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Annales.

Economies, sociétés,
civilisations

Du fédéralisme et de Proudhon
Lucien Febvre

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Febvre Lucien. Du fédéralisme et de Proudhon. In: Annales. Economies, sociétés, civilisations. 1ᵉ année, N. 3, 1946. pp. 264-
265;

doi : https://doi.org/10.3406/ahess.1946.3223

https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1946_num_1_3_3223

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DU FÉDÉRALISME ET DE PROUDHON

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d'ailleurs. MUe Amoudruz pense bien, enfin ; je veux dire qu'elle replace,
avec infiniment de bon sens et de raison, son Proudhon diplomate — si
l'on peut dire ! — dans le cadre de 'l'histoire de son temps. Tout ceci
est très intelligemment fait.
Proudhon, ce vaincu de l'évolution historique. Il est bien vrai que-
ce les événements lui ont donné tort ». Il est bien vrai que, s'il n'est
pas d'accord avec les passions de son temps, « c'est parce qu'il est en
retard sur lui, non parce qu'il le devance ». Il est bien vrai qu'en matière
de politique étrangère, « son idéal reste celui d'un individualiste et
d'un provincial qui comprend obscurément les dangers d'une période
nouvelle, sans discerner les causes impitoyables de ce renouvellement ».
Mais il est vrai aussi, — et Georges Lefebvre le signale en quelquee mots
remarquables dans la Préface dont il a doté le travail de MUe Amoudruz,
— il est vrai que Proudhon, fédéraliste, se maintenait dans le droit fil
d'un courant qui traverse tout le dix-neuvième siècle, d'un grand
courant dont le triomphe des idées de Tocqueville (et, d'ailleurs, lee faits
eux-mêmes) a conduit les Français à sous-estimer l'importance : car
c'est une vérité que « la Révolution populaire de 89, si jalouse qu'elle
se soit montrée d'achever et de fortifier l'unité nationale, tendait à la
concevoir sous la forme federative ». Quand les révolutionnaires
envisageaient l'avenir des relations internationales, c'est bien « vers une
entente librement consentie des peuples maîtres de leur destinée » que
leurs regards se tournaient. Par là, Proudhon s'inscrit dans une grande
lignée : Proudhon, porte-parole authentique « de cette démocratie de
conditions de la production moderne n'ont pas été favorables », mais
dont le désir, dont les rêves de fédéralisme ne peuvent que nous
apparaître comme un trait original de notre peuple.
DU FEDERALISME ET DE PROLDHON 265
Du peuple français. Du peuple franc-comtois aussi. C'est une
excellente idée qu'a eue MUo Amoudruz de chercher dans les origines comtoises
de Proudhon la source de son état d'esprit, ou l'une des sources de son
état d'esprit en matière de politique étrangère. Le fils du tonnelier du
Petit-Battant était bien de chez lui — et M1Ie Amoudruz a raison d'écrire
qu'au fond des conceptions de Proudhon, à l'origine même de son
fédéralisme, il y a la province, sa province, la Franche -Comté. Cette
Franche-Comté qu'il exaltait si naïvement, quand il s'écriait, en 18З8 :
« Que l'humanité grandisse, que la Franche-Comté soit radieuse, et
périsse ma mémoire ! » L'humanité, puis la Franche-Comté : entre ces
deux termes, rien... Les quelques indications que fournit MUe \moudruz
sur l'état d'esprit politique des Francs-Comtois marquants de cette
épotjue sont très intelligentes Elles auraient pu, sans doute, être
multipliées. J'ai souvent pensé, pour ma part, à l'intérêt — non pas
seulement provincial, on l'entend bien, mais national — d'une pareille étude,
en un temps où les Comtois occupent un peu partout en France, pour
la première fois, des positions importantes. Il aurait été bon d'insister
s>ur les rapports des Comtois avec les Suisses, leurs voisins ; il aurait
été bon de rappeler les souvenirs récents de i8i5. Mais ne semblons pas
reprocher à MUe Amoudruz d'avoir eu une idée excellente et de mettre
son lecteur sur une piste neuve.
Petit livre à lire. Et qui, souvent, dépasse l'intérêt d'une
'monographie. On y trouve, par exemple sur la Commune, des pages
excellentes (1З7 et suiv.j, justes de ton, et qui tendent à maintenir ouvert pour
l'historien un grand procès toujours pendant. L'esquisse de l'influence
proudhonienne. prolongée jusqu'à la fin du xrxe siècle, est fort
intelligente. On s'aperçoit, à lire attentivement ce travail élégant et bien
conduit, que le sujet n'est ni mince ni mort. Et qu'il vaut la peine
d'être signalé et lu.
Lucien Febvre.

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