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DOI 10.1007/s12611-014-0267-7
Résumé L’impact sur le nouveau-né d’un traitement mater- Abstract Birth defects are the most feared hazards of mater-
nel en cours de grossesse est souvent considéré uniquement nal drug exposure during pregnancy. But if prescribed at the
sous l’angle malformatif. Or, lorsqu’il a lieu en fin de gros- end of pregnancy, maternal treatments do not carry a malfor-
sesse, un traitement maternel n’expose pas le futur enfant à mative risk anymore, but may have adverse effects during
un risque de malformation, mais peut avoir des répercus- the first post-natal days. As most drugs cross the placenta,
sions pendant les premiers jours de vie. Dans la mesure où medications taken until delivery may be present in newborn
la plupart des molécules passent le placenta, un médicament and cause symptoms linked to their pharmacological/toxico-
pris jusqu’à l’accouchement a toutes les chances d’être pré- logical profile. Nevertheless, after a thorough benefit-risk
sent dans l’organisme de l’enfant à la naissance et pourra evaluation, some treatments essential for maternal disease
éventuellement être à l’origine de symptômes propres à son control might be used during pregnancy despite known neo-
profil pharmacotoxicologique. Néanmoins, à l’issue d’une natal effects. Fetal and neonatal effects of in utero drugs
évaluation soigneuse de la balance bénéfice/risque, certains exposure are reviewed, firstly by affected neonatal functions
traitements indispensables à l’équilibre d’une pathologie and then by main pharmacological categories. The know-
maternelle sont parfois utilisés pendant toute la grossesse ledge of neonatal effects of drugs taken late in pregnancy
malgré des effets néonatals connus. Les effets fœtaux et néo- is necessary to set up an appropriate newborn care when
natals de l’exposition in utero aux médicaments seront pré- the treatment is known, and also to think of drug-induced
sentés, d’abord sous l’angle des altérations possibles des effects when facing neonatal symptoms without clear
grandes fonctions mises en jeu dans l’adaptation néonatale etiology.
puis sous celui des conséquences des principales classes
pharmacologiques. La connaissance des répercussions néo- Keywords Drugs · Pregnancy · Fetus · Newborn · Neonatal
natales éventuelles des médicaments pris en fin de grossesse adaptation
permet de prévoir l’accueil et la prise en charge du nouveau-
né lorsque le traitement maternel est connu, mais également
d’évoquer une cause médicamenteuse devant des symp-
tômes néonatals sans étiologie évidente. Introduction
Mots clés Médicaments · Grossesse · Nouveau-né · Fœtus · La notion de risque pour le futur enfant lors de la prise de
Adaptation néonatale médicaments par une femme enceinte, fait référence le plus
souvent à l’effet malformatif, qui concerne essentiellement
les expositions ayant lieu pendant la période d’organogenèse
C. Vauzelle (*) · E. Elefant (embryogenèse), c’est-à-dire pendant les deux premiers mois
Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT), de grossesse postconception (ce qui correspond aux dix pre-
hôpitaux universitaires Est-Parisien, mières semaines d’aménorrhée). La possibilité, lors d’un
hôpital Armand-Trousseau,
traitement maternel en fin de grossesse, d’un effet indési-
26, avenue du Docteur-Arnold-Netter,
F-75571 Paris cedex 12, France rable fœtal et/ou d’une altération de l’adaptation du
e-mail : catherine.vauzelle@trs.aphp.fr nouveau-né à la vie extra-utérine et d’un retentissement néo-
natal pendant les premiers jours de vie est encore souvent
P. Vert
méconnue et mal évaluée, sauf en ce qui concerne les médi-
Maternité régionale universitaire Adolphe-Pinard,
CHU de Nancy, 10, avenue du Docteur-Heydenreich, caments utilisés au cours de l’accouchement (qui ne seront
CS 74213, F-54042 Nancy cedex, France pas détaillés ici). Pourtant, les prescriptions chez les femmes
2 Rev. Méd. Périnat.
enceintes ne sont pas rares. Certaines pathologies chroniques niveau du placenta, et certaines molécules, comme les IgG,
peuvent nécessiter la poursuite, la reprise ou l’introduction sont transportées par pinocytose et transcytose [5].
