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Sous la direction de Philipp e Chanson, JACQUES ORGIAZZI, JEAN-LOUIS THOMAS

MISES AU POINT CLINIQUES


D’ENDOCRINOLOGIE,
NUTRITION ET MÉTABOLISME
2018

Conférences présentées aux


TRENTE-HUITIÈMES JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE
D’ENDOCRINOLOGIE et MALADIES MÉTABOLIQUES
tenues à Paris les 23 et 24 novembre 2018
SOUS LE PATRONAGE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D’ENDOCRINOLOGIE

LES ÉDITIONS DE MÉDECINE PRATIQUE


17, rue Souham, 19000 TULLE
Tél. 05.55.26.18.87 – Fax 05.55.26.07.36

Prix : 60 e

La matière publiée dans cet ouvrage est répertoriée dans la base PASCAL de l’INIST
TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)
TRENTE-HUITIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
et MALADIES MÉTABOLIQUES
SOUS LE PATRONAGE DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D’ENDOCRINOLOGIE

SOMMAIRE

Hirsutisme : bilan et traitement........................................................................................... 5


Anne BACHELOT (Paris)

La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace.............. 15


Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT,
Philip BOHME et Bruno GUERCI (Nancy)

Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes............................................................... 33


Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU, Capucine DE MARCELLUS,
Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT, Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU,
Laure CAZABAT et Marie-Laure RAFFIN-SANSON (Boulogne)

Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique............................... 51


Emmanuel COSSON (Paris)

Bilan et traitement d’une gynécomastie.............................................................................. 63


Dominique MAITER (Bruxelles)

Place de l’inflammation dans la pathogénie et le traitement du diabète de type 2 :


focus sur l’interleukine 1............................................................................................. 75
Marc Y DONATH (Bâle, Suisse)

Diagnostic de l’acromégalie : observations à partir d’une base de données internationale


(Liège acromegaly survey - LAS) ............................................................................... 81
Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS (Liège, Belgique)

Artériopathie périphérique diabétique................................................................................ 93


Kamel MOHAMMEDI (Bordeaux, France)

Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons,


abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée
familiale....................................................................................................................... 107
Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI
et Philippe MOULIN (Lyon)

Paris, 23-24 novembre 2018


4

Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité....................................... 125


Patrice DARMON (Marseille)

Obésité sans risque métabolique mythe ou réalité ?.......................................................... 147


Joane MATTA, Claire RIVES LANGE, Claire CARETTE
et Sébastien CZERNICHOW (Paris)

Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ?....................................... 155


Anne GOMPEL (Paris)

Quels traitements avant la surrénalectomie pour phéochromocytome ?.......................... 169


Claude LENTSCHENER (Hôpital Cochin, Paris)

Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit
en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et
thérapeutiques............................................................................................................ 179
Jacques YOUNG (Paris)

Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage


de la stéatose des diabétiques de type 2.................................................................. 199
Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND
et Bruno VERGES (Dijon)

Hyperthyroïdies - Modalités de la prise en charge en France............................................ 211


Bernard GOICHOT (Strasbourg)

La cachexie expliquée aux endocrinologues....................................................................... 217


Jean-Paul THISSEN, Isabelle MASSART et Audrey LOUMAYE (Bruxelles)

Stratégies de préservation de la fertilité en cas de traitement anticancéreux.................. 225


Christine DECANTER (Lille)

Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie.......................................................... 227


Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER
et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE (Paris, Nantes)

Hormones thyroïdiennes : de la concentration mesurée aux effets ressentis.................... 249


Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ et Patrice RODIEN (Angers)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


HIRSUTISME : BILAN ET TRAITEMENT

par Anne BACHELOT a (Paris)

L’hirsutisme est un motif fréquent de consultation en endocrinologie et en gynécologie.


n n n n n n n n n n n n n

L’évaluation clinique est importante et doit conduire à des explorations hormonales.


Celles-ci sont utiles, quelle que soit la sévérité de l’hirsutisme, afin de poser un diagnostic
étiologique avec des conséquences en termes de traitement, de fertilité, voire de conseil
génétique dans le cas d’une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en
21-hydroxylase. Le traitement de l’hirsutisme repose sur l’utilisation de plusieurs types de
médicaments visant, soit à bloquer la production des androgènes ovariens, soit à bloquer
leurs actions périphériques, associés à des traitements locaux.

Mots-clés : Hirsutisme, syndrome des ovaires polykystiques, hyperandrogénie, hyperplasie congénitale des
surrénales par déficit en 21-hydroxylase, anti-androgènes.

L’hirsutisme est un motif fréquent de consultation en endocrinologie et en gynécologie.


Ce symptôme ne doit jamais être négligé ou banalisé, et mérite une enquête étiologique
rigoureuse, à la recherche de l’affection responsable (1, 2).

1. DÉFINITION
L’hirsutisme est défini comme le développement excessif de la pilosité dans des terri-
toires anatomiques qui en sont normalement dépourvus chez la femme : visage, thorax,
ligne blanche, régions fessière et intergénito-crurale. Il est important de le distinguer de
l’hypertrichose, définie comme le développement excessif de la pilosité dans des zones qui
en sont normalement pourvues chez la femme et qui ne sont pas androgénodépendantes,
parfois secondaire à des prises médicamenteuses (glucocorticoïdes ou ciclosporine).
Certaines études suggèrent que l’hirsutisme peut toucher jusqu’à 6 à 8% des femmes en
âge de procréer (3, 4), mais l’on ne dispose pas actuellement d’étude française concernant
la prévalence de ce symptôme.

2. PHYSIOPATHOLOGIE
Le cycle pilaire se découpe en 3 phases : l’anagène est la phase de croissance du poil,
durant 2-6 ans pour les cheveux, 3 à 6 mois pour le corps ; le catagène, phase de régression
du follicule pileux, durant 2 à 3 semaines pour les cheveux et la pilosité du corps ; le
télogène, phase de repos durant 3 à 4 mois.
L’hirsutisme est un phénomène androgéno-dépendant, résultant de l’interaction entre
les concentrations d’androgènes circulantes et la sensibilité du follicule pileux aux andro-
gènes. La peau possède, d’une part, un récepteur aux androgènes (RA) et, d’autre part, les

Paris, 23-24 novembre 2018


6 Anne BACHELOT

enzymes capables de convertir les précurseurs de la testostérone, déhydroépiandrostérone


(DHEA) et Δ4 androstènedione, en testostérone et de métaboliser ce stéroïde en un andro­
gène plus actif, la dihydrotestostérone (DHT). Cette dernière étape fait intervenir la
5α-réductase qui possède deux isoenzymes : type 1 (Chr 5) et 2 (Chr 2), présentes dans la
peau et le follicule pileux. Les androgènes exercent un effet indirect sur le follicule pileux,
celui-ci étant dépourvu de RA. La DHT agit de plusieurs manières sur le poil : augmenta-
tion de la production de sébum par la glande sébacée qui est riche en RA, différenciation
terminale du poil, irréversible, et prolongation de la phase anagène de croissance du
poil  (5).
La présence et l’importance de l’hirsutisme résultent d’une interaction entre la concen-
tration d’androgènes et la sensibilité du follicule pileux aux androgènes. Cependant, les
concentrations d’androgènes circulants et le degré d’hirsutisme ne sont pas corrélés (5) :
ainsi, certaines femmes ayant une hyperproduction androgénique donnée peuvent avoir
un hirsutisme sévère alors que d’autres n’auront qu’une pilosité légèrement augmentée.
Ainsi, devant une femme hirsute, après avoir éliminé un apport exogène d’androgènes,
deux cadres physiopathologiques seront envisagés : soit une hypersécrétion d’androgènes,
provenant de l’ovaire ou de la surrénale, soit une sensibilité cutanée accrue de la peau à des
concentrations circulantes normales d’androgènes (1, 2). Ce dernier cadre est appelé
« hirsutisme idiopathique », mais ce diagnostic doit rester un diagnostic d’élimination.

3. ÉVALUATION CLINIQUE
Il s’agit d’un temps important de l’évaluation puisqu’elle permet déjà une orientation
diagnostique.
L’interrogatoire doit préciser l’ancienneté de l’hirsutisme, son apparition par rapport à
l’installation de la puberté, une installation péri-pubertaire étant en faveur d’un syndrome
des ovaires polykystiques ou d’un déficit enzymatique surrénalien, alors qu’un hirsutisme
récent peut suggérer sur une pathologie tumorale. L’histoire des cycles doit ensuite être
détaillée, en particulier leur régularité, la présence d’épisode de spanioménorrhée ou
d’aménorrhée ou d’une infertilité. L’enquête familiale recherchera des antécédents d’hirsu-
tisme et d’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21 hydroxylase. On recher-
chera une prise médicamenteuse (androgènes, anabolisants) pouvant être responsable de
l’hirsutisme.
La sévérité de l’hirsutisme est classiquement évaluée par le score modifié de Ferriman-
Gallwey (6), où à chacune des neuf régions androgéno-sensibles est assignée une cotation
de 0 à 4 (Fig. 2). Un score supérieur à 8 définit arbitrairement l’hirsutisme. Son évaluation
reste néanmoins subjective et semi-quantitative. En outre, il peut être pris en défaut chez
les patientes blondes ou récemment épilées. Enfin, il est important de noter ces critères
n’ont été établis que dans une population de femmes blanches. Ce système de score reste
cependant utilisé dans les études cliniques et thérapeutiques.
Les autres signes cliniques de l'hyperandrogénie sont l'acné, la séborrhée et l'alopécie
androgénique. Il est important de souligner que l’acné prise isolément est un symptôme
relativement banal, surtout chez l'adolescente et la jeune femme. Il est considéré comme
un témoin d’hyperandrogénie lorsqu’il est inflammatoire, sévère, à topographie masculine
et touche au moins deux sites différents et s’accompagne de troubles du cycle menstruel.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hirsutisme : bilan et traitement 7

Enfin on cherchera des signes en faveur d’une étiologie, en particulier en faveur d’un
syndrome de Cushing. La présence d’un acanthosis nigricans, témoignant d’une résistance
à l’insuline, oriente vers un syndrome des ovaires polykystiques.

4. EXPLORATION HORMONALE
L’évaluation hormonale est toujours indispensable. En présence de cycles menstruels, les
examens doivent être pratiqués au troisième jour du cycle ; chez une femme en aménor-
rhée, les examens peuvent être pratiqués soit indifféremment, soit entre trois et cinq jours
après une hémorragie de privation induite par un progestatif. Les recommandations
portant sur l’évaluation hormonale à réaliser devant un hirsutisme font l’objet d’un
consensus en France (7) :
- L e dosage de la testostérone totale est recommandé en première intention (7, 8)
Il s’agit en effet du principal androgène actif circulant, dont les concentrations varient
peu au cours du cycle. Il fait, par ailleurs, l’objet d’un contrôle de qualité en France (Pro.
Bio.Qual). La méthode de dosage recommandée chez ces femmes est la méthode de dosage
radio-immunologique après traitement préalable de l’échantillon (extraction ou extrac-
tion + chromotographie), en attendant l’utilisation plus large de la spectrographie de
masse (7, 8). Néanmoins, la grande majorité des laboratoires utilisent des méthodes
directes (RIA) sans extraction préalable. Les valeurs trouvées chez les femmes présentant
une hyperandrogénie et celles des femmes normales se chevauchent de manière impor-
tante. La diversité des kits, l’absence de normes claires en fonction de la tranche d’âge et
des groupes ethniques et de seuils consensuels compliquent aussi le diagnostic d’hyperan-
drogénie. Dans l’avenir, le dosage par spectrométrie de masse couplée à la chromatogra-
phie liquide (LC-MS/MS) devrait permettre d’améliorer ces performances, mais est encore
loin d’être disponible partout. Le dosage de la testostérone libre ne doit pas être utilisé du
fait de son manque de précision (7).
En cas de surpoids ou d’hyperinsulinisme, le dosage de la testostérone totale peut être
pris en défaut du fait d’une diminution de la protéine porteuse des stéroïdes sexuels, la
SHBG (Sex Hormone Binding Globulin), ce qui se traduira par une testostérone totale non
augmentée, malgré une augmentation de la production de ce stéroïde sexuel. La mesure de
la SHBG plasmatique permet de calculer un index de testostérone libre (FAI) très utilisé
(T/SHBG x 100) (7).

- Le dosage de la Δ4-androstènedione
Le dosage de la Δ4-androstènedione plasmatique doit être réalisé dans des laboratoires
spécialisés qui en ont bien établi les valeurs de référence. Son intérêt par rapport à la
mesure de la testostérone est mal évalué pour déterminer l’étiologie de l’hirsutisme. Une
élévation des androgènes prédominant sur la Δ4 androstènedione s’observe aussi bien dans
un syndrome des ovaires polykystiques, que dans un déficit en 21 hydroxylase.

- Dosage de la 17 hydroxyprogestérone (17OHP)


Le dépistage de l’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase
repose sur le dosage plasmatique de la 17OHP, en début de phase folliculaire, le matin
entre 8 et 10 heures, à distance de la prise d’hydrocortisone ou de corticoïdes (9, 10) de
base et après test au Synacthène® immédiat. Le dosage de base de la 17OHP ne semble pas
être suffisant pour dépister 100% des patients, rendant le test au Synacthène® nécessaire.

Paris, 23-24 novembre 2018


8 Anne BACHELOT

L’augmentation de la 17-hydroxyprogestérone au-delà de 10 ng/ml après Synacthène® fait


suspecter la présence d’un déficit en 21-hydroxylase et doit conduire à une analyse molécu-
laire du gène CYP21A2.

- Le dosage du Sulfate de déhydroépiandrostènedione (SDHEA), du cortisol libre


urinaire et le freinage minute à la dexaméthasone
Lorsque les concentrations de testostérone totale sont très élevées, dépassant deux fois
la limite supérieure de la normale, en l’absence d’élévation de la SHBG (hyperthyroïdie,
médicaments comme les estrogènes ou SERMs, dysfonction hépatique), la présence d’une
tumeur surrénalienne ou ovarienne doit être évoquée (7, 8). L’histoire clinique sera bien
étudiée, et des explorations complémentaires (mesure de la SDHEA, du cortisol libre
urinaire des 24 heures, imagerie surrénalienne voire IRM pelvienne) seront réalisées. Le
syndrome de Cushing sera recherché en cas de suspicion clinique par le dosage du cortisol
libre urinaire des 24 heures ou un test de freinage minute par la dexamethasone.

- Dosages de LH, FSH, estradiol et prolactine compléteront le bilan


Les pathologies thyroïdiennes et l’hyperprolactinémie, très fréquentes chez les femmes
en âge de procréer doivent être cherchée en cas de troubles du cycle.

5. DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE
5.1 Hirsutismes d’origine ovarienne
- Syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) (80 à 90 %)
Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est une pathologie courante affectant
entre 5 et 15 % des femmes en période d’activité génitale dans les pays industrialisés (3, 4,
8, 11). Il constitue la principale cause de troubles des règles et d’infertilité de la femme. Ce
syndrome associe une hyperandrogénie à des troubles du cycle menstruel (cycles irrégu-
liers ou absence de règles) et une infertilité.
Décrit pour la première fois en 1935 par Stein et Leventhal, il s’agit d’un syndrome
hétérogène qui doit son nom de « polykystique » à un aspect bosselé des ovaires observé à
l’époque où l’on pratiquait des explorations chirurgicales chez ces femmes, mais on sait à
présent que cette appellation est impropre et qu’il s’agit en fait d’ovaires multifolliculaires.
Le SOPK reste un syndrome et, en tant que tel, aucun critère diagnostique n’est suffisant
à lui seul pour le diagnostic clinique (12). De même, le SOPK reste un diagnostic d’exclu-
sion. Les critères diagnostiques du SOPK ont évolué avec le temps (Tableau 1) (12, 13), ils
Tableau 1. - Evolution des critères retenus pour le diagnostic de SOPK

NIH 1990 Rotterdam 2003 AE-PCOS 2006


Présence de deux critères Présence de deux des trois Présence de deux critères
critères suivants :
Hyperandrogénie clinique et/ou Hyperandrogénie clinique et/ou Hyperandrogénie clinique et/ou
biologique biologique biologique
Oligo-Anovulation Oligo-Anovulation Dysfonction ovarienne
Ovaires polykystiques à (oligo-anovulation ou ovaires
l’échographie polykystiques à l’échographie)

AE-PCOS : Androgen Excess PolyCystic Ovary Syndrome Society

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hirsutisme : bilan et traitement 9

ont fait l’objet d’une Conférence de Consensus internationale et reposent encore


aujourd’hui sur les « critères OPMK), par l’hyper-insulinisme et par le système de dosage
utilisé. Sur la base de ces données, la mesure des concentrations de LH plasmatique ne
doit pas être considérée comme nécessaire pour le diagnostic clinique du SOPK.
Plus récemment, une concentration élevée d’AMH (hormone anti-mullérienne) a été
proposée comme un bon marqueur du SOPK, en particulier chez les femmes pour qui
l’échographie n’est pas contributive (23). L’AMH est produite chez la femme par les cellules
de la granulosa des follicules préantraux. Le dosage de l’AMH est très corrélé au compte
folliculaire antral, et est donc un bon marqueur de la réserve ovarienne (24). Les concen-
trations sériques élevées d’AMH chez les patientes avec SOPK, sont en étroite relation
avec l’excès de follicules antraux de 2 à 5 mm en échographie. Les techniques de dosage
de l’AMH sont en évolution, elles ne sont pas encore stabilisées ni standardisées. Actuel-
lement, on ne dispose donc pas de seuil consensuel et universel des concentrations d’AMH
pouvant prédire le diagnostic de SOPK (2, 14). Par ailleurs, le dosage de l’AMH ne fait pas
encore partie des examens remboursés par l’Assurance Maladie, et ne fait pas partie des
définitions officielles du SOPK, bien qu’il soit très utilisé en pratique courante.
De nombreuses études récentes ont montré que le SOPK était fréquemment associé à un
surpoids ou à une obésité. Cette dernière est, par exemple, trouvée chez 30 à 70 % des
patientes dans les études Nord-Américaines, mais chez 10 à 30 % seulement dans patientes
dans une étude espagnole (25, 26). Nous ne disposons pas d’étude spécifique en France. De
nombreuses études récentes ont montré que le SOPK était associé fréquemment à un état
d'insulino-résistance (25, 26). Le dépistage du diabète de type 2 doit être systématique
chez ces patientes.
En pratique, il faut insister sur l’importance, avant de porter un diagnostic définitif de
SOPK chez une femme, d'avoir éliminé une autre pathologie ovarienne ou surrénalienne
à l’origine d’une production excessive d'androgènes.

- Tumeurs virilisantes de l’ovaire (0.2%)


Les tumeurs virilisantes de l’ovaire se révèlent par un hirsutisme avec une virilisation
souvent importante, associé le plus souvent une aménorrhée, les symptômes étant d’appa-
rition récente. L’androgène sécrété préférentiellement est la testostérone. Une concentra-
tion de testostérone supérieure à deux fois la limite supérieure de la normale fait suspecter
le diagnostic de tumeur ovarienne. En l’absence d’imagerie (échographie ou IRM
pelvienne) montrant clairement une tumeur ovarienne, un cathétérisme simultané des
veines ovariennes doit être réalisé, afin de faire la part entre une tumeur ovarienne et une
hyperthécose ovarienne ou un syndrome des ovaires polykystiques, qui en constituent les
principaux diagnostics différentiels (27, 28). Il est primordial de faire réaliser cet examen
par des équipes ayant une bonne expérience de ce geste. Au plan histologique, il s’agit
principalement de tumeurs du mésenchyme et des cordons sexuels (tumeur de Sertoli-
Leydig ou tumeur de Leydig).

- Hyperthécose ovarienne
Il s’agit d’une forme sévère de syndrome des ovaires polykystiques, par hyperplasie
majeure du stroma et de la thèque associée à la présence d’îlots de cellules thécales lutéi-
nisées dans le stroma.

Paris, 23-24 novembre 2018


10 Anne BACHELOT

5.2 Hirsutismes d’origine surrénalienne


5.2.1 Hyperplasie congénitale surrénalienne par déficit en 21-hydroxylase (2 à 4 %)
L’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) dans sa forme non classique est une
mala­die autosomique récessive fréquente, avec des variations importantes de la prévalence
selon l’origine ethnique des patientes. Ainsi, la prévalence de la maladie est estimée à
3,7 % parmi la population juive ashkénaze, 2 % parmi la population d’Europe centrale,
0,1 % parmi la population caucasienne new-yorkaise (29, 30). Elle peut se manifester en
période prépubertaire, par une pubarche précoce, ou en période péri ou post-pubertaire
par un hirsutisme et/ou des troubles des règles, il s’agit alors de forme dite “tardive” ou non
classique. L’HCS peut être asymptomatique, aussi nommée cryptique et diagnostiquée lors
d’une enquête familiale. Le diagnostic est suspecté sur le dosage de la 17OHP avant et
après Synacthène®, puis est confirmé par l’analyse génétique du gène CYP21A2 (31). Les
patientes atteintes d’une HCS à révélation tardive peuvent être homozygotes ou, le plus
souvent, hétérozygotes composites, l’expression de la maladie étant déterminée par la
mutation la moins sévère. Il est important de rappeler l’importance du dépistage de l’hété-
rozygotie du gène CYP21A2 du conjoint des patientes atteintes d’HCS tardive et présen-
tant (au moins) une mutation sévère afin d’évaluer le risque de donner naissance à un
enfant atteint d’une forme classique et d’être en mesure de proposer une prise en charge
périconceptionnelle et anténatale adaptée.

5.2.2 Tumeurs virilisantes de la corticosurrénale


Les tumeurs virilisantes surrénaliennes se révèlent par un hirsutisme et un syndrome de
virilisation d’apparition récente et de progression rapide, associé à des troubles du cycle
menstruel (16). Ces tumeurs peuvent être responsables d’un hypercorticisme associé.
D’après une étude française, 6% des patients ayant un corticosurrénalome se présente-
raient avec une hypersécrétion isolée d’androgènes lors du diagnostic et 47 % auraient une
sécrétion mixte de cortisol et d’androgènes (32). L’hyperandrogénie biologique est impor-
tante avec une concentration plasmatique de testostérone souvent supérieure à deux fois
la normale. Cette élévation de la concentration plasmatique de testostérone peut être le
résultat d’une sécrétion directe de ce stéroïde par la tumeur ou plus fréquemment d’une
conversion périphérique des précurseurs de la testostérone, sécrétés en excès : Δ4 andros-
tènedione, DHEA ou SDHEA. Le diagnostic sera facilement confirmé par un scanner des
surrénales.

5.2.3 Syndrome de Cushing


En dehors des tumeurs corticosurrénaliennes, un syndrome de Cushing ACTH-dépen-
dant peut entraîner un hirsutisme, du fait du caractère stimulant de l’ACTH sur la zone
réticulée qui peut provoquer une sécrétion d’androgènes excessive. Le tableau d’hypercor-
ticisme est alors souvent au premier plan.

5.3 Hirsutisme idiopathique (4 à 6 %)


Ce diagnostic d’élimination se définit par une fonction ovarienne strictement normale
et l’absence d’hyperandrogénie biologique. Au plan clinique, l’hirsutisme est isolé et
ancien, préexistant à la puberté mais souvent aggravé par celle-ci. On retrouve fréquem-
ment des antécédents familiaux et une origine méditerranéenne (3, 4). La normalité de la
fonction ovarienne doit être vérifiée par une courbe thermique ou un dosage de progesté-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hirsutisme : bilan et traitement 11

rone en 2e partie de cycle. L’échographie ovarienne retrouve des ovaires de taille normale,
sans signe de SOPK.

6. TRAITEMENT
Le traitement de l’hirsutisme repose sur l’utilisation de plusieurs types de médicaments
visant, soit à bloquer la production des androgènes ovariens, soit à bloquer leurs actions
périphériques, associés à des traitements locaux. Ce traitement fait actuellement l’objet
d’un consensus publié par la Société Française d’Endocrinologie (34).

6.1 Contraception œstroprogestative


Les œstroprogestatifs (OP) contiennent de l’éthinyl estradiol (EE) qui exerce un double
blocage hypothalamique et hypophysaire des gonadotrophines et un progestatif qui assure
également un effet antigonadotrope hypothalamique et possiblement hypophysaire. Les
concentrations de LH sont supprimées ce qui induit une diminution de la production
thécale d’androgènes. Les concentrations de SHBG sont augmentées, ce qui réduit la
fraction libre des androgènes circulants. Le progestatif a un degré d’activité progestatif,
androgénique ou antiandrogénique variable in vitro (34).
L’utilisation préférentielle d’un OP par rapport à un autre a des bases théoriques. Ainsi
les progestatifs dits de 3ème génération comme le norgestimate, le désogestrel et le gestro-
dène ont une activité androgénique faible comparé aux progestatifs de 2ème génération, le
levonorgestrel. Néanmoins, les études cliniques disponibles n’ont jamais montré que les
progestatifs à faible activité androgénique étaient plus efficaces dans le traitement de l’hir-
sutisme. En pratique, les OP sont le traitement de première intention de l’hirsutisme
mo­déré de la femme non-ménopausée (34-36), en débutant comme pour toute contracep-
tion par une COP de 2ème génération.

6.2 Acétate de cyprotérone


L’acétate de cyprotérone (CPA) est un progestatif puissant qui induit une baisse des
concentrations plasmatiques de testostérone et de delta4-androstènedione par inhibition
de la LH. Il bloque également les effets périphériques des androgènes en inhibant leur
liaison à leur récepteur. Sa demi-vie est longue, du fait d’une accumulation dans le tissu
adipeux. Il est largement utilisé en France et en Europe dans le cadre d’une AMM pour le
traitement de l’hirsutisme chez la femme. Le CPA ne modifie pas les paramètres métabo-
liques ni les facteurs de la coagulation mais néanmoins expose à des signes désagréables de
carence œstrogénique et à un risque osseux à long terme, rendant indispensable la
pres­cription concomitante d’un estrogène. Actuellement, la question de l’augmentation de
risque de développement de méningiome sous ce traitement est posée et devrait faire
l’objet de recommandations.
En pratique, le CPA à 50 mg/j, 20 jours par mois, associé à un estrogène est le traitement
de première intention de l’hirsutisme modéré à sévère de la femme non-ménopausée
(34-36).
Ce traitement est généralement bien toléré, toutefois, la survenue possible d’une aménor-
rhée secondaire doit être expliquée aux patientes. Par ailleurs, des saignements irréguliers

Paris, 23-24 novembre 2018


12 Anne BACHELOT

et de faible abondance (spotting), des métrorragies, une dyspareunie, une baisse de la


libido peuvent être observés. Une prise de poids peut s’observer.
D’autres traitements, hors AMM, peuvent parfois utilisés en cas d’intolérance ou de
contre-indication des traitements précédents, dans des centres spécialisés, comme la spiro-
nolactone. La spironolactone est utilisée comme anti-hypertenseur du fait de ses propriétés
anti-aldostérone. Cette molécule possède aussi des effets anti-androgéniques et est
beau­coup utilisée dans cette indication aux États-Unis, alors qu’en France, elle est
beaucoup moins prescrite d’autant plus que ce traitement n’a pas d’AMM dans cette
indication (34-36). La dose initiale habituellement utilisée est de 100 mg par jour. A ces
doses, les effets secondaires sont rares : polydipsie, polyurie, nausées, céphalées, asthénie,
gastrite, spotting...
Ce traitement, sous couvert d’une contraception, est donc efficace et peut être intéres-
sant notamment chez les patientes hypertendues. Il pourra être proposé en deuxième
intention en cas d’effets secondaires ou de contre-indication du CPA dans l’hirsutisme
modéré à sévère.

6.3 Traitements locaux


La croissance du poil est un phénomène cyclique lent, nécessitant d’évaluer l’efficacité
des traitements sur plusieurs mois, et d’utiliser en parallèle des traitements symptoma-
tiques. Les études sont néanmoins limitées dans le temps et dans le choix des produits.
L’épilation électrique (électrolyse) consiste à insérer une aiguille dans le follicule pileux
puis d’y déclencher une décharge électrique qui détruit le bulbe germinatif. Ce traitement
est efficace mais douloureux et coûteux. Il est donc réservé habituellement au traitement
de l’hirsutisme du visage. Le traitement par photothermolyse (laser alexandrite,
neo­dymium:yttrium-aluminum-garnet (Nd:YAG), et lasers ruby ou d’autres sources type
IPL) s’est développé, où l’énergie suit le poil pigmenté et détruit les cellules papillaires du
derme (37). L’utilisation de ce type de laser semble surtout efficace en cas de peau claire et
de poils foncés. Des effets secondaires à type de rougeur, d’hyper ou d’hypopigmentation
peuvent s’observer dans 15-25% des cas. Plusieurs séances sont habituellement nécessaires,
habituellement de plus en plus espacées.
L’eflornithine (Vaniqa®) est disponible depuis 2001 et plus récemment en Europe et en
France (non remboursé). Il s’agit d’un topique ralentissant la croissance du poil, inhibiteur
irréversible de la L-ornithine décarboxykase, enzyme essentielle à la synthèse des polya-
mines et à la division cellulaire, modulée par les androgènes et nécessaire à la croissance
du poil. Ce traitement n’enlève pas les poils existants mais ralentit, prévient la repousse.
L’effet est observable après 2 mois d’utilisation mais est réversible à l’arrêt du traitement, au
bout de 2 mois en général. Les effets secondaires sont modérés (irritation, erythème…) et
rares (10 % des cas). Son intérêt, au vu de son coût et de son efficacité réversible à l’arrêt,
reste discuté.

CONCLUSION
L’hirsutisme est une pathologie fréquente, chronique et parfois invalidante dont la prise
en charge s’est améliorée avec l’utilisation conjointe de traitements médicamenteux et

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hirsutisme : bilan et traitement 13

locaux. Le bilan étiologique est indispensable, afin de ne pas méconnaitre une pathologie
tumorale ou génétique.

a
Service d'Endocrinologie et Médecine de la Reproduction,
IE3M, Hôpitaux Universitaires Pitié Salpêtrière - Charles
Foix, 47-83 boulevard de l’hôpital, 75013 Paris, France
anne.bachelot@aphp.fr

Adresse pour la correspondance : Anne Bachelot, Service d'Endocrinologie et Médecine de la


Reproduction, IE3M, Hôpitaux Universitaires Pitié Salpêtrière - Charles Foix, 47-83 boulevard de l’hôpital,
75013 Paris, France - Email : anne.bachelot@aphp.fr

HIRSUTISM : DIAGNOSIS AND TREATMENT


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Anne BACHELOT  (Paris - France)

ABSTRACT
Hirsutism is a common clinical problem in women, and it reflects the interaction between
circulating androgen concentrations, local androgen concentrations, and the sensitivity of
the hair follicle to androgens. Polycystic ovary syndrome is the most common causes of the
condition. Treatment of hirsutism should be based on the degree of excess hair growth
presented by the patient and in the pathophysiology of the disorder. Treatment includes lifes-
tyle therapies.

Key-words : hirsutism, 21-hydroxylase deficiency, polycystic ovary syndrome, androgen, hyperandrogenism,


insulin resistance, obesity.

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14 Anne BACHELOT

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


LA GASTROPARÉSIE DIABÉTIQUE : UN DIAGNOSTIC
PRÉCIS POUR UN TRAITEMENT EFFICACE

par Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT,


Philip BOHME et Bruno GUERCI (Nancy)

La gastroparésie diabétique, composante de la neuropathie autonome, est la


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

manifestation la plus fréquente de la neuropathie digestive. Le diabète est responsable


d’environ un quart des gastroparésies. Les signes digestifs sont souvent frustes mais il faut
savoir évoquer une gastroparésie devant toute situation d’instabilité métabolique, comme
les hypoglycémies postprandiales. Nausées, vomissements, satiété précoce, plénitude
gastrique, ballonnements font partie des signes cliniques les plus fréquents. Au-delà de la
clinique, l’examen de référence pour le diagnostic de gastroparésie est la scintigraphie
gastrique. D’autres examens sont disponibles mais ne font pas l’objet de consensus
internationaux. Le traitement de base consiste à équilibrer le diabète et à fractionner les
repas, en réduisant le volume des prises alimentaires, la teneur en fibres non digestibles et
en lipides de l’alimentation. Les médicaments tels que le métoclopramide et la dompéridone
peuvent être essayés, mais leur efficacité est souvent limitée. L’utilisation de nouveaux
agonistes sérotoninergiques ou d’autres molécules à effet motiline-like comme l’érythro­
mycine est une alternative très séduisante et efficace sur le moyen terme. D’autres
approches thérapeutiques sont en cours de développement et de validation, comme les
analogues de la ghréline, les injections de toxine botulique, la pyloroplastie laparoscopique
ou la pyloromyotomie endoscopique. Enfin, la neuromodulation gastrique est une tech­­
nique qui consiste à appliquer une stimulation électrique continue de haute fréquence et
basse énergie au niveau de l’antre gastrique à l’aide d’un système totalement implanté par
laparoscopie pour traiter les formes cliniques réfractaires aux traitements conven­tionnels.
Néanmoins, une prise en charge nutritionnelle lourde est parfois nécessaire dans les formes
les plus sévères. La voie entérale doit être alors privilégiée (sonde nasojéjunale puis
éventuelle jéjunostomie). En cas d’inefficacité, en particulier chez les patients ayant une
neuropathie grêlique, la nutrition parentérale au long cours est parfois justifiée.

Mots-clés : gastroparésie diabétique, vidange gastrique, neuropathie végétative, motilité, pylore, scintigraphie,
prokinétiques, diététique, myotomie, neuromodulation gastrique.

En 2007, Michael Camilleri introduisait son article du New England Journal of


Medicine  (1) sur cette observation :
« A 36-year-old man with a 20-year history of type 1 diabetes mellitus, background retino-
pathy, peripheral sensory neuropathy, and nephropathy presents with a history of several months
of nausea and vomiting of undigested food and bile, during which time he lost 4 kg. On physical
examination (performed 1 hour after the patient has eaten), his blood pressure is 130/80 mm
Hg while he is lying down and 110/60 mm Hg while he is standing. His abdomen is not tender.
There is epigastric distention, but no splash is audible when the upper abdomen is shaken. How
should the gastrointestinal symptoms of this patient be evaluated and treated? »

Paris, 23-24 novembre 2018


16 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

Cette description typique d’un patient diabétique de type 1 atteint d’une neuropathie
digestive invalidante à type de gastroparésie, est une situation fréquente que les diabétolo-
gues sont amenés à rencontrer dans leur consultation. Malheureusement, les signes
cliniques aspécifiques, la complexité de cette complication, les difficultés d’établir un
diagnostic positif et enfin les limites ou la méconnaissance des solutions thérapeutiques,
aboutissent souvent à une insuffisance de la prise en charge de ces patients. Le présent
article vise à donner des pistes claires et pragmatiques pour le diagnostic de cette compli-
cation, et pour sa prise en charge.

INTRODUCTION
La gastroparésie est un état chronique caractérisé par une vidange gastrique retardée, en
l’absence d'obstruction mécanique. Cette pathologie est parfois associée au diabète mais se
rencontre aussi dans un certain nombre d’autres pathologies. Dans certains cas où aucune
étiologie n’est retrouvée, on parle de gastroparésie idiopathique. Elle se manifeste clinique-
ment par des symptômes digestifs pouvant être particulièrement invalidants. Dans le cas
du diabète, il s’agit d’une complication souvent mal connue ou mal identifiée mais qu’il
faut évoquer car elle retentit inévitablement sur l’équilibre glycémique : cela se traduit par
une instabilité glycémique, une fréquence plus élevée d’hypoglycémies notamment en
période postprandiale, ou des épisodes d’hypoglycémies sévères, ou une difficulté à la
récupération des épisodes hypoglycémiques. Les symptômes digestifs peuvent dans ce cas
être totalement absents.

PHYSIOLOGIE DE L’ESTOMAC
L’estomac est constitué de deux régions dont les actions sont différentes mais complé-
mentaires : le fundus qui est une zone de stockage de l’alimentation, l’antre et le pylore qui
assurent broyage et évacuation du bol alimentaire [Figure 1] (2). L’estomac est donc un
muscle innervé dont la fonction motrice est coordonnée avec celle du pylore pour assurer
une fragmentation et une progression régulière du bol alimentaire, assurant la régularité

Fundus
Cellules de Cajal
Vagues lentes
(fréquence de 3x/min.)
vagues
péristaltiques

m
corps
énu py
od lor
du e

an
tre

Figure 1. - Anatomie du muscle gastrique (d’après Koch et al.[1]).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 17

de la digestion. Cette vidange gastrique est également influencée par la viscosité du bol
alimentaire et sa densité calorique, expliquant certaines variations selon que l’alimenta-
tion est solide et/ou liquide et plus ou moins riche en graisses et en fibres. Chez des
individus sains, l'activité naturelle rythmique contractile de l'estomac sert à mélanger,
réduire et déplacer le contenu de l'estomac du fundus à l'antre. Cette activité péristaltique
provient de la région du pacemaker de l'estomac sur la grande courbure (cellules de Cajal)
et se propage vers le bas, vers l'antre et le pylore à une fréquence contrôlée par le rythme
naturel gastrique électrique appelé la vague gastrique lente, qui arrive à la fréquence
d'environ trois cycles par minute. Des vagues gastriques lentes arrivent en continu, tandis
que l'activité de contractions péristaltiques arrive seulement après une ingestion alimen-
taire. Grâce à cette activité rythmique péristaltique, l'estomac se vide de façon régulière et
prévisible après l'ingestion d'alimentation. Approximativement la moitié du contenu de
l’estomac sera extériorisé vers le duodénum en une à deux heures et seulement une très
faible partie de ce repas sera conservée après quatre heures.

DÉFINITION DE LA GASTROPARÉSIE
La gastroparésie est un trouble gastrique neuromusculaire qui se traduit par une vidange
ralentie de l'alimentation contenue dans l'estomac. Ce ralentissement est en rapport avec
une perturbation de la motricité gastrique et/ou grêlique. La gastroparésie est associée à
différents symptômes du haut appareil digestif, incluant nausées chroniques, vomisse-
ments fréquents, satiété précoce, ballonnements, gêne ou douleurs épigastriques. Ces
conditions pathologiques empêchent le patient de manger normalement et peuvent mener
à la déshydratation, à l’anorexie et à la perte de poids avec des déséquilibres électrolytiques
voire une dénutrition. Dans les cas les plus sévères, les patients peuvent nécessiter une
hospitalisation, la prescription d’antiémétiques intraveineux et une nutrition parentérale.

PHYSIOPATHOLOGIE DE LA GASTROPARÉSIE DIABÉTIQUE


La gastroparésie diabétique s’inscrit dans une entité plus large, celle de la neuropathie
autonome diabétique. La neuropathie végétative est bien connue chez ce type de patient,
participant à la dénervation cardiaque avec le risque de troubles du rythme et de mort
subite, l’hypotension orthostatique, la neuropathie vésicale avec résidus post-mictionnels
et la neuropathie génito-urinaire. La neuropathie digestive, avec sa composante gastrique,
la gastroparésie, est aussi une complication de la neuropathie végétative et peut conduire
à une difficulté de prise en charge du diabète. Elle est en général moins symptomatique que
chez le sujet non diabétique atteint de neuropathie végétative. En revanche, elle est
susceptible d’interférer avec la qualité de l’équilibre métabolique et la stabilité du diabète.
À ce titre, on retrouve une bonne corrélation entre les éléments de la neuropathie
auto­nome cardiaque et la gastroparésie, alors que ce n’est pas le cas avec les autres
paramètres de la neuropathie périphérique.
La physiopathologie de la gastroparésie diabétique est complexe et mal connue. Le
système nerveux autonome comprend un système afférent et efférent avec de longues
fibres efférentes dans le système parasympathique et des fibres courtes amyéliniques post-
ganglionnaires dans le système sympathique. La gastroparésie est liée en partie à une
atteinte du nerf parasympathique, ce qui explique que les manifestations cliniques sont
proches de celles observées après vagotomie. Cependant, des modifications de sécrétion
d’hormones comme la motiline et la ghréline interviennent également dans le processus
physiopathologique (3, 4, 5). Cela se traduit par une relaxation excessive au niveau du

Paris, 23-24 novembre 2018


18 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

fundus, une hypomotricité antrale, une mauvaise synchronisation antro-pyloro-duodé-


nale, et enfin une motricité duodénale anormale [Figure 2] (6). Par ailleurs, des avancées
physiopathologiques récentes ont été réalisées dans ce domaine : l’altération des sécrétions
d’insuline et d’IGF1 entraîne une diminution du SCF (Stem Cell Factor)(7), seul facteur
de croissance connu pour les cellules de Cajal dont la diminution voire la quasi-disparition
est retrouvée chez les sujets atteints de gastroparésie diabétique (8).
Chez des patients diabétiques, le retard de vidange gastrique rend le contrôle glycémique
difficile en particulier lors de l’emploi d’analogues rapides de l’insuline. De même, la
glycémie agit sur la vidange gastrique : ainsi il est maintenant bien établi qu’une hypergly-
cémie au-delà de 16 mmol/l ralentit la vidange gastrique, et qu’au contraire, une hypogly-
cémie l’accélère (9).

Fonctions physiologiques gastriques Gastroparésie diabétique


Stockage
Relaxation excessive du fundus

Oesophage Fundus

Corps
pylorospasme
Pylore Perte des
Pacemaker Cellules de Cajal
Cellules de Cajal
Rythme électrique
de base = 3 cts/min

Broyage et Hypomotricité
Antre antrale
évacuation Motricité duodénale
Régulateur du débit anormale
et anti-reflux
Duodénum Mauvaise synchronisation
antro-pyloro-duodénale
Figure 2. - Physiopathologie de la gastroparésie diabétique

ÉTIOLOGIES DES GASTROPARÉSIES


Un certain nombre de pathologies sont susceptibles d’engendrer une atteinte végétative
ou une neuropathie végétative et peuvent par conséquent entraver le fonctionnement
normal de la vidange gastrique qui est accélérée ou, au contraire, retardée dans le temps,
voire différée de plusieurs heures. En dehors de l’inconfort digestif, ces manifestations de
neuropathie végétative sont généralement sans conséquence, ce qui explique qu’elles
restent souvent méconnues, non explorées, non diagnostiquées et donc non traitées.
Plusieurs étiologies sont classiquement rapportées, par ordre de fréquence : idiopathique,
diabète, post-chirurgie (essentiellement gastrique), maladie de Parkinson, vascularites. Les
données épidémiologiques sur ce sujet sont toutefois rares en dehors de deux études menées
à partir de populations hospitalières (10, 11). Les données issues d’une population de ville
sont potentiellement différentes de celles-ci. Parmi les patients atteints de gastroparésie, il
est nécessaire d’individualiser ceux qui ont des symptômes sévères réfractaires aux traite-
ments médicamenteux conventionnels. Cette population constituerait environ 1 % de

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 19

l’ensemble des patients atteints de gastroparésie. La gastroparésie diabétique toucherait de


30 à 65 % des patients diabétiques, quel que soit le type de diabète (2, 12). Les diabétiques
de type 1 seraient cependant plus concernés que les diabétiques de type 2 (50  % vs 30  %).
L’évaluation exacte de la prévalence de la gastroparésie diabétique est difficile, selon que le
diagnostic est posé sur les signes cliniques seuls ou sur la méthode de référence que
constitue la scintigraphie digestive, voire les signes électriques. Un nombre non négli-
geable de patients diabétiques asymptomatiques peuvent présenter des anomalies de la
vidange gastrique objectivées par la scintigraphie digestive (13, 14). À l’inverse, les nausées,
la sensation de satiété précoce ou la dysphagie ne sont pas toujours associées à un retard
de vidange gastrique. Cette pathologie évolue de façon aléatoire, perturbant la prise en
charge du diabète autant pour le patient dans sa gestion quotidienne que le médecin dans
le choix et l’évaluation thérapeutiques. Ainsi, la gastroparésie est susceptible de devenir le
problème majeur à gérer chez certains patients diabétiques. Elle est pourtant méconnue,
sous-diagnostiquée et donc non traitée.

QUAND PENSER À UNE GASTROPARÉSIE DIABÉTIQUE ?


Devant toute instabilité du diabète en particulier devant une fréquence anormalement
élevée d’hypoglycémies en situation postprandiale, chez un patient suspect de présenter
une neuropathie végétative, c’est-à-dire ayant un diabète ancien associé à d’autres manifes-
tations de neuropathie, soit périphérique, mais surtout végétative, il faut indéniablement
évoquer la présence d’une gastroparésie diabétique. En effet, si la vidange gastrique se fait
avec retard, il y aura hypoglycémie postprandiale et hyperglycémie tardive avec une diffi-
culté thérapeutique puisque la voie digestive est insuffisamment fonctionnelle. Ces obser-
vations ont été particulièrement bien mises en évidence lors d’enregistrements continus
du glucose par capteur (15).
L’interrogatoire peut retrouver des signes fonctionnels frustes à type de pesanteur
abdominale et /ou de sensation de plénitude, ces signes cliniques étant retrouvés les plus
fréquemment (54 % des patients). Le mode d’expression clinique est variable mais regroupe
principalement une satiété précoce (60 % des cas), une dilatation ou un ballonnement de
l'estomac (75 %), des nausées (92 %) et/ou vomissements post-prandiaux (84 %), des
douleurs abdominales (46 %), ou une symptomatologie de reflux gastro-œsophagien avec
régurgitations (11). Dans une série de 101 patients diabétiques type 1 et type 2, publiée en
2001, les symptômes digestifs sont retrouvés avec une fréquence relative de 83 % (16).
Cette moindre fréquence pourrait s’expliquer par la lenteur d’installation de la pathologie
et par l’existence de la neuropathie. Par ailleurs avant l’utilisation des analogues de l’insu-
line et des schémas de type basal-bolus qui permettent plus de souplesse dans la diététique,
le fractionnement alimentaire était souvent de règle dans un but de prévention des
hypoglycémies qu’il y ait ou non une gastroparésie associée. Le recours aux schémas tout-
analogues, et la suppression des collations non souhaitées par les patients, a donc pu
démasquer un certain nombre de gastroparésies jusqu’alors méconnues. Au total, c’est
surtout le contexte et en particulier des difficultés d’équilibration glycémique qui doivent
faire rechercher une gastroparésie diabétique.

RELATION ENTRE GLYCÉMIE ET VIDANGE GASTRIQUE


Cette relation prend toute son importance lorsqu’il s’agit d’authentifier le retard de
vidange gastrique, avec la nécessité de réaliser les tests dans un contexte d’équilibre glycé-
mique acceptable.

Paris, 23-24 novembre 2018


20 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

L’hyperglycémie est un frein à la vidange gastrique, alors que l’hypoglycémie accélère la


vidange. Cet effet de la concentration de glucose sur la vidange gastrique a été authentifié
chez des patients diabétiques de type 1 pour des valeurs élevées de glycémie autour de 16 à
20 mmol/l comparativement à la normoglycémie, que ce soit pour la phase solide comme
pour la phase liquide (17). Mais l’impact de l’hyperglycémie est retrouvé pour des valeurs
beaucoup plus modestes (8,00 vs 4,00 mmol/l), que ce soit dans des populations non diabé-
tiques comme les diabétiques de type 1 (18). Inversement, la qualité de la vidange gastrique
retentit sur les excursions glycémiques postprandiales, rendant compte de 35 % de la
variance du pic glycémique postprandial (19).
L’influence directe du contrôle glycémique sur la vidange gastrique a amené à proposer
un protocole de stabilisation glycémique au cours de l’épreuve de repas-test associé à la
scintigraphie gastrique. Ainsi, selon les auteurs, il est préconisé de réaliser un transit isoto-
pique uniquement si la glycémie se situe entre 0 ,75 et 2,75 g/l (20) ou strictement inférieure
à 1,80 g/l sans proposer de valeur seuil inférieure (21, 22). Le glucose modifie l’activité du
nerf vague, même à des concentrations physiologiques (4,00-8,00 mmol/l), l’hyperglycémie
modifie la contraction antro-pylorique et atténue l’efficacité des médicaments prokiné-
tiques (18, 23, 24).
Gardons cependant à l’esprit que, même si l’hyperglycémie ralentit la vidange gastrique
de 19 à 51 % selon les critères utilisés (lag phase, T50 % ou T100min.)(18, 25), la neuropathie
végétative ‘per se’ explique des retards de l’ordre de 270 à 410 % sur les mêmes critères de
jugement lorsqu’on compare des diabétiques atteints de gastroparésie et des sujets non
diabétiques [Tableau 1]. Enfin, l’effet de la normalisation glycémique sur les paramètres de
vidange (fraction évacuée, index moteur gastrique) a été mis en évidence récemment (26).
Tableau 1. - Comparaison de l’impact de l’hyperglycémie vs normoglycémie et de la neuropathie
végétative sur les critères de vidange gastrique

Normoglycémie vs Gastroparésie diabétique vs


hyperglycémie témoins

Lag phase é 40 – 51 % é 340 %

T 50 % é 20 – 43 % é 410 %

T 100 min. é 19 – 33 %

% rétention à 4H é 380 %

T total é 270 %

COMMENT FAIRE LE DIAGNOSTIC DE GASTROPARÉSIE CHEZ LE


DIABÉTIQUE ?
Un diagnostic de gastroparésie est généralement fait sur la base de l’historique des
symptômes et de la maladie : nausées, ballonnements, satiété précoce sont associés à cette
pathologie, mais parfois la symptomatologie est peu spécifique ou évocatrice. On peut
s’aider de questionnaires qui analysent la fréquence et la sévérité des signes rencontrés. En
parler avec le patient est, quoi qu’il en soit, une première étape qui peut amener le patient
à prendre conscience de la relation qui existe entre ses signes cliniques et le déséquilibre
de son diabète. Le diagnostic de gastroparésie diabétique doit être évoqué chez tout patient
ayant un déséquilibre glycémique persistant non expliqué par ailleurs.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 21

Pour quantifier les symptômes, on dispose de différents questionnaires ou échelles de


mesure des symptômes de gastroparésie. Parmi eux, le GCSI (Gastroparesis Cardinal
Symptom Index) est sans doute le plus complet, car les symptômes sont « gradés » par le
patient en fréquence et en sévérité sur les 15 jours précédents (27). D’autres questionnaires
sont également accessibles, notamment le « Abell Scoring » avec 3 grades de sévérité (28)
ou le GIQLI dont l’intérêt principal consiste en sa traduction validée en français (29). Ce
score digestif de qualité de vie comprend 36 items portant sur les symptômes, le statut
physique, les émotions, les problèmes sociaux, et l’effet des traitements médicaux. Le score
est compris entre 0 et 144, plus le score est haut, meilleure est la qualité de vie. La valida-
tion du questionnaire français fait état d’un score de 96 pour les volontaires sains contre
126 en moyenne pour les patients. Cependant ces scores ne répondent pas à une exhaus-
tivité des symptômes à recueillir, notamment pour le GIQLI qui ne prend pas en compte
la fréquence et sévérité des épisodes de vomissements.

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Pour affiner le diagnostic, et apporter une certitude sur les altérations supposées de la
vidange gastrique, il faut alors avoir recours à des explorations complémentaires.
1.   L’endoscopie digestive réalisée le plus souvent pour une autre raison, met en évidence à
distance d’un repas, et après une période de jeûne respectée, la présence de résidus
alimentaires, voire la présence d’un bézoard. Même si cette situation est évocatrice de
gastroparésie, l’endoscopie n’est en aucun cas l’examen complémentaire permettant
d’en assurer le diagnostic. En effet, dans une série portant sur 26 patients dont la gastro-
parésie avait été authentifiée par la scintigraphie et/ou l’électrogastrographie, la fibros-
copie digestive était normale dans 50 % des cas, retrouvait des signes inflammatoires
dans 34 % des cas et des signes de rétention dans seulement 8 % des cas (30).
2.  Le test de vidange gastrique utilisant des isotopes stables (scintigraphie gastrique)
constitue l’examen de référence pour affirmer l’existence d’un retard à la vidange
gastrique et donc la présence d’une gastroparésie selon la définition de valeurs normales
de vidange gastrique (31). Cette méthode reste cependant chère et difficile à mettre en
œuvre se heurtant à plusieurs problèmes techniques. L’examen est effectué le matin à
jeun, pour éviter la présence de résidus alimentaires. Selon des critères diagnostiques
internationaux, le retard de vidange gastrique est établi sur la détermination du T50 %
(temps nécessaire pour que la moitié du contenu de l'estomac soit éliminé) ou du
pourcentage de rétention à deux ou quatre heures après l'ingestion de ce repas (anormal
si le pourcentage de rétention dépasse 60 % à la 2ème heure et 10 % à la 4ème heure)(31).
Cet examen a fait l’objet d’un travail de consensus dans sa réalisation et son interpréta-
tion (32). Le repas test contient 120 g de blanc d’œuf mélangés avec 18,5-37 MBq
99m
Tc-colloïdes, 2 tranches de pain blanc toasté, 30 g de confiture et 120 ml d’eau (pris
en 10 minutes), correspondant au total à 255 kcal (72 % glucides, 24 % protéines, 2 %
graisses, 2 % fibres).
Un certain nombre de recommandations sont à suivre pour la réalisation de cet examen
initial lorsque l’objectif est de poser un diagnostic positif :
• Patient à jeun depuis minuit la veille, tabac inclus.
• Repas mangé en moins de 10 minutes.
• Glycémie idéalement inférieure à 2,75 g/l.

Paris, 23-24 novembre 2018


22 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

• D  emi-dose d’insuline de la dose habituelle d'analogue rapide le matin chez les diabé-
tiques.
• Manger au moins 50 % de chaque composant du repas.
• Arrêt des prokinétiques 2 jours avant (métoclopramide, dompéridone, érythromy-
cine) sauf si l’objectif est d’évaluer leur efficacité.
• Arrêt des analgésiques opioïdes, anticholinergique et antispasmodique 2 jours avant.
• Arrêt des autres médicaments susceptibles d'avoir un effet sur la vidange gastrique
également 2 jours avant : atropine, nifédipine, progestérone, octréotide, théophyl-
line, benzodiazépines, phentolamine.
• Femmes en pré-ménopause : réaliser l’étude dans les 10 premiers jours du cycle (effets
des hormones sur la motilité gastro-intestinale).
• Interrogatoire : attention aux antécédents de chirurgie bariatrique ou gastrectomie
totale/partielle, hernie hiatale, noter si présence de vomissements ou non.
Une gamma-caméra mesure la vitesse à laquelle le radio-marquage passe de la cavité
gastrique vers l’intestin. Il importe de s’assurer de la standardisation de l’épreuve si les
tests sont pratiqués dans différents centres, de la teneur liquide ou solide du repas test,
et surtout du niveau glycémique avant et au cours du repas test. En effet, la variabilité
intra- et inter-sujet à cette épreuve dynamique est importante. La reproductibilité de la
scintigraphie gastrique semble même diminuée dans la population diabétique : le
meilleur critère serait le T50 % avec 93 % de reproductibilité. L’étude de la vidange des
solides est plus sensible que celle des liquides.
Selon les critères de Bonta et al. (33), il est également possible de définir si la poursuite
de l’examen sur 4 heures est nécessaire ou non. En d’autres termes, si la rétention
gastrique est > 65 % à la 2ème heure, le test est jugé pathologique ; si la rétention est <
45 %, il est considéré comme normal ; entre les deux, l’étude complète de la vidange
gastrique est à réaliser sur 4h. Enfin, ce test donne la possibilité de grader la gastropa-
résie à 4h : Grade 1 (faible) : rétention de 11 à 20 %, Grade 2 (modérée) : rétention de
21 à 35 %, Grade 3 (sévère) : rétention de 36 à 50 % portant également l’indication de
neuromodulation gastrique, et Grade 4 (très sévère) : rétention > 50 %. Alors que les
prokinétiques doivent être normalement arrêtés 2 jours avant le test lorsque celui-ci a
un objectif diagnostique, ce n’est plus obligatoire pour un suivi de gastroparésie préala-
blement identifiée.
3.   Test respiratoire au 13C-acide octanoïque. Ce test possède une bonne reproductibilité
puisque la variabilité inter-individuelle est de 24 % et la variabilité intra-individuelle de
15 % dans une évaluation faite au sein d’une population de sujets témoins (34). Le test
consiste à prendre au cours d’un repas de 75 à 91 mg d’acide octanoïque marqué au 13C
et incorporé à un jaune d’œuf, cuit en omelette et ingéré. Le marquage est stable et des
échantillons d’air exhalé sont prélevés toutes les 15 minutes ou demi-heures pendant 3
à 4 heures selon les protocoles en vigueur. La teneur en carbone marqué est mesurée le
plus souvent par spectrométrie de masse. Ce test fournit des informations proches de
celles de la scintigraphie, à savoir, un T50 % de vidange gastrique et un T lag phase corres-
pondant à la phase de latence entre l’ingestion et le début de la phase de vidange
gastrique. Il est intéressant de noter l’assez bonne corrélation entre cette méthode et la
méthode « dite de référence » c’est à dire la scintigraphie sur deux critères tels que la lag
phase et le T50 % (r = 0.603 – 0.8257 ; p < 0.001-0.0001). En comparaison avec la méthode
scintigraphique, la sensibilité du test respiratoire est de 1.00 et la spécificité de 0.73 chez
des patients diabétiques. Elle est un peu moins bonne dans une population de sujets

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 23

témoins (sensibilité = 67 % et spécificité = 80 %)(34). Plus récemment, le test a été


évalué avec une scintigraphie simultanée chez 38 volontaires en bonne santé et
129  patients suspectés d'une vidange gastrique retardée. Avec une spécificité de 80 %,
la sensibilité pour prédire correctement la catégorie de vidange gastrique en utilisant
des métriques de test respiratoire par rapport à une scintigraphie simultanée était de
89 % (35). Enfin, le test respiratoire ne semble pas être affecté par les niveaux de glucose
circulant à la différence de la scintigraphie gastrique (36).
4.   Électrogastrographie : cette technique consiste à enregistrer l’activité électrique générée
par le muscle lisse gastrique. Cette méthode souffre d’une absence de standardisation
du matériel utilisé (électrodes cutanées ou internes), et de l’absence de consensus sur le
placement des électrodes de surface ainsi que sur l’interprétation de l’amplitude et de la
fréquence du signal enregistré. L’enregistrement électrique est effectué pendant 15 à 60
minutes après une première phase de jeûne puis un repas-test de 250-300 kcal.
5.   Récemment, la Food and Drug Administration (FDA) a approuvé la vidéo-capsule qui
détecte le temps de vidange gastrique en identifiant le changement soudain du pH à
l'entrée dans le duodénum (37).
On peut aussi recourir à des moyens utilisant des produits radio-opaques, soit liquides,
soit solides tel que le transit baryté, en faisant des clichés radiologiques à heures
régulières pour visualiser la vitesse de vidange de l’estomac. Cependant, ce type
d’examen est d’interprétation plus difficile car la vidange gastrique est un élément
complexe avec vidange des liquides en premier, puis des solides. De toute évidence, le
repas test isotopique semble d’une meilleure qualité que le suivi radiologique.
Une fois le diagnostic posé, la prise en charge demeure encore aujourd’hui empirique
dans la majorité des situations.

QUELS TRAITEMENTS POUR LA GASTROPARÉSIE DIABÉTIQUE ?


Il s’agit avant tout d’un traitement symptomatique et empirique. Parmi toutes les straté-
gies thérapeutiques, certaines sont plus ou moins efficaces et acceptables à long terme pour
le patient. On peut distinguer celles relevant d’une approche symptomatique simple,
palliative plus complexe et enfin celles visant à restaurer une motilité gastrique satisfai-
sante. Par rapport à la thérapeutique hypoglycémiante du patient diabétique, rappelons les
mesures thérapeutiques simples à appliquer :
1.  Un fractionnement de l’alimentation, alimentation de faible volume, plutôt semi-
liquide que solide a démontré son efficacité dans la réduction de la fréquence et de la
sévérité des symptômes, en particulier chez le patient diabétique (38, 39), en privilé-
giant par ailleurs une hydratation et le maintien d’un apport suffisant d’électrolytes (du
fait du risque de troubles ioniques liés aux vomissements dans les situations cliniques
sévères), et en limitant la consommation d’aliments riches en lipides et en fibres alimen-
taires non solubles qui ralentissent la vidange gastrique. Un point essentiel consiste
également à traiter une constipation opiniâtre qui aggrave considérablement les
symptômes de gastroparésie du fait du rétrocontrôle digestif. L’alcool et le tabac sont à
proscrire (22).
2.   Sur le plan nutritionnel, le recours à des compléments nutritionnels oraux est parfois
nécessaire pour limiter le risque de dénutrition dans les formes sévères. Il est par consé-
quent indispensable de l’évaluer, car ce risque peut s’observer chez des patients diabé-
tiques de type 1 dont le poids a diminué lentement mais significativement dans les

Paris, 23-24 novembre 2018


24 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

dernières années, à la suite de mise en place de mesures de restriction alimentaire


secondaires à des troubles digestifs invalidants. En ce qui concerne la nutrition artifi-
cielle, il faut préférer une nutrition entérale que parentérale pour des raisons de coûts
et de risques infectieux à moyen et long cours. Le « tubing » par jéjunostomie, est
parfois précédé par une alimentation par sonde nasogastrique souvent peu efficace du
fait de l’intolérance gastrique, et ne doit pas dépasser un débit de 60 ml/h à raison de 12
à 15H/jour (22).
3.  Spécifiquement vis-à-vis du diabète, le recours à des insulines rapides régulières au
moment des repas est à privilégier avec une contre-indication relative à l’utilisation des
analogues rapides de l’insuline : l’objectif est de faire coïncider, pour autant que cela soit
réalisable, la cinétique de vidange de l’estomac avec la cinétique d’insuline d’une durée
d’action de 5 à 7 heures. En revanche, pour les patients traités par pompe à insuline, les
analogues rapides de l’insuline sont à utiliser en programmant l’envoi des bolus
prandiaux selon des modes alternatifs (bolus combinés ou mieux, bolus carrés sur 2 à 3
heures en règle générale). Dans cette situation de bolus carrés, l’objectif de glycémie
postprandiale est décalé et coïncide avec la fin d’action du bolus prandial d’insuline.
Enfin, on ne dispose pas de données sur la tolérance des analogues lents de l’insuline
dans cette population de patients gastroparétiques, mais en pratique courante, leur
utilisation ne semble pas poser de problème particulier.
L’équilibre glycémique est important pour stabiliser voire faire régresser les signes de la
neuropathie autonome, comme nous l’avons vu, de par l’influence de la glycémie sur les
paramètres de la vidange gastrique. Ainsi, l’étude STENO 2 portant sur la prise en
charge globale des patients diabétiques de type 2 a montré une réduction significative
du taux de progression de la neuropathie diabétique dans le groupe intensifié, alors
qu’aucune amélioration n’a été rapportée sur les paramètres de la neuropathie périphé-
rique (40). La neuropathie autonome présente pour 28 % des patients au début de l’étude
a eu un taux de progression plus faible de 30 % vs 54 % soit une réduction du risque
relatif de 63 % après un suivi moyen de 7,8  années.
4.   Les médications prokinétiques : Il s’agit du métoclopramide, seul prokinétique recom-
mandé par la FDA (antagoniste de la dopamine avec une certaine action d’agoniste
sérotoninergique) pour une durée n’excédant pas 12 semaines. La dompéridone, égale-
ment antagoniste dopaminergique, serait plus efficace en termes de symptomatologie et
de qualité de vidange gastrique avec moins d’effets indésirables (dans moins de 1 %),
mais son efficacité nécessiterait d’être confirmée par des études d’intervention. En effet,
le métoclopramide est réputé favoriser la survenue de dyskinésies, de dystonie, et de
signes extra-pyramidaux, et la dompéridone associée à de rares cas de mort subite par
probable allongement de l’espace QT, générateur de troubles du rythme cardiaque. Une
alerte de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament) limite l’utilisation
de la dompéridone à une posologie maximale de 100 mg x 3/jour. Enfin, une nouvelle
formulation du métoclopramide en spray nasal est actuellement à l’étude, alors que de
nouveaux agonistes sérotoninergiques sont en cours de développement et d’analyse de
leur efficacité dans la gastroparésie diabétique, comme le velusetrag ou le prucalorpide.
5.   Les antibiotiques macrolides, tels que l’érythromycine et l’azythromycine possèdent un
effet motiline-like qui permet de restaurer une activité motrice gastrique : leur utilisa-
tion en traitement oral chronique a été proposé à raison de 500 mg avant chaque repas
pour l’érythromycine mais se heurte à un phénomène de tachyphylaxie qui en réduit
l’efficacité à court terme (dans les 2 à 4 semaines). Certaines équipes proposent par

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 25

conséquent des séquences de traitement de 15 jours par mois, ou la prescription de ce


traitement uniquement lors de crises de nausées et vomissements. Son intérêt est
surtout reconnu en pré-opératoire afin de vider les gros estomacs dysautonomiques et
de réduire le risque de régurgitation chez les patients diabétiques avec gastroparésie. Le
traitement consiste alors à effectuer 200 mg en IV deux heures avant l’induction
anesthésique. Le traitement de référence consiste alors en des séquences de 5 jours avec
IV lente en pré-prandial à 125 à 250 mg (selon la tolérance et les éventuelles contre-
indications), diluée dans 100 ml de NaCl, en 20-30 minutes, à effectuer avant les repas,
donc 3 fois par jour (effet rémanent parfois observé sur 3 à 6 mois). Les contre-indica-
tions absolues d’administration conjointe sont : la dompéridone et l’halopéridol. S’agis-
sant d’un inhibiteur du cytochrome P450 CYP3A, l’érythromycine interagit avec le
métabolisme de plus de 80 médicaments avec des risques d’effets indésirables dont
certains graves comme l’allongement du QT. Des précautions sont donc à prendre avec
l’utilisation conjointe de médicaments comme le fluconazole, kétoconazole, vérapamil
et diltiazem. L’arrêt de la dompéridone est indispensable 24 à 48 h avant et à ne
reprendre que 10 jours après la fin de la cure (41). La correction d’une hypokaliémie,
d’une hypomagnésémie avant le début du traitement sont aussi nécessaires du fait du
risque d’induction de troubles du rythme cardiaque. Enfin, ce traitement est contre-
indiqué en cas de cardiopathie instable : insuffisance coronarienne, ACFA, insuffi-
sance cardiaque, cardiomyopathie. Ces cures d’érythromycine sont réalisées hors AMM
et doivent par conséquent faire l’objet d’une information claire auprès du patient et
consignées dans les dossiers cliniques et auprès de la pharmacie hospitalière ou en
hospitalisation à domicile. L’azythromycine, de longue durée d’action, serait plus
efficace que l’érythromycine, sans inhibition du cytochrome P450, et associée à moins
d’effets indésirables, mais son utilisation est plus ou moins abandonnée (41).
Tous ces médicaments prokinétiques utilisés en monothérapie, peuvent aussi être
associés en bithérapie. Toutefois, leur efficacité est relative comme en témoignent
certains essais conduits chez des diabétiques de type 1 dont la gastroparésie avait été
authentifiée par une scintigraphie gastrique (32). Mais généralement les études sont
effectuées sur de courtes périodes de temps (3 mois environ) alors même que la théra-
peutique, si elle se révèle efficace, doit être maintenue au long cours.
6.   La voie de la ghréline : Il existe une diminution du relargage de ghréline dans la gastro-
parésie diabétique. Cette altération s’explique par une dysfonction vagale (5). Une
étude montre que l’administration intraveineuse de ghréline (5 pmol/kg.min en IV
continue sur 2 heures) chez 10 patients diabétiques sous insuline (DT1) dans un essai
randomisé en double aveugle vs placebo et cross-over peut améliorer la vidange
gastrique chez des patients atteints de gastroparésie diabétique. Ceci représente une
nouvelle voie thérapeutique mais l’amélioration de la vidange gastrique n’est pas
corrélée à une amélioration de la symptomatologie digestive (43). Plus récemment, le
développement de la relamoréline (RM-131), agoniste des récepteurs de la ghréline
inhibe l'iléus gastrique postopératoire ou retarde la vidange gastrique chez les rats et les
primates sains. Dans les modèles de troubles gastro-intestinaux chez les rats, la relamo-
réline était de 600 à 1800 fois plus puissante que les autres agents mimétiques de la
ghréline pour augmenter la vidange gastrique. Dans une étude de phase II d'une durée
de 4 semaines chez des patients diabétiques de type 1, la relamoréline a également
accéléré la vidange gastrique et réduit les symptômes gastro-intestinaux supérieurs chez
des patients présentant des vomissements initiaux élevés (44). Dans une étude de phase
2B sur 12 semaines, portant sur une plus large série de 393 diabétiques de type 1 et 2

Paris, 23-24 novembre 2018


26 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

avec gastroparésie clinique (score clinique > 2 vomissements sur 15 jours) et breath test
pathologique, la relamoréline améliore 4 symptômes importants associés à la gastropa-
résie (douleurs abdominales, nausées, ballonnements abdominaux, pesanteur postpran-
diale) mais pas significativement les vomissements, malgré de bons répondeurs. Une
amélioration des constantes de vidange gastrique de 10 % est aussi rapportée (45).
Rappelons ici qu’en 2015, la Food and Drug Administration a publié des recommanda-
tions pour l’évaluation de l’efficacité des médicaments chez les patients atteints de
gastroparésie (46).
7.   Les interventions pyloriques
• L
 ’injection intra-pylorique de toxine botulique : la toxine botulique est utilisée avec
succès dans l’achalasie où il existe une hypertonie du sphincter inférieur de l’œso-
phage. On retrouve dans la gastroparésie une hypercontractilité pylorique qui
explique en partie le retard de vidange gastrique. Différentes études récentes
semblent souligner l’intérêt des injections intra-pyloriques de toxine botulique qui
améliorent les symptômes digestifs [47, 48, 49] et sont associées à une amélioration
de la vidange gastrique [47, 49] chez un certain nombre de patients. Cette technique
apparaît dépourvue d’effets indésirables. Toutefois les études menées concernent le
plus souvent un nombre restreint de sujets et des études contrôlées vs placebo doivent
être menées sur de plus grandes séries de patients pour confirmer ces effets. Ces
résultats encourageants mettent par conséquent l’accent sur la nécessité d’améliorer
l’hypercontractilité du sphincter pylorique, donc de réduire le pylorospasme classi-
quement observé en situation de gastroparésie de manière médicale ou chirurgicale.
• L
 a mise en place endoscopique d’un stent transpylorique en métal auto-expansible a
été testée dans le cadre de petites études ouvertes, généralement chez les patients
atteints de gastroparésie réfractaire (50) Bien que les données soient incomplètes,
une amélioration de la vidange gastrique et de la clinique est observée chez 75 % des
patients avec un suivi adéquat, avec une plus grande efficacité chez ceux présentant
des nausées et/ou des vomissements prédominants.
• L
 a pyloroplastie laparoscopique : Chez 177 patients, la pyloroplastie laparoscopique
améliore ou normalise la vidange gastrique chez près de 90 % des patients souffrant
de gastroparésie et réduit considérablement les symptômes de nausées, vomisse-
ments, ballonnements et douleurs abdominales (51). Le taux de morbidité global
était de 6,8 % avec quatre retours à la chirurgie et deux fuites digestives confirmées.
La durée moyenne de séjour était de 3,5 jours et le taux de réadmission était de 7 %.
Quatre-vingt-six pour cent des patients ont connu une amélioration de la vidange
gastrique avec une normalisation de 77 % (la vidange gastrique à la mi-temps est
passée de 175 ± 94 à 91 ± 45 min).
• L
 a pyloromyotomie endoscopique : 30 patients avec gastroparésie post chirurgicale
(n=12), diabétique (n=11) et idiopathique (n=7), réfractaires aux autres thérapeu-
tiques (prokinétiques, érythromycine, injection toxine botulique, stent pylorique)
ont été suivis dans 5 centres cliniques. La durée moyenne de la procédure de pyloro-
myotomie était de 72 minutes (35– 223 min), et la longueur de la myotomie de 2.6
+/- 2.3 cm. La durée moyenne d’hospitalisation était de 3,3 jours (1–12 jours). Des
complications sont apparues chez 2 patients (ulcère et pneumopéritoine). Une
réponse clinique satisfaisante a été observée chez 26 patients (86 %) sur les 5,5 mois
de suivi. La scintigraphie gastrique a été répétée chez 17 patients, normalisée chez 8

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 27

(47 %), et améliorée chez 6 (35 %). En revanche, aucun facteur prédictif de succès ou


d’échec n’a pu être identifié (52).
8. L a neuromodulation gastrique
Le premier rapport de ce nouveau concept date des années 1960 où la stimulation
électrique a été appliquée pour le traitement de l'iléus post-chirurgical au moyen d'un
dispositif externe (53). C’est seulement au début des années 90 que la recherche animale
et son application réussie à l’homme a démontré que l’application des paramètres de
stimulation pouvaient être reproduits grâce à des générateurs d'impulsions implantés.
L’étude de faisabilité GEMS (Gastro-Electrical Mechanical Stimulation) suivi par l’étude
internationale WAVESS réalisée en multicentrique et randomisée ont véritablement
donné l’impulsion à la technique. Les résultats de ces deux études montrent que la
stimulation électrique de l'estomac réduit la fréquence des vomissements pour la plupart
des patients diabétiques ou idiopathiques. Les symptômes de nausées et de vomisse-
ments ont été réduits et la qualité de vie post-implantation améliorée (54, 55).
La thérapie Enterra™ est une thérapeutique réversible qui applique une stimulation
électrique continue à la partie inférieure de l’estomac (antre). La stimulation électrique est
délivrée par un système totalement implanté comprenant deux électrodes intramuscu-
laires et un neurostimulateur. Le stimulateur (« pacemaker ») et les électrodes peuvent être
implantés par laparoscopie ou par laparotomie. Les électrodes sont implantées au niveau
du muscle de l’estomac, dans la région antrale à 10 cm environ du pylore. Le neurostimu-
lateur est placé dans une poche sous-cutanée du quart supérieur de la paroi abdominale
[Figure 3]. Le niveau de stimulation (la fréquence) et l'amplitude (l’intensité) peuvent être
paramétrés avec le programmateur (Medtronic N'Vision), communiquant par télémétrie
avec le neurostimulateur implanté [Figure 4a et 4b].
Peu d’études ont été conduites à ce jour dans des populations exclusivement diabétiques,
et toutes les études ne portent que sur des séries de patients en nombre limité (de 17 à
55  patients) [Tableau 2] : les résultats publiés montrent cependant une efficacité en termes
d’amélioration glycémique (baisse du taux d’HbA1c), ainsi qu’une diminution significative

Figure 3. - Représentation schématique de la technique laparoscopique


d’implantation du neurostimulateur gastrique

Paris, 23-24 novembre 2018


28 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

4a : Neurostimulateur implanté 4b : Programmateur externe :


chirurgicalement (partie supérieure/médiane commande et réglage du
de l’abdomen) comprenant deux sondes neurostimulateur implanté
intramusculaires + électrodes implantées
dans la paroi musculaire de l’estomac
Figure 4. - Technique ENTERRA (Medtronic GU).

Tableau 2. - Études de neuromodulation gastrique chez des patients atteints de gastroparésie


diabétique, post-chirurgicale ou idiopathique
% de patients
Études Patients (n) Essai Durée (mois)
diabétiques
Prospective ½ mois
Abell TL 2002 38 27 %
puis en ouvert puis 12 mois
En cross-over (ON/OFF) 2 x 1 mois
Abell TL 2003 33 52 %
puis en ouvert puis 12 mois
Forster J 2003 55 71 % Prospective 12 mois
Lin Z 2004 48 100 % Rétrospective 12 mois
Van Der Voort IR 2005 17 100 % Prospective 12 mois
Lin Z 2006 55 71% Prospective 36 mois

Tableau 3. - Résultats métaboliques de la neuromodulation gastrique dans des populations


de patients diabétiques
Différence vs initiale
HbA1c 12 36
Études 6 mois 12 36
initiale mois mois 6 mois
mois mois
Forster J 2003 9,8 % 9,0 % 8,5 % - -0,8 -1,3 * -
Lin Z 2004 9,4 % 8,7 % 8,4 % - -1,3 -1,0 * -
Van Der Voort IR 2005 8,7 % 6,2 % 6,5 % - -2,4 # -2,1 # -
Lin Z 2006 9,5 % - 8,4 % 7,9 % - -1,1 * -1,6 *
* p < 0,05 - # p < 0,01

des symptômes digestifs de gastroparésie. Quatre études ont été conduites dans des popula-
tions où les patients diabétiques étaient significativement représentés (de 71 % à 100 % de
la population de l’étude): parmi ces quatre études, trois étaient prospectives (21, 56, 57),
une rétrospective (20), avec un nombre de patients allant de 17 à 55, et sur des durées de
12 mois maximum [Tableau 3]. Une seule de ces études sur 55 patients dont 39 diabétiques,

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 29

possède maintenant un recul de 3 ans dans cette thérapie, permettant d’observer qu’il n’y
a pas d’échappement à la neuromodulation gastrique notamment en terme d’amélioration
métabolique (58). L’étude Wavess (55) comportant 52 % de patients diabétiques a été
menée en cross over mais ne fournit aucune donnée sur les paramètres métaboliques. Plus
récemment, 113 patients ont bénéficié d'un traitement par neuromodulation gastrique
(111  primo-implantations et 2 remplacements). Avec un recul moyen de 27 mois (1–113),
une amélioration des symptômes a été obtenue chez 91 patients (80 %) et était similaire
pour les sous-groupes diabétique et idiopathique. La nécessité de recours à une nutrition
artificielle (entérale et/ou parentale) a été diminuée dans les deux groupes (59).
Une métaanalyse sur les essais de neuromodulation gasrique retrouve une certaine
hétérogénéité dans la réponse au traitement (60). Dix études conduites entre 1995 et 2011,
ont été analysées. La méthodologie et la qualité des essais était très variable mais jugée
globalement faible sur un total de 601 patients, avec des résultats semble t’il plus favorables
chez les patients atteints de gastroparésie diabétique.
Notons également qu’en comparaison avec le traitement pharmacologique, la neuromo-
dulation gastrique apparaît nettement plus efficace dans le contrôle des symptômes
gastrointestinaux (58).
L’indication de la neuromodulation gastrique dans l’ensemble de l’arsenal thérapeutique
avait été initialement définie par l’AGA (American Gastroenterology Association) en 2004
et repris par différents auteurs (1, 28, 61). L’indication était définie par une rétention du bol
alimentaire de plus de 35 % à 4h lors de la scintigraphie gastrique.

Tableau 4. - Prise en charge diagnostique et thérapeutique de la gastroparésie

Anamnèse et Diagnostic

Historique / Examen physique Histoire du patient


Évaluation neurologique, bilan sanguin
Bilan des thérapies antérieures

Examens complémentaires Endoscopie haut appareil digestif


Examens barytés du haut appareil digestif
Scintigraphie gastrique (élément solide/liquide)
Test respiratoire au 13C acide octanoïque
Électro-gastrographie

Traitements

Modifications alimentaires Liquides, pauvres en lipides


Petits repas fréquents
Limitation fibres alimentaires

Traitements médicamenteux Antagonistes dopaminergiques à action antiémétique et


prokinétiques (dompéridone, métoclopramide) autres
drogues prokinétiques (tégaserod, érythromycine)

Nutrition entérale Apport direct de substances nutritives vers l’intestin via une
sonde alimentaire

Nutrition parentérale Apport direct de substances nutritives au système sanguin


via un cathéter à demeure

Options chirurgicales Gastrectomie

Neuromodulation gastrique Stimulation électrique à la partie inférieure de l’estomac

Paris, 23-24 novembre 2018


30 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

Au total parmi toutes les solutions thérapeutiques, certaines ont fait plus ou moins
preuve de leur démonstration lors d’études randomisées et sur des populations suffisam-
ment importantes et des durées d’évaluation significatives (au moins 12 semaines) (22, 62).
En conclusion, un algorithme de prise en charge de la gastroparésie diabétique et d’autre
cause, a été établi et publié en 2013. Il repose sur un diagnostic positif basé sur la clinique
et des examens complémentaires calibrés dont la scintigraphie gastrique fait office de
« gold standard », puis d’un diagnostic étiologique. Pour la prise en charge thérapeutique,
les traitements dépendent de la sévérité de la maladie, ainsi que des répercussions notam-
ment nutritionnelles [Tableau 4] (22).

UNE STRATÉGIE GLOBALE ET DES CONSENSUS À ÉTABLIR


Au total, il faudra par conséquent retenir que cette pathologie est loin d’être exception-
nelle, et que l’évoquer est déjà une étape importante de la prise en charge. Le bilan doit
être complet, pour éliminer d’autres étiologies que celle du diabète notamment lorsque le
contexte ne le laisse pas supposer, et pour authentifier le plus précisément possible les
anomalies de vidange gastrique et les répercussions cliniques et biologiques qui s’y associent
[Tableau 5]. La thérapeutique reste encore trop souvent empirique malgré de réelles orien-
tations consensuelles, associant ‘petits moyens’ nutritionnels et insuliniques, ou prise en
charge nutritionnelle intensifiée dans les cas les plus sévères. Enfin, les moyens de
diagnostic et de traitement modernes se sont développés, ouvrant une perspective plus
optimiste dans la thérapie de cette pathologie trop longtemps sous estimée voire négligée.
Tableau 5. - Algorithme de prise en charge diagnostique et thérapeutique de la gastroparésie
1ère étape Diagnostic de la gastroparésie
(scintigraphie à la 4ème heure)
2ème étape 1. Éliminer une cause iatrogène
2. Traitement diététique
3. Contrôle glycémique
3ème étape Traitements pharmacologiques
■ Prokinétiques
■ Antiémétiques

4ème étape Support nutritionnel (CNO)


• Alimentation entérale
5ème étape Traitement non pharmacologique
■ Injection toxine botulique intra-pylorique
■ Gastrostomie, jéjunostomie
■ Nutrition parentérale
■ Neuromodulation gastrique
■ Pyloroplastie
■ Gastrectomie partielle

Service d'Endocrinologie, Diabetologie & Nutrition,


Hôpital Brabois Adultes,
CHRU de Nancy & Université de Lorraine
54500 Vandoeuvre Lès Nancy, France

Adresse pour la correspondance : Professeur Bruno GUERCI, MD PhD - Chef du Service


d'Endocrinologie, Diabetologie & Nutrition, Hôpital Brabois Adultes, Philippe Canton et CIC Inserm, ILCV,
CHRU de Nancy - 54500 Vandoeuvre Lès Nancy, France
Secretary (33) 383155032 - Office (33) 383155033 - Fax (33) 383153440
Email : b.guerci@chru-nancy.fr - b.guerci@gmail.com

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La gastroparésie diabétique : un diagnostic précis pour un traitement efficace 31

Liens d’intérêt du Pr Bruno GUERCI : Consultant, avis d’expert, travail d’écriture et de relecture,
participation à des études cliniques de phase II, III et IV, orateur à des symposia, co-financement ou
subventions à des projets de recherche clinique
Pour les firmes pharmaceutiques et industrielles, organismes et sociétés savantes suivants :
Firmes : Bristol-Myers Squibb, Sanofi Aventis, GlaxoSmithKline, Novartis, Novo Nordisk, Eli lilly, Johnson
& Johnson, Astra Zeneca, Boehringer Ingelheim, Janssen, Intarcia, Metacure, Pfizer, MSD, Roche
Diagnostic, Medtronic, Menarini Diagnostic, Abbott, Lifescan, Vitalaire, Dinno Santé, Ork’yn
Organismes : AFSSAPS, CNAMTS, CEPS, SFD, SFE, NSFA

DIABETIC GASTROPARESIS: A PRECISE DIAGNOSIS


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

FOR AN EFFECTIVE TREATMENT


by Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY,
Niasha MICHOT, Philip BOHME and Bruno GUERCI (Nancy - France)

ABSTRACT
Diabetic gastroparesis, a component of autonomic neuropathy, is the most common
manifestation of digestive neuropathy. Diabetes is responsible for about a quarter of gastro-
paresis. The digestive signs are often paucisymptomatic, but one must know how to evoke
gastroparesis in the face of any situation of metabolic instability, such as postprandial
hypoglycaemia. Nausea, vomiting, early satiety, gastric fullness, bloating are among the
most common clinical signs. Beyond the clinical symptoms, the reference test for the
diagnosis of gastroparesis is gastric scintigraphy. Other tests for diagnosis are available but
without any consensus. The basic treatment consists of improving metabolic control of
diabetes, splitting meals, reducing the amount of food intake, the content of non-digestible
fiber and fat in the diet. Drugs such as metoclopramide and domperidone can be tried, but
their effectiveness is often limited. The use of new serotonine receptor agonists and other
motilin-like molecules such as erythromycin are a very attractive and effective alternative
in the medium term. Other therapeutic approaches are being developed and validated, such
as ghrelin analogs, intrapyloric injections of botulinum toxin, laparoscopic pyloroplasty or
endoscopic pyloromyotomy. Finally, gastric neuromodulation is a technique that consists
in applying a continuous electrical stimulation of high frequency and low energy at the
level of the gastric antrum using a totally laparoscopically implanted device for treating
clinical forms of nauseas and vomiting refractory to conventional treatments. Never-
theless, a heavy nutritional care is sometimes necessary in the most severe forms. The
enteral route have to be preferred (nasojejunal tubing and then jejunostomy). In case of
inefficiency, especially in patients with grelic neuropathy and/or total digestive intolerance,
long-term parenteral nutrition is sometimes required.
Key-words : Diabetic gastroparesis, gastric emptying, autonomic neuropathy, motility, pylorus, scintigraphy,
prokinetics, diet, myotomy, gastric stimulation.

