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LE DROIT

DES CONTRATS
EN CARTES MENTALES

Antonin Pitras
Docteur en droit

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ISBN 9782340-060791
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Table des abréviations

Adde ajouter
aff. affaire
AJDI L’Actualité juridique : Droit immobilier
al.  alinéa
art. article
ass. plén. Assemblée plénière
assoc. association
av. gén. Avocat général
BICC Bulletin d’information de la Cour de cassation
BJCP Bulletin juridique des contrats publics
BJE Bulletin Joly des entreprises en difficulté
BJB Bulletin Joly Bourse
BJS Bulletin Joly Sociétés
BOCCRF Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de
la répression des fraudes
BRDA Bulletin rapide de droit des affaires
Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation : Chambres civiles
Bull. crim. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation :
Chambre criminelle
Bull. Joly Bulletin mensuel Joly d’information des sociétés
C. assur. Code des assurances
C. cass. Cour de cassation
C. civ. Code civil

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C. com. Code de commerce
c. contre
C. mon. fin. Code monétaire et financier
C. pén. Code pénal
CA cour d’appel
Cah. dr. entr. Cahiers de droit de l’entreprise
CCC Contrats Concurrence Consommation
CE Conseil d’État
CEDH Cour européenne des droits de l’homme
CESDH Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales
ch. chambre
chr. chronique
CJCE Cour de justice des Communautés européennes
CMP Contrats et marchés publics
coll. collection
comm. commentaire
comp. comparer
D. Recueil Dalloz
DDHC Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
Def. Répertoire Defrénois
dir. direction
doss. dossier
Dr. et patri. Droit et patrimoine
Dr. sociétés Droit des sociétés
éd. édition
et al. et alii
fasc. fascicule
Gaz. Pal.  Gazette du Palais
ibid. ibidem
JCP Juris-Classeur périodique

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JORF Journal officiel de la République française
JOUE Journal officiel de l’Union européenne
Leb. Recueil Lebon
LEDC L’essentiel Droit des contrats
LPA Les Petites Affiches
No numéro
obs. observation
op. cit. opere citato
p.  page
préc. précité
pt. point
RB : Revue Banque
RCA Revue Responsabilité civile et assurances
RD banc. fin. Revue de droit bancaire et financier
RDC Revue des contrats
Rev. sociétés Revue des sociétés
RJ com. Revue de jurisprudence commerciale
RJDA Revue de jurisprudence de droit des affaires
RLC Revue Lamy de la concurrence
RLDC Revue Lamy droit civil
RTD civ. Revue trimestrielle de droit civil
RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial
RTD eur. Revue trimestrielle de droit européen
s. suivants
t. tome
T. com tribunal de commerce
TGI tribunal de grande instance
th. thèse
Voy. Voyez
Vo verbo
vol. volume

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Introduction

I. Notion de (droit des) contrats

1. Le contrat, instrument d’échange économique et de régulation


sociale. – Le contrat est un instrument d’échange économique indispensable
à la vie des entreprises ou des particuliers. Il se décline en une multitude de
formes (contrat de location, de vente, d’assurance, de crédit, de prestation
de service, de travail, de transport, etc.) et concourt à l’organisation de la vie
des affaires autant que des relations civiles les plus ordinaires. Plus encore,
le contrat tend à s’imposer comme un véritable outil de régulation sociale : la
sécurité, les litiges ou encore les relations familiales font l’objet d’un mouvement
croissant de contractualisation. « C’est le signe que le contrat séduit » (B. Fages,
Droit des obligations, LGDJ, coll. Manuels 10e éd., 2020, no 19, p. 41).
2. Le contrat, source d’obligations. – Le contrat constitue l’une
des principales sources d’obligations, aux côtés de la « responsabilité
extracontractuelle » et des « autres sources d’obligation », régies par le
titre III du livre III du Code civil, intitulé « Des sources des obligations ».
Au sens juridique, l’obligation constitue le rapport de droit unissant le
débiteur au créancier (Voy. Lexique des termes juridiques, Dalloz, 9e éd., 1993,
v° « obligation », p. 366). Ainsi l’obligation se compose-t-elle à la fois d’une
dimension positive – pour le créancier, en mesure d’exiger une prestation de
la part de son débiteur, en vertu de la créance dont il est titulaire  –, et d’une
dimension négative – pour le débiteur, qui en raison de sa dette, doit fournir
une prestation à son créancier.
3. Contrat et convention. – Autrefois réduit à un acte créateur d’obligations, le
contrat était considéré par la doctrine comme un type particulier de convention,
elle-même comprise comme un acte juridique formé par une pluralité de
volontés destiné à produire des effets de droit (y inclus la modification,
l’extinction, le transfert ou encore la création d’obligations).

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Tel que défini aujourd’hui par l’article 1101 du Code civil, dans sa rédaction
issue de l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, le « contrat est un accord
de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, trans-
mettre ou éteindre des obligations. » L’ancienne distinction entre la notion
de contrat et celle de convention n’a désormais plus lieu d’être, de sorte que
l’une et l’autre de ces expressions peuvent être tenues pour synonymes (Voy.
B. Fages, op. cit., p. 43).
4. Le contrat, un acte juridique conventionnel. – En tant qu’il représente
une « manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit », le
contrat constitue une forme d’acte juridique (C. civ., art. 1100-1, al. 1er), par
opposition aux faits juridiques, compris comme « des agissements ou des
événements auxquels la loi attache des effets de droit » (C. civ., art. 1100-2,
al. 1er).
Plus précisément, le contrat est un acte juridique « conventionnel », dès lors
qu’il est le produit d’un accord entre deux ou plusieurs volontés. Le contrat se
distingue ainsi des actes juridiques « unilatéraux », résultant de la manifesta-
tion de volonté d’une seule personne (à l’instar de la démission : Cass. com.,
22 février 2005, no 03-12.902).
5. Contrats et quasi-contrats. – Le contrat se distingue de certaines
situations, communément désignées sous l’expression « quasi-contrats »,
génératrices d’une obligation de compenser l’avantage injustement reçu
d’autrui. Ces situations sont celles de la « gestion d’affaires », de la « répétition
de l’indu », et de « l’enrichissement sans cause », régies par le sous-titre III
du titre III du livre III du Code civil (art. 1300 à 1303-4) relatif aux « autres
sources d’obligations ». Les règles afférentes aux quasi-contrats ne seront pas
abordées plus avant dans le présent ouvrage.

II. Sources du droit des contrats

6. Le Code civil, source textuelle du droit des contrats, interprétée par
le juge. – Depuis sa création en 1804, le Code civil constitue la principale
source textuelle du droit français des contrats. Durant plus de deux siècles,
l’immense majorité des dispositions relatives au droit des contrats sont restées
inchangées.
Cette circonstance explique sans doute le rôle capital joué par les juges,
comblant certaines lacunes rencontrées dans les textes, et apportant des
précisions aux dispositions les plus obscures. Par son travail d’interpréta-
tion, la jurisprudence a ainsi permis l’adaptation des règles aux évolutions
de la société (Voy. D. Mazeaud, « La place du juge en droit des contrats », RDC
2016 no 2, p. 353).

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Introduction
Le droit des contrats connaît également d’autres sources textuelles régis-
sant certains types de contrats en particulier (le Code du travail, en ce qui
concerne le contrat de travail ; le Code de la consommation, s’agissant des
contrats conclus entre un professionnel et un consommateur).
7. La réforme du droit des contrats opérée par l’ordonnance du
10 février 2016. – Le droit français des contrats a récemment connu une
réforme de grande ampleur, ayant suscité d’abondants commentaires (Ph.
Simler, « Inexécution du contrat. – Exécution forcée en nature », in Encyclopédie
du JurisClasseur : Civil Code, Art. 1221 et 1222, LexisNexis, 2017 ; D. Mainguy,
« Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des
obligations », JCP E 2016, act. 151 ; J. Mestre, « Petit abécédaire de la réforme
des contrats et des obligations », RLDC no 136, avril 2016, p. 16 ; L. Aynès, « Le
juge et le contrat : nouveaux rôles ? », RDC 2016, n° Hors-série d’avril 2016,
p. 14 ; A. Bénabent, « Les nouveaux mécanismes », RDC 2016, n° Hors-série
d’avril 2016, p. 17 ; Cl. François, « Tableau de correspondance des nouveaux
et anciens articles du Code civil à l’issue de la réforme du droit des contrats »,
RDC 2016, n° Hors-série d’avril 2016, p. 71 ; Ph. Simler, « Actualité : réforme
du droit des obligations [ord. no 2016-131, 10 février 2016] », in Encyclopédie
du JurisClasseur : Commercial, LexisNexis, 2016, Fasc. 27 ; N. Dissaux et Chr.
Jamin, Projet de réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve
des obligations, rendu public le 25 février 2015 : commentaire article par article,
Dalloz, 2015 ; Ph. Stoffel-Munck (dir.), Réforme du droit des contrats et pratique
des affaires, Dalloz, 2015).
Cette réforme s’imposait afin de renforcer l’attractivité du droit français des
contrats à l’échelle européenne et internationale : l’obsolescence de certaines
dispositions justifiait leur abandon, les lacunes les plus profondes devaient
être comblées et les règles prétoriennes méritaient d’être codifiées, dans un
souci tout à la fois de cohérence, de clarté et de sécurité juridique.
La réforme a été rendue possible par l’adoption de la loi no 2015-177 du
16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et
des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures
(JORF no 0040 du 17 février 2015), dont l’article 8 autorise le Gouvernement à
modifier la structure et le contenu du livre III du Code civil, afin de « moder-
niser, de simplifier, d’améliorer la lisibilité, de renforcer l’accessibilité du droit
commun des contrats, du régime des obligations et du droit de la preuve ».
Sur ce fondement a été adoptée l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016
portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des
obligations (JORF no 0035 du 11 février 2016). Les changements opérés par la
réforme sont substantiels et le droit français des contrats en ressort moder-
nisé. La loi no 2018-287 du 20 avril 2018 (JORF no 0093 du 21 avril 2018) ratifiant
ladite ordonnance, n’apporte que des retouches mineures et entérine l’extrême
majorité de ses dispositions.

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8. Droit commun des contrats et droit des contrats spéciaux. – Depuis
la réforme de 2016, le droit des contrats fait l’objet d’un sous-titre entier, au
sein du titre III du livre III du Code civil, constitué des articles 1101 à 1231-7.
Ces dispositions régissent ce qu’il est convenu d’appeler le droit commun des
contrats, c’est-à-dire l’ensemble des règles générales applicables par principe à
l’ensemble des contrats, quel qu’en soit le type, traitées par le présent ouvrage.
En revanche, ne sera pas abordé en ces pages, sinon à titre subsidiaire, le
droit des contrats spéciaux, intéressant certaines règles auxquelles se trouvent
soumis certains types de contrats en particulier.
9. L’influence européenne et internationale. – À l’instar de toute autre
branche juridique, le droit français des contrats dépend en partie du droit
de l’Union européenne, plus particulièrement préoccupé par la protection
des consommateurs. Par ailleurs, le droit français connaît l’influence de
nombreuses initiatives européennes et internationales, à l’instar du Draft
Common Frame of Reference, élaboré dans le cadre de réseaux européens de
chercheurs (Le Research Group on EC Private Law et le Study Group on a European
Civil Code), devant servir d’ébauche à un futur régime optionnel, que pourraient
choisir les parties afin de régir leur contrat. Doivent être encore évoqués les
PECL (pour Principles of European Contract Law), élaborés à partir des années
1990 par une commission présidée par le professeur danois Ole Lando, ainsi
que les principes d’Unidroit relatifs aux contrats du commerce international,
publiés en 1994 par l’Institut international pour l’unification du droit privé,
proposant des clauses types pouvant être insérées dans les contrats et offrant
aux juges des clés d’interprétation des contrats internationaux.

III. Typologie des contrats

10. Contrats nommés et contrats innommés. – La liberté contractuelle des


parties permet d’envisager la conception d’une infinité de types de contrats,
au sein de laquelle il est de coutume de distinguer entre différentes catégories
générales de contrats, chacune étant soumise à des règles propres.
Une première distinction peut être tout d’abord opérée entre les contrats
innommés et les contrats nommés. Le contrat innommé ne fait l’objet d’aucune
dénomination juridique propre (ce qui ne l’empêche pas d’être désigné par un
nom particulier en pratique, tel le contrat de « location de coffre-fort »). Cela
ne signifie pour autant pas que le contrat innommé souffre d’un vide juridique,
mais seulement qu’il n’est soumis à aucune réglementation spéciale, et demeure
donc régi par le droit commun. À l’inverse, le contrat nommé fait l’objet d’un
régime spécial établi par un texte (contrat de vente, bail, assurance).

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Introduction
Cette distinction doit être toutefois relativisée dès lors que par principe (et
sans préjudice d’éventuelles règles spéciales dérogatoires), les contrats « qu’ils
aient ou non une dénomination propre, sont soumis à des règles générales »,
composant le droit commun des contrats.
11. Contrats BtoB, CtoC et BtoC. – Il convient encore de distinguer selon la
qualité (consommateur ou professionnel) des parties aux contrats. Trois types
de contrats distincts en ressortent : les contrats entre-deux professionnels (en
pratique, « business to business – BtoB »), entre deux consommateurs (« consumer
to consumer – CtoC ») et entre un professionnel et un consommateur (« business to
consumer – BtoC »). Le Code de la consommation régit en particulier ce dernier
type de contrat dans un souci de protection du consommateur. Certaines
clauses déséquilibrées au détriment de celui-ci seront en effet prohibées
seulement si le contrat litigieux a été conclu entre un professionnel et un
consommateur (Voy. infra no 138 s.).
12. Contrats internes et contrats internationaux. – Il s’agit ensuite de
bien faire le départ entre les contrats nationaux et internationaux, celui-ci
pouvant être identifié lorsqu’il comporte un élément d’extranéité (i.e. un
lien de rattachement avec au moins deux pays distincts), ou lorsqu’il met en
cause les intérêts du commerce international (en régissant une opération
dont l’exécution produit des effets économiques dans au moins deux États).
Le contrat international peut alors être soumis à des règles spécifiques
prévues en droit français (à l’exemple de l’article 1343-3 du Code civil, autori-
sant les clauses de monnaie étrangère dans les contrats internationaux), ou
en droit international (dont l’une des sources principales est la Convention
des Nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandises
du 11 avril 1980, dite « convention de Vienne »).
13. Contrats de gré à gré et contrats d’adhésion. – Le contrat de gré à gré,
défini comme « celui dont les stipulations sont négociables entre les parties »
(C. civ., art. 1110, al. 1er), s’oppose au contrat d’adhésion, entendu comme
« celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à
l’avance par l’une des parties » (C. civ., art. 1110, al. 2). Cette distinction revêt
une importance toute particulière depuis la réforme du droit des obligations
de 2016, ayant introduit le principe de prohibition du déséquilibre significatif
dans les contrats d’adhésion (Voy. infra no 134).
14. Contrats synallagmatiques et contrats unilatéraux. – Tout aussi
fondamental est le distinguo entre le contrat synallagmatique et le contrat
unilatéral. Le premier est un contrat dont les contractants s’obligent
réciproquement les uns envers les autres (C. civ., art. 1106, al. 1er) ; le second
renvoie à un contrat en vertu duquel une ou plusieurs personnes s’obligent
envers une ou plusieurs autres sans qu’il y ait d’engagement réciproque de
celles-ci (C. civ., art. 1106, al. 2). Dans ce dernier cas, une seule des parties

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s’oblige à titre principal, sans que les obligations de son cocontractant (si
elles existent) ne constituent la contrepartie de sa propre obligation (contrat
de donation, par exemple). La distinction trouve essentiellement son intérêt
sur le terrain des sanctions de l’inexécution, certaines sanctions supposant
par essence, un rapport réciproque d’obligation, de sorte qu’elles ne seront
ouvertes qu’en cas de contrat synallagmatique (Voy. infra no 193).
15. Contrats à titre onéreux et contrats à titre gratuit. – Le contrat est à
titre onéreux « lorsque chacune des parties reçoit de l’autre un avantage en
contrepartie de celui qu’elle procure » (C. civ., art. 1107, al. 1er). Il est à titre
gratuit « lorsque l’une des parties procure à l’autre un avantage sans attendre
ni recevoir de contrepartie » (C. civ., art. 1107, al. 2).
Le contrat à titre gratuit est ainsi animé d’une intention libérale (contrat
de donation) ou de la volonté de rendre service (contrat de prêt). L’intérêt de
la distinction est relatif ; il se rattache pour l’essentiel, à la question des vices
du consentement (Voy. infra no 92 s.).
16. Contrats commutatifs et contrats aléatoires. – Parmi les contrats à
titre onéreux, doivent être distingués les contrats dits « commutatifs », dont
chacune des parties s’engage à procurer à l’autre un avantage qui est regardé
comme l’équivalent de celui qu’elle reçoit (C. civ., art. 1108, al. 1er), et les
contrats dits « aléatoires », dont les parties acceptent de faire dépendre les
effets du contrat, quant aux avantages et aux pertes qui en résulteront, d’un
événement incertain (C. civ., art. 1108, al. 2), tels les contrats d’assurance. La
distinction intéresse les règles afférentes à la lésion, qui ne peut en aucun cas
être retenue pour un contrat aléatoire (Voy. infra no 136).
17. Plan de l’ouvrage : formation et exécution du contrat. – Le présent
ouvrage est structuré suivant les principales étapes marquant la vie du contrat.
Ainsi s’intéressera-t-il tout d’abord aux règles afférentes à la formation du
contrat (Partie I), avant d’aborder celles relatives à son exécution (Partie II).

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Partie I
La formation du contrat

18. Conditions du contrat valablement formé. – Certaines étapes


préliminaires (Chapitre I) précèdent bien souvent la conclusion du contrat
entre deux ou plusieurs personnes capables et consentantes (Chapitre II).
Le contrat est alors valablement formé pour autant que son contenu soit
conforme aux exigences de licéité, de certitude et d’équilibre (Chapitre III).

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Chapitre I
Les préalables au contrat

19. Anticipation d’un contrat futur par les parties. – Les termes du contrat


sont parfois négociés entre les futurs contractants. Très fréquents dans la vie
des affaires, les pourparlers font l’objet d’un encadrement légal préservant
une certaine marge de manœuvre pour les parties (Section I). Ces dernières
peuvent encore anticiper la conclusion d’un futur contrat définitif au moyen
de divers contrats préparatoires, au premier rang desquels figurent le pacte
de préférence et la promesse de contrat (Section II). Ces étapes préalables
ne sont toutefois pas systématiques, et ne se rencontrent généralement qu’en
amont des contrats les plus complexes.

Section I. La négociation contractuelle

20. Notion de négociation. – Synonyme de « pourparlers », le terme


de « négociations » renvoie aux discussions conduites par les parties
préalablement à la formation définitive du contrat par la rencontre de l’offre
et de l’acceptation (sur les négociations en doctrine, Voy. I. Beynex et L.-C.
Lemmet, « La négociation des contrats », RTD com. 2016, p. 1 ; O. Deshayes, « La
rupture des pourparlers », LPA 2008, no 203, p. 4 ; J. Ghestin, « Les dommages
réparables à la suite de la rupture abusive des pourparlers », JCP G 2007, I,
p. 157 ; Ph. Le Tourneau, « La rupture des négociations », RTD com. 1998,
p. 479 ; P. Chauvel, « Rupture des pourparlers et responsabilité délictuelle »,
Dr. & patr. 1996, p. 36 ; A. Cohérier, Des obligations naissant des pourparlers
préalables à la formation des contrats, thèse de doctorat en Droit, Université
de Paris, 1939 ; P. Roubier, Essai sur la responsabilité précontractuelle, thèse de
doctorat en Droit, Université de Lyon, 1911).
Depuis la réforme de 2016, les négociations précontractuelles sont régies
par les articles 1112, 1112-1 et 1112-2 du Code civil, ces dispositions formant
une sous-section spécifique au sein de la section consacrée à la formation du
contrat. Sur ce registre comme sur d’autres, la réforme ne fait pour l’essentiel,

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que consacrer les solutions prétoriennes relatives aux pourparlers, tout en
apportant à la marge, quelques modifications du régime antérieur. Ces dispo-
sitions encadrent tout à la fois l’initiative des négociations (§ 1), leur bon
déroulement (§ 2), ainsi que les modalités de rupture des pourparlers (§ 3).

§ 1. L’initiative des négociations

21. Distinction entre l’invitation à entrer en négociation et l’offre. – L’entrée


en pourparlers résulte communément de ce que les textes dénomment une
« invitation à entrer en négociation » (C. civ., art. 1114). Cette invitation constitue
une simple proposition à entamer les discussions en vue de l’éventuelle
conclusion d’un contrat futur. Elle se distingue en ce sens, de la pollicitation
(ou « offre »), qui constitue une proposition ferme et complète ayant pour effet
d’entraîner la formation du contrat en cas de rencontre avec une acceptation
(V. infra no 62 s.).
22. Liberté de ne pas négocier. – En principe, nul ne peut être obligé à
entrer en négociation. À l’instar de la pollicitation, l’invitation aux négociations
demeure libre ; de même d’ailleurs que l’acceptation de commencer les
discussions.
Dans certaines situations toutefois, les parties pourront être tenues de
(re)négocier, tout particulièrement lorsqu’elles y sont obligées en vertu d’une
clause d’imprévision ou de sauvegarde, habituellement appelée en pratique
« clause de hardship ». En effet, cette dernière a pour objet d’obliger les parties
à négocier une adaptation du contrat dans l’hypothèse d’un changement de
circonstances (V. M. Fabre-Magnan, Droit des obligations, 1 – Contrat et engage-
ment unilatéral, PUF, coll. Thémis, 4e éd., 2016, spéc. no 497).
L’obligation de renégocier peut encore résulter de la loi elle-même :
l’article 1195 du Code civil prévoit ainsi qu’une partie peut exiger de son
cocontractant une renégociation du contrat si un changement de circons-
tances imprévisible lors de la conclusion de la convention rend son exécu-
tion excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en
assumer le risque.
23. Liberté de négocier. – En principe, il n’existe pas non plus d’interdiction
d’entrer en pourparlers. En particulier, le fait d’avoir débuté une négociation
avec quelqu’un ne saurait faire obstacle à l’initiation d’une négociation parallèle
avec une autre personne (Cass. com., 15 décembre 1992, no 90-19.608, Bull. civ.
IV, no 415 ; note J. Mestre, RTD civ. 1993, p. 577). Pour autant, cette liberté de
négocier peut être valablement restreinte par une clause d’exclusivité insérée
au sein de l’accord de négociation.

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Initiative des négociations

Partie I • La formation du contrat


§ 2. Le déroulement des négociations

24. Bonne foi précontractuelle. – Le déroulement des négociations est guidé


par un principe général de bonne foi. Ce principe sous-tend notamment toute
une série d’obligations d’information précontractuelle. Durant les pourparlers,
chacune des parties peut être en effet tenue de divulguer certaines informations
à son futur cocontractant (A). Par le biais d’un accord sur le principe ou sur
les modalités de la négociation, les parties peuvent également régir elles-
mêmes certains aspects du déroulement des pourparlers (B).

A. Le devoir d’information précontractuelle


25. Codification des solutions jurisprudentielles. – L’article 1112-1 du
Code civil, issu de l’ordonnance du 10 février 2016 reprend pour l’essentiel, les
solutions prétoriennes identifiant les débiteurs et créanciers de l’obligation
d’information précontractuelle (1), le contenu précis de cette obligation (2)
et les sanctions du manquement à celle-ci (3).

1. Débiteurs et créanciers de l’obligation d’information


26. Champ d’application ratione personae étendu. – L’obligation
d’information pèse non seulement sur les parties, quelle que soit leur
qualité – professionnel ou consommateur  –, mais elle peut également s’imposer
à certains tiers au contrat (a). Quant aux créanciers de l’information, il ne
s’agit que des parties légitimement ignorantes de l’information à divulguer (b).

a. Débiteurs de l’obligation d’information


27. Les parties débitrices de l’obligation d’information. – L’article 1112-1
du Code civil énonce un devoir général d’information précontractuelle,
au stade des négociations : « celle des parties qui connaît une information
dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en
informer ».

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Cette obligation générale d’information pèse sur l’ensemble des parties – pour
autant qu’elles aient une connaissance effective de l’information –, quel que
soit leur statut (consommateur, professionnel, non-professionnel). Là où la loi
ne distingue pas, il ne devrait en effet pas y avoir lieu de distinguer (Br. Petit et
S. Rouxel, Contrat. – Formation du contrat. – Négociations », in Encyclopédie du
JurisClasseur : Civil Code, art. 1112 à 1112-2, 2020, Fasc. Unique, pt. 60 à 65).
28. Les tiers débiteurs de l’obligation d’information. – Mais le devoir
d’information pèse également parfois sur un tiers au contrat futur (V. Cass.
1re civ., 18 avril 1989, no 87-12.053, Bull. civ. I, no 150, pour l’engagement de
la responsabilité d’un agent immobilier ayant manqué à son obligation
d’information durant les négociations d’un acte de vente).

b. Créanciers de l’obligation d’information


29. Ignorance légitime de l’information. – Là encore, tous les contractants,
quelle que soit leur qualité (professionnel ou consommateur), pourront
être rendus créanciers de l’information (M. Fabre-Magnan, De l’obligation
d’information dans les contrats. Essai d’une théorie, LGDJ, coll. Anthologie du
droit, 1992, spéc. no 254). Pour autant, l’article 1112-1 alinéa 1er du Code civil
précise que le devoir d’information existe au profit d’une partie « dès lors que,
légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son
cocontractant ». L’une des parties ne saurait en effet décemment se plaindre
de ce qu’une information qu’il connaissait déjà ne lui a pas été révélée (V.
Br. Petit et S. Rouxel, fasc. préc., pt. 68 s.). Les juges ont ainsi pu écarter tout
manquement du vendeur à son devoir d’information précontractuelle, dès lors
qu’il était établi que l’acquéreur « connaissait parfaitement les risques naturels
découlant de la situation des lieux » (Cass. 3e civ., 10 mai 2001, no 99-18.372), ou
encore que l’acheteur avait « pu constater les fissures apparentes de l’immeuble
et apprécier leur importance » (Cass. 3e civ., 16 avril 2013, no 12-16.242).
30. Présomption de connaissance attachée au statut de professionnel.
– Toutefois, certaines parties sont présumées avoir connaissance de
l’information eu égard à leurs compétences spécifiques, tenant en particulier
à leur qualité de professionnel.
Une telle circonstance est alors de nature à écarter l’obligation d’information
qui leur est destinée. Il en va notamment ainsi d’une compagnie d’assurance,
ne pouvant prétendre avoir été trompée par l’assuré, dès lors qu’elle jouis-
sait, en tant que professionnel averti, des moyens d’information lui permet-
tant d’apprécier les risques encourus (Cass. com., 4 juin 2013, no 12-13.002,
note C. Le Stanc, D. 2013, p. 2487). Une solution similaire peut être retenue
à l’encontre d’un acheteur professionnel, seulement créancier d’une obliga-
tion d’information « dans la mesure où sa compétence ne lui donne pas les

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Partie I • La formation du contrat
moyens d’apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du dispo-
sitif en cause » (Cass. com., 11 juillet 2006, no 04-17.093, obs. L. Leveneur, CCC
no 12, décembre 2006, comm. 248 ; Cass. 1re civ., 20 juin 1995, no 93-15.948).
31. Illégitimité de l’ignorance portant sur des faits notoires. – A fortiori,
un contractant ne pourra légitimement exciper de son ignorance lorsqu’elle
porte sur des faits notoires, i.e. « des faits qui sont de la connaissance de
tous » (Cass. 3e civ., 6 mars 2002, no 99-20.637) ou qui ont bénéficié d’une large
publicité (Cass. com., 17 juillet 2001, no 97-17.259). Les juges ont dès lors pu
considérer qu’un fumeur ne pouvait ignorer les effets néfastes du tabac sur la
santé (Cass. 2e civ., 20 novembre 2003, no 01-17.977 : écartant le manquement
à une obligation d’information sur les dangers du tabagisme de la part de la
Société nationale d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes [Seita] à
l’égard d’un fumeur, victime d’un cancer des poumons, dès lors que ce dernier
ne pouvait « ignorer les méfaits de l’usage abusif du tabac, non seulement du
fait de l’information légale portée sur les paquets de cigarettes, mais encore
du fait de toutes les informations présentées à la connaissance de tous par
les médias, presse et radio-télévision »).
Dans la même veine, un banquier n’a pas pour obligation de rappeler à un
emprunteur qu’il convient de répondre avec sincérité aux questions posées lors
de la conclusion d’un contrat, et d’attirer son attention sur les conséquences
d’une fausse déclaration. L’obligation de répondre avec sincérité relève en
effet de l’obligation de bonne foi régissant la matière contractuelle, aucune
des parties ne pouvant être tenue d’en rappeler le principe à son cocontrac-
tant (Cass. 1re civ., 28 mars 2000, no 97-18.737).