d’un traitement en cours de grossesse (dépression, asthme, À l’exception de quelques substances de poids molécu-
hypertension…), de même que des pathologies aiguës doi- laire très élevé (insuline, héparines, interféron alpha), pres-
vent être traitées, comme les infections notamment. C’est que tous les médicaments sont donc susceptibles de passer le
dans ce contexte que des recommandations ont été émises placenta dans des proportions diverses, et leur degré de pas-
par l’Académie nationale de médecine, insistant sur la néces- sage peut être conditionné par la présence de transporteurs
sité d’une information spécifique des professionnels de santé présents sur le syncitiotrophoblaste.
et des futures mères sur les risques néonatals des médica-
ments reçus in utero [1]. Modifications des paramètres pharmacologiques
S’il est essentiel de connaître l’apparition possible de en cours de grossesse
symptômes chez le fœtus et/ou le nouveau-né dus à l’expo-
sition médicamenteuse in utero, cela ne doit cependant pas Les adaptations physiologiques de l’organisme maternel
faire perdre de vue le bénéfice attendu du traitement mater- induites par l’état de grossesse sont à l’origine de modifica-
nel. Dans ce contexte, en l’absence d’une alternative plus tions de la pharmacocinétique des médicaments chez la
sûre, et si l’abstention thérapeutique expose la mère à une femme enceinte. Celles-ci peuvent entraîner une augmenta-
décompensation ou à une complication délétère pour elle et tion de l’exposition fœtale, mais aussi diminuer l’efficacité
son futur enfant, une prévention et/ou une surveillance néo- maternelle des traitements et nécessiter une augmentation
natale adaptée au médicament utilisé seront envisagées. des posologies en cours de grossesse.
Les données sur les effets fœtaux et néonatals des médi-
caments sont variables selon les molécules ; cependant, la Absorption
connaissance du profil pharmacotoxicologique d’une sub-
stance peut amener à proposer une conduite à tenir même Le débit cardiaque est augmenté de 30 à 50 % par rapport à
en l’absence d’information ou d’effet déjà signalé. l’état basal ainsi que les flux sanguins régionaux (utérus,
peau, reins, poumons) [6], résultant notamment en un entraî-
nement plus rapide dans la circulation sanguine des molécu-
Facteurs influençant l’exposition in utero les administrées localement par voie inhalée (bronchodilata-
aux médicaments teurs…) ou par voie cutanée (anti-inflammatoires non
stéroïdiens [AINS]…).
L’importance de l’exposition fœtale dépend du passage pla-
centaire et des concentrations plasmatiques maternelles des Distribution
substances administrées.
En raison de l’augmentation du volume plasmatique (d’en-
Passage placentaire viron 50 %) qui atteint son maximum vers 30–34 semaines
d’aménorrhée, le volume de distribution de certains médica-
La plupart des médicaments passent le placenta qui est une ments peut être accru. Du fait de la diminution de la concen-
zone d’échanges bidirectionnels entre l’organisme maternel tration d’albumine, la fraction libre des médicaments peut
et l’organisme fœtal [2]. Au fur et à mesure de la grossesse, augmenter les rendant alors plus disponibles pour le passage
sa surface augmente tandis que son épaisseur diminue, ce qui placentaire ou l’effet thérapeutique, voire toxique, mais leur
facilite le passage des molécules par diffusion passive, prin- élimination s’accroissant également, il en résulte peu de
cipal mode de transfert placentaire des médicaments. Un conséquences en pratique [7].
