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Prix : 60 e
La matière publiée dans cet ouvrage est répertoriée dans la base PASCAL de l’INIST
TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
TRENTE-HUITIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
et MALADIES MÉTABOLIQUES
SOUS LE PATRONAGE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D’ENDOCRINOLOGIE
SOMMAIRE
Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit
en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et
thérapeutiques............................................................................................................ 179
Jacques YOUNG (Paris)
Mots-clés : Hirsutisme, syndrome des ovaires polykystiques, hyperandrogénie, hyperplasie congénitale des
surrénales par déficit en 21-hydroxylase, anti-androgènes.
1. DÉFINITION
L’hirsutisme est défini comme le développement excessif de la pilosité dans des terri-
toires anatomiques qui en sont normalement dépourvus chez la femme : visage, thorax,
ligne blanche, régions fessière et intergénito-crurale. Il est important de le distinguer de
l’hypertrichose, définie comme le développement excessif de la pilosité dans des zones qui
en sont normalement pourvues chez la femme et qui ne sont pas androgénodépendantes,
parfois secondaire à des prises médicamenteuses (glucocorticoïdes ou ciclosporine).
Certaines études suggèrent que l’hirsutisme peut toucher jusqu’à 6 à 8% des femmes en
âge de procréer (3, 4), mais l’on ne dispose pas actuellement d’étude française concernant
la prévalence de ce symptôme.
2. PHYSIOPATHOLOGIE
Le cycle pilaire se découpe en 3 phases : l’anagène est la phase de croissance du poil,
durant 2-6 ans pour les cheveux, 3 à 6 mois pour le corps ; le catagène, phase de régression
du follicule pileux, durant 2 à 3 semaines pour les cheveux et la pilosité du corps ; le
télogène, phase de repos durant 3 à 4 mois.
L’hirsutisme est un phénomène androgéno-dépendant, résultant de l’interaction entre
les concentrations d’androgènes circulantes et la sensibilité du follicule pileux aux andro-
gènes. La peau possède, d’une part, un récepteur aux androgènes (RA) et, d’autre part, les
3. ÉVALUATION CLINIQUE
Il s’agit d’un temps important de l’évaluation puisqu’elle permet déjà une orientation
diagnostique.
L’interrogatoire doit préciser l’ancienneté de l’hirsutisme, son apparition par rapport à
l’installation de la puberté, une installation péri-pubertaire étant en faveur d’un syndrome
des ovaires polykystiques ou d’un déficit enzymatique surrénalien, alors qu’un hirsutisme
récent peut suggérer sur une pathologie tumorale. L’histoire des cycles doit ensuite être
détaillée, en particulier leur régularité, la présence d’épisode de spanioménorrhée ou
d’aménorrhée ou d’une infertilité. L’enquête familiale recherchera des antécédents d’hirsu-
tisme et d’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21 hydroxylase. On recher-
chera une prise médicamenteuse (androgènes, anabolisants) pouvant être responsable de
l’hirsutisme.
La sévérité de l’hirsutisme est classiquement évaluée par le score modifié de Ferriman-
Gallwey (6), où à chacune des neuf régions androgéno-sensibles est assignée une cotation
de 0 à 4 (Fig. 2). Un score supérieur à 8 définit arbitrairement l’hirsutisme. Son évaluation
reste néanmoins subjective et semi-quantitative. En outre, il peut être pris en défaut chez
les patientes blondes ou récemment épilées. Enfin, il est important de noter ces critères
n’ont été établis que dans une population de femmes blanches. Ce système de score reste
cependant utilisé dans les études cliniques et thérapeutiques.
Les autres signes cliniques de l'hyperandrogénie sont l'acné, la séborrhée et l'alopécie
androgénique. Il est important de souligner que l’acné prise isolément est un symptôme
relativement banal, surtout chez l'adolescente et la jeune femme. Il est considéré comme
un témoin d’hyperandrogénie lorsqu’il est inflammatoire, sévère, à topographie masculine
et touche au moins deux sites différents et s’accompagne de troubles du cycle menstruel.
Enfin on cherchera des signes en faveur d’une étiologie, en particulier en faveur d’un
syndrome de Cushing. La présence d’un acanthosis nigricans, témoignant d’une résistance
à l’insuline, oriente vers un syndrome des ovaires polykystiques.
4. EXPLORATION HORMONALE
L’évaluation hormonale est toujours indispensable. En présence de cycles menstruels, les
examens doivent être pratiqués au troisième jour du cycle ; chez une femme en aménor-
rhée, les examens peuvent être pratiqués soit indifféremment, soit entre trois et cinq jours
après une hémorragie de privation induite par un progestatif. Les recommandations
portant sur l’évaluation hormonale à réaliser devant un hirsutisme font l’objet d’un
consensus en France (7) :
- L e dosage de la testostérone totale est recommandé en première intention (7, 8)
Il s’agit en effet du principal androgène actif circulant, dont les concentrations varient
peu au cours du cycle. Il fait, par ailleurs, l’objet d’un contrôle de qualité en France (Pro.
Bio.Qual). La méthode de dosage recommandée chez ces femmes est la méthode de dosage
radio-immunologique après traitement préalable de l’échantillon (extraction ou extrac-
tion + chromotographie), en attendant l’utilisation plus large de la spectrographie de
masse (7, 8). Néanmoins, la grande majorité des laboratoires utilisent des méthodes
directes (RIA) sans extraction préalable. Les valeurs trouvées chez les femmes présentant
une hyperandrogénie et celles des femmes normales se chevauchent de manière impor-
tante. La diversité des kits, l’absence de normes claires en fonction de la tranche d’âge et
des groupes ethniques et de seuils consensuels compliquent aussi le diagnostic d’hyperan-
drogénie. Dans l’avenir, le dosage par spectrométrie de masse couplée à la chromatogra-
phie liquide (LC-MS/MS) devrait permettre d’améliorer ces performances, mais est encore
loin d’être disponible partout. Le dosage de la testostérone libre ne doit pas être utilisé du
fait de son manque de précision (7).
En cas de surpoids ou d’hyperinsulinisme, le dosage de la testostérone totale peut être
pris en défaut du fait d’une diminution de la protéine porteuse des stéroïdes sexuels, la
SHBG (Sex Hormone Binding Globulin), ce qui se traduira par une testostérone totale non
augmentée, malgré une augmentation de la production de ce stéroïde sexuel. La mesure de
la SHBG plasmatique permet de calculer un index de testostérone libre (FAI) très utilisé
(T/SHBG x 100) (7).
- Le dosage de la Δ4-androstènedione
Le dosage de la Δ4-androstènedione plasmatique doit être réalisé dans des laboratoires
spécialisés qui en ont bien établi les valeurs de référence. Son intérêt par rapport à la
mesure de la testostérone est mal évalué pour déterminer l’étiologie de l’hirsutisme. Une
élévation des androgènes prédominant sur la Δ4 androstènedione s’observe aussi bien dans
un syndrome des ovaires polykystiques, que dans un déficit en 21 hydroxylase.
5. DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE
5.1 Hirsutismes d’origine ovarienne
- Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) (80 à 90 %)
Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est une pathologie courante affectant
entre 5 et 15 % des femmes en période d’activité génitale dans les pays industrialisés (3, 4,
8, 11). Il constitue la principale cause de troubles des règles et d’infertilité de la femme. Ce
syndrome associe une hyperandrogénie à des troubles du cycle menstruel (cycles irrégu-
liers ou absence de règles) et une infertilité.
Décrit pour la première fois en 1935 par Stein et Leventhal, il s’agit d’un syndrome
hétérogène qui doit son nom de « polykystique » à un aspect bosselé des ovaires observé à
l’époque où l’on pratiquait des explorations chirurgicales chez ces femmes, mais on sait à
présent que cette appellation est impropre et qu’il s’agit en fait d’ovaires multifolliculaires.
Le SOPK reste un syndrome et, en tant que tel, aucun critère diagnostique n’est suffisant
à lui seul pour le diagnostic clinique (12). De même, le SOPK reste un diagnostic d’exclu-
sion. Les critères diagnostiques du SOPK ont évolué avec le temps (Tableau 1) (12, 13), ils
Tableau 1. - Evolution des critères retenus pour le diagnostic de SOPK
- Hyperthécose ovarienne
Il s’agit d’une forme sévère de syndrome des ovaires polykystiques, par hyperplasie
majeure du stroma et de la thèque associée à la présence d’îlots de cellules thécales lutéi-
nisées dans le stroma.
rone en 2e partie de cycle. L’échographie ovarienne retrouve des ovaires de taille normale,
sans signe de SOPK.
6. TRAITEMENT
Le traitement de l’hirsutisme repose sur l’utilisation de plusieurs types de médicaments
visant, soit à bloquer la production des androgènes ovariens, soit à bloquer leurs actions
périphériques, associés à des traitements locaux. Ce traitement fait actuellement l’objet
d’un consensus publié par la Société Française d’Endocrinologie (34).
CONCLUSION
L’hirsutisme est une pathologie fréquente, chronique et parfois invalidante dont la prise
en charge s’est améliorée avec l’utilisation conjointe de traitements médicamenteux et
locaux. Le bilan étiologique est indispensable, afin de ne pas méconnaitre une pathologie
tumorale ou génétique.
a
Service d'Endocrinologie et Médecine de la Reproduction,
IE3M, Hôpitaux Universitaires Pitié Salpêtrière - Charles
Foix, 47-83 boulevard de l’hôpital, 75013 Paris, France
anne.bachelot@aphp.fr
ABSTRACT
Hirsutism is a common clinical problem in women, and it reflects the interaction between
circulating androgen concentrations, local androgen concentrations, and the sensitivity of
the hair follicle to androgens. Polycystic ovary syndrome is the most common causes of the
condition. Treatment of hirsutism should be based on the degree of excess hair growth
presented by the patient and in the pathophysiology of the disorder. Treatment includes lifes-
tyle therapies.
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Mots-clés : gastroparésie diabétique, vidange gastrique, neuropathie végétative, motilité, pylore, scintigraphie,
prokinétiques, diététique, myotomie, neuromodulation gastrique.
Cette description typique d’un patient diabétique de type 1 atteint d’une neuropathie
digestive invalidante à type de gastroparésie, est une situation fréquente que les diabétolo-
gues sont amenés à rencontrer dans leur consultation. Malheureusement, les signes
cliniques aspécifiques, la complexité de cette complication, les difficultés d’établir un
diagnostic positif et enfin les limites ou la méconnaissance des solutions thérapeutiques,
aboutissent souvent à une insuffisance de la prise en charge de ces patients. Le présent
article vise à donner des pistes claires et pragmatiques pour le diagnostic de cette compli-
cation, et pour sa prise en charge.
INTRODUCTION
La gastroparésie est un état chronique caractérisé par une vidange gastrique retardée, en
l’absence d'obstruction mécanique. Cette pathologie est parfois associée au diabète mais se
rencontre aussi dans un certain nombre d’autres pathologies. Dans certains cas où aucune
étiologie n’est retrouvée, on parle de gastroparésie idiopathique. Elle se manifeste clinique-
ment par des symptômes digestifs pouvant être particulièrement invalidants. Dans le cas
du diabète, il s’agit d’une complication souvent mal connue ou mal identifiée mais qu’il
faut évoquer car elle retentit inévitablement sur l’équilibre glycémique : cela se traduit par
une instabilité glycémique, une fréquence plus élevée d’hypoglycémies notamment en
période postprandiale, ou des épisodes d’hypoglycémies sévères, ou une difficulté à la
récupération des épisodes hypoglycémiques. Les symptômes digestifs peuvent dans ce cas
être totalement absents.
PHYSIOLOGIE DE L’ESTOMAC
L’estomac est constitué de deux régions dont les actions sont différentes mais complé-
mentaires : le fundus qui est une zone de stockage de l’alimentation, l’antre et le pylore qui
assurent broyage et évacuation du bol alimentaire [Figure 1] (2). L’estomac est donc un
muscle innervé dont la fonction motrice est coordonnée avec celle du pylore pour assurer
une fragmentation et une progression régulière du bol alimentaire, assurant la régularité
Fundus
Cellules de Cajal
Vagues lentes
(fréquence de 3x/min.)
vagues
péristaltiques
m
corps
énu py
od lor
du e
an
tre
de la digestion. Cette vidange gastrique est également influencée par la viscosité du bol
alimentaire et sa densité calorique, expliquant certaines variations selon que l’alimenta-
tion est solide et/ou liquide et plus ou moins riche en graisses et en fibres. Chez des
individus sains, l'activité naturelle rythmique contractile de l'estomac sert à mélanger,
réduire et déplacer le contenu de l'estomac du fundus à l'antre. Cette activité péristaltique
provient de la région du pacemaker de l'estomac sur la grande courbure (cellules de Cajal)
et se propage vers le bas, vers l'antre et le pylore à une fréquence contrôlée par le rythme
naturel gastrique électrique appelé la vague gastrique lente, qui arrive à la fréquence
d'environ trois cycles par minute. Des vagues gastriques lentes arrivent en continu, tandis
que l'activité de contractions péristaltiques arrive seulement après une ingestion alimen-
taire. Grâce à cette activité rythmique péristaltique, l'estomac se vide de façon régulière et
prévisible après l'ingestion d'alimentation. Approximativement la moitié du contenu de
l’estomac sera extériorisé vers le duodénum en une à deux heures et seulement une très
faible partie de ce repas sera conservée après quatre heures.
DÉFINITION DE LA GASTROPARÉSIE
La gastroparésie est un trouble gastrique neuromusculaire qui se traduit par une vidange
ralentie de l'alimentation contenue dans l'estomac. Ce ralentissement est en rapport avec
une perturbation de la motricité gastrique et/ou grêlique. La gastroparésie est associée à
différents symptômes du haut appareil digestif, incluant nausées chroniques, vomisse-
ments fréquents, satiété précoce, ballonnements, gêne ou douleurs épigastriques. Ces
conditions pathologiques empêchent le patient de manger normalement et peuvent mener
à la déshydratation, à l’anorexie et à la perte de poids avec des déséquilibres électrolytiques
voire une dénutrition. Dans les cas les plus sévères, les patients peuvent nécessiter une
hospitalisation, la prescription d’antiémétiques intraveineux et une nutrition parentérale.
Oesophage Fundus
Corps
pylorospasme
Pylore Perte des
Pacemaker Cellules de Cajal
Cellules de Cajal
Rythme électrique
de base = 3 cts/min
Broyage et Hypomotricité
Antre antrale
évacuation Motricité duodénale
Régulateur du débit anormale
et anti-reflux
Duodénum Mauvaise synchronisation
antro-pyloro-duodénale
Figure 2. - Physiopathologie de la gastroparésie diabétique
T 50 % é 20 – 43 % é 410 %
T 100 min. é 19 – 33 %
% rétention à 4H é 380 %
T total é 270 %
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Pour affiner le diagnostic, et apporter une certitude sur les altérations supposées de la
vidange gastrique, il faut alors avoir recours à des explorations complémentaires.
1. L’endoscopie digestive réalisée le plus souvent pour une autre raison, met en évidence à
distance d’un repas, et après une période de jeûne respectée, la présence de résidus
alimentaires, voire la présence d’un bézoard. Même si cette situation est évocatrice de
gastroparésie, l’endoscopie n’est en aucun cas l’examen complémentaire permettant
d’en assurer le diagnostic. En effet, dans une série portant sur 26 patients dont la gastro-
parésie avait été authentifiée par la scintigraphie et/ou l’électrogastrographie, la fibros-
copie digestive était normale dans 50 % des cas, retrouvait des signes inflammatoires
dans 34 % des cas et des signes de rétention dans seulement 8 % des cas (30).
2. Le test de vidange gastrique utilisant des isotopes stables (scintigraphie gastrique)
constitue l’examen de référence pour affirmer l’existence d’un retard à la vidange
gastrique et donc la présence d’une gastroparésie selon la définition de valeurs normales
de vidange gastrique (31). Cette méthode reste cependant chère et difficile à mettre en
œuvre se heurtant à plusieurs problèmes techniques. L’examen est effectué le matin à
jeun, pour éviter la présence de résidus alimentaires. Selon des critères diagnostiques
internationaux, le retard de vidange gastrique est établi sur la détermination du T50 %
(temps nécessaire pour que la moitié du contenu de l'estomac soit éliminé) ou du
pourcentage de rétention à deux ou quatre heures après l'ingestion de ce repas (anormal
si le pourcentage de rétention dépasse 60 % à la 2ème heure et 10 % à la 4ème heure)(31).
Cet examen a fait l’objet d’un travail de consensus dans sa réalisation et son interpréta-
tion (32). Le repas test contient 120 g de blanc d’œuf mélangés avec 18,5-37 MBq
99m
Tc-colloïdes, 2 tranches de pain blanc toasté, 30 g de confiture et 120 ml d’eau (pris
en 10 minutes), correspondant au total à 255 kcal (72 % glucides, 24 % protéines, 2 %
graisses, 2 % fibres).
Un certain nombre de recommandations sont à suivre pour la réalisation de cet examen
initial lorsque l’objectif est de poser un diagnostic positif :
• Patient à jeun depuis minuit la veille, tabac inclus.
• Repas mangé en moins de 10 minutes.
• Glycémie idéalement inférieure à 2,75 g/l.
• D emi-dose d’insuline de la dose habituelle d'analogue rapide le matin chez les diabé-
tiques.
• Manger au moins 50 % de chaque composant du repas.
• Arrêt des prokinétiques 2 jours avant (métoclopramide, dompéridone, érythromy-
cine) sauf si l’objectif est d’évaluer leur efficacité.
• Arrêt des analgésiques opioïdes, anticholinergique et antispasmodique 2 jours avant.
• Arrêt des autres médicaments susceptibles d'avoir un effet sur la vidange gastrique
également 2 jours avant : atropine, nifédipine, progestérone, octréotide, théophyl-
line, benzodiazépines, phentolamine.
• Femmes en pré-ménopause : réaliser l’étude dans les 10 premiers jours du cycle (effets
des hormones sur la motilité gastro-intestinale).
• Interrogatoire : attention aux antécédents de chirurgie bariatrique ou gastrectomie
totale/partielle, hernie hiatale, noter si présence de vomissements ou non.
Une gamma-caméra mesure la vitesse à laquelle le radio-marquage passe de la cavité
gastrique vers l’intestin. Il importe de s’assurer de la standardisation de l’épreuve si les
tests sont pratiqués dans différents centres, de la teneur liquide ou solide du repas test,
et surtout du niveau glycémique avant et au cours du repas test. En effet, la variabilité
intra- et inter-sujet à cette épreuve dynamique est importante. La reproductibilité de la
scintigraphie gastrique semble même diminuée dans la population diabétique : le
meilleur critère serait le T50 % avec 93 % de reproductibilité. L’étude de la vidange des
solides est plus sensible que celle des liquides.
Selon les critères de Bonta et al. (33), il est également possible de définir si la poursuite
de l’examen sur 4 heures est nécessaire ou non. En d’autres termes, si la rétention
gastrique est > 65 % à la 2ème heure, le test est jugé pathologique ; si la rétention est <
45 %, il est considéré comme normal ; entre les deux, l’étude complète de la vidange
gastrique est à réaliser sur 4h. Enfin, ce test donne la possibilité de grader la gastropa-
résie à 4h : Grade 1 (faible) : rétention de 11 à 20 %, Grade 2 (modérée) : rétention de
21 à 35 %, Grade 3 (sévère) : rétention de 36 à 50 % portant également l’indication de
neuromodulation gastrique, et Grade 4 (très sévère) : rétention > 50 %. Alors que les
prokinétiques doivent être normalement arrêtés 2 jours avant le test lorsque celui-ci a
un objectif diagnostique, ce n’est plus obligatoire pour un suivi de gastroparésie préala-
blement identifiée.
3. Test respiratoire au 13C-acide octanoïque. Ce test possède une bonne reproductibilité
puisque la variabilité inter-individuelle est de 24 % et la variabilité intra-individuelle de
15 % dans une évaluation faite au sein d’une population de sujets témoins (34). Le test
consiste à prendre au cours d’un repas de 75 à 91 mg d’acide octanoïque marqué au 13C
et incorporé à un jaune d’œuf, cuit en omelette et ingéré. Le marquage est stable et des
échantillons d’air exhalé sont prélevés toutes les 15 minutes ou demi-heures pendant 3
à 4 heures selon les protocoles en vigueur. La teneur en carbone marqué est mesurée le
plus souvent par spectrométrie de masse. Ce test fournit des informations proches de
celles de la scintigraphie, à savoir, un T50 % de vidange gastrique et un T lag phase corres-
pondant à la phase de latence entre l’ingestion et le début de la phase de vidange
gastrique. Il est intéressant de noter l’assez bonne corrélation entre cette méthode et la
méthode « dite de référence » c’est à dire la scintigraphie sur deux critères tels que la lag
phase et le T50 % (r = 0.603 – 0.8257 ; p < 0.001-0.0001). En comparaison avec la méthode
scintigraphique, la sensibilité du test respiratoire est de 1.00 et la spécificité de 0.73 chez
des patients diabétiques. Elle est un peu moins bonne dans une population de sujets
avec gastroparésie clinique (score clinique > 2 vomissements sur 15 jours) et breath test
pathologique, la relamoréline améliore 4 symptômes importants associés à la gastropa-
résie (douleurs abdominales, nausées, ballonnements abdominaux, pesanteur postpran-
diale) mais pas significativement les vomissements, malgré de bons répondeurs. Une
amélioration des constantes de vidange gastrique de 10 % est aussi rapportée (45).
Rappelons ici qu’en 2015, la Food and Drug Administration a publié des recommanda-
tions pour l’évaluation de l’efficacité des médicaments chez les patients atteints de
gastroparésie (46).
7. Les interventions pyloriques
• L
’injection intra-pylorique de toxine botulique : la toxine botulique est utilisée avec
succès dans l’achalasie où il existe une hypertonie du sphincter inférieur de l’œso-
phage. On retrouve dans la gastroparésie une hypercontractilité pylorique qui
explique en partie le retard de vidange gastrique. Différentes études récentes
semblent souligner l’intérêt des injections intra-pyloriques de toxine botulique qui
améliorent les symptômes digestifs [47, 48, 49] et sont associées à une amélioration
de la vidange gastrique [47, 49] chez un certain nombre de patients. Cette technique
apparaît dépourvue d’effets indésirables. Toutefois les études menées concernent le
plus souvent un nombre restreint de sujets et des études contrôlées vs placebo doivent
être menées sur de plus grandes séries de patients pour confirmer ces effets. Ces
résultats encourageants mettent par conséquent l’accent sur la nécessité d’améliorer
l’hypercontractilité du sphincter pylorique, donc de réduire le pylorospasme classi-
quement observé en situation de gastroparésie de manière médicale ou chirurgicale.
• L
a mise en place endoscopique d’un stent transpylorique en métal auto-expansible a
été testée dans le cadre de petites études ouvertes, généralement chez les patients
atteints de gastroparésie réfractaire (50) Bien que les données soient incomplètes,
une amélioration de la vidange gastrique et de la clinique est observée chez 75 % des
patients avec un suivi adéquat, avec une plus grande efficacité chez ceux présentant
des nausées et/ou des vomissements prédominants.
• L
a pyloroplastie laparoscopique : Chez 177 patients, la pyloroplastie laparoscopique
améliore ou normalise la vidange gastrique chez près de 90 % des patients souffrant
de gastroparésie et réduit considérablement les symptômes de nausées, vomisse-
ments, ballonnements et douleurs abdominales (51). Le taux de morbidité global
était de 6,8 % avec quatre retours à la chirurgie et deux fuites digestives confirmées.
La durée moyenne de séjour était de 3,5 jours et le taux de réadmission était de 7 %.
Quatre-vingt-six pour cent des patients ont connu une amélioration de la vidange
gastrique avec une normalisation de 77 % (la vidange gastrique à la mi-temps est
passée de 175 ± 94 à 91 ± 45 min).
• L
a pyloromyotomie endoscopique : 30 patients avec gastroparésie post chirurgicale
(n=12), diabétique (n=11) et idiopathique (n=7), réfractaires aux autres thérapeu-
tiques (prokinétiques, érythromycine, injection toxine botulique, stent pylorique)
ont été suivis dans 5 centres cliniques. La durée moyenne de la procédure de pyloro-
myotomie était de 72 minutes (35– 223 min), et la longueur de la myotomie de 2.6
+/- 2.3 cm. La durée moyenne d’hospitalisation était de 3,3 jours (1–12 jours). Des
complications sont apparues chez 2 patients (ulcère et pneumopéritoine). Une
réponse clinique satisfaisante a été observée chez 26 patients (86 %) sur les 5,5 mois
de suivi. La scintigraphie gastrique a été répétée chez 17 patients, normalisée chez 8
des symptômes digestifs de gastroparésie. Quatre études ont été conduites dans des popula-
tions où les patients diabétiques étaient significativement représentés (de 71 % à 100 % de
la population de l’étude): parmi ces quatre études, trois étaient prospectives (21, 56, 57),
une rétrospective (20), avec un nombre de patients allant de 17 à 55, et sur des durées de
12 mois maximum [Tableau 3]. Une seule de ces études sur 55 patients dont 39 diabétiques,
possède maintenant un recul de 3 ans dans cette thérapie, permettant d’observer qu’il n’y
a pas d’échappement à la neuromodulation gastrique notamment en terme d’amélioration
métabolique (58). L’étude Wavess (55) comportant 52 % de patients diabétiques a été
menée en cross over mais ne fournit aucune donnée sur les paramètres métaboliques. Plus
récemment, 113 patients ont bénéficié d'un traitement par neuromodulation gastrique
(111 primo-implantations et 2 remplacements). Avec un recul moyen de 27 mois (1–113),
une amélioration des symptômes a été obtenue chez 91 patients (80 %) et était similaire
pour les sous-groupes diabétique et idiopathique. La nécessité de recours à une nutrition
artificielle (entérale et/ou parentale) a été diminuée dans les deux groupes (59).
Une métaanalyse sur les essais de neuromodulation gasrique retrouve une certaine
hétérogénéité dans la réponse au traitement (60). Dix études conduites entre 1995 et 2011,
ont été analysées. La méthodologie et la qualité des essais était très variable mais jugée
globalement faible sur un total de 601 patients, avec des résultats semble t’il plus favorables
chez les patients atteints de gastroparésie diabétique.
Notons également qu’en comparaison avec le traitement pharmacologique, la neuromo-
dulation gastrique apparaît nettement plus efficace dans le contrôle des symptômes
gastrointestinaux (58).
L’indication de la neuromodulation gastrique dans l’ensemble de l’arsenal thérapeutique
avait été initialement définie par l’AGA (American Gastroenterology Association) en 2004
et repris par différents auteurs (1, 28, 61). L’indication était définie par une rétention du bol
alimentaire de plus de 35 % à 4h lors de la scintigraphie gastrique.
Anamnèse et Diagnostic
Traitements
Nutrition entérale Apport direct de substances nutritives vers l’intestin via une
sonde alimentaire
Au total parmi toutes les solutions thérapeutiques, certaines ont fait plus ou moins
preuve de leur démonstration lors d’études randomisées et sur des populations suffisam-
ment importantes et des durées d’évaluation significatives (au moins 12 semaines) (22, 62).
En conclusion, un algorithme de prise en charge de la gastroparésie diabétique et d’autre
cause, a été établi et publié en 2013. Il repose sur un diagnostic positif basé sur la clinique
et des examens complémentaires calibrés dont la scintigraphie gastrique fait office de
« gold standard », puis d’un diagnostic étiologique. Pour la prise en charge thérapeutique,
les traitements dépendent de la sévérité de la maladie, ainsi que des répercussions notam-
ment nutritionnelles [Tableau 4] (22).
Liens d’intérêt du Pr Bruno GUERCI : Consultant, avis d’expert, travail d’écriture et de relecture,
participation à des études cliniques de phase II, III et IV, orateur à des symposia, co-financement ou
subventions à des projets de recherche clinique
Pour les firmes pharmaceutiques et industrielles, organismes et sociétés savantes suivants :
Firmes : Bristol-Myers Squibb, Sanofi Aventis, GlaxoSmithKline, Novartis, Novo Nordisk, Eli lilly, Johnson
& Johnson, Astra Zeneca, Boehringer Ingelheim, Janssen, Intarcia, Metacure, Pfizer, MSD, Roche
Diagnostic, Medtronic, Menarini Diagnostic, Abbott, Lifescan, Vitalaire, Dinno Santé, Ork’yn
Organismes : AFSSAPS, CNAMTS, CEPS, SFD, SFE, NSFA
ABSTRACT
Diabetic gastroparesis, a component of autonomic neuropathy, is the most common
manifestation of digestive neuropathy. Diabetes is responsible for about a quarter of gastro-
paresis. The digestive signs are often paucisymptomatic, but one must know how to evoke
gastroparesis in the face of any situation of metabolic instability, such as postprandial
hypoglycaemia. Nausea, vomiting, early satiety, gastric fullness, bloating are among the
most common clinical signs. Beyond the clinical symptoms, the reference test for the
diagnosis of gastroparesis is gastric scintigraphy. Other tests for diagnosis are available but
without any consensus. The basic treatment consists of improving metabolic control of
diabetes, splitting meals, reducing the amount of food intake, the content of non-digestible
fiber and fat in the diet. Drugs such as metoclopramide and domperidone can be tried, but
their effectiveness is often limited. The use of new serotonine receptor agonists and other
motilin-like molecules such as erythromycin are a very attractive and effective alternative
in the medium term. Other therapeutic approaches are being developed and validated, such
as ghrelin analogs, intrapyloric injections of botulinum toxin, laparoscopic pyloroplasty or
endoscopic pyloromyotomy. Finally, gastric neuromodulation is a technique that consists
in applying a continuous electrical stimulation of high frequency and low energy at the
level of the gastric antrum using a totally laparoscopically implanted device for treating
clinical forms of nauseas and vomiting refractory to conventional treatments. Never-
theless, a heavy nutritional care is sometimes necessary in the most severe forms. The
enteral route have to be preferred (nasojejunal tubing and then jejunostomy). In case of
inefficiency, especially in patients with grelic neuropathy and/or total digestive intolerance,
long-term parenteral nutrition is sometimes required.
Key-words : Diabetic gastroparesis, gastric emptying, autonomic neuropathy, motility, pylorus, scintigraphy,
prokinetics, diet, myotomy, gastric stimulation.
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Les pathologies corticosurrénaliennes sont rares mais touchent plus souvent les femmes,
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
parfois jeunes. Certaines de ces femmes dont la maladie est diagnostiquée et traitée peuvent
souhaiter un enfant. Dans d’autres cas, elles sont découvertes pendant la grossesse.
Cette revue aborde le cas de l’insuffisance surrénale, son diagnostic et sa prise en charge
durant une gestation, mais aussi les hyperfonctionnements corticosurrénaliens : syndrome
de Cushing d’origine hypophysaire ou surrénalien, hyperaldostéronisme primaire, en privi
légiant les aspects pratiques du diagnostic et du traitement, les risques pour la mère et
l’enfant.
Le lien particulier entre hyperfonctionnement, prolifération corticosurrénalienne et
grossesse est aussi analysé à la lumière des données de la littérature, en particulier
l’influence des hormones de la grossesse sur les mécanismes de la différenciation
surrénalienne et de la tumorigenèse.
1. INTRODUCTION
Les pathologies surrénaliennes sont rares mais peuvent toucher les femmes jeunes. Il
n’est donc pas rare d’avoir à prendre en charge une femme enceinte atteinte d’insuffisance
surrénale, d’hypercorticisme ou d’hyperaldostéronisme primaire ou d’en faire le diagnostic
dans ce contexte. La prise en charge est délicate pour la mère et l’enfant, notamment en
cas d’hyperfonctionnements surrénaliens. Ces situations restent malgré tout très rares, ce
pourquoi peu d’endocrinologues sont familiers avec cette prise en charge. Cette revue de
la littérature est centrée sur les connaissances pratiques nécessaires lorsqu’un dysfonction-
nement surrénalien est évoqué et/ou diagnostiqué pendant la grossesse. Nous évoquerons
aussi quelques éléments physiopathologiques plus récents expliquant en partie les liens
entre hyperfonctionnement corticosurrénalien, sexe féminin et grossesse. En revanche,
nous n’aborderons pas, faute de temps, la prise en charge des blocs enzymatiques.
2. A
DAPTATION DE L’AXE HYPOTHALAMO-HYPOPHYSO-
SURRÉNALIEN (HHS) ET DU SYSTÈME RÉNINE-ANGIOTENSINE
(SRA) À LA GESTATION
Durant la grossesse, l’adaptation de la synthèse d’hormones HHS et de leur régulation
doivent être prises en compte pour interpréter valablement les résultats des dosages et
3.1 Épidémiologie
Un travail récent (13) a évalué la prévalence de l’insuffisance surrénale primaire entre
5,6/100 000 en 2003 et 9,6/100 000 en 2011. Parmi les cas publiés d’insuffisance surrénale,
les causes primaires ou secondaires sont trouvées dans des proportions sensiblement égales.
L’insuffisance surrénale peut résulter d’une destruction des glandes surrénales par un
processus auto-immun, infectieux ou tumoral, un acte chirurgical ou un traitement
médicamenteux. Les causes auto-immunes sont les plus fréquentes. L’insuffisance surré-
nale peut alors être associée à d’autres atteintes auto-immunes dans le cadre d’une polyen-
docrinopathie de type 2 associant thyroïdite de Hashimoto, diabète de type 1 et/ou insuf-
fisance ovarienne prématurée. L’insuffisance surrénale peut également être d’origine
hypophysaire, secondaire à un déficit corticotrope. Les causes d’insuffisance surrénale
secondaires rejoignent celles de l’insuffisance anté-hypophysaire en général auxquelles on
peut ajouter l’insuffisance corticotrope post corticothérapie.
L’association d’une insuffisance surrénale et d’une grossesse est rare, compte tenu de la
rareté de la pathologie, mais aussi parce que l’insuffisance surrénale peut s’accompagner de
troubles de la fertilité. Dans les causes hypophysaires, une insuffisance gonadotrope peut
accompagner l’atteinte corticotrope, ce qui nécessitera le recours à la PMA pour permettre
une grossesse (14). Dans l’insuffisance surrénale primaire, le risque plus important d’insuf-
fisance ovarienne prématurée doit être connu et les patientes informées. Par ailleurs,
même si l’on exclut les patientes avec insuffisance ovarienne prématurée, on observe une
diminution du nombre d’enfants chez les patientes ayant une maladie d’Addison (15) en
comparaison de la population générale. La cause en est probablement multifactorielle. Le
contexte psychosocial de maladie chronique avec diminution de la qualité de vie et
moindre fréquence d’une vie de couple, sont des éléments d’explication. La réelle préva-
lence de l’insuffisance surrénale chez la femme enceinte n’est pas connue.
3.4 D
éterminer la cause d’une insuffisance surrénale lorsqu’elle est diagnostiquée
pendant une grossesse
Une concentration d’ACTH à plus de 2 fois la limite supérieure de la normale est évoca-
trice d’une cause basse. La légère augmentation de l’ACTH observée pendant la grossesse
ne complique pas habituellement le diagnostic différentiel entre insuffisance surrénale
primaire et corticotrope. Le dosage d’Ac anti 21-hydroxylase peut permettre, éventuelle-
ment, d’affirmer l’origine auto-immune. Les insuffisances surrénales d’origine haute sont
habituellement accompagnées d’une symptomatologie évocatrice (céphalées, troubles
visuels) par effet de masse sur les structures voisines, qu’il s’agisse de la nécrose d’un
macroadénome hypophysaire ou d’une hypophysite. Leur survenue concerne essentielle-
ment le 3ème trimestre de la grossesse. Une IRM sans injection peut être réalisée si les
céphalées sont intenses ou, bien entendu, en cas de déficit visuel.
césariennes sont également particulièrement fréquentes (presque 90 % des cas), expli-
quées, d’après les auteurs, par des présentations défavorables ou d’autres raisons obstétri-
cales. En revanche, aucune mort maternelle directement liée à une insuffisance surrénale
n’est à déplorer.
4. HYPERCORTICISME ET GROSSESSE
L’hypercorticisme, en association à une grossesse est une situation rare du fait des
troubles de la fertilité associés à cette pathologie, malgré la plus grande fréquence de
l’hypercorticisme chez les femmes jeunes. Environ 250 cas ont été publiés à ce jour dans la
littérature, témoignant de la difficulté à évoquer et confirmer le diagnostic ainsi que du
mauvais pronostic pour la mère et pour l’enfant si l’hypercorticisme n’est pas contrôlé. Les
causes surrénaliennes tumorales sont au premier plan, participant au mauvais pronostic de
cette association et un certain nombre d’hypercorticismes d’origine surrénalienne stricte-
ment dépendants de la grossesse ont été décrits. Cette situation a été discutée dans
plusieurs revues récentes (24)(25). Nous nous centrerons ici sur quelques aspects pratiques,
notamment le diagnostic et le traitement.
4.1 C
omment diagnostiquer une hypersécrétion de cortisol chez une femme
enceinte et en déterminer la cause ?
La suspicion clinique d’hypercorticisme est difficile à évoquer pendant une grossesse :
prise de poids, vergetures, fatigue, hyperglycémie ou HTA sont logiquement d’abord attri-
bués à la gestation. Ces signes ou symptômes doivent toutefois attirer l’attention, surtout
s’ils s’associent à des signes d’hypercatabolisme bien plus spécifiques (ecchymoses, faiblesse
musculaire…) et/ou à une hypokaliémie. L’HTA gravidique concerne habituellement le
3ème trimestre de la grossesse. La constations précoce d’une HTA doit attirer l’attention et
faire évoquer une cause secondaire (26).