2. Contenu de l’obligation d’information


32. Information ayant une importance déterminante pour le consentement
des parties. – L’article 1112-1, alinéa 1er du Code civil n’impose la divulgation que
des informations « dont l’importance est déterminante pour le consentement »
du cocontractant. L’alinéa 3 du même article précise à cet égard : « [o]nt une
importance déterminante les informations qui ont un lien direct et nécessaire
avec le contenu du contrat ou la qualité des parties. »
Les éléments afférents au contenu du contrat sont décrits en détail par les
articles 1162 et suivants du Code civil (V. infra no 110). À la lecture du rapport au
Président de la République relatif à l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016
(JORF no 0035 du 11 février 2016), ces éléments incluent de manière générale,
tout ce qui relevait antérieurement de l’objet du contrat et de sa cause.
Quant aux informations en lien avec la qualité des parties, il n’est pas interdit
de penser qu’elles renvoient aux informations rendues nécessaires en consi-
dération du statut de professionnel ou de profane de la matière considérée ;
cette dernière qualité (de profane) pouvant justifier un devoir d’information

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plus substantiel (C. Larroumet, S. Bros, Traité de droit civil, t. 3, Les obligations,
Le contrat, Economica, coll. Corpus Droit privé, 8e éd., 2016, no 293 ; Br. Petit
et S. Rouxel, fasc. préc., pt. 89).
33. Exclusion de l’obligation d’information relative à la valeur de la
prestation. – L’article 1112-1, alinéa 2, du Code civil pose une limite au contenu
du devoir d’information en affirmant qu’il « ne porte pas sur l’estimation de
la valeur de la prestation ».
L’ordonnance du 10 février 2016, dont cette disposition est issue, a ainsi
codifié la jurisprudence dite « Baldus » : dans cette affaire relative à un contrat
de vente portant sur des photographies du célèbre photographe Baldus, la
Cour de cassation avait écarté toute obligation d’information pesant sur
l’acquéreur quant à la valeur réelle de la chose, et censuré l’arrêt d’appel qui
avait retenu l’existence d’un dol ayant conduit le vendeur à céder les photo-
graphies pour un prix jugé dérisoire (Cass. 1re civ., 3 mai 2000, no 98-11.381,
Bull. civ. I, no 131, obs. J. Mestre et B. Fages, RTD civ. 2000, p. 566 ; Chr. Jamin,
JCP G 2001, II, 10510). Il en résulte que l’acquéreur n’est pas tenu d’informer le
cédant que la valeur véritable de la chose excède le prix convenu ; de même
que le vendeur n’a pas pour obligation de faire savoir à l’acheteur que le prix
stipulé est supérieur à la valeur du bien vendu.
34. Modalités du devoir d’information : distinction entre les obligations
de renseignement, de conseil et de mise en garde. – Les modalités du devoir
d’information pesant sur les parties sont très variables. Celles-ci sont le plus
souvent soumises à un simple devoir de renseignement. Ce dernier constitue la
forme la plus légère des obligations d’information : il s’agit pour son débiteur
de délivrer une information stricto sensu, neutre et objective, dépourvue de
toute orientation du cocontractant dans une direction ou une autre. Elle a
pour seul objet de porter à son attention les éléments qui lui permettront de
se déterminer en connaissance de cause (P. Malaurie, L. Aynès, P. Stoffel-
Munck, Droit des obligations, LGDJ, 8e éd., 2016, no 778 ; Br. Petit et S. Rouxel,
fasc. préc., pt. 95). Telle obligation repose par exemple sur le vendeur, ainsi
tenu de renseigner l’acheteur sur les caractéristiques de la chose vendue et, le
cas échéant, sur les éléments de nature à en affecter les qualités essentielles
(Cass. 3e civ., 30 juin 1992, no 90-19.093).
Les parties sont également parfois obligées à un devoir de conseil.
L’information est ici non plus neutre, mais orientée positivement : le conseil
comporte en effet une appréciation de l’opportunité du contrat projeté et vise
diriger le cocontractant dans un sens conforme à ses propres intérêts. Ainsi
du devoir de conseil pesant sur le réparateur, destiné à éclairer le client sur
l’opportunité de la réparation demandée, et visant à l’orienter sur l’option
qui lui serait la plus favorable (Cass. com., 25 février 1981, no 79-15.227, Bull.
civ. IV, no 109).

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L’obligation d’information peut enfin revêtir la forme d’une véritable mise

Partie I • La formation du contrat


en garde. L’information est alors orientée négativement, en ce qu’elle tend à
empêcher le cocontractant de conclure un acte contraire à ses propres intérêts.
La mise en garde doit ainsi permettre d’attirer l’attention de l’autre partie
sur un aspect négatif du contrat (M. Fabre-Magnan, De l’obligation d’infor-
mation dans les contrats. Essai d’une théorie, op. cit., no 467). Un tel devoir est
tout particulièrement mis à la charge du banquier prêteur, tenu de mettre
en garde les emprunteurs non avertis du risque d’endettement excessif né de
l’octroi d’un prêt, à raison des facultés financières du client (Cass. ch. mixte,
29 juin 2007, no 06-11.673).

3. Sanctions du manquement à l’obligation d’information


35. Annulation du contrat pour vice du consentement. – Le manquement
au devoir d’information pourra tout d’abord être sanctionné par la nullité du
contrat, lorsqu’en découle un vice du consentement de la partie créancière de
l’obligation d’information. L’article 1112-1, alinéa 6, du Code civil prévoit en
effet que « le manquement à ce devoir d’information peut entraîner l’annulation
du contrat dans les conditions prévues aux articles 1130 et suivants » (c’est-
à-dire les dispositions relatives aux vices du consentement). Ne pourront
toutefois entraîner l’annulation du contrat que les vices induits par un défaut
d’information, à savoir l’erreur et le dol, mais à l’exclusion de la violence (sur
les vices du consentement, Voy. infra no 92 s.).
36. Responsabilité de la partie débitrice du devoir d’information.
– L’article 1112-1, alinéa 6, du Code civil envisage encore l’engagement de la
responsabilité de celui qui était tenu à l’obligation d’information. Le préjudice
peut être matériel (endettement excessif d’un emprunteur non averti qui n’a
pas été mis en garde par son banquier : Cass. com., 31 janvier 2017, no 15-17.184 ;
pertes financières subies par un épargnant en raison d’un placement mal
avisé géré par une entreprise d’investissement ayant manqué à son devoir
d’information sur les risques d’une opération boursière : Cass. com.,
23 juin 2015, no 14-18.419).
Mais la détermination du préjudice réparable en cas de manquement à
l’obligation d’information achoppe sur le fait qu’il ne peut être établi avec certi-
tude que le créancier de l’information aurait agi différemment (en contrac-
tant à des conditions différentes, ou en refusant même de contracter), s’il
avait eu connaissance des informations non divulguées par l’autre partie.
Les juges retiennent en conséquence le plus souvent qu’il convient non pas
de réparer le dommage intégral subi par le créancier de l’information, mais
seulement un préjudice lié à la perte de chance qu’il avait d’éviter le dommage.
Il s’agit donc d’indemniser une perte de chance « de ne pas contracter » (Cass.
com., 20 octobre 2009, no 08-20.274, Bull. civ. IV, no 127, note D. Mazeaud, RDC

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no 1, 2010, p. 30), ou de « contracter à des conditions plus avantageuses »
(Cass. com., 31 janvier 2012, no 11-10.834, obs. Ph. Stoffel-Munck, JCP G no 46,
12 novembre 2012, doctr. 1224).
Plus rarement, un manquement au devoir d’information peut être à l’ori-
gine d’un préjudice moral (V. pour un emprunteur mal informé ayant subi
« d’importantes perturbations de sa vie personnelle », en raison des place-
ments désastreux qu’il avait effectués : Cass. com., 30 juin 2015, no 14-11.607,
note H. Barbier, RTD civ. 2015, p. 612).

B. Les accords de négociation


37. Accord de principe. – Les parties peuvent elles-mêmes régir certains
aspects du déroulement des pourparlers, par le biais d’accords de négociation.
Les parties peuvent tout d’abord s’entendre sur le principe même des
négociations, via la conclusion d’un « accord de principe ». Ce dernier est un
véritable contrat, suivant lequel les parties s’obligent à mener de bonne foi
les négociations relatives aux conditions d’un autre contrat futur (Cass. com.,
10 janvier 2012, no 10-26.149, obs. B. Fages, RTD civ. 2012, p. 311 ; Cass. com.,
2 juillet 2002, no 00-13.459). L’accord de principe n’a pour effet que de contrac-
tualiser les négociations précontractuelles ; il ne saurait aucunement porter
atteinte à la liberté de ne pas contracter et n’est donc assorti d’aucune obliga-
tion d’aboutir à la conclusion d’un contrat définitif (Cass. com., 2 juillet 2002,
no 00-13.459). Manque donc à son obligation et engage sa responsabilité, celui
qui s’abstient purement et simplement d’engager la négociation promise (Cass.
3e civ., 16 avril 1973, no 72-10.487).
38. Accord partiel. – Bien différent est « l’accord partiel », compris comme
un contrat aux termes duquel les parties s’entendent sur certains éléments du
contrat futur, en cours de négociation. En tant qu’il vaut accord sur certains
éléments du contrat futur, l’accord partiel n’interdit donc pas aux parties
de remettre en cause les différents aspects du contrat sur lesquels elles se
sont accordées. Pour autant, l’accord partiel n’a pas pour effet d’obliger à la
conclusion du contrat définitif à l’issue des pourparlers ; si bien que si cette
dernière n’intervient pas in fine, l’accord partiel est anéanti (V. C. Larroumet,
S. Bros, op. cit., no 301).
39. Accord portant sur les modalités de la négociation. – De manière
générale, les accords de négociation peuvent comporter des clauses très variées,
régissant divers aspects des pourparlers. Pourront être ainsi déterminées les
conditions matérielles des négociations, tenant au lieu où elles se dérouleront,
au calendrier des discussions, ou encore à la répartition des frais induits par
la négociation (à défaut de stipulation contraire, les coûts seront partagés par
moitié : CA Paris, 24 septembre 1991, note J. Mestre, RTD civ. 1992, p. 753).

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Partie I • La formation du contrat
Il est par ailleurs tout à fait envisageable de prévoir une interdiction
contractuelle des négociations parallèles. Quoique dérogeant au principe de
liberté de négocier, telle clause d’exclusivité est en principe licite (Voy. Br.
Petit et S. Rouxel, fasc. préc., pt. 10).

Déroulement des négociations

§ 3. La rupture des négociations

40. Encadrement de la liberté de rompre les négociations. – Si la rupture


unilatérale des pourparlers est en principe libre, elle peut s’avérer fautive
dans certaines circonstances (A), engageant alors la responsabilité de celui
qui s’est abusivement retiré des négociations (B).

A. Liberté de la rupture, sous réserve de l’abus


41. Liberté de rompre les négociations, dans le respect du principe de
bonne foi. – Tout comme l’initiative et le déroulement des pourparlers, la rupture
des négociations est libre, ainsi que cela ressort de l’article 1112, alinéa 1er
du Code civil. En principe, l’exercice de ce droit de rupture unilatérale n’a
donc pas à être motivé (Cass. 1re civ., 20 décembre 2012, no 11-27.340, note O.
Deshayes, RDC 2013, p. 545).
Pour autant, le même article précise que la rupture des négociations
doit intervenir dans le respect du principe de bonne foi ; à défaut de quoi, la
rupture peut être jugée abusive et donc fautive (Cass. com., 7 janvier 1997,
no 94-21.561).
42. Cas de rupture abusive. – La rupture étant libre par principe, elle
ne sera donc jamais fautive en elle-même. Son caractère abusif ne peut se
déduire que des circonstances dans lesquelles la rupture est intervenue ; au
premier rang desquelles figurent la longueur des négociations (Cass. com.,
20 mars 1972, no 70-14.154, Bull. civ. IV, no 93 note G. Durry, RTD civ. 1972,

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p. 779), l’espoir entretenu par l’autre partie de conclure le contrat (Cass. com.,
11 juillet 2000, no 97-18.275) ou encore le caractère brutal de la rupture (Cass.
com., 6 septembre 2016, no 14-29.692, obs. M. Malaurie-Vignal, CCC no 11,
novembre 2016, comm. 232).
43. Cas de rupture non abusive. – L’abus ne peut en revanche être retenu,
lorsque l’auteur qui se retire des négociations ne fait qu’user de sa liberté de
ne pas contracter à ce stade des pourparlers.
Il en va notamment ainsi en cas de pourparlers seulement ébauchés
(Cass. 1re civ., 20 décembre 2012, no 11-27.340), ou en l’absence de négocia-
tions véritablement sérieuses (Cass. 3e civ., 4 octobre 2011, no 10-19.502, consi-
dérant que le fait, pour les propriétaires d’un bien immobilier, de consentir
plusieurs visites à un acheteur potentiel n’est pas révélateur de l’existence de
pourparlers sérieux, et jugeant non fautif le refus dans ces conditions d’une
offre d’achat).
Au surplus, l’existence d’un motif légitime peut justifier la rupture (même
brutale) des négociations. Constitue par exemple, un motif légitime de rupture,
la découverte par l’acquéreur potentiel des actions d’une société, d’informa-
tions défavorables sur la situation financière de cette dernière (Cass. com.,
20 novembre 2007, no 06-20.332, note B. Fages, RTD civ. 2008, p. 101). Une autre
proposition émise par un tiers peut encore constituer un motif de rupture
légitime (Cass. com., 15 septembre 2009, no 08-11.627, note B. Fages, RTD civ.
2009, p. 716).

B. La responsabilité en cas de rupture fautive


44. Nature de la responsabilité. – Celui qui a abusivement rompu les
pourparlers engage sa responsabilité. La nature de cette responsabilité dépend
alors de la présence ou non d’un accord de négociation. En l’absence d’un tel
accord, la responsabilité revêt une nature indubitablement extracontractuelle,
en application des articles 1240 et suivants du Code civil. Dans une telle
hypothèse, la faute est en effet commise antérieurement à la conclusion d’un
éventuel contrat (Cass. 1re civ., 20 juin 1961, Bull. civ. I, no 327).
En revanche, la partie qui commet un abus dans la rupture des pourparlers
en violation d’un accord de négociation engage sa responsabilité contractuelle,
sur le fondement de l’article 1231-1 du Code civil (Cass. com., 16 septembre 2014,
no 13-16.524).
45. Dommages réparables. – La victime d’une rupture abusive peut
notamment obtenir réparation des frais divers occasionnés par les négociations
et les études préalables (Cass. com., 10 novembre 2015, no 14-18.844).

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Partie I • La formation du contrat
Les juges accordent également réparation de la perte de chance de contrac-
ter avec un tiers (Cass. com., 18 juin 2002, no 99-16.488 ; Cass. com., 7 avril 1998,
no 95-20.361), ou dans le même ordre d’idée, le préjudice tenant à « l’immo-
bilisation du bien dont la vente était envisagée » (Cass. com., 11 juillet 2006,
no 04-16.773). Une atteinte à la réputation de la victime peut être tout autant
réparée lorsque la rupture s’accompagne d’un retentissement négatif sur
l’image de la partie éconduite (Cass. com., 16 septembre 2014, no 13-16.524).
46. Dommages non réparables : le gain manqué. – L’article 1112, alinéa 2,
du Code civil énonce que la réparation du préjudice résultant de la rupture
fautive « ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages
attendus du contrat non conclu ni la perte de chance d’obtenir ces avantages. »
Le gain manqué n’est ainsi pas réparable. La réforme de 2016, dont cette
disposition est issue, consacre la solution établie par la jurisprudence dite
« Manoukian » : dans cette affaire, la chambre commerciale de la Cour de
cassation avait ainsi jugé que « les circonstances constitutives d’une faute
commise dans l’exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers
précontractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d’une
chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat ».
La Haute juridiction avait en conséquence approuvé l’arrêt d’appel, considérant
que le dommage subi par la victime de la rupture abusive « n’incluait que les
frais occasionnés par la négociation et les études préalables auxquelles elle
avait fait procéder et non les gains qu’elle pouvait, en cas de conclusion du
contrat, espérer tirer de ce contrat ni même la perte d’une chance d’obtenir
ces gains » (Cass. com., 26 novembre 2003, no 00-10.243, Manoukian, obs.
P. Stoffel-Munck, JCP E 2004, p. 738, A.-S. Dupré-Dallemagne, D. 2004, p. 869,
D. Mazeaud, RDC 2004, p. 267).

Rupture des négociations

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Section II. Les avant-contrats

47. Anticipation du contrat définitif. – Il n’est pas rare que la conclusion d’un


contrat définitif soit précédée par la conclusion d’autres contrats préparatoires,
également désignés sous l’expression « avant-contrats ». Ces derniers créent
des obligations à la charge des parties se rapportant à la conclusion du contrat
définitif par anticipation. Il existe de nombreuses variétés d’avant-contrats.
Ne seront abordées en ces pages que les deux principales formes de contrats
préparatoires, à savoir le pacte de préférence (§ 1) et les promesses de contrat
(§ 2).

§ 1. Le pacte de préférence

48. Définition du pacte de préférence. – Aux termes de l’article 1123,


alinéa 1er, du Code civil, le pacte de préférence est le contrat préparatoire
par lequel une partie (le « promettant ») s’engage envers une autre partie
(le « bénéficiaire ») à lui accorder une préférence (par rapport à d’autres
contractants éventuels) au cas où il déciderait de conclure un contrat déterminé
(vente, location, prêt etc.). Un premier pas vers le contrat définitif est accompli,
l’identité des cocontractants étant déjà pressentie. Pour autant, aucun d’entre
eux ne donne son consentement définitif : le promettant peut toujours décider
de ne pas conclure le contrat, qui n’est pour l’instant qu’une possibilité laissée
à son choix, de même que le bénéficiaire, qui demeure libre de refuser l’offre
formulée ultérieurement (Voy. B. Fages, Droit des obligations, op. cit., p. 69).
49. Contenu du pacte de préférence. – La jurisprudence exige que le pacte
de préférence définisse avec précision les biens (Cass. com., 15 septembre 2009,
no 08-11.627, obs. B. Fages, RTD civ. 2009, p. 716) ou les opérations sur lesquels
porte le droit de priorité. Ainsi par exemple, lorsque le pacte vise seulement
l’hypothèse d’une « cession » d’actions, le bénéficiaire ne peut se prévaloir
d’aucun droit de priorité à l’occasion d’une opération « d’apport » (Cass. com.,
15 décembre 2009, no 08-21.637, obs. H. Le Nabasque, Rev. Sociétés 2010, p. 291),
ou en présence d’une donation (Cass. com., 17 mars 2009, no 08-11.268).
Pour le surplus, les rédacteurs du pacte de préférence jouissent d’une
relative flexibilité, les juges ne soumettant pas sa validité à la stipulation d’un
délai d’acceptation particulier, ni même d’un prix déterminé (Cass. 3e civ.,
15 janvier 2003, no 01-03.700, obs. H. Kenfack, D. 2003, p. 1190 ; Cass. 1re civ.,
6 juin 2001, no 98-20.673, note J. Mestre et B. Fages, RTD civ. 2002, p. 88). Les
parties demeurent ainsi tout à fait libres de fixer ou non un prix, pour autant
que la détermination ultérieure de son montant ne soit pas laissée à la discré-
tion du bénéficiaire (Cass. com., 5 janvier 2016, no 14-19.584, obs. P. Mousseron,
JCP E no 5, 2016, 1363 ; Cass. com. 6 novembre 2012, no 11-24.730). En pratique
un terme est également souvent stipulé, sans que cela n’apparaisse comme

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Partie I • La formation du contrat
une condition de validité, le contrat pouvant parfaitement être conclu pour
une durée déterminée, ou plus rarement, pour une durée indéterminée (Voy.
B. Fages, Droit des obligations, op. cit., p. 70).
50. Effets du pacte de préférence. – L’obligation pesant sur le promettant en
vertu du pacte de préférence ne peut être considérée comme étant respectée
que si, ayant décidé de conclure le contrat définitif, le promettant engage
les pourparlers ou adresse son offre par priorité au bénéficiaire du pacte.
Si ce dernier accepte l’offre formulée par le promettant, le contrat est alors
définitivement formé (Cass. 3e civ., 22 septembre 2004, no 02-21.441, note J.
Mestre et B. Fages, RTD civ. 2005, p. 122). Si le bénéficiaire du pacte rejette
l’offre, le promettant est alors libéré de son obligation et peut licitement
conclure avec un tiers (Cass. 3e civ., 29 janvier 2003, no 01-03.707).
51. Sanctions de la violation du pacte de préférence. – En vertu de
l’article 1123, alinéa 2, du Code civil, si le promettant, ayant finalement décidé
de conclure le contrat définitif, manque à son obligation en ne conférant pas une
priorité au bénéficiaire et contracte avec un tiers, il engage sa responsabilité
contractuelle et pourra être condamné au paiement de dommages et intérêts. Le
même article ajoute que le bénéficiaire du pacte peut également agir en nullité
et demander à être substitué au tiers, lorsque ce dernier avait connaissance
de l’existence du pacte et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir.

Le pacte de préférence

§ 2. Les promesses de contrat

52. Distinction selon la nature unilatérale ou synallagmatique de la


promesse. – De manière générale, la promesse de contrat est une convention
par laquelle une partie (le « promettant ») accorde au profit d’une autre partie

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(le « bénéficiaire »), son consentement définitif à la conclusion d’un contrat
futur dans des conditions prédéterminées. Selon que la promesse est unilatérale
(A) ou synallagmatique (B), son régime sera différent.

A. Promesse unilatérale de contrat


53. Identification de la promesse unilatérale. – La promesse unilatérale
est le contrat par lequel le promettant accorde au bénéficiaire une option
pour la conclusion d’un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés,
et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire
(C. civ., art. 1124, al. 1er). Les promesses sont envisageables pour différents
types de contrats (bail, contrat de travail, prêt, etc.). Mais on les retrouve plus
fréquemment en projection d’un contrat de vente : par une promesse de vente,
le promettant s’engage à céder un bien à un certain prix au bénéficiaire, celui-ci
disposant alors d’une option d’achat ; à l’inverse, par une promesse d’achat,
le promettant accepte d’acheter un bien à un certain prix au bénéficiaire, qui
dispose quant à lui d’une option de vente.
54. Alternative au profit du bénéficiaire. – L’option confère au bénéficiaire
une alternative :
• soit le bénéficiaire lève l’option dans le délai et dans le respect des formes
requises. Le contrat est alors réputé définitivement formé, aux conditions
stipulées dans la promesse ;
• soit le bénéficiaire décide de ne pas lever l’option (ou la lève après l’expi-
ration du délai), auquel cas le contrat n’est pas formé et la promesse est
frappée de caducité (Cass. 3e civ., 8 octobre 2003, no 02-11.953, note J. Mestre
et B. Fages, RTD civ. 2003, p. 697).
55. Sanction de la rétractation anticipée de la promesse unilatérale. – La
promesse unilatérale résulte d’un accord de volontés et constitue un véritable
contrat.
La promesse se distingue ainsi de la pollicitation (Voy. infra no 62) : par
sa promesse, le promettant ne s’engage pas seulement à maintenir une offre
pendant un certain délai ; il donne son consentement définitif à conclure un
contrat futur dont tous les éléments sont déterminés, et dont la formation
ne dépend plus que de la levée de l’option par le bénéficiaire (Cass. 3e civ.
8 septembre 2010, no 09-13.345).
En conséquence, la rétractation anticipée de la promesse (c’est-à-dire avant
l’issue du délai d’option) est inefficace. Si le bénéficiaire a levé l’option dans
le délai imparti, il pourra demander l’exécution forcée de la promesse et faire
constater judiciairement la formation définitive du contrat. Cette solution,
consacrée par l’ordonnance du 10 février 2016 et codifiée à l’article 1124, alinéa 2
du Code civil, met fin à une position jurisprudentielle malvenue, estimant que
la rétractation précoce du promettant ne pouvait être sanctionnée que par

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Partie I • La formation du contrat
l’octroi de dommages et intérêts (Cass. 3e civ. 15 décembre 1993, no 91-10.199,
obs. D. Mazeaud, JCP G 1995, II, 22366, Ph. Delebecque, Defrénois 1994, p. 795,
L. Aynès, D. 1995, p. 87 ; Cass. 3e civ. 28 octobre 2003, no 02-14.459 ; Cass. com.,
13 septembre 2011, no 10-19.526).
56. Indemnité d’immobilisation. – Bien qu’il ne l’oblige pas à conclure le
contrat futur, l’acte de promesse peut cependant faire peser certaines obligations
sur le bénéficiaire. En matière de promesse de vente, le bénéficiaire peut tout
particulièrement convenir de verser une indemnité dite « d’immobilisation »
au promettant, rémunérant l’indisponibilité du bien pendant la durée de la
promesse, le promettant s’interdisant en effet d’en disposer afin de le réserver
au bénéficiaire.

B. Promesse synallagmatique de contrat


57. Identification de la promesse synallagmatique. – Contrairement à
la promesse unilatérale, aux termes de laquelle, une seule des deux parties
consent à la conclusion du contrat définitif, la promesse synallagmatique (ou
« compromis ») constitue un engagement réciproque de la part des deux parties.
Par exemple, une promesse synallagmatique de vente renfermera à la
fois l’engagement d’une partie à vendre et l’engagement d’une autre partie à
acheter une chose pour un prix déterminé.
58. Une promesse synallagmatique (ne) valant (pas) contrat définitif.
– A priori, dès lors que l’engagement réciproque de contracter est acquis, la
promesse synallagmatique équivaut au contrat définitif. Tel est notamment
le cas en matière de vente : l’article 1589 du Code civil dispose en effet que « la
promesse de vente vaut vente, lorsqu’il y a consentement réciproque des deux
parties sur la chose et sur le prix. » Toutefois, la promesse synallagmatique
de vente ne vaut pas nécessairement vente parfaite ; en particulier lorsque
le compromis a été conclu sous seing privé et que celui-ci prévoit, à titre de
formalité essentielle, que l’acte devra être réitéré sous forme authentique.
Dans cette hypothèse, la promesse synallagmatique de vente n’équivaut pas
au contrat définitif de vente, car un élément considéré comme essentiel par
les parties fait encore défaut (Cass. 3e civ., 17 juillet 1997, no 95-20.064).
59. Deux promesses unilatérales croisées (ne) valant (pas) promesse
synallagmatique. – Il n’est pas rare que les parties promettent chacune de
manière unilatérale, de vendre pour l’une, d’acheter pour l’autre, un bien (par
exemple des actions de société) à un prix déterminé. En principe, de telles
promesses unilatérales croisées ne sauraient être assimilées à une promesse
synallagmatique. En effet, ce serait faire fi des options réservées à chacune
des deux parties : l’une et l’autre conservent la possibilité de ne pas lever leurs

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options respectives et d’induire la caducité de la promesse unilatérale dont
elles sont chacune les bénéficiaires, faisant ainsi obstacle à la conclusion du
contrat définitif (Voy. B. Fages, Droit des obligations, op. cit., p. 76)
Néanmoins, la jurisprudence a pu assimiler des promesses unilatérales
croisées à une promesse synallagmatique lorsque la dimension optionnelle
des promesses ne ressortait pas avec évidence des stipulations, permettant de
caractériser un double engagement réciproque de vendre et d’acheter (Cass.
com., 22 novembre 2005, no 04-12.183).

Promesse de contrat

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Chapitre II
La conclusion du contrat

60. Rencontre des volontés de contractants capables et consentants. – La


conclusion du contrat procède d’une rencontre de volontés, c’est-à-dire d’une
concordance entre l’offre et l’acceptation de contracter (Section I). Un contrat
est alors valablement formé pourvu que les parties soient titulaires de la
capacité à contracter (Section II) et que leurs consentements soient exempts
de tout vice (Section III).

Section I. La rencontre des volontés

61. Rencontre d’une offre et d’une acceptation. – L’article 1113 du Code


civil énonce que le contrat est formé par la rencontre d’une offre (§ 1) et d’une
acceptation (§ 2), manifestant la volonté des parties de s’engager. La rencontre
des volontés est régie par une nouvelle sous-section relative à « l’offre et
l’acceptation » (C. civ., art. 1113 à 1122), insérée au sein du Code civil à la
faveur de l’ordonnance du 10 février 2016 (sur la rencontre des volontés, en
doctrine, Voy. : N. Mathey, « Période précontractuelle. – Offre. Acceptation »,
in Encyclopédie du JurisClasseur : Contrats – Distribution, LexisNexis, 2019, Fasc.
25 ; N. Molfessis, « La formation du contrat », JCP 2015, suppl. no  21 ; M.-L.
Mathieu-Izorche, « L’irrévocabilité de l’offre de contrat », D. 2009, p. 440 ;
J.-L. Aubert, Notions et rôle de l’offre et de l’acceptation dans la formation du
contrat, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 59, 1970).

§ 1. L’offre

62. Définition doctrinale de l’offre. – L’offre, également nommée


« pollicitation », n’est pas définie dans les textes. Elle peut se concevoir comme
« la proposition de conclure un contrat, à des conditions déterminées, de telle
sorte que son acceptation suffit à la formation de celui-ci » (Fr. Terré, Ph.
Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, Droit civil – Les obligations, Dalloz, coll.
Précis, 12e éd., 2018, no 165). Cette proposition de contracter peut être faite

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à une ou plusieurs personnes déterminées ou indéterminées, lorsqu’elle est
adressée au public (C. civ., art. 1114). Pour être efficace, l’offre doit respecter
différentes conditions de fond (A). Par principe, elle n’est en revanche soumise
à aucune exigence formelle.
Exceptionnellement, la loi peut toutefois imposer un certain formalisme (B).
La rétractation de l’offre demeure possible dans diverses situations et fait
alors obstacle à la formation du contrat (C).

