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et Philippe Delebecque
professeur à l'université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)
Sûretés
Sommaire
La présente chronique couvre à titre principal les deuxième et troisième trimestres 2014.
S'il est un arrêt en matière de cautionnement qui mérite d'être remarqué dans la présente livraison, c'est celui du
23 septembre 2014 (n° 4), qui applique à la caution la solution prétorienne selon laquelle un tiers peut invoquer
sur le fondement délictuel la responsabilité contractuelle du créancier envers le débiteur principal. Elle ouvre de
nouvelles perspectives au sujet de l'irritante question des exceptions opposables par la caution. D'autres arrêts de
la Haute juridiction intriguent (n° 6, ouvrant un recours intégral à une caution personne morale contre une
caution personne physique) ou continuent d'intriguer (n° 1, relatif à l'omission de la formule « et mes biens »
dans la mention manuscrite). Un autre (n° 7) lève un coin du voile très opaque jeté par celui, très abondamment
commenté, du 7 janvier 2014 relatif à la fusion d'une société sous-caution.
La spécificité du porte-fort-sûreté se trouve confortée par un arrêt du 1er avril 2014 (n° 9).
S'agissant des sûretés réelles, l'actualité reste assez fournie. On notera que le contentieux sur l'exercice du droit
de rétention reste important de même que sur celui de la conformité des sûretés au regard de l'intérêt social ou
encore sur celui de l'assiette de l'hypothèque judiciaire conservatoire. Le débat sur la validité des pactes
commissoires masqués dans des ventes à réméré est relancé comme du reste sur celui du domaine de l'attribution
judiciaire. D'autres décisions méritent d'être retenues, qu'il s'agisse de l'arrêt sur la portée de la publicité du
contrat de crédit-bail ou encore de l'intéressante décision refusant, à juste titre, de valoriser le caractère
d'accessoire de la réserve de propriété.
1. Sûretés personnelles
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A. - Cautionnement
1. - Persiste et signe : l'omission de l'expression « et mes biens » dans la mention manuscrite prescrite par
l'article L. 341-2 du Code de la consommation emporte limitation du gage du créanciers aux seuls revenus
de la caution. - Cette étonnante solution, retenue une première fois par un arrêt du 1er octobre 2013 (Cass. com.,
1er oct. 2013, n° 12-20.278 : JurisData n° 2013-021291 ; Bull. civ. 2013, IV, n° 143 ; JCP E 2013, 1624, note D.
Legeais ; JCP G 2014, 207, J.-D. Pellier ; D. 2014, p. 127, note M. Julienne et L. Andreu ; Banque et droit 2013,
p. 43, obs. E. Netter ; RDC 2014, p. 230, note A.-S. Barthez ; V. aussi, à propos de cet arrêt, D. Legeais,
Cautionnement et mention manuscrite, suite... : RD bancaire et fin. 2013, étude 24), est réaffirmée dans les
mêmes termes par un arrêt du 27 mai 2014 (Cass. com., 27 mai 2014, n° 13-16.989, inédit : JurisData n°
2014-011518 ; RD bancaire et fin. 2014, comm. 131, obs. D. Legeais ; Contrats, conc. consom. 2014, comm. 231,
obs. G. Raymond). Solution étonnante, car de deux choses l'une.Ou bien - ce qui est le plus probable - la
reproduction incomplète de la formule « sur mes revenus et mes biens » procède d'un oubli ou d'une inadvertance.
Elle doit alors être qualifiée d'erreur matérielle. Si celle-ci est vénielle, il convient de ne pas en tenir compte et de
donner plein effet à l'engagement, comme si la mention avait été conforme, ainsi qu'il en a été décidé pour d'autres
omissions mineures. Si elle est au contraire substantielle - ce qu'il y a tout lieu de penser - la sanction ne peut être
que la nullité fulminée par le texte, qui impose une mention précise, « et uniquement celle-ci ».Ou bien le
souscripteur a volontairement et sciemment omis les termes « et mes biens », et la mention ne peut alors qu'être
jugée non conforme, emportant nullité de l'engagement, pour la raison déjà exprimée : l'article L. 341-2 est un
texte impératif, qui ne tolère aucune variante, ni aucun aménagement contractuel. S'il est certes possible d'exclure
tels biens du droit de gage général d'un créancier, encore faut-il, d'une part, que celui-ci ait clairement accepté
cette dérogation à la règle et, d'autre part, que la loi ne l'interdise pas. Tel est précisément le cas en l'occurrence.
On se demande ce que décidera la Cour de cassation lorsque l'omission portera sur « mes revenus » plutôt que sur
« mes biens ». Jugera-t-on que seul le capital du patrimoine de la caution constituera le gage du créancier ? Il est
vrai que les revenus sont aussi des biens.
