ?
- Je pensais que tu pouvais mettre ta main au feu pour moi ; mais tu te méfies de moi au même
titre que les autres collègues. Je croyais bêtement que je pouvais te considérer comme amie. Mais
hélas! je me suis trompée.
Je ne comprends pas pourquoi Safi parlait subitement ainsi. C’est vrai, je me méfie maintenant de
toutes mes collègues, elle y compris ; mais je la considère toujours comme mon amie.
J’essaie de mieux cerner ce qu’elle essaie de me dire en la questionnant:
- Safi, je ne comprends rien à ce que tu me dis. Sois plus claire.
- Oh que si ! Tu comprends !
- Non, je ne comprends rien ;
- Très bien, c’est simple ; je vais te poser une question que je t’ai déjà plusieurs fois posé ; et tu
me donneras une réponse ;
- Vas-y ;
- Comment évolue les investigations avec l’Avocate ?
J’avoue que cette question m’embarrasse; pourquoi tient-elle à le savoir ? Alors, pour la ènième
fois, je lui réponds que l’Avocate ne me dit pas grand-chose. Elle se fâche.
- Voilà; après, c’est pour dire que tu ne te méfies pas de moi. Tu as récupéré ton porte-monnaie; tu
peux partir ; à demain.
- Ecoute Safi, tu ne dois pas te fâcher pour si peu; mon procès est dans cinq jours; est-ce le
moment que tu as trouvé pour faire palabre avec moi ?
-Raissa, je suis vraiment déçue de toi; depuis que tu me connais, t’ai-je déjà donné des raisons de
douter de moi ?
- Pas du tout.
- Alors, pourquoi me caches-tu que l’amie de Sonia qui l’a accompagnée le jour de
l’accouchement a séjourné dans notre hôpital ?
Là, je suis totalement surprise. Pourquoi cette réponse l’intéresse tant ?
Je change de ton :
- Safi, pourquoi cela t’intéresse tant ?
Elle fait un sourire ironique et bat des mains.
- Il ne manquerait plus que cela; tu me suspectes;
Elle secoue la tête et reprend:
- Je ne devrais pas te le dire puisque tu n’as aucune confiance en moi ; mais je te le dirai pour que
tu arrêtes de m’offenser en me soupçonnant; c’est Adèle qui pensant que je le savais déjà, m’en a
parlé; elle m’a dit que la dame qui a accompagné Sonia séjourne à l’hôpital suite à un accident et
tel qu’elle a parlé, tu le savais puisqu’elle a même dit que c’est toi qui l’aurais amené ici.
J’ai fait comme si de rien n’était et comme si tu me l’as dit; depuis ce temps, j’attendais que tu
m’en parles, mais non; tu te méfies de moi.
Quelle hypocrisie de ta part ! Raissa, ce que tu ne sais pas, si j’ai tué Sonia, je ne te laisserai
jamais aller en prison;j’aurais alors déclaré que je suis la coupable.
Mais je ne la connais ni d’Eve, ni d’Adam et je suis arrivée au boulot après sa mort. Et cela,
j’espère bien que Maître Justine saura te le faire comprendre.
-Excuse-moi Safi, je….
Elle me coupe net:
- Tu m’as déjà caché une première fois que tu avais accouché la maîtresse de ton mari ; j’ai
pardonné; mais tu continues de me cacher des choses; je ne traîne pas avec les hypocrites parce
que je n’en suis pas une ; pour moi, la vraie amitié, c’est le soir partagé, la main tendue et la
complicité ; pour moi, la vraie amitié supprime tout mensonge, tout secret, toute trahison et c’est
juste la confiance; tu me diras que j’en demande trop mais avec moi ça passe ou ça casse. Tu peux
partir;
- Safi, je ne sais plus où j’en suis; je me devais d’être prudente ; il faut que tu me comprennes;
Safiétou garde le silence. Je m’adresse de nouveau à elle mais elle me demande de la laisser seule.
On dirait que le diable est à mes trousses; pourquoi faut-il que je rencontre toujours des obstacles
quand le chemin semble se redresser ?
Est-ce à quelques jours du procès que tout ceci doit arriver afin que Safiétou ne témoigne plus ?
En plus d’Adèle, cela fait déjà deux témoins de moins.
Pourquoi Safiétou ne comprend pas que je dois me méfier de tout le monde et même de mon
ombre ? C’est vrai que dans les moments difficiles, elle m’a démontré que je peux compter sur
elle. Mais je ne suis pas Dieu pour savoir ce qui se passe dans le cœur des autres !
Parlant d’Adèle, comment elle a su que c’est l’amie de Sonia qui est l’accidentée que j’ai amenée
à l’hôpital?
Pourtant dès que Maître Justine me l’a interdit, je me suis éloignée d’Hermione.
Je n’ai plus de doute, c’est Adèle la coupable et il faut que j’en parle à Maître Justine dès demain.
Son détective doit suivre ses traces car son affaire de village
pour voir sa mère n’est pas claire.
Bref, c’est mon analyse. Pourvu que
l’histoire-ci se termine vite pour que je reprenne ma vie en main.
A force de méditer, je n’ai même pas vu le temps passer et me voilà déjà chez mon frère. Comme
d’habitude, je ne suis même pas encore descendue de la voiture que mes neveux et Chris
accourent déjà vers moi; c’est toujours la même routine; ils sont heureux de me voir et j’en suis
ravie aussi.
Cela me change de la tristesse que je ressens après mon malentendu avec Safiétou.
Je remarque les voitures de mon frère et sa femme et je comprends qu’ils sont tous deux rentrés.
Les enfants s’agrippent à moi, chacun voulant me manifester sa joie plus que l’autre. Comme
j’envie cette étape de leur vie qu’est l’enfance ! C’est le monde de l’insouciance, de l’innocence,
de la joie et de la pureté.
Les enfants sont toujours gais, sans
soucis, sans chagrin ; ils se coulent une douce existence, sans songer au
lendemain. Leurs cœurs encore tendres et novices ne connaissent pas la noirceur et la méchanceté.
Leurs caresses enfantines sont pures et sans aigreurs.
Parfois, j’aimerais bien redevenir enfant; ne pas avoir à penser à la gestion du quotidien; c’est fou
qu’on ne réalise l’importance d’une chose que lorsqu’elle n’existe plus.
Ma nièce très bavarde me souffle déjà que des visiteurs étaient dans la maison:
- Tantine, il y a deux personnes au salon ;
- Ah oui ? Qui sont-elles ?
Mon neveu réagit vivement:
-Tais-toi, petite bavarde, maman a dit que c’est une surprise pour tantine et toi tu veux déjà lui
dire; tu parles trop.
Je les calme rapidement avant que cela ne dégénère; je les connais ; ces petits enfants de neuf et
six ans sont toujours en train de se disputer.
- Calmez-vous et allons-y tous.
Accompagnée des enfants, je fais mon entrée au salon quand je remarque une présence qui me
cloue sur place.
Je passe ma main au visage pour être certaine que je vois bien.
Malgré la situation de surprise, un sourire se dessine sur mon visage.
Je suis vraiment contente de la voir assise. Elle aussi me sourit. Il n’en fallait pas plus pour me
redonner ma joie perdue depuis ma conversation avec Safiétou.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 23)
Accompagnée des enfants, je fais mon entrée au salon quand je remarque une présence qui me
cloue sur place.
Je passe ma main au visage pour être certaine que je vois bien.
Malgré la situation de surprise, un sourire se dessine sur mon visage. Je suis vraiment contente de
la voir assise. Elle aussi me sourit. Il n’en fallait pas plus
pour me redonner ma joie perdue depuis ma conversation avec Safiétou.
Je ne lui demande pas ce qu’elle fait là et pourquoi elle est là ? Je suis juste heureuse. Elle court se
réfugier dans mes bras déjà grands ouverts avec son sourire séducteur que je lui ai toujours connu.
La plus belle récompense d’une mère
est le sourire franc de son enfant.
Je n’arrive pas à croire que Carine, ma fille aînée était là; je me disais que je ne retrouverai son
amour que quand je serai déclarée innocente à l’issue du procès.
Je caresse les cheveux de ma fille et je la serre encore tout contre moi. Elle est accompagnée de la
femme de ménage que je salue.
Elle me répond:
- Madame, vous m’avez demandé d’enlever de la tête de Carine que vous êtes une criminelle ;
mission accomplie.
- Merci infiniment, je ne te remercierai jamais assez ;
- Ne vous gênez pas Madame. Je vous avais dit que j’étais de votre côté;
-Que Dieu te bénisse pour cet acte salutaire !
Carine s’adresse à moi:
- Je suis désolée, maman, c’est papa qui m’a dit que tu as tué une femme et son bébé.
- C’est faux Carine, j’ai accouché une femme qui est morte après; mais rien ne prouve que c’est
de ma faute; et même si c’était le cas, c’est involontaire; ce n’est pas comme si j’ai décidé d’aller
tuer quelqu’un ! La bonne nouvelle est que le bébé n’est pas mort.
Oups ! J’ai parlé trop vite ! Il ne faut pas que Carine aille dire à Stanley que le bébé n’est pas
mort; il ne doit l’apprendre que le jour du procès.
J’essaie d’expliquer à ma fille qu’elle doit garder notre conversation pour elle;
- Ne t’inquiète pas maman, papa ne sait pas que je suis ici;
- Comment cela ! Vous avez menti pour sortir ? Ce n’est pas bien de mentir; tu n’es qu’un enfant.
- Cela fait une semaine que je demande à te voir maman mais papa s’y oppose et devient même
méchant avec moi. Alors nous avons dû mentir que nous allons au
marché ;
Quelle vie ! Ma fille est obligée de mentir pour me voir ? Oh Dieu ! Il faut que cela s’arrête; ce
n’est en aucun cas une bonne éducation qu’un enfant apprenne à mentir !
Vivement que le procès passe, que je divorce et que je récupère mes enfants !
Tout ceci, c’est la faute à Stanley.
Mais je m’occuperai de ces questions plus tard ; en attendant, je savoure le bonheur d’être avec
ma fille.
- Où sont tes sœurs ?
- Elles sont restées avec papa puisqu’elles ne savaient pas que nous venions te voir; dis-moi
maman, reviendras-tu un jour à la maison ?
- Je ne sais pas exactement et je n’ai pas de réponse à ta question ; mais très bientôt, nous allons
vivre à nouveau ensemble.
- Je l’espère, parce que papa dit que bientôt tu iras en prison et que tu vas y séjourner longtemps ;
qu’il faut que nous apprenions à vivre sans toi et que nous aurons une nouvelle maman.
Stanley dans sa folie, n’épargne même pas les enfants. Il leur raconte des sottises. Pourquoi tant
de haine ?
C’est comme s’il me cherchait depuis longtemps ! Je ne lui ai pourtant jamais rien fait de mal. Je
l’oublie et je me consacre à Carine. Je voulais m’assurer que cette période difficile sans sa mère
n’a pas perturbé ses études.
Il fallait que je m’assure que tout va bien. Elle est en dernière année du cours primaire et c’est une
étape décisive pour la suite de ses études.
Je n’avais plus envie de me séparer d’elle mais il ne fallait pas qu’elle traîne; c’est la mort dans
l’âme que je l’ai laissé partir.
Avant son départ, elle m’interroge:
- Papa m’a dit que tu seras jugée très bientôt; c’est quand ?
- Dans cinq jours, ma fille.
- Je croise les doigts pour que tout se passe bien; j’ai même demandé à Dieu de t’assister;
- Tu pries ? Mon Dieu, c’est merveilleux; qui te l’a appris ?
- C’est Tata.
Je me tourne vers la femme de ménage pour la remercier.
Je me souviens qu’elle a toujours été très croyante et parfois, elle m’énervait quand je l’entendais
prier ; je me disais qu’elle perdait son temps au lieu de travailler; aujourd’hui, j’ai compris.
Elle me répond:
- Ce n’est point la peine de me dire merci; j’ai fait mon devoir ; nous allons partir ; beaucoup de
courage pour le procès; je serai en prière pour vous.
Carine et la femme de ménage une fois parties, je me replonge dans ma tristesse et Colette l’ayant
remarqué, m’apostrophe:
- Que se passe t-il Raissa ?
- Rien du tout;
- Tu sembles préoccupée, ne me cache rien; que se passe t-il ?
- Safi est fâchée contre moi;
- Et pourquoi ?
Je lui raconte le problème car elle au moins connaît tout de l’histoire, étant donné que c’est mon
frère qui a engagé l’Avocate; en plus, c’est par elle que j’ai revu Hermione.
Colette répond:
- Au fond, vous avez toutes deux raisons Safi et toi ; Safi s’estime trahie parce qu’elle sait qu’elle
est sincère avec toi; mais de ton côté, tu n’as pas le pouvoir de déceler qui est sincère ou pas.
Surtout que l’ennemi est souvent proche de nous ; il ne vient jamais de loin; la
preuve, une de tes collègues est suspecte.
Stanley, ton propre mari et père de tes enfants, t’a trompé et jeté en prison sans état d’âme; le
Commissaire a trahi Stanley en te livrant ses secrets;
Hermione a trahi Sonia en pactisant avec son meurtrier; dans la Bible, Jésus a été livré par Judas,
son propre disciple; la réalité a montré que la fourmi qui te pique est presque toujours dans ton
pagne ; d’ailleurs pour bien te piquer, il faut que la fourmi t’approche.
C’est pourquoi avant d’ouvrir notre cœur à quelqu’un, nous nous devons d’avoir le maximum
d’assurance. Et en cela, tu as raison de te méfier. Mais si tu veux mon avis, Safi n’est pas
coupable.
- Moi je pense au contraire qu’elle l’est et qu’elle cherche un alibi pour ne pas témoigner et se
présenter au procès;
- Réfléchis bien Raissa; si elle l’était, elle n’allait jamais te dire qu’elle sait que tu as secouru
Hermione ; elle se contenterait de te faire surveiller discrètement.
Non seulement elle allait fouiller ton porte-monnaie mais elle n’allait même pas te le remettre.
En plus, elle t’a bien dit que tu finiras par découvrir le coupable. Mais je peux me tromper.
Commençons déjà par vérifier s’il y a toujours ta carte mémoire; J’ouvre le porte-monnaie et la
carte s’y trouve;
Colette me recommande d’insérer la carte dans mon téléphone pour m’assurer que c’est la même,
ce que je fais sans
tarder; c’est la même.
Colette poursuit:
- Mais pourquoi tu enlèves la carte du téléphone ?
- Parce qu’un téléphone peut se perdre;
- Tu as raison; est-ce que tu constates que Safi a fouillé ta trousse ?
- Non, je ne pense pas; tout est en ordre.
- La première action qu’elle aurait mené en tant que coupable aurait été d’apporter ta trousse chez
elle afin d’avoir le temps de la fouiller minutieusement; mais au contraire, elle t’a appelé depuis
l’hôpital pour t’informer; en plus, elle t’a dit ouvertement ce qu’elle te reprochait;
cela m’étonnerait qu’elle soit la coupable car l’ennemi passe toujours inaperçu; c’est bien plus
tard qu’on découvre ses actions et la plupart du temps, on est étonné.
Mais concernant Safi, seul Dieu sait si j’ai raison ou pas ; dans tous les cas, il faut que ton amie
Safiétou comprenne que tu dois, pour ta sécurité, garder certaines
informations pour toi ; elle a une conception erronée de l’amitié qui n’est en aucun cas une
obligation pour tout se dire; en effet, aujourd’hui vous êtes amies; et si demain vous ne l’êtes
plus ? Qu’est ce qui te garantit la confidentialité de vos échanges actuels ?
En fait elle est peut-être sincère et pense que tout le monde doit être comme elle mais elle doit
comprendre que le monde est tel que parfois, c’est ton propre orteil qui perce ta chaussure ; on
doit toujours être prudent ;
Safi ne doit en aucun cas se fâcher pour cela car l’amitié doit respecter la liberté de chacun; si tu
veux, après le procès j’irai lui parler;
- C’est plutôt avant qu’il faut y aller afin qu’elle puisse témoigner;
- Raissa, si je vais avant, elle penserait qu’on la supplie pour son témoignage. Ne t’inquiète pas
pour ce procès.
C’est en Dieu qu’il faut avoir confiance ; Safi ou pas, ton procès est entre les mains de Dieu ;
n’est-ce pas ce Dieu qui a créé Safi ? Contente-toi de prier et de dire à Dieu que tu veux le
témoignage de Safi; il faut y croire fermement et tu auras gain de cause. Mais essaie au moins de
discuter avec elle de ce malentendu;
- Merci Colette, je vais la voir au travail demain ;
- Tu iras encore travailler demain ? Ne m’avais-tu pas dit que tu comptes solliciter une permission
?
- Oui, mais demain , je travaille.
Colette, je suis fatiguée ; je vais manger et vite dormir ;
- D’accord, Raissa.
En dépit de ma fatigue intense de la journée, je passe quand même une nuit agitée. Je n’étais pas
au mieux de ma forme; même si j’ai été heureuse de revoir Carine, le problème avec Safiétou me
pertube sérieusement. Je pense que cela
a agi sur ma nuit. Elle est quand même mon amie depuis longtemps !