Lorsque le diagnostic est évoqué, l’exploration doit prendre en compte les modifications
physiologiques de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et du système rénine angio-
tensine aldostérone évoqués plus haut. Les dosages ou tests utilisés habituellement pour
faire le diagnostic positif d’hypercorticisme sont tous modifiés par l’état de grossesse. La
cortisolurie des 24 heures s’élève physiologiquement à 1,5 ou 2 fois la normale et les résul-
tats doivent donc être interprétés en fonction des normes de chaque trimestre (1). Comme
les laboratoires de biologie fournissent rarement des normes adaptées à leurs dosages pour
les femmes enceintes, l’Endocrine Society (27) recommande de considérer comme patho-
logiques des cortisoluries supérieures à 2 ou 3 fois la limite supérieure de la normale à
partir du 2ème trimestre. Les tests de freinage sont fréquemment pathologiques, même
lorsque l’on dose la cortisolurie des 24 heures donc la forme libre (5). En effet la grossesse
s’accompagne d’une relative résistance au freinage dont le mécanisme n’est pas formelle-
ment établi. Le cycle est préservé pendant la grossesse mais atténué par l’élévation du
cortisol plasmatique. Le cortisol salivaire à minuit lui même, non modifié par l’augmenta-
tion de la CBG, semble avoir des normes légèrement plus élevées pendant la grossesse
(28), même si cette notion est discutée (3). C’est ce dernier test qui apparaît le plus sensible
pour établir le diagnostic d’hypercorticisme chez une femme enceinte.
Le diagnostic étiologique peut également s’avérer délicat. Les causes surrénaliennes
tumorales constituent les deux tiers des cas d’hypercorticisme découverts pendant la
grossesse (29) comme détaillé ci dessous, une proportion inverse de celle qui est observée
en dehors de la gestation où l’adénome corticotrope est, de loin, la cause le plus fréquente.
De façon remarquable, la concentration d’ACTH reste détectable dans presque la moitié
des cas d’hypercorticisme d’origine surrénalienne diagnostiqués pendant la grossesse (5).
On ne dispose pas de normes établies pendant la grossesse pour les tests à la CRH et le
freinage fort par la dexaméthasone. En revanche, l’imagerie est très utile pour déterminer
ou confirmer la cause de l’hypercorticisme. L’échographie et l’IRM surrénaliennes ainsi
que l’IRM hypophysaire peuvent être réalisées si besoin, sans injection de gadolinium.
L’échographie est un examen considéré comme peu performant pour la surrénale mais qui
s’avère utile pendant la grossesse: sur 15 patientes rapportées par Linsdsay et al. présentant
un hypercorticisme d’origine surrénalienne, l’échographie a permis de localiser la tumeur
dans 11 cas. Quel que soit le résultat de l’échographie, une IRM doit être réalisée. L’IRM,
sans injection de produit de contraste, visualise la tumeur, renseigne sur sa taille, ses
rapports avec les organes de voisinage et apporte des arguments pour la malignité (hétéro-
généité, hypersignal en T2, absence de chute de signal en opposition de phase qui évalue
le contenu en graisse). La répétition des dosages d’ACTH et l’imagerie permettent
habituellement de conclure quant à la cause.
même un cathétérisme des sinus pétreux peuvent être réalisés pendant la gestation. La
balance bénéfice-risque est nettement en faveur de la chirurgie (5)(25). Le moment le plus
approprié semble être le deuxième trimestre (25)(32) car une anesthésie générale pendant
le premier trimestre semble associé à un risque accru de fausse-couche spontanée (FCS)
tandis que le troisième trimestre expose à un surcroît de risque de prématurité et d’hyper-
pression dans la veine cave inférieure. La chirurgie trans-sphénoidale pratiquée à ce terme
donne, selon le petit nombre de cas publiés, des résultats rassurants (25). Une chirurgie
surrénalienne, si elle est indiquée, sera, elle-aussi, réalisée au mieux au 2ème trimestre, sauf
en cas de suspicion de malignité où l’exérèse est à réaliser dès que possible. Une chirurgie
au 3ème trimestre est également envisageable avec des taux de prématurité sans doute plus
important (30). Une surrénalectomie laparoscopique peut, en effet, être réalisée jusqu’à 32
semaines (33)(34) avec une amélioration de la mortalité fœtale et de la morbidité mater-
nelle mais une fréquence toujours très élevée de prématurité et de RCIU. En cas de tumeur
maligne, même si les suites immédiates sont simples, il faut souligner la fréquence élevée
des récidives précoces (35). L’ablation de la tumeur expose, en cas de succès, à une insuffi-
sance corticotrope qui devra être prise en charge comme toute insuffisance surrénale chez
la femme enceinte (voir ci-dessus).
Les traitements médicamenteux de l’hypercorticisme ont parfois été utilisés pendant la
grossesse (36)(30). L’efficacité et la tolérance sont correctes, si l’on en croit la vingtaine de
cas rapportés. Le produit le plus souvent utilisé est la métyrapone. Il faut toutefois souli-
gner le risque d’accumulation de desoxycorticosterone (DOC) du fait du bloc en
11 hydroxylase et donc du risque d’HTA avec hypokaliémie pouvant évoluer vers la
pré-éclampsie. Le ketoconazole a été utilisé de façon efficace et sans effet secondaire
notable chez trois femmes enceintes atteintes de tumeurs surrénaliennes, malgré son effet
anti-androgénique. Il paraît toutefois logique de le réserver aux femmes ayant besoin d’un
traitement médical et ne tolérant pas la metyrapone. Quant à l’Op’DDD (mitotane), il est
contre-indiqué du fait de sa parenté avec le DDT qui en fait un perturbateur endocrinien
et un tératogène probable. Six cas publiés d’enfants exposés n’ont toutefois pas confirmé
ces craintes (37) (38) (Magkou D, 2018, sous presse) mais l’autopsie après une ITG d’un
embryon de 8 semaines exposé au mitotane retrouvait un aspect anormal des structures
surrénaliennes (39). Parmi les médicaments à effet central, la cabergoline à fortes doses a
été utilisée à deux reprises (40) (41) avec une rémission complète de l’hypercorticisme. Il
n’y a pas de publication sur l’utilisation du pasiréotide pendant la grossesse. D’une façon
générale, les médicaments doivent être réservés à une prise en charge urgente et brève, en
attendant un traitement chirurgical indiqué le plus rapidement possible.
tion particulière (7), on peut estimer sa prévalence entre 0,6 et 0,8 % chez les femmes
enceintes. Mais si l’on considère que seules 0,24 % des HTA pendant la grossesse sont des
HTA secondaires, quelle qu’en soit la cause (26), la proportion est probablement beaucoup
plus faible. Une revue de la littérature francophone et anglophone jusqu’en 2018 ne
retrouve que 42 cas publiés.
5.2 P
rise en charge thérapeutique de l’hyperaldostéronisme primaire chez une
femme enceinte
Compte tenu du diagnostic de plus en plus fréquent de l’HAP et de la fréquence de
l’HTA chez des adultes jeunes, le problème de la grossesse chez ces patientes risque de se
présenter de plus en plus souvent. Lorsque l’HAP est connu avant la grossesse, l’évolution
des symptômes est imprévisible. Certaines patientes peuvent observer une amélioration de
l’HTA sous l’effet de la progestérone et de son action anti-aldostérone. Une récidive de
l’HTA et de l’hypokaliémie sera observée après l’accouchement. D’autres cas s’aggravent
au contraire en cours de grossesse et deviennent difficiles à contrôler avec des consé-
quences sévères sur le développement de l’enfant.
Bien qu’aucune recommandation officielle n’ait été publiée, les propositions suivantes
peuvent être faites, basées sur les données de la littérature et les effets secondaires connus
des traitements antihypertenseurs.
Si un HAP est connu chez une jeune femme, une sécrétion unilatérale doit être recher-
chée et en cas d’adénome de Conn, l’exérèse doit en être réalisée avant d’envisager la
grossesse. Si la sécrétion est bilatérale, l’HTA doit être contrôlée en pré-conceptionnel en
évitant au maximum la spironolactone. En effet, cette molécule passe le placenta, se lie au
récepteur des androgènes et exerce un effet anti-androgénique qui fait craindre la fémini-
sation d’un fœtus masculin, comme observé chez le rat (45). En réalité, les quelques cas
publiés d’exposition chez l’homme n’ont pas confirmé ces craintes mais seulement une
quinzaine de naissances ont été rapportées. Aucune malformation y compris des organes
génitaux externes n’a été notée en dehors d’une ambiguïté sexuelle chez une fille, le lien
avec la spironolactone étant difficile à affirmer dans ce dernier cas. Dans le doute, il faut
éviter cette molécule en périconceptionnel et, au moins, durant le premier trimestre. On
utilisera en priorité les antihypertenseurs largement connus et prescrits pour traiter l’HTA
L’influence de la grossesse sur la sécrétion de cortisol par ces tumeurs a parfois été
rapportée (47) mais surtout sur le plus mauvais pronostic des corticosurrénalomes. D’une
façon générale, le fait d’être enceinte au moment de la découverte d’un cancer n’aggrave
pas le pronostic de la maladie à l’exception notable des cancers du sein. Le rôle aggravant
de la grossesse sur le pronostic se retrouve dans le cas des tumeurs corticosurrénaliennes
malignes (corticosurrénalomes, CS). Compte tenu des difficultés pour évoquer le
diagnostic, il n’est pas surprenant que les CS découverts pendant une grossesse soient
diagnostiqués à un stade plus avancé (31). Mais, même lorsqu’on compare des femmes dont
le CS a été découvert au même stade, la survie est plus courte chez les femmes dont la
tumeur a été découverte pendant une grossesse. Ainsi, le diagnostic de CS durant une
grossesse ou dans le post partum immédiat est un facteur indépendant de mauvais pronostic
(31). En revanche, la survenue d’une grossesse chez une femme dont le CS est connu et
traité ne semble pas aggraver le pronostic de la tumeur (48), en sachant que le biais de
sélection (« healthy mother effect ») peut avoir masqué un excès de risque et que la petite
taille de cette série reste une limite. Les femmes traitées pour un CS et en capacité d’avoir
un enfant pourraient même avoir un pronostic plus favorable que les femmes n’ayant pas
souhaité ou n’ayant pas pu être enceintes. On recommande toutefois une rémission avec
un recul suffisant (par exemple 5 ans) ainsi qu’une mitotanémie indétectable pour le projet
de parentalité.
6.3 E
mbryogenèse de la surrénale, développement postnatal et renouvellement
de la surrénale adulte
Le développement surrénalien chez le fœtus et l’enfant, tout comme le renouvellement
surrénalien à l’âge adulte, fait apparaître un dimorphisme sexuel qui offre des pistes pour
mieux comprendre le développement plus précoce et plus fréquent des maladies surréna-
liennes chez la femme que chez l’homme. Comme les gonades, la surrénale est formée à
partir de l’ébauche commune adrénogonadique exprimant les facteurs de transcription
Wilms Tumor suppressor-1 (WT1), GATA4 puis SF1. Autour de J28 post conception, cette
structure donne naissance à la surrénale primitive dans laquelle Wnt1 et GATA4 sont
réprimés et des cellules originaires de la crête neurale la rejoignent pour former la médul-
losurrénale. La gonade primitive qui continue à exprimer Wnt1 et GATA4 et se différen-
ciera ultérieurement en ovaire ou en testicule. Le cortex surrénalien fœtal est divisé en
deux parties : une partie interne, ou zone fœtale, destinée à involuer, et une partie externe
qui deviendra le cortex surrénalien définitif. Sous le contrôle de l’hCG, la zone fœtale
la voie Wnt/β-caténine est activée dans 40 % des tumeurs malignes du cortex surrénalien
par différents mécanismes dont des mutations ponctuelles de l’exon 3 de CTNNB1 (58).
Le rôle des hormones sexuelles dans l’équilibre entre ces deux voies AMPc/PKA et
Wnt/β-caténine reste à préciser. Un modèle murin de PPNAD par inactivation de
PRKAR1A a permis de mieux comprendre par quel mécanisme la maladie se manifeste
plus tôt et de façon plus intense chez les femelles que chez les mâles, comme dans l’espèce
humaine. Ceci s’explique en partie par un renouvellement plus lent du cortex surrénalien
chez les souris mâles, sous l’effet de la testostérone. L’action de la testostérone pourrait
passer par l’activation de Wnt/β-caténine (via la répression du récepteur FrzB) qui, en
s’opposant à l’activité PKA, pourrait expliquer l’atténuation du phénotype ou le retard
d’apparition de la maladie chez les mâles (59).
Le lien entre prolifération tumorale surrénalienne et grossesse reste partiellement
élucidé. Des récepteurs de la progestérone et de l’œstradiol ont été mis en évidence dans la
surrénale normale et dans les tumeurs bénignes et malignes de la corticosurrénale, à des
taux qui auraient été considérés comme associés à une réponse à une hormonothérapie
dans le cancer du sein (47). L’estradiol stimule la prolifération cellulaire dans la lignée de
corticosurrénalome H295R. L’inactivation de ER bloque la prolifération cellulaire induite
par l’E2 et l’ IGF-II dans cette même lignée (60). Le récepteur de la LH/hCG est également
exprimé dans les cellules corticosurrénaliennes tumorales et dans la lignée H295R.
Un modèle murin souligne le lien entre tumorigénèse surrénalienne et hCG/LH.
Certaines lignées de rongeurs développent des tumeurs corticosurrénaliennes malignes en
cas de castration, sous l’influence de la sécrétion de LH (61). Les bases génétiques de cette
susceptibilité ne sont pas encore éclaircies. Il s’agit d’un trait complexe influencé par
plusieurs loci. On sait que la castration induit dans les lignées murines susceptibles,
l’expression dans la surrénale de gènes habituellement exprimés dans les gonades : récep-
teur de la LH, AMH, inhibine, facteurs de transcription Gata4 et Wt1 (62). GATA 4
semble jouer un rôle prédominant dans le processus de tumorigenèse induit par la castra-
tion puisque l’expression transgénique de ce facteur de transcription suffit à induire le
développement de tumeurs de la corticosurrénale à partir de cellules sous capsulaires
progénitrices, et que son inactivation empêche le développement de tumeurs dans des
lignées normalement sensibles à la castration (63). Le lien entre GATA4 et prolifération
cellulaire reste inconnu.
Chez plusieurs patientes présentant un hypercorticisme dépendant de la grossesse, la
réponse in vivo à de multiples stimuli dont l’hCG a été bien documentée. L’équipe d’U.
Plockinger (64) a récemment détaillé les modifications histologiques et moléculaires
induites par l’hCG chez une patiente ayant présenté un syndrome de Cushing récidivant
à chaque grossesse avec hyperplasie surrénalienne réversible après l’accouchement… Les
auteurs ont confirmé la stimulation de la sécrétion de cortisol par l’hCG in vivo. Après
surrénalectomie, la surexpression du récepteur LH/hCG, des récepteurs de la vasopressine,
de la POMC et de GATA4 a pu être démontrée dans les cellules surrénaliennes, ainsi que
la sécrétion de cortisol, de minéralocorticoïdes et d’androgènes en réponse à l’hCG. Les
cellules surexprimant le récepteur de la LH/hCG étaient localisées dans la région sous-
capsulaire et la zone glomérulée, ainsi que parmi des cellules stéroïdogéniques hyperpla-
siques de la corticosurrénale. La médullosurrénale comportait des clusters de cellules
corti
cosurrénaliennes ectopiques coexprimant les enzymes CYP11B1/CYP11B2 et les
récepteurs AVPR1 & 2. Les mutations de CTNNB1, PRKAR1A, ARMC5, et PRKACA
ont été exclues. Les auteurs formulent l’hypothèse que l’hypercorticisme induit par la
grossesse chez cette patiente résultait de la transformation, sous l’effet de l’hCG, de cellules
sous-capsulaires indifférenciées exprimant le récepteur LH/hCG (des cellules progéni-
trices ayant conservé la possibilité d’exprimer des gènes normalement exprimés spécifique-
ment dans les gonades ?) en cellules corticosurrénaliennes hyperplasiques répondant à la
LH/hCG. La présence du facteur de transcription GATA4 dans ces cellules rappelle le
modèle murin décrit ci-dessus.
Des adénomes de Conn révélés pendant une grossesse ont été décrits avec histologique-
ment un aspect de type zone glomérulée (« glomerulosa–like adenoma ») (65), différents des
adénomes de Conn les plus fréquemment rencontrés, d’aspect fasciculé (« zona fasciculata–
like aldosterone-producing adenomas »), fréquemment mutés au niveau du gène KCNJ5 ou
d’autres canaux ioniques. Des mutations de CACNA1D sont au contraire retrouvées dans
les adénomes de Conn type « zona-glomerulosa-like » tout comme des mutations de
CTNNB1 codant pour la β-caténine (3 % des adénomes de Conn, associés au sexe
féminin). Par ailleurs, l’expression du récepteur LH/hCG a été rapportée dans des
adénomes de Conn. Un travail de Teo et al. sur trois adénomes de Conn révélés pendant
la grossesse a confirmé la particularité histologique (aspect de type zone glomérulée) des
adénomes révélés pendant la grossesse, et la présence d’une mutation activatrice de la
β-caténine. Par ailleurs ces adénomes présentaient une surrexpression majeure du récep-
teur LH/hCG et du facteur de transcription GATA4. Les auteurs ont montré que la trans-
fection de CTNNB1 muté dans des cellules glomérulées en culture primaire suffisait à
induite l’expression du récepteur LH/hCG (46).
7. CONCLUSION
Diagnostiquer une pathologie corticosurrénalienne chez une femme enceinte et la
traiter constitue un cas de figure rare et difficile, avec des risques pour la mère comme pour
l’enfant. La prise en charge de la patiente nécessite une collaboration étroite entre endocri-
nologue, obstétricien et pédiatre, mais aussi une concertation avec les médecins biochi-
mistes et radiologues. Les liens physiopathologiques entre prolifération/sécrétion cortico-
surrénaliennes et les hormones produites durant la grossesse commencent tout juste à être
connus. Ils sont l’objet de recherches dont l’enjeu est une meilleure connaissance du
dimorphisme sexuel qui caractérise la pathologie surrénalienne en général. La prise en
charge oncologique des patientes devrait en être améliorée.
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
XXXXXXXXX
by Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU,
Capucine DE MARCELLUS, Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT,
Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU, Laure CAZABAT
and Marie-Laure RAFFIN-SANSON (Boulogne - France)
ABSTRACT
Om xxxx
Key-words : m .
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NOTES
doit pas être systématique mais réalisé uniquement en cas de très haut risque
cardiovasculaire. Nous proposons de considérer dans cette catégorie les patients avec
atteinte d’organe évoluée et de considérer, au cas échéant, ceux qui présentent un score
calcique coronaire ≥ 400 UA. Cela permettra peut-être dans cette population très ciblée
de limiter le risque cardiovasculaire résiduel, comme le suggère une méta-analyse récente.
Mots-clés : diabète, coronaropathie, ischémie myocardique silencieuse, score calcique coronaire, revascu
larisation.
La coronaropathie représente toujours une menace de Santé Publique, avec 2,2 fois plus
d’hospitalisations pour infarctus du myocarde chez les patients diabétiques que chez les
non diabétiques en France (1). Actuellement, les patients diabétiques gardent un sur-risque
cardiovasculaire malgré une prise en charge optimisée (2). Une partie du risque résiduel
semble attribuable à la coronaropathie silencieuse.
Le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse (IMS) chez le patient diabétique a
été très longtemps recommandé et pratiqué très largement, notamment en France (3).
Cependant, il a été remis en cause par plusieurs études randomisées (4-7). De nombreuses
recommandations prônent maintenant de ne plus effectuer de dépistage chez le patient
asymptomatique, mais certaines proposent encore un dépistage très sélectif s’il est accom-
pagné de mesures thérapeutiques en cas de diagnostic positif.
ne s’agit pas d’IMS. Une coronarographie doit être réalisée immédiatement en cas d’ano-
malies à l’ECG de repos en faveur d’un infarctus silencieux (3).
- Chez le patient totalement asymptomatique, dépister par un test non invasif
La scintigraphie myocardique et l’échographie de stress sont plus sensibles que l’ECG
d’effort pour dépister des patients avec une coronaropathie silencieuse (22). Les résultats
des épreuves réalisées chez les mêmes patients peuvent être cependant hétérogènes selon
l’épreuve effectuée. Dans une série de 262 patients diabétiques asymptomatiques ayant
effectué une scintigraphie myocardique de stress (c'est-à-dire après ECG d’effort),
54 patients avaient un ECG d’effort anormal, et 42 patients supplémentaires avaient des
anomalies de la scintigraphie alors que l’ECG d’effort était normal (23).
La valeur prédictive positive de l’IMS pour détecter des sténoses coronaires significatives
est plus élevée lorsque deux tests fonctionnels sont concordants. Dans la série de patients
citée plus haut, la valeur prédictive positive d’une anomalie isolée scintigraphique ou à
l’ECG d’effort était de 45 % environ, contre 64 % lorsque anomalies scintigraphiques et à
l’ECG d’effort étaient combinées (23).
des patients avec une scintigraphie anormale normalisaient leur scintigraphie trois ans
plus tard, probablement grâce au traitement intensif de leurs facteurs de risque (37). Ainsi,
la prévalence de l’IMS diminue progressivement. L’équipe de Montpellier a récemment
rapporté que la prévalence de l’IMS avait progressivement diminué de la période 1999-2002
(22,9 %) à 2003-2005 (13,9 %) pour tomber à seulement 5,9 % en 2006-2009 (38).
- Le score calcique coronaire :
La tomodensitométrie cardiaque quantifie les calcifications coronaires dont la quantité
est proportionnelle à la probabilité de plaques athéromateuses. Le score calcique coronaire
(CAC) score est associé à la présence d’une IMS, et d’autant plus élevé que l’ischémie est
sévère (39). Dans la série de Bondy, nous trouvons une association entre CAC score et
IMS (1/3 des patients avec un CAC score ≥ 100 UA ont une IMS contre 10 % pour ceux
dont le CAC score est < 100). Le CAC score est d’autant plus utile pour sélectionner les
patients à risque d’IMS qu’ils ne présentent pas de macroprotéinurie ni d’artériopathie
périphérique (qui leur confèrent, de toute façon, un très haut risque cardiovasculaire a
priori). Enfin, 75 % des patients qui présentent une IMS et des sténoses coronaires signifi-
catives ont un CAC score ≥ 100 UA.
ETAPE 1
- Examen clinique
- Evaluation des facteurs de risque cardiovasculaire
Routine - Bilan des complications du diabète
- ECG de repos
- Echographie cardiaque, dopplers (si disponibles)
Risque a priori
Bas Intermédiaire Elévé Très élevé
DT1 : âge < 15 ans Macroprotéinurie
ou ou
DT2 : âge < 40 ans Insuffisance rénale
Et ou
pas de FDR CV Rétinopathie proliférante
Et ou
pas de complication NAC symptomatique
ou
Atteintes vasculaires
ETAPE 2 périphériques
caractéristiques du patient.
- Que faire en cas d’IMS ?
Le traitement des facteurs de risque doit être optimisé, et le patient considéré comme à
très haut risque cardiovasculaire. Dans ce cadre, on privilégiera les molécules hypoglycé-
miantes à favoriser en cas de prévention secondaire (https://www.sfdiabete.org/sites/www.
sfdiabete.org/files/files/ressources/prise_de_position_sfd_diabete_type_2.pdf) (56). Un traite-
ment anti-angineux doit être mis en place. Enfin, le patient sera exploré par coronarogra-
phie pour évaluer si une revascularisation coronaire peut être utile.
La revascularisation coronaire est remise en cause depuis l’étude COURAGE qui avait
rapporté un pronostic identique comparativement au traitement médical multifactoriel
intensifié dans la population diabétique ou non (61), puis l’étude BARI-2D (Bypass Angio-
plasty Revascularization Investigation 2 Diabetes) qui avait montré, dans une population de
patients diabétiques de type 2 avec coronaropathie stable, que les patients relevant d’une
angioplastie, randomisés pour une angioplastie vs un traitement médical seul, avaient le
même pronostic. En revanche, les patients avec indication de pontage coronaire et rando-
misés dans le groupe revascularisation et pontés avaient un meilleur pronostic que ceux
traités médicalement (62). Les revascularisations permettaient toutefois de réduire la
symptomatologie, même après angioplastie (63).
Depuis, les angioplasties avec stents actifs ont montré une meilleure efficacité que les
anciennes méthodes d’angioplastie (64), avec cependant un risque de thrombose plus
important qu’après pontage. Actuellement, tout stent doit être actif chez le patient diabé-
tique pour limiter le risque de resténose (55). L’étude SYNTAX a montré chez des patients
présentant des lésions tritronculaires et/ou une sténose du tronc commun de la coronaire
gauche, dont un quart étaient diabétiques, que le traitement par pontage conduisait à
moins d’événements à 12 mois qu’un traitement par stent actif (65). Dans l’étude CARDIa
(Coronary Artery Revascularization in Diabetes) qui avait recruté des patients diabétiques
ayant une atteinte coronaire multi-tronculaire symptomatique, les patients randomisés
dans le bras pontage présentaient un taux de mortalité, d’infarctus du myocarde, d’acci-
dent vasculaire cérébral et de nouvelle revascularisation moindre que les patients dans le
bras angioplastie avec stent (66). L’étude FREEDOM (Future REvascularization Evaluation
in patients with Diabetes mellitus: optimal management of Multivessel disease), réalisée chez
des diabétiques dont 80 % présentaient des lésions tri-tronculaires, a montré que les perfor-
mances du pontage restaient meilleures que celles de l’angioplastie avec stent actif (67).
Au total, en cas de lésion coronaire unique simple, le traitement médical seul peut être
envisagé ; en cas de lésions multiples ou plus complexes (score SYNTAX > 22), chez des
patients opérables, il faut actuellement privilégier les pontages (68). Dans les autres cas, les
angioplasties peuvent être considérées comme une alternative pour contrôler les douleurs,
et doivent être réalisées avec stent actif (55) et double anti-agrégation (57).
AU TOTAL
L’IMS reste un bon marqueur de risque cardiovasculaire résiduel mais sa prévalence a
beaucoup diminué grâce à la prise en charge optimisée des facteurs de risque cardiovascu-
laire dans cette population. La proposition est donc de limiter la recherche d’une IMS à la
proportion très faible de diabétiques étiquetés en routine à très haut risque cardiovascu-
laire : soit a priori en raison d’une atteinte d’organe, soit a posteriori en raison d’un score
CAC très élevé. Le dépistage de l’IMS n’a de sens que s’il conduit à modifier la prise en
charge du risque cardiovasculaires en cas de positivité.
Les conclusions du groupe de travail de la Société Francophone de Diabétologie et de la
Société Française de Cardiologie, coordonné par les Prs Valensi et Henry, devraient être
publiées d’ici la fin d’année 2018.
1
P-HP, Hôpital Jean Verdier, Université Paris 13, Sorbonne
A
Paris Cité, service d’Endocrinologie-Diabétologie-Nutrition,
CRNH-IdF, CINFO, Bondy, France
2
Sorbonne Paris Cité, UMR U1153 Inserm / U1125 Inra /
Cnam / Université Paris 13, Bobigny, France
ABSTRACT
Screening for ischemia in asymptomatic diabetic patients should not be systematic but
rather performed solely in the patients with a very high cardiovascular risk. We propose to
include in this category the patients with severe organ damage, and if not, those with a
coronary calcium score ≥ 400 AU. This may limit, in this very selective population, residual
cardiovascular risk, as suggested by a recent meta-analysis.
Key-words : diabetes, coronaropathy, silent myocardial ischemia, calcium coronary artery score,
revascularisation.
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La gynécomastie est un symptome pouvant affecter les hommes à toutes les périodes de
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
leur vie. Le plus souvent, il s’agit d’une manifestation bénigne qu’il ne faut cependant pas
toujours banaliser puisqu’elle peut entraîner un préjudice esthétique important et qu’elle
peut être le premier signe clinique d’une affection maligne sous-jacente. Les principales
causes pathologiques de gynécomastie chez l’homme adulte sont, par ordre de fréquence
décroissante, la gynécomastie idiopathique, la gynécomastie pubertaire persistante (ou
récidivante), la gynécomastie induite par des médicaments, les causes d’hypogonadisme
primaire plus que secondaire, la cirrhose, des tumeurs, surtout d’origine testiculaire,
l’hyperthyroïdie et les causes ‘métaboliques’ comme l’insuffisance rénale ou la réali
mentation rapide. Le traitement est d’abord - si possible - étiologique. Ensuite, en fonction
de l’importance et de l’ancienneté du problème, une simple surveillance, un gel de
dihydrotestostérone, un traitement par tamoxifène ou une chirurgie plastique correctrice
peuvent être proposés.
parce que les facteurs favorisant la croissance du tissu mammaire chez l’homme sont aussi
ceux qui favorisent le cancer du sein (6). Une tumeur cancéreuse est habituellement
unilatérale, excentrée par rapport au mamelon, de consistance dure et adhérente à la peau
ou aux plans profonds (1). Elle est parfois associée à une petite rétraction du mamelon, un
écoulement ou à des adénopathies axillaires.
D’autres causes plus rares de masse au niveau de la région mammaire incluent des
hématomes, kystes dermoïdes, lipomes, neurofibromes ou lymphangiomes.
PHYSIOPATHOLOGIE DE LA GYNÉCOMASTIE
Une gynécomastie survient habituellement suite à une altération, passagère ou perma-
nente, chez l’homme, de la balance entre l’action des œstrogènes (œstradiol et œstrone) et
celle des androgènes, principalement la testostérone. Ces derniers sont des inhibiteurs de
la prolifération du tissu glandulaire mammaire alors que les œstrogènes stimulent la proli-
fération et l’élongation des canaux glandulaires et la vascularisation au sein du tissu
mammaire, comme chez la femme (1, 2). Cette altération de la balance œstrogènes-andro-
gènes peut résulter d’une augmentation absolue des concentrations d’œstrogènes libres,
d’une diminution des concentrations de testostérone libre, d’une augmentation du rapport
œstrogènes/androgènes, d’une résistance partielle à l’action des androgènes et/ou d’un
effet œstrogéniques de certains médicaments ou toxiques.
Il est utile de rappeler brièvement ici les mécanismes de production normale d’œstro-
gènes chez l’homme (Figure 2). Un homme en bonne santé produit en moyenne 45 µg
d’œstradiol par jour, dont une faible proportion (10-20 %) provient d’une sécrétion directe
par les cellules de Leydig testiculaires sous l’impulsion de la LH, et la majeure partie de
l’aromatisation extra-glandulaire des androgènes, principalement au niveau du foie et du
tissu adipeux. Ainsi, l’œstradiol peut être synthétisé directement par aromatisation de la
testostérone en œstradiol, via l’activité de la CYP 19 aromatase, ou indirectement, à partir
des androgènes surrénaliens : production de DHEA, transformée en androstènedione,
aromatisée en estrone, qui est ensuite converti en œstradiol (et vice-versa) sous l’effet de
l’enzyme 17β- hydroxystéroïde déshydrogénase (1,6). L’œstradiol circulant est en majorité
lié à la sex hormone binding globulin (SHBG) mais avec une affinité moindre que celle de
ÉTIOLOGIES DE LA GYNÉCOMASTIE
Les principales causes de gynécomastie sont reprises dans le tableau 1.
Causes physiologiques
Gynécomastie néonatale
Gynécomastie pubertaire
Gynécomastie de l’homme âgé
Causes pathologiques
Gynécomastie idiopathique
fœtale. Cette gynécomastie ne dure que quelques semaines et est spontanément résolutive.
Elle ne nécessite aucun traitement.
Parmi les adolescents, plus de la moitié sont touchés par une gynécomastie, généralement
très discrète et passant inaperçue. Elle survient aux alentours de 12 à 14 ans et une compo-
sante familiale est souvent retrouvée (8). On ne connaît cependant pas exactement le
mécanisme d’apparition de celle-ci. Elle pourrait être secondaire à une production retardée
de testostérone par rapport à celle des œstrogènes au début de la puberté, à une augmenta-
tion transitoire de l’activité de l’aromatase ou encore à une augmentation de la sensibilité
aux œstrogènes à cet âge. La régression spontanée de cette gynécomastie se fait classique-
ment en 1 ou 2 ans et il est rare qu’elle persiste après l’âge de 17 ans. Il n’y a dès lors pas lieu
d’intervenir médicalement ou chirurgicalement, sauf en cas de persistance inesthétique de
cette gynécomastie après la puberté (gynécomastie pubertaire persistante).
Une gynécomastie est également trouvée fréquemment chez l’homme âgé (30-50 % des
cas selon les séries) (1-5) et est souvent liée à de multiples facteurs : hypogonadisme physio-
logique lié au vieillissement, aromatisation accrue suite à l’augmentation de la masse
grasse, augmentation des concentrations de SHBG et/ou origine médicamenteuse.
Figure 3. - Fréquence moyenne relative des principales causes pathologiques de gynécomastie chez
l’homme adulte (l’utilisation de stéroïdes anabolisants n’est pas considérée dans ce classement et
pourrait constituer jusqu’à 10-15 % des causes de gynécomastie en général).
anormal qui peut constituer un problème esthétique important, nécessitant une prise en
charge médicale, voir chirurgicale (voir infra, traitement de la gynécomastie).
2. Les médicaments
Il s’agit d’une cause très fréquente de gynécomastie. La liste de médicaments utilisés
dans des domaines très différents qui peuvent induire une gynécomastie est très longue
(Tableau 2). Ceux qui sont le plus souvent incriminés sont la spironolactone, la ciméti-
dine, le kétoconazole, l’hormone de croissance recombinante, les œstrogènes, les anti-
androgènes, les agonistes de la gonadolibérine (gonadotropin releasing hormone -GnRH-) et
les inhibiteurs de la 5-alpha réductase (9). L’effet des médicaments est généralement dose-
dépendant. Ainsi, la spironolactone à faibles doses (25-50 mg/jour) induit une gynéco-
mastie chez environ 10 % des sujets masculins alors qu’une dose de 100 mg/jour ou plus
entraîne une gynécomastie quasi systématique (5). Les mécanismes sont multiples :
diminution des concentrations de testostérone, déplacement des hormones sexuelles de la
protéine porteuse, effet « œstrogène-like », blocage du récepteur aux androgènes,… Il est
Toxiques Chimiothérapie
Anti-ulcéreux Anti-fungiques
Oméprazole Kétoconazole
Cimétidine Itraconazole
Ranitidine
Autres Antibiotiques
Phénytoïne Métronidazole
Théophylline Isoniazide
Anti-protéases (infection VIH) Athionamide
3. L’hypogonadisme
Toutes les causes d’hypogonadisme chez l’homme, congénitales ou acquises, primaires
(testiculaires) ou secondaires (hypothalamo-hypophysaires) peuvent aussi induire une
gynécomastie. De manière générale, les causes d’hypogonadisme primaire (syndrome de
Klinefelter, atteinte testiculaire traumatique, toxique, post-radique ou infectieuse, ...)
s’accompagnent plus fréquemment d’une gynécomastie, en raison d’une augmentation des
gonadotrophines (LH et FSH) qui stimulent l’aromatase et d’une production de testosté-
rone persistant le plus souvent de façon significative (1).
Les hommes avec hyperprolactinémie chronique (le plus souvent due à un prolacti-
nome) peuvent développer une gynécomastie en raison de l’hypogonadisme secondaire.
L’excès de prolactine par lui-même peut stimuler une production de lait (galactorrhée)
mais ne provoque pas directement de gynécomastie.
principal effet est une stimulation de leur production de testostérone mais plus encore
d’œstrogènes, essentiellement par augmentation de l’activité aromatase et transformation
de la testostérone en œstradiol.
Par ailleurs, la gynécomastie est présente chez 20 à 30 % des patients avec une tumeur
testiculaire stromale à cellules de Leydig (ou leydigome), mais celle-ci est beaucoup plus
rare, ne représentant que 2 à 3 % des tumeurs testiculaires. En cas de leydigome, le
mécanisme responsable de la gynécomastie est une hyperproduction directe d’œstrogènes
par les cellules tumorales, elle-même secondaire à une augmentation de l’activité aroma-
tase des cellules néoplasiques. Environ 10 % de ces tumeurs sont malignes et métastasent
au niveau des ganglions retropéritonéaux (70 %), du foie (45 %), des poumons (40 %) et
des os (25 %).
La production directe d’aromatase par des tumeurs développées aux dépens de cellules
de Sertoli est une cause très rare de gynécomastie. Dans ce cas, la testostérone est souvent
basse, l’œstradiol élevé et les gonadotrophines sont diminuées.
5. Autres tumeurs
D’autres tumeurs, non testiculaires, par leur sécrétion, peuvent induire un déséquilibre
entre les concentrations d’œstrogènes et de testostérone. Par exemple, une proportion
faible des corticosurrénalomes malins peuvent sécréter des œstrogènes en excès et, de ce
fait, induire une gynécomastie. Dans une série de 52 patients avec corticosurrénalome
féminisant, 98 % avaient une gynécomastie, 58 % avaient une tumeur abdominale palpable
et environ 50 % avaient une atrophie testiculaire (16).
Des tumeurs sécrétrices d’hCG peuvent également être de localisation extragonadique :
tumeurs bronchiques, hépatiques (hépatoblastomes), rénales ou cérébrales (germinomes
hypothalamiques et pinéaux) et devront être recherchées en cas d’anomalies hormonales
évocatrices avec bilan testiculaire négatif. Elles induisent une gynécomastie et un hypogo-
nadisme par les mêmes mécanismes que les tumeurs testiculaires germinales (cfr supra)
6. La cirrhose
La prévalence de la gynécomastie chez les patients cirrhotiques est élevée (65 %) (17).