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32 Delphine BOUDOT, Laurène SCHOUMACKER-LEY, Niasha MICHOT, Philip BOHME et Bruno GUERCI

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


GROSSESSE ET PATHOLOGIES
CORTICO-SURRÉNALIENNES

par Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU, Capucine DE MARCELLUS,


Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT, Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU,
Laure CAZABAT et Marie-Laure RAFFIN-SANSON (Boulogne)

Les pathologies corticosurrénaliennes sont rares mais touchent plus souvent les femmes,
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

parfois jeunes. Certaines de ces femmes dont la maladie est diagnostiquée et traitée peuvent
souhaiter un enfant. Dans d’autres cas, elles sont découvertes pendant la grossesse.
Cette revue aborde le cas de l’insuffisance surrénale, son diagnostic et sa prise en charge
durant une gestation, mais aussi les hyperfonctionnements corticosurrénaliens : syndrome
de Cushing d’origine hypophysaire ou surrénalien, hyperaldostéronisme primaire, en pri­­vi­
légiant les aspects pratiques du diagnostic et du traitement, les risques pour la mère et
l’enfant.
Le lien particulier entre hyperfonctionnement, prolifération corticosurrénalienne et
grossesse est aussi analysé à la lumière des données de la littérature, en particulier
l’influence des hormones de la grossesse sur les mécanismes de la différenciation
surrénalienne et de la tumorigenèse.

Mots-clés : Insuffisance surrénale, syndrome de Cushing, corticosurrénalome, adénome de Conn, hyperaldosté­


ronisme primaire, grossesse.

1. INTRODUCTION
Les pathologies surrénaliennes sont rares mais peuvent toucher les femmes jeunes. Il
n’est donc pas rare d’avoir à prendre en charge une femme enceinte atteinte d’insuffisance
surrénale, d’hypercorticisme ou d’hyperaldostéronisme primaire ou d’en faire le diagnostic
dans ce contexte. La prise en charge est délicate pour la mère et l’enfant, notamment en
cas d’hyperfonctionnements surrénaliens. Ces situations restent malgré tout très rares, ce
pourquoi peu d’endocrinologues sont familiers avec cette prise en charge. Cette revue de
la littérature est centrée sur les connaissances pratiques nécessaires lorsqu’un dysfonction-
nement surrénalien est évoqué et/ou diagnostiqué pendant la grossesse. Nous évoquerons
aussi quelques éléments physiopathologiques plus récents expliquant en partie les liens
entre hyperfonctionnement corticosurrénalien, sexe féminin et grossesse. En revanche,
nous n’aborderons pas, faute de temps, la prise en charge des blocs enzymatiques.

2. A
 DAPTATION DE L’AXE HYPOTHALAMO-HYPOPHYSO-
SURRÉNALIEN (HHS) ET DU SYSTÈME RÉNINE-ANGIOTENSINE
(SRA) À LA GESTATION
Durant la grossesse, l’adaptation de la synthèse d’hormones HHS et de leur régulation
doivent être prises en compte pour interpréter valablement les résultats des dosages et

Paris, 23-24 novembre 2018


34 Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU, Capucine DE MARCELLUS, Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT, Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU, Laure CAZABAT et Marie-Laure RAFFIN-SANSON

choisir les thérapeutiques. La concentration de la protéine porteuse du cortisol (cortisol


binding globulin, CBG) augmente sous l’effet de l’augmentation des concentrations
majeures d’estradiol pendant la grossesse, ce qui élève le cortisol plasmatique total et fait
surestimer le cortisol libre. Le taux de production de cortisol est augmenté : la cortisolurie
des 24 heures et la concentration de cortisol salivaire doivent être interprétées en fonction
de normes propres à chaque trimestre de la grossesse (1). De plus, une certaine résistance
au freinage fausse l’interprétation des tests à la dexamethasone (2). En revanche, le cycle
du cortisol est préservé quoiqu’on note une légère atténuation (3). Le placenta produit de
la corticolibérine (Corticotrophin Releasing Hormone- CRH) et de la pro-opio-mélanocor-
tine (POMC). La concentration sanguine de CRH s’élève très précocement et de façon
exponentielle. Elle atteint en fin de grossesse 200 fois les concentrations préconception-
nelles tandis que de la POMC ou des produits de clivage anormaux (4) sont trouvés en
quantité importante dans la circulation du fait d’une maturation particulière du précurseur
dans cet organe. Ces molécules peuvent faire sous-estimer ou donner au contraire un
signal artefactuel dans certains dosages d’ACTH. Ces sécrétions placentaires expliquent
peut-être que la concentration d’ACTH augmente pendant la grossesse et soit parfois
incomplètement freinée dans certains hypercorticismes d’origine surrénalienne (prés de la
moitié des cas repris par Lindsay en 2005)(5). Les dosages d’androgènes doivent être inter-
prétés en fonction du terme de la grossesse, en particulier la testostérone, du fait de l’éléva-
tion de la TeBG (1)(6). Les concentrations de testostérone biodisponible et de delta4-
androstenedione s’élèvent également en fin de grossesse, jusqu’à doubler au moment de
l’accouchement. En revanche, les concentrations plasmatiques de SDHEA diminuent
d’environ 30 %, malgré une augmentation de la production de ce stéroïde, en raison d’une
augmentation important de sa clairance (6).
Le système rénine-angiotensine (SRA) subit lui aussi des modifications du fait de la
grossesse, dont il faut tenir compte pour l’interprétation des dosages (7). Toutes les compo-
santes du SRA sont stimulées pendant la grossesse : sous l’effet des estrogènes, la synthèse
hépatique d’angiotensinogène (précurseur de l’angiotensine 1) augmente. La synthèse de
rénine, augmente également (production rénale mais aussi utérine) ainsi que celle de
l’enzyme de conversion (8)(9). À 10 semaines de gestation, l’activité rénine est multipliée
par 4 pour atteindre un plateau à 22 semaines (10). Ceci a pour effet d’augmenter la
production d’angiotensine 2 (multipliée par 3 durant la grossesse) et ainsi la sécrétion
d’aldosté­rone (11). Les concentrations circulantes d’aldostérone peuvent être multipliées
par 10 en fin de grossesse, ce qui participe à l’hypervolémie physiologique malgré l’effet
antagoniste de la progestérone. La concentration de désoxycorticostérone (DOC)
augmente également. En revanche, les vaisseaux développent une certaine résistance à
l’action vasoconstrictrice de l’angiotensine 2. La pression artérielle ne s’élève donc pas,
grâce à la vasodilatation périphérique, et la kaliémie reste normale.

3. INSUFFISANCE SURRÉNALE ET GROSSESSE


Cette situation a fait l’objet d’une très bonne revue récente (12). La coexistence d’une
insuffisance surrénale et d’une grossesse peut se produire dans 2 circonstances différentes :
la future mère est addisonnienne et souhaite une grossesse, le problème est alors à la
gestion du traitement substitutif pendant les différentes phases de la grossesse, ou la
grossesse débute chez une femme qui ne se sait pas insuffisante surrénalienne et la diffi-
culté sera d’en faire le diagnostic pendant la grossesse.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 35

3.1 Épidémiologie
Un travail récent (13) a évalué la prévalence de l’insuffisance surrénale primaire entre
5,6/100  000 en 2003 et 9,6/100 000 en 2011. Parmi les cas publiés d’insuffisance surrénale,
les causes primaires ou secondaires sont trouvées dans des proportions sensiblement égales.
L’insuffisance surrénale peut résulter d’une destruction des glandes surrénales par un
processus auto-immun, infectieux ou tumoral, un acte chirurgical ou un traitement
médicamenteux. Les causes auto-immunes sont les plus fréquentes. L’insuffisance surré-
nale peut alors être associée à d’autres atteintes auto-immunes dans le cadre d’une polyen-
docrinopathie de type 2 associant thyroïdite de Hashimoto, diabète de type 1 et/ou insuf-
fisance ovarienne prématurée. L’insuffisance surrénale peut également être d’origine
hypophysaire, secondaire à un déficit corticotrope. Les causes d’insuffisance surrénale
secondaires rejoignent celles de l’insuffisance anté-hypophysaire en général auxquelles on
peut ajouter l’insuffisance corticotrope post corticothérapie.
L’association d’une insuffisance surrénale et d’une grossesse est rare, compte tenu de la
rareté de la pathologie, mais aussi parce que l’insuffisance surrénale peut s’accompagner de
troubles de la fertilité. Dans les causes hypophysaires, une insuffisance gonadotrope peut
accompagner l’atteinte corticotrope, ce qui nécessitera le recours à la PMA pour permettre
une grossesse (14). Dans l’insuffisance surrénale primaire, le risque plus important d’insuf-
fisance ovarienne prématurée doit être connu et les patientes informées. Par ailleurs,
même si l’on exclut les patientes avec insuffisance ovarienne prématurée, on observe une
diminution du nombre d’enfants chez les patientes ayant une maladie d’Addison (15) en
comparaison de la population générale. La cause en est probablement multifactorielle. Le
contexte psychosocial de maladie chronique avec diminution de la qualité de vie et
moindre fréquence d’une vie de couple, sont des éléments d’explication. La réelle préva-
lence de l’insuffisance surrénale chez la femme enceinte n’est pas connue.

3.2 Prise en charge thérapeutique de l’insuffisance surrénale chez une femme


enceinte
Dans la très grande majorité des cas, l’insuffisance surrénale est connue avant la concep-
tion. En dehors de la prise en charge d’une éventuelle infertilité ou hypofertilité, se pose la
question de l’adaptation du traitement et de sa surveillance pendant la gestation, en parti-
culier lors de vomissements du premier trimestre et au moment de l’accouchement. Le
pronostic est habituellement considéré comme bon et l’on s’attend à une heureuse issue
pour la mère et pour l’enfant. L’éducation thérapeutique est fondamentale pour permettre
à la patiente l’auto-ajustement de la posologie et le passage à la forme injectable en cas de
besoin. Il faut avant tout préciser que l’hydrocortisone est non seulement sûre pour le
fœtus mais surtout indispensable à la vie de la mère et de l’enfant à naître. L’hydrocorti-
sone doit rester le glucocorticoïde à privilégier pendant la grossesse. Des mentions
« maladroites » sur les boîtes d’hydrocortisone ont été retirées et il est indiqué désormais
que « ce médicament peut être prescrit pendant la grossesse si besoin ». La principale difficulté
du premier trimestre est la gestion du traitement en cas de vomissements gravidiques.
L’utilisation du traitement injectable en sous-cutané, administré par la patiente dès le
2ème  épisode de vomissements en 6 heures doit être apprise (16), la patiente et son entou-
rage doivent avoir déjà manipulé le produit et les seringues et aiguilles, les numéros des
secours urgents doivent être connus, la façon d’informer les médecins urgentistes doit
avoir été discutée (17). Plus tard au cours de la gestation, du fait de la nécessité de saturer
la CBG dont la concentration augmente et du discret hypercorticisme physiologique de la

Paris, 23-24 novembre 2018


36 Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU, Capucine DE MARCELLUS, Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT, Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU, Laure CAZABAT et Marie-Laure RAFFIN-SANSON

grossesse, une discrète augmentation des posologies d’hydrocortisone est possible. On


conseille une augmentation de la posologie de l’hydrocortisone, essentiellement au
troisième trimestre. Il n’y a pas de certitude quant à la quantité d’hydrocortisone supplé-
mentaire nécessaire. On l’évalue, en théorie, à 20-30 % de la dose préconceptionnelle, soit
5 à 10  mg d’hydrocortisone supplémentaires à démarrer au début du 6ème mois (16). L’ajus-
tement doit être fait comme toujours sur la clinique, au moins une fois par trimestre. En
pratique, l’augmentation de dose n’est pas obligatoire et il est rare d’avoir besoin d’aug-
menter de plus de 5  mg. Les signe de surdosage et de sous-dosage doivent être recherchés,
cette évaluation étant compliquée par le contexte obstétrical. Le surdosage peut, en effet,
favoriser le diabète gestationnel, l’hypertension gravidique, la prise de poids et la survenue
de vergetures. À noter que l’activité de la 11 beta-hydroxy-stéroïde déshydrogénase de type
2 placentaire protège le fœtus d’un excès de cortisol. Le sous-dosage au contraire prédis-
pose aux vomissements gravidiques et favorise la survenue d’une décompensation aiguë.
Les besoins en minéralocorticoïdes augmentent légèrement pendant la grossesse, notam-
ment au 3ème trimestre, du fait de l’action anti-aldostérone de la progestérone. Toutefois,
l’augmentation des besoins reste modeste et la priorité est donnée à la clinique. La dose de
fludrocortisone s’adapte sur le niveau de la pression artérielle et l’apparition éventuelle
d’une hypotension orthostatique. La surveillance de l’ionogramme est également néces-
saire. En revanche, la mesure de la rénine est inutile.
L’accouchement doit être couvert par de l’hydrocortisone injectable, 100 mg IV dès le
début du travail, suivi par une perfusion continue d’hydrocortisone, 100 mg sur 12 ou
24  heures (16). Le même traitement peut être appliqué en cas de césarienne. Le retour à la
posologie préconceptionnelle per os se fait en 48 heures, à moduler en fonction des suites
obstétricales et de l’état général. La gestion de l’insuffisance surrénale aiguë, si elle survient,
n’a pas de spécificité quant aux molécules nécessaires, à leur dose, à la rééquilibration
hydroélectrolytique à associer. La surveillance du fœtus est, en revanche, un élément
majeur de la prise en charge. Nous reviendrons sur le risque de mort fœtale in utero en cas
de crise aiguë.

3.3 Diagnostiquer une insuffisance surrénale chez une femme enceinte


Le diagnostic d’insuffisance surrénale est toujours délicat, du fait de la rareté de la
pa­thologie et de son début insidieux. Le contexte de grossesse ajoute à la difficulté. Le
moment où se manifestent les symptômes se répartit de façon assez égale entre les diffé-
rents trimestres de la grossesse. Les nausées, la perte de poids, la fatigue, les vomissements
et les sensations de malaise peuvent être attribués à la grossesse elle-même surtout lorsqu’ils
surviennent au premier trimestre. L’insuffisance surrénale aiguë peut être confondue avec
un hyperemesis gravidarum et il est prudent d’envisager systématiquement l’insuffisance
surrénale comme diagnostic différentiel. Un contexte auto-immun personnel ou familial
peut, en revanche, aider au diagnostic. Une hyponatrémie doit attirer l’attention. L’hyper-
pigmentation lorsqu’elle est cliniquement apparente est, en général, facile à distinguer du
masque de grossesse du fait de ses caractères séméiologiques (elle est présente sur les
régions à l’abri du soleil, les muqueuses, la paume des mains…).
Dès lors que le diagnostic est suspecté, le dosage de cortisol et d’ACTH à 8 heures ou au
moment d’une crise aigüe permettent habituellement d’établir le diagnostic (18). Le traite-
ment doit être débuté dès la suspicion diagnostique, sans attendre les résultats de prélève-
ments qu’il n’est pas toujours facile de réaliser dans un contexte aigu. L’évolution sous

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 37

traitement et les dosages réalisés à distance viendront confirmer le diagnostic. L’algorithme


diagnostique retenu par le consensus SFE est valable sur son principe pour le diagnostic
d’insuffisance surrénale pendant la grossesse. Le test au Synacthène® ordinaire utilisé pour
le test porte le mention « l’utilisation de ce médicament ne doit être envisagé au cours de la
grossesse que si nécessaire c’est à dire dans le respect de l’indication validée » ce qui permet son
utilisation si besoin. Lorsque la cortisolémie est < 5  mcg/dl dans un contexte clinique
évocateur, le diagnostic d’insuffisance surrénale peut être affirmé. Le dosage d’ACTH
concomitante supérieur à plus de 2 fois la limite supérieure de la normale permet d’en
déterminer l’origine basse. Quant aux seuils du cortisol plasmatique permettant d’éliminer
l’insuffisance surrénale, ils doivent être adaptés à l’élévation de la protéine porteuse CBG
qui majore les concentrations de cortisol total chez la femme enceinte. Les valeurs-seuils
à atteindre pour être rassuré sur la fonction corticosurrénalienne de la patiente sont donc
d’autant plus élevées que le terme de la grossesse avance mais la littérature manque de
données pour établir un seuil indiscutable. Des chiffres sont donnés à titre indicatif sur la
Figure 2 pour la cortisolémie soixante minutes après Synacthène®, pour chaque trimestre
(19)(12)(20)(21) soit 25, 29 et 32μg/dL pour les premier, second and troisième trimestres
respectivement, pour diagnostiquer ou exclure une insuffisance surrénale. La réponse au
test au Synacthène® peut être appréciée sur la cortisolémie salivaire qui n’est pas modifiée
par les variations de la protéine porteuse. Les normes hors grossesse peuvent être utilisées
à titre indicatif. Des normes ont également été publiée chez des femmes enceintes au 2ème
et 3ème trimestre (19). Comme en dehors de la grossesse, le test au Synacthène® peut être
pris en défaut dans certains cas d’insuffisance corticotrope. Hors grossesse, on recom-
mande, en cas de doute, la réalisation d’une hypoglycémie insulinique ou d’un test à la
métopirone, lesquels sont contre-indiqués chez la femme enceinte. En cas de grossesse, si
le doute persiste sur une insuffisance corticotrope avec réponse positive au test au Synac-
thène®, on peut proposer de maintenir le traitement substitutif jusqu’à l’accouchement et
de compléter alors les explorations.

3.4 D
 éterminer la cause d’une insuffisance surrénale lorsqu’elle est diagnostiquée
pendant une grossesse
Une concentration d’ACTH à plus de 2 fois la limite supérieure de la normale est évoca-
trice d’une cause basse. La légère augmentation de l’ACTH observée pendant la grossesse
ne complique pas habituellement le diagnostic différentiel entre insuffisance surrénale
primaire et corticotrope. Le dosage d’Ac anti 21-hydroxylase peut permettre, éventuelle-
ment, d’affirmer l’origine auto-immune. Les insuffisances surrénales d’origine haute sont
habituellement accompagnées d’une symptomatologie évocatrice (céphalées, troubles
visuels) par effet de masse sur les structures voisines, qu’il s’agisse de la nécrose d’un
macroadénome hypophysaire ou d’une hypophysite. Leur survenue concerne essentielle-
ment le 3ème trimestre de la grossesse. Une IRM sans injection peut être réalisée si les
céphalées sont intenses ou, bien entendu, en cas de déficit visuel.

3.5 Pronostic maternel et fœtal en cas d’insuffisance surrénale


La revue de la littérature récente révèle une morbidité non négligeable surtout, mais pas
seulement, dans les cas où l’insuffisance surrénale n’était pas connue avant la grossesse.
Des cas de mort fœtale in utero ont ainsi été rapportés (22) ainsi que des retards de crois-
sance intra-utérins (RCIU). Beaucoup de ces enfants se présentant avec un petit poids de
naissance sont issus de grossesse avec hypopituitarisme (23). Dans ce dernier cas, les

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césariennes sont également particulièrement fréquentes (presque 90 % des cas), expli-
quées, d’après les auteurs, par des présentations défavorables ou d’autres raisons obstétri-
cales. En revanche, aucune mort maternelle directement liée à une insuffisance surrénale
n’est à déplorer.

4. HYPERCORTICISME ET GROSSESSE
L’hypercorticisme, en association à une grossesse est une situation rare du fait des
troubles de la fertilité associés à cette pathologie, malgré la plus grande fréquence de
l’hypercorticisme chez les femmes jeunes. Environ 250 cas ont été publiés à ce jour dans la
littérature, témoignant de la difficulté à évoquer et confirmer le diagnostic ainsi que du
mauvais pronostic pour la mère et pour l’enfant si l’hypercorticisme n’est pas contrôlé. Les
causes surrénaliennes tumorales sont au premier plan, participant au mauvais pronostic de
cette association et un certain nombre d’hypercorticismes d’origine surrénalienne stricte-
ment dépendants de la grossesse ont été décrits. Cette situation a été discutée dans
plusieurs revues récentes (24)(25). Nous nous centrerons ici sur quelques aspects pratiques,
notamment le diagnostic et le traitement.

4.1 C
 omment diagnostiquer une hypersécrétion de cortisol chez une femme
enceinte et en déterminer la cause ?
La suspicion clinique d’hypercorticisme est difficile à évoquer pendant une grossesse :
prise de poids, vergetures, fatigue, hyperglycémie ou HTA sont logiquement d’abord attri-
bués à la gestation. Ces signes ou symptômes doivent toutefois attirer l’attention, surtout
s’ils s’associent à des signes d’hypercatabolisme bien plus spécifiques (ecchymoses, faiblesse
musculaire…) et/ou à une hypokaliémie. L’HTA gravidique concerne habituellement le
3ème trimestre de la grossesse. La constations précoce d’une HTA doit attirer l’attention et
faire évoquer une cause secondaire (26).
Lorsque le diagnostic est évoqué, l’exploration doit prendre en compte les modifications
physiologiques de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien et du système rénine angio-
tensine aldostérone évoqués plus haut. Les dosages ou tests utilisés habituellement pour
faire le diagnostic positif d’hypercorticisme sont tous modifiés par l’état de grossesse. La
cortisolurie des 24 heures s’élève physiologiquement à 1,5 ou 2 fois la normale et les résul-
tats doivent donc être interprétés en fonction des normes de chaque trimestre (1). Comme
les laboratoires de biologie fournissent rarement des normes adaptées à leurs dosages pour
les femmes enceintes, l’Endocrine Society (27) recommande de considérer comme patho-
logiques des cortisoluries supérieures à 2 ou 3 fois la limite supérieure de la normale à
partir du 2ème trimestre. Les tests de freinage sont fréquemment pathologiques, même
lorsque l’on dose la cortisolurie des 24 heures donc la forme libre (5). En effet la grossesse
s’accompagne d’une relative résistance au freinage dont le mécanisme n’est pas formelle-
ment établi. Le cycle est préservé pendant la grossesse mais atténué par l’élévation du
cortisol plasmatique. Le cortisol salivaire à minuit lui même, non modifié par l’augmenta-
tion de la CBG, semble avoir des normes légèrement plus élevées pendant la grossesse
(28), même si cette notion est discutée (3). C’est ce dernier test qui apparaît le plus sensible
pour établir le diagnostic d’hypercorticisme chez une femme enceinte.
Le diagnostic étiologique peut également s’avérer délicat. Les causes surrénaliennes
tumorales constituent les deux tiers des cas d’hypercorticisme découverts pendant la

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 39

grossesse (29) comme détaillé ci dessous, une proportion inverse de celle qui est observée
en dehors de la gestation où l’adénome corticotrope est, de loin, la cause le plus fréquente.
De façon remarquable, la concentration d’ACTH reste détectable dans presque la moitié
des cas d’hypercorticisme d’origine surrénalienne diagnostiqués pendant la grossesse (5).
On ne dispose pas de normes établies pendant la grossesse pour les tests à la CRH et le
freinage fort par la dexaméthasone. En revanche, l’imagerie est très utile pour déterminer
ou confirmer la cause de l’hypercorticisme. L’échographie et l’IRM surrénaliennes ainsi
que l’IRM hypophysaire peuvent être réalisées si besoin, sans injection de gadolinium.
L’échographie est un examen considéré comme peu performant pour la surrénale mais qui
s’avère utile pendant la grossesse: sur 15 patientes rapportées par Linsdsay et al. présentant
un hypercorticisme d’origine surrénalienne, l’échographie a permis de localiser la tumeur
dans 11 cas. Quel que soit le résultat de l’échographie, une IRM doit être réalisée. L’IRM,
sans injection de produit de contraste, visualise la tumeur, renseigne sur sa taille, ses
rapports avec les organes de voisinage et apporte des arguments pour la malignité (hétéro-
généité, hypersignal en T2, absence de chute de signal en opposition de phase qui évalue
le contenu en graisse). La répétition des dosages d’ACTH et l’imagerie permettent
habituellement de conclure quant à la cause.

4.2 Quel est le risque pour la mère et l’enfant ?


Cette association constitue une situation à haut risque pour l’enfant et pour la mère (5)
(30)(24). Plusieurs revues récentes ou plus anciennes, colligeant les données la littérature
jusqu’en 2015, rapportent des taux élevés d’hypertension et de pré-éclampsie, d’insuffi-
sance cardiaque, de diabète, de manifestations psychiatriques, de fractures ostéoporo-
tiques, d’infections ainsi qu’une mortalité maternelle très inhabituelle (2 %). Il faut toute-
fois nuancer le pronostic en fonction de la cause de l’hypercorticisme, du terme de la
grossesse, des ressources thérapeutiques (le pronostic est nettement meilleur pour les
patientes prises en charge plus récemment)… Le pronostic est également bien plus
favorable si le diagnostic a été fait et que l’hypercorticisme a pu être contrôlé pendant la
grossesse (24). Le pronostic fœtal est particulièrement médiocre, avec une forte proportion
de naissances prématurées (43 %), de RCIU (5 %), de fausse couche, de morts fœtales in
utero (MFIU) (5 %) ou de mort-nés (6 %), surtout en présence d’un hypercortisolisme actif.
La mortalité fœtale diminue, en effet, de 23.6 % à 8.5 % si l’hypercorticisme a pu être
contrôlé. Le pronostic fœtal est également particulièrement sombre lorsque la cause de
l’hypercorticisme est une tumeur maligne de la corticosurrénale (31). Nous avons rapporté
une série de 12 patientes dont la tumeur corticosurrénalienne maligne a été découverte au
décours d’une grossesse ou immédiatement après l’accouchement. Sur les 12 enfants, le
pourcentage de prématurité atteignait 66 % et la mortalité était de 2/12. Il n’y a pas eu de
mortalité maternelle immédiate mais un plus mauvais pronostic de la tumeur sur le moyen
terme comme détaillé ci-dessous. Par ailleurs, le devenir à long terme de ces enfants et les
conséquences métaboliques ou psychologiques éventuelles d’une exposition in utero à un
excès de cortisol n’ont pas été évalués.

4.3 Traitement de l’hypercorticisme pendant une grossesse


En plus du traitement symptomatique, qui peut être le seul à mettre en œuvre pour les
patientes très prés de leur terme, le traitement de la cause est de loin le plus bénéfique pour
la mère et l’enfant, le bon contrôle de l’hypercorticisme étant comme indiqué ci-dessus, un
élément majeur du pronostic. Une chirurgie hypophysaire par voie trans-sphénoïdale et

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même un cathétérisme des sinus pétreux peuvent être réalisés pendant la gestation. La
balance bénéfice-risque est nettement en faveur de la chirurgie (5)(25). Le moment le plus
approprié semble être le deuxième trimestre (25)(32) car une anesthésie générale pendant
le premier trimestre semble associé à un risque accru de fausse-couche spontanée (FCS)
tandis que le troisième trimestre expose à un surcroît de risque de prématurité et d’hyper-
pression dans la veine cave inférieure. La chirurgie trans-sphénoidale pratiquée à ce terme
donne, selon le petit nombre de cas publiés, des résultats rassurants (25). Une chirurgie
surrénalienne, si elle est indiquée, sera, elle-aussi, réalisée au mieux au 2ème trimestre, sauf
en cas de suspicion de malignité où l’exérèse est à réaliser dès que possible. Une chirurgie
au 3ème trimestre est également envisageable avec des taux de prématurité sans doute plus
important (30). Une surrénalectomie laparoscopique peut, en effet, être réalisée jusqu’à 32
semaines (33)(34) avec une amélioration de la mortalité fœtale et de la morbidité mater-
nelle mais une fréquence toujours très élevée de prématurité et de RCIU. En cas de tumeur
maligne, même si les suites immédiates sont simples, il faut souligner la fréquence élevée
des récidives précoces (35). L’ablation de la tumeur expose, en cas de succès, à une insuffi-
sance corticotrope qui devra être prise en charge comme toute insuffisance surrénale chez
la femme enceinte (voir ci-dessus).
Les traitements médicamenteux de l’hypercorticisme ont parfois été utilisés pendant la
grossesse (36)(30). L’efficacité et la tolérance sont correctes, si l’on en croit la vingtaine de
cas rapportés. Le produit le plus souvent utilisé est la métyrapone. Il faut toutefois souli-
gner le risque d’accumulation de desoxycorticosterone (DOC) du fait du bloc en
11  hydroxylase et donc du risque d’HTA avec hypokaliémie pouvant évoluer vers la
pré-éclampsie. Le ketoconazole a été utilisé de façon efficace et sans effet secondaire
notable chez trois femmes enceintes atteintes de tumeurs surrénaliennes, malgré son effet
anti-androgénique. Il paraît toutefois logique de le réserver aux femmes ayant besoin d’un
traitement médical et ne tolérant pas la metyrapone. Quant à l’Op’DDD (mitotane), il est
contre-indiqué du fait de sa parenté avec le DDT qui en fait un perturbateur endocrinien
et un tératogène probable. Six cas publiés d’enfants exposés n’ont toutefois pas confirmé
ces craintes (37) (38) (Magkou D, 2018, sous presse) mais l’autopsie après une ITG d’un
embryon de 8 semaines exposé au mitotane retrouvait un aspect anormal des structures
surrénaliennes (39). Parmi les médicaments à effet central, la cabergoline à fortes doses a
été utilisée à deux reprises (40) (41) avec une rémission complète de l’hypercorticisme. Il
n’y a pas de publication sur l’utilisation du pasiréotide pendant la grossesse. D’une façon
générale, les médicaments doivent être réservés à une prise en charge urgente et brève, en
attendant un traitement chirurgical indiqué le plus rapidement possible.

5. HYPERALDOSTÉRONISME PRIMAIRE DURANT LA GESTATION


L’hyperaldostéronisme primaire (HAP) représente 10 % des causes d’HTA hors grossesse
et sa prise en charge a fait l’objet de recommandations récentes (42)(43)(44). Toutefois la
gestation modifie les sécrétions du système rénine-angiotensine-aldostérone et fait décon-
seiller certains médicaments antihypertenseurs suspects d’être tératogènes ou néfastes
pour le développement de l’enfant. La prise en charge d’un HAP durant la grossesse est
donc forcément différente. Ce sujet ayant récemment fait l’objet d’une excellente revue  (7),
nous nous centrerons sur les aspects pratiques du diagnostic et le traitement et aborderons
quelques points physiopathologiques plus récents.
La réelle fréquence de cette situation est inconnue. Si l’on admet que la proportion
d’HTA secondaire à un HAP est la même pendant la grossesse qu’en dehors de cette situa-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 41

tion particulière (7), on peut estimer sa prévalence entre 0,6 et 0,8 % chez les femmes
enceintes. Mais si l’on considère que seules 0,24 % des HTA pendant la grossesse sont des
HTA secondaires, quelle qu’en soit la cause (26), la proportion est probablement beaucoup
plus faible. Une revue de la littérature francophone et anglophone jusqu’en 2018 ne
retrouve que 42 cas publiés.

5.1 Diagnostiquer un hyperaldostéronisme primaire pendant une grossesse


Dans la grande majorité des cas publiés, le diagnostic d’HAP a été fait pendant la
grossesse; toutefois, les éléments du diagnostic sont rarement précisés. Dans tous les cas
publiés où le niveau de la kaliémie est connu, celle-ci est toujours basse. Les quelques
publications où l’exploration hormonale est rapportée montrent une aldostéronémie
élevée et une réninémie freinée, même si ce critère manquait à une occasion. La difficulté
vient du fait que l’aldostéronémie est physiologiquement élevée pendant la grossesse, le
seuil pathologique n’ayant pas été défini. Cette élévation ne peut donc être utilisée comme
critère diagnostique. Le seul abaissement de la réninémie n’est pas non plus un critère
diagnostique spécifique. Comme le seuil pathologique pour le rapport aldostérone/rénine
n’a pas été déterminé durant la grossesse et que les tests dynamiques ne peuvent être
utilisés, finalement, le diagnostic biologique ne peut être confirmé qu’après l’accouche-
ment. Quant à l’imagerie, les tumeurs sont trop petites pour être visualisées à l’échogra-
phie. En revanche, l’IRM sans injection peut constituer un bon examen.

5.2 P
 rise en charge thérapeutique de l’hyperaldostéronisme primaire chez une
femme enceinte
Compte tenu du diagnostic de plus en plus fréquent de l’HAP et de la fréquence de
l’HTA chez des adultes jeunes, le problème de la grossesse chez ces patientes risque de se
présenter de plus en plus souvent. Lorsque l’HAP est connu avant la grossesse, l’évolution
des symptômes est imprévisible. Certaines patientes peuvent observer une amélioration de
l’HTA sous l’effet de la progestérone et de son action anti-aldostérone. Une récidive de
l’HTA et de l’hypokaliémie sera observée après l’accouchement. D’autres cas s’aggravent
au contraire en cours de grossesse et deviennent difficiles à contrôler avec des consé-
quences sévères sur le développement de l’enfant.
Bien qu’aucune recommandation officielle n’ait été publiée, les propositions suivantes
peuvent être faites, basées sur les données de la littérature et les effets secondaires connus
des traitements antihypertenseurs.
Si un HAP est connu chez une jeune femme, une sécrétion unilatérale doit être recher-
chée et en cas d’adénome de Conn, l’exérèse doit en être réalisée avant d’envisager la
grossesse. Si la sécrétion est bilatérale, l’HTA doit être contrôlée en pré-conceptionnel en
évitant au maximum la spironolactone. En effet, cette molécule passe le placenta, se lie au
récepteur des androgènes et exerce un effet anti-androgénique qui fait craindre la fémini-
sation d’un fœtus masculin, comme observé chez le rat (45). En réalité, les quelques cas
publiés d’exposition chez l’homme n’ont pas confirmé ces craintes mais seulement une
quinzaine de naissances ont été rapportées. Aucune malformation y compris des organes
génitaux externes n’a été notée en dehors d’une ambiguïté sexuelle chez une fille, le lien
avec la spironolactone étant difficile à affirmer dans ce dernier cas. Dans le doute, il faut
éviter cette molécule en périconceptionnel et, au moins, durant le premier trimestre. On
utilisera en priorité les antihypertenseurs largement connus et prescrits pour traiter l’HTA

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de la femme enceinte à savoir l’alphamethyldopa, antihypertenseur central pour lequel


nous avons beaucoup de recul et aucune anomalie fœtale décrite et le labetalol, alpha/beta
bloquant pour lequel on dispose de beaucoup de données et pas de toxicité fœtale particu-
lière. Une supplémentation potassique sera prescrite si besoin. Si ces traitements ne
suffisent pas, les diurétiques peuvent être ajoutés, bien qu’ils soient classiquement contre-
indiqués pendant la grossesse en raison du risque d’hypovolémie. Les données de la litté-
rature sont toutefois rassurantes sur ce point. On choisira les thiazidiques ou l’amiloride en
fonction de la kaliémie. La nicardipine à petite dose peut être discutée en cas d’HTA
sévère. On dispose de très peu de données sur l’éplérénone. En cas d’HTA sévère après le
2ème trimestre, la spironolactone peut être envisagée. L’ajustement du traitement se fera en
lien étroit avec l’équipe obstétricale. Si l’ablation d’un adénome de Conn est pertinente,
celle-ci peut être effectuée pendant la grossesse selon les mêmes modalités que dans le cas
des tumeurs secrétant du cortisol.
Le pronostic de l’enfant était sévère dans les cas publiés de la littérature, aussi bien
lorsque l’HAP préexistait à la grossesse que dans les cas où le diagnostic avait été fait
pendant la gestation. Une HTA mal contrôlée était bien entendu un facteur majeur de
mauvais pronostic. Sur les 42 grossesses, on comptait 4 enfants mort-nés ou décédés
pendant les premiers jours de vie et un enfant né très prématurément avec un RCIU
majeur. Aucune mort maternelle n’était à déplorer (7)(46).

6. I NFLUENCE DE LA GROSSESSE SUR LES HYPERFONCTIONNEMENTS


CORTICOSURRÉNALIENS ET LE DÉVELOPPEMENT DES TUMEURS
DE LA CORTICOSURRÉNALE
De façon générale, les femmes ont deux à trois fois plus de risque de développer une
tumeur de la corticosurrénale tous types de tumeurs confondus. L’âge à la découverte est
plus précoce chez les femmes (42.7±16.5 ans vs. 47.9±14.6 ans chez les hommes, p = 0.04)
(31). Cette précocité se retrouve dans les causes congénitales d’hypercorticisme comme
l’hyperplasie micronodulaire des surrénales (pigmented primary nodular adrenal hyperplasia,
PPNAD). L’étiologie des hypercorticismes diagnostiqués chez les femmes enceintes
comporte deux spécificités. D’une part, dans les hypercorticismes diagnostiqués pendant
une grossesse et persistant après l’accouchement, on note une prédominance inhabituelle
de causes tumorales surrénaliennes. Par ailleurs, ont été décrits quelques cas très rares mais
bien documentés de maladies surrénaliennes comportant une sécrétion de cortisol ou
d’aldostérone, se développant pendant la grossesse, disparaissant après l’accouchement et
récidivant éventuellement lors d’une grossesse ultérieure. Nous discuterons quelques
hypo­thèses physiopathologiques pouvant expliquer toutes ces observations.

6.1 Grossesse et tumeurs de la corticosurrénale


Les tumeurs corticosurrénaliennes bénignes et malignes représentent 70 % des causes de
syndrome de Cushing dont le diagnostic a été fait pendant la grossesse, tandis que la
maladie de Cushing ne représente que 25 % des cas (29). La proportion est inverse lors­­
qu’un hypercorticisme est découvert en dehors d’une grossesse. Parmi les tumeurs sur­ré­
naliennes diagnostiquées chez les femmes enceintes, les tumeurs bénignes et malignes
sont retrouvées en proportion à peu près égale (29). Cette fréquence inhabituelle de
tumeurs surrénaliennes malignes participe au mauvais pronostic du syndrome de Cushing
découvert pendant la grossesse et justifie une imagerie surrénalienne systématique.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 43

L’influence de la grossesse sur la sécrétion de cortisol par ces tumeurs a parfois été
rap­­portée  (47) mais surtout sur le plus mauvais pronostic des corticosurrénalomes. D’une
façon générale, le fait d’être enceinte au moment de la découverte d’un cancer n’aggrave
pas le pronostic de la maladie à l’exception notable des cancers du sein. Le rôle aggra­vant
de la grossesse sur le pronostic se retrouve dans le cas des tumeurs corticosurréna­liennes
malignes (corticosurrénalomes, CS). Compte tenu des difficultés pour évoquer le
dia­gnos­tic, il n’est pas surprenant que les CS découverts pendant une grossesse soient
diagnostiqués à un stade plus avancé (31). Mais, même lorsqu’on compare des femmes dont
le CS a été découvert au même stade, la survie est plus courte chez les femmes dont la
tumeur a été découverte pendant une grossesse. Ainsi, le diagnostic de CS durant une
grossesse ou dans le post partum immédiat est un facteur indépendant de mauvais pronostic
(31). En revanche, la survenue d’une grossesse chez une femme dont le CS est connu et
traité ne semble pas aggraver le pronostic de la tumeur (48), en sachant que le biais de
sélection (« healthy mother effect ») peut avoir masqué un excès de risque et que la petite
taille de cette série reste une limite. Les femmes traitées pour un CS et en capacité d’avoir
un enfant pourraient même avoir un pronostic plus favorable que les femmes n’ayant pas
souhaité ou n’ayant pas pu être enceintes. On recommande toutefois une rémission avec
un recul suffisant (par exemple 5 ans) ainsi qu’une mitotanémie indétectable pour le projet
de parentalité.

6.2 Hyperfonctionnements corticosurrénaliens dépendant de la grossesse


Quelques cas bien documentés de syndromes de Cushing d’origine surrénalienne dont
la production de cortisol était dépendante de la grossesse ont été rapportés, soit sous forme
de cas clinique, soit à l’occasion de petites séries de patientes (49)(50)(51)(52)(53)(54)(55).
Typiquement, il s’agit d’un hypercorticisme d’origine surrénalienne (ACTH freinée) avec,
à l’imagerie, des surrénales d’aspect normal ou plus rarement un aspect d’hyperplasie
nodulaire. L’hypercorticisme clinique et biologique se manifeste exclusivement lors d’une
grossesse, régressant après l’accouchement ou la fausse couche et récidivant lors d’une
grossesse ultérieure ou à la ménopause. De façon notable, des signes d’hyperandrogénie et
souvent une hypokaliémie sont associés à l’hypercortisolisme. Dans 2 cas sur les 7, un
hypercorticisme finissait par persister en dehors de toute grossesse. Des cas d’hyperaldos-
téronisme isolés dépendants de la grossesse ou de la ménopause ont aussi été décrits (46).

6.3 E
 mbryogenèse de la surrénale, développement postnatal et renouvellement
de la surrénale adulte
Le développement surrénalien chez le fœtus et l’enfant, tout comme le renouvellement
surrénalien à l’âge adulte, fait apparaître un dimorphisme sexuel qui offre des pistes pour
mieux comprendre le développement plus précoce et plus fréquent des maladies surréna-
liennes chez la femme que chez l’homme. Comme les gonades, la surrénale est formée à
partir de l’ébauche commune adrénogonadique exprimant les facteurs de transcription
Wilms Tumor suppressor-1 (WT1), GATA4 puis SF1. Autour de J28 post conception, cette
structure donne naissance à la surrénale primitive dans laquelle Wnt1 et GATA4 sont
réprimés et des cellules originaires de la crête neurale la rejoignent pour former la médul-
losurrénale. La gonade primitive qui continue à exprimer Wnt1 et GATA4 et se différen-
ciera ultérieurement en ovaire ou en testicule. Le cortex surrénalien fœtal est divisé en
deux parties : une partie interne, ou zone fœtale, destinée à involuer, et une partie externe
qui deviendra le cortex surrénalien définitif. Sous le contrôle de l’hCG, la zone fœtale

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synthétise de grandes quantités de DHEA qui sert de précurseur à la synthèse placentaire


d’estradiol. Après la naissance, la zone fœtale disparaît progressivement et la production
de DHEA s’effondre. La partie périphérique du cortex se différencie en zone glomérulée
externe, secrétant de l’aldostérone, et zone fasciculée, interne, produisant le cortisol. Vers
l’âge de 8 ans, une troisième zone se différencie dans le cortex surrénalien de l’enfant, à la
jonction entre la zone fasciculée et la médullosurrénale : c’est la zone réticulée. La reprise
de la synthèse d’androgènes surrénaliens dans cette zone réticulée définit l’adrénarche qui
se caractérise cliniquement par l’apparition de la pilosité pubienne et axillaire.
Ainsi constitué de ces 3 zones, le cortex surrénalien dans sa structure définitive se
renouvelle toute la vie à partir de cellules progénitrices situées sous la capsule. Ces précur-
seurs se différencient d’abord en cellules glomérulées qui migrent ensuite dans la surrénale
de façon centripète, devenant des cellules fasciculées et plus tard des cellules réticulées. La
différenciation des cellules progénitrices et le maintien de la masse de chaque zone est
contrôlée par un certain nombre d’hormones parmi lesquelles l’ACTH, l’angiotensine II et
des hormones traditionnellement associées avec les fonctions de reproduction comme la
LH. Elle fait intervenir différentes voies de signalisation. Le renouvellement et le recrute-
ment des cellules progénitrices sous-capsulaires se fait sous l’action des voies Wnt/
β-caténine et Sonic Hedghog (Shh). La migration centripète et la différenciation progres-
sive des cellules progénitrices en zone glomérulée puis fasciculée dépend d’un équilibre
entre deux voies de signalisations essentielles et complémentaires dans le fonctionnement
surrénalien, Wnt/β-caténine et AMPc/protéine kinase A (PKA). La voie WNT/β-caté­
ninine inhibe la signalisation PKA et la différenciation fasciculée et favorise le maintien
des cellules progénitrices dans un état indifférencié. La voie AMPc/PKA inhibe la diffé-
renciation glomérulée, favorise la différenciation fasciculée et s’oppose à la tumorigénèse
induite par Wnt/ β-caténine (56).

6.4 Altération de la signalisation intracellulaire et tumorigenèse surrénalienne


En accord avec ce modèle, les évènements génétiques aboutissant à une activation de la
voie AMPc/PKA sont fréquents et variés dans les pathologies bénignes associées à une
hypersécrétion de cortisol, adénomes bénins ou hyperplasies surrénaliennes. On peut citer
les mutations de PRKACA (qui code pour la sous unité catalytique de la PKA) et duplica-
tions du gène PRKACA dans les adénomes bénins sécrétants, mutation de PRKAR1A
(codant pour la sous-unité régulatrice de la PKA), dans l’hyperplasie micronodulaire des
surrénales (PPNAD), inactivation des phosphodiestérases PDE8B et PDE11A, dont l’inac-
tivation favorise l’accumulation d’AMPc et l’hyperplasie surrénalienne (56)(57)… Au
contraire, la perte de signal AMPc/PKA chez des patients mutés pour le récepteur de
l’ACTH (MC2R) est associée à une atrophie de la zone fasciculée et à un défaut de sécré-
tion de cortisol tandis que la fonction glomérulée est maintenue. La voie Wnt/β-caténine
est activée dans des tumeurs corticosurrénaliennes bénignes mais peu ou pas secrétantes,
responsables tout au plus d’un hypercorticisme infra-clinique. Il s’agit de mutations de
CTNNB1 (codant pour la β-caténine), des mutations situées dans l’exon 3 et empêchant
sa dégradation. Cette anomalie génétique a aussi été décrite dans des adénomes de Conn
très particuliers, secrétant de l’aldostérone uniquement à l’occasion d’une grossesse ou de
la ménopause (46) et non dans des adénomes de Conn développés hors grossesse. Mais,
même en l’absence de cette mutation, la voie Wnt/β-caténine est activée dans 70 % des
adénome de Conn, en relation avec une expression diminuée de la protéine inhibitrice
SFRP2 (frizzled related protein 2). Le mécanisme moléculaire précis reste inconnu. Enfin,

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 45

la voie Wnt/β-caténine est activée dans 40 % des tumeurs malignes du cortex surrénalien
par différents mécanismes dont des mutations ponctuelles de l’exon 3 de CTNNB1 (58).
Le rôle des hormones sexuelles dans l’équilibre entre ces deux voies AMPc/PKA et
Wnt/β-caténine reste à préciser. Un modèle murin de PPNAD par inactivation de
PRKAR1A a permis de mieux comprendre par quel mécanisme la maladie se manifeste
plus tôt et de façon plus intense chez les femelles que chez les mâles, comme dans l’espèce
humaine. Ceci s’explique en partie par un renouvellement plus lent du cortex surrénalien
chez les souris mâles, sous l’effet de la testostérone. L’action de la testostérone pourrait
passer par l’activation de Wnt/β-caténine (via la répression du récepteur FrzB) qui, en
s’opposant à l’activité PKA, pourrait expliquer l’atténuation du phénotype ou le retard
d’apparition de la maladie chez les mâles (59).
Le lien entre prolifération tumorale surrénalienne et grossesse reste partiellement
élu­cidé. Des récepteurs de la progestérone et de l’œstradiol ont été mis en évidence dans la
surrénale normale et dans les tumeurs bénignes et malignes de la corticosurrénale, à des
taux qui auraient été considérés comme associés à une réponse à une hormonothérapie
dans le cancer du sein (47). L’estradiol stimule la prolifération cellulaire dans la lignée de
corticosurrénalome H295R. L’inactivation de ER bloque la prolifération cellulaire induite
par l’E2 et l’ IGF-II dans cette même lignée (60). Le récepteur de la LH/hCG est également
exprimé dans les cellules corticosurrénaliennes tumorales et dans la lignée H295R.
Un modèle murin souligne le lien entre tumorigénèse surrénalienne et hCG/LH.
Certaines lignées de rongeurs développent des tumeurs corticosurrénaliennes malignes en
cas de castration, sous l’influence de la sécrétion de LH (61). Les bases génétiques de cette
susceptibilité ne sont pas encore éclaircies. Il s’agit d’un trait complexe influencé par
plusieurs loci. On sait que la castration induit dans les lignées murines susceptibles,
l’expression dans la surrénale de gènes habituellement exprimés dans les gonades : récep-
teur de la LH, AMH, inhibine, facteurs de transcription Gata4 et Wt1 (62). GATA 4
semble jouer un rôle prédominant dans le processus de tumorigenèse induit par la castra-
tion puisque l’expression transgénique de ce facteur de transcription suffit à induire le
développement de tumeurs de la corticosurrénale à partir de cellules sous capsulaires
progénitrices, et que son inactivation empêche le développement de tumeurs dans des
lignées normalement sensibles à la castration (63). Le lien entre GATA4 et prolifération
cellulaire reste inconnu.
Chez plusieurs patientes présentant un hypercorticisme dépendant de la grossesse, la
réponse in vivo à de multiples stimuli dont l’hCG a été bien documentée. L’équipe d’U.
Plockinger (64) a récemment détaillé les modifications histologiques et moléculaires
induites par l’hCG chez une patiente ayant présenté un syndrome de Cushing récidivant
à chaque grossesse avec hyperplasie surrénalienne réversible après l’accouchement… Les
auteurs ont confirmé la stimulation de la sécrétion de cortisol par l’hCG in vivo. Après
surrénalectomie, la surexpression du récepteur LH/hCG, des récepteurs de la vasopressine,
de la POMC et de GATA4 a pu être démontrée dans les cellules surrénaliennes, ainsi que
la sécrétion de cortisol, de minéralocorticoïdes et d’androgènes en réponse à l’hCG. Les
cellules surexprimant le récepteur de la LH/hCG étaient localisées dans la région sous-
capsulaire et la zone glomérulée, ainsi que parmi des cellules stéroïdogéniques hyperpla-
siques de la corticosurrénale. La médullosurrénale comportait des clusters de cellules
cor­ti­
cosurrénaliennes ectopiques coexprimant les enzymes CYP11B1/CYP11B2 et les
récepteurs AVPR1 & 2. Les mutations de CTNNB1, PRKAR1A, ARMC5, et PRKACA

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ont été exclues. Les auteurs formulent l’hypothèse que l’hypercorticisme induit par la
grossesse chez cette patiente résultait de la transformation, sous l’effet de l’hCG, de cellules
sous-capsulaires indifférenciées exprimant le récepteur LH/hCG (des cellules progéni-
trices ayant conservé la possibilité d’exprimer des gènes normalement exprimés spécifique-
ment dans les gonades ?) en cellules corticosurrénaliennes hyperplasiques répondant à la
LH/hCG. La présence du facteur de transcription GATA4 dans ces cellules rappelle le
modèle murin décrit ci-dessus.
Des adénomes de Conn révélés pendant une grossesse ont été décrits avec histologique-
ment un aspect de type zone glomérulée (« glomerulosa–like adenoma ») (65), différents des
adénomes de Conn les plus fréquemment rencontrés, d’aspect fasciculé (« zona fasciculata–
like aldosterone-producing adenomas »), fréquemment mutés au niveau du gène KCNJ5 ou
d’autres canaux ioniques. Des mutations de CACNA1D sont au contraire retrouvées dans
les adénomes de Conn type « zona-glomerulosa-like » tout comme des mutations de
CTNNB1 codant pour la β-caténine (3 % des adénomes de Conn, associés au sexe
fé­minin). Par ailleurs, l’expression du récepteur LH/hCG a été rapportée dans des
adénomes de Conn. Un travail de Teo et al. sur trois adénomes de Conn révélés pendant
la grossesse a confirmé la particularité histologique (aspect de type zone glomérulée) des
adénomes révélés pendant la grossesse, et la présence d’une mutation activatrice de la
β-caténine. Par ailleurs ces adénomes présentaient une surrexpression majeure du récep-
teur LH/hCG et du facteur de transcription GATA4. Les auteurs ont montré que la trans-
fection de CTNNB1 muté dans des cellules glomérulées en culture primaire suffisait à
induite l’expression du récepteur LH/hCG (46).

7. CONCLUSION
Diagnostiquer une pathologie corticosurrénalienne chez une femme enceinte et la
traiter constitue un cas de figure rare et difficile, avec des risques pour la mère comme pour
l’enfant. La prise en charge de la patiente nécessite une collaboration étroite entre endocri-
nologue, obstétricien et pédiatre, mais aussi une concertation avec les médecins biochi-
mistes et radiologues. Les liens physiopathologiques entre prolifération/sécrétion cortico-
surrénaliennes et les hormones produites durant la grossesse commencent tout juste à être
connus. Ils sont l’objet de recherches dont l’enjeu est une meilleure connaissance du
dimorphisme sexuel qui caractérise la pathologie surrénalienne en général. La prise en
charge oncologique des patientes devrait en être améliorée.

Service d’Endocrinologie Nutrition, Hôpital Ambroise Paré,


9 Av Charles de Gaulle, 92100 Boulogne

Adresse pour la correspondance : Pr Marie-Laure Raffin-Sanson


E-mail : marie-laure.raffin-sanson@aphp.fr
sophia_bak@hotmail.com
mohammed.barigou@aphp.fr
capucine.demarcellus@aphp.fr
ramona.zaharia@aphp.fr
marion.bretault@aphp.fr
elodie.le-marois@aphp.fr
dimitriamagk@gmail.com
laure.cazabat@aphp.fr

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 47

n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
XXXXXXXXX
by Sophia BAKOPOULOU, Mohammed BARIGOU,
Capucine DE MARCELLUS, Ramona ZAHARIA, Marion BRETAULT,
Élodie LE MAROIS, Dimitra MAGKOU, Laure CAZABAT
and Marie-Laure RAFFIN-SANSON (Boulogne - France)

ABSTRACT
Om xxxx

Key-words : m .

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Grossesse et pathologies cortico-surrénaliennes 49

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Paris, 23-24 novembre 2018


50

NOTES

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


DÉPISTAGE DE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE
SILENCIEUSE CHEZ LE DIABÉTIQUE

par Emmanuel COSSON1,2 (Paris)

Le dépistage de l’ischémie myocardique chez le patient diabétique asymptomatique ne


n n n n n n n n n n

doit pas être systématique mais réalisé uniquement en cas de très haut risque
cardiovasculaire. Nous proposons de considérer dans cette catégorie les patients avec
atteinte d’organe évoluée et de considérer, au cas échéant, ceux qui présentent un score
calcique coronaire ≥ 400 UA. Cela permettra peut-être dans cette population très ciblée
de limiter le risque cardiovasculaire résiduel, comme le suggère une méta-analyse récente.

Mots-clés : diabète, coronaropathie, ischémie myocardique silencieuse, score calcique coronaire, revascu­
larisation.

La coronaropathie représente toujours une menace de Santé Publique, avec 2,2 fois plus
d’hospitalisations pour infarctus du myocarde chez les patients diabétiques que chez les
non diabétiques en France (1). Actuellement, les patients diabétiques gardent un sur-risque
cardiovasculaire malgré une prise en charge optimisée (2). Une partie du risque résiduel
semble attribuable à la coronaropathie silencieuse.
Le dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse (IMS) chez le patient diabétique a
été très longtemps recommandé et pratiqué très largement, notamment en France (3).
Cependant, il a été remis en cause par plusieurs études randomisées (4-7). De nombreuses
recommandations prônent maintenant de ne plus effectuer de dépistage chez le patient
asymptomatique, mais certaines proposent encore un dépistage très sélectif s’il est accom-
pagné de mesures thérapeutiques en cas de diagnostic positif.

QU’EST-CE QUE L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE SILENCIEUSE ?


La classification de Cohn et al., proposée dans les années 80 (8), détermine trois types
d’IMS : l’IMS de type 1 concerne les patients totalement asymptomatiques, celle de type 2
ceux qui sont en prévention secondaire coronaire et celle de type 3 ceux qui présentent
alternativement des épisodes symptomatiques et asymptomatiques. Le patient diabétique
auquel nous nous intéressons ici est asymptomatique sur le plan coronarien (IMS de
type  1), a fortiori stable, mais pourrait présenter, en raison de son risque cardiovasculaire a
priori, une coronaropathie silencieuse.
D’anciennes études, dont les résultats n’ont pas été confirmés à l’heure actuelle, ont
montré que l’ischémie myocardique était deux à trois fois plus souvent indolore ou silen-
cieuse chez les diabétiques que chez les non diabétiques (9, 10), ce qui a justifié qu’on
s’intéresse à cette population.

Paris, 23-24 novembre 2018


52 Emmanuel COSSON

COMMENT S’EXPLIQUE CETTE ISCHÉMIE ?


La coronarographie réalisée chez un patient présentant une IMS diagnostiquée par
ECG d’effort, ou scintigraphie myocardique, ou échographie de stress, ne met en évidence
de sténoses coronaires significatives que dans 40 [8, 18, 26, 27] à 90 % des cas [9, 13, 25].
En l’absence de sténose significative, la positivité de l’examen peut être due à un artéfact,
comme une atténuation mammaire à la scintigraphie myocardique simulant une hypoper-
fusion inférieure. Le plus souvent, lorsque la coronarographie est normale, l’ischémie est
due à des atteintes microangiopathiques, de la fonction endothéliale (11, 12) et/ou de la
réserve coronaire (13). Plusieurs facteurs physiopathologiques participent à l’ischémie
myocardique, silencieuse ou non, du diabétique. Comme chez tous les patients présentant
une (ou des) sténose(s) coronaire(s), la présence d’une dépression de la vasodilatation
endothélium-dépendante, quasi-constante chez les diabétiques (14), augmente le degré de
la sténose lors des stress qui stimulent le système orthosympathique (émotion, froid,
exercice). IMS et dysfonction endothéliale sont liées (11). L’altération de la vasodilatation
endothélium-dépendante touche également la microcirculation coronaire, ce qui altère les
mécanismes d’adaptation du débit coronaire à la demande métabolique du myocarde (11,
15). Enfin, des altérations structurelles de la microcirculation coronaire diminuent la
surface de section fonctionnelle des micro-vaisseaux et par conséquent la capacité d’aug-
mentation du débit coronaire (14). Ainsi les mécanismes physiopathologiques s’accu-
mulent pour concourir à perturber sévèrement le débit coronaire.
Les sténoses coronaires chez le patient diabétique sont volontiers plus diffuses et distales
que chez le sujet non diabétique. Les artères sont petites et calcifiées, de revascularisation
souvent difficile. Les plaques sont riches en thrombus et souvent instables (16). Enfin, la
proportion de patients ayant des atteintes tri-tronculaires est plus importante. Il n’y a pas
d’étude montrant des caractéristiques différentes selon le caractère symptomatique ou non
de la coronaropathie. Le caractère asymptomatique de l’ischémie n’est pas réellement
expliqué. Une des hypothèses est la présence d’une neuropathie, notamment autonome
cardiaque, chez le patient diabétique (17).

COMMENT DÉPISTER L’ISCHÉMIE MYOCARDIQUE ET LA


CORONAROPATHIE SILENCIEUSES ?
- Ê
 tre sûr préalablement que le patient est bien asymptomatique : l’interrogatoire et
l’ECG de repos.
L’interrogatoire minutieux du patient est une étape clé de l’examen du patient diabétique.
Il faut évoquer une ischémie voire un infarctus du myocarde lors de la survenue soudaine
de symptômes atypiques pour un angor et par ailleurs inexpliqués, comme des troubles
digestifs et parfois des douleurs épigastriques, une asthénie, en particulier à l’effort, des
troubles du rythme cardiaque, une baisse de la pression artérielle ou une dyspnée d’effort.
La réalisation d’un ECG de repos est recommandée annuellement (18). L’ECG de repos
peut révéler des signes d’ischémie de repos ou un infarctus du myocarde silencieux (19).
L’ECG de repos demeure un puissant marqueur de risque cardiovasculaire : une onde Q
chez un patient asymptomatique est associée à un sur-risque d’infarctus du myocarde (20).
Ces ondes Q ont été rapportées chez 4 à 28 % des patients diabétiques (19). L’échocardio-
graphie peut mettre en évidence une hypokinésie régionale faisant aussi suspecter un
infarctus silencieux (21). Dans ces cas, une exploration cardiologique est préconisée et il

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique 53

ne s’agit pas d’IMS. Une coronarographie doit être réalisée immédiatement en cas d’ano-
malies à l’ECG de repos en faveur d’un infarctus silencieux (3).
- Chez le patient totalement asymptomatique, dépister par un test non invasif
La scintigraphie myocardique et l’échographie de stress sont plus sensibles que l’ECG
d’effort pour dépister des patients avec une coronaropathie silencieuse (22). Les résultats
des épreuves réalisées chez les mêmes patients peuvent être cependant hétérogènes selon
l’épreuve effectuée. Dans une série de 262 patients diabétiques asymptomatiques ayant
effectué une scintigraphie myocardique de stress (c'est-à-dire après ECG d’effort),
54  patients avaient un ECG d’effort anormal, et 42 patients supplémentaires avaient des
anomalies de la scintigraphie alors que l’ECG d’effort était normal (23).
La valeur prédictive positive de l’IMS pour détecter des sténoses coronaires significatives
est plus élevée lorsque deux tests fonctionnels sont concordants. Dans la série de patients
citée plus haut, la valeur prédictive positive d’une anomalie isolée scintigraphique ou à
l’ECG d’effort était de 45 % environ, contre 64 % lorsque anomalies scintigraphiques et à
l’ECG d’effort étaient combinées (23).

PRÉVALENCE ET FACTEURS DE RISQUE DE L’IMS


De nombreux facteurs expliquent que la prévalence de l’IMS chez les patients diabé-
tiques varie de 6,4 (24) à 73 % (25).
- le test effectué
La scintigraphie et l’échographie de stress sont plus sensibles que l’ECG d’effort. Lorsque
la définition est une anomalie à deux examens, la prévalence est également plus faible en
raison de la non-concordance des résultats des épreuves (24).
- le sexe du patient
Les femmes ont au moins deux fois plus d’IMS que les hommes (7, 24-27).
- la présence ou non de facteurs de risque cardiovasculaire (28)
L’âge de plus de 60 ans (27, 29), la dyslipidémie, l’hypertension artérielle, le tabagisme et
les antécédents familiaux précoces de maladie cardiovasculaire (7, 24, 25, 27, 30-33) sont
des facteurs de risque classiques d’IMS. Il a été montré récemment que la présence d’une
dyslipidémie athérogène doublait le risque d’IMS et de sténoses coronaires parmi les
patients dont l’objectif de LDL cholestérol était atteint (34).
- La présence ou non d’une complication du diabète
L’IMS est également plus fréquente en cas d’atteinte microangiopathique : néphropathie
(24, 30-32), neuropathie autonome cardiaque (17) mais aussi rétinopathie (25, 26). Les
atteintes artérielles périphériques (7, 25, 27, 33) mais aussi la cardiopathie (notamment
hypertrophie et dilatation ventriculaires gauches) (21) sont associées à plus d’IMS. Nous
avions également retrouvé qu’une concentration de NT-proBNP ≥ 38 pg/m était associée
à un triplement du risque de coronaropathie silencieuse, indépendamment des autres
facteurs de risque et de la fonction ventriculaire gauche (35). Enfin, la dysfonction érectile
est prédictive d’IMS (36).
- La prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire
Dans l’étude Detection of Ischemia in Asymptomatic Diabetics (DIAD), plus de la moitié

Paris, 23-24 novembre 2018


54 Emmanuel COSSON

des patients avec une scintigraphie anormale normalisaient leur scintigraphie trois ans
plus tard, probablement grâce au traitement intensif de leurs facteurs de risque (37). Ainsi,
la prévalence de l’IMS diminue progressivement. L’équipe de Montpellier a récemment
rapporté que la prévalence de l’IMS avait progressivement diminué de la période 1999-2002
(22,9 %) à 2003-2005 (13,9 %) pour tomber à seulement 5,9 % en 2006-2009 (38).
- Le score calcique coronaire :
La tomodensitométrie cardiaque quantifie les calcifications coronaires dont la quantité
est proportionnelle à la probabilité de plaques athéromateuses. Le score calcique coronaire
(CAC) score est associé à la présence d’une IMS, et d’autant plus élevé que l’ischémie est
sévère (39). Dans la série de Bondy, nous trouvons une association entre CAC score et
IMS (1/3 des patients avec un CAC score ≥ 100 UA ont une IMS contre 10 % pour ceux
dont le CAC score est < 100). Le CAC score est d’autant plus utile pour sélectionner les
patients à risque d’IMS qu’ils ne présentent pas de macroprotéinurie ni d’artériopathie
périphérique (qui leur confèrent, de toute façon, un très haut risque cardiovasculaire a
priori). Enfin, 75 % des patients qui présentent une IMS et des sténoses coronaires signifi-
catives ont un CAC score ≥ 100 UA.

QUEL EST LE PRONOSTIC DE L’IMS ?


L’IMS détectée par ECG d’effort (40, 41) ou par scintigraphie myocardique (4, 7 24 27
42 44) est associée à plus d’événements cardiovasculaires. La valeur prédictive d’événe-
ments cardiaques de la scintigraphie myocardique est d’autant plus importante que la
proportion de segments atteints est importante (4, 7). Le pronostic de l’IMS est d’autant
plus péjoratif que les anomalies de perfusion sont associées à des sténoses coronaires signi-
ficatives (40). On note également que l’IMS est de plus mauvais pronostic chez les patients
âgés de plus de 60 ans (29), et chez ceux présentant une neuropathie autonome
cardiaque  (45).
En outre, le statut ischémique a une valeur pronostique additionnelle au risque a priori,
estimé sur les facteurs de risque classiques (46). Ainsi, des patients estimés à risque inter-
médiaire selon leurs facteurs de risque évalués en routine peuvent être reclassés à très haut
risque quand ils présentent une IMS. A contrario, ceux classés à haut risque selon leurs
facteurs de risque classiques passeraient à un risque intermédiaire en l’absence d’IMS (46).
Il semble donc que l’IMS participe au risque résiduel et reste un bon marqueur de risque
cardiovasculaire, permettant de reclasser leur risque.

EST-CE QUE DÉPISTER L’IMS PEUT AMÉLIORER LE PRONOSTIC


CARDIOVASCULAIRE DES PATIENTS ?
- Des données initiales encourageantes
En raison de leur très haut risque cardiovasculaire, on estime que les patients présentant
une IMS doivent avoir une intensification de leur traitement préventif, avec, en particu-
lier, un objectif de LDL-cholestérol aussi bas qu’en prévention secondaire (47). La prescrip-
tion d’agents anti-plaquettaires et d’un traitement anti-angineux (béta-bloquants, inhi­­
biteurs calciques, dérivés nitrés) avait montré son efficacité chez les patients avec des
sténoses coronaires silencieuses (48-50). De façon très encourageante, une étude obser­
vationnelle regroupant 1189 patients diabétiques de type 2 asymptomatiques subdivisés en
deux groupes selon qu’ils avaient été dépistés (n=921) ou non (n=268) pour une corona-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique 55

ropathie silencieuse avait suggéré que la revascularisation en cas de sténose coronaire


significative pourrait également être utile. Après un suivi de 4,3±1,9 ans, l’incidence d’évé-
nements cardiovasculaires était diminuée dans le groupe « dépisté » en comparaison du
groupe « non dépisté », même après étude multivariée prenant en compte les facteurs de
confusion [hazard ratio (HR) de 0,2 (0,2-0,3)] (51).
- La douche froide des études randomisées (Tableau 1)
DIAD et DYNAMIT ont montré que le pronostic des patients ne différait pas qu’ils aient
été dépistés ou non. Cependant, aucune intervention n’était pré-spécifiée en cas d’IMS (4,
52). Par exemple, dans DIAD, seulement un tiers des patients avec IMS ont eu une corona-
rographie. En outre, le nombre de patients ayant eu une recherche d’IMS et une revascu-
larisation pendant le suivi a été paradoxalement le double dans le groupe « non dépisté »
comparativement au groupe « dépisté », ce qui a réduit la puissance de l’étude (4).
Le pronostic était cependant amélioré dans le groupe interventionnel d’une étude pilote
italienne dans laquelle une intervention était planifiée en cas d’ischémie (43). Dans cette
étude, 15 patients avec IMS dans le bras interventionnel avaient des sténoses coronaires
significatives, et 14 d’entre eux avaient été revascularisés (43).
L’intervention de l’étude Factor 64 consistait en la réalisation d’une angiographie co­ro­
naire par tomodensitométrie (coroscan) et la mesure concomitante du score CAC  (5). En
cas d’anomalies intermédiaires, une recherche d’ischémie par une scintigraphie, suivie par
une coronarographie et une éventuelle revascularisation coronaire, était prévue. En cas de
lésions importantes à l’examen tomodensitométrique, la coronarographie était réalisée
d’emblée. En cas d’anomalie, le traitement médical était encore optimisé. Après un suivi
de 4 ans, le taux de survenue d’événements cardiovasculaires était identique dans les deux
bras et les auteurs ont conclu que ce type de stratégie était inutile. L’analyse fine de l’article
doit nous faire relativiser ces propos. Tout d’abord, les patients étaient à bas risque cardio-
vasculaire (incidence annuelle d’événements de 1,9 %). Ensuite, 12,6 % des participants
n’ont pas eu d’angioscanner pour des raisons techniques. En outre, on note une déviation
de protocole : parmi les 395 patients ayant eu un angioscanner, 160 (40,7 %) avaient un
CAC score > 100 et 40 (11,9 %) avaient des sténoses modérées à l’angioscanner et auraient
dû avoir une recherche d’IMS. Or, seuls 61 de ces 200 patients ont été dépistés, et, de ce
fait, le nombre de coronarographies réalisées a été limité.
Enfin, dans l’étude DADDY-D (Does coronary Atherosclerosis Deserve to be Diagnosed
earlY in Diabetic patients?), une stratégie guidée par les résultats de l’ECG d’effort n’a pas
amélioré le pronostic (6). En analyse en sous groupes, l’incidence d’insuffisance cardiaque
était diminuée dans le groupe interventionnel chez les patients à risque intermédiaire, et
celle de décès chez le patients de plus de 60 ans (6).
Certaines études ont randomisé uniquement des patients avec IMS pour comparer des
approches thérapeutiques différentes. Les plus anciennes ont montré qu’un traitement
anti-angineux (49, 53) et que les revascularisations coronaires (53) permettaient de réduire
les événements cardiovasculaires par rapport à un contrôle optimisé des facteurs de risque
seul. Dans l’étude BARDOT (Basel Asymptomatic high-Risk Diabetics’ Outcome Trial), une
stratégie combinée, médicale et invasive en cas de sténoses coronaires, vs un traitement
médical seul, a permis de réduire la progression de l’ischémie à la scintigraphie, sans
diminuer l’incidence des événements cardiovasculaires (7).
Enfin, une méta-analyse récente montre une réduction des événements de 27 % en cas
de dépistage (54).

Paris, 23-24 novembre 2018


56 Emmanuel COSSON

Tableau 1. - Études randomisées concernant le dépistage, ou le traitement de l’ischémie myocardique


silencieuse, ou les deux, chez des patients, le plus souvent diabétiques de type 2, asymptomatiques
et en prévention primaire
Étude / Critères d’inclusion Groupe contrôle versus interventionnel Résultats principaux
Référence
Dépistage de l’ischémie myocardique
DIAD (4) DT2 Pas de dépistage (n=562) Suivi : 4,8±0,9 ans
50-75 ans versus Décès cardiaque ou IDM :
Dépistage par scintigraphie myocardique HR 0,88 (0,44-1,88)
(n=561)
DYNAMIT DT2 Pas de dépistage (n=315) Suivi : 3,5 ans
(52) ≥ 2 FDR versus Décès cardiaque ou IDM ou
Dépistage par ECG d’effort ou IC ou AVC :
scintigraphie myocardique (n=316) HR 1,0 (0,59-1,71)
Stratégie combinant un dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse, et son traitement en cas de présence
Faglia et al. DT2 Pas de dépistage (n=70) Suivi : 2,4 ans
(43) 46-75 ans versus Décès par IDM, IDM, angor
≥ 2 FDR Dépistage par ECG d’effort ou scintigra- de repos :
phie myocardique / Si un test anormal, HR 0,23 (0,71-0,72)
coronarographie et
revascularisation si possible (n=71)
FACTOR DT2 ou DT1 Contrôle des FDR (n=448) Suivi : 4,0±1,7 ans
64 (5) depuis > 3-5 ans versus Décès ou IDM ou angor
Traitement agressif guidé par instable nécessitant une
l’angioscanner, incluant la recherche d’IMS hospitalisation :
et la réalisation de coronarographie HR 0,80 (0,49-1,32)
(n=452)
DADDY-D DT2 Contrôle des FDR (n=258) Suivi : 3,6 ans
trial (6) 50-70 ans versus Décès cardiaque ou IDM :
Risque CV à 10 ans ≥ 10 % ECG d’effort / si anormal : OR = 0,849 (0,393–1,827)
coronarographie et revascularisation si IC : HR 0,27 (0,06–1,31)
possible (n=262)
Traitement de l’ischémie myocardique silencieuse
ACIP (49) Patients avec des - Traitement guidé par la présence d’un Suivi : 2,0 ans
sténoses coronaires angor clinique (n=183) Décès : 6,6 vs 4,4 vs 1,1 %
revascularisables, versus (p=0,02)
découvertes suite à un - Traitement guidé par la présence d’un Décès ou IDM : 12,1 vs 8,8
ECG d’effort ou un holter angor clinique ou scintigraphique (n=183) vs 4,7 (p<0,05)
ECG anormal versus
! DT2 16 % - Revascularisation (n=192)
SWISSI 1 ≥ 1 FDR - Contrôle des FDR (n=28) Suivi : 4,8±0,9 ans
(53) ECG d’effort et versus Décès cardiaque ou IDM ou
scinti­graphie myocar- - Contrôle des FDR et traitement SCA : 61 vs 12 %, p<0,001
dique anormaux anti-angineux et aspirine (n=26)
! DT2 10 %
BARDOT DT2 ≥ 5 ans Stratégie médicale (n=41) Suivi : 2,0±0,2 ans
(7) AOMI ou rétinopathie ou versus Décès cardiaque ou IDM ou
néphropathie ou NAC ou Stratégie médicale et coronarographie revascularisation pour
≥2 FDR avec revascularisation si possible (n=46) angor : HR 0,36 (0,05–1,81)
Scintigraphie Ischémie scintigraphique :
myocardique anormale 0,16 (0,05–0,45)
ACIP : Asymptomatic Cardiac Ischemia Pilot; AOMI : artériopathie périphérique des membres inférieurs ;
AVC : accident vasculaire cérébral ; SCA: syndrome coronarien aigu; BARDOT: Basel Asymptomatic high-Risk
Diabetics’ Outcome Trial; DIAD : Detection of Ischemia in Asymptomatic Diabetics; DADDY-D : Does coronary
Atherosclerosis Deserve to be Diagnosed earlY in Diabetic patients?; DT1 : diabète de type 1 ;
DT2 : diabète de type 2 ; FDR: facteur de risque cardiovasculaire ; HR: hazard ratio ; IC : insuffisance cardiaque ;
IDM : infarctus du myocarde ; CV : cardiovasculaire.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique 57

QUELLES SONT LES RECOMMANDATIONS ACTUELLES ?


En France, la Haute Autorité de Santé annonce clairement qu’il faut éviter de dépister
systématiquement l’IMS (55). La proposition est de considérer les « patients asympto­
matiques à risque cardiovasculaire élevé pour lesquels la réalisation de tests fonctionnels
et le recours au cardiologue peuvent être justifiés : artérite oblitérante des membres
inférieurs, accident vasculaire cérébral, protéinurie, deux autres facteurs de risque associés
au diabète ». Ce dernier critère ne limite pas du tout la prescription par rapport aux
anciennes recommandations (3). Les recommandations américaines sont en revanche très
limitatives, puisque, en dehors des patients pauci- ou symptomatiques, elles ne recom-
mandent une recherche d’IMS que chez les patients présentant une atteinte artérielle
périphérique  (56).
Les recommandations européennes, qui seront mises à jour l’année prochaine, proposent
actuellement d’envisager un dépistage chez les patients considérés à très haut risque,
notamment ceux avec une atteinte d’organe cible comme la macro-protéinurie, l’insuffi-
sance rénale, les atteintes vasculaires périphériques ou un score CAC élevé (57). Une
recherche d’IMS apparaît également licite en cas de reprise de l’activité physique et l’ECG
d’effort est alors l’exploration la plus adaptée dans ce contexte particulier. Il s’agit d’un cas
particulier que nous ne traitons pas dans ce manuscrit.

COMMENT ADAPTER NOTRE PRATIQUE ? (Figure 1)


- Dépister les sujets à très haut risque
Même si les faisceaux de preuve sont très faibles, on peut encore penser que la prise en
charge de l’IMS et des sténoses coronaires silencieuses pourrait réduire le risque cardiovas-
culaire résiduel des patients à très haut risque. La question revient donc à identifier ces
patients.
La première façon, la plus simple, est de considérer des variables cliniques de routine. La
présence d’atteintes d’organe identifie une durée et une intensité suffisante d’exposition aux
facteurs de risque cardiovasculaire ayant conduit à une atteinte de la paroi vasculaire. La
présence d’une insuffisance rénale, d’une macroprotéinurie, d’une neuropathie auto­nome
cardiaque symptomatique (hypotension artérielle orthostatique, non adaptation de la
fréquence cardiaque à l’effort), d’une rétinopathie proliférante, d’une artériopathie oblité-
rante des membres inférieurs ou des troncs supra-aortiques pourrait être considérée.
Chez les nombreux patients exempts de ces atteintes d’organe, un CAC score ≥ 400 UA
est probablement le plus apte à identifier, en seconde étape, ceux qui seraient en réalité à
très haut risque cardiovasculaire. Le CAC score offre les taux de reclassement du risque
cardiovasculaire les plus élevés (58). Un score nul a une valeur prédictive négative d’évé-
nement cardiovasculaires excellente avec seulement 4 % d’événement survenant à 10 ans,
tandis qu’un score ≥ 400 UA est fortement prédictif d’événement ischémiques (20 à 30 %)
chez les diabétiques, à des niveaux équivalents voire dépassant ceux de la prévention
secondaire (59, 60). Cette exploration pourrait être renouvelée tous les 3-4 ans dans la
population avec des chiffres moindres.
- Comment dépister l’IMS ?
Les explorations les plus sensibles sont la scintigraphie myocardique et l’échographie
de stress. Le choix sera porté par la disponibilité des ces explorations et également les

Paris, 23-24 novembre 2018


58 Emmanuel COSSON

ETAPE 1
- Examen clinique
- Evaluation des facteurs de risque cardiovasculaire
Routine - Bilan des complications du diabète
- ECG de repos
- Echographie cardiaque, dopplers (si disponibles)

Risque a priori
Bas Intermédiaire Elévé Très élevé
DT1 : âge < 15 ans Macroprotéinurie
ou ou
DT2 : âge < 40 ans Insuffisance rénale
Et ou
pas de FDR CV Rétinopathie proliférante
Et ou
pas de complication NAC symptomatique
ou
Atteintes vasculaires
ETAPE 2 périphériques

CAC score Recherche


d’IMS
0 1-10 11-399 400+

Reclassement du risque (Risque a posteriori)


Bas Intermédiaire Elévé Très élevé

Figure 1. - Proposition d’indications d’une recherche d’ischémie myocardique dans la population


diabétique.
CAC : score calcique coronaire ; DT1 et DT2 : diabète de type 1 et 2 ; ECG : électrocardiogramme ;
NAC : neuropathie autonome cardiaque

caractéristiques du patient.
- Que faire en cas d’IMS ?
Le traitement des facteurs de risque doit être optimisé, et le patient considéré comme à
très haut risque cardiovasculaire. Dans ce cadre, on privilégiera les molécules hypoglycé-
miantes à favoriser en cas de prévention secondaire (https://www.sfdiabete.org/sites/www.
sfdiabete.org/files/files/ressources/prise_de_position_sfd_diabete_type_2.pdf) (56). Un traite-
ment anti-angineux doit être mis en place. Enfin, le patient sera exploré par coronarogra-
phie pour évaluer si une revascularisation coronaire peut être utile.
La revascularisation coronaire est remise en cause depuis l’étude COURAGE qui avait
rapporté un pronostic identique comparativement au traitement médical multifactoriel
intensifié dans la population diabétique ou non (61), puis l’étude BARI-2D (Bypass Angio-
plasty Revascularization Investigation 2 Diabetes) qui avait montré, dans une population de
patients diabétiques de type 2 avec coronaropathie stable, que les patients relevant d’une
angioplastie, randomisés pour une angioplastie vs un traitement médical seul, avaient le
même pronostic. En revanche, les patients avec indication de pontage coronaire et rando-
misés dans le groupe revascularisation et pontés avaient un meilleur pronostic que ceux
traités médicalement (62). Les revascularisations permettaient toutefois de réduire la
symptomatologie, même après angioplastie (63).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Dépistage de l’ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique 59

Depuis, les angioplasties avec stents actifs ont montré une meilleure efficacité que les
anciennes méthodes d’angioplastie (64), avec cependant un risque de thrombose plus
important qu’après pontage. Actuellement, tout stent doit être actif chez le patient diabé-
tique pour limiter le risque de resténose (55). L’étude SYNTAX a montré chez des patients
présentant des lésions tritronculaires et/ou une sténose du tronc commun de la coronaire
gauche, dont un quart étaient diabétiques, que le traitement par pontage conduisait à
moins d’événements à 12 mois qu’un traitement par stent actif (65). Dans l’étude CARDIa
(Coronary Artery Revascularization in Diabetes) qui avait recruté des patients diabétiques
ayant une atteinte coronaire multi-tronculaire symptomatique, les patients randomisés
dans le bras pontage présentaient un taux de mortalité, d’infarctus du myocarde, d’acci-
dent vasculaire cérébral et de nouvelle revascularisation moindre que les patients dans le
bras angioplastie avec stent (66). L’étude FREEDOM (Future REvascularization Evaluation
in patients with Diabetes mellitus: optimal management of Multivessel disease), réalisée chez
des diabétiques dont 80 % présentaient des lésions tri-tronculaires, a montré que les perfor-
mances du pontage restaient meilleures que celles de l’angioplastie avec stent actif (67).
Au total, en cas de lésion coronaire unique simple, le traitement médical seul peut être
envisagé ; en cas de lésions multiples ou plus complexes (score SYNTAX > 22), chez des
patients opérables, il faut actuellement privilégier les pontages (68). Dans les autres cas, les
angioplasties peuvent être considérées comme une alternative pour contrôler les douleurs,
et doivent être réalisées avec stent actif (55) et double anti-agrégation (57).