Certaines de ses réflexions m’ont
profondément blessé comme quand elle dit qu’elle ne traîne pas avec les
hypocrites.
Est-ce hypocrite que d’être prudent ?
C’est en ce moment que j’ai le plus besoin de Safi et elle me lâche ? Ou alors, est-elle la
coupable ?
Je ne sais plus quoi penser. Mais pour une coupable, elle s’affiche trop; c’est Colette qui doit
avoir raison quand elle dit que l’ennemi passe inaperçu.
Une fois à l’hôpital, je me rends à la maternité comme d’habitude.
J’enlève mes habits et je porte ma blouse. De nombreuses femmes sont déjà là et attendent d’être
consultées.
Je commence mon travail sans tarder en attendant l’arrivée de Safiétou. Je travaille jusqu’à midi
avant de me rendre compte qu’elle n’était toujours pas là; ce n’est pas de ses habitudes.
Je prends mon téléphone et je l’appelle. Elle ne décroche pas une première
fois; j’insiste et elle décroche enfin.
- Allô.
- Bonjour Safi.
- Bonjour ;
- Je ne t’ai pas vu aujourd’hui, que se passe t-il ?
- Rien;
- Et pourquoi, tu n’es pas venue travailler?
- J’ai sollicité une permission pour aujourd’hui.
-Mais Safi, tu aurais pu me prévenir ;
- Désolée Raissa, je n’ai aucun compte à te rendre.
Safi est vraiment fâchée; serait-elle sincère ? Enfin, je l’espère.
Je reprends la conversation;
- Ecoute Safi, pourquoi me réponds-tu aussi sèchement ?
Safi ne dit rien ; je poursuis:
- Il faut que je te voie, nous devons nous parler.
- Ecoute Raissa, arrête de m’importuner; ou tu es chaude, ou tu es froide ? Je ne supporte pas l'eau
tiède.
- Safi, ce n’est vraiment pas le moment de nous disputer; tu sais que mon procès est pour bientôt
et tu me fais cela ?
- Si c’est pour ton procès, ne t’inquiète pas ; j’ai promis témoigner en ta faveur et je tiendrai
parole.
Maintenant, je dois raccrocher; à la prochaine.
Cette dernière phrase prononcée par Safi me laisse bouche bée; moi qui croyais qu’elle voulait un
alibi pour ne pas témoigner ! Avant de rentrer ce soir, je ferai un tour chez elle.
Je prends une pause pour aller voir Luc, le fils d’Ezéchiel. Je constate qu’il n’est plus aux
urgences ; je me renseigne et il est installé dans une chambre d’hospitalisation; je m’y dirige et je
retrouve son père qui m’accueille avec un sourire qui me chavire le cœur.
J’ai le cœur qui bat au son de sa voix. Que m’arrive-t-il ? Je passe quelques minutes avec eux puis
je décide de prendre congé d’eux.
J’ai à peine avancer de quelques pas
qu’Ezéchiel m’appelle.
- Raissa.
- Oui, Ezéchiel.
- Ce qui t’attend est bien plus merveilleux que ce qui est derrière toi. Quand tu as déposé ton
problème à Dieu, tu as fait ta part; reste calme et regarde Le faire
l’impossible. C’est dans le calme et la confiance que sera ta force.
- Merci Ezéchiel ; tu m’es d’un grand réconfort.
- Tout ira bien.
Je quitte la chambre toute joyeuse. Ezéchiel m’épate. Je pense à lui en marchant de la section
médecine à
la maternité. Mais je reviens sur terre rapidement car c’est ainsi que Stanley était gentil; mais
aujourd’hui, il fait de ma vie un enfer; je soulève le regard et je n’en crois pas mes yeux; on pense
au loup et on voit sa queue.
Stanley venait dans ma direction; mais que cherche t-il ici ?
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 24)
Je quitte la chambre toute joyeuse. Ezéchiel m’épate. Je pense à lui en marchant de la section
médecine à
la maternité. Mais je reviens sur terre rapidement car c’est ainsi que Stanley était gentil ; mais
aujourd’hui, il fait de ma vie un enfer; je soulève le regard et je n’en crois pas mes yeux; on pense
au loup et on voit sa queue.
Stanley venait dans ma direction ; mais que cherche t-il ici ?
Je le regarde s’avancer et arrivé à ma hauteur, il s’arrête et enclenche:
- Bonjour madame la meurtrière;
- Que viens-tu faire par ici ?
- Madame, ici c’est un hôpital à ce que je sache; ou alors est-ce la propriété de ton père ?
- Mieux, tu continues ton chemin Stanley, je n’ai pas envie d’entendre tes inepties.
- Et pourtant tu les entendras; j’ai appris que ma fille était avec toi hier? Sache que je ne veux pas
qu’elle te fréquente.
- Ta fille dont tu parles est aussi la mienne, Stanley; laisse-moi te rappeler que j’ai une
autorisation en bonne et due forme signée par le président du tribunal pour voir mes enfants ; et je
ne les verrai pas en cachette; c’est pourquoi j’ai conseillé à la petite de te dire la vérité car tu es en
train de la pousser à mentir ; quel est ce genre d’éducation que tu lui donnes ?
- C’est bon, profite du peu de temps que tu as pour bien les voir car comme je t’ai dit, tu ne les
verras plus jamais;
- Heureusement que c’est toi qui le dis et non Dieu;
Stanley éclata de rire et répond:
- Je t’ai déjà dit de laisser Dieu tranquille; Il ne peut rien pour toi ;
- On verra s’il ne peut vraiment rien pour moi; Stanley, pourquoi me traites-tu ainsi? Je me
demande si une fois tu m’as jamais aimé ?
- Oui je t’aimais à un moment donné de ma vie, mais je me rends compte que c’est une grave
erreur que je faisais;
- Moi, erreur ! Que t’ai-je donc fait pour mériter tout ceci ?
- Tu as tué ma Sonia, la perle de ma vie, celle qui donnait un sens à mes nuits quand tu me laissais
seul, et pire, tu as tué mon héritier ; je ne te le pardonnerai jamais.
- Je n’ai tué personne, du moins pas
intentionnellement ; et toi mon mari, tu devrais être le premier à me croire ;
- Qui est ton mari? Va le dire à d’autres; si tu ne te reproches rien, pourquoi as-tu caché
l’information ?
- Tu parles comme si tu étais propre !
- Pense ce que tu veux; c’est ton problème. Au fait, comme je suis gentil, j’ai bien réfléchi par
rapport à Chris; j’aime bien ce petit; si tu veux, je peux le reprendre car de toute façon, tu seras
coupable de meurtre donc je ne veux pas qu’il soit seul dans la vie car il n’a pas à payer pour ton
crime; je vais lui donner un foyer que je vais créer avec ma future femme.
-Tu me fais rire Stanley ; car parlant de femme, tu as déjà oublié Sonia que tu viens d’appeler
perle de ta vie ? Sois conséquent envers toi-même. Et puis, concernant Chris, si je ne peux pas
l’élever, mon frère le fera ;
- Bien, comme tu voudras, c’était juste une proposition; trève de bavardage car mon temps est
précieux ; tu voulais savoir pourquoi je suis là ? Pour deux raisons mais la seconde ne te regarde
pas ;
- Parle vite car j’ai du travail;
- Le procès est dans quatre jours; vu que tu seras condamnée et que tu iras en prison, c’est
pratiquement l’une des dernières fois que j’ai l’occasion de te voir; alors, je veux savoir si tu peux
venir évacuer tes affaires de chez moi car une fois en prison, tu ne pourras plus le faire;
Entendez ce que Stanley ose me dire ! Je le regarde avec dédain; il me dégoûte ; je n’arrive pas à
croire que je l’ai épousé et que je dormais dans le même lit que cet homme.
Je ne sais même pas ce sur quoi il compte pour être si sûr que je serai déclarée coupable. Je décide
de ne pas lui répondre et je continue mon chemin; il me lance:
-Raissa, si tu ne viens pas chercher tes affaires toi-même, je les jetterai après le procès.
Je ne me retourne pas et je m’éloigne; je suis au bord des larmes; non ! Je me sens démunie et
désarmée. Stanley est venu me saper le moral. Cette fois-ci, je n’en peux plus. Les larmes
longtemps contenues coulent ; je les efface vite du revers de la main et je poursuis mon chemin
vers la maternité ; en voulant traverser le hall principal, je croise le directeur de l’hôpital.
- Bonjour Monsieur le directeur;
- Bonjour Sage-femme ; mais, tu as pleuré!
- Non, pas du tout ;
- Tu mens; tes yeux sont rouges; tu as bel et bien pleuré; qu’est-ce qui ne va pas Raissa?
- Tout va bien, Monsieur le directeur ;
- Non, c’est faux ; viens avec moi;
Je le suis jusque dans son bureau; il me demande de m’asseoir; il ouvre le petit réfrigérateur
installé dans la pièce et m’offre un verre d’eau fraîche; ensuite, il me tend un mouchoir; va aux
toilettes te rincer le visage et tu reviens.
Son bureau disposait de toilettes. J’y entre pour me débarbouiller mais je pleure encore un bon
coup ; je me lave le visage et je ressors m’asseoir devant lui.
- Raissa, même si tu ne veux rien me dire, sache que dans la vie, quel que soit le problème, il est
inutile de se morfondre; ce qu’il faut faire pour affronter les difficultés, c’est d’avoir une bonne
attitude. Par exemple, lorsque tu subis un échec important, pourquoi réagir comme si tu avais tout
perdu ? Essaie plutôt de
focaliser sur ce que tu es et ce que tu possèdes encore.
Apprécie ce que tu as, au lieu de
t’apitoyer sur ce que tu as perdu. Il est normal que tu sois déçue, cependant, essaie de focaliser sur
les raisons que tu as encore d’être heureuse.
Tu sais, Sage-femme, une vie sans problèmes, cela n’existe pas.
Chaque jour amène son lot de petites et grandes difficultés, de soucis, d’agacements, voire
d’épreuves, de douleur. La vie se charge de mettre sur notre route tout un tas d’épreuves plus ou
moins faciles à surmonter: le désamour, la rupture, la maladie, les accidents, la
perte d’emploi, les aléas professionnels, les complications relationnelles dans la vie
professionnelle ou personnelle.
Il est évident qu’aucune mesure ne peut nous prémunir contre ce type d’épreuve, qui sont hors de
notre contrôle. Il s’agit donc d’être outillés pour y faire face, plutôt que de nous laisser écraser par
elles. Il faut savoir entretenir un état d’esprit positif et dynamique pour mieux
rebondir.
Raissa, je te parle en tant qu’homme expérimenté. Quelle que soit la gravité du problème, dis-toi
que ce n’est qu’un moment difficile et qu’il passera; ça passe toujours; tout ce qui a un début à
une fin; à quoi bon alors te morfondre ou verser des larmes qui ne t’apporteront que
désolation et non consolation?
Sois heureuse! Le sentiment d’être
heureux naît à la fois de notre regard sur notre vie en général et de notre regard sur nos problèmes,
de notre capacité à les affronter avec un minimum de sérénité, de recul et surtout, de confiance en
l’Etre suprême.
Il y a une citation qui dit « Ne dis pas à Dieu combien tes problèmes sont grands; mais dis à tes
problèmes combien ton Dieu est grand ».
Je l’écoutais religieusement me tenir
ses propos ; je n’ai jamais su que le directeur était aussi avisé, éclairé et sage.
J’avoue que mon moral tantôt touché par Stanley, revient après l’avoir écouté ; effectivement, il
avait raison, cette situation passera car Dieu est grand même si Stanley trouve qu’il ne vaut rien.
Je remercie le directeur et lui promet de tenir compte de ses paroles.
- D’accord, je promets de ne plus me morfondre ; c’est que je viens de rencontrer mon mari qui
m’a sapé le
moral ; mais j’ai bien compris tout ce que vous m’avez dit.
- Ton mari souhaite que tu sois triste et abattue; ne lui donne surtout pas ce plaisir.
- Je ferai l’effort ; c’est que c’est dur ma nouvelle vie sans mes enfants ; je n’étais pas préparée à
cela ; j’ai été sevrée brusquement et parfois, c’est comme si je touche le fond;
- Raissa, le fond du lac peut être le meilleur endroit où recommencer car la seule direction à
prendre ensuite, c’est vers le haut.
- Vous pensez que ma vie sera à nouveau un jour équilibrée ?
-Assurément car il n’y a pas de clé pour la porte du bonheur ; cette porte est toujours ouverte. Les
nouveaux débuts sont souvent déguisés en douloureuses fins.
- Lorsque tout ceci sera fini, je vais alors prier Dieu pour qu’il m’envoie quelqu’un qui saura me
compléter.
- Tu n’as pas besoin de quelqu’un qui te complète dans ta vie ; tu as besoin de quelqu’un qui
t’acceptera complètement. Je vais te laisser maintenant travailler; ta demande de permission pour
trois jours à compter de demain est accordée.
J’ai déjà signé le courrier de réponse; l’administration te le remettra.
- Merci Directeur pour le soutien; c’est hautement apprécié;
- Je t’en prie Sage-Femme. Bon après-midi.
Dès que je sors du bureau du directeur de l’hôpital, je prends le chemin qui mène vers la
maternité; je dois passer devant le parking principal de l’hôpital; quelle ne fut pas ma surprise
quand je vois au loin la sœur d’Ezéchiel qui veillait sur Luc à l’hôpital raccompagner Stanley.
Ils devisaient tranquillement sans se
cacher; je ne comprends plus rien.
C’est encore quoi ce nouveau mystère ? Je voulais réagir vivement mais je me souviens de ce que
venait de me dire le directeur.
Alors, je me calme et décide d’affronter ce nouveau défi avec sérénité comme il me l’a conseillé.
Je réfléchis un instant et j’eus l’idée de passer un coup de fil à Maître Justine pour l’informer de la
venue de Stanley à l’hôpital et de la scène à laquelle je viens d’assister.
- Raissa, nous sommes à quatre jours du procès; j’ai besoin de voir clair; comment se fait-il que
Stanley connaisse la sœur d’Ezéchiel ?
- Maître Justine, je pense que c’est Stanley qui a envoyé Luc, le fils d’Ezéchiel tuer Hermione.
- C’est possible mais si c’était le cas, Stanley ne s’afficherait pas ouvertement avec la sœur
d’Ezéchiel sachant que tu le connais.
- Maître Justine, c’est évident que Luc et peut-être même Ezéchiel sont complices;
- Raissa, calme-toi, l’évidence n’est pas une preuve ; seulement, nous n’avons plus de temps à
perdre ; je viens tout de suite à l’hôpital interroger Ezéchiel; je te fais signe à mon arrivée.
Je raccroche et je rebrousse chemin pour que Stanley et la sœur d’Ezéchiel ne me voient pas. Je
me cache derrière un arbre pour bien les observer; ils conversent encore un moment puis Stanley
rentre dans la voiture ; mais avant, les deux s’embrassent.
Je suis déroutée; savez-vous ce qu’on appelle la confusion ? Je ne sais plus quoi penser; donc
Ezéchiel connaissait Stanley ? Tout s’embrouille dans ma tête.
Je m’affaisse au sol; je repense à tout ce que le directeur de l’hôpital vient de me dire et je
reprends courage; là où j’en suis, je ne peux plus travailler; je décide d’aller attendre Maître
Justine au restaurant de l’hôpital. Mon cerveau fonctionne cent à l’heure, tellement il grouille
d’idées.
En attendant que Maître Justine ne vienne, je réfléchis;
Ezéchiel me paraissait si honnête ! Pourquoi à chaque fois il faut que je rencontre un obstacle ?
Enfin, Maître Justine est là ! Elle me rejoint au restaurant de l’hôpital ;
-J'ai pourtant fait suivre Luc et Ezéchiel un moment et rien de suspect ;
- Ah, Maître Justine, c’est ce que j’ai vu ;
- C’est étrange ; allons dans la chambre de Luc ; je dois lui poser des questions en espérant qu’il
serait en état de répondre;
- Cet Ezéchiel m’a bien eu !
- Raissa, arrête de juger trop vite les gens;
- Maître, peut-on nier l’évidence ?
-Je te répète que l’évidence n’est pas une preuve.
Parfois toutes les conditions sont réunies pour faire une déduction ; et pourtant, la réalité vient
prouver le contraire. Il est dangereux de tirer des conclusions hâtives. Allons-y vite les voir.
Nous marchons ou plutôt courons vers la chambre où est hospitalisé Luc ; nous ouvrons la porte ;
Luc est couché sur son lit de malade, Ezéchiel est debout, c’est comme s’il sortait, sa sœur est
assise sur une chaise.
Dès qu’il me voit, il me sourit, on dirait qu’il est même content ; je le toise. Il fronce les sourcils
d’étonnement et s’adresse à moi.
- Que se passe t-il Raissa, on dirait que tu es furieuse !
Je ne lui réponds pas; Maître Justine enclenche:
- Bien, nous n’allons pas tourner autour du pot ; c’est bien que vous soyez tous les trois réunis ;
j’ai une seule question pour vous.
Ezéchiel répond:
- Maître, vous semblez bizarre ; que se passe t-il ?
- Madame et messieurs Luc et Ezéchiel Semondzi, connaissez-vous monsieur Stanley Gobi ?
