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M AT É R I AU X

Ti553 - Traitements des métaux

Traitements thermiques
des métaux : généralités

Réf. Internet : 42500

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III
Cet ouvrage fait par tie de
Traitements des métaux
(Réf. Internet ti553)
composé de  :

Traitements thermiques des métaux : généralités Réf. Internet : 42500

Traitements thermiques des aciers, des alliages et des fontes Réf. Internet : 42364

Traitements thermiques superficiels et thermochimiques Réf. Internet : 42501

Traitements de surface des métaux : contexte et gestion Réf. Internet : 42502


environnementale

Traitements de surface des métaux : contrôle et préparation Réf. Internet : 42362

Traitements de surface des métaux en milieu aqueux Réf. Internet : 42359

Traitements de surface des métaux par voie sèche et en Réf. Internet : 42360
milieu fondu

Traitements des métaux : revêtements non métalliques Réf. Internet : 42363

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IV
Cet ouvrage fait par tie de
Traitements des métaux
(Réf. Internet ti553)

dont les exper ts scientifiques sont  :

Pierre BARBERIS
Ingénieur de recherche, AREVA NP, Centre de recherche, Ugine

Martine DEPÉTRIS-WERY
Ingénieur électrochimiste CNAM, Docteur en chimie-physique, Professeur à
l'Université Paris-Sud

Michel GANTOIS
Professeur à l'Ecole Nationale Supérieure des Mines et à l'Ecole Européenne
d'Ingénieurs en Génie des Matériaux - Nancy

Henri MICHEL
Docteur ès Sciences Appliquées

Jacques PAGETTI
Professeur honoraire des universités, Responsable de la commission
Traitements de surface au CEFRACOR (Centre français de l'anticorrosion)

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V
Les auteurs ayant contribué à cet ouvrage sont :

Philippe BRISTIEL
Pour l’article : IN209

Meryem BUFFIN
Pour l’article : M1220

Marc BUVRON
Pour l’article : M1117

Serban CANTACUZÈNE
Pour l’article : M1220

Cécile COMBE
Pour l’article : M1117

Patrick COPPIN
Pour l’article : M1220

Yves DESALOS
Pour les articles : M1105 – M1110 – M1111

Benoît LHOTE
Pour l’article : M1220

Alain MICHEL
Pour l’article : BM5190

Guy MURRY
Pour l’article : M1115

Ngadia Taha NIANE
Pour l’article : IN209

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VI
Traitements thermiques des métaux : généralités
(Réf. Internet 42500)

SOMMAIRE
Réf. Internet page

Introduction aux traitements thermiques des métaux et alliages M1105 9

Panorama métallurgique des traitements thermiques M1110 13

Bases métallurgiques des traitements thermiques M1111 15

Transformations dans les aciers M1115 19

Dégradation de surface des pièces métalliques en traitement thermique M1117 31

Atmosphères de traitement thermique M1220 37

Pièces mécaniques soudées. Contraintes résiduelles induites et traitements BM5190 45


applicables
Simulation numérique des traitements thermochimiques : applications industrielles IN209 51

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VII
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Référence Internet
M1105

Introduction aux traitements


thermiques des métaux et alliages

par Yves DESALOS


Ingénieur civil des Mines, Docteur ès sciences
Expert Métallurgie-Traitements Renault SA

1. Place et enjeux des traitements thermiques .............................. M 1 105 - 2


1.1 Spécificités ................................................................................................... — 2
1.2 Intérêt technique et économique ............................................................... — 3
2. Propriétés d’emploi et relations structures-propriétés ................ — 4
2.1 Principales propriétés d’emploi des alliages métalliques........................ — 4
2.2 Quantification des diverses possibilités de durcissement ....................... — 5
2.3 Principaux moyens d’action sur la structure métallurgique .................... — 7
3. Contrôle des états structuraux par traitement thermique .......... — 9
3.1 Exemples de traitements pour les familles d’alliages
les plus courantes........................................................................................ — 9
3.1.1 Aciers ................................................................................................... — 9
3.1.2 Alliages d’aluminium ......................................................................... — 10
3.1.3 Alliages de cuivre ............................................................................... — 10
3.1.4 Alliages de titane ................................................................................ — 11
3.2 Utilisation des diagrammes de prévision.................................................. — 12
3.3 Moyens de contrôle au niveau produit ou process .................................. — 13
3.4 Dispersions attendues................................................................................. — 13
4. Grandes familles de traitements thermiques industriels .......... — 14
4.1 Recuits .......................................................................................................... — 14
4.2 Trempes ........................................................................................................ — 15
4.3 Revenus ou vieillissements ........................................................................ — 16
4.4 Traitements thermochimiques ................................................................... — 16
4.5 Procédés plus récents ................................................................................. — 17
5. Conclusions ............................................................................................... — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 19

et article introductif rappelle d’abord la place et les enjeux des traitements


C thermiques des métaux et alliages.
Suivent deux paragraphes consacrés, l’un aux relations structure métallur-
gique-propriétés, l’autre aux principaux moyens de contrôle de cette structure
par traitements thermiques.
L’article est complété par un panorama des grandes familles de traitements
avec leurs limites technico-économiques.
Parution : décembre 2003

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 1 105 − 1

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Référence Internet
M1105

INTRODUCTION AUX TRAITEMENTS THERMIQUES DES MÉTAUX ET ALLIAGES _____________________________________________________________________

1. Place et enjeux Évolution historique


des traitements thermiques de la notion de traitements thermiques

À l’Âge du Bronze, les qualités des produits métalliques dépendaient


surtout du savoir-faire des ancêtres fondeurs, notamment à travers les
1.1 Spécificités plages de composition obtenues en phase liquide. Avec l’Âge du Fer, le
savoir-faire a gagné l’art du forgeron avec une certaine maîtrise de la
thermique en phase solide, depuis le puddlage jusqu’au martelage de
mise en forme à chaud. Les cycles thermiques correspondants, aléatoi-
On réserve maintenant le terme de traitements thermiques aux res, facilitaient surtout la mise en forme, en étant parfois favorables aux
opérations intentionnelles destinées à adapter aux conditions de propriétés d’emploi : nos lointains ancêtres ont donc sûrement fait du
mise en œuvre ou d’emploi les caractéristiques structurales des traitement thermique sans le savoir...
ébauches, ou pièces finies, en les soumettant à des cycles ther- On peut néanmoins attribuer aux Chalybes/Hittites, 14 siècles avant
Jésus-Christ, le réchauffement du métal dans du charbon de bois et les
miques appropriés en phase solide. La modification de la struc- premiers traitements thermiques – notamment les premiers durcisse-
ture physico-chimique de l’alliage peut être destinée à optimiser ments par trempe – pour améliorer les propriétés des alliages ferreux.
les propriétés mécaniques intermédiaires ou finales, mais parfois L’empirisme des forgerons d’armes et outils ne pouvait conduire alors
aussi d’autres propriétés d’emploi : tenue dans différents qu’à des propriétés d’emploi très dispersées, et encore quelques siècles
milieux, propriétés électriques ou magnétiques, accrochage de avant J.C., seules certaines régions d’Europe centrale disposant de mine-
certains revêtements... Pour que ces opérations ne soient pas rais riches en manganèse, donc avec une certaine marge de trempabilité,
considérées comme relevant prioritairement du domaine des pouvaient produire des produits de qualité. On ne situe que plus tard,
vers 50 avant J.C., la découverte de l’influence bénéfique du revenu pour
dépôts ou revêtements, les modifications structurales apportées
diminuer la fragilité de l’acier, et celle du recuit pour augmenter sa mal-
par la thermique doivent pouvoir être considérées comme essen- léabilité.
tielles vis-à-vis des apports de surface. Au Moyen-Âge, la fin de la supériorité légendaire des épées de Damas
est une bonne illustration du « petit détail métallurgique déterminant »...
et des risques nés de la mondialisation des échanges.
Bien entendu, ces cycles thermiques ciblés en phase solide Nous allons résumer en quelques lignes cette évolution sur plusieurs
peuvent faire suite à une opération depuis le domaine liquide (sur siècles.
pièces moulées par exemple), ou accompagner des opérations de On sait que, depuis les croisades, les forgerons européens ont vaine-
déformation plastique (traitements thermomécaniques), ou encore ment cherché à imiter les armes islamiques équipées de lames de
des enrichissements chimiques (traitements thermochimiques). Damas. Ces lames en acier à 1,5 % C, présentaient des motifs ondulés
caractéristiques qui sont maintenant analysés comme liés à des bandes
En ce qui concerne les traitements thermochimiques, c’est l’amé- de précipités de cémentite. Or, on estime que le procédé de fabrication
lioration des structures métallurgiques des couches superficielles des lames de Damas a été perdu il y a 200 ans dans le pays d’origine. Il a
du métal de base qui est prise en considération pour parler de trai- été montré récemment [7] que l’impossibilité de reproduire les bandes
tement thermique. En revanche, l’apport superficiel à chaud d’élé- de cémentite lors des nombreux martelages entre 950 et 750 oC, était en
fait liée à un changement d’approvisionnement d’acier dû à une évolu-
ments métalliques (chromisation, aluminisation, shérardisation, tion des échanges commerciaux au début du 19e siècle.
dépôts à chaud de poudres...) est généralement analysé en termes
La provenance indienne des lingotins d’origine (les fameux « lingots
de revêtement (problèmes spécifiques, comme l’adhérence des de wootz ») a été ainsi progressivement substituée, sans que l’on mesure
phases nouvelles). les conséquences de la suppression des teneurs résiduelles en vanadium
(de l’ordre de 0,05 %) : il est maintenant prouvé que la ségrégation inter-
Le domaine des traitements des aciers à outils illustre bien le
dentritique de vanadium est indispensable à l’apparition progressive – au
caractère un peu arbitraire du découpage entre traitements ther- cours des martelages – des bandes caractéristiques de carbures aux pro-
miques et traitements de surface : les petites pièces d’outillage priétés remarquables.
(forêts, tarauds, outils de coupe, petites fraises...) sont traitées En fait, en dehors des tours de main plus ou moins heureux, les tech-
dans la masse pour une tenue globale en fatigue, cémentées ou niques de fabrication des produits ferreux n’ont guère fait de progrès
nitrurées pour la tenue en fatigue de surface, et revêtues pour une importants entre le 5e siècle – où apparurent les épées damassées par
meilleure tenue à l’usure adhésive et abrasive ; à l’opposé, pour soudure, ainsi que la cémentation et la nitruration – et le début du 18e siè-
certaines applications dans le domaine des gros outillages de mise cle marqué par les premiers travaux « scientifiques » de Réaumur sur les
traitements thermiques des aciers et des fontes.
en forme à chaud, on utilisera plutôt la projection à chaud de céra-
On ne parle maintenant de traitement thermique que lorsque le cycle
miques ou d’alliages base nickel ou cobalt pour obtenir des revê- thermique en phase solide est réalisé à des fins structurales précises. On
tements épais assurant directement une bonne résistance à la est ainsi passé très lentement de l’empirisme artisanal et magique (le feu
fatigue thermique et au matage. et la forge ont longtemps symbolisé le monde des enfers), à des opéra-
tions rationnelles et précises, de mieux en mieux intégrées dans une
De façon générale, les traitements thermiques peuvent concer- gamme de fabrication industrielle.
ner toute la pièce, et on parlera alors de traitement dans la masse, Les traitements thermiques des alliages non ferreux sont beaucoup
ou être seulement localisés comme les traitements superficiels. plus récents. Par exemple, les duralumins, alliages d’aluminium au cui-
Comme nous venons de l’entrevoir, la notion de traitements de vre et magnésium conçus en Allemagne, n’ont été étudiés qu’à partir de
1910, et compris qu’à partir de 1935, grâce en particulier aux travaux de
surface déborde celle des traitements thermiques. On a coutume Guinier. Les traitements thermiques se sont ensuite développés à grande
en effet de regrouper les traitements de surface [1] en quatre échelle industrielle parallèlement à une systématisation de leurs
grandes familles dont nous ne retiendrons que les variantes avec concepts, pour les aciers inoxydables et réfractaires, les alliages de
activation thermique : magnésium, les alliages de cuivre, les alliages de titane, et depuis une
cinquantaine d’années – sous l’impulsion des développements aéronau-
a - les traitements par transformation structurale sans matériau tiques – pour les aciers à haute résistance de type maraging et les super-
d’apport où la structure métallurgique superficielle du substrat est alliages à base nickel ou cobalt surtout utilisés dans les turbines de
modifiée par la seule thermique ; réacteurs.
Enfin, en liaison notamment avec les développements sur les
Exemple : la trempe superficielle après chauffage par induction. revêtements à chaud d’outils ou de pièces de turbines aéronautiques,
se sont multipliés des traitements de surface combinant des apports
b - les traitements par diffusion, où un matériau d’apport dif- métalliques et de nouvelles techniques de dépôt à chaud comme les
torches à plasma, les projections assistées par laser, ou les canons à
fuse thermiquement dans le substrat en réagissant ou non avec grande vitesse de projection de poudres fondues. Ces développements
lui ; montrent bien la nécessité de recentrer la notion de traitements
thermiques.
Exemple : la cémentation par le carbone des alliages ferreux.

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M 1 105 − 2 © Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques

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M1105

_____________________________________________________________________ INTRODUCTION AUX TRAITEMENTS THERMIQUES DES MÉTAUX ET ALLIAGES

c - les traitements de conversion chimique, où le matériau Certaines familles de pièces n’auront recours aux traitements
d’apport réagit superficiellement avec le substrat pour former des thermiques que pour faciliter la mise en forme, d’autres unique-
composés définis sur des épaisseurs inférieures à 10 µm ; ment pour améliorer les propriétés d’emploi des alliages utilisés,
les possibilités de mise en œuvre conjointe des deux types de
Exemple : la phosphatation antigrippante.
traitements étant généralement plus rares et réalisées chez des
d - les revêtements où le matériau d’apport s’accumule en acteurs économiques différents.
surépaisseur relativement forte sans réagir avec le substrat, et n’y Exemple : fournisseur du métal ou forgeron/fabricant de pièces ou
diffuse que peu ; traiteur à façon.
Exemple : projections par plasma chaud de barrières thermiques. Par ailleurs, les propriétés de mise en œuvre ou d’emploi opti-
males ne coïncident évidemment pas avec les plus basses ou les
On voit bien avec les deux dernières familles de traitements de
plus hautes caractéristiques mécaniques. Donnons-en rapidement
surface, qu’il ne s’agit pas de traitements thermiques proprement
quelques exemples pour illustrer la diversité des familles d’emploi
dits, même si elles sont réalisées à chaud.
final consacrées par des décennies d’expérience industrielle.
Si les trempes superficielles (avec chauffage par induction,
Tout le monde comprend que la construction d’ouvrages métalli-
faisceau laser, faisceau d’électrons...) et les principaux traitements
ques (charpentes, ponts...) est surtout concernée par des limites de
thermochimiques (cémentation, carbonitruration, nitruration...)
flèche élastique, l’aptitude au soudage, la résistance à la corrosion
sont indéniablement des traitements thermiques, tous les cycles
atmosphérique, le coût de pièces volumineuses, alors que le fabri-
thermiques faisant suite à un écrouissage du métal ne sont pas for-
cant d’engrenages pour une pompe de moteur-fusée sera surtout
cément assimilés à des traitements thermiques. Peuvent être assi-
préoccupé d’allègement, de tenue en fatigue vibratoire et de risques
milés à ces derniers ceux qui font suite à une déformation
de grippage.
plastique soit pour contrôler la structure métallographique du
métal directement dans la chaude de mise en forme (laminage, for- Dans le cas des tôles de carrosserie automobile, un aspect tech-
geage, matriçage...), soit pour restaurer ou recristalliser le métal nique important est le contrôle par recuit continu ou en four batch des
par un nouveau chauffage. On parlera en revanche de traitement textures de recristallisation, ce qui permet des emboutissages pro-
thermomécanique (exemple : le laminage contrôlé des tôles pour fonds, donc des emboutis moins nombreux, plus complexes ou pro-
tubes pétroliers) lorsque les effets du traitement (transformations pices à certains designs. Les préoccupations sont évidemment bien
allotropiques ou structurales) opèrent sur du métal non recristallisé différentes pour la recristallisation à grains orientés des tôles au Fe-Si
après écrouissage à chaud, et de traitement de recristallisation des transformateurs électriques.
lorsque le cycle thermique en question est séparé de la phase
On pourrait citer bien d’autres exemples de traitements très
d’écrouissage à froid.
spécifiques à une famille d’emploi :
On classe aussi dans les traitements thermiques les cycles ther- — les outils à coupe rapide [M 1 134], dont les traitements de
miques destinés à homogénéiser la composition chimique d’un trempe et revenus sont de plus en plus complétés par des revê-
métal coulé et plus ou moins corroyé par un premier dégrossis- tements antiusure obtenus par dépôts chimiques (CVD) ou phy-
sage en demi-produit. siques (PVD), voire avec assistance plasma (PaCVD) ;
Il serait également logique de considérer comme un traitement — les différentes familles d’aciers inoxydables, dont les trai-
thermique le recuit de recristallisation des tôles laminées à froid tements peuvent aller, suivant les conditions d’emploi, de simples
en acier extradoux, puisque ce recuit est pratiqué intentionnelle- vieillissements (nuances ferritiques ou austénitiques) à des durcis-
ment en vue d’améliorer une propriété de mise en œuvre sements structuraux par déstabilisation de structures d’équilibre
(l’emboutissabilité). On considère toutefois que les traitements (aciers de type 17-7 PH) ;
spécifiques à une famille d’emploi – fût-elle de l’importance écono- — les alliages α-β du titane pour compresseurs aéronautiques,
mique de la précédente – ne sont de véritables traitements ther- traités un peu au-dessous de la température de transus ;
miques que si leurs préoccupations s’apparentent à celles des — les superalliages à base nickel pour les parties chaudes des
« alliages spécifiques pour traitement thermique ». turbomachines, traités par hypertrempe et revenus après forge, sur
poudres, ou après solidification dirigée ;
À la limite, un cycle de soudage bien maîtrisé peut être assimilé
— les engrenages mécaniques pour véhicules qui subissent
à un traitement thermique dans la mesure où le cycle, plus ou
après taillage et rasage des dentures une cémentation ou une
moins complexe (avec pré- ou post-chauffage, par exemple),
carbonitruration plus ou moins profonde ;
conduit à des structures prévisibles et recherchées [M 1 365]. Ce
— etc.
sera par exemple bien le cas si le soudage fait partie d’une gamme
sur « acier pour traitements thermiques ». Nota : CVD Chemical Vapor Deposition
PaCVD Plasma assisted CVD
Notons enfin que certains traitements thermiques sont indispen- PVD Physical Vapor Deposition
sables à la mise en valeur d’alliages particuliers. C’est notamment
le cas des superalliages à base de nickel ou cobalt traités pour la Dans certains cas de traitements d’emploi coûteux, on peut avoir
résistance à chaud des aubages de turbines aéronautiques, ou intérêt à ne dispenser la valeur ajoutée qu’au plus près des cotes
encore d’alliages pour propriétés physiques particulières (dilato- finales, si possible au niveau des seules parties ou surfaces fonc-
métriques, électriques, magnétiques...). tionnelles indispensables de la pièce (traitements localisés ou
superficiels).
Le choix d’un traitement thermique résulte souvent d’un
compromis entre plusieurs propriétés contradictoires, l’améliora-
1.2 Intérêt technique et économique tion de l’une d’elles se traduisant par une détérioration d’autres.
Ainsi, une augmentation de dureté ou de résistance mécanique
L’intérêt technique et économique des traitements thermiques accompagne généralement une diminution de la ductilité, un
courants qui vient le premier à l’esprit, c’est de permettre une mise accroissement de la fragilité, une plus grande sensibilité à la rup-
en œuvre facile et (ou) économique de la pièce métallique, puis de ture différée, des difficultés d’usinabilité ou de soudabilité...
lui conférer les propriétés d’emploi optimales.
Les applications industrielles dépendent beaucoup de la fonc-
À titre d’exemple, une pièce mécanique en acier performant peut tion, des dimensions et des quantités de pièces à traiter. On ne
être usinée dans un état recuit à moins de 300 HV de dureté et traitée traite évidemment pas de la même manière de grandes séries de
pour l’emploi à 600 HV, soit 2 000 MPa de résistance. pièces d’horlogerie et un gros rotor de turboalternateur.

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M1105

INTRODUCTION AUX TRAITEMENTS THERMIQUES DES MÉTAUX ET ALLIAGES _____________________________________________________________________

Du point de vue marché industriel, il convient de distinguer les sible des conditions d’emploi prévues. Un premier tri technico-
traitements à façon sur pièces à faible nombre d’exemplaires et les économique rejette en général assez vite les alliages réalisant des
traitements intégrés, où l’opération fait partie d’une gamme compromis trop larges : inutile d’envisager un acier très allié et
complète de fabrication en série d’une pièce plus ou moins très pur (refondu sous vide, par exemple), traité à un haut niveau
compliquée. de limite d’élasticité, pour réaliser une poutre en construction sou-
Les traitements à façon sont réalisés chez un « spécialiste » des dée... L’expérience se charge d’attacher à chaque famille d’alliages
traitements, qui optimise la qualité – souvent sans pièce d’essai – des conditions d’emploi et des possibilités de valorisation, que
au prix d’une valeur ajoutée convenue avec le donneur d’ordre. peut d’ailleurs faire évoluer le contexte technico-économique au
gré de nouvelles exigences d’emploi.
Les traitements intégrés, réalisés en série après mise au point
d’échantillons initiaux, répondent surtout à des impératifs éco- Plus généralement, on peut décomposer toute pièce en un cer-
nomiques et aux soucis d’insertion dans une gamme avec flux tain nombre de surfaces fonctionnelles, chacune de celles-ci
tendu de production. Ce type de traitement concerne les devant faire face à des sollicitations mécaniques déterminées, dans
constructions mécaniques et automobiles. Les traitements sur un environnement donné. L’idéal serait de pouvoir mettre en face
bruts réalisés chez le forgeron, soit dans la chaude de forge, soit de chaque surface fonctionnelle un cahier des charges avec des
en four séparé, pour favoriser l’aptitude à la mise en œuvre chez besoins en propriétés quantifiables.
le client final, s’apparentent aussi à cette famille. On aboutit finalement, pour chaque famille d’alliages, à des
L’enjeu économique des traitements thermiques reflète les domaines d’emploi dont on peut synthétiser les performances par
tonnages mis en œuvre pour chaque famille de métaux et alliages, des caractéristiques mesurables et reconnues de tous. De ces der-
mais aussi la complexité des cycles à réaliser et la taille des séries nières, on peut dresser la liste non exhaustive suivante attachée
concernées. aux grandes familles d’emploi.
En 2000, les consommations mondiales respectives d’acier, — Comportement élastique : module d’Young et de Poisson,
d’aluminium, de cuivre, de magnésium et de titane, étaient de limite d’élasticité rapportée à la masse volumique... Sont concernées
l’ordre de 750, 24, 9, 5, et 0,2 million de tonnes, mais seule une toutes les pièces qui ne sont pas soumises à des sollicitations
faible proportion de ces consommations passe par des traitements répétées significatives et qui doivent seulement travailler en statique
thermiques à valeur ajoutée identifiée. bien au-dessous de la limite d’élasticité. Quand elles sont en acier,
ces pièces font rarement l’objet d’un traitement thermique.
Par exemple, les aciers de construction métallique, comme les tôles — Risques de rupture en statique : résistance, ductilité. Ces
et poutrelles, correspondent à de fortes consommations non traitées, pièces peuvent être exceptionnellement sollicitées jusqu’au niveau
alors que les aciers de construction mécanique traités à de hauts de l’allongement réparti, avant l’apparition de l’instabilité de stric-
niveaux de caractéristiques mécaniques, ou encore les aciers à outils, tion.
représentent des consommations mondiales limitées à des productions
— Risques de rupture en dynamique : résiliences diverses, téna-
« pointues » des pays développés.
cité (K1C).
En France, le marché des traitements thermiques industriels est — Risques de rupture en sollicitations cycliques : limite d’endu-
schématiquement ainsi réparti : 25 % pour l’automobile (90 % de rance en fatigue dans différents milieux, comportement en fatigue
traitements intégrés et 10 % de traitements à façon), 25 % pour la oligocyclique. Rappelons que le comportement d’un alliage en char-
mécanique, 25 % pour l’outillage, 10 % pour l’aéronautique. gement oligocyclique (typiquement, à des niveaux voisins de la
limite d’élasticité, pour un nombre de cycles de sollicitation inférieur
Seulement 5 % des aciers consommés font l’objet de traitements
à 10 4 ), n’est pas celui en endurance (typiquement, plus de
thermiques, mais il s’agit de nuances alliées (aciers à outils, par
106 cycles). La limitation de tenue en fatigue est évidemment déter-
exemple) à beaucoup plus grande valeur ajoutée que celles entrant
minante pour toutes les applications mécaniques, notamment pour
dans les productions de masse (tôles automobiles, produits longs
« les aciers de traitement thermique » et les aciers à outils.
pour construction métallique).
— Comportement à l’usure adhésive ou abrasive : duretés, adhé-
À titre d’exemple, pour un outil en acier rapide à 10 €/kg, les trai- rence de revêtements divers.
tements de trempe + triple revenu peuvent exiger un four sous vide, — Comportement au matage et à la fatigue de surface : sensi-
de hautes températures d’austénitisation (1 230 oC), des précautions bilité à l’écaillage.
spéciales à la trempe au gaz (tapures, distorsions) et de grandes pré-
cisions dans les cycles thermiques, si bien que des traitements de ce — Comportement à mi-chaud des aciers à outils : indices de
type en petites séries reviennent à plus de 5 €/kg. À l’opposé, pour vieillissement, d’adoucissement en service, de tenue aux chocs
une tôle de carrosserie à 0,5 €/kg, le recuit continu de recristallisation thermiques.
après laminage à froid est un traitement à moins de 0,07 €/kg car — Comportement au fluage d’alliages conçus pour travailler
réalisé en bande continue défilant à plus de 2 m/s. dans certaines plages de températures (les aciers pour turbines à
vapeur à moins de 600 oC, ou à plus de 1 000 oC, les superalliages
pour turbines aéronautiques) : résistances conventionnelles à durée
de vie ou déformation permanente imposée pour une température
d’emploi déterminée.
2. Propriétés d’emploi — Comportement à froid : résiliences, températures de transition
et relations ductile - fragile.
— Comportement en conditions cryogéniques : températures de
structures-propriétés transition de résilience des récipients métalliques inférieures aux
températures des gaz liquéfiés transportés.
— Aptitude à tel ou tel type d’assemblage (soudages avec ou
2.1 Principales propriétés d’emploi sans refusion, brasages...).
des alliages métalliques — Résistance à l’environnement et aux différents types de
corrosion : indices de corrosion généralisée, intergranulaire, par
Les domaines d’emploi des métaux et alliages peuvent varier piqûres, dans un milieu particulier...
dans une très large mesure, et le choix du matériau et de son trai- — Comportement à l’irradiation : valeurs de gonflement, indices
tement passe d’abord par un cahier des charges le plus précis pos- d’endommagement.