2. - Caution étrangère : responsabilité du notaire pour ne l'avoir pas invitée à se faire assister d'un
interprète. - Peut paraître bien sévère la condamnation du notaire à garantir la caution à hauteur de la totalité de
la créance de la banque au motif que, « tenu d'éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques des actes
auxquels il prête son concours, (ayant) constaté la mauvaise connaissance de la langue française par son client »,
il ne l'avait pas invité à se faire assister par un interprète (Cass. 1re civ., 13 mai 2014, n° 13-13.509 : JurisData n°
2014-009380 ; JCP G 2014, act. 608 ; Bull. civ. 2014, I, n° 82). L'arrêt attaqué est en outre approuvé pour avoir
jugé que la faute de la caution elle-même, « était entièrement absorbée par celle, plus grave, de son notaire et qu'il
n'y avait pas lieu, dès lors, d'opérer un partage de responsabilité ». Est également écartée l'objection qui vient à
l'esprit tenant à la simple perte d'une chance, la Haute juridiction soulignant « qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des
pièces de la procédure que la société notariale ait soutenu que le préjudice résultant des manquements qui lui
étaient imputés s'analysait en une simple perte de chance ». On pouvait en effet nourrir a priori un doute sur l'effet
dissuasif qu'aurait pu avoir la présence d'un interprète.
3. - Notion de créancier professionnel : bailleur de locaux non utilisés par un professionnel pour sa propre
activité. - Une cour d'appel a jugé valable un cautionnement souscrit à l'occasion d'un bail commercial et
dépourvu des mentions manuscrites des articles L. 341-2 et L. 341-3 du Code de la consommation au motif que
« la société A. (bailleur) n'a pas pour activité professionnelle, même accessoire, la location de locaux dès lors
qu'elle a pour objet social l'activité d'entreprise générale de bâtiment et de marchand de biens ». Le bail portait sur
une partie non utilisée de ses propres locaux d'exploitation. L'arrêt est censuré pour n'avoir pas recherché « si la
location litigieuse ne constituait pas (...) une opération de nature à favoriser directement ou indirectement le but
poursuivi par celle-ci, son extension ou son développement » (Cass. com., 10 sept. 2014, n° 13-19.426, inédit :
JurisData n° 2014-020365). Cet arrêt révèle une conception particulièrement extensive de la notion de créancier
professionnel. Un tel bail peut difficilement être qualifié d'« activité » économique accessoire, au sens de l'arrêt de
référence du 9 juillet 2009 (Cass. 1re civ., 9 juill. 2009, n° 08-15.910 : JurisData n° 2009-049063 ; Bull. civ.
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2009, I, n° 173 ; JCP G 2009, doctr. 492, n° 5 ; JCP G 2009, 286, D. Legeais), qui avait retenu le critère du
« rapport direct avec l'une des activités professionnelles (du créancier), même si celle-ci n'est pas principale ». Un
lien indirect, même purement occasionnel, avec l'activité professionnelle paraît suffisant pour reconnaître au
créancier la qualité de « créancier professionnel ».
4. - Tiers au contrat principal, la caution peut invoquer le manquement contractuel qui lui cause un
préjudice. - La Cour de cassation a solennellement jugé le 6 octobre 2006 (Cass. ass. plén., 6 oct. 2006,
n° 05-13.255 : JurisData n° 2006-035298 ; JCP G 2006, II, 10181, note M. Billiau. - Dans le même sens, Cass.
com., 6 sept. 2011, n° 10-11.975 : JurisData n° 2011-018085 ; Bull. civ. 2011, IV, n° 126) qu'un tiers (qui, dans
ces deux espèces, n'était pas une caution) à un contrat pouvait agir sur le fondement délictuel contre un
contractant dont la faute contractuelle était source de préjudice pour lui. Un arrêt du 23 septembre 2014 applique
la même solution à une caution, dans une espèce où la dissimulation de passif par le cédant d'un fonds de
commerce avait conduit au redressement judiciaire du cessionnaire cautionné (Cass. com., 23 sept. 2014, n°
13-14.241, inédit : JurisData n° 2014-021850). Celle-ci est en effet tiers au contrat principal. Il était donc logique
qu'elle puisse se prévaloir de cette jurisprudence. La solution paraît pourtant difficilement conciliable avec
certaines autres en la matière. Ainsi, un arrêt retentissant a-t-il décidé le 8 juin 2007 que le dol dont a été victime
le débiteur principal était constitutif d'une exception personnelle dont la caution ne pouvait se prévaloir (Cass. ch.
mixte, 8 juin 2007, n° 03-15.602 : JurisData n° 2007-039197 ; JCP G 2007, II, 10138, note Ph. Simler ; et les
autres réf. citées JCP G 2007, I, 212, n° 6). La même solution a été étendue à d'autres manquements, tels que
l'octroi ou le retrait abusifs de crédit (Cass. com., 22 sept. 2009, n° 08-10.389 : JurisData n° 2009-049597 ; JCP
G 2009, doctr. 492, n° 8. - V. aussi CA Bordeaux, 11 avr. 2014 : JurisData n° 2014-007505). De même encore,
les cautions averties se voient-elles plus généralement, et sauf circonstances exceptionnelles, refuser la mise en
jeu de la responsabilité du créancier envers le débiteur, notamment pour défaut de mise en garde (V. après de
nombreux arrêts, Cass. com., 28 janv. 2014, n° 12-27.703 : JurisData n° 2014-001149 ; Bull. civ. 2014, IV, n°
20 ; RD bancaire et fin. 2014, comm. 128, obs. F.-J. Crédot et T. Samin ; RDC 2014, p. 365, obs. S. Carval). On
voit mal pourquoi certaines fautes du créancier pourraient être invoquées par toutes cautions et d'autres seulement
par les cautions non averties.