Ezéchiel, étonné, répond:
- Oui, nous le connaissons tous les trois ; il y a un problème à cela, Maître ?
- Non, du moins pas pour le moment ; puis-je savoir quelle sorte de relation vous lie ?
- Stanley est un futur partenaire ;
- Pouvez-vous mieux expliquer Monsieur Ezéchiel ?
- Vous savez que je suis chef d’entreprise ; j’ai une usine d’égrenage de coton et Monsieur
Stanley est Ingénieur Agronome ; je l’ai connu dans ce cadre et j’ai apprécié sa manière de traiter
certaines affaires ; nous avons commencé à collaborer et à nous fréquenter depuis bientôt deux
ans.
Il est en instance de divorce et il est
actuellement fiancé à ma sœur que voici et va bientôt l’épouser dès que le divorce sera prononcé.
Nous avons également décidé qu’il sera actionnaire dans mon entreprise, un genre d’associé une
fois le mariage célébré. Stanley est donc venu rendre visite à mon fils malade ; Quoi de plus
normal ?
- Bien Monsieur Ezéchiel ; malgré l’état de votre fils, laissez-moi lui poser une question.
- Ok, allez-y Maître Justine ;
- Monsieur Luc, Monsieur Stanley vous a-t-il demandé de renverser Mademoiselle Hermione ?
Luc, encore affaibli, fait l’effort de répondre :
- Qui est Hermione ?
- La jeune dame que tu as renversée avec la voiture de ton père ;
- Non, Monsieur Stanley et moi ne sommes pas des amis ; il ne peut jamais me demander de faire
une telle connerie ; l’accident est par hasard.
Ezéchiel est exaspéré, mais néanmoins demande d’un ton calme:
- Maître, c’est quoi le problème au juste ?
- Le problème c’est que Raissa a eu l’impression en voyant Stanley et votre sœur qu’elle a été
piégée;
- Je ne comprends toujours pas; Qu’est-ce que Raissa à avoir avec Stanley ?
- C’est son mari.
- Quoi !!!
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 25)
- Maître, c’est quoi le problème au juste ?
- Le problème c’est que Raissa a eu l’impression en voyant Stanley et votre sœur qu’elle a été
piégée;
-Je ne comprends toujours pas; Qu’est-ce que Raissa à avoir avec Stanley ?
- C’est son mari.
- Quoi !!!!
Ezéchiel est visiblement troublé; sa sœur intervient:
- Dites-moi que c’est faux; Stanley est en instance de divorce; il a trois enfants; sa femme est
actuellement en prison parce qu’elle aurait tué une dame et son bébé; mais il n’aime pas trop en
parler.
- Ah Madame ! C’est ce qu’il vous a dit ?
- Oui, lorsque nous nous sommes connus, il m’a dit qu’avec sa femme, cela ne fonctionne plus et
qu’ils étaient en instance de divorce. Récemment, il m’a dit qu’elle a été enfermée pour meurtre.
Je comprends tout maintenant; Stanley après la mort de Sonia s’est mise avec la sœur d’Ezéchiel
parce qu’effectivement cela ne fonctionnait plus entre nous; il a certainement pris la décision de
se
mettre avec elle; c’est pour cela qu’entre temps il voulait le divorce; comme je ne le lui ai pas
accordé, il a profité de l’aveu que je lui ai fait pour m’écarter de son chemin; évidemment, il
fallait qu’il épouse
Tatiana, la sœur d’Ezéchiel afin de devenir son associé, ce qui représentait quand-même une
fortune. Il avait donc intérêt à ce que je sois inculpée pour obtenir le divorce rapidement et à mes
torts;
Tatiana est donc la nouvelle maman qu’il promettait aux enfants.
En même temps, au plus profond de moi, j’eus honte car j’accusais déjà Ezéchiel de complicité
alors qu’il n’en ait pour rien; Maître Justine a raison de me dire de me garder de tirer des
conclusions hâtives et de juger trop vite; l’évidence n’est effectivement pas une preuve.
J’entreprends de présenter mes excuses à Ezéchiel:
- Excuse-moi, Ezéchiel; j’ai fait une mauvaise appréciation de la situation;
- Pas de problème Raissa; je te comprends.
Je ne sais plus où donner de la tête mais je suis heureuse que Ezéchiel ne soit pas impliquée. Je
m’adresse à nouveau à lui:
- Ta sœur n’a pas à s’inquiéter; je vais divorcer de Stanley dans peu de temps;
-Tu plaisantes Raissa ? Il n’est plus question qu’il épouse ma sœur ! Tu veux qu’un jour, elle vive
la même chose que toi ? Egalement, il ne sera plus mon associé ; je remercie Dieu d’avoir appris
tout ceci à temps.
- Mon nom Raissa Gobi aurait dû te dire quelque chose.
- Il y a plein de Gobi dans le pays ; à vrai dire, je n’ai retenu que Raissa.
Maître Justine intervient:
- Monsieur Ezéchiel, vous n’avez pas à décider à la place de votre sœur.
Tatiana, à ces propos réagit vivement:
- Maître, c’est mon frère qui a raison; sa décision sera la mienne; d’ailleurs, je n’ai pas envie que
demain on me jette en prison comme une vulgaire prostituée de passage; Stanley ne m’avait pas
bien expliqué l’affaire ; il m’avait dit que sa femme est une meurtrière et est en prison et c’est
pour cela qu’il demande le divorce car elle a tué une femme et son bébé sans me préciser que le
bébé était le sien; il a tordu le cou à la vérité. Je ne peux jamais me mettre avec un tel homme !
Autant demeurer une célibataire endurcie. Mieux vaut être seule que mal accompagnée.
Maître Justine répond:
- J’aimerais vous demander une grande faveur; vous, Luc et Ezéchiel;
- Allez-y Maître;
- Je souhaiterais que Stanley ne soit informé de tout ceci qu’après le procès, pas avant.
- Ah Maître, c’est dur; moi je ne veux plus le voir;
- Trouve n’importe quel prétexte, mais ne lui dis rien; le procès c’est dans quatre jours.
- Ok, je vous le promets.
Ezéchiel et son fils promettent aussi de ne rien dire à Stanley ;
-Non seulement, nous ne lui dirons rien avant mais nous serons au procès ; si mon fils ne sort pas
de l’hôpital avant ce jour, j’enverrai une de mes domestiques rester avec lui ici pour pouvoir venir
avec Tatiana.
- Merci Monsieur Ezéchiel.
Comme tout est bien qui finit bien, je sors de la chambre d’hospitalisation pour retourner à la
maternité pour prendre mon sac et rentrer ;
Maître Justine me demande d’attendre et me rattrape.
On dirait qu’elle est fâchée:
- Raissa, tu m’arrêtes tes comportements-là ;
- Qu’est-ce que j’ai fait ?
- Ne t’ai-je pas dit de ne pas juger trop vite?
Malgré cela, dès que tu es entrée dans la chambre, tu as toisé Ezéchiel. Et maintenant, est-il
complice comme tu le pensais ?
- Je m’excuse Maître Justine; je n’ai pas supporté la scène que j’ai vue.
-Combien de fois vais-je te dire que quand Dieu est avec toi, tu peux dormir tranquille ; tu ne dois
être troublée par aucune situation; si tu paniques le jour du procès, tu vas t’enfoncer toi-même ; ne
rends pas vain mes efforts;
- C’est compris, Maître.
- Le gars défie Dieu et toi tu paniques ! tu verras comment il va finir ; Il est écrit que c’est Dieu
qui parle à travers ses prophètes « Autant les cieux sont élevées au-dessus de la terre, autant mes
voies sont au-dessus de vos voies et mes pensées au-dessus de vos pensées» ; c’est Lui le grand
Maître et c’est Lui qui met ses puzzles en place; calme-toi et aie confiance; n’est-ce pas que
Stanley vient de perdre sa prétendue fiancée avant le procès ?
N’est-ce pas son partenariat avec Ezéchiel ne sera plus possible ? Ce qui sera un grand coup pour
lui car au cas où tu ne le sais pas, je te le dis;
Ezéchiel que tu vois-là, est un type très riche. C’est lui qui a la société SORL;
- Quoi !
- C’est certainement pour cela que ton Stanley voulait épouser sa sœur et devenir partenaire. C’est
pour cela il voulait divorcer de toi ; quand tu lui as avoué ce qui s’est passé avec Sonia, il a trouvé
là, l’occasion rêvée de divorcer; et pour cela, il est allé très loin au point de te dénoncer.
-Mon Dieu ! Même Ezéchiel m’avait une fois dit qu’il y a certainement une raison pour laquelle
Stanley m’a dénoncé. Si ce n’était pas qu’un intrus ne peut facilement pas accéder à la salle
d’accouchement, je dirai que c’est lui qui a tué Sonia.
- Personnellement, je ne crois pas; Stanley est juste un homme mauvais et égoïste qui n’aime que
lui-même; et puis n’oublie pas que pour lui, tu as tué son fils; j’ai d’ailleurs une idée du coupable
mais
j’attends d’autres preuves et surtout le jour du procès.
Je pense bien que c’est parmi tes collègues. Toutefois, il se peut que je me trompe. Je vais
interroger à nouveau tout à l’heure la famille Semondzi pour savoir à quel moment Tatiana a
rencontré Stanley; si c’est avant la mort de Sonia, il sera très suspect ; mais je pense bien que c’est
après le décès;
- Mine de rien le temps file ; bientôt trois ans que cette dame est morte;
- Oui, le temps file et ton Stanley pour avoir défié Dieu, aura ce qu’il mérite. Il ferait mieux de se
repentir très vite; de toute façon, tu as de bons éléments pour que le divorce soit prononcé à ses
torts et pour que tu obtiennes la garde des enfants.
Bon, je te laisse aller travailler ; on se reprend à tout moment. Je me dirige vers la maternité pour
récupérer mon sac ; d’ailleurs j’ai enlevé la carte mémoire de ma trousse. Mon après-midi a été
riche en émotions diverses. J’ai besoin d’aller me reposer.
Je passe par l’administration chercher la réponse à ma demande de permission puis je me rends
sur le parking. J’y croise encore le directeur de l’hôpital qui venait vers sa voiture.
- Décidément Sage-femme ! On se croise encore aujourd’hui, pourtant l’hôpital est si grand !
Vous allez peut-être avoir des jumeaux prochainement;
- Non, Monsieur le directeur, j’ai déjà fini; mes trois filles me suffisent. C’est peut-être à vous que
les jumeaux sont destinés;
- Tu plaisantes ? Mes deux enfants sont grands, la dernière a déjà douze ans.
Nous éclatons de rire tous les deux puis il reprend;
- Tu as fini ta journée ?
-Oui ;
- Il n’est pas encore l’heure.
- Toutes mes excuses, Monsieur le directeur, après que je vous ai quitté, j’ai vécu d’intenses
moments d’émotions ; je n’ai plus le cœur à l’ouvrage; c’est mieux que je parte.
- Ok ; comme je comprends ta situation, je laisse passer ; sinon en principe, tu as enfreint au
règlement en rentrant avant l’heure;
- Je sais, Monsieur le directeur et je m’en excuse.
- Rentre donc sage-femme et repose-toi.
- Merci Monsieur le Directeur.
Je rentre dans ma voiture et je démarre ; dès que je rentre, avant même de me changer, je passe
par la cuisine me désaltérer ; j’y rencontre Colette.
-Ah Colette ! Je ne pensais pas te trouver ici ; je n’ai pas vu ta voiture dehors;
- C’est chez le mécanicien; un problème de filtre;
- Ok; tu es rentrée bien tôt aujourd’hui.
- Je ne suis même pas allée au travail; j’ai commencé mes congés aujourd’hui, j’en ai pour un
mois. Et toi, tu rentres aussi bien tôt ;
- Ma chère, il le fallait ; trop d’émotions pour mon pauvre petit cœur.
- Raconte-moi tout.
Evidemment, je le lui raconte ; Colette est de confiance et en plus elle aime beaucoup mon frère ;
j’aime bien lui parler car j’apprécie les conseils qu’elle me donne.
Colette répond:
- Ma chère belle-sœur, lorsque tu as des situations nouvelles, prends ton calme; ne t’agite plus et
ne juge pas trop vite sinon tu seras dans l’erreur; tu prendras pour vrai ce qui se montre à tes yeux,
or, c’est le faux.
Tu vois bien maintenant qu’Ezéchiel n'est pas impliqué dans cette affaire ; en fait, il faut que tu
comprennes les réponses de Dieu à tes prières, à nos prières aussi car nous sommes nombreux à te
soutenir dans la prière ; en fait, je pense que c'est Dieu qui a permis cet accident pour rendre
Hermione redevable envers toi; c’est pour cette raison que je suis certaine qu’elle va finir par
témoigner; ou du moins dire ce qui s’est passé ce jour-là.
Dieu a permis que ce soit Luc qui la cogne afin que tu puisses rencontrer Ezéchiel pour que ce
dernier puisse
empêcher sa sœur d’épouser ce vautour mais surtout pour empêcher ce partenariat de Ézéchiel
avec Stanley.
Certainement qu’Ezéchiel, très croyant se confie tout le temps à Dieu; c’est ce qu’il t’a d'ailleurs
recommandé selon ce que tu m’as dit ; Dieu voulait épargner Ezéchiel
et sa sœur. Dieu voulait également te montrer la vraie raison pour laquelle Stanley a tôt faire de te
dénoncer afin d’avoir rapidement le divorce. Enfin, Dieu voulait montrer à Stanley par là qu’on ne
Le défie pas.
Ton problème est réglé Raissa, va dormir tranquille.
- Ah Colette ! Je ne voyais pas les choses de cette façon ; merci de m’éclairer ;
- C’est mon devoir, vu que ta foi bascule tout le temps car tantôt tu as confiance en Dieu, tantôt tu
doutes de sa Puissance.
- Comprends-moi, je n’étais pas sur ce chemin avant ; c’est Dame Ayabavi qui m’a orienté ;
-Ce n’est pas grave ; avec le temps, ta foi se solidifiera ;
- Je l’espère aussi ; je me demande si Stanley n’est pas à la base du décès de Sonia ;
- Cela m’étonnerait; il est juste de mauvaise moralité c’est tout ; j’ai même l’impression qu’avec
toi, il a fait l’effort de changer mais très tôt tes gardes de nuit l’ont replongé dans sa mauvaise vie.
J’espère qu’il saura comprendre le message de Dieu et vite se reprendre sinon il va finir mal.
- J’imagine sa tête le jour du procès quand il apprendra certaines choses et quand il verra la
famille Semondzi.
- Ah oui, cela va être chaud ! Ne pense même plus à lui; comme on dit souvent, laisse le mouton
se promener autant qu’il le désire; ne te soucie même pas de lui car sa fin sera au jour de la fête de
Tabaski.
Maintenant dis-moi, ton directeur est vraiment très sage conseiller ; seulement, je trouve qu’il
s’intéresse particulièrement à ta vie.
- Que veux-tu insinuer ?
- Rien du tout; je fais juste des constats.
-Tu as peut-être raison; Safiétou aussi m’avait déjà dit que le directeur de l’hôpital m’admirait et
que certainement il n’a jamais rien dit parce que je suis mariée;
- Ah tu vois non ? Je ne suis pas la seule à faire de déduction; il te paie ta facture de mécanicien, il
venait te voir en prison, etc... En tout cas……bref, parlant de Safi, lui as-tu parlé ?
- Oui, au téléphone ; elle n’était pas au travail aujourd’hui.
- Alors ?
- Elle était très froide. Mais elle m’a dit qu’elle viendra témoigner en ma faveur;
- C’est très bien ; c’est une bonne personne ; souviens-toi de comment
elle s’occupait de toi en prison ! Elle a juste une conception erronée de l’amitié; il lui faut juste
comprendre certaines choses et tout rentrera dans l’ordre; laisse-moi lui parler après le procès.
- Comme tu voudras. Qu’est-ce que tu as cuisiné ? J’ai une faim de loup; je veux manger et après
prendre ma douche puis me reposer.
-Eh Raissa ! Toi, tu es du corps médical et tu ne sais pas que ce n’est pas bien de se laver juste
après avoir mangé ?
- Non, c’est quand on se baigne, surtout dans l'eau froide immédiatement après les repas. La
baignade dans ce cas provoque une augmentation de la circulation sanguine vers les mains, les
jambes et alors la quantité de sang autour de l'estomac va diminuer.
Cela affaiblit le système digestif dans notre estomac. De plus, l'organisme doit dépenser de
l'énergie pour trois choses lors d'une baignade qui suit immédiatement un repas: la digestion, les
mouvements de natation, le maintien de la température corporelle.
Cela peut représenter beaucoup de dépenses énergétiques.
Or lorsque l'on dépense beaucoup d'énergie dans un court laps de temps, on risque les malaises
comme coups de fatigue, évanouissement, Or, dans l'eau, un
malaise représente un très grand risque.
- Ah je comprends maintenant; j’ai toujours pensé que c’est la douche.
Colette me sert ce bon plat de ndolé qu’elle vient de cuisiner; elle l’a
accompagné de banane plantain mûre.
C’est une spécialité culinaire du Cameroun dont Colette est originaire.