transport actif, contre un gradient de concentration, nécessi-
tant la présence de transporteurs à la surface du placenta, a Métabolisme
récemment été observé. Il met en jeu des transporteurs d’in-
flux (facilitant l’entrée des molécules vers le fœtus) et des L’activité de certaines enzymes hépatiques est augmentée
transporteurs d’efflux (limitant le passage dans le comparti- pendant la grossesse, conduisant à un métabolisme accru
ment fœtal), notamment la P-glycoprotéine (P-gp, ABCB1), de certains médicaments [8] et donc à une diminution de
la breast cancer resistance proteine (BCRP, ABCG2) et les leurs concentrations plasmatiques pouvant nécessiter une
multidrug resistant associated proteins (MRPs, ABCC). De augmentation de leur posologie pour maintenir le contrôle
nombreux médicaments sont substrats de ces transporteurs, de la pathologie maternelle. C’est le cas, par exemple, pour
ce qui limite leur passage placentaire et diminue ainsi l’ex- certains antiépileptiques, notamment la lamotrigine et l’ox-
position fœtale. Enfin, certains médicaments, comme la carbazépine [9], pour la méthadone [10] et la buprénorphine
prednisolone [3] et la méthadone [4], sont métabolisés au [11], et certains antidépresseurs (sertraline…).
Rev. Méd. Périnat. 3
méthadone, antidépresseurs, benzodiazépines, baclofène…), stances toxiques comme l’alcool ou des stupéfiants (opia-
un syndrome de sevrage peut également survenir chez le cés…), cela bien que de telles interactions soient bien docu-
nouveau-né. Les signes cliniques apparaissent dans les jours mentées chez l’adulte.
qui suivent la naissance, leur délai de survenue étant fonc- Il est impossible de présenter un catalogue exhaustif des
tion de la demi-vie de chaque molécule. Un arrêt brutal du médicaments susceptibles de perturber l’adaptation néona-
traitement juste avant l’accouchement pourrait être un fac- tale. C’est pourquoi les principaux troubles sont répertoriés
teur favorisant l’apparition d’un sevrage néonatal, comme selon les fonctions physiologiques.
cela a été rapporté avec la paroxétine (antidépresseur inhibi-
teur de recapture de la sérotonine [IRS]) [18]. Système nerveux
• Dépression
Adaptation néonatale et médicaments acquis
in utero
Hypotonie neuromusculaire, hypoventilation, apnées ; trou-
Physiologie de l’adaptation néonatale et facteurs bles de la succion et de la déglutition, fausses-routes alimen-
de vulnérabilité taires ; troubles de la vigilance avec retentissement sur l’éta-
blissement de la relation mère–enfant ; exceptionnellement
La naissance est caractérisée par un accroissement soudain coma.
du métabolisme énergétique multiplié par un facteur de 2 à 3. Le score d’Apgar qui teste, à une et cinq minutes, la res-
Cette adaptation se fait sous l’influence d’une intense sécré- piration, le tonus, la réponse à une stimulation, la fréquence
tion hormonale : adrénaline et noradrénaline, thyroxine, cardiaque et la couleur est un test principalement neurolo-
cortisol… gique. Sont en cause à des degrés variables, analgésiques,
L’augmentation du métabolisme basal suppose un trans- anesthésiques, antiépileptiques, psychotropes et somnifères
port d’oxygène adéquat depuis le poumon en cours de rema- [16,19,20].
niement fonctionnel jusqu’aux tissus. Le cerveau compte
pour 60 % des besoins énergétiques. • Syndrome de sevrage (ou d’abstinence)
Différentes conditions pathologiques éventuellement
associées sont susceptibles de rendre l’adaptation fonction-
Initialement décrit chez des enfants de mère héroïnomane, il
nelle plus vulnérable en présence de médicaments :
peut se manifester pour l’ensemble des substances addicti-
• la prématurité : les enfants, même proches du terme, sont ves. Après un délai de quelques heures à plusieurs jours,
non seulement plus sensibles aux effets dépresseurs cen- dépendant de la vitesse d’élimination, l’enfant est agité, irri-
traux, mais ont aussi une immaturité du métabolisme et de table, hypertonique et crispé, il peut même convulser. Une
l’excrétion des médicaments ; tendance hyperphagique contraste avec des vomissements.
