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Comme nous l'avons précisé, le risque analysé par l'assureur lui permet de déterminer s'il va intégrer
le candidat dans la mutualité. Ce risque va aussi lui permettre de déterminer sa garantie. La garantie
c'est l'engagement qu'il prend vis à vis de l'assuré. Elle contient les conditions et les moyens de
l'intervention de l'assureur. Le champ de la garantie est toujours inférieur à celui du risque. Les
préoccupations financières vont pousser l'assureur à retrancher du risque certaines situations qui lui
paraissent augmenter la fréquence.
A l'inverse, les mêmes contraintes vont pousser à ajouter des contraintes sous la forme d'obligations.
La plus courante étant la nécessité d'être protégé par une serrure en trois points. De là vient le
malentendu entre assuré et assureur : on croit être assuré pour le risque que l'on a déclaré alors que
celui-ci n'est qu'une matière première. La garantie est un produit fini dont on a expurgé un certain
nombre d'éléments indésirables. Dans les contrats, la garantie se présente de cette façon : on voit
bien qu'elle est la transcription du risque, mais on voit aussi qu'elle comporte des exclusions. Ce
que l'on voit moins, en général, c'est que la garantie a une certaine durée et que la détermination de
cette durée est un élément de détermination de la garantie même.
S'il s'agit d'un risque déterminé S'il s'agit d'une activité ou d'un ensemble
d'activités
La segmentation consiste à énumérer toutes les circonstances entrant dans le cadre de la garantie.
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Exemple
Si l'on prend l'exemple de l'assurance de protection juridique, on trouvera le modèle suivant :
l'assureur couvre les litiges relatifs à l'habitation, le sport, la relation de travail... il faudra prendre
garde aux exclusions. La clause "tout sauf" consiste à énoncer des thèmes de garantie et retrancher
certaines circonstances.
Couvrir les litiges relatifs à la vie privée sauf le droit de la famille. Les assurances d'activité sont
des assurances multirisque.
La détermination positive de la garantie peut être difficile quand le contrat conclu avec l'assuré est
constitué de conditions générales et de conditions particulières ajoutant ou retranchant au principal.
Ce sera souvent en considération du prix que l'assuré est prêt à investir pour sa sécurité.
Bien souvent, le contrat subordonnera la garantie à la réalisation de conditions qui sont une forme de
prévention des risques. Elle peut concerner la composition des biens assurés, leur situation, la façon
dont la personne exerce l'activité assurée. On le verra, la condition de garantie est souvent difficile à
distinguer de l'exclusion de garantie qui a un régime plus sévère. Cette condition ne peut cependant
jouer que si l'assureur apporte la preuve qu'elle a « précisément » été porté à la connaissance de
l'assuré (Cass. 2e civ., 22 janv. 2009, n° 07-21.530, RCA 2009, 84, obs. Groutel - Cass. 2e civ., 25
févr. 2010, n° 09-10386, RGDA 2010, 301, note Abravanel-Joly. - Cass. 2e civ., 3 mars 2011, n°
10-11826, RGDA 2011, 686).
Si l'on s'arrête à ces éléments, seuls les événements redoutés ont été délimités. Le contrat
déterminera les dommages qui sont pris en charges à la suite de la réalisation du risque. Cela
permettra à l'assureur de décider, par exemple, s'il prend en charge les simples dommages
matériels ou s'il intègre les dommages corporels. Le contrat précisera s'il s'agit des risques directs,
consécutifs...
A la transcription contractuelle des risques et des dommages, la loi ajoute une extension.
L'article L. 121-2 du Code des assurances dispose en effet que " L'assureur est garant des pertes
et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de
l'article 1384 du Code civil, quelle que soit la nature et la gravité des fautes de ces personnes".
L'extension réalisée par le législateur est assez importante. Elle vise toutes les hypothèses dans
lesquelles une personne est responsable d'une autre quel qu'en soit le titre. Il faut tenir compte des
extensions réalisées par la jurisprudence et les responsabilités spéciales crées par le législateur
(Cass. civ. I, 15 mars 1955, RGAT 1955, p. 194, note A. B.). L'assureur doit sa garantie sans
considération de la nature et la gravité des fautes dont l'assuré est civilement responsable. La
disposition semble heurter l'exclusion légale de garantie en cas de faute intentionnelle de l'assuré
(C. ass., art. L. 113-1).
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Jurisprudence
La jurisprudence (Cass. 1re civ., 12 mars 1991, RGAT 1991, p. 633, note R. Bout : assurance
de responsabilité civile) fait cependant prévaloir l'article L. 121-2 du Code des assurances. La
solution est logique et favorable à la victime d'un dommage causé par l'assuré. La faute, même
intentionnelle, de la personne dont l'assuré doit répondre n'enlève pas au contrat son caractère
aléatoire : "Contrairement à la faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré lui-même, la faute des
personnes dont l'assuré doit répondre constitue un risque assurable parce que le dommage causé
par de telles fautes conserve un caractère aléatoire pour l'assuré (Ph. Rémy, note sous : Cass. 1re
civ., 17 nov. 1993, RGAT 1994, p. 518) ".
La délimitation de la garantie peut être d'origine légale. Dans ce cas, on dira que l'assurance est
obligatoire. Lorsqu'il crée une obligation d'assurance, le législateur en précise, en général la portée.
Lorsque l'obligation porte sur une responsabilité professionnelle, le législateur va viser le texte
fondant cette responsabilité professionnelle.
Exemple
C'est le cas pour la responsabilité médicale : l'article L.251-1 du Code des assurances renvoie à
l'article L. 1142-1 du Code de la santé publique. Il est évident que cette délimitation est impérative
et ne peut être réduite par des clauses contractuelles (Cass. 2e civ., 8 févr. 2006, RGDA 2006, 193,
obs. Kullmann, tempête).
Il arrive cependant que le législateur se borne à imposer une obligation d'assurance en laissant aux
parties le soin de fixer le contenu des garanties, et laissant par ailleurs perplexe sur l'efficacité d'une
telle obligation. Il en va ainsi pour l'assurance de responsabilité des groupements sportifs. Lorsque
l'obligation est complète, elle limite la possibilité de prévoir des exclusions de garantie.
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Section 2. Les exclusions de garantie
Les exclusions de garantie sont assez courantes. Elles servent des objectifs différents.
L'art. L. 113-1 du Code des assurances énumère quelques exclusions : « Les pertes et les
dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la
charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police ». L'alinéa
2 continue : « Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une
faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ».