5. - La force majeure n'exonère pas la caution de son obligation. - Une caution opposait au créancier
poursuivant la disposition de l'article 1148 du Code civil, aux termes duquel « il n'y a lieu à aucun dommage et
intérêt lorsque, par suite d'une force majeure ou d'un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire
ce à quoi il était obligé ». Elle invoquait de graves problèmes de santé qui l'ont contrainte à cesser toute activité
professionnelle postérieurement à son engagement. La cour d'appel avait rejeté cette argumentation au motif que
le texte invoqué ne s'appliquait qu'à l'obligation d'indemnisation en cas d'inexécution contractuelle. Son arrêt est
approuvé : « le débiteur d'une obligation contractuelle de somme d'argent inexécutée ne peut s'exonérer de cette
obligation en invoquant un cas de force majeure » (Cass. com., 16 sept. 2014, n° 13-20.306, P+B : JurisData n°
2014-020972 ; D. 2014, p. 1868).Cet argument ne paraît pas avoir été, antérieurement, soutenu par une caution.
Pour être nouvelle, la solution s'imposait. L'exonération formulée par l'article 1148 du Code civil est justifiée par
l'impossibilité d'exécution de l'obligation, qui ne saurait donner lieu à des dommages et intérêts. Or, l'exécution
d'une dette de somme d'argent est toujours possible, tant, du moins, que le débiteur reste solvable. La solution
conforte la thèse selon laquelle l'obligation de somme d'argent n'est ni une obligation de faire, ni une obligation de
donner, question qui a été amplement débattue en doctrine. Elle permet aussi de mettre en relief une différence
supplémentaire entre le cautionnement et le porte-fort d'exécution, même lorsque celui-ci a pour objet une dette de
somme d'argent (pour un ex. V. Cass. com., 8 juill. 2014, n° 13-14.777, rapporté infra n° 9).
6. - Recours entre cofidéjusseurs : une société de caution mutuelle est-elle en droit de recouvrer par voie
de subrogation l'intégralité de la créance contre une caution personne physique ? - Une réponse négative à
cette question paraît s'imposer. En l'absence de conventions particulières, le recours entre coobligés se divise en
toute hypothèse, qu'il s'agisse de codébiteurs ou de cautions, que celles-ci soient personnes physiques ou
personnes morales, cautions institutionnelles ou simples particuliers, qu'elles se soient obligées ensemble ou
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séparément. Il ne s'établit aucune hiérarchie entre elles, à moins que l'une ne se soit spécialement engagée à ne pas
exercer un recours en contribution contre l'autre, ce qui permet inversement à cette dernière, si elle a exécuté
l'obligation, à exercer un recours pour l'intégralité de la créance contre la première. Est évidemment différente,
aussi, l'hypothèse du sous-cautionnement.Un arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le
18 mars 2014 paraît pourtant ouvrir à une société de caution mutuelle un recours intégral contre une caution
personne physique (Cass. com., 18 mars 2014, n° 13-12.444, P+B : JurisData n° 2014-005223 ; JCP E 2014,
act. 1220 ; Bull. civ. 2014, IV, n° 56 ; RD bancaire et fin. 2014, comm. 99, obs. A. Cerles ; RDC 2014, p. 391,
obs. R. Libchaber). En l'espèce, la banque créancière, ainsi doublement garantie, avait obtenu le paiement de sa
créance de la société de caution mutuelle. Subrogée dans les droits de la banque, la société avait investi celle-ci
d'un mandat de recouvrement contre la caution personne physique. Ce recours n'aurait dû porter que sur la moitié
du montant de la créance. C'est pourtant au paiement de la totalité de la somme que la seconde caution a été
condamnée envers la première : « après avoir relevé que la Socama, qui avait réglé à la banque, en vertu de la
garantie souscrite à son profit, la dette de la société, était subrogée à tous les droits et actions de leur créancier
commun, la banque, la cour d'appel en a exactement déduit que la Socama disposait du droit de poursuivre la
caution, fût-ce au moyen d'un mandat de recouvrement donné à la banque ».L'arrêt laisse perplexe. Certes, à
aucun moment il n'a été question, que ce soit dans l'arrêt ou dans le pourvoi, de division de la dette ou de
contribution. Dans son principe, le recours était évidemment fondé. Mais la division entre coobligés est de droit :
aux termes de l'article 2310 du Code civil, « la caution qui a acquitté la dette a recours contre les autres,
chacune pour sa part et portion ». Peut-être faut-il comprendre que l'arrêt s'est borné à statuer sur le principe du
recours, n'ayant été saisi que de cette seule question. Il reste que le résultat est le même que s'il s'était agi d'un
sous-cautionnement, alors que les deux garants n'étaient que des cofidéjusseurs.