La cirrhose est accompagnée de plusieurs modifications qui expliquent le développement
de ce symptôme: diminution de la production testiculaire de testostérone, augmentation
de la production d’androstènedione par les glandes surrénales, aromatisation accrue des
androgènes en œstrogènes, augmentation de la SHBG avec diminution de la testostérone
libre, … En outre, de nombreux patients reçoivent des doses élevées de spironolactone, qui
peuvent aussi contribuer à la pathogenèse du symptôme dans cette population.
L’étiologie alcoolique entraîne des altérations hormonales plus sévères (notamment par
un efft toxique sur les cellules de Leydig) et la gynécomastie est dès lors très fréquente chez
les patients souffrant de cirrhose éthylique (18).
7. Causes diverses
L’insuffisance rénale, surtout traitée par dialyse (19) ou après transplantation, ainsi que
la dénutrition mais aussi la réalimentation rapide après dénutrition sévère peuvent provo-
quer une gynécomastie par une diminution des concentrations de testostérone alors que
celles des œstrogènes sont maintenues, puis par ré-ascension rapide des concentrations de
testostérone dans un contexte d’aromatisation accrue lorsque la situation s’améliore (refee-
ding gynaecomastia).
Une gynécomastie a été rapportée dans 10 à 25 % des hyperthyroïdies en rapport avec
une maladie de Basedow (5). Divers mécanismes sont en jeu: une majoration des concen-
trations de LH contribuant à une production relativement plus élevée d’œstradiol par les
cellules de Leydig, une aromatisation accrue de la testostérone en œstradiol et de l’andros-
tènedione en œstrone, une augmentation des concentrations de SHBG par stimulation de
la synthèse hépatique et une diminution des concentrations de testostérone libre…
D’autres causes exceptionnelles ont été décrites. Citons à titre d’exemple la survenue
d’une gynécomastie pubertaire sévère avec hypogonadisme hypogonadotrope et concen-
trations circulantes élevées en œstradiol en rapport avec une mutation gain-de-fonction
du gène de l’aromatase (20).
8. La gynécomastie idiopathique
Dans environ 25 à 30 % des cas, aucune cause précise n’est retrouvée et on parle alors de
« gynécomastie idiopathique ». Une des principales causes favorisantes dans la population
est l’obésité. Celle-ci peut provoquer une vraie gynécomastie par augmentation de l’aroma-
tisation de la testostérone au sein même de la graisse mammaire.
Figure 4. - Algorithme proposé pour le bilan hormonal et radiologique d’une gynécomastie vraie,
récente, sans explication évidente à l’anamnèse et à l’examen clinique (pas de contexte pubertaire,
pas de médicament, pas de signe de pathologie pouvant être responsable du problème,…).
T : testostérone totale ; SHBG : sex hormone globulin ; E2 : oestradiol ; LH : hormone lutéinisante ; hCG :
hormone gonadotrope chorionique humaine; TSH : thyréostimuline; T4 : thyroxine ; CT : tomodensitométrie.
* : en cas d’hypogonadisme primaire, la testostérone totale peut se situer dans la moitié inférieure de
l’intervalle normal pour l’âge
§ : en cas d’hyperthyroïdie, la testostérone totale est augmentée par élévation de la SHBG alors que la
testostérone libre est basse, induisant une élévation de la LH.
Si la gynécomastie est récente, peu gênante et surtout si elle est liée à une cause réver-
sible (médicament par exemple), une surveillance simple peut être proposée au patient.
Dans de nombreux cas, la gynécomastie peut disparaitre spontanément. Si une autre
cause spécifique est responsable, le traitement doit être d’abord étiologique (1-5). Ainsi,
tant que la gynécomastie n’a pas atteint un stade fibrotique, un traitement par testostérone
peut entraîner une amélioration du problème chez les sujets avec hypogonadisme bien
démontré, surtout primaire (et ce même si l’hypogonadisme est compensé : testostérone
totale normale avec LH augmentée). Ce traitement ne doit jamais être proposé lorsque la
fonction gonadique est strictement normale puisque la gynécomastie pourrait s’aggraver
suite à l’aromatisation de la testostérone en œstradiol. Un traitement spécifique devra
également être proposé en cas d’hyperthyroïdie, de tumeur testiculaire, d’autres tumeurs, ...
Si la gynécomastie est plus conséquente mais toujours prise en charge durant la phase
proliférative, on peut obtenir une régression de la tuméfaction et une diminution des
douleurs grâce à un traitement par tamoxifène (Nolvadex®). Le tamoxifène est un SERM
(selective estrogen receptor modulator) qui bloque l’action des œstrogènes au niveau des
tissus cibles tels que la glande mammaire. L’efficacité de ce traitement a été bien démon-
trée dans deux études cliniques randomisées contre placebo, conduisant à une nette
amélioration dans 80 % des cas de gynécomastie pubertaire persistante ou de l’adulte, en
particulier dans les formes douloureuses (24-26). Le traitement par tamoxifène se fait sur
une période de trois mois à raison de 20 mg par jour.
Le raloxifène a également été testé dans cette indication (26) mais son utilisation est
moins efficace et ce traitement qui diminue les valeurs d’œstradiol pourrait entraîner une
diminution de la libido et une augmentation de la masse grasse (27). Rappelons aussi que
ni le tamoxifène ni le raloxifène n’ont d’Autorisation de Mise sur le Marché dans cette
indication.
Les autres traitements, tels que les inhibiteurs de la sécrétion des gonadotrophines
(danazole) ou les inhibiteurs de l’aromatase (anastrozole) se sont révélés moins efficaces et
ne doivent pas être utilisés en pratique clinique (28).
Finalement la chirurgie plastique est le meilleur traitement à proposer quand la gynéco-
mastie ne régresse pas avec les traitements précités, quand elle entraine un inconfort
esthétique important ou quand elle dure depuis plus de 12 mois (5, 29, 30). Dans la plupart
des cas, cette intervention comprendra à la fois une excision chirurgicale du tissu glandu-
laire et une liposuccion du tissu adipeux via une incision péri-aréolaire. Les résultats
esthétiques sont très satisfaisants et les complications (sein déformé, hématome, douleur
mamelonnaire résiduelle) sont rares, si la correction est effectuée par un chirurgien plasti-
cien ayant l’expertise de ce type de chirurgie. La récidive est rare si la cause a pu être
éliminée et que tout le tissu glandulaire a bien été extirpé.
Notons enfin qu’une radiothérapie a également été proposée comme traitement des
gynécomasties induites par les traitements anti-androgènes chez les patients âgés souffrant
d’un cancer prostatique (31). Toutefois, le tamoxifène peut également être efficace dans
ces circonstances (5).
ABSTRACT
Gynaecomastia is a symptom that can affect men at any time in their live. Most often, it
is a benign clinical manifestation of unknown origin but the problem should not be neglected
as it may cause significant cosmetic disgrace or be the first clinical sign of an underlying
malignant disease. The main pathological causes of gynecomastia in adult men are, in order
of decreasing frequency, idiopathic gynecomastia, persistent (or recurrent) pubertal gynae-
comastia, drug-induced gynaecomastia, primary and secondary hypogonadism, cirrhosis,
tumors, mostly of testicular origin, hyperthyroidism and metabolic causes (such as the so
called ‘refeeding gynaecomastia’). Primary treatment is to remove or treat the cause if this
has been identified and is treatable. Next, depending on the relative severity and duration of
the problem, either surveillance, local application of a dihydrotestosterone gel, short-time
treatment with tamoxifen, or corrective plastic surgery can be proposed.
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La mise en évidence d’un processus inflammatoire chez les patients atteints de diabète
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
* Traduit et complété par Philippe Chanson, Service d’Endocrinologie et des Maladies de la Reproduction, Hôpital
Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre, France.
PATHOLOGIE
Depuis les premières observations attribuant un rôle à l'IL-1β dans la pathogénie du
diabète de type 2 (1), de nombreuses observations et études cliniques ont démontré son
implication dans le métabolisme du glucose [revu in (2)]. Dans une première étude
clinique de preuve de concept 70 patients atteints de diabète de type 2 ont été randomisés
afin de recevoir soit l'anakinra (un antagoniste du récepteur de l'IL-1 humain recombi
nant), soit un placebo pendant 13 semaines (3). L’anakinra a amélioré la glycémie et la
fonction sécrétoire des cellules β. Au-delà de ce bénéfice métabolique direct, l'antago
nisme du récepteur de l'IL-1 réduit les concentrations de CRP, ce qui a justifié la mise en
place de l'étude CANTOS (voir ci-dessous). Deux études de suivi intéressantes utilisant
l'anakinra chez des prédiabétiques (4) et chez des patients présentant une perturbation de
la tolérance au glucose (5) ont montré que, même à ces stades très précoces de la maladie,
l’antagonisme du système IL-1 améliorait la fonction sécrétoire des cellules β et pouvait
ainsi prévenir ou retarder l'apparition du diabète de type 2. Ces études de preuve de
concept avec l'anakinra démontrent le rôle de l'IL-1 dans la pathogénie du tant du défaut
de sécrétion d'insuline que de la résistance à l'insuline au cours du diabète de type 2.
Cependant, l'anakinra nécessite des injections quotidiennes et est souvent à l’origine
d’effets indésirables au niveau du site d'injection. Des anticorps anti-IL-1β humanisés ont
donc été développés par de multiples groupes et testés dans diverses maladies, dont le
diabète de type 2. La demi-vie de ces anticorps est d'environ 3 semaines, ce qui permet une
administration mensuelle ou moins. Chacun de ces anticorps a démontré des effets
bénéfiques chez les patients atteints de diabète de type 2 (6-8). Une seule dose d'un
anticorps anti-IL-1β, le gevokizumab, a amélioré l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo
de 0,9 % après 3 mois (6). Deux études chez des patients atteints de diabète de type 2 ont
été menées avec un autre anticorps anti-IL-1β, le canakinumab. La première étude a utilisé
une dose unique d'anticorps chez des sujets présentant une intolérance au glucose ou un
diabète de type 2 bien contrôlé (hémoglobine glyquée d'environ 7,0 %) (7). Bien que le
nombre de patients soit faible (27 à 33 par bras), une tendance à l'amélioration du taux de
sécrétion d'insuline a été observée. La deuxième étude visait à trouver la dose optimale de
canakinumab nécessaire pour améliorer le contrôle de la glycémie chez des patients
atteints de diabète de type 2 (9). Des injections mensuelles de canakinumab pendant
4 mois ont entraîné une réduction de l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo. Enfin, des
injections hebdomadaires de l'anticorps anti-IL-1β LY2189102 pendant 12 semaines ont
amélioré l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo ainsi que la glycémie à jeun et postpran
diale et les biomarqueurs inflammatoires (8).
L'ÉTUDE CANTOS
Sur la base de ces huit études cliniques indépendantes, l’antagonisme de l'IL-1β est donc
capable d'améliorer le métabolisme du glucose chez les patients diabétiques. Cela a
récemment été confirmé par l'étude CANTOS (10). En effet, bien qu’elle ne soit pas spéci
fiquement dédiée au diabète, cette vaste étude analysant les résultats cardiovasculaires
chez plus de 10 000 patients permet de tirer des conclusions intéressantes pour le
diabète (11) (i) Même si les patients n’ont été sélectionnés que sur la base de la CRP et des
maladies cardiovasculaires, 90 % d’entre eux ont un trouble du métabolisme du glucose
(40 % ont un diabète, 50 % un prédiabète). Cela plaide fortement en faveur d'un lien entre
l'inflammation et le diabète. (ii) L'antagonisme de l'IL-1 a diminué significativement
l'HbA1c pendant les 6 à 9 premiers mois de traitement puis les effets se sont atténués. Ces
PHYSIOLOGIE
Des études antérieures ont démontré un rôle pathogène de l'inflammation chronique sur
le métabolisme (12). Cependant, le rôle physiologique et adaptatif attendu (aigu) du
système immunitaire inné dans le contrôle métabolique n'a commencé que récemment à
faire l'objet d'études approfondies. Ainsi, l'IL-1β et l'IL-6 dépendant de l'IL-1 et l'IL-33
apparaissent comme des modulateurs importants de la sécrétion d'insuline et de l'utilisa
tion du glucose (13-15). En effet, des concentrations élevées d'IL-6 en réponse à l'exercice
ou à l'obésité stimulent la sécrétion de GLP-1 par les cellules L intestinales et les cellules α
pancréatiques, conduisant à une amélioration de l’homéostasie du glucose (15). Par consé
quent, l'IL-6 intervient dans le dialogue entre les tissus insulino-sensibles, les cellules L et
les îlots de Langerhans pour s'adapter aux changements des besoins en augmentant la
sécrétion de GLP-1 et en reprogrammant les cellules α pour transformer le proglucagon en
GLP-1.
En outre, l'IL-1β, généralement pro-inflammatoire, présente des effets physiologiques
dans le contexte de la prise alimentaire et de l'adaptation à un régime riche en graisses (14,
16). Ainsi, une élévation postprandiale du glucose entraîne une élévation aiguë de l'IL-1β
dérivée des macrophages qui contribue à la sécrétion d'insuline postprandiale. Cet effet
dépend également des produits microbiens dérivés des aliments et de l'intestin, qui
permettent aux macrophages de produire davantage d'IL-1β. Fait intéressant, l'insuline
renforce un état pro-inflammatoire et stimule la production d'IL-1β par les macrophages
via l'absorption et le métabolisme du glucose, la production de ROS et l'activation subsé
quente de l'inflammasome NLRP3. L'insuline et l'IL-1β régulent toutes deux l'élimination
ABSTRACT
Morphological and therapeutic interventions have uncovered an inflammatory process in
patients with type 2 diabetes. This inflammation is due to a pathological activation of the
innate immune system by metabolic stress and is partly governed by IL-1 signaling. Initially,
the inflammatory response is probably deployed to promote adaptation and regeneration.
Yet, as it becomes chronic, activation of auto-inflammatory processes may then become
deleterious. It follows that modulation of inflammatory mediators may present as a possible
causal therapy. This is supported by clinical studies showing that IL-1 antagonism decreases
glycated hemoglobin at a similar level than DPP-4 inhibitors. Furthermore, IL-1 antagonism
prevents cardiovascular diseases, the major complication of diabetes.
BIBLIOGRAPHIE
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beta cell production of IL-1beta contributes to glucotoxicity in human pancreatic islets. J Clin Invest.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
L’acromégalie est une maladie rare dont la prévalence est de 1/7000. Il est par conséquent
n n n n n n n n n n n n n n
difficile d’obtenir une grande série de patients dans un seul centre. Néanmoins, certains
aspects de la maladie ne peuvent être perçus qu’en faisant appel aux grands nombres. Le «
Liège Acromegaly Survey » (LAS) est une base de données relationnelle qui permet
d’exploiter de grandes quantités de données sur un grand nombre de patients. Elle regroupe
les observations de 14 centres européens comportant près de 3200 patients. Les résultats
de ces observations au moment du diagnostic de l’acromégalie sont présentés dans cet
article.
Mots-clés : Acromégalie, base de données, big data, diagnostic, morbidité, hormone de croissance, IGF-1, âge.
INTRODUCTION
L’acromégalie fait suite à une hypersécrétion d’hormone de croissance (GH). La cause
principale est un adénome hypophysaire à GH. Si celui-ci survient tôt dans la vie (avant
la fusion des cartilages de conjugaison), il provoque un gigantisme. Sinon, il sera respon-
sable d’une acromégalie. Les causes génétiques des adénomes à GH sont partiellement
élucidées [1,2,3]. Il s’agit d’une maladie assez rare avec une prévalence probablement
encore très sous-estimée d’environ 1/7000 [4].
Cette pathologie étant rare, il est difficile de réaliser des études de grandes séries, ce qui
prive les endocrinologues d’informations potentiellement très intéressantes déductibles
uniquement à partir de plus grands nombres de patients. C’est pour réaliser de telles études
que nous avons mis au point le « Liège Acromegaly Survey » qui est une base de données
relationnelle permettant d’exploiter facilement et rapidement les quantités importantes
données qui ont été encodées sur un grand nombre de patients. Le modèle a d’abord été
testé sur la population des acromégales de Liège, soit environ 290 patients [5]. Après avoir
constaté qu’il était fonctionnel, nous l’avons élargi à 13 autres centres européens (voir liste
table 1). Au total, près de 3 200 patients ont ainsi été encodés. Les premiers résultats qui
ont été publiés fin 2017 [6] sont brièvement présentés dans cet article.
Sofia 815
Bicêtre 363
Liège 302
Rotterdam 277
Marseille 260
Naples 205
Reims 188
Stockholm 178
Prague 138
L'Aquila 126
Munich 114
Gênes 111
Porto 63
Valencia 33
MÉTHODE STATISTIQUE
Les différents paramètres étudiés ont montré une distribution non-normale. Des métho
des non-paramètriques ont donc été utilisées pour décrire les populations (médianes,
quartiles), les données continues ont été comparées avec le test de Mann-Withney et les
tables de contingences par un test du Chi-carré. Pour les graphiques, une représentation
par « box-plot » a été préférée, la boite représentant le premier et deuxième quartile, la
ligne centrale représentant la médiane et les « moustaches » 1.5 fois la taille de l'écart
interquartiles.
Figure 1. - Âge au diagnostic selon les centres. Colonne de gauche (en grisé) : Âge médian au
diagnostic en fonction des centres. Partie droite : graphique box plot de l’âge au diagnostic selon le sexe
pour chaque centre. (Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017 [6]. avec autorisation).
tion sanguine d’hormone de croissance est en relation directe avec la taille de la tumeur
(Figure 7) et inverse avec l’âge (Figure 8). Il y a donc une relation triangulaire entre la taille
de la tumeur, la concentration d’hormone de croissance et l’âge. Plus le patient est âgé,
plus la tumeur est petite et moins elle sécrète d’hormone de croissance.
Figure 6. - Âge des patients selon la taille et l’invasion tumorale. « N » : pas d'invasion ;
« Y » : présence d'invasion. (Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).
Figure 10. - Régression linéaire entre glycémie et concentration sérique de GH. Graphe de gauche :
Glycémie basale ; graphe de droite : Glycémie à 120 mn lors de l’HGPO.
(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017,[6] avec autorisation).
DIABÈTE ET HTA
Au diagnostic, 24.5 % des patients étaient diabétiques. Après réalisation d’un test par
hyperglycémie par voie orale, les chiffres grimpent à 27.5 %. Près de 40 % des patients
étaient hypertendus au moment du diagnostic dont 30 % considérés comme insuffisam-
ment contrôlés médicalement. Les facteurs de risque les plus importants pour l’HTA,
étaient l’âge et le diabète.
Figure 11. - Prévalence de l’hypertension (HT) selon le groupe d’âge, chez les non-diabétiques
(gauche) et les diabétiques (droite).
COMORBIDITÉ
L’étude de la corrélation entre les concentrations d’hormone de croissance et la survenue
d’un AVC avant le diagnostic d’acromégalie montre paradoxalement que les patients avec
plus d’hormone de croissance font moins d’AVC (figure 12). En réalité, si on cherche la
corrélation entre l’AVC et l’âge, on constate que les patients âgés font plus d’AVC que les
patients jeunes et, comme présenté plus haut, les personnes âgées ont des concentrations
d’hormone de croissance moins élevées que les patients jeunes.
Figure 12. - Comparaison des valeurs de GH, d’IGF-1 et de l’âge chez les patients avec et sans
antécédents d’AVC au moment du diagnostic. Y : antécédent d'AVC au moment du diagnostic.
N : pas d'antécédent d'AVC. A: IGF-1 en valeurs absolues dans les groupes avec et sans antécédent
d'AVC. B : IGF-1 en % des valeurs supérieures à la normale. C : GH. D : Age au diagnostic des groupes
avec et sans antécédent d'AVC.
APNÉES DU SOMMEIL
Une apnée du sommeil a été diagnostiquée chez 26 % des patients. Néanmoins, la
recherche n’a pas été effectuée de façon systématique. Lorsque c’est le cas, le pourcentage
d’apnéiques monte jusqu’à 70 % [7].
DISCUSSION
Cette étude réalisée dans 10 pays et 14 centres montre que le diagnostic de l’acromégalie
est maintenant porté de façon plus précoce qu’auparavant même s’il reste des divergences
relativement importantes entre les centres. Le sex ratio est éminemment variable d’un
centre à l’autre dépendant du type de recrutement. Ceci est important lorsque des études
mono-centriques sont réalisées sur un thème particulier. Les résultats sont susceptibles de
diverger relativement fortement en fonction de ces données.
Un nombre beaucoup plus important d’acromégales âgés sont diagnostiqués. Cela est
probablement le résultat d’une meilleure connaissance de la maladie dans le corps médical,
ce qui permet d’une part de raccourcir le délai diagnostique chez tous les acromégales mais
aussi de reconnaitre des formes moins agressives comme chez le patient âgé. Il existe une
relation triangulaire entre la taille de l’adénome, l’âge et les concentrations d’hormone de
croissance. Ceci confirme des études faites sur des échantillons beaucoup plus petits. Dans
notre étude publiée en 2010 [8], les patients souffrant de mutation du gène AIP étaient
comparés à des patients AIP négatifs. Les AIP positifs étaient beaucoup plus jeunes au
diagnostic, avec des tumeurs significativement plus volumineuses et une concentration
plus élevée d’hormone de croissance. Dans une autre étude réalisée à partir du registre
français de l’acromégalie, les patients acromégales âgés montraient des valeurs de GH et
d’IGF-1 moins élevées au diagnostic [9].
L’hormone de croissance induit une résistance à l’insuline. Au contraire, l’IGF-1 produit
des hypoglycémies. On peut donc logiquement se demander quel est le facteur le plus utile
pour connaitre l’importance de l’activité de la maladie. Est-il préférable de connaitre la
GH ou l’IGF-1? Une corrélation entre les concentrations d’IGF-1 et la prévalence d’intolé-
rance glucidique ou de diabète a déjà été démontrée [10]. Notre étude, ciblant les patients
non-diabétiques, montre que la corrélation entre glycémie et IGF-1 existe alors qu’il n’y a
pas de corrélation entre GH et glycémie, ce qui tend à montrer que l’IGF-1 est bien un
reflet meilleur de l’activité de la maladie plutôt que la GH. Il en est de même dans la corré-
lation avec les concentrations d’hémoglobine ou d’hématocrite. C’est l’IGF1 qui reflète le
mieux l’activité de l’acromégalie.
Des apnées du sommeil étaient présentes chez 26 % des cas. Ceci peut paraître peu mais
les données n’étaient pas codées chez tous les patients. En réalité, lorsque les études sont
systématiques, environ 70 % des patients acromégales souffrent d’apnées du sommeil, ce
phénomène peut également être observé avec les nodules thyroïdiens qui n’ont pas été
étudiés de façon systématique et qui étaient dès lors présents dans une relativement faible
proportion (34 %) alors que les études systématiques révèlent des nodules dans 70 % des
cas.
Enfin, la présence d’AVC était corrélée avec l’âge et dès lors, il n’est pas étonnant de voir
des concentrations de GH et d’IGF-1 plus faibles. Les valeurs élevées de ces deux hormones,
GH et IGF-1 observées chez les jeunes n’ont absolument pas d’effet protecteur, c’est simple-
ment l’âge qui est lié au risque d’AVC.
CONCLUSION
Le Liège Acromegaly Survey (LAS) est une base de données relationnelle qui constitue
un nouvel outil pour étudier l’acromégalie. Il s’agit de la base de données la plus grande et
la plus complète pour cette pathologie. Elle a permis de mettre en évidence de nouveaux
aspects de la maladie comme la corrélation entre l’âge, la taille et la sécrétion d’hormone
de croissance et de confirmer que l’IGF-1 est un meilleur marqueur de la maladie que la
GH. Le LAS a montré la différence importante de population de patients selon les centres.
Les prochaines analyses conduites sur la base du LAS concerneront les aspects liées aux
traitements et l’évolution de la maladie à long terme.
Service d’Endocrinologie
CHU de Liège, Université de Liège
Domaine Universitaire du Sart-Tilman
B-4000 Liège, Belgique
Adresse pour la correspondance : Professeur Albert Beckers - Service d’Endocrinologie - CHU de Liège,
Université de Liège - Domaine Universitaire du Sart-Tilman - B-4000 Liège, Belgique
E-mail : albert.beckers@chuliege.be
ABSTRACT
Acromegaly is a rare disease with a prevalence of 1/7000. It is therefore difficult to gather
a big series of patients in a single center. However some aspects of the disease can only be
approached by using big numbers of patients. The Liège Acromegaly Survey (LAS) is a
relational database that allows to exploit big quantity of data on a large number of patients.
It covers the observations of 14 European centers on almost 3200 patients. The results of
these observations at the time of diagnosis of acromegaly are presented in this article.
Key-words : Acromegaly, data base, big data, diagnosis, morbidity, growth hormone, IGF-1, age.
BIBLIOGRAPHIE
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
INTRODUCTION
L’artériopathie périphérique est la troisième localisation la plus importante de l’athéro
sclérose après la cardiopathie ischémique et l’accident vasculaire cérébral. Il s’agit d’un
problème majeur de santé publique avec une prévalence qui augmente de façon endémique
ces dernières décennies, à cause de l’explosion de la démographie mondiale, du vieillisse
ment de la population, et de l’augmentation de la prévalence du tabagisme, de l’hyperten
sion artérielle, et du diabète de type 2 (1). Elle est 2 à 4 fois plus fréquente chez les patients
diabétiques en comparaison aux sujets non diabétiques (2). Le pronostic de l’artériopathie
périphérique est sévère, particulièrement dominé par un risque d’amputation de membre
inférieur 5 fois plus élevé chez les patients diabétiques en comparaison aux sujets non
diabétiques (3). L’artériopathie périphérique diabétique est également associée à un risque
élevé de maladie cardiovasculaire et de mortalité (4, 5). Elles génèrent un coût écono
mique considérable nécessitant des hospitalisations longues et itératives, complétées par
des soins en ambulatoire (6, 7). Elles peuvent être responsables de séquelles invalidantes,
d’états dépressifs, et d’altération de la qualité de vie, engendrant ainsi des difficultés sociales
et professionnelles (8, 9).
ÉPIDÉMIOLOGIE
L’artériopathie périphérique touche plus de 200 millions de patients dans le monde dont
40 millions vivant en Europe (1). Son incidence était estimée à 1,24 par 100 patients-
années chez les participants diabétiques de type 2 dans l’étude ADVANCE (Action in
Diabetes and Vascular Disease: PreterAx and DiamicroN Modified-Release Controlled Evalua-
tion) et 3,7 cas par 100 patients-années dans une autre cohorte australienne (10, 11). Sa
prévalence est variable en fonction de la définition utilisée et des caractéristiques de la
population étudiée, notamment l’âge, la durée du diabète, le niveau du risque vasculaire,
et la présence ou pas de maladie cardiovasculaire. La prévalence de l’artériopathie périphé
rique peut dépasser 20 % si le diagnostic est basé sur l’index de pression systolique (IPS)
(12). Les formes plus sévères, définies par la présence d’ulcération ou d’amputation d’ori
gine vasculaire ou d’antécédent de revascularisation, étaient présentes chez 4,6 % des
participants de l’étude ADVANCE à l’inclusion (11). L’artériopathie périphérique est
habituellement diagnostiquée lors de la cinquième décennie avec une augmentation
exponentielle de sa prévalence après l’âge de 65 ans. La prévalence augmente également au
fur et à mesure de l’ancienneté du diabète : dans l’étude UKPDS (UK Prospective Diabetes
Study), elle a progressé de 1,2 % au moment du diagnostic du diabète à 12,5 % après 18 ans
d’évolution (13). La prévalence de l’artériopathie périphérique varie également selon la
région d’origine des patients, elle est fréquente chez les participants originaires d’Europe de
l’Est dans l’étude ADVANCE, et particulièrement faible chez les Asiatiques (11, 14). Il
n’est pas clair si ces différences sont liées à une prédisposition génétique.
Les principaux facteurs de risque d’artériopathie périphérique diabétique sont compa
rables aux autres facteurs de risque cardiovasculaires traditionnels notamment l’âge, le
sexe, la pression artérielle systolique, les concentrations plasmatiques des lipoprotéines, et
le tabagisme actif (11, 13, 15). Certaines études ont suggéré que la macroalbuminurie et la
rétinopathie diabétique étaient des facteurs prédictifs indépendants d’artériopathie
périphérique (11, 15). Une large étude épidémiologique récente a montré que la baisse du
débit de filtration glomérulaire et l’augmentation de l’excrétion urinaire d’albumine étaient
des facteurs de risque indépendants d’artériopathie périphérique (16).
PHYSIOPATHOLOGIE
La claudication intermittente est liée à une diminution du flux sanguin, avec une baisse
de l’afflux d’oxygène lors de l’effort physique, secondaire à une sténose ou à une occlusion
d’une artère irriguant un muscle squelettique. Plusieurs mécanismes contribuent à cette
ischémie aigüe, particulièrement la rigidité artérielle, les anomalies thrombotiques,
l’inflammation de bas grade, les produits avancés de la glycation, et le stress oxydant.
Plusieurs études ont suggéré le développement d’une réaction inflammatoire aiguë secon
daire à l’ischémie lors de l’exercice chez des patients présentant une claudication intermit
tente avec l’augmentation des concentrations plasmatiques de plusieurs médiateurs (throm
boxane, interleukine 8, molécule soluble d’adhésion 1, ou le facteur de von Willebrand) et
la libération d’agents vasoconstricteurs telle que l’endothéline 1 (17). Nous avons rapporté
récemment une association indépendante entre les concentrations plasmatiques de TNFR1
(tumor necrosis factor-α receptor 1) et d’IMA (ischemia-modified albumin, un marqueur du
stress oxydant) et le risque de développer un événement vasculaire périphérique ou une
amputation majeure dans la cohorte Poitevine SURDIAGENE (SURvie, DIAbete de type
2 et GENEtique) (18, 19). De façon intéressante, TNFR1 améliore la prédiction des évène
ments vasculaires périphériques, indépendamment des autres facteurs de risque cardiovas
culaires traditionnels. Les cellules endothéliales, par leur localisation stratégique entre le
sang et les tissus, jouent un rôle majeur dans l’homéostasie vasculaire. Elles secrètent
plusieurs facteurs paracrines au niveau de la paroi et la lumière vasculaire. La dysfonction
endothéliale, induite entre autres par les facteurs de risque cardiovasculaire, est respon
sable de troubles hémodynamiques et d’autres anomalies structurelles et fonctionnelles,
altérant la réactivité et la relaxation des vaisseaux, favorisant ainsi l’athérosclérose (20). Il
est clairement établi que l’artériopathie périphérique est une manifestation commune de
l’athérosclérose des gros vaisseaux, mais des études récentes suggèrent également une parti
cipation de la dysfonction microvasculaire dans sa pathogénie (21). Une étude italienne a
montré des anomalies histologiques microvasculaires, avec épaississement de la membrane
basale et réduction de la densité des capillaires, sur des prélèvements cutanés de pieds
diabétiques neuro-ischémiques nécessitant une revascularisation (21). Nous avons observé
dans l’étude ADVANCE une association forte et indépendante entre un antécédent de
maladie microvasculaire (néphropathie ou rétinopathie) à l’inclusion et le risque de
développer une artériopathie périphérique diabétique pendant le suivi (11). De façon
intéressante, l’antécédent de maladie microvasculaire était associé à l’atteinte distale tandis
que l’antécédent de maladie macrovasculaire était associé à l’artériopathie proximale.
Enfin, l’absence de pouls pédieux ou tibial postérieur à l’inclusion était associée, de façon
dose-réponse, à un excès de risque d’évènements microvasculaires (22).
DÉPISTAGE ET DIAGNOSTIC
Le dépistage d’artériopathie périphérique chez les patients diabétiques doit être basé sur
un interrogatoire minutieux et un examen clinique rigoureux (23). Aucun examen
complémentaire n’est justifié chez les patients asymptomatiques. Il faut, néanmoins,
rechercher des formes pauci-symptomatiques, particulièrement en présence de neuropa
thie diabétique qui peut masquer certains symptômes d’artériopathie. La neuropathie
diabétique distale est associée à l’artériopathie périphérique dans 50 % des cas, et elle est
également impliquée dans la médiacalcose (24), qui est une anomalie spécifique au diabète,
caractérisée par une calcification de la média des artères responsable de vaisseaux incom
pressibles. La présentation clinique de l’artériopathie périphérique diabétique est évaluée
selon la classification de Leriche et Fontaine ou celle de Rutherford. La claudication inter
mittente et les douleurs de décubitus sont des signes importants à rechercher, mais ils
peuvent être absents ou difficiles à distinguer des autres étiologies notamment neuropa
thiques. Toute détérioration de la qualité et de la vitesse de la marche doit être prise en
considération, ainsi que la fatigue, les douleurs, les crampes, l’inconfort, ou les brûlures au
niveau des fesses, des cuisses, des mollets ou des pieds. Ces signes cliniques sont particuliè
rement évocateurs d’artériopathie périphérique quand ils sont déclenchés par l'exercice ou
la montée d’une pente, et rapidement soulagés par le repos. L’aspect général de la peau,
l’état de la pilosité, et la température des membres inférieurs doivent être soigneusement
évalués. La palpation des pouls périphériques (pédieux, tibial postérieur, poplité et fémoral)
est un examen simple et non onéreux qui doit être réalisé systématiquement chez tous les
patients diabétiques. Néanmoins, la palpation des pouls périphériques manque de repro
ductibilité, et ses conclusions dépendent des variations anatomiques des pieds, de l’expé
rience des médecins, et des conditions de l’examen clinique. L’examen des pouls a une
faible performance dans le diagnostic de l’artériopathie, particulièrement le pouls pédieux
qui peut être absent physiologiquement en absence d’anomalie vasculaire. En revanche,
l’absence simultanée des pouls pédieux et tibiaux postérieurs lors d’un examen minutieux,
réalisé dans des conditions cliniques satisfaisantes, améliore la reproductibilité et la perfor
mance de cet examen dans le diagnostic d’artériopathie périphérique (25). L’auscultation
des axes artériels des membres inférieurs n’a qu’une faible sensibilité pour dépister une
artériopathie périphérique.
L’Index de Pression Systolique (IPS) est l’examen à réaliser en première intention chez
les patients symptomatiques. Il est défini par le rapport de la pression artérielle systolique
de la jambe sur celle de l’avant-bras, mesurée chez un patient en position allongée après
5 – 10 minutes de repos, à l’aide d’un brassard gonflable et d’un appareil doppler pour
détecter l’artère pédieuse (ou tibiale postérieure) pour la jambe et l’artère brachiale pour
l’avant-bras. L’IPS est considéré comme normal entre 1,0 et 1,4 ; douteux entre 0,9 et 1,0 ;
et clairement pathologique au-dessous de 0,9. Un IPS >1,4 est également anormal, reflé
tant des artères rigides et calcifiées. La performance de l’IPS <0,9 n’est cependant pas
parfaite dans le dépistage de l’artériopathie périphérique diabétique chez les patients
diabétiques, avec une sensibilité variant entre 29 à 95 % et une spécificité entre 58 à 97 %
(26). L’intégration de l’IPS >1,3 dans le dépistage de l’artériopathie périphérique n’amé
liore pas la discrimination. Cette performance imparfaite est particulièrement observée en
cas de neuropathie périphérique ou de médiacalcose. L’index brachial à l’orteil est plus
performant en cas de médiacalcose ou d’artères incompressibles. La pression systolique
d’orteil et la pression transcutanée du dos du pied (TcPO2) sont indiquées dans le
diagnostic d’ischémie critique des membres inférieurs (voir plus loin) ou pour estimer les
chances de cicatrisation après une amputation de membre inférieur. À titre d’exemple, une
TcPO2 >40 mmHg est associée à une bonne probabilité de cicatrisation après une amputa
tion mineure. Le test sur tapis roulant utilisant habituellement le protocole Strandness
(vitesse de 3 km/h et une pente de 10 %) est un excellent outil pour détecter les sténoses
modérées ou confirmer une origine ischémique d’une douleur atypique ou masquée par la
neuropathie. Le diagnostic d’artériopathie est retenu devant une diminution de la pression
systolique de la cheville post-exercice >30 mmHg ou une baisse de plus de 20 % de l'IPS.
L’étude hémodynamique apporte des informations complémentaires. Une onde tripha
sique reflète un état hémodynamique satisfaisant et donc l’absence d’artériopathie périphé
rique. En revanche, la présence d’une onde mono- ou biphasique est en faveur d’une
artériopathie ; elle a une bonne valeur prédictive négative, mais sa valeur prédictive
positive est variable selon la présence ou l’absence de neuropathie (26). L’écho-doppler
artériel des membres inférieurs est le premier examen d’imagerie permettant d’avoir un
diagnostic topographique d’artériopathie, il doit être réalisé dans le cadre d’un projet
thérapeutique chez des patients symptomatiques. Cet examen simple, non invasif, et peu
coûteux, permet une étude anatomique et hémodynamique des lésions sans être affecté
par les calcifications artérielles. C’est un examen performant avec une bonne sensibilité et
spécificité, mais il est très opérateur dépendant. L’angioscanner, l’angio-IRM, et l’angiogra
phie numérique sont des examens invasifs qui permettent un diagnostic topographique
plus précis, et sont souvent réalisés dans le cadre d’un bilan préopératoire. Sur le plan
topographique, on peut distinguer classiquement l’atteinte proximale (depuis l’artère
iliaque commune jusqu’à la fémorale superficielle) de l’atteinte distale (depuis l’artère
poplitée jusqu’à la pédieuse). Cette dernière localisation est particulièrement observée
chez les patients diabétiques. Il est intéressant de noter que l’artériopathie périphérique
distal et proximale ne coexistaient à l’inclusion que dans 5 % des cas dans l’étude
ADVANCE (Figure 1), suggérant ainsi que les deux présentations cliniques pourraient
avoir deux histoires naturelles distinctes.