On peut trouver dans l'art. L. 121-8 une autre exclusion : « L'assureur ne répond pas, sauf
convention contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit
par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires ».
Ces différentes dispositions appellent à distinguer les exclusions légales et les exclusions
conventionnelles.
A. La faute intentionnelle
Le problème de la faute intentionnelle est traité différemment selon que l'on se trouve dans une
assurance de dommage ou une assurance sur la vie.
Dans les assurances de responsabilité, c'est la victime de l'assuré qui pâtirait principalement de
l'exclusion. Pour cette raison, la jurisprudence retient traditionnellement une conception étroite de
la faute intentionnelle. Elle décide que la faute intentionnelle suppose la volonté de provoquer le
dommage. Cette définition est parfaitement conforme à l'esprit du droit des assurances, ce qui
compte en la matière, l'essence du risque, ce sont les conséquences dommageables de l'événement.
La faute est intentionnelle quand on a recherché ces conséquences dommageables. De ce fait, il
faudrait plutôt parler de sinistre volontaire que de faute intentionnelle. Cela permettrait d'éviter les
confusions avec d'autres formes d'intention et notamment l'intention criminelle. Comme le signalent
la plupart des pénalistes la notion d'intention qui peut être retenue dans les infractions volontaires
est différente de celle du droit des assurances. L'intention criminelle est abstraite, on veut s'assurer
que la personne voulait commettre l'acte qu'elle a effectivement commis. En droit des assurances
on veut être certain que la personne voulait effectivement s'en prendre à des intérêts assurés. Il
faut cependant préciser que cette conception étroite a un coût. Elle consiste à faire supporter par
la mutualité un nombre plus grand de comportements, cela a une incidence directe sur le niveau
des primes.
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Jurisprudence
Si l'on prend l'exemple de l'incendie volontaire, les choses s'éclairent. Des enfants mettent
volontairement feu à une vigne vierge située sous le bureau du principal afin de l'enfumer. C'est
un cas d'incendie volontaire. Lorsque tout le collège se trouve détruit par l'incendie, la Cour de
cassation peut décider qu'il n'y a pas faute intentionnelle au sens de l'article L. 113-1 du Code des
assurances. Le dommage lui-même n'a pas été voulu (Cass. civ. I, 21 juin 1988, Bull. civ. I, n° 195).
Le principal effet du choix de cette définition est donc de provoquer des casuistiques infinies. Si
l'on reste dans l'hypothèse de l'incendie volontaire, on trouve des cas où la faute intentionnelle du
droit des assurances est retenue. Un immeuble est détruit par un incendie dont est responsable
un locataire. Son assureur doit-il indemniser le propriétaire de l'immeuble ? Les juges estiment que
c'est le cas. Avant de mettre le feu, le locataire a enfermé deux personnes. Cela démontre sa volonté
de provoquer « le sinistre et les conséquences dommageables qu'il entraînait pour le propriétaire
de l'immeuble (Cass. civ. I, 3 mai 1995, Bull. civ. I, n° 182) ».
Sortons du domaine de l'incendie. Celui qui tente de se suicider en immobilisant sa voiture sur une
voie ferrée n'a pas commis de faute intentionnelle. Il n'a pas voulu les conséquences dommageables
causées à la SNCF (Cass. civ. I, 14 octobre 1997, Bull. civ. I, n° 272). En revanche, celui qui donne
un coup de poing au joueur d'une équipe adverse hors de toute action de jeu a commis une faute
intentionnelle (Cass. civ. I, 10 juin 1997, RCA 1997, com. 284, obs. H. Groutel).
Cette conception de la faute intentionnelle est largement à l'avantage de l'assuré. Ce n'est pas pour
cette seule raison que cette conception a été privilégiée. C'était une façon de réaliser l'évolution de
la responsabilité civile.
Schématiquement, il s'est agi de retenir le plus souvent possible la faute civile de l'assuré tout
en évitant une qualification de faute intentionnelle. Pour ce faire, on a fait évolué la faute civile et
régresser la faute en droit des assurances.
La faute civile, depuis 1968, est détachée de tout élément intentionnel. C'est une faute
objective qui n'est pas difficile à prouver. La faute intentionnelle au sens de l'art. L. 113-1 suppose
la conscience. Elle est moins facile à établir et c'est tant mieux puisque c'est l'assureur qui tente de
le faire pour ne pas donner sa garantie qui revient à la victime.
Comme le souligne B. Beignier (op. cit., n°101), on assiste à une inversion du processus de
responsabilité. La faute n'est plus démontrée pour établir la responsabilité mais pour écarter la
garantie en fin de chaîne de réparation. La promotion de l'indemnisation justifie ces solutions.
Les professionnels de l'assurance se sont émus d'une conception de la faute intentionnelle aussi
large, surtout dans le domaine de la responsabilité civile professionnelle. Cela conduit à considérer
le plus souvent que même lorsque le professionnel a commis une faute manifestant une légèreté
blâmable, cela ne le prive pas de la garantie.
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Jurisprudence
Afin de donner un peu de souplesse aux juges du fond, la Cour de cassation considère désormais
que l'existence de la faute intentionnelle relève du pouvoir souverain d'appréciation (Cass. 1re civ.,
27 mai 2003, Resp. civ. et assur. 2003, 282, obs. Groutel. - Cass. 1re civ., 4 juill. 2000, D. 2001,
somm. 1615, obs. Bonnard; RGDA 2000, 1055, note Kullmann) des juges du fond tout en rappelant
son attachement à la définition donnée (Cass. 1re civ., 27 mai 2003, Resp. civ. et assur. 2003, 282,
obs. Groutel).
Depuis que le contentieux de l'assurance est passé à la deuxième chambre civile, cette dernière
a réaffirmé son attachement à la conceptiont classique de la faute intentionnelle (Cass. 2e civ.,
23 sept. 2004, RCA 2004, 389, obs. Groutel. - Cass. 2e civ., 24 mai 2006, RCA 2006, 319, obs.
groutel Cass. 2e civ., 20 mars 2008, n° 07-10.499, RGDA 2008, 326, note Kullmann. - Civ. 2e, 9
avril 2009, n°08-15867, NPB, RGDA 2009, 747, note Mayaux. - Cass. 3e civ., 30 mars 2010, n°
09-12652. - Cass. 2e civ., 1er juill. 2010, n° 09-10590, RGDA 2010, 684, obs. Kullmann. - Cass.
3e civ., 29 mars 2011, n° 09-16749, RGDA 2011, 696, note Kullmann. - Cass. 2e civ., 18 oct.