B. - Garanties autonomes
8. - « L'engagement d'un garant à première demande est causé dès lors que le donneur d'ordre a un
intérêt économique à la conclusion du contrat de base ». - Cette formule d'un arrêt de la Cour de cassation du 3
juin 2014 (Cass. com., 3 juin 2014, n° 13-17.643, inédit : JurisData n° 2014-012246 ; RD bancaire et fin. 2014,
comm. 134, obs. A. Cerles), qui rappelle par ailleurs « qu'un engagement ne peut être qualifié de garantie
autonome que s'il n'a pas pour objet la dette du débiteur principal et comporte une stipulation de l'inopposabilité
des exceptions », mérite d'être relevée à deux autres titres : d'une part, parce qu'il qualifie clairement la garantie
autonome d'acte causé, alors que certains auraient voulu y voir une illustration de l'hypothétique catégorie des
actes abstraits ; d'autre part, en ce qu'il définit la cause de la garantie par l'intérêt économique du donneur d'ordre à
la conclusion du contrat de base. Cette définition de la cause, qui reste controversée, mérite approbation : la cause
de toute garantie personnelle - cautionnement, garantie autonome ou porte-fort d'exécution - réside dans
l'avantage escompté par le débiteur garanti dans l'opération principale, donc dans son « intérêt économique ». Il
est précisément proposé par le « projet Terré » de réforme du droit des contrats de substituer le concept d'intérêt à
celui de cause. Si ces deux concepts désignent la même réalité, on peut se demander si la substitution controversée
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9. - Consécration de la spécificité du porte-fort d'exécution. - Par un arrêt en date du 1er avril 2014 (Cass.
com., 1er avr. 2014, n° 13-10.629, P+B : JurisData n° 2014-006497 ; JCP G 2014, 752, Y. Dagorne-Labbe ;
Contrats, conc. consom. 2014, comm. 150, obs. L. Leveneur ; D. 2014, p. 1185, note B. Dondero ; RTD com.
2014, p. 309, obs. B. Saintourens ; RDC 2014, p. 347, obs. Th. Génicon), la chambre commerciale de la Haute
juridiction confirme le revirement opéré par un précédent arrêt rendu le 18 juin 2013 (cette chron. n° 12-18.890,
P+B : JurisData n° 2013-012446 ; JCP G 2013, doctr. 1256, n° 9) au sujet de la spécificité du porte-fort
d'exécution. En l'espèce, une société qui avait cédé sa clientèle d'expertise comptable s'est portée fort envers
l'acquéreur de ce que ses associés s'abstiendraient de toute intervention, directe ou indirecte, auprès de la clientèle
cédée. Or, il était reproché à l'un desdits associés d'avoir accepté de traiter des dossiers d'anciens clients du
promettant. Est censuré pour violation de l'article 1120 du Code civil l'arrêt qui avait rejeté l'action en
indemnisation du cessionnaire au motif qu'il n'était pas démontré que l'associé incriminé « les aurait démarchés, ni
qu'il aurait utilisé des moyens déloyaux ». Or, « le porte-fort, débiteur d'une obligation de résultat autonome, est
tenu envers le bénéficiaire de la promesse, des conséquences [dommageables] de l'inexécution de l'engagement
promis ».La particularité intéressante de l'espèce est que l'objet de la promesse était une abstention. Il est
particulièrement évident que l'assimilation du porte-fort d'exécution à un cautionnement et l'application de
l'exigence de la mention manuscrite de l'article 1326 du Code civil, solution antérieurement retenue par la
chambre commerciale (Cass. com., 13 déc. 2005, n° 03-19.217 : JurisData n° 2005-031318 ; JCP G 2006, II,
10021, note Ph. Simler. - Cass. com., 18 déc. 2007, n° 05-14.328 : JurisData n° 2007-042117 ; JCP G 2008, I,
152, n° 13, obs. P. Simler ; JCP G 2013, doctr. 1256, n° 9), sont inappropriées dans cette hypothèse. Mais il est
tout aussi évident que la promesse d'une action d'un tiers ne peut être traitée différemment de la promesse d'une
abstention. Le porte-fort de l'exécution d'une obligation par un tiers est constitutive d'une obligation de faire et
cette obligation, qui est toujours de résultat (V. Cass. 1re civ., 25 janv. 2005, n° 01-15.926 : JurisData
n° 2005-026634 ; Bull. civ. 2005, I, n° 43 ; JCP G 2006, II, 10021, 1re esp., note Ph. Simler. - Cass. soc., 3 mai
2012, n° 11-10.501 : JurisData n° 2012-009084 ; RDC 2012, p. 1205, obs. O. Deshayes ; RDC 2012, p. 1221,
obs. D. Mazeaud), est sanctionnée par une indemnisation du bénéficiaire à hauteur du préjudice subi du fait de son
inexécution. On regrettera seulement que la Haute juridiction ait cru bon d'ajouter que cette obligation de résultat
est « autonome ». Ce qualificatif n'ajoute rien, sinon le risque de confusion avec la catégorie des garanties
éponymes. L'obligation du promettant, indéniablement constitutive d'une garantie, n'est certes pas accessoire, au
sens où l'est le cautionnement, ce qui paraît à présent acquis. Mais elle n'est pas pour autant autonome : elle est
tributaire de l'existence, de la validité, de l'étendue... et de l'inexécution effective du « fait » - ou de l'abstention -
promis, alors que le propre d'une garantie réellement autonome est précisément d'être insensible, une fois
souscrite, à tout ce qui affecte l'obligation garantie.On peut noter que, dans un arrêt postérieur de la même
formation de la Cour de cassation, qui décide également « que l'engagement de porte-fort (en l'espèce, du
remboursement d'un compte courant d'associé) constitue un engagement de faire auquel n'est pas applicable
l'exigence d'une mention écrite par celui qui s'engage, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en
chiffres » (Cass. com., 8 juill. 2014, n° 13-14.777, inédit : JurisData n° 2014-018855), n'apparaît pas la mention
d'un caractère autonome de l'engagement.