• les conséquences d’une hypoxie ou asphyxie périnatale Une hypersudation aggrave le risque de déshydratation.
peuvent être aggravées par les neurosédatifs et les Ce tableau peut être observé chez des enfants de mère
hypotenseurs ; sous méthadone ou sous buprénorphine [21]. Des troubles
• l’infection systémique en particulier par des germes produi- de même nature, mais évoluant sur un mode atténué, peuvent
sant une exotoxine, comme le streptocoque B et certaines survenir chez des enfants dont la mère prend des barbituri-
entérobactéries, est de nature à exercer un effet vasocons- ques, des benzodiazépines, des antidépresseurs comme les
tricteur artériel pulmonaire et vasoplégiant périphérique ; IRS. Ils sont aussi évoqués après intoxication alcoolique ou
• certaines malformations graves comme les cardiopathies ou nicotinique.
moins évidentes comme une oligonéphronie sont suscepti-
bles d’altérer la distribution et l’excrétion médicamenteuse. Thermorégulation
Les grandes fonctions pouvant être altérées Le nouveau-né est normalement un homéotherme imparfait.
par l’héritage médicamenteux À la naissance, le métabolisme énergétique est augmenté de
deux à trois fois, cela avec un apport extérieur réduit. Grâce
S’il est possible d’identifier d’éventuels effets délétères de aux effets conjugués des catécholamines et de la thyroxine,
certaines molécules ou familles de molécules, on ne dispose le métabolisme basal est augmenté. Les benzodiazépines
pas de données sur les conséquences possibles d’interactions et les barbituriques à fortes doses exercent à des degrés
chez des enfants de mère recevant plusieurs médicaments, divers un effet contraire exposant l’enfant au risque d’hypo-
ou associant la prise de médicaments avec celle de sub- thermie [22].
Rev. Méd. Périnat. 5
Hémostase
Fonctions digestives
Si les anticoagulants oraux de type antivitamines K sont
Indépendamment des fonctions de succion et de déglutition, généralement contre-indiqués durant la grossesse (sauf dans
l’adaptation néonatale est marquée par l’évacuation méco- certaines circonstances assumées chez les porteuses de pro-
niale, la constitution de la flore intestinale, la multiplication thèses valvulaires cardiaques, en particulier mécaniques),
des microvillosités et la maturation de la muqueuse. des hypoprothrombinémies (et une baisse de l’ensemble
6 Rev. Méd. Périnat.
des facteurs vitamino-K-sensibles) peuvent être observées Médicaments à risque fœtal et/ou néonatal
lors de traitements inducteurs enzymatiques pour épilepsie
(phénobarbital…). Des hématomes viscéraux ont été rappor- Les effets fœtaux et néonatals des principales classes phar-
tés [34]. Cela est également signalé pour d’autres inducteurs macothérapeutiques sont résumés dans les Tableaux 1 et 2,
des cytochromes P450 comme la rifampicine [35]. en distinguant les médicaments qui sont formellement
Les inhibiteurs de la synthèse des prostaglandines contre-indiqués en fin de grossesse en raison d’un effet fœto-
(AINS), et en particulier l’acide acétylsalicylique, ont un rôle toxique avéré et de l’existence d’alternatives plus sûres
inhibiteur des fonctions plaquettaires et peuvent être à l’ori- (Tableau 1), et ceux qui, s’ils peuvent éventuellement être
gine d’hémorragies cérébrales périnatales (en particulier utilisés en cours de grossesse en raison du bénéfice thérapeu-
chez le prématuré) pouvant prêter à confusion avec des com- tique malgré des effets connus ou anticipés, nécessitent une
plications postasphyxiques [36]. prévention et/ou une surveillance (Tableau 2). Parmi ces der-
niers, les antidépresseurs, les benzodiazépines, le baclofène,
Troubles métaboliques le tramadol, la codéine, la buprénorphine et la méthadone, de
même que la morphine, l’oxycodone… peuvent être à l’ori-
Des hypoglycémies sont observées chez des enfants exposés gine d’un syndrome de sevrage chez le nouveau-né. Si dans
aux bêtabloquants [37] et parfois à l’acide valproïque [38]. le cas des morphiniques (tramadol, codéine, buprénorphine,
Une hypocalcémie asymptomatique a été décrite lors méthadone…), le volet pharmacologique de la prise en
d’exposition au phénobarbital induisant une hypovitaminose charge est bien codifié, reposant principalement sur l’admin-
D maternelle [39]. De fortes hypermagnésémies après traite- istration d’opiacés aux nouveau-nés [54], il n’en est pas de
ment par sulfate de magnésium peuvent s’accompagner même pour le sevrage néonatal en relation avec l’exposition
d’hypocalcémie néonatale. à une molécule d’une autre famille pharmacologique
Rev. Méd. Périnat. 7
Tableau 2 Médicaments utilisables pendant la grossessea, mais dont les risques fœtaux et/ou néonatals nécessitent une prévention et/
ou une surveillance (liste non exhaustive).