2012, n° 11-13084, EDA 2012, 167, obs. Astegiano-La Rizza). Elle emploie parfois une définition
différente qui semble plus large la faute intentionnelle se concevrait comme celle qui supprime
tout aléa lors de la réalisation du sinistre (Cass. 2e civ., 22 sept. 2005, JCP G 2006, I, 135, obs.
Kullmann ; Cass. 2e civ., 24 mai 2006, n° 03-21.024, RGDA 2006, 635, note Kullmann). Elle se
rattache même occasionnellement à l'autre qualification proposée par l'article L. 113-1 du Code
des assurances, celle de faute dolosive (Cass. 3e civ., 7 oct. 2008, n° 07-17.969, Cass. 2e civ.,
16 oct. 2008, n° 07-14.373, RGDA 2008, 912, obs. Kullmann. - Cass. 2e civ., 1er juill. 2010, n°
09-14884, RGDA 2010, 684, obs. Kullmann). On perçoit, dans les décisions de justice et les opinions
doctrinales, une volonté de traiter avec plus de sévérité celui qui est assuré pour sa responsabilité
professionnelle par rapport au simple particulier (sur la question : Maud ASSELAIN, « Violation
délibérée de ses obligations professionnelles par l'assuré : à la recherche d'une sanction », RCA
2009, étude 6. - L. Mayaux, Les grandes questions du droit des assurances, LGDJ, 2011, question
8, 119 s.). Rejoignant les deux qualifications à propos d'une affaire impliquant encore une fois des
professionnels, la Cour de cassation a considéré que la faute intentionnelle résultait pour l'assuré
de "la volonté et la conscience de mettre à la charge de son propre assureur les conséquences qui
résultaient de ses fautes" (Cass. 2e civ., 14 juin 2012, n° 11-17367). Elle précise que cette faute
est incompatible avec l'aléa.
Face à une conception aussi complexe de la faute intentionnelle, on ne sera pas surpris de
rencontrer des contrats dans lesquels l'assureur exclut conventionnellement les dommages causés
ou provoqués intentionnellement par l'assuré (Cass. 2e civ., 18 oct. 2012, n° 12-23900, EDA 2012,
173, obs. Astegiano- La Rizza). Les deux conceptions sont ainsi consacrées !
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Avant : « L'assurance en cas de décès est de Désormais : ' L'assurance en cas de décès
nul effet si l'assuré se donne volontairement et est de nul effet si l'assuré se donne
consciemment la mort au cours de la première volontairement la mort au cours de la
année du contrat ». première année du contrat.L'assurance en
cas de décès doit couvrir le risque de suicide
à compter de la deuxième année du contrat.
En cas d'augmentation des garanties en
cours de contrat, le risque de suicide, pour
les garanties supplémentaires, est couvert à
compter de la deuxième année qui suit cette
augmentation. Les dispositions du premier
alinéa ne sont pas applicables aux contrats
mentionnés à l'article L. 140-1 souscrits par
les organismes mentionnés au dernier alinéa
de l'article L. 140-6..L'assurance en cas de
décès doit couvrir dès la souscription, dans la
limite d'un plafond qui sera défini par décret,
les contrats mentionnés à l'article L. 140-1
souscrits par les organismes mentionnés à la
dernière phrase du dernier alinéa de l'article
L. 140-6, pour garantir le remboursement d'un
pr~et contracté pour financer l'acquisition du
logement principal de l'assuré. '.
Au demeurant, les raisons ne manquent pas pour faire du suicide une cause d'exclusion légale de
garantie. On retrouve ici l'effet néfaste de la volonté sur le jeu de l'aléa : tout est faussé. Derrière
cette explication technique, on trouve des raisons plus morales. Il ne s'agirait pas que la personne
se suicide en toute impunité en pensant que sa mort bénéficiera en tout dernier lieu à sa famille qui
récupérera le pactole. En disposer autrement ce serait presque pousser les gens au suicide. Ces
arguments ont été développés par un auteur dans le passé. Il avait complètement perdu de vue la
détresse, la souffrance et l'isolement. Il est évident que ce n'est pas de cette façon que doit être traité
le problème du suicide. La façon dont on en parle parfois laisse percer que les anciennes conceptions
n'ont pas disparu. Pour beaucoup de gens, le suicide est un péché qu'il ne faut pas pardonner :
celui qui se suicide fuit ses responsabilités. Il faut savoir que le suicide, aussi paradoxal que
cela puisse paraître, exprime un désir de vivre autrement. On ne peut donc légiférer en cherchant
à sanctionner un acte odieux. On ne peut non plus légiférer pour des hypothèses marginales dans
lesquelles une personne se suicide pour rechercher le versement de l'assurance. C'est faire des lois
macédoniennes et insultantes pour la majorité des autres. Ils ne valent pas mieux que ceux que l'on
cherche à sanctionner. Il faut remarquer que le droit des assurances est en retard sur la question.
En droit du travail, on considère que le suicide peut être un accident du travail. C'est un acte auquel
peut être confronté toute personne placée dans certaines circonstances. L'idée d'accident est en
tout cas un progrès.
Avant la réforme du 3 décembre 2001, on trouvait dans le Code des assurances une prise en
considération partielle de la complexité de l'acte de suicide. Deux périodes étaient délimitées. Une
période débutant à partir de la souscription du contrat. Elle était de un an. Pendant cette période, si
l'assuré se suicidait, la garantie n'était pas due à condition que le suicide soit conscient. Si le suicide
était inconscient, la garantie était due. Le dispositif n'était pas d'ordre public. La distinction entre
le suicide conscient et inconscient est ancienne. La loi de 1930 n'a fait qu'entériner les solutions
jurisprudentielles. A l'époque, les contrats d'assurance prévoyaient une exclusion de garantie en cas
de suicide. Les juges limitaient cette exclusion au suicide conscient qui, selon eux, était la seule
faute intentionnelle.
• Le premier serait le fruit d'un acte réfléchi, presque mûri, un choix philosophique.
• Le second serait une action sous le coup d'une pathologie, un geste désespéré.
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Jurisprudence
Sur cette distinction, je vous invite à lire la note de B. Beignier sous l'arrêt de la Cour d'appel de
Versailles du 3 février 1994. C'est un très bon état des distinctions que l'on s'imposait alors en
pratique. Ce sont les juges du fond qui vont apprécier s'il s'agit de l'un ou de l'autre. Si l'on reprend
l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, on voit quels éléments sont pris en considération.