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Panorama métallurgique
des traitements thermiques

par Yves DESALOS


Ingénieur civil des Mines, Docteur ès sciences
Expert Métallurgie – Traitements RENAULT SA

1. Différents types de traitements envisageables............................... M 1 110 - 2


2. Principes métallurgiques ....................................................................... — 3
3. Exemples de traitements sur les principales familles d’alliages — 4
3.1 Aciers et fontes ............................................................................................ — 4
3.2 Alliages d’aluminium .................................................................................. — 5
3.3 Alliages de cuivre ........................................................................................ — 6
3.4 Alliages de titane ......................................................................................... — 7
3.5 Superalliages utilisés dans les parties chaudes des turboréacteurs....... — 9
4. Conclusion ................................................................................................. — 9
Références bibliographiques ......................................................................... — 10

’article introductif [M 1 105] a montré que, pour fabriquer une pièce détermi-
L née, les performances du matériau utilisé sont évidemment un premier élé-
ment de dimensionnement, mais que le coût de la gamme d’élaboration, qui
dépend notamment d’un dessin judicieux des parties fonctionnelles, de leur faci-
lité de mise en forme et de leurs modes de liaison est souvent un élément décisif
de choix industriel.
Les traitements thermiques interviennent dans cette problématique du choix des
matériaux soit en élargissant les possibilités de mise en forme de la pièce, soit en
améliorant les propriétés d’emploi du matériau, pendant ou après la mise en forme.
Au plan métallurgique, les traitements thermiques des alliages métalliques
reposent sur des évolutions structurales en phase solide qui ont été souvent
étudiées en premier sur les aciers spéciaux susceptibles de présenter des trans-
formations allotropiques. Toutes les familles d’aciers ne sont évidemment pas
traitées en faisant intervenir le passage par une transformation allotropique soit
que la composition retenue ne le permette du point de vue thermodynamique,
soit que la métallurgie du traitement visé n’en ait cure. Les objectifs assignés aux
traitements des aciers peuvent concerner en effet des secteurs aussi variés que
l’homogénéisation compositionnelle à chaud, une recristallisation après écrouis-
sage à faibles températures, un adoucissement par transformation allotropique
lente au refroidissement ou par revenu, un durcissement par trempe et revenu,
un durcissement « structural », un durcissement superficiel par enrichissement
en éléments interstitiels...
Pour la plupart des familles d’alliages, comme ceux de l’aluminium, on ne peut
pas profiter de transformations allotropiques et les possibilités de durcissement
se limitent à l’écrouissage ou au durcissement structural.
Par ailleurs, pour tirer le meilleur parti de tenues en service particulières, les
traitements thermiques peuvent être relativement sophistiqués : c’est le cas des
Parution : mars 2004

superalliages à base nickel, dont la tenue à chaud (plus de 1 000 ˚C) repose sur la

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M1110

PANORAMA MÉTALLURGIQUE DES TRAITEMENTS THERMIQUES ________________________________________________________________________________

maîtrise simultanée d’un durcissement par solution solide de la matrice, d’une


morphologie de précipitation optimale séquentielle de plusieurs phases judi-
cieuses et d’un contrôle des joints de grains.
Dans des cas plus rares, on peut utiliser les possibilités d’un durcissement par
décomposition spinodale pour obtenir des caractéristiques relativement intéres-
santes (ex. : alliage Cu-15 Ni-8 Sn), ou encore mettre à profit les effets de mémoire
de forme au passage d’une phase à l’autre (ex. : laiton à 20 % Zn et 5 % Al).
Dans tous les cas, on sait associer – au moins de manière semi-quantitative –
à chaque type de structure métallurgique après traitement, un ensemble de pro-
priétés caractérisant soit la mise en forme, soit l’état d’emploi final.
Nous allons dans cet article résumer les aspects métallurgiques principaux des
traitements thermiques abordés dans l’article d’introduction [M 1 105], sachant
que les bases métallurgiques présidant à la mise au point de ceux-ci sera plus
détaillée dans l’article suivant [M 1 111]. Autrement dit, dans les rappels sur les
bases métallurgiques des traitements thermiques des alliages métalliques, le
présent article résumera les structures visées par traitement et famille d’alliages,
tandis que le suivant reprendra les notions thermodynamiques et cinétiques
indispensables à la compréhension des évolutions structurales correspondantes.

1. Différents types de Durcissement structural. Ce traitement final comporte la mise en


solution d’un élément d’alliage maintenu en sursaturation par un
traitements envisageables refroidissement rapide, et la précipitation au revenu de particules
formées à partir de cet élément par désaturation de la solution
solide de départ. Ce durcissement dans la masse concerne aussi des
En mettant un peu à part les traitements thermomécaniques réa- alliages qui ne présentent pas de transformation allotropique.
lisés dans la chaude de mise en forme (laminage, forgeage,
matriçage) avec hérédité de l’écrouissage, on peut distinguer, sui- Traitements thermochimiques. Ils sont caractérisés par un durcis-
vant leurs finalités métallurgiques, plusieurs familles de traitements sement superficiel lié à un enrichissement en éléments interstitiels
purement thermiques [M 1 105] réf. [13]. (carbone, azote) à partir d’une réaction interfaciale en atmosphère
Traitements ou recuits d’homogénéisation. Pratiqués aux plus gazeuse ou bain de sel accompagnée de diffusion. Il s’agit d’une
hautes températures du domaine solide, ces traitements visent sur- vaste famille de traitements (cémentation, carbonitruration, nitrura-
tout à réduire par diffusion les gradients de composition résultant tion gazeuse ou ionique, nitrocarburation, oxy-nitrocarburation...)
de la solidification. Le rapprochement des espaces interdentritiques sur aciers spéciaux, comportant le plus souvent un enrichissement
par des corroyages à chaud accélère l’homogénéisation chimique. sur quelques dixièmes de millimètres en carbone, azote, ou
Restauration-recristallisation du métal écroui en cours de mise en carbone + azote. Cet enrichissement superficiel peut être suivi d’une
forme à l’ambiante. Ces traitements, à relativement basse tempéra- trempe dans la masse (cémentation ou carbonitruration vers 900 ˚C)
ture par rapport aux recuits d’homogénéisation, ont pour objectif de ou d’un simple refroidissement naturel (nitruration, nitrocarbura-
restaurer la ductilité du métal soit en vue de poursuivre la mise en tion vers 550 ˚C). Ces traitements, pratiqués en très grosses séries
forme par écrouissage, soit en vue de propriétés d’emploi. dans les ateliers intégrés de la construction mécanique ou automo-
Traitements d’adoucissement par transformation allotropique de bile, sont surtout destinés à améliorer les tenues, à l’usure, à la fati-
recuit ou normalisation, ou encore par revenu sans transformation gue en flexion localisée, ou en fatigue de surface, de toute une série
allotropique. Ces adoucissements sont envisagés généralement de pièces mécaniques en aciers très sollicitées (roulements,
pour faciliter des opérations d’usinage, permettre une mise en pignons, portées...).
forme à froid difficile, ou encore reprendre une structure perturbée
par un passage à haute température ou par une opération de sou- Parmi les traitements affectant simultanément toute la masse du
dage. produit, on doit distinguer ceux pratiqués sur ébauche, qui sont
Durcissements par trempe et revenu. La trempe après chauffage généralement destinés à faciliter la mise en œuvre intermédiaire
en phase stable à relativement haute température conduit, sur (mise en forme, usinage...) et ceux pratiqués sur pièce finie en vue
certains alliages comme les « aciers de traitement thermique » de l’obtention des propriétés d’emploi final. Dans ce dernier cas, les
[M 1 115] réf. [14] ou les fontes [M 1 145] réf. [28], à des structures évolutions structurales superficielles peuvent être perturbées par
métastables de type martensite, tandis que le revenu conduit à un
des nitrurations ou des revêtements à chaud complémentaires, fré-
dosage intéressant de caractéristiques mécaniques par
détensionnement, précipitations et retour progressif à des structu- quents notamment pour toutes sortes d’outils [M 1 134] réf. [16].
res d’équilibre. Ces traitements peuvent concerner la masse de la
pièce ou être volontairement localisés à une partie fonctionnelle de Enfin, un certain nombre d’opérations centrées sur un cycle ther-
la pièce. C’est le cas de la trempe superficielle après réchauffage par mique particulier, comme un soudage ou une refusion localisée,
induction, ou par toute autre source thermique à forte densité de peuvent aussi être rangées dans la famille des traitements thermi-
puissance (faisceau laser, faisceau d’électrons, torche plasma). ques ou bénéficier de traitements associés [M 1 365] réf. [27].

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Bases métallurgiques
des traitements thermiques

par Yves DESALOS


Ingénieur civil des Mines, Docteur ès sciences
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1. Thermodynamique et cinétique des évolutions


de phases à l’état solide ........................................................................ M 1 111 – 2
1.1 Énergie libre des solutions, diagrammes de phase et activités .............. — 2
1.2 Produits de solubilité et mises en solution en début de traitement........ — 4
1.3 Changements de phase en cours de traitement ....................................... — 5
1.4 Limitations diffusionnelles et diagrammes de transformation ............... — 6
1.5 Processus de précipitation.......................................................................... — 7
2. Durcissement des alliages et relations générales structure -
propriétés ................................................................................................... — 10
2.1 Durcissement par transformation allotropique dans la masse ou en
surface .......................................................................................................... — 10
2.2 Exemples de durcissement structural........................................................ — 10
2.2.1 Durcissement par précipitation d’un élément pur à forte variation
de solubilité......................................................................................... — 10
2.2.2 Durcissement par composés intermétalliques................................. — 11
2.2.3 Durcissement par composés interstitiels ......................................... — 12
2.3 Relations structure - propriétés après durcissement par précipitation... — 13
2.4 Exemple de relations structures-propriétés plus complexes................... — 15
3. Prévision et contrôle des états structuraux par traitement
thermique ................................................................................................... — 16
3.1 Utilisation des diagrammes de prédiction ................................................ — 16
3.2 Équivalences temps - température ............................................................ — 17
3.3 Dispersions et ségrégations ....................................................................... — 17
4. Conclusion ................................................................................................. — 18
Références bibliographiques ......................................................................... — 18

es articles introductifs [M 1 105] et [M 1 110] ont montré que l’on sait asso-
L cier à chaque type de structure métallurgique après traitement un ensemble
de caractéristiques plus ou moins favorables soit à la mise en forme, soit aux
propriétés d’emploi final.
Les exemples de traitements thermiques, tirés notamment des grandes
familles d’alliages les plus utilisées et résumés dans l’article [M 1 110], suffisent
à nous convaincre de la très large variété de structures et de propriétés d’emploi
qu’ils permettent avec des cycles thermiques relativement simples (quelques
heures, à quelques centaines de degrés Celsius, dans des atmosphères neutres
ou réductrices assez faciles à industrialiser).
S’agissant de transformations à l’état solide sensibles aux faibles additions
(faibles fractions volumiques précipitées, relations cristallographiques très loca-
les, rôle important des ségrégations aux joints de grains...), on perçoit bien la
nécessité de disposer de données thermodynamiques, pour prévoir les phases
Parution : mars 2004

possibles à l’équilibre, et de données cinétiques pour suivre lors de cycles

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M1111

BASES MÉTALLURGIQUES DES TRAITEMENTS THERMIQUES ___________________________________________________________________________________

raisonnables les degrés d’avancement des différentes diffusions pour les élé-
ments critiques de la composition nominale de l’alliage.
Au plan thermodynamique, un certain nombre de notions semble plus
particulièrement importantes à approfondir : l’activité et le potentiel chimique,
les diagrammes de phases et les données cristallographiques correspondantes,
les produits de solubilités des précipités essentiels...
Au plan cinétique, il faut évidemment disposer de données diffusionnelles
pour les phases concernées par le système étudié, de vitesses de coalescence ou
de redissolution des précipités au profit de nouvelles phases, de diagrammes
schématisant les cinétiques de transformation allotropique ou de précipitation...
Ces bases métallurgiques existent évidemment dans tous les ouvrages de
métallurgie générale, mais seront plus précisément recentrées dans cet article
autour des traitements envisagés.
Parallèlement au choix pratique des conditions de traitement se pose aussi la
question de la dispersion des résultats attendus, dispersion liée autant aux dis-
persions opératoires qu’aux inévitables ségrégations de l’alliage.

1. Thermodynamique T (°C)
et cinétique des évolutions 1 100
T1

de phases à l’état solide


1 000 T2
Liquide
900 Phase
Lorsque l’on envisage un traitement sur un alliage, on commence β (S)
toujours par recenser les différentes phases possibles pour des Phase
800 α (S) XE
T3
conditions d’équilibre thermodynamique dans les différentes pla- X tα XE
α
ges thermiques accessibles.
700 T4
X 4α X 4β
Ces équilibres, présentés notamment en [M 70], réf. [17], sont
illustrés sous forme de diagrammes de phases (figure 1 a). Les 600
domaines de stabilité figurés sur ces diagrammes sont générale-
ment suffisants pour entrevoir les possibilités d’un traitement 500
donné (par exemple, un durcissement structural), ou guider des
évolutions compositionnelles. Le diagramme des phases d’un 400
alliage est bien le point de départ et le garde-fou des traitements
thermiques. 300
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1
En pratique, beaucoup d’alliages sont utilisés loin de leur état
Titre molaire X en Cu
d’équilibre (cf. martensites des aciers) et on peut faire apparaître par
traitements thermiques des phases non prévues dans le diagramme
et pourtant assez stables pour subsister longtemps à température Figure 1 – Diagramme d’équilibre Ag-Cu
ordinaire (cf. phases métastables du durcissement structural des allia-
ges d’aluminium). Par ailleurs, le diagramme d’équilibre ne renseigne
pas sur la morphologie des phases dans l’alliage (lamelles, globules, 1.1 Énergie libre des solutions,
précipités en épitaxie...) et on sait que les propriétés d’emploi sont diagrammes de phase et activités
étroitement liées à la distribution microstructurale des phases.

Compte tenu de la relative lenteur des phénomènes de diffusion L’étude thermodynamique des solutions ne fait aucune distinction
en phase solide, on s’interroge ensuite sur les aspects cinétiques entre l’état solide et l’état liquide et s’intéresse à la stabilité de leurs
des transformations et précipitations pour apprécier leurs consé- phases constitutives à travers l’évolution de l’enthalpie libre par
quences lors de cycles industriels. Ces considérations conduisent à mole de solution :
la recherche de diagrammes de transformations schématisant l’évo- G = U + PV − TS
lution de celles-ci pour des cycles thermiques voisins de ceux à par-
avec U énergie interne,
tir desquels ils ont été établis.
P pression,
Il est finalement difficile d’échapper à certains rappels de considé- V volume,
rations thermodynamiques qui constituent la base de compré-
hension des évolutions structurales largement développée dans la T température,
plupart des ouvrages de métallurgie physique [2] [3] [10]. S entropie.

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___________________________________________________________________________________ BASES MÉTALLURGIQUES DES TRAITEMENTS THERMIQUES

G G
T1 T2

( G α) (G β) (G α) ( G β)

(G liquide)
(G liquide)

0 1 XCu 0 1 XCu

G G
T3 (G β) (G α) T4 ( G β)

(G α) (G liquide)

(G liquide)

0 1 XCu 0 1 XCu Figure 2 – Évolution des enthalpies libres


XE
α XE XE
β X 4α X 4β
des différentes phases du diagramme Ag-Cu
de la figure 1 à quatre températures différentes

Cette enthalpie libre de Gibbs, dont la caractéristique pour un sys- De façon générale, l’enthalpie libre molaire de la solution
tème fermé - isotherme - isobare est de présenter un minimum à solide AB peut être exprimée en fonction des enthalpies molaires
l’équilibre, est en fait de la forme des corps purs A et B et des activités ai, ou coefficients d’activité γi
de l’élément i engagé dans une phase donnée de la solution.
G = ∑ ni µi On a ainsi pour la phase α de la solution solide AB :
i
G α ( X A ) = G A0 + G B0 + RT [ X A ln a A + ( 1 – X A ) ln a B ]
avec ni et µi nombre de moles et potentiel chimique de
l’élément constitutif i du système fermé = G A0 + G B0 + RT [ X A ln γ A X A + ( 1 – X A ) ln γ B ( 1 – X A ) ]
considéré.
Il n’existe pas de relation thermodynamique pour le calcul des
G est la fonction potentiel de la part chimique de l’énergie, tandis activités dans les solutions ternaires à partir des données des solu-
que TS est la part chaleur, et − PV la part énergie mécanique. tions binaires. Dans le cas particulier d’une solution ternaire
L’équilibre isotherme-isobare entre deux phases α et β du système régulière, l’enthalpie libre molaire peut être décrite par l’équation
s’exprime par l’égalité des potentiels chimiques de chaque consti- suivante :
tuant dans les 2 phases :
G = X 1 G 10 + X 2 G 20 + X 3 G 30 + RT ( X 1 ln X 1 + X 2 ln X 2 + X 3 ln X 3 )
µ 1α = µ 1β , µ 2α = µ 2β ... etc. + Ω 12 X 1 X 2 + Ω 23 X 2 X 3 + Ω 31 X 3 X 1

Si nous examinons le cas simple d’un système binaire, tel le sys- avec G 10 , G 20 , G 30 enthalpies libres des composants purs,
tème Ag-Cu dont nous avons présenté le diagramme d’équilibre à la X1 + X2 + X3 = 1 fractions atomiques ou titres
figure 2 a, la règle des phases de Gibbs pour la variance : molaires des composants de la
v=c+2−ϕ solution,
Ωij paramètre qui caractérise l’interaction
avec c nombre de constituants, des éléments i et j dans la solution.
ϕ nombre de phases De façon plus générale, l’enthalpie libre molaire d’une phase α
montre que, à température et pression constante, la variance d’une dans une solution solide à plusieurs constituants en titres molaires
phase α se réduit à 1, c’est-à-dire que toute propriété de α, comme ∑
Xi avec X i = 1 peut se mettre sous la forme :
son énergie libre, est fonction d’une seule variable, par exemple le
titre molaire en cuivre.
La figure 2 b représente, précisément en fonction du titre molaire
Gα = ∑ X i [ µ i0 + RT ( ln a i ) ] = ∑ X i [ µ i0 + RT ( ln γ i X i ) ]
i i
en cuivre, l’évolution réelle, à quatre températures différentes, des
enthalpies libres des différentes phases du système Ag-Cu. avec µ i0 potentiel chimique de l’élément i dans un état
standard déterminé, arbitrairement défini
On imagine le travail pour reconstituer le diagramme d’un sys-
comme ayant une activité égale à l’unité.
tème (même aussi simple...) à partir de mesures thermodyna-
miques (pressions de vapeur à haute température, forces Pour tenir compte des effets croisés des éléments, on fait interve-
électromotrices de piles, recoupements d’équilibres avec une phase nir les coefficients d’interaction :
gazeuse appropriée...) permettant de remonter aux enthalpies libres
partielles molaires. ε ij = ∂( ln γ i ) ⁄ ∂X j quand Xi et Xj → 0.

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BASES MÉTALLURGIQUES DES TRAITEMENTS THERMIQUES ___________________________________________________________________________________

Cela revient à adopter pour le logarithme népérien de l’activité de Les bases de données thermodynamiques et les calculs des dia-
chaque élément i, un développement limité autour de sa teneur qui grammes de phases multiconstitués se sont effectivement large-
linéarise les effets des teneurs en autres éléments : ment développés depuis les années 1980, sous l’impulsion
notamment du professeur Mats HILLERT (Institut Royal de Technolo-
gie de Stockholm) qui est à l’origine du logiciel de calcul et d’optimi-
ln a i = ln X i + ∑ ε ij X j sation le plus utilisé : « THERMO-CALC ». Des groupes de
j coopération mondiale – tel SGTE (Scientific Group Thermodata
Europe) et son réseau THERMODATA – contribuent encore à établir
L’existence de ces interactions n’est pas surprenante puisque les des banques de données thermodynamiques accessibles à tous les
coefficients d’activité changent avec la concentration, même pour utilisateurs potentiels.
un seul soluté. Tout changement dans la composition du milieu peut Ces données d’équilibre sont maintenant susceptibles d’être
influer sur les forces intermoléculaires, si bien que l’activité d’un complétées par des logiciels tels DICTRA, interfacés avec THERMO-
élément est fonction de toutes les concentrations de toutes les sub- CALC, rendant compte de différents aspects cinétiques (calculs dif-
stances présentes. Dès lors, les coefficients d’activité s’éloignent de fusionnels, produits de solubilité, conditions limite de précipita-
la valeur unité s’il existe des interactions thermodynamiques fortes tion...), indispensables pour analyser des processus lents mais pas
entre les constituants : attraction ou répulsion chimique, facteurs à l’équilibre.
d’ordre cristallographique, enthalpies de mélange... On peut illus-
trer cette notion importante par quelques exemples.
Premier exemple en phase liquide : la présence de 2 % en masse
de carbone dans le fer liquide vers 1 600 ˚C double l’activité du silicium
1.2 Produits de solubilité et mises
présent dans le même bain. Une recarburation volontaire de l’acier en solution en début de traitement
électrique en cours d’élaboration accélère la désoxydation et la
désiliciation du métal (décantation de SiO2).
Au cours de la vie thermomécanique d’un alliage depuis son éla-
Autres exemples concernant la carbonitruration d’un acier vers boration, un certain nombre d’éléments constitutifs peuvent avoir
900 ˚C précipité ou coprécipité, s’excluant ainsi de la composition de la
Le potentiel carbone d’une atmosphère cémentante à une tempéra- solution solide. La connaissance des produits de solubilité des prin-
ture T est égal à la teneur en carbone Cs que prend, à l’équilibre, un cipaux précipités dans les différentes phases des alliages usuels est
feuillard mince en fer qui y est immergé. L’activité du carbone en solu- un outil de choix pour prévoir les conditions de mise en solution
tion dans l’austénite de ce feuillard est alors directement reliée au préalables à tout traitement thermique.
potentiel carbone suivant l’état de référence adopté pour le coefficient
Pour illustrer cette notion, on peut se contenter du cas simple de
d’activité. En schématisant les réactions de cémentation par l’équilibre
remise en solution austénitique des carbures de type MC dans un
global :
acier. Le seuil de remise en solution/précipitation correspond à la
2 CO ↔ CO2 + Cs, réaction d’équilibre :

on peut relier Cs à la constante d’équilibre K(T) de la réaction précé- → MC,


M+C←
dente et aux pressions partielles pCO et p CO2 en CO et CO2 de
caractérisée par une enthalpie libre standard de réaction ∆G0 tel
l’atmosphère mesurables par analyseur infrarouge. que, à l’équilibre à la température T :

La relation a C = K ( p CO ) 2 ⁄ ( p CO2 ) permet de prévoir l’activité du ∆G0 = − RT ln K(T)


carbone en solution austénitique d’un alliage ferreux quelconque, donc Dans cette expression, le produit de solubilité K est proportionnel
sa teneur, à partir du potentiel carbone de l’atmosphère (déterminé par au produit des activités de M et de C dissous dans l’austénite, donc
exemple par les teneurs en CO et CO2 de l’atmosphère), pourvu que – en première approximation – au produit de leurs concentrations
l’on connaisse K(T) et les coefficients croisés d’interaction des élé- en solution. En toute rigueur, on peut évaluer, à chaque température
ments de l’alliage sur l’activité du carbone [16]. T du domaine austénitique, les activités du métal M et du carbone C
dissous à partir de la composition massique de la solution solide,
À même potentiel carbone de l’atmosphère cémentante et à même
compte tenu des relations :
température, la cinétique d’enrichissement en carbone d’un acier déter-
miné est plus rapide en présence d’azote en solution dans l’austénite.
On peut montrer par ailleurs que le coefficient de diffusion du carbone ln a i = ln ( %i ) + ∑ e ij ( %j )
j
n’est pas modifié par l’addition d’azote. Par contre, on peut justifier les
interactions C  N en phase austénitique lors des carbonitrurations des et de la connaissance des coefficients croisés d’interaction eij des
aciers par un fort coefficient d’interaction positif, donc une interaction éléments j sur l’activité thermodynamique de l’élément i.
répulsive : en surface d’une pièce carbonitrurée, l’activité du carbone
augmente à isoteneur en présence de l’azote, ce qui a surtout pour effet En première approximation, l’évolution avec la température du
de renforcer le gradient d’activité moteur de la diffusion du carbone et produit de solubilité est de la forme :
accessoirement de limiter sa solubilité limite dans l’austénite. lg(%M)s(%C)s = A − B/T
Dernier exemple : aux températures classiques (vers 500 ˚C) de la avec (%M)s et (%C)s teneurs massiques en solution solide
fragilité réversible de revenu de la martensite des aciers alliés, l’évolution dans l’austénite,
des concentrations des différents éléments fragilisants ségrégant aux
joints de grains (P, Sb, As, Sn) est pilotée par celle des activités de tous A et B constantes déduites de la décomposition
les éléments participant à la composition de l’acier considéré [6] [11]. de l’enthalpie libre en ses composantes
enthalpique et entropique, mais plus
fréquemment déduites d’essais directs de
En conclusion, dans les solutions solides, l’activité de chaque élé-
mise en solution et dosage des fractions
ment est le terme qui se substitue à sa teneur pour toutes les lois fai-
précipitées.
sant intervenir les potentiels chimiques : constantes d’équilibre des
réactions, lois d’action de masse, potentiels de diffusion... Les On trouvera, à titre d’exemple, une représentation graphique de ces
calculs et maniements de ces activités nécessitent l’emploi de bases relations de solubilité sur la figure 3 d’après ARONSSON [12] pour
de données fastidieuses dont l’informatisation s’imposait. quelques carbures et nitrures dans l’austénite d’aciers pas trop alliés.

