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Commande des Processus Industriels

Chapitre 3 : Synthèse de régulateurs dans le


domaine fréquentiel
Classes : 3EEA hatem.trabelsi@issatm.ucar.tn

1. Introduction

En plus des performances temporelles (stabilité, précision, rapidité, amortissement, capacité


à éliminer les perturbations), le cahier des charges d’une boucle de régulation peut imposer
d’autres spécifications fréquentielles. Afin de tenir compte de ces spécifications, la synthèse
du régulateur doit s’effectuer conjointement dans le domaine fréquentiel.

Les performances fréquentielles couramment imposées aux systèmes de régulation de


processus incluent essentiellement:

- de bonnes marges de stabilité


- une capacité à atténuer les bruits de mesure
- un gain important en basses fréquences permettant d’améliorer la précision
- une large bande passante garantissant la rapidité de la réponse
2. Performances des asservissements dans le domaine fréquentiel
2.1. Stabilité

La stabilité est la capacité d’un système à retrouver son état d’équilibre après avoir été
décalé de celui-ci. Qualitativement, la réponse d’un système stable à un signal borné
(exemples : échelon, impulsion de Dirac) est convergente. Elle est divergente (infinie) si le
système est instable.

Attention, pour une entrée non bornée (exemple : rampe), même la réponse d’un système
stable est divergente.

2.1.1.Critères de stabilité dans le domaine temporel

Soit un système linéaire à temps continu défini par sa fonction de transfert



( )= avec ≥ .

 Condition nécessaire et suffisante : Le système défini par ( )est stable si et seulement


si tous les pôles (racines du dénominateur) de sa fonction de transfert sont à partie réelle
strictement négative : ( ô ) < 0.

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 Condition nécessaire : Si le système défini par ( ) est stable, alors tous les coefficients
du dénominateur de sa fonction de transfert sont de même signe et non nuls :
>0 <0.

Autrement dit, si l’un des coefficients est nul ou de signe différent des autres coefficients,
alors le système est instable.

 Critère algébrique de Routh: Le système défini par ( ) est stable si et seulement si les
éléments de la première colonne du tableau de Routh équivalent sont tous de même signe.

2.1.2.Etude de la stabilité dans le domaine fréquentiel : critère de revers

Le critère de revers est une version simplifiée du critère graphique de Nyquist s’appliquant à
des systèmes dont la fonction de transfert n’admet pas de zéros ou pôles à partie réelle
positive. Il permet de conclure sur la stabilité du système bouclé unitairement à partir de sa
réponse fréquentielle en boucle ouverte.

Le critère de revers peut être exprimé dans les plans de Nyquist (plan complexe), Black (gain
en fonction de la phase) et Bode (gain et phase en fonction de la pulsation).

Dans le plan de Bode, le critère de revers s’énonce comme suit :

Un système bouclé unitairement est stable si, à la pulsation °, son gain en boucle
ouverte est négatif : ( °) < 0

° étant la pulsation pour la quelle la phase en boucle ouverte vaut -180° :


( ° ) = −180°.

Rappel

Diagrammes de Bode = {diagramme


de gain en décibel GdB( ) ;
diagramme de phase ( ) }

GdB( )=20*log( |H( )| )

( )= ( ) =
( ( ) / ( ( )) )

Figure 1 : Critère de revers dans le plan de Bode

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2.2. Marges de gain et de phase

Les marges de gain et de phase , ou marges de stabilité, sont définies par :

=− ( °)

= ( )+ °

° étant la pulsation pour laquelle la phase en boucle ouverte vaut -180° :


( ° ) = −180°.

désigne la pulsation pour laquelle le gain en boucle ouverte mesure 0 dB:


( )=0 .

Les marges de gain et de phase sont des mesures renseignant sur l’éloignement du système
de l’instabilité. Le critère de revers peut s’énoncer d’une manière équivalente en termes de
marges de stabilité :

Un système bouclé unitairement est stable si les marges de gains et de phase associées à sa
fonction de transfert en boucle ouverte sont strictement positives.

Figure 2 : Marge de gain et marge de phase : cas d’un système stable en boucle fermée

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Figure 3 : Marge de gain et marge de phase : cas d’un système instable en boucle fermée

En pratique, on impose généralement :

- une marge de gain entre 10 à 15 dB


- une marge de phase entre 40° et 45° (une marge de phase plus grande ralentit la
réponse et augmente le risque de saturation)

Remarque : L’augmentation du gain statique du système en boucle ouverte, pouvant être à


l’origine du gain proportionnel d’un correcteur, conduit, dans le plan de Bode, à une
translation verticale vers le haut du diagramme de gain. Ceci réduit la marge de gain et par
conséquent applique un effet déstabilisant sur le système bouclé.

Pour un système décrit par une fonction de transfert H(p) en boucle ouverte et qui est
stable en boucle fermée, la valeur maximale Krmax du gain proportionnel à appliquer au
système pour maintenir la stabilité est telle que :

La translation du diagramme de gain ne ramène pas le point ( °) au dessus de l’axe


0dB  ( ° ) + 20*log(Krmax) < 0

 20*log(Krmax)< où désigne la marge de gain de H(p)


( / )
 Krmax <

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Figure 4 : Effet d’un gain proportionnel Kr sur les diagrammes de Bode

2.3. Bande passante

Dans le domaine fréquentiel, la rapidité est définie par la bande passante du système.