En l'espèce, la Cour relève qu'un assuré n'a pas eu pendant l'année précédant le suicide d'arrêt de
travail et qu'il ne souffrait d'aucune affection sur le plan physique ou psychique. Suivent d'autres
commentaires concluant à la pleine possession des facultés intellectuelles. L'arrêt affirme donc que
le suicide a été décidé et réalisé en toute lucidité en dehors de toutes contraintes extérieures ou
intérieures, compte tenu des circonstances dans lesquelles il est intervenu (il a écrit un poème sur
le mur avant sa mort, « le mode de suicide choisi nécessite la réunion de moyens ou de préparatifs
préalables à son exécution »).
Jurisprudence
Deux espèces permettront de le démontrer.
• Dans une première hypothèse (Paris, 18 décembre 1991, Juris-data n° 025027), une personne
décide de se suicider par le gaz. Elle ouvre les robinets après s'être enfermée. Elle revient
sur sa décision et ouvre les fenêtres, cependant, elle a la mauvaise idée d'allumer une
cigarette; cela provoque l'explosion dont elle mourra. Les juges du fond retiennent l'hypothèse
de l'accident. Les fenêtres ouvertes attestent que le suicide n'était pas voulu.
• Seconde hypothèse (Cass. civ. I, 2 juillet 1996, Bull. civ. I, n° 275; RCA 1997, com. 402, obs.
H. Groutel). Une personne est retrouvée pendue à un arbre. Au cours de l'enquête, il apparaît
qu'elle se livrait à des pratiques sexuelles incluant la strangulation (exemple intéressant
dans Soleil levant). Par conséquent ils en concluent que la mort était due à une volonté de
rechercher un plaisir sexuel intense et non à une volonté morbide. La preuve du suicide ne
sera pas donc évidente à trouver. Le doute sur la nature du suicide profite au bénéficiaire de
l'assurance (Cass. civ. l, 22 octobre 1996, RCA 1997, corn. n° 35).
B. Le risque de guerre
Selon l'article L. 121-8 du Code des assurances, « L'assureur ne répond pas, sauf convention
contraire, des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la
guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements ».
Les raisons d'exclure le risque de guerre ont encore une fois un lien avec la technique de l'assurance.
Il est impossible à l'assureur de prévoir la survenance et l'importance d'une guerre. Les destructions
massives qu'elle emporte sont en outre impossibles à couvrir pour lui. On est loin des principes
régissant la fréquence et la dispersion du risque et qui sont à la base d'une bonne mutualisation. Il
faut exclure. Cependant, il convient de remarquer que le droit des assurances distingue deux sortes
de conflits : les confits ouverts pour lesquels on applique une exclusion franche, et les conflits larvés,
le terrorisme, pour lesquels on a substitué à la garantie l'indemnisation par un fond.
1. La guerre en général
L'article L. 121-8 du Code des assurances se continue par un second alinéa précisant que lorsque
les risques de guerre ne sont pas prévus par le contrat, « l'assuré doit prouver que le sinistre résulte
d'un autre fait que la guerre étrangère; il appartient à l'assureur de prouver que le sinistre résulte de
la guerre civile, d'émeutes ou de mouvements populaires ».
Le Code des assurances procède à un de ces partages des tâches dont il a le secret. Avant de
l'expliciter, il faut noter qu'ici, le texte s'affirme supplétif. Les parties peuvent décider de couvrir tel
ou tel dommage lié à une guerre.
• Il peut s'agir d'une guerre étrangère. C'est la guerre la plus facile à délimiter, elle a lieu
entre une puissance étrangère et la France. Elle débute par une déclaration et s'achève par un
armistice, un cessez-le-feu ou une capitulation. Le fait de guerre peut cependant être reconnu
sans entrer dans ces limites. En cas de guerre étrangère, l'assuré doit prouver qu'il n'y a pas
de lien entre le sinistre et la guerre. Il s'agit d'une présomption défavorable pour lui. Elle est
assez logique car les circonstances de guerre favorisent l'idée que les sinistres sont dus aux
destructions massives. A l'assuré de démontrer le contraire.
• La règle s'inverse pour la guerre civile, les émeutes ou les mouvements populaires.
Ces circonstances sont plus difficiles à déterminer. On peut dire que la guerre civile un «
état d'hostilité générale entre citoyens (Y. Lambert-Faivre, n° 356) d'un même pays ». Ce fut
le cas en Espagne (1936), en Algérie (1954), en Yougoslavie (1991). Ces guerres peuvent
débuter par des émeutes ou des mouvements populaires. Les émeutes se caractérisent par
leur violence et les mouvements populaires par l'idée que la circulation d'une foule poursuivant
une revendication va causer des désordres et des excès. Puisque qu'aucune guerre n'est
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déclarée, pour ces événements, on va présumer que l'assureur doit sa garantie. Il revient
alors à l'assureur de démontrer qu'une de ces trois circonstances est à l'origine du sinistre.
En fait, l'exclusion pour émeute et mouvement populaire est aujourd'hui dépassée. Soit ces
circonstances prennent la forme d'actes de terrorisme et la victime sera indemnisée, soit elles
entraînent la responsabilité de l'Etat. Seules restent pertinentes l'exclusion du fait de la guerre
étrangère ou de la guerre civile.
Dans tous les cas, l'exclusion du sinistre repose sur son lien avec les faits. Il est en effet évident que
les circonstances nommées ne suppriment pas tous les sinistres du quotidien.
Cette condition de causalité permet à la jurisprudence d'apporter une certaine souplesse au cas
d'exclusion légale. Elle va surtout accroître ou faciliter la preuve à laquelle peuvent être soumis
l'assuré ou l'assureur par la distribution du texte. La jurisprudence ne se satisfait pas d'une
coexistence des événements, il faut souligner des faits particuliers ayant exercé sur la création ou
l'aggravation du risque une influence constitutive. Dans la formule, on trouve une conception large et
étroite du lien de causalité. Cela conduit à une jurisprudence très incertaine et parfois contradictoire
guidée certainement par l'équité. Cette même équité justifie les solutions qui s'imposent face au
terrorisme.
2. Le terrorisme
La loi réserve un sort particulier aux dommages causés par les actes de terrorisme. Cette forme de
guerre moderne s'est développée au cours du 20e siècle. Aujourd'hui, on peut affirmer qu'aucun pays
n'est à l'abri d'attentats terroristes en tous genres. Les exemples ne manquent malheureusement pas
dans l'actualité récente. A la suite d'une vague de terrorisme particulièrement violente, le législateur
français décida d'édicter une loi régissant l'indemnisation des dommages consécutifs à des actes de
terrorisme et la lutte contre ces actes : la loi du 9 septembre 1986.