Déficit
Stade Catégorie Déficit sensitif Pronostic
moteur
Pas besoin de traitement
I Membre viable Aucun Aucun
immédiat
Ischémie discrètement Aucun ou uniquement Sauvetage si rapidement
IIa Aucun
menaçante localisé aux orteils traité
Ischémie immédiatement Léger/ Sauvetage si
IIb Orteils et au-delà
menaçante modéré revascularisation rapide
Profond, Amputation, déficit
III Irréversible Profond, anesthésiant
paralysant neurologique irréversible
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
La prise en charge de l’artériopathie périphérique diabétique nécessite une équipe pluri
disciplinaire impliquant diabétologue, chirurgien vasculaire, infectiologue, radiologue,
médecin de réadaptation physique, infirmière, podologue, orthoprothésiste, et kinésithé
rapeute. Un contrôle strict des facteurs de risque cardiovasculaire est indispensable pour
traiter l’artériopathie, et surtout pour améliorer le pronostic cardiovasculaire et global des
patients.
Contrôle du diabète et différents traitements antidiabétiques
Un contrôle strict du diabète est indispensable devant toute artériopathie (29, 30). Lors
de l’étude UKPDS, chaque baisse d’un pourcentage d’HbA1c était associée à une réduc
tion de 43 % du risque d’artériopathie périphérique (amputation ou mort secondaire à un
évènement vasculaire périphérique) (31). En revanche, cette étude n’a pas montré de
réduction significative du risque d’artériopathie chez les patients bénéficiant d’un équilibre
strict du diabète lors du suivi épidémiologique (32). Lors de l’étude ADVANCE, l’inci
dence des évènements vasculaires périphériques était similaire dans les 2 groupes de l’étude
(intensif versus standard) (11). De façon intéressante, les analyse post-hoc de l’étude
BARI-2D (Bypass Angioplasty Revascularization Investigation 2 Diabetes) ont suggéré que le
traitement insulino-sensibilisateur (metformine ou thiazolidinedione), comparé au traite
ment insulino-sécréteur (sulfamide, glinide ou insuline), était associé à une réduction de
l’incidence d’artériopathie périphérique (IPS ≤0,9, revascularisation des artères périphé
riques, ou amputation) (33). D’autre part, Marso et al. ont rapporté dans l’étude SUSTAIN-6
que le traitement par Sémaglutide, analogue du GLP1 à libération prolongée, était associée
à 35 % de réduction du risque de revascularisation coronaire ou périphérique, mais le
bénéfice net en terme d’atteinte périphérique n’a pas été rapporté (34). L’étude LEADER
(Liraglutide Effect and Action in Diabetes: Evaluation of Cardiovascular Outcome Results)
n’a pas rapporté non plus de données sur l’artériopathie malgré un bénéfice significatif de
la Liraglutide en terme d’évènements vasculaires (35). L’incidence de l’artériopathie
périphérique a été comparable chez les patients traités par Exenatide à libération prolongée
ou par placebo dans l’étude EXSCEL (Exenatide Study of Cardiovascular Event
Lowering) (36). Enfin, l’étude CANVAS a montré qu’en comparaison au placebo, un
traitement par canaglifozine, inhibiteur du co-transporteur sodium- glucose de type 2
(i.SGLT2), était associé à 2 fois plus de risque d’amputation mineure ou majeure des
membres inférieurs (37). En analysant les patients ayant subi une amputation lors de
l’étude CANVAS, les auteurs ont observé que l’artériopathie et l’ischémie aigüe du membre
inférieur étaient plus fréquentes dans le groupe canaglifozine, tandis que la neuropathie
était plus observée dans le groupe placebo. Cet effet indésirable grave ne semble pas être
un effet classe des i.SGLT2. Ainsi, l’incidence des amputations de membres inférieurs était
comparable entre les 2 groupes (empaglifozine versus placebo) de l’essai clinique
EMPA-REG OUTCOME (38). Une large étude rétrospective réalisée récemment aux
USA n’a pas observé de risque élevé d’amputation des membres inférieurs lié aux traite
ments par i.SGLT2 (39). Les mécanismes physiopathologiques susceptibles d’expliquer le
risque élevé d’amputation des membres inférieurs lié à la canaglifozine dans l’étude
CANVAS ne sont pas encore élucidés.
Traitements antihypertenseurs
Lors de la phase observationnelle de l’étude UKPDS, chaque baisse de 10 mmHg de
pression artérielle systolique était associée à 16 % de réduction du risque d’artériopathie
Traitements hypolipémiants
Les sociétés européennes de cardiologie (ESC) et de chirurgie vasculaire (ESVS) recom
mandent un LDL-cholestérol <0,70 g/l (ou une baisse de 50 % par rapport au taux de base
s’il est situé entre 0,70 et 1,35 g/l) chez tous les patients souffrant d’artériopathie périphé
rique (30). Peu d’études ont évalué l’intérêt des statines dans le développement ou la
progression de l’artériopathie périphérique, mais plusieurs études randomisées ou observa
tionnelles ont montré leur intérêt dans la réduction des évènements cardiovasculaires chez
les patients atteints de complications vasculaires périphériques (43). D’autres études
suggèrent l’intérêt des statines dans l’amélioration du périmètre de marche (44). Un
éventuel bénéfice des fibrates chez les patients artéritiques a été également évoqué. Dans
l’étude FIELD (Fenofibrate Intervention and Event Lowering in Diabetes), le traitement par
fenofibrate, comparé au placebo, a montré une réduction de 36 % du risque d’amputation
des membres inférieurs, mais cette protection ne concernait pas les amputations majeures
liées à une atteinte de gros vaisseaux (45). Le traitement par evolocumab, immunoglobu
line monoclonale dirigée contre le PCSK9 (proprotein convertase subtilisin/kexin type 9) a
permis de réduire de 42 % le risque d’évènements vasculaires périphériques lors de l’étude
FOURIER (Further Cardiovascular Outcomes Research With PCSK9 Inhibition in Subjects
With Elevated Risk), avec une corrélation significative entre la baisse du LDL-cholestérol
et la réduction du risque d’évènements vasculaires périphériques (46).
cérébral ischémique (48). Le traitement par ticagrelor, comparé au clopidogrel, n’a pas
montré de réduction d’évènements vasculaires (cardiovasculaire ou périphérique) chez
13 885 participants (dont 40 % de diabétiques) atteints d’artériopathie périphérique
symptomatique (49). Il n’existe pas de bénéfice évident en faveur d’un double traitement
AAP. Dans le sous-groupe des patients avec artériopathie périphérique (36 % de diabé
tiques) dans l’étude CHARISMA, un traitement par deux APP (clopidogrel plus aspirine
versus aspirine seule) a permis de réduire le risque d’infarctus du myocarde, mais sans autre
protection vasculaire notamment périphérique, avec un risque élevé d’hémorragie modérée
(50). Par ailleurs, un double traitement APP, associant clopidogrel et aspirine, peut être
prescrit pendant 1 mois après une revascularisation endovasculaire avec la pose de stent
au niveau sous-inguinal (30). Cette association peut être également discutée après un
by-pass au-dessous du genou avec pose d’une prothèse.
Les sociétés savantes européennes (ESC et ESVS) ne recommandent pas d’APP en cas
d’artériopathie périphérique asymptomatique sans autre localisation cardiovasculaire
(30). En effet, Belch et coll. n’ont pas montré de bénéfice d’un traitement par aspirine ou
antioxydant (seuls ou combinés), comparés au placebo, chez 1 276 patients diabétiques
avec artériopathie périphérique asymptomatique en termes de maladie cardiovasculaire,
d’amputation majeure secondaire à une ischémie critique, ou de mortalité (51).
Un traitement anticoagulant n’est recommandé qu’en présence d’indications classiques
d’anticoagulation efficace. Il doit être utilisé seul, sauf dans de rares cas (exemple : revas
cularisation endovasculaire) où une association avec un traitement AAP peut être consi
dérée pendant un mois et seulement si le risque hémorragique est jugé faible. Les résultats
récents de l’étude COMPASS (Cardiovascular Outcomes for People Using Anticoagulation
Strategies) montrent qu’une association d’aspirine avec le rivaroxaban, un inhibiteur oral
du facteur Xa, comparée à l’aspirine seule, réduit de 46 % le risque d’évènements vascu
laires périphériques, notamment d’amputation de membre inférieur chez des patients avec
des antécédents de maladie cardiovasculaire ou périphérique (52). Les patients diabétiques
(44 % à l’inclusion) bénéficient de cette association de la même façon que les autres parti
cipants. Cependant, ce bénéfice n’a pas été observé avec rivaroxaban seul, et il est surtout
contrebalancé par un risque élevé d’hémorragie majeure, particulièrement gastro-intesti
nale. Un traitement par vorapaxar, un antagoniste sélectif du récepteur plaquettaire
PAR-1, a également permis de réduire le risque d’évènements vasculaires périphériques,
mais avec une augmentation du risque hémorragique chez des patients avec antécédents
de maladie cardiovasculaire stable (53).
Autres vasodilatateurs
Certains vasodilatateurs peuvent être utilisés, à visée symptomatique, pour améliorer la
claudication intermittente tels que cilostazol (inhibiteur de la phosphodiestérase type III),
et naftidrofuryl (vasodilatateur périphérique), mais leur bénéfice est minime à modéré
avec un niveau de preuve limité (44). Dans une large revue de la littérature, cilostazol était
associé à une amélioration du périmètre de marche, mais sans protection cardiovasculaire
notable ni effet favorable sur la qualité de vie (54). Ce médicament est responsable de
certains effets secondaires, notamment céphalées, vertige, palpitations, et diarrhées. Le
Cilostazol a également un effet APP et doit être utilisé avec prudence en association avec
d’autres APP ou anticoagulants (55). L’oxalate de naftidrofuryl améliore également de
façon significative le périmètre de marche (56).
Traitements innovants
Les facteurs de croissance et les cellules souches ont été également testés dans l’artério
pathie périphérique, avec des résultats encourageants. L’étude TA- MARIS (Efficacy and
Safety of XRP0038/NV1FGF in Critical Limb Ischemia Patients With Skin Lesions), qui a
inclus 520 patients souffrant d’ICC dont 53 % étaient diabétiques, n’a pas permis de
démontrer l’intérêt du facteur de croissance NV1FGF (non-viral 1 fibroblast growth factor)
dans la réduction du risque de mortalité ou d’amputation majeure de jambe (57). Une
revue récente n’a pas supporté l’intérêt d’un traitement par facteurs de croissance dans la
réduction du risque de décès, d’amputation majeure, ni l’amélioration du périmètre de
marche en analysant 14 études testant FGF (fibroblast growth factors), HGH (hepatocyte
growth factors) ou VEGF (vascular endothelial growth factors) chez 1 400 patients avec
artériopathie périphérique (58). Par ailleurs, ces traitements ont amélioré les anomalies
hémodynamiques et diminué le risque d’amputations mineures, mais le niveau de bais
était élevé. Une large métaanalyse récente a montré que l’autogreffe de cellules souches
réduisait le risque d’amputation, augmentait le taux de survie sans amputation, et amélio
rait la cicatrisation des ulcères (59). Ils ont rapporté également une augmentation de l’IPS
et de la TcPO2, et une réduction des douleurs de décubitus. De façon intéressante, la
réduction du risque d’amputation était plus marquée dans les études avec une forte préva
lence de diabète. Ces résultats encourageants n’ont pas été corroborés par l’étude PACE
(Patients With Intermittent Claudication Injected With ALDH Bright Cells) réalisée chez
82 patients (30 diabétiques) avec artériopathie périphérique bénéficiant d’une autogreffe
de la moelle osseuse en comparaison au placebo (60).
Mesures non pharmacologiques
Le sevrage strict de l’intoxication tabagique est indispensable pour éviter le développe
ment ou l’aggravation de l’artériopathie périphérique (61, 62). L’exposition passive à la
cigarette doit être également évitée (63). L’activité physique est indispensable dans la prise
en charge des patients artéritiques, en particulier ceux avec une claudication intermit
tente. Elle améliore le périmètre de marche et la qualité de vie (64). Une activité physique
supervisée avec une rééducation à la marche est largement recommandée chez les patients
atteints d’artériopathie périphérique. L’éducation diététique peut être également bénéfique
chez ces patients. Une étude espagnole a montré qu’un régime méditerranéen à base d’huile
d’olive ou de noix était associé à une réduction du risque d’artériopathie périphérique (65).
Prise en charge chirurgicale
Les techniques de revascularisation ont connu beaucoup de progrès ces dernières
années, et elles sont actuellement mieux codifiées (30). La revascularisation chirurgicale
est recommandée pour les occlusions aorto-iliaques et bi-fémorales. Une revascularisation
endovasculaire peut être discutée en première intention pour les atteintes proximales en
cas de lésion courte, chez les patients avec une comorbidité sévère, ou dans les centres
experts. Pour les lésions infra-poplitées, une revascularisation chirurgicale par by-pass est
recommandée en première intention avec un bon niveau de preuve (30). Une revasculari
sation endovasculaire peut également être envisagée en cas d’atteinte distale.
CONCLUSION
L’artériopathie périphérique est une complication sévère fréquemment observée chez les
patients diabétiques. Son pronostic est préoccupant avec un impact péjoratif sur le plan
ABSTRACT
Peripheral arterial disease (PAD) is a severe vascular disease. It is common in patients
with diabetes, with a worse prognosis. PAD has been associated with excess risk of lower-
extremity amputation, cardiovascular disease, and all-cause mortality. The screening for
PAD will be based on a careful evaluation of medical history and a comprehensive clinical
examination. The diagnosis of PAD can be established based on the assessment of the ankle-
brachial index, which should be performed in patients with symptoms or signs suggesting
PAD. The management of PAD requires an experienced and multidisciplinary team.
Diabetes and blood pressure controls, statins, and antiplatelet drugs are the key-treatments
of PAD. Revascularisation should be considered according to PAD anatomic localization,
medical conditions, and operator experience. Supervised walking rehabilitation and an
absolute smoking cessation are crucial in PAD management.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
NOTES
par Sybil CHARRIERE 1,2, Mathilde DI FILIPPO 1,3, Oriane MARMONTEL 1,3,
Noël PERETTI 1,4 et Philippe MOULIN 1,2 (Lyon)
lipides rares et méconnues. Elles sont caractérisées par une diminution du cholestérol
contenu dans les lipoprotéines de type LDL (low density lipoprotein) ou hypoLDLémie.
Elles regroupent deux situations très différentes. Tout d’abord, un groupe de trois
pathologies très rares et graves d’expression phénotypique précoce dès les premières années
de vie: la maladie de rétention des chylomicrons, l’abêtalipoprotéinémie et l’hypobêtali
poprotéinémie homozygote qui se manifestent dès les premières semaines de vie par des
diarrhées graisseuses avec malabsorption lipidique entraînant un retard de croissance
staturo-pondérale puis des anomalies principalement neurologiques et ophtalmologiques
par carences en vitamines liposolubles et en acides gras essentiels, et un risque de stéato-
hépatite. Par ailleurs, on trouve des hypolipidémies moins sévères, le plus souvent
asymptomatiques et de découverte fortuite, l’hypobêtalipoprotéinémie hétérozygote, et
l’hypolipidémie combinée familiale. Ces pathologies sont généralement considérées comme
« bénignes », mais présentent également un risque de stéatose hépatique avec évolution
possible vers une fibrose chez, les porteurs de mutations du gène APOB, justifiant le
diagnostic, l’exploration familiale et la surveillance des porteurs de ces mutations.
I. INTRODUCTION
Les hypolipidémies génétiques sont des pathologies rares et méconnues du métabolisme
des lipoprotéines, liées à un défaut de production des lipoprotéines riches en triglycérides
(chylomicrons / VLDL) par l’intestin ou une accélération de catabolisme ou clairance. Les
lipoprotéines sont essentielles pour assurer le transport des lipides dans la circulation
plasmatique. Un déficit sévère en lipoprotéines circulantes va donc générer une carence
cellulaire en acides gras en particulier en acides gras essentiels, mais également en
vitamines liposolubles, responsables d’une partie des complications de ces pathologies.
Nous ne détaillerons, dans cet article, que les hypocholestérolémies liées majoritaire-
ment à une diminution du cholestérol contenu dans les lipoprotéines de type LDL (low
épurés par le récepteur appelé LRP (LDL receptor-related protein) puisque l’apo B48 est
dépourvue du domaine de liaison au récepteur des LDL.
La voie endogène correspond à la synthèse hépatique des VLDL qui subissent également
l’action de la LPL lorsqu’elles sont déversées dans la circulation générale. Elles sont ainsi
converties en Intermediate-density Lipoproteins (IDL) qui peuvent être soit captées par le
foie, soit subir l’action de lipase l’hépatique générant des LDL qui seront recaptées par le
récepteur des LDL après liaison à l’apoB100 (Figure 1).
ment impliquée dans la sécrétion des VLDL (8-10). Seulement une quarantaine de patients
homozygotes ou hétérozygotes composites issus de 24 familles ont été décrits dans la litté-
rature. 17 mutations différentes ont été rapportées (10 mutations faux sens et 7 protéines
tronquées) (11).
Il s’agit d’une pathologie très rare, touchant moins de 1 personne pour 1 million (17). 67
patients issus de 58 familles présentant une abêtalipoprotéinémie ont été rapportés.
53 mutations différentes ont été décrites dont seulement 8 mutations faux sens (18).
Chez l’Homme, un seul gène, situé sur le chromosome 2, code pour l’apoB (OMIM#
107730) (19). Il existe néanmoins deux transcrits, grâce au mécanisme d’édition de
l’ARNm qui consiste en une désamination de la cytidine 6 666 (base 6538 sur la séquence
NM_000388.2, selon la nouvelle nomenclature) en uridine, ce qui conduit à l’apparition
d’un codon stop (20, 21). Selon le type cellulaire, l’apoB sécrétée peut donc être : l’ApoB100
dans les hépatocytes et l’ApoB48 qui correspond à 48 % de l’ApoB100 (extrémité N termi-
nale, 2 152 acides aminés) dans les cellules intestinales (22).
Au total, plus de 100 mutations sur le gène APOB ont été décrites associées à des
hypocholestérolémies, entraînant pour la plupart des troncatures de taille variable (du
peptide signal à 90 %).
V. DIAGNOSTIC PARACLINIQUE
HDLc 0,19 0,27 0,30 0.55+/-0.18 0.60 +/- 0.21 0,50+/-0,12 0,23+/-0,50
LDLc calculé 0,34 <0,02 0,02 0.34+/-0.18 0.63 +/- 0.23 0,97+/-0,31 0,42+/-0,12
Tableau 1. - Valeurs des paramètres lipidiques (en g/L) dans les différents types d’hypoLDLémies.
ABL : abêtalipoprotéinémie, CT : cholestérol total, HDLc : HDL cholestérol, He-ANGPTL3 : hétérozygote
ANGPTL3, Ho-ANGPTL3 : homozygote ANGPTL3, Hz-FHBL : hypobêtalipoprotéinémie heterozygote,
Ho-FHBL : hypobêtalipoprotéinémie homozygote, He-PCSK9 : heterozygote PCSK9,
LDLc : LDL cholestérol, TG : triglycérides.
Le dosage des vitamines liposolubles est utile non seulement pour estimer la carence
initiale mais également aider à orienter le diagnostic, en particulier celui de la vitamine E.
Un déficit profond (vitamine E inférieure à la limite de quantification) oriente vers une
ABL ou une MRC. En cas de mutation sur le gène APOB, une carence profonde en
vitamine E n’est retrouvée qu’avec des troncatures de taille inférieure à 48 % avec des
carences qui peuvent être profondes dans la forme homozygote et modérées chez les
hétérozygotes.
L’acanthocytose désigne la déformation en spicules de la membrane des érythrocytes.
Des acanthocytes sont retrouvés en proportion anormale (>5 %) lors de l’examen micros-
copique des frottis sanguins en particulier dans l’ABL, chez quelques cas d’Ho-FHBL et de
MRC.
LDLc et ApoB
abaissés
OUI
(les 2
parents)
doses médicaments
50 UI/kg/j OMACOR®
Vitamine E
(100 à 300 UI/kg/j) VEDROP®
15 000 UI/j
Vitamine A VITAMINE A313®
(100 à 400 UI/kg/j)
Les troubles digestifs et l’état général des malades sont complètement transformés après
instauration d’un régime pauvre en graisses. La symptomatologie digestive peut régresser
voire disparaître en quelques jours. Certains enfants ont une évolution staturo-pondérale
normale alors que d’autres amorcent un rattrapage puis se stabilisent sur un canal inférieur
à -1 DS. Cependant, le retard de l’âge osseux et le retard intellectuel (lorsqu’ils sont
présents au moment du diagnostic) persistent souvent.
VIII. CONCLUSION
Les déficits génétiques en lipoprotéines contenant de l’ApoB se présentent sous des
formes cliniques variées. Les formes graves sont rares du fait de leur transmission selon un
mode récessif, mais ont un retentissement neurologique, ophtalmologique, et sur la crois-
sance qui est la conséquence de la malabsorption lipidique et un retentissement muscu-
laire et/ou cardiaque encore mal expliqué, ainsi qu’un risque de stéatose hépatique. Ces
patients doivent donc bénéficier précocement d’une prise en charge et d’un suivi adapté,
ce qui n’est pas sans difficultés du fait de leur expression clinique peu spécifique et de la
méconnaissance de ces maladies rares.
Les formes plus modérées, de transmission autosomique co-dominante, sont plus
fréquentes et doivent également être dépistées : initialement elles étaient considérées
comme protectrice puisque les taux abaissés de LDLc étaient supposés diminuer le risque
cardiovasculaire des patients. Cependant, du fait de leur association à des stéatoses, voire
des fibroses hépatiques, en particulier en cas de mutation du gène APOB, ces formes
doivent également être diagnostiquée et conduire à un dépistage familial avec un suivi
hépatique de tous les patients atteints.
Ces pathologies sont importantes à identifier non seulement pour proposer une prise en
charge adaptée à ces patients, mais également afin d’améliorer la compréhension des
mécanismes de synthèse et de catabolisme des lipoprotéines riches en apoB, ce qui a
permis d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques pour le traitement des dyslipidémies.
1
INSERM U1060, Laboratoire CarMeN, Université Lyon 1,
INRA U1235, INSA de Lyon, CENS, Centre de Recherche en
Nutrition Humaine Rhône Alpes, Villeurbanne F-69621,
Oullins cedex F-69921, France
2
Hospices Civils de Lyon, Hôpital Louis Pradel,
Fédération d’Endocrinologie, Maladies métaboliques,
Diabète et Nutrition, Bron cedex F-69677, France
(sybil.charriere@chu-lyon.fr ; philippe.moulin@chu-lyon.fr)
3
ospices Civils de Lyon, Groupement Hospitalier Est,
H
Service de Biochimie et Biologie moléculaire Grand Est,
Bron cedex F-69677, France (mathilde.di-filippo@chu-lyon.fr
oriane.marmontel@chu-lyon.fr)
4
ospices Civils de Lyon, Hôpital Femme Mère Enfant,
H
Service d’Hépato-Gastroentérologie Nutrition pédiatrique,
Bron cedex F-69677, France (noel.peretti@chu-lyon.fr)
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
GENETIC HYPOCHOLESTEROLEMIA
by Sybil CHARRIERE 1,2, Mathilde DI FILIPPO 1,3, Oriane MARMONTEL 1,3,
Noël PERETTI 1,4 and Philippe MOULIN 1,2 (Lyon - France)
ABSTRACT
Genetic hypocholesterolemia encompasses several rare and often unrecognized diseases of
lipid metabolism. They are characterized by a decrease cholesterol content of LDL (low
density lipoprotein) or hypoLDLemia. They include two different groups of diseases. Firstly,
three rare, severe and early occurring diseases (chylomicron retention diseases, abetalipopro
teinemia and homozygous hypobetalipoproteinemia) mostly revealed by fatty diarrhea with
lipid malabsorption leading to growth retardation, risk of neurological and ophthalmological
complications due to deficiencies in liposoluble vitamins and essential fatty acids, associated
with a risk of liver steatosis. Secondly, some hypocholesterolemias are less severe, mostly
asymptomatic and incidentally discovered: heterozygous hypobetalipoproteinemia and
familial combined hypolipidemia. These diseases are generally considered as benign but can
also lead to hepatic steatosis with risk of hepatic fibrosis, risk identified for APOB mutation
carriers, therefore warranting the need for diagnosis, familial exploration and monitoring of
these patients.
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NOTES
Les agonistes des récepteurs du GLP-1 (GLP-1 RA) occupent une place croissante dans
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
le traitement du diabète de type 2, dès la deuxième ligne de traitement. Plus de dix ans
après leur commercialisation, le rapport bénéfices-risques des GLP-1 RA apparaît
clairement favorable. Au-delà de leur impact positif sur l’équilibre glycémique et le poids
(en dépit d’un taux non négligeable de sujets non répondeurs), mais aussi sur la pression
artérielle et, dans une moindre mesure, sur les paramètres lipidiques, la sécurité cardio
vasculaire démontrée avec les GLP-1 RA - voire le bénéfice cardiovasculaire retrouvé avec
certaines molécules de la classe dans certaines populations - ainsi que leur possible effet
néphroprotecteur, constituent des arguments majeurs en faveur de leur utilisation. Les
principaux effets indésirables sont gastro-intestinaux (nausées, vomissements, troubles du
transit), mais ils sont le plus souvent légers et transitoires, et conduisent rarement à l’arrêt
du traitement. L’incidence des lithiases biliaires est sans doute également plus élevée chez
les patients traités par GLP-1 RA. À ce jour, il n’existe pas d’argument formel en faveur
d’un risque spécifique des GLP-1 RA sur la survenue de pancréatites aiguës et de cancers
du pancréas, comme sur celle d’hyperplasies des cellules C ou de cancers médullaires de la
thyroïde, mais des études à long terme sont encore nécessaires. Une prudence d’utilisation
est suggérée chez les patients ayant des antécédents de pathologies pancréatiques, et les
GLP-1 RA sont, de principe, contre-indiqués chez les sujets présentant des antécédents
personnels ou familiaux de cancer médullaire de la thyroïde ou de NEM 2. Une élévation
modérée de la fréquence cardiaque est retrouvée sous GLP-1 RA, sans impact clinique
dans les essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA. Pour autant, cette
augmentation de la fréquence cardiaque explique peut-être en partie le signal défavorable
observé sous GLP-1 RA en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection ventriculaire
gauche diminuée. Dans tous les cas, l’efficacité et la tolérance des GLP-1 RA, ainsi que
l’observance au traitement, devront être soigneusement et régulièrement évaluées compte
tenu du prix élevé de ces produits, de la possibilité d’une intolérance digestive et de
l’existence de patients non répondeurs.
INTRODUCTION
Dans l’arsenal des traitements du diabète de type 2 (DT2), le choix d’une classe théra-
peutique, puis d’une molécule spécifique, est basé sur les caractéristiques clinico-biolo-
giques du patient, le respect des indications et contre-indications, l’appréciation de la
balance bénéfices/risques (découlant des résultats des études de phase III ou IV puis des
observations en vie réelle), mais aussi sur les préférences du patient. Les stratégies théra-
peutiques dans le DT2 sont devenues bien plus complexes avec l’émergence, depuis une
dizaine d’années, des médicaments ciblant la voie des incrétines. Pour rappel, l’effet incré-
semble que les GLP-1 RA de courte durée d’action exercent un effet favorable sur la lipémie
post-prandiale (diminution des taux de triglycérides, chylomicrons, apo B48, acides gras
libres) [7-8]. Une méta-analyse en réseau incluant 35 études montre une diminution
modeste mais significative du taux de LDL-c versus placebo est retrouvé pour tous les
GLP-1 RA (entre -0,08 et -0,16 mmol/l) [16]. Dans cette méta-analyse, l’exénatide retard
et le liraglutide à la dose de 1,8 mg/j diminuent aussi le cholestérol total versus placebo
(entre -0,16 et -0,27 mmol/l), et le liraglutide 1,8 mg/j réduit également les taux de trigly-
cérides (-0,30 et -0,17 mmol/l) [16]. Dans le RCP du sémaglutide, il est fait mention d’une
baisse de 12 % des triglycérides, de 21 % des VLDL et de plus de 40 % de l’hyperlipidémie
post-prandiale après un repas riche en graisses.
5. Sécurité / bénéfices cardiovasculaires
Depuis 2008 et la controverse sur la rosiglitazone, la Food & Drug Administration
(FDA) exige une étude d’innocuité cardiovasculaire de 2 ans minimum versus placebo
pour tout nouveau traitement mis sur le marché. L’Agence Européenne du Médicament
(EMA) a aussi exigé de telles études dès 2010, pour une durée minimale de 3 ans. Le proto-
cole particulier de ces études, élaboré pour répondre aux exigences réglementaires, n’est
pas destiné à évaluer l’effet sur l’HbA1c du produit testé dans la mesure où les investiga-
teurs sont incités à ajouter, en cours d’étude, d’autres médicaments anti-hyperglycémiants
pour optimiser l’équilibre glycémique du patient - l’idéal étant d’obtenir une HbA1c
identique entre les deux groupes afin de ne tester réellement que la sécurité cardiovascu-
laire de la molécule à l’étude, sans biais potentiel lié à une exposition différente à l’hyper-
glycémie entre les deux groupes. Ces dernières années ont vu la publication de quatre de
ces grands essais d’intervention, menés chez des patients à haut risque cardiovasculaire,
dont les principaux résultats sont résumés dans le Tableau 1. Quant aux résultats des
études menées avec l’exénatide en implant sous-cutané (FREEDOM-CVO, effet neutre sur
le critère primaire de jugement déjà annoncé), le dulaglutide (REWIND) et l’albiglutide
(HARMONY OUTCOMES), ils devraient être dévoilés en 2019.
a. Étude ELIXA
L’étude ELIXA a inclus 6 068 patients DT2 dans les suites (< 6 mois) d’un syndrome
coronarien aigu (infarctus du myocarde ou hospitalisation pour angor instable), rando-
misés pour recevoir, en double aveugle, soit du lixisénatide (une injection par jour de 10
puis 20 µg), soit un placebo, en plus de leur traitement usuel [17]. Les patients (âge moyen
60 ans, ancienneté du diabète 9 ans, HbA1c à l’inclusion 7,7 %, prévention secondaire
100 %, insuffisance cardiaque 22,4 %) ont été suivis pendant une période médiane de
25 mois. En dépit du dessin de l’étude, l’HbA1c est resté modérément mais significative-
ment inférieure dans le groupe lixisénatide (différence moyenne -0,27 % sur l’ensemble de
suivi) ; des différences significatives de poids (-0,7 kg), de PAS (-0,8 mmHg) et de rythme
cardiaque (+0,4 battement par minute, bpm) ont été retrouvées sous lixisénatide versus
placebo. L’incidence des hypoglycémies s’est avérée comparable dans les deux groupes,
mais un nombre plus élevé d’hypoglycémies sévères a été recensé sous placebo. Le critère
d’évaluation principal (critère composite comprenant décès cardiovasculaire, infarctus du
myocarde (IDM) non fatal, accident vasculaire cérébral (AVC) non fatal et angor instable)
a été observé de façon comparable dans les deux groupes, à savoir chez 13,4 % des patients
sous lixisénatide et 13,2 % des patients sous placebo, démontrant la non-infériorité du
lixisénatide versus placebo (p<0,001) mais réfutant l’hypothèse de supériorité (p=0,81). Il
n’y avait pas de différence en ce qui concerne la mortalité totale, les composantes indivi-
duelles de ce critère composite principal ou d’autres types d’événements cardiovasculaires.
b. Étude LEADER
L’étude LEADER a inclus 9 340 patients DT2 âgés de plus de 50 ans en situation de
prévention cardiovasculaire secondaire (coronaropathie, atteinte artérielle cérébrale ou
périphérique, affection rénale chronique de stade 3 ou plus ou insuffisance cardiaque
NYHA II ou III) ou âgés de plus de 60 ans en prévention primaire mais avec au moins un
facteur de risque associé (albuminurie, hypertension artérielle avec hypertrophie ventricu-
laire gauche, dysfonction ventriculaire gauche ou index de pression systolique <0,9),
randomisés pour recevoir, en double aveugle, soit du liraglutide (une injection de 1,8 mg/j),
soit un placebo, en plus de leur traitement usuel [18]. Les patients (âge moyen 64 ans,
ancienneté du diabète 13 ans, HbA1c à l’inclusion 8,7 %, prévention secondaire 81,3 %,
insuffisance cardiaque 14 %) ont été suivis pendant une période médiane de 3,8 ans. En
dépit du dessin de l’étude et du recours plus fréquent à d’autres anti-hyperglycémiants dans
le groupe placebo, l’HbA1c est resté significativement inférieure sous liraglutide (diffé-
rence moyenne -0,40 % après 36 mois) ; des différences significatives de poids (-2,3 kg), de
PAS (-1,2 mmHg), de la PAD (+0,6 mmHg) et de rythme cardiaque (+3 bpm) ont été
retrouvées sous liraglutide versus placebo. L’incidence des hypoglycémies et des hypoglycé-
mies sévères était plus faible sous liraglutide (-20 % et -31 %, respectivement). Le critère
d’évaluation principal (critère composite comprenant décès cardiovasculaire, IDM non
fatal symptomatique ou silencieux, AVC non fatal) a été observé chez 13 % des patients du
bras liraglutide et 14,9 % des patients du bras placebo - soit une baisse du risque de 13 % -
démontrant la non-infériorité du liraglutide versus placebo (p<0,001), puis sa supériorité
(p<0,01). Une réduction significative de 22 % de la mortalité cardiovasculaire et de 15 %
de la mortalité toutes causes ont également été observées dans le groupe liraglutide. Ces
bénéfices n’apparaissent qu’au-delà de la première année mais semblent s’accentuer
progressivement avec le temps. Une diminution de l’incidence des IDM et AVC non fatals
ainsi que des hospitalisations pour insuffisance cardiaque a été observée sous liraglutide,
mais sans atteindre la signification statistique. Le bénéfice sur le critère principal était
retrouvé dans le sous-groupe des patients en prévention secondaire et dans celui des sujets
présentant un DFG < 60 ml/mn, mais ne l’était pas dans ceux des sujets en prévention
primaire ou présentant un DFG > 60 ml/mn. Il faut traiter par liraglutide (1,8 mg/j)
66 sujets pendant 3 ans pour éviter un événement du critère principal.
c. Étude SUSTAIN-6
L’étude SUSTAIN-6 a inclus 3 297 sujets DT2 âgés de plus de 50 ans en situation de
prévention cardiovasculaire secondaire ou âgés de plus de 60 ans en prévention primaire
mais avec au moins un facteur de risque associé (critères identiques à ceux de l’étude
LEADER), randomisés en quatre groupes pour recevoir, en double aveugle, soit du sémaglu-
tide (1 injection de 0,5 ou de 1 mg/semaine), soit leur placebo respectif, en plus de leur
traitement usuel [19]. Les patients (âge moyen 65 ans, ancienneté du diabète 14 ans,
HbA1c à l’inclusion 8,7 %, prévention secondaire 83,0 %, insuffisance cardiaque 23,6 %)
ont été suivis pendant une période médiane de 2,1 ans. Le plan d’analyse statistique
prévoyait de regrouper les deux groupes sémaglutide d’une part, et les deux groupes placebo
d’autre part. En dépit du protocole de l’étude et du recours plus fréquent aux autres anti-
hyperglycémiants dans le groupe placebo, le taux d’HbA1c est resté largement et significa-
tivement plus faible dans les bras sémaglutide 0,5 mg (différence moyenne -0,7 %) et 1 mg
(différence moyenne -1,0 %) ; des différences significatives de poids (-2,9 et -4,3 kg), de
PAS (-1,3 (non significatif) et -2,6 mmHg), et de fréquence cardiaque (+2 et +2,5 bpm) ont
été retrouvées sous sémaglutide 0,5 et 1 mg respectivement, versus placebo. Les taux de
triglycérides et de LDL-c étaient très discrètement diminués sous sémaglutide. L’incidence
des hypoglycémies documentées ou sévères était comparable dans les différents groupes.