AU TOTAL
L’IMS reste un bon marqueur de risque cardiovasculaire résiduel mais sa prévalence a
beaucoup diminué grâce à la prise en charge optimisée des facteurs de risque cardiovascu-
laire dans cette population. La proposition est donc de limiter la recherche d’une IMS à la
proportion très faible de diabétiques étiquetés en routine à très haut risque cardiovascu-
laire : soit a priori en raison d’une atteinte d’organe, soit a posteriori en raison d’un score
CAC très élevé. Le dépistage de l’IMS n’a de sens que s’il conduit à modifier la prise en
charge du risque cardiovasculaires en cas de positivité.
Les conclusions du groupe de travail de la Société Francophone de Diabétologie et de la
Société Française de Cardiologie, coordonné par les Prs Valensi et Henry, devraient être
publiées d’ici la fin d’année 2018.

1
 P-HP, Hôpital Jean Verdier, Université Paris 13, Sorbonne
A
Paris Cité, service d’Endocrinologie-Diabétologie-Nutrition,
CRNH-IdF, CINFO, Bondy, France
2
Sorbonne Paris Cité, UMR U1153 Inserm / U1125 Inra /
Cnam / Université Paris 13, Bobigny, France

Adresse pour la correspondance : Service d’Endocrinologie-Diabétologie-Nutrition - Avenue du 14 juillet  -


Hôpital Jean Verdier - 93143 Bondy Cedex. FRANCE - Tél: +33 148-02-65-80 - Fax: +33 148-02-65-79
Email : emmanuel.cosson@aphp.fr

Paris, 23-24 novembre 2018


60 Emmanuel COSSON

SCREENING FOR SILENT MYOCARDIAL ISCHEMIA IN PATIENTS


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
WITH DIABETES
by Emmanuel COSSON (Paris - France)

ABSTRACT
Screening for ischemia in asymptomatic diabetic patients should not be systematic but
rather performed solely in the patients with a very high cardiovascular risk. We propose to
include in this category the patients with severe organ damage, and if not, those with a
coronary calcium score ≥ 400 AU. This may limit, in this very selective population, residual
cardiovascular risk, as suggested by a recent meta-analysis.

Key-words : diabetes, coronaropathy, silent myocardial ischemia, calcium coronary artery score,
revascularisation.

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


BILAN ET TRAITEMENT D’UNE GYNÉCOMASTIE

par Dominique MAITER (Bruxelles)

La gynécomastie est un symptome pouvant affecter les hommes à toutes les périodes de
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

leur vie. Le plus souvent, il s’agit d’une manifestation bénigne qu’il ne faut cependant pas
toujours banaliser puisqu’elle peut entraîner un préjudice esthétique important et qu’elle
peut être le premier signe clinique d’une affection maligne sous-jacente. Les principales
causes pathologiques de gynécomastie chez l’homme adulte sont, par ordre de fréquence
décroissante, la gynécomastie idiopathique, la gynécomastie pubertaire persistante (ou
récidivante), la gynécomastie induite par des médicaments, les causes d’hypogonadisme
primaire plus que secondaire, la cirrhose, des tumeurs, surtout d’origine testiculaire,
l’hyper­thyroïdie et les causes ‘métaboliques’ comme l’insuffisance rénale ou la réali­
mentation rapide. Le traitement est d’abord - si possible - étiologique. Ensuite, en fonction
de l’importance et de l’ancienneté du problème, une simple surveillance, un gel de
dihydrotestostérone, un traitement par tamoxifène ou une chirurgie plastique correctrice
peuvent être proposés.

Mots-clés : gynécomastie, hypogonadisme masculin, œstrogènes, testostérone, aromatase, adipomastie,


tumeur testiculaire.

La gynécomastie est une augmentation du volume de la glande mammaire chez l’homme


(Figure 1). Elle est le plus souvent bilatérale mais peut être asymétrique et n’être clinique-
ment apparente que d’un seul côté dans la moitié des cas. Elle est parfois sensible, voire
douloureuse, principalement durant les premiers mois après son apparition (1-4). Très
fréquente et souvent physiologique chez le nouveau-né, durant la période pubertaire
(12-15  ans) et chez l’homme âgé, elle est plus rare en dehors de ces trois périodes de la vie
et doit alors faire rechercher une cause pathologique, même si, en dehors d’autres
symptômes ou points d’appel, le bilan étiologique
reste souvent négatif (5).
À l’examen clinique, la gynécomastie est diagnos-
tiquée par la palpation d’un disque de tissu glandu-
laire, de consistance élastique à ferme, d’au moins
0,5 cm de diamètre, habi­­tuellement centré sur le
mamelon. Il faut la distinguer de l’adipomastie (ou
pseudo-gynécomastie) qui est une accumulation
locale de tissu graisseux au niveau de la poitrine, en
particulier chez les sujets en surpoids. Lors de la
palpation d’une adipomastie, on ne palpe pas de
disque tissulaire ferme et bien délimité, contraire-
ment à la gynécomastie. Le cancer du sein est rare Figure 1. - Illustration
chez l’homme (0.2 % des cancers) mais il est 10 fois d’une gynécomastie bilatérale chez
plus fréquent en cas de gynécomastie, probablement un homme jeune.

Paris, 23-24 novembre 2018


64 Dominique MAITER

parce que les facteurs favorisant la croissance du tissu mammaire chez l’homme sont aussi
ceux qui favorisent le cancer du sein (6). Une tumeur cancéreuse est habituellement
unilatérale, excentrée par rapport au mamelon, de consistance dure et adhérente à la peau
ou aux plans profonds (1). Elle est parfois associée à une petite rétraction du mamelon, un
écoulement ou à des adénopathies axillaires.
D’autres causes plus rares de masse au niveau de la région mammaire incluent des
hématomes, kystes dermoïdes, lipomes, neurofibromes ou lymphangiomes.

PHYSIOPATHOLOGIE DE LA GYNÉCOMASTIE
Une gynécomastie survient habituellement suite à une altération, passagère ou perma-
nente, chez l’homme, de la balance entre l’action des œstrogènes (œstradiol et œstrone) et
celle des androgènes, principalement la testostérone. Ces derniers sont des inhibiteurs de
la prolifération du tissu glandulaire mammaire alors que les œstrogènes stimulent la proli-
fération et l’élongation des canaux glandulaires et la vascularisation au sein du tissu
mammaire, comme chez la femme (1, 2). Cette altération de la balance œstrogènes-andro-
gènes peut résulter d’une augmentation absolue des concentrations d’œstrogènes libres,
d’une diminution des concentrations de testostérone libre, d’une augmentation du rapport
œstrogènes/androgènes, d’une résistance partielle à l’action des androgènes et/ou d’un
effet œstrogéniques de certains médicaments ou toxiques.
Il est utile de rappeler brièvement ici les mécanismes de production normale d’œstro-
gènes chez l’homme (Figure 2). Un homme en bonne santé produit en moyenne 45 µg
d’œstradiol par jour, dont une faible proportion (10-20 %) provient d’une sécrétion directe
par les cellules de Leydig testiculaires sous l’impulsion de la LH, et la majeure partie de
l’aromatisation extra-glandulaire des androgènes, principalement au niveau du foie et du
tissu adipeux. Ainsi, l’œstradiol peut être synthétisé directement par aromatisation de la
testostérone en œstradiol, via l’activité de la CYP 19 aromatase, ou indirectement, à partir
des androgènes surrénaliens : production de DHEA, transformée en androstènedione,
aromatisée en estrone, qui est ensuite converti en œstradiol (et vice-versa) sous l’effet de
l’enzyme 17β- hydroxystéroïde déshydrogénase (1,6). L’œstradiol circulant est en majorité
lié à la sex hormone binding globulin (SHBG) mais avec une affinité moindre que celle de

Figure 2. - Principaux mécanismes de production d’œstrogènes chez l’homme adulte normal.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Bilan et traitement d’une gynécomastie 65

la testostérone. Au niveau tissulaire, l’œstradiol et l’œstrone se fixent aux récepteurs


nucléaires des œstrogènes (ER) dont deux formes ont été identifiées, ERα et ERβ.

ÉTIOLOGIES DE LA GYNÉCOMASTIE
Les principales causes de gynécomastie sont reprises dans le tableau 1.

Tableau 1. - Principales causes de gynécomastie regroupées en fonction des principaux mécanismes

Causes physiologiques

Gynécomastie néonatale
Gynécomastie pubertaire
Gynécomastie de l’homme âgé

Causes pathologiques

Causes iatrogènes (médicaments, toxiques, anabolisants)

Par excès en oestrogènes


Tumeurs testiculaires (leydigome, choriocarcinome et séminome contenant des
cellules trophoblastiques, tumeurs à cellules de Sertoli)
Adénocarcinome cortico-surrénalien féminisant
Production extraglandulaire par aromatisation excessive: cirrhose, hyperthyroïdie,
dialyse rénale, réalimentation rapide après dénutrition, mutation activatrice du
gène de l’aromatase,…
Prise exogène d’oestrogènes, volontaire ou accidentelle
Autres tumeurs produisant de l’hCG (pulmonaire, hypothalamique,…)

Par déficit en androgènes


Causes congénitales et acquises d’hypogonadisme primaire et d’hypogonadisme
hypogonadotrope
Augmentation de la SHBG et diminution de la testostérone libre (cirrhose,
hyperthyroïdie)
Syndrome d’insensibilité partielle aux androgènes (mutation du récepteur aux
androgènes responsable d’un phénotype masculin avec hypogonadisme et
gynécomastie pubertaire)

Gynécomastie pubertaire persistante

Gynécomastie idiopathique

1) Les causes physiologiques


La gynécomastie est fréquente et habituellement physiologique lors de trois périodes de
la vie : chez le nouveau-né, au début de la puberté et chez l’homme âgé.
La plupart des nourrissons (environ 60 % d’entre eux) peuvent présenter une petite
gy­né­­comastie et même, parfois, une galactorrhée suite au passage de quantités impor-
tantes d’œstrogènes placentaires dans la circulation du fœtus et du nouveau-né (5). Ces
œstrogènes sont formés par aromatisation placentaire à partir de la DHEA maternelle et

Paris, 23-24 novembre 2018


66 Dominique MAITER

fœtale. Cette gynécomastie ne dure que quelques semaines et est spontanément résolutive.
Elle ne nécessite aucun traitement.
Parmi les adolescents, plus de la moitié sont touchés par une gynécomastie, généralement
très discrète et passant inaperçue. Elle survient aux alentours de 12 à 14 ans et une compo-
sante familiale est souvent retrouvée (8). On ne connaît cependant pas exactement le
mécanisme d’apparition de celle-ci. Elle pourrait être secondaire à une production retardée
de testostérone par rapport à celle des œstrogènes au début de la puberté, à une augmenta-
tion transitoire de l’activité de l’aromatase ou encore à une augmentation de la sensibilité
aux œstrogènes à cet âge. La régression spontanée de cette gynécomastie se fait classique-
ment en 1 ou 2 ans et il est rare qu’elle persiste après l’âge de 17 ans. Il n’y a dès lors pas lieu
d’intervenir médicalement ou chirurgicalement, sauf en cas de persistance inesthétique de
cette gynécomastie après la puberté (gynécomastie pubertaire persistante).
Une gynécomastie est également trouvée fréquemment chez l’homme âgé (30-50 % des
cas selon les séries) (1-5) et est souvent liée à de multiples facteurs : hypogonadisme physio-
logique lié au vieillissement, aromatisation accrue suite à l’augmentation de la masse
grasse, augmentation des concentrations de SHBG et/ou origine médicamenteuse.

2) Les causes pathologiques


Leur fréquence relative varie selon les séries, principalement en fonction des critères de
sélection des patients. À titre indicatif, la Figure 3 montre les proportions relatives
moyennes des principales étiologies de gynécomastie à l’âge adulte.

1. La gynécomastie pubertaire persistante


Bien que ne constituant pas une entité pathologique à proprement parler, la persistance
d’une gynécomastie d’origine pubertaire au-delà de l’âge de 17 ans est un phénomène

Figure 3. - Fréquence moyenne relative des principales causes pathologiques de gynécomastie chez
l’homme adulte (l’utilisation de stéroïdes anabolisants n’est pas considérée dans ce classement et
pourrait constituer jusqu’à 10-15 % des causes de gynécomastie en général).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Bilan et traitement d’une gynécomastie 67

anormal qui peut constituer un problème esthétique important, nécessitant une prise en
charge médicale, voir chirurgicale (voir infra, traitement de la gynécomastie).

2. Les médicaments
Il s’agit d’une cause très fréquente de gynécomastie. La liste de médicaments utilisés
dans des domaines très différents qui peuvent induire une gynécomastie est très longue
(Tableau 2). Ceux qui sont le plus souvent incriminés sont la spironolactone, la ciméti-
dine, le kétoconazole, l’hormone de croissance recombinante, les œstrogènes, les anti-
androgènes, les agonistes de la gonadolibérine (gonadotropin releasing hormone -GnRH-) et
les inhibiteurs de la 5-alpha réductase (9). L’effet des médicaments est généralement dose-
dépendant. Ainsi, la spironolactone à faibles doses (25-50 mg/jour) induit une gynéco-
mastie chez environ 10 % des sujets masculins alors qu’une dose de 100 mg/jour ou plus
entraîne une gynécomastie quasi systématique (5). Les mécanismes sont multiples :
dimi­nution des concentrations de testostérone, déplacement des hormones sexuelles de la
protéine porteuse, effet « œstrogène-like », blocage du récepteur aux androgènes,… Il est

Tableau 2. - Principaux médicaments et toxiques potentiellement responsables d’une gynécomastie


(les plus fréquemment incriminés en caractères gras)

Anti-androgènes – inhibiteurs de la synthèse Hormones


des androgènes

Acétate de cyprotérone Androgènes


Finastéride Œstrogènes
Spironolactone Testostérone
Flutamide, bicalutamide Stéroïdes anabolisants
hCG
Hormone de croissance

Toxiques Chimiothérapie

Alcool Agents alkylants


Amphétamines Vincristine
Marijuana Cisplatine
Héroïne Imatimib
méthadone Méthotrexate

Psychotropes et anti-dopaminergiques Médicaments cardio-vasculaires

Halopéridol Inhibiteur de l’enzyme de conversion (captopril)


Antidépresseurs tricycliques Digitoxine
Diazépam Amiodarone
Phénothiazines Anticalcique (nifédipine)
Métoclopramide
Dompéridone

Anti-ulcéreux Anti-fungiques

Oméprazole Kétoconazole
Cimétidine Itraconazole
Ranitidine

Autres Antibiotiques

Phénytoïne Métronidazole
Théophylline Isoniazide
Anti-protéases (infection VIH) Athionamide

Paris, 23-24 novembre 2018


68 Dominique MAITER

important de se rappeler que la gynécomastie peut être réversible à l’arrêt du médicament,


mais surtout lorsque le traitement incriminé n’a été commencé que récemment.
L’utilisation de plus en plus fréquente de stéroïdes anabolisants par des hommes de tout
âge est devenue un problème de société important, affectant jusqu’à 3-4 % de la population
masculine (10) et constituant 10 à 15  % des causes de gynécomastie en consultation (11).
Cet usage illicite de stéroïdes anabolisants s’explique par la recherche effrénée et de plus
en plus fréquente de performances sportives, d’une apparence plus virile, d’un dynamisme
professionnel accru ou d’une (fausse) protection contre le vieillissement. Parmi les divers
effets secondaires, il peut entraîner une gynécomastie significative dans plus de la moitié
des cas, et s’accompagne généralement d’autres problèmes associés tels que l’atrophie testi-
culaire avec stérilité, l’alopécie, et un hypogonadisme sévère à l’interruption du traitement
(celui-ci étant habituellement cyclique) (12) Dans ce même contexte, il faut aussi signaler
qu’un traitement par hormone de croissance à doses importantes peut aussi contribuer à
un développement mammaire chez l’homme (13).
D’autres substances toxiques favorisent l’apparition d’une gynécomastie. C’est le cas
notamment de l’abus d’alcool et de marijuana (14).

3. L’hypogonadisme
Toutes les causes d’hypogonadisme chez l’homme, congénitales ou acquises, primaires
(testiculaires) ou secondaires (hypothalamo-hypophysaires) peuvent aussi induire une
gynécomastie. De manière générale, les causes d’hypogonadisme primaire (syndrome de
Klinefelter, atteinte testiculaire traumatique, toxique, post-radique ou infectieuse, ...)
s’accompagnent plus fréquemment d’une gynécomastie, en raison d’une augmentation des
gonadotrophines (LH et FSH) qui stimulent l’aromatase et d’une production de testosté-
rone persistant le plus souvent de façon significative (1).
Les hommes avec hyperprolactinémie chronique (le plus souvent due à un prolacti-
nome) peuvent développer une gynécomastie en raison de l’hypogonadisme secondaire.
L’excès de prolactine par lui-même peut stimuler une production de lait (galactorrhée)
mais ne provoque pas directement de gynécomastie.

4. Les tumeurs testiculaires


Les tumeurs testiculaires représentent une cause peu fréquente mais potentiellement
grave de gynécomastie. Certaines de ces tumeurs sont en effet malignes et nécessitent un
traitement précoce. On retrouve ici différents types de tumeurs et différents mécanismes
(15). Ces tumeurs induisent des modifications hormonales très caractéristiques mais ne
sont que rarement détectées à l’examen clinique (11). La simple palpation testiculaire ne
suffit donc pas et une échographie doit être réalisée si l’on veut exclure une tumeur à ce
niveau.
Une gynécomastie survient chez 3 à 6 % des patients porteurs d’une tumeur testiculaire
à cellules germinales, séminomateuses ou non séminomateuses. Celles-ci représentent
95 % des tumeurs testiculaires de l’adulte. Elles induisent habituellement une gynéco-
mastie via une sécrétion anormale de β-hCG, observée dans 90 % des choriocarcinomes
(dont c’est la caractéristique majeure) et dans 30 % des séminomes. L’hormone a une
action endocrine et paracrine sur les cellules de Leydig normales avoisinantes, dont le

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Bilan et traitement d’une gynécomastie 69

principal effet est une stimulation de leur production de testostérone mais plus encore
d’œstrogènes, essentiellement par augmentation de l’activité aromatase et transformation
de la testostérone en œstradiol.
Par ailleurs, la gynécomastie est présente chez 20 à 30 % des patients avec une tumeur
testiculaire stromale à cellules de Leydig (ou leydigome), mais celle-ci est beaucoup plus
rare, ne représentant que 2 à 3 % des tumeurs testiculaires. En cas de leydigome, le
mécanisme responsable de la gynécomastie est une hyperproduction directe d’œstrogènes
par les cellules tumorales, elle-même secondaire à une augmentation de l’activité aroma-
tase des cellules néoplasiques. Environ 10 % de ces tumeurs sont malignes et métastasent
au niveau des ganglions retropéritonéaux (70 %), du foie (45 %), des poumons (40 %) et
des os (25 %).
La production directe d’aromatase par des tumeurs développées aux dépens de cellules
de Sertoli est une cause très rare de gynécomastie. Dans ce cas, la testostérone est souvent
basse, l’œstradiol élevé et les gonadotrophines sont diminuées.

5. Autres tumeurs
D’autres tumeurs, non testiculaires, par leur sécrétion, peuvent induire un déséquilibre
entre les concentrations d’œstrogènes et de testostérone. Par exemple, une proportion
faible des corticosurrénalomes malins peuvent sécréter des œstrogènes en excès et, de ce
fait, induire une gynécomastie. Dans une série de 52 patients avec corticosurrénalome
féminisant, 98 % avaient une gynécomastie, 58 % avaient une tumeur abdominale palpable
et environ 50 % avaient une atrophie testiculaire (16).
Des tumeurs sécrétrices d’hCG peuvent également être de localisation extragonadique :
tumeurs bronchiques, hépatiques (hépatoblastomes), rénales ou cérébrales (germinomes
hypothalamiques et pinéaux) et devront être recherchées en cas d’anomalies hormonales
évocatrices avec bilan testiculaire négatif. Elles induisent une gynécomastie et un hypogo-
nadisme par les mêmes mécanismes que les tumeurs testiculaires germinales (cfr supra)

6. La cirrhose
La prévalence de la gynécomastie chez les patients cirrhotiques est élevée (65 %) (17).
La cirrhose est accompagnée de plusieurs modifications qui expliquent le développement
de ce symptôme: diminution de la production testiculaire de testostérone, augmentation
de la production d’androstènedione par les glandes surrénales, aromatisation accrue des
androgènes en œstrogènes, augmentation de la SHBG avec diminution de la testostérone
libre, … En outre, de nombreux patients reçoivent des doses élevées de spironolactone, qui
peuvent aussi contribuer à la pathogenèse du symptôme dans cette population.
L’étiologie alcoolique entraîne des altérations hormonales plus sévères (notamment par
un efft toxique sur les cellules de Leydig) et la gynécomastie est dès lors très fréquente chez
les patients souffrant de cirrhose éthylique (18).

7. Causes diverses
L’insuffisance rénale, surtout traitée par dialyse (19) ou après transplantation, ainsi que
la dénutrition mais aussi la réalimentation rapide après dénutrition sévère peuvent provo-
quer une gynécomastie par une diminution des concentrations de testostérone alors que

Paris, 23-24 novembre 2018


70 Dominique MAITER

celles des œstrogènes sont maintenues, puis par ré-ascension rapide des concentrations de
testostérone dans un contexte d’aromatisation accrue lorsque la situation s’améliore (refee-
ding gynaecomastia).
Une gynécomastie a été rapportée dans 10 à 25 % des hyperthyroïdies en rapport avec
une maladie de Basedow (5). Divers mécanismes sont en jeu: une majoration des concen-
trations de LH contribuant à une production relativement plus élevée d’œstradiol par les
cellules de Leydig, une aromatisation accrue de la testostérone en œstradiol et de l’andros-
tènedione en œstrone, une augmentation des concentrations de SHBG par stimulation de
la synthèse hépatique et une diminution des concentrations de testostérone libre…
D’autres causes exceptionnelles ont été décrites. Citons à titre d’exemple la survenue
d’une gynécomastie pubertaire sévère avec hypogonadisme hypogonadotrope et concen-
trations circulantes élevées en œstradiol en rapport avec une mutation gain-de-fonction
du gène de l’aromatase (20).

8. La gynécomastie idiopathique
Dans environ 25 à 30 % des cas, aucune cause précise n’est retrouvée et on parle alors de
« gynécomastie idiopathique ». Une des principales causes favorisantes dans la population
est l’obésité. Celle-ci peut provoquer une vraie gynécomastie par augmentation de l’aroma-
tisation de la testostérone au sein même de la graisse mammaire.

Bilan d’une gynécomastie


Un bilan étiologique est recommandé lorsque la gynécomastie apparait après l’âge de
18  ans, a fortiori en l’absence de cause évidente (21). En effet, dans ces conditions, une
cause précise peut être identifiée dans plus de 40 % des cas, alors que cette proportion
chute à moins de 8 % si la gynécomastie apparait avant l’âge de 18 ans (11).
L’anamnèse est importante, notamment concernant les antécédents familiaux de
maladie endocrinienne ou de cancer, ainsi que la liste des médicaments pris par le patient.
L’examen clinique de la région mammaire chez l’homme se fait idéalement en position
couché sur le dos, les mains relevées derrière la nuque. Il doit ainsi permettre de différen-
cier une gynécomastie vraie (disque de tissu ferme centré sur le mamelon) d’une adipo-
mastie (tissu adipeux). L’examen permet ensuite de déterminer le caractère uni- ou bilatéral
de la gynécomastie, ses dimensions et ses caractéristiques bénignes. On doit également
rechercher un éventuel écoulement mamelonnaire ainsi que d’éventuelles adénopathies
axillaires. Il faut noter que la gynécomastie est souvent bilatérale mais asymétrique ; elle
peut donc n’être cliniquement perçue que d’un seul côté. Il faut aussi examiner le patient
de manière complète, rechercher la présence des caractères sexuels secondaires, d’un
goitre, d’une anomalie au niveau des testicules, d’une hépatomégalie ou d’une masse
abdominale.
Le recours à une mammographie ou à une échographie est indiqué si le diagnostic diffé-
rentiel entre gynécomastie et adipomastie est difficile, si l’on a un doute sur la présence
d’un éventuel carcinome mammaire (partie indurée ou déformation de la région) ou avant
chirurgie correctrice. L’imagerie ne doit cependant pas faire partie du bilan systématique
d’une gynécomastie si le diagnostic et la cause sont évidents.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Bilan et traitement d’une gynécomastie 71

Le bilan complémentaire comprendra d’abord une biologie hormonale incluant la


mesure des concentrations circulantes de testostérone totale (et de SHBG si l’on suspecte
une variation des protéines porteuses), d’œstradiol, de LH, FSH, prolactine et hCG (1-5,
21). Pour des raisons pratiques, il est souvent utile d’évaluer aussi d’emblée la fonction
rénale, les tests hépatiques et la fonction thyroïdienne. Idéalement, les dosages des stéroïdes
plasmatiques devraient être réalisés aujourd’hui par spectrométrie de masse couplée à la
chromatographie liquide (LC-MS/MS). C’est particulièrement vrai pour le dosage de
l’œstradiol dont les concentrations sont relativement basses chez l’homme (22). De la
même manière, le dosage de l’œstrone par méthode immunométrique classique n’est pas
recommandé en raison de nombreuses causes d’erreur. Il n’est utile que s’il peut être évalué
de manière précise par LC-MS/MS.
Des examens plus orientés peuvent être ensuite nécessaires, en fonction du bilan initial:
échographie testiculaire, bilan thyroïdien complémentaire, imagerie des glandes surréna-
liennes,… La ponction-biopsie n’est indiquée qu’en cas de forte suspicion de carcinome
mammaire.
Un algorithme diagnostique basé sur le bilan hormonal de départ est proposé à la
Figure  4.

Figure 4. - Algorithme proposé pour le bilan hormonal et radiologique d’une gynécomastie vraie,
récente, sans explication évidente à l’anamnèse et à l’examen clinique (pas de contexte pubertaire,
pas de médicament, pas de signe de pathologie pouvant être responsable du problème,…).
T : testostérone totale ; SHBG : sex hormone globulin ; E2 : oestradiol ; LH : hormone lutéinisante ; hCG :
hormone gonadotrope chorionique humaine; TSH : thyréostimuline; T4 : thyroxine ; CT : tomodensitométrie.
* : en cas d’hypogonadisme primaire, la testostérone totale peut se situer dans la moitié inférieure de
l’intervalle normal pour l’âge
§ : en cas d’hyperthyroïdie, la testostérone totale est augmentée par élévation de la SHBG alors que la
testostérone libre est basse, induisant une élévation de la LH.

Paris, 23-24 novembre 2018


72 Dominique MAITER

Traitement d’une gynécomastie


En fonction de la durée de la gynécomastie, l’approche thérapeutique sera différente. La
phase proliférative s’étend sur les douze premiers mois : la glande mammaire est alors le
siège de phénomènes d’hyperplasie et d’inflammation qui seront souvent responsables
d’une gêne douloureuse, au moins à la pression. C’est au cours de cette période de remanie-
ments du tissu glandulaire qu’une intervention thérapeutique peut s’avérer bénéfique.
Après douze mois, la réaction inflammatoire disparaît pour laisser place à un tissu fibreux
cicatriciel qui est généralement résistant au traitement. Dans ce cas, la solution la plus
efficace sera l’exérèse chirurgicale.

Si la gynécomastie est récente, peu gênante et surtout si elle est liée à une cause réver-
sible (médicament par exemple), une surveillance simple peut être proposée au patient.
Dans de nombreux cas, la gynécomastie peut disparaitre spontanément. Si une autre
cause spécifique est responsable, le traitement doit être d’abord étiologique (1-5). Ainsi,
tant que la gynécomastie n’a pas atteint un stade fibrotique, un traitement par testostérone
peut entraîner une amélioration du problème chez les sujets avec hypogonadisme bien
démontré, surtout primaire (et ce même si l’hypogonadisme est compensé : testostérone
totale normale avec LH augmentée). Ce traitement ne doit jamais être proposé lorsque la
fonction gonadique est strictement normale puisque la gynécomastie pourrait s’aggraver
suite à l’aromatisation de la testostérone en œstradiol. Un traitement spécifique devra
également être proposé en cas d’hyperthyroïdie, de tumeur testiculaire, d’autres tumeurs,  ...

Si un traitement symptomatique s’avère nécessaire, on peut prescrire une application


quotidienne d’un gel de dihydrotestostérone, un dérivé non aromatisable de la testostérone
(Andractim®) pendant 2-3 mois. Ce produit n’est malheureusement plus disponible actuel-
lement sur le marché européen, mais on peut espérer la mise à disposition future d’une
préparation similaire. Ce traitement – très simple et dénué de toxicité – n’a jamais été
étudié de manière randomisée mais apporte une amélioration significative dans de
nombreux cas de gynécomastie (23), sans effets secondaires autres qu’une réaction eczéma-
teuse locale occasionnelle.

Si la gynécomastie est plus conséquente mais toujours prise en charge durant la phase
proliférative, on peut obtenir une régression de la tuméfaction et une diminution des
douleurs grâce à un traitement par tamoxifène (Nolvadex®). Le tamoxifène est un SERM
(selective estrogen receptor modulator) qui bloque l’action des œstrogènes au niveau des
tissus cibles tels que la glande mammaire. L’efficacité de ce traitement a été bien démon-
trée dans deux études cliniques randomisées contre placebo, conduisant à une nette
amélioration dans 80 % des cas de gynécomastie pubertaire persistante ou de l’adulte, en
particulier dans les formes douloureuses (24-26). Le traitement par tamoxifène se fait sur
une période de trois mois à raison de 20 mg par jour.

Le raloxifène a également été testé dans cette indication (26) mais son utilisation est
moins efficace et ce traitement qui diminue les valeurs d’œstradiol pourrait entraîner une
diminution de la libido et une augmentation de la masse grasse (27). Rappelons aussi que
ni le tamoxifène ni le raloxifène n’ont d’Autorisation de Mise sur le Marché dans cette
indication.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Bilan et traitement d’une gynécomastie 73

Les autres traitements, tels que les inhibiteurs de la sécrétion des gonadotrophines
(danazole) ou les inhibiteurs de l’aromatase (anastrozole) se sont révélés moins efficaces et
ne doivent pas être utilisés en pratique clinique (28).
Finalement la chirurgie plastique est le meilleur traitement à proposer quand la gynéco-
mastie ne régresse pas avec les traitements précités, quand elle entraine un inconfort
esthétique important ou quand elle dure depuis plus de 12 mois (5, 29, 30). Dans la plupart
des cas, cette intervention comprendra à la fois une excision chirurgicale du tissu glandu-
laire et une liposuccion du tissu adipeux via une incision péri-aréolaire. Les résultats
esthétiques sont très satisfaisants et les complications (sein déformé, hématome, douleur
mamelonnaire résiduelle) sont rares, si la correction est effectuée par un chirurgien plasti-
cien ayant l’expertise de ce type de chirurgie. La récidive est rare si la cause a pu être
éliminée et que tout le tissu glandulaire a bien été extirpé.
Notons enfin qu’une radiothérapie a également été proposée comme traitement des
gynécomasties induites par les traitements anti-androgènes chez les patients âgés souffrant
d’un cancer prostatique (31). Toutefois, le tamoxifène peut également être efficace dans
ces circonstances (5).

Service d'Endocrinologie et Nutrition,


Cliniques Universitaires Saint Luc, Avenue Hippocrate,
10/ Local 690, B-1200 Bruxelles, Belgique.

Adresse pour la correspondance : Prof. Dominique MAITER, Service d'Endocrinologie et Nutrition,


Cliniques Universitaires Saint Luc, Avenue Hippocrate, 10/ Local 690, B-1200 Bruxelles, Belgique.
Tél 32-2-764.54.75 - Fax 32-2-764.54.18 – E-mail : dominique.maiter@uclouvain.be

CLINICAL APPROACH TO GYNAECOMASTIA


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Dominique MAITER (Bruxelles - Belgique)

ABSTRACT
Gynaecomastia is a symptom that can affect men at any time in their live. Most often, it
is a benign clinical manifestation of unknown origin but the problem should not be neglected
as it may cause significant cosmetic disgrace or be the first clinical sign of an underlying
malignant disease. The main pathological causes of gynecomastia in adult men are, in order
of decreasing frequency, idiopathic gynecomastia, persistent (or recurrent) pubertal gynae-
comastia, drug-induced gynaecomastia, primary and secondary hypogonadism, cirrhosis,
tumors, mostly of testicular origin, hyperthyroidism and metabolic causes (such as the so
called ‘refeeding gynaecomastia’). Primary treatment is to remove or treat the cause if this
has been identified and is treatable. Next, depending on the relative severity and duration of
the problem, either surveillance, local application of a dihydrotestosterone gel, short-time
treatment with tamoxifen, or corrective plastic surgery can be proposed.

Key-words : mynaecomastia, male hypogonadism, estrogens, testosterone, aromatase, testicular tumour.

Paris, 23-24 novembre 2018


74 Dominique MAITER

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


PLACE DE L’INFLAMMATION DANS LA PATHOGÉNIE
ET LE TRAITEMENT DU DIABÈTE DE TYPE 2 :
FOCUS SUR L’INTERLEUKINE 1*

par Marc Y DONATH (Bâle, Suisse)

La mise en évidence d’un processus inflammatoire chez les patients atteints de diabète
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

de type 2 repose sur des données morphologiques et d’intervention thérapeutique. Cette


inflammation est due à une activation pathologique du système immunitaire inné par le
stress métabolique et est en partie dépendante de la signalisation par IL-1. Initialement, la
réponse inflammatoire est probablement mise en jeu pour favoriser l'adaptation et la
régénération. Pourtant, à mesure qu’elle devient chronique, l’activation des processus
auto-inflammatoires peut devenir délétère. Un traitement « étiologique » du diabète et de
ses complications pourrait alors consister à essayer de moduler ces médiateurs inflam­
matoires. C’est en tout cas ce que tendent à prouver différentes études cliniques montrant
que l'antagonisme de l'IL-1 diminue l'hémoglobine glyquée à un niveau similaire à celui des
inhibiteurs de la DPP-4. De plus, l'antagonisme de l'IL-1 prévient les maladies cardio­
vasculaires, complication majeure du diabète.

Mots-clés : Inflammation, cytokines, traitement du diabète.

Traditionnellement, le métabolisme et l'immunité sont perçus comme deux entités


distinctes ayant des fonctions distinctes: le métabolisme régule l'utilisation, la transfor­
mation et le gain d'énergie provenant des nutriments, tandis que le système immunitaire
est responsable de la défense de l'hôte. Cependant, dans un sens plus large, ces deux
processus participent à la réponse d'un organisme aux facteurs de stress, dans le but de
restaurer l'homéostasie. Pour l'immunité, les facteurs de stress sont les agents pathogènes
et les agressions mécaniques. De même, avec l’abondance croissante des aliments et les
consé­quences néfastes de la surnutrition, il est devenu évident que ceux-ci peuvent
éga­lement constituer des facteurs de stress importants pour l’organisme. Ainsi, il semble
raison­nable de penser que, de manière similaire à la réponse aux microbes, le stress
métabolique soit capable d’agir sur le système immunitaire et de déclencher une réponse
inflammatoire. On dispose de plus en plus d’arguments démontrant que l'activation
chronique du système immunitaire associée à l'obésité est probablement délétère. Une telle
défaillance du système immunitaire peut être due à la durée et à l'ampleur du stress
métabolique, ainsi qu'à une prédisposition génétique. Les interactions entre l'immunité et
le métabolisme que nous venons de décrire ont généré un nouveau champ, celui de
l’« immuno-métabolisme ».

* Traduit et complété par Philippe Chanson, Service d’Endocrinologie et des Maladies de la Reproduction, Hôpital
Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre, France.

Paris, 23-24 novembre 2018


76 Marc DONATH

PATHOLOGIE
Depuis les premières observations attribuant un rôle à l'IL-1β dans la pathogénie du
diabète de type 2 (1), de nombreuses observations et études cliniques ont démontré son
implication dans le métabolisme du glucose [revu in (2)]. Dans une première étude
clinique de preuve de concept 70 patients atteints de diabète de type 2 ont été randomisés
afin de recevoir soit l'anakinra (un antagoniste du récepteur de l'IL-1 humain recombi­
nant), soit un placebo pendant 13 semaines (3). L’anakinra a amélioré la glycémie et la
fonction sécrétoire des cellules β. Au-delà de ce bénéfice métabolique direct, l'antago­
nisme du récepteur de l'IL-1 réduit les concentrations de CRP, ce qui a justifié la mise en
place de l'étude CANTOS (voir ci-dessous). Deux études de suivi intéressantes utilisant
l'anakinra chez des prédiabétiques (4) et chez des patients présentant une perturbation de
la tolérance au glucose (5) ont montré que, même à ces stades très précoces de la maladie,
l’antagonisme du système IL-1 améliorait la fonction sécrétoire des cellules β et pouvait
ainsi prévenir ou retarder l'apparition du diabète de type 2. Ces études de preuve de
concept avec l'anakinra démontrent le rôle de l'IL-1 dans la pathogénie du tant du défaut
de sécrétion d'insuline que de la résistance à l'insuline au cours du diabète de type 2.
Cependant, l'anakinra nécessite des injections quotidiennes et est souvent à l’origine
d’effets indésirables au niveau du site d'injection. Des anticorps anti-IL-1β humanisés ont
donc été développés par de multiples groupes et testés dans diverses maladies, dont le
diabète de type 2. La demi-vie de ces anticorps est d'environ 3 semaines, ce qui permet une
administration mensuelle ou moins. Chacun de ces anticorps a démontré des effets
bénéfiques chez les patients atteints de diabète de type 2 (6-8). Une seule dose d'un
anticorps anti-IL-1β, le gevokizumab, a amélioré l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo
de 0,9 % après 3 mois (6). Deux études chez des patients atteints de diabète de type 2 ont
été menées avec un autre anticorps anti-IL-1β, le canakinumab. La première étude a uti­lisé
une dose unique d'anticorps chez des sujets présentant une intolérance au glucose ou un
diabète de type 2 bien contrôlé (hémoglobine glyquée d'environ 7,0 %) (7). Bien que le
nombre de patients soit faible (27 à 33 par bras), une tendance à l'amélioration du taux de
sécrétion d'insuline a été observée. La deuxième étude visait à trouver la dose optimale de
canakinumab nécessaire pour améliorer le contrôle de la glycémie chez des patients
atteints de diabète de type 2 (9). Des injections mensuelles de canakinumab pendant
4  mois ont entraîné une réduction de l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo. Enfin, des
injections hebdomadaires de l'anticorps anti-IL-1β LY2189102 pendant 12 semaines ont
amélioré l'hémoglobine glyquée ajustée au placebo ainsi que la glycémie à jeun et postpran­
diale et les biomarqueurs inflammatoires (8).

L'ÉTUDE CANTOS
Sur la base de ces huit études cliniques indépendantes, l’antagonisme de l'IL-1β est donc
capable d'améliorer le métabolisme du glucose chez les patients diabétiques. Cela a
ré­cemment été confirmé par l'étude CANTOS (10). En effet, bien qu’elle ne soit pas spéci­
fiquement dédiée au diabète, cette vaste étude analysant les résultats cardiovasculaires
chez plus de 10 000 patients permet de tirer des conclusions intéressantes pour le
diabète  (11) (i) Même si les patients n’ont été sélectionnés que sur la base de la CRP et des
maladies cardiovasculaires, 90 % d’entre eux ont un trouble du métabolisme du glucose
(40 % ont un diabète, 50 % un prédiabète). Cela plaide fortement en faveur d'un lien entre
l'inflammation et le diabète. (ii) L'antagonisme de l'IL-1 a diminué significativement
l'HbA1c pendant les 6 à 9 premiers mois de traitement puis les effets se sont atténués. Ces

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place de l’inflammation dans la pathogénie et le traitement du diabète de type 2 : focus sur l’interleukine 1 77

données confirment les études cliniques antérieures et prouvent le rôle de l'IL-1 et de


l'inflammation dans le diabète. L'amplitude des effets dépend de l'HbA1c initiale. Le taux
d'HbA1c initial était de 7,1 %, ce qui est très inférieur à l'HbA1c cible pour cette popula­
tion de patients (<8 % selon les Recommandations de l'American Diabetes Association).
Cependant, au cours des premiers mois, l’effet « pur » de l’anti-Il-1 était surtout net dans la
population diabétique dont l’HbA1c initiale était plus élevée, à 7,5 % (restant quand même
assez basse) et qui diminuait de manière statistiquement significative l’HbA1c lors du
traitement. L'atténuation de l'effet après 6 à 9 mois est probablement due à la conception
de l'étude, qui autorisait des interventions axées sur le mode de vie et l'adaptation des
traitements antidiabétiques. En effet, dans les autres études portant sur les effets cardio­
vasculaires des antidiabétiques « classiques » (les inhibiteurs de DPP4 et de SGLT2 étant
les médicaments antidiabétiques les plus largement utilisés), on observe des effets de même
amplitude et de même cinétique. Chez les patients non diabétiques, le canakinumab a
diminué l'HbA1c pendant toute la durée de l'étude, bien que l'effet ait été très modéré
puisque les patients étaient normoglycémiques dès le début. (iii) L'antagonisme de l'IL-1 a
empêché l'apparition du diabète pendant 4 ans. Après cette période, le nombre de patients
suivis dans l'étude a diminué d'environ 50 % et l'effet du canakinumab n'était plus détecté.
La raison de cette perte d'efficacité reste à expliquer, mais pourrait être liée à la sélection
des patients discutée ci-dessus ou au rôle physiologique de l'IL-1β. À noter que la préven­
tion du diabète n'a jamais été démontrée auparavant avec les antidiabétiques les plus
utilisés (inhibiteurs de DPP4, inhibiteurs de SGLT2, insuline, sulfonylurées) contraire­
ment à la prévention à 4 ans par le blocage de l'IL-1β. Globalement, l'antagonisme de
l'IL-1β est une option intéressante pour traiter les patients présentant un syndrome
métabolique et ses complications cardiovasculaires.

PHYSIOLOGIE
Des études antérieures ont démontré un rôle pathogène de l'inflammation chronique sur
le métabolisme (12). Cependant, le rôle physiologique et adaptatif attendu (aigu) du
système immunitaire inné dans le contrôle métabolique n'a commencé que récemment à
faire l'objet d'études approfondies. Ainsi, l'IL-1β et l'IL-6 dépendant de l'IL-1 et l'IL-33
apparaissent comme des modulateurs importants de la sécrétion d'insuline et de l'utilisa­
tion du glucose (13-15). En effet, des concentrations élevées d'IL-6 en réponse à l'exercice
ou à l'obésité stimulent la sécrétion de GLP-1 par les cellules L intestinales et les cellules α
pancréatiques, conduisant à une amélioration de l’homéostasie du glucose (15). Par consé­
quent, l'IL-6 intervient dans le dialogue entre les tissus insulino-sensibles, les cellules L et
les îlots de Langerhans pour s'adapter aux changements des besoins en augmentant la
sécrétion de GLP-1 et en reprogrammant les cellules α pour transformer le proglucagon en
GLP-1.
En outre, l'IL-1β, généralement pro-inflammatoire, présente des effets physiologiques
dans le contexte de la prise alimentaire et de l'adaptation à un régime riche en graisses (14,
16). Ainsi, une élévation postprandiale du glucose entraîne une élévation aiguë de l'IL-1β
dérivée des macrophages qui contribue à la sécrétion d'insuline postprandiale. Cet effet
dépend également des produits microbiens dérivés des aliments et de l'intestin, qui
permettent aux macrophages de produire davantage d'IL-1β. Fait intéressant, l'insuline
renforce un état pro-inflammatoire et stimule la production d'IL-1β par les macrophages
via l'absorption et le métabolisme du glucose, la production de ROS et l'activation subsé­
quente de l'inflammasome NLRP3. L'insuline et l'IL-1β régulent toutes deux l'élimination

Paris, 23-24 novembre 2018


78 Marc DONATH

du glucose, l'IL-1β stimulant préférentiellement l'absorption du glucose dans le comparti­


ment des cellules immunitaires. Enfin, l'exposition prolongée des macrophages à l'insuline
favorise la sécrétion de l'antagoniste des récepteurs de l'IL-1, l'IL-1Ra, limitant potentielle­
ment l'auto-amplification du système et la normalisation de la glycémie.
Récemment, l'IL-33, un autre membre de la famille des IL-1, est apparu comme un
régulateur positif de la sécrétion d'insuline (13). En effet, l'IL-33 est exprimée par les
cellules mésenchymateuses des îlots et est stimulée par un environnement diabétique
(concentrations élevées de glucose, d’IL-1β et d’acides gras saturés). L'IL-33 favorise la
fonction des cellules β par l'intermédiaire des cellules lymphoïdes innées (ILC2) du groupe
2 résidant dans les îlots qui induisent des capacités de production d'acide rétinoïque dans
les macrophages et les cellules dendritiques par la production d'IL-13 et de facteur stimu­
lant les colonies de type 2. L’acide rétinoïque signale ensuite aux cellules β d'augmenter la
sécrétion d'insuline. Cet axe IL-33/ILC2 de l'îlot est activé après un stress aigu des cellules  β
mais est défectueux lors d'une obésité chronique. En conséquence, les injections d'îlots
restaurent la fonction de l’IL-33 chez les souris obèses. Ces découvertes apportent la preuve
d'un nouveau dialogue immuno-métabolique entre les cellules IL-33, ILC2 et myéloïdes
dérivées des îlots, qui contribue au maintien de la sécrétion d'insuline.

RÉCONCILIER LA PHYSIOLOGIE ET LA PATHOLOGIE


Le rôle physiologique proposé pour les macrophages dans l'homéostasie du glucose
semble être en contradiction avec les effets hypoglycémiants des médicaments anti-inflam­
matoires tels que les antagonistes de l'IL-1 chez les patients atteints de diabète de type 2.
On peut peut-être réconcilier les deux en réinterprétant la pathogénie du diabète de
type  2. Nous proposons l’hypothèse selon laquelle les mécanismes conduisant à cette
maladie sont principalement des mécanismes adaptatifs à la surnutrition. De ce fait, la
« glucotoxicité » dans les îlots (à savoir la réduction de la sécrétion d'insuline en réponse à
une concentration de glucose chroniquement élevée) et la résistance à l'insuline dans le
foie et le tissu adipeux , constitueraient des mécanismes de défense pour éviter la surcharge
des cellules en nutriments. Alors que l'IL-1β dérivée des macrophages stimule la sécrétion
d'insuline de manière aiguë (14), chroniquement, elle conduirait à un épuisement des
cellules β. C'est la base du concept thérapeutique de la « mise au repos » des cellules β. En
effet, les médicaments qui ouvrent les canaux potassiques (ce qui diminue la sécrétion
d'insuline), améliorent finalement la sécrétion d'insuline chez les patients atteints de
diabète de type 2 (17). Le bénéfice de l'antagonisme de l'IL-1 chez les patients atteints de
diabète de type 2 pourrait résulter de la « mise au repos » des cellules β, éventuellement en
combinaison avec l'inhibition des effets toxiques « classiques » de l'IL-1β (18). Ainsi, plutôt
que d'induire la mort des cellules β, les effets toxiques chroniques de l'IL-1β semblent
altérer la prolifération des cellules β et la sécrétion d'insuline (18, 19). En outre, la stimu­
lation de l'IL-1β conduisant à des insulinémies élevées pourrait devenir préjudiciable pour
le métabolisme en raison de nos observations selon lesquelles l'insuline renforce l'état
inflammatoire des macrophages (14). Ainsi, les macrophages activés de manière chronique
dans cet état pourraient contribuer au dysfonctionnement des cellules β et au développe­
ment de la résistance à l'insuline. Nous proposons donc l’hypothèse selon laquelle les
concen­trations plasmatiques d'insuline, qui sont augmentées aux stades précoces du
diabète de type 2, pourraient provoquer puis maintenir un état inflammatoire au niveau
des macrophages, ce qui pourrait protéger les tissus de la surcharge en nutriments… mais
contribuer à l’hyperglycémie et au diabète.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place de l’inflammation dans la pathogénie et le traitement du diabète de type 2 : focus sur l’interleukine 1 79

Département de Médecine Interne,


Division d’Endocrinologie, Diabète et Nutrition Clinique
Hôpital Universitaire de Bâle, Bâle, Suisse

Adresse pour la correspondance : Département de Médecine Interne, Division d’Endocrinologie,


Diabète et Nutrition Clinique Hôpital Universitaire de Bâle, Bâle, Suisse - Email : marc.Donath@usb.ch

INFLAMMATION IN THE PATHOGENESIS AND TREATMENT OF TYPE


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

2 DIABETES: FOCUS ON INTERLEUKIN 1


by Marc Y DONATH
(Bâle, Suisse)

ABSTRACT
Morphological and therapeutic interventions have uncovered an inflammatory process in
patients with type 2 diabetes. This inflammation is due to a pathological activation of the
innate immune system by metabolic stress and is partly governed by IL-1 signaling. Initially,
the inflammatory response is probably deployed to promote adaptation and regeneration.
Yet, as it becomes chronic, activation of auto-inflammatory processes may then become
deleterious. It follows that modulation of inflammatory mediators may present as a possible
causal therapy. This is supported by clinical studies showing that IL-1 antagonism decreases
glycated hemoglobin at a similar level than DPP-4 inhibitors. Furthermore, IL-1 antagonism
prevents cardiovascular diseases, the major complication of diabetes.

Key-words : Inflammation, cytokines, diabetes treatment.

BIBLIOGRAPHIE

1.  Maedler K, Sergeev P, Ris F, Oberholzer J, Joller-Jemelka HI, Spinas GA, et al. Glucose-induced
beta cell production of IL-1beta contributes to glucotoxicity in human pancreatic islets. J Clin Invest.
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insulinogenic index in subjects with impaired glucose tolerance. Diabetes Obes Metab. 2014; 16(12):
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Lancaster  J, Abu-Raddad E, Polzer J, Miller JW, Scherer JC, De Gaetano A, et al. Double-blind,
randomized study evaluating the glycemic and anti-inflammatory effects of subcutaneous LY2189102,
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- 9.  Hensen J, Howard CP, Walter V, Thuren T. Impact of interleukin-1beta antibody (canakinumab)
on glycaemic indicators in patients with type 2 diabetes mellitus: results of secondary endpoints

Paris, 23-24 novembre 2018


80 Marc DONATH

from a randomized, placebo-controlled trial. Diabetes Metab. 2013; 39(6): 524-31. - 10.  Ridker  PM,
Everett BM, Thuren  T, MacFadyen JG, Chang WH, Ballantyne C, et al. Antiinflammatory Therapy
with Canakinumab for Atherosclerotic Disease. N Engl J Med. 2017; 377(12): 1119-31. - 11.  Everett
BM, Donath MY, Pradhan AD, Thuren T, Pais P, Nicolau JC, et al. Anti-Inflammatory Therapy With
Canakinumab for the Prevention and Management of Diabetes. J Am Coll Cardiol. 2018; 71(21): 2392-
401. - 12.  Donath MY, Shoelson SE. Type 2 diabetes as an inflammatory disease. Nat Rev Immunol.
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Interleukin-33-Activated Islet-Resident Innate Lymphoid Cells Promote Insulin Secretion through Myeloid
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Wueest S, Thevenet J, Thienel C, et al. Postprandial macrophage-derived IL-1beta stimulates insulin,
and both synergistically promote glucose disposal and inflammation. Nat Immunol. 2017; 18(3): 283-92.
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enhances insulin secretion by increasing glucagon-like peptide-1 secretion from L cells and alpha cells.
Nat Med. 2011; 17(11): 1481-9. - 16.  Hajmrle C, Smith N, Spigelman AF, Dai X, Senior L, Bautista A,
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Cell Proliferation and Insulin Secretion. Cell Rep. 2018; 22(7): 1774-86.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


DIAGNOSTIC DE L’ACROMÉGALIE :
OBSERVATIONS À PARTIR D’UNE BASE
DE DONNÉES INTERNATIONALE
(LIÈGE ACROMEGALY SURVEY - LAS)

par Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS (Liège, Belgique)

L’acromégalie est une maladie rare dont la prévalence est de 1/7000. Il est par conséquent
n n n n n n n n n n n n n n

difficile d’obtenir une grande série de patients dans un seul centre. Néanmoins, certains
aspects de la maladie ne peuvent être perçus qu’en faisant appel aux grands nombres. Le «
Liège Acromegaly Survey » (LAS) est une base de données relationnelle qui permet
d’exploiter de grandes quantités de données sur un grand nombre de patients. Elle regroupe
les observations de 14 centres européens comportant près de 3200 patients. Les résultats
de ces observations au moment du diagnostic de l’acromégalie sont présentés dans cet
article.

Mots-clés : Acromégalie, base de données, big data, diagnostic, morbidité, hormone de croissance, IGF-1, âge.

INTRODUCTION
L’acromégalie fait suite à une hypersécrétion d’hormone de croissance (GH). La cause
principale est un adénome hypophysaire à GH. Si celui-ci survient tôt dans la vie (avant
la fusion des cartilages de conjugaison), il provoque un gigantisme. Sinon, il sera respon-
sable d’une acromégalie. Les causes génétiques des adénomes à GH sont partiellement
élucidées [1,2,3]. Il s’agit d’une maladie assez rare avec une prévalence probablement
encore très sous-estimée d’environ 1/7000 [4].

Cette pathologie étant rare, il est difficile de réaliser des études de grandes séries, ce qui
prive les endocrinologues d’informations potentiellement très intéressantes déductibles
uniquement à partir de plus grands nombres de patients. C’est pour réaliser de telles études
que nous avons mis au point le « Liège Acromegaly Survey » qui est une base de données
relationnelle permettant d’exploiter facilement et rapidement les quantités importantes
données qui ont été encodées sur un grand nombre de patients. Le modèle a d’abord été
testé sur la population des acromégales de Liège, soit environ 290 patients [5]. Après avoir
constaté qu’il était fonctionnel, nous l’avons élargi à 13 autres centres européens (voir liste
table 1). Au total, près de 3 200 patients ont ainsi été encodés. Les premiers résultats qui
ont été publiés fin 2017 [6] sont brièvement présentés dans cet article.

Paris, 23-24 novembre 2018


82 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

Centre Nombre de patients

Sofia 815

Bicêtre 363

Liège 302

Rotterdam 277

Marseille 260

Naples 205

Reims 188

Stockholm 178

Prague 138

L'Aquila 126

Munich 114

Gênes 111

Porto 63

Valencia 33

Table 1. - Centres participants au LAS et nombre de patients par centre.

MÉTHODE STATISTIQUE
Les différents paramètres étudiés ont montré une distribution non-normale. Des métho­
des non-paramètriques ont donc été utilisées pour décrire les populations (médianes,
quartiles), les données continues ont été comparées avec le test de Mann-Withney et les
tables de contingences par un test du Chi-carré. Pour les graphiques, une représentation
par « box-plot » a été préférée, la boite représentant le premier et deuxième quartile, la
ligne centrale représentant la médiane et les « moustaches » 1.5 fois la taille de l'écart
interquartiles.

ÂGE DES PATIENTS ET DURÉE D’ÉVOLUTION DE LA MALADIE


On remarque (Figure 1) que l’âge au diagnostic est très variable d’un centre à l’autre (de
39 à 52 ans). Le diagnostic se fait beaucoup plus précocement actuellement qu’il y a 20 ou
30 ans (Figure 2). On diagnostique actuellement beaucoup plus de patients acromégales
âgés qu’auparavant (Figure 3). Le sex ratio varie très fortement suivant le type de recrute-
ment des centres (Figure 4).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Diagnostic de l'acromégalie : observations à partir d'une base de données internationale (Liège acromegaly survey - LAS) 83

Figure 1. - Âge au diagnostic selon les centres. Colonne de gauche (en grisé) : Âge médian au
diagnostic en fonction des centres. Partie droite : graphique box plot de l’âge au diagnostic selon le sexe
pour chaque centre. (Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017 [6]. avec autorisation).

Figure 2. - Délai entre l’apparition des premiers signes de l’acromégalie et le diagnostic.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Paris, 23-24 novembre 2018


84 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

Figure 3. - Âge au diagnostic en fonction de la décennie.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Figure 4. - Sex ratio selon les centres. « n » : nombre de patients.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

DIAMÈTRE MAXIMAL DE LA TUMEUR


Les patients plus jeunes présentent des tumeurs plus volumineuses que les patients âgés
(Figure 5). Il s’agit plus fréquemment de macro-adénomes invasifs (Figure 6). La concentra-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Diagnostic de l'acromégalie : observations à partir d'une base de données internationale (Liège acromegaly survey - LAS) 85

tion sanguine d’hormone de croissance est en relation directe avec la taille de la tumeur
(Figure 7) et inverse avec l’âge (Figure 8). Il y a donc une relation triangulaire entre la taille
de la tumeur, la concentration d’hormone de croissance et l’âge. Plus le patient est âgé,
plus la tumeur est petite et moins elle sécrète d’hormone de croissance.

Figure 5. - Taille maximale de l’adénome selon le groupe d’âge des patients.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017,[6] avec autorisation).

Figure 6. - Âge des patients selon la taille et l’invasion tumorale. « N » : pas d'invasion ;
« Y » : présence d'invasion. (Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Paris, 23-24 novembre 2018


86 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

Figure 7. - Distribution des valeurs de GH selon la taille tumorale.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Figure 8. - Concentration de GH au diagnostic selon le groupe d’âge des patients.


(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Diagnostic de l'acromégalie : observations à partir d'une base de données internationale (Liège acromegaly survey - LAS) 87

QUEL EST LE MEILLEUR TÉMOIN DE LA MALADIE – GH OU INSULINE


LIKE GROWTH FACTOR 1 (IGF-1)
Une étude de corrélation entre d’une part la glycémie chez les patients non diabétiques
ou encore entre les concentrations d’hémoglobine ou l’hématocrite et d’autre part les
concentrations d’hormone de croissance ou les concentrations d’IGF-1, montre que ces
paramètres sont corrélés avec la concentration d’IGF-1 et non pas avec celle de l’hormone
de croissance. L’IGF-1 apparait donc comme un meilleur témoin que la GH pour évaluer
l’importance de la maladie chez les patients acromégales.

Figure 9. - Régression linéaire entre glycémie et concentration sérique d’IGF-1.


IGF-1 exprimée en valeurs absolues (A et B). IGF-1 exprimée en % des valeurs normales (C et D).
Glycémie basale (A et C). Glycémie à 120 mn lors de l’HPO (B et D).
(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017, [6] avec autorisation).

Paris, 23-24 novembre 2018


88 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

Figure 10. - Régression linéaire entre glycémie et concentration sérique de GH. Graphe de gauche :
Glycémie basale ; graphe de droite : Glycémie à 120 mn lors de l’HGPO.
(Petrossians P. et al, Endocrine Related Cancer, 2017,[6] avec autorisation).

DIABÈTE ET HTA
Au diagnostic, 24.5 % des patients étaient diabétiques. Après réalisation d’un test par
hyperglycémie par voie orale, les chiffres grimpent à 27.5 %. Près de 40 % des patients
étaient hypertendus au moment du diagnostic dont 30 % considérés comme insuffisam-
ment contrôlés médicalement. Les facteurs de risque les plus importants pour l’HTA,
étaient l’âge et le diabète.

Figure 11. - Prévalence de l’hypertension (HT) selon le groupe d’âge, chez les non-diabétiques
(gauche) et les diabétiques (droite).

COMORBIDITÉ
L’étude de la corrélation entre les concentrations d’hormone de croissance et la survenue
d’un AVC avant le diagnostic d’acromégalie montre paradoxalement que les patients avec

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Diagnostic de l'acromégalie : observations à partir d'une base de données internationale (Liège acromegaly survey - LAS) 89

plus d’hormone de croissance font moins d’AVC (figure 12). En réalité, si on cherche la
corrélation entre l’AVC et l’âge, on constate que les patients âgés font plus d’AVC que les
patients jeunes et, comme présenté plus haut, les personnes âgées ont des concentrations
d’hormone de croissance moins élevées que les patients jeunes.

Figure 12. - Comparaison des valeurs de GH, d’IGF-1 et de l’âge chez les patients avec et sans
antécédents d’AVC au moment du diagnostic. Y : antécédent d'AVC au moment du diagnostic.
N : pas d'antécédent d'AVC. A: IGF-1 en valeurs absolues dans les groupes avec et sans antécédent
d'AVC. B : IGF-1 en % des valeurs supérieures à la normale. C : GH. D : Age au diagnostic des groupes
avec et sans antécédent d'AVC.

APNÉES DU SOMMEIL
Une apnée du sommeil a été diagnostiquée chez 26 % des patients. Néanmoins, la
recherche n’a pas été effectuée de façon systématique. Lorsque c’est le cas, le pourcentage
d’apnéiques monte jusqu’à 70 % [7].

Paris, 23-24 novembre 2018


90 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

DISCUSSION
Cette étude réalisée dans 10 pays et 14 centres montre que le diagnostic de l’acromégalie
est maintenant porté de façon plus précoce qu’auparavant même s’il reste des divergences
relativement importantes entre les centres. Le sex ratio est éminemment variable d’un
centre à l’autre dépendant du type de recrutement. Ceci est important lorsque des études
mono-centriques sont réalisées sur un thème particulier. Les résultats sont susceptibles de
diverger relativement fortement en fonction de ces données.
Un nombre beaucoup plus important d’acromégales âgés sont diagnostiqués. Cela est
probablement le résultat d’une meilleure connaissance de la maladie dans le corps médical,
ce qui permet d’une part de raccourcir le délai diagnostique chez tous les acromégales mais
aussi de reconnaitre des formes moins agressives comme chez le patient âgé. Il existe une
relation triangulaire entre la taille de l’adénome, l’âge et les concentrations d’hormone de
croissance. Ceci confirme des études faites sur des échantillons beaucoup plus petits. Dans
notre étude publiée en 2010 [8], les patients souffrant de mutation du gène AIP étaient
comparés à des patients AIP négatifs. Les AIP positifs étaient beaucoup plus jeunes au
diagnostic, avec des tumeurs significativement plus volumineuses et une concentration
plus élevée d’hormone de croissance. Dans une autre étude réalisée à partir du registre
français de l’acromégalie, les patients acromégales âgés montraient des valeurs de GH et
d’IGF-1 moins élevées au diagnostic [9].
L’hormone de croissance induit une résistance à l’insuline. Au contraire, l’IGF-1 produit
des hypoglycémies. On peut donc logiquement se demander quel est le facteur le plus utile
pour connaitre l’importance de l’activité de la maladie. Est-il préférable de connaitre la
GH ou l’IGF-1? Une corrélation entre les concentrations d’IGF-1 et la prévalence d’intolé-
rance glucidique ou de diabète a déjà été démontrée [10]. Notre étude, ciblant les patients
non-diabétiques, montre que la corrélation entre glycémie et IGF-1 existe alors qu’il n’y a
pas de corrélation entre GH et glycémie, ce qui tend à montrer que l’IGF-1 est bien un
reflet meilleur de l’activité de la maladie plutôt que la GH. Il en est de même dans la corré-
lation avec les concentrations d’hémoglobine ou d’hématocrite. C’est l’IGF1 qui reflète le
mieux l’activité de l’acromégalie.
Des apnées du sommeil étaient présentes chez 26 % des cas. Ceci peut paraître peu mais
les données n’étaient pas codées chez tous les patients. En réalité, lorsque les études sont
systématiques, environ 70 % des patients acromégales souffrent d’apnées du sommeil, ce
phénomène peut également être observé avec les nodules thyroïdiens qui n’ont pas été
étudiés de façon systématique et qui étaient dès lors présents dans une relativement faible
proportion (34 %) alors que les études systématiques révèlent des nodules dans 70 % des
cas.
Enfin, la présence d’AVC était corrélée avec l’âge et dès lors, il n’est pas étonnant de voir
des concentrations de GH et d’IGF-1 plus faibles. Les valeurs élevées de ces deux hormones,
GH et IGF-1 observées chez les jeunes n’ont absolument pas d’effet protecteur, c’est simple-
ment l’âge qui est lié au risque d’AVC.

CONCLUSION
Le Liège Acromegaly Survey (LAS) est une base de données relationnelle qui constitue
un nouvel outil pour étudier l’acromégalie. Il s’agit de la base de données la plus grande et

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Diagnostic de l'acromégalie : observations à partir d'une base de données internationale (Liège acromegaly survey - LAS) 91

la plus complète pour cette pathologie. Elle a permis de mettre en évidence de nouveaux
aspects de la maladie comme la corrélation entre l’âge, la taille et la sécrétion d’hormone
de croissance et de confirmer que l’IGF-1 est un meilleur marqueur de la maladie que la
GH. Le LAS a montré la différence importante de population de patients selon les centres.
Les prochaines analyses conduites sur la base du LAS concerneront les aspects liées aux
traitements et l’évolution de la maladie à long terme.

Service d’Endocrinologie
CHU de Liège, Université de Liège
Domaine Universitaire du Sart-Tilman
B-4000 Liège, Belgique

Adresse pour la correspondance : Professeur Albert Beckers - Service d’Endocrinologie - CHU de Liège,
Université de Liège - Domaine Universitaire du Sart-Tilman - B-4000 Liège, Belgique
E-mail : albert.beckers@chuliege.be

THE DIAGNOSIS OF ACROMEGALY.


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

DATA FROM THE INTERNATIONAL LIÈGE ACROMEGALY SURVEY - LAS


by Albert BECKERS and Patrick PETROSSIANS
(Liège, Belgique)

ABSTRACT
Acromegaly is a rare disease with a prevalence of 1/7000. It is therefore difficult to gather
a big series of patients in a single center. However some aspects of the disease can only be
approached by using big numbers of patients. The Liège Acromegaly Survey (LAS) is a
relational database that allows to exploit big quantity of data on a large number of patients.
It covers the observations of 14 European centers on almost 3200 patients. The results of
these observations at the time of diagnosis of acromegaly are presented in this article.

Key-words : Acromegaly, data base, big data, diagnosis, morbidity, growth hormone, IGF-1, age.

BIBLIOGRAPHIE

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Paris, 23-24 novembre 2018


92 Albert BECKERS et Patrick PETROSSIANS

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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


ARTÉRIOPATHIE PÉRIPHÉRIQUE DIABÉTIQUE

par Kamel MOHAMMEDI (Bordeaux, France)

L’artériopathie périphérique est une manifestation fréquente de l’athérosclérose. Sa


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

prévalence est particulièrement élevée chez les patients diabétiques. Le pronostic de


l’artériopathie périphérique diabétique est sévère, essentiellement dominé par des risques
élevés d’amputation de membre inférieur, de maladie cardiovasculaire, et de décès de toute
cause. Un interrogatoire et un examen clinique rigoureux sont les éléments-clés du
dépistage de l’artériopathie périphérique diabétique. Le diagnostic repose sur l’index de
pression systolique, qui doit être réalisé en présence de signes cliniques évocateurs
d’artériopathie périphérique. La prise en charge de l’artériopathie périphérique diabétique
repose principalement sur le contrôle de tous les facteurs de risque cardiovasculaire,
notamment le diabète, l’hypertension artérielle, et la dyslipidémie. Un traitement par
antiagrégant plaquettaire est indiqué en cas d’artériopathie périphérique symptomatique.
Les différentes techniques de revascularisation doivent être discutées selon la localisation
anatomique des lésions, le terrain clinique et l’expérience de l’équipe chirurgicale. La
réadaptation à la marche et le sevrage strict de l’intoxication tabagique sont des mesures
non pharmacologiques incontournables dans la stratégie thérapeutique globale de
l’artériopathie périphérique.

Mots-clés : diabète, artériopathie périphérique, amputation de membre inférieur.

INTRODUCTION
L’artériopathie périphérique est la troisième localisation la plus importante de l’athéro­
sclérose après la cardiopathie ischémique et l’accident vasculaire cérébral. Il s’agit d’un
problème majeur de santé publique avec une prévalence qui augmente de façon endémique
ces dernières décennies, à cause de l’explosion de la démographie mondiale, du vieillisse­
ment de la population, et de l’augmentation de la prévalence du tabagisme, de l’hyperten­
sion artérielle, et du diabète de type 2 (1). Elle est 2 à 4 fois plus fréquente chez les patients
diabétiques en comparaison aux sujets non diabétiques (2). Le pronostic de l’artériopathie
périphérique est sévère, particulièrement dominé par un risque d’amputation de membre
inférieur 5 fois plus élevé chez les patients diabétiques en comparaison aux sujets non
diabétiques (3). L’artériopathie périphérique diabétique est également associée à un risque
élevé de maladie cardiovasculaire et de mortalité (4, 5). Elles génèrent un coût écono­
mique considérable nécessitant des hospitalisations longues et itératives, complétées par
des soins en ambulatoire (6, 7). Elles peuvent être responsables de séquelles invalidantes,
d’états dépressifs, et d’altération de la qualité de vie, engendrant ainsi des difficultés sociales
et professionnelles (8, 9).

ÉPIDÉMIOLOGIE
L’artériopathie périphérique touche plus de 200 millions de patients dans le monde dont
40 millions vivant en Europe (1). Son incidence était estimée à 1,24 par 100 patients-

Paris, 23-24 novembre 2018


94 Kamel MOHAMMEDI

années chez les participants diabétiques de type 2 dans l’étude ADVANCE (Action in
Diabetes and Vascular Disease: PreterAx and DiamicroN Modified-Release Controlled Evalua-
tion) et 3,7 cas par 100 patients-années dans une autre cohorte australienne (10, 11). Sa
prévalence est variable en fonction de la définition utilisée et des caractéristiques de la
population étudiée, notamment l’âge, la durée du diabète, le niveau du risque vasculaire,
et la présence ou pas de maladie cardiovasculaire. La prévalence de l’artériopathie périphé­
rique peut dépasser 20 % si le diagnostic est basé sur l’index de pression systolique (IPS)
(12). Les formes plus sévères, définies par la présence d’ulcération ou d’amputation d’ori­
gine vasculaire ou d’antécédent de revascularisation, étaient présentes chez 4,6 % des
participants de l’étude ADVANCE à l’inclusion (11). L’artériopathie périphérique est
habituellement diagnostiquée lors de la cinquième décennie avec une augmentation
exponentielle de sa prévalence après l’âge de 65 ans. La prévalence augmente également au
fur et à mesure de l’ancienneté du diabète : dans l’étude UKPDS (UK Prospective Diabetes
Study), elle a progressé de 1,2 % au moment du diagnostic du diabète à 12,5 % après 18 ans
d’évolution (13). La prévalence de l’artériopathie périphérique varie également selon la
région d’origine des patients, elle est fréquente chez les participants originaires d’Europe de
l’Est dans l’étude ADVANCE, et particulièrement faible chez les Asiatiques (11, 14). Il
n’est pas clair si ces différences sont liées à une prédisposition génétique.
Les principaux facteurs de risque d’artériopathie périphérique diabétique sont compa­
rables aux autres facteurs de risque cardiovasculaires traditionnels notamment l’âge, le
sexe, la pression artérielle systolique, les concentrations plasmatiques des lipoprotéines, et
le tabagisme actif (11, 13, 15). Certaines études ont suggéré que la macroalbuminurie et la
rétinopathie diabétique étaient des facteurs prédictifs indépendants d’artériopathie
périphérique (11, 15). Une large étude épidémiologique récente a montré que la baisse du
débit de filtration glomérulaire et l’augmentation de l’excrétion urinaire d’albumine étaient
des facteurs de risque indépendants d’artériopathie périphérique (16).

PHYSIOPATHOLOGIE
La claudication intermittente est liée à une diminution du flux sanguin, avec une baisse
de l’afflux d’oxygène lors de l’effort physique, secondaire à une sténose ou à une occlusion
d’une artère irriguant un muscle squelettique. Plusieurs mécanismes contribuent à cette
ischémie aigüe, particulièrement la rigidité artérielle, les anomalies thrombotiques,
l’inflammation de bas grade, les produits avancés de la glycation, et le stress oxydant.
Plusieurs études ont suggéré le développement d’une réaction inflammatoire aiguë secon­
daire à l’ischémie lors de l’exercice chez des patients présentant une claudication intermit­
tente avec l’augmentation des concentrations plasmatiques de plusieurs médiateurs (throm­
boxane, interleukine 8, molécule soluble d’adhésion 1, ou le facteur de von Willebrand) et
la libération d’agents vasoconstricteurs telle que l’endothéline 1 (17). Nous avons rapporté
récemment une association indépendante entre les concentrations plasmatiques de TNFR1
(tumor necrosis factor-α receptor 1) et d’IMA (ischemia-modified albumin, un marqueur du
stress oxydant) et le risque de développer un événement vasculaire périphérique ou une
amputation majeure dans la cohorte Poitevine SURDIAGENE (SURvie, DIAbete de type
2 et GENEtique) (18, 19). De façon intéressante, TNFR1 améliore la prédiction des évène­
ments vasculaires périphériques, indépendamment des autres facteurs de risque cardiovas­
culaires traditionnels. Les cellules endothéliales, par leur localisation stratégique entre le
sang et les tissus, jouent un rôle majeur dans l’homéostasie vasculaire. Elles secrètent
plusieurs facteurs paracrines au niveau de la paroi et la lumière vasculaire. La dysfonction

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Artériopathie périphérique diabétique 95

endothéliale, induite entre autres par les facteurs de risque cardiovasculaire, est respon­
sable de troubles hémodynamiques et d’autres anomalies structurelles et fonctionnelles,
altérant la réactivité et la relaxation des vaisseaux, favorisant ainsi l’athérosclérose (20). Il
est clairement établi que l’artériopathie périphérique est une manifestation commune de
l’athérosclérose des gros vaisseaux, mais des études récentes suggèrent également une parti­
cipation de la dysfonction microvasculaire dans sa pathogénie (21). Une étude italienne a
montré des anomalies histologiques microvasculaires, avec épaississement de la membrane
basale et réduction de la densité des capillaires, sur des prélèvements cutanés de pieds
diabétiques neuro-ischémiques nécessitant une revascularisation (21). Nous avons observé
dans l’étude ADVANCE une association forte et indépendante entre un antécédent de
maladie microvasculaire (néphropathie ou rétinopathie) à l’inclusion et le risque de
développer une artériopathie périphérique diabétique pendant le suivi (11). De façon
intéressante, l’antécédent de maladie microvasculaire était associé à l’atteinte distale tandis
que l’antécédent de maladie macrovasculaire était associé à l’arté­riopathie proximale.
Enfin, l’absence de pouls pédieux ou tibial postérieur à l’inclusion était associée, de façon
dose-réponse, à un excès de risque d’évènements microvasculaires  (22).

DÉPISTAGE ET DIAGNOSTIC
Le dépistage d’artériopathie périphérique chez les patients diabétiques doit être basé sur
un interrogatoire minutieux et un examen clinique rigoureux (23). Aucun examen
complémentaire n’est justifié chez les patients asymptomatiques. Il faut, néanmoins,
rechercher des formes pauci-symptomatiques, particulièrement en présence de neuropa­
thie diabétique qui peut masquer certains symptômes d’artériopathie. La neuropathie
diabétique distale est associée à l’artériopathie périphérique dans 50 % des cas, et elle est
également impliquée dans la médiacalcose (24), qui est une anomalie spécifique au diabète,
caractérisée par une calcification de la média des artères responsable de vaisseaux incom­
pressibles. La présentation clinique de l’artériopathie périphérique diabétique est évaluée
selon la classification de Leriche et Fontaine ou celle de Rutherford. La claudication inter­
mittente et les douleurs de décubitus sont des signes importants à rechercher, mais ils
peuvent être absents ou difficiles à distinguer des autres étiologies notamment neuropa­
thiques. Toute détérioration de la qualité et de la vitesse de la marche doit être prise en
considération, ainsi que la fatigue, les douleurs, les crampes, l’inconfort, ou les brûlures au
niveau des fesses, des cuisses, des mollets ou des pieds. Ces signes cliniques sont particuliè­
rement évocateurs d’artériopathie périphérique quand ils sont déclenchés par l'exercice ou
la montée d’une pente, et rapidement soulagés par le repos. L’aspect général de la peau,
l’état de la pilosité, et la température des membres inférieurs doivent être soigneusement
évalués. La palpation des pouls périphériques (pédieux, tibial postérieur, poplité et fémoral)
est un examen simple et non onéreux qui doit être réalisé systématiquement chez tous les
patients diabétiques. Néanmoins, la palpation des pouls périphériques manque de repro­
ductibilité, et ses conclusions dépendent des variations anatomiques des pieds, de l’expé­
rience des médecins, et des conditions de l’examen clinique. L’examen des pouls a une
faible performance dans le diagnostic de l’artériopathie, particulièrement le pouls pédieux
qui peut être absent physiologiquement en absence d’anomalie vasculaire. En revanche,
l’absence simultanée des pouls pédieux et tibiaux postérieurs lors d’un examen minutieux,
réalisé dans des conditions cliniques satisfaisantes, améliore la reproductibilité et la perfor­
mance de cet examen dans le diagnostic d’artériopathie périphérique (25). L’auscultation
des axes artériels des membres inférieurs n’a qu’une faible sensibilité pour dépister une
artériopathie périphérique.

Paris, 23-24 novembre 2018


96 Kamel MOHAMMEDI

L’Index de Pression Systolique (IPS) est l’examen à réaliser en première intention chez
les patients symptomatiques. Il est défini par le rapport de la pression artérielle systolique
de la jambe sur celle de l’avant-bras, mesurée chez un patient en position allongée après
5  – 10 minutes de repos, à l’aide d’un brassard gonflable et d’un appareil doppler pour
détecter l’artère pédieuse (ou tibiale postérieure) pour la jambe et l’artère brachiale pour
l’avant-bras. L’IPS est considéré comme normal entre 1,0 et 1,4 ; douteux entre 0,9 et 1,0 ;
et clairement pathologique au-dessous de 0,9. Un IPS >1,4 est également anormal, reflé­
tant des artères rigides et calcifiées. La performance de l’IPS <0,9 n’est cependant pas
parfaite dans le dépistage de l’artériopathie périphérique diabétique chez les patients
diabétiques, avec une sensibilité variant entre 29 à 95 % et une spécificité entre 58 à 97 %
(26). L’intégration de l’IPS >1,3 dans le dépistage de l’artériopathie périphérique n’amé­
liore pas la discrimination. Cette performance imparfaite est particulièrement observée en
cas de neuropathie périphérique ou de médiacalcose. L’index brachial à l’orteil est plus
performant en cas de médiacalcose ou d’artères incompressibles. La pression systolique
d’orteil et la pression transcutanée du dos du pied (TcPO2) sont indiquées dans le
diagnostic d’ischémie critique des membres inférieurs (voir plus loin) ou pour estimer les
chances de cicatrisation après une amputation de membre inférieur. À titre d’exemple, une
TcPO2 >40 mmHg est associée à une bonne probabilité de cicatrisation après une amputa­
tion mineure. Le test sur tapis roulant utilisant habituellement le protocole Strandness
(vitesse de 3 km/h et une pente de 10 %) est un excellent outil pour détecter les sténoses
modérées ou confirmer une origine ischémique d’une douleur atypique ou masquée par la
neuropathie. Le diagnostic d’artériopathie est retenu devant une diminution de la pression
systolique de la cheville post-exercice >30 mmHg ou une baisse de plus de 20 % de l'IPS.
L’étude hémodynamique apporte des informations complémentaires. Une onde tripha­
sique reflète un état hémodynamique satisfaisant et donc l’absence d’artériopathie périphé­

Figure 1. - Présentations cliniques de l’artériopathie périphérique diabétique

Données de l’étude ADVANCE à l’inclusion (5).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Artériopathie périphérique diabétique 97

rique. En revanche, la présence d’une onde mono- ou biphasique est en faveur d’une
artériopathie ; elle a une bonne valeur prédictive négative, mais sa valeur prédictive
positive est variable selon la présence ou l’absence de neuropathie (26). L’écho-doppler
artériel des membres inférieurs est le premier examen d’imagerie permettant d’avoir un
diagnostic topographique d’artériopathie, il doit être réalisé dans le cadre d’un projet
thérapeutique chez des patients symptomatiques. Cet examen simple, non invasif, et peu
coûteux, permet une étude anatomique et hémodynamique des lésions sans être affecté
par les calcifications artérielles. C’est un examen performant avec une bonne sensibilité et
spécificité, mais il est très opérateur dépendant. L’angioscanner, l’angio-IRM, et l’angiogra­
phie numérique sont des examens invasifs qui permettent un diagnostic topographique
plus précis, et sont souvent réalisés dans le cadre d’un bilan préopératoire. Sur le plan
topographique, on peut distinguer classiquement l’atteinte proximale (depuis l’artère
iliaque commune jusqu’à la fémorale superficielle) de l’atteinte distale (depuis l’artère
poplitée jusqu’à la pédieuse). Cette dernière localisation est particulièrement observée
chez les patients diabétiques. Il est intéressant de noter que l’artériopathie périphérique
distal et proximale ne coexistaient à l’inclusion que dans 5 % des cas dans l’étude
ADVANCE (Figure 1), suggérant ainsi que les deux présentations cliniques pourraient
avoir deux histoires naturelles distinctes.

