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extraits de la revue du Voile d'Isis :

LA PROPAGANDE
( Voile díIsis (août 1907 )

LE POETE
( Voile díisis. Août 1909.)

L'INITIATION
Krishna, Bouddha et le Christ
(Le Voile d'Isis, février 1911)

LA PROPAGANDE
Voile díIsis (août 1907)
De tous côtés se forment des associations de recherches psychiques et de diffusion
ésotérique; leurs fondateurs et leurs adhérents sont tous animés de la ferveur la plus
louable, et quoi qu'en disent les contempteurs de l'idéalisme, bien peu, parmi les
nombreux chefs de ces phalanges d'avant-garde, pensent à leur bénéfice pécunier
ou honorifique. Ils sont donc tous dignes d'éloges; mais leur enthousiasme les rend
quelquefois imprudents: ils se pressent peut être un peu trop.
Je ne veux pas dire qu'il ne faille pas aller de l'avant, mais l'explorateur ne court
pas à l'aveuglette dans une forêt vierge; il se renseigne, il essaie d'éviter marécages
et fondrières et tribus hostiles, le chercheur de mystères psychiques doit donc
prendre certaines précautions. Il met le pied dans un domaine que toute la tradition
dépeint comme foisonnant d'erreurs et de mirages; et il n'est pas bien sûr que la
recherche absolument désintéressée du vrai, soit son seul mobile; chez presque tout
le monde, il y a la curiosité et la satisfaction d'être expert en des choses qui ne sont
pas à la portée de tout le monde.
Or, les effets du monde moral sont très importants. L'acte le plus commun peut
acquérir une grande influence en bien ou en mal, suivant l'intention qui était au
fond du cúur de son auteur. Le semblable appelle le semblable. Le manque de
sincérité vis à vis de soi-même fait venir l'erreur; le manque de simplicité appelle
la complication. Je dirai plus, celui qui se croit supérieur appelle involontairement
et inconsciemment des esprits d'orgueil; et ainsi de suite pour tous les états de notre
âme, et tous les modes de notre vie.
L'expérimentateur des choses psychiques devrait donc, pour diminuer eu principe
toutes les chances d'erreur, devenir d'abord un saint. Mais comme ce travail là est
terriblement long, celui qui líentreprendrait à fond, n'aurait plus guère de temps
pour cataloguer les fluides, bâtir de pompeuses théories et se donner la réputation
d'un pionnier: ce retard apparent du progrès de la science ne serait pas mauvais, car
l'homme se croit toujours plus avisé que les êtres qui le guident; il ne peux se
mettre dans la tête l'idée que sa nourriture intellectuelle est assurée, malgré lui,
pour ainsi dire et qu'il lui suffit d'obéir à la loi .
Sans pousser aussi loin, la prudence, les chercheurs en psychisme doivent se rendre
compte qu'ils manient des forces dangereuses; elles sont imprégnées de vie à une
haute tension, c'est vrai; mais il ne s'ensuit, pas que cette vie soit assimilable dans
l'état actuel de développement du genre humain. Tel phénomène qui va faire un pas
énorme à la science, ne peut être obtenu qu'en violant plusieurs des lois cosmiques,
qu'en sacrifiant un grand nombre d'existences, qui pour n'être pas visibles n'en sont
pas moins réelles. Aucun homme n'est assez instruit pour établir la balance d'une
telle comptabilité.
Et comme les chercheurs en question croient d'ordinaire à l'existence de Dieu , ils
doivent comprendre que toute créature, saint, ange, ou démon est susceptible de se
tromper; qu'il ne faut donc pas demander de l'aide et de l'inspiration à aucune
d'elles; qu'il ne faut pas se lier par pacte avec aucune; qu'il ne faut obéir à aucune
mais à Dieu seul, de qui la volonté est connue et sait toujours se faire connaître
indubitablement.
SEDIR

LE POETE
(Voile díisis. Août 1909.)
L'un des littérateurs modernes qui ont donné, de la fonction biologique du poète la
description la mieux vivante, c'est, voici tantôt douze on quatorze ans, Saint Pol
Roux le Magnifique. Le poète, à son dire, " figure l'entière humanité dans un seul
homme, il contient l'univers en puissance: quand le poète s'adonne à l'oeuvre, cela
signifie que l'univers ferme son vaste éventail, se replie sur soi, se réduit à sa plus
simple expression, en un mot, s'élexirise, ou plus simplement, s'individualise, c'est-
à-dire s'incarne dans le poète élu pour héraut, afin de se mettre davantage a la
Portée des âmes et de communiquer plus directement avec l'éparse attention ".