Philippe Simler
2. Sûretés réelles
A. - Sûretés immobilières
10. - Privilège immobilier : l'attribution judiciaire du bien en pleine propriété est-elle possible ? - La
question avait déjà été posée : elle reçoit, une nouvelle fois, une réponse positive (V. Rép. min. n° 28606 : J0AN Q
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1er avr. 2014, p. 3052). Ayant déjà approuvé cette solution, nous nous permettrons de renvoyer à nos
observations précédentes (V. JCP G 2013, doctr. 1256, n° 12).
11. - Hypothèque : quelle imputation du produit de la vente dans l'hypothèse où le créancier détient
plusieurs créances sur un même débiteur ? - Lorsqu'un créancier hypothécaire détient plusieurs créances sur un
même débiteur, comment se fait l'imputation du produit de la vente de l'immeuble ? En fonction de l'intérêt du
créancier ? En fonction de l'intérêt du débiteur ? Ou en tenant compte de ce que les parties ont pu vouloir ou
encore, et plus simplement, en prenant en considération la date des inscriptions ? Ce dernier critère n'est pas dénué
de toute pertinence dans la mesure où il se fonde sur les principes mêmes du droit hypothécaire. L'arrêt rapporté
(Cass. 3e civ., 12 juin 2014, n° 13-18.595, P+B : JurisData n° 2014-013000) a préféré cependant s'en tenir au
droit commun de l'imputation des paiements et régler la difficulté en se demandant quelle était la dette que le
débiteur a le plus d'intérêt à voir, en tout ou partie, éteinte. L'arrêt ne donne aucune justification à sa solution, ce
qui ne signifie pas qu'elle soit inexacte, bien au contraire, puisque la question posée relève avant tout de la théorie
du paiement et non du droit des sûretés. Quant à l'appréciation de l'intérêt du débiteur, elle relève du pouvoir
souverain des juges du fond. En l'espèce, le paiement avait été imputé sur la dette la plus ancienne, de surcroît
garantie également par un cautionnement. On peut effectivement penser que c'est cette dette dont le débiteur avait
le plus d'intérêt à se libérer.
12. - Hypothèque : une SCI peut-elle affecter son immeuble - et le seul immeuble dont elle est propriétaire
- en garantie de la dette de l'un de ses associés ? - La réponse est clairement négative, alors même, vient de
préciser la Cour de cassation (Cass. com., 23 sept. 2014, n° 13-17.347, P+B : JurisData n° 2014-021821 ; JCP G
2014, act. 1043), que l'affectation hypothécaire entre dans l'objet de la société. Une telle garantie dont la SCI ne
tire aucun avantage est en effet « de nature à compromettre l'existence même de la société » : elle est, dans ces
conditions, contraire à l'intérêt même de la société. Un associé ne saurait se servir de « sa » société en vue d'en
tirer crédit pour sa propre satisfaction. La société n'en retire en effet aucun avantage, du moins a priori. Il en va
ainsi alors même que la garantie aurait été autorisée par l'ensemble des associés (Cass. 3e civ., 12 sept. 2012,
n° 11-17.948 : JurisData n° 2012-020134 ; Rev. sociétés 2013, p. 16, note A. Viandier). Le concept d'intérêt
social, compris comme l'intérêt de la société en tant que personne morale ou comme l'intérêt commun des
associés, est un instrument redoutable, car la nullité encourue a, assurément, un caractère absolu. Les créanciers
doivent y prendre garde, quitte pour eux à multiplier les précautions, ce qui n'est pas de nature à favoriser le crédit
en général.
13. - Peut-on prendre une hypothèque judiciaire conservatoire sur un bien insaisissable ? - La question
n'est pas vraiment nouvelle : faut-il rappeler que la Cour de cassation a déjà eu l'occasion de dire ou de rappeler
qu'une hypothèque conventionnelle ne pouvait grever un bien frappé d'inaliénabilité (V. Cass. 1re civ., 23 févr.
2012, n° 09-13.113 : JurisData n° 2012-002550 ; JCP G 2012, act. 302 ; JCP G 2012, doctr. 626, n° 16) ? En
l'espèce, le bien convoité avait été frappé d'insaisissabilité en application des dispositions de l'article L. 526-1 du
Code de commerce (cf. déclaration notariée d'insaisissabilité). Ce texte, d'interprétation stricte, car dérogatoire au
droit de gage général, interdit la saisie du ou des biens formant l'objet de la déclaration d'insaisissabilité, mais ne
s'oppose pas à l'inscription d'une hypothèque judiciaire à titre conservatoire sur ce même bien (Cass. com., 11
juin 2014, n° 13-13.643, P+B : JurisData n° 2014-012570 ; JCP G 2014, 925, J.-J. Barbieri). La solution est
justifiée au regard précisément des articles 2284 et 2285 du Code civil, d'autant plus qu'elle ménage
intelligemment le crédit de l'intéressé (rappr. Cass. 1re civ., 9 oct. 1985, n° 84-13.306 : JurisData n°
1985-702619 ; Bull. civ. 1985, I, n° 252, admettant l'inscription d'une hypothèque conservatoire en dépit d'une
clause d'inaliénabilité).