Ischémie critique chronique


On estime que 50 à 70 % des patients souffrant d’ischémie critique chronique (ICC)
sont diabétiques, particulièrement ceux compliqués d’un pied diabétique neuro-isché­
mique. Le diagnostic d’ICC est évoqué devant la présence de douleurs de décubitus
chronique (>2 semaines), typiquement au niveau de l’avant-pied avec ou sans troubles
trophiques. Le diagnostic d’ICC doit être discuté même en absence de douleurs si le
diabète est compliqué de neuropathie. Il est confirmé par un IPS <0,4, une pression de
la cheville <50 mmHg, une pression d’orteil <30 mmHg, ou une TcPO2 <30 mmHg.
L’ischémie aigüe des membres inférieurs doit être recherchée (Tableau 1)(27) en
urgence afin d’évaluer le pronostic du membre et de proposer une prise en charge
médico-chirurgicale appropriée. La nécessité d’amputation doit également être évaluée
rapidement. La nouvelle classification WIFI (Wound, Ischaemia, Foot Infection),
actuellement recommandée, fournit un score basé sur des stades à sévérité progressive
(de 0 à 3) de l’ulcération, l’ischémie et l’infection (28). Ainsi un score W0-I0-FI0 est
associé à un risque très faible d’amputation contrairement au score W3-I3-FI3 qui
reflète un risque très élevé.
Tableau 1. - Stades de l’ischémie aiguë des membres inférieurs (27)

Déficit
Stade Catégorie Déficit sensitif Pronostic
moteur
Pas besoin de traitement
I Membre viable Aucun Aucun
immédiat
Ischémie discrètement Aucun ou uniquement Sauvetage si rapidement
IIa Aucun
menaçante localisé aux orteils traité
Ischémie immédiatement Léger/ Sauvetage si
IIb Orteils et au-delà
menaçante modéré revascularisation rapide
Profond, Amputation, déficit
III Irréversible Profond, anesthésiant
paralysant neurologique irréversible

Paris, 23-24 novembre 2018


98 Kamel MOHAMMEDI

STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE
La prise en charge de l’artériopathie périphérique diabétique nécessite une équipe pluri­
disciplinaire impliquant diabétologue, chirurgien vasculaire, infectiologue, radiologue,
médecin de réadaptation physique, infirmière, podologue, orthoprothésiste, et kinésithé­
rapeute. Un contrôle strict des facteurs de risque cardiovasculaire est indispensable pour
traiter l’artériopathie, et surtout pour améliorer le pronostic cardiovasculaire et global des
patients.
Contrôle du diabète et différents traitements antidiabétiques
Un contrôle strict du diabète est indispensable devant toute artériopathie (29, 30). Lors
de l’étude UKPDS, chaque baisse d’un pourcentage d’HbA1c était associée à une réduc­
tion de 43 % du risque d’artériopathie périphérique (amputation ou mort secondaire à un
évènement vasculaire périphérique) (31). En revanche, cette étude n’a pas montré de
réduction significative du risque d’artériopathie chez les patients bénéficiant d’un équilibre
strict du diabète lors du suivi épidémiologique (32). Lors de l’étude ADVANCE, l’inci­
dence des évènements vasculaires périphériques était similaire dans les 2 groupes de l’étude
(intensif versus standard) (11). De façon intéressante, les analyse post-hoc de l’étude
BARI-2D (Bypass Angioplasty Revascularization Investigation 2 Diabetes) ont suggéré que le
traitement insulino-sensibilisateur (metformine ou thiazolidinedione), comparé au traite­
ment insulino-sécréteur (sulfamide, glinide ou insuline), était associé à une réduction de
l’incidence d’artériopathie périphérique (IPS ≤0,9, revascularisation des artères périphé­
riques, ou amputation) (33). D’autre part, Marso et al. ont rapporté dans l’étude SUSTAIN-6
que le traitement par Sémaglutide, analogue du GLP1 à libération prolongée, était associée
à 35 % de réduction du risque de revascularisation coronaire ou périphérique, mais le
bénéfice net en terme d’atteinte périphérique n’a pas été rapporté (34). L’étude LEADER
(Liraglutide Effect and Action in Diabetes: Evaluation of Cardiovascular Outcome Results)
n’a pas rapporté non plus de données sur l’artériopathie malgré un bénéfice significatif de
la Liraglutide en terme d’évènements vasculaires (35). L’incidence de l’artériopathie
périphérique a été comparable chez les patients traités par Exenatide à libération prolongée
ou par placebo dans l’étude EXSCEL (Exenatide Study of Cardiovascular Event
Lowering) (36). Enfin, l’étude CANVAS a montré qu’en comparaison au placebo, un
traitement par canaglifozine, inhibiteur du co-transporteur sodium- glucose de type 2
(i.SGLT2), était associé à 2 fois plus de risque d’amputation mineure ou majeure des
membres inférieurs (37). En analysant les patients ayant subi une amputation lors de
l’étude CANVAS, les auteurs ont observé que l’artériopathie et l’ischémie aigüe du membre
inférieur étaient plus fréquentes dans le groupe canaglifozine, tandis que la neuropathie
était plus observée dans le groupe placebo. Cet effet indésirable grave ne semble pas être
un effet classe des i.SGLT2. Ainsi, l’incidence des amputations de membres inférieurs était
comparable entre les 2 groupes (empaglifozine versus placebo) de l’essai clinique
EMPA-REG OUTCOME (38). Une large étude rétrospective réalisée récemment aux
USA n’a pas observé de risque élevé d’amputation des membres inférieurs lié aux traite­
ments par i.SGLT2 (39). Les mécanismes physiopathologiques susceptibles d’expliquer le
risque élevé d’amputation des membres inférieurs lié à la canaglifozine dans l’étude
CANVAS ne sont pas encore élucidés.
Traitements antihypertenseurs
Lors de la phase observationnelle de l’étude UKPDS, chaque baisse de 10 mmHg de
pression artérielle systolique était associée à 16 % de réduction du risque d’artériopathie

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Artériopathie périphérique diabétique 99

périphérique (40). Les patients randomisés initialement dans le groupe du traitement


antihypertenseur intensif avaient une réduction significative de 50 % du risque d’artério­
pathie périphérique après 20 ans de suivi total (41). Les analyses post-hoc de l’étude VADT
(Veterans Affairs Diabetes Trial) ont également montré une réduction du risque d’amputa­
tion chez les participants présentant une faible pression artérielle systolique (<140 versus
≥140 mm Hg) (42). En revanche, l’étude ADVANCE n’a pas montré de bénéfice du traite­
ment par perindopril/indapamide, en compassion au placebo, en termes d’évènements
vasculaires périphériques (11). L’intérêt de baisser la pression artérielle pour réduire le
risque cardiovasculaire chez les patients atteints d’artériopathie périphérique ne prête à
aucun doute, mais la balance bénéfice-risque de chaque classe d’antihypertenseurs n’a pas
été suffisamment étudiée. À l’état actuel des connaissances (avec un niveau de preuves très
faible), les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, les antagonistes des récepteurs de l’angio­
tensine II, et les inhibiteurs des canaux calciques peuvent être privilégiés pour leur effet
vasodilatateur périphérique.

Traitements hypolipémiants
Les sociétés européennes de cardiologie (ESC) et de chirurgie vasculaire (ESVS) recom­
mandent un LDL-cholestérol <0,70 g/l (ou une baisse de 50 % par rapport au taux de base
s’il est situé entre 0,70 et 1,35 g/l) chez tous les patients souffrant d’artériopathie périphé­
rique (30). Peu d’études ont évalué l’intérêt des statines dans le développement ou la
progression de l’artériopathie périphérique, mais plusieurs études randomisées ou observa­
tionnelles ont montré leur intérêt dans la réduction des évènements cardiovasculaires chez
les patients atteints de complications vasculaires périphériques (43). D’autres études
suggèrent l’intérêt des statines dans l’amélioration du périmètre de marche (44). Un
éventuel bénéfice des fibrates chez les patients artéritiques a été également évoqué. Dans
l’étude FIELD (Fenofibrate Intervention and Event Lowering in Diabetes), le traitement par
fenofibrate, comparé au placebo, a montré une réduction de 36 % du risque d’amputation
des membres inférieurs, mais cette protection ne concernait pas les amputations majeures
liées à une atteinte de gros vaisseaux (45). Le traitement par evolocumab, immunoglobu­
line monoclonale dirigée contre le PCSK9 (proprotein convertase subtilisin/kexin type 9) a
permis de réduire de 42 % le risque d’évènements vasculaires périphériques lors de l’étude
FOURIER (Further Cardiovascular Outcomes Research With PCSK9 Inhibition in Subjects
With Elevated Risk), avec une corrélation significative entre la baisse du LDL-cholestérol
et la réduction du risque d’évènements vasculaires périphériques (46).

Antiagrégants plaquettaires et anticoagulants


Un traitement par antiagrégant plaquettaire (AAP) est indiqué chez tous les patients
avec artériopathie périphérique symptomatique ou ayant bénéficié d’une revascularisation.
Il permet de réduire le risque d’évènements vasculaires périphériques et de maladie cardio­
vasculaire. Certaines données de la littérature peuvent encourager l’utilisation du clopido­
grel chez ces patients. Une large méta-analyse de 18 essais cliniques randomisés et contrôlés
chez 5 269 patients avec artériopathie périphérique n’a pas démontré de bénéfice signifi­
catif de l’aspirine en terme de réduction cardiovasculaire, sauf pour l’accident vasculaire
cérébral non fatal quand il a été considéré seul comme un critère de jugement secondaire
(47). L’étude CAPRIE (Aspirin in Patients at Risk of Ischaemic Events), incluant 20 % de
participants diabétiques, a montré que clopidogrel 75 mg était supérieur à l’aspirine 325 mg
en terme de prévention cardio-vasculaire chez les patients avec antécédents d’artériopa­
thie périphérique symptomatique ou d’infarctus du myocarde, ou d’accident vascu laire

Paris, 23-24 novembre 2018


100 Kamel MOHAMMEDI

cérébral ischémique (48). Le traitement par ticagrelor, comparé au clopidogrel, n’a pas
montré de réduction d’évènements vasculaires (cardiovasculaire ou périphérique) chez
13  885 participants (dont 40 % de diabétiques) atteints d’artériopathie périphérique
symp­tomatique (49). Il n’existe pas de bénéfice évident en faveur d’un double traitement
AAP. Dans le sous-groupe des patients avec artériopathie périphérique (36 % de diabé­
tiques) dans l’étude CHARISMA, un traitement par deux APP (clopidogrel plus aspirine
versus aspirine seule) a permis de réduire le risque d’infarctus du myocarde, mais sans autre
protection vasculaire notamment périphérique, avec un risque élevé d’hémorragie modérée
(50). Par ailleurs, un double traitement APP, associant clopidogrel et aspirine, peut être
prescrit pendant 1 mois après une revascularisation endovasculaire avec la pose de stent
au niveau sous-inguinal (30). Cette association peut être également discutée après un
by-pass au-dessous du genou avec pose d’une prothèse.
Les sociétés savantes européennes (ESC et ESVS) ne recommandent pas d’APP en cas
d’artériopathie périphérique asymptomatique sans autre localisation cardiovasculaire
(30). En effet, Belch et coll. n’ont pas montré de bénéfice d’un traitement par aspirine ou
antioxydant (seuls ou combinés), comparés au placebo, chez 1  276 patients diabétiques
avec artériopathie périphérique asymptomatique en termes de maladie cardiovasculaire,
d’amputation majeure secondaire à une ischémie critique, ou de mortalité (51).
Un traitement anticoagulant n’est recommandé qu’en présence d’indications classiques
d’anticoagulation efficace. Il doit être utilisé seul, sauf dans de rares cas (exemple : revas­
cularisation endovasculaire) où une association avec un traitement AAP peut être consi­
dérée pendant un mois et seulement si le risque hémorragique est jugé faible. Les résultats
récents de l’étude COMPASS (Cardiovascular Outcomes for People Using Anticoagulation
Strategies) montrent qu’une association d’aspirine avec le rivaroxaban, un inhibiteur oral
du facteur Xa, comparée à l’aspirine seule, réduit de 46 % le risque d’évènements vascu­
laires périphériques, notamment d’amputation de membre inférieur chez des patients avec
des antécédents de maladie cardiovasculaire ou périphérique (52). Les patients diabétiques
(44 % à l’inclusion) bénéficient de cette association de la même façon que les autres parti­
cipants. Cependant, ce bénéfice n’a pas été observé avec rivaroxaban seul, et il est surtout
contrebalancé par un risque élevé d’hémorragie majeure, particulièrement gastro-intesti­
nale. Un traitement par vorapaxar, un antagoniste sélectif du récepteur plaquettaire
PAR-1, a également permis de réduire le risque d’évènements vasculaires périphériques,
mais avec une augmentation du risque hémorragique chez des patients avec antécédents
de maladie cardiovasculaire stable (53).

Autres vasodilatateurs
Certains vasodilatateurs peuvent être utilisés, à visée symptomatique, pour améliorer la
claudication intermittente tels que cilostazol (inhibiteur de la phosphodiestérase type III),
et naftidrofuryl (vasodilatateur périphérique), mais leur bénéfice est minime à modéré
avec un niveau de preuve limité (44). Dans une large revue de la littérature, cilostazol était
associé à une amélioration du périmètre de marche, mais sans protection cardiovasculaire
notable ni effet favorable sur la qualité de vie (54). Ce médicament est responsable de
certains effets secondaires, notamment céphalées, vertige, palpitations, et diarrhées. Le
Cilostazol a également un effet APP et doit être utilisé avec prudence en association avec
d’autres APP ou anticoagulants (55). L’oxalate de naftidrofuryl améliore également de
façon significative le périmètre de marche (56).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Artériopathie périphérique diabétique 101

Traitements innovants
Les facteurs de croissance et les cellules souches ont été également testés dans l’artério­
pathie périphérique, avec des résultats encourageants. L’étude TA- MARIS (Efficacy and
Safety of XRP0038/NV1FGF in Critical Limb Ischemia Patients With Skin Lesions), qui a
inclus 520 patients souffrant d’ICC dont 53 % étaient diabétiques, n’a pas permis de
démontrer l’intérêt du facteur de croissance NV1FGF (non-viral 1 fibroblast growth factor)
dans la réduction du risque de mortalité ou d’amputation majeure de jambe (57). Une
revue récente n’a pas supporté l’intérêt d’un traitement par facteurs de croissance dans la
réduction du risque de décès, d’amputation majeure, ni l’amélioration du périmètre de
marche en analysant 14 études testant FGF (fibroblast growth factors), HGH (hepatocyte
growth factors) ou VEGF (vascular endothelial growth factors) chez 1  400 patients avec
artériopathie périphérique (58). Par ailleurs, ces traitements ont amélioré les anomalies
hémo­dynamiques et diminué le risque d’amputations mineures, mais le niveau de bais
était élevé. Une large métaanalyse récente a montré que l’autogreffe de cellules souches
réduisait le risque d’amputation, augmentait le taux de survie sans amputation, et amélio­
rait la cicatrisation des ulcères (59). Ils ont rapporté également une augmentation de l’IPS
et de la TcPO2, et une réduction des douleurs de décubitus. De façon intéressante, la
réduction du risque d’amputation était plus marquée dans les études avec une forte préva­
lence de diabète. Ces résultats encourageants n’ont pas été corroborés par l’étude PACE
(Patients With Intermittent Claudication Injected With ALDH Bright Cells) réalisée chez
82  patients (30 diabétiques) avec artériopathie périphérique bénéficiant d’une autogreffe
de la moelle osseuse en comparaison au placebo (60).
Mesures non pharmacologiques
Le sevrage strict de l’intoxication tabagique est indispensable pour éviter le développe­
ment ou l’aggravation de l’artériopathie périphérique (61, 62). L’exposition passive à la
cigarette doit être également évitée (63). L’activité physique est indispensable dans la prise
en charge des patients artéritiques, en particulier ceux avec une claudication intermit­
tente. Elle améliore le périmètre de marche et la qualité de vie (64). Une activité physique
supervisée avec une rééducation à la marche est largement recommandée chez les patients
atteints d’artériopathie périphérique. L’éducation diététique peut être également bénéfique
chez ces patients. Une étude espagnole a montré qu’un régime méditerranéen à base d’huile
d’olive ou de noix était associé à une réduction du risque d’artériopathie périphérique (65).
Prise en charge chirurgicale
Les techniques de revascularisation ont connu beaucoup de progrès ces dernières
années, et elles sont actuellement mieux codifiées (30). La revascularisation chirurgicale
est recommandée pour les occlusions aorto-iliaques et bi-fémorales. Une revascularisation
endovasculaire peut être discutée en première intention pour les atteintes proximales en
cas de lésion courte, chez les patients avec une comorbidité sévère, ou dans les centres
experts. Pour les lésions infra-poplitées, une revascularisation chirurgicale par by-pass est
recommandée en première intention avec un bon niveau de preuve (30). Une revasculari­
sation endovasculaire peut également être envisagée en cas d’atteinte distale.

CONCLUSION
L’artériopathie périphérique est une complication sévère fréquemment observée chez les
patients diabétiques. Son pronostic est préoccupant avec un impact péjoratif sur le plan

Paris, 23-24 novembre 2018


102 Kamel MOHAMMEDI

fonctionnel, cardiovasculaire et vital. La démarche diagnostique est actuellement mieux


codifiée permettant un dépistage précoce notamment des formes pauci-symptomatiques,
tout en évitant l’excès d’un dépistage universel peu utile et onéreux. Une meilleure
compréhension de la physiopathologie et de l’histoire naturelle de l’artériopathie périphé­
rique permet d’améliorer sa prise en charge, qui est complexe et incontestablement multi­
disciplinaire.

Service d’Endocrinologie, Diabétologie, Nutrition


CHU de Bordeaux, Hôpital Haut-Lévêque
Avenue de Magellan, 33604 PESSAC CEDEX
Tél. +33 5 57 65 60 78; Fax. +33 5 57 65 65 29

Adresse pour la correspondance : Professeur Kamel Mohammedi (adresse ci-dessus)


Email : km.mmohammedi@gmail.com

PERIPHERAL ARTERIAL DISEASE IN PATIENTS WITH DIABETES


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Kamel MOHAMMEDI (Bordeaux, France)

ABSTRACT
Peripheral arterial disease (PAD) is a severe vascular disease. It is common in patients
with diabetes, with a worse prognosis. PAD has been associated with excess risk of lower-
extremity amputation, cardiovascular disease, and all-cause mortality. The screening for
PAD will be based on a careful evaluation of medical history and a comprehensive clinical
examination. The diagnosis of PAD can be established based on the assessment of the ankle-
brachial index, which should be performed in patients with symptoms or signs suggesting
PAD. The management of PAD requires an experienced and multidisciplinary team.
Diabetes and blood pressure controls, statins, and antiplatelet drugs are the key-treatments
of PAD. Revascularisation should be considered according to PAD anatomic localization,
medical conditions, and operator experience. Supervised walking rehabilitation and an
absolute smoking cessation are crucial in PAD management.

Key-words : Diabetes, peripheral arterial disease, lower-extremity amputation.

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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Paris, 23-24 novembre 2018


106

NOTES

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


LES HYPOCHOLESTÉROLÉMIES GÉNÉTIQUES :
MALADIE DE RÉTENTION DES CHYLOMICRONS,
ABÊTALIPOPROTÉINÉMIE,
HYPOBÊTALIPOPROTÉINÉMIES ET HYPOLIPIDÉMIE
COMBINÉE FAMILIALE

par Sybil CHARRIERE 1,2, Mathilde DI FILIPPO 1,3, Oriane MARMONTEL 1,3,
Noël PERETTI 1,4 et Philippe MOULIN 1,2 (Lyon)

Les hypocholestérolémies d’origine génétique sont des pathologies du métabolisme des


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

lipides rares et méconnues. Elles sont caractérisées par une diminution du cholestérol
contenu dans les lipoprotéines de type LDL (low density lipoprotein) ou hypoLDLémie.
Elles regroupent deux situations très différentes. Tout d’abord, un groupe de trois
pathologies très rares et graves d’expression phénotypique précoce dès les premières années
de vie: la maladie de rétention des chylomicrons, l’abêtalipoprotéinémie et l’hypobêtali­
poprotéinémie homozygote qui se manifestent dès les premières semaines de vie par des
diarrhées graisseuses avec malabsorption lipidique entraînant un retard de croissance
staturo-pondérale puis des anomalies principalement neurologiques et ophtalmologiques
par carences en vitamines liposolubles et en acides gras essentiels, et un risque de stéato-
hépatite. Par ailleurs, on trouve des hypolipidémies moins sévères, le plus souvent
asymptomatiques et de découverte fortuite, l’hypobêtalipoprotéinémie hétérozygote, et
l’hypolipidémie combinée familiale. Ces pathologies sont généralement considérées comme
« bénignes », mais présentent également un risque de stéatose hépatique avec évolution
possible vers une fibrose chez, les porteurs de mutations du gène APOB, justifiant le
diagnostic, l’exploration familiale et la surveillance des porteurs de ces mutations.

Mots-clés : Hypocholestérolémie, hypobêtalipoprotéinémie, abêtalipoprotéinémie, maladie de rétention des


chylomicrons, diarrhées, stéatose hépatique.

I. INTRODUCTION
Les hypolipidémies génétiques sont des pathologies rares et méconnues du métabolisme
des lipoprotéines, liées à un défaut de production des lipoprotéines riches en triglycérides
(chylomicrons / VLDL) par l’intestin ou une accélération de catabolisme ou clairance. Les
lipoprotéines sont essentielles pour assurer le transport des lipides dans la circulation
plasmatique. Un déficit sévère en lipoprotéines circulantes va donc générer une carence
cellulaire en acides gras en particulier en acides gras essentiels, mais également en
vitamines liposolubles, responsables d’une partie des complications de ces pathologies.
Nous ne détaillerons, dans cet article, que les hypocholestérolémies liées majoritaire-
ment à une diminution du cholestérol contenu dans les lipoprotéines de type LDL (low

Paris, 23-24 novembre 2018


108 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

density lipoprotein) ou hypoLDLémie, excluant les hypoalphaliprotéinémies, groupe très


différent de pathologies. Après un rappel sur le métabolisme des lipoprotéines, nous détail-
lerons les anomalies génétiques à l’origine de ces pathologies, leur diagnostic puis leur prise
en charge thérapeutique.

II. RAPPEL SUR LE MÉTABOLISME DES LIPOPROTÉINES


Les lipides sont solubilisés et transportés dans le sang circulant par des lipoprotéines. Il
existe schématiquement deux familles de lipoprotéines circulantes :
- Les lipoprotéines contenant de l’apoB, synthétisées par deux voies : les lipoprotéines
contenant de l’ApoB48 (Chylomicrons, remnants des chylomicrons ; voie exogène) et
celles contenant de l’ApoB100 (VLDL ou Very Low Density Lipoprotein, IDL ou Inter­
mediary Density Lipoprotein, LDL ou Low Density Lipoprotein ; voie endogène).
- Les lipoprotéines dépourvues d’apoB, qui comportent des particules très hétérogènes,
plus petites et beaucoup plus denses, les HDL (High Density Lipoprotein), contenant de
l’ApoA1.
La quantité de lipoprotéines circulantes résulte d’un équilibre complexe entre leur
production, leurs interactions dans la circulation et leur catabolisme.
La voie exogène prend en charge les lipides essentiellement sous forme de triglycérides
(TG). Après leur absorption intestinale sous forme d’acides gras libres, les TG sont resyn-
thétisés dans l’intestin grêle, incorporés dans les chylomicrons qui sont ensuite sécrétés
dans la lymphe et se déversent dans la circulation sanguine via le canal thoracique. La
protéine de structure des chylomicrons est l’apoB48. Les chylomicrons sont hydrolysés
dans le secteur intravasculaire par la lipoprotéine lipase (LPL) qui hydrolyse leurs TG. À
l’issue de leur remaniement dans la circulation, les remnants des chylomicrons seront

Figure 1. - Schéma du métabolisme des lipoprotéines.


HL : lipase hépatique, IDL : intermediary density lipoprotein, LDL : low density lipoprotein,
LDLR : récepteur aux LDL, LPL : lipoprotéine lipase, MTTP : microsomal triglycerides transfert protein,
VLDL : very low density lipoprotein.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 109

épurés par le récepteur appelé LRP (LDL receptor-related protein) puisque l’apo B48 est
dépourvue du domaine de liaison au récepteur des LDL.
La voie endogène correspond à la synthèse hépatique des VLDL qui subissent également
l’action de la LPL lorsqu’elles sont déversées dans la circulation générale. Elles sont ainsi
converties en Intermediate-density Lipoproteins (IDL) qui peuvent être soit captées par le
foie, soit subir l’action de lipase l’hépatique générant des LDL qui seront recaptées par le
récepteur des LDL après liaison à l’apoB100 (Figure 1).

III. DÉFINITION DES HYPOLDLÉMIES


Les diminutions de LDL-cholestérol ou hypoLDLémies sont définies par un LDL-choles-
térol (LDLc) et un taux d’apoB inférieurs au 5ième percentile pour l’âge et le sexe. La préva-
lence de l’hypoLDLémie avec ce seuil a été évaluée à 7,8 % dans une population générale
de donneurs de sang (1). Les hypoLDLémies ne sont donc pas rares.
Bien qu’il n’y ait pas de seuil consensuel, on peut retenir comme seuils basés sur le
5ème  percentile pour l’âge et le sexe d’après 2 études récentes (2, 3) :
- chez l’enfant de moins de 18 ans : LDLc < 1.2 mmol/l soit environ 0.45 g/l ;
- c hez le jeune adulte (hommes 18-30 et femmes 18-40 ans) : LDLc < 1,5 mmol/l soit
environ 0.60 g/l ;
- <
 1,8 mmol/L soit environ 0.70 g/l après l’âge de 30 ans chez l’homme et 40 ans chez
la femme ;
- <
 2 mmol/L soit environ 0.75 g/l à partir de 40 ans chez l’homme et de 50 ans chez la
femme.

IV. LES HYPOLDLÉMIES D’ORIGINE GÉNÉTIQUE


Elles sont liées soit à un déficit en protéines impliquées dans la synthèse des lipopro-
téines riches en apoB, soit à un déficit d’une protéine régulant leur catabolisme.

IV.1. HypoLDLémies génétiques sévères à expression précoce


Elles regroupent 3 pathologies responsables d’un défaut de production des lipoprotéines
contenant de l’apoB (Chylomicrons et VLDL) : la maladie de rétention des chylomicrons,
l’abêtalipoprotéinémie, et les hypobêtalipoprotéinémie homozygote.

IV.1.1. Les causes génétiques des hypoLDLémies sévères


IV.1.1.1. Maladie de rétention des chylomicrons (MRC)
La maladie de rétention des chylomicrons (MRC, ou en anglais CMRD Chylomicron
Retention Disease, OMIM#246700) initialement appelée maladie d’Anderson, est une
maladie rare de transmission autosomique récessive. Elle est liée à une mutation du gène
SAR1B (initialement appelée SARA2), situé sur le chromosome 5, et exprimé majoritai-
rement dans le foie et le muscle (4-7). La protéine Sar1b, composée de 198 acides aminés,
joue un rôle crucial dans la synthèse et la sécrétion des chylomicrons : elle assure le trans-
port des pré-chylomicrons entre le réticulum endoplasmique (RE) et le Golgi, et est égale-

Paris, 23-24 novembre 2018


110 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

ment impliquée dans la sécrétion des VLDL (8-10). Seulement une quarantaine de patients
homozygotes ou hétérozygotes composites issus de 24 familles ont été décrits dans la litté-
rature. 17 mutations différentes ont été rapportées (10 mutations faux sens et 7 protéines
tronquées) (11).

IV.1.1.2. Abêtalipoprotéinémie (ABL)


L’abêtalipoprotéinémie est également une hypocholestérolémie génétique autosomique
récessive (ABL, OMIM#200100). Ces malades n’ont pas de lipoprotéines contenant de
l’apoB (chylomicrons, VLDL, LDL). Elle est liée à des mutations du gène MTTP (micro-
somal triglycerides transfert protein) (OMIM*157147), situé sur le chromosome 4 et
codant une protéine de 894 acides aminés, exprimée dans le foie et les cellules intestinales
(12, 13).

La protéine MTTP se présente sous forme d’hétérodimères avec la protéine disulfide


isomérase (PDI maintenant appelée P4HB) (14, 15). Ce complexe joue un rôle de protéine
chaperonne, primordiale pour la synthèse de l’apoB, qu’elle lipide au fur et à mesure de sa
synthèse. En l’absence de cette protéine fonctionnelle, l’apoB est orientée vers les voies de
dégradation par le protéasome, elle n’est donc pas sécrétée (16). Son déficit explique
l’absence de synthèse de chylomicrons et de VLDL et en aval l’absence de LDL.

Il s’agit d’une pathologie très rare, touchant moins de 1 personne pour 1 million (17). 67
patients issus de 58 familles présentant une abêtalipoprotéinémie ont été rapportés.
53  mutations différentes ont été décrites dont seulement 8 mutations faux sens (18).

IV.1.1.3. Hypobêtalipoprotéinémie par mutation homozygote sur le gène APOB


L’hypobêtalipoprotéinémie (familial hypobetalipoproteinemia-1, FHBL1  ; OMIM#
615558) est due à des mutations du gène APOB. C’est une hypocholestérolémie génétique
de transmission autosomique co-dominante : on distingue la forme homozygote ou
hété­rozygote composite (Ho-FHBL1) lorsqu’une mutation a été héritée de chaque parent
et la forme hétérozygote (une seule mutation, Hz-FHBL1) générant un tableau clinique
beaucoup moins sévère (voir plus loin).

Chez l’Homme, un seul gène, situé sur le chromosome 2, code pour l’apoB (OMIM#
107730) (19). Il existe néanmoins deux transcrits, grâce au mécanisme d’édition de
l’ARNm qui consiste en une désamination de la cytidine 6 666 (base 6538 sur la séquence
NM_000388.2, selon la nouvelle nomenclature) en uridine, ce qui conduit à l’apparition
d’un codon stop (20, 21). Selon le type cellulaire, l’apoB sécrétée peut donc être : l’ApoB100
dans les hépatocytes et l’ApoB48 qui correspond à 48 % de l’ApoB100 (extrémité N termi-
nale, 2 152 acides aminés) dans les cellules intestinales (22).

Dans la forme homozygote ou hétérozygote composite (Ho-FHBL1), la symptomatologie


est variable selon la taille de la protéine résiduelle, en particulier pour les signes digestifs
qui sont retrouvés seulement chez les patients synthétisant une apoB de taille inférieure à
30 %. En revanche, une atteinte hépatique a été mise en évidence quelle que soit la
mutation (18) L’Ho-FHBL1 est également très rare : 41 sujets issus de 27 familles présentent
une hypobêtalipoprotéinémie (OMIM#615558) homozygote ou hétérozygote composite
(Ho-FHBL1) ont été décrits (18).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 111

Au total, plus de 100 mutations sur le gène APOB ont été décrites associées à des
hypocholestérolémies, entraînant pour la plupart des troncatures de taille variable (du
peptide signal à 90 %).

IV.1.2. Présentation clinique et complications


La symptomatologie dépend du mécanisme conduisant à l’hypoLDLémie, de l’organe
dans lequel s’exprime et agit la protéine déficitaire, et des voies dans lesquelles elle est
impliquée. Schématiquement, si la protéine intervient dans la synthèse de lipoprotéine,
non seulement la lipoprotéine ne sera pas sécrétée mais il en résulte également une
surcharge lipidique de l’organe (intestin et/ou foie). Les trois pathologies se révèlent
généralement dès les premières semaines ou années de vie par une diarrhée chronique
associée à un syndrome de malabsorption avec retard de croissance pondérale puis statu-
rale, et survenue ultérieure de troubles neurologiques d’origine carentielle.

Malabsorption intestinale et ses conséquences


Signes digestifs et retentissement sur la croissance
L’absence de synthèse ou de sécrétions de chylomicrons entraîne une surcharge lipi­-
dique entérocytaire et une malabsorption lipidique intestinale. Cette malabsorption est
responsable d’une diarrhée chronique graisseuse (stéatorrhée) souvent associée à des
douleurs abdominales, des ballonnements, et parfois de vomissements. Elle entraîne un
déficit d’apports lipidiques et donc d’apport énergétique qui se traduit par un déficit de la
croissance pondérale puis staturale. Cette diarrhée est quasiment constante et s’installe
dès les premiers jours de vie ou dans la petite enfance dans la MRC (90 % des cas) et l’ABL
(80 % des cas) (11, 18). En cas de mutation de l’apoB, les diarrhées sont surtout observées
en cas de troncature inférieure à 48 %.
Carence en acides gras essentiels et en vitamines liposolubles
Les chylomicrons assurent également l’absorption et le transport des acides gras essen-
tiels et des vitamines liposolubles. En cas de malabsorption lipidique (MRC, ABL et
Ho-FHBL1), les patients présentent donc également une carence profonde en acides gras
essentiels et en vitamines liposolubles (A, D, E, K). Cependant, la profondeur de la carence
n’est pas la même pour toutes les vitamines : la vitamine E qui est exclusivement trans-
portée par les lipoprotéines est classiquement effondrée au diagnostic, la carence en
vitamines A et K est souvent plus modérée et celle est vitamine D est faible à modérée.
Cette différence peut s’expliquer par l’existence de transporteurs spécifiques indépendants
des lipoprotéines pour les vitamines A et D, ainsi que par la synthèse endogène cutanée
pour la vitamine D.
Complications neurologiques
Elles sont la conséquence de la carence en vitamine E à l’origine de dommages oxy­datifs
sur le système nerveux central et périphérique, et débutent généralement dans la première
ou seconde décennie de la vie. Les complications neurologiques les plus sévères sont en
général rencontrées chez les patients ABL (18). Elles sont en général moins sévères chez
les patients Ho-FHBL et MRC (11, 18). La démyélinisation des axones spinocérébelleux
conduit progressivement à des troubles de la marche (23, 24). On note une perte progres-
sive des réflexes ostéotendineux, de la sensation de vibration et de la proprioception, une

Paris, 23-24 novembre 2018


112 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

faiblesse musculaire, et finalement, une ataxie proche de l’ataxie de Friedrich (25). Un


traitement précoce par forte dose de vitamine E permet d’enrayer ou prévenir ces compli-
cations neurologiques (24, 26, 27).
Complications ophtalmologiques
Les complications ophtalmologiques sont liées à la malabsorption de la vitamine E (cf.
supra), la vitamine A, EPA et DHA. Il s’agit avant tout d’une dégénérescence rétinienne,
dont le mécanisme précis reste mal connu. L’atteinte ophtalmologique est très fréquente
dans l’ABL, 60 % des patients présentant des manifestations ophtalmologiques (18),
variable dans leur âge de survenue et leur gravité, avec des survenues précoces mais égale-
ment de nombreux patients ABL asymptomatiques jusqu'à l'âge adulte. La perte de la
vision de nuit est souvent le premier symptôme décrit avec la perte de la vision des couleurs
(24, 28-31). Sans traitement par fortes doses de vitamines, la dégénérescence rétinienne
peut conduire à la cécité (28). Des troubles mineurs de l’adaptation à l’obscurité ou de la
vision des couleurs ont également été rapportés dans la MRD et l’Ho-FHBL (11, 18). Plus
rarement, les carences en vitamines A et E ont également été impliquées dans d’autres
manifestations ophtalmologiques comme un ptosis, une ophtalmoplégie ou des ulcères de
la cornée (23).
Autres complications liées à un défaut d’absorption des vitamines liposolubles
- A
 nomalies osseuses : Les déficits en vitamine D entraînent une augmentation de la
PTH, une résorption osseuse avec un risque de fracture voire d’ostéomalacie. Les
régimes hypolipidiques des patients sont également pauvres en calcium, ce qui pourrait
participer à la fragilité osseuse.
- D
 éficit en vitamine K : Un déficit en vitamine K conduit à une augmentation de l’INR
et à un risque de complications hémorragiques, rarement décrit. Un déficit chronique
pourrait contribuer à une ostéopénie elle-même favorisée par un statut précaire en
vitamine D lors de ces hypolipidémies.
Complications hépatiques
Une stéatose est retrouvée chez tous les patients ABL chez lesquels elle a été recher-
chée  (18). La plupart des patients avec Ho-FHBL (homozygote ou hétérozygote compo-
site) présentent également une stéatose (14/16) (18). Plusieurs cas de NASH fibrosantes
survenues sans facteurs secondaires additionnels montrent que les mutations du gène
APOB aussi bien à l’état homozygote qu’hétérozygote, peuvent entraîner à elles seules une
atteinte hépatique. Cette donnée est confirmée par l’observation de plusieurs cas de
cirrhose ayant nécessité une transplantation hépatique (18, 32-36).) Dans la MRC, une
hépatomégalie serait présente dans 20 % des cas et des élévations transitoires des transa-
minases ont été rapportées (37). Dans la littérature, 3 cas de stéatose ont été mis en
évidence et aucun cas de cirrhose n’a été rapporté (11).
Manifestations musculaires et cardiaques
Une élévation CPK (1,5 à 9,4 fois la normale) a été rapportées chez des patients présen-
tant une MRC (38). Une fraction d’éjection ventriculaire gauche diminuée a été mise en
évidence chez un des patients, cependant une biopsie musculaire ne révélait pas d’ano-
malie particulière et l’absence d’accumulation de lipides (38). Des cas de cardiopathies
sévères pouvant entraîner des décès avant l’âge de 50 ans ont été rapportés dans l’ABL  (18).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 113

IV.2. HypoLDLémies modérées ou asymptomatiques


En dehors des mutations hétérozygotes de l’APOB, les hypolipidémies modérées sont
liées à une accélération du catabolisme ou de la clairance des lipoprotéines. Ces patholo-
gies sont généralement peu ou pas symptomatiques et découvertes fortuitement sur le bilan
lipidique. Elles entrainent peu de complications en dehors des complications hépatiques
chez les porteurs des mutations de l’APOB hétérozygote.

IV.2.1. Hypobêtalipoprotéinémie hétérozygote (mutation hétérozygote sur le gène


APOB)
La forme hétérozygote d’abêtaliprotéinémie (Hz-FHBL1) est beaucoup plus fréquente
que la forme homozygote, entre 1/500 et 1/1000 dans la population générale (39, 40).
La découverte est le plus souvent fortuite, à l’occasion d’un bilan lipidique systématique,
qui révèle une diminution du LDLc associée à une concentration d’apoB de 1/3 à 1/4 de la
normale (généralement inférieure à 0.30g/L). Quelques cas ont été découverts lors d’un
bilan de stéatose hépatique, sachant que de certains patients peuvent évoluer vers la
fibrose hépatique et la cirrhose (1, 32, 41-44). Aucune anomalie neurologique clinique n’a
été rapportée chez les patients présentant une Hz-FHBL qui n’ont qu’un déficit partiel en
vitamine E.

IV.2.2. Mutations sur le gène PCSK9


Le gène PCSK9 a été tout d’abord impliqué dans les dyslipidémies comme étant le
troisième locus de l’hypercholestérolémie familiale (45). Les études génétiques ont identi-
fiées des mutations « gain de fonction » dans l’hypercholestérolémie familiale alors que des
mutations « perte de fonction » sont associées à une hypocholestérolémie et une réduction
du risque cardiovasculaire (46). La transmission est autosomique co-dominante.
Le gène PCSK9, situé sur le chromosome 1, est exprimé principalement dans le foie, le
rein et l’intestin. PCSK9 empêche le recyclage du R-LDL à la surface cellulaire et favorise
la dégradation intra-hépatocytaire du récepteur des LDL (LDLR) dans les endosomes
(47-49).
Lors d’une mutation perte de fonction du gène PCSK9, le recyclage du LDLR à la surface
cellulaire est majoré, et par conséquent diminue la concentration plasmatique du LDLc.
Les variations perte de fonction ont été initialement trouvées dans une population de
patients présentant une diminution du LDLc (Dallas Heart Study) et ont été mises en
évidence chez 2 % des individus d’origine afro-américaine et moins de 0,1 % d’individus
d’origine européenne (46) Une quarantaine de variations ou de mutations associées à une
hypocholestérolémie a été décrite. Deux patients homozygotes ou hétérozygotes compo-
sites asymptomatiques ont été décrits avec un LDLc aux alentours de 0.4 mmol/L (50).
Les patients présentant des mutations sur les gènes PCSK9 ont été dépistés de façon
fortuite devant un bilan lipidique objectivant une hypoLDLémie. Une stéatose a été
rapportée chez 4 patients porteurs de mutations-perte de fonction du gène PCSK9 qui
présentaient en outre des facteurs génétiques et environnementaux de susceptibilité, et des
études contrôlées montrent que le contenu intra-hépatique en triglycérides est identique à
celui de témoins (51-55).

Paris, 23-24 novembre 2018


114 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

IV.2.3. Hypolipidémie combinée familiale (FChL)


L’hypobêtalipoprotéinémie FHBL 2 (OMIM#605019) est due à des mutations sur le
gène ANGPTL3. La transmission du phénotype est complexe puisqu’elle est autosomique
co-dominante pour le LDLc et la triglycéridémie et récessive pour le HDL cholestérol, qui
est donc abaissé uniquement chez les patients présentant une forme homozygote ou
hétérozygote composite Le gène ANGPTL3 (OMIM 604774), situé sur le chromosome 1
et a été découvert par séquençage de l’exome dans deux familles présentant une hypobê-
talipoprotéinémie jusqu’alors inexpliquée (56). Exprimé principalement dans le foie, il
code pour une protéine de 460 acides aminés. Cette protéine appartient à la famille des
angiopoïétines, facteurs de croissance de l’endothélium vasculaire ; elle inhibe la lipopro-
téine lipase (LPL) et la lipase endothéliale (LE) (57-60). Chez l’Homme, l’inactivation par
mutation du gène ANGPTL3 augmente l’activité de la LPL, et est associée à une diminu-
tion des TG, du LDLc et du HDLc (61, 62). Désormais, 93 sujets FChL hétérozygotes et 22
homozygotes ou hétérozygotes composites ont été décrits (63). Les patients publiés sont
asymptomatiques et ont été diagnostiqués de façon fortuite ou par étude familiale. La
prévalence de la stéatose n’est pas augmentée chez les porteurs de mutations sur le gène
ANGPTL3, (p=0.7, n=115 dont 22 homozygotes et 93 hétérozygotes versus 402 non
porteurs) cependant une patiente obèse (IMC 41kg/m2) a été décrite avec une stéatose
sévère (63) pouvant faire suspecter un rôle favorisant de cette mutation mais sans certi-
tude.

IV.2.4. Formes homozygotes paucisymptomatique ou asymptomatiques


Il est rare de découvrir à l’âge adulte une ABL ou une MRC chez un patient demeuré
asymptomatique jusque-là. 2 cas d’ABL ont été diagnostiqués de façon fortuite à l’âge
adulte devant les anomalies de leur bilan lipidique associées à une stéatose chez l’un et une
rétinite pigmentaire atypique chez l’autre (64). 4 cas de MRC ont été diagnostiqués à l’âge
adulte mais tous présentaient des symptômes négligés (diarrhées et/ou signes neurolo-
giques depuis l’enfance) (11). Par contre, chez un adulte asymptomatique, le diagnostic de
FHB Ho peut être porté de façon fortuite sur la base du bilan lipidique. Dans ce cas cepen-
dant il est important que le diagnostic soit établi afin de réaliser une surveillance de
l’atteinte hépatique chez les porteurs de mutations sur le gène APOB.

V. DIAGNOSTIC PARACLINIQUE

V.1. Anomalies biologiques


Le bilan lipidique à jeun (EAL, Exploration d’une Anomalie Lipidique) ainsi qu’un
dosage d’apoB réalisé chez le cas index couplé avec le même bilan lipidique chez ses parents
permet d’orienter très souvent le diagnostic étiologique. Les résultats obtenus chez les
patients publiés sont résumés dans le tableau 1.
Avant les développements récents de la génétique, des analyses sophistiquées des
lipoprotéines pouvaient guider le diagnostic étiologique. Un test de charge en graisses
peut être mis en place afin de tester la sécrétion de chylomicrons en prélevant du sérum à
T0, T3, T4, T5h après la charge. L’absence d’augmentation des TG (pas de doublement du
taux basal des triglycérides) et de l’apoB48 témoigne de l’absence de sécrétion des chylo-
microns (ABL, MRC, Ho-FHBL avec troncatures de petite taille).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 115

MRC1 ABL2 Ho-FHBL2 Hz-FHBL3 He-PCSK94 He-ANGPTL35 Ho-ANGPTL35


(n=34) (n=58) (n=27) (n=50) (n=33) (n=93) (n=22)

CT 0,7 0,34 0,34 0.97+/-0.24 1.40+/-0.24 1,6+/-0,35 0,73+/-0,19


(0,32-0,39) (0,32-0,53)

TG 0,81 0,08 0,20 0,34+/-0,36 0.82 +/- 0.40 0,8+/-0,44 0,35+/-0,09


(0,08-0,18) (0,18-0,47)

HDLc 0,19 0,27 0,30 0.55+/-0.18 0.60 +/- 0.21 0,50+/-0,12 0,23+/-0,50

LDLc calculé 0,34 <0,02 0,02 0.34+/-0.18 0.63 +/- 0.23 0,97+/-0,31 0,42+/-0,12

ApoB 0,49 <0,02 <0,02 0.27+/-0.13 0,8+/-0,2 0,5+/-0,1

ApoA1 0,52 0,50 0,97 1,5 0,7


1 réference (11), moyenne
2 réference (18), médiane (Intervalle de confiance 95 %)
3 données personnelles non publiées, moyenne +/- écart type
4 références (46, 51), moyenne +/- écart type
5 références (62, 63), moyenne +/- écart type

Tableau 1. - Valeurs des paramètres lipidiques (en g/L) dans les différents types d’hypoLDLémies.
ABL : abêtalipoprotéinémie, CT : cholestérol total, HDLc : HDL cholestérol, He-ANGPTL3 : hétérozygote
ANGPTL3, Ho-ANGPTL3 : homozygote ANGPTL3, Hz-FHBL : hypobêtalipoprotéinémie heterozygote,
Ho-FHBL : hypobêtalipoprotéinémie homozygote, He-PCSK9 : heterozygote PCSK9,
LDLc : LDL cholestérol, TG : triglycérides.

Le dosage des vitamines liposolubles est utile non seulement pour estimer la carence
initiale mais également aider à orienter le diagnostic, en particulier celui de la vitamine E.
Un déficit profond (vitamine E inférieure à la limite de quantification) oriente vers une
ABL ou une MRC. En cas de mutation sur le gène APOB, une carence profonde en
vitamine E n’est retrouvée qu’avec des troncatures de taille inférieure à 48 % avec des
carences qui peuvent être profondes dans la forme homozygote et modérées chez les
hétérozygotes.
L’acanthocytose désigne la déformation en spicules de la membrane des érythrocytes.
Des acanthocytes sont retrouvés en proportion anormale (>5 %) lors de l’examen micros-
copique des frottis sanguins en particulier dans l’ABL, chez quelques cas d’Ho-FHBL et de
MRC.

V.2. Analyse moléculaire


Une recherche de mutations permettra de confirmer le diagnostic (gold standard). De
grands réarrangements ont été décrits sur les gènes APOB, MTTP et SAR1B, qui posaient
des difficultés techniques par méthode classique de Sanger en cas de forme hétérozygote
composite avec un risque de faux négatif. Le séquençage ciblé par méthode Sanger tend à
être abandonné au profit des techniques de séquençage haut débits (NGS, New Genera-
tion Sequencing), permettant de dépister les grands réarrangements et de séquencer les
gènes mentionnés précédemment simultanément.

V.3. Endoscopie haute et biopsies duodénales


Initialement, une endoscopie digestive était indispensable au diagnostic des hypocho-
lestérolémies d’origine intestinale (ABL, Ho FHBL, MRC) en évaluant l’aspect macrosco-

Paris, 23-24 novembre 2018


116 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

pique de la muqueuse duodénale (une muqueuse « blanche » avec un aspect en « chute de


neige » aussi appelé « gelée blanche » qui traduit la surcharge lipidique), en effectuant des
biopsies pour examen microscopique et éventuellement en mesurant l’activité MTTP à
partir des biopsies. On réalise maintenant les analyses moléculaires en en première inten-
tion, quand un diagnostic d’hypocholestérolémie génétique est suspecté, avant de proposer
un bilan endoscopique.

VI. DÉMARCHE DIAGNOSTIQUE


Avant d’évoquer une hypoLDLémie d’origine génétique, il faut toujours en premier lieu
éliminer une cause secondaire d’hypocholestérolémie. Les causes principales à rechercher
sont une insuffisance hépatique (albuminémie, taux de prothrombine et/ou dosage du
facteur V) et une dénutrition (albumine, préalbumine). Plus rarement, on peut retrouver
une hyperthyroïdie (TSH), un syndrome inflammatoire lors de fièvre, infection, trauma-
tisme, cancer, infarctus du myocarde (CRP). En cas de diarrhées, en particulier chez
l’enfant, il est important de faire le diagnostic différentiel avec les autres causes de
diarrhées. Les autres causes de diarrhées avec malabsorption à rechercher chez l’enfant
sont : la mucoviscidose et autres causes de déficit secrétoire pancréatique (test de la sueur,
mutation du gène CFTR), maladie coeliaque (dosage des anticorps anti-transglutami-
nases), infections chroniques du tube digestif, anomalies anatomiques du tube digestif.
En cas de découverte d’une diminution du LDLc et de l’apoB lors de la réalisation d’un
bilan lipidique chez un patient asymptomatique, un contrôle à distance (1 à 3mois) est
recommandé. En cas de persistance, l’étiologie pourra être orientée en fonction du taux de
triglycérides et d’HDL ainsi que par le bilan lipidique des parents (Figure 2).
Figure 2

LDLc et ApoB
abaissés

NON NON NON NON


Diabète,
effondrés TG Ô HDLc Ô PCSK9
obésité

OUI + OUI OUI OUI


TG
He-
(masquent la
effondrés diminution FChL
des TG))
Diarrhées NON
Parents NON 1 Parent Ho-
ABL dès
FChL
atteints atteint l’enfance

OUI
(les 2
parents)

Ho-FHBL Hz-FHBL MCR

Figure 2. - Schéma diagnostique devant une hypoLDLémie.


ABL : abêtalipoprotéinémie, CT : cholestérol total, HDLc : HDL cholestérol, He-ANGPTL3 : hétérozygote
ANGPTL3, Ho-ANGPTL3 : homozygote ANGPTL3, Hz-FHBL: hypobêtalipoprotéinémie heterozygote,
Ho-FHBL : hypobêtalipoprotéinémie homozygote, He-PCSK9 : heterozygote PCSK9,
LDLc : LDL cholestérol, TG : triglycérides.

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Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 117

VII. PRISE EN CHARGE : TRAITEMENT ET SUIVI


La prise en charge doit être adaptée à chacune des pathologies. Un suivi régulier est
indispensable afin d’adapter les traitements, de rechercher et traiter les complications. Des
recommandations de prise en charge thérapeutique et de suivi ont été publiées pour l’ABL,
la MRC, l’Ho-FHBL, l’Hz-FHBL1 (37, 65, 66). Il s’agit de recommandations d’experts,
nécessairement empiriques compte tenu du faible nombre de patients suivis et des données
encore limitées disponibles pour les patients adultes. Pour les formes sévères il est néces-
saire de prendre l’avis de centres référents ayant l’expérience de la prise en charge ces
pathologies.

VII.1. Traitement et suivi des formes sévères


Les patients doivent être pris en charge précocement, non seulement pour améliorer leur
confort digestif mais également et surtout, pour pallier leur déficit calorique et en vitamines
liposolubles afin de tenter de prévenir les complications neurologiques, ophtalmologiques,
hépatiques, voire cardiaques dans l’ABL.

VII.1.1. Traitement des formes sévères


Il convient de réduire la stéatorrhée qui favorise une malabsorption d’autres nutriments
en limitant les apports en graisses (moins de 30 % de l’apport calorique total). Au besoin,
pour maintenir l’apport calorique, notamment chez l’enfant, des triglycérides à chaines
moyennes (TCM) pourront être employés (lait ou huiles riches en TCM) et on tentera de
compenser la carence en AG essentiels en enrichissant les apports en DHA et EPA (37)
(huiles végétales 3 cuillérées à café / jour, poissons gras et supplémentation en oméga 3).
Les vitamines liposolubles seront substituées en fonction de l’intensité des carences et en
mettant l’accent sur la vitamine E. Un traitement précoce par vitamine E permet de
ralentir, voire de prévenir l’évolution des complications neurologiques et ophtalmologiques
(24, 27). Des doses pharmacologiques sont employées en espérant la persistance d’une
absorption résiduelle via la production intestinale des HDL. En cas de carence sévère, une
supplémentation à haute très dose orale est recommandée (37, 98) (tableau 2). Dans les
formes les plus sévères, il est exceptionnel de restaurer des concentrations plasmatiques
proches de la normale. Le dosage de la vitamine E érythrocytaire, voire adipocytaire,

Tableau 2. - Doses recommandées pour les supplémentations vitaminiques per os


(à ajuster sur la surveiller biologique)

doses médicaments

50 UI/kg/j OMACOR®
Vitamine E
(100 à 300 UI/kg/j) VEDROP®

15 000 UI/j
Vitamine A VITAMINE A313®
(100 à 400 UI/kg/j)

800-1200 UI/kg/j ou UVEDOSE®,


Vitamine D
100 000 UI/2 mois STEROGYL® …

15 mg/sem ampoules de vitamine K


Vitamine K
(5 à 35 mg/sem) 2 ou 10 mg

Paris, 23-24 novembre 2018


118 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

pourrait alors constituer un indicateurs intéressant pour guider la supplémentation dans la


mesure où des concentrations plasmatiques basses liées à l’absence de lipoprotéines
peuvent néanmoins, dans certains cas, être associées à un statut tissulaire normal (érythro-
cyte et adipocyte) (67). La vitamine A doit être administrée à des doses élevées pour
prévenir les complications ophtalmologiques mais, en raison du risque d’intoxication, les
posologies devront être adaptées soigneusement en fonction des dosages plasmatiques de
rétinol. Une supplémentation en vitamine D est également indiquée afin de prévenir les
complications osseuses (37). Des doses orales relativement élevées de vitamine K sont
recommandées avec une surveillance de l’INR ou un dosage de la vitamine K.

Les doses recommandées de vitamines sont détaillées dans le tableau 2.

Une supplémentation intraveineuse en vitamines liposolubles de même qu’une nutrition


parentérale ne sont pas nécessaires ou conseillés. Certains experts recommandent, en cas
de prise en charge tardive ou de complications neurologiques, des perfusions mensuelles
de lipides, vitamines A et E (37) mais cela reste controversé puisque des cas de stéatose
hépatique ont été décrits sous nutrition parentérale avec un lien de causalité difficile à
établir, puisque la pathologie est elle-même une cause stéatose. Par ailleurs, le traitement
par voie orale étant efficace, une supplémentation intraveineuse n’est plus recommandée
de façon systématique.

Les troubles digestifs et l’état général des malades sont complètement transformés après
instauration d’un régime pauvre en graisses. La symptomatologie digestive peut régresser
voire disparaître en quelques jours. Certains enfants ont une évolution staturo-pondérale
normale alors que d’autres amorcent un rattrapage puis se stabilisent sur un canal inférieur
à -1 DS. Cependant, le retard de l’âge osseux et le retard intellectuel (lorsqu’ils sont
présents au moment du diagnostic) persistent souvent.

VII.1.2. Suivi des formes sévères


Un suivi clinique au minium annuel est nécessaire dans les formes sévères avec atteinte
digestive, pour :
- s’assurer de la compliance du régime hypolipidique avec des apports caloriques suffi-
sants, de la supplémention en acides gras essentiels et en vitamines liposolubles ;
- surveiller la croissance staturo-pondérale (rattrapage de la courbe de croissance en
pédiatrie) ;
- s ur le plan digestif : rechercher les troubles de l’appétit, diarrhées, distension abdomi-
nale, vomissements, hépatomégalie ;
- rechercher les comorbidités hépatiques (consommation excessive d’alcool, surpoids,
syndrome métabolique, facteurs de risque de contamination aux virus B et C) ainsi
que les signes physiques habituels d’hépatopathie chronique avancée (ictère, hépato-
mégalie, splénomégalie, ascite, …) ;
- rechercher les complications neurologiques et ophtalmologiques: retard mental,
ataxie, aréflexie, dysarthrie, troubles proprioceptifs, faiblesse ou douleurs musculaires,
signes visuels.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 119

Sur le plan biologique, annuellement au minimum :


- u n bilan lipidique peut être proposé (cholestérol, triglycérides, HDL cholestérol,
ApoA1, ApoB), mais dont le résultat évolue peu dans le temps,
- d osage des vitamines liposolubles (vitamines A, D, E (++ intra-érythrocytaire), K ou
INR),
- dosage des acides gras essentiels,
- NFP (anémie, thrombopénie),
- le dosage des ALAT, ASAT, GGT, PAL, bilirubines totale et libre, protéines totales,
albumine.
La surveillance de l’imagerie hépatique est indispensable en cas d’ABL, et d’hypobêtalipo-
protéinémie homozygote. Elle est recommandée de principe en cas de MRC et de mutation
de PCSK9 homozygote On réalisera annuellement une échographie abdominale afin de
rechercher une dysmorphie hépatique, une lésion focalisée intrahépatique et/ou de signes
d’hypertension portale. En cas d’anomalie échographique, un complément de bilan par
imagerie en coupe (scanner ou IRM abdominale) sera à proposer. En cas d’atteinte
hépatique ou d’évolution cirrhogène, le dépistage du carcinome hépatocellulaire devra être
réalisé de manière périodique.
Les tests non invasifs de fibrose hépatique (élastométrie impulsionnelle, tests sanguins
biologiques) ne sont pas encore totalement validés à ce jour dans cette indication. Des
études sont en cours afin de valider ces tests dans les NASH comme dans les autres
hépatopathies chroniques.
Une biopsie hépatique pourra être proposée en cas d’anomalie des tests fonctionnels
hépatiques et/ou de suspicion de fibrose sévère. Elle a un intérêt pronostique car elle
permet d’apprécier la sévérité des lésions de fibrose hépatique mais également diagnostique
permettant la recherche d’une autre cause d’hépatopathie associée.
Autres complications. Les experts recommandent la réalisation systématique tous les
3  ans à partir de l’âge de 10 ans, des contrôles suivants :
- électromyogramme, dosage des CPK,
- fond d’œil à la recherche de pigmentation irrégulière de la rétine, test de vision des
couleurs, mesure des potentiels évoqués visuels et éléctrorétinographie,
- ostéodensitométrie,
- échographie cardiaque, à partir de l’âge adulte.

VII.2. Traitement et suivi des patients Hz-FHBL


Ces patients ne nécessitent pas de régime spécifique.
Si des carences en vitamines liposolubles sont détectées (en particulier vitamine E) sont
détectées, même légère, une supplémentation peut être proposée, cependant l’intérêt de
cette supplémentation au long cours est controversé actuellement. Une surveillance
hépatique est recommandée chez les patients asymptomatiques pour les hypobêtalipopro-
téinémies hétérozygotes, en essayant de limiter facteurs surajoutés de stéatose hépatique
(alcool, surpoids, obésité, contrôle glycémique, promotion de l’activité physique …).

Paris, 23-24 novembre 2018


120 Sybil CHARRIERE, Mathilde DI FILIPPO, Oriane MARMONTEL, Noël PERETTI et Philippe MOULIN

VIII. CONCLUSION
Les déficits génétiques en lipoprotéines contenant de l’ApoB se présentent sous des
formes cliniques variées. Les formes graves sont rares du fait de leur transmission selon un
mode récessif, mais ont un retentissement neurologique, ophtalmologique, et sur la crois-
sance qui est la conséquence de la malabsorption lipidique et un retentissement muscu-
laire et/ou cardiaque encore mal expliqué, ainsi qu’un risque de stéatose hépatique. Ces
patients doivent donc bénéficier précocement d’une prise en charge et d’un suivi adapté,
ce qui n’est pas sans difficultés du fait de leur expression clinique peu spécifique et de la
méconnaissance de ces maladies rares.
Les formes plus modérées, de transmission autosomique co-dominante, sont plus
fréquentes et doivent également être dépistées : initialement elles étaient considérées
comme protectrice puisque les taux abaissés de LDLc étaient supposés diminuer le risque
cardiovasculaire des patients. Cependant, du fait de leur association à des stéatoses, voire
des fibroses hépatiques, en particulier en cas de mutation du gène APOB, ces formes
doivent également être diagnostiquée et conduire à un dépistage familial avec un suivi
hépatique de tous les patients atteints.
Ces pathologies sont importantes à identifier non seulement pour proposer une prise en
charge adaptée à ces patients, mais également afin d’améliorer la compréhension des
mécanismes de synthèse et de catabolisme des lipoprotéines riches en apoB, ce qui a
permis d’identifier de nouvelles cibles thérapeutiques pour le traitement des dyslipidémies.

1
INSERM U1060, Laboratoire CarMeN, Université Lyon 1,
INRA U1235, INSA de Lyon, CENS, Centre de Recherche en
Nutrition Humaine Rhône Alpes, Villeurbanne F-69621,
Oullins cedex F-69921, France
2
Hospices Civils de Lyon, Hôpital Louis Pradel,
Fédération d’Endocrinologie, Maladies métaboliques,
Diabète et Nutrition, Bron cedex F-69677, France
(sybil.charriere@chu-lyon.fr ; philippe.moulin@chu-lyon.fr)
3
 ospices Civils de Lyon, Groupement Hospitalier Est,
H
Service de Biochimie et Biologie moléculaire Grand Est,
Bron cedex F-69677, France (mathilde.di-filippo@chu-lyon.fr
oriane.marmontel@chu-lyon.fr)
4
 ospices Civils de Lyon, Hôpital Femme Mère Enfant,
H
Service d’Hépato-Gastroentérologie Nutrition pédiatrique,
Bron cedex F-69677, France (noel.peretti@chu-lyon.fr)

Adresse pour la correspondance : Docteur Sybil Charrière, Fédération d’Endocrinologie, Maladies


métaboliques, Diabète et Nutrition, Hôpital Louis Pradel, 28 avenue Doyen Lépine, 69677 Bron Cedex,
France. (Tel.: + 33 72 68 13 31; Fax: + 33 4 72 68 13 07)
Email : sybil.charriere@chu-lyon.fr

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Les hypocholestérolémies génétiques : maladie de rétention des chylomicrons, abêtalipoprotéinémie, hypobêtalipoprotéinémie et hypolipidémie combinée familiale 121

n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
GENETIC HYPOCHOLESTEROLEMIA
by Sybil CHARRIERE 1,2, Mathilde DI FILIPPO 1,3, Oriane MARMONTEL 1,3,
Noël PERETTI 1,4 and Philippe MOULIN 1,2 (Lyon - France)

ABSTRACT
Genetic hypocholesterolemia encompasses several rare and often unrecognized diseases of
lipid metabolism. They are characterized by a decrease cholesterol content of LDL (low
density lipoprotein) or hypoLDLemia. They include two different groups of diseases. Firstly,
three rare, severe and early occurring diseases (chylomicron retention diseases, abetalipopro­
teinemia and homozygous hypobetalipoproteinemia) mostly revealed by fatty diarrhea with
lipid malabsorption leading to growth retardation, risk of neurological and ophthalmological
complications due to deficiencies in liposoluble vitamins and essential fatty acids, associated
with a risk of liver steatosis. Secondly, some hypocholesterolemias are less severe, mostly
asymptomatic and incidentally discovered: heterozygous hypobetalipoproteinemia and
familial combined hypolipidemia. These diseases are generally considered as benign but can
also lead to hepatic steatosis with risk of hepatic fibrosis, risk identified for APOB mutation
carriers, therefore warranting the need for diagnosis, familial exploration and monitoring of
these patients.

Key-words : Hypocholesterolemia, hypobetalipoproteinemia, abetalipoproteinemia, chylomicron retention


disease, diarrhea, liver steatosis.

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124

NOTES

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


AGONISTES DES RÉCEPTEURS DU GLP-1 :
BALANCE EFFICACITÉ-SÉCURITÉ

par Patrice DARMON (Marseille)

Les agonistes des récepteurs du GLP-1 (GLP-1 RA) occupent une place croissante dans
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

le traitement du diabète de type 2, dès la deuxième ligne de traitement. Plus de dix ans
après leur commercialisation, le rapport bénéfices-risques des GLP-1 RA apparaît
clairement favorable. Au-delà de leur impact positif sur l’équilibre glycémique et le poids
(en dépit d’un taux non négligeable de sujets non répondeurs), mais aussi sur la pression
artérielle et, dans une moindre mesure, sur les paramètres lipidiques, la sécurité cardio­
vasculaire démontrée avec les GLP-1 RA - voire le bénéfice cardiovasculaire retrouvé avec
certaines molécules de la classe dans certaines populations - ainsi que leur possible effet
néphroprotecteur, constituent des arguments majeurs en faveur de leur utilisation. Les
principaux effets indésirables sont gastro-intestinaux (nausées, vomissements, troubles du
transit), mais ils sont le plus souvent légers et transitoires, et conduisent rarement à l’arrêt
du traitement. L’incidence des lithiases biliaires est sans doute également plus élevée chez
les patients traités par GLP-1 RA. À ce jour, il n’existe pas d’argument formel en faveur
d’un risque spécifique des GLP-1 RA sur la survenue de pancréatites aiguës et de cancers
du pancréas, comme sur celle d’hyperplasies des cellules C ou de cancers médullaires de la
thyroïde, mais des études à long terme sont encore nécessaires. Une prudence d’utilisation
est suggérée chez les patients ayant des antécédents de pathologies pancréatiques, et les
GLP-1 RA sont, de principe, contre-indiqués chez les sujets présentant des antécédents
personnels ou familiaux de cancer médullaire de la thyroïde ou de NEM 2. Une élévation
modérée de la fréquence cardiaque est retrouvée sous GLP-1 RA, sans impact clinique
dans les essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA. Pour autant, cette
augmentation de la fréquence cardiaque explique peut-être en partie le signal défavorable
observé sous GLP-1 RA en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection ventriculaire
gauche diminuée. Dans tous les cas, l’efficacité et la tolérance des GLP-1 RA, ainsi que
l’observance au traitement, devront être soigneusement et régulièrement évaluées compte
tenu du prix élevé de ces produits, de la possibilité d’une intolérance digestive et de
l’existence de patients non répondeurs.

Mots-clés : agonistes des récepteurs du GLP-1 ; diabète de type 2 ; efficacité ; sécurité.

INTRODUCTION
Dans l’arsenal des traitements du diabète de type 2 (DT2), le choix d’une classe théra-
peutique, puis d’une molécule spécifique, est basé sur les caractéristiques clinico-biolo-
giques du patient, le respect des indications et contre-indications, l’appréciation de la
balance bénéfices/risques (découlant des résultats des études de phase III ou IV puis des
observations en vie réelle), mais aussi sur les préférences du patient. Les stratégies théra-
peutiques dans le DT2 sont devenues bien plus complexes avec l’émergence, depuis une
dizaine d’années, des médicaments ciblant la voie des incrétines. Pour rappel, l’effet incré-

Paris, 23-24 novembre 2018


126 Patrice DARMON

tine se définit par une potentialisation de la réponse insulinique à l’administration de


glucose quand elle est réalisée par voie orale plutôt que par voie intraveineuse, et ce pour
une excursion glycémique d’amplitude similaire. Cet effet est lié à l’action des incrétines,
hormones intestinales sécrétées en réponse à la prise alimentaire et dont le rôle physiolo-
gique majeur est de potentialiser la sécrétion d’insuline. Les deux incrétines impliquées
dans ce processus sont le glucagon-like peptide-1 (GLP-1) et le glucose-dependent insulino-
tropic polypeptide (GIP). Dans le DT2, l’effet incrétine est diminué, d’autant plus que
l’hyperglycémie est importante. Les causes de cette diminution restent mal connues
(insuffisance de sécrétion du GLP-1, résistance à l’action du GIP et du GLP-1), mais il s’agit
sans doute plus d’un phénomène secondaire que d’une anomalie primaire.
Parmi les agents anti-hyperglycémiants ciblant la voie des incrétines, on distingue les
incrétino-potentialisateurs et les incrétino-mimétiques : les premiers, administrés par voie
orale, sont des inhibiteurs de l’enzyme inactivant le GLP-1, la dipeptidyl peptidase-4
(iDPP4) ; les seconds, administrés par voie sous-cutanée, sont des agonistes des récepteurs
du GLP-1 (GLP-1 RA) et se différencient, entre autres, par leur degré d’homologie avec le
GLP-1 natif humain et leur durée d’action. Les GLP-1 RA d’action brève sont l’exénatide
(2 injections/jour ou administration via une mini-pompe osmotique implantée dans le
tissu sous-cutané) et le lixisénatide (1 injection/jour) ; les GLP-1 RA d’action prolongée
sont le liraglutide (1 injection/jour), l’exénatide à libération prolongée, le dulaglutide,
l’albiglutide, et le sémaglutide (1 injection/semaine) [1-3]. L’effet thérapeutique des GLP-1
RA passe principalement par une stimulation glucose-dépendante de la sécrétion d’insu-
line par les cellules bêta-pancréatiques et une inhibition glucose-dépendante, sans doute
par effet paracrine, de la sécrétion du glucagon par les cellules alpha-pancréatiques. Les
GLP-1 RA entraînent aussi un ralentissement de la vidange gastrique (surtout observé
avec les agonistes de courte durée d’action) et une majoration de la sensation de satiété [3].
Les GLP-1 RA occupent une place croissante dans le traitement du DT2. Dans ses
recommandations de 2013, la Haute Autorité de Santé (HAS), considérant le surcoût
représenté par les GLP-1 RA et la nécessité, à l’époque, d’obtenir plus d’informations sur
leur sécurité d’emploi à long terme, avait positionné les produits de cette classe en troisième
ligne, avec cependant la possibilité de les prescrire en deuxième ligne dans certains cas
précis [4]. Dans la prise de position conjointe des sociétés savantes de diabétologie améri-
caine (ADA) et européenne (EASD), publiée en 2012 et réactualisée en 2015 (en atten-
dant la version 2018) [5], comme dans celle de la Société Francophone du Diabète (SFD)
publiée en 2017 [6], les GLP-1 RA peuvent être envisagés dans de nombreux cas dès la
deuxième ligne de traitement, après la metformine ; ils représentent aussi aujourd’hui une
alternative à l’instauration d’une insuline basale, mais peuvent aussi être associés à celle-ci
et remplacer ainsi les injections d’insuline rapide. À ce jour, les GLP-1 RA commercialisés
en France sont l’exénatide à libération immédiate ou prolongée, le liraglutide, et le dulaglu-
tide ; le sémaglutide devrait être le prochain à accéder au marché français.
En pratique, pour le thérapeute, la prescription d’un GLP-1 RA puis le choix entre les
différents GLP-1 RA reposent principalement sur le profil clinique des patients, mais doit
aussi considérer les préférences des patients, après information éclairée du rapport
bénéfices/risques, dans le cadre de l’approche centrée sur le patient et de la décision
médicale partagée. Il convient donc pour le clinicien de bien connaître les bénéfices et les
risques potentiels de ces différents produits, dont le coût journalier est particulièrement
élevé (autour de 3 €/j aux doses usuelles).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 127

GLP-1 RA : QUELS BÉNÉFICES ?


1. Effets sur le contrôle glycémique
Les GLP-1 RA améliorent le contrôle glycémique avec une baisse moyenne d’hémoglo-
bine glyquée (HbA1c) à 6 mois allant de 0,6 à 1,9 % selon les produits et les études [1-2].
Les GLP-1 RA d’action prolongée ciblent à la fois les glycémies à jeun, pré- et post-
prandiales, tandis que les GLP-1 RA d’action courte ont un effet plus spécifique sur les
glycémies post-prandiales. Au sein de la classe, l’albiglutide, le lixisénatide et l’exénatide à
libération immédiate ont une efficacité un peu inférieure aux autres molécules [7-8], alors
que le sémaglutide semble avoir une puissance supérieure, s’avérant par exemple plus
efficace que l’exénatide retard [9] et le dulaglutide [10] sur la baisse d’HbA1c dans des
études de comparaison directe. Comme pour les iDPP4, le risque hypoglycémique est
faible avec les GLP-1 RA puisque leur effet sur la sécrétion d’insuline est dépendant de la
glycémie et que la stimulation des récepteurs du GLP-1 avec une glycémie normale ou
basse ne provoque pas de réponse insulinique. Les épisodes d’hypoglycémie rapportés sous
GLP-1 RA concernent très majoritairement des patients traités par ailleurs par sulfamide
hypoglycémiant ou insuline [1-2]. Globalement, les GLP-1 RA ont une efficacité supérieure
à celle des sulfamides et des iDPP4 sur l’HbA1c. En association à la metformine, la baisse
moyenne d’HbA1c sous GLP-1 RA est de 0,97 % (intervalle de confiance IC95 % -1,30 à
-0,65) contre -0,79 % (IC95 % -0,94 à -0,63) sous iDPP4 et -0,79 % (IC95 % -1,15 à -0,43)
sous sulfamide dans la méta-analyse de Phung et al [11]. Une autre méta-analyse montre
que les GLP-1 RA entrainent un gain supplémentaire moyen de -0,41 % (IC95 % -0,53 à
-0,30) par rapport aux iDPP4, avec un delta de poids de -2,15 kg (IC95 % -3,04 à -1,27) ;
dans les études évaluant le passage d’un iDPP4 à un GLP-1 RA, le gain d’HbA1c est de
-0,69 % (IC95 % -1,03 à -0,35) en moyenne, et le delta de poids de -2,25 kg (IC95 % -3,12 à
-1,38) [12]. En association à une bithérapie metformine + sulfamide, la diminution
moyenne de l’HbA1c est comparable après ajout d’un iDPP4, d’un GLP-1 RA, ou d’une
insuline basale dans la méta-analyse de Gross et al [13]. En outre, de nombreuses études
montrent que l’association d’un GLP-1 RA à l’insuline basale donne de bons résultats. Le
rationnel de cette association repose sur leur complémentarité d’action : l’insuline basale
a vocation à contrôler la glycémie à jeun, tandis que le GLP-1 RA va cibler la glycémie à
jeun et la glycémie post-prandiale. Dans la majorité des cas, après échec d’une insulinothé-
rapie basale, l’ajout d’un GLP-1 RA peut être proposé de préférence à une insulinothérapie
intensifiée, en raison d’une efficacité au moins comparable, mais avec une plus grande
simplicité (pas de titration complexe de la dose) et une meilleure tolérance (moins d’hypo-
glycémies, moins de prise de poids) [5-6]. En France, seuls l’exénatide dans sa forme
standard, le liraglutide et le dulaglutide ont une AMM en association avec l’insuline ; il
existe aussi sur le marché une forme combinée associant dans le même stylo, avec un ratio
fixe, une insuline basale (degludec) et un GLP-1 RA (liraglutide). Le coût élevé de l’asso-
ciation thérapeutique GLP-1 RA + insuline doit amener à une réévaluation régulière de
son efficacité et de sa tolérance. La baisse substantielle de l’HbA1c moyenne observée dans
les essais d’intervention ne doit pas faire oublier qu’il existe, en vie réelle, un pourcentage
non négligeable de sujets mauvais répondeurs sur le plan glycémique. À ce jour, il est
impossible d’identifier ces patients avec certitude à partir de critères préalables à la pres­­
cription. Toutefois, des éléments orientant vers une insulinopénie (traitement préa­lable
par insuline ou sulfamide, nombre élevé de traitements, ancienneté du diabète…)
pourraient être associés à un pourcentage de succès plus faible [14]. Ce caractère difficile-
ment prédictible impose donc de réévaluer de façon systématique la réponse individuelle

Paris, 23-24 novembre 2018


128 Patrice DARMON

au traitement prescrit, et peut conduire à le maintenir ou à l’interrompre pour le remplacer


par une molécule d’une autre classe pour éviter un empilement thérapeutique et des
dépenses de santé inutiles.
2. Effets sur le poids
Les GLP-1 RA favorisent la perte de poids via la stimulation des récepteurs se situant au
niveau des centres de régulation de la satiété. L’administration d’un GLP-1 RA entraîne
une réduction de la prise alimentaire due à une diminution de l’appétit et à une augmen-
tation de la satiété, mais n’a pas d’effet significatif sur la dépense énergétique après ajuste-
ment pour la perte de masse maigre [1-3]. L’amaigrissement survient indépendamment de
l’apparition de nausées ou de vomissements, mais ceux-ci peuvent contribuer à l’accentuer.
En moyenne, la perte de poids observée sous GLP-1 RA se situe entre 1 et 4 kg. En associa-
tion à la metformine, l’évolution moyenne du poids sous GLP-1 RA est de -1,74 kg (IC95 %
-3,11 à -0,48) contre +2,06 kg (IC95 % 1,15 à 2,96) sous sulfamide et une stabilité sous
iDPP4 dans la méta-analyse de Phung et al. [11]. Au sein de la classe, l’albiglutide a une
efficacité pondérale un peu inférieure aux autres molécules [7-8], alors que le sémaglutide
semble être plus puissant sur la perte de poids (jusqu’à -6,5 kg), s’avérant notamment plus
efficace que l’exénatide retard [9] et le dulaglutide [10] dans des études de comparaison
directe. Comme sur le plan glycémique, il existe des sujets mauvais répondeurs aux GLP-1
RA sur le plan pondéral (qui ne sont pas forcément ceux qui répondent mal sur le plan
glycémique, et vice-versa) : l’amaigrissement est donc difficilement prévisible, mais une
perte de poids plus importante a été observée chez les patients présentant un indice de
masse corporelle (IMC) élevé à l’inclusion. Notons que le liraglutide à la dose de 3 mg est
commercialisé dans certains pays comme un traitement du surpoids et de l’obésité (avec
une perte de poids moyenne de -5 à -6 kg).
3. Effets sur la pression artérielle
Dans la quasi-totalité des études cliniques, les GLP-1 RA diminuent de façon modeste
mais significative la pression artérielle systolique (PAS). Cet effet favorable ne peut s’expli-
quer uniquement par l’amaigrissement concomitant, et repose sans doute également sur
d’autres mécanismes qui restent à préciser (augmentation de la natriurèse ? amélioration
des fonctions endothéliales ? vasodilatation ?). Dans la méta-analyse de Sun et al [15], la
baisse moyenne de la PAS sous GLP-1 RA varie de -1,84 mmHg (IC95 % -3,48 à -0,20) à
-4,60 mmHg (IC95 % -7,18 à -2,03) versus placebo ou comparateurs actifs ; une baisse
modeste mais significative de la pression artérielle diastolique (PAD -1,08 mmHg (IC95 %
-1,78 à -0,33)) est aussi retrouvée sous exénatide 20 μg/j versus placebo [15]. Certaines
méta-analyses concluent à une diminution plus importante de la PAS avec les GLP-1 RA
d’action prolongée versus GLP-1 RA d’action courte [8], mais ceci n’est pas retrouvé dans
d’autres études [7]. Les données des résumés des caractéristiques des produits (RCP) font
état d’une baisse moyenne de PAS versus placebo de -2,1 mmHg sous lixisénatide,
-2,8  mmHg sous dulaglutide, -1,9 à -4,5 mmHg sous liraglutide, -2,9 à -4,7 mmHg sous
exénatide retard et -5,4 à -7,3 mmHg sous sémaglutide.
4. Effets sur les lipides
Les essais randomisés montrent une amélioration (modeste) du profil lipidique chez les
patients DT2 recevant un GLP-1 RA versus placebo ou comparateur actif, avec une
diminution modeste du LDL-c (en moyenne 0,2 mmol/l), du cholestérol total et des trigly-
cérides, sans impact sur le HDL-c. Les mécanismes ne sont pas encore élucidés, mais il

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 129

semble que les GLP-1 RA de courte durée d’action exercent un effet favorable sur la lipémie
post-prandiale (diminution des taux de triglycérides, chylomicrons, apo B48, acides gras
libres) [7-8]. Une méta-analyse en réseau incluant 35 études montre une diminution
modeste mais significative du taux de LDL-c versus placebo est retrouvé pour tous les
GLP-1 RA (entre -0,08 et -0,16 mmol/l) [16]. Dans cette méta-analyse, l’exénatide retard
et le liraglutide à la dose de 1,8 mg/j diminuent aussi le cholestérol total versus placebo
(entre -0,16 et -0,27 mmol/l), et le liraglutide 1,8 mg/j réduit également les taux de trigly-
cérides (-0,30 et -0,17 mmol/l) [16]. Dans le RCP du sémaglutide, il est fait mention d’une
baisse de 12 % des triglycérides, de 21 % des VLDL et de plus de 40 % de l’hyperlipidémie
post-prandiale après un repas riche en graisses.
5. Sécurité / bénéfices cardiovasculaires
Depuis 2008 et la controverse sur la rosiglitazone, la Food & Drug Administration
(FDA) exige une étude d’innocuité cardiovasculaire de 2 ans minimum versus placebo
pour tout nouveau traitement mis sur le marché. L’Agence Européenne du Médicament
(EMA) a aussi exigé de telles études dès 2010, pour une durée minimale de 3 ans. Le proto-
cole particulier de ces études, élaboré pour répondre aux exigences réglementaires, n’est
pas destiné à évaluer l’effet sur l’HbA1c du produit testé dans la mesure où les investiga-
teurs sont incités à ajouter, en cours d’étude, d’autres médicaments anti-hyperglycémiants
pour optimiser l’équilibre glycémique du patient - l’idéal étant d’obtenir une HbA1c
identique entre les deux groupes afin de ne tester réellement que la sécurité cardiovascu-
laire de la molécule à l’étude, sans biais potentiel lié à une exposition différente à l’hyper-
glycémie entre les deux groupes. Ces dernières années ont vu la publication de quatre de
ces grands essais d’intervention, menés chez des patients à haut risque cardiovasculaire,
dont les principaux résultats sont résumés dans le Tableau 1. Quant aux résultats des
études menées avec l’exénatide en implant sous-cutané (FREEDOM-CVO, effet neutre sur
le critère primaire de jugement déjà annoncé), le dulaglutide (REWIND) et l’albiglutide
(HARMONY OUTCOMES), ils devraient être dévoilés en 2019.
a. Étude ELIXA
L’étude ELIXA a inclus 6 068 patients DT2 dans les suites (< 6 mois) d’un syndrome
coronarien aigu (infarctus du myocarde ou hospitalisation pour angor instable), rando-
misés pour recevoir, en double aveugle, soit du lixisénatide (une injection par jour de 10
puis 20 µg), soit un placebo, en plus de leur traitement usuel [17]. Les patients (âge moyen
60 ans, ancienneté du diabète 9 ans, HbA1c à l’inclusion 7,7 %, prévention secondaire
100 %, insuffisance cardiaque 22,4 %) ont été suivis pendant une période médiane de
25  mois. En dépit du dessin de l’étude, l’HbA1c est resté modérément mais significative-
ment inférieure dans le groupe lixisénatide (différence moyenne -0,27 % sur l’ensemble de
suivi) ; des différences significatives de poids (-0,7 kg), de PAS (-0,8 mmHg) et de rythme
cardiaque (+0,4 battement par minute, bpm) ont été retrouvées sous lixisénatide versus
placebo. L’incidence des hypoglycémies s’est avérée comparable dans les deux groupes,
mais un nombre plus élevé d’hypoglycémies sévères a été recensé sous placebo. Le critère
d’évaluation principal (critère composite comprenant décès cardiovasculaire, infarctus du
myocarde (IDM) non fatal, accident vasculaire cérébral (AVC) non fatal et angor instable)
a été observé de façon comparable dans les deux groupes, à savoir chez 13,4 % des patients
sous lixisénatide et 13,2 % des patients sous placebo, démontrant la non-infériorité du
lixisénatide versus placebo (p<0,001) mais réfutant l’hypothèse de supériorité (p=0,81). Il
n’y avait pas de différence en ce qui concerne la mortalité totale, les composantes indivi-
duelles de ce critère composite principal ou d’autres types d’événements cardiovasculaires.