Le ndolé est le nom camerounais de variétés alimentaires de Vernonia dont les
feuilles et les racines ont également des vertus thérapeutiques ;
Le ndolè est parfois comparé aux épinards à cause de sa couleur et de sa texture mais sa
préparation est tout à fait différente.
Je mange avec appétit, puis je me dirige dans ma chambre; je prends ma douche; je ceins un petit
pagne aux reins et m’asseois sur le lit ; je m’apprêtais à m’allonger quand la domestique frappe à
ma porte.
- Qui est-ce ?
- C’est Ajoua, tantine ;
- Entre ;
- Tantine, vous avez un visiteur;
- Un visiteur ? Qui connait ici à part Maître Justine ? Un homme ou une femme ?
- Un homme;
- Tu ne lui as pas demandé son nom?
-Non Tata ; le gardien ne me l’a pas dit;
- Eh toi aussi ! bon; j’arrive;
Qui peut bien me rendre visite ici à part mon Avocate, mes enfants, Safiétou et la nounou ? A
moins que ce ne soit ce con de Stanley et si tel est le cas je ne vais même pas le recevoir.
J’enfile rapidement un t-shirt sur mon pagne et je sors.
Mon visiteur m’attendait sur la véranda.
Pour une surprise, c’en est une.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 26)
Qui peut bien me rendre visite ici à part mon Avocate, mes enfants, Safiétou et la nounou ?
A moins que ce ne soit ce con de Stanley et si tel est le cas je ne vais même pas le recevoir.
J’enfile rapidement un t-shirt sur mon pagne et je sors.
Mon visiteur m’attendait sur la véranda. Pour une surprise, c’en est une. J’avais complètement
oublié qu’il m’avait déposé une fois chez mon frère.
- Bonsoir Monsieur le directeur .
- Bonsoir Raissa ;
- C’est une surprise ; que puis-je pour vous ? Euuuh……. Un instant, je vous apporte de l’eau. Je
me rends dans la cuisine et revient avec un verre et une bouteille d’eau minérale, le tout posé sur
un plateau en plastique.
Chez nous, les visiteurs sont accueillis avec de l’eau. C’est le premier geste à faire pour leur
souhaiter la bienvenue. On considère qu’ils ont fait un long trajet et qu’ils doivent avoir soif.
L’eau est ainsi servie à tout étranger qui ne le peut le refuser. C’est notre culture.
La culture africaine est vaste et diversifiée; étant africains, nous nous devons de connaître nos
racines, d’où nous venons et qui nous sommes.
Surtout, si nous vivons à l’étranger et que nous nous adaptons à la culture occidentale, nous
devrons préserver en nous notre identité et l’apprendre à nos enfants.
Le directeur boit l’eau et dépose le verre.
- Qu’est-ce que je vous sers ? Une bière, un jus ou un whisky ?
- Merci, l’eau suffit ;
- J’insiste ;
- Non Raissa, n’insiste pas.
- Ok; alors, qu’est-ce que je peux pour vous ?
- Je suis juste venue voir comment tu
allais et ton moral, même si c’est la troisième fois que l’on se voit aujourd’hui; je ne suis pas
rassuré en fait.
- Je vais bien, ne vous inquiétez pas pour moi.
- Tu peux me tutoyer, Raissa ;
- Non, je n’oserai pas ; vous êtes le patron ;
- En tout cas, ici nous ne sommes pas au travail. Alors, tu te prépares bien pour le procès ?
- Disons que oui ;
- Ce jour-là, sois naturelle ; ne panique pas ; réponds aux questions correctement et naturellement.
Ton Avocate a dû déjà te le dire mais je voudrais apporter ma contribution.
Il est important de respecter quelques règles. Tu dois parler poliment à tout le monde et garder ton
calme en toute circonstance. Le juge aura tout contrôle sur la salle et pourrait prendre des
décisions très importantes pour toi.
Tu dois donc apparaitre comme une personne polie, respectueuse et de confiance devant le jury.
Le langage corporel et ta présentation pourraient même s’avérer plus importants que ce que tu
diras lors de l’audience.
Souviens-toi que le juge et les autres juristes présents représentent la loi
et conduis-toi en conséquence.
Habille-toi correctement pour aller au tribunal. Porte de préférence une tenue classique, ce sera un
signe de respect pour le juge et pour la Cour. Évite de porter des couleurs criardes ou de te vêtir
tout en noir.
Ne porte que les bijoux nécessaires, comme ton alliance ou une montre. Ne porte pas de gros
bracelets, de grosses boucles d’oreille ou de gros colliers.
Évite les vêtements trop courts, trop décolletés, trop moulants ou ornés de slogans ou d’images
choquantes.
Ne parle que si l’on te le demande. Au tribunal, il est malvenu d’interrompre quelqu’un qui parle.
Réponds clairement et attentivement aux questions.
Réponds toujours par la vérité et du mieux que tu le peux. Mentir à la barre constitue un parjure et
est passible de poursuites judiciaires. Demande à ton Avocate comment tu dois t’adresser au juge.
Certains juges aiment être appelés
« votre honneur», d’autres préfèrent « Monsieur le Président».
- Dis-donc, vous en savez énormément sur le monde judiciaire en étant médecin; je suis
impressionnée;
- Mon frère jumeau est Juge ; j’ai donc pris des conseils pour toi chez lui.
- Ah ! Vous êtes jumeaux ?
- Oui;
- Je l’ignorais. Merci beaucoup, j’apprécie votre geste, Monsieur le Directeur.
- C’est un plaisir de te soutenir. Très bien, je ne vais plus tarder ; je vais partir.
- Merci pour la visite. Je le raccompagne puis je reviens ; j’avoue que cette visite inattendue m’a
surprise.
Peut-être que Safiétou et Colette ont raison et que le directeur de l’hôpital est amoureux de moi;
pourtant, pendant des années, il ne m’en a jamais parlé; je pense que nous nous faisons des idées;
d’ailleurs, même si c’est le cas, moi j’ai fini avec les hommes; j’ai déjà trois enfants ; je n’ai plus
rien à cirer d’un homme.
Quand je rentre au salon, Colette m’adresse un sourire moqueur ;
- Pourquoi souris-tu en coin, Colette?
- Ne te l’avais-je pas dit ?
- Comment tu as su que c’est lui ? Tu
écoutes aux portes ?
- Ce n’est pas ma faute si vos voix portaient et parvenaient à mes oreilles.
- De toute façon, je divorce de Stanley et j’oublie que les hommes existent; ce sont mes enfants
ma priorité;
- C’est toujours ce qu’on dit.
- Si je n’ai pas de valeur pour celui à qui j’ai donné trois enfants, c’est pour un autre que j’en aurai
?
Laisse-moi me concentrer sur mon procès, Colette;
Colette éclate de rire et répond :
- Ok ; je suis ici, tu viendras me dire.
- Tu te trompes Colette ; je ne veux plus d’homme dans ma vie et même si je le voulais, ce ne sera
pas le directeur de l’hôpital ;
- Et ce sera qui alors ?
- Changeons de sujet; c’est mieux,d’ailleurs j’allais dormir quand il est arrivé ; je repars. A
demain Colette.
Je rejoins ma chambre et je m’allonge sur mon lit; j’ai une brève pensée pour mes enfants ; je ne
sais même pas quand le sommeil m’emporte.
A la sonnerie du réveil, j’ouvre mes yeux encore désireux de se fermer. C’est une grâce de se
coucher le soir et de se réveiller le lendemain; car beaucoup sont allés dormir comme moi hier,
mais ne se réveilleront plus jamais de leur sommeil.
Maître Justine me dit souvent « Réveille-toi chaque matin avec la pensée que quelque chose de
merveilleux se produira».
Mon regard se porte vers Chris, couché près de moi et dormant à poings fermés.
Je me demande à quel moment il est venu se mettre au lit; le procès est dans trois jours et Dieu
seul connaît l’issue.
Même si je suis confiante, je ne peux m’empêcher de me soucier de Chris; si j’étais condamnée,
comment fera t-il ?
Certes, Stanley m’a offert de le récupérer mais je ne veux pas que ce petit vive auprès de lui; il va
lui donner une mauvaise éducation.
Mais dans le même temps, serait-il heureux aux côtés de mon frère et sa femme ?
Soudain, je réalise qu’en réfléchissant à cette éventualité, j’admets implicitement l’idée que je
pourrai être condamnée. Or ce que l’homme imagine peut devenir une réalité ; ce que l’être
humain ressent peut se manifester dans sa vie; je chasse très vite cette idée de mon cœur.
Je dois écouter ma petite voix intérieure plutôt que mes doutes; je serai déclarée innocente et après
j’aurai la garde de mes enfants avec lesquels je recommencerai une nouvelle vie, un point, un
trait.
Je dois croire en cela et croire que Dieu agira en ma faveur.
Aujourd’hui, je ne vais pas au travail ; je n’ai donc pas à me presser pour quitter le lit ; je choisis
de passer quelques minutes dans la prière ; ensuite, j’exécute ma routine matinale, brossage,
douche... et je sors de ma chambre aux environs de sept heures du matin. Je m’étais réveillée à
cinq heures après que le réveil ait sonné.
Comme je me suis levée bien tôt, j’eus subitement envie de faire une courte promenade pour
respirer de l’air pur ; je préviens la domestique de Colette de ce que je sortais et que Chris dormait
encore ; je m’élance dans la nature ; la zone dans laquelle mon frère habite est une banlieue de
notre capitale; tout est calme, on se croirait en campagne.
Parfois même, on entend des coqs chanter au réveil ; le ciel est bien clair et des nuages s’y
baladent ; l’air est frais et pur ; chaque fois que l’on se promène dans la nature, on reçoit plus que
l’on ne cherche.
La promenade est une manière de converser avec soi-même. Je continue de marcher. Je veux me
retrouver seule avec moi-même pour faire une introspection sur ma vie depuis quelques années:
mon mariage, la mort de ma mère, la naissance de mes enfants.
Pensant à ma mère, une larme fugitive s’échappe d’un œil ; j’aurais dû l’écouter ; elle n’a jamais
voulu de Stanley.
Quant à mon mariage, c’est un échec mais je ne vais pas en faire un souci aujourd’hui; je fais
confiance au temps qui panse les blessures.
J’avance toujours tout droit ; c’est l’occasion pour moi de découvrir la zone; je n’avais pas
l’habitude de venir par ici; je
fréquentais rarement mon frère ; il a construit cette maison et a déménagé ici, il n’y a pas si
longtemps; avant de venir habiter ici, j’étais venue juste une fois quand il venait d’intégrer.
De belles maisons se distinguent dans la zone ; il y a également beaucoup d’arbres qui donnent à
la nature un aspect verdoyant. Je continue d’avancer. Je décide d’aller tout droit pour ne pas me
perdre.
J’avance encore un moment tout en
pensant à ce fameux procès. Pourrait-on découvrir le coupable à l’occasion ou Maître Justine se
contenterait de prouver mon innocence ?
Mes pensées s’envolent vers Hermione qui ne s’est toujours pas décidée à nous dire ce qui s’est
passé ce jour-là ; mais bon, comme mon entourage ne cesse de me le dire, ma confiance ne doit
pas être placée en l’être humain.
L’homme de Dieu ne cesse de me répéter que la foi déplace des montagnes, change le mal en
bien, transforme nos ennemis en amis et produit des miracles.
Les témoignages de Béatrice et de mes collègues ne seront pas négligeables. C’est déjà heureux
que Safiétou sera présente.
J’avance encore, l’air frais pénètre mes entrailles et et me fait du bien ; au loin, une grande maison
fleurie et luxueuse, du moins vu de l’extérieur, attire mon attention.
Lorsque je me retrouve à son niveau, j’attends un moment pour l’admirer.
Le plan extérieur de la maison m’impressionnait tellement que j’ouvris grandement mes yeux
pour la contempler à l’instar d’un africain nouvellement arrivé en Europe ou en Amérique.
- Comme c’est beau ! Dis-je intérieurement. Mon regard était plein d’admiration; j’avais déjà vu
de belles maisons ; le domicile de Stanley n’était pas mal, celui de mon frère aussi est magnifique
mais celle-là me tue; l’architecture est hors du commun ; si l’extérieur est ainsi fait, qu’en sera-t-il
de l’intérieur ?
Contempler cette maison me fait oublier un moment mes pensées de l’heure.
Soudain, j’entends une voix que je connais maintenant très bien me dire:
- Raissa, que fais-tu ici et si tôt ?
Je sursaute.
J’observe mon interlocuteur habillé en tenue de sport et cela le change
complètement.
La surprise fait que je ne pus prononcer un mot.
J’avais en même temps honte de me faire surprendre en train d’admirer ce domicile; il s’adresse à
moi:
- N’aie pas peur ; je revenais juste du sport; je fais l’effort de courir tous les matins pendant trente
minutes avant de commencer ma journée; cela me permet de me maintenir en santé. Etant du
corps médical, tu n’ignores pas que le sport renforce le cœur et régule la tension.
- Bien sûr, le sport a de nombreuses vertus; mais avec le boulot et les
enfants, c’est difficile pour moi de le faire;
- A te voir, tu n’en as d’ailleurs pas grand besoin, tu as une silhouette raffinée comme une jeune
de fille de vingt-ans.
- Je suis flattée par un tel compliment ;
- Alors dis-moi, Raissa, que fais-tu chez moi de si beau matin ? As-tu un problème?
- Ah ! c’est chez vous ici ?
- Oui.
- Ah! Euh. je m’excuse ; je me promenais dans la nature pour me ressourcer; j’ai vu la maison et
je l’ai trouvé magnifique; je me suis alors arrêtée pour l’admirer.
Mon interlocuteur esquisse un sourire et déclare:
- Je comprends; c’est effectivement un plan assez spécial ; viens à l’intérieur; j’en profiterai pour
t’expliquer l’histoire de cette maison.
Je le suis pour entrer dans le superbe bâtiment.
Dès l’entrée, se dresse un magnifique jardin tapissé d'une verdure flamboyante comportant toutes
sortes de fleurs.
Je n’arrive pas à croire que cette maison est sa propriété.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 27)
Je le suis pour entrer dans le superbe bâtiment. Dès l’entrée, se dresse un magnifique jardin
tapissé d'une verdure flamboyante comportant toutes sortes de fleurs.
Je n’arrive pas à croire que cette maison est sa propriété.
Je n’aurais jamais cru qu’il habitait une si belle maison car il s’est toujours montré modeste et
humble; la modestie et l’humilité sont des qualités bien rares de nos jours. Pour peu de choses, les
êtres humains se gonflent comme un ballon en oubliant que l’orgueil précède la chute.
Nous traversons la cour et il m’installe dans une salle décorée avec de beaux rideaux et des objets
d’arts.
- Assieds-toi, me dit-il ;
- Merci ;
- Sens-toi à l’aise. Qu’est-ce que je te sers?
-Non, c’est encore très tôt;
- Justement, comme il est tôt, un bon café serait la bienvenue.
Il appelle une jeune femme et lui ordonne de nous faire du café; j’imagine que c’est sa femme de
ménage.
En attendant que le café n’arrive,il engage la discussion :
- Raissa, depuis hier, nous ne faisons que nous croiser;
- Effectivement Monsieur le Directeur; comme par hasard;
- Par hasard ? Il n’y a pas de hasard, il n’y a que des rendez-vous; personne ne croise notre
chemin par hasard et nous n’entrons pas dans la vie de quelqu’un sans raison;
- Ah bon ? Je ne le savais pas;
- Chaque chose qui nous arrive à un sens. Tout arrive pour une raison, Raissa.
- J’en doute ;
- Pourquoi ?
- Si tout arrive pour une raison, alors pourquoi je traverse une telle situation ? Pourquoi il a fallu
que la maîtresse de mon mari vienne accoucher dans l’hôpital où je travaille et la nuit où je suis de
garde ? Pourquoi il a fallu que mon propre mari me jette en prison ?
- Je ne saurai te répondre mais crois-moi, un jour, tu auras à la réponse à toutes ses questions. En
attendant, concentre-toi sur ton procès; c’est bien que tu aies décidé de te promener ce matin pour
t’aérer l’esprit.
- Cette envie m’a pris subitement, monsieur le directeur ;
- Ecoute Raissa, quand nous sommes seuls, tu peux m’appeler Frank; c’est mon prénom au cas où
tu l’ignores.
-Non, je préfère vous appeler directeur pour ne pas à dire Frank en public de façon spontanée.
Il sourit et reprend:
- Alors, je t’ai promis te raconter l’histoire de cette maison ; en réalité, elle appartenait à un
homme très riche de ce pays dont j’ai sauvé le fils unique à l’article de la mort. Il était si
reconnaissant ! Il ne faisait que me remercier; il m’a même donné beaucoup d’argent que j’ai
refusé; mais nous avons gardé le contact; à sa mort, grande a été ma surprise d’apprendre par son
notaire qu’il m’a légué cette maison en guise de remerciement; il en a bien d’autres.
C’est ainsi que je suis devenu le propriétaire de cette maison que j’habite depuis cinq ans.
-Emouvant, cette histoire ;
- Eh oui !
-En tout cas, c’est une somptueuse résidence.