On voit, dans ces formules, où revit la pure élégance intellectuelle de Platon avi-
vée par la tendresse qui vient de Jésus, le clair pressentiment, d'un état de Beauté
où le Sacerdoce poétique sera une création. " Les mots exprimés depuis les
origines par des races à la suite sont une seule et continue évocation qui, au cours
des âges, amasse des forces virtuelles Jusqu à ce que, le pouvoir magique enfin à
son paroxysme, êtres et choses évoqués cohérent, germent se contexturent,
s'accusent de peu en prou, pour définitivement peupler le solide empire des sens ".

Ceci est une expression moderne de l'antique croyance, partout encore flottante sur
les hauts lieux où se déployaient, les analogies dans les souterrains sacrés, sous le
vieil arbre où enseignait le gourou nu ; la parole est une magie ; la parole absolue
est le Verbe divin: sa réfraction terrestre est le langage: et si Dieu quand il parle,
crée, conglomère, édifie les mondes, peint les décors cosmiques, combine les
symphonies des sphères,, trace les épures des forces zodiacales, règle les danses
des Muses, c'est à dire la marche des lois ontologiques, - l'homme dans sa
minuscule opération, configure à l'image du Verbe, des corps de mots, de formes,
de couleurs et de sons, aux visiteurs invisibles qui lui viennent en foule des
royaumes de la Connaissance et de la Beauté.

De sorte que chacun peux être poète, harmoniste et peintre: le désir essentiel de la
race sacrée des Artistes est, comme l'écrit Saint Pol-Roux : " que la Beauté
descende s'asseoir parmi les hommes ainsi que Jésus s'asseyait, parmi les pêcheurs
de Galilée... coaguler l'Abstrait, iconiser l'absolu, figurativer le mystère, organiser
l'invisible, meubler l'espace, coloniser l'inconnu, sont la neuve ambition du génie".

" Le poète est la souffrance humaine tout entière, dit encore le protagoniste des "
Magnifiques ", cíest, par là qu'il est uni au Crucifié et c'est pour cela que, le plus
grossier des hommes, si le désir de Dieu lui brûle le coeur sera poète par un geste,
par un regard, par un mot.

Il y a, en effet, un terreau indispensable aux fleurs esthétiques pour qu'elles


s'épanouissent, : c'est notre coeur que laboure la charrue du Malheur; si au Poète
d'action, la vie quotidienne apporte la fumure par l'effort physique, au poète
proprement dit. c'est la culture mentale qui enrichit le soi intérieur.

On ignore généralement de quel prix les artistes qui atteignent la splendide


simplicité du Beau paient leur maîtrise. Une page de Flaubert, une strophe de
Verlaine reposent sur les invisibles, fondations de cette sorte de culture dont
l'érudit possède bien les éléments, mais que le docte seul a digéré avec intelligence
pour, en extraire par la méditation une forme de science personnelle et originale. A
lire Salammbô ou les Tentations, on se rend encore compte de la mémoire et, de la
compréhension de líécrivain. Mais qui se douterait que l'exquise candeur du
chantre de Sagesse jaillit, comme la pariétaire aux murailles ruinées, d'une
connaissance minutieuse de la théologie. Verlaine possédait ses Pères de líEglise
comme un professeur de Saint Sulpice mais ce métier, ce sous oeuvre étaient en
lui, si intimement assimilés, que passés dans les cryptes de l'inconscient, ils
soutenaient, sans effort, spontanément, naturellement, de leur basse continue, les
mélodie-, du concerto intérieur.

Les modes de la matière, les panaches des mondes lancés dans l'espace, les êtres
individuels, les feux d'artifices de la pensée, les constructions du savoir, les jets
flamboyants des amours, tout possède son hégémonie, tout est le vêtement d'un
esprit, tout aussi est, un combattant. Dans ces tableaux innombrables, le poète
surprend la seconde où l'harmonie éternelle de la cause et des moyens, du mobile et
des organes, s'inscrit dans le geste, dans le contour, dans la résonnance, dans les
mots, dans la couleur. Toute chose possède plusieurs âmes, créées, et une âme
essentielle: cette dernière oeuvre toujours selon le mode de 1'unité, et, le beau en
est l'irradiation longtemps captive mais qui éclate à coup sûr dès que les relativités
adverses arrivent, enfin à une combinaison harmonieuse quoique fugace.

Líartiste est le chasseur à l'affût de cet éclair, il promène son butin afin que la foule
sente, plutôt, que comprenne, la splendeur de l'Univers : líArt est donc un
sacerdoce: son mode central est religieux: son intégration est l'Absolu.