Paris, 23-24 novembre 2018


130 Patrice DARMON

b. Étude LEADER
L’étude LEADER a inclus 9 340 patients DT2 âgés de plus de 50 ans en situation de
pré­vention cardiovasculaire secondaire (coronaropathie, atteinte artérielle cérébrale ou
périphérique, affection rénale chronique de stade 3 ou plus ou insuffisance cardiaque
NYHA II ou III) ou âgés de plus de 60 ans en prévention primaire mais avec au moins un
facteur de risque associé (albuminurie, hypertension artérielle avec hypertrophie ventricu-
laire gauche, dysfonction ventriculaire gauche ou index de pression systolique <0,9),
randomisés pour recevoir, en double aveugle, soit du liraglutide (une injection de 1,8 mg/j),
soit un placebo, en plus de leur traitement usuel [18]. Les patients (âge moyen 64 ans,
ancienneté du diabète 13 ans, HbA1c à l’inclusion 8,7 %, prévention secondaire 81,3 %,
insuffisance cardiaque 14 %) ont été suivis pendant une période médiane de 3,8 ans. En
dépit du dessin de l’étude et du recours plus fréquent à d’autres anti-hyperglycémiants dans
le groupe placebo, l’HbA1c est resté significativement inférieure sous liraglutide (diffé-
rence moyenne -0,40 % après 36 mois) ; des différences significatives de poids (-2,3 kg), de
PAS (-1,2 mmHg), de la PAD (+0,6 mmHg) et de rythme cardiaque (+3 bpm) ont été
retrouvées sous liraglutide versus placebo. L’incidence des hypoglycémies et des hypoglycé-
mies sévères était plus faible sous liraglutide (-20 % et -31 %, respectivement). Le critère
d’évaluation principal (critère composite comprenant décès cardiovasculaire, IDM non
fatal symptomatique ou silencieux, AVC non fatal) a été observé chez 13 % des patients du
bras liraglutide et 14,9 % des patients du bras placebo - soit une baisse du risque de 13 % -
démontrant la non-infériorité du liraglutide versus placebo (p<0,001), puis sa supériorité
(p<0,01). Une réduction significative de 22 % de la mortalité cardiovasculaire et de 15 %
de la mortalité toutes causes ont également été observées dans le groupe liraglutide. Ces
bénéfices n’apparaissent qu’au-delà de la première année mais semblent s’accentuer
progressivement avec le temps. Une diminution de l’incidence des IDM et AVC non fatals
ainsi que des hospitalisations pour insuffisance cardiaque a été observée sous liraglutide,
mais sans atteindre la signification statistique. Le bénéfice sur le critère principal était
retrouvé dans le sous-groupe des patients en prévention secondaire et dans celui des sujets
présentant un DFG < 60 ml/mn, mais ne l’était pas dans ceux des sujets en prévention
primaire ou présentant un DFG > 60 ml/mn. Il faut traiter par liraglutide (1,8 mg/j)
66  sujets pendant 3 ans pour éviter un événement du critère principal.
c. Étude SUSTAIN-6
L’étude SUSTAIN-6 a inclus 3  297 sujets DT2 âgés de plus de 50 ans en situation de
prévention cardiovasculaire secondaire ou âgés de plus de 60 ans en prévention primaire
mais avec au moins un facteur de risque associé (critères identiques à ceux de l’étude
LEADER), randomisés en quatre groupes pour recevoir, en double aveugle, soit du sémaglu-
tide (1 injection de 0,5 ou de 1 mg/semaine), soit leur placebo respectif, en plus de leur
traitement usuel [19]. Les patients (âge moyen 65 ans, ancienneté du diabète 14 ans,
HbA1c à l’inclusion 8,7 %, prévention secondaire 83,0 %, insuffisance cardiaque 23,6 %)
ont été suivis pendant une période médiane de 2,1 ans. Le plan d’analyse statistique
prévoyait de regrouper les deux groupes sémaglutide d’une part, et les deux groupes placebo
d’autre part. En dépit du protocole de l’étude et du recours plus fréquent aux autres anti-
hyperglycémiants dans le groupe placebo, le taux d’HbA1c est resté largement et significa-
tivement plus faible dans les bras sémaglutide 0,5 mg (différence moyenne -0,7 %) et 1 mg
(différence moyenne -1,0 %) ; des différences significatives de poids (-2,9 et -4,3 kg), de
PAS (-1,3 (non significatif) et -2,6 mmHg), et de fréquence cardiaque (+2 et +2,5 bpm) ont
été retrouvées sous sémaglutide 0,5 et 1 mg respectivement, versus placebo. Les taux de
triglycérides et de LDL-c étaient très discrètement diminués sous sémaglutide. L’incidence

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 131

des hypoglycémies documentées ou sévères était comparable dans les différents groupes.
Le critère d’évaluation principal (critère composite incluant décès cardiovasculaire, IDM
non fatal, AVC non fatal) a été observé chez 6,6 % des patients sous sémaglutide et 8,9 %
des patients sous placebo - soit une baisse du risque de 26 % - démontrant la non-infério-
rité du sémaglutide versus placebo (p<0,001), puis sa supériorité (p=0,02) dans une analyse
qui n’était cependant pas pré-spécifiée. Ce bénéfice est dû à la baisse du nombre d’IDM
non fatals (-26 %, ns) mais surtout d’AVC non fatals (-39 %, p=0,02). Aucun effet signifi-
catif sur la mortalité cardiovasculaire ou totale n’a été retrouvé. Il faut traiter par sémaglu-
tide 45 sujets durant 2 ans pour éviter un événement du critère principal.
d. Étude EXSCEL
L’étude EXSCEL a inclus 14  752 sujets DT2 (âge moyen 62 ans, ancienneté du diabète
12  ans, HbA1c 8,0 %, prévention secondaire 73,1 %, insuffisance cardiaque 16,2 %) rando-
misés pour recevoir soit de l’exénatide à libération prolongée (1 injection de 2 mg/semaine),
soit un placebo, en plus de traitement actuel [20]. La durée médiane de suivi a été de
3,2  années mais du fait d’un taux inhabituel d’arrêt prématuré du traitement dans les deux
groupes (43 et 45,2 % dans les groupes exénatide retard et placebo, respectivement), la
durée d’exposition au traitement n’a été que de 2,4 années. En dépit du protocole de l’étude
et du recours plus fréquent aux autres anti-hyperglycémiants dans le groupe placebo, le
taux d’HbA1c est resté significativement plus faible dans le bras exénatide retard (diffé-
rence moyenne -0,53 %) ; des différences significatives de poids (-1,3 kg), de PAS
(-1,5  mmHg), de LDL-c (-1,5 mg/dl), de triglycérides (-1,8 mg/dl), de PAD (+0,25 mmHg)
et de fréquence cardiaque (+2,5 bpm) ont été retrouvées sous exénatide retard versus
place­bo. L’incidence des hypoglycémies sévères était comparable dans les deux groupes. Le
critère d’évaluation principal (composite comprenant décès cardiovasculaire, IDM non
fatal, AVC non fatal) a été observé chez 11,4 % des patients du bras exénatide retard et
12,2 % des patients du bras placebo (hazard ratio HR 0,91 (IC95 % 0,83 à 1,00)), démon-
trant la non-infériorité de l’exénatide retard versus placebo (p<0,001) mais réfutant
l’hypothèse de supériorité (p=0,06). Le même résultat a été retrouvé pour la plupart des
critères secondaires d’évaluation : décès cardiovasculaires (HR 0,88 (IC95 % 0,76 à 1,02)),
IDM fatal ou non (HR 0,97 (IC95 % 0,85 à 1,10)), AVC fatal ou non (HR 0,85 (IC95 %
0,70 à 1,03)), hospitalisation pour insuffisance cardiaque (HR 0,94 (IC95 % 0,78 à 1,13)),
hospitalisation pour syndrome coronarien aigu (HR 1,05 (IC95 % 0,94 à 1,18)). Le risque
de mortalité totale était également plus faible dans le groupe exénatide retard (HR 0,86
(IC95 % 0,77 à 0,97) ; p=0,016), mais cela ne pouvait pas être considéré comme significatif
au regard du plan d’analyse statistique. Les analyses de sensibilité ont montré un bénéfice
significatif de l’exénatide retard sur le critère primaire composite dans la sous-population
pré-spécifiée des sujets de plus de 65 ans (HR 0,80 (IC95 % 0,71 à 0,91)). On doit souligner
le recours plus fréquent au liraglutide et surtout aux inhibiteurs de SGLT2 (iSGLT2) dans
le groupe placebo : or, on sait désormais que ces agents apportent un bénéfice cardiovas-
culaire, ce qui a pu conduire à un biais d’interprétation.
e. Questions en suspens
Les résultats apparemment discordants des études ELIXA et EXSCEL d’une part
(neutralité cardiovasculaire) et LEADER et SUSTAIN-6 d’autre part (bénéfice cardiovas-
culaire), posent de multiples questions. Ces divergences sont-elles liées à des différences de
méthodologie et/ou de niveau de risque des populations, masquant un effet-classe des
GLP-1 RA ? Traduisent-elles à l’inverse des effets propres à chacune des molécules ? (fonc­
tion de leur durée d’action ? de leur puissance ? de leur degré d’homologie avec le GLP-1

Paris, 23-24 novembre 2018


132 Patrice DARMON

natif humain ?). Les deux études positives présentent elles aussi des discordances, que l’on
ne sait pas, à ce jour, expliquer : diminution de la mortalité dans LEADER et non dans
SUSTAIN-6 ; diminution du risque d’AVC dans SUSTAIN-6 et non dans LEADER. Une
méta-analyse regroupant 176 310 participants issus de 236 essais randomisés d’une durée
d’au moins 12 semaines montre que, contrairement aux iDPP4, l'utilisation des GLP-1 RA
(et des iSGLT2) est associée à une mortalité cardiovasculaire et à une mortalité totale plus
faible par rapport au placebo ou à l’absence de traitement [21]. La méta-analyse des quatre
grands essais d’intervention, réalisée par l’équipe qui a conduit l’étude EXSCEL, conclut,
elle, sans doute un peu hâtivement, à un effet-classe des GLP-1 RA, avec une baisse signi-
ficative de 10 % du critère composite « décès d’origine cardiovasculaire, IDM non fatals,
AVC non fatals » (IC95 % 0,82 à 0,99), de 13 % de la mortalité cardiovasculaire (IC95 %
0,79 à 0,96) et de 12 % de la mortalité totale (IC95 % 0,81 à 0,95) [22]. Les résultats de
l’étude REWIND, menée avec le dulaglutide dans une population présentant un niveau de
risque cardiovasculaire globalement moins élevé, sont attendus avec impatience et appor-
teront de nouveaux arguments dans ce débat.
L’autre question en suspens concerne les mécanismes par lesquels les GLP-1 RA
pourraient agir sur le plan cardiovasculaire. Les résultats des essais d’intervention plaident
pour un effet anti-athérogène. On sait que des récepteurs du GLP-1 sont présents au niveau
des cellules de l’endothélium, du myocarde et du système immunitaire. De multiples
données expérimentales montrent que le GLP-1 et les GLP-1 RA exercent des effets
bénéfiques dans les modèles animaux d’ischémie-reperfusion (réduction de la taille de la
zone myocardique infarcie) ou sur le développement des lésions d’athérosclérose et l’inflam-
mation de la plaque chez des souris hypercholestérolémiques [23]. Des effets favorables sur
la fonction endothéliale et l’agrégation plaquettaire ont également été rapportés dans des
études précliniques [23]. Chez l’homme, ces effets spécifiques pourraient venir s’ajouter

Tableau 1. - Résumé des essais de sécurité cardiovasculaire évaluant les GLP-1 RA disponibles en 2018

ELIXA LEADER SUSTAIN-6 EXSCEL


(lixisénatide) (liraglutide) (sémaglutide) (exénatide retard)
6 068 sujets DT2 9 340 sujets DT2 3 297 sujets DT2 14 752 sujets DT2
Population
post SCA à haut risque CV à haut risque CV à haut risque CV
Prévention CV
100 81,3 83,0 73,1
secondaire (%)
HbA1c 8,0
7,7 ±1,3 8,7 ±1,6 8,7 ±1,5
initiale (%) (écart interquartile 7,3-8,9)

Suivi médian
2,1 3,8 2,1 3,2
(années)
Critère CV
1,02 (0,89-1,17) 0,87 (0,78-0,97) 0,74 (0,58-0,95) 0,91 (0,83-1,00)
composite, HR
IDM non fatal, HR 1,03 (0,87-1,22) 0,88 (0,75-1,03) 0,74 (0,51-1,08) 0,95 (0,84-1,09)
AVC non fatal, HR 1,12 (0,79-1,58) 0,89 (0,72-1,11) 0,61 (0,38-0,99) 0,86 (0,70-1,07)
Insuffisance
0,96 (0,75-1,23) 0,87 (0,73-1,05) 1,11 (0,77-1,61) 0,94 (0,78-1,13)
cardiaque, HR
Mortalité CV, HR 0,98 (0,78-1,22) 0,78 (0,66-0,93) 0,98 (0,45-1,48) 0,88 (0,76-1,02)
Mortalité totale, HR 0,94 (0,78-1,13) 0,85 (0,74-0,97) 1,05 (0,74-1,50) 0,86 (0,77-0,97)
DT2 : diabète de type 2 ; SCA : syndrome coronarien aigu ; CV : cardiovasculaire ;
IDM : infarctus du myocarde ; AVC : accident vasculaire cérébral ; HR : hazard ratio

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 133

aux bénéfices sur le contrôle glycémique, la pression artérielle, le poids ou les lipides
observés sous GLP-1 RA, mais rien n’est clairement démontré à ce jour.

6. Néphroprotection ?
Les études de sécurité cardiovasculaire menées ces dernières années avec les nouveaux
agents anti-hyperglycémiants ont permis de mettre en lumière un rôle néphroprotecteur
potentiel pour certains d’entre eux, et notamment les GLP-1 RA. Ainsi, dans LEADER,
chez des patients DT2 à très haut risque cardiovasculaire, parmi lesquels plus de 80 %
recevaient un inhibiteur du système rénine-angiotensine, le critère d’évaluation composite
comprenant la progression vers la macroprotéinurie, le doublement de la créatininémie, le
recours la dialyse ou la greffe ou le décès lié à la maladie rénale a été réduit de 22 % sous
liraglutide 1,8 mg/j versus placebo (5,7 % versus 7,2 %, p=0,005) ; ces bénéfices étaient
surtout « tirés » par la réduction de la progression vers la macroalbuminurie, et étaient
indépendants de l’HbA1c, de l’IMC, de la PAS et de l’excrétion urinaire d’albumine à
l’inclusion. Un ralentissement du déclin du DFG ainsi qu’une moindre augmentation de
l’excrétion urinaire d’albumine étaient retrouvés sous liraglutide [24]. Dans l’étude
SUSTAIN-6, le sémaglutide est également associé à une diminution du risque d’apparition
ou de progression de la maladie rénale dans une population similaire : le critère d’évalua-
tion composite comprenant la progression vers la macroprotéinurie, le doublement de la
créatininémie avec DFG < 45 ml/mn/1,73 m² ou le recours la dialyse ou la greffe a été
réduit de 36 % sous sémaglutide (3,8 % versus 6,1 %, p=0,005) : là encore, c’est la réduction
de la progression vers la macroalbuminurie qui « tirait » ces résultats [19]. Dans l’étude
AWARD-7 comparant dulaglutide 0,75 ou 1,5 mg une fois par semaine et insuline glargine
une fois par jour tous deux en association à l’insuline lispro chez 576 patients DT2 présen-
tant une maladie rénale chronique de stade 3 ou 4 (DFG 38 ml/mn/1,73 m² ; albuminurie/
créatininurie A/C 847,2 mg/g), il existe à 52 semaines, à contrôle glycémique comparable,
une moindre diminution du DFG et une tendance à une réduction supérieure du rapport
A/C dans le groupe dulaglutide 1,5 mg [25]. Ce possible effet néphroprotecteur des GLP-1
RA doit encore être confirmé. Il pourrait s'agir d'un effet propre des GLP-1 RA (diminu-
tion de l’inflammation ? du stress oxydant ?...), mais le bénéfice observé pourrait, plus
simplement, être avant tout médié par l'amélioration du contrôle glycémique et de la
pression artérielle [26]. Notons que le liraglutide et le dulaglutide peuvent être administrés
jusqu’au stade d’insuffisance rénale chronique sévère (contre-indication en cas d’insuffi-
sance rénale terminale), tandis que l’exénatide n’est pas recommandé en-dessous de
30 ml/mn de clairance de la créatinine et l’exénatide retard en-dessous de 50 ml/mn [6].

7. Autres bénéfices putatifs des GLP-1 RA


a. Effet sur la stéatose hépatique et la NASH ?
On peut logiquement imaginer que la perte de poids induite par les GLP-1 RA puisse
avoir un effet favorable sur la stéatose hépatique ou la stéatohépatite non alcoolique
(NASH). En outre, des données chez l'animal suggèrent que le GLP-1 ou les GLP-1 RA
pourraient avoir un effet bénéfique direct sur les hépatocytes en réduisant la lipogenèse -
mais un doute persiste sur la présence de récepteurs du GLP-1 sur les hépatocytes chez
l’homme. La méta-analyse de Dong et al. portant sur 6 études d’observation ou d’interven-
tion visait à évaluer l’effet d’un GLP-1 RA sur la stéatose hépatique ou la NASH : l’analyse
porte sur 329 patients, dont 277 patients DT2, et montre une amélioration significative des
paramètres histologiques (stéatose, inflammation lobulaire, ballonisation des hépatocytes,
fibrose) après une période de traitement par GLP-1 RA par rapport à l’inclusion, ainsi

Paris, 23-24 novembre 2018


134 Patrice DARMON

qu’un réduction significative des gamma-GT versus placebo ou autre comparateurs [27].
Cependant, il n’est pas aujourd’hui démontré que le bénéfice des GLP-1 RA sur la stéatose
et la NASH soit indépendant de la perte de poids concomitante.
b. Effets sur la cellule bêta ?
Dans les modèles murins, le GLP-1 exerce effets protecteurs sur les cellules bêta des îlots
de Langerhans du pancréas (prolifération des cellules préexistantes, stimulation de la
néo­genèse, effet anti-apoptotique) ; toutefois, la relevance de ces données chez l’homme
reste à démontrer. De nombreux essais cliniques réalisés avec les GLP-1 RA mettent en
évidence une amélioration de la fonction bêta-cellulaire sur la base de mesures simples
telles que le HOMA-B et le rapport pro-insuline/insuline, ainsi qu’une amélioration de la
première et de la deuxième phase de sécrétion d’insuline. Pour autant, aucune étude à ce
jour n’a apporté la preuve d’une plus grande « durabilité » des traitements par GLP-1 RA
et d’un effet protecteur sur les cellules bêta [3].
c. Neuroprotection ?
De nombreuses études précliniques suggèrent un possible rôle protecteur des GLP-1 RA
dans les pathologies neurodégénératives, en particulier les maladies d’Alzheimer ou de
Parkinson [28]. Plusieurs travaux ont montré les potentiels bénéfices de l’exénatide dans
des modèles murins de Parkinson : effets neurotrophiques, stimulation de la neurogenèse,
restauration des circuits dopaminergiques, amélioration de la fonction motrice et de
l’apprentissage. Après avoir publié les résultats favorables d’une étude clinique pilote
menée en ouvert avec l’exénatide chez des patients ayant une maladie de Parkinson
d’intensité modérée (amélioration des symptômes moteurs et des troubles cognitifs persis-
tant 12 mois après l’arrêt du traitement), une équipe londonienne a mené un essai de phase
II randomisé au cours duquel les patients recevaient une injection hebdomadaire d’exéna-
tide retard (2 mg) ou de placebo pendant 48 semaines, en plus de leur traitement antipar-
kinsonien habituel. L’étude montre un effet favorable de l’exénatide sur les signes moteurs
de la maladie, persistant (tout en s’émoussant un peu) 3 mois après l’arrêt du traitement,
sans pouvoir conclure à un véritable effet neuro-protecteur de l’exénatide, seule promesse
d’un bénéfice sur la vitesse de progression de la maladie de Parkinson [29]. Des essais sont
en cours avec d’autres GLP-1 RA et dans d’autres pathologies neurodégénératives.

GLP-1 RA : QUELS EFFETS INDÉSIRABLES ? QUELS RISQUES ?


1. Nausées, vomissements et autres effets indésirables digestifs
Les effets secondaires digestifs (nausées principalement, mais aussi vomissements,
diarrhées ou ralentissement du transit) sont les effets indésirables les plus fréquemment
rencontrés sous GLP-1 RA, touchant entre 25 et 50 % des patients selon les études [1-3].
Ces troubles sont en lien avec l’impact des GLP-1 RA sur la vidange gastrique, la motilité
intestinale et la sécrétion d’hormones gastro-intestinales, dont il est difficile de savoir s’il
est direct ou indirect (via le système nerveux central ou périphérique). Les troubles diges-
tifs sont généralement d’intensité légère à modérée, et sont principalement observés lors
des premières semaines de traitement. Chez la plupart des patients ayant présenté ces
effets indésirables à l’initiation du traitement, la fréquence et la sévérité des symptômes
s’estompent avec le temps. Cependant, ils peuvent parfois conduire à l’arrêt du traitement
(< 5 % des cas). Ils n’ont pas d’impact significatif sur le contrôle glycémique, mais conduisent
généralement à majorer la perte de poids. Les patients de plus de 70 ans et ceux présentant
une insuffisance rénale chronique peuvent être davantage sujets aux effets indésirables

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 135

digestifs des GLP-1 RA. Des signes de déshydratation, incluant une insuffisance rénale
aiguë, ont été rapportés chez des patients traités par GLP-1 RA en raison de la survenue
d’effets indésirables gastro-intestinaux.
Une revue systématique incluant 32 essais de phase III montre que le risque d’effets
secondaires digestifs sous GLP-1 RA est proportionnel à la dose administrée, et augmente
lorsque les GLP-1 RA sont associés à la metformine. Les GLP-1 RA d’action prolongée
induisent moins de nausées et de vomissements (stimulation continue des récepteurs du
GLP-1 responsable d’un phénomène de tachyphylaxie), mais plus de diarrhées que les GLP-1
RA d’action brève [30]. Parmi ces derniers, le lixisénatide induit moins d’effets secondaires
digestifs que l’exénatide. Parmi les GLP-1 RA d’action prolongée, le liraglutide et le dulaglu-
tide exposent à un risque comparable d’effets secondaires digestifs, supérieur à celui observé
sous exénatide retard ou albiglutide [29]. Le Tableau 2, adapté de la revue de Filippatos et al
[31], récapitule la fréquence des effets secondaires digestifs selon les molécules.
Tableau 2. - Incidence des effets secondaires digestifs rapportés avec les différents GLP-1 RA
(d’après [31])

Nausées Vomissements Diarrhées


Exénatide 20 μg 26 à 51 % 9 à 19 % 4 à 13 %
Lixisénatide 20 μg 19 à 40 % 8 à 18 % 6 à 11 %
Liraglutide 1,2 mg 16 à 29 % 5 à 13 % 7 à 18 %

Dulaglutide 1,5 mg 17 à 29 % 7 à 17 % 11 à 16 %


Exénatide retard 2 mg 7 à 24 % 4 à 11 % 6 à 12 %
Albiglutide 30 mg 5 à 11 % 2 à 7 % 8 à 13 %
Sémaglutide 1 mg * 20 % 8 % 13 %

* pour le sémaglutide : données issues du RCP

2. Pancréatite aiguë - Cancer du pancréas


Des études précliniques ont montré qu’un traitement par exénatide pouvait induire chez
certains modèles de rat une réplication des cellules ductales et des phénomènes de dysplasie
du pancréas exocrine, pouvant en théorie faire le lit de poussées de pancréatite aiguë ou
d’un cancer du pancréas. Des cas de pancréatite aigüe et de cancer du pancréas ont été
rapportés après la mise sur le marché des GLP-1 RA (et des iDPP4), ce qui a conduit à un
signal de pharmacovigilance, bien qu’aucun des grands essais de phase III menés dans le
programme de développement de ces produits n’ait jamais rapporté d’augmentation signi-
ficative de l’incidence des pancréatites ou des cancers du pancréas. En 2011, le groupe de
Peter Butler rapporte pour la première fois une forte augmentation du risque de pancréa-
tites et de cancers (en particulier de cancers du pancréas) en lien avec l’utilisation des
traitements ciblant la voie des incrétines (exénatide, sitagliptine), s’appuyant pour cela sur
une analyse de la base de données de pharmacovigilance de la FDA [32]. Ce travail souffre
toutefois d’un grand nombre de faiblesses méthodologiques : en premier lieu, l’utilisation
de la base de données de pharmacovigilance de la FDA pour des calculs d’incidence est
contestable en raison de biais liés à la déclaration spontanée et forcément partielle de cas
- la connaissance de possibles effets secondaires pancréatiques pour les GLP-1 RA et les
iDPP4 a pu conduire à un excès de déclaration de ce type d’événements par rapport aux

Paris, 23-24 novembre 2018


136 Patrice DARMON

traitements plus anciens choisis comme comparateurs ; ensuite, aucun ajustement n’a pu
être réalisé sur d’autres facteurs de risque fréquents chez les patients DT2 comme le poids,
le taux de triglycérides ou la consommation d’alcool ou de tabac ; enfin, on peut s’inter-
roger sur la pertinence clinique du délai de survenue de cancers déclarés en lien avec des
produits mis sur le marché peu de temps auparavant. Cependant, en 2013, une étude
cas-témoins réalisée par Singh et al [33] à partir d’une base administrative américaine
retrouve, elle aussi, un risque de pancréatite aiguë plus élevé chez les utilisateurs actuels ou
passés (< 2 ans) d’un traitement de la voie des incrétines, indépendamment des autres
facteurs de risque : taux de probabilité (odds ratio ; OR) 2,24 (IC95 % 1,36 à 3,68) pour
l’exénatide et 2,01 (IC95 % 1,37 à 3,18) pour la sitaglitpine. Toutefois, malgré les ajuste-
ments statistiques, l’imputabilité est difficile à affirmer car l'abus de tabac, d'alcool ainsi
que l’obésité ont été nettement sous-enregistrés dans cette base de données [33].
En 2014, une méta-analyse portant sur 55 études d’intervention (incluant 33 350 patients
DT2) retrouve des résultats inverses, avec un OR à 1,11 (IC95 % 0,57 à 2,17) pour les
médicaments de la voie des incrétines en général, et à 1,05 (IC95 % 0,37 à 2,94) pour les
GLP-1 RA en particulier ; parmi les 5 études d’observation analysées (portant sur 320 289
patients), une seule retrouve un effet défavorable de médicaments de la voie des incrétines,
celle de Singh et al citée plus haut [34]. En juillet 2014, l’EMA et la FDA ont publié
conjointement un travail regroupant une synthèse de 250 études toxicologiques menées
chez l’animal (avec des analyses de toxicité pancréatique et des analyses histologiques
réalisées en insu par trois anatomopathologistes indépendants) et une revue de 200 essais
cliniques sur 41 000 patients, et ont conclu à l’absence de lien de causalité entre les traite-
ments de la voie des incrétines et l’incidence des pancréatites et/ou des cancers du pancréas
[35]. En 2016, Azoulay et al ont publié les résultats d’une étude cas-témoins dérivée
(« nested within ») d’une étude de cohorte multicentrique (Canada, États-Unis et
Royaume-Uni), portant sur plus de 1,5 million de patients DT2 ayant débuté un anti-
hyperglycémiant entre janvier 2007 et juin 2013. Dans un premier temps, les auteurs ont
recensé tous les patients hospitalisés pour une pancréatite aiguë et apparié chacun d’entre
eux avec des patients contrôles comparables pour l’âge, le sexe, l’ancienneté du DT2 et du
suivi, ainsi que la date d’entrée dans la cohorte (jusqu’à 20 contrôles pour un cas) : le
risque de pancréatite aiguë n’était pas plus élevé chez les patients recevant un traitement
de la voie des incrétines, ou plus spécifiquement un GLP-1 RA, que chez ceux traités par
au moins deux antidiabétiques oraux : Hazard Ratio (HR) ajusté 1,03 (IC95 % 0,87 à 1,22)
et 1,04 (IC95 % 0,81 à 1,35), respectivement [36]. Dans un second temps et une seconde
publication, l’exercice a été répété pour le cancer du pancréas : avec un suivi médian relati-
vement court (1,3 à 2,8 ans), le risque de cancer du pancréas n’était pas plus élevé chez les
patients recevant un traitement de la voie des incrétines, ou plus spécifiquement un GLP-1
RA, que chez ceux traités par sulfamides : HR ajusté 1,02 (IC95 % 0,84 à 1,23) et 1,13
(IC95 % 0,38 à 3,38), respectivement [37]. Dans ce contexte, l’ANSM (Agence Nationale
de Sécurité du Médicament et des produits de santé) a mené une étude à partir des données
du SNIIRAM (Système national d'information inter-régimes de l'Assurance maladie) afin
de mieux préciser l’association entre médicaments de la voie des incrétines et risque de
cancer du pancréas parmi les patients DT2 [38]. Plus de 1 300 000 sujets (âge moyen
63,8  ans, hommes 54 %) ont été inclus et suivis pendant 3,7 ans en moyenne. Au cours du
suivi, 41,1 % ont reçu l’un des iDPP4 et 7,2 % l’un des GLP-1 RA commercialisés en France
à cette période, et 3 113 cancers du pancréas sont survenus. Le risque de survenue d’un
cancer du pancréas était majoré de 30 % chez les patients exposés aux iDPP4, mais l’expo-
sition aux autres antidiabétiques oraux (metformine, sulfamides notamment) était égale-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 137

ment associée à une augmentation de 20 à 40 % du risque de cancer du pancréas ; en


revanche, l’exposition aux GLP-1 RA n’était pas associée au cancer du pancréas. L’associa-
tion entre iDPP4 et cancer du pancréas est particulièrement marquée peu après l’introduc-
tion des iDPP4 et décroit avec la durée d’exposition ainsi qu’avec la dose de traitement
cumulée. Cette association ne diffère pas selon le type d’iDPP4 considéré et elle n’est pas
retrouvée pour les cancers autres que le cancer du pancréas. L’hypothèse la plus plausible
pour expliquer ces résultats, concordants avec ceux d’autres études épidémiologiques, est
celle d’un phénomène de causalité inverse : l’initiation ou l’intensification d’un traitement
par iDPP4 serait la conséquence d’un déséquilibre du diabète, lui-même dû à un cancer du
pancréas non encore diagnostiqué, plutôt que la cause de ce cancer.
Ces données rassurantes ont été confortées par deux méta-analyses récentes : la première,
incluant 113 essais randomisés contrôlés avec plus de 11 semaines de suivi, montre que le
risque de pancréatite et de cancer du pancréas est comparable sous GLP-1 RA et sous
autres antidiabétiques ou placebo : OR 0,93 (IC95 % 0,65 à 1,34) et 0,94 (IC95 % 0,52 à
1,70), respectivement [39] ; la seconde, portant sur 33 essais randomisés contrôlés avec
plus d’un an de suivi, rassemblant près de 80 000 sujets, montre que le risque de cancer du
pancréas (87 cas au total) est comparable sous traitement de la voie des incrétines et sous
autres antidiabétiques ou placebo (OR 0,67 (IC95 % 0,44 à 1,02)) et qu’il existerait même
une diminution significative du risque de cancer du pancréas chez les patients sous traite-
ment ciblant la voie des incrétines dans les essais avec plus de 2 ans de suivi (près de
60  000 patients, 84 cas au total) (OR 0,62 (IC95 % 0,41 à 0,95) [40]. Enfin, une méta-
analyse incluant ELIXA, LEADER et SUSTAIN-6, essais randomisés contrôlés avec plus
de 2 ans de suivi dans lesquels la pancréatite aiguë était un événement indésirable prédé-
fini et adjudiqué en aveugle par un comité indépendant, montre que le risque de pancréa-
tite aiguë est comparable sous GLP-1 RA et sous placebo (OR 0,745 (IC95 % 0,47 à 1,17))
[41]. Les Tableaux 3 et 4 récapitulent l’incidence des pancréatites aiguës et des cancers du
pancréas survenus dans les essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA.
Par exemple, dans LEADER, 18 épisodes de pancréatite aiguë ont été rapportés dans le
groupe liraglutide 1,8  mg/j contre 23 sous placebo, survenant généralement plus de
12   mois après la randomisation, et sans que ce risque ne soit majoré chez les patients
présentant un antécédent de pancréatite. Chez les patients sous liraglutide, il est observé
une augmentation moyenne de 28 % des taux de lipase, maximale à 6 mois avant de se
stabiliser par la suite, mais l’élévation de la lipase n’a pas de valeur prédictive sur le risque
ultérieur de pancréatite [42].
Au final, toutes ces données sont plutôt rassurantes, en particulier pour ce qui concerne
le risque de cancer du pancréas. Cependant, une vigilance doit sans doute rester de mise

Tableau 3. - Incidence des pancréatites aiguës dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA

Pancréatites aiguës GLP-1 RA Placebo

ELIXA 5 (1,6 ‰) 8 (2,6 ‰)

LEADER 18 (3,9 ‰) 23 (4,9 ‰)

SUSTAIN-6 9 (5,5 ‰) 12 (7,3 ‰)

EXSCEL 26 (3,5 ‰) 22 (3,0 ‰)

TOTAL 58 (3,5 ‰) 65 (3,9‰)

Paris, 23-24 novembre 2018


138 Patrice DARMON

au long cours et des études plus longues sont encore nécessaires. Les patients traités par
GLP-1 RA doivent être informés des symptômes caractéristiques de pancréatite aiguë.
Comme cela est précisé dans le RCP de ces molécules, le traitement doit être arrêté en cas
de suspicion de pancréatite ; si le diagnostic est confirmé, le traitement ne doit pas être
repris. Il convient d'être prudent en cas d'antécédent de pathologie pancréatique. Notons
que l’administration d’un GLP-1 RA est associée à une majoration de 10 à 20 % en moyenne
des enzymes pancréatiques (lipase et/ou amylase). Néanmoins, en l'absence de signes
cliniques évocateurs, l’élévation des enzymes pancréatiques n’est pas prédictive de la
survenue d'une pancréatite aiguë : il n’est donc pas recommandé de doser systématique-
ment les enzymes pancréatiques sous GLP-1 RA.
Tableau 4. - Incidence des cancers du pancréas dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA

Cancers du pancréas GLP-1 RA Placebo

ELIXA 3 (1,0 ‰) 9 (3,0 ‰)

LEADER 13 (2,8 ‰) 9 (1,9 ‰)

SUSTAIN-6 1 (0,6 ‰) 4 (2,4 ‰)

EXSCEL 15 (2,0 ‰) 16 (2,2 ‰)

TOTAL 32 (1,9 ‰) 38 (2,3 ‰)

3. Lithiases biliaires
Parmi les effets secondaires à long terme des GLP-1 RA, figurent également les manifes-
tations liées aux lithiases biliaires. La survenue de ces lithiases pourrait contribuer à l'aug-
mentation du risque de pancréatite aiguë avec cette classe thérapeutique. Peu de cas de
lithiase biliaire (0,4 %) et de cholécystite (0,1 %) ont été rapportés au cours des essais
cliniques de phase III réalisés avec le liraglutide. Dans LEADER, la fréquence des manifes-
tations vésiculaires, des lithiases biliaires et des cholécystites était respectivement de
3,1 %, 1,5 % et de 0,8 % sous liraglutide versus 1,9 % (p<0,001), 1,1 % (p=0,09) et 0,4 %
(p=0,046) sous placebo. Le Tableau 5 résume l’incidence des complications vésiculaires
dans les grands essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA. La méta-
analyse de Monami et al, incluant 113 essais randomisés contrôlés avec plus de 11 semaines
de suivi, retrouve un excès de risque de lithiase vésiculaire sous GLP-1 RA (OR 1,30
(IC95 % 1,01 à 1,68), p=0,04) [39]. Ces effets vésiculaires peuvent s’expliquer en partie par
la perte de poids, mais il semble également exister un effet négatif des GLP-1 RA sur la
motilité de la vésicule [43].

Tableau 5. - Incidence des complications vésiculaires dans les études de sécurité cardiovasculaire
avec les GLP-1 RA

Complications vésiculaires GLP-1 RA Placebo

ELIXA 36 (1,2 %) 28 (0,9 %)

LEADER 145 (3,1 %) *p<0,001 90 (1,9%)

SUSTAIN-6 58 (3,5 %) 61 (3,7 %)

EXSCEL 178 (2,4 %) 146 (2,0 %)

TOTAL 417 (2,5 %) 325 (1,9 %)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 139

4. Hyperplasie des cellules C - Cancer médullaire de la thyroïde


Les données de toxicologie précliniques relatives aux GLP-1 RA ont montré que le
lira­glutide et l’exénatide pouvaient, chez le rongeur, stimuler les récepteurs du GLP-1
pré­sents sur les cellules C de la thyroïde, induire une augmentation des taux de calcitonine
(CT) et provoquer la survenue d’une hyperplasie ou d’une tumeur des cellules C (adénome
ou carcinome), avec un effet dose-dépendant [44]. Ces conséquences adverses décrits chez
les rongeurs sont dues à un mécanisme non génotoxique, spécifique, médié par les récep-
teurs du GLP-1, auquel ces animaux sont particulièrement sensibles, mais ne sont pas
retrouvées chez le primate soumis à de très fortes doses de liraglutide [44] ou de dulaglutide
[45]. In vitro, le liraglutide augmente la synthèse et la sécrétion de CT par les cellules C
de rongeurs, mais n’a aucun effet sur les cellules C humaines, du fait de la faible densité et
de la moindre fonctionnalité des récepteurs du GLP-1 sur ces cellules [46].
En 2011, Hegedüs et al. [47] ont analysé l’évolution des taux sériques de CT dosés tous
les 3 mois et le risque de survenue d’une pathologie des cellules C de la thyroïde chez plus
de 5  000 patients DT2 et/ou obèses non diabétiques enrôlés dans 9 essais randomisés de
phase II ou III, recevant du liraglutide (0,6 à 3,0 mg/j), un autre antidiabétique et/ou un
placebo. À 26, 52 et 104 semaines, les taux moyens ajustés de CT étaient discrètement plus
élevés sous liraglutide (à partir de 1,2 mg/j) que sous placebo, mais le plus souvent compa-
rables à ceux observés sous comparateurs actifs, et restaient de toute façon très bas, même
après deux ans d’exposition au liraglutide. La proportion de patients présentant un taux de
CT ≥20 ng/l (seuil considéré comme pertinent sur le plan clinique, justifiant la réalisation
d’explorations complémentaires) restait inférieure à 2 % et comparable dans les groupes
liraglutide et comparateurs actifs, mais était un peu supérieure à celle retrouvée sous
placebo. Sur les 14 patients inclus dans les bras liraglutide présentant initialement une CT
≥20 ng/l, 3 ont été exclus de l’étude pour cette raison précise, mais aucun des 11 autres n’a
présenté d’élévation supplémentaire de la CT sous liraglutide pendant le suivi. Sept des
14  patients traités par liraglutide présentant un taux de CT ≥20 ng/l étaient traités par
antihistaminiques H2 ou inhibiteurs de la pompe à protons, traitements pouvant
aug­menter les taux sériques de CT. Sept patients suspects de présenter une maladie des
cellules C du fait d’une élévation de la CT avant la randomisation ou durant le suivi ont
subi une thyroïdectomie (5 sous liraglutide et 2 sous comparateur, soit 0,14 % versus
0,11 %) : dans les groupes liraglutide, il s’agissait à chaque fois d’une hyperplasie des cellules
C, alors que dans les groupes comparateurs, il s’agissait dans un cas d’un possible carci-
nome médullaire in situ et, dans l’autre, d’un carcinome médullaire avéré chez un sujet
présentant un taux de CT supérieur à 1 000 ng/l avant la randomisation [47].
Ces dernières années, les essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA ont
donné à nouveau l’opportunité de recenser de façon prospective les tumeurs des cellules C
sous GLP-1 RA ou placebo. Dans les quatre grands essais pris dans leur ensemble, 2 cas de
cancer médullaire de la thyroïde ont été rapportés dans les groupes GLP-1 RA versus 2  cas
dans les groupes placebo (Tableau 6). Dans l’étude LEADER, l’évolution des taux de CT au
cours du temps s’est avérée comparable sous liraglutide et sous placebo : une diminution du
taux moyen de CT a été mise en évidence dans les deux groupes, et après 36 mois de traite-
ment, il n’y avait pas de différence de taux de CT chez les patients traités ou non par liraglu-
tide, et ce quel que soit leur statut (tabagisme, utilisateur d’un inhibiteur de la pompe à
protons ou d’un anti antihistaminique H2, antécédent de pathologie thyroïdienne) [48].
Bien que le temps d’exposition soit relativement court dans ces études, toutes ces
données sont rassurantes sur le risque d’hyperplasie des cellules C et de cancer médullaire

Paris, 23-24 novembre 2018


140 Patrice DARMON

Tableau 6. - Incidence des cancers médullaires de la thyroïde dans les études de sécurité
cardiovasculaire avec les GLP-1 RA

Cancer médullaire de la thyroïde GLP-1 RA Placebo


ELIXA 0 0
LEADER 0 1
SUSTAIN-6 0 0
EXSCEL 2 1
TOTAL 2 2

sous GLP-1 RA. Il n’est pas recommandé de doser la CT chez les patients traités par GLP-1
RA. Cependant, en l’état des connaissances, l’hypothèse d’un effet différentiel des GLP-1
RA sur les cellules C cancéreuses ne peut être totalement exclue. Ainsi, il est précisé dans
les RCP des GLP-1 RA que ces agents ne doivent pas être prescrits chez les sujets présen-
tant des antécédents personnels ou familiaux de cancer médullaire de la thyroïde ou de
NEM 2, par mesure de précaution.

5. Accélération du rythme cardiaque


Les études réalisées dans différents modèles animaux ont démontré que le GLP-1 module
la fréquence cardiaque et les paramètres hémodynamiques, principalement via l’activation
du système nerveux sympathique. L’utilisation des GLP-1 RA se traduit par une accéléra-
tion modeste mais significative de la fréquence cardiaque (+2 à 4 bpm). Une méta-analyse
en réseau incluant 60 études valide cette augmentation de la fréquence cardiaque sous
GLP-1 RA versus placebo : +3,35 bpm (IC95 % 1,23 à 5,50) pour l’exénatide retard, +2,06
bpm (IC95 % 0,43 à 3,74) pour le liraglutide 1,2 mg, +2,35 bpm (IC95 % 0,94 à 3,76) pour
le liraglutide 1,8 mg [15]. Certains auteurs rapportent un effet tachycardisant moins
marqué avec les agonistes d’action : c’est le cas de la méta-analyse de Lorenz et al [49] (+1
à +3 bpm pour l’exénatide administré en 2 injections quotidiennes et le lixisénatide contre
+3 à +4 bpm pour l’exénatide retard ou le dulaglutide et dans des études courtes, et jusqu’à
+6 à +10 bpm pour le liraglutide ou l’albiglutide) ou celle de Htike et al [7], mais ceci n’est
pas retrouvé dans celle de Dalsgaard et al [8]. Cette augmentation peut être plus impor-
tante chez certains patients, et de rares cas de tachycardie sinusale ont été décrits. Dans
les essais de sécurité cardiovasculaire menés avec les GLP-1 RA, il n’a pas été observé
d’impact clinique à long terme de l’augmentation du rythme cardiaque sur le risque d’évè-
nements cardiovasculaires.

6. Effets adverses en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée ?


Si les GLP-1 RA ont démontré des effets protecteurs dans de nombreux modèles précli-
niques d’insuffisance cardiaque [23], leur impact positif sur la fonction ventriculaire
gauche chez l’homme n’est pas constamment retrouvé. Des études pilotes avaient suggéré
l’existence d’un bénéfice des GLP-1 RA chez des patients insuffisants cardiaques, diabé-
tiques ou non, mais ce bénéfice n’a pas été confirmé par les données récentes d’études
spécifiques dans ce type de population. Les études observationnelles et les méta-analyses
incluant des essais randomisés de phase II et de phase III n’ont pas rapporté d’augmenta-
tion du risque d’insuffisance cardiaque sous GLP-1 RA [50]. De même, aucune influence
sur les événements liés à l’insuffisance cardiaque n’est rapportée dans les essais de sécurité
cardiovasculaire menés avec le lixisénatide [17] (HR 0,96 (IC95 % 0,75 à 1,23)), le liraglu-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 141

tide [18] (HR 0,87 (IC95 % 0,73 à 1,05)), le sémaglutide [19] (HR 1,11 (IC95 % 0,77 à 1,61))
et l’exénatide retard [20] (HR 0,94 (IC95 % 0,78 à 1,13)) versus placebo (Tableau 1). En
outre, dans ces essais, les analyses pré-spécifiées en sous-groupes ne montrent pas d’inte-
raction significative entre les antécédents d’insuffisance cardiaque (concernant 22 %,
14 %, 23 % et 16 % des sujets inclus, respectivement) et l’influence du traitement testé sur
le critère composite primaire. Par contre, dans l’étude FIGHT, réalisée chez 300 sujets
diabétiques ou non diabétiques présentant une insuffisance cardiaque avec altération de la
fraction d’éjection ventriculaire gauche (< 40 % à l’inclusion, en moyenne 25 %), la
prescription de liraglutide 1,8 mg/j dans les 14 jours suivant une hospitalisation pour
poussée d’insuffisance cardiaque n’était pas associée à une plus grande stabilité clinique à
6 mois, mais au contraire à une tendance défavorable en termes de ré-hospitalisation
(+30 %, ns) ou de décès (+10 %, ns) versus placebo [51]. En outre, dans l’étude LIVE menée
chez 241 sujets diabétiques ou non diabétiques présentant une insuffisance cardiaque
stable avec altération de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (< 45 % à l’inclusion,
en moyenne 34 %), le liraglutide 1,8 mg/j versus placebo n’a pas permis d’améliorer la
fonction ventriculaire gauche à 24 semaines, mais était associée à une augmentation signi-
ficative de la fréquence cardiaque (+6 versus -1 bpm) et surtout des événements indési-
rables cardiaques graves (tachycardie ventriculaire létale ou non, fibrillation auriculaire,
aggravation de l’insuffisance cardiaque, syndrome coronarien aigu : 12 cas versus 3) [52].
Ainsi, dans l’attente de nouvelles données, et comme cela est formulé dans la prise de
position de la SFD [6], les GLP-1 RA doivent être évités en cas d’insuffisance cardiaque à
fraction d’éjection diminuée, du fait de l’accélération du rythme cardiaque et du signal
défavorable observé avec le liraglutide dans les études LIVE et FIGHT chez de tels patients.
Notond qu’il est précisé dans le RCP du liraglutide qu’il n’y a pas d’expérience chez les
sujets présentant une insuffisance cardiaque congestive de classe NYHA IV.

7. Aggravation de la rétinopathie ?
Dans l’étude LEADER, l’incidence du premier événement rétinien tendait à être plus
élevée sous liraglutide que sous placebo (HR 1,15 (IC95 % 0,87 à 1,52) ; p=0,33) [18]. Dans
SUSTAIN-6 [19], on retrouve un pourcentage significativement plus élevé de complica-
tions graves de la rétinopathie sous sémaglutide (3,0 %) que sous placebo (1,8 %) (HR 1,76
(IC95 % 1,11 à 2,78) ; p=0,002). Cette différence survient de manière très précoce lors de
l’étude avec un recours plus fréquent à la panphotocoagulation (2,3 %) et aux injections
intra-vitréennes (1 %) sous sémaglutide que sous placebo (1,2 % et 0,8 %, respectivement).
La majorité des 79 patients ayant présenté une complication ophtalmologique avait une
atteinte rétinienne à l’inclusion, et ce dans le groupe sémaglutide comme dans le groupe
placebo [19]. Une analyse post-hoc de SUSTAIN-6 montre que la majorité de l’effet
constaté est attribuable à l’amplitude et la rapidité de la diminution du taux d’HbA1c
observée au cours des quatre premiers mois de traitement par sémaglutide chez les patients
présentant majoritairement une rétinopathie pré-existante, un mauvais contrôle glycé-
mique initial et un traitement par insuline [53]. Une étude rétrospective publiée en 2011
avait déjà montré un risque substantiel d’aggravation de la rétinopathie diabétique chez
des patients DT2 traités par exénatide, en lien là aussi avec la rapidité et l’amplitude de
l’amélioration de l’équilibre glycémique [54].
Si la normalisation brutale de la glycémie semble devoir expliquer les événements
indésirables rétiniens parfois rapportés avec les GLP-1 RA, on ne peut à ce jour exclure un
effet pro-angiogénique direct des GLP-1 RA sur la rétine [55], et ce même si le récepteur
du GLP-1 semble peu exprimé au niveau de la rétine et n’a pas été détecté dans les yeux de

Paris, 23-24 novembre 2018


142 Patrice DARMON

patients présentant des formes avancées de rétinopathie proliférante [56]. Toutefois, de


façon rassurante, une analyse de la base de données de pharmacovigilance de la FDA ne
retrouve pas de sur-déclaration d’effets indésirables rétiniens chez les utilisateurs de GLP-1
RA, au contraire (HR 0,38 (IC95 % 0,34 à 0,43) ; p<0,0001) [57].

8. Réactions aux points d’injection


Des réactions au site d’injection (rash, érythème, induration, prurit…), à médiation
immunitaire potentielle, généralement de faible intensité et ne conduisant pas à l’arrêt du
traitement, ont été signalées chez 5 % des patients traités par exénatide à libération
immédiate, 4 % des patients traités par lixisénatide, < 2 % des patients traités par liraglu-
tide, dulaglutide, sémaglutide [données RCP]. La fréquence des ces réactions au point
d’injection est bien plus élevée avec l’albiglutide (jusqu’à 15 %) et avec l’exénatide à libéra-
tion prolongée, atteignant jusqu’à 16 % des patients, avec en particulier la survenue de
petits nodules sous-cutanés, ce qui est cohérent avec les propriétés connues des formula-
tions poly (D, L-lactide-co-glycolide) des microsphères de polymère dans lesquelles est
encapsulé l’exénatide dans sa forme retard [données RCP]. La plupart de ces nodules sont
asymptomatiques, ne conduisent pas à l’arrêt du traitement et disparaissent au bout de 4 à
8 semaines.

9. Immunogénicité
Compte tenu des propriétés potentiellement immunogènes des médicaments contenant
des protéines ou des peptides, les patients traités par GLP-1 RA peuvent développer des
anticorps anti-médicament. La réponse immunitaire contre les GLP-1 RA est bien moins
marquée pour les molécules présentant une forte homologie avec le GLP-1 natif : ainsi, on
retrouve des AC anti-médicament dans moins de 2 % des cas sous dulaglutide ou sémaglu-
tide, 3 à 7 % des cas sous albiglutide, 2 à 13 % des cas sous liraglutide contre 41 à 61 % des
cas sous exénatide à libération immédiate, 13 à 73 % des cas sous exénatide à libération
prolongée et 70 % à 74 % des cas sous lixisénatide [30]. La présence de ces anticorps
n’altère pas l’efficacité du produit sur contrôle glycémique, mais il existe un peu plus de
non-répondeurs parmi les patients présentant un titre très élevé d’anticorps. En revanche,
les patients avec anticorps anti-médicament ont tendance à présenter plus de réactions au
site d’injection (prurit, érythème) [données RCP].

10. Allergies
Lors des études de phase II et de phase III, des événements d'hypersensibilité systémique
(urticaire, œdème…) ont été signalés chez environ 0,5 % des patients traités par GLP-1
RA. Ces réactions allergiques sont très généralement d’intensité légère. De rares cas de
réactions anaphylactiques ou d’angiœdème ont aussi été rapportés. Aucun des patients
ayant présenté une hypersensibilité systémique n'a développé d'anticorps anti-médicament
[données RCP].

CONCLUSION
Plus de dix ans après leur commercialisation, et en l’état actuel des connaissances, le
rapport efficacité-sécurité ou bénéfices-risques des GLP-1 RA apparaît clairement favorable.
Au-delà de leur impact positif sur l’équilibre glycémique et le poids (en dépit d’un taux non
négligeable de non répondeurs), mais également sur la pression artérielle et les paramètres
lipidiques, la sécurité voire le bénéfice cardiovasculaire démontré avec certaines des

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Agonistes des récepteurs du GLP-1 : balance efficacité-sécurité 143

molé­cules de la classe dans certaines populations, ainsi que leur possible caractère néphro-
protecteur, constituent des arguments particulièrement intéressants pour l’utilisation de
ces médicaments. Globalement, la tolérance et la sécurité d’utilisation des GLP-1 RA sont
bonnes : les effets secondaires digestifs à type de nausées, vomissements ou troubles du
transit, fréquents et bien connus des cliniciens, peuvent être limités par une augmentation
progressive des doses, s’estompent généralement avec le temps et conduisent rarement à un
arrêt du traitement. S’il semble bien exister un risque accru de lithiases vésiculaires sous
GLP-1 RA, les études épidémiologiques, les données de registres de pharmacovigilance et
les essais d’intervention ne sont pas en faveur d’un risque spécifique des GLP-1 RA sur la
survenue de pancréatites aiguës et de cancers du pancréas, même si des études à long terme
semblent encore nécessaires. Une prudence d’utilisation est suggérée chez les sujets présen-
tant des antécédents de pathologies pancréatiques. En outre, les patients traités doivent
être informés des symptômes caractéristiques de pancréatite aiguë : le traitement doit être
suspendu en cas de suspicion de pancréatite et définitivement arrêté si le diagnostic est
confirmé. Les études sont également rassurantes quant au risque d’hyperplasies des cellules
C et de cancers médullaires de la thyroïde, mais les GLP-1 RA restent contre-indiqués, par
précaution, chez les patients présentant des antécédents personnels ou familiaux de cancer
médullaire de la thyroïde ou de NEM 2. L’aggravation de la rétinopathie observée dans
quelques études, et notamment dans l’étude SUSTAIN-6 avec le sémaglutide, paraît
devoir être attribuée plus à l’amélioration brutale de la glycémie qu’à un effet propre des
GLP-1 RA, même si la prudence doit encore prévaloir en l’état des connaissances. Enfin,
une élévation modérée de la fréquence cardiaque est constamment rapportée sous GLP-1
RA : toutefois, il n’a pas été observé d’impact clinique de cette accélération du rythme
cardiaque sur le risque d’évènements cardiovasculaires dans les essais de sécurité cardio-
vasculaire menés avec les GLP-1 RA. Pour autant, cette augmentation du rythme cardiaque
explique peut-être en partie le signal défavorable observé avec le liraglutide chez des
patients présentant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection diminuée : dans
l’attente de nouvelles données, les GLP-1 RA doivent être évités chez de tels sujets [6].
Comme le stipule la prise de position de la SFD sur la prise en charge médicamenteuse
de l’hyperglycémie du patient DT2 [6], le choix d’un GLP-1 RA peut être envisagé en
deuxième ligne, après échec de la metformine, ou en troisième ligne, en association avec
des traitements anti-hyperglycémiants oraux et/ou de l’insuline, en particulier chez le
patient obèse (IMC ≥ 30 kg/m2) et chez le patient en prévention cardiovasculaire secon-
daire, en faisant alors le choix du liraglutide au regard des résultats favorables de l’étude
LEADER (seul GLP-1 RA commercialisé en France à ce jour à avoir démontré un bénéfice
cardiovasculaire). Le rapport bénéfice-risque des GLP-1 RA est plus incertain chez les
patients âgés car l’expérience de leur utilisation après 75 ans est limitée et la perte de poids
expose à un risque de dénutrition, pouvant également être majoré par les effets secon-
daires digestifs : dans cette classe d’âge, il est donc préférable de les réserver aux sujets en
bonne santé générale, et, idéalement, après avis d’un endocrinologue-diabétologue [6].
L’efficacité et la tolérance des GLP-1 RA, ainsi que l’adhésion thérapeutique des patients
devront être soigneusement réévaluées à intervalles réguliers compte tenu de leur prix
bien plus élevé que celui des iDPP4 et des sulfamides, de la possibilité d’une intolérance
digestive (surtout en début de traitement) et de l’existence de patients non répondeurs.

Service d’Endocrinologie, Maladies Métaboliques et


Nutrition, APHM, Hôpital de la Conception Marseille, France
et

Paris, 23-24 novembre 2018


144 Patrice DARMON

Aix Marseille Université, INSERM, INRA, C2VN, Marseille,


France

Adresse pour la correspondance : Professeur Patrice Darmon, adresse ci-dessus.


E-mail : pdarmon@ap-hm.fr

EFFICACY AND SAFETY OF GLP-1 RECEPTOR AGONISTS


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Patrice DARMON (Marseille - France)

ABSTRACT
GLP-1 receptor agonists (GLP-1 RA) are becoming increasingly used in the treatment of
type 2 diabetes. More than 10 years after their approval for the treatment of type 2 diabetes,
the benefit-risk ratio of the GLP-1 RA appears clearly favourable. Beyond their positive
impact on glycaemic control and body weight (despite a non-negligible rate of non-respon-
ders), but also on blood pressure and, to a lesser extent, on lipid parameters, the cardiovas-
cular safety found with GLP-1 RA and even the cardiovascular benefit demonstrated with
certain molecules in certain populations, as well as their possible reno-protective effects, are
all strength for their use. The main adverse effects are mild to moderate, transient gastrointes-
tinal symptoms (nausea, vomiting, transit disorders), that rarely lead to discontinuation of
treatment. In addition, the incidence of cholelithiasis is also probably higher with GLP-1
RA. To date, there is no formal argument for a specific risk of GLP-1 RA on the occurrence
of acute pancreatitis and pancreatic cancer, as well as on C-cell hyperplasia or medullary
thyroid cancer, but long term studies are still needed. Caution is advised in patients with a
history of pancreatic disease, and GLP-1 RA is contraindicated in subjects with a personal
or family history of medullary thyroid cancer or MEN 2. A moderate increase in heart rate
was found in patients treated by GLP-1 RA, with no particular clinical impact in cardiovas-
cular outcomes trials. However, this increase in heart rate may partly explain the adverse
signal observed with GLP-1 RA in subjects with heart failure and low left ventricular ejection
fraction. In all cases, the efficacy and safety of GLP-1 RA, as well as the adherence to
treatment, should be carefully and regularly assessed given their high cost, the risk of
gastrointestinal intolerance and the existence of non-responders.

Key-words : GLP-1 receptor agonists; type 2 diabetes; efficacy; safety.

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Paris, 23-24 novembre 2018


146 Patrice DARMON

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


OBÉSITÉ SANS RISQUE MÉTABOLIQUE
MYTHE OU RÉALITÉ ?

par Joane MATTA1, Claire RIVES LANGE2, Claire CARETTE2


et Sébastien CZERNICHOW2,3 (Paris)

Certains individus obèses ne présentent pas d’anomalies métaboliques et sont présentés


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

comme ayant une obésité métaboliquement saine ou de phénotype MHO pour « metabo­
lically healthy obesity ». Cependant, il n’existe pas de consensus clair sur la définition de ce
phénotype. Quatre variables importantes sont fréquemment prises en considération dans
la caractérisation du profil : pression artérielle, glycémie, HDL-cholestérol et triglycérides.
Le débat repose sur l’instabilité de ce phénotype et sur son caractère transitoire ; les
personnes ayant ce phénotype ne seraient donc pas protégées à long terme des risques de
maladies cardiovasculaires et de décès prématurés observés au sein de la population obèse.
La notion d’obésité en bonne santé reste une notion qui reste à préciser scientifiquement.
Les études prospectives récentes semblent montrer que les individus MHO ont plus de
risque de développer un syndrome métabolique et par conséquent des maladies cardio­
vasculaires à long terme que les sujets de poids normal et métaboliquement sains. La prise
en charge de toutes les personnes obèses, sans restriction liée au profil cardio­métabolique,
est importante afin de prévenir les autres complications qui en découlent telles que
pathologies respiratoires, arthrose, cancers et dépression.

Mots-clés : obésité, obésité métaboliquement saine, phénotype MHO.

INTRODUCTION
L’obésité est une maladie chronique définie comme étant un excès de masse grasse qui
entraine des conséquences néfastes sur la santé. Cette maladie est associée à des compli-
cations cardio-métaboliques telles que l’hypertension artérielle, le diabète de type 2 et les
dyslipidémies. La prévalence de l’obésité dans le monde a augmenté de façon significative
dans les 30 dernières années (1). Cette augmentation est prédictive d’une croissance des
dépenses de santé liées à une augmentation de la morbidité associées à l’obésité. L’exis-
tence d’un sous-groupe très à risque justifie de cibler les moyens sur ce groupe. Un sous-
phénotype de personnes obèses ne présentant pas d’anomalies métaboliques liées à l’obé-
sité et avec un profil comparable, en termes de morbidité et de mortalité, à celui d’individus
de poids normal sans troubles métaboliques a été décrit dès les années 1980 (2). Il est
défini comme « obésité métaboliquement saine » ou MHO pour « metabolically healthy
obesity ». Le débat repose sur l’instabilité de ce phénotype et sur son caractère transitoire
(3, 4) ; les personnes ayant ce phénotype ne seraient donc pas protégées à long terme des
risques de maladies cardiovasculaires et de décès prématurés observés au sein de la popula-
tion obèse (5).

Paris, 23-24 novembre 2018


148 Joane MATTA, Claire RIVES LANGE, Claire CARETTE et Sébastien CZERNICHOW

DÉFINITION DU PROFIL MHO


Il n’existe pas de consensus actuel concernant la définition du MHO. La plupart des
critères, dans la littérature, se basent sur différentes combinaisons reposant en majorité sur
quatre variables : la pression artérielle, le cholestérol HDL, la triglycéridémie et la glycémie
à jeun. D’autres définitions, moins fréquentes, tiennent compte aussi de la résistance à
l’insuline par le modèle HOMA (homeostasis model assessment of insulin resistance) et de la
CRP (6). Une des définitions les plus régulièrement employées est celle de l’ATP III (Adult
Treatment Panel III) associant IMC ≥30 kg/m² et aucun ou un seul des facteurs de risque
suivants : triglycérides ≥1,7 mmol/l ou traitement en cours, pression artérielle systolique
(PAS) ≥130 mm Hg, pression artérielle diastolique (PAD) ≥85 mm Hg ou traitement en
cours, glycémie à jeun ≥5,6 mmol, cholestérol-HDL <1,04 mmol/l pour les hommes et
<1,29 mmol/l pour les femmes.
La prévalence du phénotype MHO selon les nombreuses définitions existantes dans la
littérature varie fortement, allant de 3-32  % pour les hommes à 11-43 % pour les femmes
(7). L’utilisation de l’IMC, pris isolément comme indicateur de santé, conduit souvent à
une sous-estimation de la présence de facteurs de risque cardio-métaboliques associés. En
effet, un pourcentage non négligeable d’hommes de poids normal dans le monde (26,6 %),
ou en surpoids (49,9 %), présentaient un ou plusieurs de ces facteurs de risque, ainsi que
25,6 % de femmes en surpoids (8). Ceci confirme que l’IMC, malgré sa simplicité d’utilisa-
tion dans les études épidémiologiques, n’est pas à lui seul un indicateur suffisant pour
définir le risque cardio-métabolique d’une population.

MÉCANISMES BIOLOGIQUES DU PHÉNOTYPE MHO


Les individus obèses ne possèdent pas tous la même capacité de stockage et de distribu-
tion du tissu adipeux. L’accumulation de la masse grasse dans le foie est un indicateur de
la résistance à l’insuline et un déterminant essentiel dans la classification du phénotype
MUHO pour « metabolically unhealthy obesity » versus MHO (9). De plus, chez certaines
personnes, cette accumulation du tissu adipeux entrainerait une libération de facteurs
inflammatoires contribuant en partie au développement de la résistance à l’insuline.
Le phénotype MHO serait aussi dû à une différence de capacité d’expansion du tissu
adipeux en cas d’excès énergétique. L’augmentation de la masse grasse s’accompagne
normalement d’une vascularisation élevée, ce qui ne s’effectue pas de façon optimale chez
certaines personnes présentant le phénotype MUHO. Cela aussi a été observé chez des
individus de poids normal en cas d’excès énergétique ce qui explique en partie pourquoi
l’IMC à lui seul ne serait pas le meilleur indicateur de la santé cardio-métabolique.
Une autre hypothèse repose sur le fait que les individus obèses de profil MUHO auraient
une tendance à stocker le gras au niveau du tronc (graisse viscérale) plutôt qu’au niveau
des membres inférieurs et supérieurs. Cette accumulation de graisse viscérale chez les
individus MUHO entrainerait une inflammation systémique, une accumulation de graisse
intra-hépatique, une diminution du taux de l’adiponectine et d’autres anomalies cardio-
métaboliques (2).
Les études animales suggèrent que le profil MHO serait liée à une adipogenèse préféren-
tiellement localisée au niveau du tissu adipeux sous-cutané. Des modèles de souris AdTG
ob/ob déficientes en leptine avec des concentrations élevées en adiponectine ont, en effet,
une sensibilité élevée à l’insuline malgré la présence d’une obésité morbide. Ce modèle de

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Obésité sans risque métabolique mythe ou réalité ? 149

souris montre aussi moins d’inflammation systémique et moins d’infiltration de macro-


phages dans le tissu adipeux (10).
L’inflammation entraîne la résistance à l’insuline, et un tissu adipeux avec inflammation
est associé à un risque plus élevé de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires, ce
qui explique en partie la variabilité du phénotype MHO chez certaines personnes
obè­ses  (3). Une étude transversale réalisée chez des hommes et femmes adultes a montré
que les individus MHO avaient des concentrations moindres de marqueurs de l’inflamma-
tion tels que la CRP, le TNF-α, et l’interleukine 6, et des concentrations plus élevées
d’adiponectine que les individus MUHO (11). Un taux élevé d’adiponectine a été montré
comme étant associé au phénotype MHO, même après ajustement sur l’âge, l’insuline et le
tour de taille (12).
En résumé le phénotype MHO pourrait être expliqué par :
• U
 ne différence de distribution du tissu adipeux : moins de stockage de graisse dans les
viscères, et notamment dans le foie ;
• Moins de libération de marqueurs de l’inflammation ;
• P
 lus d’expansion du tissu adipeux en cas d’excès énergétique associée à un meilleur
profil métabolique : adipogénèse accrue au niveau du tissu adipeux sous cutané ;
• D
 es concentrations élevées d’adiponectine hormone insulino-sensibilisatrice secrétée
par le tissu adipeux.

DÉTERMINANTS COMPORTEMENTAUX ET MHO


Une étude au Canada, a montré que le phénotype MHO n’est pas associé à l’état cardio-
respiratoire mais que ce phénotype est associé à un tour de taille plus faible et à une
moindre stéatose hépatique(13). Cependant, une autre étude a montré que la capacité
cardiorespiratoire estimée par la VO2 max mesurée à l’effort était meilleure chez les
individus de phénotype MHO (46 % de cet échantillon de personnes obèses) que chez
ceux de type MUHO (14).
Une alimentation saine et un niveau élevé d’activité physique ont été associés à un profil
MHO dans certaines études. D’autres études ont montré que les femmes MHO avaient
une alimentation plus riche en fibres et en acides gras insaturés par comparaison avec les
femmes dont le profil d’obésité associait des facteurs de risque cardio-métaboliques
(MUHO). Ainsi, il a été montré, qu’une alimentation dite « saine », spécifique à chaque
pays ou région, serait associée au profil MHO plutôt que MUHO (15).
Au-delà des apports alimentaires, les données sur la différence de niveau d’activité
physique chez les obèses de type MHO, par rapport à ceux de type MUHO, sont peu
concluantes. Il n’a pas été démontré que les individus MHO pratiquaient plus d’activité
physique que ceux à profil MUHO. Prince et al. ont montré qu’une activité physique
modérée à intense est associée au profil MHO chez des jeunes obèses mais cette associa-
tion n’était pas vérifiée pour toutes les catégories correspondant aux différentes définitions
du profil MHO (16). D’autre part, la sédentarité a été associée négativement au le profil
MHO (17). Ces résultats non concluants suggèrent la nécessité d’utiliser des mesures
objectives de l’activité physique et de prendre en considération la différence d’âge pour les
comparaisons entre les individus MHO et MUHO.

Paris, 23-24 novembre 2018


150 Joane MATTA, Claire RIVES LANGE, Claire CARETTE et Sébastien CZERNICHOW

PARADOXES DE L’OBÉSITÉ
La notion d’obésité « en bonne santé » reste donc à préciser. En effet, des études récentes
ont remis en question l’existence du phénotype MHO (18) qui serait, en réalité, simple-
ment un profil métabolique instable qui s’estomperait au fil du temps, malgré une meilleure
sensibilité à l’insuline. Le pronostic des sujets à profil MHO à long terme reste mal connu.
Les individus obèses et métaboliquement sains ont, pour un même niveau de masse
grasse, un profil cardio-métabolique sain. Ce phénotype impliquerait que ces individus
sont à moindre risque de complications liées à l’obésité. Mais ceci n’a pas été retrouvé dans
des études prospectives récentes (2, 19). Une méta-analyse de 2016, portant sur 22 études
prospectives (suivi moyen de 12 ans) et étudiant la différence de risques cardiovasculaires
entre quatre groupes : MHO, MUHO, poids normal avec ou sans troubles métaboliques, a
montré que les personnes obèses à profil MHO avaient plus de risque de complications
métaboliques à long terme que les sujets de poids normal mais métaboliquement sains
(risque relatif, RR : 1,45 ; IC 95 % 1,20-1,70). Cependant, le risque de développer des
maladies cardiovasculaires était plus élevé chez les sujets de profil MUHO (2,31 ; 1,99-2,69)
ou les individus de poids normal avec anomalies métaboliques (2,07 ; 1,62-2,65)(19). Le
profil MHO n’aurait donc pas d’effet protecteur. Il n’en reste pas moins que l’obésité,
au-delà des anomalies métaboliques, confère une augmentation du risque d’arthrose, de
complications respiratoires, de dépression et de certains cancers.
Des études ont aussi montré que les individus MHO avaient plus de risque de développer
un diabète de type 2 que les sujets de poids normal sur une période de 11 ans (20). Bradshaw
et al. ont étudié l’incidence, sur une période de 9 ans, des composantes du syndrome
méta­bolique chez 3 969 sujets adultes initialement sans syndrome métabolique et répartis
en trois groupes, poids normal sans anomalie cardio-métabolique, surpoids et MHO (21).
Le risque relatif de développer une anomalie métabolique était plus élevée chez les sujets
MHO que chez ceux de poids normal sans troubles cardio-métaboliques. Le risque d’inci-
dence de troubles métaboliques était plus faible chez les individus en surpoids métaboli-
quement sains initialement. D’autres chercheurs considèrent aussi que le phénotype MHO
n’existe pas vraiment. L’étude récente, déjà citée (5), a montré qu’après suivi pendant
15  ans de 18  070 individus, les personnes MHO avaient accumulé 10 % de poids supplé-
mentaire et présentaient un risque accru de complications cardio-métaboliques par rapport
aux sujets de poids normal sans complications métaboliques ; toutefois ces risques restaient
moindres que chez les sujets MUHO. Les auteurs concluent que les individus MHO ne
sont donc pas indemnes du risque de complications, et ce, en cas de gain de poids, bien
que le risque ne soit pas aussi élevé que chez les sujets MUHO (5).
Les résultats de la cohorte MESA (Multi-Ethnic Study of Atherosclerosis) ont montré que
les individus MHO n’avaient pas une plus forte incidence d’événements cardiovasculaires
que les sujets de poids normal métaboliquement sains (2). Toutefois, la moitié des individus
MHO ont développé un syndrome métabolique pendant la période de suivi de 12 ans. De
plus, il est apparu que les sujets dont le phénotype MHO s’est révélé instable, avec dévelop-
pement d’un syndrome métabolique, avaient plus de risque de maladie cardiovasculaire
que ceux chez qui le phénotype MHO étaitt resté stable (OR=1,60 95 % CI 1,14-2,25). En
somme, l’absence de développement de syndrome métabolique s’est accompagnée de
l’absence d’augmentation de risque cardiovasculaire (2).
Des données récentes tirées d’une étude de population conduite au Royaume-Uni
pendant plus de 20 ans permettent de soulever le concept de la « stabilité » du phénotype

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Obésité sans risque métabolique mythe ou réalité ? 151

MHO (21). La question essentielle pourrait être celle du dépistage de cette forme de MHO
dite « stable ». Certains éléments prédictifs semblent être le sexe féminin ainsi que le jeune
âge et un poids initial plus faible lors du dépistage (22). Dans le domaine des associations
potentielles entre obésités et syndromes dépressifs, les données provenant de la cohorte
GAZEL ont montré que les personnes obèses de profil MHO avaient moins de risque de
symptômes de dépression à l’entrée dans l’étude que les personnes de profil MUHO. Ce
risque était cependant atténué avec le temps sur une période de suivi de 26 ans (23).
Ces résultats impliquent que l’obésité métaboliquement saine n’est pas un phénotype
stable et, en corollaire, représente une opportunité de prévention primaire de maladies
cardiovasculaires. La majorité des individus MHO semblent devenir MUHO au cours du
temps (24). A ce titre, l’étude de Mongraw-Chaffin (2) montre que le risque le plus élevé
apparait en présence d’un ou plusieurs composants du syndrome métabolique, d’où l’impor-
tance d’une prise en charge précoce de l’obésité, même en cas de phénotype MHO. Dans
une méta-analyse portant sur la définition de la « santé métabolique », des chercheurs ont
montré que les individus en surpoids, mais métaboliquement sains, avaient une plus forte
incidence de diabète que ceux de poids normal sans troubles métaboliques, mais un risque
moindre que les personnes MHO. D’autre part, les auteurs considèrent que les définitions
employées afin de déterminer le risque métabolique ont une sensibilité élevée mais une
spécificité faible chez les individus obèses ce qui limite la pertinence de l’utilisation de ces
définitions dans la prédiction du diabète (25).

CONCLUSION
La stabilité du phénotype MHO au cours de la vie est remise en question par certains
auteurs et la majorité des individus MHO semblent développer un profil MUHO. Cela dit,
certains individus conservent ce profil protecteur pendant des années et le mécanisme
physiologique protecteur sous-jacent reste mal compris (22). Au-delà du débat qui agite la
communauté scientifique sur ce sujet, il n’en reste pas moins que l’obésité reste un facteur
de risque majeur de nombreuses complications (articulaires, respiratoires, cancers
no­tamment).

1
 épartement de Nutrition, Faculté des Sciences
D
Agronomiques et Alimentaires,
Université Saint Esprit de Kaslik, Jounieh, Liban
2
 ervice de Nutrition, Hôpital européen Georges Pompidou,
S
CSO IdF Sud, Paris
3
Université Paris Descartes, Paris

Adresse pour la correspondance : Service de Nutrition (Centre Spécialisé Obésité Idf Sud) - Hôpital
Européen Georges Pompidou, 20 Rue Leblanc, 75015 Paris
Email : sebastien.czernichow@aphp.fr

Paris, 23-24 novembre 2018


152 Joane MATTA, Claire RIVES LANGE, Claire CARETTE et Sébastien CZERNICHOW

METABOLICALLY HEALTHY OBESITY : MYTH OR REALITY ?


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n by Joane MATTA, Claire RIVES LANGE, Claire CARETTE
and Sébastien CZERNICHOW2,3 (Paris - France)

ABSTRACT
Some obese individuals do not show any metabolic abnormalities and are described as
having a metabolically healthy obesity or an MHO phenotype for ‘metabolically healthy
obesity’. However there is still no clear consensus on the definition of this phenotype. Four
important variables are frequently taken into consideration in the classification of the MHO
profile: blood pressure, glycaemia, HDL-cholesterol and triglycerides. There is a conceptual
conflict on the stability or the transient nature of this phenotype. Certain individuals with the
MHO phenotype do not remain protected from cardiovascular diseases and premature death
that usually occur in the obese population so the concept of “healthy obesity” is still debatable
and remains, yet, to be scientifically studied. Prospective studies seem to show that indivi­
duals with the MHO phenotype have higher risks of developing metabolic abnormalities on
the long run compared to metabolically healthy normal weight counterparts. In any case,
patient care of all obese individuals irrespective of their metabolic risk is important in order
to prevent complications that are caused by obesity such as respiratory conditions, arthritis,
cancer and depression.

Key-words : obesity, metabolically healthy obesity, MHO phenotype.

BIBLIOGRAPHIE

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Obésité sans risque métabolique mythe ou réalité ? 153

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a systematic review and network meta-analysis. Diabetes care. 2015; 38(11): 2177-87.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Paris, 23-24 novembre 2018


154

NOTES

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


TRAITEMENT HORMONAL DE LA MÉNOPAUSE :
OÙ EN EST-ON EN 2018 ?

par Anne GOMPEL (Université Paris Descartes)

Le traitement hormonal de la ménopause (THM) a été l’objet d’un recul de prescription


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

sans précédent dans l’histoire moderne de la médecine. Ce recul a été lié aux publications
de deux essais randomisés américains publiés à grand renfort de publicité négative sur les
résultats. Ce sont les deux essais randomisés de la Women Health Initiative, l’un randomisé
entre le traitement actif par estrogènes conjugués équins et acétate de médroxyprogestérone
et placebo, l’autre chez les femmes hystérectomisées, entre estrogènes conjugués et placebo.
Cette population incluse était en moyenne beaucoup plus âgée que la population susceptible
de bénéficier d’un THM et a montré un « indice global de morbidité » en défaveur du
THM. Des publications ultérieures ont permis d’affiner ces résultats montrant que,
finalement, dans la population candidate à un THM, 10 ans suivant la ménopause, la
mortalité était réduite dans le groupe traité, ce qu’ont confirmé deux métaanalyses d’essais
randomisés. De plus, dans l’essai estrogènes seuls, le nombre de cancers du sein était
diminué. Des études observationnelles, notamment françaises et anglaises, ont également
montré que thromboses veineuses et accidents vasculaires cérébraux étaient évités avec des
traitements différents (estradiol extra-digestif et progestérone ou dérivés proches). Enfin les
mêmes cohortes françaises ont permis de montrer que la progestérone micronisée ou la
dydrogestérone était associée à un risque plus faible de cancer du sein que les progestatifs
de synthèse. D’autres données montrent aussi que les femmes atteintes d’insuffisance
ovarienne prématurée doivent être traitées sous peine de voir leur risque d’accidents
cardio-vasculaires augmenter. De tous ces résultats il résulte que les femmes
symptomatiques proches de la ménopause devraient pouvoir bénéficier des traitements « à
la française » avec un bénéfice possible en mortalité (non démontré avec les traitements
français), mais certain en qualité de vie et en prévention de l’ostéoporose. Actuellement
seules 10 % des femmes françaises sont traitées (!) et seulement 5 % reçoivent des
estrogènes topiques alors que plus de la moitié en auraient besoin ! Ce domaine médical
n’a pas su raison garder !

Mots-clés : Risque cardio-vasculaire, cancer du sein, estrogènes, progestatifs, thrombose veineuse.

INTRODUCTION
L’utilisation du traitement hormonal de la ménopause (THM) a été profondément
affectée par les publications américaines dont la première date de l’été 2002. Moins de
10 % des femmes ménopausées sont traitées en France malgré une demande beaucoup plus
importante et des indications potentielles non prises en charge chez des femmes très
symptomatiques. La plupart des Agences du Médicament [FDA, EMEA, HAS, (1, 2)] ont
édité des recommandations stipulant que le THM devrait être administré aux doses
minimales pendant une durée la plus brève possible en fonction des symptômes chez les

Paris, 23-24 novembre 2018


156 Anne GOMPEL

femmes symptomatiques pour les troubles climactériques, et qu’une réévaluation régulière


de l’utilité des traitements devait être pratiquée. Les sociétés scientifiques de Ménopause
(European Menopause Andropause Society, International Menopause Society) et d’Endo-
crinologie (American Society of Endocrinology and European Society of Endocrinology)
ont régulièrement réévalué la balance risque/bénéfice avec des conclusions différentes de
celles des Agences du Médicament. En plus d’être le traitement le plus efficace pour traiter
les signes climatériques et prévenir l’ostéoporose, le THM offre un bénéfice en survie
globale chez les femmes de 50-60 ans ou dans les 10 ans suivant la ménopause (3–5). Les
bénéfices peuvent diminuer après 60 ans, mais, chez des femmes encore symptomatiques
sans facteurs de risque particuliers sur les plans cardio-vasculaire et mammaire, la poursuite
du traitement peut être discutée. La plupart de ces recommandations stipulent qu’ après
information de la patiente sur les risques et bénéfices, si elle souhaite poursuivre le THM
celui-ci doit lui être prescrit (3).

Sur quelles informations sont basées ces recommandations ?

LES RÉSULTATS DES ESSAIS AMÉRICAINS RANDOMISÉS TIRÉS DE LA


WOMEN HEALTH INITIATIVE (WHI)
Avant 2002, année de la première publication de la WHI (6), le THM était considéré
comme bénéfique sur les signes climatériques, l’ostéoporose et le risque de maladies cardio-
vasculaires (c-v). L’opinion était que les estrogènes sont protecteurs via de nombreux
mécanismes décrits dans des modèles in vitro ou animaux. De plus, l’épidémiologie
comparée hommes/femmes des maladies c-v et des études observationnelles sur le THM
suggéraient fortement le bénéfice du THM dans la prévention c-v. Mais, les publications
successives de la WHI, soit l’essai randomisé du THM combiné associant estrogènes
conjugués équins (CEE) et acétate de medroxyprogestérone (MPA), essai CHT, soit le
deuxième essai estrogènes seuls (ET) chez les femmes hystérectomisées (7), ont remis en
cause l’hypothèse du bénéfice c-v. Ces essais ont inclus des femmes relativement âgées - en
moyenne 63 ans dans l’essai CHT -à distance de la ménopause pour réduire le nombre de
perdues de vue dans le groupe placebo dont 30 % (essai CHT) et 40 % (essai ET) étaient
obèses, et avec des facteurs de risque c-v non négligeables. La dose de CEE était fixe de
0,625 mg/j et le MPA à 2,5 mg/j en continu. Les résultats ont été évalués avec comme
premier objectif les pathologies coronariennes (CHD) (infarctus du myocarde fatal et non
fatal) et comme principal effet adverse le cancer du sein (CS). Un index global de morbi-
dité, incluant CS, embolie pulmonaire, cancer colorectal, cancer endométrial, fractures
de hanche et décès d’autres causes faisaient aussi partie des critères secondaires (6). Dans
le CHT, 16608 femmes d’un âge moyen de 63,3 ans ont été inclues et suivies en moyenne
5,2 ans (au lieu des 10 ans prévus). L’étude a été stoppée en raison d’une balance bénéfice-
risque négative (6). Seulement 33 % de la population avait moins de 60 ans et plus de 20 %
avaient plus de 70 ans ! Plus de 30 % étaient obèses et 43 % hypertendues. L’essai ET a
inclus 10739 femmes hystérectomisées d’un âge moyen de 63,3 ans avec un suivi moyen de
6,8 ans (7). 30 % des femmes avaient moins de 60 ans mais plus de 25 % avaient plus de
70  ans. Une plus grande proportion de femmes étaient obèses (40 %) et hypertendues
(53 %). Le principal résultat du CHT a été une augmentation des maladies c-v (CHD,
AVC), du risque thromboembolique (VTE) et de l’incidence du CS. Une diminution du
cancer colorectal et des fractures ostéoporotiques a cependant été observée (Tableau 1).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ? 157

Tableau 1. - Évènements dans l’essai WHI CHT pendant le traitement (d’après Manson et al. 2013)
exprimés en différences du nombre d’évènements par 10 000 années-femmes.
CEE+MPA CEE
total 50-59 ans total 50-59 ans
CHD 6 5 -3 -11
CS 9 6 -7 -5
AVC 9 5 11 -1
EP 9 6 4 3
TV 12 7
Cancer colorectal -6 -1 2 3
Cancer Endométrial -1 0 NA NA
Fracture de hanche -6 -3 -6 3
Mortalité toutes causes -1 -10 3 -11
CHD : coronaropathies ; CS : cancer du sein ; EP : embolie pulmonaire ; TV : thrombose veineuse.

En fait, ces effets secondaires n’étaient plus significatifs après ajustement sur les facteurs
de risque, à l’exception du risque de VTE qui était le seul significatif (6). Dans l’essai ET,
il y avait plus d’AVC et de VTE mais pas de CS.
Cependant, des publications ultérieures, très nombreuses, de la WHI ont ré-analysé ces
résultats en fonction des catégories d’âge et du temps écoulé depuis la ménopause.
- L
 es publications récentes de la WHI montrent une baisse de la mortalité globale
chez les femmes 50-59 ans (8). De plus, exprimé en termes de bénéfice-risque, - 1,45
(-6,6 to +4,2) évènements / 1000 femmes sont survenus pendant 5 ans de traitement
dans l’essai ET et +3,9 (0,15–8,0) évènements / 1000 / 5 ans dans l’essai CHT (9).
Moins de cancers du sein dans l’essai ET. Dans l’essai CHT, le hazard ratio (HR) pour
le CS était de 1,24 (1,01-1,53), augmentant avec la durée alors que dans l’essai ET le
HR était de 0,79 (0,61-1,02) sans effet lié à la durée (8).
- L
 es évènements c-v n’étaient significativement augmentés que pour les femmes de
plus de 70 ans. Les évènements c-v étaient observés uniquement chez les femmes en
cours d’utilisation, plus fréquents la première année comme les VTE liés aux effets
pro-coagulants du THM à l’américaine. Les femmes ayant des facteurs de risque c-v
étaient plus à risque (10).
- L
 e risque de CS était augmenté après au moins 7 ans d’utilisation, augmentant avec
la durée et diminuant progressivement à l’arrêt (essai CHT). Ces résultats sont inter-
prétés comme un effet promoteur sur des lésions préexistantes (11). Il est connu depuis
longtemps que ce sont les cancers hormonodépendants ayant des récepteurs à l’estra-
diol (RE) positifs et les lobulaires qui sont surtout induits par le traitement. Selon des
données plus modernes, ce sont les cancers de type luminal A, riches en RE, et un peu
moins les luminaux B, et moins encore les CS HER2+ et les triples-négatifs, qui sont
associés au traitement hormonal, comme l’ont montré deux études récentes (12,13).
Seulement les femmes (30 %) qui avaient utilisé auparavant un THM au moins 2 ans
ont eu un sur-risque de cancer du sein avec une utilisation d’au moins 3/5 ans, soit
5/7  ans au total (14). Le risque de CS était augmenté chez les femmes ayant

Paris, 23-24 novembre 2018


158 Anne GOMPEL

p­ réala­­blement, ou développant sous traitement, des mastodynies et une forte densité


mammaire (15, 16).
- P
 ar ailleurs, la WHI a permis de montrer qu’il y avait une prévalence significativement
plus faible de diabète de type 2 chez les femmes traitées en accord avec l’effet positif
de l’estradiol sur l’insulinorésistance, la préservation des ilôts beta et de l’insulinose-
crétion (8). Une étude randomisée précédente avait pu observer le même effet béné­­
fique (17). La lithiase vésiculaire et l’incidence de l’incontinence urinaire étaient
augmentées par le traitement systémique (8). Plus de démences, très vraisemblable-
ment d’origine vasculaire, ont été également observées (19, 20).