Le critère d’évaluation principal (critère composite incluant décès cardiovasculaire, IDM
non fatal, AVC non fatal) a été observé chez 6,6 % des patients sous sémaglutide et 8,9 %
des patients sous placebo - soit une baisse du risque de 26 % - démontrant la non-infério-
rité du sémaglutide versus placebo (p<0,001), puis sa supériorité (p=0,02) dans une analyse
qui n’était cependant pas pré-spécifiée. Ce bénéfice est dû à la baisse du nombre d’IDM
non fatals (-26 %, ns) mais surtout d’AVC non fatals (-39 %, p=0,02). Aucun effet signifi-
catif sur la mortalité cardiovasculaire ou totale n’a été retrouvé. Il faut traiter par sémaglu-
tide 45 sujets durant 2 ans pour éviter un événement du critère principal.
d. Étude EXSCEL
L’étude EXSCEL a inclus 14 752 sujets DT2 (âge moyen 62 ans, ancienneté du diabète
12 ans, HbA1c 8,0 %, prévention secondaire 73,1 %, insuffisance cardiaque 16,2 %) rando-
misés pour recevoir soit de l’exénatide à libération prolongée (1 injection de 2 mg/semaine),
soit un placebo, en plus de traitement actuel [20]. La durée médiane de suivi a été de
3,2 années mais du fait d’un taux inhabituel d’arrêt prématuré du traitement dans les deux
groupes (43 et 45,2 % dans les groupes exénatide retard et placebo, respectivement), la
durée d’exposition au traitement n’a été que de 2,4 années. En dépit du protocole de l’étude
et du recours plus fréquent aux autres anti-hyperglycémiants dans le groupe placebo, le
taux d’HbA1c est resté significativement plus faible dans le bras exénatide retard (diffé-
rence moyenne -0,53 %) ; des différences significatives de poids (-1,3 kg), de PAS
(-1,5 mmHg), de LDL-c (-1,5 mg/dl), de triglycérides (-1,8 mg/dl), de PAD (+0,25 mmHg)
et de fréquence cardiaque (+2,5 bpm) ont été retrouvées sous exénatide retard versus
placebo. L’incidence des hypoglycémies sévères était comparable dans les deux groupes. Le
critère d’évaluation principal (composite comprenant décès cardiovasculaire, IDM non
fatal, AVC non fatal) a été observé chez 11,4 % des patients du bras exénatide retard et
12,2 % des patients du bras placebo (hazard ratio HR 0,91 (IC95 % 0,83 à 1,00)), démon-
trant la non-infériorité de l’exénatide retard versus placebo (p<0,001) mais réfutant
l’hypothèse de supériorité (p=0,06). Le même résultat a été retrouvé pour la plupart des
critères secondaires d’évaluation : décès cardiovasculaires (HR 0,88 (IC95 % 0,76 à 1,02)),
IDM fatal ou non (HR 0,97 (IC95 % 0,85 à 1,10)), AVC fatal ou non (HR 0,85 (IC95 %
0,70 à 1,03)), hospitalisation pour insuffisance cardiaque (HR 0,94 (IC95 % 0,78 à 1,13)),
hospitalisation pour syndrome coronarien aigu (HR 1,05 (IC95 % 0,94 à 1,18)). Le risque
de mortalité totale était également plus faible dans le groupe exénatide retard (HR 0,86
(IC95 % 0,77 à 0,97) ; p=0,016), mais cela ne pouvait pas être considéré comme significatif
au regard du plan d’analyse statistique. Les analyses de sensibilité ont montré un bénéfice
significatif de l’exénatide retard sur le critère primaire composite dans la sous-population
pré-spécifiée des sujets de plus de 65 ans (HR 0,80 (IC95 % 0,71 à 0,91)). On doit souligner
le recours plus fréquent au liraglutide et surtout aux inhibiteurs de SGLT2 (iSGLT2) dans
le groupe placebo : or, on sait désormais que ces agents apportent un bénéfice cardiovas-
culaire, ce qui a pu conduire à un biais d’interprétation.
e. Questions en suspens
Les résultats apparemment discordants des études ELIXA et EXSCEL d’une part
(neutralité cardiovasculaire) et LEADER et SUSTAIN-6 d’autre part (bénéfice cardiovas-
culaire), posent de multiples questions. Ces divergences sont-elles liées à des différences de
méthodologie et/ou de niveau de risque des populations, masquant un effet-classe des
GLP-1 RA ? Traduisent-elles à l’inverse des effets propres à chacune des molécules ? (fonc
tion de leur durée d’action ? de leur puissance ? de leur degré d’homologie avec le GLP-1
natif humain ?). Les deux études positives présentent elles aussi des discordances, que l’on
ne sait pas, à ce jour, expliquer : diminution de la mortalité dans LEADER et non dans
SUSTAIN-6 ; diminution du risque d’AVC dans SUSTAIN-6 et non dans LEADER. Une
méta-analyse regroupant 176 310 participants issus de 236 essais randomisés d’une durée
d’au moins 12 semaines montre que, contrairement aux iDPP4, l'utilisation des GLP-1 RA
(et des iSGLT2) est associée à une mortalité cardiovasculaire et à une mortalité totale plus
faible par rapport au placebo ou à l’absence de traitement [21]. La méta-analyse des quatre
grands essais d’intervention, réalisée par l’équipe qui a conduit l’étude EXSCEL, conclut,
elle, sans doute un peu hâtivement, à un effet-classe des GLP-1 RA, avec une baisse signi-
ficative de 10 % du critère composite « décès d’origine cardiovasculaire, IDM non fatals,
AVC non fatals » (IC95 % 0,82 à 0,99), de 13 % de la mortalité cardiovasculaire (IC95 %
0,79 à 0,96) et de 12 % de la mortalité totale (IC95 % 0,81 à 0,95) [22]. Les résultats de
l’étude REWIND, menée avec le dulaglutide dans une population présentant un niveau de
risque cardiovasculaire globalement moins élevé, sont attendus avec impatience et appor-
teront de nouveaux arguments dans ce débat.
L’autre question en suspens concerne les mécanismes par lesquels les GLP-1 RA
pourraient agir sur le plan cardiovasculaire. Les résultats des essais d’intervention plaident
pour un effet anti-athérogène. On sait que des récepteurs du GLP-1 sont présents au niveau
des cellules de l’endothélium, du myocarde et du système immunitaire. De multiples
données expérimentales montrent que le GLP-1 et les GLP-1 RA exercent des effets
bénéfiques dans les modèles animaux d’ischémie-reperfusion (réduction de la taille de la
zone myocardique infarcie) ou sur le développement des lésions d’athérosclérose et l’inflam-
mation de la plaque chez des souris hypercholestérolémiques [23]. Des effets favorables sur
la fonction endothéliale et l’agrégation plaquettaire ont également été rapportés dans des
études précliniques [23]. Chez l’homme, ces effets spécifiques pourraient venir s’ajouter
Tableau 1. - Résumé des essais de sécurité cardiovasculaire évaluant les GLP-1 RA disponibles en 2018
Suivi médian
2,1 3,8 2,1 3,2
(années)
Critère CV
1,02 (0,89-1,17) 0,87 (0,78-0,97) 0,74 (0,58-0,95) 0,91 (0,83-1,00)
composite, HR
IDM non fatal, HR 1,03 (0,87-1,22) 0,88 (0,75-1,03) 0,74 (0,51-1,08) 0,95 (0,84-1,09)
AVC non fatal, HR 1,12 (0,79-1,58) 0,89 (0,72-1,11) 0,61 (0,38-0,99) 0,86 (0,70-1,07)
Insuffisance
0,96 (0,75-1,23) 0,87 (0,73-1,05) 1,11 (0,77-1,61) 0,94 (0,78-1,13)
cardiaque, HR
Mortalité CV, HR 0,98 (0,78-1,22) 0,78 (0,66-0,93) 0,98 (0,45-1,48) 0,88 (0,76-1,02)
Mortalité totale, HR 0,94 (0,78-1,13) 0,85 (0,74-0,97) 1,05 (0,74-1,50) 0,86 (0,77-0,97)
DT2 : diabète de type 2 ; SCA : syndrome coronarien aigu ; CV : cardiovasculaire ;
IDM : infarctus du myocarde ; AVC : accident vasculaire cérébral ; HR : hazard ratio
aux bénéfices sur le contrôle glycémique, la pression artérielle, le poids ou les lipides
observés sous GLP-1 RA, mais rien n’est clairement démontré à ce jour.
6. Néphroprotection ?
Les études de sécurité cardiovasculaire menées ces dernières années avec les nouveaux
agents anti-hyperglycémiants ont permis de mettre en lumière un rôle néphroprotecteur
potentiel pour certains d’entre eux, et notamment les GLP-1 RA. Ainsi, dans LEADER,
chez des patients DT2 à très haut risque cardiovasculaire, parmi lesquels plus de 80 %
recevaient un inhibiteur du système rénine-angiotensine, le critère d’évaluation composite
comprenant la progression vers la macroprotéinurie, le doublement de la créatininémie, le
recours la dialyse ou la greffe ou le décès lié à la maladie rénale a été réduit de 22 % sous
liraglutide 1,8 mg/j versus placebo (5,7 % versus 7,2 %, p=0,005) ; ces bénéfices étaient
surtout « tirés » par la réduction de la progression vers la macroalbuminurie, et étaient
indépendants de l’HbA1c, de l’IMC, de la PAS et de l’excrétion urinaire d’albumine à
l’inclusion. Un ralentissement du déclin du DFG ainsi qu’une moindre augmentation de
l’excrétion urinaire d’albumine étaient retrouvés sous liraglutide [24]. Dans l’étude
SUSTAIN-6, le sémaglutide est également associé à une diminution du risque d’apparition
ou de progression de la maladie rénale dans une population similaire : le critère d’évalua-
tion composite comprenant la progression vers la macroprotéinurie, le doublement de la
créatininémie avec DFG < 45 ml/mn/1,73 m² ou le recours la dialyse ou la greffe a été
réduit de 36 % sous sémaglutide (3,8 % versus 6,1 %, p=0,005) : là encore, c’est la réduction
de la progression vers la macroalbuminurie qui « tirait » ces résultats [19]. Dans l’étude
AWARD-7 comparant dulaglutide 0,75 ou 1,5 mg une fois par semaine et insuline glargine
une fois par jour tous deux en association à l’insuline lispro chez 576 patients DT2 présen-
tant une maladie rénale chronique de stade 3 ou 4 (DFG 38 ml/mn/1,73 m² ; albuminurie/
créatininurie A/C 847,2 mg/g), il existe à 52 semaines, à contrôle glycémique comparable,
une moindre diminution du DFG et une tendance à une réduction supérieure du rapport
A/C dans le groupe dulaglutide 1,5 mg [25]. Ce possible effet néphroprotecteur des GLP-1
RA doit encore être confirmé. Il pourrait s'agir d'un effet propre des GLP-1 RA (diminu-
tion de l’inflammation ? du stress oxydant ?...), mais le bénéfice observé pourrait, plus
simplement, être avant tout médié par l'amélioration du contrôle glycémique et de la
pression artérielle [26]. Notons que le liraglutide et le dulaglutide peuvent être administrés
jusqu’au stade d’insuffisance rénale chronique sévère (contre-indication en cas d’insuffi-
sance rénale terminale), tandis que l’exénatide n’est pas recommandé en-dessous de
30 ml/mn de clairance de la créatinine et l’exénatide retard en-dessous de 50 ml/mn [6].
qu’un réduction significative des gamma-GT versus placebo ou autre comparateurs [27].
Cependant, il n’est pas aujourd’hui démontré que le bénéfice des GLP-1 RA sur la stéatose
et la NASH soit indépendant de la perte de poids concomitante.
b. Effets sur la cellule bêta ?
Dans les modèles murins, le GLP-1 exerce effets protecteurs sur les cellules bêta des îlots
de Langerhans du pancréas (prolifération des cellules préexistantes, stimulation de la
néogenèse, effet anti-apoptotique) ; toutefois, la relevance de ces données chez l’homme
reste à démontrer. De nombreux essais cliniques réalisés avec les GLP-1 RA mettent en
évidence une amélioration de la fonction bêta-cellulaire sur la base de mesures simples
telles que le HOMA-B et le rapport pro-insuline/insuline, ainsi qu’une amélioration de la
première et de la deuxième phase de sécrétion d’insuline. Pour autant, aucune étude à ce
jour n’a apporté la preuve d’une plus grande « durabilité » des traitements par GLP-1 RA
et d’un effet protecteur sur les cellules bêta [3].
c. Neuroprotection ?
De nombreuses études précliniques suggèrent un possible rôle protecteur des GLP-1 RA
dans les pathologies neurodégénératives, en particulier les maladies d’Alzheimer ou de
Parkinson [28]. Plusieurs travaux ont montré les potentiels bénéfices de l’exénatide dans
des modèles murins de Parkinson : effets neurotrophiques, stimulation de la neurogenèse,
restauration des circuits dopaminergiques, amélioration de la fonction motrice et de
l’apprentissage. Après avoir publié les résultats favorables d’une étude clinique pilote
menée en ouvert avec l’exénatide chez des patients ayant une maladie de Parkinson
d’intensité modérée (amélioration des symptômes moteurs et des troubles cognitifs persis-
tant 12 mois après l’arrêt du traitement), une équipe londonienne a mené un essai de phase
II randomisé au cours duquel les patients recevaient une injection hebdomadaire d’exéna-
tide retard (2 mg) ou de placebo pendant 48 semaines, en plus de leur traitement antipar-
kinsonien habituel. L’étude montre un effet favorable de l’exénatide sur les signes moteurs
de la maladie, persistant (tout en s’émoussant un peu) 3 mois après l’arrêt du traitement,
sans pouvoir conclure à un véritable effet neuro-protecteur de l’exénatide, seule promesse
d’un bénéfice sur la vitesse de progression de la maladie de Parkinson [29]. Des essais sont
en cours avec d’autres GLP-1 RA et dans d’autres pathologies neurodégénératives.
digestifs des GLP-1 RA. Des signes de déshydratation, incluant une insuffisance rénale
aiguë, ont été rapportés chez des patients traités par GLP-1 RA en raison de la survenue
d’effets indésirables gastro-intestinaux.
Une revue systématique incluant 32 essais de phase III montre que le risque d’effets
secondaires digestifs sous GLP-1 RA est proportionnel à la dose administrée, et augmente
lorsque les GLP-1 RA sont associés à la metformine. Les GLP-1 RA d’action prolongée
induisent moins de nausées et de vomissements (stimulation continue des récepteurs du
GLP-1 responsable d’un phénomène de tachyphylaxie), mais plus de diarrhées que les GLP-1
RA d’action brève [30]. Parmi ces derniers, le lixisénatide induit moins d’effets secondaires
digestifs que l’exénatide. Parmi les GLP-1 RA d’action prolongée, le liraglutide et le dulaglu-
tide exposent à un risque comparable d’effets secondaires digestifs, supérieur à celui observé
sous exénatide retard ou albiglutide [29]. Le Tableau 2, adapté de la revue de Filippatos et al
[31], récapitule la fréquence des effets secondaires digestifs selon les molécules.
Tableau 2. - Incidence des effets secondaires digestifs rapportés avec les différents GLP-1 RA
(d’après [31])
traitements plus anciens choisis comme comparateurs ; ensuite, aucun ajustement n’a pu
être réalisé sur d’autres facteurs de risque fréquents chez les patients DT2 comme le poids,
le taux de triglycérides ou la consommation d’alcool ou de tabac ; enfin, on peut s’inter-
roger sur la pertinence clinique du délai de survenue de cancers déclarés en lien avec des
produits mis sur le marché peu de temps auparavant. Cependant, en 2013, une étude
cas-témoins réalisée par Singh et al [33] à partir d’une base administrative américaine
retrouve, elle aussi, un risque de pancréatite aiguë plus élevé chez les utilisateurs actuels ou
passés (< 2 ans) d’un traitement de la voie des incrétines, indépendamment des autres
facteurs de risque : taux de probabilité (odds ratio ; OR) 2,24 (IC95 % 1,36 à 3,68) pour
l’exénatide et 2,01 (IC95 % 1,37 à 3,18) pour la sitaglitpine. Toutefois, malgré les ajuste-
ments statistiques, l’imputabilité est difficile à affirmer car l'abus de tabac, d'alcool ainsi
que l’obésité ont été nettement sous-enregistrés dans cette base de données [33].
En 2014, une méta-analyse portant sur 55 études d’intervention (incluant 33 350 patients
DT2) retrouve des résultats inverses, avec un OR à 1,11 (IC95 % 0,57 à 2,17) pour les
médicaments de la voie des incrétines en général, et à 1,05 (IC95 % 0,37 à 2,94) pour les
GLP-1 RA en particulier ; parmi les 5 études d’observation analysées (portant sur 320 289
patients), une seule retrouve un effet défavorable de médicaments de la voie des incrétines,
celle de Singh et al citée plus haut [34]. En juillet 2014, l’EMA et la FDA ont publié
conjointement un travail regroupant une synthèse de 250 études toxicologiques menées
chez l’animal (avec des analyses de toxicité pancréatique et des analyses histologiques
réalisées en insu par trois anatomopathologistes indépendants) et une revue de 200 essais
cliniques sur 41 000 patients, et ont conclu à l’absence de lien de causalité entre les traite-
ments de la voie des incrétines et l’incidence des pancréatites et/ou des cancers du pancréas
[35]. En 2016, Azoulay et al ont publié les résultats d’une étude cas-témoins dérivée
(« nested within ») d’une étude de cohorte multicentrique (Canada, États-Unis et
Royaume-Uni), portant sur plus de 1,5 million de patients DT2 ayant débuté un anti-
hyperglycémiant entre janvier 2007 et juin 2013. Dans un premier temps, les auteurs ont
recensé tous les patients hospitalisés pour une pancréatite aiguë et apparié chacun d’entre
eux avec des patients contrôles comparables pour l’âge, le sexe, l’ancienneté du DT2 et du
suivi, ainsi que la date d’entrée dans la cohorte (jusqu’à 20 contrôles pour un cas) : le
risque de pancréatite aiguë n’était pas plus élevé chez les patients recevant un traitement
de la voie des incrétines, ou plus spécifiquement un GLP-1 RA, que chez ceux traités par
au moins deux antidiabétiques oraux : Hazard Ratio (HR) ajusté 1,03 (IC95 % 0,87 à 1,22)
et 1,04 (IC95 % 0,81 à 1,35), respectivement [36]. Dans un second temps et une seconde
publication, l’exercice a été répété pour le cancer du pancréas : avec un suivi médian relati-
vement court (1,3 à 2,8 ans), le risque de cancer du pancréas n’était pas plus élevé chez les
patients recevant un traitement de la voie des incrétines, ou plus spécifiquement un GLP-1
RA, que chez ceux traités par sulfamides : HR ajusté 1,02 (IC95 % 0,84 à 1,23) et 1,13
(IC95 % 0,38 à 3,38), respectivement [37]. Dans ce contexte, l’ANSM (Agence Nationale
de Sécurité du Médicament et des produits de santé) a mené une étude à partir des données
du SNIIRAM (Système national d'information inter-régimes de l'Assurance maladie) afin
de mieux préciser l’association entre médicaments de la voie des incrétines et risque de
cancer du pancréas parmi les patients DT2 [38]. Plus de 1 300 000 sujets (âge moyen
63,8 ans, hommes 54 %) ont été inclus et suivis pendant 3,7 ans en moyenne. Au cours du
suivi, 41,1 % ont reçu l’un des iDPP4 et 7,2 % l’un des GLP-1 RA commercialisés en France
à cette période, et 3 113 cancers du pancréas sont survenus. Le risque de survenue d’un
cancer du pancréas était majoré de 30 % chez les patients exposés aux iDPP4, mais l’expo-
sition aux autres antidiabétiques oraux (metformine, sulfamides notamment) était égale-
Tableau 3. - Incidence des pancréatites aiguës dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA
au long cours et des études plus longues sont encore nécessaires. Les patients traités par
GLP-1 RA doivent être informés des symptômes caractéristiques de pancréatite aiguë.
Comme cela est précisé dans le RCP de ces molécules, le traitement doit être arrêté en cas
de suspicion de pancréatite ; si le diagnostic est confirmé, le traitement ne doit pas être
repris. Il convient d'être prudent en cas d'antécédent de pathologie pancréatique. Notons
que l’administration d’un GLP-1 RA est associée à une majoration de 10 à 20 % en moyenne
des enzymes pancréatiques (lipase et/ou amylase). Néanmoins, en l'absence de signes
cliniques évocateurs, l’élévation des enzymes pancréatiques n’est pas prédictive de la
survenue d'une pancréatite aiguë : il n’est donc pas recommandé de doser systématique-
ment les enzymes pancréatiques sous GLP-1 RA.
Tableau 4. - Incidence des cancers du pancréas dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA
3. Lithiases biliaires
Parmi les effets secondaires à long terme des GLP-1 RA, figurent également les manifes-
tations liées aux lithiases biliaires. La survenue de ces lithiases pourrait contribuer à l'aug-
mentation du risque de pancréatite aiguë avec cette classe thérapeutique. Peu de cas de
lithiase biliaire (0,4 %) et de cholécystite (0,1 %) ont été rapportés au cours des essais
cliniques de phase III réalisés avec le liraglutide. Dans LEADER, la fréquence des manifes-
tations vésiculaires, des lithiases biliaires et des cholécystites était respectivement de
3,1 %, 1,5 % et de 0,8 % sous liraglutide versus 1,9 % (p<0,001), 1,1 % (p=0,09) et 0,4 %
(p=0,046) sous placebo. Le Tableau 5 résume l’incidence des complications vésiculaires
dans les grands essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA. La méta-
analyse de Monami et al, incluant 113 essais randomisés contrôlés avec plus de 11 semaines
de suivi, retrouve un excès de risque de lithiase vésiculaire sous GLP-1 RA (OR 1,30
(IC95 % 1,01 à 1,68), p=0,04) [39]. Ces effets vésiculaires peuvent s’expliquer en partie par
la perte de poids, mais il semble également exister un effet négatif des GLP-1 RA sur la
motilité de la vésicule [43].
Tableau 5. - Incidence des complications vésiculaires dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA
Tableau 6. - Incidence des cancers médullaires de la thyroïde dans les études de sécurité
cardiovasculaire avec les GLP-1 RA
sous GLP-1 RA. Il n’est pas recommandé de doser la CT chez les patients traités par GLP-1
RA. Cependant, en l’état des connaissances, l’hypothèse d’un effet différentiel des GLP-1
RA sur les cellules C cancéreuses ne peut être totalement exclue. Ainsi, il est précisé dans
les RCP des GLP-1 RA que ces agents ne doivent pas être prescrits chez les sujets présen-
tant des antécédents personnels ou familiaux de cancer médullaire de la thyroïde ou de
NEM 2, par mesure de précaution.
tide [18] (HR 0,87 (IC95 % 0,73 à 1,05)), le sémaglutide [19] (HR 1,11 (IC95 % 0,77 à 1,61))
et l’exénatide retard [20] (HR 0,94 (IC95 % 0,78 à 1,13)) versus placebo (Tableau 1). En
outre, dans ces essais, les analyses pré-spécifiées en sous-groupes ne montrent pas d’inte-
raction significative entre les antécédents d’insuffisance cardiaque (concernant 22 %,
14 %, 23 % et 16 % des sujets inclus, respectivement) et l’influence du traitement testé sur
le critère composite primaire. Par contre, dans l’étude FIGHT, réalisée chez 300 sujets
diabétiques ou non diabétiques présentant une insuffisance cardiaque avec altération de la
fraction d’éjection ventriculaire gauche (< 40 % à l’inclusion, en moyenne 25 %), la
prescription de liraglutide 1,8 mg/j dans les 14 jours suivant une hospitalisation pour
poussée d’insuffisance cardiaque n’était pas associée à une plus grande stabilité clinique à
6 mois, mais au contraire à une tendance défavorable en termes de ré-hospitalisation
(+30 %, ns) ou de décès (+10 %, ns) versus placebo [51]. En outre, dans l’étude LIVE menée
chez 241 sujets diabétiques ou non diabétiques présentant une insuffisance cardiaque
stable avec altération de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (< 45 % à l’inclusion,
en moyenne 34 %), le liraglutide 1,8 mg/j versus placebo n’a pas permis d’améliorer la
fonction ventriculaire gauche à 24 semaines, mais était associée à une augmentation signi-
ficative de la fréquence cardiaque (+6 versus -1 bpm) et surtout des événements indési-
rables cardiaques graves (tachycardie ventriculaire létale ou non, fibrillation auriculaire,
aggravation de l’insuffisance cardiaque, syndrome coronarien aigu : 12 cas versus 3) [52].
Ainsi, dans l’attente de nouvelles données, et comme cela est formulé dans la prise de
position de la SFD [6], les GLP-1 RA doivent être évités en cas d’insuffisance cardiaque à
fraction d’éjection diminuée, du fait de l’accélération du rythme cardiaque et du signal
défavorable observé avec le liraglutide dans les études LIVE et FIGHT chez de tels patients.
Notond qu’il est précisé dans le RCP du liraglutide qu’il n’y a pas d’expérience chez les
sujets présentant une insuffisance cardiaque congestive de classe NYHA IV.
7. Aggravation de la rétinopathie ?
Dans l’étude LEADER, l’incidence du premier événement rétinien tendait à être plus
élevée sous liraglutide que sous placebo (HR 1,15 (IC95 % 0,87 à 1,52) ; p=0,33) [18]. Dans
SUSTAIN-6 [19], on retrouve un pourcentage significativement plus élevé de complica-
tions graves de la rétinopathie sous sémaglutide (3,0 %) que sous placebo (1,8 %) (HR 1,76
(IC95 % 1,11 à 2,78) ; p=0,002). Cette différence survient de manière très précoce lors de
l’étude avec un recours plus fréquent à la panphotocoagulation (2,3 %) et aux injections
intra-vitréennes (1 %) sous sémaglutide que sous placebo (1,2 % et 0,8 %, respectivement).
La majorité des 79 patients ayant présenté une complication ophtalmologique avait une
atteinte rétinienne à l’inclusion, et ce dans le groupe sémaglutide comme dans le groupe
placebo [19]. Une analyse post-hoc de SUSTAIN-6 montre que la majorité de l’effet
constaté est attribuable à l’amplitude et la rapidité de la diminution du taux d’HbA1c
observée au cours des quatre premiers mois de traitement par sémaglutide chez les patients
présentant majoritairement une rétinopathie pré-existante, un mauvais contrôle glycé-
mique initial et un traitement par insuline [53]. Une étude rétrospective publiée en 2011
avait déjà montré un risque substantiel d’aggravation de la rétinopathie diabétique chez
des patients DT2 traités par exénatide, en lien là aussi avec la rapidité et l’amplitude de
l’amélioration de l’équilibre glycémique [54].
Si la normalisation brutale de la glycémie semble devoir expliquer les événements
indésirables rétiniens parfois rapportés avec les GLP-1 RA, on ne peut à ce jour exclure un
effet pro-angiogénique direct des GLP-1 RA sur la rétine [55], et ce même si le récepteur
du GLP-1 semble peu exprimé au niveau de la rétine et n’a pas été détecté dans les yeux de
9. Immunogénicité
Compte tenu des propriétés potentiellement immunogènes des médicaments contenant
des protéines ou des peptides, les patients traités par GLP-1 RA peuvent développer des
anticorps anti-médicament. La réponse immunitaire contre les GLP-1 RA est bien moins
marquée pour les molécules présentant une forte homologie avec le GLP-1 natif : ainsi, on
retrouve des AC anti-médicament dans moins de 2 % des cas sous dulaglutide ou sémaglu-
tide, 3 à 7 % des cas sous albiglutide, 2 à 13 % des cas sous liraglutide contre 41 à 61 % des
cas sous exénatide à libération immédiate, 13 à 73 % des cas sous exénatide à libération
prolongée et 70 % à 74 % des cas sous lixisénatide [30]. La présence de ces anticorps
n’altère pas l’efficacité du produit sur contrôle glycémique, mais il existe un peu plus de
non-répondeurs parmi les patients présentant un titre très élevé d’anticorps. En revanche,
les patients avec anticorps anti-médicament ont tendance à présenter plus de réactions au
site d’injection (prurit, érythème) [données RCP].
10. Allergies
Lors des études de phase II et de phase III, des événements d'hypersensibilité systémique
(urticaire, œdème…) ont été signalés chez environ 0,5 % des patients traités par GLP-1
RA. Ces réactions allergiques sont très généralement d’intensité légère. De rares cas de
réactions anaphylactiques ou d’angiœdème ont aussi été rapportés. Aucun des patients
ayant présenté une hypersensibilité systémique n'a développé d'anticorps anti-médicament
[données RCP].
CONCLUSION
Plus de dix ans après leur commercialisation, et en l’état actuel des connaissances, le
rapport efficacité-sécurité ou bénéfices-risques des GLP-1 RA apparaît clairement favorable.
Au-delà de leur impact positif sur l’équilibre glycémique et le poids (en dépit d’un taux non
négligeable de non répondeurs), mais également sur la pression artérielle et les paramètres
lipidiques, la sécurité voire le bénéfice cardiovasculaire démontré avec certaines des
molécules de la classe dans certaines populations, ainsi que leur possible caractère néphro-
protecteur, constituent des arguments particulièrement intéressants pour l’utilisation de
ces médicaments. Globalement, la tolérance et la sécurité d’utilisation des GLP-1 RA sont
bonnes : les effets secondaires digestifs à type de nausées, vomissements ou troubles du
transit, fréquents et bien connus des cliniciens, peuvent être limités par une augmentation
progressive des doses, s’estompent généralement avec le temps et conduisent rarement à un
arrêt du traitement. S’il semble bien exister un risque accru de lithiases vésiculaires sous
GLP-1 RA, les études épidémiologiques, les données de registres de pharmacovigilance et
les essais d’intervention ne sont pas en faveur d’un risque spécifique des GLP-1 RA sur la
survenue de pancréatites aiguës et de cancers du pancréas, même si des études à long terme
semblent encore nécessaires. Une prudence d’utilisation est suggérée chez les sujets présen-
tant des antécédents de pathologies pancréatiques. En outre, les patients traités doivent
être informés des symptômes caractéristiques de pancréatite aiguë : le traitement doit être
suspendu en cas de suspicion de pancréatite et définitivement arrêté si le diagnostic est
confirmé. Les études sont également rassurantes quant au risque d’hyperplasies des cellules
C et de cancers médullaires de la thyroïde, mais les GLP-1 RA restent contre-indiqués, par
précaution, chez les patients présentant des antécédents personnels ou familiaux de cancer
médullaire de la thyroïde ou de NEM 2. L’aggravation de la rétinopathie observée dans
quelques études, et notamment dans l’étude SUSTAIN-6 avec le sémaglutide, paraît
devoir être attribuée plus à l’amélioration brutale de la glycémie qu’à un effet propre des
GLP-1 RA, même si la prudence doit encore prévaloir en l’état des connaissances. Enfin,
une élévation modérée de la fréquence cardiaque est constamment rapportée sous GLP-1
RA : toutefois, il n’a pas été observé d’impact clinique de cette accélération du rythme
cardiaque sur le risque d’évènements cardiovasculaires dans les essais de sécurité cardio-
vasculaire menés avec les GLP-1 RA. Pour autant, cette augmentation du rythme cardiaque
explique peut-être en partie le signal défavorable observé avec le liraglutide chez des
patients présentant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée : dans
l’attente de nouvelles données, les GLP-1 RA doivent être évités chez de tels sujets [6].
Comme le stipule la prise de position de la SFD sur la prise en charge médicamenteuse
de l’hyperglycémie du patient DT2 [6], le choix d’un GLP-1 RA peut être envisagé en
deuxième ligne, après échec de la metformine, ou en troisième ligne, en association avec
des traitements anti-hyperglycémiants oraux et/ou de l’insuline, en particulier chez le
patient obèse (IMC ≥ 30 kg/m2) et chez le patient en prévention cardiovasculaire secon-
daire, en faisant alors le choix du liraglutide au regard des résultats favorables de l’étude
LEADER (seul GLP-1 RA commercialisé en France à ce jour à avoir démontré un bénéfice
cardiovasculaire). Le rapport bénéfice-risque des GLP-1 RA est plus incertain chez les
patients âgés car l’expérience de leur utilisation après 75 ans est limitée et la perte de poids
expose à un risque de dénutrition, pouvant également être majoré par les effets secon-
daires digestifs : dans cette classe d’âge, il est donc préférable de les réserver aux sujets en
bonne santé générale, et, idéalement, après avis d’un endocrinologue-diabétologue [6].
L’efficacité et la tolérance des GLP-1 RA, ainsi que l’adhésion thérapeutique des patients
devront être soigneusement réévaluées à intervalles réguliers compte tenu de leur prix
bien plus élevé que celui des iDPP4 et des sulfamides, de la possibilité d’une intolérance
digestive (surtout en début de traitement) et de l’existence de patients non répondeurs.
ABSTRACT
GLP-1 receptor agonists (GLP-1 RA) are becoming increasingly used in the treatment of
type 2 diabetes. More than 10 years after their approval for the treatment of type 2 diabetes,
the benefit-risk ratio of the GLP-1 RA appears clearly favourable. Beyond their positive
impact on glycaemic control and body weight (despite a non-negligible rate of non-respon-
ders), but also on blood pressure and, to a lesser extent, on lipid parameters, the cardiovas-
cular safety found with GLP-1 RA and even the cardiovascular benefit demonstrated with
certain molecules in certain populations, as well as their possible reno-protective effects, are
all strength for their use. The main adverse effects are mild to moderate, transient gastrointes-
tinal symptoms (nausea, vomiting, transit disorders), that rarely lead to discontinuation of
treatment. In addition, the incidence of cholelithiasis is also probably higher with GLP-1
RA. To date, there is no formal argument for a specific risk of GLP-1 RA on the occurrence
of acute pancreatitis and pancreatic cancer, as well as on C-cell hyperplasia or medullary
thyroid cancer, but long term studies are still needed. Caution is advised in patients with a
history of pancreatic disease, and GLP-1 RA is contraindicated in subjects with a personal
or family history of medullary thyroid cancer or MEN 2. A moderate increase in heart rate
was found in patients treated by GLP-1 RA, with no particular clinical impact in cardiovas-
cular outcomes trials. However, this increase in heart rate may partly explain the adverse
signal observed with GLP-1 RA in subjects with heart failure and low left ventricular ejection
fraction. In all cases, the efficacy and safety of GLP-1 RA, as well as the adherence to
treatment, should be carefully and regularly assessed given their high cost, the risk of
gastrointestinal intolerance and the existence of non-responders.
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comme ayant une obésité métaboliquement saine ou de phénotype MHO pour « metabo
lically healthy obesity ». Cependant, il n’existe pas de consensus clair sur la définition de ce
phénotype. Quatre variables importantes sont fréquemment prises en considération dans
la caractérisation du profil : pression artérielle, glycémie, HDL-cholestérol et triglycérides.
Le débat repose sur l’instabilité de ce phénotype et sur son caractère transitoire ; les
personnes ayant ce phénotype ne seraient donc pas protégées à long terme des risques de
maladies cardiovasculaires et de décès prématurés observés au sein de la population obèse.
La notion d’obésité en bonne santé reste une notion qui reste à préciser scientifiquement.
Les études prospectives récentes semblent montrer que les individus MHO ont plus de
risque de développer un syndrome métabolique et par conséquent des maladies cardio
vasculaires à long terme que les sujets de poids normal et métaboliquement sains. La prise
en charge de toutes les personnes obèses, sans restriction liée au profil cardiométabolique,
est importante afin de prévenir les autres complications qui en découlent telles que
pathologies respiratoires, arthrose, cancers et dépression.
INTRODUCTION
L’obésité est une maladie chronique définie comme étant un excès de masse grasse qui
entraine des conséquences néfastes sur la santé. Cette maladie est associée à des compli-
cations cardio-métaboliques telles que l’hypertension artérielle, le diabète de type 2 et les
dyslipidémies. La prévalence de l’obésité dans le monde a augmenté de façon significative
dans les 30 dernières années (1). Cette augmentation est prédictive d’une croissance des
dépenses de santé liées à une augmentation de la morbidité associées à l’obésité. L’exis-
tence d’un sous-groupe très à risque justifie de cibler les moyens sur ce groupe. Un sous-
phénotype de personnes obèses ne présentant pas d’anomalies métaboliques liées à l’obé-
sité et avec un profil comparable, en termes de morbidité et de mortalité, à celui d’individus
de poids normal sans troubles métaboliques a été décrit dès les années 1980 (2). Il est
défini comme « obésité métaboliquement saine » ou MHO pour « metabolically healthy
obesity ». Le débat repose sur l’instabilité de ce phénotype et sur son caractère transitoire
(3, 4) ; les personnes ayant ce phénotype ne seraient donc pas protégées à long terme des
risques de maladies cardiovasculaires et de décès prématurés observés au sein de la popula-
tion obèse (5).
PARADOXES DE L’OBÉSITÉ
La notion d’obésité « en bonne santé » reste donc à préciser. En effet, des études récentes
ont remis en question l’existence du phénotype MHO (18) qui serait, en réalité, simple-
ment un profil métabolique instable qui s’estomperait au fil du temps, malgré une meilleure
sensibilité à l’insuline. Le pronostic des sujets à profil MHO à long terme reste mal connu.
Les individus obèses et métaboliquement sains ont, pour un même niveau de masse
grasse, un profil cardio-métabolique sain. Ce phénotype impliquerait que ces individus
sont à moindre risque de complications liées à l’obésité. Mais ceci n’a pas été retrouvé dans
des études prospectives récentes (2, 19). Une méta-analyse de 2016, portant sur 22 études
prospectives (suivi moyen de 12 ans) et étudiant la différence de risques cardiovasculaires
entre quatre groupes : MHO, MUHO, poids normal avec ou sans troubles métaboliques, a
montré que les personnes obèses à profil MHO avaient plus de risque de complications
métaboliques à long terme que les sujets de poids normal mais métaboliquement sains
(risque relatif, RR : 1,45 ; IC 95 % 1,20-1,70). Cependant, le risque de développer des
maladies cardiovasculaires était plus élevé chez les sujets de profil MUHO (2,31 ; 1,99-2,69)
ou les individus de poids normal avec anomalies métaboliques (2,07 ; 1,62-2,65)(19). Le
profil MHO n’aurait donc pas d’effet protecteur. Il n’en reste pas moins que l’obésité,
au-delà des anomalies métaboliques, confère une augmentation du risque d’arthrose, de
complications respiratoires, de dépression et de certains cancers.
Des études ont aussi montré que les individus MHO avaient plus de risque de développer
un diabète de type 2 que les sujets de poids normal sur une période de 11 ans (20). Bradshaw
et al. ont étudié l’incidence, sur une période de 9 ans, des composantes du syndrome
métabolique chez 3 969 sujets adultes initialement sans syndrome métabolique et répartis
en trois groupes, poids normal sans anomalie cardio-métabolique, surpoids et MHO (21).