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M1115

Transformations dans les aciers

par Guy MURRY


Ingénieur de l’École Nationale Supérieure d’Électrochimie et d’Électrométallurgie
de Grenoble, Docteur-Ingénieur
Ingénieur-Conseil Métallurgie et Aciers
Ancien directeur de l’OTUA

1. Généralités.................................................................................................. M 1 115 - 2
1.1 Transformations allotropiques du fer ......................................................... — 2
1.2 Durcissement du fer ..................................................................................... — 2
1.3 Diagramme fer-carbone ............................................................................... — 3
1.4 Éléments d’alliage dans les aciers .............................................................. — 5
2. Transformations g → a ............................................................................ — 8
2.1 Transformations g → a dans les conditions d’équilibre ........................... — 8
2.1.1 Cas des alliages Fe-C........................................................................... — 8
2.1.2 Cas des alliages Fe-C-X....................................................................... — 9
2.2 Transformations g → a hors équilibre........................................................ — 10
2.2.1 Généralités ........................................................................................... — 10
2.2.2 Transformations g → a hors équilibre et en conditions
isothermes — 10
2.2.3 Transformations g → a hors équilibre
en refroidissement continu................................................................. — 23
3. Transformations au chauffage ............................................................. — 33
3.1 Revenu des structures hors équilibre ......................................................... — 33
3.1.1 Description qualitative des phénomènes se produisant
au cours du revenu.............................................................................. — 33
3.1.2 Descriptions quantitatives des évolutions des propriétés
mécaniques au cours du revenu ........................................................ — 36
3.1.3 Phénomènes provoquant des fragilisations sensibles après
revenu — 39
3.2 Transformations a → g : austénisation ...................................................... — 41
3.2.1 Transformations a → g en conditions d’équilibre ........................... — 41
3.2.2 Transformations a → g hors équilibre............................................... — 42
3.2.3 État austénitique.................................................................................. — 45
4. Deux notions importantes : trempabilité et capacité
de durcissement de l’acier ..................................................................... — 45
4.1 Méthode de Grossmann .............................................................................. — 46
4.2 Modifications apportées à la méthode de Grossmann ............................. — 46
4.3 Méthodes de calcul des courbes Jominy ................................................... — 46
700
4.4 Méthodes de calcul des courbes HV = f (∆t 300 ) ....................................... — 48
4.5 Remarque sur la validité des différentes formules.................................... — 49
4.6 Conclusions................................................................................................... — 49
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. M 1 115

omme il a été indiqué dans l’article des Techniques de l’Ingénieur Aciers.


C Généralités [62], le principal facteur de durcissement du fer est, en pratique,
la précipitation de carbures (ce qui implique l’addition de carbone au fer et
donc la fabrication d’acier), carbures qui peuvent être des carbures :
Parution : septembre 1998

— de fer, ce qui est le cas des aciers non alliés ;


— d’éléments d’alliage carburigènes introduits dans le fer, cas qui correspon-
dent à certains aciers alliés.

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Ces notions conduisent à la nécessité de « conditionner » correctement la pré-


cipitation des carbures, c’est-à-dire de provoquer leur formation au sein des
grains de fer en leur donnant une taille la plus proche de la taille optimale [63].
D’un point de vue général, ce résultat est obtenu, pour nombre de métaux, par
des opérations de traitement thermique qui provoquent des transformations
structurales que l’on peut schématiser comme suit :
— la mise en solution des précipités par chauffage à une température suffi-
samment élevée (fonction de la composition de l’alliage et des conditions
d’équilibre) ; en effet, ces précipités sont généralement trop grossiers à l’état
brut de solidification ;
— le refroidissement rapide pour empêcher la précipitation et maintenir donc
l’alliage à l’état sursaturé à la température ambiante (cela pour éviter les hétéro-
généités qu’apporterait le fait qu’un refroidissement, quel qu’il soit, n’est pas
uniforme dans toute la section d’un morceau de métal ; les conditions de germi-
nation et de croissance des précipités sont alors différentes d’un point à un
autre) ;
— le réchauffage contrôlé pour provoquer la précipitation optimale.
Il est donc indispensable de connaître, dans ces conditions, le comportement
d’un alliage durcissable par précipitation et donc d’étudier ses transformations.

1. Généralités Tableau 1 – Variations relatives du volume spécifique du fer


pur au chauffage à partir de 20 oC [64]
Dans le cas des aciers les transformations structurales décrites Fer α Fer γ
plus avant interfèrent avec les transformations allotropiques du fer,
c’est-à-dire avec ses changements de système cristallin. Température ∆V/V0 Température ∆V/V0
(°C) (%) (°C) (%)
300 + 1,185 912 γ + 3,088
1.1 Transformations allotropiques du fer
400 + 1,595 1 000 + 3,782
Entre – 273 oC et 912 oC d’une part et d’autre part de 1 394 oC à 500 + 2,035 1 100 + 4,533
1 538 oC, la structure cristalline du fer pur est cubique centrée (CC) 600 + 2,518 1 200 + 5,255
(cette structure n’est pas compacte) ; dans cet état, les atomes de fer
occupent les sommets et le centre d’un cube dont l’arête, à 20 oC, 700 + 3,045 1 300 + 6,030
mesure 0,2866 nm (0,286 nm à – 273 oC, 0,2903 nm à 912 oC, 800 + 3,545 1 394 γ + 6,731
0,293 nm à 1 394 oC).
900 + 4,075 1 394 δ + 7,377
Entre –273 oC et 912 oC, la forme cristalline du fer est dite
« fer a », par contre entre 1 394 oC et 1 538 o C, elle est dite « fer d » 912 α + 4,154 1 500 + 8,135
bien qu’elles soient toutes deux identiques. α → γ : ∆V/V0 = –1,02 % à 912 oC
Entre 912 oC et 1 394 oC, la structure cristalline du fer pur est cubi- γ → δ : ∆V/V0 = + 0,60 % à 1 394 oC
que à face centrée (CFC) (structure compacte). Dans cet état, les ato-
mes de fer occupent les sommets et les centres des faces d’un cube
dont l’arête mesure 0,3647 nm à 912 oC et 0,3678 nm à 1 394 oC (elle
À noter que le coefficient de dilatation du fer augmente avec la
mesurerait 0,355 nm à 20 oC). Cette forme est dite « fer g »
température mais qu’à température identique, il est plus élevé à
Ces évolutions des paramètres de maille engendrent des modifi- l’état γ qu’à l’état α.
cations du volume spécifique du fer qui sont décrites, en valeur rela-
tive, dans le tableau 1.
À l’examen de ce tableau, on constate que la transformation α ↔ γ 1.2 Durcissement du fer
est accompagnée d’une variation du volume spécifique du fer (1 %
environ soit à peu près 0,34 % en longueur — retrait au chauffage, Pour juger des possibilités de durcissement du fer par précipita-
dilatation au refroidissement). tion de carbures, il faut prendre en compte la solubilité du carbone
La transformation α ↔ γ s’accompagne aussi d’un effet dans le fer (il est en effet nécessaire que les carbures soient solubles
thermique ; il y a absorption de chaleur lors de la transformation à haute température et, au contraire, le moins possible solubles à
α → γ et dégagement de chaleur lors de la transformation γ → α. basse température). Le tableau 2 donne quelques indications sur
L’enthalpie de transformation α → γ serait de l’ordre de 16 à 17 J/g. cette solubilité dans le fer pratiquement pur.

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Tableau 2 – Solubilité du carbone dans le fer pur (1) 1.3 Diagramme fer-carbone

Fer α Fer γ
Le système fer-carbone est théoriquement décrit par le dia-
gramme fer-carbone dans lequel le carbone, insoluble dans le fer α
Température C Température C précipiterait sous forme de graphite. Mais, dans le domaine des
(°C) (%) (°C) (%) aciers (C < 2,11 %, environ) non alliés, l’expérience révèle qu’il n’en
est pas ainsi et que le carbone en excès précipite sous la forme du
200 7 × 10–7 727 0,77 carbure de fer Fe3C appelé cémentite. Il est donc alors normal de
300 21 × 10–6 800 0,94 considérer le diagramme d’équilibre fer-cémentite dont la figure 1
présente un schéma.
400 23 × 10–5 900 1,22
En dehors des domaines de solidification, ce diagramme
500 13 × 10 –4
1 000 1,55 fer-cémentite fait apparaître :
600 57 × 10–4 1 100 1,92 — sur l’axe des ordonnées, les domaines de température dans
lesquels les différentes formes allotropiques du fer pur sont stables ;
650 102 × 10 –4
1 148 2,11 — le domaine ABCDEFGHI d’existence du fer γ (dont la limite infé-
rieure IHGF définit le point de transformation symbolisé par Ae1) et
700 16 × 10–3 Limite du solidus
qui inclut :
727 22 × 10–3 1 200 1,85 • le domaine mixte ABC (fer δ + fer γ),
(1) Dans l’équilibre Fe-Fe3C d’après [1]. • le domaine mixte DEFG (fer γ + cémentite),
• le domaine mixte GHI (fer γ + fer α),
• le domaine ACDGI d’existence du fer γ seul qui est aussi le
domaine dans lequel un acier non allié fer-carbone est, à
On constate que le carbone peut entrer en solution solide dans le l’état solide, monophasé CFC, tout le carbone étant en solu-
fer ; c’est une solution solide d’insertion car les atomes de carbone tion solide dans le fer γ (phase appelée austénite) et dont la
se glissent dans des espaces libres entre les atomes de fer. Une telle limite inférieure IG définit le point de transformation symbo-
insertion n’est possible que parce que l’atome de carbone est petit lisé par Ae3 ;
(rayon atomique = 0,077 nm). Mais la solubilité, qui demeure tou- — la limite DG de solubilité du carbone dans le fer γ que l’on peut
jours partielle dans ce cas, varie avec les possibilités d’insertion des décrire approximativement avec la relation :
atomes de solutés entre les atomes de solvant. C’est ainsi que l’on lg (C %) = 1,363 – 1 475/T
constate une très grande différence de solubilité du carbone dans
les deux formes allotropiques du fer qui nous intéresse ici, à savoir avec T (K) température
le fer α et le fer γ. On note que le carbone est soluble dans le fer γ (la et qui définit le point de transformation symbolisé par Aem ;
solution solide de carbone dans le fer γ s’appelle : austénite) alors — le domaine IGFJK d’existence du fer α (dont la frontière IG défi-
qu’il est « pratiquement » insoluble dans le fer α (le fer α qui con- nit le point de transformation symbolisé par Ae3) et qui inclut :
tient des traces de carbone en solution solide s’appelle : ferrite). La • le domaine mixte IGH (fer α + fer γ),
différence de solubilité s’explique en considérant les possibilités • le domaine mixte HGFJK (fer α + cémentite),
d’insertion d’atomes de carbone entre les atomes de fer dans les • le domaine IHK d’existence du fer α seul qui est aussi le
deux réseaux. En effet, les sites octaédriques susceptibles d’être domaine dans lequel un acier non allié fer-carbone (à très
occupés par le carbone dans les deux types de réseaux n’ont pas les basse teneur en carbone) est, à l’état solide, monophasé CC, le
mêmes dimensions : carbone étant en solution solide dans le fer α (phase appelée
— dans le fer γ, ces sites permettent la mise en place d’une ferrite) ;
sphère dont le diamètre est de l’ordre de 0,1464 fois l’arête du cube — la limite HK de solubilité du carbone dans le fer α que l’on peut
soit ici environ 0,053 nm ; la présence d’un atome de carbone (rayon décrire approximativement avec la relation :
atomique = 0,077 nm) est tolérable parce qu’elle ne provoque lg (C %) = 2,36 – 4 030/T
qu’une distorsion limitée du réseau ;
— l’évolution, en fonction de la teneur en carbone de la limite
— dans le fer α, ces sites ne permettent que la mise en place d’un supérieure IG du domaine mixte fer α – fer γ (IGH) qui traduit
ellipsoïde dont le petit diamètre est de l’ordre de 0,067 fois l’arête du l’influence du carbone sur l’état d’équilibre de l’austénite ; en pré-
cube soit ici environ 0,019 nm et le grand diamètre de 0,274 fois sence de carbone en solution solide, celle-ci est stable à des tempé-
l’arête du cube soit ici environ 0,078 nm ; la présence d’un atome de ratures inférieures à 912 oC. Le carbone stabilise donc l’austénite et,
carbone (rayon atomique = 0,077 nm) engendre donc une distorsion de ce fait, on le dit « gammagène » ;
trop importante du réseau. — l’existence d’un eutectoïde dont les coordonnées sont :
Ainsi donc le carbone soluble dans le fer à haute température ne C = 0,77 % à 727 oC
l’est pratiquement plus à la température ambiante et cela, non seu-
lement parce que sa solubilité diminue mais aussi parce que la et qui est constitué, lors de sa formation à 727 oC, par un agrégat de
structure cristalline du fer change et ne permet quasiment plus grains de ferrite (contenant 0,02 % de carbone) et de grains de
l’insertion des atomes de carbone entre les nœuds du réseau. Les cémentite Fe3C (à 6,69 % de carbone). Dans un alliage fer-carbone,
conditions d’équilibre sont donc remplies pour permettre la forma- cet agrégat contient en poids (les proportions en volume sont prati-
tion, dans le domaine d’existence du fer α, d’une deuxième phase quement identiques) 88,78 % de ferrite et 11,22 % de cémentite (les
contenant le carbone. La première étape de l’étude des possibilités proportions à 20 oC sont de 88,49 % de ferrite pratiquement sans
offertes par cette situation est l’examen des diagrammes décrivant carbone et 11,51 % de cémentite, cette dernière proportion a aug-
les phases en équilibre dans les aciers [62], c’est-à-dire dans les menté par suite de la précipitation du peu de carbone qui était en
alliages fer + carbone (+ éventuellement des éléments d’alliages) solution dans la ferrite à 727 oC). La réaction eutectoïde s’écrit :
tels qu’il existe un domaine de température dans lequel tout le car- Fe γ (0,77 % C sol-sol) ↔ Fe α (0,02 % C sol · sol) + Fe3C
bone puisse être mis en solution solide dans le fer (autrement dit
tels qu’à l’instant où leur solidification s’achève, le carbone ne forme Dans les conditions d’équilibre, elle se déroule à la température
aucun précipité). constante de 727 oC (pour un acier Fe-C non allié) ;

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Température (¡C)
Température (¡C)

1800

Fe δ B
1600 B
Liquide + Austénite
C 1400 Liquide + Fe3C
A
A C
Liquide

1200
Austénite 1148
D E
1000
I Aem Austénite + Fe3C Fe3C
I 912
Ae3
800 Ae1
727
H H G F
600
Ferrite

400 Ferrite + Fe3C

200

K K J
0
Fe
Grossissement 0 1 2 3 4 5 6 7
(faibles teneurs en carbone) Fe Teneur en carbone (%) Figure 1 – Schémas du diagramme d’équilibre
Fe-Fe3C

1180
Température (¡C)

Température (¡C)
912 ¡C Austénite Ae3
1140 1148 ¡C
900
1100 Austénite
+ Ferrite
1060 Ae1
800
1020 770 ¡C Température de Curie
Aem
Ae1
980
Austénite
940 700
912 ¡C Austénite + Fe3C Ferrite
900

860
600
820 Ae3
Austénite
780 + Ferrite Ferrite + Fe3C
770¡C Température de Curie Ae1 500
740
727 ¡C
700
Ferrite Ferrite + Fe3C
660 400
Fe 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 1,4 1,6 1,8 2,0 2,2 Fe 0,005 0,015 0,025
0,0218 0,77 2,11 0,0218
Teneur en carbone (%) Teneur en carbone (%)

Figure 2 – Détails du diagramme d’équilibre fer-carbone (équilibre Fe-Fe3C) [1]

— à l’équilibre à 20 oC, les proportions des phases présentes évo- Nota : la notation C % utilisée dans les formules signifie que, par exemple, pour une
teneur en carbone de 2 % :
luent avec la teneur en carbone. Les deux formules suivantes quan- C % = 2 (et non 0,02).
tifient ces relations (entre 0 et 2,11 % de carbone) :
Pour l’étude des transformations des aciers, on utilise essentielle-
% ferrite totale = 100 – 14,95 (C %) ment les parties utiles du diagramme Fe-Fe3C telles qu’elles sont
% cémentite = 14,95 (C %) présentées par la figure 2.

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1.4 Éléments d’alliage dans les aciers Mais il est nécessaire de considérer aussi l’influence des éléments
d’alliage sur les états d’équilibre du système fer-carbone. Dans ce
domaine, on constate tout d’abord que les éléments alphagènes
Les aciers contiennent souvent des éléments d’alliage qui sont augmentent la surface du domaine dans lequel la phase α est stable.
susceptibles de modifier leurs états d’équilibre. Une première indi- La figure 5a, [10] illustre cet effet en ce qui concerne le molybdène.
cation concernant ces effets peut être tirée de l’examen des dia- Les éléments gammagènes, eux, augmentent la surface du domaine
grammes binaires fer-éléments d’alliage [65] [66]. dans lequel la phase γ est stable. La figure 5b [10] illustre cet effet,
en ce qui concerne le manganèse.
■ En effet, certains éléments d’alliage, tels le chrome (figure 3),
Pour des teneurs limitées, ces modifications du tracé du dia-
augmentent la stabilité de la phase α au point que l’alliage, au-delà
gramme d’équilibre Fe-C sont traduites par deux diagrammes qui,
d’une certaine teneur, reste CC à toutes températures ; un tel élé-
en fonction de la teneur en élément d’alliage et cela pour chacun
ment est dit alphagène. La liste des éléments alphagènes com-
d’eux, représentent :
prend presque tous les éléments d’alliage habituels tels que Si, Al,
Cr, Mo, Ti, W. — pour le premier (figure 6), l’évolution de la température à
laquelle se déroule la transformation eutectoïde, température qui
D’autres éléments d’alliage, tels le nickel (figure 4), augmentent
correspond, si la teneur en carbone n’est pas inférieure à 0,0218 %,
au contraire la stabilité de la phase γ au point qu’au-delà d’une cer-
à celle du point Ae1 (courbe HGF de la figure 1) ; cet effet peut aussi
taine teneur, l’alliage puisse rester CFC quelle que soit la tempéra-
être quantifié à l’aide d’une formule empirique due à Andrews [13] :
ture. Un tel élément est dit gammagène ; la liste des éléments
gammagènes est assez limitée puisqu’elle ne comporte que Ni, Mn Ae1(oC) = 727 – 10,7 Mn % – 16,9 Ni % + 29,1 Si %
et Cu.
+ 16,9 Cr % + 6,38 W % + 290 As %
ces variations de la température à laquelle se déroule la transforma-
tion eutectoïde modifient les conditions de germination et de crois-
sance des constituants de l’agrégat eutectoïde de telle sorte que
Température (¡C)

1830 celui-ci sera formé de grains de ferrite et de cémentite d’autant plus


1800 fins que la température sera plus basse et d’autant plus gros qu’elle
sera plus élevée ;
— pour le second (figure 7), les variations de la teneur globale de
l’eutectoïde en carbone, variations qui conduisent toutes à un abais-
1600 sement de la teneur globale en carbone de l’eutectoïde (nous ver-
1534 rons plus loin (§ 2.1.2) les conséquences d’un tel abaissement).
1507
23
(22)
1400 1390
Température (¡C)

1600
3,24 1534 5,9 (6,2)
1200 (3,4) 1512
γ α δ 1455
4,3
1400 (3,4)
FeCr

13,3 (12,5) 1390


1000
910 910
48
7,5 820
γ
FeNi3

830 Transformation
800 800 magnétique
σ 769

600 600
520
503+
--2
FeNi3
400
400
345
α 354
0,5 52 62,5

200 200

0 0
0 20 40 60 80 100 0 20 40 60 80 100
Fe Cr Fe Ni
Teneur atomique en chrome (%) Teneur atomique en nickel (%)

En bleu, entre parenthèses, les teneurs massiques en En bleu, entre parenthèses, les teneurs massiques en nickel
chrome et sans parenthèses, les teneurs atomiques. et sans parenthèses, les teneurs atomiques.