LE TRAITEMENT AMÉRICAIN DIFFÈRE PAR PLUSIEURS ASPECTS DES


TRAITEMENTS FRANÇAIS
La voie d’administration des estrogènes est d’importance primordiale
Des études cas-contrôles et observationnelles de larges cohortes Françaises, Anglaises et
Américaines ont permis de montrer que l’utilisation d’estradiol (E2) par voie extradiges-
tive n’est pas associée à une activation de la coagulation contrairement à la voie orale (20,
21) et qu’ il n’y avait pas de sur-risque veineux ni d’AVC, d’autant que l’on combine le
traitement avec la progestérone micronisée, la rétroprogestérone (dydrogestérone) ou un
pregnane proche (20, 22–27). Les CEE, sont connus comme thrombogéniques depuis
longtemps. L’activation de la coagulation est cependant dose-dépendante. Ainsi dans
l’étude tirée d’une base de données anglaise sur l’AVC, l’utilisation d’un patch dosé à plus
de 50 µg était associée à un risque plus élevé (28). Dans la genèse des AVC, l’activation de
la coagulation joue sans doute un rôle plus marqué que dans la survenue des infarctus du
myocarde, et l’activation de la coagulation est très dépendante du niveau estrogénique. Par
ailleurs, dans la très large cohorte française E3N des femmes de la MGEN, l’E2 a égale-
ment des effets favorables sur la survenue de DT2 aussi bien par voie extradigestive que par
voie orale (29). Concernant le risque de CS, les deux voies d’administration confèrent un
risque équivalent, le type de progestatif étant la variable associée au risque (30, 31).

Le type de progestatif et le schéma d’administration sont importants pour diminuer


les risques du THM : risques de VTE, métaboliques, de cancer endométrial et de
CS
Les progestatifs sont des stéroïdes non sélectifs pour le récepteur de la progestérone (RP)
et, selon les molécules, peuvent se lier comme agonistes ou antagonistes aux récepteurs des
androgènes, glucocorticoïdes ou minéralocorticoïdes. Les norstéroïdes ont des métabolites
estrogéniques. La progestérone, la dydrogesterone ou des progestatifs de synthèse peuvent
être utilisés dans le THM chez les femmes non hystérectomisées pour diminuer le risque
de cancer de l’endomètre.
En ce qui concerne le risque métabolique et d’activation de la coagulation, la proges-
térone et la dydrogesterone ainsi que l’acétate de chlormadinone et sans doute la medro­
gestone (mais peu de données sont disponibles sur ce dernier progestatif) sont neutres.
L’étude PEPI, ayant randomisé contre placebo CEE, CEE+MPA ou CEE+pro­­ges­térone, a
pu montrer la neutralité de la progestérone sur les lipides et la glycorégulation (32). Dans
les études françaises sur la VTE et l’AVC, seuls les dérivés norpregnanes sont à plus fort
risque de VTE et d’AVC (21, 33).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ? 159

En ce qui concerne le cancer de l’endomètre, plusieurs études ont montré que le traite-
ment séquentiel (estrogènes jours 1-25 ou continu + progestatif 12/14 jours/mois) était
associé à un risque plus élevé que le traitement combiné continu. Ainsi dans la WHI, il n’y
a pas eu d’augmentation du risque de cancer de l’endomètre malgré la prévalence élevée de
l’obésité. Il a d’ailleurs été montré qu’un des bénéfices du THM chez les femmes obèses/ou
en surcharge pondérale était de diminuer le risque de cancer de l’endomètre et ceci du fait
de l’administration de progestatifs dans le THM (34). Les progestatifs de synthèse sont
équivalents en terme de protection endométriale (35). Cependant, un risque plus impor-
tant de cancer endométrial a été rapporté dans la cohorte E3N avec la progestérone (35,
36). Nous avons publié récemment une revue sur ce thème où le lecteur pourra trouver
plus de détails (37). L’une des explications possibles est un problème de compliance car la
progestérone est commercialisée pour l’instant seule, et est associée à une voie transder-
mique ou orale, alors qu’il existe plusieurs association progestatifs + estradiol oral ou en
patches. Notre expérience clinique est, effectivement, que certaines femmes oublient
volontiers le comprimé… Ce qui va dans ce sens est le fait qu’il existe deux études rando-
misées ayant utilisé la progestérone dans le THM et n’ayant pas vu plus d’hyperplasies avec
la progestérone que le MPA dans l’étude PEPI (38) et que l’acétate de chlormadinone dans
une étude française (39). Il est donc très important d’informer les femmes traitées de
l’importance et du rôle joué par la progestérone et les progestatifs (40). Il est aussi possible
que la posologie habituellement prescrite en continu de 100 mg soit insuffisante chez
certaines femmes notamment obèses. Dans des études relativement anciennes, c’était la
posologie de 200 mg qui était recommandée mais en séquentiel (41) et de 300 mg en traite-
ment séquentiel de 10 jours (durée trop courte !) en combinaison avec 1,25 mg de CEE une
dose double de celle utilisée maintenant (42). Il est donc difficile de conclure sur une
posologie insuffisante, mais on peut conseiller d’augmenter celle-ci chez les femmes obèses.
On peut aussi proposer une surveillance endométriale chez les femmes traitées par E2 +
progestérone. Enfin, l’effet sur le risque endométrial est rémanent de manière durable après
l’arrêt du traitement à l’inverse de ce qui se passe avec le cancer du sein.
Cancer du sein. Plusieurs études françaises et d’autres pays (tableau 2) ont montré un
plus faible risque avec la progestérone et la dydrogesterone que les progestatifs de synthèse
de CS au moins jusqu’à > 5 ans de traitement (31, 43–46). L’effet cesse à l’arrêt du traite-
ment comme l’a montré l’étude E3N et plus rapidement qu’avec les progestatifs de synthèse
sans doute car beaucoup plus faible. Cet aspect est discuté en détail dans la publication
récente (47).

COMMENT DIMINUER LE RISQUE DE CANCER DU SEIN, FINALEMENT


LE SEUL VRAI RISQUE DE CE TRAITEMENT ?
Bien connaître les facteurs de risque du cancer du sein (tableau 3) permettrait sans doute
d’être prudent en cas de risque élevé, ou de pratiquer un suivi mammaire plus fréquent. Il
existe également des scores accessibles gratuitement en ligne dont certains sont utiles pour
évaluer le risque oncogénétique avec l’histoire familiale mais aussi deux scores plus utilisés
par les cliniciens. Le score de Gail (actuellement modifié) a été le premier à être utilisé. Il
inclut certains facteurs cliniques et une partie de l’histoire familiale. Il est accessible à
l’adresse https://www.mdcalc.com/gail-model-breast-cancer-risk Un autre score est plus
complet incluant plus de données cliniques et familiales, c’est le score d’IBIS, construit à
partir d’une grande étude de prévention en Angleterre. Il est chargeable à l’adresse
http://www.ems-trials.org/riskevaluator/ Cependant, bien qu’il soit plus complet incluant
depuis peu la densité mammaire, la c-statistique reste inférieure à 70 %. Ce score peut aider,

Paris, 23-24 novembre 2018


160 Anne GOMPEL

Tableau 2. - Risque de cancers du sein (CS) avec la progestérone et la dydrogestérone


Suivi moyen
Études Population Risque de CS
(ans)

Fournier Cohorte E2: RR 1,29 (95% CI : 1,02–1,65)


et al 80 377 femmes françaises E2 + P: RR 1,00 (95% CI : 0,82-1,22)
(43) ménopausées 8,1 E2 + DYD: RR 1,16 (95% CI : 0,94-1,43)
moyenne âge : 53,1 ans E2 + progestatifs de synthèse :
RR 1,69 (95% CI : 1,50–1,91)

Espié Cohorte sans THM : 0,70% (incidence du CS)


et al 4 949 femmes françaises sans E2 seul : 0,28
(79) ménopausées
8,2 E2 + P : 0,40%
moyenne âge : E2 + progestatifs de synthèse : 0,94%
64,2 ans (groupe THM)
Pas d'augmentation du risque
60,6 ans (groupe sans THM)

Cordina- Cas–contrôle E2 seul : OR 1,19 (95% CI : 0,69–2,04)


Duverger 1 555 femmes françaises E2+P : OR 0,80 (95% CI : 0,44–1,43)
et al 739 cases, 816 contrôles
E2 + progestatifs de synthèse :
(80) âge des cas : OR 1,57 (95% CI : 0,99–2,49)
35–54 ans (16,5%) 
E2 + norstéroïdes : OR 3,35
55–64 ans (47,0%)
(95% CI : 1,07–10,4)
> 65 ans (36,5%)
âge des contrôles :
35–54 ans (17,6%)
55–64 ans (43,6%) 
> 65 ans (38,7%)

Schneider Cas–contrôles E2 + DYD: OR 0,68 (95% CI : 0,38–1,20)


et al 1 261 cas et 7 566 contrôles CEE + norgestrel
(81) - 2–4 ans : OR 1,50 (95% CI : 1,11–2,04)
Moyenne d’âge : 51,3 ans
- 5 ans : OR 1,34 (95% CI : 0,71–2,54)
6 E2+NET
- 2–4 ans : OR 1,19 (95% CI : 0,86–1,63)
- 5 ans : OR 2,85 (95% CI : 1,87–4,36)
CEE + MPA: OR 0,78 (95% CI : 0,50–1,20)
Significativement moins de CS avec DYD

Lyytinen 221 551 femmes finlandaises E2 transdermique vs. oral : pas de différence
et al ménopausées E2 + NET: augmente avec la durée
(82) THM à partir de registres de - 3 -<5ans, RR 1,34 (95% CI : 1,17–1,51)
pharmacie et de cancers - 5–10 ans, RR 2,03 (95% CI : 1,88–2,18)
6 211 cas de CS - >10 ans, RR 3,15 (95% CI : 2,44–4,00)
E2 + MPA: effet de la durée
- 3–10 ans, RR 1,27 (95% CI : 1,09–1,48)
- 5–10 years, RR 1,64 (95% CI : 1,49–1,79)
- > 10 ans, RR 1,90 (95% CI : 1,07–3,07)
E2 + DYD: effet de la durée
- 3–5 ans, RR 1,22 (95% CI : 0,83–1,72)
- 5 ou plus, RR 1,13 (95% CI : 0,49–2,22)
- > 10 ans, pas de cas et peu de contrôles
dans le groupe NET : Risque avec le
traitement continu > séquentiel
NET, noréthisterone; MPA, medroxyprogestérone acetate ; DYD, dydrogestérone ; CEE, estrogènes conjugués
équins ; E2,estradiol ; OR, odd ratio ; RR, risque relatif.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ? 161

nous semble-t-il, à discuter avec les patientes, certaines pensant avoir un risque élevé à tort,
ou l’inverse. Connaitre les facteurs de risque et leur amplitude peut suffire pour évaluer
correctement le niveau du risque, faible, modéré ou élevé (tableau 3). L’importance de la
densité mammaire en particulier est à prendre en compte. Les femmes qui ont une densité
mammaire élevée à la ménopause, alors que le devenir normal est l’involution fibro-adipeuse
du sein, sont plus à risque de cancer. Il est également possible que cette forte densité
contribue à retarder le diagnostic par rapport à des seins moins denses, plus facilement
analysables en mammographie (48, 49). Les femmes ayant eu une biopsie montrant des
lésions prolifératives, surtout avec atypies, sont plus à risque de CS (50). Comme nous
l’avons déjà signalé, les mastodynies constituent un facteur de risque. Elles surviennent
souvent sur des seins denses et doivent donc être prises en compte pour adapter le traite-
ment, voire arrêter les estrogènes. Il n’est pas rare que ce type de seins expose à une intolé-
rance aux estrogènes faisant choisir un autre type de traitement. De manière intéressante,
dans la WHI ET, les femmes ayant une histoire familiale de cancer du sein ou un antécé-
dent de mastopathie n’ont pas bénéficié de la baisse du risque de CS (51). Plusieurs études
de modélisation à partir de cohortes de femmes ménopausées ont montré que le contrôle
des facteurs de risque de cancer liés au comportement et donc modifiables (IMC, alcool,
exercice physique, nutrition, tabac) pouvaient contribuer à diminuer le risque de CS (52,
53). Les femmes ayant un IMC élevé ne sont pas plus à risque si elles prennent un THM
que leur risque de base déjà élevé (54). Une étude très récente ayant porté sur la cohorte «
Diet, Cancer and Health » au Danemark, a tenté de calculer les interactions des différents
facteurs de risque pour les différents cancers. Elle confirme que chez les femmes obèses, le
risque n’est pas majoré par le THM (55). En revanche elle montre un effet additif de l’alcool
et du THM tant sur le cancer du sein que le cancer de l’endomètre (55).
Tableau 3. - Facteurs de risque du cancer du sein

Haut risque (multiplié par ≥ 4)


Mutation BRCA, haut risque familial sans mutation (cancers surtout préménopausiques)
• Biopsie avec une hyperplasie atypique, carcinome lobulaire in situ, carcinome canalaire in situ
• Radiothérapie thoracique à un âge jeune
• Densité mammaire élevée (Birad 4) (4 catégories BIRAD selon l’ACR)
Risque intermédiaire (multiplié par ≤ 2)
• Histoire familiale à un âge plus tardif
• Obésité (post-ménopausique) (x 1,2-2,5)
• Diabète (x 1,2-2,0)
• Birad 3 ( x 2)
• Facteurs de la vie reproductive :
o Jeune âge à la menarche (cancer pré-menopausique > post-menopausique) (x 1,20-1,50)
o Age à la première grossesse menée à terme ≥ 35 ans (pré- > post-ménopausique) (x 1,36)
o Nulliparité (x 1,3)
• Sédentarité
• Alcool (x 1,05-1,4)

AUTRES CANCERS
Le cancer de l’ovaire est rapporté dans des études observationnelles et une métaanalyse
comme augmenté par le THM (56). Le niveau de risque est très variable d’une étude à
l’autre et le facteur principal d’ajustement, la prise de contraception orale, manque parfois
(57). Dans la plupart des études observationnelles, ce sont les estrogènes plutôt que le
traitement combiné qui est le facteur de risque, mais ceci n’est pas retrouvé dans la métaa-

Paris, 23-24 novembre 2018


162 Anne GOMPEL

nalyse ainsi que dans une minorité d’études (58). Certaines études trouvent un effet de la
durée mais pas toutes (56, 58). Cet effet disparait à l’arrêt du traitement, mais toutes ces
observations suggérent un possible biais de sélection ou de suivi (58). De manière nouvelle
et intéressante, trois essais randomisés, comportant il est vrai un nombre relativement
faible de femmes, ont montré que le THM chez des femmes ayant été traitées pour un
cancer de l’ovaire de haut grade était associé à une meilleure survie globale et sans récidive
(59–61).

Cancers gastro-intestinaux (GI)


Outre le cancer colorectal, les cancers du haut appareil digestif et du foie auraient une
plus faible prévalence comme le rapporte pour la première fois une étude de cohorte en
population suédoise chez les femmes sous THM (62). Cette étude trouve un risque standar-
disé (SIR) de 0,81 (0,64-1,00) pour le cancer de l’œsophage, de 0,81 (0,65-0,99) pour le foie
et de 0,90 (0,84-0,95) pour le colon. S’agit-il d’un biais lié à une prévalence plus faible de
tabac et d’alcool chez les femmes sous THM ? Malheureusement, ces informations ne sont
pas disponibles dans cette étude. Dans l’ étude danoise précitée, il est observé que le THM
n’aurait un effet protecteur sur le colon qu’en cas d’absence des autres facteurs de risque
(55). Concernant l’effet sur le colon, il semble aussi que les risques varient en fonction des
politiques de dépistage des pays. Ainsi dans l’étude française E3N, chez des femmes ayant
eu des coloscopies, il n’est pas retrouvé d’effet bénéfique sur le cancer du côlon ni sur les
adénomes, mais l’utilisation d’ estrogènes seuls était associée à plus d’adénomes coliques et
moins de cancers (62).

LA PLACE DE LA TIBOLONE
La tibolone est un progestatif du groupe des norstéroïdes ayant des métabolites avec des
propriétés androgéniques et estrogéniques. Elle est efficace (un peu plus faiblement ?) sur les
signes climatériques et la prévention des fractures (63, 64). Elle est aussi associée à un
risque d’AVC dans cette population de femmes âgées et ostéoporotiques (64). Chez des
femmes atteintes de cancer du sein, un essai randomisé a montré plus de récidives chez les
femmes traitées par tibolone (65). On considère donc qu’elle expose à un risque de CS
analogue à celui du THM. Elle n’est pas associée à des mastodynies, et sa potentialité
androgénique peut aider les femmes ne retrouvant pas une libido sous THM classique. C’est
donc un traitement de seconde ligne pour des femmes relativement jeunes sans facteurs de
risque c-v et ayant une intolérance mammaire ou des saignements sous THM classique.

EN PRATIQUE
Lors de la première consultation, il faut évaluer les risques familiaux et individuels c-v,
d’ostéoporose, de cancers et de VTE, tout comme l’importance des troubles climatériques,
génito-urinaires et sexuels. Un risque c-v élevé ou de CS peut contrindiquer le THM
(tableaux 4 et 5). C’est l’occasion de délivrer une information diététique, sur les prises
quotidiennes de calcium, le bénéfice de l’exercice physique, de l’arrêt du tabac, de la
consommation modérée d’alcool, etc… ainsi que sur le suivi gynécologique et mammaire.
Un bilan métabolique est conseillé en raison des modifications périménopausiques. La
mesure de la densité minérale osseuse est recommandée en France seulement en fonction
des facteurs de risque. Aux USA, la recommandation est de la pratiquer après 65 ans en
dehors de facteurs de risque particuliers (66). Le score de FRAX développé par l’OMS et
adapté à de nombreux pays permet de prédire le risque de fracture à 10 ans et le niveau

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ? 163

Table 4. - Contrindications absolues ou relatives au THM


1) Facteurs de risque cardio-vasculaire : calculé selon les scores
- si >10%, haut risque, contrindication absolue
- 5-10% risque modéré (à discuter)
- Diabète (à discuter en fonction de l’état c-v)
- Syndrome métabolique (idem)
2) Antécédents de VTE ou à risque de VTE : E2 oral contrindiqué, discussion d’expert/réunions de
concertation pluridisciplinaires (RCPS) voie extradigestive
3) CS
Haut risque (x 4 fois le risque de la population générale)
si risque moyen (à discuter)
4) Cancer endométrial (en fonction du stade)
5) Méningiome

Table 5. - Alternatives au THM et posologies quotidiennes


Paroxetine: 7,5-25 mg
Venlafaxine : 65-150 mg
Desvenlafaxine:100-150 mg
Citalopram: 10-20 mg
Gabapentin: 900-2400 mg
Pregabalin: 150-300 mg

d’intervention thérapeutique (67). Il existe aussi des scores de prédiction d‘accidents c-v
(68–70). Seul le “SCORE” est validé en Europe. En cas de risque élevé, une exploration
c-v par des moyens à disposition et variant avec les équipes et un avis spécialisé sont
conseillés avant d’introduire le THM (71). Le consensus actuel, à partir des résultats de la
WHI et les données précliniques, est que le THM prescrit avant l’apparition de plaques
athéromateuses est bien toléré voire protecteur, mais en présence d’athérosclérose les
estrogènes sont proapoptotiques sur les plaques instables favorisant un accident c-v.
Concernant le risque de CS, il peut être aussi stratifié comme nous l’avons vu précédem-
ment (tableau 3). L’information complète doit être délivrée à la patiente. Notre Société de
Ménopause, le GEMVI, met à disposition une fiche d’information téléchargeable sur le site
en accès ouvert (gemvi.org).
Cas particuliers
- S
 i la patiente souhaite le traitement, nous privilégions l’E2 par voie transdermique (en
patchs de 37,5 µg/j) ou percutanée (en gel : 0,75 mg-1 mg/j) et la progestérone micronisée
100/200 mg/j) ou la dydrogesterone (10 mg/j) (36, 37, 47, 71). L’adaptation de la posologie
se fera lors de la consultation ultérieure avec surveillance annuelle et réévaluation de la
nécessité du traitement et des doses. La durée des signes climatériques est variable mais
parfois très prolongée.
- E
 n cas d’intolérance aux estrogènes (mastodynies, kystes mammaires, adénomyose), la
progestérone, les progestatifs ou la tibolone peuvent être efficaces sur les bouffées de
chaleur. De plus, la progestérone a un effet favorable sur les troubles du sommeil et
l’anxiété (72, 73).
- P
 our les patientes ne souhaitant pas de THM ou ayant des contrindications, des
alternatives existent. Ceci concerne en particulier les femmes ayant eu un CS.
o Les plus étudiées sont les « Selective Serotonin Receptor Inhibitors » (SSRI) et les
« Selective Noradrenaline Receptor Inhibitors » (Table 5). Ils sont moins efficaces sur

Paris, 23-24 novembre 2018


164 Anne GOMPEL

les bouffées de chaleur que l’estradiol mais supérieurs au placebo. Venlafaxine, Fluoxe-
tine, Paroxetine, Citalopram ou Gabapentin, un ligand du récepteur GABA, ont été
évalués dans des essais randomisés (3). Leur efficacité est relativement lente et prend
parfois 2 à 3 mois pour atteindre son efficacité optimale, et ils ne sont pas dénués
d’effets secondaires.
o Les phytoestrogènes sont commercialisés en vente libre. Leur efficacité est souvent
médiocre. Les contrindications sont les mêmes que pour le THM, notamment en cas
de cancers du sein.
o Des produits à base de plante, d’homéopathie (Serelys®, Actheane® et autres…) sont
disponibles sans contrindication après avoir vérifié qu’il ne contiennent pas de
phytoestrogènes.
o Des traitements non médicamenteux ont été évalués, parfois dans des essais rando-
misés, et peuvent être tentés comme le yoga, l’acupuncture, la relaxation, la médita-
tion, en particulier chez les femmes ayant eu un cancer du sein (74,75). L’injection du
ganglion stellaire semble très efficace mais avec peu de recul (76).
Enfin, il ne faut pas oublier que, si on contre indique ou interrompt le THM, les
troubles génito-urinaires doivent être traitées par des estrogènes vaginaux. Il n’existe
aucun risque de cancer du sein (77) associé à ces traitements et l’administration de proges-
térone n’est pas nécessaire, donc sans contrindications, sauf peut-être chez les femmes sous
inhibiteur de l’aromatase. Il existe deux nouveaux traitements des troubles vulvo-vaginaux
: le laser mais dont l’efficacité et la tolérance à long terme restent à évaluer (78) et l’admi-
nistration intra-vaginale de DHEA à 0.50 % (6.5 mg de DHEA ; PRASTERONE®), en
cours de développement.
Une situation particulière que nous n’aborderons pas ici est celle des femmes ayant
une insuffisance ovarienne prématurée : les risques c-v et ostéoporotiques importants
dans cette population font indiquer un THM jusqu’à l’âge normal de la ménopause même
en cas de risque mammaire élevé. C’est notamment le cas des femmes porteuses de
mutations de BRCA ayant subi une ovariectomie prophylactique que l’on traite sous
surveillance mammaire jusqu’à l’âge d’environ 50 ans.

CONCLUSION
Le THM est le traitement le plus efficace pour les troubles climactériques et contribue à
la prévention de l’ostéoporose postménopausique. Le choix des produits administrés peut
conditionner la présence ou l’absence de complications thromboemboliques et mammaires.
Il est indispensable d’évaluer les risques individuels avant sa prescription. Des alternatives
au THM existent mais d’efficacité moindre. La consultation de ménopause est une
occasion précieuse pour délivrer une information et une éducation de prévention des
risques à cette période de la vie afin d’améliorer les comportements pour diminuer les
risques c-v et de cancers.

Université Paris Descartes,


Gynécologie Endocrinienne,
123 bd du Port Royal, Paris, 75014.

Adresse pour la correspondance : Professeur Anne Gompel (adresse ci-dessus)


Email : anne.gompel@parisdescartes.fr

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Traitement hormonal de la ménopause : où en est-on en 2018 ? 165

n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n
MENOPAUSE HORMONE THERAPY : WHERE DO WE STAND IN 2018 ?
by Anne GOMPEL (Paris - France)

ABSTRACT
The use of menopause hormone therapy (MHT) has been dramatically challenged these
last years. This alteration was due to the publication of two randomized trials from the
Women Health Initiative. The initial publication of the WHI, in the summer of 2002,
reported more severe events in women treated than in the control group. Those women were
actually older than the usual population candidate to MHT to treat their climacteric
symptoms. Subsequent publications from the WHI reported however that cardio-vascular
events were not increased in women closer to menopause, in the ten years following it.
Furthermore two metaanalyses as well as the WHI reported that mortality was lower in
women treated than in the control group at the age of 50-60 years or ten years after
menopause. In the estrogen only trial, the number of breast cancers was decreased. Obser-
vational studies from France and UK showed that by using transdermal estradiol the risk of
thromboembolic events and stroke could be alleviated. Furthermore, micronized progeste-
rone and dydrogesterone were associated with a lower risk of breast cancer than with
synthetic progestin. Other studies strongly argue for treating women with premature ovarian
failure in order to prevent c-v risk. Given that, only 10% of postmenopausal women are
treated in France. In addition, only 5% of postmenopausal received topical estrogens (not
associated with any risk) despite the fact that more than a half should beneficiate from it. The
drastic decrease does not appear to be scientifically justified.

Key-words : Brest cancer, cardio-vascular risk, estrogens, progestins, venons thrombosis.

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therapy. Obstet Gynecol. 2009; 113: 65‑73.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


QUELS TRAITEMENTS
AVANT LA SURRÉNALECTOMIE
POUR PHÉOCHROMOCYTOME ?

par Claude LENTSCHENER (Hôpital Cochin, Paris)

Des recommandations largement diffusées, qui reflètent les opinions des auteurs mais ne
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

sont supportées par aucune étude scientifiquement conduite, attribuent à la prescription


généralisée de drogues hypotensives huit à 15 jours avant l’opération et à la réparation
d’une hypovolémie réfutée par le peu d’études disponibles les bons résultats actuellement
rapportés de la surrénalectomie pour phéochromocytome. Les progrès dans l’imagerie
permettant la localisation précise de la tumeur, les techniques chirurgicales mini invasives,
la surveillance hémodynamique par voie artérielle sanglante et la disposition de drogues
vasoactives et anti arythmiques puissantes à effet quasi immédiat et de courte durée
d’action peuvent aussi expliquer ces bons résultats. Avant la chirurgie, un traitement
spécifique est indiqué pour (a) les hypertensions artérielles menaçantes à court terme et les
défaillances viscérales associées, les dysrythmies menaçantes, (b) les diabètes associés et
(c) les femmes enceintes. Pour les patients n’entrant pas dans ce cadre et devant être opérés
d’une surrénalectomie pour phéochromocytome, excepté si on décide de se plier à des
pressions ou à des habitudes locales, aucune mesure prophylactique spécifique n’est justifiée
par les données disponibles.

Mots-clés : Phéochromocytome - Hypertension artérielle - Hypotension artérielle - Hypovolémie - Arythmie -


Traitement péri opératoire.

I.   LIMITES DES DONNÉES DE LA LITTÉRATURE


Le phéochromocytome est une maladie rare qui rend compte de moins de 1 pour cent
des hypertensions artérielles, et très hétérogène du fait des différences dans les quantités
relatives d’hormones libérées (1). Des statisticiens ont calculé qu’il faudrait inclure de
3 000 à 8 000 patients dans une étude prospective pour mettre en évidence une améliora-
tion significative de la mortalité opératoire par rapport à une mortalité supposée actuelle
de 1 % (2). Des études cliniques scientifiquement conduites et de puissance suffisante sont
donc impossibles à envisager et toutes les recommandations pour la prise en charge des
patients opérés d’une surrénalectomie pour phéochromocytome comportent une part
majeure de subjectivité (1-9). La littérature qui traite de la prise en charge préopératoire
du phéochromocytome n’échappe pas à cette limitation (1-9). A notre connaissance, cette
littérature est intégralement basée sur (a) le recueil a posteriori de données récoltées sur
de très longues périodes souvent supérieures à 10 années (7), (b) des études qui n’incluent
jamais de groupe contrôle individualisé après un tirage au sort (1-9), (c) des études rétros-
pectives où les groupes individualisés a posteriori ne sont souvent pas homogènes et
incluent de nombreux facteurs confondants (8), ou (d) sur des cas cliniques isolés ou des

Paris, 23-24 novembre 2018


170 Claude LENTSCHENER

petites séries de cas cliniques recueillies dans des centres parfois géographiquement très
éloignés au sein desquels les pratiques diffèrent et ne sont pas supportées par les preuves
(8, 10, 11). Des recommandations internationales péremptoires sont néanmoins régulière-
ment publiées (1, 3). Dans ce texte, nous rapportons uniquement l’analyse du médecin qui
prend en charge la période per- et postopératoire immédiate, sans interférer avec des considéra-
tions spécifiquement endocrinologiques ou du ressort des spécialistes de l’hypertension artérielle.
La prise en charge des cancers métastasés et les indications des inhibiteurs de la tyrosine
hydroxylase sont exclues de cette analyse.

II.   OBJECTIFS D’UNE PRÉPARATION SPÉCIFIQUE AVANT UNE


SURRÉNALECTOMIE POUR PHÉOCHROMOCYTOME ?
Une préparation spécifique en vue d’une surrénalectomie pour phéochromocytome ne
se justifie que si elle limite ou supprime la morbidité et/ou la mortalité spécifiques associées
à cette procédure ou/et à cette maladie.
En préopératoire elle doit prévenir ou traiter :
- les complications cardiovasculaires de l’hypertension artérielle (HTA) aiguë ou
chronique, essentiellement les crises hypertensives, les accidents vasculaires cérébraux
hémorragiques, les arythmies, les ischémies du myocarde, les incompétences myocar-
diques aiguës ou chroniques ;
- plus rarement un diabète induit ;
- très exceptionnellement, une constipation opiniâtre attribuée à l’effet direct des
catécholamines sur les récepteurs α du tube digestif et/ou à la sous-perfusion du tube
digestif résultant à la vasoconstriction splanchnique pouvant se compliquer d’iléus,
d’ischémies hémorragies et perforations du tube digestif ;
- au cours de la grossesse, une mortalité maternelle et fœtale accrue (5, 10-18).
En peropératoire, elle doit limiter :
- les conséquences hémodynamiques de la libération des catécholamines associée aux
manipulations tumorales ;
- la chute de la pression artérielle associée au sevrage en catécholamines lors de la surré-
nalectomie (2, 4, 8, 19).

III.   LES « RECOMMANDATIONS COURANTES »


En dépit des importantes limitations de la littérature, les bons résultats du traitement
chirurgical du phéochromocytome sont encore en grande partie attribués au respect de
recommandations contraignantes publiées par les sociétés savantes d’endocrinologie et par
des équipes faisant autorité (1, 3, 5). Ces recommandations incluent :

A.  L’administration préopératoire systématique de drogues hypotensives (1,3,7).


La mortalité de la surrénalectomie pour phéochromocytome est passée de 40 % aux
premiers temps de cette chirurgie (6) à un taux quasiment nul dans les séries récentes
tandis que se généralisait l’administration préopératoire de drogues hypotensives même à
des patients normotendus (1, 3, 6). Une relation entre ces deux évènements a été faite
donnant lieu à des recommandations qui ne nous paraissent pas avoir été réévaluées en

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Quels traitements avant la surrénalectomie pour phéochromocytome ? 171

tenant compte de données complémentaires de la littérature (1, 3, 4, 13). Dans une étude
récente, un saignement chirurgical accru a même été associé à l’absence de préparation par
la phénoxybenzamine sans analyse critique de l’information rapportée (13). L’efficacité
supérieure des α-bloqueurs est alléguée dans de nombreuses séries (1-3, 7). Vera et al.
considèrent qu’il y a une perte de chance pour les patients qui sont traités moins de 15
jours sans fournir la moindre preuve pour supporter cette opinion d’auteurs (3).

B.  La correction d’une hypothétique hypovolémie.


Cette hypovolémie est attribuée à la vasoconstriction chronique résultant de la libéra-
tion de noradrénaline (1, 4, 6). Des équipes regardent l’expansion volémique préopératoire
comme une autre mesure essentielle ayant contribué à diminuer l’instabilité hémodyna-
mique peropératoire, la chute de la pression artérielle qui suit la surrénalectomie et la
mortalité post opératoire (1, 6). De nombreuses équipes assurent des perfusions abondantes
en ambulatoire ou en hospitalisation, parfois de courte durée, parfois jusqu’à 8-10 jours
avant l’intervention chirurgicale (6, 20).

IV.   UNE ANALYSE CRITIQUE DE LA LITTÉRATURE CONDUIT À


ENVISAGER PLUS SÉLECTIVEMENT LE SUIVI DE CES
RECOMMANDATIONS.

A.  Les patients porteurs d’un phéochromocytome sont-ils hypovolémiques ?


L’absence d’études actualisées récentes de ce point est une lacune majeure de la littéra-
ture (4). En 1966, le volume plasmatique de 15 patients porteurs d’un phéochromocytome
a été mesuré en utilisant de l’albumine marquée par 125I, avant administration d’un
hypotenseur (21). Treize patients sur 15 avaient un volume plasmatique normal (21). Plus
récemment, l’étude des variations de la courbe de la PA sous ventilation mécanique a été
utilisée pour mesurer la composante négative (δ−down) des variations de la pression
artérielle systolique (PAS) chez 13 patients opérés d’une surrénalectomie pour phéochro-
mocytome (22). Après la surrénalectomie la stabilité du δ−down et l’absence de corréla-
tion entre les variations de la PAS et le δ−down suggéraient que (a) l’hypovolémie n’était
pas un élément fondamental pour rendre compte de la chute de la PA qui suit la surréna-
lectomie (22) et que (b) la chute de la PA était en rapport avec une vasodilatation et non
une hypovolémie (22). La prise en charge de cette situation est bien documentée dans la
littérature anesthésique (23). Ainsi après la réalisation d’un blocage du système nerveux
central par un anesthésique local au cours des anesthésies rachidiennes, les recommanda-
tions actuelles insistent sur la vasodilatation qui en résulte et sur l’administration d’un
vasopresseur pour traiter la chute fréquente de la PA (23).

B.  L’expansion volémique préopératoire a-t-elle modifié les suites opératoires ?


L’appréciation critique de cette mesure est soumise aux mêmes limitations que précé-
demment mentionné. Néanmoins l’absence de bénéfice de l’expansion volémique préopé-
ratoire est fortement suggérée par les résultats rapportés dans la littérature qui montrent
constamment une mortalité identique proche de zéro au décours des surrénalectomies
réglées pour phéochromocytome quelles que soient les protocoles adoptés pour les apports
liquidiens (a) limités aux standards de la chirurgie abdominale (4), (b) visant à optimiser
un monitorage hémodynamique (19), ou (c) empiriquement très accrus par rapport aux
recommandations (20).

Paris, 23-24 novembre 2018


172 Claude LENTSCHENER

C.  L’administration préopératoire systématique de drogues hypotensives a-t-elle


simplifié la période peropératoire ?
À notre connaissance, tous les textes qui traitent du bénéfice de l’administration préopé-
ratoire systématique de diverses drogues hypotensives comportent les limitations majeures
signalées en préambule. Ainsi, Plouin et al. ont rapporté une analyse multivariée réalisée
sur les données de 165 patients opérés d’une surrénalectomie pour phéochromocytome (5).
Les auteurs ont conclu que le niveau de la PA préopératoire était une variable indépen-
dante associée à la survenue des complications de la surrénalectomie pour phéochromocy-
tome (5). En fait l’intégralité des complications alléguées étaient, dans l’étude de Plouin et
al., sans rapport possible avec une HTA, incluant des lésions accidentelles d’organes
(uretère, vascularisation hépatique), des manifestations anaphylactiques, des hypoventila-
tions peropératoires et des complications de l’intubation trachéale (5). Brunaud et al. ont
relevé les variables pré- et peropératoires de trois séries de patients (n=155) traités systéma-
tiquement avant la surrénalectomie par des α-bloqueurs (n=110), des inhibiteurs des
canaux calciques (n=41) ou ne recevant pas de préparation (n=4) (8). La PA moyenne
était significativement plus basse en préopératoire immédiat chez les patients recevant un
α-bloqueurs (P < 0.0001) (8). Mais cette différence statistiquement significative (96±14  mm
Hg vs 104±15 mm Hg) n’avait pas d’intérêt clinique (8). Le même nombre de pics hyper-
tensifs > 160 mm Hg et de chutes de la PA < 60 mm Hg a. été relevé dans les trois groupes
(8). L’étude de Brunaud et al. est représentative des séries publiées. Dans toutes les séries de
surrénalectomies pour phéochromocytome, les groupes étudiés ne sont pas homogènes, la
PA préopératoire n’est jamais normalisée chez tous les patients, des pics élevés d’HTA sont
rapportés durant l’intervention, et pourtant la mortalité de la chirurgie réglée est proche
de zéro, quelles que soient les modalités de la prise en charge préopératoire (2, 4, 7, 8, 19).

D.  L’administration préopératoire de drogues hypotensives a-t-elle influencé la


période préopératoire ?
À cet égard, il est important de noter que quelques circonstances bien sélectionnées ont
probablement tiré un bénéfice d’une prise en charge préopératoire adaptée.

a) Les hypertensions artérielles sévères.


En l’absence d’études spécifiques de ce facteur au cours du phéochromocytome, les
recom­mandations des centres qui prennent en charge les patients hypertendus indiquent
que certaines circonstances exposent à un risque très accru de morbidité et/ou de mortalité
à court terme (16). Ces sociétés recommandent d’administrer à très court terme un traite-
ment anti hypertenseur aux patients dont la pression artérielle systolique est ≥ à 185  mm
Hg et la pression artérielle diastolique est ≥ 115 mm Hg, et/ou qui présentent une altération
viscérale résultant de l’HTA, essentiellement une incompétence myocardique chronique
ou aiguë et/ou un accident vasculaire hémorragique ou des signes fonctionnels d’intolé-
rance à l’HTA dont on peut probablement rapprocher les signes fonctionnels associés au
phéochromocytome : céphalées, acouphène, palpitations, sueurs profuses, pâleur cutanée
(16). Il est logique d’administrer un hypotenseur en préopératoire à ces patients.

b) Les hypertensions artérielles modérées.


En l’absence d’études spécifiques de ce facteur chez les patients porteurs d’un phéochro-
mocytome, on ne peut que se référer aux études conduites chez des hypertendus en dehors
du phéochromocytome (14). Loon et al. ont observé durant 5 ans 12 660 patients atteints

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Quels traitements avant la surrénalectomie pour phéochromocytome ? 173

d’une HTA modérée (PAS ≤ 160 mmg) et recevant après tirage au sort soit une association
sartan + diurétique soit un placebo (14). Aucune différence en termes de morbidité et de
mortalité n’a été relevée au cours de la période d’observation de cinq ans, entre les deux
groupes (14). Cette étude suggère qu’on doit donc pouvoir s’abstenir de traiter une HTA
modérée durant les trois semaines qui précèdent la surrénalectomie pour phéochromocy-
tome si on a pu le faire durant cinq ans sur une telle population de patients (4, 14).
c) La grossesse.
En l’absence de grandes séries homogènes, plus de 350 cas cliniques publiés montrent
que la normalisation de la PA, l’optimisation hémodynamique sensée optimiser la perfu-
sion utero placentaire, et le choix adéquat de la date de l’accouchement, par césarienne en
dépit de cas rapportés d’accouchement par voie basse qui ont eu une issue favorable, ont
été associés à une amélioration du pronostic maternel et fœtal (10). Toutes les drogues
hypotensives ont été utilisées dans la littérature, pour traiter les HTA dans ce contexte de
phéochromocytome diagnostiqué au cours de la grossesse, avec un bon résultat, incluant
la phénoxybenzamine, la prazocine, la doxazocine, les inhibiteurs des canaux calciques, le
sulfate de magnésium et les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (10). Les β-bloqueurs
peuvent être nécessaires pour contrôler une arythmie ou une tachycardie (10). Les divers
auteurs rapportent que les β−bloqueurs sélectifs comme le métoprolol ou l’aténolol doivent
être préférés au propanolol qui a été rendu responsable chez le fœtus de retards de matura-
tion, de bradycardies et d’hypoglycémies (10). Il semble que l’attention portée aux patientes
soit plus importante que la catégorie de drogue hypotensive utilisée (10).
d) Les patients hospitalisés en unités de soins intensifs.
Des défaillances circulatoires aiguës ou chroniques peuvent révéler un phéochromocy-
tome et conduire des patients en unité de soins intensifs (11, 12, 15, 16). Sur 140 phéochro-
mocytomes colligés dans un centre unique par Giavarini et al., 15 patients ont présenté une
insuffisance circulatoire aiguë inaugurale, incluant un œdème aigu du poumon chez 12
patients, et/ou un choc cardiogénique chez 10 patients, et/ou une balonnisation apicale ou
basale du ventricule gauche chez 6 patients et/ou le recourt à un support hémodynamique
chez 8 patients (11). La surrénalectomie a constamment été réalisée après la normalisation
de la fraction d’éjection du ventricule gauche, s’élevant sous traitement de [médiane (IQ)]
30 % (23–33 %) à 71 % (50–72 %). Aucun patient n’est décédé (11). En revanche, dans la
série de 25 patients rapportée par Scholten et al., dix patients ont été opérés en urgence et
15 patients après normalisation de l’état circulatoire à la discrétion exclusive des médecins
responsables (15). L’hospitalisation a été significativement plus longue et le taux des compli-
cations significativement plus élevé chez les patients opérés en urgence (15). Un mort a été
observé dans le groupe des patients opérés en urgence (15). En l’absence d’études contrô-
lées, il parait raisonnable de différer la chirurgie jusqu’à la normalisation de l’état circula-
toire chez les patients hospitalisés en unités de soins intensifs lorsque c’est possible (11, 15).

V.   NÉCESSITÉ D’ABORDER CETTE QUESTION DIFFÉREMMENT.


Excepté pour les phéochromocytomes qui compliquent les grossesses, les patients
porteurs d’une HTA menaçante à très court terme, les patients hospitalisés dans une unité
de soins intensifs, ou porteur d’un diabète menaçant, il n’existe aucune étude supportant
que les mesures prophylactiques habituellement recommandées aient influencé les suites
de la surrénalectomie pour phéochromocytome (1, 3, 4).

Paris, 23-24 novembre 2018


174 Claude LENTSCHENER

En revanche, l’amélioration des résultats de la prise en charge de la surrénalectomie


pour phéochromocytome peut être expliquée autrement (4, 6, 9). Les pertes sanguines
peropératoires atteignant couramment 20 litres de sang étaient liées aux abords chirurgi-
caux larges dans les premières séries de surrénalectomies pour phéochromocytome (6).
Elles n’apparaissent plus aujourd’hui dans les séries rapportées du fait des progrès de l’ima-
gerie qui ont permis une localisation plus précise des lésions (4, 9), de l’approche laparos-
copique qui s’est généralisée (9), et des avancées de la technique chirurgicale (9). De plus,
Joris et al. ont bien documenté le fait que (a) les élévations menaçantes de la PA peropé-
ratoire sont directement corrélées à la libération peropératoire d’adrénaline et de noradré-
naline lors de l’augmentation de la pression intraabdominale due à la mobilisation du
patient, les réflexes de toux provoqués par l’intubation, la mise sous ventilation mécanique,
la création du pneumopéritoine, et la manipulation tumorale (19) ; (b) les baisses me­na­
çantes de la PA sont dues à la chute des taux plasmatiques de ces médiateurs lors de la
surrénalectomie (19). Quelle que soit la PA enregistrée avant l’induction de l’anesthésie
générale, un arsenal thérapeutique hautement efficace pour le diagnostic et le traitement
des variations hémodynamiques peropératoires est disponible et peut rendre compte à lui
seul des bons résultats de la chirurgie du phéochromocytome incluant (4) :
• u n cathéter artériel qui permet la détection et le traitement immédiat des désordres
hémodynamiques peropératoires (4) ;
• la disponibilité de nombreuses drogues vasoactives et anti arythmiques détaillées
dans le tableau 1 avec production des références, qui permettent de traiter immédia-
tement les pics d’HTA, les chutes de la PA, les troubles du rythme cardiaques. Toutes
les drogues figurant sur ce tableau ont été utilisées avec efficacité dans les séries de
surrénalectomies réglées pour phéochromocytome et sont associées à une mortalité
proche de zéro dans la chirurgie réglée (4).

Tableau 1. - Drogues vasoactives et anti arythmiques à effet immédiat dont l’efficacité a été
rapportée dans le traitement peropératoire des accès d’hypertension artérielle, des troubles du
rythme cardiaque, et des chutes de la pression artérielles qui suivent la surrénalectomie.

Hypertension artérielle
- Anesthésiques volatiles
• Desflurane
Kinney et al. J Cardiothorac Vasc Anesth 2002
• Isoflurane
- Phentolamine Mc Millian et al. J Health Syst Pharm 2011
- Nitroprussiate de Sodium Groeben et al. Br J Anaesth 2017
- Trinitrine Hamilton et al. Can J Anaesth 1997
- Nicardipine Joris et al. Anesth Analg 1992
- Uradipyl Gosse et al. J hum Hypertens 2005
- Sulfate de Magnesium James et al. Br J Anaesth 1989

Chute de la pression artérielle


- Noradrénaline Desmont et al. Br J Anaest 2005
- Vasopressine Roth et al. Anesthesiology 2007

Tachycardies et dysryhmies
- Lidocaine
Desmont et al. Br J Anaest 2005
- Bêtabloqueurs

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Quels traitements avant la surrénalectomie pour phéochromocytome ? 175

VI.   PATHOLOGIES ADDITIONNELLES.

A.  L’hyperglycémie.
Le phéochromocytome est parfois associé à un diabète qu’il faut rechercher et traiter en
préopératoire (17). La sécrétion prédominante d’adrénaline semble un facteur favorisant
(17).

B.  Les iléus.
Ainsi que mentionné plus haut, des séries de la littérature rapportent que des iléus
consé­quences d’un effet direct des catécholamines (a) sur les récepteurs-α du tube digestif
ou (b) sur la vasoconstriction splanchnique peuvent entrainer des complications me­na­
çantes (18). Leur diagnostic doit entrainer la mise en route d’un traitement symptoma-
tique local (18).

VII.   D
 ES DROGUES HYPOTENSIVES DOIVENT-ELLES ÊTRE
PRIVILÉGIÉES ?
Déciderait-on d’administrer un traitement hypotenseur préopératoire soit par principe
en accord avec les recommandations des sociétés savantes, soit dans le cadre d’une indica-
tion indiscutable, les opinions d’experts avec les limitations déjà évoquées dans ce texte
allèguent une plus grande efficacité des agents α-bloquants en termes de la normalisation
de la PA préopératoire et de la diminution de la fréquence et du degré des pics d’HTA
peropératoires (1, 3). A notre connaissance, aucune étude scientifique ne supporte cette
opinion (2, 4). La phénoxybenzamine, α-bloqueur de longue durée d’action, semble être
associée à des chutes de la PA plus fréquentes et plus prononcées après la surrénalectomie
que les autres agents hypotenseurs (2). Cet agent n’est plus disponible en France (4). En
fait, tous les agents hypotenseurs ont été administrés avant la surrénalectomie pour
phéochromocytome incluant les α-bloqueurs de longue et courte durée d’action, les
inhibiteurs des canaux calciques, et même les inhibiteurs de l’enzyme de conversion et les
sartans (2-5, 7, 8, 19). Un examen attentif des résultats des études montre que, quelle que
soit la drogue utilisée, la PA préopératoire n’est jamais constamment normalisée chez tous
les patients, des pics d’HTA de niveaux et de fréquence variée sont enregistrés, des chutes
de la PA de fréquence et de degré variable surviennent après la surrénalectomie, des
troubles du rythme cardiaque doivent être traités, et……. toutes les études des trente
dernières années rapportent une mortalité proche de zéro dans la chirurgie réglée quelle
que soit l’hypotenseur prescrit et même si aucune drogue n’est administrée (4). L’absence
d’homogénéité des groupes devrait interdire leur comparaison (1-9). La titration soigneuse
de l’efficacité de la drogue choisie est plus importante que le type de drogues administrée
(4). Il faut néanmoins noter que des chutes préoccupantes de la PA nécessitant le recours
à des catécholamines ont été rapportées en chirurgie générale après l’induction anesthé-
sique chez des patients recevant des inhibiteurs de l’enzyme de conversion et des sartans
(24). En l’absence d’études conduites chez les patients porteurs d’un phéochromocytome il
est prudent de limiter l’administration de ces agents aux patients pour lesquels aucune
autre alternative est possible (24). On se rappellera, qu’en l’absence d’un traitement
hypo­tenseur efficace, un β-bloqueur a induit une incompétence myocardique au décours
d’une poussée d’HTA chez des patients porteurs d’un phéochromocytome (4, 16).

Paris, 23-24 novembre 2018


176 Claude LENTSCHENER

VIII.   FAUT-IL RÉALISER DES TESTS CARDIOLOGIQUES DE DÉPISTAGE ?


A.  Échocardiographie systématique ?
Des recommandations formalisées d’experts rappellent que la surrénalectomie pour
phéochromocytome représente moins d’un pour cent des interventions chirurgicales réali-
sées chez des patients hypertendus (25). En conséquence, chez ces patients les examens
cardiologiques pré interventionnels sortent du cadre des références formalisées d’experts et
ne peuvent s’inscrire que dans une stratégie de dépistage qui relève de l’avis du cardiologue
(25). Le risque vital spécifiquement lié à cette chirurgie ne les justifie pas en l’absence de
limitation fonctionnelle (4,25). A notre connaissance une seule étude a évalué de façon
rétrospective un groupe de 63 patients opérés d’une surrénalectomie pour phéochromocy-
tome (26). Aucune anomalie susceptible d’influencer la prise en charge periopératoire ne
fut détectée sur l’échocardiographie transthoracique préopératoire chez les patients qui ne
présentaient pas de douleur thoracique ou de limitation fonctionnelle (26).
B.  L’IRM myocardique ?
Ferreira et al. ont réalisé un examen du cœur par résonance magnétique (IRM) systéma-
tiquement chez 29 patients porteur d’un phéochromocytome au cours du bilan de leur
maladie (27). Ils ont comparé les données recueillies par cette IRM à celles de (a)
31  patients après le traitement chirurgical de leur phéochromocytome, (b) 51 témoins
sains, et (c) 14 patients porteurs d’une hypertension artérielle essentielle (27). Chez les
patients porteurs d’un phéochromocytome mais asymptomatiques et ambulatoires, des
lésions diffuses ou focales ont été mises en évidence sur 10 à 27 % de la surface du myocarde
chez 57 % des patients ainsi qu’une une fixation tardive mais réversible et non ischémique
du gadolinium chez 59 % des patients (27). Ces lésions sont associées à une baisse certes
statistiquement significative des indices de fonction systolique et diastolique du ventricule
gauche qui en fait ne sont pas cliniquement significatives avec une fraction d’éjection du
ventricule gauche mesurée à 60±9 % (27). Sur les patients ne présentant pas de limitation
fonctionnelle, la plupart des lésions aiguës ont disparu avec le traitement chirurgical
laissant la place à une fibrose cicatricielle sans retentissement clinique (27). En dehors
d’un protocole de recherche ou de circonstances cliniques le suggérant il n’y a pas de
raison aujourd’hui d’exiger une IRM myocardique dans le cadre du bilan pré anesthésique
d’un phéochromocytome chez des patients asymptomatiques (27).

IX. CONCLUSIONS
• L
 ’essentiel des traitements recommandés pour préparer un patient à être opéré d’une
surrénalectomie pour phéochromocytome ne repose pas sur des preuves.
• L
 a surrénalectomie va guérir définitivement les patients porteurs d’un phéochromo-
cytome donc confier les patients au chirurgien dans les plus brefs délais est une
priorité.
•
Repousser le traitement chirurgical pour optimiser une PA préopératoire non
menaçante ou traiter une hypovolémie réfutée par toutes les études n’est pas justifié.
• E
 n dehors de situations menaçantes à court terme et parfaitement définies, incluant
les HTA menaçantes par leurs niveaux de PA et/ou les défaillances viscérales
associées, et la grossesse, le bénéfice de l’administration préopératoire systématique
de drogues hypotensives est ni justifié ni démontré.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Quels traitements avant la surrénalectomie pour phéochromocytome ? 177

• L
 a notion d’hypovolémie associée au phéochromocytome est réfutée par le petit
nombre d’études disponibles.
• L
 es progrès de l’imagerie préopératoire, de la technique chirurgicale et la disponibilité
de drogues vasoactives et anti arythmiques efficaces rendent probablement plus
compte de l’amélioration du pronostic de la maladie que l’administration préopéra-
toire généralisée de drogues hypotensives. Des études supplémentaires sont néces-
saires pour le prouver.

Service d’Anesthésie Réanimation


Hôpital Cochin, Assistance Publique, Hôpitaux de Paris
et Université Paris Descartes
27, rue du Faubourg Saint Jacques, 75014 Paris

Adresse pour la correspondance : claude@lentschener.com

WHICH TREATMENT PRIOR TO PHEOCHROMOCYTOMA REMOVAL ?


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Claude LENTSCHENER
(Paris - France)

ABSTRACT
Widespread guidelines, only reflecting authors’ opinions and which are not supported by
scientific proofs, attribute the good results of adrenalectomies for pheochromocytoma to the
administration of hypotensive drugs eight to 15 days prior to surgery and to the treatment of
an alleged hypovolemia refuted by the few available data. However, improvements in
imaging allowing adequate tumor localization, mini invasive surgical approaches, hemody-
namic monitoring using an arterial catheter and availability of potent, on/off vasoactive and
antiarrhythmic agents are also likely to account for the good results of surgery. Prior to
surgery specific care is mandatory for (a) life-threatening arterial hypertension, related organ
dysfunction and dysrhythmia, (b) diabetes mellitus, (c) pregnancies. For all other patients,
except if it has been decided to comply with local pressures or habits, available data do not
warrant the administration of any prophylactic measures.

Key-words : Phéochromocytoma - Blood pressure: increase - Blood pressure: decrease - Hypovolémia –


Arythmia - Peri operative care.

BIBLIOGRAPHIE

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178 Claude LENTSCHENER

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


INFERTILITÉ DES HOMMES NÉS AVEC UNE
HYPERPLASIE CONGÉNITALE DES SURRÉNALES
PAR DÉFICIT EN 21 HYDROXYLASE : MÉCANISMES,
PRÉVENTION ET DÉFIS DIAGNOSTIQUES ET
THÉRAPEUTIQUES

par Jacques YOUNG (Le Kremlin-Bicêtre)

Chez les garçons nés avec une forme classique d’hyperplasie congénitale des surrénales
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

par déficit sévère en 21-hydroxylase (HCS/DC-21OH) il existe un risque important


d’infertilité à l’âge adulte. L’infertilité chez ces hommes malades est expliquée par trois
mécanismes qui peuvent être intriqués : 1) Le déficit en gonadotrophines hypophysaires qui
sont freinées par l’effet anti-gonadotrope synergique des précurseurs stéroïdiens comme la
progestérone, la 17-hydroxyprogestérone et l’androstènedione via sa conversion extra-
surrénalienne en testostérone, 2) les obstacles sur les voies excrétrices testiculaires (rete
testis), 3) la destruction du parenchyme testiculaire normal, et donc des tubes séminifères,
secondaire à la fois à l’ischémie testiculaire induite par la compression des vaisseaux du hile
et à l’envahissement tumoral. Les deux derniers mécanismes sont liés à l’apparition de
tumeurs testiculaires bilatérales d’origine surrénale. Ces tumeurs appelées inclusions
sur­ré­
naliennes intra-testiculaires (ISIT) sont fréquentes et peuvent apparaître dès
l’enfance. Elles doivent être dépistées systématiquement par la palpation et l’échographie
testiculaires. Leur présence est un facteur péjoratif en terme de fertilité et doit donc être
prise en charge de façon spécifique par des experts du domaine. La prévalence importante
de l’infertilité chez les hommes nés avec une HCS/DC-21OH pose la question de la
pré­servation de la fertilité. Celle-ci est proposée systématiquement dans des centres experts
dès qu’un spermogramme est réalisé. La réalisation d’un spermogramme est recommandée
dès la mise en place de la puberté, d’autant plus que des ISIT ont été dépistées. Une
enquête récente réalisée en France dans des centres hospitaliers universitaires montre que
le dépistage des ISIT, le diagnostic, la prise en charge de l’infertilité ainsi que la préservation
de la fertilité ne sont effectués que chez une minorité de ces hommes avec bloc en
21-hydroxylase sévère. Une prise de conscience de ce problème par les spécialistes
endocrinologues qui suivent ces patients semble nécessaire pour améliorer leur prise en
charge à l’âge adulte.

Mots-clés : Bloc en 21-hydroxylase, hyperplasie congénitale des surrénales, inclusions surrénaliennes intra-
testiculaires, TART, CYP21A2, azoospermie, infertilité, insuffisance surrénale, Hypogonadisme hypogonadotrope.

I. INTRODUCTION
L’hyperplasie congénitale des surrénales (HCS) par déficit classique en 21-hydroxylase
(DC-21OH) est une maladie rare caractérisée par une altération enzymatique qui empêche
la synthèse normale du cortisol et de l’aldostérone par la corticosurrénale et provoque

Paris, 23-24 novembre 2018


180 Jacques YOUNG

ainsi une insuffisance surrénale primitive (1). Ce bloc enzymatique est responsable aussi
de l’accumulation de précurseurs stéroïdiens qui vont induire une surproduction pré- et
post-natale d’androgènes. Chez les foetus de sexe féminin l’excès de testostérone va induire
une masculinisation des organes génitaux externes et donc une anomalie du développe-
ment sexuel (DSD). Les DSD et l’impact majeur de la maladie chez les filles, adolescentes
et femmes nées avec un HCS/DC-21OH ont fait l’objet de plusieurs publications et revues
(1-3) et ne seront pas abordées ici. Un des points commun chez les femmes et les hommes
atteints de HCS/DC-21OH est l’aromatisation en estrogènes des androgènes produits en
excès par la surrénale. Cette conversion va entraîner une exposition excessive aux estro-
gènes qui va accélérer la maturation osseuse et aboutir, en l’absence de traitement efficace,
à une petite taille par fusion précoce des cartilages de conjugaison (4).
Chez les hommes nés avec HCS/DC-21OH l’impact de la maladie sur la fertilité a été
moins étudié que chez la femme (1, 5).
L’objectif de cette brève revue est d’analyser, sur la base de la littérature existante, les
conséquences, chez les hommes, de l’HCS/DC-21OH sur la fertilité, le fonctionnement de
l’axe gonadotrope et d’en discuter l’impact sur les fonctions testiculaires endocrines et
exocrines. Le but final est d’apporter aux endocrinologues des éléments pratiques permet-
tant d’optimiser la prise en charge chronique de ces patients, depuis la délicate phase de
transition enfance ➞ puberté ➞ âge adulte, puis tout le long de leur existence.

II. PRÉVALENCE
L’HCS/DC-21OH est une maladie rare dont la prévalence a été évaluée entre 1/10 000
à 1/18 000 au niveau international et à 1/15 700 en France, si on se base sur les études de
dépistage néonatal (1, 6). Sa fréquence est similaire dans les deux sexes ce qui est logique
étant donné sa transmission génétique de type autosomique récessive.

III. BASE GÉNÉTIQUE


L’apparition d’une HCS/DC-21OH est causée par des mutations bi-alléliques du gène
CYP21A2 (OMIM 201910) codant pour l’enzyme 21-hydroxylase (21OHase), protéine
com­po­sée de 495 acides aminés (1, 7). Le gène CYP21A2, identifié en 1984, contient
10  exons ; il est localisé au niveau du chromosome 6 (région 6p21.3) à côté du pseudogène
CYP21A1P (8, 9). Le mode de transmission de l’HCS/DC-21OH est autosomique récessif
c’est-à-dire que la maladie n’apparaît que quand les 2 allèles sont mutés alors que les hétéro-
zygotes simples sont indemnes (voir plus loin) (1, 7, 10). La fréquence relativement élevée
dans la population générale des porteurs sains de mutations sévères à l’état hétérozygote
explique l’importance du conseil génétique lorsqu’un projet parental est envisagé chez un
patient atteint (7, 10, 11).
La 21OHase surrénalienne est responsable du métabolisme de la progestérone en corti-
costérone et de la 17-hydroxyprogestérone en 11-desoxycortisol (12). Dans le cortex surré-
nalien cette enzyme participe donc à la fois à la synthèse de l’aldostérone dans la couche
glomérulée et du cortisol dans la couche fasciculée (Fig. 1) (12). Dans les formes classiques,
les mutations de CYP21A2 entraînent une altération de la protéine 21OHase qui, en corol-
laire, diminue son activité enzymatique (12-14). De l’importance de la perte de fonction de
l’enzyme, induite par une mutation donnée, dépendra la forme clinique (voir ci-dessous)
lorsque la mutation délétère est présente à l’état homozygote. Lorsqu’un patient porte deux

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 181

Figure 1. - Biosynthèse des stéroïdes dans le cortex de la surrénale. Conséquences du déficit


en 21-hydroxylase. Accumulation des précurseurs à effet progestatif et androgénique.
L'androstènedione sécrétée par la corticosurrénale est métabolisée en Testostérone par une
17ß-hydroxystéroïde deshydrogénase (17ßHDS) qui peut à son tour être convertie en estradiol
(aromatase) ou en dihydrotestostérone (DHT) par une 5alpha-réductase.

mutations différentes, la sévérité de la maladie est conditionnée par l’allèle portant le


variant délétère altérant le moins l’activité enzymatique (1, 10, 13, 14).

IV. HCS/DC-21OHD : FORMES CLINIQUES


Historiquement, dans le sexe masculin, du fait de l’absence d’ambigüité sexuelle attirant
l’attention à la naissance, les formes classiques se manifestaient le plus souvent par une
insuffisance surrénalienne périphérique néonatale pouvant provoquer des décès par insuf-
fisance surrénalienne aigüe (1, 5, 6). Depuis 1995, l’instauration systématique d’un dépis-
tage néonatal avait comme but de diminuer ces complications aigües et la mortalité
précoce (6). Les formes plus sévères, dites avec perte de sel (salt wasting), sont les plus
fréquentes des formes classiques et sont expliquées par un déficit profond en gluco- et
minéralo-corticoïdes (1, 5, 10-12). Les formes classiques avec atteinte surrénalienne moins
sévère (c.a.d. avec un déficit minéralo-corticoïde et gluco-corticoïde plus atténué), dites
virilisantes simples, se révèlent cliniquement plus tard pendant l’enfance par un tableau de
virilisation précoce, avec gonadotrophines basses, associé à une avance staturale et une
avance d’âge osseux (1, 4, 5). Les formes à révélation tardive sont quasi-exclusivement
étudiées chez les femmes où elle se révèlent par une hyperandrogénie (15, 16). Des données
plus récentes suggèrent que cette division classique - très marquée par une conception
exclusivement mendelienne de la maladie - en trois formes cliniques caricaturales doit être
nuancée dans la mesure où il semble bien que s’agisse plutôt d’un spectre clinique continu
allant de la forme classique sévère avec perte de sel à la forme asymptomatique, dite
cryptique (1, 10, 17).

Paris, 23-24 novembre 2018


182 Jacques YOUNG

V. OBJECTIFS ESSENTIELS DU TRAITEMENT CHEZ L’HOMME


Les objectifs essentiels de la prise en charge des sujets de sexe masculin nés avec HCS/
DC-21OH sont clairement établis et admis universellement depuis des décennies (1, 18).
Ils visent en premier à assurer la survie de ces malades atteints d’insuffisance surrénalienne
depuis la naissance grâce à la substitution par des glucocorticoïdes et des minéralocorti-
coïdes. Un autre objectif essentiel pendant l’enfance est d’assurer une croissance optimale
permettant d’atteindre la taille-cible qui dépend des tailles parentales (1, 5, 18). L’atteinte
de cet objectif s’est progressivement améliorée au cours du temps mais une enquête
française récente a montré que le résultat n’était pas encore optimal, de nombreux patients
ayant des tailles finales inférieures à celles de la population française de référence (5). Cet
échec est à rapprocher d’un équilibre thérapeutique défaillant au long cours qui laisse
persister une sécrétion exagérée de précurseurs stéroïdiens (Fig. 2) (5).

Figure 2. - Hommes nés avec une forme classique de bloc en 21-hydroxylase.


Évaluation hormonale à l’âge adulte.
En haut : augmentation de la concentration sérique des précurseurs stéroïdiens en amont du bloc.
(A : progestérone ; B : 17-Hydroxyprogestérone ; C : androsténedione (ADIONE)) (échelle logarithmique)
En bas : D : élévation très importante de l’ACTH circulante (échelle logarithmique) et E : élévation
concomitante majeure de la rénine active circulante (échelle logarithmique). Les lignes horizontales
en pointillé indiquent les limites inférieures et supérieures de la normale. Panneaux B et C les lignes
horizontales hachurées indiquent les taux recommandés par certains experts.
(adapté d’après la référence 5)

VI. H
 CS/DC-21OH ET FERTILITÉ CHEZ L’HOMME : ÉVOLUTION DES
CONNAISSANCES
Jusqu’en 2000, la littérature concernant les hommes nés avec HCS/DC-21OHD était
modeste. Elle se limitait souvent à l’évaluation de la taille finale et à l’étude des consé-
quences du traitement par les glucocorticoïdes sur le capital osseux (19, 20). Avant cette
période, seuls quelques cas cliniques isolés ont attiré l’attention sur l’existence de troubles

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 183

de la fertilité. Les endocrinologues, pédiatres et adultes, étaient globalement sous l'emprise


des données issues d’une modeste série de patients publiée en 1978 par le groupe de Migeon
qui semblaient rassurantes (21). C’est seulement à partir du début des années 2000 que
trois séries publiées signalent de façon concordante, mais sur un nombre limité de patients,
l’existence d’une infertilité et d’altérations de la spermatogenèse (22-24).
Parmi ces études, il faut citer un travail qui a évalué la fécondité chez l’ensemble des
patients finlandais adultes atteints de HCS/DC-21OH (22). Cette étude montrait globale-
ment une diminution significative du nombre d’enfants chez les hommes avec HCS/
DC-21OH par rapport à la population contrôle. Une étude américaine, publiée par le
groupe de Maria New, grande experte de cette affection, a montré des anomalies du
spermogramme chez 12 des 30 hommes atteints de HCS/DC-21OH étudiés (23). Ces
patients avaient, à l’examen clinique, soit des tumeurs intra-testiculaires, soit des testicules
diminués de taille. Chez ces patients, dont l’examen testiculaire était anormal, la majorité
présentait une oligospermie et certains une azoospermie. Dans une étude hollandaise,
publiée aussi en 2001, les auteurs soulignaient la fréquence importante des inclusions
surrénaliennes intra-testiculaires asymptomatiques découvertes à l’échographie et l’altéra-
tion fréquente de la spermatogenèse, avec parfois une atteinte de la fonction leydigienne,
chez des adolescents et des adultes nés avec une forme classique de HCS/DC-21OH (24).
Ces études un peu alarmantes avaient en fait été précédées d’un travail important, mais
passé un peu inaperçu, publié par une équipe allemande en 1998 sous forme d’abstract
montrant une dégradation claire de la spermatogenèse (25). Dans cette étude, un spermo-
gramme avait été fait chez 53 hommes avec HCS/DC-21OH. La concentration moyenne
de spermatozoïdes était diminuée par rapport à la population témoin. Seul un tiers de ces
malades avaient un spermogramme normal.
Après ces premières études, des données plus récentes ont confirmé les craintes concer-
nant la fertilité des hommes atteints de HCS/DC-21OH. Ainsi, depuis près d’une dizaine
d’années de nombreuses études, accumulant un grand nombre de patients, ont démontré
de façon claire et concordante l’existence d’une altération réelle et importante de la ferti-
lité dans des séries indépendantes d’hommes nés avec HCS/DC-21OH dans des pays diffé-
rents (5, 13, 26-30).

VII. CAUSES DE L’INFERTILITÉ CHEZ LES HOMMES HCS/DC-21OH


Trois mécanismes, qui sont souvent intriqués, peuvent expliquer l’altération de la ferti-
lité chez les hommes avec HCS/DC-21OH : diminution des gonadotrophines (hypogona-
disme hypogonatrope (HH)) (Fig. 3), obstacle sur les voies excrétrices d’évacuation des
spermatozoïdes testiculaires et destruction du parenchyme testiculaire (insuffisance testi-
culaire primitive - ITP) (5, 31) (Fig. 3). Les deux derniers sont liés à l’apparition de tumeurs
au sein des testicules qui auraient comme origine des reliquats microscopiques de tissu
corticosurrénalien. Du fait de leur ressemblance histologique et fonctionnelle avec le tissu
corticosurrénalien, ces tumeurs sont appelées « inclusions surrénaliennes intratesticu-
laires (ISIT) » et sont connues dans la littérature anglo-saxonne sous l’acronyme TARTs
(Testicular Adrenal Rest Tumors) (5, 31).

A) Les inclusions surrénaliennes intra-testiculaires (ISIT/TARTs)


Elles ont été décrites pour la première fois par Wilkins et al en 1940 (32). Depuis cette
date jusqu’aux années 2000, les inclusions surrénaliennes intra-testiculaires ont été rappor-

Paris, 23-24 novembre 2018


184 Jacques YOUNG

Figure 3. - Hommes nés avec une forme classique de bloc en 21-hydroxylase. Évaluation hormonale à
l’âge adulte : concentrations circulantes des gonadotrophines hypophysaires (LH et FSH), de la
testostérone et de l’inhibine B.
En bas droite : anomalies testiculaires observées. Les lignes horizontales en pointillé indiquent les
limites inférieures et supérieures de la normale. (adapté d’après la référence 5)

tées essentiellement sous forme de cas cliniques isolés (33-40). Depuis 2000, on a constaté
sur quelques petites séries qu’il s’agissait d’une complication non anecdotique. Plus récem-
ment leur prévalence importante, mais très variable, a été mieux documentée (5).
Les ISIT/TARTS sont, dans l’immense majorité des cas, des tumeurs bénignes. On
pense qu’elles se développent chez les patients avec HCS/DC-21OH à partir de reliquats de
tissu surrénalien intra-testiculaires qui seraient normalement présents chez les enfants (31,
35). Ces reliquats pourraient dériver des cellules provenant de la structure fœtale « primor-
dium adréno-génital » qui auraient suivi la migration testiculaire vers le scrotum (31, 35).
Ils sont le plus souvent bilatéraux et localisés au niveau du rete testis (Fig. 4). Leur taille
est très variable, de quelques millimètres à plusieurs centimètres (Fig. 5 à 7) (5, 31, 33-40).
1) Prévalence
La prévalence réelle des ISIT/TARTS dans la population globale des sujets de sexe
masculin nés avec HCS/DC-21OH n’est pas connue (5). Elle dépend des sous-groupes de
HCS/DC-21OH étudiés (enfants ou adultes, formes sévères ou plus atténuées), des moyens
utilisés pour les dépister (palpation ou imagerie) et des biais de recrutement dans les
centres ayant participé aux différentes études publiées (5, 31, 33-40).
Comme on l’a vu plus haut, les ISIT/TARTS étaient réputées rares avant les années
2000 (36), mais sont devenues fréquentes lorsqu’on les recherche de façon systématique

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 185

Figure 4. - Inclusions surrénaliennes intra-testiculaires (ISIT/TARTs) : Origine, stades schématiques de


croissance avec retentissement testiculaire croissant.
Stade 1 : Reliquat de cellules surrénaliennes au sein du rete-testis au niveau du hile testiculaire =
au sein du rete-testis au niveau du hile testiculaire. Stade 2 : Hyperplasie et hypertrophie des cellules
cortico-surrénaliennes. Stade 3 : Croissance des reliquats puis compression du hile et rete-testis.
Stade 4 : Ischémie puis fibrose ± infiltrat lymphocytaire. Stade 5 : Lésions irréversibles du parenchyme
testiculaire (modifié d’après référence 31).

par imagerie (voir plus loin) (5, 35-40). Elles semblent plus fréquentes chez les patients
présentant des formes sévères, avec perte de sel, que chez les malades ayant une forme
virilisante simple (5, 35-40). Sur la base de cas cliniques (35) on pense aussi que ces
tumeurs seraient plus fréquentes chez les sujets ayant une faible adhérence au traitement
substitutif par les glucocorticoïdes. Cependant, elles peuvent aussi apparaître chez des
patients correctement traités et certaines études indiquent une absence de corrélation
entre adhérence thérapeutique et apparition des ISIT/TARTS (23, 24, 30, 34, 37, 39, 41).
Ce point suggère que d’autres facteurs - non encore identifiés - pourraient intervenir dans
leur apparition et/ou leur croissance.
Le nombre plus important de cas répertoriés à un âge post-pubère suggère que leur
fréquence pourrait être plus grande chez les hommes que chez les garçons, mais en l’absence
d’études systématiques avec moyens similaires de détection, il est difficile de trancher.
Quoi qu’il en soit, le nombre significatif de cas rapportés par diverses équipes pédiatriques
chez les enfants et adolescents (5, 31, 33, 35, 39, 42, 43) montre qu’un dépistage précoce
systématique pendant l’enfance et l’adolescence est très probablement utile.

2) Anatomo-pathologie
Les ISIT/TARTS sont formées d’îlots de cellules stéroïdogènes hypertrophiées dévelop-
pées au sein du testicule normal probablement sous l’effet de la stimulation permanente

Paris, 23-24 novembre 2018


186 Jacques YOUNG

par l’ACTH qui pourrait être majorée par l’effet mitogène de l’angiotensine 2. Quand on
ne connait pas le contexte clinique de HCS/DC-21OH, le diagnostic anatomopatholo-
gique d’ISIT/TARTS est difficile. En effet, au plan histologique elles sont très proches - et
souvent confondues avec – des tumeurs testiculaires à cellules de Leydig (leydigomes). Il
faut savoir que les ISIT/TARTS sont bilatérales dans près de 80 % des cas (5, 31, 43, 44)
contrairement aux leydigomes qui dans près de 97 % sont unilatéraux (31, 47). De plus, les
cristalloïdes de Reinke (dépôts de cholestérol visibles au microscope) sont exceptionnelle-
ment présents dans les ISIT/TARTS alors qu’ils intéressent près de 40 % des leydigomes
(31, 44, 45). Les anatomopathologistes expérimentés connaissent ces difficultés diagnos-
tiques et savent actuellement qu’un argument essentiel en faveur d’une ISIT/TARTS
devant une tumeur testiculaire stéroïdogène - a fortiori bilatérale - est le contexte d’ HCS/
DC-21OH.

3) Arguments en faveur de la nature cortico-surrénalienne des ISIT/TARTS


Avant les années 2000, devant les difficultés combinées des incertitudes anatomopatho-
logiques et de la méconnaissance de la forte prévalence des ISIT/TARTS chez les hommes
avec HCS/DC-21OHD (22-24) de nombreuses approches ont été développées pour aboutir
à un diagnostic fiable d’ISIT/TARTS en démontrant la nature surrénalienne de ces
tumeurs testiculaires. Une méthode invasive et complexe au plan pratique proposée alors
consistait à réaliser un cathétérisme des veines spermatiques (46-48). Une variante consis-
tait à faire des prélèvements per-opératoires des veines spermatiques pendant l’exérèse
chirurgicale des tumeurs (49, 50). Le but était de démontrer l’existence anormale de fortes
concentrations de stéroïdes 11-hydroxylés provenant des veines drainant les testicules
(46-49). D’autres équipes ont utilisé des méthodes immuno-histochimiques visant à
démontrer l’expression, dans les tumeurs testiculaires, de l’enzyme 11-hydroxylase, des
récepteurs de l’ACTH et de l’angiotensine 2 qui, tous spécifiques du cortex surrénalien et
non exprimés dans les leydigomes (51, 52). Enfin, d’autres auteurs ont démontré par des
approches bio­chimiques que les tissus issus de ces tumeurs étaient capables de produire des
stéroïdes 11-hydroxylés, spécifiques de la corticosurrénale et non synthétisés par les cellules
de Leydig tumorales (31, 51-53). Plus récemment, il a été montré que les ISIT/TARTS sont
capables de capter activement le nor-iodocholestérol (Fig. 7) comme de nombreuses
tumeurs surrénaliennes bénignes (49).

4) Diagnostic
Au plan clinique, ces tumeurs, sont souvent asymptomatiques du fait de leur petite taille
et leur position centrale, mais elles peuvent être découvertes à la palpation testiculaire qui
doit donc être systématique chez tout enfant, adolescent ou homme né avec une HCS/
DC-21OH (5, 31). Lorsque les ISIT/TARTs sont volumineuses l’examen montre des testi-
cules très fermes, avec des nodules indurés, avec parfois une prise en masse très dure de
l’ensemble des deux testicules (Fig. 6). Leur détection par la palpation est souvent tardive,
synonyme de tumeur déjà développée, avec un impact délétère sur les structures testicu-
laires et donc de pronostic réservé. Pour les dépister à un stade plus précoce, avant l’instal-
lation de lésions testiculaires bilatérales irréversibles, une imagerie testiculaire systéma-
tique est nécessaire. Celle-ci fait appel à l’échographie testiculaire (5, 37, 39, 41) plus
accessoirement à l’IRM des testicules (31, 38, 49). L’échographie montre des aspects
variables mais souvent les lésions sont hypoéchogènes, relativement faciles à distinguer du
testicule normal (Fig. 5). L’IRM testiculaire, plus rarement réalisée, permet aussi de très

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 187

Figure 5. - Aspects, à l’échographie testiculaire, des inclusions surrénaliennes intra-testiculaires


(ISIT/TARTs) (flèches).

bien distinguer et caractériser les ISIT/TARTs par leur aspect en hyposignal T1 (31, 38,
49) (Fig. 7).

5) ISIT/TARTs et équilibre thérapeutique


Dans les premières publications rapportant des ISIT/TARTs, les auteurs décrivaient
souvent des patients avec un équilibre thérapeutique insuffisant (5, 31). Ces cas ont sous-
tendu l'hypothèse selon laquelle l'élévation chronique de l'ACTH circulante (Fig.  2D)
était un facteur responsable de l'apparition de ces tumeurs testiculaires. Un argument
complémentaire était la régression des ISIT/TARTs à la réintroduction du traitement
observée dans quelques cas d'hommes ayant arrêté la substitution par hydrocortisone (35,
54-56). Cependant, des études plus récentes ne semblent pas montrer de corrélation aussi
claire entre la prévalence des ISIT/TARTs et un équilibre thérapeutique insuffisant (31).
En l’absence d’études prospectives prolongées il n’est pas possible, à l’heure actuelle,
d’écarter ou d’affirmer la relation causale entre mauvais équilibre thérapeutique chronique
et apparition des ISIT/TARTs.

B) Infertilité par freination des gonadotrophines hypophysaires


Chez les patients avec HCS/DC-21OH la surrénale hyperplasique sécrète de façon
excessive des précurseurs stéroïdiens qui ont une activité progestative (progestérone et
17-hydroxyprogestérone) ou sont des précurseurs de la testostérone comme la ∆4- andros-
tènedione (Fig. 1 et 2) (1, 5). Ce précurseur est converti en testostérone en dehors de la
surrénale par des enzymes appelées 17-hydroxy-stéroïde-deshydrogénase (17ßHSD) (Fig. 1).
Grâce à une étude multicentrique française comprenant plus de 219 hommes nés avec
HCS/DC-21OH, il a pu être montré que les sécrétions de progestérone, 17-OHP et
∆4-andrsotènedione étaient chroniquement très élevées chez la majorité des patients (5)

Paris, 23-24 novembre 2018


188 Jacques YOUNG

(Fig. 2). Dans ce contexte il faut rappeler que des travaux visant à développer la contracep-
tion hormonale masculine ont montré de façon concordante que l'association de testosté-
rone et de progestatifs a un effet synergique sur l'inhibition de la sécrétion des gonadotro-
phines hypophysaires FSH et LH (57). Dans le travail français cité plus haut, les
gonadotrophines hypophysaires ont aussi été étudiées et il a été clairement montré que
plus d'un tiers des hommes HCS/DC-21OH avaient des concentrations de FSH et de LH
abaissées (Fig. 3) (5). Ces données ont renforcé la portée de cas cliniques et de petites
séries préalablement publiées qui avaient déjà rapporté une baisse des gonadotrophines
(23, 31, 58, 59). Il existe donc un tableau d'hypogonadisme hypogonadotrophique (HH)
chez près d'un tiers d'hommes adultes nés avec HCS/DC-21Oh classique. Cette baisse des
gonadotrophines était associée chez certains patients à une diminution du volume testicu-
laire et/ou de la concentration de spermatozoïdes (voir plus loin) (5). De plus, dans certains
cas cliniques publiés, il a clairement été montré que la baisse de l'ACTH, de la progesté-
rone, de la 17-hydroxyprogestérone et de l'androstènedione s'accompagnait d'une augmen-
tation des gonadotrophines et même de l'augmentation de la concentration de spermato-
zoïdes et de l'obtention de grossesses chez les partenaires (5, 54, 55).

C) Infertilité par obstacle sur les voies excrétrices et compression des vaisseaux
testiculaires
Comme cela a été discuté plus haut, les ISIT/TARTS se développent souvent à partir du
hile testiculaire où se trouve le rete testis (Fig. 4) (31). Le rete testis est formé d'un réseau de
canaux où convergent les tubes séminifères. Il se prolonge par l'épididyme qui se termine
par le canal déférent par où sont évacués les spermatozoïdes provenant des testicules.
Lorsque les ISIT/TARTS atteignent un certain volume, elles peuvent comprimer les
canaux du rete testis et former un obstacle diminuant ou empêchant l'évacuation des
spermatozoïdes.
Lorsqu'elles atteignent un volume important, les ISIT/TARTS peuvent de plus
comprimer les veines et artères testiculaires avec pour conséquence une ischémie des
tubes séminifères pouvant aboutir à des nécroses irréversibles ce qui va contribuer au
tableau d'insuffisance testiculaire primitive (voir ci dessous) (5, 31, 36, 60, 61).