14. - Le créancier peut-il s'approprier la maison d'habitation de son débiteur ? - La réforme de 2006,
malgré ses audaces, ne l'a pas admis (C. civ., art. 2459). Voilà que la jurisprudence passe outre. En vérité, la
question est ancienne et repose le problème des ventes à réméré (i.e. avec faculté de rachat) masquant un pacte
commissoire. Il y a de nombreuses années au moment où la prohibition des pactes commissoires était encore un
principe, on s'était interrogé sur la validité des ventes à réméré précédées d'un crédit et ainsi conclues entre un
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débiteur et son créancier. Si le débiteur n'est pas en mesure d'exercer sa prérogative, c'est-à-dire s'il ne peut payer
le prix de rachat et donc s'il ne peut rembourser la somme initialement prêtée, le bien formant l'objet de la vente
reste la propriété du créancier qui peut ainsi faire une très bonne affaire. La jurisprudence avait su fixer quelques
critères de nature à contenir les abus de cette pratique (V. les références citées dans les notes infra). Ce sont
précisément ces critères que la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 21 mai 2014, n° 12-23.607, P+B : JurisData
n° 2014-010680 ; JCP G 2014, 942, F. Dourneaux ; Gaz. Pal. 2-3 juill. 2014, p. 11, obs. M. Mignot ; Journ. des
sociétés juin 2014, p. 60, note A. Hontbeyrie) vient de rappeler et de mettre à l'épreuve dans une espèce où le prix
de rachat de l'immeuble n'était pas très éloigné de la valeur du marché immobilier et ne supposait pas un emprunt
à taux usuraire, et où les parties n'avaient pas prévu que le débiteur resterait dans les lieux. En d'autres termes,
l'opération ne respirait pas l'usure et ses circonstances laissaient penser que le créancier n'était pas un habitué des
prêts doublés de ventes à réméré. Au demeurant, comme le souligne l'arrêt, la simple concomitance prêt - réméré
n'est pas un critère « significatif » (déterminant ?) du pacte commissoire prohibé. Il reste que le législateur et la
jurisprudence gagneraient sans doute à accorder leurs violons sur le régime du pacte commissoire portant sur des
immeubles à usage d'habitation. On avait cru comprendre, après la réforme des sûretés, que ces immeubles
devaient heureusement et nécessairement échapper à toute attribution en pleine propriété, ce qui appelait sans
doute une actualisation des critères jurisprudentiels jusqu'alors retenus.
B. - Sûretés mobilières
15. - Le choix entre droit de rétention et privilège : une prérogative discrétionnaire ? - Ce n'est pas la
première fois que l'on se demande si un créancier peut mettre en oeuvre librement la sûreté de son choix (V. Les
sûretés : Dalloz, coll. Précis Dalloz, 6e éd., n° 35). Une fois encore, la Cour de cassation laisse entendre que le
créancier ne commet aucune faute en choisissant la sûreté qui préserve le mieux ses intérêts (Cass. com., 13 mai
2014, n° 13-11.296, inédit : JurisData n° 2014-009923 ; DMF 2014, p. 613, rapp. J.-P. Rémery, obs. J. Lecat).
La solution ne paraît guère discutable, ce qui ne veut pas dire que la prérogative du créancier soit
discrétionnaire.Voici une société chinoise qui commande à une société française une cargaison de bois avec un
règlement de 10 % à la commande et le solde dans les 15 jours de la date d'émission des connaissements. Le solde
ne sera pas réglé. D'où un litige entre les parties et un arbitrage en Chine. L'acheteur ne peut présenter les
connaissements à la compagnie maritime, laquelle ne peut que s'abstenir de toute livraison. Faute de lettre de
garantie régulièrement délivrée par l'acheteur qui aurait pu débloquer le refus de livraison, le transporteur
immobilise les conteneurs et se prévaut de son droit de rétention en garantie des surestaries de conteneurs dues
(indemnités de retard dues par le destinataire de la marchandise en cas de non restitution des conteneurs dans les
délais contractuels). L'acheteur va le lui reprocher en imputant au transporteur une responsabilité pour avoir fait
prospérer sa créance de surestaries en tardant (+ de 15 mois) à mettre en oeuvre son privilège. À tort, observe
l'arrêt rapporté : « en raison du litige entre les vendeurs et l'acheteur et en l'absence de délivrance de la lettre de
garantie, les transporteurs maritimes [sont] fondés, avant de mettre en oeuvre leur privilège et de faire vendre les
marchandises, à attendre la solution du litige sur le fond et la concrétisation des engagements pris à leur égard par
[l'acheteur] ». Impossible ainsi de remettre en cause la rétention du transporteur. On précisera que les frais de
stationnement étaient bien la conséquence du litige commercial entre le vendeur et l'acheteur. L'acheteur portait la
responsabilité de l'échec commercial : il ne pouvait donc reprocher au transporteur une quelconque faute.Si le
choix de la rétention ou du privilège appartient, en principe, librement au créancier, l'exercice même de la
rétention est tout aussi libre, sans être pour autant discrétionnaire. Ainsi le transporteur qui écrit à son client qu'il
bloque l'ensemble de ses conteneurs sans distinction de date et bien qu'il ait été payé des prestations postérieures
au redressement judiciaire de ce dernier, commet-il un abus de droit et doit-il être condamné à restituer ce qu'il a
indument retenu (CA St Denis de La Réunion, 16 juill. 2014 : BTL 2014, p. 511).