Il faut distinguer le traitement des dommages aux biens et des dommages aux personnes.
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Pour les dommages aux biens Pour les dommages subis par les
personnes
Il convient donc de déterminer le critère de qualification d'une exclusion. Cette qualification semble
nécessaire car l'exclusion de garantie pourrait être confondue avec d'autres mécanismes.
A. La qualification de l'exclusion
En premier lieu, il est difficile de distinguer l'exclusion de garantie de la condition de garantie. En
second lieu, il convient de la distinguer de la déchéance.
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La jurisprudence présente parfois le critère opposé à celui de l'exclusion. C'est celui qui caractérise
la condition de garantie dont il est difficile de distinguer l'exclusion. Selon la Cour de cassation, la
condition participe à la définition du risque (Cass. civ. I, 7 juillet 1998, Bull. civ. I, n° 236 ; D. 1998,
IR, p. 205; RGDA 1998, p. 753, obs. Favre-Rochex - Cass. 1re civ., 13 mai 2003, D. 2003, IR 1733.
- Cass. 2e civ., 17 mars 2011, n° 10-18120, RGDA 2011, 693, note Mayaux). Il convient cependant
de relativiser le critère. En premier lieu parce qu'il n'est réellement efficace que dans la distinction
exclusion/condition.
C'est en fonction de l'intérêt de la qualification que se révèle le critère de l'exclusion. En second lieu,
parce que l'application du critère conduit à des nuances très subtiles (Cass. civ. I, 16 juillet 1998,
B. I, n° 246; D. 1999, som. corn., p. 224, obs. C. J. Berr). Le critère retenu par la jurisprudence
permet de faire entrer dans la catégorie des causes d'exclusions de garantie les mesures préventives
auxquelles les contrats soumettent parfois les assurés (Cass. 2e civ., 9 juill. 2009, n° 08-13.780,
RGDA 2009, 1162, note Abravanel-Jolly). Elles n'y entrent cependant pas toutes (Cass. 2e civ.,
8 janvier 2009, no 07-20731, RGDA 2009, 247, obs. Abravannel-Jolly : subordonner la garantie à
l'entretien et l'utilisation conforme de la chose c'est une condition - Cass. 2e civ., 16 juin 2009, n°
08-15.249, RGDA 2009, 1167, note Abravanel-Jolly : présence d’un antivol).
Un contrat d'assurance comportait un article relatif à la garantie des risques de vol en Italie.
La garantie était acquise si des conditions étaient respectées : stationnement dans un lieu clos,
fermeture du camion ou surveillance, utilisation d'un antivol. La garantie était acquise à 80% pour
un stationnement inférieur à 90 minutes et dans le respect de deux conditions. La jurisprudence
a estimé qu'il s'agissait d'une exclusion de garantie.L'un des enjeux de la qualification d'exclusion
est le régime auquel elle est soumise dans le Code des assurances. Un autre enjeu consiste dans
l'attribution de la charge de la preuve. Il revient à l'assuré de démontrer que le sinistre est couvert
par la garantie (Cass. 2e civ., 13 janv. 2012, n° 10-28.355,RCA 2012, comm. 123). Il appartient à
l'assureur de démontrer que les conditions de mise en jeu de la garantie ne sont pas remplies. Il doit
démontrer la réunion des conditions de fait de l'exclusion. Le contrat d'assurance ne peut renverser
cette règle (Cass. 1re civ., 17 juill. 2001, RGDA 2001, 1032, note Maleville).
La distinction entre condition et exclusion théoriquement bien arrêtée est pratiquement difficile
lorsque la jurisprudence ne respecte la distinction qui vient d'être posée, elle en arrive à qualifier les
mêmes exigences de conditions ou d'exclusion selon les espèces (G.?Durry, «?La distinction de la
condition de la garantie et de l'exclusion de risque?», in Mélanges H.?Groutel, Litec, 2006, p.?129 et
s.). Il en va ainsi pour l'exigence d'entretien régulier du matériel ou des locaux loués (Civ. 2e, 8 janv.
e
2009, no 07-20.731, RGDA 2009, 247, obs. Abravannel-Jolly ; Civ. 2 , 9 avril 2009, n° 08-14.271,
NPB, RGDA 2009, 673, note Astegiano-La Rizza (exclusions des dommages dus à défaut permanent
e
et volontaire d'entretien). - Civ. 2 , 9 juill. 2009, n° 08-13.780, NPB, RCA 2009, 337, obs. Groutel
(maintien en bon état du matériel assuré). - Cass. 2e civ., 25 févr. 2010, n° 09-10386, RGDA 2010,
301, note Abravanel-Joly. - Cass. 2e civ., 6 oct. 2011, n° 10-10.001).
2. Exclusion et déchéance
En second lieu, il est nécessaire de distinguer l'exclusion de garantie de la déchéance. Le critère posé
précédemment ne peut jouer, la jurisprudence en a trouvé un autre, temporel : l'exclusion sanctionne
les manquements antérieurs au sinistre (Civ. 3e, 17 oct. 2007, Bull. civ. III, n° 176 ; JCP G, 2007,
II, 10199, note Karila ; N. Leblond, « Un nouveau rôle pour le sinistre en assurance », RCA 2008,
chron. 4). La déchéance les manquements postérieurs à celui-ci. Ce critère est issu de la définition
classique des déchéances. Le choix d'une référence au temps indique la difficulté à distinguer les
13
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deux. Cette position n'est d'ailleurs pas celle adoptée par la 2e chambre civile de la Cour de cassation
(Cass. 2e civ.,, 10 avr. 2008, n° 07-12028, RGDA 2008, 909, obs. Kullmann).
B. Le régime de l'exclusion
Par défiance envers le mécanisme de l'exclusion, le législateur a posé des conditions strictes à
l'efficacité des clauses d'exclusion. A la différence de protections plus récentes, celle-ci joue quelle
que soit la qualité de l'assuré (Cass. 2e civ., RGDA 2007, 581, obs. Kullmann). L'article L. 113-1
du Code des assurances exige une exclusion formelle et limitée dans la police. L'article L. 112-4 du
Code des assurances complète les conditions en exigeant que les exclusions soient imprimées en
caractères très apparents. Ces exigences conduisent à une interdiction de principe des exclusions
indirectes (Cass. 3e civ., 26 mars 2008, n° 07-14.406, RGDA 2008, 911, obs. Bruschi).