A. Contenu ferme et précis de l’offre


63. Fermeté de l’offre. – L’offre doit être ferme. Elle doit « exprime[r] la
volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation » ; à défaut de quoi, la
proposition ne constitue qu’une « invitation à entrer en négociation » (C. civ.,
art. 1114). Cette disposition reprend une expression jurisprudentielle bien
assise (Cass. com., 25 septembre 2012, no 11-23.319 ; Cass. com., 6 mars 1990,
no 88-12.477, note B. Gross, JCP E 1990, II, 15803). L’acceptation du destinataire
de l’offre doit ainsi suffire pour emporter la formation du contrat, sans que
soit nécessaire aucune autre manifestation de volonté par le pollicitant.
À l’évidence, une proposition formulée sur le ton de la plaisanterie (jocandi
causa) ne saurait dès lors constituer une offre.
En principe, une offre manque également de fermeté lorsqu’elle est entourée
de réserves, soumettant la conclusion définitive du contrat à une manifestation
de volonté supplémentaire de la part de son auteur (V. N. Mathey, « Période
précontractuelle. – Offre. Acceptation. », in Encyclopédie du JurisClasseur :
Contrats – Distribution, LexisNexis, 2019, Fasc. 25, pt. 9 à 11). Ainsi d’une
proposition précisant par exemple que « la vente ne sera considérée comme
définitive qu’une fois la commande confirmée par le vendeur ». Mais telle ne
sera pas le cas d’une offre assortie de conditions objectives indépendantes
de la volonté du pollicitant, à l’exemple d’une offre de prêt conditionnée à
l’obtention d’une sûreté par l’emprunteur ; l’offre conservant alors toute sa
fermeté (CA Saint-Denis de La Réunion, 2 septembre 2011, no 09/01568, obs.
J.-B. Seube, JCP G 2011, 1232).
Mais le juge considère parfois que le pollicitant conserve la liberté de
ne pas répondre positivement à l’acceptation du destinataire de l’offre dans
certaines situations (V. par ex., Cass. com., 21 février 1978, no 76-12.070 :
possibilité pour un journal ayant émis une offre de publication d’annonces,
de refuser la publication d’une annonce en raison de son contenu, incompa-
tible avec les objectifs poursuivis par le journal et/ou de nature à engager la
responsabilité du directeur de la publication).
64. Précision de l’offre. – L’offre doit comporter les « éléments essentiels
du contrat envisagé » (C. civ., art. 1114). Faute de précision suffisante à cet
égard, la proposition ne constitue qu’une invitation à entrer en pourparlers

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(V. M. Latina et G. Chantepie, Le nouveau droit des obligations. Commentaire

Partie I • La formation du contrat


théorique et pratique dans l’ordre du Code civil, Dalloz, 2e éd., 2018, no  199 ;
N. Mathey, « Période précontractuelle. – Offre. Acceptation. », fasc. préc., pt.
13). Les éléments essentiels renvoient de manière générale aux « éléments
centraux, spécifiques, qui traduisent l’opération juridique et économique
que les parties veulent réaliser » (Ph. Delebecque, Les clauses allégeant les
obligations, thèse de doctorat en Droit, Université Aix-Marseille, 1981, p. 198).
Les éléments essentiels varient d’un contrat à l’autre. En présence d’un
contrat nommé, leur identification ne soulève généralement pas de diffi-
culté, mais la tâche est parfois malaisée en cas de contrat innomé. À titre
d’exemple, l’offre de conclure une vente doit être suffisamment précise quant
à la chose et le prix, qui constituent les éléments essentiels du contrat de vente
(C. civ., art. 1583). Sur le fondement de l’article 1709 du Code civil, les juges
considèrent pareillement le prix et la chose, dont la jouissance est accordée
au locataire, comme des éléments essentiels du contrat de bail (Cass. 3e civ.,
27 juin 1973, no 72-12321).
En revanche, le silence de l’offre à propos des éléments accessoires demeure
sans incidence sur son efficacité.
Ainsi, le prix n’étant pas considéré comme un élément essentiel du contrat
d’entreprise, l’offre de conclure un contrat de ce type conserve son effica-
cité, quand bien même elle manquerait de précision relativement au prix de
la prestation (Cass. 1re civ., 19 juin 1990, no 88-20.266, Bull. civ. I, no  170 ; note
J.-L. Aubert, Defrénois 1991, art. 34987, p. 358). De même, la date de prise d’effet
du bail constitue un élément accessoire du contrat de location. Son omission
dans l’offre est indifférente (Cass. 3e civ., 28 octobre 2009, no 08-20.224, Bull.
civ. III, no 237 ; obs. G. Loiseau, JCP G 2009, 574).

B. Forme de l’offre
65. Absence d’exigence formelle par principe. – En principe, l’offre peut
être émise sans avoir à respecter de forme particulière. Il s’agit là d’un corollaire
des principes du consensualisme et de la liberté contractuelle : « chacun est
libre de contracter ou de ne pas contracter, de choisir son cocontractant et
de déterminer […] la forme du contrat » (C. civ., art. 1102). La manifestation
de volonté du pollicitant peut ainsi tout autant revêtir une forme écrite ou
orale. L’offre peut être exprimée par une déclaration de volonté expresse de la
part de son auteur, ou résulter du comportement de celui-ci, duquel se déduit
alors la volonté de contracter.
La reconduction tacite du bail se rattache par exemple à cette dernière
catégorie : un nouveau contrat de bail s’opère « si, à l’expiration des baux
écrits, le preneur reste et est laissé en possession » (C. civ., art. 1738).

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66. Exigences formelles par exception. – La liberté de déterminer la
forme du contrat peut néanmoins connaître certaines « limites fixées par
la loi » (C. civ., art. 1102). Il est en effet des contrats pour lesquels l’offre doit
être faite par écrit. Il en est ainsi du contrat de crédit, dont l’offre doit être
impérativement établie sur support papier ou sur un autre support durable
(C. consom., art. L. 312-18).
Tel est également le cas d’une offre de contrat faisant suite à un démar-
chage téléphonique : le professionnel doit ainsi adresser au consommateur
« sur papier ou sur support durable » une confirmation de l’offre exprimée
par téléphone (C. consom., art. L. 221-16, al. 2). Cette exigence permet de
limiter les difficultés probatoires et vise à renforcer la compréhension de
l’offre par son destinataire (N. Mathey, « Période précontractuelle. – Offre.
Acceptation. », fasc. préc., pt. 28).

C. Rétractation de l’offre
67. Rétractation de l’offre avant ou après sa réception par le destinataire.
– Tant que l’offre n’a pas été réceptionnée par son destinataire, la rétractation
demeure totalement libre (C. civ., art. 1115). Une fois parvenue à son
destinataire, l’offre ne peut être rétractée qu’à l’issue du délai stipulé par le
pollicitant lui-même ou, subsidiairement, à l’issue d’un délai raisonnable
(C. civ., art. 1116, al. 1er). Il s’agit ici de laisser au destinataire de l’offre un
délai suffisant pour s’y intéresser et se prononcer. Sous toute vraisemblance,
le délai raisonnable pourra varier selon les circonstances, mais devrait en
toute hypothèse demeurer relativement court (Cass. 3e civ., 21 octobre 1975,
no 74-11.599, Bull. civ. III, no 302, pour une acceptation jugée trop tardive, car
formulée neuf ans après la réception de l’offre).
68. Sanction de la rétractation irrégulière. – L’article 1116, alinéa 2 du
Code civil est sans ambiguïté : la rétractation irrégulière de l’offre, c’est-à-dire
une fois que l’offre est parvenue à son destinataire et avant l’issue du délai
raisonnable ou fixé par son auteur, « empêche la conclusion du contrat ».
L’alinéa 3 du même article ajoute que la responsabilité du pollicitant ne
peut être qu’ « extracontractuelle […] dans les conditions du droit commun
sans l’obliger à compenser la perte des avantages attendus du contrat. »
Cette sanction se distingue ainsi de celle qui s’impose en cas de rétractation
anticipée d’une véritable promesse de contrat, à savoir son exécution forcée
(C. civ., art. 1124, al. 2).

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L’offre

Partie I • La formation du contrat


§ 2. L’acceptation

69. Définition légale de l’acceptation. – À la lecture de l’article 1118 du Code


civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 10 février 2016, l’acceptation
se conçoit comme « la manifestation de volonté de son auteur d’être lié dans les
termes de l’offre ». Pourvu qu’elle respecte un certain nombre de conditions de
fond (A) et de forme (B), l’acceptation conforme à l’offre emporte la conclusion
du contrat (C).

A. Acceptation ferme et précise quant aux éléments essentiels


du contrat
70. Acceptation dans les termes de l’offre. – L’acceptation doit être accordée
« dans les termes de l’offre » (C. civ., art. 1102, al. 1er). En d’autres mots,
l’acceptation doit concorder purement et simplement avec l’offre. L’acceptation
non conforme à cette dernière est ainsi dépourvue d’effet ; tout au plus pourra-
t-elle constituer une offre nouvelle (C. civ., art. 1102, al. 3).
Partant, l’efficacité de l’acceptation suppose que cette dernière s’étende
à l’ensemble des éléments essentiels du contrat contenus dans l’offre (Cass.
req., 1er décembre 1885, Bull. civ. no 212, p. 403). Il n’est toutefois pas indis-
pensable que l’acceptation vise individuellement chacun des éléments essen-
tiels. Un accord global, voire un simple oui, peut suffire (V. B. Fages, Droit des
obligations, LGDJ, coll. Manuels 8e éd., 2018, no 77).
L’absence d’accord sur les éléments accessoires est indifférente à la conclu-
sion du contrat (ainsi des modalités de paiement du prix, dès lors qu’un accord
a été trouvé sur son montant : Cass. 1re civ., 26 novembre 1962, no 60-11.634,

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Bull. civ. I, no 504). Les parties pourront s’accorder à ce sujet postérieurement
à celle-ci (Cass. com., 28 février 2006, no 04-14.719, obs. J. Mestre et B. Fages,
RTD civ. 2006, p. 755).
L’acceptation pure et simple vaut accord sur les réserves éventuellement
formulées dans l’offre, pourvu qu’elles soient connues de son destinataire.
Les réserves inconnues de ce dernier ou formulées postérieurement à son
acceptation lui sont inopposables (Cass. com., 28 avril 1998, no 95-20.290, obs.
J. Mestre, RTD civ. 1999, p. 81).
71. Portée de l’acceptation quant aux conditions générales. – Les
conditions générales (de vente ou de prestation) invoquées par une partie n’ont
d’effet à l’égard de l’autre que si cette dernière les a acceptées après qu’elles
aient été portées à sa connaissance (C. civ., art. 1119, al. 1er). Lorsque l’une et
l’autre des parties invoquent des conditions générales discordantes, les clauses
incompatibles sont sans effet (C. civ., art. 1119, al. 2). En cas de discordance
entre des conditions générales et les conditions particulières contenues dans
le contrat, les secondes l’emportent sur les premières (C. civ., art. 1119, al. 3).
72. Fermeté et sérieux de l’acceptation. – Tout comme l’offre,
l’acceptation doit être ferme et sérieuse (sur ce point, Voy. N. Mathey,
« Période précontractuelle. – Offre. Acceptation. », fasc. préc., pt. 31). Une
acceptation donnée sur le ton de la plaisanterie (jocandi causa) sera dès lors
tout aussi inefficace qu’une acceptation imprécise (Cass. com., 6 octobre 2009,
no 08-19.857). Est pareillement dépourvue d’efficacité, l’acceptation donnée par
une personne incapable d’avoir pleinement conscience de toute la portée de
son acte, en raison par exemple de son incompréhension de la langue utilisée
(Cass. soc., 14 janvier 1997, no 95-40.36, pour un salarié ne comprenant pas la
langue française ; Cass. 1re civ., 2 octobre 2013, no 12-21.246, pour une personne
d’un âge avancé ne sachant pas lire le français).

B. Forme de l’acceptation
73. Déclaration ou comportement non équivoque de l’acceptant. – Le
principe de liberté contractuelle s’étend aux formes du contrat (C. civ.,
art. 1102, al. 1er). Il s’en déduit que l’acceptation n’est en principe soumise
à aucun formalisme particulier. La manifestation de volonté de l’acceptant
peut résulter d’une « déclaration » (C. civ., art. 1113, al. 2) orale ou écrite, y
compris de nature électronique (C. civ., art. 1125 à 1127-4).
Dans cette dernière situation, l’article 1127-2, alinéa 1er du Code civil soumet
la validité du contrat à ce que l’acceptant ait eu la possibilité de vérifier le prix
total ainsi que le détail de sa commande et de corriger d’éventuelles erreurs
avant d’exprimer son acceptation définitive.

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Partie I • La formation du contrat
L’acceptation peut encore résulter « d’un comportement non équivoque de
son auteur » (C. civ., art. 1113, al. 2). Telle acceptation implicite de conclure
un contrat de transport pourra par exemple être déduite de ce que l’acceptant
est monté dans un taxi (Cass. 1re civ., 2 décembre 1969, Bull. civ. I, no 381).
Exceptionnellement, la loi restreint parfois cette liberté en imposant
une forme particulière à l’acceptation ; ainsi de la donation (C. civ., art. 932,
al. 1er) et du cautionnement (C. civ., art. 2292), impérativement conclus de
façon expresse.
74. Principe du silence ne valant pas acceptation. – À rebours de l’adage
« qui ne dit mot consent », le silence ne vaut pas acceptation en droit français
des contrats (C. civ., art. 1120). Le principe est établi de longue date en
jurisprudence : « le silence de celui que l’on prétend obligé ne peut suffire,
en l’absence de toute autre circonstance, pour faire preuve contre lui de
l’obligation alléguée » (Cass. civ., 25 mai 1870, S. 1870, 1, p. 341 ; H. Capitant,
Fr. Terré, Y. Lequette et Fr. Chénedé, Grands arrêts de la jurisprudence civile,
t. 2, Dalloz, 13e éd., 2015, no 146, p. 24).
Ce principe connaît toutefois une série de dérogations : le silence peut
ainsi valoir acceptation en considération « de la loi, des usages, des relations
d’affaires ou de circonstances particulières » (C. civ., art. 1120). À titre d’illus-
tration, l’article L. 145-10 alinéa 4 du Code de commerce prévoit que si le
bailleur est resté silencieux durant les trois mois suivant la signification par
le locataire de son souhait de renouveler le bail commercial, le bailleur est
réputé avoir accepté le renouvellement.
L’article L. 312-1-1, IV du Code monétaire et financier dispose pareillement
qu’ayant été informé d’un projet de modification de la convention de compte
bancaire, son titulaire est réputé avoir accepté la proposition de modification
s’il ne notifie pas à son banquier son refus avant la date d’entrée en vigueur
des modifications proposées.

C. Effets de l’acceptation quant à la conclusion du contrat


75. Conséquences du consensualisme. – Par principe, le contrat est
consensuel ; il « se forme par le seul échange des consentements quel qu’en
soit le mode d’expression » (C. civ., art. 1109, al. 1er). L’acceptation pure et
simple dans les termes de l’offre suffit donc à former le contrat. Tel est le cas
de la vente (C. civ., art. 1583). Néanmoins, de rares contrats conservent une
nature réelle, en ce que leur formation dépend non seulement de la rencontre
d’une offre et d’une acceptation, mais aussi de la remise d’une chose (C. civ.,
art. 1109, al. 3), à l’exemple du contrat de dépôt (C. civ., art. 1919, al. 1er : celui-ci
« n’est parfait que par la remise réelle ou fictive de la chose déposée »).

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76. Date et lieu de formation du contrat par correspondance. – La date et
le lieu exacts de formation du contrat par correspondance (conclu entre des
parties éloignées) ont été débattus. La question n’est pas sans enjeux. C’est
notamment à la date de la conclusion du contrat que doivent être appréciés
le consentement et la capacité des parties. Quant au lieu de sa conclusion, il
peut être déterminant de la juridiction compétente (le salarié est ainsi libre de
saisir le conseil de prud’hommes du lieu où le contrat de travail a été conclu
ou celui du lieu où son employeur est établi : C. trav., art. R 1412-1).
Deux solutions étaient alors envisageables : la date et le lieu de la conclu-
sion du contrat pouvaient être d’une part, ceux de la réception de l’accepta-
tion par le pollicitant, ou bien d’autre part, ceux de l’émission de l’acceptation
par la partie acceptante (sur ce débat, Voy. N. Mathey, « Période précontrac-
tuelle. – Offre. Acceptation. », fasc. préc., pt. 59 à 70).
L’ordonnance du 10 février 2016 a tranché en faveur de la première solution :
l’article 1121 du Code civil énonce désormais que le « contrat est conclu dès
que l’acceptation parvient à l’offrant. Il est réputé l’être au lieu où l’accepta-
tion est parvenue ».
77. Rétractation de l’acceptation. – Dès lors que l’acceptation est parvenue
au pollicitant, le contrat est formé. En conséquence, L’acceptant ne peut plus
se rétracter valablement une fois que l’acceptation a été réceptionnée par le
pollicitant. Mais l’acceptation peut être librement rétractée tant qu’elle ne lui
est pas parvenue. Pour être efficace, la rétractation doit donc impérativement
parvenir au pollicitant avant que ce dernier n’ait reçu l’acceptation (C. civ.,
art. 1118, al. 2).

L’acceptation

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Section II. La capacité des parties

Partie I • La formation du contrat


78. Capacité des personnes morales. – La capacité se comprend comme
l’aptitude à avoir des droits et disposer du pouvoir de les mettre en œuvre
soi-même. Elle est une condition de validité du contrat (C. civ., art. 1128,
sous 2°).
En principe, toute personne en est dotée. Les personnes morales sont ainsi
capables de contracter dès qu’elles accèdent à la personnalité juridique (Voy.
J.-R. André et M. Storck, « La capacité juridique des sociétés civiles », JCP N
2017, 1310). Celle-ci est reconnue aux associations dès la publication de leur
création au journal officiel, faisant suite à leur déclaration en préfecture
(loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, JORF du 2 juillet 1901,
p. 4025, art. 5). Quant aux sociétés, elles sont pourvues de la capacité à compter
de leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés (C. civ.,
art. 1842, al. 1er ; C. com., art. L 210-6, al. 1er). Ne pourront donc pas contrac-
ter les groupements dépourvus de la personnalité juridique, tels que les socié-
tés créées de fait ou les sociétés en participation.
La capacité des personnes morales ne saurait donc être limitée que de
manière exceptionnelle et spéciale « par les règles applicables à chacune
d’entre elles » (C. civ., art. 1145, al. 2). Le principe de spécialité statutaire
enferme ainsi le domaine d’action de la société dans le cadre de son objet
social (V. R. Besnard Goudet, « Objet social. – Notion et influence sur la
condition juridique de la société », in Encyclopédie du JurisClasseur : Sociétés
Traité, LexisNexis, 2018, Fasc. 9-10). Dans la même veine, les associations ne
pourront acquérir à titre onéreux et administrer que des immeubles stric-
tement nécessaires à l’accomplissement du but qu’elles poursuivent (loi du
1er juillet 1901 préc., art. 6, sous 3°).
79. Capacité des personnes physiques. – En principe, les personnes
physiques sont pareillement dotées de la capacité de contracter. Pour autant,
cette dernière connaît exceptionnellement certaines limites prévues par la
loi (C. civ., art. 1145, al. 1er).
Le législateur retient ainsi différents cas d’incapacité d’exercice (§ 1) et de
jouissance (§ 2). Les premières ne privent l’incapable que de la faculté d’exer-
cer seul ou sans autorisation, un droit dont il reste titulaire. Les secondes lui
retirent le droit même de conclure certains contrats en particulier.

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§ 1. Les incapacités d’exercice

80. Mineurs et majeurs protégés. – L’article 1146 du Code civil prive les


mineurs non émancipés (A) et les majeurs protégés (B) de la possibilité d’exercer
certains de leurs droits seuls ou sans autorisation, afin de les protéger contre
le risque de contracter à des conditions défavorables en raison de leur jeune
âge ou de l’altération de leurs facultés.

A. Incapacités d’exercice du mineur non émancipé


81. Incapacité de principe du mineur non émancipé. – Si le mineur
émancipé est « capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile »
(C. civ., art. 413-6, al. 1er), le mineur non émancipé est incapable par principe
(sur la capacité du mineur, en doctrine, Voy. Ch. Rieubernet, « Protection des
mineurs et capacité associative depuis la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité
et à la citoyenneté », Dr. famille 2017, étude 22 ; F. Julienne, « Le mineur, acteur
de la vie économique ? (à propos de la loi du 15 juin 2010) », Dr. famille 2010,
étude 31 ; A. Cermolacce, « Les contrats du mineur », Dr. famille 2006, étude
27 ; J. Casey, « L’enfant et la banque », Dr. & patr. 2000, no 87, p. 76 ; P. Conte
et J.-C. Montanier, « Les actes patrimoniaux du mineur non émancipé »,
JCP N 1986, p. 101136). Il ne peut donc contracter par lui-même et doit être
représenté dans tous les actes de la vie civile par son ou ses administrateurs
légaux, c’est-à-dire ses parents, ou celui de ses parents qui exerce l’autorité
parentale (C. civ., art. 382). Lorsque le père et la mère sont tous deux décédés
ou se trouvent privés de l’autorité parentale, l’enfant mineur est placé sous le
régime de la tutelle et sera donc représenté par son tuteur (C. civ., art. 390).
82. Capacité résiduelle du mineur non émancipé. – Par dérogation
toutefois, le mineur non émancipé peut accomplir seul certains actes autorisés
par la loi ou l’usage (C. civ., art. 388-1-1 et 408, al. 1er). Ainsi les mineurs sont-ils
admis, sans condition d’âge, à se faire ouvrir seuls un livret A. Ils pourront
librement retirer les sommes figurant sur ledit livret à compter de leurs 16
ans, sauf opposition de la part de leur représentant légal. Le retrait d’argent
par un mineur de moins de 16 ans n’est possible que sur autorisation préalable
du représentant légal (C. mon. fin., art. L. 221-3, al. 2).
Dans les mêmes conditions, un mineur âgé de 16 ans révolus peut égale-
ment participer à la constitution et à l’administration d’une association (loi du
1er juillet 1901 préc., art. 2 bis). Le mineur non émancipé peut encore adhérer
au syndicat de son choix, lorsqu’il est salarié (C. trav., art. L. 2141-1) ; étant
rappelé que le mineur ne peut conclure un contrat de travail qu’à compter de
ses 16 ans, mis à part le contrat d’apprentissage ouvert dès l’âge de 15 ans (C.
trav., art. L. 6222-1) et le travail durant les vacances scolaires, légal à partir
de 14 ans (C. trav., art. L. 4153-3).

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83. Nullité de l’acte conclu par le mineur incapable. – « L’incapacité de

Partie I • La formation du contrat


contracter est une cause de nullité relative » (C. civ., art. 1147). Autrement dit,
le contrat est nul de plein droit lorsqu’il a été conclu par un mineur incapable.
Seul ce dernier, que la loi entend protéger, est titulaire de l’action en nullité
(C. civ., art. 1181).
Si le cocontractant capable ne saurait agir en nullité, il lui est loisible en
revanche de s’en défendre. En effet, l’acte échappe à la nullité en cas de confir-
mation donnée par le contractant devenu capable (C. civ., art. 1151, al. 2).
Cette sanction peut encore être évitée lorsque le cocontractant de la partie
incapable établit que l’acte était non lésionnaire et utile à celle-ci ou qu’il lui
a profité (C. civ., art. 1151, al. 1er).
Il appartient alors au juge d’apprécier si le contrat est effectivement
équilibré ou s’il a profité au mineur incapable (sur cette question, Voy. Chr.
Simler, « Contrat. – Capacité de contracter », in Encyclopédie du JurisClasseur :
Contrats – Distribution, LexisNexis, 2020, Fasc. 80, pt. 17 à 25).

B. Incapacités d’exercice du majeur protégé


84. Incapacité par principe du majeur sous tutelle. – Plusieurs régimes
de protection sont envisageables selon la gravité de l’altération des facultés
mentales ou corporelles du majeur (sur la capacité du majeur, en doctrine,
Voy. L. Fabre, « Perspectives d’amélioration de la protection juridique des
majeurs », JCP N 2019, p. 1106 ; A. Batteur, L. Mauger-Vielpeau et G. Raoul-
Cormeil, « La conclusion forcée du contrat de mariage du majeur protégé »,
D. 2019, p. 825 ; S. Bottineau, « L’habilitation familiale : une mesure qui reste
à conseiller avec prudence », JCP N 2019, p. 1158 ; K. Buhler, « Les majeurs
protégés et l’assurance-vie », JCP N 2008, p. 1271 ; N. Peterka, « Les libéralités
du majeur protégé dans la loi du 5 mars 2007 », Dr. famille 2007, étude 20).
Ces mesures permettent d’assister la personne protégée (i.e. la conseiller et
être présent à ses côtés lors de la conclusion de l’acte), voire de la représenter
(c’est-à-dire de se substituer à elle lors de la conclusion du contrat). La tutelle
constitue le régime le plus limitatif de sa capacité.
Elle s’impose lorsque l’altération de ses facultés médicalement constatée
place le majeur dans l’impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts et justifie
une représentation continue (C. civ., art. 440, al. 3). Le tuteur le représente
alors dans tous les actes de la vie civile (C. civ., art. 473, al. 1er). Cette repré-
sentation suppose une autorisation préalable du conseil de famille ou du juge
des tutelles lorsqu’il s’agit de conclure un acte de disposition (vente, donation
d’un immeuble), une transaction ou un compromis (C. civ., art. 505 et 506).

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Telle autorisation n’est toutefois pas requise pour représenter le majeur
afin de conclure un acte conservatoire (réparation d’un bien, inscription
d’une sûreté) ou d’administration (conclusion d’un contrat de bail ou d’assu-
rance) nécessaire à la gestion de son patrimoine (C. civ., art. 504, al. 1er).
Le majeur sous tutelle jouit cependant d’une capacité résiduelle dans divers
cas prévus par la loi ou l’usage (C. civ., art. 473, al. 1er). Il conserve notam-
ment la possibilité de faire et de révoquer son testament seul, i.e. sans repré-
sentation, mais avec l’autorisation préalable du juge ou du conseil de famille
(C. civ., art. 476), qui devront s’assurer que le majeur protégé est bien « en
capacité d’exprimer clairement sa volonté quant à ses dispositions testamen-
taires et que le projet de testament correspond à ses souhaits » (Cass. 1re civ.,
8 mars 2017, no 16-10.340). Il est également loisible au juge d’étendre la capacité
résiduelle du majeur à d’autres actes lors du jugement d’ouverture ou ultérieu-
rement (C. civ., art. 473, al. 2) ; ainsi de la possibilité pour le majeur de préle-
ver seul des sommes à concurrence de 30 000 francs par mois sur un compte
bancaire ouvert par le tuteur (Cass. 1re civ., 10 octobre 1995, no 93-19.422).
85. Incapacité par principe du majeur sous curatelle. – La curatelle est
appropriée lorsque le majeur, sans être hors d’état d’agir lui-même, doit être
assisté continuellement dans les actes les plus importants de la vie civile
(C. civ., art. 440). Le curatélaire conserve une capacité plus étendue que celle
du majeur sous tutelle en raison d’une altération moindre de ses facultés.
L’article 467 du Code civil prévoit que le curatélaire doit être assisté par
son curateur pour accomplir les actes qui, en cas de tutelle, requerraient
une autorisation du juge ou du conseil de famille ; à savoir en particulier, les
actes de disposition, ainsi que les transactions et les compromis. A contrario,
le majeur sous curatelle peut accomplir seul (sans représentation) les actes
qu’un tuteur pourrait effectuer sans autorisation judiciaire ou du conseil de
famille, tels que les actes conservatoires ou d’administration.
86. Capacité par principe du majeur sous sauvegarde de justice.
– Contrairement aux régimes de tutelle et de curatelle, caractérisés par un
système de représentation continue, la sauvegarde de justice permet une
assistance du majeur pendant un temps limité et/ou pour certains actes
déterminés (C. civ., art. 433, al. 1er). La sauvegarde de justice est particulièrement
appropriée lorsque le juge est saisi d’une procédure de tutelle ou de curatelle,
en ce qu’elle permet une protection provisoire du majeur, pendant la durée
de l’instance et en l’attente du jugement (l’article 433 alinéa 2 du Code civil en
prévoit la possibilité). Sous sauvegarde de justice, le majeur demeure capable
en principe d’accomplir seul tout acte juridique (C. civ., art. 435, al. 1er). Les
actes ainsi accomplis seront toutefois réduits en cas d’excès ou rescindables
pour lésion.