16. - Le dépôt de garantie stipulé dans un contrat de bail est-il transmissible à l'ayant cause à titre
particulier ? - Sous réserve des dispositions particulières concernant les baux d'habitation imposant la restitution
au nouveau propriétaire (L. n° 89-462, 6 juill. 1989, art. 22), on peut le penser, compte tenu du caractère
accessoire de la garantie qui accompagne la créance de loyers. Le dépôt de garantie n'est qu'un gage ou, plus
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exactement, depuis la réforme des sûretés, un nantissement (cf. C. civ., art. 2355 soumettant, au demeurant, le
nantissement de biens incorporels, à défaut de dispositions spéciales, aux règles du gage corporel). Le nouveau
bailleur devrait donc bénéficier du dépôt de garantie initial et récupérer ainsi, par l'effet du transfert de propriété,
une bonne sûreté. Ce n'est cependant pas ce que dit la Cour de cassation qui, plus (trop ?) prudemment s'est
contentée d'affirmer que l'acquéreur de l'immeuble loué, nouveau bailleur, substitué pour l'intégralité des clauses
du contrat de bail et de ses accessoires, ne pouvait disposer de plus de droits que son vendeur et n'était donc pas
fondé à réclamer au locataire le règlement d'un nouveau dépôt de garantie (Cass. 3e civ., 26 mars 2014, n°
13-10.698, P+B : JurisData n° 2014-005976 ; D. 2014, p. 825 ; D. 2014, p. 1610, obs. P. Crocq ; RDC 2014, p.
400, obs. R. Boffa ; JCP E 2014, 1351, n° 11, obs. J.-B. Seube). Cette analyse, négative, est certainement fondée
au regard des principes les mieux établis du droit des obligations (nemo plus juris...), mais conduit le lecteur à se
demander si le nouveau propriétaire bénéficie pour autant et de plein droit de la garantie initiale. Sans doute (cf.
auteurs préc.), mais encore faut-il que celle-ci ait été constituée et n'ait pas été restituée entre-temps.
17. - Des fonds souverains peuvent-ils être nantis ? - A priori, non, car ces biens sont couverts par l'immunité
d'exécution des États et sont donc inaliénables et insaisissables. Tel est le cas des fonds figurant au crédit d'un
compte bancaire appartenant à un État souverain (ici la République d'Ouzbékistan) et alimentés par des
redevances versées en raison de la souveraineté de cet État sur son espace aérien et le survol de son territoire,
activité de puissance publique couverte par l'immunité d'exécution. Rien ne s'oppose cependant à ce que l'État
concerné renonce à son immunité en vue d'affecter les sommes en cause en garantie d'un prêt, en l'espèce consenti
pour acquérir un système de contrôle du trafic aérien, de surveillance radar et d'aide à la navigation aérienne. Les
fonds restent des fonds souverains, mais le créancier nanti ne pourra se voir opposer l'immunité. En d'autres
termes, la renonciation est spéciale et ne vaut que pour l'opération de nantissement et à l'égard du seul bénéficiaire
de la garantie. L'ensemble des créanciers ne saurait donc en profiter (V. Cass. 1re civ., 5 mars 2014, n°
12-22.406, P+B+I : JurisData n° 2014-003944 ; D. 2014, p. 1470). Le droit de gage général des créanciers n'est
pas ici en conflit avec le droit des immunités. Dès l'instant que des biens publics sont en cause, fussent-ils
étrangers, c'est le droit public qui s'impose et toute dérogation qui lui est apportée doit être comprise strictement.
18. - Crédit-bail, défaut de publicité : quelles conséquences ? - À la suite de la liquidation judiciaire d'un
crédit-preneur, le crédit-bailleur déclare sa créance. Le liquidateur l'assigne peu après en paiement d'une somme
représentant le montant des échéances réglées antérieurement au jugement déclaratif en considérant que les
paiements faits lui étaient inopposables faute de publication du contrat de crédit-bail. La publicité du crédit-bail
est en effet requise par l'article L. 313-10 du Code monétaire et financier sous peine non pas de nullité de
l'opération, mais d'inopposabilité aux tiers. De plus, faisait observer le liquidateur, les paiements effectués par le
crédit-preneur au crédit-bailleur en vertu d'un contrat non publié doivent être restitués en ce qu'« ils ont affecté le
droit de gage des créanciers de la procédure ». C'était sans doute faire produire au défaut de publicité trop d'effet :
comme l'a souligné la Cour de cassation (Cass. com., 29 avr. 2014, n° 13-12.528, P+B : JurisData n°
2014-008555), « le défaut de publicité [a] pour seul effet d'empêcher le crédit-bailleur de se prévaloir envers les
créanciers ou les ayants cause à titre onéreux du crédit-preneur de son droit de propriété sur la chose louée, mais
n'affect[e] pas ses droits sur les mensualités perçues antérieurement à l'ouverture de la procédure ».