En général, la typographie des exclusions se détache nettement du reste du texte dans les
contrats d'assurance. L'assureur est alors certain qu'elles sont très apparentes. Cette condition
comme des autres dépend largement de la présentation positive de la garantie. Si celle-ci consiste à
énumérer toutes les circonstances dans lesquelles la garantie est due, les exclusions sont indirectes.
C'est de l'interprétation du contrat par le juge que ressortira le respect des conditions imposées par
le texte. Cette exigence de forme montre implique que l'assuré ait connu et accepté cette exclusion.
Ce ne sera pas le cas si, même formelle et en caractères apparents, elle figure dans un contrat
non remis (location de voiture, exclusion ne figurant pas dans le contrat remis au locataire Cass. 2e
civ., 13 juillet 2006, n° 05-16035, RGDA 2006, 1006, note Mayaux). Une exclusion ne peut pas plus
figurer dans un lexique (Paris, 25 janv. 2005, Gaz. Pal. 4 et 5 mai 2007, p. 41, obs. Leducq).
L'exigence d'une exclusion formelle et limitée procède du bon sens. L'assureur ne peut, par une
exclusion adroite, retirer la quasi-totalité de sa garantie, l'exclusion est forcément limitée.
Exemple
Une exclusion ne peut vider de sa substance une extension de garantie (Cass. 2e civ., 9 févr. 2012,
n° 10-31057, EDA 2012, 50, obs. Nicolas).
La condition d'une exclusion limitée n'est pas une condition de forme, c'est une condition de fond.
Il ne faut pas que l'assureur trouve dans les clauses d'exclusion de garantie l'occasion de se délier
de sa garantie en faisant disparaître tout le risque. (L'exclusion ne doit pas vider la garantie prévue
aux conditions générales : Cass. 2e civ., 20 mars 2008, n° 06-11763, RGDA 2008, 452, note
Abravanel-Jolly - Cass. 2e civ., 11 juin 2009, n° 08-12.843, RCA 2009, 302, obs. Groutel). Ainsi,
dans une assurance de dommage, une police prévoyait l'extension de la garantie aux dommages
ayant pour origine un état d'arriération mentale ou d'aliénation. Pourtant, la police définissait la notion
d'accident en se référant au comportement d'un individu normal. L'exclusion annulait donc l'extension
de garantie. C'est aussi le cas d'une clause d'exclusion qui vise les phénomènes naturels présentant
un caractère catastrophique tels que....L'utilisation de « tels que » est la preuve que la clause n'est
pas limitative. De même, la jurisprudence considère que "la clause excluant la garantie de l'assureur
de la copropriété en cas de défaut d'entretien ou de réparation caractérisé et connu de l'assuré ne se
référant pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées n'était pas formelle
et limitée et ne pouvait ainsi recevoir application en raison de son imprécision" (Cass. 3e civ., 26
sept. 2012, n° 11-19117, Bull. civ., www. actuassurance.com, n° 28, obs. Abravannel-Jolly).
De la même manière, n'est pas considérée limitée la clause excluant « les maladies ou accidents
occasionnés par l'alcoolisme... » (Cass. 2e civ., 18 janv. 2006, D. 2006, IR 320) ou le mal de dos
(Cass. 2e civ., 18 janv. 2006, D. 2006, IR 321). La jurisprudence n'intervient cependant pas que pour
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sanctionner des abus. Un entrepreneur était spécialisé dans l'installation de fermetures et ferronnerie
aluminium, il avait pris une assurance sur corps de navire en construction. Une clause excluait de
la garantie « les dommages et pertes provenant de vice propre, les dépenses de réparation ou de
remplacement des pièces affectées de vice caché, les fris de rectification des vices de conception,
d'exécution et de matière... ».
Les juges du fond avaient vu dans cette clause la disparition de la garantie. La Cour de cassation
ne les suit pas en considérant que le contrat d'assurance avait pour objet de garantir les dommages
subis ou causés par le navire pendant sa construction et jusqu'à sa livraison. Dans un autre domaine,
la Cour de cassation considère formelle et limitée l'exclusion en cas d'invalidité ou incapacité
résultant de troubles psychiques (Cass. 2e civ., 2 avr. 2009, n° 08-12.587, JCP G 2009, 1766), ou les
atteintes discales et/ou vertébrales (Cass. 2e civ., 13 janv. 2011, n° 10-11.806, RCA 2011, comm.
163).
N'est pas limitée, en revanche, la clause figurant dans une assurance de responsabilité
professionnelle et excluant toute activité interdite par les lois, décrets ou règlements applicables à la
profession considérée (Cass. 2e civ., 13 juill. 2006, RCA 2006, 284 ; Cass. 2e civ., 2 octobre 2008,
n° 07-15810, RGDA 2009, 117, obs. Mayaux).
On ne peut considérer qu'une clause trop formelle n'est pas assez limitée. Il y avait pourtant de l'idée
dans la motivation des juges du fond.
Une idée que la Cour de cassation développe par ailleurs. C'est parfois le nombre des exclusions
qui conduit à réduire la garantie comme peau de chagrin.
La Cour de cassation appelle les juges du fond à un devoir de vigilance : « Attendu qu 'en se
déterminant ainsi, alors que, par leur nombre et leur étendue, les exclusions,..., aboutissaient à priver
de tout effet l'extension souscrite, la Cour d'appel a violé le texte susvisé (Cass. civ. I, 15 décembre
1999, RGDA 1999, p. 61, obs. A. Favre-Rochex) ;... ».
La conséquence d'une rédaction hasardeuse est bien sûr l'inopposabilité de la clause à l'assuré.
L'autre conséquence d'une rédaction hasardeuse c'est que les juges ne peuvent plus interpréter la
clause.
Jurisprudence
La Cour de cassation estime en effet qu'une clause d'exclusion ne peut être formelle et limitée si
elle doit être interprétée (Cass. 1re civ., 22 mai 2001, D. 2001, 2778, B. Beignier - Cass. 2e civ., 8
oct. 2009, n° 08-19646, RCA 2010, 28. - Cass. 2e civ., 12 avril 2012, n° 10-20831, EDA 2012, 83,
obs. Patris). La clause non formelle et limitée et non apparente est réputée non écrite. En revanche,
les juges du fond peuvent rechercher l'esprit de l'exclusion pour en déduire le domaine exact (Cass.