Figure 3 – Diagramme d’équilibre des alliages Fe-Cr [65] Figure 4 – Diagramme d’équilibre des alliages Fe-Ni [65]

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1500
Température (¡C)

Température eutectoïde (¡C)


Ti
1200
Mo
1300

6,5 % Mn 4 9 2,5
1100
0,35 % Mn
2,5 1000 W
4
900 6,5
9
Si

Acier au carbone
700 Cr
à 0,35 % Mn
800

500
0 0,4 0,8 1,2 1,6 Mn
Teneur en carbone (%)
a influence du manganèse Ni
600
1500
Température (¡C)

0 2 4 6 8
Acier au carbone Élément d'alliage (% en masse)
à 0 % Mo
1300 Figure 6 – Influence des éléments d’alliage sur la température de
l’eutectoïde dans chaque système fer-carbone-élément d’alliage [4]
7%
Mo
1100 4%
Mo
0,80
Teneur en carbone (% en masse)

2%
Mo Ni
900
0,60 Mn

Cr
700 Si
0 0,4 0,8 1,2 1,6 0,40
Teneur en carbone (%)
b influence du molybdène W

0,20 Ti
Mo
Figure 5 – Exemples de modification du domaine de stabilité
de l’austénite par les éléments d’alliage [10]

0
0 2 4 6 8
■ Par ailleurs, certains éléments d’alliage engendrent des modifica-
Élément d'alliage (% en masse)
tions des carbures précipités à l’état d’équilibre ; en leur présence, le
carbone ne précipite plus sous la forme de carbure de fer mais sous
d’autres espèces. On est ainsi amené à considérer les éléments dits Figure 7 – Influence des éléments d’alliage sur la teneur en carbone
carburigènes, éléments qui ont pour le carbone une affinité plus de l’eutectoïde dans chaque système fer-carbone-élément
grande que celle du fer. Ce sont Mn, Cr, Mo, V, W, Nb, Ti. Il faut noter d’alliage [4]
que ces éléments, à faibles teneurs, ont souvent tendance à partici-
per à la formation de la cémentite en se substituant partiellement au
fer, donnant ainsi des carbures répondant à la formule générale
M3C. À fortes teneurs, par contre, ils forment les carbures qui leur Dans ces cas, la transformation eutectoïde perd sa spécificité pour
sont propres (en admettant parfois un peu de fer qui se substitue à faire place à une transformation plus complexe s’étalant générale-
eux). C’est ainsi, par exemple, qu’avec le chrome on pourra former ment sur un intervalle de température parfois assez large.
des carbures répondant aux formules suivantes :
Ces éléments carburigènes ont leur solubilité propre qui, selon la
(Fe, Cr)3C (Cr, Fe)7C3 (Cr, Fe)23C6 température, leur permettra d’être solubles, totalement ou partielle-
ment dans l’austénite ou au contraire leur interdira de passer en
alors qu’avec le vanadium on pourra identifier : solution solide (ils ne seront alors solubles qu’à la fusion). La des-
cription des états d’équilibre des alliages formés peut être partielle-
(Fe, V)3C et (V, Fe)4C3 ment fournie par des diagrammes ternaires (cas des alliages à trois

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1600 1600
Température (¡C)

Température (¡C)
α+L δ+L
α δ
Liquide L
1400 1400
α+γ γ+L γ+δ Liquide L

γ+L
1200 1200 L+Fe3C
γ γ+M3C+L γ

γ+M2C
1000 1000
γ+M3C γ+M6C γ+Fe2MoC γ+Fe3C
γ+M23C6
α+γ
α+ γ γ+M7C3 α
800 800
α γ+M23C6
α+ α+ α+M6C
M7C3 M C +M C
7 3 3 α+M3C α+M2C α+M23C6 α+Fe3C
600 600
Fe 1 2 3 4 5 0 1 2 3 4 5 6
Teneur en carbone (%) α+Fe2MoC α+Fe2MoC+M23C6 α+M23C6+Fe3C Teneur en carbone (%)

a diagramme d'équilibre Fe-C - 5 % Cr b diagramme d'équilibre Fe-C - 2 % Mo

Figure 8 – Exemples de coupes de diagrammes d’équilibre ternaires [1]

composants du type Fe-C-X) ou par des coupes planes tirées de ces imposées pour le tracé des diagrammes d’équilibre (et souvent
derniers ou de diagrammes encore plus complexes. La figure 8a même s’en écartent volontairement !). Dès lors, il devient indispen-
présente, à titre d’exemple, le diagramme Fe-C-5 % Cr et la sable de prendre en compte l’influence du temps et donc de décrire
figure 8b celui des alliages Fe-C-2 % Mo. la cinétique des transformations à l’état solide. Pour ce faire, on réa-
lise deux analyses différentes mais complémentaires :
■ Enfin, il faut rappeler que certains éléments d’alliage peuvent
contribuer à la formation de composés tels que : — des analyses des transformations à température constante qui
permettent la construction de diagrammes de transformation en
— les oxydes ; l’oxygène est une impureté des aciers ; la désoxy-
conditions isothermes, dits diagrammes TTT (Température Temps
dation, qui a pour objet de l’éliminer, l’inclut dans des composés
Transformation) ;
séparables du métal liquide (formés avec des éléments d’addition
ayant pour l’oxygène une affinité supérieure à celle du carbone et à — des analyses des transformations au cours de variations conti-
celle du fer ; ce sont généralement Mn, Si et Al) ; il peut en subsister nues (de type industriel) de la température qui permettent de tracer
de petites quantités retenues lors de la solidification ; elles consti- des diagrammes de transformation en conditions anisothermes
tuent des inclusions insolubles à l’état solide, ce qui conduit à (chauffage ou refroidissement) ; différentes lois de variations de la
« neutraliser » la part d’éléments d’alliage qui les ont formées ; température sont alors réalisées pour passer des chauffages ou des
— les sulfures ; le soufre est une impureté issue des matières refroidissements les plus lents aux plus rapides.
premières ; sa présence peut provoquer la formation de sulfures ou Nous allons donc décrire ainsi les transformations des aciers en
d’oxysulfures de fer fusibles à relativement basses températures et commençant dans chaque cas par un rappel de ce que sont les
susceptibles de ce fait d’engendrer des difficultés de mise en forme modalités des transformations dans les conditions d’équilibre. Pour
à chaud (métal rouverin) ; la part qui n’a pas été éliminée lors de des raisons pratiques, nous adopterons l’ordre suivant :
l’élaboration est fixée à l’aide du manganèse qui a, pour cet élé-
ment, une affinité plus grande que celle du fer et forme des sulfures — tout d’abord, les transformations de l’austénite au cours de
non fusibles aux températures de laminage et de forgeage ; le man- son retour depuis sa haute température d’équilibre jusqu’à la tem-
ganèse ainsi utilisé demeure insoluble dans l’austénite ; pérature ambiante ; pour faciliter la présentation, nous grouperons
— les composés intermétalliques ; dans certains aciers très l’ensemble sous l’appellation « transformations γ → α » ;
alliés, il est possible de provoquer la précipitation de composés — ensuite, les transformations de la ou des structure(s) obte-
intermétalliques à base de fer tels FeTi, Fe3Al, FeCr, Fe2Mo ou for- nue(s) lors de la première étape ci-dessus, lorsque, partant de la
més à partir de deux éléments d’alliage tels Ni3Al ou Ni3Ti ; ces température ambiante, on réchauffe le métal :
composés judicieusement précipités peuvent apporter un durcisse- • pour provoquer un retour vers un état (plus stable) se rappro-
ment important. chant plus ou moins de l’état d’équilibre à la température
Mais les diagrammes décrits plus avant ne définissent que les ambiante ; ce point sera traité dans le paragraphe intitulé
états d’équilibre, c’est-à-dire les états structuraux obtenus dans des « revenu »,
conditions telles que le facteur temps n’intervienne pas. Or, dans la • pour parvenir à l’état austénitique stable à haute température ;
pratique, les transformations à l’état solide sont provoquées au ici encore, pour faciliter la présentation, nous grouperons l’ensem-
cours de cycles thermiques qui ne respectent pas les exigences ble sous l’appellation « transformations α → γ ».

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2. Transformations g → a

Température (¡C)
I Austénite
912 ¡C
900
2.1 Transformations g → a dans les H' Intervalle de
transformation
conditions d’équilibre
Ferrite + Austénite
2.1.1 Cas des alliages Fe-C Ferrite 727 ¡C
700 H

Le diagramme d’équilibre fer-carbone (figure 2) montre qu’à


l’exception des alliages dont la teneur en carbone est inférieure
à 0,022 %, les aciers subissent la transformation eutectoïde pré- Début de la
cédée (sauf pour les aciers à 0,77 % C) soit (si 0,02 < C % < 0,77) précipitation
d’une étape de formation de ferrite, soit (si 0,77 < C % < 2,11) de Fe3C
d’une étape de formation de cémentite. 500 (au refroidissement)

2.1.1.1 Transformations des aciers à très basses teneurs


en carbone ; C % < 0,02
Ferrite + Fe3C
La transformation commence (figure 9) à une température varia-
ble avec la teneur en carbone mais comprise entre 912 et 900 oC 300
environ (limite IH’) ; elle donne naissance, aux joints des grains
d’austénite, à des grains de ferrite dont la teneur en carbone, très
faible pour les premiers grains formés, croît au fur et à mesure de
l’abaissement de la température tandis que les premiers grains for-
més s’enrichissent en carbone par diffusion (dans les conditions
d’équilibre, la diffusion est totale) à partir des grains de ferrite plus K
0
riches (ligne IH). Le carbone, chassé des zones où se forme la ferrite, 0 0,01 0,02
enrichit l’austénite non encore transformée (ligne IH’). La transfor-
Teneur en carbone (%)
mation s’achève à une température variable avec la teneur en car-
bone, mais comprise entre 912 et 727 oC (ligne IH). La structure est Figure 9 – Transformations à l’équilibre d’un acier à 0,01 % C
alors constituée de grains de ferrite contenant, en solution solide,
tout le carbone présent. Avec la poursuite du refroidissement et à
partir d’une température variable avec la teneur en carbone mais
inférieure à 727 oC (ligne HK), on assiste à la précipitation (dans les
Température (¡C)

joints des grains), sous forme de Fe3C, du carbone contenu dans la Début de la
Austénite
ferrite alors saturée. formation de
ferrite au
À la température ambiante, la structure d’équilibre est donc cons- refroidissement
tituée de ferrite très pauvre en carbone et de Fe3C précipité.
1000 Fin de la
formation de
2.1.1.2 Transformation eutectoïde ; C % = 0,77 ferrite au Précipitation
de Fe3C
Toute la transformation γ → α se produit à 727 oC selon la réaction refroidissement
dans l'austénite
eutectoïde (figure 2) : Austénite
+ au refroidissement
800
Fe γ (0,77 % C sol-sol) → Fe α (0,02 % C sol-sol) + Fe3C Fe3C

Cette réaction provoque la formation d’un agrégat eutectoïde


constitué de grains intimement mélangés de ferrite et de cémentite.
Austénite Transformation
Ces deux constituants sont présents, à la température à laquelle 600 +
s’achève la transformation, dans les proportions suivantes : eutectoïde
Ferrite
— ferrite : 88,78 % (en poids) ;
— cémentite : 11,22 % (en poids).
Au-dessous de 727 oC, seul se produit l’appauvrissement en car- Précipitation
400
de Fe3C
bone de la ferrite qui contenait initialement 0,02 % C et qui se trouve Ferrite + Fe3C à partir de
saturée. Le carbone précipite progressivement sous forme de Fe3C, la ferrite au
généralement sur les grains de cémentite déjà formés. refroidissement
À la température ambiante, la structure est donc exclusivement 200
formée d’agrégat eutectoïde dans les proportions suivantes :
— ferrite : 88,5 % (en poids) ;
— cémentite : 11,5 % (en poids).

2.1.1.3 Transformations des aciers à 0,02 < C % < 0,77 0


0 1 2
Le diagramme d’équilibre (figure 10) montre que la transforma- Teneur en carbone (%)
tion eutectoïde est précédée d’une étape de formation de ferrite.
La transformation débute à une température variable avec la Figure 10 – Transformations à l’équilibre d’un acier à 0,4 % C
teneur en carbone mais comprise entre environ 900 et 727 oC ; elle et d’un acier à 1,6 % C

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Au-dessous de 727 oC, on assiste seulement à un appauvrisse-


ment en carbone de la ferrite constituant l’agrégat eutectoïde ; la
Teneur en constituant (%)

teneur en carbone de cette ferrite initialement égale à 0,02 % décroît


100 Eut
fortement, la plus grande partie du carbone dissous précipitant pro-
ecto gressivement sous forme de Fe3C sur les grains de cémentite de
Ferr ïde
ite t
otal
l’agrégat.
Ferr

e
À la température ambiante, la structure est donc formée d’agrégat
ite h

eutectoïde et de précipités intergranulaires de Fe3C. La partie droite


de la figure 11 décrit les variations à 20 oC des proportions des dif-
o
rs e

50 férents constituants en fonction de la teneur en carbone dans les


ïde
utec

limites considérées ici.


ecto

le
oïde

tota
Eut

Fe 3C toïd
e L’examen de la figure 11 conduit à distinguer trois types
ut c
e
h o rs e d’aciers :
Fe 3C — ceux qui, à l’équilibre, sont constitués uniquement par
0 l’agrégat eutectoïde et qui sont, de ce fait dits « aciers
0 0,77 1 2 2,11
eutectoïdes » ;
Teneur en carbone (%)
— ceux qui, à l’équilibre, sont constitués de ferrite et d’agré-
gat eutectoïde et qui sont dits « aciers hypoeutectoïdes »
Figure 11 – Variations en fonction de la teneur en carbone (leur teneur en carbone est inférieure à celle de l’eutectoïde) ;
des proportions de différents constituants d’équilibre à 20 °C — ceux qui, à l’équilibre, sont constitués de cémentite et
d’agrégat eutectoïde et qui sont dits « aciers hypereutectoï-
des » (leur teneur en carbone est supérieure à celle de l’eutec-
toïde).
donne naissance à des grains de ferrite pauvre en carbone. Avec
l’abaissement de la température, on assiste :
— à la formation de grains de ferrite un peu plus riches en car- 2.1.2 Cas des alliages Fe-C-X
bone (teneur maximale 0,02 %) ;
— à un très léger enrichissement (par diffusion) en carbone des Deux cas doivent être distingués ici.
grains de ferrite déjà formés (teneur maximale 0,02 %) ; ■ Si l’élément X n’est pas carburigène, les différentes étapes de la
— à un enrichissement en carbone de l’austénite non encore transformation γ → α en conditions d’équilibre restent semblables à
transformée dont la teneur croît jusqu’à atteindre 0,77 % quand la celles décrites pour les alliages Fe-C, mais les limites en teneur en
température de l’alliage est abaissée à 727 oC. carbone et en température subissent l’infuence de la présence de
À 727 oC se produit la transformation eutectoïde : l’élément d’alliage comme il a été indiqué plus avant.
■ Si l’élément X est carburigène, les conditions de précipitation du
Fe γ (0,77 % C sol-sol) → Fe α (0,02 % C sol-sol) + Fe3C
carbone sont différentes car, selon la teneur en cet élément X, le car-
qui intéresse toute l’austénite non encore transformée et donne bone précipite soit sous la forme de cémentite substituée, soit sous
naissance à l’agrégat eutectoïde. la forme du carbure de cet élément X. Par ailleurs, cet élément X fait
aussi sentir son influence en tant qu’élément d’alliage sur les limites
À (727 + ε) oC (juste avant que la transformation eutectoïde com- en teneur en carbone et en température.
mence), l’acier est formé de ferrite proeutectoïde (formée avant la Généralement la transformation eutectoïde fait place à une trans-
réaction eutectoïde) à 0,02 % C et d’austénite à 0,77 % C. formation non isotherme produisant un agrégat de ferrite et de car-
À (727 – ε) oC (juste après que la transformation eutectoïde se soit bures contenant l’élément X. Dans certains cas d’ailleurs, la
achevée), l’acier est formé de ferrite à 0,02 % C (la ferrite composition des carbures précipités peut évoluer au cours du refroi-
proeutectoïde + la ferrite de l’agrégat) et de cémentite à 6,69 % C. dissement.
Avec la poursuite du refroidissement, on n’assiste plus qu’à la préci- Mais il faut s’intéresser au fait que, comme on l’a vu au paragra-
pitation, sur les carbures existants et sous forme de Fe3C, du car- phe 1, les éléments d’alliage abaissent tous la teneur globale en car-
bone en solution dans la ferrite à 727 oC. bone de l’agrégat eutectoïde. Ce changement engendre, pour les
aciers hypoeutectoïdes et à même teneur en carbone, une modifica-
À la température ambiante, la structure est donc constituée de fer-
tion de l’état structural avec augmentation de la teneur en agrégat et
rite proeutectoïde et d’agrégat eutectoïde contenant le carbone sous
diminution de la teneur en ferrite formée avant la réaction eutec-
forme de Fe3C. La partie gauche de la figure 11 décrit les variations
toïde comme le montre le tableau 3.
à 20 oC des proportions de ces divers constituants en fonction de la
teneur en carbone dans les limites considérées ici.
Tableau 3 – Proportions des différents constituants
2.1.1.4 Transformations des aciers à 0,77 < C % < 2,11 présents à l’équilibre à 20 oC dans un acier à 0,4 % C
Le diagramme d’équilibre (figure 10) montre que la transforma- Eutectoïde Eutectoïde
tion eutectoïde est précédée par une étape de formation de cémen- Constituant
à 0,77 % C à 0,65 % C
tite. La transformation débute à une température variable avec la
teneur en carbone, mais comprise entre 1 148 oC et 727 oC, par la Ferrite totale 94 % 94 %
précipitation, dans les joints des grains d’austénite, de carbone sous Cémentite totale 6% 6%
forme de Fe3C, cela afin de ne pas sursaturer l’austénite. Avec
l’abaissement de la température, cette précipitation se poursuit tan- Ferrite hors eutectoïde 48 % 38,5 %
dis que l’austénite s’appauvrit en carbone ; sa teneur décroît jusqu’à Eutectoïde 52 % 61,5 %
atteindre 0,77 % à 727 oC.
dont ferrite 46 % 55,5 %
À 727 oC, la transformation eutectoïde se produit ; elle intéresse
toute l’austénite et donne naissance à l’agrégat eutectoïde. dont cémentite 6% 6%

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2.2 Transformations g → a hors équilibre

Dureté
Température (¡C)
2.2.1 Généralités 800
Ac3
I
Ac1
Pour étudier les développements de la transformation γ → α dans A+F II
des conditions hors équilibre, on peut, calquant la pratique indus- A IV
trielle, procéder à des refroidissements plus ou moins rapides ou 92 HRB
III
plus ou moins lents au cours desquels on détermine les chan- 600 22 HRC
gements structuraux qui se produisent jusqu’au retour à la tem- 25
pérature ambiante. On effectue ainsi une étude dite en A+F+C
30
« refroidissement continu ». L’expérience a montré que les résul-
tats obtenus peuvent parfois être très complexes et difficiles à ana- F+C 31
lyser. AA
+F++
FC+C 400 A+F+C 33
Pour mieux décomposer les phénomènes et distinguer plus aisé- 41
ment les effets du temps d’une part et ceux de la température Ms
d’autre part, on procède, au préalable, à une analyse du déroule- 25 %
A+M
ment des transformations au cours de maintiens isothermes à des 50 %
températures inférieures à la limite du domaine de stabilité de l’aus- 200
75 %
ténite. On réalise ainsi l’étude dite en « conditions isothermes ».

2.2.2 Transformations g → a hors équilibre 0


63
et en conditions isothermes 1 2 5 10 10
2
10
3
10
4
10
5

Temps (s)

L’étude des transformations en conditions isothermes de 1' 2' 15' 1h 2h 4h 8h 24h


l’austénite exige qu’à partir de sa température de formation, elle
soit instantanément ramenée à la température à laquelle ses Acier austénitisé à 825 ¡C pendant 15 min
transformations doivent être analysées. Cette condition ne peut Grosseur de grain AFNOR : 11
théoriquement pas être satisfaite puisqu’elle s’applique à un 25 %, 50 % et 75 % sont les pourcentages d'austénite formée
A : austénite C : cémentite F : ferrite
échantillon d’acier dont l’épaisseur n’est pas nulle. Des astuces
opératoires permettent de pallier partiellement cette impossibi-
lité à la condition que soit vérifié in fine que la durée de mise en Figure 12 – Diagramme TTT d’un acier hypoeutectoïde du type C 55
température n’avait pas d’influence sensible sur les modalités (0,53 % C - 0,7 % Mn - 0,24 % Ni - 0,52 % Cu) [5]
des transformations.

La cinétique des transformations γ → α se déroulant en conditions 2.2.2.1 Différents processus de transformation d’un acier
isothermes est décrite par le « diagramme de transformation en non allié
conditions isothermes » ou « diagramme TTT » dont la figure 12 L’examen du diagramme de la figure 12 (acier C 55 non allié à
donne un exemple pour un acier non allié hypoeutectoïde du type 0,53 % C) montre que la transformation γ → α peut se développer
C 55. Un tel diagramme est tracé dans le système de coordonnées : dans des conditions différentes selon la température de maintien :
logarithme du temps (en abscisse)/température (en ordonnée). Les
courbes qui le constituent joignent les points qui correspondent aux — dans un domaine de température compris entre la limite de
températures auxquelles : stabilité de la ferrite (Ac3 ≈ Ae3) et une température voisine, dans
l’exemple présenté, de 310 oC (et repérée Ms), les transformations
— la transformation γ → α débute (I) ; se déroulent en fonction du temps ;
— le type de constituant formé change (II) ;
— par contre, dans le domaine des températures inférieures à
— 50 % d’austénite sont transformés (III) ; cette température Ms, le temps ne paraît plus intervenir et la trans-
— la formation d’un constituant cesse (IV) ; formation n’évolue plus alors qu’en fonction de l’abaissement de la
— la transformation γ → α s’achève. température.
Un tel diagramme apporte par ailleurs les informations suivantes : Dans le domaine de température compris entre la limite de stabi-
— la composition chimique du métal dans lequel ont été préle- lité de la ferrite et la température ambiante, l’expérience montre
vées les éprouvettes utilisées ; donc que le processus de transformation est différent selon que l’on
— les conditions d’austénitisation (température, durée) ; se place aux températures les plus hautes ou les plus basses de
— la grosseur du grain austénitique tel qu’il existe après réalisa- l’intervalle considéré. C’est ainsi qu’avec l’acier C 55 qui nous sert
tion de l’austénitisation dans les conditions indiquées ; d’exemple :
— les températures Ac1 et Ac3 qui, déterminées au chauffage a) Dans le domaine de température compris entre la limite de
dans des conditions particulières (150 o C/h < vitesse de stabilité de la ferrite (Ac3 ≈ Ae3) et 500-550 oC environ, la transfor-
chauffage < 300 oC/h), sont très proches des températures Ae1 et mation γ → α se développe selon un mécanisme voisin de celui
Ae3 et rappellent donc les limites des domaines de transformation propre à l’équilibre. En effet, elle débute par la germination et la
en conditions d’équilibre ; croissance de grains de ferrite puis elle se poursuit, si la tempéra-
— les duretés de l’acier après totale transformation de l’austénite ture est inférieure à la limite de stabilité de l’austénite (Ac1 ≈ Ae1),
à certaines températures ; ces duretés sont reportées généralement par la formation d’un constituant semblable à l’agrégat eutectoïde
sur la partie droite du diagramme ; mais dont les constituants apparaissent le plus souvent sous forme
— les constituants présents dans chacun des domaines délimités de lamelles parallèles d’autant plus fines que la température est
par les diverses courbes. plus basse dans l’intervalle considéré ; on parle alors de perlite