Un silence momentané s’installe. Son regard se plonge un instant dans le mien et cela
m’embarrasse. Je baisse les yeux et me râcle la gorge.
Le directeur sourit et déclare:
- Je reviens du sport et comme par hasard, je tombe sur toi, debout devant ma maison; qu’est-ce
que tu en penses ?
- Euuuh….. enfin….. rien du tout ; cela
devrait-il signifier quelque chose ?
- Pour moi, oui.
Je ne saisis pas bien le sens de ce qu’il voulait dire mais je ne voulais pas lui poser la question ;
heureusement, c’est à ce moment précis que la femme de ménage se pointa avec des tasses de café
ainsi que de l’eau chaude conservée dans une thermox;elle dispose les tasses, y met deux
cuillérées de café; elle y verse de l’eau chaude avant de me demander si je veux du sucre et du
lait.
Je décline l’offre, j’ai toujours aimé prendre du café pur ; mais je n’en abuse pas car c’est un
stimulant. Je sirote mon café sans plus rien dire ;
Le regard du directeur fixé sur moi en dit long ; je commence à penser que Safiétou et Colette ont
raison.
Dès que je finis ma tasse, je demande à partir:
- Bien directeur, merci pour le café; l’heure file et vous devez partir au travail ;
- C’est un plaisir de t’avoir croisé ce matin et d’avoir partagé une tasse de café avec toi. Je te
souhaite une bonne journée ; laisse-moi te raccompagner au portail.
- Merci.
Dès que je sors de la maison du directeur, je décide de rebrousser chemin; j’ai environ vingt
minutes de marche à faire pour rejoindre le domicile de mon frère.
Cette rencontre imprévue, je dois l’avouer a bouleversé ma promenade. La faim me tenaillait déjà
avant que je ne rentre; je demande à la domestique de Colette de me faire des œufs; vous direz
que je ne fais que manger ; c’est vrai, j’adore déguster de bons plats et pourtant je ne grossis
jamais.
Certains parlent de génétique,d’autres, du métabolisme. Dans tous les cas, pour l’instant, j’ai faim
et je compte donner satisfaction à mon organisme.
Mon petit déjeuner une fois terminée, je décide de rejoindre ma chambre ; je pense que Chris dort
encore. En traversant le grand salon, je croise Colette.
- Bonjour Raissa ;
- Bonjour Colette; tu es en congé ; il fallait faire la grasse matinée;
- C’est Abdoulaziz qui m’a réveillé en partant et je n’ai pas pu continuer le sommeil ; et toi, ça
va ? On dirait que tu étais sortie ?
- Oui, une courte promenade pour prendre de l’air frais ;
- Pour une personne qui est allée se promener, tu es bien vite rentrée;
- Oui, après avoir pris le café, j’ai eu chaud et je n’ai plus été motivée;
- Tu prends le café en route maintenant, Raissa ?
Je souris de la remarque puis je réponds:
- Non, on me l’a offert;
- Hum ! Qui t’a offert du café en route ?
Je parle de ma rencontre avec le directeur de l’hôpital à Colette qui s’écrie en riant:
- On dirait que ton destin te bipe, ma chère !
- C’est encore quelle expression ça, Colette ?
- C’est juste pour rire; c’est quand même bizarre ce hasard; bref, est-ce que tu vas revoir ton
Avocate aujourd’hui ?
-Non, plutôt demain.
- Au fait, Raissa, j’espère que tu t’es excusée auprès de l’entrepreneur pour ton comportement.
- J’ai oublié, je le ferai au cours de
la journée ;
- Non, fais-le en même temps, tu pourrais encore oublier. Je suis les conseils de Colette et
j’appelle Ezéchiel ; il est tout à fait courtois comme d’habitude et apparemment ne m’en veut pas
pour cet incident.
Cependant, il exprime le désir de me voir avant le jour du procès. Dès que je raccroche, je
constate un message sur mon téléphone ; je l’ouvre et je lis. Il est écrit: « Prends au sérieux ce que
je t’ai dit hier; viens chercher tes affaires qui n’ont plus rien à faire chez moi; tu dois libérer la
chambre pour ma future femme».
Je comprends que c’est Stanley; qui lui a même donné mon numéro de téléphone ?
Je hausse les épaules; ce n’est pas bien difficile à avoir ; je l’utilise pour appeler le domicile et
parler aux enfants et parfois à la nounou.
Au début, son message m’énerve mais je me souviens des mots que Colette m’avait dit à propos
du mouton et de la tabaski. Alors, je l’ignore. Pfff ! Quelle future femme même ! Rira bien qui
rira le dernier.
Quand je finissais la lecture du message, Chris s’est déjà réveillé et est venu au salon de lui-même
; il me sourit; il pense que je suis sa mère; pauvre petit innocent! Je l’observe, il commence à
prendre les traits de Stanley progressivement.
Je passe ma journée à lire et à me préparer psychologiquement ; j’aurais
téléphoné à Safiétou si la situation n’était pas tendue entre nous.
La nuit tombe aussi vite que le jour est apparu ; quand vient l’heure de se coucher, je m’allonge
sur le lit après avoir prié; j’ai une brève pensée pour mes enfants; ensuite le tableau de ma
rencontre avec le directeur de l’hôpital vient dans mon esprit mais je le chasse aussi vite qu’il
s’est montré ; je m’endors toute confiante. C’est étrange, je ressemble même une certaine paix.
Demain sera un autre jour. Le lendemain je prolonge mon sommeil pour faire une grasse matinée ;
c’est la sonnerie du téléphone assez retentissante qui me réveille.
Je prends le téléphone et je constate que c’est Béatrice.
- Bonjour Béatrice ;
- Non, ce n’est pas Béatrice ; c’est son mari ; elle m’a dit de vous appeler ;
- Oui, je vous écoute.
- Les contractions ont commencé ; elle demande de vous avertir et si vous n’étiez pas disponible,
elle préfère aller dans un autre hôpital ;
- Non, emmenez-là à l’hôpital, j’arrive.
Je saute du lit et prends mon bain ; je ne peux pas ne pas assister Béatrice même si je suis
permissionnaire; je vais aller l’accoucher moi-même et m’assurer que tout se passe bien ;
heureusement même que ses jumeaux ont décidé de se pointer deux jours avant le procès; si
c’était le jour même, ce serait grave; mais je me réjouis trop vite car rien ne prouve que dans deux
jours, Béatrice serait déjà en forme pour témoigner.
Je m’apprête rapidement et je sors de ma chambre ; j’avertis Colette que je me rends à l’hôpital .
- Mais tu es permissionnaire !
- Béatrice mon principal témoin est sur le point d’accoucher.
- Oh ! Les enfants auraient dû attendre le lendemain du procès mais n’aie crainte, Dieu est grand ;
- Merci Colette, j’y vais ;
- Raissa, laisse que je te conduise; tu auras l’esprit plus reposé avant d’effectuer l’accouchement.
Une fois à l’hôpital, j’entre dans le bureau des Sage-femmes pour aller au vestiaire porter ma
blouse.
Safiétou était assise, remplissant une fiche; je la salue mais elle me répond à peine. Béatrice
attendait déjà ; comme toute femme en travail, elle faisait assez de grimaces et hurlait sa douleur.
Nous avions trois salles pour l’accouchement: une, très grande, qui est commune à toutes les
femmes et deux autres où on ne peut accoucher qu’une femme enceinte, celles-là qui désirent que
leurs maris soient présents à leurs côtés. Mais dans ce cas, il faut payer une somme élevée pour
bénéficier d’un tel privilège.
Je me souviens que Béatrice ne voulait pas accoucher dans la grande salle, alors je l’emmène dans
une des salles privées. Elle était complètement dilatée; je l’installe sur la table mais le premier
bébé se présente en siège, c’est-à-dire que plutôt que la tête se présente, ce sont les fesses.
Oh Dieu ! Je suis obligée de faire appel au gynécologue pour la césarienne. Dans ce cas, ce n’est
pas évident qu’en deux jours, Béatrice soit déjà en forme pour
témoigner. En dehors d’Hermione qui ne se manifeste toujours pas, Béatrice est le témoin-clé.
Une fois encore, ma foi est mise à rude épreuve et je ne sais pas quand est-ce que je commence à
couler des larmes. Pourquoi faudrait-il que je rencontre toujours des obstacles ?
Tout en pleurant, je cours dans le bureau des Sage-femmes pour utiliser l’interphone afin de
prévenir l’un des gynécologues pour l’opérer; en journée, il y en a au moins quatre.
Safiétou était toujours présente dans le bureau et voyant que j’ai les larmes aux yeux, elle laisse
tomber sa colère et m’interroge:
- Raissa, pourquoi tu pleures ?
- Pour rien ; Je m’avance pour prendre l’interphone mais elle vient se placer devant moi.
- Qu’est- ce qui ne va pas ?
D’abord, on m’a dit que tu es
permissionnaire ; que fais-tu ici ?
- C’est ma patiente Béatrice qui m’a appelé ;
- Tu es la seule Sage-femme ici ? Elle ne peut pas se faire accoucher par une d’entre nous ?
- Safiétou, tu me perds le temps, elle doit être césarisée, je veux appeler un Gynéco.
- Elle a quel problème ?
- Le bébé s’est présenté en siège; En disant cela, des larmes s’échappent encore.
Safiétou reprend :
- Raissa, vas-tu enfin arrêter de me cacher des choses et me parler franchement ? Si l’enfant de ta
patiente est en siège, tu appelles un
gynécologue et tu te reposes, c’est tout; si tu pleures, c’est que tu as une bonne raison; dis-le moi,
je peux peut-être t’aider.
Je sens au plus profond de moi-même que Safiétou est sincère; alors je lui explique que Béatrice
devrait témoigner en tant que patiente, ce qui compterait
énormément pour le verdict du Juge; je m’abstiens de lui dire qu’elle était même le témoin clé.
Safiétou répond:
- Si elle est césarisée, ce n’est pas sûr qu’elle puisse être disponible pour témoigner. Raissa, la
présentation par siège n’implique pas automatiquement la césarienne ; essayons d’abord;
Laisse-moi faire; allons-y ;
- Elle porte des jumeaux ;
- Allons ;
Safiétou et moi nous précipitons dans la salle où est installée Béatrice qui continue de grimacer ; il
faut dire que Safiétou est une Sage-femme très professionnelle et très experte; elle a déjà fait ses
preuves pour des cas compliqués.
Je la regardais faire et je priais intensément dans mon cœur. Il fallait que Béatrice témoigne.
Safiétou et moi essayons de délivrer Béatrice et grâce à Dieu, tout se déroule bien; c’est vrai, cela
a été douloureux pour Béatrice mais les deux bébés sont venus au monde et en pleine forme: un
garçon et une fille.
Mon cœur s’apaise. Dans deux jours, elle pourra donc consacrer deux à trois heures de temps pour
l’audience.
Dieu soit loué !
Safiétou et moi nous occupons des nouveaux-nés et quand nous avons fini, nous apportons les
enfants à leur mère,
toujours sur la table d’accouchement pour surveillance. Elle nous remercie.
- Merci les Sage-femmes ;
- Tes bébés sont là; ils sont si mignons;
- Merci Sage-femme, même si cela va être difficile, je serai quand même au procès pour
témoigner.
- Merci Béatrice.
Safiétou m’adresse la parole:
- Rentre Raissa, je vais la surveiller ;
rentre te reposer et te préparer ;
- Merci infiniment Safiétou.
Ce dernier geste que vient de poser Safiétou achève de me convaincre définitivement qu’elle n’est
pas coupable.
Avant de sortir de l’hôpital, je passe en Médecine pour voir le fils d’Ezéchiel ; il va beaucoup
mieux, disons qu’il est presque guéri ; il était seul avec Tatiana, sa tante.
- Bonjour Tatiana; j’ai juste fait un crochet pour voir comment Luc allait ;
- Très bien, comme tu peux le constater ;
- Où est Ezéchiel ?
- Au travail ;
- Ok, je vais vous laisser ;
- Raissa,je suis désolée pour Stanley ;
- Mais non, tu n’en es pour rien.
Passe mon bonjour à ton frère quand il sera là; à bientôt.
J’appelle un taxi car Colette est repartie; dès que je me retrouve à la maison, je lui fais le point
puis je m’allonge encore un moment pour me reposer avant de me préparer pour me rendre à mon
rendez- vous avec Ezéchiel qui tenait à me voir.
Que d’émotions ressenties depuis ce matin ! Seigneur, merci pour la délivrance de Béatrice !
Je n’attends plus qu’Hermione ! Je me repose un moment avant de m'apprêter pour sortir.
Au programme, un tour au cabinet de mon Avocate et puis honorer la
rencontre avec Ezechiel.
Je m'y préparais quand mon téléphone portable sonne et je vois que c'est Béatrice.
- Allô Béatrice, je vois que tu es déjà
remise de tes efforts;
- Oui j'ai déjà une chambre mais j'ai besoin que tu viennes tout de suite.
- Pourquoi?
Elle répond d'une voix très basse. Elle chuchotait presque:
- La voix. Je l'ai reconnu.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 28)
Je m'y préparais quand mon téléphone portable sonne et je vois que c'est Béatrice.
- Allô Béatrice, je vois que tu es déjà remise de tes efforts;
- Oui j'ai déjà une chambre mais j'ai besoin que tu viennes tout de suite.
- Pourquoi?
Elle répond d'une voix très basse. Elle chuchotait presque:
- La voix. Je l'ai reconnu.
- Quelle voix ?
- Viens, c’est mieux.
Mon cœur bat la chamade; je pouvais même entendre les battements saccadés; sur le champ, je ne
sus quoi lui répondre.
Elle poursuit:
-Je ne peux pas parler fort;
- D’accord, je comprends, raccroche, j’arrive.
En une vitesse d’éclair, je suis déjà au volant en train de conduire. Le trajet de l’hôpital auquel je
suis pourtant habituée, me paraît une éternité. Pendant que je roule, je pense à tellement de
choses !
Avec quelle Sage-femme Béatrice a eu de contact à part Safi ? Mais non, je ne vais pas juger trop
vite;
Maître Justine m’a déjà dit que l’évidence n’est pas une preuve et j’ai moi-même déjà fait
l’expérience avec Ezéchiel; cette journée, il y avait trois Sage-femmes puisqu’Adèle est en congé;
je l’exclus d’office de même que celle qui sera de garde ce soir; mais, si Safi était la coupable, elle
n’allait pas vouloir que Béatrice témoigne en ma faveur; elle allait donc préférer qu’on la césarise;
de
même, Béatrice me l’aurait dit avant mon départ de l’hôpital.
Oh mon Dieu, je suis confuse, faites que ce ne soit pas Safiétou !
J’arrive enfin. Je ne vois que ma collègue, Juliette celle-là qui m’avait passé le témoin pour la
garde de malheur; les autres sont parties.
- Salut Juliette ;
- Salut Raissa ; tu es venue voir ta patiente ?
- Oui, elle est dans quelle chambre ?
- Chambre une ;
- Tu es encore là pour longtemps ?
- Non, c’est Silicatou qui est de garde ; dès qu’elle vient, je vais partir.
- Ok,
- Au fait, as-tu croisé Adèle ?
-Non, elle m’avait dit qu’elle voyageait;
- Oui mais elle est revenue avec sa mère qu’elle compte soigner ici; elle avait fait un saut à la
maternité après ton départ; elle est à peine sortie d’ici quand tu es entrée.
- Ok, à tout à l’heure, je vais voir ma patiente.
Adèle était donc ici ? Alors, elle s’ajoute aux trois collègues qui étaient là en journée ; elle
m’avait dit qu’elle resterait un moment près de sa mère ; bon, je suppose qu’elle a préféré que de
bons soins lui soient prodigués en ville. Mais je la soupçonne fortement.
Je pousse légèrement la porte de la chambre de Béatrice que je vois devisant tranquillement avec
son mari. Les bébés dorment à côté; son mari me remercie une fois encore:
- Sage-femme, merci encore pour ce matin ;
- Je vous en prie, c’est mon travail; alors, Béatrice, tu t’es remise ?
- Oui, je ne sens rien d’étrange, tout va bien ; chéri, est-ce que tu peux me laisser un moment avec
la Sage-femme, s’il te plaît ?
Son mari acquiesce et sort de la chambre. Elle me fait signe de m’asseoir et de m’approcher
d’elle. Elle murmure dans mes oreilles ;
- Raissa, c’est imprudent que nous parlions ici; c’est pour cela que je te
chuchote dans les oreilles; j’ai reconnu la voix de ta collègue en question.
Je réponds aussi avec une voix basse:
- C’est qui ?
- Je ne connais pas son nom; je l’ai juste entendu parler;
- Est-ce Safiétou ?
- Qui est Safiétou ?
- Celle qui t’a accouché ;
- Non, pas du tout ;
Mon cœur ne m’avait donc pas trompé; Dieu merci, ce n’est pas Safi ma copine.
Béatrice poursuit:
- Safiétou a même été très gentille avec moi. Elle m’a examiné et selon elle, c’est comme si
j’avais un début de saignement; alors, elle est allée appeler trois autres Sage-femmes pour venir
m’examiner et donner leurs avis.
Pendant qu’elles discutaient entre elles, j’ai reconnu la voix.