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Partie I • La formation du contrat
Ce n’est qu’à titre dérogatoire que la capacité de la personne sous sauve-
garde de justice peut être limitée. Le juge peut en effet désigner un manda-
taire spécial chargé de l’accomplissement de certains actes déterminés, y
compris de disposition, nécessaire à la gestion du patrimoine du majeur
protégé (C. civ., art. 437, al. 2).
87. Capacité conservée du majeur sous mandat de protection future.
– L’article 477 du Code civil offre la possibilité à un majeur de désigner à
l’avance un ou plusieurs mandataires chargés de le représenter lorsqu’il
ne pourra plus pourvoir seul à ses intérêts en raison de l’altération de ses
facultés. Ce texte n’ouvre cette faculté qu’aux personnes ne faisant pas déjà
l’objet d’une mesure de tutelle ou de sauvegarde familiale (un curatélaire
peut en bénéficier).
Il s’agit donc d’une mesure de protection contractuelle. Le mandant et le
mandataire établissent eux-mêmes l’étendue des pouvoirs de représentation
de celui-ci : le mandat peut être général ou spécial, selon qu’il porte sur tout
ou partie des actes de la vie civile.
Le mandat de protection future se distingue des autres régimes de protec-
tion du majeur en tant que ce dernier conserve la totalité de sa capacité
juridique pendant la durée du mandat : si le mandataire acquiert un pouvoir
de représentation du mandant, le majeur protégé demeure capable d’accom-
plir lui-même tout acte de la vie civile (V. J. Leprovaux, « Le mandat de protec-
tion future », JCP N no 36, 5 septembre 2008, dossier 1274).
88. Incapacité temporaire du majeur sous habilitation familiale. – Lorsque
le majeur n’a pas la possibilité de pourvoir seul à ses intérêts en raison de
l’altération de ses facultés, le juge peut habiliter une ou plusieurs personnes
choisies parmi ses proches (ascendant, descendant, frère ou sœur, époux,
concubin, partenaire d’un pacte civil de solidarité), à l’assister et le représenter
dans la conclusion de certains actes (C. civ., art. 494-1). L’habilitation peut être
générale (C. civ., art. 494-6, al. 5) ou spéciale et ne valoir que pour certains
actes en particulier (C. civ., art. 494-6, al. 1er). Contrairement aux régimes
de la tutelle et de la curatelle, l’habilitation familiale ne constitue pas une
mesure de protection judiciaire, si bien qu’une fois la mesure prononcée par
le juge, ce dernier n’intervient plus.
Le majeur sous habilitation familiale conserve en toute hypothèse la
capacité d’accomplir seul les actes courants autorisés par la loi ou l’usage visés
par l’article 1148 du Code civil. Il conserve au surplus, une capacité juridique
résiduelle inversement proportionnelle à l’entendue des pouvoirs conférés
à la personne habilitée : tout acte que celle-ci n’est pas habilitée à conclure,
peut être passé par le majeur seul. Du reste, l’incapacité du majeur protégé
n’est que temporaire. Elle cesse une fois que les actes pour lesquels l’habili-
tation a été délivrée sont accomplis (C. civ., art. 494-11).

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89. Sanction de l’acte conclu par le majeur incapable. – Les actes accomplis
par le majeur incapable encourent la nullité relative : seule la personne sous
protection peut s’en prévaloir (C. civ., art. 1147).
Pour autant, le contractant du majeur incapable pourra faire obstacle à
l’action en nullité en établissant l’absence de lésion et l’utilité de l’acte pour le
majeur incapable, ou le profit retiré de l’acte par ce dernier (C. civ., art. 1147).
La fragilité du majeur préexiste nécessairement au jugement prononçant
l’ouverture de la mesure de protection. Partant, les actes accomplis durant
la période dite « suspecte », précédant le commencement de ladite mesure,
peuvent être remis en cause lorsque la fragilité du majeur était notoire ou
connue de son cocontractant et qu’il existe un risque que celui-ci ait cherché
à en profiter. La période suspecte couvre les deux années précédant la publi-
cité du jugement d’ouverture d’une mesure de tutelle ou de curatelle (C. civ.,
art. 464), ou les deux ans avant le jugement délivrant une habilitation familiale
(C. civ., art. 494-9, al. 3).

Incapacités d’exercice

§ 2. Les incapacités de jouissance

90. Incapacités de jouissance destinées à protéger l’incapable. – Afin


de protéger certaines personnes vulnérables, la loi leur retire parfois le
droit même de conclure certains actes. À peine de nullité relative (C. civ.,
art. 1147), l’incapable ne peut alors pas conclure le contrat ni par lui-même
ni par la représentation ou l’assistance d’un tiers. L’article 903 du Code civil
prévoit par exemple, l’incapacité de jouissance du mineur âgé de moins de
16 ans quant aux actes de disposition à titre gratuit ; à moins que la donation
soit faite à son ou sa conjoint(e) par contrat de mariage (C. civ., art. 1095). Le
mineur non émancipé souffre également d’une incapacité commerciale : la

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Partie I • La formation du contrat
qualité de commerçant lui est refusée (C. civ., art. 387-2, 3° et 509, 3°). Il ne
saurait par conséquent, être associé d’une société dont les membres sont tous
commerçants (telle qu’une société en nom collectif : C. com., art. L 221-1, al. 1er).
Les majeurs protégés sont également frappés d’un certain nombre d’inca-
pacités de jouissance du même ordre. Ainsi du majeur sous tutelle, incapable
d’accomplir toute une série d’actes énumérés à l’article 509 du Code civil, y
compris par l’intermédiaire de son tuteur, tels que l’exercice du commerce
ou l’aliénation de ses biens à titre gratuit.
91. Incapacités de jouissance destinées à protéger le cocontractant de
l’incapable. – La loi prévoit diverses incapacités de jouissance, sanctionnées
de manière générale par la nullité relative (C. civ., art. 1147), visant à protéger
non pas l’incapable mais son cocontractant. Le législateur se méfie ici de
l’ascendance néfaste que pourraient avoir certaines personnes sur l’autre
partie, et leur retire donc la capacité de conclure un contrat (B. Fages, Droit
des obligations, LGDJ, coll. Manuels 10e éd., 2020, no 70). Ainsi le médecin
traitant d’un patient mourant ne peut-il recevoir aucune libéralité de la part
de ce dernier (C. civ., art. 909).
De la même manière, les administrateurs ou employés d’un établisse-
ment hébergeant des personnes âgées ne peuvent profiter de dispositions à
titre gratuit (par voie de donation ou de testament) faites en leur faveur par
lesdites personnes pendant la durée de leur séjour au sein de l’établissement
(CASF, art. L 116-4). Telle incapacité de jouissance s’impose afin « de proté-
ger des risques de captation les personnes, hébergées dans certains établisse-
ments, qui vivent le plus souvent dans une situation de dépendance à l’égard
des membres de l’établissement » (Cass. 1re civ., 20 mars 1990, no  88-16.454 ;
Bull. civ. I, no 67 p. 49 ; obs. J. Massip, D. 1991, p. 213).

Incapacités de jouissance

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Section III. Le consentement des parties

92. Existence d’un consentement non vicié. – Le consentement des parties


constitue la première des trois conditions de validité du contrat exigées par
l’article 1128 du Code civil, outre la licéité de son contenu et la capacité des
contractants. L’existence même du consentement implique avant toute chose
que les parties soient saines d’esprit. À l’évidence, le dément ne saurait en
effet, valablement consentir à contracter (C. civ., art. 414-1 et 1129).
Mais si le consentement doit exister, il doit encore être exempt de tout vice
affectant la volonté contractuelle. Qu’une telle altération du consentement
soit observée et le contrat encourrait alors la nullité relative (C. civ., art. 1131).
Ainsi l’article 1130 du Code civil recense-t-il trois vices (Voy. P. Chauvel, Le
vice du consentement, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 1981), en
l’absence desquels « l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté
à des conditions substantiellement différentes » : l’erreur (§ 1), le dol (§ 2), la
violence (§ 3).

§ 1. L’erreur

93. Définition commune de l’erreur. – Le régime de l’erreur est prévu aux


articles 1132 à 1136 du Code civil. Issues de l’ordonnance du 10 février 2016
portant réforme du droit des contrats (ord. no 2016-131, JORF no 0035 du
11 février 2016), ces dispositions reprennent dans une large mesure, les
solutions antérieurement établies.
Communément définie, l’erreur peut se concevoir comme une rupture entre
la réalité et une croyance (sur l’erreur en doctrine, Voy. J. Ghestin, La notion
d’erreur dans le droit positif actuel, LGDJ, coll. Anthologie du droit, 2013 ; Ph.
Malinvaud, « De l’erreur sur la substance », D. 1972, chron. p. 215 ; R. Célice,
L’erreur dans les contrats, étude de jurisprudence française, thèse de doctorat en
Droit, Université de Paris, 1922). Être dans l’erreur, revient en d’autres termes,
à croire vrai ce qui est faux ou inversement (N. Dissaux, Rép. civ. Dalloz, Vo
Contrat : formation, avril 2017, pt. 135).
Toute erreur n’est cependant pas sanctionnée juridiquement. Certaines
méprises emportent la nullité du contrat (A) ; d’autres en revanche, sont à cet
égard parfaitement indifférentes (B).

A. L’erreur affectant la validité du contrat


94. Erreur sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du
cocontractant. – L’erreur ne constitue un vice déterminant du consentement
qu’en tant qu’elle « porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur
celles du cocontractant » (C. civ., art. 1132). La notion éminemment subjective

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Partie I • La formation du contrat
de « qualités essentielles » s’entend de celles qui ont été expressément ou
tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté
(C. civ., art. 1133, al. 1er).
La méprise peut ainsi porter sur la prestation due à l’errans. Ce dernier est
alors victime d’une fausse représentation de son objet. Tel sera par exemple
le cas d’une erreur sur le caractère neuf ou d’occasion d’une machine (Cass.
com., 8 juin 1999, Dr. et patri. 2000/78, chron. no 2478, obs. P. Chauvel), ou la
puissance motrice d’une automobile (CA Nancy, 18 juillet 1933, Gaz. pal. 1933,
2, p. 785).
Mais l’erreur peut encore porter sur la propre prestation de la victime.
Admise de longue date par la jurisprudence (Cass., civ. 1re, 22 février 1978,
no 76-11.551, affaire dite « Poussin », à propos de l’authenticité d’un tableau
de maître, ignorée de son vendeur), la solution est désormais consacrée dans
les textes (C. civ., art. 1133, al. 2).
95. Aléa accepté des parties. – L’existence d’un aléa sur une qualité
particulière de la prestation due exclut toute erreur quant à ladite qualité
(C. civ., art. 1133, al. 3). Cette règle s’impose pour autant que l’aléa ait été
accepté des parties (Cass., civ. 1re, 24 mars 1987, affaire dite du « Verrou de
Fragonard », RTD civ. 1987, p. 743, obs. J. Mestre, écartant l’erreur du vendeur
quant à l’authenticité d’un tableau, dès lors que celui-ci était, au moment de
la vente, « attribué à Fragonard », ce dont les juges avaient pu déduire qu’un
aléa était entré dans le champ contractuel).
L’erreur redevient admissible si l’un des contractants n’en avait pas connais-
sance (Cass., civ. 1re, 28 mars 2008, no 06-10.715).
96. Erreur sur la personne du contractant. – La nullité est également
encourue en cas d’erreur sur la personne du cocontractant, pourvu que la
convention ait été conclue intuitu personae (C. civ., art. 1134). Il en va notamment
ainsi d’une erreur sur l’indépendance d’esprit d’un arbitre désigné pour
trancher un litige (l’exigence d’indépendance n’étant alors pas satisfaite dès lors
que l’arbitre choisi avait préalablement délivré à l’autre partie une consultation
écrite qui lui était favorable : Cass. civ. 2e, 13 avril 1972, no 70-12.774, JCP G 1972,
II, 17189, note P. Level). Tel n’est à l’inverse pas le cas, d’une simple méprise
sur le statut juridique du cocontractant, entreprise individuelle plutôt que
société (CA Paris, 24 septembre 1987, no 86-6536). Le domaine de la nullité
n’est certes, pas sans limite.

B. L’erreur n’affectant pas la validité du contrat


97. Erreur inexcusable. – Certaines erreurs sont insusceptibles d’affecter la
validité d’une convention, au premier rang desquelles figure l’erreur inexcusable
(C. civ., art. 1132) : l’on ne saurait revendiquer la nullité d’un acte tirée d’une

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méprise induite par sa propre négligence fautive. Les compétences spécifiques,
voire professionnelles, de l’errans seront à ce titre déterminantes (Cass., civ.
1re, 2 mars 1964, Bull. civ. I, no 122 : rejetant la demande d’un architecte ayant
découvert une servitude grevant le terrain qu’il vient d’acheter, alors qu’il
avait été informé de l’existence d’un plan d’urbanisme).
98. Erreur sur le motif. – Est pareillement indifférente, l’erreur sur un
motif du contrat (C. civ., art. 1132). Dans cette hypothèse, la victime ne se
fourvoie pas sur la substance de la chose, mais sur les raisons qu’elle a de
contracter. Or, la validité d’une convention ne saurait dépendre d’espérances
ou d’événements contingents, ignorés par hypothèse, du cocontractant.
En ce sens, n’a par exemple pas été remise en cause, la vente d’un collier,
acquis dans la croyance inexacte qu’il avait été porté par une actrice célèbre
(T. com. Seine, 12 novembre 1891, Gaz. pal. 1891, 2, p. 622).
99. Erreur sur la valeur de la prestation. – L’article 1136 du Code civil
écarte enfin l’erreur sur la valeur de la prestation, comprise comme une
appréciation économique erronée de celle-ci. L’admettre ouvrirait la voie d’un
contournement de la prohibition générale de la rescision pour lésion ; étant
entendu que la méprise ne porte ici pas sur une qualité essentielle de la chose,
mais seulement sur un élément extérieur, à savoir la quantité de monnaie
nécessaire à son acquisition ou son usage (P. Chauvel, « Contrats. – Vices
du consentement », in Encyclopédie du JurisClasseur : Contrats – Distribution,
LexisNexis, 2016, Fasc. 45, pt. 108). La solution est constante (Cass. com.,
4 novembre 1964, Bull. civ. III, no 479, à propos d’une erreur sur la valeur d’un
électrophone ; Cass. com., 18 février 1997, no 95-12617, Bull. civ. IV, no 55, sur
une méprise quant à la valeur d’actions d’une société).
Pour autant, l’erreur sur la valeur, tout comme celle sur le motif, pourront
être sanctionnées dès lors qu’elles ont été provoquées par l’autre partie, c’est-
à-dire lorsqu’elles constituent le produit d’un dol.

L’erreur

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§ 2. Le dol

Partie I • La formation du contrat


100. Le dol, une erreur provoquée par une autre personne. – Le dol
est régi par les articles 1137 à 1139 du Code civil. Introduites à la faveur de
l’ordonnance du 10 février 2016, ces dispositions codifient pour l’essentiel,
un droit constant. En substance, le dol est une erreur provoquée par une
autre personne, généralement le cocontractant (sur le dol en doctrine, voy.
M. Fabre-Magnan, De l’obligation de renseignement dans les contrats, Essai d’une
théorie, LGDJ, coll. Anthologie du droit, 2014 ; J. Ghestin, « La réticence, le dol,
et l’erreur sur les qualités substantielles », D. 1971, chron. p. 247 ; P. Bonassies,
Le dol dans la conclusion des contrats, thèse de doctorat en Droit, Université de
Lille, 1955 ; P. Guyot, « Dol et réticence », in Études de droit civil à la mémoire de
Henri Capitant, Dalloz, 1938, p. 228 s.). Il se caractérise par deux composantes,
d’ordre respectivement matériel et moral.
101. Élément matériel : manœuvre, mensonge, réticence. – L’élément
matériel du dol consiste en des agissements visant à induire la victime en
erreur, relativement en particulier, à la valeur de la prestation ou la réalité
de l’une de ses propriétés. Il peut alors s’agir de manœuvres ou de mensonges
(C. civ., art. 1137, al. 1er).
À cet égard, la jurisprudence révèle toute la diversité des pratiques
dolosives : les juges ont d’ailleurs bien souvent à connaître d’un ensemble
de promesses, mises en scènes, mensonges ou assurances en tout genre,
visant à tromper le contractant ; ainsi de la falsification d’un bilan comptable
(Cass. com., 10 juin 1960, Bull. civ. III, no 227), de la modification du kilomé-
trage d’un véhicule (Cass., civ. 1re, 15 avril 1982, Gaz. pal. 1982, 2, pan. p. 288),
de la production d’un faux bon de livraison (CA Douai, 31 janvier 1936, Gaz.
pal. 1936, 1, p. 702), ou de la fausse affirmation qu’un véhicule cédé n’a jamais
été accidenté (CA Paris, 3 avril 1973, JCP G 1974, II, 17631).
Outre la mise en œuvre de pratiques positives, le dol par voie de réticence
est également sanctionné.
Est en effet prohibé, le fait pour l’un des cocontractants, de taire, voire
dissimuler, une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre
partie (C. civ., art. 1137, al. 2). Les exemples abondent : sont ainsi constitu-
tives d’une réticence dolosive, la dissimulation d’une saisie frappant le bien
vendu (Cass. civ. 3e, 30 janvier 1974, D. 1974, jurispr. p. 237), celle du carac-
tère inconstructible d’un terrain (Cass. civ. 3e, 3 février 1981, no 79-13.774),
de la disparition prochaine d’une autorisation administrative d’exploitation
(Cass. com., 15 juin 1973, no 72-10.609), ou encore de l’existence d’un projet
immobilier allant faire perdre son ensoleillement à un appartement (Cass.
civ. 3e, 20 décembre 1995, no 94-14.887).

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102. Caractère déterminant du dol. – La validité du contrat n’est remise
en cause qu’en tant que la méprise ainsi provoquée a été déterminante du
consentement de la victime. Néanmoins, le champ du dol est sur ce point,
plus compréhensif que celui de l’erreur. L’article 1139 du Code civil admet en
effet que la méprise induite dolosivement est toujours excusable, et justifie la
nullité du contrat quand bien même elle porterait sur la valeur de la prestation
ou sur un simple motif.
103. Élément moral : l’intention dolosive. – La dimension morale du dol
réside en l’intention de son auteur d’induire l’autre partie en erreur. Elle
doit être établie, quelle que soit la forme matérielle du dol. Pour autant, les
manœuvres et mensonges supposent une telle volonté par nature. Celle-ci
sera dès lors aisément démontrable.
Plus délicate est la démonstration d’une intention dolosive en cas de
réticence ; raison pour laquelle l’élément intentionnel n’est expressément
visé dans les textes, qu’à son propos (C. civ., art. 1137, al. 2). Faute d’en rappor-
ter la preuve, la nullité du contrat n’est pas encourue.
Le fait de ne pas transmettre une information, par négligence et sans
volonté de tromper, ne justifie que l’octroi de dommages et intérêt pour
manquement à l’obligation précontractuelle d’information (Cass., civ. 1re, 28
mai 2008, no 07-13.487, Bull. civ. I, no 154, RDC no 4, octobre 2008, p. 1118, obs.
D. Mazeaud).
104. Auteur du dol. – Quant à l’auteur du dol, il doit s’agir en principe
de l’un des contractants (C. civ., art. 1137). Toutefois, cette règle admet une
série d’exceptions bienvenues : « le dol est également constitué s’il émane
du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant »
(C. civ., art. 1138, al. 1er). Plus généralement, le dol peut émaner d’un « tiers
de connivence », agissant en connaissance de cause (C. civ., art. 1138, al. 2).
Le champ d’application ratione personae des textes prohibant la violence
est plus inclusif encore : la violence est un vice d’une telle gravité que l’iden-
tité de son auteur est sans importance.

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Le dol

Partie I • La formation du contrat


§ 3. La violence

105. La violence, une contrainte par la menace. – Quoique son esprit


demeure intact, la violence est à n’en pas douter, le vice dont le régime,
désormais situé aux articles 1140 à 1143 du Code civil, a été le plus amendé
par la réforme. Son ressort demeure la « crainte » inspirée d’une menace,
poussant le contractant à s’engager. La victime de violence est ainsi consciente
de ce qu’elle cède à la contrainte, afin d’éviter un mal auquel elle est exposée.
En cela réside la différence avec l’erreur ou le dol, affectant simplement le
contractant dans sa compréhension des termes (sur la violence en doctrine :
C. Nourissat, « La violence économique vice du consentement. Beaucoup de
bruit pour rien ? », D. 2000, chron. p. 369 ; A. Breton, La notion de violence en tant
que vice du consentement. Étude critique, thèse de doctorat en Droit, Université
de Caen, 1925 ; J. Rovinsky, La violence dans la formation du contrat, thèse de
doctorat en Droit, Université d’Aix-Marseille, 1987).
106. Personnes menacées. – À la lecture de l’article 1140 du Code civil,
un acte de violence est tout d’abord constitué en cas de menace d’un « mal
considérable » sur la « personne » du contractant ; il est à cet égard indifférent
que la contrainte soit de nature physique (Cass. civ. 3e, 18 décembre 1972,
no 71-12327, Bull. civ. III, no 681) ou psychologique (V. par exemple, pour des
révélations diffamatoires : Cass., civ. 1re, 30 juin 1954, JCP G 1954, II, 8325).
La menace peut encore porter sur sa « fortune » (ainsi d’une campagne de
presse, financièrement nuisible pour une société commerciale : Cass. crim.,
27 juillet 1912, S. 1913, I, 338).

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Le même article admet enfin la possibilité d’une violence exercée sur les
« proches » de la victime, et non plus seulement à l’encontre de son époux
ou son épouse, descendants ou ascendants, protégés par le régime antérieur
(anc. art. 1113).
107. Abus des voies de droit. – En principe, la menace d’exercer une voie
de droit n’est pas illicite. Telle contrainte est parfaitement légitime lorsqu’il
ne s’agit là pour un créancier que d’obtenir le paiement de son dû (Cass. civ.,
25 février 1879, DP 1879, 1, p. 158).
Mais il en va autrement en cas d’abus, soit « lorsque la voie de droit est
détournée de son but ou lorsqu’elle est invoquée ou exercée pour obtenir un
avantage manifestement excessif. » (C. civ., art. 1141). À par exemple, été jugée
constitutive d’un acte de violence, la menace de poursuite pénale aux fins
d’obtention d’une somme excédant manifestement le montant du dommage
réel (Cass. civ., 9 avril 1913, DP 1917, 1, p. 103 : promesse à hauteur de 65.000
F pour un préjudice de 20 F).
108. Auteur de la menace. – La violence est un vice d’une telle gravité, que
l’identité de son auteur est sans importance : elle est une cause de nullité,
qu’elle ait été exercée par un contractant ou par un tiers (C. civ., art. 1142).
Par ailleurs, il est notable que l’ordonnance du 10 février 2016 a supprimé
l’ancien article 1114 du Code civil en vertu duquel, « [l]a seule crainte révéren-
cielle envers le père, la mère, ou autre ascendant, sans qu’il y ait eu de violence
exercée, ne suffi[sait] point pour annuler le contrat. » Afin de lutter contre les
mariages forcés, le législateur avait déjà reconnu en 2006 qu’une contrainte
exercée sur les époux, par crainte révérencielle envers un ascendant, consti-
tuait un cas de nullité du mariage (loi no 2006-399 du 4 avril 2006, JORF no 81,
5 avril 2006, p. 5097, ayant modifié l’article 180 du Code civil). La règle est
désormais généralisée à tout type de contrat. C’est admettre que la violence
peut être le fait d’un parent.
109. Exploitation abusive d’un état de dépendance. – L’article 1143 du Code
civil assimile à la violence, l’exploitation abusive par l’une des parties, d’un
« état de dépendance dans lequel se trouve son cocontractant à son égard ».
L’abus est caractérisé dès lors que son auteur « obtient de lui un engagement
qu’il n’aurait pas souscrit en l’absence d’une telle contrainte et en tire un
avantage manifestement excessif ». Il s’agit là d’une innovation majeure de
l’ordonnance du 10 février 2016.
Le domaine exact de ce texte reste pour l’heure, incertain. Mais outre la
violence économique, déjà envisagée par les juges (Cass., civ. 1re, 30 mai 2000,
no 98-15.242, Bull. civ. I, no 169 ; Cass., civ. 1re, 3 avril 2002, no 00-12.932, Bull.
civ. I, no  108 ; D. 2002, p. 1862, note J.-P. Chazal ; Voy. Ph. Stoffel-Munck (dir.),
Réforme du droit des contrats et pratique des affaires, Dalloz, coll. « Thèmes et
commentaires », 2015, p. 33), cette disposition nouvelle pourrait également

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Partie I • La formation du contrat
sanctionner l’exploitation d’une dépendance capitalistique (exercée par une
société mère contre sa filiale : Voy. R. Marty, « Mutualisation des sûretés ou
cross-collateralization lors des opérations de LBO et des financements de
groupe », RD bancaire et fin. no 3, mai 2019, étude 7, pt. 8), ou de nature affec-
tive (A. Chatain et J.-Ph. Erb, « Les conséquences de la réforme du droit des
contrats sur l’intervention du juge », JCP E no 18, 4 mai 2017, 1245, pt. 23).

La violence

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Chapitre III
Le contenu du contrat

110. Rareté des références à l’objet au sein du Code civil. – Outre le


consentement et la capacité des parties, étudiés au chapitre précédent,
l’article 1128 du Code civil soumet la validité des contrats à l’existence d’un
contenu licite et certain. Le contenu contractuel n’est pas une notion nouvelle.
Il n’apparaît toutefois au sein du Code civil qu’à la faveur de l’ordonnance du
10 février 2016 précitée. Le « contenu licite et certain » remplace ainsi l’exigence
d’un « objet certain » et d’une « cause licite » visés à l’ancien article 1128 du
même Code.
Quoique les références à l’objet se fassent désormais plus discrètes, l’objet
n’a pas totalement disparu du Code civil (sur la notion d’objet, en doctrine,
Voy. : E. Mouial Bassilana et J.-B. Racine, « Contrat. – Contenu du contrat :
objet du contrat », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil Code : Art. 1162 à 1171,
LexisNexis, 2018, Fasc. 30 ; J. Ghestin , G. Loiseau et Y.-M. Serinet, Traité de
droit civil, La formation du contrat, t. 2, L’objet et la cause, Les nullités, LGDJ,
coll. Traité de droit civil, 4e éd., 2013 ; G. J. Martin et J.-B. Racine, « Contrats
et obligations. – Objet du contrat », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil
Code, art. 1126 à 1130, LexisNexis, 2009, Fasc. 10 [Archives antérieures au
1er octobre 2016] ; A.-S. Lucas-Puget, Essai sur la notion d’objet du contrat, LGDJ,
coll. Bibliothèque de Droit privé, no 441, 2005 ; H. Mayer, L’objet du contrat,
thèse de doctorat en Droit, Université de Bordeaux, 1968). L’article 1163, dans
sa rédaction issue de l’ordonnance de 2016, énonce ainsi que « l’obligation a
pour objet une prestation présente ou future. » L’objet de l’obligation, propre
à chacun des cocontractants, se comprend ainsi comme la « prestation » que
les parties se sont individuellement engagées à fournir. Dans un contrat de
vente par exemple, l’objet de l’obligation du vendeur consiste en la délivrance
de la chose ; celui de l’acheteur est de payer le prix.
En tant qu’il se réfère à la fourniture d’une « prestation », l’article 1163 se
distingue opportunément de l’ancien article 1129 du Code civil, qui assimilait
l’objet de l’obligation à la notion vague et restrictive de « chose » (à donner,
faire ou ne pas faire).

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L’objet de l’obligation est communément distingué de « l’objet du contrat »,
évoqué de manière tout à fait incidente par les articles 1171 et 1196 du Code
civil. L’objet du contrat désigne l’opération contractuelle réalisée par les parties,
envisagée dans son ensemble et non plus en considération de l’un seul de ses
éléments constitutifs – le contrat de vente a par exemple pour objet l’aliéna-
tion de propriété d’un bien à titre onéreux.
111. Disparition de la cause au sein du Code civil. – Quant à la « cause », elle
a totalement disparu du Code civil (sur la cause, en doctrine, voy. : F. Chénedé,
« La cause est morte… Vive la cause ? », CCC 2016, doss. 4, p. 21 ; C. Grimaldi,
« Les maux de la cause ne sont pas qu’une affaire de mots », D. 2015, p. 814 ;
T. Génicon, « Défense et illustration de la cause en droit français des contrats »,
D. 2015, p. 1551 ; L. Aynès, « La cause, inutile et dangereuse, Dossier La réforme
du droit des contrats », Dr. et patrimoine octobre 2014, p. 40 ; H. Capitant,
De la cause des obligations (contrats, engagements unilatéraux, legs), La
Mémoire du droit, Collection de la Faculté Jean-Monnet, 2012 ; P. Catala,
« Deux regards inhabituels sur la cause dans les contrats », Defrénois 2008,
art. 38866, p. 2365 ; J. Ghestin, Cause de l’engagement et validité du contrat,
LGDJ 2006 ; D. Mazeaud, « La cause », in 1804-2004, Le Code civil : un passé,
un présent, un avenir, Université Panthéon-Assas-Paris II, D. 2004, p. 451 ;
J. Rochfeld, Cause et type de contrat, LGDJ, coll. Bibliothèque de Droit privé,
no 311, 1999 ; G. Chevrier, Essai sur l’histoire de la cause dans les obligations,
thèse de doctorat en Droit, Université de Paris, 1929). Depuis la réforme du
droit des contrats de 2016, plus aucune de ses dispositions ne s’y réfère.
Elle était régie par les anciens articles 1131 à 1133 du Code civil, soumettant
la validité du contrat à l’existence d’une cause licite et conforme aux bonnes
mœurs ainsi qu’à l’ordre public. La doctrine et la jurisprudence distinguaient
traditionnellement la cause objective de la cause subjective.
La première peut se comprendre comme l’intérêt en considération duquel
une partie s’engage à fournir une prestation. La cause objective est générale-
ment identique entre différents contrats du même type. Dans le cadre d’un
contrat de vente, le transfert de propriété de la chose vendue constitue ainsi
la cause (objective) de l’acheteur, et de son engagement à payer le prix.
La cause subjective s’apparente au mobile ayant conduit une partie à s’enga-
ger dans un contrat. Elle est propre à chacun : l’achat d’un bien immobilier
par exemple, pourrait être motivé par le souhait tout à fait légitime de l’ache-
teur d’en faire sa résidence principale, ou par le projet moins avouable d’y
implanter une maison close.
Nonobstant l’absence de toute référence explicite dans les textes, certains
auteurs (B. Fages, Droit des obligations, LGDJ, coll. Manuels 10e éd., 2020, pt.
153 ; Ph. Delebecque et Fr.-J. Pansier, Droit des obligations ; Contrat et quasi-
contrat, LexisNexis, coll. Objectif droit, 8e éd. 2018, pt. 232) considèrent pourtant

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Partie I • La formation du contrat
que l’esprit de la cause subsiste en droit français des contrats, à travers
notamment l’exigence d’une contrepartie non dérisoire (C. civ. art. 1169)
ou la prise en compte du but ayant conduit les parties à conclure le contrat
(C. civ. art. 1162).
112. Licéité, certitude et équilibre du contenu contractuel, conditions
de validité du contrat. – En toute hypothèse, l’importance de l’objet et de la
cause se trouve amoindrie. Ni l’un ni l’autre ne sont à ce jour expressément
mentionnés dans les textes parmi les conditions de validité d’une convention ;
contrairement au contenu licite et certain du contrat (section I), « nécessaires
à [sa] validité » (C. civ. art. 1162). Au surplus, nombre de dispositions de droit
commun ou spécial soumettent la validité du contrat à l’équilibre de son
contenu (section II).