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lamellaire. La transformation de l’austénite donne donc naissance On constate ainsi que toute diminution de Ei abaisse ∆G et facilite
à deux produits ; les grains de ferrite properlitique et les amas de ce fait la germination ; or Ei est plus faible quand la germination
perlitiques ; se développe dans un site où le réseau cristallin est perturbé
b) Dans le domaine de température compris, dans l’exemple de comme, notamment, dans un joint de grain.
l’acier C 55 considéré ici, entre 500-550 oC environ et la température Par ailleurs, on montre aussi que ∆G, nulle à l’origine (r = 0), passe
Ms (310 oC ici), la transformation γ → α conduit à un résultat fonda- par un maximum pour une valeur critique rc du rayon :
mentalement différent de celui obtenu dans le domaine supérieur ;
elle produit encore de la ferrite sursaturée en carbone et des cristaux rc = 2Ei /|Gr|
de cémentite, mais elle ne provoque plus la formation d’un consti- (rappelons qu’un germe ne peut se développer que si, sous l’action
tuant proeutectoïde et d’un agrégat de type eutectoïde. Le produit de l’agitation thermique, il atteint cette taille critique) et que cette
final est un nouvel agrégat formé de plaquettes de ferrite et de taille critique diminue quand la température à laquelle se développe
cémentite appelé bainite dont l’aspect diffère suivant la tempéra- la transformation est abaissée ([67] M 36 § 4.2.1.1). Cela explique
ture à laquelle il s’est formé. Aux températures les plus hautes dans pourquoi, dans cette dernière circonstance, les examens métallo-
le domaine considéré, les plaquettes de ferrite sont en effet rassem- graphiques montrent que les germes de ferrite apparaissent plus
blées en groupes dans lesquels elles sont parallèles entre elles, les vite et sont plus nombreux.
plaquettes de cémentite étant dispersées entre elles et disposées
elles aussi parallèlement à la même direction principale ; on obtient Mais l’évolution de ∆G montre qu’une fois franchi le stade de la
ainsi la bainite dite supérieure. Par contre, aux températures les germination, les grains désormais stables ont tendance à grossir et
plus basses dans le domaine considéré, on forme la bainite dite d’autant plus que leur diamètre est plus grand. Cette croissance,
inférieure, constituée de plaquettes de ferrite plus individualisées et dont on constate qu’elle est thermiquement activée (la vitesse de
plus imbriquées dans lesquelles les plaquettes de cémentite sont croissance est donc d’autant plus faible que la température est plus
dispersées et forment parfois un angle voisin de 60o avec la direc- basse), peut être contrôlée par :
tion de croissance des plaquettes de ferrite ; — la réaction d’interface qui fait passer les atomes des grains de
phase γ aux grains de phase α ; la vitesse de croissance des grains
c) Dans le domaine des températures inférieures à la température
de ferrite serait alors constante (à température constante) ;
repérée Ms (ici 310 oC), la transformation de l’austénite ne dépend
plus du temps. Cette transformation donne naissance à un nouveau — la diffusion du carbone qui doit, pour que la transformation
constituant, la martensite qui peut être comparée à une pseudo- puisse se dérouler, migrer depuis les zones où se forme la ferrite
solution sursaturée de carbone dans le fer α dont le réseau est vers les zones où subsiste de l’austénite non encore transformée ; la
déformé (il est quadratique) pour permettre l’insertion des atomes vitesse de croissance des grains de ferrite serait alors (à tempéra-
de carbone. Cette martensite apparaît le plus souvent sous forme de ture constante) inversement proportionnelle à la racine carrée du
lentilles (martensite aciculaire ou en aiguilles) et, parfois, pour les temps.
aciers à basse teneur en carbone, sous forme de lattes (martensite En fait, l’expérience montre que c’est ce deuxième processus, la
massive). diffusion du carbone, qui contrôle le grossissement des grains de
Nous allons nous intéresser aux conditions de formation de ces ferrite. La loi de croissance isotherme de la ferrite obéit alors à une
différents constituants. cinétique conforme à la loi d’Avrami :

p = 1 – exp(–ktn)
2.2.2.2 Transformations properlitiques
avec k coefficient,
Le début de la formation des constituants est précédé par une
période de métastabilité de l’austénite, appelée période d’incuba- p proportion d’austénite transformée (0 < p < 1),
tion. Lorsque la température s’abaisse, le temps d’incubation n 2,5 à 1,5,
décroît par suite de l’augmentation de l’énergie motrice de la trans- t temps.
formation qui croît avec l’écart entre la température de maintien et
la température d’équilibre puis croît quand cet écart devient plus La croissance s’arrête quand les grains de ferrite arrivent au
grand, les transformations étant reportées dans des domaines de contact les uns des autres mais, surtout, lorsque l’austénite non
température où la germination des phases devient plus difficile par encore transformée est, à la température considérée, saturée en
suite de la diminution de l’agitation thermique. carbone ; en effet, elle ne peut plus alors absorber le carbone qui
serait rejeté lors d’une nouvelle formation de ferrite. Il faut noter que
2.2.2.2.1 Formation de ferrite properlitique la limite de saturation prise en compte ici est celle qui résulte de
l’extrapolation, vers des températures inférieures à 727 oC, de la
Pour un acier hypoeutectoïde (figure 12), dans le domaine de courbe de solubilité du carbone dans l’austénite (courbe DG de la
température compris entre la limite de stabilité de la ferrite figure 1) ; elle peut donc être très sensiblement inférieure à 0,77 %.
(Ac3 ≈ Ae3) et 500-550 oC environ, la transformation γ → α débute De ce fait, la proportion de ferrite properlitique diminue au fur et à
par la germination et la croissance de grains de ferrite properlitique. mesure que la température de transformation est plus basse et, par
Les examens métallographiques montrent tout d’abord que les ger- voie de conséquence, la quantité d’austénite qui se transformera en
mes de ferrite proeutectoïde apparaissent dans les zones désordon- perlite est plus importante (cette perlite contiendra toujours la
nées intercristallines, c’est-à-dire essentiellement dans les joints des même quantité de cémentite mais mêlée à une plus forte proportion
grains de l’austénite et aux points triples. Ce processus de germina- de ferrite).
tion hétérogène s’explique si l’on se réfère au calcul classique de
l’énergie libre ∆G qui préside à la germination et à la croissance
d’une nouvelle phase. En effet, si l’on admet que cette dernière 2.2.2.2.2 Formation de cémentite properlitique
apparaît sous forme sphérique de rayon r, on écrit que : Pour un acier hypereutectoïde (figure 13 : acier C 90 non allié à
∆G = Ei 4πr 2 + Gr(4/3)πr 3 0,93 % C), dans le domaine de température compris entre la limite
de solubilité du carbone dans l’austénite (Acm ≈ Aem) et 600 oC
avec Ei énergie d’interface, environ, la transformation γ → α est précédée par la germination et
Gr énergie libre volumique de la transformation ; la croissance de grains de cémentite properlitique qui, en préci-
pitant, dessaturent l’austénite (la solubilité du carbone étant plus
et en notant que l’énergie Gr doit être négative pour que la transfor- faible par suite du refroidissement depuis la température d’austéni-
mation puisse se développer, on peut réécrire cette relation sous la tisation). Les examens métallographiques montrent que les germes
forme : de cémentite proeutectoïde apparaissent dans les zones désordon-
∆G = Ei 4πr2 – |Gr|(4/3)πr3 nées intercristallines, c’est-à-dire essentiellement dans les joints des

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Dégradation de surface des pièces


métalliques en traitement thermique

par Marc BUVRON


Chargé d’études sur les matériaux métalliques et les traitements thermiques
Pôle Matériaux Métalliques et Surfaces,
Centre technique des industries de la mécanique (CETIM),
Senlis, France

et Cécile COMBE
Ingénieur d’études sur les matériaux métalliques et les traitements thermiques
Pôle Matériaux Métalliques et Surfaces,
Centre technique des industries de la mécanique (CETIM),
Saint-Étienne, France

1. Différentes sources de contaminations des pièces ................. M 1 117 – 2


1.1 Contaminants et interaction avec le traitement thermique .............. — 2
1.2 Contaminants organiques .................................................................. — 3
1.3 Contaminants minéraux ..................................................................... — 4
1.4 Particules métalliques ........................................................................ — 4
1.5 Autres sources de contamination ...................................................... — 4
2. Préparations de surface................................................................. — 4
2.1 Dégraissage ........................................................................................ — 4
2.2 Décapage ............................................................................................ — 5
2.3 Exemples de contrôles de la contamination superficielle ............... — 5
3. Influence des principaux gaz utilisés en traitement
thermique ......................................................................................... — 9
3.1 Différentes atmosphères de traitement thermique ........................... — 9
3.2 Interaction atmosphère-pièce ............................................................ — 9
4. Moyens de contrôle de la qualité de la surface ........................ — 13
4.1 Contrôle du dégraissage .................................................................... — 13
4.2 Exemple du contrôle de l’efficacité du dégraissage ......................... — 16
4.3 Contrôle du décapage ........................................................................ — 16
4.4 Contrôle des pièces après passage au four ...................................... — 18
5. Points clés à surveiller................................................................... — 19
5.1 Nouveau produit introduit dans l’atelier ........................................... — 20
5.2 Four de traitement thermique de trempe et de revenu, de séchage
ou de dégazage et bacs de trempe .................................................... — 20
5.3 Bain de dégraissage, de traitement électrolytique et de rinçage ..... — 20
6. Conclusion........................................................................................ — 20
7. Sigles et symboles .......................................................................... — 20
Pour en savoir plus.................................................................................. Doc. M 1 117

e traitement thermique a pour fonction de modifier la microstructure initiale


L d’une pièce en surface et/ou à cœur, pour lui conférer des propriétés
d’usage spécifiques (amélioration de la résistance à l’usure, de la durée de vie
en fatigue, de la résistance à la corrosion…).
Parution : septembre 2018

Lors du traitement thermique – qui consiste à porter la pièce en température


dans une ambiance gazeuse – des interactions non souhaitées entre la surface
de la pièce et l’atmosphère du four peuvent se produire et conduire à la

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DÉGRADATION DE SURFACE DES PIÈCES MÉTALLIQUES EN TRAITEMENT THERMIQUE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

dégradation de la surface. Parmi les précautions, une attention particulière doit


être portée avant traitement sur la préparation de la surface de la pièce à traiter,
surface qui doit présenter un état de contamination connu et maı̂trisé. La pré-
sence de résidus superficiels peut être la cause de dégradations par effet de bar-
rière thermique ou physique et/ou de réactions physico-chimiques entre la pièce
et l’environnement gazeux chauffé. La maı̂trise de l’atmosphère de traitement
(réglage du potentiel carbone par exemple) joue également un rôle prépondé-
rant dans les réactions physico-chimiques pouvant se produire à la surface des
pièces et conduire à leur dégradation. Les effets couplés de l’atmosphère et de la
contamination des surfaces avant traitement ont en effet un impact direct sur la
qualité des pièces traitées. Une mauvaise maı̂trise des paramètres de traitement
thermique peut donc être à l’origine de dégradations des pièces traitées qui peu-
vent également révéler des anomalies du process de fabrication en amont.
La première section de cet article est dédiée aux différentes sources de conta-
minations pouvant être retrouvées sur les pièces : leur nature, leur origine et
leur impact.
Dans une deuxième section, sont développées les différentes atmosphères de
traitement thermique et l’impact d’atmosphères mal maı̂trisées sur la qualité
des pièces traitées.
En supplément des éléments cités ci-dessus, les différentes parties ou équipe-
ments des fours de traitements thermiques (tapis, moufle, sole…), également
soumis aux ambiances gazeuses chauffées, peuvent être le siège de dégrada-
tions et ils sont abordés dans cet article.
Enfin, nous évoquons brièvement les différentes techniques d’analyses pou-
vant être utilisées avant et après traitement thermique. Les principales règles de
métier pour limiter les dégradations sur les pièces à traiter ou sur les éléments de
four sont citées.
Le lecteur trouvera en fin d’article un tableau des sigles et des symboles
utilisés.

– une difficulté particulière d’un décapage ultérieur laissant sub-


1. Différentes sources sister des contaminants minéraux ;
– une mauvaise adhérence ou le cloquage d’un revêtement réa-
de contaminations lisé ultérieurement ;
des pièces – une modification de la rugosité des pièces traitées (attaque de
la surface) ;
– une augmentation ou une diminution de la résistance au choc
des pièces traitées ;
1.1 Contaminants et interaction – une modification du caractère hydrophile de la surface des piè-
avec le traitement thermique ces traitées.
Les causes de ces dommages sont nombreuses :
À toutes les étapes de la fabrication des pièces, des produits chi-
miques sont utilisés pour permettre ou faciliter leur mise en œuvre. – une difficulté d’élimination complète de produits chimiques
Néanmoins, ces mêmes produits peuvent s’avérer néfastes lors lors des dégraissages et des rinçages préalables ;
d’une étape ultérieure du processus de fabrication. On parle alors – une oxydation (formation de rouille rouge dans le cas des allia-
de contamination. Lors du traitement thermique, les contaminants ges ferreux) ou une corrosion sèche (formation de calamine dans le
présents sur les pièces après dégraissage se décomposent. La pré- cas des alliages ferreux) de la surface pendant le traitement ;
sence de ces contaminants ou des produits de décomposition, dus – une décomposition, lors du traitement thermique, des produits
à l’interaction entre le produit chimique (et/ou un gaz de traitement) chimiques. Les éléments chimiques peuvent alors diffuser depuis la
et les pièces à traiter ou les éléments du four, peut entraı̂ner à surface de la pièce ;
haute température une modification des propriétés mécaniques ou – une vitrification d’un produit chimique lors du traitement ther-
des caractéristiques physico chimiques. mique, ce peut être le cas lorsque des résidus de silice ou de bore
sont portés à haute température ;
Parmi les principaux problèmes rencontrés, on peut citer : – une diffusion de l’hydrogène, présent dans le four ou dégagé
– une hétérogénéité du traitement (dureté, profondeur, épaisseur) ; lors de l’utilisation d’un produit chimique ou de son élimination,
– une hétérogénéité de composition chimique de la surface des depuis la surface qui fragilise la pièce ;
pièces ; – la formation d’un réseau de contraintes résiduelles de compres-
– un aspect après traitement non conforme (couleur, taches) ; sion ou de traction.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– DÉGRADATION DE SURFACE DES PIÈCES MÉTALLIQUES EN TRAITEMENT THERMIQUE

La maı̂trise des procédés nécessite donc une connaissance des peintures. Le coût des huiles synthétiques est plus élevé que celui
principaux produits contaminants. Les contaminants présents à la des huiles minérales.
surface forment les grandes catégories suivantes :
– produits organiques (huiles, graisses…) ; 1.2.1.4 Additifs présents dans les huiles
– produits minéraux (oxydes) ; La présence d’additifs permet une nette amélioration des perfor-
– particules métalliques. mances en fonction de l’application souhaitée (frottement, refroi-
dissement, coupe…). Ces additifs modifient considérablement le
comportement du produit de base. La plupart des huiles utilisées
1.2 Contaminants organiques dans l’usinage, le découpage, l’emboutissage ou la coupe contien-
Les produits organiques sont définis par le fait que l’élément car- nent, en proportions variables, des éléments tels que le calcium, le
bone entre dans leur composition. magnésium, l’aluminium, le soufre, le molybdène, le zinc, le phos-
phore ou le chlore.
Dans les cas industriels, on distingue en particulier :
La variété des additifs est considérable, on peut citer
– huiles ou lubrifiants de coupe utilisés pour la mise en forme ; notamment :
– graisses ;
– protections temporaires afin d’éviter l’apparition d’oxydes en – additifs extrême-pression ;
interopération ou pendant l’expédition ; – additifs anti-usure ;
– huiles et polymères de trempe. – additifs antirouille et anticorrosion ;
– émulgateurs ou émulsifiants ;
1.2.1 Huiles – antimousses ;
– biocides ;
Les huiles de base utilisées dans les process de réalisation de – antioxydants ;
pièces mécaniques couvrent une large gamme de produits d’ori- – agents détergents ;
gine naturelle (huiles végétales, animales ou minérales) ou synthé- – additifs dispersants ;
tiques. Les huiles naturelles animales sont désormais très peu utili- – additifs abaissant le point de congélation ;
sées dans l’industrie et tendent à disparaı̂tre. – additifs de viscosité ;
Pour plus de détails, le lecteur se référera à l’article [BM 5 341]. – additifs d’onctuosité, de frottement, d’adhésivité ;
– lubrifiants solides ;
1.2.1.1 Huiles végétales – additifs de basicité et les passivants ;
– nanoparticules.
Les huiles d’origine végétale, telles que les huiles de colza, de
soja, de palme, de ricin, de tournesol, de coton, sont de plus en
plus utilisées du fait de leur biodégradabilité. Elles sont composées 1.2.2 Graisses
principalement d’esters d’acide gras (triglycérides), d’acides gras et Les graisses lubrifiantes sont des produits à consistance semi-
d’alcools gras. fluide (pâteuse) obtenue par dispersion d’un agent épaississant ou
Les huiles végétales sont obtenues par pression de graines, par gélifiant (phase solide) dans une huile lubrifiante minérale ou syn-
extraction au solvant ou par raffinage. Elles ont un très bon pouvoir thétique (phase liquide) éventuellement additivée. Les graisses
lubrifiant, et sont de ce fait employées comme additifs d’onctuo- lubrifiantes sont utilisées de préférence aux huiles lorsque la quan-
sité. Elles apportent une bonne protection anticorrosion, sont non tité de chaleur à éliminer du mécanisme à lubrifier est faible, ce qui
toxiques et généralement biodégradables. La température de point est le cas des mécanismes fonctionnant à faible vitesse éventuelle-
éclair est élevée. Cependant, leur résistance à l’oxydation est faible. ment sous forte charge, ou fonctionnant à vitesse moyenne mais
Les huiles végétales présentent une tendance à l’hydrolyse et au sous charge modérée.
moussage. Lorsqu’elles sont dégradées, elles peuvent présenter Des agents épaississants sont présents à raison de 8 à 40 % en
une action corrosive sur certains alliages cuivreux. La viscosité à poids. Ils sont généralement constitués d’un savon métallique
froid de ces huiles est inférieure à celle des huiles minérales et syn- résultat de la réaction d’un acide gras avec un hydroxyde métal-
thétiques. De plus, le coût des huiles végétales est élevé. lique. Dans certaines graisses, l’agent épaississant est un composé
inorganique comme la bentonite, qui est une argile dotée de remar-
1.2.1.2 Huiles minérales quables propriétés d’adsorption.
Les huiles minérales sont issues principalement du raffinage du Les additifs sont rajoutés aux graisses formées par le mélange de
pétrole. Les huiles minérales sont des mélanges complexes l’huile et de l’épaississant pour renforcer certaines propriétés à
d’hydrocarbures paraffiniques, naphténiques et aromatiques, dont l’instar des huiles. On distingue les additifs solubles et insolubles.
la composition dépend de l’origine du pétrole brut et du degré de
raffinage. Elles sont de structures très diverses et peuvent contenir Les principaux additifs solubles présents dans les graisses sont :
des impuretés résiduelles oxygénées. – agents antioxydants ;
Les huiles minérales sont disponibles dans une large gamme de – additifs antirouille et anticorrosifs ;
viscosité. Leur pouvoir lubrifiant est bon. Elles présentent des tem- – additifs d’adhérence ;
pératures limites d’utilisation de l’ordre de 120 à 160  C. – réducteurs et modificateurs de frottement ;
– additifs abaisseurs de point d’écoulement ;
1.2.1.3 Huiles synthétiques – agents extrême-pression et anti-usure ;
– passivants et stabilisants.
Les huiles de synthèse (ou bases synthétiques) sont obtenues par
polymérisation, estérification, alkylation, fluoration… Elles sont de Des additifs insolubles ou solides sont rajoutés à des teneurs de
nature très diverse. On recense en particulier : l’ordre de quelques pourcents pour améliorer le pouvoir lubrifiant.
– hydrocarbures de synthèse ; Ils s’ajoutent à l’épaississant. Les plus fréquents sont :
– esters de synthèse ; – le bisulfure de molybdène ;
– polyglycols. – le graphite ;
– le PTFE.
Les huiles synthétiques ont une bonne tenue en température et
une bonne résistance à l’oxydation. Les esters et les polyglycols À plus forte teneur (20 à 60 %), ils sont considérés comme
présentent une compatibilité limitée avec les élastomères et les épaississants.

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DÉGRADATION DE SURFACE DES PIÈCES MÉTALLIQUES EN TRAITEMENT THERMIQUE –––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Les graisses contiennent éventuellement de l’eau ou de la glycé- Ces composés sont chimiquement très stables et, en général,
rine pour faciliter la dispersion des autres produits. seul le traitement de décapage permet leur élimination.
On distingue généralement les graisses avec ou sans savon au Ces contaminants peuvent perturber l’adhérence ou fragiliser
lithium, au calcium, à l’aluminium ou au sodium. l’interface d’un revêtement réalisé ultérieurement.

1.2.3 Protections temporaires


1.4 Particules métalliques
Les protections temporaires permettent d’assurer une protection
anticorrosion pendant une période de stockage allant de quelques Cette famille de contaminants est constituée par les copeaux, les
heures à plusieurs mois dépendant des produits utilisés. En effet, limailles et les bavures issus de la mise en forme (usinage,
des huiles riches en additif anticorrosion autorisent une protection découpe, résidus de polissage, de grenaillage ou de sablage) et
de courte durée, alors que l’ajout de cire ou l’emploi de vernis auto- pouvant rester fixés sur la surface de la pièce. Ces éléments peu-
rise une protection de moyenne ou de longue durée. Ces protec- vent compliquer la préparation de surface ultérieure. De plus, par
tions rendent généralement la surface hydrophobe. Les protections la suite, ces particules peuvent se détacher avec, par exemple, les
contenant des cires ou des vernis s’éliminent mal lors d’un dégrais- revêtements de surface qui les recouvrent.
sage ou d’un décapage, ce qui peut compliquer l’opération en ren-
dant par exemple nécessaire l’utilisation d’un moyen mécanique Il faut également noter que, si ces contaminants sont constitués
comme le brossage ou la tribofinition pour obtenir un résultat d’un matériau d’une autre nature chimique, des piles électrochimi-
correct. ques peuvent se former et entraı̂ner une oxydation de la surface.

Les huiles d’arrêt de revenu, qui permettent de refroidir les piè- Lors d’un micro-sablage, des microbilles sont parfois employées
ces après le traitement de revenu (traitement qui après trempe per- sur des matériaux de natures différentes. Les microbilles se recou-
met d’obtenir un compromis entre la résistance mécanique et la vrent de ces matériaux, qui se redéposent ultérieurement sur
tenue au choc), sont généralement des huiles solubles rentrant d’autres pièces microbillées. Cela entraı̂ne la coexistence de maté-
dans cette catégorie. riaux ayant, en présence d’un électrolyte, des potentiels électrochi-
miques différents et donc présentant un risque de corrosion par
couplage galvanique.
1.2.4 Polymères de trempe
Les polymères de trempe sont principalement constitués par les
PolyVinyl-Pyrrolidone (PVP) utilisés surtout dans les trempes dans 1.5 Autres sources de contamination
la masse et les PolyAlkylène Glycol (PAG) trouvant des applications
dans les trempes dans la masse ou après chauffage superficiel. D’autres sources de contamination peuvent avoir une influence
Ces polymères sont liquides à la température ambiante et solubles sur la réalisation des traitements ultérieurs. On peut citer notam-
dans l’eau dans des proportions variables entre 3 % et environ ment les résidus provenant d’un emballage antérieur (huile,
30 %. Avec cette dernière teneur, ils concurrencent les huiles de graisse, résine, polymère…), les peintures, les produits de traçage
trempe. ou les pâtes de protection.
Les solutions de polymères sont de plus en plus utilisées en rem-
placement des huiles de trempe. Ils permettent en effet d’adapter la
vitesse de refroidissement au besoin, en agissant sur la concentra-
tion. Pour les polymères cités, une inversion de solubilité se pro- 2. Préparations de surface
duit au-delà de 70 à 75  C environ. Le polymère devient alors
pâteux (PAG) ou forme un film de polymère solide (PVP) à la sur-
face de la pièce trempée. Ces polymères sont généralement élimi-
nés par rinçage, mais des résidus non éliminés peuvent se consu-
2.1 Dégraissage
mer lors du revenu. Les éléments chimiques présents sont alors le
carbone, l’oxygène et l’hydrogène, auxquels s’ajoute l’azote dans le
Le dégraissage consiste à éliminer les contaminants à base
cas du PVP. La majorité de ces éléments est alors éliminée par for-
d’huile ou de graisse présents à la surface pour lui conférer un
mation d’eau et de monoxyde de carbone.
caractère hydrophile [M 1 450]. Cette opération peut s’effectuer
Les pollutions pouvant entraı̂ner des proliférations de micro- suivant deux principes distincts : le dégraissage au solvant et le
organismes dans les solutions de trempe (bactéries, algues, cham- dégraissage alcalin.
pignons) nécessitent le rajout d’additifs du type bactéricides et
fongicides.
2.1.1 Dégraissage au solvant
1.3 Contaminants minéraux Dans ce cas, l’action solvante de produits chlorés tel que le per-
chloroéthylène permet de dissoudre la majorité des huiles et des
Les principales contaminations minérales sont des oxydes ou graisses. Cependant, dans certains cas, les graisses sont mal élimi-
des hydroxydes issus soit d’un processus d’oxydation électrochi- nées et « sèchent » sur la pièce car l’opération est réalisée à envi-
mique soit de corrosion à chaud. Dans le cas des aciers, il est ron 120  C. Des résidus minéraux (sodium, calcium, oxydes) prove-
donc possible de retrouver, à la surface des pièces, des oxydes de nant d’huiles solubles peuvent également contaminer la surface
fer du type Fe2O3, Fe3O4 ou FeO et des hydroxydes de fer du type après dégraissage. Par contre, les risques de corrosion des pièces
Fe(OH)2 ou Fe(OH)3. sont très faibles, car le solvant n’est pas agressif (si le pH et la
teneur en ions chlorure sont bien controlés) et parce que les pièces
Des résidus de lessives mal rincées ou la présence de résidus ou
sont sèches après dégraissage.
de poussières minérales à base de sodium, calcium et d’oxydes
peuvent être visibles. Les composés permettant d’améliorer le frot- L’utilisation des solvants est désormais fortement réglementée
tement du type bisulfure de molybdène (MoS2) constituent égale- pour limiter leur impact sur l’environnement. Le recours à des ins-
ment des contaminants minéraux. tallations fermées et onéreuses devient une nécessité pour permet-
Lors d’un passage à haute température, la décomposition à tre l’emploi de ces produits.
chaud des contaminants organiques (huiles ou graisses) laisse des Les solvants sont généralement additionnés de stabilisants per-
résidus minéraux formés à partir des éléments chimiques présents mettant d’éviter une acidification rapide, notamment sous l’action
dans la composition des produits initiaux. de l’eau éliminée de la surface des pièces à dégraisser.