- Trois autres ou deux autres?
- Trois autres ;
- Mais il n’y avait que trois Sage-femmes ici ce matin ;
- En tout cas, elles étaient quatre à mon chevet.
Adèle était donc là en ce moment sans doute. Il n’y a aucune autre explication.
J‘interroge à nouveau Béatrice.
- Peux-tu me décrire l’intéressée ?
- Oui, elle est noire et grande de taille.
J’exclus d’office Juliette ; elle est claire et courte de taille. Il reste Anne-Marie, Adèle et Rosalie,
vu que Silicatou n’était pas là.
Définitivement, Safi est écartée ; Béatrice a certifié que ce n’est pas elle. De plus, Safiétou est
grosse et claire de peau.
- Béatrice, peux-tu ajouter un autre descriptif ?
- Elle est mince.
Si elle est mince, alors ce n’est pas Anne-Marie. Il n’y a qu’Adèle et Rosalie qui répondent à ces
critères.
Silicatou aussi, mais elle n’était pas là ; néanmoins, tout comme Adèle a fait un saut aujourd’hui,
il me faut m’assurer que Silicatou n’a pas fait un tour entre temps.
L’information de Béatrice n’a fait que m’aider à écarter certaines pistes mais hélas, ne m’a pas
permis de découvrir le coupable.
Mon téléphone sonne et c’est mon Avocate:
- Allô
- Mais où es-tu ? Je t’attends depuis deux heures;
- Excusez-moi Maître, je m’apprêtais à venir quand j’ai reçu un coup de fil de Béatrice ;
- Que se passe t-il avec elle ?
- Elle a accouché ; je viens à l’instant, je vous expliquerai.
Je prends congé de Béatrice et je me rends chez mon Avocate; pendant que je roule, je passe un
coup de fil à Ezéchiel.
- Allô
- Salut Ezéchiel; j’appelle pour reporter l’heure du rendez-vous ; j’ai eu des imprévus ; Ok, il est
bientôt dix-neuf heures ; si tu veux, on remet à demain;
- Non, demain j’ai prévu rester avec mes enfants une partie de la journée et je ne veux pas sortir
du tout; si cela ne te gêne pas, dès que je finis avec l’Avocate, je te fais signe.
- S’il se fait tard, laisse ta voiture à son cabinet et appelle-moi ; je viendrai te chercher ; il ne faut
pas que tu conduises seule la nuit ;
- C’est entendu.
Une fois, chez Maître Justine, je lui reporte la discussion avec Béatrice
qui s’exclame.
- Lorsque j’ai interrogé tes collègues, c’est exactement les trois personnes que j’avais
soupçonnées: Rosalie, Adèle et Silicatou.
- Ah bon ?
- Oui, si nous pouvons nous assurer que Silicatou n’est pas du tout venue aujourd’hui, alors c’est
entre Adèle et
Rosalie.
- Rosalie est une personne très calme; en plus, Adèle était la première venue à l’hôpital ; or,
Béatrice a bien dit que la coupable était seule avec Hermione.
- Je penche aussi pour Adèle mais l’expérience m’a montré qu’il ne faut
jamais rien conclure sans preuves et le sucre ressemble au sel à vue d’œil ; ce n’est qu’en les
goûtant que tu peux faire la différence ; de toute façon, nous sommes avancées car au moins à ces
trois personnes, je poserai des questions très pertinentes ; au tribunal, avec les
questions du procureur et du jury, tout ceci va s’éclaircir; avec un peu de chance, tu ne seras pas
qu’innocentée mais la coupable sera découverte et ira en prison à ta place.
- La question que je me pose, Maître est: pour quelle raison l’une de mes collègues tuerait Sonia ?
- Il y a toujours une motivation et nous le saurons s’il plaît à Dieu après-demain.
- J’ai encore failli faire une erreur de jugement ; j’avais pensé tout à l’heure à Safiétou ; d’ailleurs
quand bien même elle est mon amie, je ne lui disais rien de l’affaire.
- Non, moi je savais à travers ses réactions que ce n’était pas elle ; Mais tu as bien fait d’être
prudente et de ne rien lui dire de nos démarches car elle pourrait le rapporter inconsciemment aux
oreilles du coupable sans même savoir qu’elle agit mal; tu n’avais pas d’autre choix que de te
méfier ; tu as eu la bonne attitude.
Après tout c’est ton avenir qui était en danger. Bien, je vais te donner quelques conseils pour
l’audience, comment te comporter, comment t’habiller etc…
Les conseils que m’ont donnés mon Avocate sont les mêmes que ceux
émis par le directeur de l’hôpital.
Je la remercie et je téléphone à Ezéchiel comme convenu.
Maître Justine m’interroge:
- Tu as rendez-vous avec Ezéchiel?
- Oui ;
- Ah ! j’ai manqué des épisodes ?
- Non, pas du tout ; il tenait juste à me voir aujourd’hui.
-Pourquoi ne pas remettre à demain ? Je ne veux pas que tu conduises la nuit ;
- Justement, je vais laisser ma voiture ici et il viendra me chercher ;
- Ok ; qu’as-tu prévu faire demain ?
- Rien dans la journée et passer du temps avec mes enfants en soirée.
- Je te conseille d’utiliser ta matinée pour prier ; retire-toi seule quelque part et confie ce procès
dans les mains du plus grand Juge.
- Merci Maître.
Peu de temps après, Ezéchiel vient me chercher:
- Où allons-nous ?
- Dans un restaurant, ce serait plus convivial pour discuter;
- Décidément ! La nourriture me cherche où que je sois.
Ezéchiel rit de cette blague.
- Tu n’as pas l’air d’une personne qui mange trop ;
- Oh que si !
- Tu as pourtant une silhouette de guêpe.
- Merci, c’est génétique ; si la nourriture devrait me faire grossir, je serai déjà aussi volumineuse
qu’une baleine.
Une fois au restaurant, nous commandons nos plats ;
Ezéchiel débute la discussion:
- Raissa, je tenais à te voir pour te témoigner tout mon soutien pour le procès ; je sais ce que tu
peux ressentir car je suis passé par là aussi;
- Ce n’est pas facile; même si on se dit que tout ira bien et que Dieu est au contrôle, parfois, une
légère frayeur vous envahit.
- Oui, et c’est là où l’être humain a besoin de Dieu; nous sommes humainement faibles. Et dans
notre faiblesse immense, que ferons-nous sans Dieu ? C’est donc sur Lui que ton regard doit être
constamment fixé ; ne doute plus une seule seconde qu’Il peut faire l’impossible pour toi; alors tu
verras les justes désirs de ton cœur s’accomplir.
- Merci Ezéchiel, je pense que j’ai été
suffisamment nourrie spirituellement.
- Je voudrais aussi attirer ton attention sur une chose ;
- Je t’écoute ;
-Ne perds pas ton temps à détester Stanley même si tu décides de t’éloigner de lui ; tu as besoin
d’avoir le cœur dégagé de toute haine pour pouvoir t’adresser à Dieu.
- C’est difficile mais je vais essayer; parlant de lui, que comptes-tu faire ?
- Cela fait un moment que je confie le mariage de ma sœur entre les mains de Dieu ; je considère
que c’est la réponse à mes prières ; nous allons tout simplement nous éloigner de lui, sans plus;
mais nous ne lui ferons aucun mal; ce sera déjà terrible pour lui de se rendre compte qu’il n’y aura
plus de mariage ni de partenariat ; ce qui est dommage est qu’il a déjà démissionné de son emploi
pour s’associer avec moi.
-Vous travaillez donc déjà ensemble?
- Oui.
- Stanley va tomber de haut alors;
- Ce serait une bonne leçon pour lui et je t’assure qu’il n’y a pas meilleur éducateur dans la vie
que de bonnes leçons. Cela pourrait l’amener à réfléchir, à s’examiner et à changer. Qui sait, il
voudra même revenir avec toi.
- Jamais de la vie ;
- On ne dit pas ça ; tu ne peux jamais être certaine que tu ne boiras plus l’eau d’une fontaine.
- En tout cas, cela m’étonnerait ! Stanley ! Non ! Je ne peux pas rester avec quelqu’un qui
m’inspire de l’insécurité; j’aurai constamment peur.
- Que vas-tu faire après le procès ?
- Je n’y pense même pas; j’attends d’abord l’issue.
- Raissa, pense que l’issue est favorable et agis comme tel; choisis de dépasser tes limites du passé
et sois prête à t’adapter et à t’ouvrir à ce que le futur te réserve. Et je suis sûr que ce futur te
réserve de bonnes choses;
- Si le futur peut m’accorder d’obtenir la garde de mes enfants, ce serait déjà assez ;
-Pas que la garde des enfants, un bon compagnon aussi ;
- Non, je n’en veux pas;
- Et pourquoi ?
- Je n’ai plus envie de vivre une histoire d’amour;
Ezéchiel émet un sourire narquois et répond:
- Ce n’est pas toi qui décides de toute façon ; c’est ton Dieu et s’il te l’impose, tu ne sauras même
pas quand et comment c’est arrivé; il se fait tard Raissa; je vais te conduire chez toi.
- On y va.
Nous commentons l’actualité politique au pays pendant le trajet;
Ezéchiel me dépose chez moi, me souhaite bonne chance pour le procès et promet de m’appeler le
lendemain.
Je rentre épuisée et je n’ai même pas pu prendre une douche avant de dormir; le lendemain je me
réveille remise de ma fatigue.
Je passe ma journée de façon relaxe et je prie beaucoup ; dans la soirée, je revois
mes enfants avec qui je me détends
formidablement.
Demain sera décisif car mon avenir se jouera au procès: le fameux procès tant attendu.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 29)
Je rentre épuisée et je n’ai même pas pu prendre une douche avant de dormir le lendemain je me
réveille remise de ma fatigue.
Je passe ma journée de façon relaxe et je prie beaucoup; dans la soirée, je revois mes enfants avec
qui je me détends formidablement.
Demain sera décisif car mon avenir se jouera au procès: le fameux procès tant attendu.
Si tout se passe bien, je retourne à la
maison, dans le cas contraire, je vais directement en prison. Quand je pense encore aux menottes
sous mes mains, j’ai froid au dos; je sais que le Dieu de justice n’a pas dit son dernier mot.
C’est aujourd’hui que mon procès a lieu; je me suis réveillée très tôt et je remercie Dieu d’être en
liberté et de pouvoir quitter un domicile pour le tribunal plutôt que la prison pour y aller; j’ai une
pensée profonde pour tous les prisonniers innocents ou ceux qui involontairement se sont
retrouvés coupables d’un crime.
Je m’apprête en suivant les recommandations de mon Avocate et du directeur de l’hôpital.
Je porte un veston bleu nuit confortable sur un pantalon de couleur noire qui me
donne un air très administratif.
Mon frère vient dans ma chambre pour me prodiguer des conseils et me réconforter. Je n’ai pas
d’appétit mais Colette m’oblige à prendre un café plus du pain pour ne pas avoir faim.
Nous montons toutes deux dans la voiture de mon frère avec Chris et la
domestique puis nous nous rendons au cabinet de Maître Justine.
Je suis légèrement stressée mais je ne suis pas effrayée; c’est vrai que j’aurai voulu qu’Hermione
témoigne mais comme Ezéchiel l’a dit, c’est dans le calme et la confiance que résidera ma force.
Maître Justine m’avait expliqué que dans un procès criminel, le principe est toujours le même: une
personne est poursuivie parce qu'elle est accusée d'avoir commis un crime. Le juge ou parfois le
jury, doit tenir compte de la preuve présentée au procès pour déterminer si la personne accusée est
coupable ou innocente.
L'audience est publique, sauf décision contraire du président du tribunal criminel. Le président
interroge d'abord le plaignant, le prévenu et les témoins.
Nous venons d’arriver au Cabinet de Maître Justine. Elle est déjà prête dans sa toge à col blanc
qui lui va très bien.
- Alors Raissa, tout va bien ?
- Oui Maître ;
- Tu as une tenue correcte. Elle te va bien. Ne crains rien ; j’ai tous les éléments pour ta défense.
Et j’ai une bonne nouvelle pour toi.
- Laquelle ?
- Le président du tribunal est un Juge très compétent et surtout intègre; jusque-là, il s’est révélé
incorruptible ; il a toujours rendu des verdicts justes ; avec les témoignages de tes patrons, tes
collègues et tes patientes dont surtout Béatrice, tu te dois t’espérer si c’est ce Juge qui tranche.
Abdoulaziz interroge l’Avocate:
- Maître, combien de témoins se prononceront contre elle ?
- Je n’en sais rien, c’est ce matin que nous allons le découvrir, mais ce qui est certain Stanley est
de la partie adverse.
Bien nous pouvons maintenant nous rendre au tribunal.
Dès que nous sommes entrés dans l’enceinte du tribunal, nous garons non loin de la salle
d’audience et je reste dans la voiture avec Maître Justine qui m’entretenait ; de là, je pouvais
apercevoir mes collègues quand chacune venait,mes supérieurs hiérarchiques, le directeur de
l’hôpital, Ezéchiel et sa sœur.
Jusque-là, Béatrice n’est pas venue.
J’hésite entre lui téléphoner ou attendre; de toute façon, il reste encore trente minutes avant le
début du procès et ses bébés ont à peine deux jours d’âge.
Stanley fait son entrée; je l’observe avancer. Visage grave mais serein, sûr de lui, il était bien
habillé et marchait avec assurance.
Je le regarde et je me demande si nous avions été unis une fois par l’amour; car cet homme qui
vient semble un étranger pour moi. Je ne ressens aucune émotion en le voyant. Je me demande si
nous
nous aimions vraiment car il paraît que l’amour vrai ne finit jamais.
Peu de temps après, je vois Béatrice faire son entrée ; pauvre nouvelle accouchée, elle a à peine eu
le temps de bien se reposer.
Maître Justine qui auparavant était descendue de la voiture revient me chercher.
- Il est l’heure d’entrer Raissa;
Légèrement anxieuse, je descends du véhicule de mon frère et je la suis. Nous faisons notre entrée
dans l’une des salles d’audience de ce palais de justice.
Le tribunal criminel est composé de magistrats professionnels. Lorsqu’ils ont fait leur entrée dans
la salle d’audience, une sonnette a tinté; à ce signal, l'assemblée s’est levée et a attendu que le
Juge, président du Tribunal, fasse signe de se rasseoir.
Le président du tribunal prend la parole et déclare ouverte l’audience criminelle du jour ; il invite
le Greffier à lire les affaires inscrites au rôle.
Celui-ci prend la parole et déclare que la seule affaire inscrite pour l’audience est la mienne
intitulée «affaire ministère public de Monsieur Stanley GOBI contre Madame Raissa POCHA
épouse GOBI ».
A l’appellation de nos noms, nous avons répondu présents.
J’ai été orientée dans le box des prévenus et Stanley s’est assis à côté du Ministère public,
représenté par un procureur. C’est lui le plaignant. Il est donc installé en face
de l’assistance.
Le Juge prend la parole et s’adresse à moi:
- Vous êtes Madame Raissa Pocha Gobi, fille de Monsieur Amadou Pocha et de Reine Lojou ;
Sage-femme de profession, c’est bien vous ?
- Oui, Votre Honneur.
Le Juge demande à ce que l’on me notifie la prévention c’est-à-dire les faits qui me sont
reprochés.
Le Greffier prend la parole et déclare
« Madame Raissa Pocha Gobi, il vous est reproché d’avoir commis un homicide volontaire sur les
personnes de Dame Sonia Gamoué et son fils nouveau-né, faits prévus et réprimés par le Codé
pénal ».
Après la lecture de la prévention, le Juge reprend la parole:
- Madame Raissa, plaidez-vous coupable ou non coupable ?
- Non coupable, Votre Honneur.
- Monsieur le Procureur, avez-vous des témoins ?
- Oui, votre honneur ; Monsieur Gobi, allez dans le box des témoins.
Stanley s’avance et rejoint le box en question le visage radieux.
Le Greffier lui fait prêter serment en
disant: « Mr Gobi Stanley, levez la main droite et répétez après moi, je jure de dire la vérité, toute
la vérité et rien que la vérité ».
Stanley répéta le serment.
Après la réception du Serment, le Juge donne la parole au Procureur dont le rôle est de rappeler
les faits en cause, ainsi que les circonstances qui entourent
l’infraction et l’arrestation.
Ce dernier pose des questions aux
témoins avant que les Avocats ne prennent la parole. Il est une sorte
d’Avocat du plaignant mais du côté de l’Etat.
Le Procureur interroge donc Stanley.
- Mr Gobi que reprochez-vous à Madame Raissa ?
-Madame Raissa que voici, a, par jalousie volontairement donné la mort à Dame Sonia Gamoué et
pire, à son bébé dont je suis le père.
- Monsieur Gobi, avez-vous les preuves de ce que vous avancez ?
- Oui, Monsieur le Procureur ; les faits sont établis que Madame Raissa Pocha a procédé à
l’accouchement de Dame Sonia qui est décédée; Madame Raissa a
ensuite récupéré le bébé dont elle a par la suite annoncé la mort. Elle s’est débarrassée de lui sans
état d’âme.