La bande passante d’un système, ou bande passante à -3dB, est l’intervalle de fréquences
(ou pulsations) entre lesquelles le gain en boucle ouverte subit une atténuation de 3 dB par
rapport à sa valeur maximale.

Figure 5 : Bande passante à -3dB

Plus la bande passante est large plus le système est rapide.

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3. Correcteurs à avance ou retard de phase

Pour > , Il s’agit de correcteurs décrits par une fonction de transfert de la forme :

.
( )= pour un régulateur à avance de phase

( )= pour un régulateur à retard de phase


.

3.1. Correcteurs à avance de phase

Le correcteur à avance de phase peut être considéré comme approximation d’un correcteur
proportionnel dérivé idéal. Ses diagrammes de Bode sont schématisés ci-dessous :

Figure 6 : Diagrammes de Bode d’un correcteur à avance de phase

La phase du correcteur admet un maximum pour = =



. Ce maximum est égal à :

= ( + ).

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3.1.1. Influence sur les performances en boucle fermée
- Pour entre et , le correcteur apporte une augmentation de la phase du
système bouclé ce qui agrandit les marges de stabilité.  amélioration de la stabilité
- La précision est réduite.
- La bande passante est améliorée et par conséquent la rapidité.

Exemple :

( )=
( . )( . )( )

+
( )=
+ .

Figure 7 : Influence du correcteur à avance de phase sur les diagrammes de Bode du système

On remarque bien l’élargissement de la bande passante du système corrigé, d’où


l’amélioration de la rapidité comme le montre la réponse indicielle du système bouclé.

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Figure 8 : Réponse indicielle unitaire du système sous l’action du correcteur à avance de phase

3.1.2. Méthode de réglage du correcteur à avance de phase

On suppose qu’on souhaite augmenter la marge de phase d’un système pour qu’elle soit
égale à ′ . Le paramétrage du correcteur à avance de phase à appliquer au système en
boucle fermée s’effectue comme suit :

A – Déterminer la marge de phase du système non corrigé.

B – Calculer la phase additive ∆ à ajouter au système : ∆ = ′ − .

− (∆ )
C – Calculer le paramètre de sorte que ∆ = = ( + ).  =
(∆ )

D – Déterminer le paramètre tel que = = où désigne la pulsation



pour laquelle le système commandé en boucle ouverte présente un gain de 0dB.
 =

E – Ajuster la valeur du gain Kr afin de respecter les exigences du cahier des charges en
basses fréquences (précision).

F – Représenter la réponse fréquentielle du système corrigé et relever la nouvelle marge de


phase. Si cette dernière ne correspond pas à la marge ′ voulue (à cause de la variation du
gain due au correcteur), reprendre les étapes précédentes en augmentant un peu ∆ .

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Exemple :

Soit le processus décrit par :

( )=
( . )

En traçant les diagrammes de Bode du système, on observe que :

- les marges de stabilité sont positives  système stable en boucle fermée même sans
correcteur
- la marge de phase est très faible. Elle est égale à 10°
- La pulsation de résonance est de 1 rad/s.

Si on désire une marge de phase du système corrigé de 55°, alors :

∆ = 55° – 10° = 45° .

(55 ) + 1
= ≈6
1− (55 )

= ≈ 0.4

La réponse indicielle unitaire en considérant un gain Kr unitaire est la suivante :

Figure 10 : Réponse indicielle sans correcteur et avec correcteur à avance de phase

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3.2. Correcteurs à retard de phase

Le correcteur à retard de phase peut être considéré comme approximation d’un correcteur
proportionnel intégral idéal. Ses diagrammes de Bode sont schématisés ci-dessous :

Figure 10 : Diagrammes de Bode d’un correcteur à retard de phase

Comme pour le correcteur à avance de phase, un déphasage maximal est observé pour
= = .


La valeur de ce déphasage est : − = ( + ).

3.2.1. Influence sur les performances en boucle fermée

- L’usage d’un correcteur à retard de phase présente un risque d’instabilité pour le


système bouclé. Il faut prendre les précautions nécessaires lors de réglage.
- La précision du système est améliorer mais l’erreur statique reste toutefois non nulle.
- Avec un régulateur à retard de phase, la rapidité du système asservi diminue

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3.2.2. Méthode de réglage du correcteur à retard de phase

Afin de paramétrer le correcteur à retard de phase tout en évitant le risque d’instabilité, il


faut :

- Identifier, à haute fréquence, la pulsation de coupure ′ permettant d’avoir la


marge de phase souhaitée. La translation nécessaire TdB du diagramme de gain pour
atteindre cette marge de phase permet de calculer le paramètre :
TdB = -20 log  =
- Eviter la diminution de phase aux basses fréquences en imposant :
′ ≫ . On choisit généralement : =
- Ajuster la valeur du gain Kr selon la précision statique souhaitée

Figure 11 : Influence d’un correcteur à retard de phase sur les diagrammes de Bode

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