Le risque relatif de développer une anomalie métabolique était plus élevée chez les sujets
MHO que chez ceux de poids normal sans troubles cardio-métaboliques. Le risque d’inci-
dence de troubles métaboliques était plus faible chez les individus en surpoids métaboli-
quement sains initialement. D’autres chercheurs considèrent aussi que le phénotype MHO
n’existe pas vraiment. L’étude récente, déjà citée (5), a montré qu’après suivi pendant
15 ans de 18 070 individus, les personnes MHO avaient accumulé 10 % de poids supplé-
mentaire et présentaient un risque accru de complications cardio-métaboliques par rapport
aux sujets de poids normal sans complications métaboliques ; toutefois ces risques restaient
moindres que chez les sujets MUHO. Les auteurs concluent que les individus MHO ne
sont donc pas indemnes du risque de complications, et ce, en cas de gain de poids, bien
que le risque ne soit pas aussi élevé que chez les sujets MUHO (5).
Les résultats de la cohorte MESA (Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis) ont montré que
les individus MHO n’avaient pas une plus forte incidence d’événements cardiovasculaires
que les sujets de poids normal métaboliquement sains (2). Toutefois, la moitié des individus
MHO ont développé un syndrome métabolique pendant la période de suivi de 12 ans. De
plus, il est apparu que les sujets dont le phénotype MHO s’est révélé instable, avec dévelop-
pement d’un syndrome métabolique, avaient plus de risque de maladie cardiovasculaire
que ceux chez qui le phénotype MHO étaitt resté stable (OR=1,60 95 % CI 1,14-2,25). En
somme, l’absence de développement de syndrome métabolique s’est accompagnée de
l’absence d’augmentation de risque cardiovasculaire (2).
Des données récentes tirées d’une étude de population conduite au Royaume-Uni
pendant plus de 20 ans permettent de soulever le concept de la « stabilité » du phénotype
MHO (21). La question essentielle pourrait être celle du dépistage de cette forme de MHO
dite « stable ». Certains éléments prédictifs semblent être le sexe féminin ainsi que le jeune
âge et un poids initial plus faible lors du dépistage (22). Dans le domaine des associations
potentielles entre obésités et syndromes dépressifs, les données provenant de la cohorte
GAZEL ont montré que les personnes obèses de profil MHO avaient moins de risque de
symptômes de dépression à l’entrée dans l’étude que les personnes de profil MUHO. Ce
risque était cependant atténué avec le temps sur une période de suivi de 26 ans (23).
Ces résultats impliquent que l’obésité métaboliquement saine n’est pas un phénotype
stable et, en corollaire, représente une opportunité de prévention primaire de maladies
cardiovasculaires. La majorité des individus MHO semblent devenir MUHO au cours du
temps (24). A ce titre, l’étude de Mongraw-Chaffin (2) montre que le risque le plus élevé
apparait en présence d’un ou plusieurs composants du syndrome métabolique, d’où l’impor-
tance d’une prise en charge précoce de l’obésité, même en cas de phénotype MHO. Dans
une méta-analyse portant sur la définition de la « santé métabolique », des chercheurs ont
montré que les individus en surpoids, mais métaboliquement sains, avaient une plus forte
incidence de diabète que ceux de poids normal sans troubles métaboliques, mais un risque
moindre que les personnes MHO. D’autre part, les auteurs considèrent que les définitions
employées afin de déterminer le risque métabolique ont une sensibilité élevée mais une
spécificité faible chez les individus obèses ce qui limite la pertinence de l’utilisation de ces
définitions dans la prédiction du diabète (25).
CONCLUSION
La stabilité du phénotype MHO au cours de la vie est remise en question par certains
auteurs et la majorité des individus MHO semblent développer un profil MUHO. Cela dit,
certains individus conservent ce profil protecteur pendant des années et le mécanisme
physiologique protecteur sous-jacent reste mal compris (22). Au-delà du débat qui agite la
communauté scientifique sur ce sujet, il n’en reste pas moins que l’obésité reste un facteur
de risque majeur de nombreuses complications (articulaires, respiratoires, cancers
notamment).
1
épartement de Nutrition, Faculté des Sciences
D
Agronomiques et Alimentaires,
Université Saint Esprit de Kaslik, Jounieh, Liban
2
ervice de Nutrition, Hôpital européen Georges Pompidou,
S
CSO IdF Sud, Paris
3
Université Paris Descartes, Paris
Adresse pour la correspondance : Service de Nutrition (Centre Spécialisé Obésité Idf Sud) - Hôpital
Européen Georges Pompidou, 20 Rue Leblanc, 75015 Paris
Email : sebastien.czernichow@aphp.fr
ABSTRACT
Some obese individuals do not show any metabolic abnormalities and are described as
having a metabolically healthy obesity or an MHO phenotype for ‘metabolically healthy
obesity’. However there is still no clear consensus on the definition of this phenotype. Four
important variables are frequently taken into consideration in the classification of the MHO
profile: blood pressure, glycaemia, HDL-cholesterol and triglycerides. There is a conceptual
conflict on the stability or the transient nature of this phenotype. Certain individuals with the
MHO phenotype do not remain protected from cardiovascular diseases and premature death
that usually occur in the obese population so the concept of “healthy obesity” is still debatable
and remains, yet, to be scientifically studied. Prospective studies seem to show that indivi
duals with the MHO phenotype have higher risks of developing metabolic abnormalities on
the long run compared to metabolically healthy normal weight counterparts. In any case,
patient care of all obese individuals irrespective of their metabolic risk is important in order
to prevent complications that are caused by obesity such as respiratory conditions, arthritis,
cancer and depression.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
NOTES
sans précédent dans l’histoire moderne de la médecine. Ce recul a été lié aux publications
de deux essais randomisés américains publiés à grand renfort de publicité négative sur les
résultats. Ce sont les deux essais randomisés de la Women Health Initiative, l’un randomisé
entre le traitement actif par estrogènes conjugués équins et acétate de médroxyprogestérone
et placebo, l’autre chez les femmes hystérectomisées, entre estrogènes conjugués et placebo.
Cette population incluse était en moyenne beaucoup plus âgée que la population susceptible
de bénéficier d’un THM et a montré un « indice global de morbidité » en défaveur du
THM. Des publications ultérieures ont permis d’affiner ces résultats montrant que,
finalement, dans la population candidate à un THM, 10 ans suivant la ménopause, la
mortalité était réduite dans le groupe traité, ce qu’ont confirmé deux métaanalyses d’essais
randomisés. De plus, dans l’essai estrogènes seuls, le nombre de cancers du sein était
diminué. Des études observationnelles, notamment françaises et anglaises, ont également
montré que thromboses veineuses et accidents vasculaires cérébraux étaient évités avec des
traitements différents (estradiol extra-digestif et progestérone ou dérivés proches). Enfin les
mêmes cohortes françaises ont permis de montrer que la progestérone micronisée ou la
dydrogestérone était associée à un risque plus faible de cancer du sein que les progestatifs
de synthèse. D’autres données montrent aussi que les femmes atteintes d’insuffisance
ovarienne prématurée doivent être traitées sous peine de voir leur risque d’accidents
cardio-vasculaires augmenter. De tous ces résultats il résulte que les femmes
symptomatiques proches de la ménopause devraient pouvoir bénéficier des traitements « à
la française » avec un bénéfice possible en mortalité (non démontré avec les traitements
français), mais certain en qualité de vie et en prévention de l’ostéoporose. Actuellement
seules 10 % des femmes françaises sont traitées (!) et seulement 5 % reçoivent des
estrogènes topiques alors que plus de la moitié en auraient besoin ! Ce domaine médical
n’a pas su raison garder !
INTRODUCTION
L’utilisation du traitement hormonal de la ménopause (THM) a été profondément
affectée par les publications américaines dont la première date de l’été 2002. Moins de
10 % des femmes ménopausées sont traitées en France malgré une demande beaucoup plus
importante et des indications potentielles non prises en charge chez des femmes très
symptomatiques. La plupart des Agences du Médicament [FDA, EMEA, HAS, (1, 2)] ont
édité des recommandations stipulant que le THM devrait être administré aux doses
minimales pendant une durée la plus brève possible en fonction des symptômes chez les
Tableau 1. - Évènements dans l’essai WHI CHT pendant le traitement (d’après Manson et al. 2013)
exprimés en différences du nombre d’évènements par 10 000 années-femmes.
CEE+MPA CEE
total 50-59 ans total 50-59 ans
CHD 6 5 -3 -11
CS 9 6 -7 -5
AVC 9 5 11 -1
EP 9 6 4 3
TV 12 7
Cancer colorectal -6 -1 2 3
Cancer Endométrial -1 0 NA NA
Fracture de hanche -6 -3 -6 3
Mortalité toutes causes -1 -10 3 -11
CHD : coronaropathies ; CS : cancer du sein ; EP : embolie pulmonaire ; TV : thrombose veineuse.
En fait, ces effets secondaires n’étaient plus significatifs après ajustement sur les facteurs
de risque, à l’exception du risque de VTE qui était le seul significatif (6). Dans l’essai ET,
il y avait plus d’AVC et de VTE mais pas de CS.
Cependant, des publications ultérieures, très nombreuses, de la WHI ont ré-analysé ces
résultats en fonction des catégories d’âge et du temps écoulé depuis la ménopause.
- L
es publications récentes de la WHI montrent une baisse de la mortalité globale
chez les femmes 50-59 ans (8). De plus, exprimé en termes de bénéfice-risque, - 1,45
(-6,6 to +4,2) évènements / 1000 femmes sont survenus pendant 5 ans de traitement
dans l’essai ET et +3,9 (0,15–8,0) évènements / 1000 / 5 ans dans l’essai CHT (9).
Moins de cancers du sein dans l’essai ET. Dans l’essai CHT, le hazard ratio (HR) pour
le CS était de 1,24 (1,01-1,53), augmentant avec la durée alors que dans l’essai ET le
HR était de 0,79 (0,61-1,02) sans effet lié à la durée (8).
- L
es évènements c-v n’étaient significativement augmentés que pour les femmes de
plus de 70 ans. Les évènements c-v étaient observés uniquement chez les femmes en
cours d’utilisation, plus fréquents la première année comme les VTE liés aux effets
pro-coagulants du THM à l’américaine. Les femmes ayant des facteurs de risque c-v
étaient plus à risque (10).
- L
e risque de CS était augmenté après au moins 7 ans d’utilisation, augmentant avec
la durée et diminuant progressivement à l’arrêt (essai CHT). Ces résultats sont inter-
prétés comme un effet promoteur sur des lésions préexistantes (11). Il est connu depuis
longtemps que ce sont les cancers hormonodépendants ayant des récepteurs à l’estra-
diol (RE) positifs et les lobulaires qui sont surtout induits par le traitement. Selon des
données plus modernes, ce sont les cancers de type luminal A, riches en RE, et un peu
moins les luminaux B, et moins encore les CS HER2+ et les triples-négatifs, qui sont
associés au traitement hormonal, comme l’ont montré deux études récentes (12,13).
Seulement les femmes (30 %) qui avaient utilisé auparavant un THM au moins 2 ans
ont eu un sur-risque de cancer du sein avec une utilisation d’au moins 3/5 ans, soit
5/7 ans au total (14). Le risque de CS était augmenté chez les femmes ayant
En ce qui concerne le cancer de l’endomètre, plusieurs études ont montré que le traite-
ment séquentiel (estrogènes jours 1-25 ou continu + progestatif 12/14 jours/mois) était
associé à un risque plus élevé que le traitement combiné continu. Ainsi dans la WHI, il n’y
a pas eu d’augmentation du risque de cancer de l’endomètre malgré la prévalence élevée de
l’obésité. Il a d’ailleurs été montré qu’un des bénéfices du THM chez les femmes obèses/ou
en surcharge pondérale était de diminuer le risque de cancer de l’endomètre et ceci du fait
de l’administration de progestatifs dans le THM (34). Les progestatifs de synthèse sont
équivalents en terme de protection endométriale (35). Cependant, un risque plus impor-
tant de cancer endométrial a été rapporté dans la cohorte E3N avec la progestérone (35,
36). Nous avons publié récemment une revue sur ce thème où le lecteur pourra trouver
plus de détails (37). L’une des explications possibles est un problème de compliance car la
progestérone est commercialisée pour l’instant seule, et est associée à une voie transder-
mique ou orale, alors qu’il existe plusieurs association progestatifs + estradiol oral ou en
patches. Notre expérience clinique est, effectivement, que certaines femmes oublient
volontiers le comprimé… Ce qui va dans ce sens est le fait qu’il existe deux études rando-
misées ayant utilisé la progestérone dans le THM et n’ayant pas vu plus d’hyperplasies avec
la progestérone que le MPA dans l’étude PEPI (38) et que l’acétate de chlormadinone dans
une étude française (39). Il est donc très important d’informer les femmes traitées de
l’importance et du rôle joué par la progestérone et les progestatifs (40). Il est aussi possible
que la posologie habituellement prescrite en continu de 100 mg soit insuffisante chez
certaines femmes notamment obèses. Dans des études relativement anciennes, c’était la
posologie de 200 mg qui était recommandée mais en séquentiel (41) et de 300 mg en traite-
ment séquentiel de 10 jours (durée trop courte !) en combinaison avec 1,25 mg de CEE une
dose double de celle utilisée maintenant (42). Il est donc difficile de conclure sur une
posologie insuffisante, mais on peut conseiller d’augmenter celle-ci chez les femmes obèses.
On peut aussi proposer une surveillance endométriale chez les femmes traitées par E2 +
progestérone. Enfin, l’effet sur le risque endométrial est rémanent de manière durable après
l’arrêt du traitement à l’inverse de ce qui se passe avec le cancer du sein.
Cancer du sein. Plusieurs études françaises et d’autres pays (tableau 2) ont montré un
plus faible risque avec la progestérone et la dydrogesterone que les progestatifs de synthèse
de CS au moins jusqu’à > 5 ans de traitement (31, 43–46). L’effet cesse à l’arrêt du traite-
ment comme l’a montré l’étude E3N et plus rapidement qu’avec les progestatifs de synthèse
sans doute car beaucoup plus faible. Cet aspect est discuté en détail dans la publication
récente (47).
Lyytinen 221 551 femmes finlandaises E2 transdermique vs. oral : pas de différence
et al ménopausées E2 + NET: augmente avec la durée
(82) THM à partir de registres de - 3 -<5ans, RR 1,34 (95% CI : 1,17–1,51)
pharmacie et de cancers - 5–10 ans, RR 2,03 (95% CI : 1,88–2,18)
6 211 cas de CS - >10 ans, RR 3,15 (95% CI : 2,44–4,00)
E2 + MPA: effet de la durée
- 3–10 ans, RR 1,27 (95% CI : 1,09–1,48)
- 5–10 years, RR 1,64 (95% CI : 1,49–1,79)
- > 10 ans, RR 1,90 (95% CI : 1,07–3,07)
E2 + DYD: effet de la durée
- 3–5 ans, RR 1,22 (95% CI : 0,83–1,72)
- 5 ou plus, RR 1,13 (95% CI : 0,49–2,22)
- > 10 ans, pas de cas et peu de contrôles
dans le groupe NET : Risque avec le
traitement continu > séquentiel
NET, noréthisterone; MPA, medroxyprogestérone acetate ; DYD, dydrogestérone ; CEE, estrogènes conjugués
équins ; E2,estradiol ; OR, odd ratio ; RR, risque relatif.
nous semble-t-il, à discuter avec les patientes, certaines pensant avoir un risque élevé à tort,
ou l’inverse. Connaitre les facteurs de risque et leur amplitude peut suffire pour évaluer
correctement le niveau du risque, faible, modéré ou élevé (tableau 3). L’importance de la
densité mammaire en particulier est à prendre en compte. Les femmes qui ont une densité
mammaire élevée à la ménopause, alors que le devenir normal est l’involution fibro-adipeuse
du sein, sont plus à risque de cancer. Il est également possible que cette forte densité
contribue à retarder le diagnostic par rapport à des seins moins denses, plus facilement
analysables en mammographie (48, 49). Les femmes ayant eu une biopsie montrant des
lésions prolifératives, surtout avec atypies, sont plus à risque de CS (50). Comme nous
l’avons déjà signalé, les mastodynies constituent un facteur de risque. Elles surviennent
souvent sur des seins denses et doivent donc être prises en compte pour adapter le traite-
ment, voire arrêter les estrogènes. Il n’est pas rare que ce type de seins expose à une intolé-
rance aux estrogènes faisant choisir un autre type de traitement. De manière intéressante,
dans la WHI ET, les femmes ayant une histoire familiale de cancer du sein ou un antécé-
dent de mastopathie n’ont pas bénéficié de la baisse du risque de CS (51). Plusieurs études
de modélisation à partir de cohortes de femmes ménopausées ont montré que le contrôle
des facteurs de risque de cancer liés au comportement et donc modifiables (IMC, alcool,
exercice physique, nutrition, tabac) pouvaient contribuer à diminuer le risque de CS (52,
53). Les femmes ayant un IMC élevé ne sont pas plus à risque si elles prennent un THM
que leur risque de base déjà élevé (54). Une étude très récente ayant porté sur la cohorte «
Diet, Cancer and Health » au Danemark, a tenté de calculer les interactions des différents
facteurs de risque pour les différents cancers. Elle confirme que chez les femmes obèses, le
risque n’est pas majoré par le THM (55). En revanche elle montre un effet additif de l’alcool
et du THM tant sur le cancer du sein que le cancer de l’endomètre (55).
Tableau 3. - Facteurs de risque du cancer du sein
AUTRES CANCERS
Le cancer de l’ovaire est rapporté dans des études observationnelles et une métaanalyse
comme augmenté par le THM (56). Le niveau de risque est très variable d’une étude à
l’autre et le facteur principal d’ajustement, la prise de contraception orale, manque parfois
(57). Dans la plupart des études observationnelles, ce sont les estrogènes plutôt que le
traitement combiné qui est le facteur de risque, mais ceci n’est pas retrouvé dans la métaa-
nalyse ainsi que dans une minorité d’études (58). Certaines études trouvent un effet de la
durée mais pas toutes (56, 58). Cet effet disparait à l’arrêt du traitement, mais toutes ces
observations suggérent un possible biais de sélection ou de suivi (58). De manière nouvelle
et intéressante, trois essais randomisés, comportant il est vrai un nombre relativement
faible de femmes, ont montré que le THM chez des femmes ayant été traitées pour un
cancer de l’ovaire de haut grade était associé à une meilleure survie globale et sans récidive
(59–61).
LA PLACE DE LA TIBOLONE
La tibolone est un progestatif du groupe des norstéroïdes ayant des métabolites avec des
propriétés androgéniques et estrogéniques. Elle est efficace (un peu plus faiblement ?) sur les
signes climatériques et la prévention des fractures (63, 64). Elle est aussi associée à un
risque d’AVC dans cette population de femmes âgées et ostéoporotiques (64). Chez des
femmes atteintes de cancer du sein, un essai randomisé a montré plus de récidives chez les
femmes traitées par tibolone (65). On considère donc qu’elle expose à un risque de CS
analogue à celui du THM. Elle n’est pas associée à des mastodynies, et sa potentialité
androgénique peut aider les femmes ne retrouvant pas une libido sous THM classique. C’est
donc un traitement de seconde ligne pour des femmes relativement jeunes sans facteurs de
risque c-v et ayant une intolérance mammaire ou des saignements sous THM classique.
EN PRATIQUE
Lors de la première consultation, il faut évaluer les risques familiaux et individuels c-v,
d’ostéoporose, de cancers et de VTE, tout comme l’importance des troubles climatériques,
génito-urinaires et sexuels. Un risque c-v élevé ou de CS peut contrindiquer le THM
(tableaux 4 et 5). C’est l’occasion de délivrer une information diététique, sur les prises
quotidiennes de calcium, le bénéfice de l’exercice physique, de l’arrêt du tabac, de la
consommation modérée d’alcool, etc… ainsi que sur le suivi gynécologique et mammaire.
Un bilan métabolique est conseillé en raison des modifications périménopausiques. La
mesure de la densité minérale osseuse est recommandée en France seulement en fonction
des facteurs de risque. Aux USA, la recommandation est de la pratiquer après 65 ans en
dehors de facteurs de risque particuliers (66). Le score de FRAX développé par l’OMS et
adapté à de nombreux pays permet de prédire le risque de fracture à 10 ans et le niveau
d’intervention thérapeutique (67). Il existe aussi des scores de prédiction d‘accidents c-v
(68–70). Seul le “SCORE” est validé en Europe. En cas de risque élevé, une exploration
c-v par des moyens à disposition et variant avec les équipes et un avis spécialisé sont
conseillés avant d’introduire le THM (71). Le consensus actuel, à partir des résultats de la
WHI et les données précliniques, est que le THM prescrit avant l’apparition de plaques
athéromateuses est bien toléré voire protecteur, mais en présence d’athérosclérose les
estrogènes sont proapoptotiques sur les plaques instables favorisant un accident c-v.
Concernant le risque de CS, il peut être aussi stratifié comme nous l’avons vu précédem-
ment (tableau 3). L’information complète doit être délivrée à la patiente. Notre Société de
Ménopause, le GEMVI, met à disposition une fiche d’information téléchargeable sur le site
en accès ouvert (gemvi.org).
Cas particuliers
- S
i la patiente souhaite le traitement, nous privilégions l’E2 par voie transdermique (en
patchs de 37,5 µg/j) ou percutanée (en gel : 0,75 mg-1 mg/j) et la progestérone micronisée
100/200 mg/j) ou la dydrogesterone (10 mg/j) (36, 37, 47, 71). L’adaptation de la posologie
se fera lors de la consultation ultérieure avec surveillance annuelle et réévaluation de la
nécessité du traitement et des doses. La durée des signes climatériques est variable mais
parfois très prolongée.
- E
n cas d’intolérance aux estrogènes (mastodynies, kystes mammaires, adénomyose), la
progestérone, les progestatifs ou la tibolone peuvent être efficaces sur les bouffées de
chaleur. De plus, la progestérone a un effet favorable sur les troubles du sommeil et
l’anxiété (72, 73).
- P
our les patientes ne souhaitant pas de THM ou ayant des contrindications, des
alternatives existent. Ceci concerne en particulier les femmes ayant eu un CS.
o Les plus étudiées sont les « Selective Serotonin Receptor Inhibitors » (SSRI) et les
« Selective Noradrenaline Receptor Inhibitors » (Table 5). Ils sont moins efficaces sur
les bouffées de chaleur que l’estradiol mais supérieurs au placebo. Venlafaxine, Fluoxe-
tine, Paroxetine, Citalopram ou Gabapentin, un ligand du récepteur GABA, ont été
évalués dans des essais randomisés (3). Leur efficacité est relativement lente et prend
parfois 2 à 3 mois pour atteindre son efficacité optimale, et ils ne sont pas dénués
d’effets secondaires.
o Les phytoestrogènes sont commercialisés en vente libre. Leur efficacité est souvent
médiocre. Les contrindications sont les mêmes que pour le THM, notamment en cas
de cancers du sein.
o Des produits à base de plante, d’homéopathie (Serelys®, Actheane® et autres…) sont
disponibles sans contrindication après avoir vérifié qu’il ne contiennent pas de
phytoestrogènes.
o Des traitements non médicamenteux ont été évalués, parfois dans des essais rando-
misés, et peuvent être tentés comme le yoga, l’acupuncture, la relaxation, la médita-
tion, en particulier chez les femmes ayant eu un cancer du sein (74,75). L’injection du
ganglion stellaire semble très efficace mais avec peu de recul (76).
Enfin, il ne faut pas oublier que, si on contre indique ou interrompt le THM, les
troubles génito-urinaires doivent être traitées par des estrogènes vaginaux. Il n’existe
aucun risque de cancer du sein (77) associé à ces traitements et l’administration de proges-
térone n’est pas nécessaire, donc sans contrindications, sauf peut-être chez les femmes sous
inhibiteur de l’aromatase. Il existe deux nouveaux traitements des troubles vulvo-vaginaux
: le laser mais dont l’efficacité et la tolérance à long terme restent à évaluer (78) et l’admi-
nistration intra-vaginale de DHEA à 0.50 % (6.5 mg de DHEA ; PRASTERONE®), en
cours de développement.
Une situation particulière que nous n’aborderons pas ici est celle des femmes ayant
une insuffisance ovarienne prématurée : les risques c-v et ostéoporotiques importants
dans cette population font indiquer un THM jusqu’à l’âge normal de la ménopause même
en cas de risque mammaire élevé. C’est notamment le cas des femmes porteuses de
mutations de BRCA ayant subi une ovariectomie prophylactique que l’on traite sous
surveillance mammaire jusqu’à l’âge d’environ 50 ans.
CONCLUSION
Le THM est le traitement le plus efficace pour les troubles climactériques et contribue à
la prévention de l’ostéoporose postménopausique. Le choix des produits administrés peut
conditionner la présence ou l’absence de complications thromboemboliques et mammaires.
Il est indispensable d’évaluer les risques individuels avant sa prescription. Des alternatives
au THM existent mais d’efficacité moindre. La consultation de ménopause est une
occasion précieuse pour délivrer une information et une éducation de prévention des
risques à cette période de la vie afin d’améliorer les comportements pour diminuer les
risques c-v et de cancers.
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
MENOPAUSE HORMONE THERAPY : WHERE DO WE STAND IN 2018 ?
by Anne GOMPEL (Paris - France)
ABSTRACT
The use of menopause hormone therapy (MHT) has been dramatically challenged these
last years. This alteration was due to the publication of two randomized trials from the
Women Health Initiative. The initial publication of the WHI, in the summer of 2002,
reported more severe events in women treated than in the control group. Those women were
actually older than the usual population candidate to MHT to treat their climacteric
symptoms. Subsequent publications from the WHI reported however that cardio-vascular
events were not increased in women closer to menopause, in the ten years following it.
Furthermore two metaanalyses as well as the WHI reported that mortality was lower in
women treated than in the control group at the age of 50-60 years or ten years after
menopause. In the estrogen only trial, the number of breast cancers was decreased. Obser-
vational studies from France and UK showed that by using transdermal estradiol the risk of
thromboembolic events and stroke could be alleviated. Furthermore, micronized progeste-
rone and dydrogesterone were associated with a lower risk of breast cancer than with
synthetic progestin. Other studies strongly argue for treating women with premature ovarian
failure in order to prevent c-v risk. Given that, only 10% of postmenopausal women are
treated in France. In addition, only 5% of postmenopausal received topical estrogens (not
associated with any risk) despite the fact that more than a half should beneficiate from it. The
drastic decrease does not appear to be scientifically justified.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
Des recommandations largement diffusées, qui reflètent les opinions des auteurs mais ne
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
petites séries de cas cliniques recueillies dans des centres parfois géographiquement très
éloignés au sein desquels les pratiques diffèrent et ne sont pas supportées par les preuves
(8, 10, 11). Des recommandations internationales péremptoires sont néanmoins régulière-
ment publiées (1, 3). Dans ce texte, nous rapportons uniquement l’analyse du médecin qui
prend en charge la période per- et postopératoire immédiate, sans interférer avec des considéra-
tions spécifiquement endocrinologiques ou du ressort des spécialistes de l’hypertension artérielle.
La prise en charge des cancers métastasés et les indications des inhibiteurs de la tyrosine
hydroxylase sont exclues de cette analyse.
tenant compte de données complémentaires de la littérature (1, 3, 4, 13). Dans une étude
récente, un saignement chirurgical accru a même été associé à l’absence de préparation par
la phénoxybenzamine sans analyse critique de l’information rapportée (13). L’efficacité
supérieure des α-bloqueurs est alléguée dans de nombreuses séries (1-3, 7). Vera et al.
considèrent qu’il y a une perte de chance pour les patients qui sont traités moins de 15
jours sans fournir la moindre preuve pour supporter cette opinion d’auteurs (3).
d’une HTA modérée (PAS ≤ 160 mmg) et recevant après tirage au sort soit une association
sartan + diurétique soit un placebo (14). Aucune différence en termes de morbidité et de
mortalité n’a été relevée au cours de la période d’observation de cinq ans, entre les deux
groupes (14). Cette étude suggère qu’on doit donc pouvoir s’abstenir de traiter une HTA
modérée durant les trois semaines qui précèdent la surrénalectomie pour phéochromocy-
tome si on a pu le faire durant cinq ans sur une telle population de patients (4, 14).
c) La grossesse.
En l’absence de grandes séries homogènes, plus de 350 cas cliniques publiés montrent
que la normalisation de la PA, l’optimisation hémodynamique sensée optimiser la perfu-
sion utero placentaire, et le choix adéquat de la date de l’accouchement, par césarienne en
dépit de cas rapportés d’accouchement par voie basse qui ont eu une issue favorable, ont
été associés à une amélioration du pronostic maternel et fœtal (10). Toutes les drogues
hypotensives ont été utilisées dans la littérature, pour traiter les HTA dans ce contexte de
phéochromocytome diagnostiqué au cours de la grossesse, avec un bon résultat, incluant
la phénoxybenzamine, la prazocine, la doxazocine, les inhibiteurs des canaux calciques, le
sulfate de magnésium et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (10). Les β-bloqueurs
peuvent être nécessaires pour contrôler une arythmie ou une tachycardie (10). Les divers
auteurs rapportent que les β−bloqueurs sélectifs comme le métoprolol ou l’aténolol doivent
être préférés au propanolol qui a été rendu responsable chez le fœtus de retards de matura-
tion, de bradycardies et d’hypoglycémies (10). Il semble que l’attention portée aux patientes
soit plus importante que la catégorie de drogue hypotensive utilisée (10).
d) Les patients hospitalisés en unités de soins intensifs.
Des défaillances circulatoires aiguës ou chroniques peuvent révéler un phéochromocy-
tome et conduire des patients en unité de soins intensifs (11, 12, 15, 16). Sur 140 phéochro-
mocytomes colligés dans un centre unique par Giavarini et al., 15 patients ont présenté une
insuffisance circulatoire aiguë inaugurale, incluant un œdème aigu du poumon chez 12
patients, et/ou un choc cardiogénique chez 10 patients, et/ou une balonnisation apicale ou
basale du ventricule gauche chez 6 patients et/ou le recourt à un support hémodynamique
chez 8 patients (11). La surrénalectomie a constamment été réalisée après la normalisation
de la fraction d’éjection du ventricule gauche, s’élevant sous traitement de [médiane (IQ)]
30 % (23–33 %) à 71 % (50–72 %). Aucun patient n’est décédé (11). En revanche, dans la
série de 25 patients rapportée par Scholten et al., dix patients ont été opérés en urgence et
15 patients après normalisation de l’état circulatoire à la discrétion exclusive des médecins
responsables (15). L’hospitalisation a été significativement plus longue et le taux des compli-
cations significativement plus élevé chez les patients opérés en urgence (15). Un mort a été
observé dans le groupe des patients opérés en urgence (15). En l’absence d’études contrô-
lées, il parait raisonnable de différer la chirurgie jusqu’à la normalisation de l’état circula-
toire chez les patients hospitalisés en unités de soins intensifs lorsque c’est possible (11, 15).
Tableau 1. - Drogues vasoactives et anti arythmiques à effet immédiat dont l’efficacité a été
rapportée dans le traitement peropératoire des accès d’hypertension artérielle, des troubles du
rythme cardiaque, et des chutes de la pression artérielles qui suivent la surrénalectomie.
Hypertension artérielle
- Anesthésiques volatiles
• Desflurane
Kinney et al. J Cardiothorac Vasc Anesth 2002
• Isoflurane
- Phentolamine Mc Millian et al. J Health Syst Pharm 2011
- Nitroprussiate de Sodium Groeben et al. Br J Anaesth 2017
- Trinitrine Hamilton et al. Can J Anaesth 1997
- Nicardipine Joris et al. Anesth Analg 1992
- Uradipyl Gosse et al. J hum Hypertens 2005
- Sulfate de Magnesium James et al. Br J Anaesth 1989
Tachycardies et dysryhmies
- Lidocaine
Desmont et al. Br J Anaest 2005
- Bêtabloqueurs
A. L’hyperglycémie.
Le phéochromocytome est parfois associé à un diabète qu’il faut rechercher et traiter en
préopératoire (17). La sécrétion prédominante d’adrénaline semble un facteur favorisant
(17).
B. Les iléus.
Ainsi que mentionné plus haut, des séries de la littérature rapportent que des iléus
conséquences d’un effet direct des catécholamines (a) sur les récepteurs-α du tube digestif
ou (b) sur la vasoconstriction splanchnique peuvent entrainer des complications mena
çantes (18). Leur diagnostic doit entrainer la mise en route d’un traitement symptoma-
tique local (18).
VII. D
ES DROGUES HYPOTENSIVES DOIVENT-ELLES ÊTRE
PRIVILÉGIÉES ?
Déciderait-on d’administrer un traitement hypotenseur préopératoire soit par principe
en accord avec les recommandations des sociétés savantes, soit dans le cadre d’une indica-
tion indiscutable, les opinions d’experts avec les limitations déjà évoquées dans ce texte
allèguent une plus grande efficacité des agents α-bloquants en termes de la normalisation
de la PA préopératoire et de la diminution de la fréquence et du degré des pics d’HTA
peropératoires (1, 3). A notre connaissance, aucune étude scientifique ne supporte cette
opinion (2, 4). La phénoxybenzamine, α-bloqueur de longue durée d’action, semble être
associée à des chutes de la PA plus fréquentes et plus prononcées après la surrénalectomie
que les autres agents hypotenseurs (2). Cet agent n’est plus disponible en France (4). En
fait, tous les agents hypotenseurs ont été administrés avant la surrénalectomie pour
phéochromocytome incluant les α-bloqueurs de longue et courte durée d’action, les
inhibiteurs des canaux calciques, et même les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les
sartans (2-5, 7, 8, 19). Un examen attentif des résultats des études montre que, quelle que
soit la drogue utilisée, la PA préopératoire n’est jamais constamment normalisée chez tous
les patients, des pics d’HTA de niveaux et de fréquence variée sont enregistrés, des chutes
de la PA de fréquence et de degré variable surviennent après la surrénalectomie, des
troubles du rythme cardiaque doivent être traités, et……. toutes les études des trente
dernières années rapportent une mortalité proche de zéro dans la chirurgie réglée quelle
que soit l’hypotenseur prescrit et même si aucune drogue n’est administrée (4). L’absence
d’homogénéité des groupes devrait interdire leur comparaison (1-9). La titration soigneuse
de l’efficacité de la drogue choisie est plus importante que le type de drogues administrée
(4). Il faut néanmoins noter que des chutes préoccupantes de la PA nécessitant le recours
à des catécholamines ont été rapportées en chirurgie générale après l’induction anesthé-
sique chez des patients recevant des inhibiteurs de l’enzyme de conversion et des sartans
(24). En l’absence d’études conduites chez les patients porteurs d’un phéochromocytome il
est prudent de limiter l’administration de ces agents aux patients pour lesquels aucune
autre alternative est possible (24). On se rappellera, qu’en l’absence d’un traitement
hypotenseur efficace, un β-bloqueur a induit une incompétence myocardique au décours
d’une poussée d’HTA chez des patients porteurs d’un phéochromocytome (4, 16).
IX. CONCLUSIONS
• L
’essentiel des traitements recommandés pour préparer un patient à être opéré d’une
surrénalectomie pour phéochromocytome ne repose pas sur des preuves.
• L
a surrénalectomie va guérir définitivement les patients porteurs d’un phéochromo-
cytome donc confier les patients au chirurgien dans les plus brefs délais est une
priorité.
•
Repousser le traitement chirurgical pour optimiser une PA préopératoire non
menaçante ou traiter une hypovolémie réfutée par toutes les études n’est pas justifié.
• E
n dehors de situations menaçantes à court terme et parfaitement définies, incluant
les HTA menaçantes par leurs niveaux de PA et/ou les défaillances viscérales
associées, et la grossesse, le bénéfice de l’administration préopératoire systématique
de drogues hypotensives est ni justifié ni démontré.
• L
a notion d’hypovolémie associée au phéochromocytome est réfutée par le petit
nombre d’études disponibles.
• L
es progrès de l’imagerie préopératoire, de la technique chirurgicale et la disponibilité
de drogues vasoactives et anti arythmiques efficaces rendent probablement plus
compte de l’amélioration du pronostic de la maladie que l’administration préopéra-
toire généralisée de drogues hypotensives. Des études supplémentaires sont néces-
saires pour le prouver.
by Claude LENTSCHENER
(Paris - France)
ABSTRACT
Widespread guidelines, only reflecting authors’ opinions and which are not supported by
scientific proofs, attribute the good results of adrenalectomies for pheochromocytoma to the
administration of hypotensive drugs eight to 15 days prior to surgery and to the treatment of
an alleged hypovolemia refuted by the few available data. However, improvements in
imaging allowing adequate tumor localization, mini invasive surgical approaches, hemody-
namic monitoring using an arterial catheter and availability of potent, on/off vasoactive and
antiarrhythmic agents are also likely to account for the good results of surgery. Prior to
surgery specific care is mandatory for (a) life-threatening arterial hypertension, related organ
dysfunction and dysrhythmia, (b) diabetes mellitus, (c) pregnancies. For all other patients,
except if it has been decided to comply with local pressures or habits, available data do not
warrant the administration of any prophylactic measures.
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Chez les garçons nés avec une forme classique d’hyperplasie congénitale des surrénales
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
Mots-clés : Bloc en 21-hydroxylase, hyperplasie congénitale des surrénales, inclusions surrénaliennes intra-
testiculaires, TART, CYP21A2, azoospermie, infertilité, insuffisance surrénale, Hypogonadisme hypogonadotrope.