Section I. Un contenu licite et certain

113. Licéité et certitude du contrat valable. – La licéité du contenu


contractuel s’apprécie en considération de différents corps de règles, auxquelles
doivent se conformer les conventions. Ces normes fixent les limites de la
liberté contractuelle : le contrat n’est licite que dans la mesure où son but
et ses stipulations leur sont compatibles (§ 1). La validité du contrat dépend
encore de la certitude de son contenu. Il doit en d’autres mots, porter sur une
prestation déterminée et possible (§ 2).

§ 1. Un contenu contractuel licite

114. Contenu licite au regard des règles d’ordre public, des droits


fondamentaux et des bonnes mœurs. – Le contenu du contrat doit se conformer
à diverses séries de normes, limitant la liberté contractuelle au nom d’intérêts
supérieurs. En premier lieu, le contenu contractuel doit être compatible avec
les règles intéressant l’ordre public (A). Il convient ensuite de respecter les
droits et libertés fondamentaux, dont la violation peut emporter la nullité
de la convention (B). Enfin, la licéité du contenu contractuel s’apprécie en
considération des bonnes mœurs, bien que les situations de nullité se fassent
aujourd’hui de plus en plus rares sur ce fondement (C).

A. Licéité du contenu contractuel en considération des règles


d’ordre public
115. Exigence de compatibilité du contrat avec l’ordre public. Fondements
textuels. – La licéité du contenu contractuel s’apprécie avant tout au regard
de l’ordre public (sur la notion d’ordre public, en doctrine, Voy. : Y. Lequette,
« Les mutations de l’ordre public contractuel, Ouverture », RDC 2012, p. 262 ;

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J. Ghestin, « Les effets pervers de l’ordre public », in Propos impertinents sur
le droit des affaires, Mél. Ch. Gavalda, Dalloz, 2001, p. 124 ; T. Revet, L’ordre
public à la fin du xxe siècle, Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 1996 ;
G. Farjat, L’ordre public économique, LGDJ, 1963 ; Ph. Malaurie, L’ordre public
et le contrat : étude de droit civil comparé, France, Angleterre, URSS, Matot-
Braine, 1953 ; G. Ripert, « L’ordre économique et la liberté contractuelle », in
Mélanges François Gény, Paris, Sirey, 1934, t. 2, p. 352).
L’exigence de compatibilité du contrat avec l’ordre public est affirmée à
maintes reprises au sein du Code civil. Son article 6, inchangé depuis 1804,
dispose en effet que « [l’on] ne peut déroger, par des conventions particulières,
aux lois qui intéressent l’ordre public ». Depuis l’ordonnance du 10 février 2016
précitée, l’article 1102, alinéa 2 du même Code ajoute que « la liberté contrac-
tuelle ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public »
et l’article 1162 rappelle à nouveau que le « contrat ne peut déroger à l’ordre
public ni par ses stipulations ni par son but ». Manifestement, ces disposi-
tions se « chevauchent » (P.-Y. Gautier, « Vers une refonte de l’ordre public en
matière de nullités », RDC 2019, no 3, p. 143, spéc. p. 144). Mais cette redon-
dance exprime toute l’importance accordée au respect de l’ordre public en
droit français des contrats et la gravité que peut représenter sa violation.
116. Identification générale de l’ordre public. – L’ordre public est une
notion difficilement saisissable (Ph. Malaurie, L’ordre public et le contrat.
Étude de droit civil comparé, France, Angleterre, URSS, Matot Braine, 1953,
no 1). Nombreux sont ceux qui ont tenté de le définir. Mais il est possible
d’identifier ses traits les plus saillants. Sur le terrain contractuel, l’ordre
public peut ainsi se concevoir de manière générale, comme « une atteinte
nécessaire à la liberté contractuelle fondée sur un intérêt supérieur [lequel]
correspond souvent à l’intérêt général, du moins à des valeurs essentielles et
collectives » (B. Fages, « Le respect de l’ordre public », in B. Fages et P. Fleury
(dir.), Le Lamy Droit du contrat, Wolters Kluwers, Lamy Droit civil, no 1175).
En ce sens, certaines clauses, voire certaines conventions, seront prohibées
au nom de l’ordre public qu’il convient de préserver.
117. Sources de l’ordre public. – Les « règles qui intéressent l’ordre public »
(C. civ. art. 1102, al. 2) trouvent notamment leur source dans les « lois » visées
à l’article 6 du Code civil. Ainsi des conventions dites de « mère porteuse »,
prohibées par l’article 16-7 du Code civil (issu de la loi no 94-653 du 29 juillet 1994
relative au respect du corps humain, JORF no 175 du 30 juillet 1994).
Mais les règles d’ordre public peuvent tout autant émaner du pouvoir
réglementaire (V. Cass. 1re civ., 10 février 1998, no 96-15.275, Bull. civ. I, no 49,
p. 32, note B. Fages, JCP G 1998, II, no 10142 ; J. Mestre, RTD civ. 1998, p. 669,
approuvant la cour d’appel de s’être fondée sur un texte réglementaire, à
savoir l’article R 34, sous 7] du Code pénal alors en vigueur, interdisant « le

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Partie I • La formation du contrat
métier de deviner et pronostiquer, ou d’expliquer les songes », pour déclarer
illicite un contrat de présentation de clientèle d’astrologue, « prohibée par
la loi au sens large »).
Par ailleurs, la jurisprudence dévoile régulièrement de nombreuses règles
d’ordre public (tel est par exemple le cas des conditions de validité de la clause
de non-concurrence tenant à sa limitation dans le temps et dans l’espace : Cass.
soc., 10 juillet 2002, no  99-43.334 ; no  99-43.336 ; no  00-45.387 ; no 00-45.135, obs.
Y. Serra, D. 2002, p. 2491, J. Rochfeld, RDC 2003, p. 17).
118. L’État, la famille, la personne, composantes traditionnelles de
l’ordre public. – Traditionnellement, l’ordre public est associé à certains
principes fondamentaux en particulier, sur lesquels repose l’organisation de
la société, tels que l’État, la famille, la personne (V. B. Fages, « Le respect de
l’ordre public », fasc. préc., no 1178). La préservation des intérêts supérieurs
qui s’y rattachent justifie la prohibition de divers contrats.
La souveraineté de l’État figure parmi les principales composantes de
l’ordre public. Seraient ainsi nuls et de nul effet les statuts d’une associa-
tion ayant « pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national et à
la forme républicaine du gouvernement. » (Loi du 1er juillet 1901 relative au
contrat d’association, JORF du 2 juillet 1901, p. 4025, art. 3).
Groupe social fondamental, la famille relève aussi prioritairement de
l’ordre public. La prohibition des conventions de gestation pour autrui (C. civ.
art. 16-7) en est une illustration des plus topiques.
La personne se rattache aussi traditionnellement à l’ordre public. La préser-
vation de son intégrité, de sa dignité ou de son corps légitime une limita-
tion de la liberté contractuelle. Aussi, toute convention ayant « pour effet de
conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses
produits » encourrait la nullité (C. civ. art. 16-5).
119. Ordre public économique. – Le xxe siècle est marqué par un
interventionnisme étatique accru dans la sphère économique. Le législateur
s’immisce ainsi de plus en plus volontiers dans le contrat et l’enferme dans
certaines limites visant à orienter l’activité économique sur une voie socialement
opportune. Émerge un « ordre public économique » (Th. Pez, « L’ordre public
économique », Nouveaux cahiers du Conseil constitutionnel no 49, 1er octobre
2015, p. 43 ; G. Marcou, « L’ordre public économique aujourd’hui. Un essai
de redéfinition », in Th. Revet et L. Vidal (dir.), Annales de la régulation, IRJS
éditions, 2009, p. 79 ; G. Farjat, L’ordre public économique, LGDJ, coll. Bibliothèque
de Droit privé, t. 34, 1963 ; R. Savatier, « L’ordre public économique », D. 1965,
chr., p. 37). L’ordre public économique est relativement compréhensif en ce
qu’il comporte des impératifs sociaux et environnementaux excédant les
préoccupations économiques stricto sensu (B. Fages, « Le respect de l’ordre
public », fasc. préc., no 1179).

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120. Ordre public de direction. – Au sein de l’ordre public économique,
un distinguo est communément opéré entre d’une part, l’ordre public de
direction et, d’autre part, l’ordre public de protection (Ph. Delebecque et Fr.-J.
Pansier, op. cit., pt. 201).
À travers l’ordre public de direction, l’État cherche à protéger un intérêt
économique général et entend pour ce faire, « canaliser l’activité contractuelle
dans le sens qui lui paraît le plus conforme à l’utilité sociale » (Fr. Terré, Ph.
Simler, Y. Lequette et Fr. Chénedé, Droit civil – Les obligations, Dalloz, coll.
Précis, 12e éd., 2018, no 495). Il en allait ainsi du dispositif antérieur d’enca-
drement des prix, régi par l’ordonnance no 45-1483 du 30 juin 1945 relative
aux prix (JORF du 8 juillet 1945) désormais abrogée. Il en va pareillement
ainsi des règles actuelles de prohibition des ententes anticoncurrentielles,
au regard desquelles doit être jugée illicite toute convention entre entreprises
ayant notamment pour effet de « limiter l’accès au marché ou le libre exercice
de la concurrence » (C. com., art. L 420-1, sous 1°).
121. Ordre public de protection. – À travers l’ordre public de protection, le
législateur cherche à préserver les intérêts individuels de l’un des cocontractants,
considéré comme en situation de faiblesse (B. Fages, Droit des obligations, LGDJ,
coll. Manuels 10e éd., 2020, pt. 161). Ressortissent tout particulièrement à l’ordre
public de protection les règles du droit de la consommation et du droit du
travail, protégeant respectivement le consommateur contre le professionnel
et le salarié dans ses rapports avec l’employeur. Est ainsi prohibée toute clause
permettant au professionnel de modifier unilatéralement les clauses relatives
à la durée du contrat, aux caractéristiques ou au prix de la prestation à fournir
(C. consom., art. R 212-1, sous 3°). Dans la même veine, toute modification (des
éléments essentiels) du contrat de travail doit être acceptée par le salarié (en
conséquence, un licenciement sera jugé sans cause réelle et sérieuse lorsqu’il
est fondé sur le refus des modifications du contrat de travail par le salarié :
Cass. soc., 20 octobre 1998, no 96-40.614).
122. Illicéité du contrat au regard de ses stipulations ou de son but.
– Réminiscence de l’objet et de la cause (O. Deshayes, Th. Genicon et Y.-M.
Laithier, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des
obligations. Commentaire article par article, LexisNexis, 2e éd., 2018, art. 1162,
p. 302 ; M. Fabre-Magnan, « Critique de la notion de contenu du contrat »,
RDC 2015, p. 639), l’article 1162 du Code civil sanctionne l’illicéité du contrat
conclu en violation de l’ordre public au regard tant de « ses stipulations » que
de « son but ». En d’autres termes, sera sanctionnée non seulement l’illicéité
du contenu contractuel à proprement parler, mais aussi celle de la motivation
des parties.
L’article 1202, alinéa 1er du Code civil prévoit par exemple la nullité d’une
contre-lettre, indépendamment du but poursuivi par les parties, dès lors
qu’elle a pour objet une augmentation du prix établi dans le traité de cession

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Partie I • La formation du contrat
d’un office ministériel. En revanche, le contrat de vente d’un bien immobi-
lier, parfaitement licite lorsqu’il est motivé par un but légitime, encourt la
nullité dès lors qu’il viserait seulement à permettre à l’un des copropriétaires
d’être majoritaire aux assemblées générales, abritant ainsi une fraude à la loi
(Cass. 3e civ., 6 juillet 1982, no 81-12.453, Bull. civ. III, no 169).

B. Licéité du contenu contractuel en considération des droits


et libertés fondamentaux
123. Identification générale des droits et libertés fondamentaux. – Outre
les règles d’ordre public, le contrat doit se conformer aux droits et libertés
fondamentaux, constitutifs d’un véritable bloc d’impérativité restreignant
la liberté contractuelle (V. B. Fages, Droit des obligations, LGDJ, coll. Manuels
10e éd., 2020, p. 149). Les droits et libertés fondamentaux, recoupant dans une
large mesure ce qu’il est convenu d’appeler droits de l’homme, se rattachent
à des valeurs essentielles, et sont reconnus à chacun égalitairement. Leurs
sources sont tout à la fois nationales (Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen [DDHC] du 26 août 1789) et internationales (Convention européenne
des droits de l’homme [CESDH] du 4 novembre 1950).
Les droits et libertés fondamentaux revêtent plusieurs dimensions (V.
R. Guillien et J. Vincent, Lexique des termes juridiques, Dalloz, 9e éd., 1993, v°
« libertés publiques ») : des droits individuels, tendent à préserver l’autono-
mie des individus face aux pouvoirs exécutif et législatif sur le terrain de leur
activité intellectuelle et spirituelle (libertés d’opinion, liberté de conscience)
ou de leur activité physique (liberté d’aller et venir, sûreté personnelle). Les
droits politiques leur garantissent la possibilité de participer aux élections
ainsi qu’à l’exercice du pouvoir politique (droit de vote, éligibilité aux fonctions
publiques). D’autres droits, à coloration économique et sociale, s’analysent
comme une créance des individus à l’égard de l’État, dont ils peuvent exiger
certaines prestations (droit au travail, droit à l’instruction, droit à la santé).
124. Conformité du contrat aux droits et libertés fondamentaux. – Le
contenu contractuel doit être conforme aux droits et libertés fondamentaux.
Ainsi la Cour de cassation a-t-elle pu juger illicites diverses clauses ou
conventions contraires à la CESDH, notamment son article 11, relatif à la liberté
de réunion et d’association (Cass. 3e civ., 12 juin 2003, no 02-10.778, Bull. civ.
III, no 125, p. 112, obs. Y. Rouquet, D. 2003, p. 1694 ; J. Mestre et B. Fages, RTD
civ. 2004, p. 280 : nullité absolue de la clause insérée dans un contrat de bail,
contraire à la liberté d’association en tant qu’elle faisait obligation au preneur
d’adhérer à une association et de maintenir son adhésion durant l’exécution
du bail) ou encore son article 8, garantissant à toute personne le droit au
respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance

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(Cass. 3e civ., 6 mars 1996, no 93-11.113, Bull. civ. III 1996 no 60 p. 41, note Chr.
Jamin, JCP G 1996, I, 3958, no 1 : nullité d’une clause contenue dans un bail
d’habitation faisant interdiction au locataire d’héberger ses proches).
Certaines atteintes aux droits et libertés fondamentaux pourront être
néanmoins justifiées lorsqu’elles apparaissent nécessaires et proportion-
nées à un intérêt légitime.
Une clause de non-concurrence, a priori contraire à la liberté du commerce
et de l’industrie (lorsqu’elle est imposée à un commerçant) ou à la liberté
du travail (dans l’hypothèse où elle s’impose à un salarié) est ainsi parfaite-
ment licite lorsque son créancier peut justifier d’un intérêt légitime et que la
clause est limitée dans le temps et dans l’espace (Cass. com., 12 février 2013,
no 12-13.726, comm. M. Gomy, D. 2013, p. 2812). De même, une clause d’inalié-
nabilité, privant le débiteur de la possibilité de disposer d’un bien déterminé,
heurte le principe de libre disposition du patrimoine (prévu à l’article 537 du
Code civil), mais demeure valable en tant qu’elle est justifiée par un intérêt
légitime et qu’elle reste temporaire (C. civ. art. 900-1).

C. Licéité du contenu contractuel en considération


des bonnes mœurs
125. Bonnes mœurs et morale. – L’article 6 du Code civil dispose que l’on
ne peut déroger par des conventions particulières « aux lois qui intéressent
[…] les bonnes mœurs » (sur la notion de bonnes mœurs, en doctrine, Voy. :
E. Fragu, Des bonnes mœurs à l’autonomie personnelle : essai critique sur
le rôle de la dignité humaine, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II,
2015 ; B. Lavaud-Legendre, Où sont donc passées les bonnes mœurs ?, PUF,
2005 ; E. Géraud-Llorca, L’introduction des bonnes mœurs dans le Code civil,
in Les bonnes mœurs, PUF, 1994).
Au sens large, les bonnes mœurs s’apparentent à la morale (G. Marty et P.
Raynaud, Les obligations. t. I. Les sources, Sirey, 1988, pt. 77). En tant que
garants du respect des bonnes mœurs, les juges s’assurent ainsi de la confor-
mité du contrat à la morale. En droit français, la jurisprudence a conféré aux
bonnes mœurs une connotation essentiellement sexuelle (Ph. Delebecque et
Fr.-J. Pansier, Droit des obligations ; Contrat et quasi-contrat, LexisNexis, coll.
Objectif droit, 8e éd. 2018, pt. 199).
Mais la conception qu’une société se fait de la morale évolue dans le temps ;
le juge se doit de réceptionner cette évolution et de la traduire en jurispru-
dence (B. Fages, « Le respect des bonnes mœurs », in B. Fages et P. Fleury
(dir.), Le Lamy Droit du contrat, Wolters Kluwers, Lamy Droit civil, no 1194).

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126. Affaiblissement de la notion juridique de bonnes mœurs. – Or la

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libération des mœurs au cours des dernières décennies et l’importance
grandissante conférée à la protection de la vie privée ont eu pour corollaire
un affaiblissement considérable de la notion juridique de bonnes mœurs. En
témoigne le revirement de jurisprudence quant aux libéralités consenties
dans le dessein de perpétuer une relation adultère : jadis considérées comme
contraires aux bonnes mœurs (Cass. 1re civ., 25 janvier 1972, no 70-12.679, Bull.
civ. I, no 25, p. 22, Ph. Le Tourneau, D. 1972, p. 413), de telles conventions ne
sont désormais plus jugées illicites sur le terrain de la morale (Cass. ass. plén.,
29 octobre 2004, no 03-11.238, Bull. civ. Ass. plén., no 12, p. 27, obs. M. Lamarche,
RLDC 2004/11, no 466, désapprouvant une cour d’appel ayant prononcé la
nullité d’un legs accordé par un homme à sa maîtresse).
À ce jour, demeurent néanmoins proscrites, en ce qu’elles sont contraires
aux bonnes mœurs, les conventions visant à organiser la prostitution d’une
personne. En règle générale, de telles conventions sont du reste pénalement
sanctionnées (C. pén., art. 225-10, sous 3°, réprimant la mise à disposition
d’une ou plusieurs personnes des locaux, en sachant qu’elles s’y livreront à
la prostitution).

Licéité du contenu

§ 2. Un contenu contractuel certain

127. Une prestation déterminée et possible. – La certitude du contenu


contractuel visée à l’article 1128 du Code civil se décompose en deux exigences :
la prestation doit d’une part, être déterminée ou déterminable (A) ; elle doit
d’autre part, être possible (B).

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A. Une prestation déterminée ou déterminable
128. Exigence générale de détermination de la prestation. – Tel que
cela résulte de l’article 1163 alinéa 2 du Code civil, la prestation doit être
« déterminée ». Cette exigence se comprend aisément : le créancier est légitime
à connaître son dû avec précision, et le débiteur doit pouvoir savoir ce que l’on
est en droit d’attendre de sa part. À défaut d’être déterminée, la prestation
peut n’être que « déterminable », c’est-à-dire qu’elle peut se déduire des
stipulations contractuelles ou en considération des usages, sans nécessiter
un nouvel accord des parties (C. civ. art. 1163, al. 3).
En ce sens, a été considéré comme suffisamment déterminé un mobilier
vendu dans son ensemble, dès lors que « les objets entreposés dans le garde-
meubles pouvaient être facilement identifiés » (Cass. 1re civ., 16 juin 1964, Bull.
civ. I, no 322). Tel n’a en revanche pas été le cas d’une clause de mobilité géogra-
phique sur le territoire d’Alsace-Lorraine précisant que la zone de mobilité
pouvait « le cas échéant, être étendue en cas d’extension d’activité », conférant
ainsi à l’employeur le pouvoir d’en étendre unilatéralement la portée (Cass.
soc., 7 juin 2006, no 04-45.846, obs. M.-C. Escande-Varniol, D. 2006, p. 3041).
129. Exigence de détermination du prix. – La jurisprudence considérait
traditionnellement que l’exigence de détermination ne s’imposait pas au prix.
Celui-ci pouvait donc en principe être fixé unilatéralement par l’une des parties,
sous réserve de l’abus (Cass. ass. plén., 1er décembre 1995, no 93-13.688, Bull.
Ass. plén., no 9, p. 16 ; Cass. 1re civ., 14 juin 2000, no 98-14.438, Bull. civ. 2000, I,
no 184, p. 119).
Depuis la réforme du droit des contrats de 2016, le prix est soumis, en tant
que prestation (de nature monétaire), à l’exigence de détermination posée à
l’article 1163 du Code civil (Ph. Delebecque et Fr.-J. Pansier, Droit des obliga-
tions ; Contrat et quasi-contrat, LexisNexis, coll. Objectif droit, 8e éd. 2018, pt.
190). Le prix doit donc en principe être déterminé (ou déterminable) par
l’ensemble des parties, sous peine de nullité du contrat. Tel est notamment le
cas du contrat de vente, dont le prix doit être déterminé en toute hypothèse.
Cette règle est expressément rappelée à l’article 1591 du Code civil (sur la
question de la détermination du prix, en doctrine, voy. : C. Grimaldi, « La
fixation du prix », RDC 2017, p. 558 ; N. Molfessis, « Les exigences relatives aux
prix en droit des contrats », LPA 2000, no 90, p. 41 ; L. Vogel, « Plaidoyer pour
un revirement : contre l’obligation de détermination du prix dans les contrats
de distribution », D. 1995, chron. p. 155 ; L. Aynès, « Indétermination du prix
dans les contrats de distribution : comment sortir de l’impasse ? », D. 1993,
chron. p. 25 ; G. Virassamy et Ph. Le Tourneau, « Détermination du prix dans
les contrats-cadres de fourniture », CCC 1993, p. 1 ; D. Legeais, « La déter-
mination du prix d’achat des marchandises dans les contrats de franchise :

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l’espoir déçu », JCP E 1992, I, 135 ; M.-A. Frison-Roche, « L’indétermination du

Partie I • La formation du contrat


prix », RTD civ. 1992, p. 269 ; J. Ghestin, « L’indétermination du prix de vente
et la condition potestative », D. 1973, chron. p. 293).
130. Exceptions à l’exigence de détermination du prix. – Le principe de
détermination du prix des conventions connaît deux exceptions notables.
La première, posée à l’article 1164 du Code civil, prévoit qu’une partie peut
unilatéralement fixer le prix d’un contrat-cadre dès lors que cela a été convenu
à l’avance (au moyen par exemple, d’une clause dite de « prix catalogue »,
renvoyant au tarif en vigueur au jour de la commande : Cass. ass. plén.,
1er décembre 1995, no 91-15.999, reconnaissant la validité d’une telle clause
sous l’empire du droit antérieur).
La seconde exception, prévue à l’article 1165 du même Code, admet que le
créancier peut seul fixer le prix d’un contrat de prestation de service, à défaut
d’accord entre les parties avant son exécution.
Ces deux exceptions partagent un régime identique : la partie ayant unila-
téralement établi le prix aura la charge d’en motiver le montant en cas de
contestation par son cocontractant (C. civ. art. 1164, al. 1er et 1165, al. 1er). En
cas d’abus dans la fixation unilatérale du prix, deux sanctions sont ouvertes
au contractant victime : celui-ci pourra saisir le juge d’une demande tendant
à obtenir des dommages et intérêts ainsi que la résolution du contrat (C. civ.
art. 1164, al. 2 et 1165, al. 2).

B. Une prestation possible


131. Nullité du contrat portant sur une prestation impossible. – À peine
de nullité de la convention, les contractants doivent s’engager à fournir une
prestation « possible » (C. civ., art. 1163, al. 2). Pour emporter la nullité, la
prestation doit être absolument impossible, c’est-à-dire impossible erga omnes :
ni le contractant ni personne d’autre ne doivent être en mesure de fournir la
prestation. Cette impossibilité doit tenir, non pas à la personne du débiteur,
mais à la prestation elle-même ; elle doit être appréciée in concreto (V. déjà
à propos de l’ancien article 1130 du Code civil relatif à l’objet de l’obligation :
G. J. Martin et J.-B. Racine, « Contrats et obligations. – Objet du contrat », in
Encyclopédie du JurisClasseur : Civil Code, art. 1126 à 1130, LexisNexis, 2009, Fasc.
10 [Archives antérieures au 1er octobre 2016], pt. 15). Demeure donc valable,
le contrat portant sur une prestation impossible au regard des seules facultés
personnelles du débiteur (CA Paris, 4 juillet 1865, D.P. 1865, 2, p. 201 : un
peintre ayant promis de réaliser un portrait engage ainsi sa responsabilité et
ne peut soulever la nullité du contrat, en prétendant ne plus avoir l’inspiration
nécessaire pour accomplir sa prestation).

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En revanche, le contrat encourt la nullité lorsque la prestation fait l’objet
d’une interdiction légale : la prestation est impossible en tout état de cause (CA
Paris, 27 octobre 1989, obs. J. Honorat, Defrénois 1990, art. 34788, à propos de
l’achat d’actions d’une compagnie d’assurance française par un cessionnaire
étranger, opération qui était alors interdite par le Code des assurances). Dans
la même veine, la vente d’une chose appartenant à autrui est nulle (C. civ.,
art. 1599) : le vendeur ne peut transmettre la propriété d’une chose dont il
n’est pas lui-même propriétaire.
132. Prestations présentes ou futures. – Les prestations possibles ne sont
pas nécessairement « présentes ». L’exigence de « possibilité » ne s’oppose
pas à ce que la prestation soit « future » (C. civ., art. 1163, al. 1er). Il est ainsi
parfaitement possible de vendre un immeuble à construire. Le transfert de
propriété pourra alors s’opérer une fois l’achèvement de l’immeuble constaté
par acte authentique (C. civ., art. 1601-1). Est encore valable la constitution
d’une sûreté sur un bien futur et/ou afin de garantir une créance future
(C. civ., art. 2333 : le gage peut être constitué sur des biens mobiliers corporels,
« présents ou futurs » afin de garantir des créances « présentes ou futures » ;
C. civ., art. 2421, permettant la constitution d’une hypothèque conventionnelle
« pour sûreté d’une ou plusieurs créances, présentes ou futures »).

Certitude du contenu

Section II. Un contenu équilibré

133. Le défaut d’équivalence des prestations non sanctionné par


principe. – Depuis la réforme du droit des obligations de 2016, est inscrit
à l’article 1168 du Code civil, le principe selon lequel dans les contrats
synallagmatiques, le défaut d’équivalence des prestations n’est pas une cause
de nullité de la convention. En principe donc, l’équilibre des prestations
réciproques ne s’impose pas, tant qu’elles ont été acceptées hors de tout vice

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Partie I • La formation du contrat
du consentement. Autrement dit, un bien payé par l’acheteur en contrepartie
d’un prix inférieur à sa valeur demeure régulièrement acquis ; réciproquement,
une chose n’en est pas moins valablement vendue, lorsqu’elle est facturée par
le cédant au-dessus de sa valeur (V. antérieurement à la réforme : Cass. 1re
civ., 4 juillet 1995, no 93-16198 ; obs. J. Mestre, RTD civ. 1995, p. 881). C’est ici
reconnaître la possibilité légale de réaliser une bonne affaire.
Mais le même article réserve la possibilité pour le législateur de prévoir
des exceptions audit principe. Or de plusieurs tempéraments peuvent être
recensés tant en droit commun (§ 1), qu’en droit spécial (§ 2) des contrats,
sanctionnant ainsi, dans certaines circonstances, le déséquilibre du contenu
contractuel.