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– DÉGRADATION DE SURFACE DES PIÈCES MÉTALLIQUES EN TRAITEMENT THERMIQUE

Des solvants non chlorés comme les solvants A3 sont égale- conformément aux modes opératoires et aux classes indiqués
ment utilisés. Ils sont constitués d’alcools modifiés et d’hydro- dans la norme NF ISO 9588.
carbures, mais ils présentent un point éclair à faible température Les entraı̂nements d’un bain actif à un autre peuvent perturber
et doivent être employés dans certaines limites de températures. l’efficacité d’un process de décapage ou de décalamination. Ils peu-
L’utilisation d’enceintes de dégraissage fermées est nécessaire vent être perturbés, par exemple, par la présence d’inhibiteurs pro-
pour limiter le risque d’incendie. venant d’opérations antérieures.

2.1.2 Dégraissage alcalin


Le dégraissage alcalin est le nettoyage le plus utilisé lors de la
2.3 Exemples de contrôles
fabrication des pièces mécaniques. Dans le cas des aciers, les de la contamination superficielle
milieux de dégraissages les plus utilisés ont un pH supérieur
Il est difficile de formuler des généralités sur le comportement
à 11,5. Le pH élevé de ces bains a de plus une action déphospha-
des contaminants, au cours du processus de fabrication, qui varie
tante. Des dégraissages faiblement basiques (pH < 10) peuvent
d’une pièce à l’autre. Des essais réalisés au CETIM, à l’occasion
être utilisés pour dégraisser les pièces zinguées. Le principe du d’études collectives proposées par des industriels du secteur de la
dégraissage consiste à saponifier les huiles selon la réaction mécanique, permettent cependant d’évoquer certaines des transfor-
suivante : mations subies et la méthodologie de contrôle utilisée.
huile + base → glycérine + savon
2.3.1 Exemple de la dégradation de la surface
Cependant, cette réaction intervient surtout sur les huiles d’ori- d’un fil lors d’un recuit
gine animale ou végétale, mais beaucoup moins sur les huiles Un recuit de recristallisation est réalisé à 700  C pendant 6 h sous
minérales ou synthétiques. Celles-ci sont dorénavant les plus utili- azote sur des pièces en acier doux DC04 polluées par un savon de
sées. Dans ce cas, l’élimination des huiles provient principalement tréfilage (utilisé pour faciliter le passage dans les filières de mise en
de l’action des tensioactifs. forme par laminage). Le savon contient de l’hydroxyde de calcium
Les tensioactifs pénètrent à l’interface entre la pellicule grasse et et 3 à 5 % de bisulfure de molybdène. Il est appelé savon noir par
le métal de base, ce qui permet de décoller des particules de les utilisateurs. Aucun nettoyage n’est pratiqué avant traitement
graisse qui sont finalement émulsionnées dans la solution dégrais- thermique. Pour vérifier les évolutions obtenues au cours du traite-
sante sous forme de micelles. ment, des analyses ont été réalisées au microscope électronique à
balayage (MEB) pour visualiser les dépôts et les analyser à l’aide
Les bains de dégraissage sont principalement constitués de pro- d’un spectromètre dispersif en énergie EDS (§ 4.3.1), pour détermi-
duits alcalins du type soude ou potasse, qui présentent l’avantage ner les éléments chimiques présents à la surface, et en spectromé-
d’une plus grande facilité de rinçage, et de tensioactifs parfois addi- trie à décharge luminescente SDL pour vérifier la possibilité d’une
tionnés de produits relargants et désémulsifiants. diffusion dans le substrat (§ 4.3.2).
Après recuit, on constate la formation d’une croûte épaisse et
2.2 Décapage poreuse visible à la surface de la pièce (figure 1). Cette couche est
adhérente et ne s’élimine que mécaniquement. L’adhérence d’un
revêtement réalisé par la suite sur ce type de résidu sera très
L’opération de décapage ou de décalaminage consiste à élimi- compromise.
ner la contamination minérale, en particulier les couches d’oxy- Des analyses EDS ont été pratiquées sur les zones recouvertes
des présentes à la surface des pièces à traiter. (figure 2) ou non (figure 3) de résidus de savon pour déterminer
son impact sur la surface.
Le décapage est généralement une réaction entre un acide fort et L’analyse comparative des deux spectres indique la présence
la surface à décaper, mais l’opération peut être réalisée aussi par dans les résidus de savon dégradés thermiquement des éléments
voie mécanique ou électrolytique [M 1 455] [M 1 456]. Lors d’une suivants : le calcium (Ca) en quantité importante, mais également
oxydation à chaud, de la calamine se forme. Celle-ci est constituée la présence de sodium (Na), de soufre (S) et d’oxygène (O).
d’un mélange complexe de différents oxydes. La surface des pièces
peut également être recouverte de rouille rouge formée à basse On note la présence, en extrême surface, d’éléments (carbone (C),
température par réaction électrochimique. Cet oxyde est formé soufre (S), oxygène (O), silicium (Si), molybdène (Mo), zinc (Zn), cal-
d’un mélange de Fe2O3.H2O (goethite et lépidocrocite) et de Fe3O4 cium (Ca), sodium (Na) susceptibles de former, d’après les analyses
(magnétite). par spectroscopie de photoélectron de rayons X XPS réalisées
(§ 4.3.4), des composés principalement de type carbonates, mais
L’élimination des oxydes en bain acide peut s’effectuer selon aussi des sulfures, sulfates et, dans une moindre mesure, d’oxydes.
deux manières différentes :
Le pic d’oxygène est de faible intensité. On ne note pas d’oxyda-
– soit par dissolution dans un acide fort selon la réaction : tion importante après recuit des savons. L’oxygène peut provenir
des composants du savon ou d’une faible pression partielle d’oxy-
oxyde + acide → sel + eau (1) gène pendant le recuit.

– soit par attaque de l’acier provoquant un dégagement gazeux Le principal problème rencontré provient de la structure solide et
qui provoque un décollement des couches d’oxyde selon la poreuse formée par le savon dégradé subsistant à la surface et qui
réaction : ne peut s’éliminer que par voie mécanique. L’adhérence d’un revê-
tement réalisé ensuite sur cette couche sera très précaire.
métal + acide → sel + hydrogène (2)
2.3.2 Exemple de décomposition d’huiles lors
Dans le cas d’un acier allié, la calamine contient également des de traitements thermiques de trempe
éléments d’addition qui renforcent sa stabilité et ralentissent le Lorsque le dégraissage avant traitement thermique laisse subsis-
décapage. ter des contaminants, ceux-ci peuvent se décomposer puis diffuser,
Le décapage d’acier à haute résistance à la traction (> 1 000 MPa) entraı̂nant ainsi une dégradation de la surface de la pièce.
peut engendrer une fragilisation par l’hydrogène. Dans ce cas, Des essais ont été menés lors d’une trempe pour évaluer l’impact
le décapage doit être suivi d’un traitement de dégazage, sur la surface.

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M1220

Atmosphères de traitement
thermique

par Patrick COPPIN


Ingénieur de l’École Centrale de Paris
Docteur ès science des Matériaux
Chef de Marché International Métallurgie à L’Air Liquide
Benoît LHOTE
Ingénieur de l’École Centrale de Paris
Responsable du programme Traitement Thermique pour la France à L’Air Liquide
Meryem BUFFIN
Ingénieur Civil en Sciences des Matériaux de l’Université Catholique de Louvain
Ingénieur de Recherche Traitement Thermique au Centre de Recherche Claude Delorme
de L’Air Liquide
Serban CANTACUZÈNE
Ingénieur de l’École Nationale Supérieure d’Électrochimie et d’Électrométallurgie
de Grenoble (ENSEEG)
Docteur ès sciences des Matériaux
Ingénieur de Recherche Traitement Thermique au Centre de Recherche Claude Delorme
de L’Air Liquide

1. Rôle de l’atmosphère .............................................................................. M 1 220 - 2


2. Généralités sur les gaz ........................................................................... — 2
3. Comportement des atmosphères dans les fours ............................ — 6
4. Recommandations de sécurité pour la mise en œuvre des gaz . — 11
5. Générateurs d’atmosphère.................................................................... — 15
6. Atmosphères à base d’azote................................................................. — 20
7. Atmosphères à base d’hydrogène ....................................................... — 23
8. Liquides organiques ................................................................................ — 26
9. Atmosphères basse pression................................................................ — 26
10. Traitements assistés par plasma ou ioniques .................................. — 27
11. Analyse et régulation des atmosphères ............................................ — 28
Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. M 1 220

ujourd’hui, l’utilisation d’atmosphères gazeuses pour le traitement ther-


A mique des métaux est devenue la norme. De plus, les exigences croissan-
tes en terme de qualité et la nécessité de contrôler et de reproduire cette qualité
imposent l’utilisation d’atmosphères de qualité de mieux en mieux élaborées et
régulées.
Cette tendance a pour conséquence la mise sur le marché de nouvelles solu-
tions de fourniture d’atmosphères et de moyens de contrôles : l’atmosphère est
aujourd’hui une composante essentielle du traitement thermique au même titre
que la maîtrise des paramètres thermiques.
Parution : mars 2000

Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite.
© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 1 220 − 1

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M1220

ATMOSPHÈRES DE TRAITEMENT THERMIQUE _______________________________________________________________________________________________

Les atmosphères gazeuses utilisées dans les fours sont généralement consti-
tuées de mélanges de plusieurs gaz (N2, H2, CO, Ar, He) avec des traces d’impu-
retés (O2, H2O, CO2, CH4). Les propriétés globales de ces atmosphères
dépendent des caractéristiques intrinsèques des mélanges unitaires et donc de
la capacité du fournisseur de l’atmosphère d’en assurer la qualité et la reproduc-
tibilité.

1. Rôle de l’atmosphère P

Le rôle de l’atmosphère en traitement thermique est de maîtriser


les caractéristiques physico-chimiques de la surface des pièces trai- Liquide
PC c
tées. Ce rôle dépend du type de traitement choisi ainsi que de l’inter- Solide C
action que l’on souhaite avoir entre le gaz et la surface du métal.

Dans le cas des traitements thermiques destinés à modifier les b


Gaz
propriétés métallurgiques « à cœur » (recuits, revenus, trempes
PT
gazeuses), l’atmosphère doit protéger la surface métallique de toute T
réaction indésirable (telles oxydation, cémentation, décarburation) a
et doit véhiculer la chaleur entre le métal traité et les parties chaudes
(résistances, tubes radiants) et froides (ventilateurs, échangeurs, T
TT TC
chemises d’eau, zones de trempe) du procédé. Les atmosphères uti-
lisées pour ce type de traitements sont soit des atmosphères inertes
Figure 1 – Diagramme d’état d’un corps pur [1]
vis-à-vis du métal traité (N2, Ar, He), soit des atmosphères réductri-
ces (H2, N2 + H2, N2 + hydrocarbure, N2 + H2 + CO).

Dans le cas des traitements thermochimiques destinés à modifier 2.1.1 Diagramme d’état ou diagramme de phases
les propriétés métallurgiques de la surface du métal (cémentation, d’un corps pur
recuit décarburant, nitruration, carbonitruration), l’atmosphère doit
véhiculer et renouveler des espèces qui interagissent chimiquement
avec le métal traité. Les atmosphères utilisées pour ces traitements L’état physique d’un corps pur dépend de la pression et de la tem-
vont contenir des espèces actives, CO et CxHy pour la cémentation, pérature. À chaque corps pur correspond un diagramme d’état [1]
dont la forme générale est représentée à la figure 1.
N2 et NH3 pour la nitruration, CO2 et H2O pour le recuit décarburant.
Le diagramme est divisé en trois domaines correspondant respec-
En dehors de cette segmentation, l’atmosphère peut aussi avoir tivement aux états solide, liquide et gazeux. Ces domaines sont
un rôle dans le dégraissage, le nettoyage ou l’activation de la sur- séparés par des lignes relatives aux conditions de pression et de
face du métal (élimination des contaminants durant le recuit, activa- température pour lesquelles deux phases coexistent. Il s’agit des
tion de la surface de tôle avant galvanisation, préparation de surface courbes de sublimation (a) (phases : solide et gaz), de vaporisation
avant brasage). (b) (phases : liquide et gaz) et de fusion (c) (phases : solide et
liquide). L’ensemble des lignes (a) et (b) est appelé courbe de pres-
sion ou de tension de vapeur.

La courbe de vaporisation s’arrête au point critique (point C), au-


2. Généralités sur les gaz delà duquel il n’est plus possible de distinguer entre les phases
liquide et gazeuse, ce que l’on exprime en disant que le fluide se
trouve dans un état supercritique.

Les trois phases, solide, liquide et gaz, ne peuvent coexister qu’au


2.1 Propriétés physiques des gaz point triple (point T).

Les propriétés physiques des gaz ont fait l’objet de nombreux 2.1.2 Température, pression et volume
ouvrages [1] [2] et, en particulier, l’Encyclopédie des gaz constitue
un exemple très complet [22].
La loi de Charles relie ces trois paramètres suivant l’expression :
Les molécules gazeuses sont continuellement en mouvement ;
pV/T = constante
elles ne se touchent que lors de collisions accidentelles. Les distan-
ces qui les séparent sont généralement très grandes comparées au
avec p pression absolue,
diamètre de ces molécules.
T température thermodynamique (en K),
Les gaz n’ont donc pas de forme propre – ils ont la particularité
d’occuper tout l’espace qui leur est offert – et sont compressibles [1]. V volume d’une masse donnée de gaz.

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Tableau 1 – Propriétés physiques des gaz utilisés dans les atmosphères de traitements thermiques
Gaz Formule Masse molaire Masse volumique (1) Densité relative Conductivité
chimique à l’air (2) thermique (1)
g/mol kg/m3 W/(m · K)
Air ....................................................... .......................... 28,97 1,293 1,000 0,0242
Dioxyde de carbone ........................... CO2 44,02 1,977 1,529 0,0145
Ammoniac .......................................... NH3 17,03 0,771 0,596 0,0221
Argon .................................................. Ar 39,95 1,784 1,380 0,0164
Azote ................................................... N2 28,01 1,250 0,967 0,0242
Butane ................................................ C4H10 58,12 2,76 2,135 0,0136
Hélium ................................................ He 4,00 0,180 0,138 0,142
Hydrogène .......................................... H2 2,02 0,0899 0,070 0,168
Méthane ............................................. CH4 16,04 0,720 0,557 0,0305
Monoxyde de carbone ....................... CO 28,01 1,250 0,967 0,0232
Oxygène ............................................. O2 31,99 1,429 1,105 0,0246
Propane .............................................. C 3 H8 44,1 2,005 1,550
(1) Conditions standards de température (0 ˚C) et de pression 760 mm Hg (760 mm Hg = 1,01325 x 105 Pa = 1,01325 bar).
(2) Rapport de la masse volumique du gaz à la masse volumique de l’air dans les conditions (1).

Tableau 2 – Température critique des gaz permanents


Gaz Tc Gaz Tc

Hydrogène .................. 33,24 K = − 239,91 ˚C Argon .............. 150,86 K = − 122,29 ˚C


Oxygène ..................... 154,576 K = −118,574 ˚C Méthane .......... 190,53 K = − 82,62 ˚C
Azote ........................... 126,20 K = − 146,95 ˚C

Au cours des opérations de traitements thermiques, l’élévation de 2.1.6 Conductivité thermique


température dans les fours augmente les volumes gazeux et la pres-
sion. Les enceintes classiques n’étant pas totalement étanches sont
La conductivité thermique est l’aptitude à transférer de la chaleur
caractérisées par un taux de renouvellement de gaz mesuré à la
lors d’échanges thermiques. Parmi les principaux gaz ou mélanges,
température ambiante ainsi que par un taux de fuite généralement
l’hydrogène et l’hélium possèdent une excellente conductivité ther-
croissant avec la température.
mique (cf. tableau 1).

2.1.3 Diffusion
2.1.7 Application du diagramme d’état :
La diffusion des gaz sans réaction chimique caractérise, avec la
conditionnement des gaz
convection et le brassage, la manière dont s’effectue le mélange de
deux ou plusieurs espèces gazeuses : mélange homogène ou non. Les gaz sont généralement comprimés ou liquéfiés avant stoc-
kage, de façon à réduire leur encombrement [1].
Ainsi que le montre le diagramme d’état (figure 1), un gaz ne peut
2.1.4 Viscosité être liquéfié ou conservé sous forme liquide qu’à des températures
inférieures à sa température critique. C’est la raison pour laquelle on
La viscosité des gaz ou des liquides définit leur mobilité. À volume distingue les gaz permanents des gaz condensables, selon que leur
constant, la température croissante élève la viscosité des gaz et température critique est inférieure ou supérieure à la température
diminue celle des liquides. ambiante.

2.1.5 Densité 2.1.7.1 Gaz permanents


Les gaz, dont la température critique est inférieure à la tempéra-
La masse volumique d’un gaz est la masse par unité de volume. ture ambiante (tableau 2), sont appelés gaz permanents, car ils ne
La densité relative à l’air est exprimée dans le tableau 1. L’hydro- peuvent pas être liquéfiés par une simple compression. Il s’agit
gène et l’hélium sont des gaz plus légers que l’air, en revanche, le notamment de l’hydrogène, de l’oxygène, de l’azote, de l’argon et
propane et le butane sont des gaz plus lourds que l’air. du méthane.

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Tableau 3 – Température critique des gaz condensables


P = 200 bar
Gaz Tc
P Ammoniac .................................... 405,55 K = 132,4 ˚C
Propane ........................................ 369,82 K = 96,67 ˚C
200 bar Butane .......................................... 425,18 K = 152,03 ˚C

C
Ta

P = pX*(Ta)

Ta T
Ta température ambiante C
p* (Ta)
Té température d'ébullition
Pa pression atmosphérique
Ta
a conditionnement sous forme comprimée

Ta T

Figure 3 – Conditionnement des gaz dont la température critique


est supérieure à la température ambiante Ta [1]
P = p* (T )
N2

2.1.7.2 Gaz condensables


P
Les gaz dont la température critique est supérieure à la tempéra-
ture ambiante sont appelés gaz condensables (tableau 3). Ces gaz
peuvent en effet être liquéfiés par simple compression et le liquide
C conservé dans des récipients dépourvus d’isolation thermique. Il
s’agit par exemple de l’ammoniac, du propane et du butane. Les
Pa récipients de stockage sont des cylindres ou des citernes métalli-
T ques dans lesquels le liquide est en équilibre avec la vapeur qui
remplit l’espace mort. Le liquide et la vapeur sont à la température
Té Ta T ambiante Ta ; la pression à l’intérieur du récipient est égale à la ten-
sion de vapeur p*(Ta) du liquide (voir figure 3).

b conditionnement sous forme liquide 2.2 Propriétés chimiques des gaz

Figure 2 – Conditionnement des gaz permanents [1] La réactivité chimique des gaz dépend essentiellement de leur
température et de leur pression partielle. Les gaz sont oxydants et
décarburants tels l’oxygène, le dioxyde de carbone et la vapeur
d’eau, réducteurs tels l’hydrogène et le monoxyde de carbone, car-
Ces gaz sont généralement comprimés à environ 200 bar et livrés burants tels le monoxyde de carbone et les hydrocarbures
sous cette pression dans des cylindres métalliques (voir figure 2 a). (méthane, propane, butane, gaz naturels) et enfin nitrurants tel
l’ammoniac. Le tableau 4 rassemble les principales réactivités chi-
Exemple : une quantité d’azote qui occupe un volume de 1 000 L à miques des gaz vis-à-vis des métaux et des alliages utilisés en trai-
température ambiante et à pression atmosphérique, n’occupe plus que tement thermique.
5,2 L lorsqu’elle est comprimée à 200 bar.

Lorsqu’ils sont destinés à des applications spéciales, ou si leur 2.2.1 Azote


consommation est particulièrement élevée, les gaz permanents sont
stockés sous forme liquide. Ces gaz ne peuvent toutefois être liqué-
fiés qu’après avoir été refroidis à une température inférieure à leur L’azote moléculaire est un gaz neutre et inerte vis-à-vis de nom-
température critique. Le liquide est conservé dans des récipients breux métaux, en particulier des aciers doux à bas carbone. L’azote
isolés thermiquement dans lesquels la pression est généralement pur et sec est une excellente atmosphère de protection contre l’oxy-
maintenue entre 6 et 10 bar (voir figure 2 b). dation. Toutefois, la présence de vapeur d’eau transforme ce milieu
neutre en atmosphère oxydante ou décarburante pour les aciers à
haut carbone ou les aciers alliés. L’azote atomique (engendré aux
Exemple : une quantité d’azote qui occupe un volume de 1 000 L à températures classiques de traitement thermique) n’est pas une
température ambiante et à pression atmosphérique n’occupe plus atmosphère protectrice ; il se combine avec le fer pour former des
qu’un volume de 1,4 L à l’état liquide. nitrures finement divisés qui augmentent la dureté de surface [2].

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Tableau 4 – Principales réactivités chimiques gaz/métal


Composants gazeux de l’atmosphère
Métaux CH4 ou
O2 CO CO2 H2 H2O (vapeur) NH3 N2 Ar, He
C3 H8

Aciers Oxydant et Réducteur Oxydant Réducteur Oxydant et Carburant Nitrurant Neutre Inerte
au carbone ................. décarburant et carburant et décarburant décarburant
Aciers inoxydables Oxydant Réducteur Oxydant Réducteur Oxydant Carburant Nitrurant Neutre Inerte
et superalliages ......... et carburant et décarburant
Fontes ......................... Oxydant et Réducteur Oxydant Réducteur Oxydant et Carburant Nitrurant Neutre Inerte
décarburant et décarburant décarburant
Aluminium Oxydant Neutre Oxydant (1) Oxydant (1) (1) Neutre Inerte
et alliages ...................
Cuivre et alliages ....... Oxydant Réducteur Oxydant Réducteur Neutre (1) (1) Neutre Inerte
Titane et alliages ........ Oxydant (1) Oxydant (1) Oxydant (1) Nitrurant Nitrurant Inerte
(t > 1 000 ˚C
(1) Atmosphère généralement non compatible pour les traitements thermiques avec le métal cité, compte tenu des réactions chimiques non désirées.

2.2.2 Oxygène Les réactions d’oxydation du fer sont :

L’oxygène moléculaire, gaz oxydant pour les métaux, conduit à la Fe + CO 2 !FeO + CO


formation de couches superficielles d’oxydes. À température éle-
vée, les aciers se recouvrent d’une couche épaisse d’oxyde appelée 3FeO + CO 2 !Fe 3 O 4 + CO
calamine. De plus, les aciers au carbone sont décarburés superficiel-
lement par réaction de l’oxygène sur le carbone du métal, avec for- Le diagramme d’équilibre Fe-FeO-Fe3O4 dans une atmosphère
mation de monoxyde de carbone. CO + CO2, en fonction de la température, est représenté à la
figure 4.
2.2.3 Air
L’air est un mélange gazeux contenant, en volume, environ 78 % 2.2.6 Hydrogène
d’azote et 21 % d’oxygène. Il comporte moins de 1 % d’argon et des
traces de dioxyde de carbone. L’air a une réactivité chimique voisine
de celle de l’oxygène, à savoir oxydante et décarburante. L’air est un L’hydrogène sec est un gaz de protection très réducteur à partir de
gaz très souvent présent dans les fours soit volontairement, soit 300 ˚C. En particulier, il réduit la plupart des oxydes métalliques en
plus généralement sous forme d’entrées d’air. Il intervient aussi métaux. L’hydrogène humide peut être décarburant selon la tempé-
dans la préparation des gaz de générateurs d’atmosphère endother- rature du four, le temps de maintien en température, la quantité de
miques et exothermiques. vapeur d’eau dans le four et la teneur en carbone dans l’acier. L’effet
décarburant de l’hydrogène est négligeable en dessous de 700 ˚C.
La vapeur d’eau augmente l’effet décarburant de l’hydrogène car
2.2.4 Monoxyde de carbone elle se dissocie, donnant lieu à de l’hydrogène et de l’oxygène nais-
sants. L’hydrogène réagit avec le carbone dans l’acier pour former
Le monoxyde de carbone est un gaz réducteur et carburant. Il joue du méthane :
un rôle important dans les réactions de cémentation des aciers pour
le transfert du carbone en surface : ( C ) + 4H !CH 4
2CO! ( C ) + CO 2
L’oxygène réagit avec le carbone dans l’acier pour former du
monoxyde de carbone :
CO + H 2 ! ( C ) + H 2 O
( C ) + O !CO
(C) représente le carbone dissous dans l’austénite (solution solide
de carbone dans le fer γ).
L’hydrogène à très bas point de rosée peut également avoir un
effet décarburant sur les aciers au carbone. En effet, ce gaz – même
s’il n’est pas dans des conditions naissantes – peut réagir avec le
2.2.5 Dioxyde de carbone carbone selon la réaction suivante :

( C ) + 2H 2 !CH 4
Le dioxyde de carbone est un gaz oxydant et décarburant. Aux
températures d’austénitisation, il réagit avec le carbone de surface Le pouvoir décarburant de l’hydrogène – qu’il soit ou non naissant
pour produire du monoxyde de carbone : – est donc fortement influencé par la teneur en carbone de l’acier et
on peut s’attendre à ce qu’il augmente directement avec la teneur en
( C ) + CO 2 !2CO carbone [2].