I. INTRODUCTION
L’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) par déficit classique en 21-hydroxylase
(DC-21OH) est une maladie rare caractérisée par une altération enzymatique qui empêche
la synthèse normale du cortisol et de l’aldostérone par la corticosurrénale et provoque
ainsi une insuffisance surrénale primitive (1). Ce bloc enzymatique est responsable aussi
de l’accumulation de précurseurs stéroïdiens qui vont induire une surproduction pré- et
post-natale d’androgènes. Chez les foetus de sexe féminin l’excès de testostérone va induire
une masculinisation des organes génitaux externes et donc une anomalie du développe-
ment sexuel (DSD). Les DSD et l’impact majeur de la maladie chez les filles, adolescentes
et femmes nées avec un HCS/DC-21OH ont fait l’objet de plusieurs publications et revues
(1-3) et ne seront pas abordées ici. Un des points commun chez les femmes et les hommes
atteints de HCS/DC-21OH est l’aromatisation en estrogènes des androgènes produits en
excès par la surrénale. Cette conversion va entraîner une exposition excessive aux estro-
gènes qui va accélérer la maturation osseuse et aboutir, en l’absence de traitement efficace,
à une petite taille par fusion précoce des cartilages de conjugaison (4).
Chez les hommes nés avec HCS/DC-21OH l’impact de la maladie sur la fertilité a été
moins étudié que chez la femme (1, 5).
L’objectif de cette brève revue est d’analyser, sur la base de la littérature existante, les
conséquences, chez les hommes, de l’HCS/DC-21OH sur la fertilité, le fonctionnement de
l’axe gonadotrope et d’en discuter l’impact sur les fonctions testiculaires endocrines et
exocrines. Le but final est d’apporter aux endocrinologues des éléments pratiques permet-
tant d’optimiser la prise en charge chronique de ces patients, depuis la délicate phase de
transition enfance ➞ puberté ➞ âge adulte, puis tout le long de leur existence.
II. PRÉVALENCE
L’HCS/DC-21OH est une maladie rare dont la prévalence a été évaluée entre 1/10 000
à 1/18 000 au niveau international et à 1/15 700 en France, si on se base sur les études de
dépistage néonatal (1, 6). Sa fréquence est similaire dans les deux sexes ce qui est logique
étant donné sa transmission génétique de type autosomique récessive.
VI. H
CS/DC-21OH ET FERTILITÉ CHEZ L’HOMME : ÉVOLUTION DES
CONNAISSANCES
Jusqu’en 2000, la littérature concernant les hommes nés avec HCS/DC-21OHD était
modeste. Elle se limitait souvent à l’évaluation de la taille finale et à l’étude des consé-
quences du traitement par les glucocorticoïdes sur le capital osseux (19, 20). Avant cette
période, seuls quelques cas cliniques isolés ont attiré l’attention sur l’existence de troubles
Figure 3. - Hommes nés avec une forme classique de bloc en 21-hydroxylase. Évaluation hormonale à
l’âge adulte : concentrations circulantes des gonadotrophines hypophysaires (LH et FSH), de la
testostérone et de l’inhibine B.
En bas droite : anomalies testiculaires observées. Les lignes horizontales en pointillé indiquent les
limites inférieures et supérieures de la normale. (adapté d’après la référence 5)
tées essentiellement sous forme de cas cliniques isolés (33-40). Depuis 2000, on a constaté
sur quelques petites séries qu’il s’agissait d’une complication non anecdotique. Plus récem-
ment leur prévalence importante, mais très variable, a été mieux documentée (5).
Les ISIT/TARTS sont, dans l’immense majorité des cas, des tumeurs bénignes. On
pense qu’elles se développent chez les patients avec HCS/DC-21OH à partir de reliquats de
tissu surrénalien intra-testiculaires qui seraient normalement présents chez les enfants (31,
35). Ces reliquats pourraient dériver des cellules provenant de la structure fœtale « primor-
dium adréno-génital » qui auraient suivi la migration testiculaire vers le scrotum (31, 35).
Ils sont le plus souvent bilatéraux et localisés au niveau du rete testis (Fig. 4). Leur taille
est très variable, de quelques millimètres à plusieurs centimètres (Fig. 5 à 7) (5, 31, 33-40).
1) Prévalence
La prévalence réelle des ISIT/TARTS dans la population globale des sujets de sexe
masculin nés avec HCS/DC-21OH n’est pas connue (5). Elle dépend des sous-groupes de
HCS/DC-21OH étudiés (enfants ou adultes, formes sévères ou plus atténuées), des moyens
utilisés pour les dépister (palpation ou imagerie) et des biais de recrutement dans les
centres ayant participé aux différentes études publiées (5, 31, 33-40).
Comme on l’a vu plus haut, les ISIT/TARTS étaient réputées rares avant les années
2000 (36), mais sont devenues fréquentes lorsqu’on les recherche de façon systématique
par imagerie (voir plus loin) (5, 35-40). Elles semblent plus fréquentes chez les patients
présentant des formes sévères, avec perte de sel, que chez les malades ayant une forme
virilisante simple (5, 35-40). Sur la base de cas cliniques (35) on pense aussi que ces
tumeurs seraient plus fréquentes chez les sujets ayant une faible adhérence au traitement
substitutif par les glucocorticoïdes. Cependant, elles peuvent aussi apparaître chez des
patients correctement traités et certaines études indiquent une absence de corrélation
entre adhérence thérapeutique et apparition des ISIT/TARTS (23, 24, 30, 34, 37, 39, 41).
Ce point suggère que d’autres facteurs - non encore identifiés - pourraient intervenir dans
leur apparition et/ou leur croissance.
Le nombre plus important de cas répertoriés à un âge post-pubère suggère que leur
fréquence pourrait être plus grande chez les hommes que chez les garçons, mais en l’absence
d’études systématiques avec moyens similaires de détection, il est difficile de trancher.
Quoi qu’il en soit, le nombre significatif de cas rapportés par diverses équipes pédiatriques
chez les enfants et adolescents (5, 31, 33, 35, 39, 42, 43) montre qu’un dépistage précoce
systématique pendant l’enfance et l’adolescence est très probablement utile.
2) Anatomo-pathologie
Les ISIT/TARTS sont formées d’îlots de cellules stéroïdogènes hypertrophiées dévelop-
pées au sein du testicule normal probablement sous l’effet de la stimulation permanente
par l’ACTH qui pourrait être majorée par l’effet mitogène de l’angiotensine 2. Quand on
ne connait pas le contexte clinique de HCS/DC-21OH, le diagnostic anatomopatholo-
gique d’ISIT/TARTS est difficile. En effet, au plan histologique elles sont très proches - et
souvent confondues avec – des tumeurs testiculaires à cellules de Leydig (leydigomes). Il
faut savoir que les ISIT/TARTS sont bilatérales dans près de 80 % des cas (5, 31, 43, 44)
contrairement aux leydigomes qui dans près de 97 % sont unilatéraux (31, 47). De plus, les
cristalloïdes de Reinke (dépôts de cholestérol visibles au microscope) sont exceptionnelle-
ment présents dans les ISIT/TARTS alors qu’ils intéressent près de 40 % des leydigomes
(31, 44, 45). Les anatomopathologistes expérimentés connaissent ces difficultés diagnos-
tiques et savent actuellement qu’un argument essentiel en faveur d’une ISIT/TARTS
devant une tumeur testiculaire stéroïdogène - a fortiori bilatérale - est le contexte d’ HCS/
DC-21OH.
4) Diagnostic
Au plan clinique, ces tumeurs, sont souvent asymptomatiques du fait de leur petite taille
et leur position centrale, mais elles peuvent être découvertes à la palpation testiculaire qui
doit donc être systématique chez tout enfant, adolescent ou homme né avec une HCS/
DC-21OH (5, 31). Lorsque les ISIT/TARTs sont volumineuses l’examen montre des testi-
cules très fermes, avec des nodules indurés, avec parfois une prise en masse très dure de
l’ensemble des deux testicules (Fig. 6). Leur détection par la palpation est souvent tardive,
synonyme de tumeur déjà développée, avec un impact délétère sur les structures testicu-
laires et donc de pronostic réservé. Pour les dépister à un stade plus précoce, avant l’instal-
lation de lésions testiculaires bilatérales irréversibles, une imagerie testiculaire systéma-
tique est nécessaire. Celle-ci fait appel à l’échographie testiculaire (5, 37, 39, 41) plus
accessoirement à l’IRM des testicules (31, 38, 49). L’échographie montre des aspects
variables mais souvent les lésions sont hypoéchogènes, relativement faciles à distinguer du
testicule normal (Fig. 5). L’IRM testiculaire, plus rarement réalisée, permet aussi de très
bien distinguer et caractériser les ISIT/TARTs par leur aspect en hyposignal T1 (31, 38,
49) (Fig. 7).
(Fig. 2). Dans ce contexte il faut rappeler que des travaux visant à développer la contracep-
tion hormonale masculine ont montré de façon concordante que l'association de testosté-
rone et de progestatifs a un effet synergique sur l'inhibition de la sécrétion des gonadotro-
phines hypophysaires FSH et LH (57). Dans le travail français cité plus haut, les
gonadotrophines hypophysaires ont aussi été étudiées et il a été clairement montré que
plus d'un tiers des hommes HCS/DC-21OH avaient des concentrations de FSH et de LH
abaissées (Fig. 3) (5). Ces données ont renforcé la portée de cas cliniques et de petites
séries préalablement publiées qui avaient déjà rapporté une baisse des gonadotrophines
(23, 31, 58, 59). Il existe donc un tableau d'hypogonadisme hypogonadotrophique (HH)
chez près d'un tiers d'hommes adultes nés avec HCS/DC-21Oh classique. Cette baisse des
gonadotrophines était associée chez certains patients à une diminution du volume testicu-
laire et/ou de la concentration de spermatozoïdes (voir plus loin) (5). De plus, dans certains
cas cliniques publiés, il a clairement été montré que la baisse de l'ACTH, de la progesté-
rone, de la 17-hydroxyprogestérone et de l'androstènedione s'accompagnait d'une augmen-
tation des gonadotrophines et même de l'augmentation de la concentration de spermato-
zoïdes et de l'obtention de grossesses chez les partenaires (5, 54, 55).
C) Infertilité par obstacle sur les voies excrétrices et compression des vaisseaux
testiculaires
Comme cela a été discuté plus haut, les ISIT/TARTS se développent souvent à partir du
hile testiculaire où se trouve le rete testis (Fig. 4) (31). Le rete testis est formé d'un réseau de
canaux où convergent les tubes séminifères. Il se prolonge par l'épididyme qui se termine
par le canal déférent par où sont évacués les spermatozoïdes provenant des testicules.
Lorsque les ISIT/TARTS atteignent un certain volume, elles peuvent comprimer les
canaux du rete testis et former un obstacle diminuant ou empêchant l'évacuation des
spermatozoïdes.
Lorsqu'elles atteignent un volume important, les ISIT/TARTS peuvent de plus
comprimer les veines et artères testiculaires avec pour conséquence une ischémie des
tubes séminifères pouvant aboutir à des nécroses irréversibles ce qui va contribuer au
tableau d'insuffisance testiculaire primitive (voir ci dessous) (5, 31, 36, 60, 61).
Figure 6. - Prise en masse et destruction du parenchyme testiculaire chez un jeune homme de 20 ans
ayant consulté pour douleurs scrotales. Ce patient était suivi depuis la naissance pour un bloc en
21-hydroxylase sévère avec perte de sel. À l’interrogatoire, le patient et sa mère ont indiqué que le
patient n’avait jamais eu d’examen clinique ou échographique des testicules. Devant les douleurs
testiculaires chroniques le patient a demandé une exérèse chirurgicale (photo de droite). Au cours de
cette intervention, une exploration au microscope a été pratiquée à la recherche de spermatozoïdes
en vue d’une congélation pour préserver la fertilité.
VIII. L
A PRÉVENTION ET LA PRISE EN CHARGE DE L'INFERTILITÉ DES
HOMMES AVEC HCS/DC-21OH EST DEFAILLANTE EN FRANCE
Comme nous l’avons discuté tout au long de cette revue, l’HCS/DC-21OH est associée
à un risque élevé d’infertilité masculine pouvant être parfois réversible mais dans certains
cas irréversible. Dans l’enquête française multicentrique évoquée plus haut il a été établi
que seuls 75 % (164/219) des hommes avec HCS/DC-21OH évalués dans les centres
universitaires français avaient eu une échographie testiculaire (5). Plus surprenant encore,
seul 32 % (71/219) de ces hommes potentiellement infertiles avaient eu un spermo-
gramme (5). Ces résultats indiquent clairement une méconnaissance du risque d’inferti-
lité chez ces malades et une prise en charge de leur infertilité qui, en corollaire, est loin
d’être optimale (5).
IX. C
OMMENT ÉVALUER EN PRATIQUE LE RETENTISSEMENT
TESTICULAIRE DE LA MALADIE CHEZ LES HOMMES HCS/DC-21OH ?
L’évaluation des fonctions testiculaires et le dépistage des ISIT/TARTS doit être un
objectif de premier plan chez les patients avec bloc en 21-hydroxylase classique et ce, dès
l’enfance, mais plus encore pendant l’adolescence et surtout à l’âge adulte. La première
étape est simple : elle consiste à palper les testicules pour déterminer leur taille, leur consis-
tance normalement ferme ou non, et pour dépister l’existence de tumeurs évoquant des
ISIT/TARTS. L’examen clinique des testicules doit être complété par une échographie
testiculaire réalisée par un radiologue compétent en l’imagerie scrotale, ce qui permet de
dépister les ISIT/TARTS non palpables et de préciser l’importance et le retentissement
testiculaire d’inclusions plus importantes (5, 31). L’évaluation des fonctions endocrines
testiculaires et des gonadotrophines sont complémentaires et apportent des renseigne-
ments utiles pour le pronostic de fertilité en diagnostiquant un hypogonadisme hypogona-
dotrope, de bon pronostic, ou une insuffisance testiculaire primitive, plus péjorative (5).
La réalisation d’un spermogramme est utile dans tous les cas. Elle a comme but, tout
d’abord, de sensibiliser le patient et son entourage à l’importance de l’évaluation de la
fertilité. Si le spermogramme est normal, il permet de rassurer le patient et sa famille, et,
dans ce cas, la conservation de spermatozoïdes par congélation peut être proposée. En cas
d’acceptation, le patient sera adressé au Centre d’Étude et de Conservation du Sperme
(CECOS) le plus proche, avec une lettre d'accompagnement précisant bien le caractère
très particulier de l'indication de la congélation. En cas d’altération du spermogramme,
une congélation est toujours possible s’il persiste des spermatozoïdes vivants et mobiles en
nombre suffisant dans l’éjaculat. Lorsque le spermogramme montre une dégradation très
importante (oligo- ou azoospermie), il est nécessaire de rapidement déterminer le ou les
mécanismes en cause : simple obstacle (compression du rete testis), souffrance ou destruc-
tion du parenchyme testiculaire, effondrement des gonadotrophines ou combinaison de
tous ces mécanismes.
X. H
OMMES NÉS AVEC HCS/DC-21OH : PRÉSERVATION DE LA
FERTILITÉ ET PRISE EN CHARGE DE L’INFERTILITÉ
Nous avons vu qu’un équilibre correct du traitement substitutif de l’insuffisance surré-
nalienne des patients atteints de HCS/DC-21OH peut permettre de diminuer l’ACTH et
par conséquent diminuer aussi les précurseurs stéroïdiens pourvus d’un effet antigonado-
trope. Il semble utile d’expliquer au patient, dans le cadre de l’éducation thérapeutique,
que le bon équilibre hormonal peut non seulement prévenir une décompensation aigue de
l’insuffisance surrénale mais aussi de préserver la fertilité. Un deuxième objectif dans la
préservation de la fertilité est le dépistage précoce des ISIT/TARTS avec les moyens de
détection évoqués plus haut. Une détection précoce permet d’agir avant l’installation de
lésions testiculaires irréversibles.
La congélation des spermatozoïdes est un point essentiel de la stratégie de préservation
de la fertilité chez ces hommes. Dans notre centre, elle est proposée dès que la réalisation
d’un spermogramme est possible. Elle permet la mise en réserve de spermatozoïdes qui
peuvent être essentiels pour accomplir un projet parental futur même si une dégradation
de la spermatogenèse apparait.
XI. P
ERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES POUR AMÉLIORER
L’ÉQUILIBRE THÉRAPEUTIQUE ET PRÉSERVER LA FERTILITÉ
(Fig. 7)
Comme nous l’avons vu plus haut, l’équilibre thérapeutique n’est pas facile à atteindre,
dans la vraie vie, avec le traitement substitutif conventionnel qui, en France, comprend
dans la grande majorité des cas de l’hydrocortisone et de la fludrocortisone (5). Le
Figure 8. - Approches thérapeutiques émergentes (hors AMM) envisagées pour améliorer la prise en
charge des patients atteints d’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase ;
(1) ketoconazole, abiratenone ; (2) mitotane ; (3) abiratenone ou inhibiteurs de l’aromatase.
(voir texte) (adapté de la référence 1).
consultant pour infertilité (61). Ce patient avait une azoospermie persistante associée à
des ISIT/TARTs et une inhibition gonadotrope. Le mitotane administré pendant des mois
a permis à la fois de diminuer le volume des inclusions et d’entraîner un effondrement des
précurseurs stéroïdiens. L’inhibition gonadotrope a été levée et, surtout, la réapparition des
spermatozoïdes dans l’éjaculat a été obtenue. Cela a permis l’obtention d’une grossesse
chez la partenaire par fécondation in-vitro et un enfant sain est né (61). Le résultat
prometteur de cette étude - preuve de concept - devra être confirmé par un essai thérapeu-
tique incluant plusieurs patients avec azoospermie et ISIT/TARTs avant que ce traitement
puisse être proposé en pratique clinique.
XIII. CONCLUSION
Les endocrinologues - pédiatres et d’adulte - doivent jouer un rôle essentiel dans l’amé-
lioration de la prise en charge des garçons, adolescents et hommes nés avec une HCS/
DC-21OH. Notre spécialité a un savoir-faire ancien et reconnu dans la substitution
chronique de l’insuffisance surrénalienne et la prévention des décompensations aigües,
améliorées, de plus, par la mise en place des programmes d’éducation thérapeutique. La
prévention, pendant l’enfance, de la maturation osseuse précoce et de la petite taille
définitive reste imparfaite mais fait toujours des progrès. En revanche, le diagnostic, la
prise en charge et la prévention de l’infertilité chez ces malades sont assez défaillants. La
première étape pour une amélioration viendra de la prise de conscience par tous les
endocrinologues de France du risque majeur d’infertilité masculine que représente la forme
classique de bloc en 21- hydroxylase. Cette prise de conscience collective permettra de
déployer efficacement le dépistage précoce, tant des anomalies de l’axe gonadotrope que
des tumeurs testicualaires respnsables de l’altération de la fertilité.
Des traitements hormonaux de première ligne permettent assez souvent de restaurer une
fertilité. En cas d’échec des approches plus lourdes sont nécessaires ; elles nécessitent une
prise en charge conjointe par les endocrinologues et des médecins spécialistes en patho-
logie de la reproduction.
ABSTRACT
Congenital adrenal hyperplasia due to 21-hydroxylase deficiency (21OHD) is a rare
autosomal recessive disease characterized by variable impairment of cortisol and aldosterone
synthesis by the adrenal cortex. Clinical manifestations of 21OHD are due to a combination
of cortisol and aldosterone deficiency and accumulation of steroid precursors that are shunted
into the androgen synthesis pathway resulting in an androgen excess. Data on the adult
outcome of male patients born with this disease, including substantial clinical, hormonal,
morphological, testicular, and sperm evaluation, have been for years only available for a few
dozen men.The aim of the present review was to provide available up-to-date published data
focused on hormonal control, especially with respect to the gonadotropic axis, testicular
function, and fertility. For this purpose we reviewed reported series of male teenagers and
adult men with classic 21OHD managed in endocrinology departments of teaching hospitals
in different countries, including France. Published data indicate that most patients had poor
hormonal control with concentrations of ACTH, and the steroids precursors : progesterone,
17-Hydroxyprogesterone, and ADIONE that remain higher than the therapeutic targets
recommended. Many published series had showed frequent alterations of the gonadotropin-
testicular axis and a high prevalence of Testicular Adrenal Rest Tumors (TARTs). Surpri-
singly, a minority of the men with classic 21OHD had a sperm count. Yet, published litera-
ture have clearly showed that men born with 21OHD have a risk of infertility. Testicular
sonography and routine semen analysis seem advisable, given the significant risk of infertility
in these men.
Key-words : 21-hydroxylase deficiency, Congenital adrenal hyperplasia, Testicular Adrenal Rest Tumors, TARTs,
CYP21A2, azoospermia, infertility, adrenal insufficiency, Hypogonadotrope Hypogonadism.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
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La stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD) est une pathologie très fréquente chez
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
les patients diabétiques de type 2. La présence d’un diabète sucré est un des facteurs de
risque évolutif indépendant vers une fibrose plus sévère, une cirrhose ou un carcinome
hépatocellulaire. Récemment, les sociétés Européennes de diabétologie, d’hépatologie et
d'obésité (EASD, EASL, EASO) ont publié des recommandations concernant le dépistage
et la prise en charge de la NAFLD. Dans ces nouvelles recommandations, les scores non
invasifs de fibrose et l’élastométrie sont considérés comme des procédures non-invasives
acceptables pour le diagnostic et le suivi des patients atteints de stéatose métabolique et
pour l’identification des patients à risque de fibrose avancée. Cependant l’application
stricte des recommandations européennes n'est pas envisageable chez les patients
diabétiques de type 2. Elle conduirait adresser à l'hépatologue un nombre beaucoup trop
important de patients à évaluer. Il semble nécessaire d'évaluer les stratégies de dépistage
dans cette population spécifique des patients diabétiques de type 2. Le dépistage en deux
temps, utilisant un premier test de screening simple, non coûteux, et l’utilisation plus
généralisée des mesures d’élastométrie hépatique pourrait être une stratégie plus
performante chez les patients diabétiques de type 2.
Mots-clés : stéatose, diabète de type 2, stéatose non alcoolique, fibrose, tests non invasifs, recommandations
européennes.
INTRODUCTION
La stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD) est une pathologie très fréquente chez
les patients diabétiques de type 2. La NAFLD est la cause la plus habituelle d’élévation des
transaminases au cours du diabète de type 2 (1-4). Ces atteintes hépatiques diverses
associées à la maladie diabétique sont responsables d’une morbidité non négligeable. Cela
justifie donc que les diabétologues portent une attention particulière aux éventuelles
pathologies hépatiques de leurs patients diabétiques. Toutefois, il est particulièrement
difficile parmi ces très nombreux patients diabétiques de dépister ceux qui présentent un
risque évolutif nécessitant des explorations complémentaires et le recours à un hépato-
logue. Avec plus de 3 millions de patients diabétiques de type 2 en France, nous n'avons
donc pas la possibilité d'adresser tous les patients diabétiques à nos collègues hépatologues.
Il est donc indispensable de disposer de recommandations permettant de cibler les patients
diabétiques nécessitant un recours à un spécialiste des maladies du foie. Récemment les
Le développement de CHC sans cirrhose en cas NASH peut amener à dépister le CHC
par échographie hépatique semestrielle chez des patients porteurs d’une NASH avec
fibrose avancée, dès le stade F3.
Logiciel de
Test Paramètres utilisés calcul online Interprétation Accès Limitations
accessible
FLI < 30 :
Fatty Liver
IMC, tour de taille, pas de stéatose
Index oui libre -
Triglycérides, GGT FLI > 60 :
(FLI)
stéatose présente
Hepatic
AST/ALT ratio, IMC, genre, HIS > 36 :
Steatosis Index oui libre -
diabète stéatose présente
(HSI)
Six composants du
FibroTest–ActiTest plus SteatoTest® > 0,38 :
SteatoTest® non payant coût
IMC, cholestérol, stéatose présente
triglycerides et glycémie
Syndrome métabolique,
NAFLD liver Score > - 0,640 : Dosage
diabète de type 2, oui libre
fat score stéatose présente insulinémie
insulinémie, AST/ALT ratio
Logiciel de
Test Paramètres utilisés calcul online Interprétation Accès Limitations
accessible
Gamma-GT, bilirubine,
FibroTest > 0,58 :
alpha-2-macroglobuline,
FibroTest non fibrose avancée payant coût
apolipoprotéine A1,
(F3-F4)
haptoglobine, ASAT, ALAT
avis spécialisé
les tests suivants : SteatoTest®, FLI, HSI (Hepatic Steatosis Index) n'étaient pas adaptés pour
le dépistage de la stéatose des patients diabétiques de type 2 (21). Ces différents tests
utilisent des paramètres biologiques comme la glycémie, le taux de triglycérides, l'insuli-
némie qui sont modifiées par les traitements que reçoivent les patients diabétiques, ce qui
peut expliquer en partie les faibles performances de ces différents tests.
Concernant les tests non invasifs d’évaluation de la fibrose un travail récent a évalué
leurs performances dans une population de sujets diabétiques de type 2 en comparaison
avec des sujets non diabétiques (22). Les performances des scores de fibroses FIB-4, APRI
(AST to Platelet Ratio Index) et Hépascore par comparaison à la biopsie hépatique sont
significativement plus faibles chez les patients diabétiques que chez les sujets non diabé-
tiques (22). De plus, il est intéressant de noter que ces tests sont moins performants pour
prédire la survenue de complications hépatiques de la NAFLD chez les sujets diabétiques
(22). Les patients diabétiques avec des scores non invasifs de fibrose faible présentent dans
cette étude un risque encore très élevé de développer des complications hépatiques, entre
15 et 21% à 5 ans selon le score de fibrose utilisé (22). Néanmoins, l’utilisation de ces tests
non-invasifs d’évaluation de la fibrose reste pertinente chez les patients diabétiques, même
s’il faut avoir conscience de leurs limites.
Un dernier frein à la prise en charge et au dépistage de la NAFLD chez les patients
diabétiques de type 2 est lié à une mauvaise évaluation du risque de cette pathologie chez
les spécialistes en diabétologie. Récemment, 133 diabétologues anglais ont répondu à une
enquête sur leur prise en charge de la NAFLD chez leurs patients diabétiques (23). Il
ressort de cette étude, que les médecins diabétologues sous-estiment très largement le
pourcentage de patients porteurs d’une NAFLD chez les patients diabétiques qu’ils
prennent en charge. Seulement 5 % des diabétologues évaluaient correctement ([entre 50
et 75 %]), la prévalence de la stéatose chez les sujets diabétiques de type 2. Les 3/4 des
médecins répondeurs évaluaient la prévalence de la NAFLD des patients diabétiques à
moins de 30% (23). Un autre enseignement très intéressant de cette enquête est que seule-
ment 5 % des diabétologues anglais utilisent les scores non-invasifs de fibrose (23).
gique hépatique et une mesure du contenu hépatique en graisse (CHG) par spectroscopie
RMN qui est le gold standard non invasif d’évaluation de la stéatose. Les patients ont eu
également une évaluation de la stéatose par des scores invasifs comme le FLI et le
SteatoTest®. De même, chaque patient a bénéficié d'une évaluation non invasive de la
fibrose par scores non invasifs tels que ceux proposés par les guidelines comme le Fibrotest
et le NAFLD fibrosis score (25). Dans cette étude nous observons les faibles performances
des marqueurs non invasifs de stéatose comparés à la spectroscopie RMN dans une popula-
tion de patients diabétiques. En effet le FLI diagnostique la stéatose par erreur chez 24,6%
des patients. De même le StatoTest® diagnostique par erreur la stéatose chez 20,1% des
patients. L'application des guidelines utilisant une méthode de référence pour la stéatose
(spectroscopie RMN) associée à une évaluation de la fibrose avec le NAFLD fibrosis score
conduit à adresser à un spécialiste des maladies du foie 68,7 % des patients diabétiques de
type 2 (25).
De plus, les recommandations européennes proposent d’adresser à l’hépatologue tous les
patients avec une anomalie du bilan biologique hépatique (transaminases et GGT), (19).
Plusieurs études ont montré que 25 à 30 % des sujets porteurs d’un diabète de type 2
avaient des perturbations du bilan biologique hépatique (4). On observe donc qu’avant
même de procéder à l’évaluation de la stéatose et de la fibrose, l’application stricte des
recommandations européennes conduit déjà à adresser aux spécialistes des maladies du
foie plus du quart des patients diabétiques.
Deux enseignements principaux peuvent être tirés de ces différentes études évaluant la
faisabilité des recommandations européennes dans les populations d'obèses et de patients
diabétiques de type 2 : d’une part les tests non invasifs de détection de la stéatose sont peu
performants dans ces populations , d’autres part l’application des guidelines de l’EASD
conduiraient à adresser entre 1/3 à plus de 3/4 des patients diabétiques à un référent spécia-
liste de la NAFLD selon les tests et les seuils de fibrose retenus.
Compte tenu du nombre de patients diabétiques en France, ces guidelines paraissent
difficilement applicables. De plus, une des limites de ces méthodes d'exploration de la
stéatose et de la sévérité de la fibrose chez les patients diabétiques de type 2 est l'absence
d'étude comparant ces méthodologies à la réalité de l'atteinte hépatique authentifiée par
biopsie hépatique et étude anatomopathologique.
ITEM Points
Sexe masculin 1
ASAT (UI/l) :
35-69 2
> 70 4
GGT (UI/l) :
35-89 1
> 90 2
Plaquettes (G/l) :
170-249 1
< 170 4
test non invasif de 2ème intention sont alors adressés à un spécialiste des maladies du foie
pour bilan complémentaire (26). L'utilisation de cet algorithme en deux temps dans une
population de patients diabétiques avec le test eLIFT en première intention et le FibroTest
en 2ème intention permet de réduire de façon importante le nombre de patients à adresser
à l'hépatologue (27). Sur une population de 220 patients diabétiques de type 2, le dépistage
simple de la stéatose et la réalisation du score eLIFT permettent d'arrêter les explorations
chez 78,1% des patients (27). Un test de 2ème intention de la fibrose n'est réalisé que pour
48 patients sur les 220 sujets évalués initialement. Au final seulement 7 patients (3,1 %)
avaient un FibroTest suggérant une fibrose avancée nécessitant un avis spécialisé auprès
d'un hépatologue (27). Il semble donc que la réalisation de ce type d'algorithme en deux
temps pourrait être bénéfique à la fois sur le plan économique, en limitant le recours aux
explorations plus coûteuses, et sur le plan de la faisabilité, en diminuant le nombre de
patients diabétiques à adresser à l'hépatologue. De même, l’utilisation du Fibroscan® direc-
tement dans les unités de diabétologie pourrait permettre de sélectionner en amont les
patients diabétiques porteurs d’une fibrose avancée à adresser à l’hépatologue pour une
prise en charge spécifique. Récemment une équipe française a évalué la pertinence du
dépistage systématique de la fibrose chez 705 sujets diabétiques consultant dans un centre
de santé (28). Une stéatose était retrouvée chez 75 % des patients et 12.7% des sujets
avaient une fibrose avancée lors de la mesure d’élastométrie (28). Sur les patients porteurs
d’une fibrose avancée au Fibroscan® avec une mesure d’élastométrie > 13 kPa, 8 présen-
taient une cirrhose et 6 une fibrose avancée (28). Il n’y avait pas de patient avec une
cirrhose à la biopsie de foie lorsque la mesure d’élastométrie était inférieure à 13 kPa (28).
CONCLUSION
On voit que l’application stricte des recommandations européennes n'est pas envisa-
geable chez les patients diabétiques de type 2. Elle conduirait à adresser à l'hépatologue un
nombre beaucoup trop important de patients. Compte tenu du risque spécifique d'évolu-
tion de la NAFLD des patients diabétiques de type 2, associé aux performances parfois
variables des tests de dépistage non invasifs de l'atteinte hépatique, il semble nécessaire
d'évaluer les stratégies de dépistage dans cette population spécifique. Le dépistage en deux
temps, utilisant un premier test de screening simple, non coûteux, accessible aussi bien en
médecine spécialisée qu'en médecine générale, nous semble une stratégie tout à fait
intéressante. Cela devrait permettre de proposer des tests plus élaborés et plus coûteux
associant les marqueurs non invasifs complexes et l’élastométrie hépatique à un nombre
beaucoup plus limité de patients. Ces tests de 2ème intention peuvent alors être réalisés
dans des structures spécialisées. Par ailleurs, des actions de sensibilisation des patients et
des soignants sur cette pathologie hépatique semblent nécessaires pour permettre un
dépistage plus précoce des complications des hépatopathies de surcharge des patients
diabétiques.
ABSTRACT
Non-alcoholic fatty liver disease (NAFLD) is very common in people with type 2 diabetes
mellitus with approximately two thirds of them being diagnosed with this disease. Type 2
diabetes is an aggravating factor for NAFLD with an increased risk for developing nonalco-
holic steatohepatitis (NASH), liver fibrosis, cirrhosis and hepatocellular carcinoma.
Recently, the European Association for the Study of the Liver (EASL), the European
Association for the Study of Diabetes (EASD) and the European Association for the Study
of Obesity (EASO) proposed recommendations for the diagnosis, treatment and follow-up
of NAFLD. In these new recommendations, biomarkers, fibrosis scores and transient
elastography, are considered acceptable non-invasive procedures for the identification of
cases with a low risk of advanced fibrosis/cirrhosis. However, the application of the EASL-
EASD-EASO algorithm for the diagnosis, treatment and follow-up of NAFLD would lead
to an excessive number of people with type 2 diabetes being referred to a liver clinic. It seems
very difficult to apply these new algorithms in routine clinical practice. We suggest that new
clinical and/or biological biomarkers of steatosis and fibrosis be specifically validated in people
with type 2 diabetes. A stepwise algorithm using simple and widely available blood test
associated with use of transient elastography directly in diabetes department could be an
interesting screening strategy to limit the number of patients being referred to hepatologists.
Key-words : steatosis, type 2 diabetes, non-alcoholic fatty liver disease, fibrosis, noninvasive biomarkers,
European guidelines.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
L’hyperthyroïdie est une des maladies endocriniennes les plus fréquentes. Plus de 90 %
des hyperthyroïdies sont liées à une des trois principales étiologies, la maladie de Basedow,
l’adénome toxique ou le goitre multinodulaire toxique. Malgré la fréquence de la maladie
et des modalités thérapeutiques qui n’ont guère évolué depuis plusieurs décennies, la litté-
rature scientifique est relativement pauvre concernant l’évaluation des méthodes diagnos-
tiques et thérapeutiques de l’hyperthyroïdie. Comme dans beaucoup d’autres domaines, les
approches diagnostiques (notamment la réalisation de certains examens complémen-
taires) n’ont quasiment jamais fait l’objet d’une réelle évaluation. En ce qui concerne les
traitements, les modalités disponibles peuvent être réparties en deux classes clairement
distinctes dans leur objectif : 1) le traitement médical (médicamenteux) qui a un effet
suspensif et ne peut être envisagé seul que dans la maladie de Basedow 2) le traitement
radical, qui lui-même comporte deux grandes options : la chirurgie ou l’administration
d’Iode 131 (« irathérapie »), qui va s’accompagner dans l’immense majorité des cas d’une
hypothyroïdie séquellaire définitive. On comprend bien la difficulté de comparer des
traitements aussi différents dans leur objectif, leurs modalités pratiques et leurs effets
indésirables ou risques potentiels. En l’absence de données scientifiques pertinentes, la
prise en charge des hyperthyroïdies repose donc sur des recommandations de sociétés
savantes elles-mêmes établies principalement sur des consensus d’experts et donc de très
faible niveau de preuve.
Un certain nombre d’études ont rapporté les modalités de prise en charge de l’hyperthy-
roïdie dans différentes régions du monde. Leur intérêt réside dans la mise en évidence
MÉTHODOLOGIE
L’attention du lecteur est attirée sur quelques différences méthodologiques entre les
études de pratiques rapportées dans certains articles qui limitent les possibilités de compa-
raison. Ainsi l’étude française a consisté en un questionnaire adressé à un échantillon
représentatif d’endocrinologues portant sur d’authentiques patients et reflète donc proba-
blement assez fidèlement les pratiques. Plusieurs autres études auxquelles il sera fait
référence ont été réalisées à partir de « vignettes » cliniques interrogeant les praticiens sur
des situations théoriques (il s’agit donc de pratiques déclarées plus que de pratiques réelles)
et le « public » visé différait dans son mode de recrutement : endocrinologues, membres
de l’American Thyroid Association (ATA) probablement plus spécialisés, etc... Les compa-
raisons n’ont donc d’intérêt que comme support d’une réflexion sur les pratiques françaises.
Maladies de Goitre
Adénome
Examens prescrits Basedow multinodulaire p
toxique (n = 69)
(n = 802) (n = 121)
Échographie (%) 93 91 94 NS
l’approche « titration »). L’étude a d’ailleurs montré (avec les limites méthodologiques
d’une étude observationnelle) que le traitement combiné permettait d’obtenir plus rapide-
ment l’euthyroïdie que le traitement par titration. Un autre travail a suggéré que cette
modalité thérapeutique diminuait le nombre de bilans sanguins et de consultations même
si l’on peut s’interroger sur la pertinence clinique de ce résultat statistiquement significatif
(- 0,3 visite par an…) (9). En tout état de cause, l’intérêt de l’étude française est de mettre
en exergue la difficulté de restaurer rapidement l’euthyroïdie dans la maladie de Basedow.
Seuls 64 % des patients sont cliniquement euthyroïdiens après 3 mois, mais significative-
ment plus dans le groupe traité de façon combinée (71 % vs 56 %).