2e civ., 8 juillet 2004, JCP G 2005, II, 1041, note Lièvremont : si on exige un vol sans clés sur le
contact c'est pour exclure l'hypothèse d'une négligence de l'assuré, si l'assuré a été éjecté de sa
voiture, laissant les clés, on n'est pas dans le cadre de l'exclusion).
Si la clause d'exclusion est valable et que les conditions de fait en sont réunies, la garantie n'est pas
due. Plus justement, on dira que l'on est dans une hypothèse de non garantie. On ne se trouve pas
dans la délimitation contractuelle de la garantie. Cette absence d'assurance est opposable à tous. Il
faut cependant noter que pour certaines assurances les exclusions sont inopposables. Ainsi,
l'assureur ne peut opposer à la victime d'un accident de la circulation que les exclusions que les
textes autorisent l'assureur à faire figurer dans le contrat (ivresse, conduite sans permis, stupéfiants).
Exemple
Ce que nous garantissons Ce que nous ne garantissons pas
15
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Section 3. La durée de la garantie
Le contrat doit mentionner sa durée. Le contrat doit aussi mentionner la durée de la garantie. Les
deux durées, si elles se recoupent, ne se juxtaposent pas nécessairement. La durée du contrat,
c'est la durée pendant la quelle les deux parties seront engagées dans une relation contractuelle. La
durée de la garantie c'est la durée pendant laquelle l'assureur peut être tenu de fournir sa prestation.
Elle peut être plus courte ou plus longue que la vie du contrat.
Le point de départ de la garantie et sa durée sont fixés librement par les parties. Ainsi, le contrat
peut comporter une clause prévoyant le point de départ de la garantie au lendemain à midi et pour
une durée égale à celle du contrat.
Le contrat peut retarder indirectement le point de départ de la garantie. Ce sera le cas lorsqu'une
clause subordonne le point de départ de la garantie au paiement de la prime (Cass. 2e civ., 3 juin
2010, n° 09-66267, RGDA 210, 1011, note Bigot). Garantie de paiement pour l'assureur, la stipulation
met en danger l'assuré. Pour réduire le risque de non garantie, la jurisprudence favorise la libération
du débiteur en considérant que la remise du chèque vaut paiement.
Jurisprudence
Cass. 1re civ., 2 déc. 1968, JCP éd. G 1969, II, n° 15775, concl. Lindon, obs. A. Besson. - sur cette
question, V. B. Beignier in : Droit du contrat d'assurance, op. cit., n° 135.
La détermination de la durée de la garantie est moins libre pour les assurances de responsabilité.
Jurisprudence
La jurisprudence considérait depuis 1990 que : "la stipulation de la police, selon laquelle le dommage
n'est garanti que si la réclamation de la victime, en tout état de cause nécessaire à la mise en œuvre
de l'assurance de responsabilité, a été formulée au cours de la période de validité du contrat, aboutit
à priver l'assuré du bénéfice de l'assurance en raison d'un fait qui ne lui est pas imputable et à créer
un avantage illicite, qui aurait alors perçu les primes sans contrepartie ; que cette stipulation doit,
en conséquence, être réputée non écrite "(Cass. 1re civ., 19 déc. 1990, Bull. civ. I, n° 303).
La clause était réputée non écrite, elle n'était pas simplement inopposable au tiers lésé (Cass. 1re
civ., 2 févr. 1994, RGAT 1994, p. 668, note Ph. Rémy). La sanction se rapprochait donc du contrôle
exercé en matière de clauses abusives ; la solution aurait dû d'ailleurs plus naturellement sur ce
mécanisme que sur celui de la cause (L. Villegas, Les clauses abusives dans le contrat d'assurance,
préf. H. de Barbarin, PUAM, 1998).
Jurisprudence
Au cours des années, La Cour de cassation a considérablement accru ses exigences. Elle
condamnait toutes les clauses restreignant la durée de la garantie. L'enjeu était clair : il fallait
protéger le droit à indemnisation des victimes, surtout dans le domaine médical. Un autre
mécanisme fut désavoué. Des clauses limitaient dans le temps la garantie due à compter du fait
générateur de responsabilité.
Cass. 1re civ., 16 déc. 1997,.RGDA 1998, p. 124, note L. Mayaux ; M.-A. Agard, « Le verrouillage
de la jurisprudence de 1990 sur l'étendue de la garantie dans le temps », Resp. civ. et assur. 1998,
chron. 15
La solution était la même lorsque le délai était prévu par un texte (CE, 29 déc. 2000, D. 2001,
p. 1265, note Y. Lambert-Faivre ; RGDA 2001, p. 97, note F. Vincent). Les professionnels de
l'assurance appelaient de leurs vœux une réforme qui permettrait de sauver la branche assurance
de responsabilité mise selon eux en péril. Ils ont été entendus
A la rigueur, on pouvait imaginer de substituer un système plus souple. Une autre solution
était envisageable. Elle découle du constat selon lequel les clauses de durée, telles qu'elles
sont rédigées, peuvent enlever tout intérêt à l'assurance de certaines responsabilités. Mais dans
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d'autres hypothèses, c'est la condamnation sèche de ces clauses qui semble mettre en péril
l'équilibre de l'opération d'assurance. Il faut donc considérer que seules certaines responsabilités
sont incompatibles avec l'existence de clauses limitatives de durée de la garantie. Les dommages
en cause sont tellement longs à se manifester que la clause limitant la durée reviendrait à rendre
la garantie insignifiante. Elle ne peut donc être stipulée.En revanche, d'autres activités s'adaptent
à une faculté de choix laissée aux parties dans la mesure où les dommages se manifestent plus
rapidement. La nature des dommages garantis suffit à déterminer si ces clauses sont valables et
permet une certaine flexibilité en la matière. C'est par l'exigence d'une cause existante au jour
de formation que l'on pourrait mettre en place un contrôle. Une autre solution a été choisie.
Les réformes en matière d'assurance de responsabilité dans le domaine médical ont sensiblement
changé la donne.
L'article L. 251-2 du Code des assurances consacre le mécanisme de la limitation dans le temps de la
garantie après disparition du contrat. Il fixe les seuils minimums. Le législateur vient encore une fois
abattre une jurisprudence. Ce n'est cependant qu'un texte spécial ne pouvant s'appliquer à toutes
les assurances de responsabilité. On se trouve donc désormais dans une situation paradoxale. Les
principes posés par la jurisprudence n'ont plus vocation à s'appliquer dans le domaine pour lequel
ils avaient été forgés, ou du moins domaine dans lequel ils manifestaient toute leur utilité.