D) Infertilité par insuffisance testiculaire primitive


Lorsque les ISIT/TARTS se développent massivement (Fig. 6 et 7) elles vont infiltrer et
détruire le parenchyme testiculaire, aussi bien interstitiel que les tubes séminifères (31).
Ces lésions testiculaires vont entrainer un tableau d’insuffisance testiculaire primitive
affectant aussi bien la sécrétion hormonale des cellules de Leydig, testostérone en particu-
lier, que les tubes séminifères. Cette dernière atteinte va provoquer à la fois une diminu-
tion de la production testiculaire de spermatozoïdes et une altération de la sécrétion testi-
culaire d’inhibine B (5). Au plan hormonal, cette insuffisance testiculaire primitive va se
traduire par une augmentation des gonadotrophines, en particulier de FSH du fait de la
diminution des taux circulants d’inhibine B (Fig. 3) (5). Ce profil hormonal avec FSH
élevée a bien été documenté par l’étude multicentrique évoquée plus haut (Fig. 3) (5).
Cependant l’inhibition gonadotrope induite par l’élévation de la progestérone, de la
17-hydroxyprogestérone et de la testostérone dérivée de l’androstènedione, come déjà
mentionné, peut masquer l’élévation des gonadotrophines et rassurer à tort le médecin (5,
61). Dans certains cas, la diminution des précurseurs stéroïdiens provenant de la surrénale
induite par l’administration de glucocorticoïdes ou d’autres médicaments comme le

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 189

Figure 6. - Prise en masse et destruction du parenchyme testiculaire chez un jeune homme de 20 ans
ayant consulté pour douleurs scrotales. Ce patient était suivi depuis la naissance pour un bloc en
21-hydroxylase sévère avec perte de sel. À l’interrogatoire, le patient et sa mère ont indiqué que le
patient n’avait jamais eu d’examen clinique ou échographique des testicules. Devant les douleurs
testiculaires chroniques le patient a demandé une exérèse chirurgicale (photo de droite). Au cours de
cette intervention, une exploration au microscope a été pratiquée à la recherche de spermatozoïdes
en vue d’une congélation pour préserver la fertilité.

mitotane, peut démasquer l’insuffisance testiculaire en laissant apparaitre l’élévation des


gonadotrophines (5, 61).

E) Infertilité par des effets délétères combinés des ISIT/TARTs et de l'inhibition


gonadotrope
Chez un nombre non négligeable de patients avec HCS/DC-21OH, souvent peu ou mal
suivis, le tableau est très sévère avec un retentissement multiple sur les fonctions testicu-
laires du fait de la combinaison de tous les effets délétères décrits ci-dessus (5, 31, 60, 61).
Dans ces cas, le pronostic de fertilité doit être précisé par une analyse clinique, hormonale
et par imagerie poussée ainsi que par la réalisation d’un spermogramme (voir ci dessous).

VIII. L
 A PRÉVENTION ET LA PRISE EN CHARGE DE L'INFERTILITÉ DES
HOMMES AVEC HCS/DC-21OH EST DEFAILLANTE EN FRANCE
Comme nous l’avons discuté tout au long de cette revue, l’HCS/DC-21OH est associée
à un risque élevé d’infertilité masculine pouvant être parfois réversible mais dans certains
cas irréversible. Dans l’enquête française multicentrique évoquée plus haut il a été établi
que seuls 75 % (164/219) des hommes avec HCS/DC-21OH évalués dans les centres
universitaires français avaient eu une échographie testiculaire (5). Plus surprenant encore,
seul 32 % (71/219) de ces hommes potentiellement infertiles avaient eu un spermo-
gramme (5). Ces résultats indiquent clairement une méconnaissance du risque d’inferti-
lité chez ces malades et une prise en charge de leur infertilité qui, en corollaire, est loin
d’être optimale  (5).

Paris, 23-24 novembre 2018


190 Jacques YOUNG

IX. C
 OMMENT ÉVALUER EN PRATIQUE LE RETENTISSEMENT
TESTICU­LAIRE DE LA MALADIE CHEZ LES HOMMES HCS/DC-21OH ?
L’évaluation des fonctions testiculaires et le dépistage des ISIT/TARTS doit être un
objectif de premier plan chez les patients avec bloc en 21-hydroxylase classique et ce, dès
l’enfance, mais plus encore pendant l’adolescence et surtout à l’âge adulte. La première
étape est simple : elle consiste à palper les testicules pour déterminer leur taille, leur consis-
tance normalement ferme ou non, et pour dépister l’existence de tumeurs évoquant des
ISIT/TARTS. L’examen clinique des testicules doit être complété par une échographie
testiculaire réalisée par un radiologue compétent en l’imagerie scrotale, ce qui permet de
dépister les ISIT/TARTS non palpables et de préciser l’importance et le retentissement
testiculaire d’inclusions plus importantes (5, 31). L’évaluation des fonctions endocrines
testiculaires et des gonadotrophines sont complémentaires et apportent des renseigne-
ments utiles pour le pronostic de fertilité en diagnostiquant un hypogonadisme hypogona-
dotrope, de bon pronostic, ou une insuffisance testiculaire primitive, plus péjorative (5).
La réalisation d’un spermogramme est utile dans tous les cas. Elle a comme but, tout
d’abord, de sensibiliser le patient et son entourage à l’importance de l’évaluation de la
fertilité. Si le spermogramme est normal, il permet de rassurer le patient et sa famille, et,
dans ce cas, la conservation de spermatozoïdes par congélation peut être proposée. En cas
d’acceptation, le patient sera adressé au Centre d’Étude et de Conservation du Sperme
(CECOS) le plus proche, avec une lettre d'accompagnement précisant bien le caractère
très particulier de l'indication de la congélation. En cas d’altération du spermogramme,
une congélation est toujours possible s’il persiste des spermatozoïdes vivants et mobiles en
nombre suffisant dans l’éjaculat. Lorsque le spermogramme montre une dégradation très
importante (oligo- ou azoospermie), il est nécessaire de rapidement déterminer le ou les
mécanismes en cause : simple obstacle (compression du rete testis), souffrance ou destruc-
tion du parenchyme testiculaire, effondrement des gonadotrophines ou combinaison de
tous ces mécanismes.

X. H
 OMMES NÉS AVEC HCS/DC-21OH : PRÉSERVATION DE LA
FERTILITÉ ET PRISE EN CHARGE DE L’INFERTILITÉ
Nous avons vu qu’un équilibre correct du traitement substitutif de l’insuffisance surré-
nalienne des patients atteints de HCS/DC-21OH peut permettre de diminuer l’ACTH et
par conséquent diminuer aussi les précurseurs stéroïdiens pourvus d’un effet antigonado-
trope. Il semble utile d’expliquer au patient, dans le cadre de l’éducation thérapeutique,
que le bon équilibre hormonal peut non seulement prévenir une décompensation aigue de
l’insuffisance surrénale mais aussi de préserver la fertilité. Un deuxième objectif dans la
préservation de la fertilité est le dépistage précoce des ISIT/TARTS avec les moyens de
détection évoqués plus haut. Une détection précoce permet d’agir avant l’installation de
lésions testiculaires irréversibles.
La congélation des spermatozoïdes est un point essentiel de la stratégie de préservation
de la fertilité chez ces hommes. Dans notre centre, elle est proposée dès que la réalisation
d’un spermogramme est possible. Elle permet la mise en réserve de spermatozoïdes qui
peuvent être essentiels pour accomplir un projet parental futur même si une dégradation
de la spermatogenèse apparait.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 191

Lorsque le patient est vu à un stade où la dégradation du spermogramme est présente ou


apparait, le traitement de l’infertilité dépendra du mécanisme. En l’absence d’ISIT/TARTs
et en cas d’inhibition profonde des gonadotrophines induite par les précurseurs stéroïdiens
on tentera de faire augmenter la LH et la FSH endogènes en freinant l’ACTH, ce qui
induit la baisse de la progestérone et de la 17OH-progestérone (54). Cette correction de
l’inhibition gonadotrope peut être obtenue en pratique soit en réintroduisant un traite-
ment stéroïdien substitutif arrêté malencontreusement soit en augmentant la dose d’hydro-
cortisone, ou en ajoutant un glucocorticoïde freinateur comme la dexaméthasone (54). En
cas de persisitance de l’inhibition gonadotrope ou en cas d’intolérance à de fortes doses de
glucocorticoïde (Cushing iatrogène) on peut introduire un traitement combiné par les
gonadotrophines (FSH et hCG) avec succès (62).
En présence de ISIT/TARTs, on peut rencontrer des paliers thérapeutiques de complexité
croissante (55, 60, 61). Parfois, la réintroduction des glucocorticoïdes ou l’augmentation
des doses permet de diminuer le volume de ces tumeurs et d’améliorer la concentration de
spermatozoïdes dans l’éjaculat, et d’obtenir des grossesses chez la partenaire (31). En cas
d’échec persistant, la question d’une exploration chirurgicale des testicules peut se poser.
Cette exploration à l’aide d’un microscope permet d’analyser au plan histologique le paren-
chyme testiculaire et de détecter des foyers éventuels de spermatogenèse. En cas de visua-
lisation d’ilots de spermatozoïdes, une extraction chirurgicale de spermatozoïdes pourra
être réalisée : c’est l’approche de type TESE (TEsticular Sperm Extraction). Ces spermato-
zoïdes peuvent être congelés puis utilisés pour une fécondation in vitro de type ICSI
(Intra-Cytoplasmic Sperm Injection). Des cas de succès par cette approche TESE/ICSI ont
été rapportés (60).

XI. P
 ERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES POUR AMÉLIORER
L’ÉQUILIBRE THÉRAPEUTIQUE ET PRÉSERVER LA FERTILITÉ
(Fig. 7)
Comme nous l’avons vu plus haut, l’équilibre thérapeutique n’est pas facile à atteindre,
dans la vraie vie, avec le traitement substitutif conventionnel qui, en France, comprend
dans la grande majorité des cas de l’hydrocortisone et de la fludrocortisone (5). Le

Figure 7. - Aspect à l’IRM des ISIT/TARTs explorées chez le patient de la figure 6.


A : coupe coronale. B : coupe axiale. C : Captage du traceur par les inclusions surrénaliennes
intra-testiculaires lors d’une scintigraphie au nor-iodocholestérol
(modifié d‘après la référence 49).

Paris, 23-24 novembre 2018


192 Jacques YOUNG

désé­quilibre thérapeutique chronique induit une augmentation au long cours de l’ACTH


(5) et de l’angiotensine II, clairement documentée, et qui stimule la croissance des cellules
de la corticosurrénale et la production anormale de précurseurs stéroïdiens. Les consé-
quences délétères, déjà discutées, sont d’altérer le fonctionnement de l’axe gonadotrope et
de favoriser l’apparition des ISIT/TARTs. On comprend donc que des approches thérapeu-
tiques diverses visent à limiter ou abolir l’élévation chronique de l’ACTH. La plus ancienne
utilisée a été celle de majorer les doses du traitement journalier ou d’utiliser des glucocor-
ticoïdes plus puissants (prednisone, dexamethasone…) (13, 26, 55). Le principal écueil de
cette pratique est le surdosage chronique qui peut provoquer un hypercorticisme médica-
menteux et dégrader l’état métabolique des patients en augmentant la prévalence de l’obé-
sité, de l’hypertension artérielle et celle des anomalies des paramètres glucidiques et
lipidiques (5, 13). D’autres auteurs proposent des formes galéniques d’hydrocortisone qui
auraient des pharmacocinétiques permettant d’obtenir des concentrations de cortisol plus
proches de la physiologie (1). Cependant des données solides de pharmacodynamique et
d’impact au long cours manquent à ce jour ; il n’y a donc pas actuellement de données
solides, reproductibles et rapportées par des équipes indépendantes qui indiquent un effet
bénéfique de ces formulations en pratique clinique (1).
Devant ces impasses, des approches innovantes visent à diminuer la sécrétion hypophy-
saire d’ACTH grâce à des antagonistes de la CRH (63), ou à inhiber l’effet de l’ACTH au
niveau de la corticosurrénale grâce à des antagonistes de l’ACTH (64) ou des anticorps
anti-récepteur de l’ACTH développés par certaines firmes pharmaceutiques (http://press.
endocrine.org/doi/abs/10.1210/endomeetings.2016.AHPAA.16.LBSun-24). Certains travaux
préliminaires semblent prometteurs (63) mais l’avenir nous dira si ces thérapeutiques
innovantes seront réellement efficaces et bien tolérées pour pouvoir être utilisées chez les
patients avec HCS/DC-21OH.
D’autres approches thérapeutiques visent directement la steroïdogénèse et la surrénale
(61, 65-67) et la synthèse des stéroïdes. Le but est ici d’inhiber directement la synthèse des
précurseurs stéroïdiens sécrétés en excès ou de leurs métabolites pour éviter les effets
cliniques indésirables de leur production excessive. Dans les premiers travaux, datant
d’une vingtaine d’années, les inhibiteurs de l’aromatase combinés avec des anti-andro-
gènes ont été étudiés chez des enfants atteints d’ HCS/DC-21OH (65). Dans ce travail
ancien, l’inhibition de la synthèse d’estradiol obtenue grâce à un inhibiteur de l’aromatase
de première génération (testolactone), associé à l’anti-androgène pur flutamide, a permis
de diminuer la dose d’hydrocortisone tout en diminuant la virilisation et la maturation
précoce de l’os, et en préservant la croissance (65). Plus récemment, Auchus et coll. (66)
ont utilisé chez des femmes avec HCS/DC-21OH un inhibiteur de la 17-20 lyase, l’abirate-
none, qui empêche la synthèse surrénalienne de Δ4-androstènedione et, corrélativement,
la production de son métabolite actif, la testostérone (66). Ce médicament, proposé
principalement dans le cancer de la prostate, permettait une correction efficace à court
terme de l’élévation des androgènes chez ces femmes avec HCS/DC-21OH (66). On
pourrait concevoir, en cas d’innocuité de ce type de médicament chez l’enfant, une utili-
sation chez les garçons pré-pubères pour éviter une virilisation précoce et une maturation
osseuse accélérée tout en allégeant le traitement par glucocorticoïdes (1, 66).
Enfin, et plus directement en rapport avec le sujet de cette revue, dans une étude préli-
minaire française a été étudiée l’efficacité du mitotane (Op’DDD) d’effet à la fois un
adrénolytique et inhibiteur de la stéroïdogénèse corticosurrénalienne (61). Les auteurs ont
administré au long cours le mitotane chez un homme né avec une HCS/DC-21OH et

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 193

Figure 8. - Approches thérapeutiques émergentes (hors AMM) envisagées pour améliorer la prise en
charge des patients atteints d’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase ;
(1) ketoconazole, abiratenone ; (2) mitotane ; (3) abiratenone ou inhibiteurs de l’aromatase.
(voir texte) (adapté de la référence 1).

consultant pour infertilité (61). Ce patient avait une azoospermie persistante associée à
des ISIT/TARTs et une inhibition gonadotrope. Le mitotane administré pendant des mois
a permis à la fois de diminuer le volume des inclusions et d’entraîner un effondrement des
précurseurs stéroïdiens. L’inhibition gonadotrope a été levée et, surtout, la réapparition des
spermatozoïdes dans l’éjaculat a été obtenue. Cela a permis l’obtention d’une grossesse
chez la partenaire par fécondation in-vitro et un enfant sain est né (61). Le résultat
prometteur de cette étude - preuve de concept - devra être confirmé par un essai thérapeu-
tique incluant plusieurs patients avec azoospermie et ISIT/TARTs avant que ce traitement
puisse être proposé en pratique clinique.

XII. CONSEIL GÉNÉTIQUE ET PROJETS PARENTAUX


Avant de conclure, il est important de rappeler, une fois encore, que l’HCS/DC-21OH
est une maladie génétique potentiellement transmissible à la descendance (1, 7, 10, 11, 13,
14). Devant un patient atteint, l’enquête familiale est essentielle pour dépister des
apparentés malades et pour s’assurer qu’ils ont un suivi médical optimal. Cette enquête a
aussi comme objectif de détecter des hétérozygotes asymptomatiques par un séquençage
systématique de CYP21A2. Tout comme le malade porteur d’une ou de mutations sévères

Paris, 23-24 novembre 2018


194 Jacques YOUNG

à l’état biallélique (homozygotes ou hetérozygotes composites), les apparentés (frères/


sœurs..) peuvent être porteurs d’une mutation sévère à l’état hétérozygote simple. Étant
donnée la fréquence relativement élevée dans la population générale des porteurs sains de
mutations sévères de CYP21A2, le risque d’avoir un enfant atteint d’HCS/DC-21OH est
loin d’être négligeable. Le conseil génétique doit donc concerner non seulement le propo-
situs d’une famille mais aussi les apparentés porteurs de mutations sévères sans expression
du phénotype. Si on découvre lors de cette enquête familiale, puis de couple, qu’un parte-
naire non apparenté est porteur d’une mutation sévère de CYP21A2, un conseil génétique
et une prise en charge spécifiques du couple désirant un enfant sera nécessaire. La quanti-
fication du risque sera clairement exposée et seront discutés les différentes options face à
une grossesse à risque : depuis le diagnostic prénatal combiné à la détermination du sexe
fœtal jusqu’à, le cas échéant, la mise en œuvre d’un traitement prénatal par dexame­
thasone (69). Bien que non encore admise en soin courant dans notre pays, la possibilité
d’un diagnostic pre-implantatoire (DPI) peut être évoquée, tout en rappelant d’une part les
limites imposées par la législation en termes d’indications et d’autre part le nombre res­-
­treint de centres compétents (https://www.congres-sfe.com/2017/getabstract!fr!!!!313202bf-
3803-11e7-a5f1-e8c2100b0703).

XIII. CONCLUSION
Les endocrinologues - pédiatres et d’adulte - doivent jouer un rôle essentiel dans l’amé-
lioration de la prise en charge des garçons, adolescents et hommes nés avec une HCS/
DC-21OH. Notre spécialité a un savoir-faire ancien et reconnu dans la substitution
chronique de l’insuffisance surrénalienne et la prévention des décompensations aigües,
améliorées, de plus, par la mise en place des programmes d’éducation thérapeutique. La
prévention, pendant l’enfance, de la maturation osseuse précoce et de la petite taille
définitive reste imparfaite mais fait toujours des progrès. En revanche, le diagnostic, la
prise en charge et la prévention de l’infertilité chez ces malades sont assez défaillants. La
première étape pour une amélioration viendra de la prise de conscience par tous les
endocrinologues de France du risque majeur d’infertilité masculine que représente la forme
classique de bloc en 21- hydroxylase. Cette prise de conscience collective permettra de
déployer efficacement le dépistage précoce, tant des anomalies de l’axe gonadotrope que
des tumeurs testicualaires respnsables de l’altération de la fertilité.
Des traitements hormonaux de première ligne permettent assez souvent de restaurer une
fertilité. En cas d’échec des approches plus lourdes sont nécessaires ; elles nécessitent une
prise en charge conjointe par les endocrinologues et des médecins spécialistes en patho-
logie de la reproduction.

Service d’Endocrinologie et des Maladies de la Reproduction


Hôpital Bicêtre - Assistance Publique-Hôpitaux de Paris,
Centre de Référence des Maladies Rares du Développement
Génital
78 avenue du Général Leclerc,
94275, Le Kremlin Bicêtre.

Université Paris-Sud - Université Paris Saclay


Faculté de Médecine Paris Sud, Le Kremlin Bicêtre
INSERM, Unité Mixte U1185, Faculté de Médecine Paris
Sud, Le Kremlin Bicêtre

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Infertilité des hommes nés avec une hyperplasie congénitale des surrénales par déficit en 21-hydroxylase : mécanismes, prévention et défis diagnostiques et thérapeutiques 195

Adresse pour la correspondance : Professeur Jacques YOUNG (adresse ci-dessus).


E-mail : jacques.young@aphp.fr

INFERTITY IN MEN WITH CONGENITAL ADRENAL HYPERPLASIA DUE


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

TO 21-HYDROXYLASE DEFICIENCY-MECHANISMS, PREVENTION,


DIAGNOSTIC ANF THERAPEUTIC CHALLENGES
by Jacques YOUNG (Le Kremlin Bicêtre, Paris - France)

ABSTRACT
Congenital adrenal hyperplasia due to 21-hydroxylase deficiency (21OHD) is a rare
autosomal recessive disease characterized by variable impairment of cortisol and aldosterone
synthesis by the adrenal cortex. Clinical manifestations of 21OHD are due to a combination
of cortisol and aldosterone deficiency and accumulation of steroid precursors that are shunted
into the androgen synthesis pathway resulting in an androgen excess. Data on the adult
outcome of male patients born with this disease, including substantial clinical, hormonal,
morphological, testicular, and sperm evaluation, have been for years only available for a few
dozen men.The aim of the present review was to provide available up-to-date published data
focused on hormonal control, especially with respect to the gonadotropic axis, testicular
function, and fertility. For this purpose we reviewed reported series of male teenagers and
adult men with classic 21OHD managed in endocrinology departments of teaching hospitals
in different countries, including France. Published data indicate that most patients had poor
hormonal control with concentrations of ACTH, and the steroids precursors : progesterone,
17-Hydroxyprogesterone, and ADIONE that remain higher than the therapeutic targets
recommended. Many published series had showed frequent alterations of the gonadotropin-
testicular axis and a high prevalence of Testicular Adrenal Rest Tumors (TARTs). Surpri-
singly, a minority of the men with classic 21OHD had a sperm count. Yet, published litera-
ture have clearly showed that men born with 21OHD have a risk of infertility. Testicular
sonography and routine semen analysis seem advisable, given the significant risk of infertility
in these men.

Key-words : 21-hydroxylase deficiency, Congenital adrenal hyperplasia, Testicular Adrenal Rest Tumors, TARTs,
CYP21A2, azoospermia, infertility, adrenal insufficiency, Hypogonadotrope Hypogonadism.

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61.  B ry-Gauillard H, Cartes A, Young J. Mitotane for 21-hydroxylase deficiency in an infertile man. N
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fertility by gonadotropin replacement in a man with hypogonadotropic azoospermia and testicular
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Antagonist: The Clinical Perspective. Front Endocrinol (Lausanne). 2017; 8: 17. doi: 10.3389/
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Paris, 23-24 novembre 2018


198 Jacques YOUNG

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levels in children with congenital adrenal hyperplasia. J Clin Endocrinol Metab 2000; 85: 1114–20. -
66.  Auchus RJ, Buschur EO, Chang AY, et al. Abiraterone acetate to lower androgens in women with
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determination in maternal serum: French cohort of 258 cases (2002-2011). J Clin Endocrinol Metab. 2014;
99: 1180-8.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


STÉATOPATHIES : APPLICATION DES
RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES
SUR LE DÉPISTAGE DE LA STÉATOSE
DES DIABÉTIQUES DE TYPE 2

par Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND


et Bruno VERGES (Dijon)

La stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD) est une pathologie très fréquente chez
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

les patients diabétiques de type 2. La présence d’un diabète sucré est un des facteurs de
risque évolutif indépendant vers une fibrose plus sévère, une cirrhose ou un carcinome
hépatocellulaire. Récemment, les sociétés Européennes de diabétologie, d’hépatologie et
d'obésité (EASD, EASL, EASO) ont publié des recommandations concernant le dépistage
et la prise en charge de la NAFLD. Dans ces nouvelles recommandations, les scores non
invasifs de fibrose et l’élastométrie sont considérés comme des procédures non-invasives
acceptables pour le diagnostic et le suivi des patients atteints de stéatose métabolique et
pour l’identification des patients à risque de fibrose avancée. Cependant l’application
stricte des recommandations européennes n'est pas envisageable chez les patients
diabétiques de type 2. Elle conduirait adresser à l'hépatologue un nombre beaucoup trop
important de patients à évaluer. Il semble nécessaire d'évaluer les stratégies de dépistage
dans cette population spécifique des patients diabétiques de type 2. Le dépistage en deux
temps, utilisant un premier test de screening simple, non coûteux, et l’utilisation plus
généralisée des mesures d’élastométrie hépatique pourrait être une stratégie plus
performante chez les patients diabétiques de type 2.

Mots-clés : stéatose, diabète de type 2, stéatose non alcoolique, fibrose, tests non invasifs, recommandations
européennes.

INTRODUCTION
La stéatose hépatique non alcoolique (NAFLD) est une pathologie très fréquente chez
les patients diabétiques de type 2. La NAFLD est la cause la plus habituelle d’élévation des
transaminases au cours du diabète de type 2 (1-4). Ces atteintes hépatiques diverses
associées à la maladie diabétique sont responsables d’une morbidité non négligeable. Cela
justifie donc que les diabétologues portent une attention particulière aux éventuelles
pathologies hépatiques de leurs patients diabétiques. Toutefois, il est particulièrement
difficile parmi ces très nombreux patients diabétiques de dépister ceux qui présentent un
risque évolutif nécessitant des explorations complémentaires et le recours à un hépato-
logue. Avec plus de 3 millions de patients diabétiques de type 2 en France, nous n'avons
donc pas la possibilité d'adresser tous les patients diabétiques à nos collègues hépatologues.
Il est donc indispensable de disposer de recommandations permettant de cibler les patients
diabétiques nécessitant un recours à un spécialiste des maladies du foie. Récemment les

Paris, 23-24 novembre 2018


200 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

sociétés européennes de diabétologie, d’hépatologie, et d'obésité ont publié des recomman-


dations concernant le dépistage et la prise en charge de la NAFLD. Il est donc important
d'évaluer l'application de ces recommandations européennes à la population spécifique à
haut risque de stéatose que sont les patients diabétiques de type 2.

PRÉVALENCE DE LA NAFLD CHEZ LES PATIENTS DIABÉTIQUES DE


TYPE 2
La prévalence de la stéatose au cours du diabète de type 2 est variable selon les études et
surtout selon les outils utilisés pour diagnostiquer la stéatose. Dans un travail prospectif,
Hickman et coll. montraient que 28 % des patients diabétiques de type 2 présentaient une
anomalie du bilan biologique hépatique avec pour 65 % d’entre eux une stéatose, 14 % une
infection virale, et 12.6 % une hépatopathie d’origine alcoolique (4). En utilisant la
technique non-invasive de référence qu’est la spectroscopie RMN, la prévalence de la
stéatose est estimée à 34 % dans la population générale américaine (5). Avec cette même
technique, différentes équipes ont démontré que 60 à 76 % des patients diabétiques de
type 2 étaient porteurs d’une stéatose (6, 7, 8) (Tableau 1). Avec plus de deux tiers de
patients diabétiques atteints d’une NAFLD, nous voyons donc qu’il est indispensable de
disposer d'outils supplémentaires pour différencier les patients porteurs d'une hépatopathie
bénigne de ceux qui présentent un potentiel évolutif vers une maladie hépatique sévère.
Tableau 1. - Prévalence de la stéatose dans la population diabétique

Auteurs N Méthodes % stéatose Référence

Targher et al 2839 Échographie 69,5% Diabetes Care 2007

Petit et al 218 Spectroscopie-RMN 63,7% JCEM 2010

Leite et al 180 Échographie 69,4% Liver Int 2009

Curr Opin Endocrinol


Cusi et al 107 Spectroscopie-RMN 76%
Diabetes Obes 2009

Quand évoquer une stéatohépatite non alcoolique


Le diagnostic de stéatohépatite non alcoolique sera recherché en particulier chez des
patients avec un IMC élevé, une dyslipidémie où une insulinorésistance, ce qui est bien
évidemment le cas de la plupart des patients diabétiques de type 2. Le diagnostic de
NAFLD reste en partie un diagnostic d’élimination, et il convient d’avoir écarté d’autres
causes d’hépatopathies comme une intoxication éthylique chronique, une hépatite virale
ou une surcharge en fer par exemple. La biologie peut objectiver une augmentation des
transaminases prédominant sur les ALAT sauf en cas de fibrose sévère. L’imagerie peut
conforter le diagnostic :
- l’échographie retrouve un foie hyperéchogène,
- le scanner peut permettre d’avoir une mesure semi-quantitative de la graisse hépatique,
- les nouvelles techniques IRM non irradiantes permettent d’obtenir une cartographie
de la graisse hépatique confirmant le diagnostic de stéatose.
Le contexte clinique évocateur avec un syndrome métabolique et une insulinorésis-
tance, l’élimination des autres étiologies d’augmentation des transaminases et une imagerie
(échographie, IRM) concordante permettent d’évoquer le diagnostic de stéatose.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage de la stéatose des diabétiques de type 2 201

PARTICULARITÉ DE LA NAFLD CHEZ LES PATIENTS DIABÉTIQUES DE


TYPE 2
Le taux de transaminases n’est pas associé de façon systématique à la sévérité de l’atteinte
hépatique. Dans le cas du diabète sucré, il a été constaté qu’à niveau de transaminases
similaire, la quantité de graisse intra-hépatique était presque doublée chez les sujets diabé-
tiques par comparaison aux patients non diabétiques (10). De même, les sujets diabétiques
peuvent avoir une stéatose importante avec des taux de transaminases dans les normes.
Soixante–huit pour cent des patients (diabétiques) porteurs d’une stéatose évoluée
(contenu hépatique en graisse >15 %) présentent des taux de transaminases dans la norme
(11). Le taux de transaminases sous–estime le niveau de stéatose des patients diabétiques.
De plus, la présence d’un diabète sucré est susceptible d’avoir une influence sur l’histoire
naturelle de la stéatose. La stéatose correspond sur le plan biochimique à une accumula-
tion de lipides dans les hépatocytes ; il s’agit essentiellement de triglycérides. Une propor-
tion importante de patients restera à ce stade de la maladie sans complications hépatiques.
Lorsque la stéatose s’accompagne d’une souffrance cellulaire avec ballonisation, d’inflam-
mation et de nécrose hépatocytaire on parle de stéatohépatite (NASH). Le pronostic sera
très différent entre la stéatose simple et la NASH. L’évolution vers une fibrose avancée sera
un critère évolutif et pronostic déterminant. Le risque de cirrhose et de mortalité d’origine
hépatique est significativement plus élevé en cas de NASH (12). Dans un travail à partir
d’une population de 144 patients porteurs d’une stéatohépatite confirmée à la biopsie, les
auteurs ont voulu déterminer les caractéristiques clinico-biologiques associées à une fibrose
sévère (13). Vingt-six pour cent n’avait pas de fibrose, 47 % avait une fibrose minime ou
modérée, 10 % une fibrose sévère et 17 % une cirrhose. En analyse multivariée, la présence
d’un diabète sucré était un des facteurs de risque indépendant de fibrose sévère (13). De
même, dans la cohorte italienne de Vérone, les patients diabétiques ont 2,5 fois plus de
risque de décéder d’une pathologie hépatique que les sujets non-diabétiques (14). Ce
potentiel évolutif élevé de la stéatose chez le patient diabétique est un argument en faveur
d'un dépistage efficace des complications hépatiques dans cette population. De même
l'existence d'une stéatose à transaminases normales plus fréquente chez les patients diabé-
tiques parait être une difficulté supplémentaire pour repérer les patients porteurs d'une
NAFLD.

CARCINOME HÉPATOCELLULAIRE ET DIABÈTE SUCRÉ


Le risque évolutif d’une NAFLD vers un carcinome hépatocellulaire (CHC) est le
problème principal de l’atteinte hépatique chez les sujets diabétiques. Plusieurs études ont
clairement montré l’existence d’une relation entre le diabète sucré et le CHC (15). De
façon indépendante des autres facteurs de risque, le diabète est associé à une augmentation
de 2,3 du risque de développer un CHC (16). L’explication de cette relation passe en partie
par l’association entre la NASH et le diabète sucré, la NASH pouvant conduire à la
cirrhose puis au CHC. Une difficulté supplémentaire concernant le dépistage des compli-
cations de la NAFLD chez les patients diabétiques est liée à la possibilité du développe-
ment d'un CHC sans passer par le stade de cirrhose. En effet, en cas de CHC sur hépato-
pathie métabolique, le cancer survient sur un foie non cirrhotique chez 30 à 50 % des
patients (17, 18). Les sujets porteurs de NAFLD sans cirrhose échappent donc aux recom-
mandations actuelles de dépistage du CHC. Ceci explique qu’au moment du diagnostic les
patients atteints de CHC sur foie métabolique ont souvent un cancer plus évolué que les
patients ayant un CHC sur infection virale chronique ou sur pathologie alcoolique (18).

Paris, 23-24 novembre 2018


202 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

Le développement de CHC sans cirrhose en cas NASH peut amener à dépister le CHC
par échographie hépatique semestrielle chez des patients porteurs d’une NASH avec
fibrose avancée, dès le stade F3.

RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES SUR LE DÉPISTAGE ET LA PRISE


EN CHARGE DE LA NAFLD
Les sociétés Européennes de diabétologie, d’hépatologie et d'obésité (EASD, EASL,
EASO) ont publié en 2016 des recommandations concernant le dépistage et la prise en
charge de la NAFLD (19). Dans ces nouvelles recommandations il est suggéré de faire une
recherche de stéatose chez tous les patients à risque métabolique et notamment les diabé-
tiques de type 2. Chez les patients souffrant d’une obésité ou d’un syndrome métabolique,
le dépistage de la NAFLD par le dosage des enzymes hépatiques et/ou la réalisation d’une
échographie doit faire partie du bilan de routine. Chez les patients à risque élevé (âge > 50
ans, diabète de type 2, syndrome métabolique), la recherche d’une maladie à un stade
avancé (c’est-à-dire une NASH avec une fibrose) est recommandée (19).
Chez les patients présentant un diabète de type 2, la présence d’une NAFLD doit être
recherchée indépendamment des valeurs des enzymes hépatiques dans la mesure où les
patients atteints d’un DT 2 sont à risque élevé de progression de la maladie (19).
Un dépistage par échographie hépatique est considéré comme l'examen de première
intention pour le screening de la stéatose ; les biomarqueurs et les scores complexes sont
considérés comme une alternative acceptable en l'absence d'échographie. Les auteurs de
ces recommandations proposent toutefois d’utiliser les biomarqueurs sériques surtout dans
le cadre des études de dépistage à grande échelle pour des problèmes de coût et de dispo-
nibilité des examens radiologiques. Les scores de stéatose les mieux validés sont le FLI
(Fatty Liver Index), le SteatoTest® et le NAFLD liver fat score (19) (Tableau 2). La fibrose
reste le facteur pronostique majeur dans la NAFLD et est associée à la mortalité et aux
complications hépatiques (20). En cas de suspicion de fibrose avancée, le patient doit être
pris en charge par un hépatologue qui évaluera la nécessité d'une biopsie de confirmation

Tableau 2. - Principaux test non invasifs de diagnostic de la stéatose

Logiciel de
Test Paramètres utilisés calcul online Interprétation Accès Limitations
accessible
FLI < 30 :
Fatty Liver
IMC, tour de taille, pas de stéatose
Index oui libre -
Triglycérides, GGT FLI > 60 :
(FLI)
stéatose présente
Hepatic
AST/ALT ratio, IMC, genre, HIS > 36 :
Steatosis Index oui libre -
diabète stéatose présente
(HSI)
Six composants du
FibroTest–ActiTest plus SteatoTest® > 0,38 :
SteatoTest® non payant coût
IMC, cholestérol, stéatose présente
triglycerides et glycémie
Syndrome métabolique,
NAFLD liver Score > - 0,640 : Dosage
diabète de type 2, oui libre
fat score stéatose présente insulinémie
insulinémie, AST/ALT ratio

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage de la stéatose des diabétiques de type 2 203

Tableau 3. - Principaux tests non invasifs d’évaluation de la fibrose

Logiciel de
Test Paramètres utilisés calcul online Interprétation Accès Limitations
accessible

Ratio > 1 : suspicion Précision


AST/ALT ratio ASAT, ALAT oui libre
de fibrose avancée modeste

FIB-4 <1,45 : pas Nombre


de fibrose avancée élevé de
Fibrosis-4 Âge, ASAT, ALAT,
oui libre patients en
(FIB-4) index plaquettes
FIB-4 >3,25 : zone
fibrose avancée indéterminée

Gamma-GT, bilirubine,
FibroTest > 0,58 :
alpha-2-macroglobuline,
FibroTest non fibrose avancée payant coût
apolipoprotéine A1,
(F3-F4)
haptoglobine, ASAT, ALAT

< -1,455 : pas de


fibrose significative
Oui (F0-F2) Nombre
Âge, IMC, intolérance au
élevé de
NAFLD glucose, diabète, ASAT, ≤ -1,455 à ≤ 0.675 :
http:// libre patients en
fibrosis score ALAT, plaquettes, score indéterminé
nafldscore. zone
albumine > 0,675 : présence
com/ indéterminée
d’une fibrose
significative (F3-F4)

Facteurs métaboliques présents


Échographie hépatique
(Biomarqueurs de stéatose) / Enzymes hépatiques

Stéatose présente Stéatose absente

Enzymes hépatiques normales Enzymes hépatiques élevées Enzymes hépatiques normales

Scores non invasifs de fibrose

faible risque risque intermédiaire ou élevé

avis spécialisé

suivi à 2 ans suivi tous les 3 à 5 ans

Enzymes hépatiques, Score non invasif de fibrose Échographie/ Enzymes hépatiques

Figure 1. - Algorithme diagnostique et de suivi de la sévérité de l’atteinte hépatique en cas de


suspicion de NAFLD chez un patient à risque métabolique selon les recommandations des sociétés
européennes EASL-EASD-EASO (19).

Paris, 23-24 novembre 2018


204 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

et la prise en charge thérapeutique spécifique. Les recommandations proposent que


­l'évaluation de cette fibrose puisse se faire par des méthodes non invasives comme le
NAFLD fibrosis score, le FIB-4, les scores ELF (Enhanced Liver Fibrosis) et le FibroTest
(Tableau 3). Ces marqueurs de fibrose doivent être calculés pour chaque patient porteur
d'une stéatose afin d'éliminer une fibrose significative supérieure ou égale au stade F2. Si
une fibrose significative ne peut être éliminée le patient doit être adressé à une structure
spécialisée pour un bilan complémentaire avec notamment une évaluation de la fibrose
par élastométrie. Parmi les techniques d’imagerie, il est possible d’utiliser l’élastométrie
pour évaluer la fibrose avancée. Une des limites de l’élastométrie est l’incertitude des résul-
tats observés chez des sujets avec un IMC élevé, avec jusqu’à 20 % de résultats peu fiables
chez l’obèse (20). La sonde XL doit être utilisée chez ces patients obèses afin de diminuer
le taux d’échec de cette technique. Néanmoins, les recommandations européennes, consi-
dèrent que les biomarqueurs et les scores de fibrose ainsi que l’élastographie impulsionnelle
sont des procédures non invasives acceptables pour identifier les patients à faible risque de
fibrose avancée (20). La Figure 1 résume les propositions des sociétés Européennes diabé-
tologie, d’hépatologie et d'obésité concernant le dépistage et l'évaluation de la sévérité de
l'hépatopathie chez les patients à risque métabolique. Les recommandations européennes
proposent d’adresser à l’hépatologues tous les patients ayant des taux de transaminases ou
de GGT au-dessus des normes.

PROBLÉMATIQUE DE LA PRISE EN CHARGE ET DU DÉPISTAGE DE LA


STÉATOSE CHEZ LES PATIENTS DIABÉTIQUES DE TYPE 2
Le dépistage de la stéatose et l'évaluation de la sévérité de la fibrose des patients diabé-
tiques de type 2 sont rendus difficiles par plusieurs problèmes que sont : le nombre de
patients diabétiques à dépister, l’impossibilité matérielle pour les hépatologues de voir en
consultation la totalité des patients diabétiques porteurs d'une hépatopathie, et la valida-
tion des scores non invasifs de stéatose ou de fibrose dans cette population spécifique.
En effet, les patients diabétiques de type 2 sont très nombreux en France avec plus de
3  millions de personnes atteintes, et au minimum deux tiers présentent une stéatose. Il est
donc inenvisageable d'adresser à l'hépatologue un nombre aussi important de patients.
Nous devons donc disposer d'outils permettant de diagnostiquer les patients présentant
une fibrose significative supérieure ou égale au stade F2, qui doivent être adressés à l'hépa-
tologue. Du fait du très grand nombre de patients il est nécessaire que ce dépistage utilise
des méthodes à faible coût et simples à mettre en œuvre. Avec 80 % des patients diabé-
tiques de type 2 pris en charge uniquement par leur médecin généraliste, sans consultation
auprès d'un spécialiste diabétologue, ce dépistage doit pouvoir être réalisé dans un cabinet
de médecine générale.
Une 2ème difficulté concerne la validation des marqueurs biologiques de stéatose et de
fibrose dans cette population spécifique. Nous avons déjà vu que les taux de transaminases
sous-estiment le niveau de stéatose chez les patients diabétiques de type 2 (10, 11). Plus de
la moitié des patients diabétiques porteurs d'une stéatose évoluée ont des transaminases
dans la norme (10, 11). Il est donc important que les scores non invasifs d'évaluation de la
stéatose ou de la fibrose aient été évalués dans la population spécifique que représentent les
patients diabétiques. Concernant l'utilisation des scores non invasifs d'évaluation de la
stéatose, nous avions déjà observé par le passé, en les comparant à la spectroscopie RMN,
que leurs performances étaient médiocres (21). Nous avions pu observer notamment que

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage de la stéatose des diabétiques de type 2 205

les tests suivants : SteatoTest®, FLI, HSI (Hepatic Steatosis Index) n'étaient pas adaptés pour
le dépistage de la stéatose des patients diabétiques de type 2 (21). Ces différents tests
utilisent des paramètres biologiques comme la glycémie, le taux de triglycérides, l'insuli-
némie qui sont modifiées par les traitements que reçoivent les patients diabétiques, ce qui
peut expliquer en partie les faibles performances de ces différents tests.
Concernant les tests non invasifs d’évaluation de la fibrose un travail récent a évalué
leurs performances dans une population de sujets diabétiques de type 2 en comparaison
avec des sujets non diabétiques (22). Les performances des scores de fibroses FIB-4, APRI
(AST to Platelet Ratio Index) et Hépascore par comparaison à la biopsie hépatique sont
significativement plus faibles chez les patients diabétiques que chez les sujets non diabé-
tiques (22). De plus, il est intéressant de noter que ces tests sont moins performants pour
prédire la survenue de complications hépatiques de la NAFLD chez les sujets diabétiques
(22). Les patients diabétiques avec des scores non invasifs de fibrose faible présentent dans
cette étude un risque encore très élevé de développer des complications hépatiques, entre
15 et 21% à 5 ans selon le score de fibrose utilisé (22). Néanmoins, l’utilisation de ces tests
non-invasifs d’évaluation de la fibrose reste pertinente chez les patients diabétiques, même
s’il faut avoir conscience de leurs limites.
Un dernier frein à la prise en charge et au dépistage de la NAFLD chez les patients
diabétiques de type 2 est lié à une mauvaise évaluation du risque de cette pathologie chez
les spécialistes en diabétologie. Récemment, 133 diabétologues anglais ont répondu à une
enquête sur leur prise en charge de la NAFLD chez leurs patients diabétiques (23). Il
ressort de cette étude, que les médecins diabétologues sous-estiment très largement le
pourcentage de patients porteurs d’une NAFLD chez les patients diabétiques qu’ils
prennent en charge. Seulement 5 % des diabétologues évaluaient correctement ([entre 50
et 75 %]), la prévalence de la stéatose chez les sujets diabétiques de type 2. Les 3/4 des
médecins répondeurs évaluaient la prévalence de la NAFLD des patients diabétiques à
moins de 30% (23). Un autre enseignement très intéressant de cette enquête est que seule-
ment 5 % des diabétologues anglais utilisent les scores non-invasifs de fibrose (23).

APPLICATION DES RECOMMANDATIONS EUROPÉENNES SUR LE


DÉPISTAGE DE LA STÉATOSE DES DIABÉTIQUES DE TYPE 2
Il existe peu d'études ayant évalué la faisabilité des recommandations européennes sur le
dépistage de la stéatose dans des populations spécifiques. Un premier travail avait évalué
l'application de ces recommandations dans une population spécifique d'obèses morbides,
dont plus du tiers présentait un diabète de type 2 (24). Les auteurs de ce travail ont montré
que dans cette population de 385 sujets atteints d'une obésité sévère, 81,3% des patients
étaient porteurs d'une NAFLD. L'application des recommandations européennes condui-
sait à adresser à un spécialiste des maladies du foie, 289 individus de cette cohorte, c'est-à-
dire 75,1% des patients (24). Dans cette étude les auteurs avaient utilisé le NAFLD fibrosis
score comme outil d'évaluation de la fibrose. L’utilisation du Fibroscan® en association au
score non invasif de fibrose permettait de diminuer le nombre de patient à adresser aux
spécialistes des maladies du foie de 81.3 % à 68 %, ce qui reste encore très élevé (24).
Une évaluation de la faisabilité et de la pertinence de ces recommandations européennes
a été réalisée dans une population exclusivement composée de patients diabétiques de
type 2 (25). Les 179 patients qui avaient été inclus dans cette étude ont eu un bilan biolo-

Paris, 23-24 novembre 2018


206 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

gique hépatique et une mesure du contenu hépatique en graisse (CHG) par spectroscopie
RMN qui est le gold standard non invasif d’évaluation de la stéatose. Les patients ont eu
également une évaluation de la stéatose par des scores invasifs comme le FLI et le
SteatoTest®. De même, chaque patient a bénéficié d'une évaluation non invasive de la
fibrose par scores non invasifs tels que ceux proposés par les guidelines comme le Fibrotest
et le NAFLD fibrosis score (25). Dans cette étude nous observons les faibles performances
des marqueurs non invasifs de stéatose comparés à la spectroscopie RMN dans une popula-
tion de patients diabétiques. En effet le FLI diagnostique la stéatose par erreur chez 24,6%
des patients. De même le StatoTest® diagnostique par erreur la stéatose chez 20,1% des
patients. L'application des guidelines utilisant une méthode de référence pour la stéatose
(spectroscopie RMN) associée à une évaluation de la fibrose avec le NAFLD fibrosis score
conduit à adresser à un spécialiste des maladies du foie 68,7 % des patients diabétiques de
type 2 (25).
De plus, les recommandations européennes proposent d’adresser à l’hépatologue tous les
patients avec une anomalie du bilan biologique hépatique (transaminases et GGT), (19).
Plusieurs études ont montré que 25 à 30 % des sujets porteurs d’un diabète de type 2
avaient des perturbations du bilan biologique hépatique (4). On observe donc qu’avant
même de procéder à l’évaluation de la stéatose et de la fibrose, l’application stricte des
recommandations européennes conduit déjà à adresser aux spécialistes des maladies du
foie plus du quart des patients diabétiques.
Deux enseignements principaux peuvent être tirés de ces différentes études évaluant la
faisabilité des recommandations européennes dans les populations d'obèses et de patients
diabétiques de type 2 : d’une part les tests non invasifs de détection de la stéatose sont peu
performants dans ces populations , d’autres part l’application des guidelines de l’EASD
conduiraient à adresser entre 1/3 à plus de 3/4 des patients diabétiques à un référent spécia-
liste de la NAFLD selon les tests et les seuils de fibrose retenus.
Compte tenu du nombre de patients diabétiques en France, ces guidelines paraissent
difficilement applicables. De plus, une des limites de ces méthodes d'exploration de la
stéatose et de la sévérité de la fibrose chez les patients diabétiques de type 2 est l'absence
d'étude comparant ces méthodologies à la réalité de l'atteinte hépatique authentifiée par
biopsie hépatique et étude anatomopathologique.

EXISTE-T-IL DES SOLUTIONS ALTERNATIVES POUR AMÉLIORER LA


PERFORMANCE DU DÉPISTAGE DE LA STÉATOSE DANS LA
POPULATION DES DIABÉTIQUES DE TYPE 2.
Récemment Boursier et coll. ont proposé un nouvel algorithme en deux temps pour le
dépistage non invasif de la fibrose avancée (26). Le easy LIver Fibrosis Test (eLIFT) est un
score qui attribue des points en fonction de l'âge, du sexe, des taux de gamma GT et
d'ASAT, de plaquettes et du taux de prothrombine (Tableau 4). Ce test très simple d'utili-
sation, est économiquement très intéressant puisqu'il utilise des dosages réalisés en pratique
clinique. Il permet de sélectionner les patients devant bénéficier d'explorations plus élabo-
rées dans un 2ème temps. C'est seulement si le score eLIFT est supérieur ou égal 8, que les
auteurs proposent des tests plus coûteux et plus complexes comme le FibroMeter®VCTE qui
est un test biologique non invasif de fibrose couplé à une mesure de l’élastométrie hépatique.
Les patients ayant un score de fibrose avancée ou indéterminée lors de la réalisation du

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage de la stéatose des diabétiques de type 2 207

Tableau 4. - Score eLIFT d’après Boursier et coll (26).


Un score eLIFT > 8 justifie le recours à des explorations complémentaires
(tests non invasifs de fibrose, élastométrie hépatique).

ITEM Points

Âge > 40 ans 3

Sexe masculin 1

ASAT (UI/l) :
35-69 2
> 70 4

GGT (UI/l) :
35-89 1
> 90 2

Plaquettes (G/l) :
170-249 1
< 170 4

Taux de prothrombine (%) :


84-96 2
< 84 4

test non invasif de 2ème intention sont alors adressés à un spécialiste des maladies du foie
pour bilan complémentaire (26). L'utilisation de cet algorithme en deux temps dans une
population de patients diabétiques avec le test eLIFT en première intention et le FibroTest
en 2ème intention permet de réduire de façon importante le nombre de patients à adresser
à l'hépatologue (27). Sur une population de 220 patients diabétiques de type 2, le dépistage
simple de la stéatose et la réalisation du score eLIFT permettent d'arrêter les explorations
chez 78,1% des patients (27). Un test de 2ème intention de la fibrose n'est réalisé que pour
48 patients sur les 220 sujets évalués initialement. Au final seulement 7 patients (3,1 %)
avaient un FibroTest suggérant une fibrose avancée nécessitant un avis spécialisé auprès
d'un hépatologue (27). Il semble donc que la réalisation de ce type d'algorithme en deux
temps pourrait être bénéfique à la fois sur le plan économique, en limitant le recours aux
explorations plus coûteuses, et sur le plan de la faisabilité, en diminuant le nombre de
patients diabétiques à adresser à l'hépatologue. De même, l’utilisation du Fibroscan® direc-
tement dans les unités de diabétologie pourrait permettre de sélectionner en amont les
patients diabétiques porteurs d’une fibrose avancée à adresser à l’hépatologue pour une
prise en charge spécifique. Récemment une équipe française a évalué la pertinence du
dépistage systématique de la fibrose chez 705 sujets diabétiques consultant dans un centre
de santé (28). Une stéatose était retrouvée chez 75 % des patients et 12.7% des sujets
avaient une fibrose avancée lors de la mesure d’élastométrie (28). Sur les patients porteurs
d’une fibrose avancée au Fibroscan® avec une mesure d’élastométrie > 13 kPa, 8 présen-
taient une cirrhose et 6 une fibrose avancée (28). Il n’y avait pas de patient avec une
cirrhose à la biopsie de foie lorsque la mesure d’élastométrie était inférieure à 13 kPa (28).

CONCLUSION
On voit que l’application stricte des recommandations européennes n'est pas envisa-
geable chez les patients diabétiques de type 2. Elle conduirait à adresser à l'hépatologue un

Paris, 23-24 novembre 2018


208 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

nombre beaucoup trop important de patients. Compte tenu du risque spécifique d'évolu-
tion de la NAFLD des patients diabétiques de type 2, associé aux performances parfois
variables des tests de dépistage non invasifs de l'atteinte hépatique, il semble nécessaire
d'évaluer les stratégies de dépistage dans cette population spécifique. Le dépistage en deux
temps, utilisant un premier test de screening simple, non coûteux, accessible aussi bien en
médecine spécialisée qu'en médecine générale, nous semble une stratégie tout à fait
intéressante. Cela devrait permettre de proposer des tests plus élaborés et plus coûteux
associant les marqueurs non invasifs complexes et l’élastométrie hépatique à un nombre
beaucoup plus limité de patients. Ces tests de 2ème intention peuvent alors être réalisés
dans des structures spécialisées. Par ailleurs, des actions de sensibilisation des patients et
des soignants sur cette pathologie hépatique semblent nécessaires pour permettre un
dépistage plus précoce des complications des hépatopathies de surcharge des patients
diabétiques.

Services de diabétologie et endocrinologie,


INSERM LNC 1231, CHU du Bocage,
BP 77908, 21079 Dijon cedex, France.

Adresse pour la correspondance : Professeur Jean-Michel PETIT, Service de Diabétologie et


d’Endocrinologie, CHU du Bocage, BP 77908, 21079 Dijon cedex, France.
Tél : (33) 3 80 29 34 53 - Fax : (33) 3 80 29 35 19 – Courriel : jean-michel.petit@chu-dijon.fr

CLINICAL PRACTICE RECOMMENDATIONS FOR THE MANAGEMENT


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

OF NON-ALCOHOLIC FATTY LIVER DISEASE: EVALUATION OF THEIR


APPLICATION IN PEOPLE WITH TYPE 2 DIABETES
by Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA,
Alexia ROULAND and Bruno VERGES (Dijon, France)

ABSTRACT
Non-alcoholic fatty liver disease (NAFLD) is very common in people with type 2 diabetes
mellitus with approximately two thirds of them being diagnosed with this disease. Type 2
diabetes is an aggravating factor for NAFLD with an increased risk for developing nonalco-
holic steatohepatitis (NASH), liver fibrosis, cirrhosis and hepatocellular carcinoma.
Recently, the European Association for the Study of the Liver (EASL), the European
Association for the Study of Diabetes (EASD) and the European Association for the Study
of Obesity (EASO) proposed recommendations for the diagnosis, treatment and follow-up
of NAFLD. In these new recommendations, biomarkers, fibrosis scores and transient
elastography, are considered acceptable non-invasive procedures for the identification of
cases with a low risk of advanced fibrosis/cirrhosis. However, the application of the EASL-
EASD-EASO algorithm for the diagnosis, treatment and follow-up of NAFLD would lead
to an excessive number of people with type 2 diabetes being referred to a liver clinic. It seems
very difficult to apply these new algorithms in routine clinical practice. We suggest that new
clinical and/or biological biomarkers of steatosis and fibrosis be specifically validated in people
with type 2 diabetes. A stepwise algorithm using simple and widely available blood test
associated with use of transient elastography directly in diabetes department could be an
interesting screening strategy to limit the number of patients being referred to hepatologists.

Key-words : steatosis, type 2 diabetes, non-alcoholic fatty liver disease, fibrosis, noninvasive biomarkers,
European guidelines.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Stéatopathies : Application des recommandations européennes sur le dépistage de la stéatose des diabétiques de type 2 209

BIBLIOGRAPHIE

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management of patients with diabetes and liver disease. Diabetes Care. 2007; 30: 734-43. - 2.  Lebovitz
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veterans is associated with nonalcoholic fatty liver disease. Clin Gastroenterol Hepatol. 2016; 14: 124-31.
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spectroscopy. Eur Radiol. 2012; 22: 855-63. - 22.  Bertot L, Jeffrey GP, de Boer B, MacQuillan G, Garas
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fatty liver disease are underestimated in clinical practice: impact of a dedicated screening approach
at a large university teaching hospital. Diabet. Med. 35: 89–98. - 24.  B lond E, Disse E, Cuerq C, Drai
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non-alcoholic fatty liver disease in severely obese people: do they lead to over-referral? Diabetologia.
2017; 60: 1218-1222. - 25.  Sberna AL, Bouillet B, Rouland A, Brindisi MC, Nguyen A, Mouillot T et al.
European Association for the Study of the Liver (EASL), European Association for the Study of Diabetes
(EASD) and European Association for the Study of Obesity (EASO) clinical practice recommendations
for the management of non-alcoholic fatty liver disease: evaluation of their application in people with
Type 2 diabetes. Diabet Med. 2018; 35: 368-375. - 26.  Boursier J, de Ledinghen V, Leroy V, Anty
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invasive diagnosis of advanced liver fibrosis and cirrhosis. J Hepatol. 2017; 66: 1158-1165. - 27.  Petit

Paris, 23-24 novembre 2018


210 Jean-Michel PETIT, Benjamin BOUILLET, Anne-Laure SBERNA, Alexia ROULAND et Bruno VERGES

JM, Bouillet B, Loffroy R, Rouland A, Hillon P, Verges B. Application of the new eLIFT test for the
non-invasive diagnosis of advanced liver fibrosis in people with type 2 diabetes. J Hepatol. 2018; 68:
603-604. - 28.  Roulot D, Roudot-Thoraval F, NKontchou G, Kouacou N, Costes JL, Elourimi G, et al.
Concomitant screening for liver fibrosis and steatosis in French type 2 diabetic patients using Fibroscan.
Liver Int. 2017; 37: 1897-1906.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


HYPERTHYROÏDIES
MODALITÉS DE LA PRISE EN CHARGE EN FRANCE

par Bernard GOICHOT (Strasbourg)

L’hyperthyroïdie est l’une des plus fréquentes des endocrinopathies. En l’absence de


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

données scientifiques fiables, la démarche diagnostique et la prise en charge thérapeutique


varient d’un pays à l’autre et au sein d’un même pays. Une étude récente a permis de mieux
caractériser les pratiques en France. Sur le plan diagnostic on note une sous-prescription
de la recherche des anticorps anti récepteurs de la TSH, pourtant recom­mandée en
première intention par la plupart des sociétés savantes et facilement accessible dans le pays,
et une sur-prescription d’échographies dont l’intérêt est discuté. Dans la maladie de
Base­dow, les antithyroïdiens de synthèse sont utilisés lors du premier épisode chez plus de
90 % des patients. Le schéma combiné (« block and replace »), pourtant déconseillé dans
les recommandations inter­nationales, reste utilisé chez plus de la moitié des patients et
semble associé à une obtention plus rapide de l’euthyroïdie. Ces résultats sont confrontés
aux pratiques décrites dans d’autres pays. Des études prospectives seraient nécessaires pour
déterminer les modalités optimales de prise en charge des hyperthyroïdies.

Mots-clés : hyperthyroïdie, maladie de Basedow, diagnostic, traitement, antithyroïdiens.

L’hyperthyroïdie est une des maladies endocriniennes les plus fréquentes. Plus de 90  %
des hyperthyroïdies sont liées à une des trois principales étiologies, la maladie de Basedow,
l’adénome toxique ou le goitre multinodulaire toxique. Malgré la fréquence de la maladie
et des modalités thérapeutiques qui n’ont guère évolué depuis plusieurs décennies, la litté-
rature scientifique est relativement pauvre concernant l’évaluation des méthodes diagnos-
tiques et thérapeutiques de l’hyperthyroïdie. Comme dans beaucoup d’autres domaines, les
approches diagnostiques (notamment la réalisation de certains examens complémen-
taires) n’ont quasiment jamais fait l’objet d’une réelle évaluation. En ce qui concerne les
traitements, les modalités disponibles peuvent être réparties en deux classes clairement
distinctes dans leur objectif : 1) le traitement médical (médicamenteux) qui a un effet
suspensif et ne peut être envisagé seul que dans la maladie de Basedow 2) le traitement
radical, qui lui-même comporte deux grandes options : la chirurgie ou l’administration
d’Iode 131 (« irathérapie »), qui va s’accompagner dans l’immense majorité des cas d’une
hypothyroïdie séquellaire définitive. On comprend bien la difficulté de comparer des
traitements aussi différents dans leur objectif, leurs modalités pratiques et leurs effets
indésirables ou risques potentiels. En l’absence de données scientifiques pertinentes, la
prise en charge des hyperthyroïdies repose donc sur des recommandations de sociétés
savantes elles-mêmes établies principalement sur des consensus d’experts et donc de très
faible niveau de preuve.
Un certain nombre d’études ont rapporté les modalités de prise en charge de l’hyperthy-
roïdie dans différentes régions du monde. Leur intérêt réside dans la mise en évidence

Paris, 23-24 novembre 2018


212 Bernard GOICHOT

d’une variabilité assez conséquente des pratiques diagnostiques et thérapeutiques. Si


clairement ces différences sont liées essentiellement à des questions d’« écoles » ou parfois
de problématiques d’accès aux soins, elles permettent d’alimenter une réflexion sur nos
propres pratiques, leur pertinence et la nécessité dans certains domaines de clarifier
certaines questions par des études cliniques bien faites.
A partir d’une étude menée en France et récemment publiée (1), nous discuterons ici de
quelques points qui nous ont paru diverger des pratiques rapportées dans d’autres pays (2,
3) pour tenter d’en identifier les raisons et replacer ces éléments dans les recommandations
internationales les plus récentes.

MÉTHODOLOGIE
L’attention du lecteur est attirée sur quelques différences méthodologiques entre les
études de pratiques rapportées dans certains articles qui limitent les possibilités de compa-
raison. Ainsi l’étude française a consisté en un questionnaire adressé à un échantillon
représentatif d’endocrinologues portant sur d’authentiques patients et reflète donc proba-
blement assez fidèlement les pratiques. Plusieurs autres études auxquelles il sera fait
référence ont été réalisées à partir de « vignettes » cliniques interrogeant les praticiens sur
des situations théoriques (il s’agit donc de pratiques déclarées plus que de pratiques réelles)
et le « public » visé différait dans son mode de recrutement : endocrinologues, membres
de l’American Thyroid Association (ATA) probablement plus spécialisés, etc... Les compa-
raisons n’ont donc d’intérêt que comme support d’une réflexion sur les pratiques françaises.

PRISE EN CHARGE DIAGNOSTIQUE


Le tableau 1 résume les résultats de l’étude française concernant les examens pratiqués
chez des patients ayant une hyperthyroïdie en fonction des trois principales étiologies.
L’interprétation doit être nuancée par le fait que le diagnostic étiologique était porté a
posteriori ce qui peut expliquer la redondance de certains examens. Néanmoins plusieurs
éléments peuvent être soulignés : la proportion relativement faible de prescription des
anticorps anti récepteurs de la TSH (Ac Anti R-TSH), y compris en cas de maladie de
Basedow (61 %), la prescription fréquente des anticorps anti TPO (Ac anti TPO, 51 %), et
la fréquence extrêmement importante de l’échographie thyroïdienne (plus de 90 % quelle
que soit l’étiologie). Les enquêtes américaines ou européennes sus-citées montraient des
chiffres un peu plus élevés pour les Ac Anti R-TSH, un peu plus faibles pour les Ac anti
TPO et de seulement 25 % environ pour l’échographie. La place de cet examen en Europe
avait fait l’objet de polémiques lors de la publication de la précédente version des recom-
mandations de l’ATA (4, 5). La France se caractérise par une utilisation quasi-systéma-
tique de cet examen alors même que son intérêt pour la prise en charge semble très limité
(hors situations particulières type hyperthyroïdie à l’amiodarone, grossesse…). Les
der­nières recommandations de l’ATA peuvent être résumées de façon assez simples : soit le
tableau clinique est clairement celui d’une maladie de Basedow (femme jeune, goitre
homo­gène, signes extra-thyroïdiens notamment l’orbitopathie…) et dans ce cas aucun
exa­men à visée étiologique n’est nécessaire ; soit l’étiologie n’est pas cliniquement évidente,
est dans ce cas l’examen recommandé en 1ère ligne est la recherche des Ac Anti R-TSH.
Cette recommandation repose sur la fréquence de la maladie de Basedow et sur les excel-
lentes performances (sensibilité, spécificité) de ce dosage. Bien entendu cette recomman-
dation doit être nuancée en fonction de la disponibilité des examens (mais ce dosage est à

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hyperthyroïdies - Modalités de la prise en charge en France 213

priori accessible facilement en France) et du terrain et/ou du tableau clinique. La scinti-


graphie peut en effet être d’emblée préférée chez un sujet âgé ayant cliniquement un goitre
hétérogène. Les défenseurs de l’échographie thyroïdienne insistent sur les anomalies qui
peuvent être observées dans la maladie de Basedow et sur certains signes indirects pouvant
orienter vers l’une ou l’autre étiologie. Ces éléments n’apparaissent cependant pas discri-
minants et nécessitent des opérateurs experts dont l’accessibilité est loin d’être évidente.
Le risque de ces échographies non justifiées est évidemment de participer au sur-diagnostic
de nodules thyroïdiens et donc de cancers thyroïdiens occultes à l’origine d’une iatro­génie
maintenant bien démontrée (6, 7). Dans l’étude française, seuls 4,5 % des patients n’avaient
pas eu d’examen à visée étiologique, les 2/3 avaient eu une combinaison variable des trois
principaux examens, Ac anti R-TSH, échographie et scintigraphie. La redondance de ces
examens était donc probable dans la majorité des cas.
Tableau 1. - Fréquence des examens prescrits en France chez les patients hyperthyroïdiens (1)

Maladies de Goitre
Adénome
Examens prescrits Basedow multinodulaire p
toxique (n = 69)
(n = 802) (n = 121)

Anticorps anti récepteurs de


61 47 45 < 0,002
la TSH (%)

Anticorps anti TPO (%) 51 39 30 < 0,001

Échographie (%) 93 91 94 NS

Scintigraphie (%) 31 67 89 < 0,001

PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE


Elle dépend pour la majorité des experts du diagnostic étiologique. Il faut cependant
rappeler que dans certains pays, où l’usage de l’irathérapie est privilégié, d’autres experts
argumentent que ce traitement peut être proposé sans démarche étiologique préalable.
Cette position semble toutefois assez minoritaire.
En ce qui concerne la maladie de Basedow, l’enquête française montrait que plus de
90 % des patients sont traités lors du premier épisode par des antithyroïdiens de synthèse
(ATS). Cette attitude est très largement majoritaire dans le monde sauf aux États-Unis où
l’irathérapie était proposée en 1ère intention à 70 % des patients dans une étude publiée il
y a une dizaine d’années (8).
Des données plus récentes montrent une augmentation de la proportion de patients
traités par ATS, qui restent cependant encore minoritaires aux États-Unis (2).
Il n’y a quasiment pas d’étude comparant les trois modalités thérapeutiques pour des
raisons évidentes déjà évoquées dans l’introduction. En ce qui concerne le traitement
médical, la plupart des études ont comparé différentes durées de traitement avec une durée
considérée actuellement comme optimale entre 12 et 18 mois. Le traitement combiné
associant ATS et L-Thyroxine (« Block and replace ») introduit au début des années 90
n’est plus recommandé au niveau international, aucune étude n’ayant démontré une
supériorité en termes de diminution du risque de rechute. Il est même déconseillé car
potentiellement associé à une fréquence plus élevée d’effets indésirables. Il reste encore
largement utilisé en France (55% dans la maladie de Basedow par rapport à 45 % pour

Paris, 23-24 novembre 2018


214 Bernard GOICHOT

l’approche « titration »). L’étude a d’ailleurs montré (avec les limites méthodologiques
d’une étude observationnelle) que le traitement combiné permettait d’obtenir plus rapide-
ment l’euthyroïdie que le traitement par titration. Un autre travail a suggéré que cette
modalité thérapeutique diminuait le nombre de bilans sanguins et de consultations même
si l’on peut s’interroger sur la pertinence clinique de ce résultat statistiquement significatif
(- 0,3 visite par an…) (9). En tout état de cause, l’intérêt de l’étude française est de mettre
en exergue la difficulté de restaurer rapidement l’euthyroïdie dans la maladie de Basedow.
Seuls 64 % des patients sont cliniquement euthyroïdiens après 3 mois, mais significative-
ment plus dans le groupe traité de façon combinée (71 % vs 56 %).

CONCLUSIONS
Ce travail montre les discordances importantes entre les pratiques françaises en matière
de diagnostic des hyperthyroïdies et les recommandations et pratiques dans d’autres
régions du monde. L’utilisation plus large des Ac anti R-TSH en 1ère intention devrait
certai­nement être encouragée compte-tenu de leurs excellentes performances, de leur
accessibilité et d’un coût assez modeste. La scintigraphie est l’examen à proposer devant
une suspicion d’hyperthyroïdie liée à une autonomisation (adénome toxique, goitre multi-
nodulaire) et en cas de négativité des Ac anti R-TSH. L’échographie devrait être réservée
aux situations de diagnostic difficile, d’indisponibilité des autres modalités d’exploration
ou en cas d’anomalie de la palpation cervicale.
Les pratiques thérapeutiques semblent elles plus en conformité avec celles de la majorité
des pays, hors États-Unis. Le traitement médical est le plus utilisé en première intention
dans la maladie de Basedow avec une pratique encore importante du traitement combiné.
Même s’il est déconseillé dans les recommandations internationales récentes, il semble
permettre l’obtention plus rapide du retour à l’euthyroïdie, objectif cliniquement pertinent
pour ces patients.

Service de Médecine interne, Endocrinologie et Nutrition


Hôpital de Hautepierre
Hôpitaux Universitaires de Strasbourg
Faculté de Médecine de Strasbourg
Avenue Molière
67098 Strasbourg Cedex

Adresse pour la correspondance : Professeur Bernard Goichot, adresse ci-dessus.


Tél : 03 88 12 75 94 – Courriel : bernard.goichot@chru-strasbourg.fr

HYPERTHYROIDISM
n n n n n n n n n n n n n n n n

PATTERNS IN THE MANAGEMENT IN FRANCE


by Bernard GOICHOT (Strasbourg - France)

ABSTRACT
Hyperthyroidism is one of the most common endocrinopathies. In the absence of reliable
scientific data, the diagnostic approach and the therapeutic management vary from one
country to another and within the same country. A recent study has made it possible to better

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hyperthyroïdies - Modalités de la prise en charge en France 215

n n n n n n n n n n n n n n n
characterize practices in France. In terms of diagnosis there is a sub-prescription of anti-TSH
receptor antibodies, though they are recommended by most international guidelines, and
easily available in the country, and an overprescription of ultrasounds whose interest is
discussed. In Graves' disease, antithyroid drugs are used in the first episode in more than
90% of patients. The block and replace regimen, which is not recommended by international
guidelines, remains used in more than half of patients and seems to be associated with faster
reach of euthyroidism. These results are confronted with practices described in other
countries. Prospective studies would be needed to determine optimal management of hyper-
thyroidism.

Key-words : hyperthyroidism, Graves’disease, diagnosis, treatment, antithyroid drugs.

BIBLIOGRAPHIE

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Paris, 23-24 novembre 2018


216

NOTES

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


LA CACHEXIE EXPLIQUÉE AUX ENDOCRINOLOGUES

par Jean-Paul THISSEN1,2, Isabelle MASSART1 et Audrey LOUMAYE1,2 (Bruxelles)

La cachexie peut se définir comme un syndrome systémique caractérisé par une perte
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

pondérale, résultant surtout d’une perte de masse maigre notamment musculaire, et


seulement partiellement réversible par l’apport nutritionnel. La cachexie se distingue de la
dénutrition simple car elle résulte d’une combinaison variable de réduction des ingesta et
d’altérations métaboliques, induites par l’inflammation. Elle complique de nombreuses
affections dont le cancer. Un faisceau d’arguments suggère le rôle de facteurs circulants
dans le développement de la cachexie, que ces facteurs soient produits par l’hôte ou par la
tumeur elle-même en cas de cancer. Le diagnostic de cachexie est basé essentiellement sur
le poids corporel, la perte de poids, la perte de masse musculaire et la réduction des ingesta.
Certains facteurs circulants pourraient constituer des biomarqueurs de la cachexie dans le
futur. La cachexie, en particulier la perte de masse musculaire, est un élément de mauvais
pronostic. Comme cette perte peut être aggravée par la réduction des ingesta due à
l’anorexie, il paraît logique d’optimaliser l’apport nutritionnel afin de la ralentir. Cependant,
plus l’inflammation est sévère, plus la résistance anabolique sera marquée. Il est dès lors
essentiel d’agir précocement, car il existe au début de la cachexie une fenêtre de réponse
anabolique à la nutrition, avec un bénéfice sur la qualité de vie, le poids, parfois la survie.
Au vu de l’efficacité toute relative de l’apport nutritionnel, des approches complémentaires
doivent être absolument recherchées. C’est dans ce sens que des thérapies hormonales au
sens large sont en cours d’investigation pour traiter la cachexie.

Mots-clés : inflammation, atrophie musculaire, survie, cancer, cytokines, hormones.

DÉFINITION
La cachexie peut se définir comme un syndrome systémique caractérisé par une perte
pondérale résultant surtout d’une perte de masse maigre notamment musculaire, avec ou
sans perte de masse grasse, et seulement partiellement réversible par un apport nutri-
tionnel optimalisé (1).

ÉTIOLOGIE
De nombreuses affections peuvent conduire à la cachexie. C’est le cas pour les insuffi-
sances d’organe à un stade avancé (cœur, rein, foie, poumon), pour certaines maladies
inflammatoires (polyarthrite rhumatoïde) ou infectieuses (SIDA avant l’ère des thérapies),
et le cancer, ce dernier contribuant à un tiers des cas de cachexie. La cachexie cancéreuse
affecte près de 80 % des patients avec un cancer avancé et est responsable de 25 % des
décès chez ces patients (2). Le développement de la cachexie est variable selon la nature
du cancer : fréquente en cas de cancer du pancréas, de la tête et du cou et du tube digestif
supérieur, plus rare en cas de cancer du sein ou de la prostate. Cette revue sera surtout
orientée vers la cachexie cancéreuse.

Paris, 23-24 novembre 2018


218 Jean-Paul THISSEN, Isabelle MASSART et Audrey LOUMAYE

DIFFÉRENCES AVEC LA DÉNUTRITION


La cachexie se distingue de la dénutrition simple par plusieurs aspects. En effet, au cours
de la cachexie, la réduction des ingesta n’est pas systématique, la dépense énergétique de
repos est rarement réduite, la perte de masse grasse peut être absente, au contraire de la
perte de masse maigre qui est systématique et rapide (3). En outre, l’administration d’un
support nutritionnel (oral, entéral ou parentéral) ne corrige que partiellement la perte de
poids et peu la perte de masse musculaire. Nourrir les patients cachectiques ne peut dès
lors qu’atténuer de façon limitée la perte progressive de masse maigre (4).

CRITÈRES DIAGNOSTIQUES
Selon le consensus proposé par WJ Evans (1), le diagnostic de cachexie peut être posé
en présence d’une perte de poids (involontaire) d’au moins 5 % en 12 mois (ou en présence
d’un IMC inférieur à 20 kg/m2), associée à trois des facteurs suivants : fatigue, perte de
force musculaire, anorexie, faible masse maigre ou anomalies biologiques telles qu’une
élévation de la CRP, une hypo-albuminémie ou une anémie. L’imprécision de cette défini-
tion reflète notre manque de connaissances fondamentales sur la physiopathologie de ce
syndrome. Pour la cachexie cancéreuse, un consensus a été proposé par K Fearon (5). Le
diagnostic de cachexie cancéreuse peut être posé dans une de ces trois circonstances : une
perte (involontaire) de poids > 5 % au cours des 6 derniers mois, une perte de poids > 2 %
associée à un IMC < 20 kg/m2, ou une perte de poids > 2 % associée à une faible masse
musculaire (< 5ème percentile). Il n’existe cependant pas de véritable consensus quant à la
méthode à utiliser pour définir l’anorexie ou la perte de masse musculaire. De façon
pragmatique, l’anorexie peut être recherchée par un questionnaire type SNAQ (Short
Nutritional Assessment Questionnaire) (6) et la masse musculaire évaluée par une analyse
des images de CT-scan abdominal au niveau de la vertèbre L3 (7).

TABLEAU CLINIQUE
La perte de poids est souvent le premier signe du développement d’une cachexie, parfois
même le signe d’appel de la présence d’un cancer. Cependant, la perte de masse musculaire
évaluée notamment par CT-scan abdominal peut survenir alors que le poids n’a pas encore
diminué (8). La coexistence de plus en plus fréquente d’une obésité rend d’ailleurs difficile
la quantification et l’interprétation d’une perte de poids. Un score basé sur l’IMC initial et
la perte de poids permet néanmoins de prédire le pronostic (9). Cependant, le pronostic
de la cachexie cancéreuse dépend directement de l’ampleur de la perte de masse muscu-
laire (10). Parallèlement à ces modifications de composition corporelle, qui conditionnent
en partie le pronostic, d’autres symptômes comme l’anorexie, la fatigue, la faiblesse,
l’anxiété, la dépression, peuvent altérer profondément la qualité de vie.

PRONOSTIC
La présence d’une cachexie est un élément de mauvais pronostic. En effet, la perte de
masse musculaire qui la caractérise est associée à une survie raccourcie indépendamment
de l'IMC (11), une toxicité accrue de la chimiothérapie (12), une moindre qualité de vie et
un risque accru de complications postopératoires (13). Des travaux chez l’animal montrent
que la correction de la perte de masse musculaire améliore la survie sans freiner pour
autant la croissance tumorale (14). La préservation de la perte de masse musculaire
apparaît dès lors comme un objectif thérapeutique essentiel.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La cachexie expliquée aux endocrinologues 219

PHYSIOPATHOLOGIE
La cachexie cancéreuse résulte d’une combinaison variable de réduction des ingesta et
d’altérations métaboliques (15). La réduction des ingesta est une composante importante,
et parfois essentielle, dans la perte de poids, mais le plus souvent insuffisante à elle seule
pour l’expliquer. La dépense énergétique de repos souvent élevée, en rapport avec l’inflam-
mation, l’existence de cycles métaboliques futiles (effet Warburg avec activation du cycle
de Cori), l’activation du tissu adipeux brun (beige), contribue à accroître le déficit énergé-
tique, et favorise donc la fonte du tissu adipeux (2). La perte de masse musculaire résulte
d’une réduction de la taille des fibres musculaires (surtout les fibres rapides glycolytiques)
(3), due à la fois à une réduction de la synthèse protéique et une augmentation de la
protéolyse musculaire. En effet, la voie Akt/mTOR stimulatrice de la synthèse protéique
est inhibée tandis que la voie FOXO stimulatrice de l’autophagie et du système ubiquitine
protéasome est activée dans le muscle squelettique. De façon intrigante, plusieurs travaux
suggèrent que la réduction du tissu adipeux par la lipolyse et l’oxydation accrue des acides
gras par le muscle contribuent à l’atrophie musculaire (16, 17). Des données récentes
impliquent le rôle d’autres organes ou tissus dans le développement de la cachexie. C’est le
cas du cerveau, en particulier l’hypothalamus (18) et de l’intestin, en particulier du micro-
biote (19). Il s’agit donc bien d’un syndrome systémique.

ALTÉRATIONS HORMONALES AU COURS DE LA CACHEXIE


CANCÉREUSE
La cachexie est caractérisée par une diminution des taux circulants ou une résistance à
l’action des principales hormones anaboliques (insuline, hormone de croissance, Insulin-like
Growth Factor (IGF)-I, testostérone). Parallèlement, les taux des principales hormones
cataboliques (glucocorticoïdes, glucagon, …) sont élevés (2). Ces changements hormonaux
sont secondaires à l’inflammation omniprésente dans la cachexie cancéreuse (20). Ils contri-
buent sans nul doute à l’atrophie musculaire qui caractérise la cachexie, de façon directe
mais également indirectement en inhibant l’action anabolique des nutriments, notamment
les acides aminés, sur le muscle (21). Cette résistance anabolique se traduit par une perte
relative de l’efficacité de l’apport nutritionnel sur la synthèse protéique musculaire.

DIFFÉRENCES MODÈLE ANIMAL-CONDITION CLINIQUE HUMAINE


La majorité de nos connaissances physiopathologiques sur la cachexie cancéreuse a été
obtenue à partir de modèles animaux, en particulier chez des rongeurs, à qui des cellules
tumorales ont été injectées. La pertinence de ces modèles animaux est discutable à
plusieurs égards. En effet, dans ces modèles, la tumeur est souvent ectopique, sa taille par
rapport à celle de l’individu est disproportionnée, la vitesse de développement de la
cachexie est très rapide et les animaux étudiés sont le plus souvent jeunes et sans comor-
bidités, contrairement à la situation observée chez l’homme (22).

RELATION CACHEXIE CANCÉREUSE – ENDOCRINOLOGIE


Un faisceau d’arguments suggère le rôle de facteurs circulants dans le développement de
la cachexie cancéreuse, que ces facteurs soient produits par l’hôte ou par la tumeur elle-
même. En outre, certains de ces facteurs pourraient constituer des biomarqueurs de la
cachexie. Enfin, des thérapies hormonales au sens large, à action anabolique ou anti-
catabolique, sont en cours d’investigation pour traiter la cachexie.

Paris, 23-24 novembre 2018


220 Jean-Paul THISSEN, Isabelle MASSART et Audrey LOUMAYE

Hormones comme médiateurs de la cachexie cancéreuse


De nombreux facteurs susceptibles de contribuer voire d’induire la cachexie, ont été
identifiés dans le sécrétome tumoral, surtout chez l’animal, mais aussi possiblement chez
l’homme. La tumeur apparaît dès lors comme un organe endocrine à part entière. La
nature de ces facteurs pro-cachectisants est extrêmement variable. Certains appartiennent
à la famille du Transforming Growth Factor (TGF)β, en particulier l’Activine A, la Myosta-
tine et le TGFβ lui-même (2). À côté d’hormones comme la Parathormone-Related Protein
(PTHrP) et l’Adrénomédulline, on retrouve certains neurotransmetteurs comme la séroto-
nine, des protéines HSP (Heat Shock Protein) incluses dans des exosomes ou encore des
microARNs. Rares sont les facteurs pro-cachectisants qui sont uniquement produits par la
tumeur cependant. En effet, la majorité de ces facteurs (et beaucoup d’autres), souvent de
nature pro-inflammatoire, peuvent également être produits par l’hôte en réponse au
développement de la tumeur. C’est le cas de nombreuses cytokines bien connues, comme
le Tumor Necrosis Factor (TNF)-α, l’Interleukine (IL)-6 et l’IL-1β, mais aussi moins
connues comme TWEAK (Tumor necrosis factor-like weak inducer of apoptosis) ou d’autres
molécules pro-inflammatoires, comme le Growth Differentiation Factor (GDF)-15. Ces
facteurs, lorsqu’ils sont administrés à l’animal de laboratoire, miment en tout ou en partie
le tableau de la cachexie. Leur action peut être directe sur les organes, tissus, cellules
cibles, mais aussi indirectes en interaction avec d’autres hormones plus classiques, notam-
ment les glucocorticoïdes (23). Alors que certains facteurs induisent surtout une anorexie
(GDF-15), d’autres induisent une atrophie du muscle (Activine A) ou du tissu adipeux
(Adrénomédulline). Enfin, ces facteurs peuvent agir de concert. C’est le cas du GDF-11 qui
stimule la production de GDF-15 (anorexigène) et de l’Activine A (atrophiante) (24). Ces
données suggèrent donc qu’il est peu probable qu’un facteur à lui seul soit responsable de
la cachexie cancéreuse.

Hormones comme outils diagnostiques/pronostiques


Le fait que de nombreux facteurs circulants soient potentiellement impliqués dans le
développement de la cachexie cancéreuse suggère que la mesure de leurs taux circulants
puisse être utilisée pour le diagnostic précoce de cette condition (25). Ainsi, des concen-
trations circulantes élevées de certains facteurs comme le GDF15, l’Activine A, le MCP-1
sont associés à la cachexie, à une faible masse musculaire, voire à une survie raccourcie
(26-29). Le taux des cytokines pro-inflammatoires classiques par contre s’est révélé
décevant pour le diagnostic de la cachexie.

Hormones comme outils thérapeutiques


Au vu de l’efficacité toute relative de l’apport nutritionnel même optimalisé dans le
traitement de la cachexie, des approches complémentaires doivent être absolument recher-
chées. De nombreuses pistes, en particulier à visée anti-inflammatoire ou plus spécifique-
ment anti-cytokine, ont été testées surtout dans des modèles animaux (30). Seule l’inhibi-
tion de l’IL-6 par des anticorps monoclonaux semble améliorer quelque peu la cachexie. À
l’heure actuelle, les molécules les plus étudiées visent à restaurer l’appétit (Ghreline,
anti-GDF-15, antagoniste du récepteur MC4) ou à stimuler l’anabolisme musculaire (Selec-
tive Androgen Receptor Modulators ou SARMS, anti-Myostatine/Activine). Parmi les
agents orexigènes, la Ghreline apparaît comme le mieux étudié. Plusieurs études de phase
II indiquent que l’Anamoréline, un analogue de la Ghreline à prise orale, augmente la
prise alimentaire mais aussi le poids, en particulier la masse maigre, et parfois la force

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La cachexie expliquée aux endocrinologues 221

musculaire chez des patients avec un cancer bronchique à petites cellules (études
ROMANA) (31, 32). Parmi les agents anaboliques, les SARMS sont les plus avancés en
recherche clinique. En effet, l’Enobosarm a montré sa capacité à augmenter la masse
maigre, la performance physique et la qualité de vie chez des patients porteurs de différents
cancers (études POWER) (33). Aucune de ces molécules n’a cependant montré à ce jour
un effet bénéfique sur la survie. Une classe très prometteuse, du moins au vu des données
animales, est celle des inhibiteurs de la Myostatine et de l’Activine, deux molécules de la
famille du TGFβ qui partagent le même récepteur, le récepteur de type IIB de l’Activine
(ActRIIB). Plusieurs approches peuvent être utilisées pour bloquer leur action : un
anticorps monoclonal dirigé contre la Myostatine (34), un anticorps dirigé contre le
récepteur ActRIIB (35) ou encore une forme soluble du récepteur ActRIIB (36). Ces
molécules augmentent non seulement la masse musculaire, mais aussi la survie de souris
porteuses d’une tumeur cachectisante (14).