CONCLUSIONS
Ce travail montre les discordances importantes entre les pratiques françaises en matière
de diagnostic des hyperthyroïdies et les recommandations et pratiques dans d’autres
régions du monde. L’utilisation plus large des Ac anti R-TSH en 1ère intention devrait
certainement être encouragée compte-tenu de leurs excellentes performances, de leur
accessibilité et d’un coût assez modeste. La scintigraphie est l’examen à proposer devant
une suspicion d’hyperthyroïdie liée à une autonomisation (adénome toxique, goitre multi-
nodulaire) et en cas de négativité des Ac anti R-TSH. L’échographie devrait être réservée
aux situations de diagnostic difficile, d’indisponibilité des autres modalités d’exploration
ou en cas d’anomalie de la palpation cervicale.
Les pratiques thérapeutiques semblent elles plus en conformité avec celles de la majorité
des pays, hors États-Unis. Le traitement médical est le plus utilisé en première intention
dans la maladie de Basedow avec une pratique encore importante du traitement combiné.
Même s’il est déconseillé dans les recommandations internationales récentes, il semble
permettre l’obtention plus rapide du retour à l’euthyroïdie, objectif cliniquement pertinent
pour ces patients.
HYPERTHYROIDISM
n n n n n n n n n n n n n n n n
ABSTRACT
Hyperthyroidism is one of the most common endocrinopathies. In the absence of reliable
scientific data, the diagnostic approach and the therapeutic management vary from one
country to another and within the same country. A recent study has made it possible to better
n n n n n n n n n n n n n n n
characterize practices in France. In terms of diagnosis there is a sub-prescription of anti-TSH
receptor antibodies, though they are recommended by most international guidelines, and
easily available in the country, and an overprescription of ultrasounds whose interest is
discussed. In Graves' disease, antithyroid drugs are used in the first episode in more than
90% of patients. The block and replace regimen, which is not recommended by international
guidelines, remains used in more than half of patients and seems to be associated with faster
reach of euthyroidism. These results are confronted with practices described in other
countries. Prospective studies would be needed to determine optimal management of hyper-
thyroidism.
BIBLIOGRAPHIE
NOTES
La cachexie peut se définir comme un syndrome systémique caractérisé par une perte
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
DÉFINITION
La cachexie peut se définir comme un syndrome systémique caractérisé par une perte
pondérale résultant surtout d’une perte de masse maigre notamment musculaire, avec ou
sans perte de masse grasse, et seulement partiellement réversible par un apport nutri-
tionnel optimalisé (1).
ÉTIOLOGIE
De nombreuses affections peuvent conduire à la cachexie. C’est le cas pour les insuffi-
sances d’organe à un stade avancé (cœur, rein, foie, poumon), pour certaines maladies
inflammatoires (polyarthrite rhumatoïde) ou infectieuses (SIDA avant l’ère des thérapies),
et le cancer, ce dernier contribuant à un tiers des cas de cachexie. La cachexie cancéreuse
affecte près de 80 % des patients avec un cancer avancé et est responsable de 25 % des
décès chez ces patients (2). Le développement de la cachexie est variable selon la nature
du cancer : fréquente en cas de cancer du pancréas, de la tête et du cou et du tube digestif
supérieur, plus rare en cas de cancer du sein ou de la prostate. Cette revue sera surtout
orientée vers la cachexie cancéreuse.
CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
Selon le consensus proposé par WJ Evans (1), le diagnostic de cachexie peut être posé
en présence d’une perte de poids (involontaire) d’au moins 5 % en 12 mois (ou en présence
d’un IMC inférieur à 20 kg/m2), associée à trois des facteurs suivants : fatigue, perte de
force musculaire, anorexie, faible masse maigre ou anomalies biologiques telles qu’une
élévation de la CRP, une hypo-albuminémie ou une anémie. L’imprécision de cette défini-
tion reflète notre manque de connaissances fondamentales sur la physiopathologie de ce
syndrome. Pour la cachexie cancéreuse, un consensus a été proposé par K Fearon (5). Le
diagnostic de cachexie cancéreuse peut être posé dans une de ces trois circonstances : une
perte (involontaire) de poids > 5 % au cours des 6 derniers mois, une perte de poids > 2 %
associée à un IMC < 20 kg/m2, ou une perte de poids > 2 % associée à une faible masse
musculaire (< 5ème percentile). Il n’existe cependant pas de véritable consensus quant à la
méthode à utiliser pour définir l’anorexie ou la perte de masse musculaire. De façon
pragmatique, l’anorexie peut être recherchée par un questionnaire type SNAQ (Short
Nutritional Assessment Questionnaire) (6) et la masse musculaire évaluée par une analyse
des images de CT-scan abdominal au niveau de la vertèbre L3 (7).
TABLEAU CLINIQUE
La perte de poids est souvent le premier signe du développement d’une cachexie, parfois
même le signe d’appel de la présence d’un cancer. Cependant, la perte de masse musculaire
évaluée notamment par CT-scan abdominal peut survenir alors que le poids n’a pas encore
diminué (8). La coexistence de plus en plus fréquente d’une obésité rend d’ailleurs difficile
la quantification et l’interprétation d’une perte de poids. Un score basé sur l’IMC initial et
la perte de poids permet néanmoins de prédire le pronostic (9). Cependant, le pronostic
de la cachexie cancéreuse dépend directement de l’ampleur de la perte de masse muscu-
laire (10). Parallèlement à ces modifications de composition corporelle, qui conditionnent
en partie le pronostic, d’autres symptômes comme l’anorexie, la fatigue, la faiblesse,
l’anxiété, la dépression, peuvent altérer profondément la qualité de vie.
PRONOSTIC
La présence d’une cachexie est un élément de mauvais pronostic. En effet, la perte de
masse musculaire qui la caractérise est associée à une survie raccourcie indépendamment
de l'IMC (11), une toxicité accrue de la chimiothérapie (12), une moindre qualité de vie et
un risque accru de complications postopératoires (13). Des travaux chez l’animal montrent
que la correction de la perte de masse musculaire améliore la survie sans freiner pour
autant la croissance tumorale (14). La préservation de la perte de masse musculaire
apparaît dès lors comme un objectif thérapeutique essentiel.
PHYSIOPATHOLOGIE
La cachexie cancéreuse résulte d’une combinaison variable de réduction des ingesta et
d’altérations métaboliques (15). La réduction des ingesta est une composante importante,
et parfois essentielle, dans la perte de poids, mais le plus souvent insuffisante à elle seule
pour l’expliquer. La dépense énergétique de repos souvent élevée, en rapport avec l’inflam-
mation, l’existence de cycles métaboliques futiles (effet Warburg avec activation du cycle
de Cori), l’activation du tissu adipeux brun (beige), contribue à accroître le déficit énergé-
tique, et favorise donc la fonte du tissu adipeux (2). La perte de masse musculaire résulte
d’une réduction de la taille des fibres musculaires (surtout les fibres rapides glycolytiques)
(3), due à la fois à une réduction de la synthèse protéique et une augmentation de la
protéolyse musculaire. En effet, la voie Akt/mTOR stimulatrice de la synthèse protéique
est inhibée tandis que la voie FOXO stimulatrice de l’autophagie et du système ubiquitine
protéasome est activée dans le muscle squelettique. De façon intrigante, plusieurs travaux
suggèrent que la réduction du tissu adipeux par la lipolyse et l’oxydation accrue des acides
gras par le muscle contribuent à l’atrophie musculaire (16, 17). Des données récentes
impliquent le rôle d’autres organes ou tissus dans le développement de la cachexie. C’est le
cas du cerveau, en particulier l’hypothalamus (18) et de l’intestin, en particulier du micro-
biote (19). Il s’agit donc bien d’un syndrome systémique.
musculaire chez des patients avec un cancer bronchique à petites cellules (études
ROMANA) (31, 32). Parmi les agents anaboliques, les SARMS sont les plus avancés en
recherche clinique. En effet, l’Enobosarm a montré sa capacité à augmenter la masse
maigre, la performance physique et la qualité de vie chez des patients porteurs de différents
cancers (études POWER) (33). Aucune de ces molécules n’a cependant montré à ce jour
un effet bénéfique sur la survie. Une classe très prometteuse, du moins au vu des données
animales, est celle des inhibiteurs de la Myostatine et de l’Activine, deux molécules de la
famille du TGFβ qui partagent le même récepteur, le récepteur de type IIB de l’Activine
(ActRIIB). Plusieurs approches peuvent être utilisées pour bloquer leur action : un
anticorps monoclonal dirigé contre la Myostatine (34), un anticorps dirigé contre le
récepteur ActRIIB (35) ou encore une forme soluble du récepteur ActRIIB (36). Ces
molécules augmentent non seulement la masse musculaire, mais aussi la survie de souris
porteuses d’une tumeur cachectisante (14).
PRISE EN CHARGE
Le groupe d'experts de l’ESPEN (European Society for Clinical Nutrition and Metabolism)
a émis trois recommandations pour la prise en charge nutritionnelle des personnes
atteintes de cancer : 1) dépistage précoce de la dénutrition indépendamment de l’IMC ;
2) évaluation approfondie le cas échéant pour y inclure des mesures de l'apport alimen-
taire, de la composition corporelle, des biomarqueurs inflammatoires, de la dépense
énergétique et de la performance physique ; 3) mise en place d’interventions nutrition-
nelles multimodales individualisées, comprenant l’augmentation de l'apport nutritionnel,
la réduction de l'inflammation et du stress hypermétabolique et l'augmentation de l'acti-
vité physique (37). Comme la perte de masse musculaire représente un facteur pronostique
puissant et qu’elle peut être aggravée par la réduction des ingesta due à l’anorexie, il paraît
logique d’optimaliser l’apport nutritionnel afin de ralentir la perte de masse musculaire.
Cependant, plus l’inflammation est sévère, plus la résistance anabolique sera marquée,
c’est-à-dire moins l’apport nutritionnel sera efficace sur la masse musculaire (38). Dès lors,
il est essentiel d’agir précocement avant le stade de cachexie réfractaire. Plusieurs travaux
ont en effet montré qu’il existe au début de la cachexie une fenêtre de réponse anabolique
à la nutrition, avec un bénéfice sur la qualité de vie, sur le poids, parfois la survie,… (39,
40). Ceci renforce dès lors la nécessité d’un diagnostic précoce. Celui-ci ne pourra se faire
que par un suivi longitudinal et systématique de paramètres simples, comme le poids, la
perte de poids, la mesure des ingesta, tout en reconnaissant que la masse et la force muscu-
laire peuvent être réduites avant que la perte de poids et l’anorexie ne s’installent. Aucun
nutriment spécifique n’a montré un effet anti-cachectisant (41), même s’il existe quelques
données suggérant un bénéfice des acides gras omega-3 dans certaines études. L’efficacité
du support nutritionnel sur la performance physique pourra être renforcée par un
programme d’activité physique, comme cela a été montré dans d’autres formes de cachexie
(bronchopneumopathies obstructives chroniques). La prise en charge de symptômes
comme la douleur et les nausées est indispensable pour optimiser voire implémenter le
support nutritionnel. Clairement la prise en charge de la cachexie doit être multimodale
(42). Des données récentes mettent en lumière le fait que certaines thérapies anti-cancé-
reuses pourraient aggraver la cachexie, en particulier la perte de la masse maigre (43). À
l’inverse, la toxicité de certaines chimiothérapies pourrait être exacerbée en cas de faible
masse musculaire comme celle rencontrée dans la cachexie (12). Ces éléments démontrent
la nécessité de développer de nouvelles approches thérapeutiques, complémentaires au
support nutritionnel.
CACHEXIE RÉFRACTAIRE
Lorsque la tumeur primitive progresse et ne répond plus aux thérapies anti-tumorales, la
cachexie devient souvent réfractaire à la prise en charge nutritionnelle. À ce stade, l’indi-
cation de la nutrition artificielle, notamment parentérale lorsque le tube digestif est
non-fonctionnel, doit être soigneusement évaluée en regard de l’impact sur la qualité de
vie, des risques et des coûts. En général, les recommandations s’accordent pour ne pas la
proposer lorsque l’espérance de vie est inférieure à deux à trois mois. Le décès par cachexie
est probablement secondaire à l’atrophie du myocarde (arythmies) et du diaphragme
(insuffisance respiratoire), et aux infections (translocation bactérienne liée à l’atrophie de
la muqueuse digestive ou pneumonie d‘inhalation liée à des problèmes de déglutition).
1
Pôle Endocrinologie, Diabétologie et Nutrition,
Institut de Recherches Expérimentales et Cliniques,
Université Catholique de Louvain, Bruxelles, Belgique
2
ervice d’Endocrinologie et Nutrition,
S
Cliniques Universitaires St-Luc, Bruxelles, Belgique
ABSTRACT
Cachexia can be defined as a systemic syndrome characterized by a loss of weight, mainly
resulting from a loss of lean mass including muscle, and only partially reversible by the nutri-
tional intake. Cachexia differs from simple undernutrition because it results from a variable
combination of ingesta reduction and metabolic alterations, induced by inflammation. It
complicates many conditions including cancer. A bundle of arguments suggests the role of
circulating factors in the development of cachexia, whether these factors are produced by the
host or by the tumor itself in case of cancer. The diagnosis of cachexia is based primarily on
body weight, weight loss, loss of muscle mass and reduction of ingesta. Circulating factors
may be biomarkers of cachexia in the future. Cachexia, especially loss of muscle mass, is an
element of poor prognosis. As this loss can be aggravated by the reduction of ingesta due to
anorexia, it seems logical to optimize the nutritional intake in order to slow it down.
However, the more severe the inflammation, the stronger the anabolic resistance is. It is
therefore essential to act early, because there is at the beginning of the cachexia a window of
anabolic response to nutrition, with a benefit on the quality of life, weight, sometimes
survival. In view of the relative effectiveness of nutritional intake, complementary approaches
must be absolutely sought after. It is in this sense that hormonal therapies in the broad sense
are being investigated to treat cachexia.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
L’imagerie fonctionnelle nucléaire a depuis de nombreuses années des liens étroits avec
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
I. - INTRODUCTION
Depuis de nombreuses années les techniques de médecine nucléaire jouent un rôle
important dans le diagnostic des pathologies endocriniennes, en particulier dans le
domaine des tumeurs neuroendocrines (TNE). Depuis une quinzaine d’années, l’essor de
la tomographie par émission de positons couplée à la tomodensitométrie (TEP/TDM) a
relancé la recherche en médecine nucléaire permettant le développement de nouveaux
radiotraceurs dont certains ont maintenant une large place en endocrinologie (Tableau 1)
Dans cette revue nous discuterons la place de 3 nouveaux traceurs TEP [18F-FCholine,
18
F-FDopa et les analogues de la somatostatine marqués au Gallium 68 (68Ga-SSA)] en
complément au 18F-FDG, traceur le plus communément utilisé, au sein de l’arsenal diagnos-
tique des pathologies tumorales endocriniennes.
Tableau 1. - Indications des différents traceurs TEP pour l’exploration des tumeurs neuroendocrines (TNE)
TNE gastroentéropancréatiques TNE
Traceur CMT PPGL
Pancréas Iléon Inconnu bronchiques
++ - PPGL cervicaux
(Maladie
18
F-FDopa - PPGL mutés SDHD +/- +++ + +/-
résiduelle avec
CT> 150 pg/ml) - Phéochromocytomes
- PPGL métastatiques +++
68
Ga-SSA +/- - PGL cervicaux +++ +++ ++ Bien
- PPGL mutés SDHB différenciées
+++
- PPGL métastatiques
18
F-FDG Pronostic Pronostic non +/- Peu
- PPGL mutés SDHB
différenciées
CMT : carcinome médullaire de la thyroïde, CT : calcitonine, PPGL : paragangliome,
SDHB/SDHD : sous-unité B/D du gène de la succinate déshydrogénase, PGL : paragangliomes,
PPGL : phéochromocytomes et paragangliomes.
2.2 18F-Choline
La 18F-Choline est un précurseur de phospholipide membranaire (choline) qui est impli
qué dans le métabolisme des membranes plasmatiques cellulaires, marqué au 18F. Ce radio-
pharmaceutique permet l’exploration de processus prolifératifs cellulaires dans lesquels la
synthèse des membranes plasmatiques est augmentée (2). Initialement développée dans le
domaine du cancer de la prostate, son intérêt diagnostique a été récemment démontré
dans l’hyperparathyroïdie (cf. infra).
2.3 18F-DOPA
La 6-fluoro-(18F)-L-3,4-dihydroxy-phenylalanine (18F-DOPA) est un acide aminé marqué
au 18F (3). La 18F-Dopa est captée et internalisée dans la cellule via le transporteur ubiqui-
taire LAT-1 (transporteur des acides aminés) puis décarboxylée en 18F-Dopamine dans
certaines tumeurs, notamment les paragangliomes (PGL), les phéochromocytomes (PCC)
et les TNE de l’intestin moyen. C’est cette étape de décarboxylation qui permet son
stockage dans les vésicules de sécrétion et en fait un traceur spécifique des TNE.
(Octréotate marqué au Lutetium 177, Lutathera®) devient une option thérapeutique acces-
sible suite aux résultats de l’essai NETTER-1 et à l’obtention d’une AMM européenne pour
le traitement des TNE-GEP (9).
La détection optimale par imagerie de la tumeur primitive et des métastases est un enjeu
majeur pour la prise en charge des TNE GEP afin d’en évaluer le pronostic et de décider de
la stratégie thérapeutique optimale. L’imagerie conventionnelle et l’écho-endoscopie,
malgré leurs hautes performances diagnostiques restent limitées pour la détection de
certaines lésions de petite taille ou de localisation difficile d’analyse. L’exploration
fonctionnelle est souvent nécessaire pour compléter le bilan d’extension, mais également
effectuer la caractérisation phénotypique, évaluer le pronostic et orienter la prise en
charge thérapeutique des TNE GEP.
rait permettre une meilleure détection des insulinomes, sans ou avec prémédication par
carbidopa (19, 20). Bien que peu sensible, cette imagerie reste néanmoins très spécifique,
un seul cas de faux positif ayant été rapporté dans la littérature avec la TEP à la 18F-FDOPA
chez un patient avec une tumeur pancréatique pseudo-papillaire (21).
La TEP au 68Ga-SSA (DOTATOC, DOTANOC, DOTATATE), semble supérieure
pour la détection des TNE pancréatiques bien différenciées, en comparaison à l’imagerie
conventionnelle et à l’Octreoscan®. Kumar et coll. (22) ont montré dans leur étude
prospective sur une série de 20 patients avec TNE pancréatique, suspectée cliniquement
et/ou prouvée histologiquement, que la TEP au 68GA-DOTATOC était supérieure pour la
détection de la tumeur primitive comparativement à la TDM avec un taux de détection de
100 % versus 75 % respectivement, ainsi que pour la détection des métastases (taux de
détection de 100 % versus 54 % pour la TDM). Ces données étaient comparables dans une
autre étude évaluant la TEP au 68Ga-DOTATATE versus l’IRM, avec un taux de détection
de 100 % versus 65 % respectivement (23). Malgré ces bons résultats, la détection des
insulinomes reste une limite avec une sensibilité inconstante de la TEP au 68Ga-SSA, de
26 à 85 % selon les séries (24–26). Ces données sont concordantes avec la mauvaise sensi-
bilité de l’Octreoscan® probablement en lien avec la faible expression des récepteurs de la
somatostatine dans certains insulinomes bénins (27).
D’après ces données récentes, la TEP au 68Ga-SSA semble donc être la meilleure option
pour la détection des TNE pancréatiques (Figure 2). Certaines études ont comparé les
deux radiopharmaceutiques sur de petites séries de patients. Haug et coll. (28) a montré
une supériorité de la TEP/TDM au 68Ga-DOTATATE par rapport au 18F-FDOPA pour la
détection de la tumeur primitive dans les TNE pancréatiques. Putzer et coll. quant à eux
retrouvaient une sensibilité équivalente sur une série de 4 patients entre la TEP/TDM au
68
Ga-DOTATOC et la 18F-FDOPA (29). Il n’y a par contre pas de données de comparaison
Figure 2. - Imagerie TEP au 68Ga-DOTATOC d’une TNE bien différenciée (OMS grade 1) de 12 mm du
corps du pancréas (SUVmax = 100).
En dehors de quelques cas décrits au sein de séries plus larges de TNE GEP (28), il n’y a
pas d’étude spécifique publiée sur l’utilisation de la 18F-FDOPA-TEP/TDM dans les TNE du
Hindgut.
Selon le grade de la tumeur, la TEP/TDM au 18FDG (36) et / ou au 68Ga-SSA (37) semble
indiquée pour le bilan lésionnel de ces tumeurs métastatiques.
1) Généralités
Les TNE broncho-pulmonaires sont la deuxième localisation de TNE (20 % des cas)
après les TNE-GEP et représentent 1 à 3 % des cancers du poumon (45). Elles se développent
à partir des cellules neuroendocrines de l’épithélium bronchopulmonaire (46) et sont
localisées en endo-bronchique dans 90 % des cas (47). Elles sont réparties en 4 sous-
groupes : les tumeurs carcinoïdes typiques et les tumeurs carcinoïdes atypiques, qui sont
bien différenciées, les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules et les carcinomes à
petites cellules, quant à eux peu différenciés avec une progression rapide et une maladie
souvent métastatique avec un pronostic sombre (46).
Plus de 50 % des patients sont symptomatiques avec une présentation clinique variable
selon la localisation et la taille de la tumeur. Les manifestations peuvent inclure de la
toux, des épisodes d’hémoptysie, de pneumopathie obstructive. Un syndrome sécrétant
n’est par contre présent que dans moins de 5 % des cas (syndrome carcinoïde, SIADH,
Cushing…) (46). Elles peuvent être sporadiques ou s’intégrer dans une forme familiale
comme la NEM de type 1 (45).
La prise en charge curative repose principalement sur la chirurgie quand cela est possible
(45, 46). Dans les autres cas, on peut proposer de la chimiothérapie pouvant être couplée
à de la radiothérapie ou bien l’utilisation de thérapies ciblées (dont les inhibiteurs de
mTOR). On peut également proposer des traitements par analogues de la somatostatine
ou la radiopeptidothérapie avec les analogues de la somatostatine radiomarqués (45). En
effet ces tumeurs expriment dans 80 % des cas les récepteurs de la somatostatine, avec une
expression d’autant plus importante que la tumeur est bien différenciée (46, 47).
La localisation de la tumeur primitive et des métastases reste donc essentielle. L’imagerie
conventionnelle, telle que le scanner et même l’IRM, est largement utilisée mais peu
spécifique des TNE BP. Pour les tumeurs bien différenciées, l’imagerie fonctionnelle des
récepteurs de la somatostatine est donc une aide utile. En ce qui concerne les tumeurs peu
différenciées, de haut grade, l’imagerie fonctionnelle de référence reste la TEP/TDM au
18
F-FDG. La TEP-TDM à la 18F-FDOPA a été peu étudiée, principalement pour les TNE BP
bien différenciées dans cette indication, avec des résultats plutôt décevants (32) et n’est
donc pas recommandée pour l’exploration de ces tumeurs (48).
2) Apport de la TEP/TDM
L’intérêt de la TEP/TDM reste à démontrer pour le bilan d’extension initial du CMT (3),
qui repose principalement sur l’échographie cervicale. En revanche, dans les situations de
maladie résiduelle ou de récidive après chirurgie, généralement détectées devant l’absence
Figure 3. - Patient de 67 ans, opéré d'un carcinome médullaire thyroïdien classé pT4a N1b avec un
taux de calcitonine à 1 800ng/ml en post-opératoire. Aspect de métastases multiples osseuses sur la
TEP à la 18F-FDopa (A) contrastant avec l’aspect entièrement négatif de la TEP au 18F-FDG.
1) Généralités
1.1 Origine histologique et caractéristiques métaboliques
Les phéochromocytomes et paragangliomes (PPGLs) constituent un groupe de tumeurs
neuroendocrines issues de cellules du système nerveux autonome dérivées des crêtes
neurales. Les PPGLs du système nerveux sympathique (PPGLs sympathiques) sont issus de
progéniteurs chromaffines de la médullosurrénale dans 80 % des cas (alors appelés
phéochromocytomes) ou bien des ganglions nerveux sympathiques para-vertébraux du
thorax, de l’abdomen ou du pelvis dans 20 % des cas. Les PPGLs sympathiques sont
souvent responsables d’une production accrue de catécholamines qui explique une partie
des manifestations cliniques liées à ces tumeurs (HTA, céphalée, accès de sueurs, pâleur)
et permet la détection biologique notamment par le dosage urinaire des métanéphrines. À
l’inverse, les PPGLs du système nerveux parasympathique (PPGLs parasympathiques) sont
majoritairement non sécrétants (4 % de tumeurs sécrétantes), expliquant leur caractère
asymptomatique fréquent et sont le plus souvent retrouvés dans la région cervicale ou de
la base du crâne. Bien que la majorité des PPGLs correspondent à des tumeurs bénignes,
il existe tout de même des formes malignes dans 10 % des cas de phéochromocytomes et
25 % des cas de PPGLs (75).
1.2 Génétique des PPGL
Environ 10 % (PCC) à 40 % (PGL) des paragangliomes-phéochromocytomes (PPGL)
sont malins (76), mais il n’existe pas de critère histologique fiable de malignité, qui n’est
affirmée qu’à l’apparition de la première métastase à distance (OMS, 2004). Près de 40 %
des PPGL sont d’origine génétique (77) avec 16 gènes de prédisposition identifiés dont les
plus fréquemment impliqués sont les gènes SDHx (SDHA, SDHB, SDHC, SDHD) codant
pour les 4 sous-unités de la succinate déshydrogénase (SDH), une enzyme mitochondriale
qui catalyse l’oxydation du succinate en fumarate dans le cycle de Krebs. Les autres gènes
majeurs sont les 3 gènes impliqués dans les formes syndromiques de la maladie associés à
des atteintes d’autres organes : RET (Néoplasie endocrinienne multiple de type 2), VHL
(maladie de Von Hippel Lindau), NF1 (Neurofibromatose de type 1). Enfin, depuis 2010,
grâce aux approches dites « multi-omics », de nombreux autres gènes de prédispositions
ont été mis en évidence, parmi lesquels MAX, TMEM127, FH, MDH2, SLC25A11, GOT2,
HIF2, …. (78). Actuellement, le dépistage génétique est donc systématiquement recom-
mandé (79).
La TDM et l’IRM constituent des modalités très sensibles pour la détection des PPGLs.
Cependant, elles ne permettent pas toujours d’affirmer le diagnostic du fait d’une spécifi-
cité parfois sous-optimale comparativement à l’imagerie métabolique (78). Les techniques
de médecine nucléaire permettent depuis de nombreuses années l’exploration de ces
tumeurs, grâce au caractère spécifique de l’information métabolique qu’elles apportent et
de l’exploration corps entier (80). La 18F-FDOPA présente des similitudes avec la scintigra-
phie à la 123I-MIBG mais avec une cible métabolique différente (le transporteur des acides
aminés LAT-1 et la décarboxylase cytosolique pour la 18F-FDOPA, le transporteur de la
norépinéphrine et le stockage vésiculaire pour la 123I-MIBG) et avec l’avantage de la
technologie TEP/TDM pour la 18F-FDOPA, ce qui explique les différences observées entre
ces deux radiotraceurs (80).
2.1 Phéochromocytomes
La 18F-FDOPA –TEP/TDM est l’imagerie la plus sensible dans cette indication, bien
qu’elle n’ait pas véritablement démontré sa supériorité par rapport à la scintigraphie à la
123
I-MIBG (3) mais est surtout moins sujette aux interactions médicamenteuses que cette
dernière. La 18F-FDOPA –TEP/TDM présente plusieurs autres avantages comme un temps
d’acquisition plus court, une faible fixation physiologique au niveau des glandes surrénales,
ce qui pourrait lui conférer un avantage diagnostique par rapport au 68Ga-SSA, notam-
ment dans la recherche de lésions pluri-focales liées aux formes familiales associées à RET,
VHL ou NF1 (78).
2.2 Paragangliomes
La TEP/TDM à la 18F-FDOPA a montré d’excellents résultats dans les PGL cervicaux,
avec une sensibilité > 95 % et une spécificité de 95-100 % (3). Cette modalité est actuelle-
ment considérée comme l’examen de choix pour ces lésions cervicales, notamment chez
les patients porteurs de mutations SDHD (66, 81, 82).
Pour les PGL sympathiques abdominaux ou métastatiques, la TEP/TDM à 18F-FDopa est
moins performante avec des cas décrits de faux-négatifs pour les PGL abdominaux rétro-
péritonéaux et surtout une faible sensibilité pour la localisation des métastases. En effet,
dans une large étude prospective Timmers et coll. (83) ont démontré une supériorité de la
TEP-18FDG pour la détection des métastases, en particulier chez les patients avec mutation
SDHB.
Plus récemment, la TEP/TDM au 68Ga-SSA semble s’imposer dans de nombreuses situa-
tions, par rapport à la 18F-FDOPA que ce soit pour les localisations cervicales (84,85) ou
l’ensemble des localisations extra-surrénaliennes (86). La TEP/TDM au 68Ga- SSA semble
également très performante pour les PPGL métastatiques, notamment avec mutation
SDHB (87). Néanmoins, ces études sont de petite taille et souvent rétrospectives. La place
des 68Ga- SSA reste à l’heure actuelle encore à définir.
mine D et de la calciurie. Le bilan d’imagerie est réalisé uniquement chez les patients avec
hyperparathyroïdie primaire confirmée biologiquement avec indication opératoire, dans le
but de guider le geste chirurgical, et de poser l’indication d’une CMI en cas de maladie
uni-glandulaire.
Le bilan d’imagerie de première ligne généralement proposé consiste en l’association de
l’échographie parathyroïdienne et de la scintigraphie des parathyroïdes au 99mTc-sestamibi
avec une sensibilité variant entre 66 et 90 % en fonction du type de protocole (soustrac-
tion ou double phase, TEMP avec ou sans TDM) et du caractère uni- ou pluri- glandulaire
de la maladie (93–96). Il permet le recours à la CMI lorsque les deux modalités mettent en
évidence un adénome parathyroïdien unique et de localisation concordante. En cas de
MPG ou de discordance entre les examens diagnostiques préopératoires, la CBE restait
jusqu’à récemment la technique de référence.
VIII. - CONCLUSION
Depuis de nombreuses années, l’imagerie fonctionnelle fait partie de la prise en charge
des pathologies endocriniennes. Le développement de la TEP/TDM a permis une amélio-
ration considérable de la sensibilité de ce type d’imagerie, la rendant incontournable dans
la prise en charge des tumeurs neuroendocrines, que ce soit pour leur localisation, le bilan
d’extension de la maladie, le pronostic ou l’évaluation de la réponse au traitement. Les
données ainsi obtenues permettent d’optimiser la prise en charge des patients en influant
sur la décision thérapeutique.
Ces nouveaux traceurs (18F-FDOPA, 68GA-SSA, 18F-FCholine) ont cependant encore
une disponibilité limitée et nécessitent notamment pour les 68GA-SSA et la 18F-FCholine
une validation sur de plus larges cohortes.
Enfin, avec les radiotraceurs marqués au 68Ga, se développe actuellement le concept de
compagnon théranostique, utilisant le peptide couplé à un radionucléide choisi en fonction
de la cible tumorale et permettant une thérapie ciblée de la maladie tumorale détectée lors
de l’imagerie fonctionnelle en couplant le peptide utilisé en imagerie à un radionucléide
émetteur α ou β.
Un meilleur accès à ces nouveaux traceurs et à la radiopeptidothérapie est attendu dans
les années à venir. La place de ces nouvelles techniques sera à préciser dans la stratégie de
surveillance des patients, l’évaluation de la réponse thérapeutique ainsi que dans les
algorithmes décisionnels thérapeutiques.
1.
Sorbonne Université, Service de Médecine Nucléaire,
Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83 boulevard de l’Hôpital,
75013 Paris
2.
Service de Médecine Nucléaire, CHU-Hôtel Dieu, 1 place
Alexis Ricordeau, 44093 Nantes Cedex 1
3.
CRCNA, INSERM UMR892, 8 quai Moncousu, BP 70721,
44007 Nantes Cedex 1
4.
Inserm U970, Centre de Recherche Cardiovasculaire de
Paris, Hôpital Européen Georges Pompidou, 56 rue
Leblanc, 75015 Paris
* Ces auteurs ont participé à part égale à ce travail
ABSTRACT
Nuclear medicine has been implicated in diagnosis and treatment of several endocrine
disorders for several decades. With recent PET tracer’s development, functional imaging
plays a major role in endocrine tumours enabling with a high performance their localisation,
characterisation and extension. Moreover, some peptides as somatostatin analogs can also be
used for peptide receptor radionuclide therapy. In this context, Gallium-68 labelled somatos-
tatin analogs (68Ga-SSA) can help to tailor therapeutic choices and follow the response to
treatment in the so-called theranostic approach. This review emphasizes the usefulness of
three novel PET tracers (18F-Fcholine, 18F-FDopa and 68Ga-SSA) for primary hyperpara-
thyroidism and neuroendocrine tumours.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
Mots-clés : thyroxine, traitement combiné, hypothyroïdie, sensibilité tissulaire, qualité de vie, polymorphismes.
INTRODUCTION
DE LA NORMALITÉ À LA DYSFONCTION
Au-delà des études d’impact des hyperthyroïdies ou hypothyroïdies frustes, de nombreux
travaux se sont attachés à rechercher, chez des sujets dont la TSH est « normale », un
impact des variations de concentration des hormones thyroïdiennes à l’intérieur de l’inter-
valle de normalité sur la morbi-mortalité et la qualité de vie des patients.
Ainsi les quintiles supérieurs de T4l sont-ils associés à une surmorbidité cardiovasculaire
chez les sujets âgés, à un risque majoré d’ostéopénie, à des anomalies métaboliques, voire à
des anomalies cognitives ou des modifications de la qualité de vie (30-34).
On imagine ainsi un continuum entre la stricte normalité (TSH et hormones thyroï-
diennes à la médiane), la normalité limite (TSH normale et hormones thyroïdiennes aux
limites de l’intervalle de référence), la dysfonction fruste (TSH anormale et hormones
thyroïdiennes dans la norme) et dysfonctions avérées (TSH et hormones thyroïdiennes
hors des normes).
Les normes proposées pour les dosages hormonaux thyroïdiens correspondent aux
limites entre lesquelles se situent les valeurs de 95 % de la population indemne de patho-
logie thyroïdienne. Cependant, les variations de TSH et d’hormones thyroïdiennes d’un
individu sont beaucoup plus limitées. Chaque individu sain a son propre intervalle de
normalité, pour la TSH, la T4 et la T3 (35). De telle sorte que la valeur de la TSH mesurée
chez un individu peut correspondre, pour cet individu, à une dysfonction fruste, alors
même qu’elle est toujours entre les limites inférieures et supérieures de la norme pour la
population de référence.
En outre, les normes elles-mêmes ont été largement discutées. Quelques éléments démo
graphiques et environnementaux peuvent en faire varier les limites pour une même
méthode de dosage. Elles dépendent de la structure ethnique de la population étudiée, des
apports en iode de cette population et de l’âge des sujets étudiés. Le caractère strict ou non
de la notion de normalité (absence d‘anticorps antithyroïdiens) (6, 36, 37).
On admet une dérive liée à l’âge de la TSH vers les valeurs plus élevées (données d’études
épidémiologiques et de suivi de cohortes), et surtout cette dérive est associée à une plus
LA FIABILITÉ DE LA MESURE
Sous ce terme de fiabilité, on entend ici la notion de variabilité technique (quelle varia-
bilité de résultats pour un même échantillon dosé plusieurs fois, dans le même laboratoire,
avec la même méthode, ou dans des laboratoires différents ?) (45-48) ainsi que la variabi-
lité individuelle déjà mentionnée (35, 49).
Ainsi, il a été proposé que pour évaluer le niveau personnel de régulation de la TSH d‘un
individu, avec une précision de 90 %, 25 prélèvements seraient nécessaires pour prendre
en compte la variabilité individuelle et la variabilité technique (35, 49). Pour évaluer son
niveau personnel de référence pour la T4 ou la T3 (totales), il faudrait cinq prélèvements
(35, 49).
Les outils de mesure de la TSH, de la T4 et de la T3 (hormones libres en France, totales
aux États-Unis) sont fiables et suffisants pour détecter des anomalies franches ; ils sont
probablement insuffisamment fiables et précis, lorsqu’on cherche à affiner et personnaliser
le traitement substitutif d’un patient qui reste symptomatique. En pratique, le dosage de la
T3l est réputé peu fiable (45, 50).
différentes causes d’une hypothyroïdie impactent différemment la qualité de vie et, singu-
lièrement l’indication d’une chirurgie thyroïdienne, maladie bénigne ou cancéreuse, n’a
pas le même retentissement, à profondeur égale de l’hypothyroïdie (90-94). On doit aussi
rappeler que l’appréciation de la qualité de vie des patients par les patients ou les praticiens
diffère quelque peu, de façon surprenante avec une vision plus négative chez les prati-
ciens ! (95).
TO FEELING
by Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ and Patrice RODIEN
(Angers - France)
ABSTRACT
The treatment of overt or subclinical hypothyroidism by Levothyroxine restores the
concentration of TSH easily. However, the feeling of a number of patients suggests that the
replacement therapy is not perfect, which is also suggested by circulating T4 andT3 measu-
rement. Blood concentration of free T4 an T3 do not precisely reflect their tissue concentra-
tions and action which are largely modulated by the action of local deiodinases, especially
deiodinase 2. Trials combining T4 and T3 did not demonstrate a clinical superiority and
carry the risk of prolonged overtreatment. Polymorphisms in genes involved in the thyro-
tropic axis regulation and signalization by thyroid hormones may contribute to a phenotype
of increased sensitivity to minimal variations in thyroid hormones concentrations and ground
the difficulty to restore a felt euthyroidism.
Key-words : thyroxin, combined treatment, hypothyroidism, tissue sensitivity, quality of life, polymorphisms.
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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)