Antituberculeux inducteur enzymatique Syndrome hémorragique précoce du nouveau-né par déficit en vitamine K
• Rifampicine (Rifadine®…) Pendant les 15 derniers jours de grossesse : vitamine K1 à la mère (10 à 20 mg/j
par voie orale)
À la naissance : vitamine K1 au nouveau-né (posologie d’enfant à risque
hémorragique majoré)
Bêtabloquants par voie générale Persistance possible du bêtablocage néonatal plusieurs jours après la naissance,
• Propanolol (Avlocardyl®…) le plus souvent non symptomatique chez le nouveau-né : hypoglycémie, bradycardie
• Labétalol (Trandate®) Très rares insuffisances cardiaques aiguës par inadaptation du cœur à l’effort lors
• Aténolol (Ténormine®…) de la naissance (facteurs de risque mal connus : accouchement difficile, souffrance
• Métoprolol (Seloken®…) … fœtale aiguë associée…) [43]
Et aussi par voie locale oculaire : Timolol
(Timoptol®…)
• Atypiques : olanzapine (Zyprexa®), En plus, pour les phénothiazines à fortes doses : signes d’imprégnation atropiniques
rispéridone (Risperdal®), … (hypertonie, trémulations, distension abdominale) qui peuvent être majorés
par la coprescription de correcteurs antiparkinsoniens
Corticoïdes par voie générale (en dehors Retards de croissance intra-utérins et petits poids de naissance signalés lors
de la maturation du surfactant de traitements au long cours pour des pathologies chroniques (lupus, asthme, greffe
pulmonaire) d’organe…). Le rôle propre de la maladie ne peut être exclu
• Prednisone (Cortancyl®) Insuffisance surrénale néonatale possible en théorie, peu probable avec un traitement
• Prednisolone (Solupred®) d’entretien à dose modérée
• Méthylprednisolone (Solumédrol®) Surveillance du nouveau-né : poids, diurèse et glycémie
(antidépresseurs, benzodiazépines, baclofène). Dans ces dant, le maintien du bon équilibre d’une pathologie mater-
situations cliniques, les données manquent, mais il semble nelle requiert parfois leur utilisation. Il est alors important
illusoire de tenter de réduire les signes de sevrage néonatals d’en informer l’équipe prenant en charge le nouveau-né,
en prescrivant un opiacé à un enfant sevré d’un traitement car l’imprégnation par un médicament maternel susceptible
qui n’est pas un opiacé (puisque ses récepteurs aux opiacés de retentir sur l’adaptation néonatale doit faire l’objet d’une
spécifiques [κ, μ] ne sont pas impliqués). Par exemple, l’uti- surveillance appropriée. Il serait utile de prévoir des proto-
lisation de baclofène a été décrite avec succès lors d’un syn- coles spécifiques dans les maternités et les unités de néona-
drome de sevrage chez deux enfants exposés in utero à cette tologie, permettant la détection, la surveillance, la prise en
molécule [49]. Dans la même logique, un traitement par ben- charge de ces troubles néonatals et permettant également
zodiazépine paraît cohérent quand un recours pharmacolo- d’intervenir lors de la décision de retour à domicile. La
gique s’avère nécessaire lors d’un syndrome de sevrage aux concertation multidisciplinaire (obstétriciens, pédiatres,
benzodiazépines chez un nouveau-né. prescripteurs, spécialistes des médicaments) et la mise en
Pour les antidépresseurs, la distinction entre sevrage et place d’une consultation spécifique avant l’accouchement
imprégnation n’est parfois pas aisée, notamment avec les pour les femmes recevant un traitement chronique contribue-
IRS. Des symptômes, évocateurs de sevrage mais pouvant raient à une prise en charge de leurs nouveau-nés dans les
aussi exprimer une imprégnation sérotoninergique, sont rap- meilleures conditions.