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2.2.8 Hydrocarbures
2
pCO
2
pCO Les principaux hydrocarbures utilisés sont le méthane, le propane
Fe3O4 et le butane. Le gaz naturel contient une grande proportion de
1,5 méthane, de 80 à 95 % en volume environ. Il existe plusieurs varié-
tés de gaz naturels selon les pays et les importations. Le propane et
le butane sont des gaz de pétrole liquéfiés (GPL), ils sont stockés
FeO
sous forme liquide et utilisés sous forme gazeuse. Les gaz naturels,
1 les propanes et les butanes n’ont pas toujours une même composi-
tion chimique définie, sachant qu’ils sont surtout utilisés comme
Fe combustibles et que, à ce titre, seul leur pouvoir calorifique inférieur
(PCI) est bien déterminé ou ajusté. Ils peuvent par conséquent con-
0,5
tenir des impuretés à teneur variable. Le soufre est un exemple
d’impureté qui est très néfaste notamment pour le catalyseur des
générateurs endothermiques : celui-ci est progressivement empoi-
0 sonné par le soufre pendant le fonctionnement du générateur. On
400 600 800 1 000 retrouve également des alcènes (éthylène, propylène...) comme
Température (°C) autres types d’impuretés. Celles-ci sont parfois à l’origine de dépôts
noirâtres sur le moufle et les résistances des fours de traitement
Figure 4 – Diagramme d’équilibre Fe-FeO-Fe3O4 en présence thermique.
d’une atmosphère CO + CO2 en fonction de la température Ces gaz servent pour la génération des atmosphères et comme
gaz additionnels pour la cémentation des aciers. La réactivité chimi-
que de ces gaz avec la surface de l’acier dépend de leur décomposi-
tion thermique et de leur tendance à former du carbone naissant à
1,25 la surface de l’acier, ainsi que de la température du four et de la
pH O charge. Le propane et le butane, par exemple, réduisent la vapeur
2
pH
2
d’eau et le dioxyde de carbone aux températures supérieures à
750 ˚C.
1
La décomposition thermique donne lieu à la formation de suie en
Fe3O4 quantité proportionnelle au nombre d’atomes de carbone dans
l’hydrocarbure ; ainsi, le butane et le propane sont supposés former
0,75 plus de suie que le méthane [2].
FeO
2.2.9 Ammoniac
0,5

Fe L’ammoniac est stocké en phase liquide et employé sous forme


gazeuse. Il est utilisé pour générer des atmosphères de protection
0,25 par craquage, pour la nitruration et la nitrocarburation gazeuses, et
comme gaz additionnel pour la carbonitruration.

0 2.2.10 Gaz inertes


400 600 800 1 000
Température (°C)
L’hélium et l’argon sont deux gaz inertes à toutes températures.
Figure 5 – Diagramme d’équilibre Fe-FeO-Fe3O4 en présence L’argon est produit par distillation fractionnée de l’air liquide à l’aide
d’une atmosphère H2 + H2O en fonction de la température d’une colonne supplémentaire de rectification. L’hélium, plus cher
que l’argon, est issu des sources de gaz naturel et séparé par cryo-
génie. Les sources d’hélium sont limitées : États-Unis, Algérie, Mexi-
que et Europe de l’Est.
2.2.7 Vapeur d’eau
Ces gaz inertes sont utilisés pour le traitement des métaux très
oxydables, tels que le titane et ses alliages, certains aciers inoxyda-
La vapeur d’eau est oxydante et décarburante. L’oxydation du fer bles ou spéciaux. Les alliages de titane notamment, ne pouvant être
s’effectue suivant des réactions symétriques de celles du CO2 : traités dans des atmosphères contenant de l’hydrogène ou de
l’azote, le sont sous atmosphère d’argon pur et sec.
Fe + H 2 O ! FeO + H 2

3FeO + H 2 O ! Fe 3 O 4 + H 2

Le diagramme d’équilibre Fe-FeO-Fe3O4 dans une atmosphère 3. Comportement


H2 + H2O, en fonction de la température, est représenté à la figure 5. des atmosphères
La réaction de décarburation des aciers est du type :
dans les fours
( C ) + H 2 O !CO + H 2

Pour les aciers au carbone, la thermodynamique définit une apti- L’atmosphère mélangée ou préparée, voire épurée, est ensuite
tude à l’oxydation plus grande, pour une atmosphère donnée, lors- introduite dans le four en contact avec le métal. L’ensemble atmos-
que la température diminue. Ceci est la principale cause du phère-four-métal est régi par la thermique, les aspects chimiques
« bleuissement » durant les cycles de refroidissement [2]. ainsi que la mécanique des fluides.

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3.1 Aspects thermiques Les alliages légers, qui possèdent de faibles émissivités, nécessi-
tent un chauffage jusqu’à des températures assez basses qui peu-
vent facilement être atteintes par convection. Les métaux plus
3.1.1 Rappel sur les modes de transfert de chaleur lourds, qui requièrent un chauffage jusqu’à des températures beau-
coup plus élevées, ont des émissivités élevées ; ainsi ils peuvent
être chauffés par radiation, puisque la recirculation des gaz devient
3.1.1.1 Conduction moins efficace au-delà de 700 ˚C.
La conduction [5] est un transfert d’énergie thermique qui s’effec- Exemple : considérons :
tue spontanément d’un point à un autre, sous la dépendance de la
répartition des températures en fonction du temps et de l’espace. Le — un four dans lequel le rayonnement est le principal moyen de
transfert de chaleur représente, dans ce cas, l’effet global du trans- transfert de chaleur, ce qui correspond à un four de traitement thermi-
port d’énergie thermique sous l’influence du gradient de tempéra- que d’acier ayant une émissivité de 0,8 ;
ture. — un four de convection correspondant à un four de recuit d’alumi-
nium possédant une émissivité 0,05.
Au cours d’un traitement thermique, la conduction est le principal Dans le premier cas, même à 300 ˚C, le rayonnement transfère plus
mode de transfert de chaleur lorsque l’épaisseur de gaz entre deux de deux fois la quantité de chaleur transférée par convection et, à
parois solides est très faible, comme par exemple lors du recuit 750 ˚C, ce rapport est de 10 : 1. Dans le deuxième cas, au contraire, la
d’une bobine d’acier. convection transfère dix fois plus de chaleur que le rayonnement à
300 ˚C, tandis qu’à 750 ˚C, la convection est encore plus de deux fois
3.1.1.2 Convection efficace que le rayonnement.
La convection thermique [5] [6] est un transfert de chaleur par rap- La quantité réelle de chaleur transférée dans chaque cas est diffé-
port à un repère donné, qui résulte d’un transfert macroscopique de rente, et il serait impossible de transférer par convection à 750 ˚C la
masse dans un milieu anisotherme. Ce transfert de chaleur s’effec- quantité de chaleur transférée par rayonnement à une surface ayant
tue à une paroi, généralement entre un solide et un fluide. une émissivité de 0,8. Cela prend en effet aussi longtemps, si ce n’est
plus, de chauffer de l’aluminium à 550 ˚C que de chauffer de l’acier de
Ainsi quand un fluide et un solide de températures différentes
même épaisseur jusqu’à 1 250 ˚C.
sont en contact, il se produit un échange de chaleur. La variation de
température du fluide est accompagnée par un changement de den-
sité, ce qui provoque des mouvements du fluide. Des courants de
flux s’établissent et il se produit alors une convection naturelle. 3.1.2 Type de chauffage de four
Lorsque le fluide est agité mécaniquement sur la surface du
solide, le transfert de chaleur est beaucoup plus grand, et le phéno- Les trois catégories de chauffage sont le chauffage direct au gaz
mène est connu sous le nom de convection forcée. ou électrique, le chauffage indirect et le chauffage par conduction.

3.1.1.3 Rayonnement
3.1.2.1 Chauffage direct au gaz
Le rayonnement [5] [6] est le seul mode de transfert thermique
qui, contrairement à la conduction ou à la convection, ne nécessite Les fumées des brûleurs aérocombustibles constituent l’atmos-
pas la présence d’un support matériel solide ou fluide. phère gazeuse en chauffage direct. Cette atmosphère comprend de
Le phénomène physique est le suivant : les atomes, les molécules l’azote, du dioxyde de carbone, de la vapeur d’eau et des traces de
et les électrons libres perdent une partie de l’énergie cinétique par monoxyde de carbone et d’hydrogène ou d’oxygène, suivant le
émission d’un rayonnement électromagnétique ; ce dernier étant réglage de la flamme. Toutefois, ces fumées sont oxydantes et
absorbé ou réfléchi par le récepteur, ce qui se traduit sous forme de décarburantes pour les aciers au carbone. Certains traitements sont
chaleur. néanmoins effectués dans cette ambiance, dans la mesure où une
oxydation, voire une calamine épaisse, n’est pas rédhibitoire. La for-
Chaque surface possède sa propre émissivité, qui est la capacité mation de cette calamine dépend de la température, du temps de
à absorber ou à émettre de la chaleur. L’émissivité d’une surface par- traitement, ainsi que du mode de fonctionnement des brûleurs et
faite est de 1. Le briquetage d’un four et l’acier oxydé ont des émis- des entrées d’air du four.
sivités d’environ 0,8. Les surfaces brillantes, telles que l’aluminium,
peuvent avoir des émissivités de valeurs inférieures à 0,1, et cette
valeur peut changer par oxydation ou toute autre réaction chimique 3.1.2.2 Chauffage direct électrique
durant le traitement thermique.
(On pourra se reporter aux articles [A 1 520] Rayonnement thermi- Le chauffage direct électrique constitue une amélioration, compte
que des matériaux opaques et [BE 8 842] Fours industriels dans le tenu de la séparation partielle de l’atmosphère et du mode de chauf-
traité Génie énergétique.) fage. En effet, dans ce type de four, l’atmosphère injectée peut être
neutre, réductrice ou carburante. Toutefois, le type de résistance
Le rayonnement de chaleur ϕ entre deux surfaces varie, en fai- électrique doit être adapté aux températures d’utilisation et à la spé-
sant certaines approximations, comme la différence de la quatrième cificité de l’atmosphère (tableau 5).
puissance de leurs températures absolues :
Exemple : les résistances contenant du chrome sont recouver-
ϕ = Kσ [ T 4 Ð T 04 ] tes naturellement d’une couche d’oxydes de chrome isolant la résis-
tance. Elles sont utilisables en atmosphères oxydantes, neutres ou
avec K facteur tenant compte de la géométrie et des légèrement réductrices, mais non en atmosphères carburantes ou très
caractéristiques radiatives, réductrices. Les cycles oxydation-réduction sont très néfastes pour la
σ constante de Stefan-Boltzmann. tenue et la durée de vie de ces résistances.
Cela signifie que lorsque la température s’élève, l’effet de chaque
degré de différence de température entre les deux surfaces a un 3.1.2.3 Chauffage indirect
effet de plus en plus grand sur le rayonnement. Ainsi, lorsqu’un four
est chauffé principalement par rayonnement, une très légère aug- Le chauffage indirect par tube radiant ou par résistance électrique
mentation de la température du four peut avoir un très grand effet est la seule solution permettant une totale indépendance de
sur la vitesse de chauffage. l’atmosphère contrôlée vis-à-vis du mode de chauffage.

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BM5190

Pièces mécaniques soudées


Contraintes résiduelles induites et
traitements applicables

par Alain MICHEL


Ingénieur CNAM et ESSA
Expert, chargé de cours
Institut de Soudure Industrie, Villepinte France
École supérieure du soudage et de ses applications, Yutz, France

1. État des assemblages après l’opération de soudage ............... BM 5 190v3 – 2


1.1 Rappel sur les effets du cycle thermique vis-à-vis du matériau ....... — 2
1.2 Rappel sur la genèse des contraintes résiduelles ............................. — 4
1.3 Contraintes et déformations résiduelles générées par le soudage .. — 8
1.4 Opportunité de la relaxation des contraintes .................................... — 12
2. Traitements thermiques sur les ensembles soudés ................. — 13
2.1 Traitements en vue de rétablir les propriétés normatives garanties
des aciers ............................................................................................ — 13
2.2 Traitement thermique de relaxation des aciers ................................. — 13
2.3 Traitement thermique après soudage des aciers non austénitiques — 15
2.4 Traitement thermique de relaxation des structures soudées
en alliages d’aluminium..................................................................... — 16
2.5 Soudage temper bead : une alternative au traitement
d’adoucissement ................................................................................ — 16
3. Traitements mécaniques sur les ensembles soudés ................ — 17
3.1 Martelage en cours de soudage ........................................................ — 17
3.2 Relaxation mécanique par étirage ..................................................... — 17
3.3 Relaxation mécanique par vibrations ................................................ — 18
4. Traitements thermomécaniques sur les ensembles soudés ... — 18
4.1 Redressage par chaude de retrait ...................................................... — 18
4.2 Relaxation thermomécanique (méthode Linde) ................................ — 19
5. Traitements locaux de parachèvement des assemblages
soudés ............................................................................................... — 20
5.1 Rôle des traitements de parachèvement – Régions concernées ...... — 20
5.2 Arasage des surépaisseurs et meulage des raccordements............. — 20
5.3 Refusion par procédé TIG (141) du pied de cordon d’angle ............. — 20
5.4 Grenaillage de précontrainte ............................................................. — 21
5.5 Martelage par ultrasons du pied de cordon ...................................... — 21
6. Conclusion........................................................................................ — 21
7. Glossaire ........................................................................................... — 22
8. Sigles et symboles .......................................................................... — 22
Pour en savoir plus..................................................................................Doc. BM 5 190v3

ien que le soudage par fusion puisse constituer à l’heure actuelle une
B technique d’assemblage très performante des métaux et alliages dans
Parution : décembre 2018

le domaine de la construction mécanique, il n’en demeure pas moins que


celui-ci donne lieu à des modifications locales, sur le plan géométrique,

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PIÈCES MÉCANIQUES SOUDÉES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

structural (constituants métallurgiques) et physique (équilibre élastique


interne), qui sont telles qu’à l’état « brut de soudage », certains assemblages
soudés ne peuvent bénéficier pleinement des performances mécaniques et
chimiques élevées conférées au matériau de base à l’issue de son élaboration.
Il devient nécessaire en conséquence, soit de faire appel en cours de soudage à
des procédures particulières de dépôts qui permettent de minimiser l’impact
des cycles thermiques, soit de soumettre la structure en fin de fabrication à
divers traitements ou parachèvements thermiques ou mécaniques qui permet-
tent de restaurer tout ou partie des caractéristiques mécaniques affectées par
l’opération de soudage.
Après un rappel indispensable définissant les modifications potentiellement
observables sur le plan des caractéristiques mécaniques de la structure, de la
géométrie et de l’équilibre interne dans les joints soudés, l’article décrit les
effets des divers traitements thermiques, mécaniques et parachèvements
locaux mis en œuvre dans le but d’améliorer les performances des construc-
tions soudées vis-à-vis des divers mécanismes de défaillance auxquelles elles
peuvent être confrontées tout au long de leur fonctionnement.
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire et un tableau des sigles et
symboles utilisés.

relation avec la vitesse de refroidissement de la ZF, laquelle dépend


1. État des assemblages de certains paramètres du MOS tels que :
après l’opération – le procédé ;
– la position de soudage ;
de soudage – la technique de dépôt : mono ou multi-passes et, dans le cas de
ce dernier paramètre, la disposition des dépôts dans le chanfrein
qui peut être de nature à multiplier ou non les régions dans les-
quelles a lieu la régénération des grains sous-jacents lors du chan-
1.1 Rappel sur les effets du cycle gement de phase au chauffage (figure 1).
thermique vis-à-vis du matériau D’une manière générale, le problème essentiel posé par la pré-
sence d’une structure de solidification grossière demeure la téna-
1.1.1 Cas des aciers non alliés et non trempants cité de cette région (ZF et ZL), qui est normalement vérifiée au
Il s’agit des aciers relevant des sous-groupes 1-1 et 2-1 présentés stade de la QMOS à l’aide d’essais mécaniques de flexion par
dans l’article [BM 5 188] (tableau 1), sur lesquels la teneur en C et Mn choc sur éprouvettes entaillées ou d’essais MR spécifiques.
est insuffisante pour que les effets du cycle thermique de soudage Il convient de préciser que certains procédés de soudage suscep-
([BM 5 185], §1.2.1), se traduisent par des modifications significatives tibles d’opérer en mono-passe sur pièces épaisses (121, 71, 73, 74
des propriétés mécaniques dans la ZAT (Zone Affectée et en particulier 72) font apparaı̂tre une fragilité inacceptable à l’état
Thermiquement). brut de soudage, ce qui nécessite en principe la réalisation d’une
gamme de Traitement Thermique Après Soudage (TTAS) fasti-
& Zone fondue (ZF) et zone de liaison (ZL) dieuse, comportant dans certains cas une double normalisation
C’est dans cette zone facilement identifiable à l’aide d’un examen afin de conférer à la structure une ténacité convenable à la tempé-
macrographique, qu’un abaissement de ductilité peut apparaı̂tre en rature de fonctionnement.
raison de la création d’une structure de solidification. Cette der- Nota : la classification et la symbolisation des procédés de soudage sont définies dans
nière comporte des grains de taille plus ou moins grossière, en l’article ([BM 5 185], tableau 1).

Zone de liaison

Isotherme Ac3

Éprouvette de
flexion par choc

a mono-passe : aucune régénération b multi-passes alignées : c multi-passes décroisées :


régénération entre passe régénération multiple

Figure 1 – Amélioration de la ductilité de la zone fondue au moyen de la technique de dépôt

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– PIÈCES MÉCANIQUES SOUDÉES

& Zone affectée thermiquement


Sauf situation exceptionnelle de pièces très épaisses soudées à
l’aide d’un MOS mettant en œuvre une faible énergie linéique de H T
soudage, la création d’une structure martensitique sous cordon
est peu probable.
D’un autre côté, et dans le cas de pièces en aciers non calmés et
mises en forme par déformation plastique à température ambiante, Ac3
il y a lieu de craindre un vieillissement accéléré au voisinage des
liaisons soudées dont la fragilité réversible peut être éliminée par
un TTAS de restauration ou à défaut de relaxation tel que défini H = f (y)
au § 2.2.
Tmax = g (y)

1.1.2 Cas des aciers non alliés ou alliés trempants


martensitiques
y
Il s’agit ici des aciers appartenant aux groupes autres que 1-1,
2-1, 7-3, 8-1, 9 et 10 ([BM 5 188], tableau 1).
zone durcie H dureté HV
Les effets du cycle thermique sur la structure de la ZF et de la ZL
sont en tout point semblables à ce qui a été dit au § 1.1.1 et il n’y a a cas des aciers non alliés
pas lieu d’y revenir. trempants à l’état N

En ce qui concerne la ZAT, le cycle thermique est à l’origine des


deux modifications notables suivantes. H T

& Durcissement martensitique (ou bainito-martensitique) sous


cordon
H = f (y)
La figure 2a représente le durcissement localisé sous cordon, qui
est en principe quasi systématique dans la ZAT d’une liaison soudée Ac3
mono-passe sur acier trempant à l’état N. L’amplitude du pic de Ac1
dureté est principalement fonction de la teneur en carbone de TRv
l’acier, la largeur de la bande durcie dépendant, de son côté, de Tmax = g (y)
l’énergie linéique mise en jeu par le dépôt. Il est important de
noter, qu’à l’inverse des aciers C-Mn (groupes 1-2, 1-3, 2-2 et 2-3
entre autres) pour lesquels il est fréquemment possible d’éviter
une transformation martensitique totale grâce à une énergie de sou- y
dage suffisante (qui délivrerait un temps de refroidissement tr8-5
supérieur à la valeur critique observable sur le diagramme TRCS),
les aciers alliés très souvent autotrempants (groupes 3-2, 3-3, 5, zone adoucie zone durcie
7-2, 7-3, 8-2, 8-3, et certains aciers des groupes 11-1 et 11-2) ne peu-
vent bénéficier de cet avantage et il y a lieu au contraire de limiter b cas des aciers alliés trempants
à l’état Q + T
l’énergie afin de limiter l’étendue de la région durcie et fragile.
Le contrôle de l’énergie de soudage débouche à l’évidence dans le Tmax : enveloppe des températures maximales
cas de joints épais sur la notion de dépôts multi-passes qui sont à atteintes lors du cycle
même de générer localement dans la ZAT un traitement naturel
local de revenu (technique « temper bead » décrite au § 2.5).
Comme précisé dans l’article ([BM 5187], §1.2.4), le critère de
Figure 2 – Effet du cycle thermique de soudage – Températures
dureté sous cordon est à considérer (tout comme celui de l’épais- maximales atteintes lors du cycle et évolution transversale de la
seur, celui de la concentration en martensite sous cordon et celui dureté
du chargement en hydrogène) dans la justification de la réalisation
d’un TTAS de revenu/relaxation dont il convient de rappeler que le
rôle est double : Le TTAS d’adoucissement/relaxation doit être réalisé selon les
modalités définies au § 2.3.
– garantir l’adoucissement des régions martensitiques de la ZAT
restées en l’état ; & Adoucissement local par sur-revenu des aciers soudés à l’état
– permettre un abaissement significatif des contraintes résiduel- trempé et revenu
les de traction générées dans la zone plastifiée par l’opération de
soudage (§ 1.3). La figure 2b représente l’abaissement local de dureté observable
entre les isothermes TRv et Ac1 de la ZAT. Très fréquemment, la
Dans le cas de constructions épaisses ( t ≥ 12 mm par exemple) différence entre les températures de transformation (Ac1) et de
assemblées en multi-passes, le critère de dureté susceptible de revenu (TRv) n’excède guère 120  C, et la largeur de la région adou-
prescrire le TTAS de revenu pourrait être estimé autour de cie peut être minimisée par une technique multi-passes avec apport
380 HV10. Ce critère se doit d’être modulé en fonction des variables calorifique contrôlé pour chaque dépôt, ce qui permet en principe
suivantes : à la ZAT de ne pas constituer un point faible en traction transver-
– épaisseur : les faibles épaisseurs ( t ≥ 6 mm par exemple) peu- sale à l’ultime. Il convient de noter à ce sujet, que le soudage à
vent accepter un critère 420 HV10 ; l’arc de structures très minces ( e ≤ 4 mm environ) ne peut avoir
– technique de dépôt : le critère doit être abaissé à 340 HV10 pour lieu qu’en mono-passe et que dès lors les conditions énergétiques
les joints épais mono- ou bipasses ; se soldent par une répartition spatiale Tmax = g(y) aplatie, condui-
– chargement en hydrogène : les MOS non susceptibles d’intro- sant dès lors à un élargissement de la région adoucie et, in fine, à
duire de l’hydrogène dans la ZF peuvent accepter un relèvement une diminution sensible de la résistance transversale intrinsèque
du critère (30 à 40 HV10 par exemple). de l’assemblage.