SEDIR.

L'INITIATION
Ce que la science occulte appelle l'Astral, comprend tout l'Invisible L'immense
variété de matières qui composent la création sont pénétrées d'Esprit à des degrés
différents, mais aucune d'elles n'est l'Esprit; celui-ci ne se trouve à l'état pur que
dans ce que l'Evangile appelle le royaume des Cieux. Nous ne possédons pas
d'étalon pour mesurer les divers pourcentages de condensation de la matière ; cet
étalon existe, mais dans un plan encore inaccessible à notre intelligence, le plan des
Nombres.
A notre point de vue relatif de terriens, notre matière physique est la plus dense,
mais au point de vue universel, il existe beaucoup de plans plus denses que le
nôtre.
Etymologiquement, le mot astral désigne toutes les espèces de forces qui agissent
par rotation, par paraboles, par ondes; les anciens occultistes ont appliqué ce mot à
toutes les sphères invisibles, à cause de leur à priori panthéiste on émanationiste.
Il faut identifier plan et planètes; il y a encore plus de planètes invisibles que de
corps célestes visibles ; il ne faut donc pas espérer les cataloguer en une existence.
Les êtres créés, depuis le vibrion jusqu'à la nébuleuse, en y comprenant tous les
états psychiques, peuvent se considérer comme statique ou dynamique, en repos ou
en mouvement : ainsi par exemple, un homme est immobile, il vit cependant, il
représente une planète, s'il agit, il vit encore, mais alors son acte est analogue à la
vie d'un cliché.
Tout est donc dans un interéchange continuel; les hommes n'ont pas inventé les
voyages; tout voyage dans la Nature ; tous les êtres réagissent les uns sur les
autres, donnent et reçoivent ; la terre rayonne des germes minéraux, végétaux,
animaux, humains, géniaux, mentaux, magnétiques, etc., et elle en reçoit autant de
tous les coins de l'Univers.
Nous baignons donc dans l'Invisible ; nous sommes l'un des canaux les plus
importants par lesquels l'Esprit de la Terre reçoit de nouvelles formes de vie, et en
expédie ; notre mission est donc très grave. L'homme terrestre sur 100 parties, en a
99 dans l'Invisible, et une seulement dans le visible ; notre esprit, qui comprend
peut-être des milliers d'organes fluidiques, agit dans cet Invisible, tant terrestre que
cosmique, y cherche, y voyage, s'y nourrit, et le cultive : il ne faut donc pas le
lancer à l'aveugle dans cet océan, et il importe de bien choisir sa boussole.
En effet, tout travail a pour effet de nous rapprocher du but que nous avons choisi ;
ce but, notre idéal, est un dieu; car tout le subjectif est la correspondance d'un être
objectif ; et ce travail a comme dernière conséquence de nous incorporer a l'être de
ce dieu : comme la cellule végétale tend vers la vie animale, et l'atteint quand une
bête se l'est assimilée comme aliment: le processus est partout analogue.
Notre existence tout entière, jusque dans ses plus vulgaires manifestations doit
donc tendre vers la forme de vie la plus haute, vers la vie éternelle : qu'est ce que
cette dernière ? C'est le sacrifice constant d'un pour tous, de tous pour un, de tous
pour tous. C'est l'Amour qui est le Centre des centres ; c'est donc à l'Amour qu'il
faut rendre un culte vivant, en agissant, en pensant, en travaillant pour lui.
Les entraînements ésotériques sont donc des trompe-l'oeil, en ce sens qu'ils ne
s'adressent pas au centre de l'homme, mais à un de ses organes externes:
magnétisme, mental, psychisme, etc. Le jardinier, qui coupe des feuilles et des
rameaux pour obtenir une fleur belle et monstrueuse, mais éphémère, fait comme
l'initié qui tue en lui telle ou telle forme de la vie, l'énergie sexuelle par exemple,
pour la sublimer en une faculté plus rare : cette faculté ne sera pas viable ni saine.
Ainsi il ne faut appeler à son aide aucune créature, aucun adepte, aucun sage,
aucun saint, aucun génie, aucun archange : toute créature est, parce que créature,
capable d'erreur : il ne faut appeler que Dieu, et l'appeler d'une façon vivante, non
seulement par le désir mais aussi et surtout par l'acte.
Toute créature, même la plus élevée, est chargée des chaînes du temps et de
l'espace : elle répondra donc moins vite à notre appel que le Ciel qui est libre ; il ne
faut rien déranger dans le monde ; mais Celui qui vit hors du monde, le Ciel, se
dérange et est auprès de celui qui l'évoque, non pas avec des cérémonies, mais par
l'holocauste de ses désirs propres : le Ciel est l'inverse de la Nature ; celle-ci vit par
l'individualisme, ou l'essaie tout au moins; celui-là vit par l'universalisme ; toutes
les fois donc que l'homme oublie son individu pour s'occuper d'un autre, il évoque
le Ciel, et le Ciel vient à côté de lui et en lui. « Celui qui fait la volonté du Père est
ma mère, dit le Verbe. »
Les enseignements des hommes célèbres ne doivent donc être pour nous que des
gymnastiques intellectuelles ; le vrai travail est au centre de nous-mêmes à la
racine de notre volonté, de notre moi, dans cet organe qu'on peut appeler le cúur
invisible qui est la lampe où couve l'étincelle de la lumière incréée.
SÉDIR