§ 1. Les règles de droit commun

134. Le déséquilibre significatif entre les droits et obligations dans les


contrats d’adhésion. – L’article 1171, alinéa 1er du Code civil, issu de la réforme
de 2016, prévoit que dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable
qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties
à la convention sera réputée non écrite (en doctrine, Voy. N. Blanc, « Contrat
d’adhésion et déséquilibre significatif après la loi de ratification », RDC 2018,
no 115, p. 20 ; G. Chantepie, « Le déséquilibre significatif entre droit commun
et droits spéciaux », JCP E 2018, no 25, p. 1336 ; C. Witz, « La nouvelle définition
du contrat d’adhésion et ses effets sur les clauses sources de déséquilibre
significatif », Rev. Lamy droit affaires, septembre 2018, no 140, p. 33).
Le domaine de cette règle est relativement limité, puisque l’alinéa second
de l’article 1171 indique que le déséquilibre n’est pas apprécié au regard de
« l’objet principal du contrat », « ni sur l’adéquation du prix à la prestation ».
Il faut en déduire que le déséquilibre porte sur les éléments accessoires du
contrat et pourra par exemple ressortir de clauses réservant certaines préro-
gatives à une seule des deux parties (telle que la possibilité unilatérale de
résilier ou modifier le contrat).
En outre, le déséquilibre significatif, au sens de l’article 1171, ne peut être
sanctionné qu’en tant qu’il affecte un « contrat d’adhésion ». Cette sanction
n’est en revanche pas envisageable en présence d’un contrat ayant fait l’objet
d’une négociation individuelle.
Le déséquilibre significatif n’est par ailleurs sanctionné que s’il vicie une
clause « non négociable ». Une clause déséquilibrée demeure ainsi valable
dès lors qu’elle a pu être individuellement négociée.
135. Sanction du caractère illusoire ou dérisoire de la contrepartie. – Aux
termes de l’article 1169 du Code civil, « un contrat à titre onéreux est nul lorsque,
au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui

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s’engage est illusoire ou dérisoire. » La validité du contrat, quel qu’en soit le
type, est ainsi conditionnée à l’existence d’une contrepartie minimale. Celle-ci
renvoie à ce qui est reçu par une partie en échange de sa propre prestation ;
il s’agit en d’autres mots de la contre-prestation, de l’objet de l’obligation du
cocontractant. La contrepartie doit être appréciée au moment de la formation
de la convention (V. antérieurement, sur le fondement de la cause du contrat :
Cass., 3e civ., 17 juillet 1996, no 19-432).
L’article 1169 vise deux hypothèses justifiant la nullité du contrat. La
première est celle de la contrepartie « illusoire », i.e. dépourvue de toute
existence en réalité, quand bien même la contrepartie serait apparente.
À titre d’exemple, encourt donc la nullité sur ce fondement, le contrat
de présentation d’une clientèle inexistante à un successeur (Cass., 1re civ.,
20 février 1973, no 71-13855), le contrat d’assurance couvrant un risque de
sinistre que l’assuré savait déjà réalisé (Cass. 1re civ., 4 novembre 2003,
no 01-14942), le contrat de franchise en vertu duquel le franchiseur ne trans-
met au franchisé aucun savoir-faire substantiel (Cass. com., 10 mai 1994,
no 92-15834).
La nullité du contrat peut encore être prononcée dès lors que la contre-
partie, quoiqu’existante, apparaît toutefois « dérisoire ». Tel sera tout particu-
lièrement le cas d’une vente à prix dérisoire (Cass. 3e civ., 16 novembre 2010,
no 09-17293 : pour une vente assortie d’une rente viagère dont les arrérages
étaient inférieurs aux revenus générés par la chose vendue). Néanmoins, la
vente à prix symbolique n’en demeure pas moins valable dès lors qu’existent
d’autres contreparties pour le vendeur (Cass. 3e civ., 3 mars 1993, no 91-15613,
note P.-Y. Gautier, RTD civ. 1994, p. 124 : la vente d’un terrain pour 1 franc
symbolique est jugée valable, dès lors que la vente se rattachait à un ensemble
contractuel plus global formant un tout indivisible et procurant au cédant u
avantage réel).
136. Sanction exceptionnelle de la lésion. – La lésion renvoie au préjudice
subi par une partie en raison du déséquilibre existant entre les prestations lors
de la formation du contrat. La lésion est une cause de nullité (ou de « rescision »)
dans un certain nombre de situations limitativement énumérées par la loi.
La lésion est principalement sanctionnée en matière de vente immobilière
lorsque le vendeur a été lésé de plus des 7/12e de la valeur réelle du bien vendu
(C. civ., art. 1674). Par exemple, si la valeur de l’immeuble s’élève à 1,2 million
d’euros, le vendeur ne pourra remettre en cause la vente que s’il est lésé d’une
somme supérieure à 700 000 euros : en d’autres termes, la rescision (nullité)
pour lésion ne sera admise que si le vendeur perçoit une somme inférieure
aux 5/12e de la valeur réelle du bien, soit en l’espèce, 500 000 euros.

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Partie I • La formation du contrat
À certaines conditions, la rescision pour lésion peut être également admise
lorsqu’elle affecte les contrats conclus par les mineurs (C. civ., art. 1149), ou
les majeurs protégés (C. civ., art. 435, 465 et 488).

Équilibre en droit commun

§ 2. Les règles de droit spécial

137. Sanction du déséquilibre contractuel par les droits de la


consommation et de la concurrence. – Le droit de la consommation prohibe
diverses clauses induisant un déséquilibre contractuel significatif au détriment
du consommateur (A). Le droit de la concurrence réprime quant à lui le fait de
soumettre son partenaire commercial à des conditions créant un déséquilibre
significatif dans les droits et obligations des parties (B).

A. La sanction du déséquilibre significatif en droit


de la consommation
138. Les clauses déséquilibrées, réputées non écrites. – Le droit de la
consommation interdit les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer
un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au
contrat, au détriment des consommateurs ; étant précisé que l’appréciation
du caractère déséquilibré ne porte ni sur la définition de l’objet principal
du contrat (ce choix relevant de la liberté contractuelle élémentaire) ni sur
l’adéquation du prix au bien vendu ou au service offert. Lorsqu’une clause
est ainsi jugée significativement déséquilibrée, elle est réputée non écrite
(C. consom., art. L 212-1). Cette sanction revient à considérer la seule clause
abusive comme n’ayant jamais été stipulée ; ce qui présente l’avantage de ne
pas affecter le contrat dans son entier, ses autres dispositions demeurant
ainsi opposables aux parties.

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139. Champ d’application ratione personae. – Le champ d’application ratione
personae de ce dispositif est restreint aux contrats conclus entre d’une part,
un professionnel et d’autre part, un consommateur ou non professionnel. Ces
diverses qualités sont définies à l’article liminaire du Code de la consommation.
Ainsi, un « consommateur » au sens de ce texte s’entend de toute personne
physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité
commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole.
Le « non professionnel » renvoie quant à lui à toute personne morale qui
n’agit pas à des fins professionnelles.
Le « professionnel » doit être enfin compris comme toute personne physique
ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son
activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris
lorsqu’elle agit au nom ou pour le compte d’un autre professionnel.
140. Champ d’application ratione personae. – Le domaine ratione materiae
du dispositif est relativement large puisqu’il s’applique à tout contrat (conclu
entre un professionnel et un consommateur/non professionnel) quel qu’en
soit l’objet, la forme ou le support : facture, bon de livraison, billet ou ticket,
bon de commande, etc. ; peu important que la clause litigieuse ait été négociée
librement ou non (C. consom., art. L 212-1, al. 4).
141. Liste de clauses noires, irréfragablement présumées abusives.
– L’article R. 212-1 du Code de la consommation énumère les clauses dites
« noires », c’est-à-dire celles irréfragablement présumées déséquilibrées. Tel
sera ainsi le cas d’une clause :
• constatant l’adhésion du consommateur à des clauses qui ne figurent pas
dans l’écrit qu’il accepte ;
• réservant au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses
du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à
livrer ou du service à rendre ;
• contraignant le consommateur à exécuter ses obligations alors que, récipro-
quement, le professionnel n’exécuterait pas ses obligations de délivrance
d’un bien ou de fourniture d’un service ;
• supprimant le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur
en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses
obligations ;
• reconnaissant au professionnel le droit de résilier discrétionnairement le
contrat, sans reconnaître le même droit au consommateur ;
• subordonnant dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation par le
consommateur au versement d’une indemnité au profit du professionnel.

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142. Liste de clauses grises, simplement présumées abusives. – D’autres

Partie I • La formation du contrat


clauses dites « grises » ne souffrent que d’une présomption simple d’illicéité.
Elles seront ainsi présumées significativement déséquilibrées et de ce fait
abusives, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire. Une liste
en est dressée à l’article R. 212-1 du Code de la consommation. Il s’agit entre
autres, des clauses :
• prévoyant un engagement ferme du consommateur, alors que l’exécution
des prestations du professionnel est assujettie à une condition potestative,
i.e. dont la réalisation dépend de sa seule volonté ;
• imposant au consommateur qui n’exécute pas ses obligations une indem-
nité d’un montant manifestement disproportionné ;
• reconnaissant au professionnel la faculté de résilier le contrat sans préavis
d’une durée raisonnable ;
• soumettant la résolution ou la résiliation du contrat à des conditions
ou modalités plus rigoureuses pour le consommateur que pour le
professionnel ;
• limitant indûment les moyens de preuve à la disposition du consomma-
teur ; ou encore ;
• supprimant l’exercice d’actions en justice et des voies de recours par le
consommateur.

B. La sanction du déséquilibre significatif en droit de la concurrence


143. Équilibre des relations commerciales. – L’article L. 442-1 2° du Code
de commerce prohibe le fait, par toute personne exerçant des activités de
production, de distribution ou de services « de soumettre ou de tenter de
soumettre l’autre partie à des obligations créant un déséquilibre significatif
dans les droits et obligations des parties » (en doctrine, Voy. M. Behar-Touchais,
« Un déséquilibre significatif à deux vitesses », JCP G 2015, doctobre 603 ;
G. Parléani, « Le devenir du déséquilibre significatif », AJCA 2014, p. 104 ;
M. Chagny, « L’article L. 442-6, I, 2°, du Code de commerce entre droit du
marché et droit commun des obligations », D. 2011, p. 392 ; M.-V. Jeannin, « Le
déséquilibre significatif ou une atteinte significative à la liberté contractuelle ? »,
LPA, 6 octobre 2011, p. 15 ; N. Mathey, « Du déséquilibre significatif… », CCC
no 11, novembre 2011, repère 10 ; F. Buy, « Entre droit spécial et droit commun :
l’article L. 442-6, I, 2° du code de commerce », LPA 17 décembre 2008, no 252,
p. 3). Le cocontractant victime peut alors demander réparation de son préjudice
et obtenir ainsi « la restitution des avantages indus », afin de rétablir l’équilibre
ainsi rompu (C. com., art. L 442-4, al. 2).
Contrairement au dispositif de prohibition des clauses abusives propre au
droit de la consommation (V. supra no 138 s.), les dispositions de l’article L. 442-1
du Code de commerce ne sont applicables qu’en présence de « partenaires

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commerciaux », ce qui suppose l’existence d’une relation continue de nature
économique, exclusive de la qualité de consommateur. Ce texte a ainsi
tout particulièrement vocation à régir les relations entre fournisseurs et
distributeurs.
144. Identification du déséquilibre significatif au sens de l’article L. 442-1
du Code de commerce. – La (tentative de) soumission doit être comprise comme
le fait de (tenter de) faire peser sur un partenaire commercial des obligations
injustifiées en raison d’un rapport de force économique déséquilibré (CA Paris,
18 septembre 2013, no 12/03177), sans pour autant s’identifier à une contrainte
irrésistible (CA Paris, 29 octobre 2014, no 13/11059).
Les obligations ainsi imposées seront jugées significativement déséquili-
brées dès lors que le partenaire commercial victime de la pratique restrictive
ne reçoit qu’une contrepartie dont la valeur est disproportionnée au regard
de la valeur du service rendu.
Les clauses tarifaires peuvent dès lors tout particulièrement traduire un
déséquilibre significatif. Dans l’affaire Ikea Supply, la Cour d’appel de Paris
estime ainsi qu’il convient « d’examiner si les prix fixés entre des parties
contractantes créent ou ont créé, un déséquilibre entre elles » (CA Paris,
23 mai 2013, no 12/01166).
Les juges ont également pu considérer qu’une clause de retour d’inven-
dus instaurait un déséquilibre significatif dès lors qu’elle conduisait à faire
peser sur le fournisseur, sans aucune contrepartie, la totalité de la charge
des invendus et le coût de la reprise des produits alors que le distributeur
contrôlait la totalité des conditions commerciales de la revente telles que
le montant du prix de revente, et les opérations promotionnelles (CA Paris,
4 juillet 2013, no 12/07651).

Équilibre en droit spécial

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Partie II
L’exécution du contrat

145. Obligation d’exécuter les prestations contractuelles, sous peine


de sanction. – Valablement formé, le contrat produit des effets de droit,
tout particulièrement celui d’obliger les parties à exécuter les prestations
auxquelles elles se sont engagées (Chapitre I). En cas de manquement de
l’un des contractants à son obligation, l’inexécution pourra faire l’objet de
sanctions (Chapitre II).

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Chapitre I
Les effets du contrat

146. Qualité de « partie » conférée aux contractants d’origine. – Aux


termes de l’article 1103 du Code civil, « les contrats légalement formés tiennent
lieu de loi à ceux qui les ont faits ». Il s’en déduit un principe suivant lequel le
contrat ne produit a priori d’effets qu’à l’égard des parties. Le contrat devrait
être en revanche, sans effet à l’endroit des tiers.
Mais afin de bien comprendre la portée de ce principe, encore faut-il au
préalable identifier avec précision les personnes pouvant revêtir la qualité
de « parties », ainsi obligées par le contrat. Cette qualité doit à l’évidence,
être avant tout reconnue aux contractants, i.e. les personnes mêmes qui ont
conclu le contrat. Ces parties originaires sont précisément celles visées par
l’article 1103 : il s’agit de « ceux qui ont fait [le contrat] ». Il est à cet égard indif-
férent que les parties aient personnellement conclu l’acte ou qu’elles aient été
représentées lors de la conclusion : seul le mandant (et non le mandataire)
sera contractuellement engagé par le contrat conclu en son nom, pour autant
que le représentant n’a pas outrepassé son pouvoir. L’intervention d’un tiers
dans la rédaction de l’acte ou à l’occasion des pourparlers, à l’exemple du
notaire, est une circonstance insuffisante pour conférer à celui-ci la qualité
de partie contractante, y compris s’il appose sa signature sur l’instrumentum
(Voy. G. Chantepie, « Contrat : effets », in Rép. civ. Dalloz, 2018, pt. 81 et 82).
147. Acquisition de la qualité de partie postérieurement à la conclusion
du contrat. – La qualité originaire de partie contractante peut être transmise
en cours d’exécution de la convention.
Tel sera tout d’abord le cas dans l’hypothèse d’une transmission du patri-
moine de la partie contractante à son successeur. L’ancien article 1122 du
Code civil exprimait cette règle de manière très explicite : « on est censé avoir
stipulé pour soi et pour ses héritiers et ayants cause, à moins que le contraire
ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de la convention. »
Quoique l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du
droit des contrats n’ait pas repris cette disposition, cette règle subsiste sans nul
doute par l’effet de divers textes de droit spéciaux (du même avis : G. Chantepie,

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fasc. préc., pt. 84). La disparition de la personne (physique) du contractant
lors de son décès ouvre sa succession (C. civ., art. 720), et emporte trans-
mission de sa qualité de partie aux héritiers réputés continuer la personne
du de cujus. Il en ira de même en cas de disparition d’une personne morale
contractante, à l’occasion par exemple de la fusion-absorption d’une société
(C. com., art. L. 236-1).
La qualité de partie contractante peut être également acquise par le cession-
naire du contrat. En effet, les conventions peuvent faire l’objet d’une cession,
telle opération ayant pour effet de remplacer l’un des contractants initiaux
par une autre personne, et de transférer à celle-ci la qualité de partie. La loi
organise elle-même divers dispositifs de cession ; ainsi de la cession (légale)
du contrat d’assurance (C. assur., art. L. 121-10) et du contrat de bail (C. civ.,
art. 1743).
L’article 1216 du Code civil admet également la cession conventionnelle de
contrat, très usitée en pratique et validée par la jurisprudence (Com. 6 mai
1997, no 94-16.335 et 95-10.252, obs. M. Billiau et Chr. Jamin, D. 1997, p. 588),
pourvu que trois conditions soient respectées : le cédant doit obtenir l’accord
de son cocontractant, le cédé (i) ; à peine de nullité, la cession doit ensuite
être constatée par écrit (ii) ; enfin, la cession ne produira effet à l’égard du
cédé qu’à compter de la notification de l’opération à ce dernier, ou lorsqu’il
en aura pris acte (iii).
148. Effets du contrat sur les parties et les tiers. – À l’égard des parties
ainsi identifiées, le contrat produit des effets de droit. La loi contractuelle
s’impose désormais à elles. Par la convention, ces dernières se sont ainsi
mutuellement obligées, ce qui traduit la force obligatoire du contrat à l’égard
des parties (Section I). Mais à l’endroit des tiers, le contrat est en principe sans
effet. Autrement dit, le contrat ne comporte qu’un effet relatif (Section II).

Section I. La force obligatoire du contrat à l’égard


des parties

149. Effet de contraintes sur les parties. – La force obligatoire du contrat se


traduit avant tout par un « effet de contrainte » (selon l’expression de Jean-Luc
Aubert et François Collart Dutilleul : Le contrat. Droit des obligations, Dalloz,
coll. Connaissance du droit, 5e éd., 2017, p. 118, plus généralement, sur la
force obligatoire en doctrine, Voy. J.-S. Borghetti, « La force obligatoire du
contrat », Dr. & patr., mai 2016, p. 69 ; D. Fenouillet, « Les effets du contrat entre
les parties », RDC 2006, p. 67 ; L. Aynès, « À propos de la force obligatoire du
contrat », RDC 2003, p. 323 ; Ph. Brun, « Le droit de revenir sur son engagement »,
Dr. & patr. mai 1998, p. 78 ; H. Lécuyer, « Redéfinir la force obligatoire du

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contrat », LPA 6 mai 1998, p. 44), en ce que l’acte met un certain nombre

Partie II • L’exécution du contrat


d’obligations à la charge des parties (§ 1). Elle s’exprime également à travers
le principe d’intangibilité du contrat, en vertu duquel une partie seule ne peut
modifier ou éteindre le contrat (§ 2).

§ 1. Des obligations contractuelles mises à la charge


des parties

150. Obligations stipulées par les parties ou déduites par le juge. – Le


contrat est le fruit d’un accord de volonté des parties, ayant choisi de mettre
mutuellement à leur charge un certain nombre d’obligations. Les parties sont
ainsi libres de stipuler des obligations de natures très variées (A). Mais à la
lecture des termes du contrat, le juge peut également parfois déduire lui-même
diverses obligations subséquentes, auxquelles seraient tenues les parties (B).

A. Nature des obligations stipulées par les parties


151. Obligations de donner, de faire, de ne pas faire. – Pour rappel,
« l’obligation a pour objet une prestation présente ou future », qui doit être
« possible et déterminée ou déterminable » (C. civ., art. 1163 ; sur les conditions
de validité du contenu contractuel, Voy. supra no 110 s.). Les obligations
contractuelles peuvent revêtir différentes natures. L’ancien article 1126 du
Code civil distinguait ainsi notamment les obligations de donner, de faire et
de ne pas faire (« tout contrat a pour objet une chose qu’une partie s’oblige à
donner, ou qu’une partie s’oblige à faire ou à ne pas faire. »
L’obligation de donner se comprend comme l’obligation de transférer la
propriété d’une chose ; elle se retrouve tout particulièrement dans les contrats
de vente ou de donation. L’obligation de faire renvoie à l’obligation positive
d’accomplir une prestation donnée (ainsi de l’obligation pour l’employeur de
verser un salaire à son salarié, ou de celle pesant sur ce dernier d’exécuter
sa mission). L’obligation de ne pas faire s’apparente enfin à un devoir d’abs-
tention, par lequel le débiteur s’interdit d’accomplir un acte donné (telle une
obligation de non-concurrence).
Cette distinction n’a toutefois pas été reprise par la réforme du droit
des contrats de 2016, les dispositions de l’article 1126 du Code civil ayant
été abrogées. Cette catégorisation n’a donc certes plus valeur légale, mais
conserve à tout le moins une valeur doctrinale (à ce sujet, nombre d’auteurs
avaient exprimé leur critique à l’endroit tout particulièrement de l’obligation
de donner, considérée comme une simple déclinaison de l’obligation de faire,
estimant dès lors que seules les catégories d’obligation de faire et de ne pas faire
devaient être opposées : A.-S. Lucas-Puget, op. cit., no 546 ; M. Fabre-Magnan,

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« Le mythe de l’obligation de donner », RTD civ. 1996, p. 85, C. Saint-Alary-
Houin, « Réflexions sur le transfert différé de la propriété immobilière », in
Mélanges offerts à Pierre Raynaud, 1985, Dalloz, p. 733).
152. Obligation de résultat, obligation de moyen. – La doctrine distingue
également de longue date (R. Demogue, Traité des obligations en général, t. 5,
éd. Arthur Rousseau, 1925, no 1237) les obligations de résultat des obligations
de moyen. Le débiteur d’une obligation de résultat est tenu à l’obtention d’un
résultat précis et déterminé (tel est par exemple le cas du transporteur,
obligé d’amener les voyageurs à destination : Cass. civ. 1re, 13 mars 2008,
no 05-12.551, obs. G. Viney, D. 2008, p. 1582). Lorsque pèse sur le débiteur une
obligation de moyen, celui-ci s’engage uniquement à mettre en œuvre tous
les moyens en vue de parvenir à un certain résultat (pèse ainsi généralement
sur le médecin une obligation de moyen à l’égard de son patient : Cass. crim.,
22 novembre 2016, no 15-87.650).
La distinction n’est pas sans enjeu au regard de la responsabilité du débiteur :
en effet, selon qu’il était tenu d’une obligation de résultat ou de moyen, sa
responsabilité pourra être engagée s’il est établi, respectivement, que le
résultat promis n’a pas été atteint, ou que le débiteur a commis une faute en
ne mettant pas en œuvre tous les moyens promis.
La réforme du droit des contrats de 2016 n’a pas formellement consacré
la distinction entre les obligations de moyen et de résultat, qui n’en conserve
pas moins une valeur doctrinale et prétorienne.
153. Obligation pécuniaire, obligation en nature. – À titre subsidiaire,
deux autres catégories d’obligations pourront encore être distinguées, à
savoir d’une part, les obligations pécuniaires et, d’autre part, les obligations
en nature. Les premières ont pour objet le versement d’une certaine somme
d’argent. Les secondes renvoient aux obligations d’accomplir une prestation
donnée (sur cette distinction, voy. « Droit des obligations. – Introduction », in
Encyclopédie du JurisClasseur : Roulois, LexisNexis, 2017, Fasc. 1450).

B. Obligations déduites des stipulations par le juge


154. Obligations déduites de l’équité, des usages, ou de la loi. – Les
obligations mises à la charge des parties ne sont pas uniquement celles
stipulées de manière expresse dans l’acte.
L’article 1194 du Code civil prévoit en effet que « les contrats obligent non
seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que leur
donnent l’équité, l’usage ou la loi. » Cette disposition offre ainsi au juge la
possibilité de déduire certaines obligations des usages (usages commerciaux
ou notariaux par exemple), de l’équité des obligations contractuelles, ou de
la loi – ce qui renvoie aux règles légales dites « supplétives », i.e. applicables

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Partie II • L’exécution du contrat
à défaut de stipulation contraire insérée dans la convention par les parties ;
à l’exemple du transfert de propriété de la chose vendue réalisé au jour de la
conclusion du contrat de vente, à moins que les parties aient prévu une date
différente pour la réalisation du transfert de propriété (C. civ. art. 1583).
155. Illustrations : obligations de sécurité et d’information. – La
jurisprudence a reconnu de longue date, l’existence d’une obligation
(contractuelle) de sécurité inhérente au contrat de transport, suivant laquelle
le transporteur est tenu de mener le(s) voyageur(s) sain et sauf à destination
(Cass. civ., 21 novembre 1911, note Ch. Lyon-Caen S. 1912, 1, p. 73). Cette
obligation de sécurité a ensuite été transposée en présence d’autres types
de contrat (contrats de bail, contrats de travail, contrats d’hôtellerie : Voy.
G. Chantepie, fasc. préc., pt. 48).
Outre l’obligation (légale) d’information précontractuelle (sur l’obliga-
tion d’information durant les pourparlers, Voy. supra no 25 s.), la jurispru-
dence a encore retenu l’existence d’une obligation générale d’information à
la charge des parties en cours d’exécution du contrat (Cass. civ. 29 mai 1951,
Bull. civ. I, no 162 ; Cass. civ. 1re, 4 avril 1995, no 93-13.326, obs. J. Mestre, RTD
civ. 1996, p. 384, à propos de l’obligation d’information du médecin à l’égard
de son patient quant aux risques attachés à une opération chirurgicale).

Obligations contractuelles des parties

§ 2. L’intangibilité du contrat

156. Intangibilité du contrat à l’égard des parties et du juge. – L’un des


corollaires de la force obligatoire du contrat est le principe de son intangibilité.
Ce principe postule qu’une partie ne peut modifier ou éteindre le contrat
seule. Toute modification ou révocation du contrat suppose un accord de
volonté de l’ensemble des parties. Par dérogation, un pouvoir de révocation

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ou de modification unilatérale du contrat peut être néanmoins reconnu à une
partie, dans certaines situations spécifiques (A). Exceptionnellement, le juge
peut également être investi d’un pouvoir semblable (B).

A. L’intangibilité du contrat à l’égard des parties


157. Possibilités restreintes de modifier ou révoquer unilatéralement le
contrat. – S’il est en principe interdit pour une partie de modifier (1) ou de
révoquer (2) seule le contrat, certaines exceptions de nature contractuelle
ou légale peuvent toutefois reconnaître une telle prérogative au profit d’une
partie contractante.

1. Possibilité restreinte de modifier unilatéralement le contrat


158. Rédaction d’un avenant. – Par principe, une partie ne peut à elle
seule modifier le contenu contractuel. La modification unilatérale du contrat
est ainsi sans effet (Cass. soc., 12 février 2014, no 12-23.051, obs. P. Lokiec et
J. Porta, D. 2014, p. 1115 ; Cass. civ. 3e, 27 septembre 2006, no 05-13.808, Bull.
civ. III, no 189).
L’article 1193 du Code civil dispose ainsi que « les contrats ne peuvent être
modifiés […] que du consentement mutuel des parties ». Il est ainsi parfaite-
ment loisible aux parties de s’accorder sur une modification des stipulations
originelles du contrat. Il conviendra alors de conclure un nouveau contrat
communément appelé « avenant », soumis aux conditions communes de
validité des contrats. Cette modification sera éventuellement initiée par une
clause de renégociation ou de hardship, insérée au sein du contrat initial, et
contraignant les parties à négocier une adaptation de la convention en cas
de changement de circonstances.
159. Clause de révision (unilatérale). – Au lieu de soumettre la modification
du contrat à la rédaction d’une nouvelle convention, les parties peuvent décider
ab initio d’insérer une « clause de révision » dans le contrat d’origine. Ces
clauses sont très variées. Elles peuvent réserver à une partie le soin d’établir
ou de modifier unilatéralement un élément du contrat (l’article 1164 du Code
civil admet ainsi que « dans les contrats cadre, il [puisse] être convenu que le
prix sera fixé unilatéralement par l’une des parties, à charge pour elle d’en
motiver le montant en cas de contestation »). Il est toutefois notable que ce
type de clause est expressément interdite dans les contrats conclus entre un
professionnel et un consommateur (C. consom., art. R. 212-1, sous 3°).
Les clauses de révision peuvent également prévoir une modification automa-
tique du contrat. Tel est notamment le cas des clauses d’indexation, prévoyant
que l’un des éléments du contrat, en particulier le prix, pourra varier en
fonction d’un facteur convenu, par exemple, un indice.

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2. Possibilité restreinte de révoquer unilatéralement le contrat

Partie II • L’exécution du contrat


160. Principe d’irrévocabilité unilatérale du contrat et mutuus
dissensus. – De même qu’il prohibe la modification unilatérale du contrat,
l’article 1193 du Code civil interdit à une partie seule d’anéantir la convention ;
suivant ce texte, la révocation ne peut en principe être que mutuelle : « les
contrats ne peuvent être […] révoqués que du consentement mutuel des
parties. » Est ainsi admis « l’accord révocatoire » ou mutuus dissensus, soit
la convention par laquelle l’ensemble des parties consentent à la révocation
du contrat qu’elles ont conclu antérieurement (A. Siri, Le mutuus dissensus,
Notion – Domaine – Régime, Presses Universitaires d’Aix-Marseille, 2015).
Les parties peuvent néanmoins convenir à l’avance d’un mécanisme de
révocation unilatérale du contrat en stipulant une clause de dédit. Ce type
de clause prévoit qu’une partie peut renoncer à exécuter le contrat en contre-
partie d’une somme (le « dédit ») versée à l’autre partie.
161. Causes de révocation unilatérale prévues par la loi. – L’article 1193
du Code civil admet également qu’une partie puisse révoquer unilatéralement
le contrat « pour les causes que la loi autorise ». Diverses causes légales de
révocation peuvent être ainsi recensées. L’article 1211 du même Code permet
tout particulièrement à chacune des parties à un contrat à durée indéterminée
d’y mettre fin unilatéralement et à tout moment, pourvu que soit respecté un
certain délai de préavis. La loi du 6 juillet 1989 reconnaît plus spécifiquement
une telle faculté à tout locataire d’un immeuble d’habitation (loi no 89-462 du
6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification
de la loi no 86-1290 du 23 décembre 1986, JORF du 8 juillet 1989, art. 15).