La garantie est due si le fait dommageable La garantie est due si le fait dommageable
survient entre prise d'effet de la garantie et intervient avant la fin du contrat et que
fin du contrat. Peu importe la date des autres la première réclamation se produit avant
éléments constitutifs du sinistre (C. assur., art. l'expiration d'un délai subséquent. La date
L. 124-5, al. 3). des autres éléments constitutifs du sinistre (C.
assur., art. L. 124-5, al. 4) ne compte pas.
L'assureur est protégé contre la mauvaise L'assuré est protégé de différentes façons
foi de l'assuré
Il est libéré de son engagement s'il établit que D'abord, la loi impose que la garantie soit
le fait dommageable était connu de l'assuré substantielle. De ce fait, pour le second
avant la souscription de la garantie. De même, choix, elle prévoit que le délai subséquent
il ne doit la garantie pour les sinistres dont ne peut être inférieur à cinq ans. Le plafond
le fait dommageable a été connu de l'assuré de garantie déclenché pendant ce délai ne
postérieurement à la fin du contrat que si la peut être inférieur à « celui de la garantie
garantie n'a pas été resouscrite ou l'a été en déclenchée pendant l'année précédant la
tenant compte de ce fait dommageable. date de résiliation du contrat » (C. assur.,
art. L. 124-5, al. 5). Ensuite, le contrat
doit reproduire l'alinéa 3 ou 4 de l'article
L. 124-5 du Code des assurances selon le
choix effectué. L'assuré sera mieux informé
du fonctionnement de la garantie. Cette
information doit d'ailleurs intervenir avant la
formation. Elle prend la forme d'une fiche
d'information décrivant la fonctionnement de
la garantie dans la durée (C. assur., art. L.
112-2, al. 2).
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Le texte apporte quelques précisions complémentaires. Il définit quelques termes essentiels à l'article
L. 124-1-1 du Code des assurances.
Le fait dommageable est « celui qui constitue la cause génératrice du dommage. Un ensemble
de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilé à un fait dommageable
unique ».
Le sinistre est « tout dommage ou ensemble de dommages causés à des tiers, engageant
la responsabilité de l'assuré, résultant d'un fait dommageable et ayant donné lieu à une ou
plusieurs réclamations ».
Par ailleurs, lorsqu'un sinistre est susceptible d'être couvert par des contrats d'assurance successifs,
la garantie ayant pris effet postérieurement à la prise d'effet de la nouvelle loi est appelée en priorité
(C. assur., art. L. 124-5, al. 6).
Malgré toutes ces préventions, le choix entre fait dommageable et réclamation n'est pas toujours
possible. La garantie est nécessairement déclenchée par le fait dommageable lorsqu'elle couvre
la responsabilité des personnes physiques en dehors de leur activité professionnelle. Ce mode
de déclenchement peut être choisi, par décret en Conseil d'Etat, pour d'autres garanties (art. L.
124-5, al. 1er). Bien entendu, ce texte général ne s'applique pas lorsqu'une loi a géré de façon plus
spécifique la question de la durée dans un domaine d'activité précis. C'est le cas de la responsabilité
professionnelle médicale. Par cette réforme législative, il ne s'agit pas de revenir purement et
simplement à un régime de liberté absolue après une période d'interdiction totale. On entrerait plutôt,
avec ce nouveau texte, dans une ère de liberté contrôlée. La jurisprudence décide que ce nouvel
équilibre législatif ne vaut que pour l'avenir c'est à dire pour les sinistres nés postérieurement à son
e
entrée en vigueur (Cass. 2 civ., 25 juin 2009, n° 08-14060 et 08-16910, JCP G 2009, 284, note
Mayaux. - Cass. com., 14 déc. 2010, n° 08-21.606, RCA 2011, 158, chron. Groutel. - Cass.2e civ.
15 sept. 2011, n° 10-20970, RGDA 2012, 120, note Kullmann.).
La fin de la garantie est aussi très spécifique dans les assurances ayant pour objet la couverture
des risques d'invalidité.
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Jurisprudence
Pour celles-ci, la jurisprudence semble désormais consacrer un principe dégagé de la loi Evin du
31 décembre 1989 (art. 7 et 7-1 ajouté postérieurement) mais s'appliquant à toutes les assurances
même celles qui ne sont pas soumises à la loi. L'idée serait que si le fait générateur du risque
couvert est né pendant la période de validité du contrat, l'assureur doit les prestations prévues (Civ.
2e, 17 avr. 2008, no 06-45.137, no 07-12.064, no 07-12.088, 3 esp., Bull. civ. II, nos 87, 100 et 101;
RGDA 2008. 694, note Mayaux.
• Civ. 2e, 3 juill. 2008, no 05-17.136, NP, RCA 2008. 341.
• Civ. 2e, 16 oct. 2008, no 07-13.940, NP et Civ. 2e, 23 oct. 2008, no 07-19.382, NP, RGDA
2009.199, obs. Mayaux.
• Civ. 2e, 12 févr. 2009, no 08-12.290, NP, RGDA 2009. 523, obs. Mayaux.
• Civ. 2e, 25 juin 2009, no 08-15.349, Bull. civ. II, no 170; RCA 2009.300, obs. Groutel.
• Civ. 2e, 25 juin 2009, no 08-14.247, NP, RGDA 2009 .
• Civ. 2e, 14 janv. 2010, n° 09-10237, Bull. civ. II, n° 6 ; RGDA 2010, 388, note Mayaux.
• Civ. 2e, 17 juin 2010, n° 09-15.089, NP, RCA 2010, 297.
• Civ. 2e, 13 janv. 2011, n° 09-16.275, NP, RGDA 2011, 531, note Mayaux
• Civ.,2e, 12 avril 2012, n° 11-17355, EDA 2012, 90, obs. Astegiano- La Rizza).
On ne sait pas encore si la jurisprudence exige que des prestations aient été versées pendant
le contrat pour que cet effet joue. On est certain en revanche que le principe ne joue pas si le
contrat ne couvre que le risque (décès ou invalidité) qui se réalise après la résiliation (Civ. 2e, 3
mars 2011, n° 09-14.989, RGDA 2011, 805, note Mayaux. – Civ. 2e, 15 sept. 2011, n° 10-21269,
Actuassurance.com, n° 23, obs. Krajeski. - Cass. 2e civ., 4 oct. 2012, n° 11-25324, EDA 2012,
158, obs. Asselain). Tout se passe alors comme dans un contrat d'assurance de responsabilité
en base réclamation. C'est la date de l'événement garanti qui compte quelle que soit la date des
autres éléments.
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