- Mr Gobi, comment avez-vous été informés de ce fait ?
- Madame Raissa me l’a elle-même avoué;
Le Procureur déclare n’avoir plus de questions à cette étape.
Le Juge donne la parole à mon Avocate en disant «Maître Justine Assaba, vous avez la parole
pour interroger le plaignant ».
- Merci Votre Honneur.
Mr Gobi, qui était Dame Sonia Gamoué pour vous ?
- J’avais une liaison avec elle parce que je n’étais pas heureux avec Madame Raissa.
-Mr Gobi, dites-moi, pendant toutes les années où vous avez vécu avec Madame Raissa, a-t-elle
jamais posé un acte de violence ?
- Non, Maître.
- Alors pourquoi pensez-vous qu’elle a froidement tué votre maîtresse ainsi que votre fils ?
- Parce qu’elle l’a avoué elle-même.
- Mr Gobi, Madame Raissa vous a-t-elle effectivement avoué qu’elle a tué Dame Sonia et votre
fils ?
- Oui, tout à fait, Maître.
- Je ne vois vraiment pas comment une personne peut avouer un crime qu’elle n’a pas commis.
Merci Votre Honneur, je n’ai plus de questions à cette étape.
Stanley est vraiment mauvais; il a juré tout à l’heure de dire la vérité, pourtant il vient de mentir ;
comment peut-il prétendre que je lui ai avoué avoir tué Sonia et le bébé ?
Je me souviens ce jour-là lui avoir avoué que c’est moi qui ai accouché Sonia ; nous n’avons
même pas eu le temps de parler du bébé; c’est lui qui a déduit que je l’ai tué. S’il croit m’enfoncer
par le mensonge, il sera surpris.
Le Juge estime les charges suffisantes pour que je puisse présenter ma défense. Il me demande de
rejoindre le box des témoins.
Une fois que je suis dans le box, il demande au Greffier de me faire prêter serment, puis donne la
parole au Procureur de l’audience:
- Madame Raissa Pocha Gobi, quand exactement avez-vous connu Madame Sonia Gamoué ?
- Je l’ai rencontré il y a bientôt trois ans alors qu’elle est venue accoucher dans notre hôpital ;
- Alors, comment avez-vous su que votre mari était le père du bébé ?
- Une de ses amies qui l’accompagnait devait renseigner une fiche à mettre dans son dossier, vu
qu’elle ne suivait pas sa grossesse dans notre hôpital.
- Est-ce la raison pour laquelle vous avez décidé de la tuer ?
- Je ne l’ai pas tué, Mr le Procureur.
- Justifiez-vous.
Je raconte les faits exactement comme ils se sont déroulés.
Le Procureur poursuit:
-Madame Raissa, pourquoi avez-vous caché à tout le monde que Dame Sonia était la maîtresse de
votre mari ?
- Je craignais d’être accusée à tort car personne ne me comprendrait ;
- Mme Raissa, pourquoi par la suite avez-vous déclaré le bébé mort ?
- Je l’ai déclaré mort par dépit ; en ce moment, j’avoue que je faisais beaucoup de bêtises et que je
ne réfléchissais pas posément, tellement la situation me troublait.
- Madame Raissa, vous venez de dire que vous l’avez déclaré mort par dépit; est-ce à dire que le
bébé n’est pas mort ?
- Non, Mr le Procureur, il est bien vivant.
Je dirige mon regard vers Stanley qui fronçait les sourcils d’étonnement.
Le Procureur reprend la parole:
- Madame Raissa, si le bébé n’est pas mort, où est-il ?
- Il vivait avec son père et moi puis maintenant il vit avec moi après que Stanley m’ait ordonné de
venir le chercher.
- Avez-vous les preuves de vos déclarations ?
- Tout à fait ; l’enfant s’appelle Chris et un test d’ADN peut être effectué si le besoin se fait sentir.
Il est en ce moment dehors avec une domestique ; si vous le désirez, ils pourront effectuer leur
entrée.
Je regarde encore Stanley qui pâlit; il ne s’en revenait pas ; son mensonge est à nu ; n’a-t-il pas
déclaré tout à l’heure que je lui ai avoué mon crime ?
Le Procureur poursuit:
- Mme Raissa, pourquoi alors avoir avoué un crime que vous n’avez pas commis à Mr Gobi ?
- Mr le Procureur, je n’ai jamais avoué une telle chose à Mr Gobi ; il a menti.
Stanley se grattait la tête; il commençait à être confondu.
Nous pouvons nous voir face à face car il est assis à côté du Procureur et face à l’assistance et au
box des témoins ; je le fixe et il baisse la tête. Il n’a même pas pu soutenir mon regard.
Le Procureur déclare n’avoir plus de questions à cette étape.
Le Juge invite mon Avocate à se prononcer.
- Votre Honneur, merci de me donner la parole ; comme vous le constatez Mr Gobi ici présent est
un homme infidèle, méchant et de surcroît dissimulateur et grand menteur.
En effet, non content d’avoir trompé sa femme, il l’accuse de meurtre alors que lui-même est un
ex-détenu.
Votre Honneur, Mr Gobi par le passé a été condamné deux fois; sa condamnation faisait suite à un
viol puis à des coups et blessures volontaires. Ainsi, nous constations tous ici présents que Mr
Gobi n’est pas de bonne moralité et qu’il a juste voulu profiter de la situation pour
enfermer sa femme afin de pouvoir en épouser une autre pour des intérêts égoistes.
Votre Honneur, qui sait d’ailleurs s’il n’est pas le réel instigateur de ce meurtre afin de faire porter
le chapeau à sa femme qui contrairement à lui jouit d’une bonne moralité ?
Pour preuve, je vous prie, Votre Honneur de bien vouloir autoriser les témoins de la défense à
produire leurs déclarations.
J’observe Stanley ; il fallait être là pour le voir ;il est devenu tout petit dans son siège; La honte l’a
envahi.
Je repense à Colette me disant de laisser le mouton se promener car la tabaski arrive.
La tabaski pour Stanley est là et il a perdu la face. C’est un déshonneur pour lui de se sentir ainsi
dévoilé ; je suis certaine qu’il se demande comment l’Avocate a eu toutes ses informations. N’est-
ce pas lui qui défiait Dieu ? Voilà qu’il est mis à nu !
Le Juge demande de faire défiler les témoins de la défense.
Le directeur de l’hôpital est le premier à produire sa déclaration, témoignant de ma bonne moralité
et de mon professionnalisme.
Tour à tour, mes collègues font de même. Elles ont toutes dit de bonnes choses pour moi.
Après ces déclarations, le Juge invite mes patientes à témoigner; il y en avait deux : Mairi et
Béatrice.
Le témoignage de Mairi fut bref et Béatrice prend sa place dans le box des témoins.
Mon Avocate déclare:
- Votre Honneur, Madame Béatrice que voici, a une déclaration importante à faire.
Béatrice prête serment et commence sa déclaration ; elle raconte exactement ce qu’elle nous avait
dit.
Toute l’assistance était étonnée.
Maître Justine reprend la parole:
- Votre Honneur, à cette étape, je vous prie de bien vouloir inviter à nouveau, Madame Adèle à la
barre.
Adèle tremblait avant même d’entrer dans le box.
Mon Avocate l’interroge.
- Madame Adèle, vous êtes la première venue avant le départ de Madame Raissa ; alors, dites-
nous, est-ce vous qui discutiez avec l’inconnue dont Béatrice
parlait ?
- Non, Maître, cette histoire m’est complètement étrangère, je n’ai discuté avec personne.
- Madame Adèle, toutes les autres Sage-femmes sont venues après vous ; or Madame Béatrice
soutient que la coupable était seule avec une personne qui n’était pas en blouse.
- C’est faux ; ce n’était pas moi.
Adèle fond en larmes, clamant son innocence.
Béatrice est à nouveau invitée à la barre.
Maître Justine l’interroge:
- Madame Béatrice, pouvez-vous reconnaître la voix de la coupable ?
- Oui Maître.
- Bien, est-ce la voix de Madame Adèle ?
- Non Maître.
- Alors, vous avez tout à l’heure entendu les collègues de Madame Raissa témoigner ; pouvez-
vous reconnaître la coupable parmi elles, grâce à sa voix ?
- Bien sûr.
Maître Justine demande au Juge d’inviter toutes mes collègues devant la salle afin que Béatrice
désigne celle dont elle reconnaissait la voix.
Il fallait les voir; elles étaient toutes tremblantes de peur que Béatrice ne fasse une erreur; jusque-
là, j’avais hâte de savoir enfin qui c’est , même si sans le témoignage de Hermione, il n’y aura
aucune preuve. Toute l’assistance était
impatiente.
- Qui est-ce ? questionne mon Avocate à Béatrice.
Béatrice sort du box des témoins et vient pointer un doigt accusateur sur la personne.
Je ne m’en revenais pas; pour une surprise, c’en est une.
Elle commence à vociférer que c’est un coup monté. Le Juge lui demande de se calmer et d’aller
dans le box des témoins, ce qu’elle fait.
Maître Justine l’interroge.
- Madame, qu’avez-vous à dire ?
- C’est un coup monté ; je ne suis pas la première venue ;
Adèle était déjà là avant mon arrivée. Comment aurais-je pu faire quelque chose du genre en sa
présence ?
Adèle renchérit immédiatement:
- C’est faux; tu es arrivée après moi certes mais à un certain moment, tu m’as demandé d’aller
vérifier l’état du bébé de la dame à la pédiatrie et qu’en revenant, de passer par la cantine te
prendre un sandwich ; pendant ce temps, je suis sortie de la salle et tu es restée seule avec Dame
Sonia et Béatrice qui dormait.
Notre accusée ne démord pas ; elle continue d’affirmer qu’elle n’avait rien à se reprocher.
Adéle poursuit:
- Je comprends maintenant pourquoi tu ne voulais pas que je témoigne;
J’étais dans mes états ; je ne savais plus quoi penser ; comment prouver tout ce qu’Adèle raconte ?
Soudain, une voix s’élève du fond de la salle.
- Tu mens, Rosalie, je n’en peux plus de garder ce secret qui me ronge; je vais tout dire.
C’était Hermione.
J’étais sidérée et heureuse à la fois; je bénissais Dieu dans mon cœur sans arrêt. Seigneur, tu es
merveilleux !
Hermione s’avança et s’adressa au
Juge:
- Votre Honneur, puis-je témoigner ? J’ai une déclaration très importante à faire.
Le Juge acquiesce de la tête et lui demande de rejoindre le box des témoins aux côtés de Rosalie.
Je souris de joie.
Maître Justine se prononce:
- Madame Hermione, nous vous écoutons.
- Merci Maître; Dame Sonia Gamoué était mon amie. Etant en congé de maternité, elle avait du
temps libre ; c’est ainsi qu’un soir, elle m’accompagne chez ma sœur ;
nous décidons de passer deux jours chez cette dernière; mais au cours de la nuit, les contractions
commencèrent pour Sonia.
C‘était très tard la nuit et je l’ai donc amené dans le centre de santé le plus proche qui est l’hôpital
où travaille Madame Raissa. Elle nous a bien accueilli puis après j’ai constaté qu’elle se
préoccupait à peine de moi.
Quand l’enfant est né, elle n’a pas daigné me le montrer. J’étais inquiète. Je n’avais plus aucune
nouvelle.
A un moment, j’ai constaté que Madame Raissa s’est changée et est sortie de la maternité ; je l’ai
interpellé mais elle
m’a envoyé paître. Son attitude m’a beaucoup intrigué ; je voulais savoir ce qui se passait. Alors,
je suis rentrée dans la salle d’accouchement quand bien même je savais que ce n’était pas
autorisé ; je voulais voir Sonia, savoir si
tout allait bien.
Lorsque je suis entrée dans la salle, j’ai vu Béatrice sur la table d’accouchement qui dormait.
J’ai vu Sonia sur la deuxième table et une Sage-femme était avec elle. Je me suis rapprochée
d’elles et j’ai constaté qu’elle se préparait à lui injecter un produit. Je m’en rappelle encore
comme si c’était hier.
Dès qu’elle m’a vu, elle m’a demandé ce que je cherche dans la salle d’accouchement.
Je lui explique que je voulais des nouvelles de Sonia car je suis une amie;mais je regardais
étrangement le mélange qui se trouvait dans la seringue ; elle est de couleur verte et je trouvais
cela curieux ; j’ai commis l’erreur de lui poser la question. Elle ne dit rien et fait rapidement
l’injection; cela se voyait qu’elle voulait vite faire avant que quelqu’un n’arrive. Ses mains étaient
bien couvertes par un gant.
Alors que je ne m’y attendais pas, elle prend ma main et elle me glissa la seringue dans les mains
puis elle me le reprend et me dit: «N’ouvre point la bouche sinon je t’élimine; tes empreintes sont
sur la seringue; moi j’ai mis des gants. Je garderai la seringue ; Si tu parles, je coule et tu coules
aussi ; tu serais même plus trempée que moi.
Je suis très dangereuse, un seul ordre que je donne et tu feras partie du passé, pars sur le champ,
enfuis-toi».
J’ai vraiment eu peur. Par la suite, je ne sais pas comment elle a fait pour me retrouver et depuis,
elle me menace de me faire tuer si je commets la moindre bêtise. Mais aujourd’hui, je décide
même s’il faut mourir de tout dévoiler car si Raissa ne m’avait pas sauvé, je serai morte déjà dans
un accident de voiture.
Un silence de cimetière règnait dans la salle après ce récit.
Rosalie n’eut plus le courage de contester et commence à sangloter.
Maître Justine l’interroge:
- Madame Rosalie, apparemment vous connaissiez bien Dame Sonia.
Dites-nous ce qu’il en est ; pourquoi
l’avez-vous tué en lui injectant un produit nocif ?
- Je voulais me venger d’elle. Ce matin-là, quand je suis arrivée au travail, Adèle était déjà là; j’ai
remarqué que c’est Sonia qui était sur la deuxième table d’accouchement.
Alors, j’étais furieuse car cela fait longtemps que je détestais cette femme ; en effet, elle a fait un
enfant avec mon ex-mari qui dans le temps m’a chassé de chez lui, chose que je n’ai jamais
digérée; je fais malgré cette situation l’effort de me contenir ; elle ne me connait pas mais moi si;
alors je lui demande le nom du père de son enfant ; elle a dit Stanley Gobi, ce nom que je ne vais
jamais oublier ; ce type assis là-bas que je ne peux jamais pardonner; alors j’ai décidé de la tuer
pour la punir de m’avoir fait perdre mon foyer mais surtout pour faire du mal à Stanley, afin qu’il
souffre; je ne savais même pas que c’est lui le mari de Raissa.
- Madame Rosalie, qu’est-ce que Stanley vous a fait ?
- Il m’a violé alors que je n’avais que quinze ans ; nous habitions près de leur demeure et il m’a
attiré dans un piège ce jour-là, il m’a battu, il m’a pris ma virginité et comme sa mère était
influente, il s’en est tiré.
Je suis tombée enceinte et ma mère à cause de mon jeune âge m’a fait faire un avortement et j’ai
perdu mon utérus car les conséquences ont été terribles.
Depuis ce temps, je le déteste de toute mon âme. Alors, non seulement Sonia m’a pris mon mari,
mais pour moi, elle est la femme de mon violeur à cause de qui je n’ai pas pu avoir d’enfant dans
ma vie ; je répète que ne savais pas que cet homme était le mari de Raissa.
Alors, j’ai envoyé Adèle à la pédiatrie pour pouvoir faire ce que j’avais décidé; c’est à ce moment
que se pointe Hermione qui pour moi a compris ce que je voulais faire en me posant la question
de savoir
ce qu’il y a dans la seringue.
Ah ! La vie et ses surprises ! Rosalie, la coupable qui l’eut cru ? Soudain, un bruit au sol attire
l’attention:
C’est Stanley qui s’est écroulé.
À suivre
UN SI LOURD SECRET (ÉPISODE 30)
Ah ! La vie et ses surprises !
Rosalie, la coupable ? Qui l’eut cru ?
Soudain, un bruit au sol attire l’attention:
C’est Stanley qui s’est écroulé.
Je le comprends: trop d’émotions pour son cœur en ce jour; il est venu en vainqueur, sachant qu’il
allait me mettre en prison, mais c’est lui qui est maintenant au banc des accusés; tout son passé est
dévoilé; Il aura appris à ses dépens que rien ni personne ne saurait défier impunément Dieu.
Son humiliation s’est dépeinte avec un H majuscule car défier Dieu est une insolence. Il avait dit
que même si Dieu était mon Avocat, je n’aurai pas gain de cause. Voilà, ce même Dieu a exposé
tout son passé sur plateau.
Qui est l’être humain pour oser se moquer de son Créateur ?
Je me souviens de Tancredo Neves,
président élu du Brésil en 1985, qui disait pendant la campagne présidentielle, que s'il obtient cinq
cent mille voix de son parti, pas même Dieu ne pourrait lui retirer la présidence.
Bien sûr, il a obtenu les votes, il a été élu, mais il est tombé malade un jour avant son investiture,
puis il est mort.
De même, après la construction du célèbre bateau Titanic, un journaliste a demandé à Thomas
Andrews, architecte constructeur du Titanic, comment était-il sûr que le Titanic serait sans
danger ?