B. L’intangibilité du contrat à l’égard du juge


162. Rejet puis reconnaissance de la révision judiciaire pour imprévision.
– Une question longtemps débattue a été celle de la possibilité ouverte au juge
de modifier ou d’anéantir le contrat en cas de survenance d’un évènement
imprévisible affectant l’équilibre du contrat en cours d’exécution (sur la révision
judiciaire pour imprévision en doctrine, Voy. C.-E. Bucher, « Le traitement
des situations d’imprévision dans l’ordonnance : il manque la notice », CCC
no 4, avril 2016, doss. 6 ; Th. Revet, « Le juge et la révision du contrat », RDC
2016, p. 373 ; Ph. Stoffel-munck, « L’imprévision et la réforme des effets du
contrat », RDC hors-série, avril 2016, p. 30 ; J.-F. Fédou, « Le juge et la révision
du contrat », RDC no 2, 2016, p. 382 ; J. Magnan De Bornier, Essai sur la théorie
de l’imprévision, thèse de doctorat en Droit, Université de Montpellier, 1924).
Longtemps refusée en jurisprudence (1), cette faculté a finalement été accordée
au juge à l’occasion de la réforme du droit des contrats de 2016 (2).

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1. Solution antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 :
rejet de la révision judiciaire pour imprévision
163. La solution posée par l’arrêt Canal de Craponne. – L’équilibre du
contrat en cours d’exécution peut être affecté par de nombreux évènements
imprévisibles : inflation, altération du prix des matières premières,
augmentation des taux d’intérêt etc. Jusqu’à très récemment encore, la
jurisprudence écartait pourtant toute possibilité pour le juge de réviser le
contrat dans une telle hypothèse. Cette solution avait été posée par la Cour de
cassation dans le célèbre arrêt dit Canal de Craponne (Cass. civ., 6 mars 1876,
obs. A. Giboulot, D. 1876, 1, p. 193).
Les circonstances de l’affaire et le raisonnement adopté par la Cour de
cassation dans cet arrêt méritent que l’on s’y intéresse plus avant. En l’espèce,
Adam de Craponne s’était engagé à construire et gérer un canal d’irrigation,
destiné à approvisionner en eau les habitations de la commune de Pelissanne,
en contrepartie d’une redevance de 3 sols par carteirade (190 ares), pour
l’entretien et la fourniture de l’eau ; conditions fixées par deux conventions
conclues en 1560 et 1567. Au xixe siècle néanmoins, les héritiers du construc-
teur avaient considéré que la redevance n’était plus suffisante pour couvrir les
frais d’entretien du canal, en raison notamment de la dépréciation monétaire.
Ils avaient donc formé une demande de révision des contrats auprès de la
juridiction civile.
Par un arrêt du 31 décembre 1873, la Cour d’appel d’Aix avait accueilli la
demande et rehaussé la redevance à 30 centimes de 1834 à 1874, puis à 60
centimes à partir de 1874. Les habitants de la commune de Pelissanne, débiteurs
du paiement de la redevance, avaient alors formé un pourvoi en cassation
pour contester cette révision judiciaire, considérée comme contraire à la
force obligatoire du contrat fondée sur l’ancien article 1134 du Code civil.
Mais la haute juridiction refusait, au visa de l’article 1134 du Code civil,
toute possibilité pour le juge de modifier le contrat légalement formé. Il n’était
ainsi pas permis aux tribunaux de s’immiscer dans le contrat, nonobstant le
déséquilibre survenu en raison des circonstances.
Suivant les termes de la Cour de cassation, la force obligatoire des contrats
consacrée par l’article 1134 était en effet « générale et absolue », si bien que
« dans aucun cas, il n’appart[enait] aux tribunaux […] de prendre en considé-
ration le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties
et ainsi substituer des clauses nouvelles à celles qui [avaient] été librement
acceptées par les contractants ». Par conséquent, « en élevant […] la redevance
d’arrosage qui était alors fixée à 3 sols par les conventions de 1560 et 1567, et
sous prétexte que cette redevance n’était plus du tout en rapport avec les frais
d’entretien du canal, l’arrêt attaqué a formellement violé l’article 1134 ci-des-
sus visé ». La Cour de cassation avait donc cassé et annulé l’arrêt d’appel.

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Partie II • L’exécution du contrat
La logique sous-jacente à cette jurisprudence est de réserver aux parties
le soin de prévoir les aléas du temps et d’anticiper un éventuel bouleverse-
ment des conditions contractuelles. Il est en effet parfaitement loisible aux
contractants de stipuler une clause de révision, permettant une modification
du contrat en cours d’exécution, ou une clause de hardship, ouvrant la possi-
bilité d’une renégociation des conditions contractuelles (voy. supra no 158).
164. Tempéraments légaux et jurisprudentiels. – De rares et relatifs
tempéraments à la solution posée dans l’arrêt Canal de Craponne peuvent
être recensés dans la loi ou la jurisprudence. Ainsi le législateur avait-il par
exemple autorisé la résolution de contrats conclus avant la première guerre
mondiale en raison du changement de circonstances affectant l’équilibre
des conventions (loi du 21 janvier 1918, dite « Failliot » relative aux marchés
à livrer et autres contrats commerciaux conclus avant la guerre, JORF du
23 janvier 1918, art. 2 : « Les marchés et contrats [commerciaux] peuvent être
résolus sur la demande de l’une quelconque des parties, s’il est établi qu’à raison
de l’état de guerre l’exécution des obligations de l’un des contractants entraînera
des charges ou lui causera un préjudice dont l’importance dépasserait de
beaucoup les prévisions qui pouvaient être raisonnablement faites à l’époque
de la convention »).
Par ailleurs, à défaut de se reconnaître un véritable pouvoir de révision
judiciaire, les juges avaient quelquefois imposé aux parties une obligation
de renégociation, tiré du principe de bonne foi contractuelle (Cass. com.,
24 novembre 1998, no 96-18.357, obs. J. Mestre, RTD civ. 1999, p. 98, D. Mazeaud,
Defrénois 1999, p. 371 ; Cass. com., 3 novembre 1992, no 90-18.547, note J. Mestre,
RTD civ. 1993, p. 124).

2. Solution retenue par l’ordonnance du 10 février 2016 :


consécration de la révision judiciaire pour imprévision
165. Changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du
contrat. – La réforme du droit des obligations met un terme à une solution
vielle de plus d’un siècle, posée dans l’arrêt Canal de Craponne, et consacre la
possibilité d’une révision judiciaire du contrat pour imprévision. L’article 1195
du Code civil dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 10 février 2016 en
admet ainsi la possibilité. La révision judiciaire n’est toutefois qu’une solution
supplétive, encadrée par plusieurs conditions.
Cette solution n’est tout d’abord envisageable qu’en présence d’un « change-
ment de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat ».
L’ordonnance reste cependant muette quant à l’appréciation du critère de
l’imprévisibilité. À cet égard, il n’est pas interdit d’opérer un rapprochement
avec les éléments de définition de la force majeure telle qu’envisagée par
l’article 1218 du Code civil ; et de concevoir ainsi l’imprévisibilité comme un
évènement qui ne pouvait être « raisonnablement prévu » par les parties,

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apprécié en considération de la soudaineté et de la spécificité de l’évène-
ment considéré, ou de la probabilité de sa survenance (Voy. Fr. Chénédé, Fr.
Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Les obligations, Dalloz, coll. Précis, 12e éd.,
2018, no 582 ; G. Chantepie, fasc. préc., pt. 71).
166. Exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas
accepté d’en assumer le risque. – L’article 1195 alinéa 1er soumet également
la révision du contrat à ce que la survenance de circonstances imprévisibles
ait rendu l’exécution du contrat « excessivement onéreuse » pour l’une des
parties ; à condition toutefois que cette dernière n’ait pas explicitement
accepté d’en assumer le risque. Le critère de l’onérosité excessive devrait être
apprécié de manière non pas subjective mais objective, au regard de l’équilibre
initialement convenu par les parties. En ce sens, l’onérosité pourrait être ainsi
jugée excessive dès lors qu’une évolution conjoncturelle conduit à alourdir
considérablement la charge pesant sur l’une des parties, peu important à
cet égard, que celle-ci soit encore en mesure de l’assumer au regard de ses
capacités personnelles (de cet avis : G. Chantepie, fasc. préc., pt. 72).
167. Révision judiciaire du contrat en cas d’échec ou de refus de la
renégociation. – Dès lors que l’ensemble de ces conditions sont réunies,
l’article 1195 alinéa 1er permet à la partie pour laquelle l’exécution du contrat
est devenue excessivement onéreuse de demander une renégociation des
termes à son cocontractant. Le même article précise que durant cette phase
amiable, ladite partie doit pour autant continuer à exécuter ses obligations.
La renégociation demandée par une partie peut alors être acceptée ou
refusée par son cocontractant. Si ce dernier accepte de rentrer en pourpar-
lers, les parties pourront, à l’issue de négociations fécondes, réviser le contrat
par le biais d’un avenant.
Le second alinéa précise toutefois que dans l’hypothèse d’un échec ou
d’un refus de la renégociation, les parties pourront convenir de la résolu-
tion du contrat, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à
son adaptation.
Faute d’un accord dans un délai raisonnable, une partie seule peut égale-
ment demander au juge de « réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et
aux conditions qu’il fixe. » Le texte ouvre donc au juge une option : réviser ou
anéantir le contrat. Les tribunaux ne devraient pourtant jouir d’une telle alter-
native que dans la mesure où les parties ont formulé une demande (principale
et/ou reconventionnelle) à la fois en révision ou en résolution. Si le deman-
deur ne prétend qu’à la révision du contrat, le juge ne devrait pas pouvoir
y mettre fin, et réciproquement (Voy. Th. Revet, « Le juge et la révision du
contrat », RDC no 2, 2016, p. 373).

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L’intangibilité du contrat

Partie II • L’exécution du contrat


Section II. L’effet relatif du contrat à l’égard des tiers

168. Principes et tempéraments de l’effet relatif des contrats. – Le contrat


n’a pas d’effet obligatoire à l’égard des tiers (sur l’effet relatif, en doctrine, Voy.
M. Bacache, « Relativité de la faute contractuelle et responsabilité des parties
à l’égard des tiers », D. 2016, p. 1454 ; D. Mazeaud, « Le contrat et les tiers :
nouvelle leçon, nouvelle présentation », in Leçons du Droit Civil – Mélanges
en l’honneur de François Chabas, Bruylant 2011, p. 605 ; L. Aynès, « Les effets
du contrat à l’égard des tiers », RDC no 1, 2006, p. 63 ; J.-L. Goutal, Essai sur le
principe de l’effet relatif du contrat, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 171, 1981 ; Y. Flour,
L’effet des contrats à l’égard des tiers en droit international privé, thèse de doctorat
en Droit, Université Paris II, 1977 ; S. Calastreng, La relativité des conventions,
thèse de doctorat en Droit, Université de Toulouse, 1939 ; A. Weill, Le principe
de la relativité des conventions en droit privé français, thèse de doctorat en Droit,
Université de Strasbourg, 1938 ; R. Savatier, « Le prétendu principe de l’effet
relatif des contrats », RTD civ. 1934, p. 525). Les tiers ne pourront donc pas se
voir contraints d’exécuter un contrat auquel ils ne sont pas parties, ni exiger
son exécution de la part des véritables contractants. Ce principe de l’effet relatif
du contrat (§ 1) connaît cependant un certain nombre de tempéraments (§ 2).

§ 1. Principe de l’effet relatif du contrat

169. Double aspect du principe de l’effet relatif. – Le principe de l’effet


relatif du contrat prend racine dans l’adage latin res inter alios acta, aliis nec nocet
nec prodest (« une chose faite entre autres ne nuit ni ne profite à autrui »). En
droit positif, le principe est énoncé très explicitement à l’article 1199 alinéa 2
du Code civil : « les tiers ne peuvent ni demander l’exécution du contrat ni se
voir contraints de l’exécuter ».

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Le principe comporte ainsi deux aspects, l’un au détriment des tiers, l’autre
à leur profit : ces derniers ne peuvent d’une part, exiger l’exécution du contrat
par les véritables parties, et ils ne peuvent d’autre part, se trouver contraints
d’exécuter eux-mêmes un contrat auquel ils sont étrangers.
170. Impossibilité pour les tiers de demander l’exécution du contrat. – En
énonçant qu’ils ne peuvent pas demander l’exécution du contrat, l’article 1199
du Code civil affirme ainsi que les tiers ne sauraient bénéficier de la qualité
de créancier en vertu d’un contrat auquel ils ne sont pas parties. L’on retrouve
ici l’idée que les conventions ne « profitent » pas au tiers, selon l’expression de
l’article 1165 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la réforme de 2016.
Les illustrations jurisprudentielles d’application de cette règle sont
nombreuses. La Cour de cassation a par exemple considéré qu’un tiers au
contrat de vente d’une machine, ayant procédé à la réparation de l’objet défec-
tueux sur demande de l’acheteur, ne pouvait invoquer la garantie du vendeur
insérée dans l’acte de vente pour exiger le paiement des réparations (Cass.
com., 13 septembre 2011, no 10-13.587).
Il a pareillement été jugé qu’un garagiste ayant effectué des réparations
sur un véhicule, ne pouvait, afin d’obtenir paiement de sa prestation, se
fonder sur la clause du contrat de vente du véhicule, stipulant que le vendeur
s’engageait auprès de l’acquéreur à assumer toutes les réparations consécu-
tives à la vente, dès lors que le garagiste était étranger au contrat de vente
(CA Montpellier, 13 mars 2007, no 05/05990).
Une société ne saurait non plus se prévaloir d’une convention de partage
des bénéfices, dès lors qu’elle n’est pas partie à ladite convention (CA Nîmes,
23 mai 2013, no 12/00569).
Les héritiers du de cujus ne sont pas plus fondés à invoquer la clause du
contrat de travail d’une employée à domicile du défunt, faisant interdiction à
celle-ci de recevoir à titre gratuit, pour annuler le testament rédigé en faveur
de la salariée (Cass. 1re civ., 25 septembre 2013, no 12-25.160, obs. J.-P. Jean,
JCP G no 46, 2013, 1167 ; A.-M. Leroyer, JCP G no 46, 2013, 1168).
171. Impossibilité de contraindre un tiers à exécuter le contrat.
– L’article 1165 du Code civil, en son ancienne rédaction, indiquait que
les conventions « ne nuisent point au tiers ». Dans la même veine, l’actuel
article 1199 du même Code prévoit désormais que les tiers ne peuvent « se
voir contraints d’exécuter le contrat ». Autrement dit, le contrat ne saurait
créer d’obligation à la charge des tiers.
Les exemples de mise en œuvre de ce principe ne manquent pas : le proprié-
taire d’une voiture ne peut être ainsi condamné à payer le prix de répara-
tions commandées par le locataire du véhicule (Cass. 1re civ., 15 février 2000,
no 97-20.179, Bull. civ. I, no 47).

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Partie II • L’exécution du contrat
Ne sauraient non plus être mises à la charge d’un employeur, les obliga-
tions pesant sur l’un de ses salariés, en vertu d’une commande passée par
celui-ci en son nom personnel et pour laquelle un acompte avait été payé avec
ses propres deniers (CA Orléans, 11 juin 1996, no 94/002350, à propos de la
commande d’une cheminée destinée à être installée dans l’entreprise, alors
que l’employeur était resté totalement étranger à l’opération).
De même, ne pourront par exemple pas être appliquées à une personne étran-
gère au contrat, une clause compromissoire (Cass. com., 15 novembre 1978,
Bull. civ. IV, no 262), une clause prévoyant une procédure de conciliation
préalable (Cass. 1re civ., 1er décembre 1999, no 97-18.577), ou une clause attri-
butive de compétence (Cass. com., 28 février 1983, Bull. civ. IV, no 89).

Principe de l’effet relatif

§ 2. Tempéraments à l’effet relatif du contrat

172. Tempéraments à chacun des deux aspects du principe de l’effet


relatif. – Chacun des deux aspects du principe de l’effet relatif doit être
tempéré : l’impossibilité pour le tiers de demander l’exécution d’un contrat
trouve ainsi une limite à travers le mécanisme de la stipulation pour autrui,
permettant au tiers de se voir investi d’une créance en vertu d’un contrat
auquel il n’est pas partie (A). De même, s’il est en principe impossible de
contraindre un tiers à exécuter le contrat, celui-ci pourra toutefois lui être
opposable dans certaines situations (B).

A. La stipulation pour autrui


173. Notion de stipulation pour autrui. – « On peut stipuler pour autrui. »
L’article 1205, alinéa 1er du Code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance
du 10 février 2016 consacre ainsi sans équivoque la licéité de la stipulation
pour autrui.

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Le deuxième alinéa procède ensuite à la définition de ce type de contrat, par
lequel un contractant (le « stipulant ») fait promettre à l’autre partie (le « promet-
tant ») d’accomplir une prestation au profit d’un tiers (le « bénéficiaire »).
La stipulation pour autrui déroge ainsi au principe de l’effet relatif, en ce
qu’elle fait naître un droit direct à l’encontre du promettant au profit du bénéfi-
ciaire, alors même que ce dernier est un tiers au contrat (C. civ., art. 1206,
al. 1er) ; cette règle reprend une solution fixée de longue date en jurisprudence
(Cass. civ., 8 février 1888, S. 1888, no 1, p. 121).
Il est notamment recouru à ce mécanisme en matière d’assurance vie,
contrat par lequel, en contrepartie du versement de cotisations, l’assureur
s’engage à couvrir le risque de décès ou de survie de l’assuré en versant une
rente (ou un capital) à la personne désignée comme bénéficiaire. (Ph. Brun,
« Assurance de Personnes », in Encyclopédie du JurisClasseur : Responsabilité
civile et Assurances, LexisNexis, 2020, Synthèse, pt. 37).
174. Régime de la stipulation pour autrui. – Le bénéficiaire peut être une
personne déterminée ou déterminable lors de l’exécution de la promesse ;
il peut encore être une personne « future » (C. civ., art. 1205, al. 2). Nulle
difficulté donc à ce que le bénéficiaire de la stipulation soit une personne
physique non encore conçue (un futur enfant) ou une personne morale qui
n’est pas encore constituée.
Le bénéficiaire peut accepter la stipulation faite à son profit. Cette accep-
tation peut être formulée de manière expresse ou tacite, par le bénéficiaire
lui-même ou, après son décès, par l’un de ses héritiers (C. civ., art. 1208).
L’acceptation n’est pas requise pour agir contre le promettant (Cass. civ. 1re,
19 décembre 2000, no 98-14.105, note H. Groutel, Resp. civ. et assur. 2001, comm.
90 ; R.  Libchaber, Defrénois 2001, no 39, p. 700 ; H. Périnet-Marquet, Defrénois
2001, no 14, p. 877), mais elle a pour effet de rendre la stipulation définitive et
irrévocable dès lors que l’acceptation parvient au stipulant ou au promettant.
Tant que le bénéficiaire n’a pas formulé d’acceptation, le stipulant demeure
en revanche libre de révoquer la stipulation et de désigner un nouveau bénéfi-
ciaire, y compris lui-même en s’attribuant cette qualité.
En tant que partie au contrat, le stipulant peut naturellement agir contre
son cocontractant (le promettant) et exiger de lui « l’exécution du contrat
envers le bénéficiaire » (C. civ., art. 1209). À cette fin, il pourra solliciter en
cas de besoin, l’exécution forcée de la stipulation pour autrui (Cass. civ. 1re,
25 novembre 1997, no 95-14.472).

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B. L’opposabilité du contrat aux tiers

Partie II • L’exécution du contrat


175. Opposabilité aux tiers du contrat non simulé. – Si les tiers ne peuvent
être obligés en vertu d’un contrat auquel ils sont étrangers, l’acte leur est
toutefois opposable. L’opposabilité du contrat (en doctrine, Voy. C. Kouchner, De
l’opposabilité en droit privé, thèse de doctorat en Droit, Université Paris X, 2004 ;
J. Duclos, L’opposabilité. Essai d’une théorie générale, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé,
t. 179, 1984 ; F. Bertrand, L’opposabilité du contrat aux tiers, thèse de doctorat en
Droit, Université Paris II, 1979) permet ainsi d’engager la responsabilité des
tiers ayant contribué à son inexécution (1). En cas de simulation du contrat,
celui-ci ne sera toutefois pas opposable aux tiers (2).

1. Respect par les tiers de la situation juridique issue du contrat


176. Responsabilité du tiers ayant contribué de mauvaise foi à l’inexécution
du contrat. – Bien qu’ils ne soient débiteurs d’aucune obligation contractuelle,
les tiers « doivent respecter la situation juridique créée par le contrat » (C. civ.,
art. 1200, al. 1er). S’ils ne peuvent exiger des tiers l’exécution d’un contrat, les
contractants peuvent en revanche leur opposer l’acte, de sorte que les tiers
ne fassent pas obstacle à son exécution par les parties. En d’autres termes,
« l’opposabilité du contrat permet le rayonnement du contrat au-delà des
seules parties » (G. Chantepie, fasc. préc., pt. 114).
Par conséquent, les tiers engagent leur responsabilité extracontractuelle
lorsqu’ils ont facilité, à tout le moins contribué, à l’inexécution d’un contrat par
l’une des parties (Cass., ass. plén., 9 mai 2008, no 07-12.449, note P. Jourdain,
RTD civ. 2008, p. 485 ; Y. Rouquet, D. 2008, p. 2328 ; Cass. civ. 1re, 26 janvier 1999,
no 96-20.782, obs. Ph. Delebecque, D. 1999, p. 263 ; J. Mestre, RTD civ. 1999,
p. 623), pour autant que leur mauvaise foi puisse être établie (la preuve de
ce que le tiers avait seulement connaissance du contrat suffit à établir sa
mauvaise foi : Cass. civ. 3e, 7 mai 2014, no 13-10.397 et no 13-10.954).
177. Exemple : violation d’une clause de non-concurrence. – Les exemples
abondent, en cas notamment de violation d’une clause de non-concurrence.
Engage sa responsabilité, un restaurateur ayant acquis une parcelle de terrain
pour y exploiter un restaurant à l’enseigne Quick, alors qu’il avait connaissance
du contrat de vente préalable d’une parcelle adjacente, comportant une
clause à la charge du vendeur par laquelle celui-ci s’engageait à ne pas
exercer directement ou indirectement une activité susceptible de favoriser
la concurrence de son acquéreur, exploitant d’un restaurant McDonald’s (Com.
16 février 2016, no 13-24.284).

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2. Inopposabilité du contrat aux tiers en cas de simulation
178. Simulation de contrat : pratique de la contre-lettre. – L’opposabilité
du contrat aux tiers est cependant à exclure dans l’hypothèse d’une simulation.
Le contrat n’est en effet opposable aux tiers que dans la mesure où il n’a pas
été simulé. La simulation est une pratique consistant à créer volontairement
une apparence destinée à induire les tiers en erreur. En matière contractuelle,
elle se manifeste notamment à travers l’existence d’une « contre-lettre », c’est-
à-dire un « acte juridique secret, non révélé aux tiers, qui a pour objet de
déroger en tout ou en partie aux composantes ou aux effets d’un acte juridique
apparent, seul porté par les parties à la connaissance des tiers » (M. Storck,
« Contrat. – Effets du contrat à l’égard des tiers. – Théorie des contre-lettres.
Simulation », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil Code, art. 1201 et 1202,
LexisNexis, 2020, pt. 1 ; en doctrine, Voy. également : F. Deboissy, La simulation
en droit fiscal, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 276, 1997 ; M. Dagot, La simulation
en droit privé, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 73, 1967 ; J.-D. Bredin, « Remarques
sur la conception jurisprudentielle de l’acte simulé », RTD civ. 1956, p. 261).
La simulation poursuit souvent un objectif frauduleux : en dissimulant le
montant du prix réellement payé ou en occultant la nature réelle de l’opéra-
tion (donation maquillée en vente), les parties peuvent par exemple chercher
à minimiser ou éviter le paiement d’une taxe dont ils seraient normale-
ment redevables (Cass. com., 18 juin 1975, Bull. civ. IV, no 173 ; Cass. 3e civ.,
10 novembre 1999, no 98-11.492).
179. Effets de la contre-lettre à l’égard des parties. – Entre les parties, la
contre-lettre produit ses effets – obligatoires (C. civ., art. 1201). Cette solution
est tout à fait justifiée : en tant qu’il exprime l’intention réelle des parties, l’acte
occulte doit primer sur le contrat apparent (le vendeur d’un immeuble, animé en
réalité d’une intention libérale, et ayant convenu avec l’acquéreur de dissimuler
une donation par une vente apparente, ne peut ainsi pas obtenir le paiement
du prix convenu dans l’acte de vente apparent : CA Caen, 13 décembre 1990,
no 05/0723).
180. Effets de la contre-lettre à l’égard des tiers. – La situation des tiers
est différente : l’article 1201 du Code civil indique en effet que la contre-lettre
« n’est pas opposable aux tiers, qui peuvent néanmoins s’en prévaloir. » Les tiers
ont donc le choix de s’en tenir à l’acte apparent ou de se prévaloir du contrat
occulte (sur l’option laissée au tiers, voy. M. Storck, « Contrat. – Effets du contrat
à l’égard des tiers. – Théorie des contre-lettres. Simulation », fasc. préc., pt.
40 s.). Cette seconde alternative pourrait ainsi parfois s’avérer préférable.
Dans l’hypothèse d’une vente fictive par exemple, les créanciers du vendeur
auraient intérêt à se prévaloir de la contre-lettre pour établir que le bien est
demeuré dans le patrimoine de leur débiteur (CA Paris, 11 juillet 1990, obs.
Ch. Larroumet, D. 1991, jurispr. p. 33).

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Tempéraments à l’effet relatif

Partie II • L’exécution du contrat

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Chapitre II
Les sanctions de l’inexécution contractuelle

181. Réunion des règles relatives aux sanctions au sein d’une


section unique du Code civil. – Auparavant, le Code civil ne traitait des
sanctions de l’inexécution contractuelle que de manière éparse et partielle.
La réforme du droit des obligations de 2016 a opportunément regroupé les
règles afférentes à la quasi-totalité des sanctions de l’inexécution au sein d’une
section unique composée d’une vingtaine d’articles (art. 1217 à 1231-7). Les
principales sanctions de l’inexécution y sont abordées l’une après l’autre de
façon claire et précise.
182. Mise en demeure obligatoire préalablement à la mise en œuvre d’une
sanction. – Le créancier doit impérativement adresser à son cocontractant
défaillant une mise en demeure avant d’appliquer une quelconque sanction de
l’inexécution. Cette règle s’impose ainsi pour la grande majorité des sanctions
prévues par le Code civil ; ainsi de la responsabilité contractuelle (C. civ.,
art. 1231), de la résolution du contrat (C. civ., art. 1225, al. 2), ou d’une exécution
forcée en nature (C. civ., art. 1221).
La mise en demeure est un acte visant à intimer le débiteur défaillant de
faire ou de ne pas faire quelque chose sans retard, à peine de sanction. La
mise en demeure comporte ainsi trois éléments distincts : l’interpellation du
débiteur, le délai accordé pour exécuter l’obligation, la menace d’une sanction
en cas e manquement. Ses formes sont relativement souples : la mise en
demeure peut résulter d’une sommation par exploit d’huissier, mais un « acte
portant interpellation suffisante » (C. civ., art. 1344), tel un simple courrier
peut constituer une mise en demeure, pourvu que son objet soit explicite-
ment exprimé (Voy. N. Cayrol, « Mise en demeure. Sommation. – régime de
l’acte de mise en demeure », in Encyclopédie du JurisClasseur : Voies d’exécu-
tion, LexisNexis, 2017)
183. Variété de sanctions ouvertes au choix du contractant créancier.
– L’article 1217 du Code civil dresse la liste des différentes sanctions, sans
opérer de hiérarchie entre elles.

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En cas d’inexécution, le contractant créancier est donc libre de choisir,
parmi l’ensemble des sanctions envisageables, celle (ou celles) qui lui siéra
(siéront) le mieux, pourvu que leurs conditions de mise en œuvre soient
réunies.
Face à l’inexécution de son cocontractant, une partie pourra ainsi tout
d’abord opter pour l’inexécution de sa propre prestation, en faisant applica-
tion de son droit de rétention ou d’une exception d’inexécution. Ce type de
sanction en miroir tend à faire pression sur le cocontractant et le contraindre
à exécuter son obligation s’il souhaite se voir lui-même désintéressé de sa
propre créance (Section I).
Lorsque l’inexécution de sa propre prestation n’est plus envisageable (notam-
ment parce qu’elle a déjà été exécutée), le créancier pourra rechercher l’exé-
cution forcée en nature de la prestation de son cocontractant (section II).
Mais dans l’hypothèse en particulier où l’exécution du contrat s’avère
définitivement impossible, le créancier pourra, au contraire, choisir d’anéan-
tir le contrat et s’orienter ainsi vers la résolution du contrat (section III).
En tout état de cause, quelle que soit la sanction choisie par le créancier,
celle-ci pourra toujours être cumulée avec une demande de dommages et
intérêts destinée à réparer le préjudice causé par l’inexécution (C. civ., art. 1217,
al. 2). Au demeurant, la responsabilité contractuelle du cocontractant défail-
lant peut être également engagée de manière autonome (section IV).