Krishna, Bouddha et le Christ


(Le Voile d'Isis, février 1911)
Krishna, Bouddha et le Christ ne sont pas les manifestations de la même entité
divine, ils mènent chacun par des routes progressivement divergentes à des lieux
de repos opposés. Ce sont eux qui, en réalité, se choisissent leurs disciples et non
leurs disciplines qui les choisissent. Les philosophes devraient s'avouer et dire aux
autres: « Nous ne savons rien que de provisoire, de relatif, de nébuleux; rien, sauf
qu'il faut lutter contre l'égoïsme ». Et si on consacrait toutes ses forces au bien-agir,
au lieu de les dépenser à la culture du mental que les disciples des orientaux
recommandent si fort, ce mental se purifierait et se développerait tout seul, bien
plus sainement. A-t-on jamais appris à un bébé les mathématiques et la mécanique
pour le faire marcher?

Pour devenir libre, la méthode n'est pas de rendre tout esclave en nous et autour de
nous, sous prétexte de ne pas entraver notre développement.
Le plan des fluides, des vibrations, que les missionnaires hindous ont présentés aux
Américains comme la clé de voûte de l'édifice cosmique, n'est encore qu'une
enveloppe; il n'est que l'aura du plan central; sa connaissance ne procure ni
l'omniscience ni l'omnipotence.

Quant à l'âme, elle est bien dans son lieu, pure, omnisciente et omnipotente, mais
en germe seulement. Pour que l'on bénéficie de sa lumière il faut bien que les
enveloppes psychiques puissent la transmettre, mais ce n'est pas par l'intelligence
qu'elle arrive à notre conscience, c'est par le coeur.

D'ailleurs, comment purifier le mental par l'effort du mental? On risque, ce faisant,


de prendre de bonne foi les appétits de cet organe pour les intuitions du soi
supérieur. Il est plus sain de délaisser un peu la contemplation au profit de l'action.
Cette dernière laisse à nos puissances intérieures leur autonomie, leur spontanéité;
elles rayonnent naturellement alors vers le monde matériel qu'elles transfigurent
peu à peu tandis que les entraîne-ments les immobilisent ou les déséquilibrent vers
l'artificiel.

Il est bien vrai que c'est notre volonté qui nous enchaîne; mais ce n'est pas la seule
force qui nous délivre. Dieu et son amour ne sont pas des entités abstraites. L'âme,
le moi, la volonté, le mental sont bien des manifestations différentes de la vie une
mais ils possèdent une certaine indépendance; et il ne faut voir dans les
psychologies si séduisantes du védantisme et du bouddhisme que des points de vue
partiels.

La foi en nous-mêmes ne peut pas nous faire rois dans le spirituel, pas plus que
dans le matériel; il lui faut des aides objectifs. En ne se fiant qu'à soi-même, on
tombe immanquablement dans une impasse.

Car s'il est vrai que l'ignorance nous rend infirmes, elle n'est pas une cause mais un
effet. Notre réel bourreau c'est l'égoïsme; c'est lui qui engendre l'ignorance et la
douleur, parce qu'il ne vit que d'ignorance et de douleur. Et cela, tous les
fondateurs de religions l'ont dit et redit.

Il s'agirait d'être d'abord un homme de charité. Et si on a consciencieusement


travaillé tout le jour à aider les hommes, les bêtes et les choses à porter leur
fardeau, il ne reste plus de temps pour les méditations et les exercices mentaux.
Tous les sauveurs le disent« Soyez d'abord un saint; la connaissance et la puissance
viendront ensuite toutes seules ».

Ce ne sont que certains commentateurs présomptueux qui ont cru que les sciences
et les pouvoirs pouvaient se conquérir directement. Ceux qui peuvent voir dans le
monde des âmes savent combien ils se sont trompés.
SÉDIR

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