19. - Réserve de propriété : quelle efficacité dans une procédure de surendettement ? - L'« effacement » des
dettes est une notion propre au surendettement. Vaut-il paiement ? Si oui, la créance est éteinte et la sûreté réelle
qui la garantit disparaît par voie de conséquence. Si non, le créancier conserve sa sûreté et spécialement le
vendeur bénéficiaire d'une clause de réserve de propriété garde la possibilité d'obtenir la restitution du bien vendu.
Le transfert de propriété étant subordonné au paiement du prix, si l'on admet que l'effacement vaut paiement, le
vendeur n'a plus que ses yeux pour pleurer. Si l'on considère que l'effacement de la dette ne peut être assimilé à un
paiement, il en va naturellement différemment et le bien couvert par la réserve de propriété ne saurait entrer dans
le patrimoine du débiteur surendetté et reste donc dans celui du vendeur. C'est précisément cette solution que la
Cour de cassation a retenue, en laissant entendre que le droit de propriété n'était pas lié au sort de la créance
(Cass. 2e civ., 27 févr. 2014, n° 13-10.891, P+B : JurisData n° 2014-003260 ; D. 2014, p. 1081, note D. R.
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Martin). Sans doute le caractère de sûreté de la réserve de propriété en est-il affecté et l'idée d'accessoire
passe-t-elle ainsi au second plan. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la réserve de propriété est
subordonnée au paiement intégral de la créance ou plus exactement au paiement avec satisfaction du créancier et
non pas au simple paiement qui, comme on le sait, vaut extinction de la créance.
20. - Les créanciers privilégiés peuvent-ils être payés en méconnaissance de leurs droits ? - Il est certain que
la loi peut porter atteinte aux causes légitimes de préférence et prévoir que les créanciers privilégiés seront
finalement payés au prorata de leurs créances comme de simples créanciers chirographaires : c'est ce que prévoit,
par exemple, le droit maritime lorsqu'une procédure de limitation de responsabilité est organisée (C. transports.,
art. L. 5121-10, al. 2) ou encore le droit commercial (C. com., art. L. 651-2, al. 3) prévoyant que les
condamnations des dirigeants en insuffisance d'actif sont réparties au marc le franc entre tous les créanciers. Mais
ces dispositions remettant en cause le droit de préférence des créanciers privilégiés ne sauraient se présumer :
ainsi en est-il, dans le cadre d'une procédure collective, lorsque les sommes recouvrées ne proviennent pas d'une
action en insuffisance d'actif (Cass. com., 11 juin 2014, n° 13-12.658, P+B+R+I : JurisData n° 2014-012817 ;
JCP G 2014, act. 719 ; D. 2014, p. 1270, obs. A. Lienhard ; D. 2014, p. 1610, obs. P. Crocq). Dans un autre arrêt
du 11 juin 2014 (n° 13-17.997 et n° 13-18.112, P+B+I : JurisData n° 2014-012806 ; JCP G 2014, act. 720 ; V.
sur ces deux décisions, Ch. Lebel, La répartition de l'actif en liquidation judiciaire : Rev. Lamy dr. aff. juill.-août
2014, p. 20), la Cour de cassation est venue préciser l'ordre de paiement des créanciers sur le prix de vente d'un
immeuble, à propos des frais de justice, puis à propos du remboursement des sommes avancées par l'Association
pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés aux salariés du débiteur en liquidation judiciaire.
Philippe Delebecque
Actualité bibliographique
Généralités
Ph. Malaurie, L. Aynès et P. Crocq, Les sûretés, La publicité foncière : LGDJ, 2014, 8e éd.
Sûretés personnelles
Sûretés réelles
A. Arsac et M. Roussille, Blocage d'un compte bancaire nanti : RD bancaire et fin. 2014, étude 10. - Ch. Gamaleur
Kameni, Les garanties excessives octroyées par un débiteur placé en procédure collective : Rev. Lamy dr. aff.
juill.-août 2014, p. 61. - C. Lebel, La répartition de l'actif en liquidation judiciaire : Rev. Lamy dr. aff. juill.-août
2014, p. 20. - S. Olivier, Le notaire et le nantissement de fonds de commerce : Dr. et patrimoine juill. 2014, p. 24 s. -
S. Piedelièvre, Patrimoine d'affectation, droits des créanciers et droit des sûretés, Mél. P. Le Cannu, 2014, p. 547. -
J.-F. Riffard, La loi type de la CNUDCI sur les opérations garanties : Rev. Lamy dr. contrats sept. 2014, p. 32. - J.-P.
Sénéchal, L'acquéreur d'un immeuble hypothéqué, Mél. P. Le Cannu, 2014, p. 577. - M. Sénéchal, Sûretés et
procédures collectives, à la recherche d'un équilibre, Mél. P. Le Cannu, 2014, p. 771.
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