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PIÈCES MÉCANIQUES SOUDÉES ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––

Le traitement approprié en vue d’effacer la zone d’adoucissement Le martelage à coup portant effectué sur joints bout à bout, sou-
par sur-revenu des pièces très minces soudées à l’état traité dés puis arasés de tôles minces écrouies en aluminium ou en cui-
demeure finalement le traitement thermique de référence (Q + T) vre, constitue l’illustration artisanale qualitative du but recherché.
qui pose par ailleurs les délicats et insolubles problèmes :
– de la stabilité dimensionnelle de la structure lors de l’austéniti-
sation précédant la trempe ; 1.2 Rappel sur la genèse des contraintes
– des déformations et contraintes résiduelles (génératrices de fis- résiduelles
sures voire de rupture) créées lors de la trempe.
1.2.1 Contraintes résiduelles générées
Il résulte en pratique que la réalisation d’un traitement de trempe
et revenu après soudage ne peut s’appliquer valablement que sur
par plasticité de déformation mécanique
de petites pièces compactes et exemptes de discontinuités, sur les- La mise en forme par déformation plastique (pliage, cintrage ou
quelles l’hétérogénéité des champs de températures peut être limi- emboutissage) d’un matériau fait apparaı̂tre (figure 4a, 4b, 4c), en
tée lors du refroidissement qui accompagne la trempe. fin du retour élastique qui accompagne la cessation de l’effort
(ou de la déformation), un système de Contraintes Résiduelles
1.1.3 Cas des aciers inoxydables austénitiques (CR) dont la répartition dans l’épaisseur dépend de la loi de com-
portement élastoplastique du matériau à la température de mise
Ainsi que précise l’article ([BM 5187], §1.3.6.4), les problèmes en forme. Le comportement élastoplastique parfait donne lieu
provoqués par le(s) cycle(s) thermique(s) de soudage appliqué(s) après retour élastique à un système de CR tel qu’illustré par la
sur certaines nuances (précipitations de carbures, formation de figure 4c. Il y a lieu d’observer que les fibres plastifiées les plus
phase sigma, mise en solution de carbures de Ti) devraient néces- déformées lors de la mise en forme se trouvent être le siège,
siter en toute rigueur la réalisation de TTAS à haute température, après retour élastique, d’une CR de signe opposé à celle ayant pro-
tels que hypertrempe après mise en solution ou au contraire trai- voqué la plastification, démontrant en cela que les surfaces intra-
tement de précipitation (TiC, NbC), qui présentent à l’évidence des dos des tôles pliées, cintrées ou embouties sont en principe ten-
risques semblables à ceux exposés au § 1.1.2 sur le plan de la dues après formage.
déformation de la construction et des contraintes résiduelles qui
en résultent.
H T

1.1.4 Cas des métaux et alliages durcis


par écrouissage H = f (y)

Dans cette catégorie, entrent certaines nuances d’aciers (non alliés


groupe 1, inoxydables austénitiques groupe 9) et d’alliages d’alumi-
nium de corroyage du groupe 11, sur lesquelles le cycle thermique
Trec
de soudage se traduit par la création d’une zone affectée dont la
largeur est en relation avec l’isotherme de recristallisation (Trec) et Tmax = g (y)
dans laquelle le matériau a retrouvé les caractéristiques mécaniques
de l’état d’adoucissement maximal (figure 3).
Dans ces conditions, le seul traitement susceptible de rétablir le y
durcissement initial dans la zone affectée demeure l’écrouissage
localisé de tout le volume adouci, dont la mise en œuvre ne serait
envisageable que dans le cas d’assemblages de géométrie simple, zone adoucie
(bout à bout) soumis à un étirage mécanique contrôlé (déformation
imposée) dans un gabarit de conformation. De toute évidence, la Figure 3 – Effet du cycle thermique de soudage – Répartition
déformation plastique localisée s’accompagne inévitablement d’un transversale des températures maximales et évolution transversale
amincissement de la zone ré-écrouie. de la dureté – Cas des métaux et alliages durcis par écrouissage

keE
ρu =
eE keE 3k k2
ρE = ρP = 2Re 1 – 1–
2Re 2Re 2 3

}p }p σu1
}e }e σu2
Re Re
e
σ ke σ ke σu

a }e b }p >}e c retour élastique

Re limité d’élasticité }p moment plastique σu contrainte résiduelle


}e moment ultime élastique k fraction d’épaisseur restée à l’état élastique

Figure 4 – Évolution des contraintes par plasticité de déformation mécanique

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–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– PIÈCES MÉCANIQUES SOUDÉES

Le graphique de la figure 5 montre qu’en surface s u1 peut attein- initiale T0 à l’intérieur d’un alésage A supposé infiniment rigide et
dre 40 à 50 % de la limite d’élasticité, lorsque la fraction d’épaisseur à cette même température T0.
plastifiée excède 50 %.
Le disque est placé dans un système de coordonnées cylindri-
Il est important de noter qu’un mécanisme analogue mais loca- ques (r, q, z) et un chauffage isotherme sélectif porte ensuite le
lisé sous la surface s’observe dans le cas de la mise en forme par disque à la température T1 ; il résulte : DT = T1 - T0.
enlèvement de copeaux (usinage, meulage).
1.2.2.1 Contraintes thermiques dans un matériau dont
1.2.2 Contraintes résiduelles générées le comportement est purement élastique
par plasticité de dilatation thermique
Comme les deux directions spatiales r et q sont celles pour
Les lignes qui suivent se proposent de présenter la genèse des laquelle la dilatation est entravée, nous écrivons que la somme des
contraintes provoquées par la dilatation thermique monotone, dilatations élastiques (eth : thermique et em : mécanique) est nulle :
c’est-à-dire en l’absence de tout changement de phase dans la
structure cristalline du matériau. εrm + εrth = 0
La figure 6 représente un disque métallique de diamètre initial D0, εθm + εθth = 0
supposé isotrope, initialement relaxé et ajusté à la température
La biaxialité de contrainte se traduit par :

Re(1 – k 2) 3k k 2
εrm = (σr − v σ0 ) / E et ε0m = (σθ − v σr ) / E
σu1 = σu2 = Re 1– –1
2 2 3
0,6
tandis que : erth = eqth = aDT,
il résulte finalement :
0,4 σu1 − E αΔT
σr = σ0 = (1)
0,2 1− v
ainsi que s z = 0
σu1/Re ; σu2/Re

0
0 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1 avec E module d’élasticité du matériau à la tempéra-
–0,2 ture T1,
–0,4 a coefficient moyen de dilatation thermique dans
σu2 l’intervalle : DT = T1 - T0,
–0,6 n coefficient de Poisson du matériau.
–0,8
Le signe négatif signifie simplement que la pièce est sous un
champ de contraintes (radiale et circonférentielle) de compression.
–1
Fraction de l’épaisseur restée élastique : k La relation (1) montre que la contrainte thermique évolue dans le
domaine élastique, comme le produit des deux caractéristiques
Figure 5 – Influence de la fraction d’épaisseur restée élastique sur le physiques que sont le module d’élasticité E et le coefficient de dila-
niveau de CR tation thermique a du matériau constitutif du barreau. Cette quan-
tité Ea représente in fine la sensibilité du matériau à un quel-
conque « bridage thermique ».
z
Le tableau 1 précise la quantité Ea pour quelques métaux et
alliages industriels à 20  C.
Il convient d’observer la sensibilité importante des aciers en
général et des aciers inoxydables austénitiques en particulier à la
A r
σθ création des contraintes thermiques. Comme certains alliages aus-
ténitiques à durcissement (PH) offrent une limite d’élasticité élevée,
ils sont appropriés pour développer par chauffage à l’état bridé un
σr effort thermo-élastique très supérieur à celui d’un vérin hydraulique
θ
T0 de même volume.
En pratique, l’influence du système extérieur de bridage conduit
à exprimer la contrainte thermique selon la relation générale :
E
α
ν D
σ = kE αΔT (2)
T1
dans laquelle k est un coefficient qui représente la raideur du sys-
tème extérieur, c’est-à-dire le bridage.
Figure 6 – Contraintes thermiques dans un disque dont la dilatation Le bridage biaxial d’un alésage infiniment rigide se traduit dans
est entravée biaxialement le cas de l’acier par : k = 1/(1 - n) = 1,43.

Tableau 1 – Produit E a de quelques métaux et alliages industriels


Matériau Zn Acier inox : 18Cr, 10Ni Ni Fe Aciers C-Mn Cu Al Mg Ti Zr
Ea (en MPa. C) 3,7 3,06 2,74 2,58 2,38 2,08 1,66 1,10 0,88 0,59

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INNOVATION

Simulation numérique
des traitements thermochimiques :
applications industrielles
par Philippe BRISTIEL
Docteur ENSAM
Pilote Métier Simulation des procédés de Soudage et Traitements Thermiques chez PSA
Peugeot Citroën
et Ngadia Taha NIANE
Docteur INPL
Spécialiste Techniques Numériques – Modélisation Numérique chez PSA Peugeot
Citroën

Résumé : Les traitements thermochimiques sont couramment employés par l’industrie


automobile pour améliorer les propriétés mécaniques de pièces en acier. Ils génèrent en
contrepartie des distorsions qu’il est important de maîtriser. La simulation numérique per-
met d’étudier ces traitements en prenant en compte les nombreux paramètres influents.
Nous présentons dans cet article un état de l’art de la simulation numérique de ces procé-
dés, avec une approche multi-physique couplant la mécanique des fluides et la mécanique
des solides, et à travers deux applications portant sur des pièces de boîtes de vitesses.
Thermochemical treatments are commonly used by the automotive industry to improve
the mechanical properties of steel parts. However, they generate distortions that are
important to master. Numerical simulation provides assistance to the study of these treat-
ments, taking into account many parameters which influence the results. We present in
this case the state of the art of numerical simulation for these processes, with a multi-
physics approach combining fluid mechanics and solid mechanics and referring to multiple
applications on gearbox part.
Mots-clés : Traitements Thermochimiques, Cémentation, Carbonitruration, Simulation
Numérique, Métallurgie, Trempe, Sysweld, Fluent, Fire
Keywords : Chemical Heat treatments, Carburizing, Carbonitriding, Numerical Simula-
tion, Metallurgy, Quenching, Sysweld, Fluent, Fire

Points clés
Domaine :
Simulation numérique des procédés de fabrication
Degré de diffusion de la technologie : Emergence | Croissance | Maturité
Technologies impliquées : Calcul par la méthode des éléments finis, calcul
par la méthode des volumes finis, traitements thermochimiques (cémenta-
tion, carbonitruration) de pièces en acier
Domaines d’application : Procédés de traitements thermochimiques
Principaux acteurs français :
Pôles de compétitivité :
Centres de compétence :
Industriels : ECM Technologies, SERTHEL, ESI, TANSVALOR
Autres acteurs dans le monde :
Contact :
Parution : mars 2013

3 - 2013 © Editions T.I. IN 209TECHNO - 1

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INNOVATION

1. Contexte global pièces sont souvent estimés sur des cas complexes, sont ici pris
en compte par une étape de simulation en mécanique des fluides
La tenue de nombreuses pièces mécaniques passe par l’appli- sur des charges complètes de pièces. Ce couplage entre la
cation d’un traitement thermique ou thermochimique qui permet mécanique des fluides et la mécanique des solides constitue
d’obtenir de bonnes propriétés mécaniques (tenue en statique et d’une part une approche plus physique du problème et permet
fatigue, résistance à l’usure…) avec un acier qui peut être non d’autre part d’étudier non plus une pièce isolée mais un
allié ou faiblement allié. Les mécanismes qui conduisent à ces ensemble de pièces avec toutes les dispersions qui en découlent.
résultats sont multiples et complexes, en particulier pour les trai-
tements thermochimiques de type cémentation ou
carbonitruration :
— l’enrichissement superficiel en carbone et azote en
2. Contexte industriel
phase austénitique permet d’augmenter superficiellement les Le constructeur PSA Peugeot Citroën a recours à différents
propriétés mécaniques de l’acier ; traitements thermiques pour optimiser les propriétés mécani-
— le refroidissement rapide (trempe) qui suit la phase ques de certaines pièces sensibles du groupe motopropulseur
d’enrichissement permet de transformer l’austénite en marten- ou de liaison au sol :
site ou bainite ; la trempabilité de l’acier étant proportionnelle  traitements thermochimiques de pièces de boîtes de
au pourcentage de carbone, on obtient naturellement une vitesses (pignons, couronnes, arbres) et de transmission
microstructure plus dure en surface qu’à cœur ; (triaxes) ;
— les gradients thermiques, chimiques et métallurgi-  trempe après chauffage superficiel par induction de
ques génèrent, suite à la trempe, des contraintes résiduelles de pièces de liaison au sol, de transmission (arbres, bols de
compression en surface. fusées) et de moteurs (vilebrequins, arbres à cames) ;
Les hautes propriétés et les contraintes résiduelles de com-  trempe et traitement de vieillissement sur pièces
pression ainsi obtenues en surface compensent les contraintes de fonderie en alliages d’aluminium (carters, culasses).
en service, elles-mêmes généralement plus élevées en surface.
Dans cet article, nous nous penchons sur les traitements ther-
Toutefois, la complexité des phénomènes physiques mis en jeu mochimiques appliqués aux pièces en aciers, en particulier les
lors d’un traitement thermochimique nécessite de maîtriser un pignons de boîtes de vitesses. En effet, en termes de volumes
grand nombre de paramètres pour obtenir les gains attendus, de production, les pièces de boîtes de vitesses sont au premier
tout en contrôlant les effets néfastes comme les distorsions. Les plan, chacune contenant une vingtaine de pièces traitées.
paramètres d’enrichissement et surtout les paramètres de Pignons, couronnes et arbres sont traités chez PSA par lots, soit
trempe sont de loin les plus critiques. par cémentation basse pression, soit par carbonitruration
La mise au point d’un nouveau traitement thermochimique ou atmosphérique.
l’application à une nouvelle pièce passe habituellement par une
Les procédés de traitements thermochimiques sont schémati-
phase d’essais qui peut être longue et coûteuse. Les progrès
quement constitués de trois étapes :
récents de la simulation numérique permettent aujourd’hui de
recourir au calcul pour simplifier cette étape de mise au point  un chauffage, qui amène les pièces en phase
ou pour optimiser les traitements existants. austénitique ;
Nous présentons dans ce dossier plusieurs applications indus-  un enrichissement superficiel en carbone et éven-
trielles de la simulation numérique de ces procédés avec les tuellement en azote (carbonitruration) ;
outils et les méthodologies les plus avancées à ce jour chez PSA  un refroidissement contrôlé (trempe), réalisé sur les
Peugeot Citroën. En particulier, les phénomènes d’écoulements installations PSA soit à l’azote (cémentation basse pression)
du fluide de trempe, dont les effets sur le refroidissement des (figure 1), soit à l’huile (carbonitruration).

Cellules de chauffe

Cellule
de
trempe
1 Transfert de la
charge vers une
cellule de chauffe /
2 enrichissement

3 2 Transfert de la
1
charge vers la cellule
de refroidissement
(trempe)

Sas

3 Sortie de la
charge

Charge Cellules de chauffe

Figure 1 – Schéma d’une installation de cémentation basse pression/trempe gaz et photo d’une charge de pignons récepteurs de 5e (PR5)

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Température
Austénite

Ac3
Martensite
Ac1 Martensite
revenue
Ferrite/Perlite

Ms
Figure 2 – Charge de couronnes de pont
Temps
Ces procédés sont complexes et les résultats dépendent de
très nombreux paramètres. Après traitement, les pièces doivent
Figure 3 – Schéma de principe d’un cycle de traitement thermique
satisfaire aux différents impératifs du cahier des charges :
 impératifs géométriques Æ maîtrise des
ajoutée aux contraintes résiduelles, aura un impact sur la tenue
déformations ;
mécanique de la pièce.
 impératifs de tenue mécanique Æ maîtrise des
contraintes résiduelles et de la microstructure. Lorsque la température de chauffage d’un traitement ther-
mique est inférieure à la température de début d’austénitisation
Il en résulte que la mise au point de ces traitements est parti-
de l’acier (Ac1), il s’agit d’un revenu. Dans le cas où elle est
culièrement délicate et nécessite généralement de nombreux
essais pour parvenir à une solution satisfaisante. D’autre part, supérieure à Ac1, on parle de recuit ou de trempe selon les
les gammes (recettes) de traitements appliquées ne sont pas conditions de refroidissement.
forcément optimales, faute de temps et de moyens pour en opti- La figure 3 représente schématiquement les différentes étapes
miser tous les paramètres. d’un traitement thermique de trempe ou de durcissement, ayant
La simulation numérique s’impose alors comme un moyen effi- pour but d’améliorer les propriétés mécaniques tout en générant
cace pour aider à la mise au point de ces traitements et ouvre des contraintes résiduelles :
également la voie à une prise en compte des procédés en phase  un chauffage, qui modifie la microstructure initiale de
de conception des pièces. l’acier (généralement Ferrite/Perlite) pour aboutir à une
microstructure austénitique ; ce chauffage peut être superfi-
Un des « cas d’école » chez PSA, qui témoigne des difficultés ciel (par exemple chauffage par induction) ou plutôt homo-
de mise au point d’un traitement thermochimique, est celui gène s’il s’agit d’un chauffage au four ;
d’une couronne de pont de boîte de vitesses dont le mode de  un refroidissement rapide (trempe) qui permet d’ob-
refroidissement a été modifié pour passer d’un bain de sel à tenir une microstructure martensitique, au moins
une trempe huile. Ce changement a entraîné une augmenta- superficiellement ;
tion très significative des distorsions des pièces et a nécessité
la mise en place d’une étape de rectification.  un revenu, facultatif, qui transforme la martensite en
martensite revenue.
Ces pièces sont traitées en charges constituées de piles
d’une dizaine de pièces en contact direct les unes avec les L’intérêt d’obtenir au final une microstructure martensitique
autres (figure 2). L’analyse des pièces non conformes a mon- tient aux propriétés mécaniques de cette phase, en particulier à
tré qu’il s’agissait principalement des pièces situées à la base sa haute limite d’élasticité. Il s’agit en revanche d’une micros-
et au sommet des piles. tructure fragile. Le revenu permet d’aboutir à un bon compromis
Ce cas est à l’origine des travaux de simulation qui ont en termes de limite d’élasticité et de ductilité. Dans le cas où le
conduit à l’adoption des outils et des méthodologies présen- traitement thermique est correctement réalisé, la limite d’élasti-
tées ici en particulier concernant la simulation de la trempe cité est augmentée et les contraintes résiduelles générées sont
huile. négatives (de compression) en surface, ce qui a pour effet d’aug-
Tout au long de cet article nous prendrons cette pièce ainsi menter significativement la tenue mécanique de la pièce en sta-
que le PR5 (pignon récepteur de 5e rapport présenté plus tique et en fatigue.
haut) comme exemples d’application.
3.2 Spécificités des traitements
3. Méthodologie de simulation thermochimiques
Un traitement thermochimique est un traitement thermique,
numérique des procédés comprenant un chauffage à une température supérieure à la
de traitements thermiques température Ac3 de l’acier (austénitisation) suivie d’une trempe,
auquel on ajoute une étape d’enrichissement superficiel des piè-
3.1 Rappels sur les traitements thermiques ces en carbone (cémentation) ou carbone + azote (carbonitrura-
Comme précisé au § 1, nous n’évoquerons ici que les applica- tion) par diffusion chimique en phase austénitique.
tions sur des pièces en acier. Le principe est résumé de manière très schématique sur la
Un traitement thermique est constitué d’un chauffage suivi figure 4. Le lecteur pourra trouver des informations détaillées
d’un refroidissement, généralement contrôlé, ayant pour but de sur les principes d’enrichissement en carbone et azote dans les
modifier la microstructure du matériau et de générer ou modifier articles [M 1 226] et [M 1 222]. À noter que la modélisation de
l’état des contraintes résiduelles. L’évolution de la microstructure l’enrichissement appliquée dans nos simulations est très simpli-
s’accompagne systématiquement d’une évolution des propriétés fiée, ce qui importe est de connaître le potentiel carbone et le
de l’acier, notamment de sa limite d’élasticité. Cette évolution, potentiel azote en surface des pièces en fonction du temps. Ces

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Potentiels
carbone (C) Turbine
Température

et azote (N)

Ac3
Ac1 C C C

N N
Échangeur

Ms

Chauffage Enrichissement Trempe Refroidissement


huile air
Temps

Figure 4 – Représentation schématique d’un cycle de chauffage/


enrichissement d’un traitement de carbonitruration

potentiels définissent les pourcentages maximaux de carbone et


azote qui peuvent être apportés en surface des pièces.
PSA dispose de deux types d’installations de traitements
thermochimiques :
— des installations de cémentation basse pression
(ICBP) ;
— des installations de carbonitruration atmosphérique
(ICA). Le terme atmosphérique signifie que le traitement (chauf- Charge
fage/enrichissement) se fait à la pression atmosphérique, par
opposition aux procédés réalisés à basse pression.
Figure 5 – Circulation de l’azote dans la cellule de trempe
3.3 Trempe de l’ICBP
La trempe est généralement l’étape clé de tout traitement
thermique : la microstructure, et donc les propriétés finales,
mais aussi les distorsions et les contraintes résiduelles, dépen-
dent essentiellement de la façon dont les pièces sont refroidies.
Or, quel que soit le procédé de trempe employé, il est impos-
sible d’obtenir un refroidissement homogène à la surface des
pièces, a fortiori lorsque les pièces sont refroidies par lots :
 à l’échelle d’une pièce, il existe des gradients de flux
surfaciques de chaleur liés aux phénomènes de convection
et à la géométrie de la pièce : les zones situées en pied de
dent par exemple refroidissent moins vite que l’extrémité 2 3
des dents ;
 à l’échelle d’un groupe de pièces (charge), on retrouve
des disparités entre les flux des différentes pièces : les pièces
situées aux extrémités d’une charge par exemple sont systé-
matiquement refroidies plus vite.
3.3.1 Trempe à l’azote 1
Le refroidissement à l’azote, tel qu’il est pratiqué sur les instal-
lations de cémentation basse pression (ICBP) de PSA, est réalisé
à haute pression avec un gaz brassé par deux turbines et refroidi
par des échangeurs thermiques (figure 5). La circulation du gaz
se fait de haut en bas. La température du gaz, comprise entre 20
et 100  C à la sortie des échangeurs et donc au-dessus de la
charge, augmente progressivement en traversant la charge.
Lors de la trempe (figure 6), la circulation du gaz (3) et les
phénomènes de convection créent un flux de chaleur des pièces
vers le gaz (2). Le refroidissement interne des pièces dépend
ensuite des phénomènes de conduction thermique (1).
3.3.2 Trempe à l’huile
Le refroidissement à l’huile, pratiqué sur les installations de
carbonitruration atmosphérique (ICA) de PSA, utilise de l’huile Figure 6 – Circulation de l’azote et phénomènes de conduction
chaude maintenue à température constante par des échangeurs thermique de l’ICBP

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thermiques et brassée par des turbines qui l’amène à circuler de peut se trouver en phase liquide ou gazeuse. Or, les échanges
bas en haut à travers la charge (figure 7). thermiques entre la surface des pièces et la phase gazeuse sont
Ce mode de refroidissement est plus complexe à décrire et à beaucoup plus lents qu’avec la phase liquide.
modéliser que le refroidissement à l’azote, en raison du carac- D’autre part, les bulles de gaz ayant tendance à remonter à la
tère diphasique de l’huile : en fonction de sa température, l’huile surface, il se créé une différence de répartition des deux phases
en fonction de la géométrie et de l’orientation des pièces : la
phase gazeuse est plus facilement « piégée » sur les faces infé-
rieures des pièces, alors qu’elle peut s’échapper plus librement
Turbine
sur les faces supérieures (figure 8).
Ainsi les différents régimes d’échanges thermiques couram-
ment décrits lors d’une trempe liquide (ébullition, ébullition
nucléée, ébullition en film…) dépendent non seulement de la
température mais également, de manière tout aussi importante,
d’aspects plus géométriques.

3.4 Bilan des phénomènes physiques mis en jeu


Nous pouvons résumer ainsi les phénomènes physiques parti-
culiers aux procédés de traitements thermochimiques, dont vont
dépendre les résultats du traitement en termes de distorsions,
contraintes résiduelles et métallurgie :
 phénomènes chimiques : apport superficiel et diffusion de
carbone et azote dans les pièces ;
 phénomènes métallurgiques : évolution de la micros-
tructure en fonction de l’histoire thermique (temps-température)
et éventuellement des pourcentages de carbone et azote ;
 phénomènes thermiques et convectifs :
— évolution des propriétés thermiques avec la température, la
microstructure métallurgique et éventuellement les pourcenta-
ges de carbone et azote ;
— échanges thermiques « réels ». La simulation de ces échan-
ges thermiques passe nécessairement par une approche en
Échangeur Charge mécanique des fluides pour prendre en compte la dynamique du
fluide, les phénomènes de turbulences ainsi que le caractère
Figure 7 – Circulation de l’huile dans le bac de trempe de l’ICA diphasique pour la trempe huile ;
 phénomènes mécaniques : évolution des propriétés
mécaniques en fonction de la température, de la microstructure
et du pourcentage de carbone.
La figure 9 résume ces différents phénomènes et couplages.
Certains couplages peuvent être considérés comme négligeables :

2
3
 l’influence des pourcentages de carbone et azote sur les
propriétés ’thermiques. Nous avons vérifié que l’utilisation de
propriétés thermiques dépendantes du pourcentage de car-
bone ne modifiait pas les résultats thermiques, ce qui s’ex-
plique par la faible profondeur d’enrichissement en carbone
et azote (généralement quelques dixièmes de millimètre) ;
 l’influence de la métallurgie sur la diffusion chimique n’a
1 pas besoin d’être prise en compte, la diffusion étant réalisée
en phase 100 % austénitique ;
 les effets de la mécanique sur la thermique sont négli-
geables, les déformations générées lors des traitements
étant très faibles et pas de nature à créer un échauffement ;
 l’influence de la mécanique sur les transformations
métallurgiques est négligée. Il s’agit en fait d’un aspect du
phénomène de plasticité de transformation non pris en
compte par la simulation.
L’ensemble des équations et des modèles implémentés dans
les outils que nous utilisons, notamment les couplages de la
thermique et de la mécanique avec la métallurgie dans
SYSWELD (voir § 3.5), est assez classique et a déjà fait l’objet
de très nombreuses publications. Nous n’aborderons ici que les
aspects méthodologiques et l’application de ces modèles. Pour
plus de détails, le lecteur pourra se référer aux documents cités
Figure 8 – Circulation de l’huile et phénomènes thermiques en annexe [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10].

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