portés, diversement associés, sous le terme général de « poor
neonatal adaptation syndrome », ou « postnatal adaptation
syndrome », que l’on pourrait traduire par « troubles de Références
l’adaptation néonatale ». Il s’agit de signes neurologiques (tré-
mulations, irritabilité, agitation, troubles du sommeil ou de 1. Vert P, Elefant E (2012) Médicaments et adaptation néonatale :
l’alimentation, troubles du tonus), de troubles respiratoires l’héritage médicamenteux. Bull Acad Natl Med 196:717–37
(détresse respiratoire ou tachypnée) et plus rarement de 2. Elefant E, Beghin D (2009) Le passage transplacentaire des
médicaments. Bull Acad Natl Med 193:1043–54
convulsions. Dans une méta-analyse récente, le risque de sur-
3. Beitins IZ, Bayard F, Ances IG, et al (1972) The transplacental
venue de ce tableau en cas d’exposition à un antidépresseur passage of prednisone and prednisolone in pregnancy near term.
(en particulier IRS) en fin de grossesse est cinq fois plus élevé J Pediatr 81:936–45
qu’en l’absence de traitement (odds ratio [OR] : 5,13 ; IC 4. Zharikova OL, Deshmukh SV, Nanovskaya TN, et al (2006) The
95 % : [2,86–9,21]). Pour les trémulations, l’OR est de 7,89 effect of methadone and buprenorphine on human placental aro-
matase. Biochem Pharmacol 71:1255–64
(IC 95 % : [3,33–18,73]) [44]. Ces symptômes sont transitoi- 5. Elefant E (2012) Le passage placentaire des immunoglobulines.
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en charge est le plus souvent non médicamenteuse (nursing). 6. Tan EK, Tan EL (2013) Alterations in physiology and anatomy
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7. Pavek P, Ceckova M, Staud F (2009) Variation of drug kinetics in
nouveau-né peut être nécessaire, mais à ce jour aucune théra-
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peutique n’a été clairement évaluée. L’usage du phénobarbital 8. Isoherranen N, Thummel KE (2013) Drug metabolism and trans-
a parfois été proposé [45], mais on pourrait également utiliser port during pregnancy: how does drug disposition change during
le diazépam [55]. La distinction entre sevrage et imprégnation pregnancy and what are the mechanisms that cause such chan-
sérotoninergique étant souvent difficile à établir cliniquement, ges? Drug Metab Dispos 41:256–62
9. Reisinger TL, Newman M, Loring DW, et al (2013) Antiepileptic
l’utilisation d’un antidépresseur pour traiter des symptômes drug clearance and seizure frequency during pregnancy in women
neurologiques tels que trémulations, agitation et irritabilité with epilepsy. Epilepsy Behav 29:13–8
chez un nouveau-né exposé in utero n’est pas envisagée. 10. Shiu JR, Ensom MH (2012) Dosing and monitoring of metha-
Enfin, devant des signes cliniques sans étiologie évidente done in pregnancy: littérature review. Can J Hosp Pharm
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chez un nouveau-né, la notion d’une prise médicamenteuse
11. Concheiro M, Jones HE, Johnson RE, et al (2011) Preliminary
maternelle doit être recherchée. Un dosage plasmatique de la buprenorphine sublingual tablet pharmacokinetic data in plasma,
molécule suspectée peut parfois être utile (si le dosage du médi- oral fluid, and sweat during treatment of opioid-dependent pre-
cament est accessible), de même qu’une recherche urinaire de gnant women. Ther Drug Monit 33:619–26
12. de Haan GJ, Edelbroek P, Segers J, et al (2004) Gestation-
substances lorsque la prise médicamenteuse n’est pas connue,
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mais qu’il existe des symptômes néonatals évocateurs. study. Neurology 63:571–3
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