Avec un ton ironique, il a répondu:
« Pas même Dieu ne peut le couler »;
Eh bien! Andrews fera partie des mille cinq cent victimes du naufrage du Titanic le 15 avril 1912.
En effet, il est écrit dans les Saintes Écritures: « Ne vous y trompez pas: on ne se moque pas de
Dieu. Ce qu'un homme aura semé, il le moissonnera aussi ».
En me dénonçant, Stanley n’aurait jamais imaginé qu’il creuserait sa propre tombe.
Tel est pris qui croyait prendre.
Quant à Rosalie, j’avoue que je suis complètement sidérée; elle si calme! Safiétou la traitait même
de bête.
A peine on l’entend parler; je savais qu’elle n’avait pas d’enfants mais j’ignorais que son mari
l’avait quitté; comme elle parle peu, je ne connais pas grand-chose sur elle; c’est Adèle qui est son
amie.
Comment une personne si calme peut avoir le courage de tuer ? C’est surprenant voire même
effrayant.
Un proverbe africain dit que "l'eau calme est toujours profonde", ceci permet de qualifier le
tempérament dangereux des
personnes d'apparence calmes.
Comme on le dit en Côte d’Ivoire,
«C’est l’homme on connait pas, on appelle Hé » pour dire que les apparences peuvent être
trompeuses.
Je me demande si Rosalie m’aurait fait du mal si elle savait que j’étais la femme de Stanley ! Mais
j’ose croire que non; elle a été simplement furieuse de voir Sonia tout comme je l’ai été quand j’ai
su que Stanley est le père de son bébé.
La colère nous conduit parfois à des réactions disproportionnées, voire violentes. Agir dans
colère, c’est embarquer dans une tempête.
Rosalie se serait contrôlée qu’on ne serait pas ici aujourd’hui; mais j’avoue que ce
n’est pas facile car moi-même, j’ai eu des envies pas très saines envers Sonia. J’ai dû faire un
effort monstre pour l’accoucher.
Concernant Sonia, elle est vraiment malchanceuse; après avoir arraché le mari de Rosalie, elle fait
un enfant pour son violeur, responsable de sa stérilité provoquée.
Je ne sais pas comment ça se passe dans le séjour des morts mais si là-bas, c’est possible de
réfléchir, elle serait en train de se mordre les doigts et de regretter amèrement cette vie qu’elle a
menée sur terre. Elle aurait payé de sa vie l’amour pour les hommes d’autrui.
Je ne voudrais pas décourager le penchant de certaines femmes pour le flirt avec les hommes
mariés mais en toutes choses, réfléchissons avant d’agir.
Je pensais à tout ceci silencieusement.
J’étais dans la salle mais fortement plongée dans mes pensées; je n’avais même pas remarqué que
des gens s’activaient autour de Stanley; je dresse la tête de là où je suis et je constate que c’est
l’équipe de médecins dans la salle qui était auprès de lui: le directeur de l’hôpital et trois autres
médecins de notre hôpital présents dans la salle.
Stanley est chanceux d’être secouru; ils essaient de le réanimer. Je ne reste pas indifférente à tout
cela et je prie silencieusement dans mon cœur pour que rien de mal ne lui arrive; après tout, n’est-
ce pas le père de mes enfants ?
Même si c’est clair dans ma tête que je n’aurai plus rien à voir avec lui, il reste le père de mes
filles qui voudront sûrement le voir par moments.
Le président du tribunal suspend l’audience pendant une heure de temps; nous sortons tous et les
médecins emmènent carrément Stanley à l’infirmerie.
Toutefois, des policiers nous surveillaient pour qu’il n’y ait aucune fuite. Ils avaient surtout l’œil
sur Rosalie.
Mes collègues à l’exception de Rosalie m’entourent. C’est Juliette qui commence; c’est la plus
bavarde de nous toutes; elle adore les commérages; elle aime faire le
«Kongossa » comme le dit Colette, ma belle-sœur camerounaise ou le «kpakpato» comme en
parle Adèle, la
béninoise.
- Juliette: Raissa, je t’avais dit que tu t’en sortiras; mais franchement Rosalie m’a étonné ! La
femme-ci a du cœur !
- Safiétou: moi, j’ai même toujours pensé qu’elle est bête et naïve. Elle a eu le courage pour tuer
quelqu’un.
- Silicatou: laissez Rosalie tranquille; à sa place, qu’auriez-vous fait ? la voleuse lui prend son
mari; elle n’a pas fini de gérer cela et elle se retrouve encore liée à son violeur; je demande hein
Raissa, comment as-tu pu vivre avec un homme aussi affreux ?
- Safiétou: est-ce qu’elle savait ?
- Anne-Marie: je suis dépassée par les évènements.
-Adèle: j’ai eu tellement peur quand j’ai pensé qu’on allait m’accuser; heureusement que Béatrice
a tout écouté et que Hermione est venue pour confirmer. J’allais être injustement accusée car
l’évidence me condamnerait. Surtout que Rosalie voulait me plonger.
Je les suivais toutes s’exprimer sans prononcer un mot; elles ont passé près de trente minutes à
commenter la situation.
Au loin, Rosalie était debout toute seule.
Je m’avance vers elle.
Safiétou me rattrape:
- Tu vas où Raissa ? Vers Rosalie ? Elle va te tuer, tu verras;
- Toi aussi Safi ! Au tribunal devant tout le monde, qu’est-ce qu’elle pourra bien me faire?
- Ah, tu sais qu’elle tue les femmes de son violeur.
Franchement, Safi est très drôle; elle ne changera jamais ; c’est encore quelle réflexion tordue !
Je m’approche de Rosalie et je m’adresse à elle:
- Rosalie, tu n’aurais pas dû tuer la dame Sonia;
- Elle a détruit ma vie et s’associe en plus avec l’homme que je déteste le plus au monde;
- Ce n’était pas la solution; il fallait te contrôler ; avec le temps, moi, j’ai compris qu’un moment
de patience dans un moment de colère nous évite plein de moments de regrets.
- Remercie Dieu car si j’avais su que tu étais sa femme, c’est possible que j’aurai cherché à te
faire du mal.
- Je suis désolée que tu aies eu à subir cette horreur de la part de Stanley;
-Je n’oublierai jamais ce jour de ma vie. Je sais que je serai condamnée mais même en prison je
ferai tout pour qu’il paie pour le mal qu’il m’a fait. Je n’aurai de répit que lorsque j’aurai sa peau;
- Arrête de vouloir te venger, Rosalie ; affaire de vengeance, voilà comment ça finit. Qui ne pense
qu'à se venger ne trouve jamais le repos. Tu dois apprendre la sagesse dans les sottises des autres
et non faire comme eux.
Nous étions encore en pleine conversation quand Maître Justine
s’approche de nous pour nous prévenir que l’audience allait reprendre.
Il semble aussi que Stanley s’est remis de son choc.
Nous reprenons chacun nos places dans la salle.
Le Juge déclare la séance ouverte à nouveau et passe la parole au Procureur pour sa réquisition.
Ce dernier déplore la situation et affirme que Rosalie n’avait pas à se faire justice; il invite le
président du tribunal à la condamner à une peine de prison pour homicide volontaire; il invite
également Rosalie à porter plainte contre Stanley afin qu’il soit jugé pour ce viol.
Pour finir, il invite le Juge à me condamner pour négligence envers Sonia Gamoué, pour
cachotterie des faits réels et pour avoir déclaré Chris mort.
Après ses propos, le Juge donne la parole à Maître Justine pour sa plaidoirie finale:
- Merci Votre Honneur.
Est-il même nécessaire que je plaide ? Les déclarations que viennent de nous livrer les uns et les
autres devraient
amplement suffire à exonérer ma cliente de cette terrible accusation et des autres charges
énumérées par le Procureur.
Votre Honneur, quand ma cliente a rencontré Mr Gobi il y a une dizaine
d’années, elle l’a aimé et était loin de s’imaginer que c’est un délinquant voire un vampire ;
Votre Honneur, comment voulez-vous qu’une femme se sente lorsqu’elle apprend que la femme
qu’elle s’apprête à accoucher est en fait sa rivale ?
Combien de femmes adopteraient une attitude irréprochable face à cette situation ? C’est pour
cette raison que je trouve que Madame Raissa mérite des félicitations pour avoir quand même
procédé à l’accouchement et s’être occupé du bébé qui a aujourd’hui trois ans.
Pour cette raison, elle ne saurait être condamnée comme le veut le Procureur pour négligence
envers la personne de Dame Sonia car elle a des circonstances atténuantes.
Le Procureur à l’attaque de son réquisitoire réagit:
- Objection, Votre Honneur ; la défense élude volontairement l’évocation des autres chefs
d’accusation !
Le Juge rejette son objection:
- Objection rejetée, Monsieur le Procureur; Maître, continuez votre plaidoirie.
- Votre Honneur, si quelqu’un devrait aujourd’hui être assis sur le banc des accusés, ce n’est point
Madame Raissa.
La réelle coupable étant découverte, Votre Honneur, je vous invite à déclarer Madame Rosalie
coupable en lieu et place de ma cliente ; je demande réparation pour les propos mensongers
véhiculés par Mr Stanley et harcèlement moral sur ma cliente par une somme de cinquante
millions de francs.
Enfin, je demande à ce que ma cliente soit relâchée purement et simplement.
Si vous agissez ainsi Votre Honneur, vous aurez rendu justice. J’en ai fini.
Après l’excellente plaidoirie de mon Avocate, le Juge déclare les débats clos; nous nous retirons
de la salle pour leur permettre de délibérer ; une fois sur la cour du tribunal, Tatiana et Ezéchiel se
rapprochent de Stanley; je les observais de loin. Certainement qu’ils sont en train de lui dire de ne
plus rien espérer d’eux.
Je suis certaine que Stanley gravera à jamais ce jour de honte dans sa mémoire.
Après environ trente minutes, nous sommes rappelés dans la salle.
Le Juge prononce la sentence. Il déclare:
- Le tribunal statuant publiquement à l’égard de toutes les parties, reçoit Mr Stanley Gobi en sa
demande et lui dit qu’elle est non fondée, déclare Madame Rosalie Lou coupable d’homicide
volontaire et la condamne à quinze ans d’emprisonnement ferme; par ailleurs, le tribunal invite
l’intéressée à porter plainte si elle le désire contre Mr Stanley Gobi;
Mr Stanley Gobi est coupable de propos mensongers à l’endroit de Dame Raissa Pocha Gobi et
est condamné à lui verser une somme de vingt millions de francs, représentant les dommages et
intérêts pour le préjudice subi et pour les frais d’honoraires d’Avocat.
Madame Raissa Pocha Gobi est coupable de négligence envers dame
Sonia Gamoué après son accouchement, coupable de mensonge de mort à propos de l’enfant
Chris Gobi.
A cet effet, elle échoppe d’une peine de trois mois d’emprisonnement, durée
qu’elle a déjà effectuée lors de sa détention.
En conséquence, Madame Raissa Pocha Gobi est libre de ses mouvements à compter
d’aujourd’hui.
J’ai ressenti une immense joie envahir tout mon corps; c’est l’euphorie totale.
J’embrasse tout à tour mes collègues, Colette, mon frère, bref tous ceux qui sont là pour me
soutenir. C’était des accolades par-ci et par-là.
Tout le monde était content; enfin, je peux pousser un ouf de soulagement.
Mon Dieu est bon.
Je regarde la voiture des prisonniers embarquer Rosalie et j’eus pitié d’elle; je pense que je vais
lui rendre visite avec l’homme de Dieu.
Je remarque au loin Stanley qui s’avançait vers sa voiture à pas très lents. On aurait dit qu’il
marchait dans la neige chaussé de lourdes bottes, tellement ses pas étaient pesants.
Après le retour à la maison, c’est une nouvelle bataille qui doit commencer pour moi: celle du
divorce aux torts exclusifs de Stanley pour récupérer mes enfants.
Je pense toujours maintenir Maître Justine pour ce volet.
Une semaine après le procès, Stanley me téléphone mais je ne décroche pas; j’en parle à l’homme
de Dieu qui me demande de cesser de le haïr et de l’écouter.
Pour lui, si Dieu nous pardonne nos fautes, nous devons aussi pardonner à notre prochain. En tant
qu’enfant de Dieu, nous devons pardonner car c’est une action noble et plus rare que celle de se
venger.
Je finis donc par décrocher les appels et Stanley insista pour me rencontrer.
- Raissa, je suis confus; je ne sais pas ce qui m’a pris; c’est le diable.
- Ce n’est pas grave, j’ai tout laissé tomber;
- Je te remercie malgré tout d’avoir emmené Chris à la maison;
- Je ne réclame qu’une chose, la garde de mes enfants.
- Je ne veux plus qu’on divorce Raissa.
-Tu plaisantes Stanley? Maintenant que tu as tout perdu et que Tatiana t’a rejeté, tu ne veux plus
divorcer ?
Ecoute, je veux bien te pardonner mais te donner une seconde chance, jamais je ne pourrai ; je ne
me sentirai plus en sécurité à tes côtés.
- Je vais changer, je te promets.
- J’ai besoin de temps pour y réfléchir mais je ne te promets rien car la réalité est que je ne veux
plus.
Stanley insiste mais je reste campée sur ma position. Quelques jours après, Stanley se pointe chez
moi avec mes filles.
- Raissa, c’est maintenant que je comprends que tu étais importante pour moi; on n'apprécie le
vrai bonheur qu'après l'avoir perdu mais c’est trop tard ; je n’ai plus le moral, je suis chômeur,
seul sans amour, et en plus l’Avocat de Rosalie a porté plainte pour viol et je serai sûrement
condamné.
Je connais la prison et je ne veux pas y retourner; je suis venu te remettre les enfants; je peux
partir de la maison pour que tu vives avec eux et je te prie de bien prendre soin de Chris comme tu
le fais maintenant;
- Stanley, tu peux encore te repentir et prendre le chemin de Dieu comme je l’ai fait.
- Oui, si tu veux revenir avec moi;
- En tout cas, pour le moment, c’est impossible.
J’aurais dû insister pour qu’il comprenne que Dieu est compatissant et qu’il peut revenir vers Lui ;
je regrette de ne l’avoir
pas fait parce que deux jours plus tard, j’apprends que Stanley s’est pendu ; il était seul désespéré
et honteux; il n’a tout simplement pas supporté et ne voulait pas retourner en prison.
Après le deuil; j’ai repris ma vie en main; le plus difficile est de consoler les enfants, surtout
Carine qui malgré tout, aimait bien son père; en effet, il s’est toujours bien comporté avec ses
filles.
Entre temps, le directeur de l’hôpital a fini par me déclarer sa flamme mais je ne voulais plus
vivre une histoire d’amour; il m’a avoué m’avoir toujours aimé mais respectait mon statut de
femme mariée; quand bien même Colette m’invitait à prier et consulter Dieu, j’ai juste opposé un
refus catégorique à sa proposition.
Avec le temps, j’ai compris que Dieu a placé Ezéchiel sur mon chemin pour l’empêcher de
s’associer à Stanley et pour que le mariage entre Tatiana et Stanley n’ait jamais lieu;
Il est vrai, il m’avait tapé dans l’œil mais c’était juste passager, rien de sérieux.
Ezékiel est apparu dans ma vie non pas pour remplacer Stanley mais pour me soutenir et
m’orienter ; il m’a été d’un secours important et me guide énormément sur le chemin de la foi.
C’est même mieux ainsi car sa sœur ayant failli épouser Stanley, cela aurait été une situation
embarrassante.
Comme c’est Dieu qui est le maître et que c’est Lui qui décide, il a créé des évènements et des
circonstances qui ont favorisé un rapprochement avec le directeur de l’hôpital.
L’amour vrai, sa sincérité se distingue mieux par les actes que par les paroles; on dit souvent qu’il
n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour. C’est ce que ce dernier m’a démontré par sa
persévérance et ses actions.
Par la force des choses, je finis par
l’épouser et tout fonctionne bien; nous vivons dans sa belle maison avec ses enfants et les miens.
J’ai confié ma vie et mon mariage dans les mains du Dieu Tout-Puissant et depuis je vois les
choses autrement.
Frank Callo mon mari est du corps médical et mes gardes de nuit n’ont jamais été un problème.
Je dirai tout simplement que Dieu m’a donné un bon époux et je suis une femme comblée.
Contrairement à ce que je pensais que j’avais arrêté de faire des enfants, je me trompais ; j’ai été
enceinte à nouveau et j’ai même eu des jumeaux ;
Je me souviens un jour, précisément le jour où Stanley est venu m’embêter à l’hôpital, avoir
plaisanté avec Frank à propos de jumeaux alors que nous nous étions croisés au parking de
l’hôpital; il
disait que cela faisait deux fois que nous sommes croisés et que je ferai des jumeaux ; je lui ai
retourné l’ascenseur, lui disant que c’est plutôt lui !
Ce jour-là, nous étions loin d’imaginer que nous allons avoir ces jumeaux-là ensemble.
Dieu est magnifique ! Il a un plan parfait pour chacun de nous. Tenez-vous avec Lui, Il sera avec
vous.
Fin Fin Fin

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