PRISE EN CHARGE
Le groupe d'experts de l’ESPEN (European Society for Clinical Nutrition and Metabolism)
a émis trois recommandations pour la prise en charge nutritionnelle des personnes
atteintes de cancer : 1) dépistage précoce de la dénutrition indépendamment de l’IMC ;
2)  évaluation approfondie le cas échéant pour y inclure des mesures de l'apport alimen-
taire, de la composition corporelle, des biomarqueurs inflammatoires, de la dépense
énergétique et de la performance physique ; 3) mise en place d’interventions nutrition-
nelles multimodales individualisées, comprenant l’augmentation de l'apport nutritionnel,
la réduction de l'inflammation et du stress hypermétabolique et l'augmentation de l'acti-
vité physique (37). Comme la perte de masse musculaire représente un facteur pronostique
puissant et qu’elle peut être aggravée par la réduction des ingesta due à l’anorexie, il paraît
logique d’optimaliser l’apport nutritionnel afin de ralentir la perte de masse musculaire.
Cependant, plus l’inflammation est sévère, plus la résistance anabolique sera marquée,
c’est-à-dire moins l’apport nutritionnel sera efficace sur la masse musculaire (38). Dès lors,
il est essentiel d’agir précocement avant le stade de cachexie réfractaire. Plusieurs travaux
ont en effet montré qu’il existe au début de la cachexie une fenêtre de réponse anabolique
à la nutrition, avec un bénéfice sur la qualité de vie, sur le poids, parfois la survie,… (39,
40). Ceci renforce dès lors la nécessité d’un diagnostic précoce. Celui-ci ne pourra se faire
que par un suivi longitudinal et systématique de paramètres simples, comme le poids, la
perte de poids, la mesure des ingesta, tout en reconnaissant que la masse et la force muscu-
laire peuvent être réduites avant que la perte de poids et l’anorexie ne s’installent. Aucun
nutriment spécifique n’a montré un effet anti-cachectisant (41), même s’il existe quelques
données suggérant un bénéfice des acides gras omega-3 dans certaines études. L’efficacité
du support nutritionnel sur la performance physique pourra être renforcée par un
programme d’activité physique, comme cela a été montré dans d’autres formes de cachexie
(bronchopneumopathies obstructives chroniques). La prise en charge de symptômes
comme la douleur et les nausées est indispensable pour optimiser voire implémenter le
support nutritionnel. Clairement la prise en charge de la cachexie doit être multimodale
(42). Des données récentes mettent en lumière le fait que certaines thérapies anti-cancé-
reuses pourraient aggraver la cachexie, en particulier la perte de la masse maigre (43). À
l’inverse, la toxicité de certaines chimiothérapies pourrait être exacerbée en cas de faible
masse musculaire comme celle rencontrée dans la cachexie (12). Ces éléments démontrent
la nécessité de développer de nouvelles approches thérapeutiques, complémentaires au
support nutritionnel.

Paris, 23-24 novembre 2018


222 Jean-Paul THISSEN, Isabelle MASSART et Audrey LOUMAYE

CACHEXIE RÉFRACTAIRE
Lorsque la tumeur primitive progresse et ne répond plus aux thérapies anti-tumorales, la
cachexie devient souvent réfractaire à la prise en charge nutritionnelle. À ce stade, l’indi-
cation de la nutrition artificielle, notamment parentérale lorsque le tube digestif est
non-fonctionnel, doit être soigneusement évaluée en regard de l’impact sur la qualité de
vie, des risques et des coûts. En général, les recommandations s’accordent pour ne pas la
proposer lorsque l’espérance de vie est inférieure à deux à trois mois. Le décès par cachexie
est probablement secondaire à l’atrophie du myocarde (arythmies) et du diaphragme
(insuffisance respiratoire), et aux infections (translocation bactérienne liée à l’atrophie de
la muqueuse digestive ou pneumonie d‘inhalation liée à des problèmes de déglutition).

1
Pôle Endocrinologie, Diabétologie et Nutrition,
Institut de Recherches Expérimentales et Cliniques,
Université Catholique de Louvain, Bruxelles, Belgique
2
 ervice d’Endocrinologie et Nutrition,
S
Cliniques Universitaires St-Luc, Bruxelles, Belgique

Adresse pour la correspondance : Professeur Jean-Paul THISSEN, SSS/IREC/EDIN, Avenue Hippocrate,


B1.55.06, 1200 Bruxelles (Belgique)
Tél : +32 2 764 54 69 – Courriel : jeanpaul.thissen@uclouvain.be

CACHEXIA EXPLAINED TO ENDOCRINOLOGISTS


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Jean-Paul THISSEN, Isabelle MASSART and Audrey LOUMAYE


(Brussels, Belgium)

ABSTRACT
Cachexia can be defined as a systemic syndrome characterized by a loss of weight, mainly
resulting from a loss of lean mass including muscle, and only partially reversible by the nutri-
tional intake. Cachexia differs from simple undernutrition because it results from a variable
combination of ingesta reduction and metabolic alterations, induced by inflammation. It
complicates many conditions including cancer. A bundle of arguments suggests the role of
circulating factors in the development of cachexia, whether these factors are produced by the
host or by the tumor itself in case of cancer. The diagnosis of cachexia is based primarily on
body weight, weight loss, loss of muscle mass and reduction of ingesta. Circulating factors
may be biomarkers of cachexia in the future. Cachexia, especially loss of muscle mass, is an
element of poor prognosis. As this loss can be aggravated by the reduction of ingesta due to
anorexia, it seems logical to optimize the nutritional intake in order to slow it down.
However, the more severe the inflammation, the stronger the anabolic resistance is. It is
therefore essential to act early, because there is at the beginning of the cachexia a window of
anabolic response to nutrition, with a benefit on the quality of life, weight, sometimes
survival. In view of the relative effectiveness of nutritional intake, complementary approaches
must be absolutely sought after. It is in this sense that hormonal therapies in the broad sense
are being investigated to treat cachexia.

Key-words : inflammation, muscle atrophy, survival, cancer, cytokines, hormones.

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


La cachexie expliquée aux endocrinologues 223

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in patients with advanced renal cell carcinoma: results from a placebo-controlled study. J Clin Oncol.
2010; 28(6): 1054-60.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


STRATÉGIES DE PRÉSERVATION DE LA FERTILITÉ
EN CAS DE TRAITEMENT ANTICANCÉREUX

par Christine DECANTER (Lille)

TEXTE NON PARVENU

Paris, 23-24 novembre 2018


TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


PLACE DES NOUVEAUX TRACEURS TEP
EN ENDOCRINOLOGIE

par Judith CHARBIT1*, Sébastien BERGERET1*, Catherine ANSQUER2,3


et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE1,4 (Paris, Nantes)

L’imagerie fonctionnelle nucléaire a depuis de nombreuses années des liens étroits avec
n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

l’endocrinologie, apportant des outils performants pour l’imagerie et la thérapie des


pathologies endocriniennes. Le développement récent de la tomographie par émission de
positons (TEP-TDM) et l’émergence de nouveaux traceurs redonne un nouveau souffle
dans le domaine des tumeurs endocrines en permettant de mieux les localiser, les
caractériser et délimiter leur extension. Avec le concept de « compagnon théranostique» la
tomographie par émission de positons avec des analogues de la somatostatine marqués au
gallium 68 permet également de sélectionner les patients pour des thérapies ciblées par
analogues de la somatostatine froids ou radio-marqués au Lutetium 177.
Dans cette revue nous aborderons la place, par rapport aux scintigraphies classiques et
au 18F-FDG, de trois nouveaux traceurs TEP : la 18F-FCholine, la 18F-FDopa et les
analogues de la somatostatine marqués au gallium 68 (68Ga-SSA) pour la prise en charge
de l’hyperparathyroïdie primaire et des tumeurs neuroendocrines.

Mots-clés : tumeurs neuroendocrines, TEP/TDM, hyperparathyroïdie primitive, Gallium 68, 18


F-FDopa,
18
F-FCholine, somatostatine, 18F-FDG.

I. - INTRODUCTION
Depuis de nombreuses années les techniques de médecine nucléaire jouent un rôle
important dans le diagnostic des pathologies endocriniennes, en particulier dans le
domaine des tumeurs neuroendocrines (TNE). Depuis une quinzaine d’années, l’essor de
la tomographie par émission de positons couplée à la tomodensitométrie (TEP/TDM) a
relancé la recherche en médecine nucléaire permettant le développement de nouveaux
radiotraceurs dont certains ont maintenant une large place en endocrinologie (Tableau 1)
Dans cette revue nous discuterons la place de 3 nouveaux traceurs TEP [18F-FCholine,
18
F-FDopa et les analogues de la somatostatine marqués au Gallium 68 (68Ga-SSA)] en
complément au 18F-FDG, traceur le plus communément utilisé, au sein de l’arsenal diagnos-
tique des pathologies tumorales endocriniennes.

1) Évolution des techniques en médecine nucléaire


Le principe de l’imagerie fonctionnelle en médecine nucléaire diagnostique consiste en
l’exploration directe de processus métaboliques grâce à l’injection et la détection d’un
radiotraceur ayant une cible moléculaire spécifique in vivo. La scintigraphie planaire
classique constitue la modalité la plus ancienne et consiste en la réalisation d’images de
projection en deux dimensions (2D) de la répartition du radiotraceur dans le corps humain

Paris, 23-24 novembre 2018


228 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

à partir d’une émission monophotonique (utilisation de radiotraceurs émettant un seul


photon). Les techniques plus récentes d’imagerie en coupe par tomographie par émission
mono-photonique (TEMP) puis de TEMP couplée à la tomodensitométrie (TEMP-TDM,
dite « imagerie hybride ») ont permis avec l’obtention d’une imagerie en 3D, un gain en
détection et sensibilité, et une meilleure localisation des anomalies scintigraphiques
notamment grâce à la TDM de repérage.

Tableau 1. - Indications des différents traceurs TEP pour l’exploration des tumeurs neuroendocrines (TNE)
TNE gastroentéropancréatiques TNE
Traceur CMT PPGL
Pancréas Iléon Inconnu bronchiques
++ - PPGL cervicaux
(Maladie
18
F-FDopa - PPGL mutés SDHD +/- +++ + +/-
résiduelle avec
CT> 150 pg/ml) - Phéochromocytomes
- PPGL métastatiques +++
68
Ga-SSA +/- - PGL cervicaux +++ +++ ++ Bien
- PPGL mutés SDHB différenciées
+++
- PPGL métastatiques
18
F-FDG Pronostic Pronostic non +/- Peu
- PPGL mutés SDHB
différenciées
CMT : carcinome médullaire de la thyroïde, CT : calcitonine, PPGL : paragangliome,
SDHB/SDHD : sous-unité B/D du gène de la succinate déshydrogénase, PGL : paragangliomes,
PPGL : phéochromocytomes et paragangliomes.

Figure 1. - Différence schématique entre l’émission monophotonique (TEMP) et biphotonique utilisée


en imagerie TEP

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 229

En parallèle, la TEP-TDM (tomographie par émission de positons couplée à la tomoden-


sitométrie) s’est développée, avec des avantages techniques notables par comparaison avec
les techniques scintigraphiques par émission monophotonique grâce à l’émission biphoto-
nique des radio-isotopes utilisés (émetteurs de positons). La TEP exploite la détection en
coïncidence des photons d’annihilation spécifiquement émis par ce type de radio-isotope
(Figure 1). En effet, le positon émis, après un parcours d’environ un millimètre dans la
matière, va s’annihiler avec un électron de la matière, ce qui aboutit à l’émission de
2  photons à 180°. Cette technique d’émission biphotonique permet un gain notable en
résolution spatiale et temporelle, permettant une meilleure qualité d’image et des temps
d’acquisition plus courts. Pour cette raison, cette modalité d’imagerie se trouve en plein
développement, et plusieurs radiotraceurs TEP ont été développés récemment.

2) Caractéristiques des radiotraceurs TEP-TDM utilisés en endocrinologie


2.1 18F-FDG
Le 18F-FDG constitue le radiotraceur le plus largement employé actuellement pour l’ima-
gerie TEP en routine clinique. Il s’agit d’un analogue du glucose marqué au 18F, isotope
radioactif du fluor et émetteur de positons. Il s’accumule préférentiellement dans les cellules
surexprimant les transporteurs membranaires du glucose (transporteurs GLUT) et
l’enzyme glycolytique hexokinase (1). Le 18F-FDG permet l’exploration du métabolisme
glucidique cellulaire, qui est augmenté dans certains contextes pathologiques, notamment
néoplasique mais également inflammatoire. La TEP-TDM au 18F-FDG a démontré son
intérêt clinique dans plusieurs pathologies endocriniennes, en particulier dans les cancers
de la thyroïde et les TNE.

2.2 18F-Choline
La 18F-Choline est un précurseur de phospholipide membranaire (choline) qui est impli­
qué dans le métabolisme des membranes plasmatiques cellulaires, marqué au 18F. Ce radio-
pharmaceutique permet l’exploration de processus prolifératifs cellulaires dans lesquels la
synthèse des membranes plasmatiques est augmentée (2). Initialement développée dans le
domaine du cancer de la prostate, son intérêt diagnostique a été récemment démontré
dans l’hyperparathyroïdie (cf. infra).

2.3 18F-DOPA
La 6-fluoro-(18F)-L-3,4-dihydroxy-phenylalanine (18F-DOPA) est un acide aminé marqué
au 18F (3). La 18F-Dopa est captée et internalisée dans la cellule via le transporteur ubiqui-
taire LAT-1 (transporteur des acides aminés) puis décarboxylée en 18F-Dopamine dans
certaines tumeurs, notamment les paragangliomes (PGL), les phéochromocytomes (PCC)
et les TNE de l’intestin moyen. C’est cette étape de décarboxylation qui permet son
stockage dans les vésicules de sécrétion et en fait un traceur spécifique des TNE.

2.4 Les analogues de la somatostatine marqués au 68Gallium


La famille des analogues de la somatostatine marqués au 68Gallium (68Ga-SSA) regroupe
plusieurs radiotraceurs présentant une structure similaire (68Ga-DOTA-TOC, 68Ga-
DOTA-NOC, 68Ga-DOTA-TATE), composés d’un chélateur (DOTA) permettant le
marquage au 68Ga (émetteur de positrons), couplé à un oligopeptide analogue de la so­ma­
tostatine (SSA) qui varie et présente une affinité spécifique pour les récepteurs de la

Paris, 23-24 novembre 2018


230 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

somatostatine (sst) (4). Tout comme la scintigraphie au 111In-Pentétréotide (Octréoscan®),


la TEP-TDM au 68Ga-SSA permet l’exploration de certaines tumeurs neuroendocrines
surexprimant les récepteurs de la somatostatine (principalement le sous-type sst 2), mais
avec de nombreux avantages, en particulier une affinité plus élevée pour le sst2, un spectre
d’affinité plus large pour les sst (affinité élevée pour les sst 2, 3 et 5 pour le 68Ga-DOTA­NOC),
mais également une meilleure résolution spatiale liée à la technologie TEP. Alors que les
traceurs marqués au 18F sont des produits de cyclotron, livrés dans les services de médecine
nucléaire, le radio-marquage des SSA par le 68Gallium est réalisé sur site et nécessite un
investissement en matériel (automate de synthèse, générateur de 68Ga) relativement
oné­reux et un personnel qualifié. De plus, son utilisation en France n’ayant obtenu une
AMM que très récemment, sa disponibilité n’est pas encore très répandue.

II. - LES TUMEURS NEUROENDOCRINES


GASTROENTÉROPANCRÉATIQUES (TNE GEP)
Les TNE GEP sont des tumeurs rares dont l’incidence d’environ 2,5 à 5 cas pour 100  000,
a augmenté ces dernières années, probablement en lien avec l’amélioration des techniques
d’imagerie (5).
Ces tumeurs se développent à partir des cellules neuroendocrines présentes sur toute la
longueur du tractus digestif. On peut les classer selon leur origine embryologique (6). Les
tumeurs originaires de l’intestin primitif antérieur (Foregut) comprennent les TNE de
l’œsophage, du duodénum, du pancréas et du jéjunum proximal. En ce qui concerne les
TNE de l’intestin primitif moyen (Midgut), il s’agit de tumeurs du jéjunum distal, de l’iléon,
de l’appendice et du côlon droit. Quant aux tumeurs de l’intestin primitif postérieur
(Hindgut), elles comprennent les TNE du côlon transverse et gauche, ainsi que du rectum.
Les TNE GEP peuvent également être classées selon leur grade en fonction de l’index de
prolifération (7): grade 1 (Ki67 < ou = à 2 %), grade 2 (Ki67 entre 3 et 20 %) et grade 3
(Ki67 > 20 %) et selon leurs caractéristiques de différenciation cellulaire à l’examen anato-
mopathologique. L’impact du grade histopronostique et de la différenciation est majeur sur
le pronostic et le traitement de ces tumeurs.
Il s’agit donc d’un groupe de tumeurs hétérogènes qui peuvent par ailleurs présenter des
expressions cliniques très variables, allant du syndrome sécrétant marqué (sécrétion de
sérotonine, insuline, gastrine ou encore glucagon, VIP, somatostatine…) malgré une taille
tumorale minime, à l’indolence clinique. La plupart sont d’origine sporadique mais
certaines d’entre elles peuvent s’intégrer dans des syndromes génétiques (néoplasie
endocrinienne multiple de type 1, maladie de Von Hippel-Lindau, neurofibromatose de
type 1). Le pronostic est généralement hétérogène, les TNE GEP de grade 3 ont notam-
ment un plus haut risque métastatique et sont appelées carcinomes pour les formes peu
différenciées selon la nouvelle classification OMS 2017 (8).
Le traitement curatif repose sur la chirurgie si la tumeur est accessible sans maladie
métastatique associée ou alors sous une forme limitée et résécable. D’autres thérapeutiques
peuvent également être proposées : les analogues de la somatostatine à visée anti-sécré-
toire ou anti-proliférative, les thérapies ciblées (Evérolimus et Sunitinib) ou la chimiothé-
rapie (notamment pour les tumeurs peu différenciées et rapidement progressives), les
traitements locorégionaux (techniques d’embolisation hépatiques notamment). Enfin, la
radiothérapie interne vectorisée utilisant les analogues de la somatostatine radiomarqués

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 231

(Octréotate marqué au Lutetium 177, Lutathera®) devient une option thérapeutique acces-
sible suite aux résultats de l’essai NETTER-1 et à l’obtention d’une AMM européenne pour
le traitement des TNE-GEP (9).
La détection optimale par imagerie de la tumeur primitive et des métastases est un enjeu
majeur pour la prise en charge des TNE GEP afin d’en évaluer le pronostic et de décider de
la stratégie thérapeutique optimale. L’imagerie conventionnelle et l’écho-endoscopie,
malgré leurs hautes performances diagnostiques restent limitées pour la détection de
certaines lésions de petite taille ou de localisation difficile d’analyse. L’exploration
fonc­tionnelle est souvent nécessaire pour compléter le bilan d’extension, mais également
effectuer la caractérisation phénotypique, évaluer le pronostic et orienter la prise en
charge thérapeutique des TNE GEP.

1) Les TNE GEP bien différenciées, de bas grade.


Ces tumeurs bien différenciées, de nature indolente, sont classiquement mal explorées
par le 18FDG. La scintigraphie des récepteurs de la somatostatine (Octreoscan®), dispo-
nible en pratique courante, était considérée jusqu’à peu comme l’examen de référence pour
le bilan lésionnel des TNE GEP bien différenciées. Cependant elle est limitée pour la
détection des petites lésions et pour la détection des tumeurs dans les sites de fixation
physiologique tels que le foie et le tube digestif. L’utilisation des 68Ga-SSA a démontré son
intérêt dans de nombreuses séries de patients avec un impact sur la prise en charge des
patients (10).
Une méta-analyse récente (11) réalisée sur 10 études regroupant 465 patients atteints
de TNE GEP ou bronchique retrouvait une sensibilité de 90,9% et une spécificité de
90,6%. La 18F-FDOPA est également un traceur spécifique de la nature endocrine, mais de
performance variable selon l’origine embryologique de la tumeur (12,13).

3.1 Les TNE de l’intestin primitif antérieur (Foregut).


Les TNE pancréatiques sont principalement localisées dans l’épithélium canalaire du
pancréas exocrine. La majorité de ces tumeurs sont non fonctionnelles et diagnostiquées à
un stade avancé avec souvent présence d’une maladie métastatique d’emblée (14).
L’utilisation de la DOPA paraît limitée dans cette indication. En effet, Ahlström et coll.
(15) ont étudié la performance diagnostique de la TEP au 11C-DOPA dans une série de
tumeurs pancréatiques et seulement 11 tumeurs sur 22 ont été détectées par cette modalité.
Par la suite, plusieurs séries ont confirmé ces résultats décevants avec l’utilisation de la
18
F-DOPA (12, 15, 16). La faible sensibilité de la TEP à la 18F-DOPA pour les TNE pancréa-
tiques bien différenciées est en partie liée à la captation physiologique du radiotraceur par
le pancréas exocrine mature. Certaines études ont montré que l’administration de carbi-
dopa, un inhibiteur de l’acide L-aminé aromatique décarboxylase (AADC) périphérique,
permettait de pallier cette captation pancréatique physiologique, variable, parfois intense
et d’améliorer les performances diagnostiques de la 18F-FDOPA-TEP/TDM dans les TNE
pancréatiques (17). Cependant il n’y a pas de consensus quant à son utilisation, ce d’autant
que la carbidopa est une préparation magistrale. En effet, certaines études ont rapporté
une disparition de la captation pancréatique focale avec des faux négatifs (18).
D’autres équipes se sont intéressées à l’intérêt d’une image acquise à un temps précoce.
En effet, une acquisition démarrant 5 minutes après l’injection de la 18F-FDOPA semble-

Paris, 23-24 novembre 2018


232 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

rait permettre une meilleure détection des insulinomes, sans ou avec prémédication par
carbidopa (19, 20). Bien que peu sensible, cette imagerie reste néanmoins très spécifique,
un seul cas de faux positif ayant été rapporté dans la littérature avec la TEP à la 18F-FDOPA
chez un patient avec une tumeur pancréatique pseudo-papillaire (21).
La TEP au 68Ga-SSA (DOTATOC, DOTANOC, DOTATATE), semble supérieure
pour la détection des TNE pancréatiques bien différenciées, en comparaison à l’imagerie
conventionnelle et à l’Octreoscan®. Kumar et coll. (22) ont montré dans leur étude
pros­pective sur une série de 20 patients avec TNE pancréatique, suspectée cliniquement
et/ou prouvée histologiquement, que la TEP au 68GA-DOTATOC était supérieure pour la
détection de la tumeur primitive comparativement à la TDM avec un taux de détection de
100 % versus 75 % respectivement, ainsi que pour la détection des métastases (taux de
détection de 100 % versus 54 % pour la TDM). Ces données étaient comparables dans une
autre étude évaluant la TEP au 68Ga-DOTATATE versus l’IRM, avec un taux de détection
de 100 % versus 65 % respectivement (23). Malgré ces bons résultats, la détection des
insulinomes reste une limite avec une sensibilité inconstante de la TEP au 68Ga-SSA, de
26 à 85 % selon les séries (24–26). Ces données sont concordantes avec la mauvaise sensi-
bilité de l’Octreoscan® probablement en lien avec la faible expression des récepteurs de la
somatostatine dans certains insulinomes bénins (27).
D’après ces données récentes, la TEP au 68Ga-SSA semble donc être la meilleure option
pour la détection des TNE pancréatiques (Figure 2). Certaines études ont comparé les
deux radiopharmaceutiques sur de petites séries de patients. Haug et coll. (28) a montré
une supériorité de la TEP/TDM au 68Ga-DOTATATE par rapport au 18F-FDOPA pour la
détection de la tumeur primitive dans les TNE pancréatiques. Putzer et coll. quant à eux
retrouvaient une sensibilité équivalente sur une série de 4 patients entre la TEP/TDM au
68
Ga-DOTATOC et la 18F-FDOPA (29). Il n’y a par contre pas de données de comparaison

Figure 2. - Imagerie TEP au 68Ga-DOTATOC d’une TNE bien différenciée (OMS grade 1) de 12 mm du
corps du pancréas (SUVmax = 100).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 233

entre la 18F-FDOPA-TEP/TDM avec prémédication par carbidopa versus la TEP/TDM au


68
Ga-SSA.

La TEP/TDM au 68Ga-DOTANOC a également montré sa supériorité par rapport à


l’imagerie conventionnelle (TDM) pour l’exploration des gastrinomes (30). Ces TNE
géné­ralement localisées dans le pancréas ou la paroi duodénale sont caractérisées par un
syndrome sécrétant marqué (syndrome de Zollinger-Ellison) pouvant être à l’origine de
complications sévères (hémorragies, perforation gastrique). La tumeur primitive est en
général de petite taille et souvent associée à des adénopathies ou des métastases à distance
lors du diagnostic. Sur une petite série de patients présentant un diagnostic clinique et/ou
biochimique de gastrinome ; la 68Ga-DOTANOC-TEP/TDM était plus sensible, plus spéci-
fique et permettait un meilleur bilan d’extension ganglionnaire que la TDM (30).

3.2 Les TNE de l’intestin primitif moyen (Midgut).


Les TNE du Midgut, anciennement appelées « carcinoïdes », sont dérivées des cellules
entérochromaffines productrices de sérotonine. Elles sont classiquement (mais inconstam-
ment) associées à un syndrome carcinoïde clinico- biologique (31) et sont le type de TNE
le plus fréquent.

La TEP au 18F-FDOPA a une excellente performance diagnostique pour les TNE du


Midgut, probablement expliquée par la production tumorale de sérotonine. En effet, l’étude
de Montravers et coll. (12) retrouvait une sensibilité de 93 % et une spécificité de 89 % de
la TEP/TDM à la 18F-FDOPA pour la détection des TNE du Midgut versus 25 % et 36 %
respectivement pour les TNE d’autre origine. Elle est également supérieure aux autres
modalités comme la TDM et l’IRM ou l’Octreoscan® avec une sensibilité de 97 % contre
65 % pour le TDM/IRM et 49 % pour l’Octreoscan® (32). Il en est de même pour la détec-
tion des localisations métastatiques (adénopathies, foie, os) où la TEP/TDM garde une
excellente sensibilité comparée à la TDM et à l’Octreoscan® (33).

La TEP/TDM au 68Ga-SSA semble également intéressante. Dans l’étude d’Ilhan et coll.


(34) portant sur 26 patients atteints de TNE de l’iléon nécessitant une reprise chirurgicale
pour résection incomplète, la TEP au 68Ga-DOTATE avait une sensibilité de 68 % et une
spécificité de 100 %. Parmi les 7 faux négatifs, 5 concernaient des tumeurs de moins d’1 cm.
Les auteurs retrouvaient également une sensibilité de 88 % pour la détection des adéno­
pathies et une bonne performance pour les localisations métastatiques hépatiques,
pul­monaires et/ou osseuses. Actuellement peu de données sont disponibles dans les TNE
du Midgut sur la TEP/TDM au 18F-FDOPA comparée à celle au 68GA-SSA (28, 35) avec
une tendance en faveur de la TEP/TDM à la 18F-FDOPA. La 18F-FDOPA-TEP/TDM est
actuellement considérée comme l’imagerie de première ligne pour les TNE iléales bien
différenciées avec sécrétion sérotoninergique, pour le bilan d’extension lésionnel exhaustif.
La TEP à la 18F-FDOPA n’a pas en revanche de valeur pronostique démontrée et n’a pas
d’intérêt théranostique contrairement à la l’imagerie des récepteurs de la somatostatine.

3.3 Les TNE de l’intestin primitif postérieur (Hindgut).


Les TNE du Hindgut sont habituellement plus agressives que celles du Midgut (7) et le
plus souvent découvertes lors d’examens coloscopiques et sur des pièces de polypectomies.

Paris, 23-24 novembre 2018


234 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

En dehors de quelques cas décrits au sein de séries plus larges de TNE GEP (28), il n’y a
pas d’étude spécifique publiée sur l’utilisation de la 18F-FDOPA-TEP/TDM dans les TNE du
Hindgut.
Selon le grade de la tumeur, la TEP/TDM au 18FDG (36) et / ou au 68Ga-SSA (37) semble
indiquée pour le bilan lésionnel de ces tumeurs métastatiques.

2) Les TNE GEP agressives et peu différenciées.


La TEP/TDM au 18F-FDG est la modalité d’imagerie fonctionnelle de première ligne
pour les TNE GEP de grade 3 (32, 38, 39). Il s’agit de l’imagerie la plus sensible pour le
bilan d’extension des TNE GEP peu différenciées, ces tumeurs ayant perdu leurs caracté-
ristiques neuroendocrines et ne surexprimant pas ou très peu les récepteurs de la somatos-
tatine. En effet la captation du 18F-FDG semble être un marqueur de dédifférenciation et
d’agressivité tumorale.
La TEP/TDM au 18F-FDG semble également être plus performante pour les TNE GEP
de grade 2 « élevé » avec une sensibilité de 77 %, contre 43 % pour l’Octreoscan® (40).
La fixation du 18F-FDG peut dans certains cas être dépendante de la localisation, avec
une positivité plus importante pour les lésions pancréatiques, notamment non fonction-
nelles, souvent associées à une moins bonne différenciation et à un plus mauvais pronostic
(41, 42).
À noter que cette modalité d’imagerie peut néanmoins s’avérer intéressante pour les
TNE différenciées. En effet, la captation du 18F-FDG par les tumeurs, mêmes bien différen-
ciées ou classées de bas grade, notamment pancréatiques, semble être associée à un moins
bon pronostic (43). La TEP au 18F-FDG permet également de documenter une hétérogé-
néité lésionnelle ou une transformation agressive d’une tumeur de bas grade (44).

III. - LES TUMEURS NEUROENDOCRINES BRONCHO-PULMONAIRES


(TNE BP)

1) Généralités
Les TNE broncho-pulmonaires sont la deuxième localisation de TNE (20 % des cas)
après les TNE-GEP et représentent 1 à 3 % des cancers du poumon (45). Elles se développent
à partir des cellules neuroendocrines de l’épithélium bronchopulmonaire (46) et sont
loca­lisées en endo-bronchique dans 90 % des cas (47). Elles sont réparties en 4 sous-
groupes : les tumeurs carcinoïdes typiques et les tumeurs carcinoïdes atypiques, qui sont
bien différenciées, les carcinomes neuroendocrines à grandes cellules et les carcinomes à
petites cellules, quant à eux peu différenciés avec une progression rapide et une maladie
souvent métastatique avec un pronostic sombre (46).
Plus de 50 % des patients sont symptomatiques avec une présentation clinique variable
selon la localisation et la taille de la tumeur. Les manifestations peuvent inclure de la
toux, des épisodes d’hémoptysie, de pneumopathie obstructive. Un syndrome sécrétant
n’est par contre présent que dans moins de 5 % des cas (syndrome carcinoïde, SIADH,
Cushing…) (46). Elles peuvent être sporadiques ou s’intégrer dans une forme familiale
comme la NEM de type 1 (45).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 235

La prise en charge curative repose principalement sur la chirurgie quand cela est possible
(45, 46). Dans les autres cas, on peut proposer de la chimiothérapie pouvant être couplée
à de la radiothérapie ou bien l’utilisation de thérapies ciblées (dont les inhibiteurs de
mTOR). On peut également proposer des traitements par analogues de la somatostatine
ou la radiopeptidothérapie avec les analogues de la somatostatine radiomarqués (45). En
effet ces tumeurs expriment dans 80 % des cas les récepteurs de la somatostatine, avec une
expression d’autant plus importante que la tumeur est bien différenciée (46, 47).
La localisation de la tumeur primitive et des métastases reste donc essentielle. L’imagerie
conventionnelle, telle que le scanner et même l’IRM, est largement utilisée mais peu
spécifique des TNE BP. Pour les tumeurs bien différenciées, l’imagerie fonctionnelle des
récepteurs de la somatostatine est donc une aide utile. En ce qui concerne les tumeurs peu
différenciées, de haut grade, l’imagerie fonctionnelle de référence reste la TEP/TDM au
18
F-FDG. La TEP-TDM à la 18F-FDOPA a été peu étudiée, principalement pour les TNE BP
bien différenciées dans cette indication, avec des résultats plutôt décevants (32) et n’est
donc pas recommandée pour l’exploration de ces tumeurs (48).

2) Les TNE broncho-pulmonaires bien différenciées


Elles concernent les tumeurs carcinoïdes typiques et les tumeurs carcinoïdes atypiques.
Ces tumeurs expriment fortement les récepteurs de la somatostatine.
L’Octreoscan® utilisé initialement a une bonne sensibilité, pouvant aller jusque 93 %
pour la tumeur primitive, supérieure à l’imagerie conventionnelle (49).
Actuellement la TEP au 68GA-SSA présente de bons résultats. L’étude d’Ambrosini et
coll. (50) a évalué la TEP au 68GA-DOTANOC sur une série de 11 patients. Une lésion a
été retrouvée dans 9 cas; elle a également apporté des informations supplémentaires par
rapport au scanner chez 9 patients sur 11 (détection d’un plus grand nombre de lésions ou
au contraire exclusion de lésions considérées comme métastatiques au scanner) et a
modifié la prise en charge de 3 patients. Ce traceur apparaît à l’heure actuelle comme la
meilleure alternative pour ce type de tumeurs. En effet, du fait de sa meilleure résolution,
la TEP au 68GA-SSA a une meilleure sensibilité que l’Octreoscan® pour les lésions de
petite taille (51, 52). Elle présente également de meilleures performances que la TEP au
18
F-FDG pour les tumeurs différenciées, carcinoïdes typiques (53–55).

3) Les TNE broncho-pulmonaires peu différenciées


Comme énoncé précédemment, elles regroupent les carcinomes neuroendocrines à
grandes cellules et les carcinomes à petites cellules. Ces tumeurs de haut grade expriment
moins les récepteurs de la somatostatine.
La TEP au 18F-FDG a donc une meilleure sensibilité pour ces lésions que la TEP au
Ga-SSA. (53) avec une sensibilité pouvant atteindre les 100% pour les carcinomes à
68

petites cellules (56).


La TEP au 18F-FDG a également un intérêt pronostique dans les carcinomes à petites
cellules. Il a été retrouvé une survie nettement diminuée chez les patients avec une TEP
au 18F-FDG positive contrairement aux patients dont l’examen était négatif (56). Il existait
également une corrélation négative entre le maximum de la valeur standardisée de fixation

Paris, 23-24 novembre 2018


236 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

(Standardized Uptake Value maximal = SUVmax) des lésions à la TEP/TDM au 18F-FDG et


la survie des patients (56).

IV. - TUMEUR PRIMITIVE INCONNUE.


La plupart des TNE révélées par des métastases sont les TNE pancréatiques et les TNE
du Midgut (57). La recherche de la tumeur primitive est essentielle pour la prise en charge,
que cela concerne la résection de la tumeur primitive, qui peut présenter un bénéfice de
survie et/ou de qualité de vie pour les patients (13, 58), que pour le choix du traitement
systémique, les TNE pancréatiques répondant habituellement mieux à la chimiothérapie
que les TNE du Midgut (59). Cependant, la détection de la tumeur primitive peut repré-
senter un challenge diagnostique, la tumeur étant le plus souvent de petite taille.
Certains auteurs ont suggéré que la TEP/TDM à la 18F-FDOPA était un outil d’imagerie
efficace pour la détection de la tumeur primitive, notamment dans les cas où l’imagerie
conventionnelle et l’Octréoscan® s’avéraient non concluants (13). La positivité de la
18
F-FDOPA-TEP/TDM semble par ailleurs corrélée aux taux de chromogranine et de
sérotonine plasmatique, ce résultat allant dans le sens de l’hyperproduction tumorale de
sérotonine évocatrice de TNE du Midgut.
D’autres études se sont attachées à évaluer la TEP au 68GA-SSA pour la détection de la
tumeur primitive. La performance de la TEP au 68GA-SSA serait d’environ 60 % pour la
détection du primitif devant une métastase de TNE prouvée et sans primitif retrouvé à
l’imagerie conventionnelle, avec une sensibilité semblant équivalente pour la détection
des primitifs du grêle ou du pancréas (60–62).

V. - CARCINOME MÉDULLAIRE DE LA THYROÏDE


1) Généralités
Le carcinome médullaire de la thyroïde (CMT) fait partie des carcinomes thyroïdiens
bien différenciés de souche non folliculaire, et constitue une variante relativement peu
fréquente des cancers thyroïdiens (1 à 5 %) (63). Il est dérivé des cellules C responsables
de la sécrétion de la calcitonine. Ainsi, le dosage sanguin de la calcitonine constitue un
biomarqueur fiable pour suivre l’évolutivité tumorale, de même que l’antigène carcino-
embryonnaire (ACE). Le CMT est fréquemment pourvoyeur de localisations secondaires
ganglionnaires loco-régionales et de métastases à distance (64), souvent difficiles à détecter
car sous forme de milaire hépatique et/ou ostéo-médullaire. Les formes familiales repré-
sentent 25 % des cas, et rentrent dans le cadre des néoplasies endocriniennes multiples de
type 2A et 2B, ainsi que dans le syndrome FMTC (Familial Medullary Thyroïd Cancer). Il
est fréquemment associé à des mutations du gène RET, soit germinales pour les formes
familiales, soit somatiques dans 50 % des cas de forme sporadique (63). La chirurgie repré-
sente le seul traitement curatif dans le CMT que ce soit en première ligne dans les patho-
logies localisées à la thyroïde ou en cas de récidive ou de maladie métastatique (65, 66).

2) Apport de la TEP/TDM
L’intérêt de la TEP/TDM reste à démontrer pour le bilan d’extension initial du CMT (3),
qui repose principalement sur l’échographie cervicale. En revanche, dans les situations de
maladie résiduelle ou de récidive après chirurgie, généralement détectées devant l’absence

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 237

de négativation ou l’augmentation de la calcitonine, la TEP-TDM joue un rôle important


pour le bilan d’extension visant à évaluer l’opérabilité de la maladie résiduelle, ainsi que
pour la surveillance et l’évaluation thérapeutique sous traitement médical.
2.1 TEP-TDM à la 18F-DOPA
La TEP-TDM à la 18F-DOPA semble correspondre à la modalité la plus sensible et spéci-
fique dans la détection de maladie résiduelle avec calcitonine élevée (Figure 3) avec dans
une méta-analyse récente comprenant 139 patients un taux de détection de 66% [58-74%]
par patient et 71% [67-75%] par lésion (67). La 18F-FDOPA est également supérieure au
18
FDG et au 68Ga-SSA dans le contexte de maladie résiduelle ou récidivante et dans le
bilan d’extension de la maladie (67–69). Cette modalité est d’autant plus intéressante que
le taux de calcitonine est supérieur à 150 pg/mL. En effet, dans leur étude prospective
comparant la TEP à la 18F-FDOPA par rapport à la TEP au 18FDG chez 17 patients, Romero-
Lluch et coll. retrouvaient une sensibilité de la TEP à la 18F-FDOPA de 91 % pour les
patients avec une calcitonine > 150 pg/mL, alors que celle-ci chutait à 29 % pour un seuil
inférieur à ce chiffre (p<0,01) (70).
La TEP à la18F-DOPA nécessite néanmoins pour être performante, la réalisation d’une
acquisition précoce à 15 minutes post-injection en raison d’une l’élimination rapide du
radiotraceur dans certaines lésions (69, 71).

Figure 3. - Patient de 67 ans, opéré d'un carcinome médullaire thyroïdien classé pT4a N1b avec un
taux de calcitonine à 1 800ng/ml en post-opératoire. Aspect de métastases multiples osseuses sur la
TEP à la 18F-FDopa (A) contrastant avec l’aspect entièrement négatif de la TEP au 18F-FDG.

2.2 TEP/TDM au 18FDG


Bien que la TEP à la18F-FDOPA semble plus sensible que La TEP au 18FDG dans la
détection de la maladie résiduelle, plusieurs études semblent indiquer une valeur pronos-
tique de la fixation du 18F-FDG dans le CMT, avec notamment une bonne corrélation
entre l’intensité de fixation du 18F-FDG et un raccourcissement du temps de doublement
du taux de calcitonine (72), facteur de progression et pronostique de la maladie (73, 74).
La TEP au 18FDG peut ainsi s’avérer complémentaire de la TEP à la18F-FDOPA dans le
bilan lésionnel des CMT de forme agressive.

Paris, 23-24 novembre 2018


238 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

VI. - PHÉOCHROMOCYTOMES ET PARAGANGLIOMES

1) Généralités
1.1 Origine histologique et caractéristiques métaboliques
Les phéochromocytomes et paragangliomes (PPGLs) constituent un groupe de tumeurs
neuroendocrines issues de cellules du système nerveux autonome dérivées des crêtes
neurales. Les PPGLs du système nerveux sympathique (PPGLs sympathiques) sont issus de
progéniteurs chromaffines de la médullosurrénale dans 80 % des cas (alors appelés
phéo­chromocytomes) ou bien des ganglions nerveux sympathiques para-vertébraux du
thorax, de l’abdomen ou du pelvis dans 20 % des cas. Les PPGLs sympathiques sont
sou­vent responsables d’une production accrue de catécholamines qui explique une partie
des manifestations cliniques liées à ces tumeurs (HTA, céphalée, accès de sueurs, pâleur)
et permet la détection biologique notamment par le dosage urinaire des métanéphrines. À
l’inverse, les PPGLs du système nerveux parasympathique (PPGLs parasympathiques) sont
majoritairement non sécrétants (4 % de tumeurs sécrétantes), expliquant leur caractère
asymptomatique fréquent et sont le plus souvent retrouvés dans la région cervicale ou de
la base du crâne. Bien que la majorité des PPGLs correspondent à des tumeurs bénignes,
il existe tout de même des formes malignes dans 10 % des cas de phéochromocytomes et
25 % des cas de PPGLs (75).
1.2 Génétique des PPGL
Environ 10 % (PCC) à 40 % (PGL) des paragangliomes-phéochromocytomes (PPGL)
sont malins (76), mais il n’existe pas de critère histologique fiable de malignité, qui n’est
affirmée qu’à l’apparition de la première métastase à distance (OMS, 2004). Près de 40 %
des PPGL sont d’origine génétique (77) avec 16 gènes de prédisposition identifiés dont les
plus fréquemment impliqués sont les gènes SDHx (SDHA, SDHB, SDHC, SDHD) codant
pour les 4 sous-unités de la succinate déshydrogénase (SDH), une enzyme mitochondriale
qui catalyse l’oxydation du succinate en fumarate dans le cycle de Krebs. Les autres gènes
majeurs sont les 3 gènes impliqués dans les formes syndromiques de la maladie associés à
des atteintes d’autres organes : RET (Néoplasie endocrinienne multiple de type 2), VHL
(maladie de Von Hippel Lindau), NF1 (Neurofibromatose de type 1). Enfin, depuis 2010,
grâce aux approches dites « multi-omics », de nombreux autres gènes de prédispositions
ont été mis en évidence, parmi lesquels MAX, TMEM127, FH, MDH2, SLC25A11, GOT2,
HIF2, …. (78). Actuellement, le dépistage génétique est donc systématiquement recom-
mandé (79).

2) Apport de l’imagerie métabolique


Les formes génétiques prédisposent donc à des lésions multiples et parfois malignes de
PPGL. La chirurgie est à l’heure actuelle le seul traitement curatif mais reste une procé-
dure délicate avec, selon la localisation du PPGL, des risques de complications nerveuses
et vasculaires non négligeables, dont la fréquence augmente avec la taille tumorale. Ces
patients nécessitent donc un bilan d’imagerie exhaustif avec pour buts : une localisation
précise de la tumeur à l’origine de l’hypersécrétion ou du PGL non sécrétant, la recherche
d’autres localisations dans le cas d’un syndrome de prédisposition, le bilan d’extension
initial à la recherche de localisations secondaires métastatiques, l’éventuel suivi sous
traitement d’un PPGL malin ou le dépistage des sujets prédisposés non encore atteints
(sujets apparentés).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 239

La TDM et l’IRM constituent des modalités très sensibles pour la détection des PPGLs.
Cependant, elles ne permettent pas toujours d’affirmer le diagnostic du fait d’une spécifi-
cité parfois sous-optimale comparativement à l’imagerie métabolique (78). Les techniques
de médecine nucléaire permettent depuis de nombreuses années l’exploration de ces
tumeurs, grâce au caractère spécifique de l’information métabolique qu’elles apportent et
de l’exploration corps entier (80). La 18F-FDOPA présente des similitudes avec la scintigra-
phie à la 123I-MIBG mais avec une cible métabolique différente (le transporteur des acides
aminés LAT-1 et la décarboxylase cytosolique pour la 18F-FDOPA, le transporteur de la
norépinéphrine et le stockage vésiculaire pour la 123I-MIBG) et avec l’avantage de la
technologie TEP/TDM pour la 18F-FDOPA, ce qui explique les différences observées entre
ces deux radiotraceurs (80).
2.1 Phéochromocytomes
La 18F-FDOPA –TEP/TDM est l’imagerie la plus sensible dans cette indication, bien
qu’elle n’ait pas véritablement démontré sa supériorité par rapport à la scintigraphie à la
123
I-MIBG (3) mais est surtout moins sujette aux interactions médicamenteuses que cette
dernière. La 18F-FDOPA –TEP/TDM présente plusieurs autres avantages comme un temps
d’acquisition plus court, une faible fixation physiologique au niveau des glandes surrénales,
ce qui pourrait lui conférer un avantage diagnostique par rapport au 68Ga-SSA, notam-
ment dans la recherche de lésions pluri-focales liées aux formes familiales associées à RET,
VHL ou NF1 (78).
2.2 Paragangliomes
La TEP/TDM à la 18F-FDOPA a montré d’excellents résultats dans les PGL cervicaux,
avec une sensibilité > 95 % et une spécificité de 95-100 % (3). Cette modalité est actuelle-
ment considérée comme l’examen de choix pour ces lésions cervicales, notamment chez
les patients porteurs de mutations SDHD (66, 81, 82).
Pour les PGL sympathiques abdominaux ou métastatiques, la TEP/TDM à 18F-FDopa est
moins performante avec des cas décrits de faux-négatifs pour les PGL abdominaux rétro-
péritonéaux et surtout une faible sensibilité pour la localisation des métastases. En effet,
dans une large étude prospective Timmers et coll. (83) ont démontré une supériorité de la
TEP-18FDG pour la détection des métastases, en particulier chez les patients avec mutation
SDHB.
Plus récemment, la TEP/TDM au 68Ga-SSA semble s’imposer dans de nombreuses situa-
tions, par rapport à la 18F-FDOPA que ce soit pour les localisations cervicales (84,85) ou
l’ensemble des localisations extra-surrénaliennes (86). La TEP/TDM au 68Ga- SSA semble
également très performante pour les PPGL métastatiques, notamment avec mutation
SDHB (87). Néanmoins, ces études sont de petite taille et souvent rétrospectives. La place
des 68Ga- SSA reste à l’heure actuelle encore à définir.

2.3 Place de l’imagerie en fonction du statut génétique


Les formes familiales prédisposent à des PPGL qui varient en terme de localisation et
de profil sécrétoire, expliquant pourquoi certains auteurs préconisent une imagerie
fonctionnelle adaptée au statut génétique (78, 80), lorsque celui-ci est connu, ce qui n’est
que rarement le cas en préopératoire chez un patient se présentant pour une première
tumeur. Ainsi, dans les cas des formes familiales, il a été proposé récemment de favoriser
la 18F-FDOPA pour les patients porteurs de mutations sur les gènes NEM2, NF1, TMEM127,

Paris, 23-24 novembre 2018


240 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

MAX, VHL et HIF2A et plutôt le 68Ga-SSA (sous réserve de sa disponibilité) ou à défaut


le 18F-FDG pour les patients SDHx.
Il n’a pas encore été établi de stratégie consensuelle concernant les modalités de dépis-
tage chez les apparentés asymptomatiques porteur d’une mutation SDHx mis en évidence
par le dépistage familial. L’IRM présente l’avantage non négligeable d’être non irradiante,
vu la nécessité d’un suivi prolongé tout au long de la vie chez ces patients, et pourrait être
proposée tous les 3 ans selon certains auteurs (78). Une étude rétrospective sur 30 patients
a retrouvé une bonne sensibilité de la TEP/TDM au 18FDG associée à l’angioIRM cervi-
cale (88). La 18F-FDOPA et le 68Ga-SSA n’ont pas été évalués dans cette indication.

VII. - HYPERPARATHYROÏDIE PRIMAIRE


1) Généralités
L’hyperparathyroïdie primaire (HPTP) constitue l’une des pathologies endocriniennes
les plus fréquentes, avec une prévalence dans la population générale de 0,86 %, une
incidence en forte augmentation et une prédominance féminine (ratio femme/homme
d’environ 3 - 4/1) (89).
Elle est secondaire à l’augmentation de la production de parathormone (PTH) par les
glandes parathyroïdes, soit par un adénome parathyroïdien unique (maladie uni-glandu-
laire) dans environ 80 % des cas ou alors sous la forme d’une maladie pluri-glandulaire
(MPG) dans 15-20 % des cas (89). Les carcinomes parathyroïdiens sont exceptionnels
(<1%).
Son diagnostic positif repose sur le dosage de la calcémie et de la parathormonémie.
Elle est définie par une hypercalcémie avec PTH inadaptée (normale ou élevée) (90).
La prise en charge chirurgicale concerne les patients symptomatiques ou les patients
asymptomatiques répondant aux critères définis par les recommandations internationales
de 2014 (portant sur le degré d’hypercalcémie, l’âge, la déminéralisation osseuse à l’ostéo­
densitométrie, les antécédents de fracture vertébrale ou l’insuffisance rénale avec DFG
<  60 ml/min) (91). La chirurgie constitue le seul traitement curatif, avec un taux de succès
élevé (95 %) et de faibles taux rapportés de complications (< 1 à 3 %) (90). La technique
chirurgicale classique consiste en une cervicotomie bilatérale exploratrice (CBE), qui
permet l’examen peropératoire des quatre glandes parathyroïdes. Actuellement, la
chi­rurgie mini-invasive (CMI) est favorisée, permettant un abord chirurgical ciblé sur une
glande parathyroïde dans le cas des pathologies uni-glandulaires, parfois associée à un
dosage peropératoire de la PTH afin de vérifier le retour à la normale de la PTH après
exérèse de l’adénome. La CMI présente plusieurs avantages, comme la compatibilité avec
une prise en charge ambulatoire, ainsi que la diminution des durées opératoires et des
complications post-opératoires (92). Elle n’est envisageable que lorsque le bilan d’imagerie
(échographie et scintigraphie 99mTc-sestamibi) peropératoire est concordant, permettant
de mettre en évidence un adénome parathyroïdien unique et de préciser sa localisation.
Dans les autres cas, la CBE reste la technique de référence (91).

2) Détection préopératoire des adénomes parathyroïdiens


Le diagnostic positif d’hyperparathyroïdie primaire repose exclusivement sur les données
biologiques, en particulier sur les dosages de la calcémie de la PTH, de la 25 OH vita­-

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 241

mine D et de la calciurie. Le bilan d’imagerie est réalisé uniquement chez les patients avec
hyperparathyroïdie primaire confirmée biologiquement avec indication opératoire, dans le
but de guider le geste chirurgical, et de poser l’indication d’une CMI en cas de maladie
uni-glandulaire.
Le bilan d’imagerie de première ligne généralement proposé consiste en l’association de
l’échographie parathyroïdienne et de la scintigraphie des parathyroïdes au 99mTc-sestamibi
avec une sensibilité variant entre 66 et 90 % en fonction du type de protocole (soustrac-
tion ou double phase, TEMP avec ou sans TDM) et du caractère uni- ou pluri- glandulaire
de la maladie (93–96). Il permet le recours à la CMI lorsque les deux modalités mettent en
évidence un adénome parathyroïdien unique et de localisation concordante. En cas de
MPG ou de discordance entre les examens diagnostiques préopératoires, la CBE restait
jusqu’à récemment la technique de référence.

3) Apport de la TEP 18F-Choline


La TEP-TDM à la 18F-Choline constitue une modalité importante pour la détection
précoce de la récidive du cancer de la prostate et son développement dans cette pathologie
a permis de mettre en évidence plusieurs cas de fixation cervicale intense en rapport avec
des adénomes parathyroïdiens (97–99). Plusieurs études ont évalué l’intérêt de cet examen
dans la détection des lésions parathyroïdiennes hyperfonctionnelles (100–108).
3.1 Comparaison à l’imagerie de première ligne
En 2014, Lenzaic et coll. ont comparé de manière prospective les performances diagnos-
tiques de la 18F-Choline-TEP/TDM par rapport à la scintigraphie des parathyroïdes dans
une étude pilote chez 24 patients présentant une HPTP (100). Les auteurs rapportaient
une sensibilité par lésion de 94 % pour les adénomes et 91 % pour les hyperplasies pour la
TEP/TDM versus 82 % et 50 % respectivement pour la scintigraphie au 99mTc-sestamibi.
Dans une étude rétrospective portant sur 151 patients (101), la TEP/TDM a montré une
excellente performance pour guider la CMI sans dosage per-opératoire de la PTH avec un
taux de guérison postopératoire de 95 %. La TEP/TDM retrouvait une maladie uni-glan­
dulaire accessible à la CMI chez 83 % des patients avec une VPP > 95 % alors que la
scintigraphie simple traceur 99mTc-sestamibi avec TEMP-TDM et l’échographie n’avaient
iden­tifié une maladie uni-glandulaire que chez 62 % et 61 % des patients respectivement.
Par ailleurs, une étude récente prospective portant sur 36 patients a rapporté une expo­­
sition aux rayonnements ionisants plus faible pour la TEP/TDM 18F-FCholine [2,8  milli
sievert (mSv)] que pour les techniques scintigraphiques, avec l’exposition la plus impor-
tante pour la scintigraphie de soustraction (qui utilise une injection supplémentaire de
pertechnetate (99mTcO4-) comme traceur thyroïdien en plus du 99mTc-sestamibi) à 7,4 mSv
(versus 6,8 mSv pour la TEMP-TDM double phase, simple traceur). La TDM basse dose
couplée aux modalités hybrides ne représentait finalement qu’une faible part de l’irradia-
tion (1,4 mSv pour la scintigraphie et 0,8 mSv pour la TEP) (103). Néanmoins, ces niveaux
d’irradiation restent globalement assez faibles comparés à une TDM 4D qui atteint la
plupart du temps les 10 mSv.
3.2 Discordance de l’imagerie de première ligne
L’une des difficultés rencontrées dans la détection préopératoire des adénomes parathy-
roïdiens est représentée par les situations de discordance entre l’échographie et la scinti-

Paris, 23-24 novembre 2018


242 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

graphie, qui empêchent le recours à la CMI, et augmentent le risque d’échec de la CBE


(104, 105). Les données récentes de la littérature sont en faveur d’une place de choix de la
18
F-FCholine -TEP/TDM dans cette situation.
Une équipe française a publié 2 études prospectives sur la même population (106, 107)
en se focalisant spécifiquement sur l’intérêt de la 18F-FCholine -TEP/TDM en cas d’image-
ries de première intention (échographie et 99mTc-sestamibi planaire seule) discordantes ou
négatives et dans son étude la plus récente a estimé la sensibilité par lésion à 94% sur
17  patients dont 11 avaient une HPTP et 6 une HPT secondaire (107). Cette étude rappor-
tait des performances de la TEP/TDM nettement supérieures à celles de l’échographie à la
fois en analyse par patient et par lésion. En revanche les performances de la TEP/TDM
n’étaient pas clairement supérieures à celles de la scintigraphie que ce soit en analyse par
lésion (sensibilité en aveugle de 83 % pour la scintigraphie versus 96 % pour la TEP/
TDM).

3.3 Récidive post-chirurgicale


Actuellement, aucune étude disponible dans la littérature ne s’est exclusivement
intéressée aux récidives et/ou persistances après une première chirurgie. Cependant, dans
une étude rétrospective récente portant sur 27 patients, 9 (26%) ont eu une 18F-FCholine-
TEP/TDM pour une persistance et/ou une récidive après une première chirurgie avec une
sensibilité de 100% de la 18F-FCholine -TEP/TDM évaluée sur seulement 3 de ces patients
[6 patients n’ayant pas été opérés pour refus (n=1), comorbidités (n=2) et stabilisation de
la calcémie (n=3)] (108).

3.4 TEP-IRM à la 18F-Choline


La TEP-IRM constitue une modalité intéressante pour l’imagerie des parathyroïdes, en
combinant l’apport de l’IRM des parathyroïdes comme imagerie de repérage (technique non
irradiante et à forte résolution en contraste) associée à la TEP à la 18F-FCholine qui apporte
une information fonctionnelle importante. Peu d’études sont disponibles à ce jour, mais les
premières données rapportent des valeurs de sensibilité et VPP élevées respectivement de
95 % et 100 % en première ligne (étude mixte TEP-TDM et TEP-IRM) (109) et de 90 % et
100 % en seconde ligne après discordance de l’imagerie échographie/ scintigraphie (110).

VIII. - CONCLUSION
Depuis de nombreuses années, l’imagerie fonctionnelle fait partie de la prise en charge
des pathologies endocriniennes. Le développement de la TEP/TDM a permis une amélio-
ration considérable de la sensibilité de ce type d’imagerie, la rendant incontournable dans
la prise en charge des tumeurs neuroendocrines, que ce soit pour leur localisation, le bilan
d’extension de la maladie, le pronostic ou l’évaluation de la réponse au traitement. Les
données ainsi obtenues permettent d’optimiser la prise en charge des patients en influant
sur la décision thérapeutique.
Ces nouveaux traceurs (18F-FDOPA, 68GA-SSA, 18F-FCholine) ont cependant encore
une disponibilité limitée et nécessitent notamment pour les 68GA-SSA et la 18F-FCholine
une validation sur de plus larges cohortes.
Enfin, avec les radiotraceurs marqués au 68Ga, se développe actuellement le concept de
compagnon théranostique, utilisant le peptide couplé à un radionucléide choisi en fonction

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 243

de la cible tumorale et permettant une thérapie ciblée de la maladie tumorale détectée lors
de l’imagerie fonctionnelle en couplant le peptide utilisé en imagerie à un radionucléide
émetteur α ou β.
Un meilleur accès à ces nouveaux traceurs et à la radiopeptidothérapie est attendu dans
les années à venir. La place de ces nouvelles techniques sera à préciser dans la stratégie de
surveillance des patients, l’évaluation de la réponse thérapeutique ainsi que dans les
algorithmes décisionnels thérapeutiques.

1. 
Sorbonne Université, Service de Médecine Nucléaire,
Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83 boulevard de l’Hôpital,
75013 Paris
2. 
Service de Médecine Nucléaire, CHU-Hôtel Dieu, 1 place
Alexis Ricordeau, 44093 Nantes Cedex 1
3. 
CRCNA, INSERM UMR892, 8 quai Moncousu, BP 70721,
44007 Nantes Cedex 1
4.
Inserm U970, Centre de Recherche Cardiovasculaire de
Paris, Hôpital Européen Georges Pompidou, 56 rue
Leblanc, 75015 Paris
* Ces auteurs ont participé à part égale à ce travail

Adresse pour la correspondance : Docteur Charlotte Lussey-Lepoutre, Service de Médecine Nucléaire,


Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris
Courriel : charlotte.lepoutre@aphp.fr

NOVEL PET TRACERS : ADDED VALUE FOR ENDOCRINE TUMORS


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

by Judith CHARBIT1*, Sébastien BERGERET1*, Catherine ANSQUER2,3


and Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE1,4 (Paris, Nantes - France)

ABSTRACT
Nuclear medicine has been implicated in diagnosis and treatment of several endocrine
disorders for several decades. With recent PET tracer’s development, functional imaging
plays a major role in endocrine tumours enabling with a high performance their localisation,
characterisation and extension. Moreover, some peptides as somatostatin analogs can also be
used for peptide receptor radionuclide therapy. In this context, Gallium-68 labelled somatos-
tatin analogs (68Ga-SSA) can help to tailor therapeutic choices and follow the response to
treatment in the so-called theranostic approach. This review emphasizes the usefulness of
three novel PET tracers (18F-Fcholine, 18F-FDopa and 68Ga-SSA) for primary hyperpara-
thyroidism and neuroendocrine tumours.

Key-words : PET/CT, neuroendocrine tumours, primary hyperparathyroidism, 18F-Fcholine, 18F-Fdopa, Gallium


68, somatostatin, 18F-FDG.

Paris, 23-24 novembre 2018


244 Judith CHARBIT, Sébastien BERGERET, Catherine ANSQUER et Charlotte LUSSEY-LEPOUTRE

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Place des nouveaux traceurs TEP en endocrinologie 247

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Paris, 23-24 novembre 2018


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Hyperparathyroidism and Inconclusive Conventional Imaging: A Prospective Pilot Study. Radiology.
2017; 284(2): 460–7.

TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


HORMONES THYROÏDIENNES :
DE LA CONCENTRATION MESURÉE
AUX EFFETS RESSENTIS

par Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ et Patrice RODIEN (Angers)

Le traitement de l’hypothyroïdie patente ou fruste par la Levothyroxine aboutit aisément


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

à la normalisation de la TSH. Pour autant, le ressenti de certains patients fait supposer


une supplémentation imparfaite, tout comme les dosages de T4l et de T3l. Les
concentrations plasmatiques de T4 et de T3 libres ne reflètent qu’imparfaitement leurs
concentrations et leurs actions tissulaires, largement modulées par l’action des désiodases
locales, notamment la désiodase de type 2. Les essais de traitement combiné par T4 et T3
n’ont pas fait la preuve d’une supériorité clinique et font craindre un surdosage prolongé en
hormones thyroïdiennes. Les polymorphismes des gènes impliqués dans la régulation de
l’axe thyréotrope et la signalisation des hormones thyroïdiennes (transporteurs, désiodases,
récepteurs) contribuent probablement à la constitution d’un phénotype de sensibilité
particulière aux variations modestes de concentration des hormones thyroïdiennes et à la
difficulté à restaurer une euthyroïdie ressentie.

Mots-clés : thyroxine, traitement combiné, hypothyroïdie, sensibilité tissulaire, qualité de vie, polymorphismes.

INTRODUCTION

DES PATIENTS INSATISFAITS


Le traitement des dysfonctions thyroïdiennes, notamment des hypothyroïdies ne devrait,
en première analyse, pas poser de difficultés particulières. Le médecin dispose de
médi­caments adaptés : anti-thyroïdiens ou hormones thyroïdiennes dont l’ancienneté
d’utilisation garantit, en théorie une bonne connaissance.
Pourtant, les études de qualité de vie chez les patients atteints ou ayant été atteints
d’hyperthyroïdie ou d’hypothyroïdie montrent qu’un nombre important de ces patients
n’est pas satisfait du traitement qui lui est prescrit, ou n’a pas recouvré son état antérieur
après guérison de la maladie (1-4). Ceci, alors même que les concentrations de TSH et
d’hormones thyroïdiennes libres (T4l et T3l) sont mesurées dans l’intervalle de normalité.
Les dysfonctions thyroïdiennes dont la prévalence varie selon les populations étudiées
(5, 6) et les bornes retenues pour l’intervalle de normalité concernent en Europe et en
France plusieurs millions de patients (5, 7, 8).
Jusqu’à 6 % de la population du nord de l’Espagne seraient atteints d’hypothyroïdies et
4,3 % d’hyperthyroïdies connues et/ou traitées en 2018, auxquelles s’ajoutent les TSH hors

Paris, 23-24 novembre 2018


250 Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ et Patrice RODIEN

normes de découverte fortuite, amenant l’ensemble des dysfonctions thyroïdiennes (selon


la concentration de TSH) à une prévalence de 15 % (9). Ces chiffres, très élevés et
vrai­semblablement biaisés, sont, néanmoins, assez proches de ceux déjà rapportés précé-
demment (10).
Par extrapolation de la prévalence rapportée en Espagne à la population adulte (au-delà
de 20 ans) française, 7,5 millions de sujets ont une TSH « anormale » dont 3 millions
d’hypothyroïdies et 2 millions d’hyperthyroïdies connues ou traitées. On rappelle que le
nombre de sujets traités par Levothyroxine dépassait trois millions en France en 2017
(données Assurance maladie).

UNE INFLATION DE BIOLOGIE HORMONALE


Plus de 18 millions de dosages de TSH, T4l et T3l, isolés ou en combinaisons ouvrant
droit à remboursement ont été réalisés en 2015 pour plus de 137 millions d’€ de rembour-
sement en France (source Assurance Maladie).
Il existe donc un décalage entre une prescription massive de dosages hormonaux thyroï-
diens, témoignant d’un intérêt important pour le diagnostic et la surveillance de ces
maladies et une insatisfaction tout aussi importante des patients. En d’autres termes, il
existe un décalage entre les résultats de la biologie utilisée pour adapter le traitement et le
ressenti des patients.

LA SYMPTOMATOLOGIE DES DYSFONCTIONS THYROÏDIENNES


La symptomatologie de l’hyperthyroïdie ou de l’hypothyroïdie avérées est sensée être
facilement repérée, mais nombre de dysfonctions thyroïdiennes sont diagnostiquées au
cours de bilan systématiques de routine. De plus, une étude en vie réelle a bien montré que
même une hyperthyroïdie avérée peut avoir peu de traduction clinique. Ainsi, la thermo-
phobie et les palpitations, signes cardinaux de l’hyperthyroïdie ne sont relevés que chez 26
à 76 % et 50 à 80 % des sujets respectivement, et encore moins chez le sujet âgé (11).
L’application d’un score d’hypothyroïdie est également prise en défaut chez nombre de
patients hypothyroïdiens (12, 13).

LES HYPERTHYROÏDIES ET HYPOTHYROIDÏES FRUSTES


Les anomalies modérées de la fonction thyroïdienne, définies par une valeur de TSH
hors des normes avec des hormones thyroïdiennes normales, souvent appelées dysfonc-
tions infracliniques dans la littérature anglo-saxonne ont fait l’objet de nombreuses
controverses quant à leur impact sur la morbi-mortalité, la qualité de vie des patients et la
nécessité ou non de les traiter.
Ces dysfonctions modérées illustrent le décalage entre les concentrations hormonales
mesurées, le ressenti des patients et le retentissement en termes de morbi-mortalité.
La discordance entre l’élévation ou la baisse de la TSH, au-delà des valeurs de références,
supposée signer la pathologie thyroïdienne, et les concentrations mesurées de T4 ou de T3
est la conséquence de l’extrême sensibilité de l’hypothalamus et de l’hypophyse aux varia-
tions minimes de la T4 et de la T3 (14). C’est pour cette capacité d’amplifier le signal de

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hormones thyroïdiennes : De la concentration mesurée aux effets ressentis 251

dysfonctionnement que la TSH est considérée comme le meilleur indicateur de l’équilibre


de la fonction thyroïdienne.
Le terme fruste n’est pas synonyme d’asymptomatique et, en cela, parait plus approprié
que le terme anglosaxon « subclinical ». En effet, la controverse sur le traitement des
dysfonctions frustes est née du lien qui a pu être fait entre des conséquences cliniques,
parfois des complications, de ces anomalies biologiques modestes.
La littérature regorge en effet d’études de l’impact de l’hyperthyroïdie fruste sur le risque
ostéoporotique, la symptomatologie cardiaque, le poids, le risque de fibrillation auriculaire
ou d’insuffisance cardiaque, de troubles cognitifs, de mortalité précoce… (15-20)
De la même façon, l’hypothyroïdie fruste a été associée à une augmentation du risque
d’évènements cardiovasculaires, de troubles cognitifs et de l’humeur, d’altération de la
qualité de vie… (15, 17, 21-26). Plus récemment, l’impact de ces dysthyroïdies frustes a été
pondéré en fonction de l’âge (21, 27-29).

DE LA NORMALITÉ À LA DYSFONCTION
Au-delà des études d’impact des hyperthyroïdies ou hypothyroïdies frustes, de nombreux
travaux se sont attachés à rechercher, chez des sujets dont la TSH est « normale », un
impact des variations de concentration des hormones thyroïdiennes à l’intérieur de l’inter-
valle de normalité sur la morbi-mortalité et la qualité de vie des patients.
Ainsi les quintiles supérieurs de T4l sont-ils associés à une surmorbidité cardiovasculaire
chez les sujets âgés, à un risque majoré d’ostéopénie, à des anomalies métaboliques, voire à
des anomalies cognitives ou des modifications de la qualité de vie (30-34).
On imagine ainsi un continuum entre la stricte normalité (TSH et hormones thyroï-
diennes à la médiane), la normalité limite (TSH normale et hormones thyroïdiennes aux
limites de l’intervalle de référence), la dysfonction fruste (TSH anormale et hormones
thyroïdiennes dans la norme) et dysfonctions avérées (TSH et hormones thyroïdiennes
hors des normes).
Les normes proposées pour les dosages hormonaux thyroïdiens correspondent aux
limites entre lesquelles se situent les valeurs de 95 % de la population indemne de patho-
logie thyroïdienne. Cependant, les variations de TSH et d’hormones thyroïdiennes d’un
individu sont beaucoup plus limitées. Chaque individu sain a son propre intervalle de
normalité, pour la TSH, la T4 et la T3 (35). De telle sorte que la valeur de la TSH mesurée
chez un individu peut correspondre, pour cet individu, à une dysfonction fruste, alors
même qu’elle est toujours entre les limites inférieures et supérieures de la norme pour la
population de référence.
En outre, les normes elles-mêmes ont été largement discutées. Quelques éléments dé­mo­
graphiques et environnementaux peuvent en faire varier les limites pour une même
méthode de dosage. Elles dépendent de la structure ethnique de la population étudiée, des
apports en iode de cette population et de l’âge des sujets étudiés. Le caractère strict ou non
de la notion de normalité (absence d‘anticorps antithyroïdiens) (6, 36, 37).
On admet une dérive liée à l’âge de la TSH vers les valeurs plus élevées (données d’études
épidémiologiques et de suivi de cohortes), et surtout cette dérive est associée à une plus

Paris, 23-24 novembre 2018


252 Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ et Patrice RODIEN

grande longévité (38-42). Ce relatif consensus, à l’origine des recommandations sur le


non-traitement de l’hypothyroïdie fruste du sujet âgé contraste avec certaines études qui
décrivent une tendance à la diminution de la TSH (9) et surtout avec les données obser-
vationnelles de réponse de la TSH à une hypothyroïdie spontanée ou après thyroïdec-
tomie (43, 44).

LA FIABILITÉ DE LA MESURE
Sous ce terme de fiabilité, on entend ici la notion de variabilité technique (quelle varia-
bilité de résultats pour un même échantillon dosé plusieurs fois, dans le même laboratoire,
avec la même méthode, ou dans des laboratoires différents ?) (45-48) ainsi que la variabi-
lité individuelle déjà mentionnée (35, 49).
Ainsi, il a été proposé que pour évaluer le niveau personnel de régulation de la TSH d‘un
individu, avec une précision de 90 %, 25 prélèvements seraient nécessaires pour prendre
en compte la variabilité individuelle et la variabilité technique (35, 49). Pour évaluer son
niveau personnel de référence pour la T4 ou la T3 (totales), il faudrait cinq prélèvements
(35, 49).
Les outils de mesure de la TSH, de la T4 et de la T3 (hormones libres en France, totales
aux États-Unis) sont fiables et suffisants pour détecter des anomalies franches ; ils sont
probablement insuffisamment fiables et précis, lorsqu’on cherche à affiner et personnaliser
le traitement substitutif d’un patient qui reste symptomatique. En pratique, le dosage de la
T3l est réputé peu fiable (45, 50).

LE TRAITEMENT DE L’HYPOTHYROÏDIE EST-IL ADAPTÉ ?


Si on en croit les résultats des études de qualité de vie et satisfaction des patients, le
traitement ne répond pas totalement à leurs attentes.

QUELLE CIBLE DE TRAITEMENT ?


On sait que le traitement par Levothyroxine, ne permet pas de normaliser (au sens des
normes individuelles) la T4 et la T3 si on normalise la TSH. Il ne normalise pas la TSH si
on normalise la T4. Ainsi, après thyroïdectomie, la normalisation de la TSH par la
Levothyroxine nécessite une T4 et une T4l circulantes plus élevées que les concentrations
mesurées en préopératoire. Malgré cela, on observe une concentration de T3 et de T3L
plus basses. La normalisation de la concentration de T3 ne s’obtient qu’au prix d’une
augmentation de la T4 et d’un freinage de la TSH (51-54). Mais plus on augmente la dose
administrée de T4, moins la désiodation de cette T4 en T3 est efficace (4, 45, 55, 56).
Cette constatation a conduit à proposer un traitement combiné de T4 et T3, pour
normaliser la T3, dont on admet qu’elle est la véritable hormone biologiquement active.
Les études de traitement combiné (T4 + T3) ont donné des résultats contradictoires,
parfois enthousiasmants parfois décevants. On s’accorde en général à conclure à une
absence de bénéfice démontré, malgré une préférence des patients dans certaines études et
à un risque potentiel de surdosage. On note également un effet placebo notable et une
capacité imparfaite à identifier le type de traitement administré dans les études en cross-
over (3, 53, 57-59).

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hormones thyroïdiennes : De la concentration mesurée aux effets ressentis 253

 ES HORMONES CIRCULANTES REFLÈTENT-ELLES LES CONCENTRATIONS


L
TISSULAIRES ?
Les notions anciennes, de la conversion hépatique de T4 en T3 par la désiodase de type
1 source principale de T3 circulante, ont été révisées au cours des dernières années avec la
démonstration du rôle majeur de la désiodase de type 2 (60) et de la production de T3 par
le cerveau, par le cœur le tissu adipeux brun et, à un moindre degré, le muscle squelettique
et la peau (45, 61, 62). De plus, nombre de modèles anciens sont basés sur les études réali-
sées chez le rongeur chez lequel 40 % environ de la T3 provient de la synthèse thyroï-
dienne, alors que dans l’espèce humaine moins de 20 % de la T3 circulante est directe-
ment sécrétée. Pour une production de 30 µg/j de T3 on estime à 5 µg, la production
thyroïdienne (45, 62).
La T3 circulante est donc produite dans différents tissus périphériques et elle résulte de
l’activité des désiodases de type 1 et 2 (production de T3) et de la désiodase de type 3
(inactivation). Cette T3 circulante ne reflète pas l’imprégnation tissulaire et cellulaire en
T3 (45, 63, 64). Les tissus riches en désiodase de type 2 amplifient localement le signal T3
en augmentant la concentration de T3. En particulier, la localisation intracellulaire de la
désiodase de type 2, proche du noyau de la cellule facilite une action génomique optimisée,
indépendante de la T3 circulante (45), et la T3 circulante basse pourrait refléter en partie
le catabolisme de la T3 après son action tissulaire en dépit d’une action biologique appro-
priée. Il faudrait, pour s’en assurer, savoir mesurer la T4, la T3 et la T2 (diiodothyronine)
au sortir immédiat d’un organe cible.
La distribution tissulaire de la désiodase de type 2 aboutit ainsi à une sensibilité en
mosaïque aux hormones thyroïdiennes. De plus, la concentration de T3l est extrêmement
sensible à toute modification physiologique ou physiopathologique de l’organisme (jeune,
perte de poids, maladie intercurrente, état critique) (65-67). Il serait tentant d’en déduire
que chercher à normaliser la concentration en T3 n’est d’aucune utilité si on admet que les
tissus adaptent eux-mêmes la disponibilité en T3. Cependant, on sait qu’une baisse de
20 % de la T3 circulante chez des sujets thyroïdectomisés substitués par blocage de la
désiodase de type 1 lors d’un traitement par propylthiouracyl, qui épargne la désiodase de
type 2, fait doubler la TSH (68). On peut y voir la preuve d’un défaut d’adaptation tissu-
laire (hypothyroïdie ressentie très fortement par l’hypothalamus et l’hypophyse malgré
une baisse modeste de la T3), mais on sait l’extrême sensibilité hypothalamo-hypophysaire
aux variations modestes des concentrations de T4 et/ou de T3 (14, 45). Ce sont bien les
dysthyroïdies frustes qui sont associées à la morbi-mortalité dans les grandes études épidé-
miologiques, c’est-à-dire les valeurs de TSH hors normes, reflets de valeurs de T4 et ou T3
proches des limites de l’intervalle de référence personnel. La TSH reste donc un excellent
marqueur d’imprégnation centrale en hormones thyroïdiennes, mais également de l’action
périphérique de celles-ci (31, 69-71)

POURQUOI LES TRAITEMENTS COMBINÉS NE FONT-ILS PAS LEUR


PREUVE ?
On l’a vu, les essais thérapeutiques comparant un traitement combiné au traitement par
T4 seule ont parfois montré une préférence, transitoire, des patients pour le schéma
combiné. En contrepartie, outre le caractère transitoire de l’amélioration, il est fréquem-
ment observé un freinage de la TSH faisant craindre des effets délétères à long terme d’un
équivalent d’hyperthyroïdie fruste.

Paris, 23-24 novembre 2018


254 Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ et Patrice RODIEN

Quelques études se sont intéressées à l’impact de variants polymorphiques des gènes


codant pour les molécules impliquées dans le transport, le métabolisme et la signalisation
des hormones thyroïdiennes, essentiellement les désiodases. Là encore, des résultats
contradictoires ont été obtenus sur le lien entre les variants des désiodases par exemple et
les taux de TSH, T4l, T3l. Quelques études ont pu relier ces variants aux scores de qualité
de vie ou à la préférence des patients pour le traitement combiné. Il est nécessaire de
séparer les études étudiant les liens entre les variants génétiques, les concentrations d’hor-
mones circulantes et leur impact chez le sujet spontanément euthyroïdien, où persiste une
adaptation thyroïdienne, de celles étudiant l’équilibre et le retentissement du traitement
substitutif (72-82).
Quel est le sort de la T4 et de la T3 absorbées par voie digestive ? Une analyse de la
littérature ne nous a pas permis de trouver d’information sur le devenir dans la circulation
portale de la T4, ou de la T3 après absorption per os, qui a été et est toujours très étudiée
(83-86). Circulent-elles sous forme libre ? sont-elles soumises à un effet de premier passage
hépatique ? si oui lequel ? désiodation, sulfatation, glycuronidation, désamination ? le cycle
entérohépatique des hormones thyroïdiennes est-il affecté par le microbiote intestinal ?
(86-88).
Peut-il y avoir, là aussi, une explication partielle à la substitution imparfaite des hypothy-
roïdies ?

POUR DES ESSAIS CONSACRÉS AUX PATIENTS HYPERSENSIBLES ET


INSATISFAITS
Les recommandations, consensus et avis d’experts concluant à l’absence de preuve de la
supériorité d’un traitement combiné T4+T3, comme d’objectifs personnalisés de TSH, de
T4l ou de T3l, ne doivent pas faire oublier la proportion de patients, minoritaires, qui
restent symptomatiques sous traitement par Levothyroxine.
Si on admet la notion de niveau de régulation individuel de l’axe thyréotrope (le
thyréostat) génétiquement déterminé, synthèse d’un déterminisme génétique de la concen-
tration idéale de T4 et/ou T3 circulantes d’une part et de la sensibilité tissulaire (transpor-
teurs, récepteurs, production-destruction des hormones thyroïdiennes) reflétée par le
dosage de TSH, d’autre part, il n’est probablement pas logique de défendre une thérapeu-
tique générale et standardisée (1, 89).
Plus que les seuls dosages hormonaux normalisés, dont la fiabilité relative a été
men­tionnée, peut-être devons-nous viser, une fois cet objectif atteint, une adaptation au
cas par cas. C’est en pratique assez souvent le cas. Pour autant, l’adoption empirique de
traitements à la carte doit être pesée au regard des études de morbi-mortalité.
Il est probablement souhaitable de concevoir de nouvelles études de la sensibilité aux
hormones thyroïdiennes et de nouveaux essais thérapeutiques, randomisés, contrôlés et en
double aveugle, dédiés aux patients symptomatiques bien que « correctement » substitués.
L’impact récent du changement de formulation de la Levothyroxine nous a rappelé que ces
patients, même minoritaires, ne sont pas exceptionnels. Ils ne peuvent être correctement
identifiés qu’à travers des essais étudiant, sans a priori, l’impact somatique, biologique et
psychique des schémas thérapeutiques, réalisés en double aveugle, pour se défaire des effets
placebo et nocebo, tellement contestés, ainsi que du jugement biaisé des praticiens. Les

Mises au point cliniques d’Endocrinologie


Hormones thyroïdiennes : De la concentration mesurée aux effets ressentis 255

différentes causes d’une hypothyroïdie impactent différemment la qualité de vie et, singu-
lièrement l’indication d’une chirurgie thyroïdienne, maladie bénigne ou cancéreuse, n’a
pas le même retentissement, à profondeur égale de l’hypothyroïdie (90-94). On doit aussi
rappeler que l’appréciation de la qualité de vie des patients par les patients ou les praticiens
diffère quelque peu, de façon surprenante avec une vision plus négative chez les prati-
ciens ! (95).

Centre de référence des maladies rares de la Thyroïde et


des Récepteurs Hormonaux (CRMR TRH), service EDN,
CHU d‘Angers, 4 rue Larrey, 49933 Angers cedex 09

Adresse pour la correspondance : Professeur Patrice Rodien, adresse ci-dessus.


Courriel : PaRodien@chu-angers.fr

THYROID HORMONES : FROM THE MEASURED CONCENTRATION


n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n n

TO FEELING
by Claire BRIET, Frédéric ILLOUZ and Patrice RODIEN
(Angers - France)

ABSTRACT
The treatment of overt or subclinical hypothyroidism by Levothyroxine restores the
concentration of TSH easily. However, the feeling of a number of patients suggests that the
replacement therapy is not perfect, which is also suggested by circulating T4 andT3 measu-
rement. Blood concentration of free T4 an T3 do not precisely reflect their tissue concentra-
tions and action which are largely modulated by the action of local deiodinases, especially
deiodinase 2. Trials combining T4 and T3 did not demonstrate a clinical superiority and
carry the risk of prolonged overtreatment. Polymorphisms in genes involved in the thyro-
tropic axis regulation and signalization by thyroid hormones may contribute to a phenotype
of increased sensitivity to minimal variations in thyroid hormones concentrations and ground
the difficulty to restore a felt euthyroidism.

Key-words : thyroxin, combined treatment, hypothyroidism, tissue sensitivity, quality of life, polymorphisms.

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Mises au point cliniques d’Endocrinologie


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TRENTE-NEUVIÈMES
JOURNÉES NICOLAS GUÉRITÉE D’ENDOCRINOLOGIE
ET MALADIES MÉTABOLIQUES
SE TIENDRONT LES
VENDREDI 22 ET SAMEDI 23 NOVEMBRE 2019
au Grand Amphithéâtre de la Faculté de Médecine des Saints-Pères
à Paris (VIe)

Paris, 23-24 novembre 2018


pour les Éditions de Médecine Pratique
17, rue Souham, 19000 TULLE
4e trimestre 2018
Dépôt légal n° 671

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