Section I. L’inexécution de sa propre obligation en sanction


de l’inexécution du cocontractant

184. « Œil pour œil, dent pour dent ». – Nonobstant l’adage nul ne peut se
faire justice à soi-même, le droit français des contrats reconnaît aux contractants
divers instruments de justice privée. Ce type de sanction peut ainsi convenir
au créancier souhaitant, non pas résoudre le contrat, mais au contraire le
maintenir et obtenir de la part de son cocontractant l’exécution de sa prestation.
Le droit de rétention (§ 1) et l’exception d’inexécution (§ 2) permettront ainsi
de faire pression sur le cocontractant débiteur, contraint à exécuter son
obligation, pour autant qu’il souhaite être désintéressé de sa propre créance.

§ 1. Le droit de rétention

185. Définition du droit de rétention. – Le droit de rétention est le droit


reconnu à certains créanciers de conserver une chose qu’ils sont tenus de
restituer aussi longtemps que leur propre créance n’est pas payée (sur le droit
de rétention, en doctrine, Voy. A. Aynès, Le droit de rétention, unité ou pluralité,

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Partie II • L’exécution du contrat
Economica, coll. Recherches Juridiques, 2005 ; S. Pièdelievre, « L’efficacité du
droit de rétention face aux autres sûretés réelles », Rev. huissiers septembre 2001,
no 20 ; M.-J. Campana et J.-M. Calendini, « Droit de rétention et procédures
collectives, la dissipation des dernières ambiguïtés ? », JCP E 1998, p. 1083 ;
J. François, « L’exercice du privilège et du droit de rétention du commissionnaire
de transport sur les marchandises n’appartenant pas au débiteur », RJ com.
1995, p. 129 ; J.-F. Durand, Le droit de rétention, thèse de doctorat en Droit,
Université Paris II, 1979 ; A. Hommel, Le droit de rétention, Essai d’une théorie
en droit français, thèse de doctorat en Droit, université de Strasbourg, 1928 ;
P. Bores, Les cas d’application du droit de rétention, thèse de doctorat en Droit,
université de Paris, 1913). Pourvu que les conditions de sa mise en œuvre
soient réunies (A), le droit de rétention s’avère être d’une grande efficacité.
Les prérogatives associées au droit de rétention ne sont pour autant pas sans
limites (B).

A. Conditions du droit de rétention


186. Titularité d’une créance. – Trois conditions doivent donc être réunies
afin de pouvoir mettre en œuvre le droit de rétention, soit l’existence d’une
créance détenue par une partie sur son cocontractant (i), la détention d’une
chose (ii), et la possibilité d’établir un lien de causalité entre ladite créance
et la détention de la chose (iii). Dès lors que le droit de rétention se comprend
comme un moyen de pression contre un débiteur, celui qui s’en prévaut doit
être naturellement titulaire d’une créance à l’encontre de ce dernier. Par
conséquent, l’extinction de la créance du rétenteur emporte extinction du
droit de rétention (Cass. 1re civ., 24 février 1987, Bull. civ. 1987, I, no 66).
Une doctrine majoritaire affirme que la créance doit être à la fois certaine,
liquide et exigible, dès lors qu’elle peut s’apparenter à une saisie-attribu-
tion ou à une compensation (L. Josserand, Cours de droit civil positif français,
Librairie du Recueil Sirey, 3e éd. 1938, no 1470 ; F. Derrida et Ch. Hannoun,
Rép. civ., Dalloz 2000, V° Rétention no 27 s. ; M. Dagot, Les sûretés, PUF, coll.
Thémis, 1981, p. 89 ; contra : J.-F. Durand, Le droit de rétention, thèse de docto-
rat en Droit, Université Paris II, 1979, p. 149, faisant toutefois état d’une juris-
prudence hésitante notamment quant aux conditions de l’exigibilité et de la
liquidité).
187. Détention de la chose. – Le créancier doit ensuite détenir la chose. Il
s’agit ici de la condition déterminante : « [p]our retenir, il faut d’abord tenir »
(G. Marty, P. Raynaud et Ph. Jestaz, Droit civil, t. III, vol. 1er, Sirey, 1987, no 33).
Cette condition est requise de longue date en jurisprudence (Cass. req.,
25 février 1878, DP 1878, 1, p. 302 : « Le droit de rétention n’existe que si l’objet
sur lequel il s’exerce a été mis et est resté en la possession [du créancier] »).
La détention s’appuie ainsi sur une mainmise matérielle éventuellement

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exercée par l’intermédiaire d’un tiers (Voy. pour un expert judiciaire ayant
reçu mission de déterminer le montant de la créance du rétenteur : Cass. req.,
19 juillet 1904, DP 1906, 1, p. 9).
188. Existence d’un lien de connexité entre la chose détenue et la
créance. – Le créancier doit enfin pouvoir être en mesure d’établir une
connexité entre sa créance et la détention de la chose : le créancier n’apparaît
en effet légitime à conserver la chose de son débiteur que s’il est en mesure de
justifier d’un lien entre la détention de la chose et l’origine de sa créance. À
la lecture de l’article 2286 du Code civil, la connexité peut revêtir différentes
formes (sur la connexité, Voy J.-M. Marmayou, « Droit de rétention. Notion
et domaine d’application », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil Code, Art.
2286, LexisNexis, 2013, spéc. pt. 33).
Elle peut tout d’abord être de nature juridique, lorsque le rétenteur détient
la chose à l’occasion du rapport de droit en vertu duquel est née une créance
à l’encontre de son propriétaire. Tel serait par exemple le cas d’un garagiste
investi d’une créance de paiement du prix des réparations effectuées sur un
véhicule appartenant à son débiteur mais qui demeure en sa possession (Cass.
1re civ., 7 janvier 1992, no 90-14.545, note Ph. Delebecque, JCP G 1992, I, 3583).
La connexité peut être également matérielle, dans l’hypothèse où la créance
impayée est née précisément à l’occasion de la détention de la chose ; ainsi
de celui qui détient une chose ne lui appartenant pas mais ayant effectué des
dépenses d’amélioration ou de conservation de la chose.
La réforme du droit des sûretés opérée à la faveur de l’ordonnance
no 2006-346 du 23 mars 2006 a enfin consacré l’hypothèse d’une connexité
conventionnelle. Le droit de rétention est alors institué par le seul effet de la
volonté des parties, alors que les conditions communes régissant le droit de
rétention ne sont pourtant pas réunies. Cette situation renvoie notamment à la
situation d’un débiteur se dessaisissant volontairement d’un bien sans rapport
direct avec sa dette au profit de son créancier afin de garantir cette créance.
Le droit de rétention s’apparente alors à une véritable sûreté (CA Rouen,
4 avril 2013, no 12/02540, obs. G. Rabu, Cah. dr. sport 2013, no 32, p. 243).

B. Effets du droit de rétention


189. Efficacité particulière à l’occasion d’une procédure collective du
débiteur. – Le droit de rétention permet à son titulaire d’opposer un refus
légitime de restitution de la chose détenue. Aussi simple soit-elle, cette
prérogative peut s’avérer d’une efficacité redoutable. La rétention permet en
effet au créancier d’exercer une pression sur le débiteur et de le contraindre
à exécuter sa prestation. La pression est alors d’autant plus forte que la valeur
du bien retenu est élevée ; a fortiori lorsque la valeur de la chose excède celle
de la créance du rétenteur.

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Partie II • L’exécution du contrat
Son efficacité se fera tout particulièrement sentir dans le contexte d’une
procédure collective, à l’occasion de laquelle le débiteur peut être légalement
obligé de payer le rétenteur par priorité aux autres créanciers (C. com., art. L
642-25, en cas de liquidation judiciaire ; C. com., art. L 622-7, al. 3, en cas de
sauvegarde ou de redressement judiciaire).
190. Ni droit de préférence ni droit de suite au profit du rétenteur. – Les
prérogatives associées au droit de rétention ne sont toutefois pas sans limites.
Le rétenteur ne saurait ainsi faire valoir un droit de préférence sur le bien : si
le rétenteur est en mesure, à l’instar de tout autre créancier, de faire vendre
le bien pour être désintéressé de sa créance, il devra subir le concours des
autres créanciers sur le prix de vente (V. Cass. com., 19 février 1958, Bull. civ.
1958, III, no 82) ; à moins qu’il ne jouisse d’un privilège, tel que ceux reconnus
au gagiste ou à celui qui a engagé des frais pour la conservation de la chose
(sur ce point, Voy J.-M. Marmayou, fasc. préc., pt. 149).
Le rétenteur ne peut non plus faire valoir de droit de suite : son droit, tiré
de la seule maîtrise matérielle de la chose (et non de sa propriété), disparaît
avec la perte de celle-ci. Si le créancier abandonne ou égare la chose, il ne
pourra pas la reprendre. La reprise du bien dans de telles conditions serait
ainsi susceptible de constituer un vol (Cass. crim., 12 octobre 1976, obs.
P. Bouzat, RTD com. 1977, p. 170).

Droit de rétention

§ 2. L’exception d’inexécution

191. Définition de l’exception d’inexécution. – L’exception d’inexécution est


régie par les articles 1219 et 1220 du Code civil (en doctrine, Voy. J.-D. Bretzner,
« Les conditions de l’exception d’inexécution par anticipation », JCP G 2016,

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no 39, p. 999 ; H. Lécuyer, « L’inexécution du contrat », CCC 2016, doss. 7 ;
J. Rochfeld, « Résolution et exception d’inexécution », in D. Fenouillet et P.
Rémy-Corlay (dir.) Les concepts contractuels français à l’heure des Principes du
droit européen du contrat, Dalloz, coll. Thèmes et commentaires, 2003, p. 213 ;
C. Atias, « Les « risques et périls » de l’exception d’inexécution (limites de
la description normative) », D. 2003, p. 1103 ; M. Fontaine et G. Viney, La
sanction de l’inexécution des obligations contractuelles – Études de droit comparé,
Bruylant, coll. Bibliothèque de la faculté de droit de l’université catholique
de Louvain, 2001 ; C. Malecki, L’exception d’inexécution, LGDJ, coll. Bibl. dr.
Privé, t. 321, 1999 ; R. Cassin, De l’exception tirée de l’inexécution dans les rapports
synallagmatiques (exception non adimpleti contractus) et de ses relations avec le
droit de rétention, la compensation et la résolution, thèse de doctorat en Droit,
Université Paris, 1914). Tel que défini par le premier de ces deux textes, ce
type de sanction permet à une partie de « refuser d’exécuter son obligation,
alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si
cette inexécution est suffisamment grave. » Pour autant que les conditions
de son applicabilité soient réunies (A), l’exception d’inexécution a pour effet
principal de suspendre l’exigibilité de la créance de celui qui se prévaut de
l’exception : son débiteur ne sera donc plus fondé à revendiquer l’exécution
de sa propre créance tant qu’il n’aura pas exécuté la sienne (B).

A. Les conditions de mise en œuvre de l’exception d’inexécution


192. Des obligations réciproques. Une inexécution de la part du débiteur
de l’excipiens. – La mise en œuvre de cette sanction est soumise au respect
de plusieurs conditions tenant aux obligations des parties (1) ainsi qu’à
l’inexécution de la prestation due par le cocontractant de la partie qui entend
se prévaloir de l’« exception » (2).

1. Conditions tenant aux obligations des parties


193. Obligations synallagmatiques. – En substance, l’exception
d’inexécution consiste pour le créancier à faire subir à son débiteur indélicat
le même sort que celui-ci lui inflige : que son cocontractant n’exécute pas sa
prestation et le créancier en fera de même s’agissant de sa propre obligation.
Cette loi du talion qui ne dit pas son nom suppose ainsi l’existence d’un
certain rapport de réciprocité dans les prestations dues ; si bien qu’a priori,
l’exception d’inexécution ne peut être envisagée qu’en présence d’obligations
synallagmatiques.
L’exception d’inexécution est ainsi concevable en cas de contrats enfer-
mant des obligations interdépendantes, tels que le contrat de vente (C. civ.,
art. 1612 : « le vendeur n’est pas tenu de délivrer la chose, si l’acheteur n’en paye
pas le prix »), le contrat d’entreprise (Cass. 3e civ., 21 mai 2003, no  02-10.052 ;
Cass. com., 20 octobre 1998, no 96-11.329 : le maître d’ouvrage est légitime à

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Partie II • L’exécution du contrat
refuser de payer le prix aussi longtemps que l’entrepreneur ne fournit pas
le service), ou encore le contrat de travail (Cass. soc., 14 novembre 2001,
no 98-45.595, pour une retenue sur le salaire d’un employé qui n’exécute pas
ses obligations). Mais l’exception d’inexécution est aussi envisageable en cas
d’obligations réciproques nées, non pas d’un contrat unique, mais de plusieurs
contrats interdépendants (cass. com., 12 juillet 2005, no 03-12.507).
194. Créance de l’excipiens certaine et exigible. – Notons que la créance
de l’excipiens (le contractant qui se prévaut de l’exception d’inexécution) doit
être certaine (Cass. 3e civ., 11 janvier 2006, no 04-30.240, obs. B. Saintourens,
RTD com. 2006, p. 566) et exigible (Cass. com., 2 juin 1992, no 90-18.821).
La liquidité de la créance est en revanche indifférente (admettant l’appli-
cabilité de l’exception d’inexécution en présence d’une créance non liquide :
Cass. 3e civ., 20 février 1991, no 89-18.372).

2. Conditions tenant à l’inexécution de la part du débiteur de l’excipiens


195. Une inexécution dont l’excipiens n’est pas responsable. – L’exception
d’inexécution suppose ensuite, très logiquement, que l’excipiens justifie d’une
inexécution de la part de son cocontractant (Cass. 1re civ., 18 décembre 1990,
no 89-14.975), pourvu que celui qui s’en prévaut ne soit pas responsable (en
tout ou partie) de l’inexécution (CA Paris, 7 décembre 1990, no 88-16.898,
jugeant inapplicable l’exception d’inexécution dès lors que l’achèvement de
la mission d’un prestataire avait été rendu impossible en raison du manque
de collaboration de l’excipiens ; Voy. également, Cass. 3e civ., 24 juin 1992,
no 90-21.773).
196. Inexécution totale ou partielle. – Cette sanction demeure applicable
non seulement en cas d’inexécution totale, mais également dans l’hypothèse
d’une inexécution partielle de l’obligation du cocontractant de l’excipiens.
Ce dernier est ainsi tout à fait fondé à suspendre l’exécution de sa propre
prestation en cas d’exécution seulement partielle ou défectueuse de la part
de son débiteur (Cass. 1re civ. 18 juillet 1995, no 93-16.338).
197. Gravité de l’inexécution. – L’article 1219 précise toutefois que
l’exception ne peut jouer que dans la mesure où l’inexécution est « suffisamment
grave ». Autrement dit, la riposte doit être proportionnée à l’inexécution.
Cette exigence trouve une justification dans le principe de loyauté et de bonne
foi contractuelle : il serait contraire à ce principe d’admettre que l’excipiens
puisse suspendre l’exécution de son obligation alors que le manquement
de son cocontractant n’est que d’une importance mineure et n’affecte
pas l’interdépendance des obligations synallagmatiques (Voy. M. Storck,
« Contrat. – Inexécution du contrat. – Exception d’inexécution », in Encyclopédie
du JurisClasseur : Civil Code, art. 1219 et 1220, LexisNexis, 2017, pt. 42).

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Un créancier ne serait ainsi pas fondé à suspendre l’une de ses obliga-
tions essentielles au motif que son partenaire n’a pas exécuté une presta-
tion secondaire (CA Versailles, 11 janvier 1990, jugeant qu’un acquéreur ne
peut suspendre le paiement du prix de vente de dépliants publicitaires au
seul motif que son partenaire n’a pas livré des cartes de visite promises à
titre gratuit, cette dernière prestation ne présentant qu’un caractère acces-
soire au contrat).
198. Inexécution future mais certaine. – Depuis la réforme du droit des
contrats opérée par l’ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016, une partie est
également fondée à suspendre l’exécution de sa propre prestation dès lors qu’il
est manifeste que son débiteur n’exécutera pas ses obligations à l’échéance
et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour
le créancier (C. civ., art. 1220).
Contrairement à la plupart des autres sanctions de l’inexécution (V. supra
no 182), la mise en œuvre de l’exception d’inexécution ne requiert pas que
le débiteur soit préalablement mis en demeure (Cass. com. 27 janvier 1970,
no 67-13.764, obs. A. Huet, JCP G 1970, II, p. 16554). L’article 1220 du Code civil
impose toutefois que cette suspension soit « notifiée [au débiteur] dans les
meilleurs délais ».

B. Les effets de l’exception d’inexécution


199. Exigibilité suspendue de la prestation de l’excipiens. – L’exception
d’inexécution a pour principal effet de suspendre l’obligation de l’excipiens
d’exécuter sa prestation. Cette sanction fait perdre à son partenaire le droit à
exécution de sa propre créance. En d’autres mots, celle-ci n’est temporairement
plus exigible, alors qu’elle l’était auparavant.
En conséquence, le débiteur de celui qui se prévaut de l’exception n’est
plus fondé à engager une action en exécution de sa propre créance, et l’éven-
tuelle clause résolutoire invoquée par le débiteur sera privée d’effet (Cass. 1re
civ., 19 juillet 1965, Bull. civ. I, no 489 ; Cass. 3e civ., 15 décembre 1993, Bull. civ.
III, no 168, note M. Storck, D. 1994, jurispr. p. 462).
200. Faire pression sur le débiteur. – Cet effet est parfaitement unilatéral :
si l’excipiens n’est plus tenu d’exécuter sa prestation, son cocontractant reste
quant à lui obligé d’exécuter la sienne. C’est d’ailleurs précisément l’objet de
cette sanction : faire pression sur le débiteur, privé de l’exécution de sa propre
créance, afin de le contraindre à respecter ses engagements.
201. Effet temporaire de l’exception d’inexécution. – En toute logique, le
bénéfice de l’exception d’inexécution cesse dès lors que le débiteur a exécuté
ses obligations. L’effet de cette sanction est purement temporaire. L’excipiens
est à nouveau tenu d’exécuter sa prestation et engage alors sa responsabilité

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Partie II • L’exécution du contrat
contractuelle s’il s’y refuse. Une fois désintéressé de sa créance, il ne peut
donc plus invoquer la résolution du contrat ; l’inexécution de sa propre
prestation n’est plus justifiée et devient fautive (a ainsi pu être jugé, dans
une telle situation, que « le contrat synallagmatique [devait] reprendre ses
effets temporairement suspendus » et qu’un architecte était donc fautif d’avoir
mis fin « unilatéralement à sa mission [dès lors que] le maître de l’ouvrage
[s’était] décidé à payer ses honoraires » (CA Orléans, 23 octobre 1975, obs. Ph.
Le Tourneau, JCP G 1977, II, p. 18653).
202. Réglementation professionnelle et règle d’ordre public. –
Exceptionnellement, la suspension de l’obligation pesant sur l’excipiens
peut également apparaître contraire à une règle d’ordre public ou à une
réglementation professionnelle. Dans de telles circonstances, l’exception
d’inexécution ne pourra donc pas jouer. En ce sens, le refus d’un chirurgien-
dentiste opposé à l’un de ses patients de repositionner une prothèse déplacée
en raison de ce qu’il demeure débiteur du prix de la prestation, serait contraire
à l’obligation de préserver l’intégrité physique de ses patients : le chirurgien
doit mener l’opération à son terme (Cass. 1re civ., 9 octobre 1985, Bull. civ. I,
no 251, obs. J. Mestre, RTD civ. 1986, p. 592 ; Ph. Bertin, Gaz. Pal. 1986, 1, p. 150).

Exception d’inexécution

Section II. L’exécution forcée en nature

203. Obtenir l’exacte prestation convenue, plutôt qu’une compensation.


– L’article 1221 du Code civil admet que le « créancier d’une obligation [puisse],
après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette
exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre
son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour le créancier »
(en doctrine, Voy. Ph. Simler, « Inexécution du contrat. – Exécution forcée

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en nature », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil Code, Art. 1221 et 1222,
LexisNexis, 2017 ; L. -F. Pignarre, Les obligations en nature et de somme d’argent
en droit privé, LGDJ, coll. Bibl. dr. Privé, t. 518, 2010 ; J. Coulet, L’exécution forcée
en nature, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 2007 ; Voy. Lonis-
Apokourastos, La primauté contemporaine du droit à l’exécution en nature,
PUAM, coll. Institut de Droit des Affaires, 2003 ; E. Delily, L’exécution forcée en
nature des obligations contractuelles non pécuniaires, thèse de doctorat en Droit,
Université de Poitiers, 2002 ; W. Jeandidier, « L’exécution forcée des obligations
contractuelles de faire », RTD civ. 1976, p. 700). Si la voie de l’exécution forcée en
nature est a priori ouverte à tout créancier, cette sanction n’en reste pas moins
subordonnée à la réunion de plusieurs conditions exigeantes (§ 1). Une fois
mise en œuvre, l’exécution forcée permet alors au créancier de rechercher la
condamnation de son débiteur à ce qu’il fournisse l’exacte prestation convenue
contractuellement, plutôt qu’une compensation par voie de dommages et
intérêts, propre à la responsabilité contractuelle (§ 2).

§ 1. Les conditions de l’exécution forcée en nature

204. Conditions de fond et de procédure. – Toute prestation ne peut faire


l’objet d’une exécution forcée en nature : cette sanction n’est admissible que
dans la mesure où l’exécution de la prestation reste possible et que son coût
n’apparaît pas disproportionné au regard de l’intérêt qu’elle représente pour
le créancier. Outre ces exigences relatives à la prestation dont l’exécution fait
défaut (A), diverses conditions de nature procédurale doivent être réunies (B).

A. Conditions tenant à la prestation à exécuter


205. Indifférence de la nature de l’obligation. – Tout type d’obligation
peut en principe faire l’objet d’une exécution forcée en nature. La nature de
l’obligation – de faire ou de ne pas faire, de donner – est à cet égard indifférente :
dès lors que l’article 1221 du Code civil issu de l’ordonnance du 10 février 2016
ne distingue pas selon la nature de l’obligation, il ne doit pas y avoir lieu
de distinguer. Formellement à tout le moins, le changement apparaît donc
substantiel au regard du droit antérieur à la réforme du droit des contrats :
l’ancien article 1142 du même Code disposait en effet que « toute obligation de
faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts en cas d’inexécution
de la part du débiteur », réservant ainsi l’exécution forcée en nature aux
obligations de donner.
En réalité, la jurisprudence s’était largement émancipé de la lettre du texte
pour retenir l’exécution forcée d’obligations de faire (CA Paris, 2 juin 2000,
no 2000/02120), ou de ne pas faire (Cass. 3e civ., 3 avril 1996, no  94-14.485 ; Cass.

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Partie II • L’exécution du contrat
1re civ., 16 janvier 2007, no 06-13.983, obs. J. Mestre et B. Fages, RTD civ. 2007,
p. 342). La réforme de 2016 aligne opportunément les solutions textuelle et
jurisprudentielle (Sur ce point, Voy. B. Fages, op. cit., p. 252).
Pour autant, quelle que soit la nature de l’obligation, son exécution en nature
doit être possible (1) et le coût induit pour son débiteur ne doit pas être dispro-
portionné par rapport à l’intérêt qu’elle représente pour son créancier (2).

1. Possibilité d’exécuter l’obligation en nature


206. Impossibilité matérielle ou légale d’exécuter l’obligation.
– L’article 1221 du Code civil écarte l’exécution forcée en nature d’une obligation
lorsque « cette exécution est impossible ».
L’impossibilité d’exécuter la prestation peut être d’ordre légal, lorsque le
service à fournir est devenu prohibé, ou d’ordre matériel, à l’exemple d’une
obligation de céder un véhicule neuf, dont le modèle n’est plus fabriqué (Cass.
com., 5 octobre 1993, Bull. civ. IV, no 313 ; Cass. req., 28 avril 1869, S. 1869, 1,
p. 173), ou d’une obligation de restitution d’un meuble ayant été détruit ou incor-
poré dans un immeuble (Cass. 1re civ., 9 décembre 1986, Bull. civ. I, no 291).
207. Impossibilité morale d’imposer l’exécution forcée nature. – L’exécution
en nature peut se heurter à au principe fondamental de l’intangibilité et de
la liberté de la personne humaine, à tout le moins lorsque ne sont en cause
que des rapports patrimoniaux de droit privé : nulle coercition physique
ne pourrait alors être exercée à l’endroit d’un débiteur récalcitrant pour le
forcer à exécuter sa prestation en nature (Voy. Ph. Simler, « Inexécution du
contrat. – Exécution forcée en nature », in Encyclopédie du JurisClasseur : Civil
Code, Art. 1221 et 1222, LexisNexis, 2017, pt. 10).
Il n’apparaît ainsi pas possible (moralement) de contraindre un(e) époux(se)
volage à exécuter son obligation de cohabitation et de communauté de vie en
procédant à sa réintégration de force au domicile conjugal. Bien que la juris-
prudence ait pu jadis admettre une exécution forcée en nature dans une telle
hypothèse (Cass. 1re civ., 24 octobre 1973, obs. A. Bénabent, D. 1975, jurispr.
p. 724 ; CA Paris, 7 janvier 1903, DP 1903, 2, p. 16), les juges s’y opposent désor-
mais (CA Paris, 2 juin 1973, D. 1973, jurispr. p. 524 ; CA Aix, 22 juin 1978, D. 1979,
jurispr. p. 192 ; CA Bordeaux, 9 juin 1983).
Une solution similaire doit être retenue lorsque l’exécution forcée en
nature irait à l’encontre de la liberté de conscience du débiteur (TGI Paris,
8 novembre 1973, obs. M. Puech, D. 1975, jurispr. p. 401, s’opposant à l’exécu-
tion forcée d’une convention de strip-tease, en rejetant la possibilité « que la
femme, éventuellement revenue au sentiment naturel de la pudeur, [puisse] se
voir contrainte par le juge, au besoin sous astreinte comminatoire ou défini-
tive, à s’exposer nue à la vue du public).

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En revanche, pour délicate qu’elle soit, la réintégration du salarié injus-
tement licencié pourra faire l’objet d’une exécution forcée en nature, dans
la mesure où elle n’achoppe sur aucune liberté fondamentale de l’employeur
(Cass. soc., 14 juin 1972, note G. Lyon-Caen JCP G 1972, II, 17275 ; Cass. soc.,
21 avril 1971, Bull. civ. V, no 287).
208. Impossibilité d’imposer l’exécution forcée d’un contrat conclu intuitu
personæ. – Une exécution forcée en nature s’avère pareillement impossible en
présence d’un contrat conclu intuitu personæ, pour lequel la qualité personnelle
du débiteur constitue un élément essentiel. Dans une telle situation, les juges
se refusent à admettre ce type de sanction (Cass. soc., 20 avril 1956, Bull.
civ. IV, no 364). En particulier, l’artiste s’étant engagé à réaliser une œuvre
ne peut être forcé à l’achever, même par la voie de l’astreinte, dès lors que
son droit moral sur l’œuvre le rend seul maître de sa divulgation (Cass. civ.,
14 mars 1900, DP 1900, 1, p. 497 ; CA Paris, 4 juillet 1865, DP 1865, 2, p. 201).

2. Proportionnalité entre le coût de l’exécution pour le débiteur


et son intérêt pour le créancier
209. Règle d’équité. – L’article 1221 du Code civil prévoit également que
l’exécution forcée en nature n’est pas admissible « s’il existe une disproportion
manifeste entre son coût pour le débiteur de bonne foi et son intérêt pour
le créancier. » En effet, lorsque l’exécution forcée en nature se révèle
excessivement coûteuse pour le débiteur, alors même que le créancier n’y
trouverait qu’un intérêt limité, il apparaît illégitime et inéquitable de permettre
à celui-ci de recourir à une telle sanction, dès lors que l’octroi de dommages et
intérêts pourrait lui garantir une compensation adéquate et moins onéreuse.
Il n’est pas à exclure que les parties décident d’écarter cette règle pour
stipuler que la sanction de l’inexécution prendra, en tout état de cause, et quel
qu’en soit le prix, la forme d’une exécution forcée en nature.
La validité d’une telle clause supposera de s’interroger sur la valeur d’ordre
public de l’article 1221 (B. Fages, op. cit., p. 256 ; H. Barbier, « Les grands mouve-
ments du droit commun des contrats après l’ordonnance du 10 février 2016 »,
RTD civ. 2016, p. 253).
210. Renversement d’une position jurisprudentielle trop sévère. – Cette
règle prévue à l’article 1221 du Code civil est une innovation bienvenue de
la réforme du droit des obligations de 2016. Elle permet ainsi de faire échec
à une jurisprudence inopportune faisant une application (trop) stricte de
l’exécution forcée en nature dans des hypothèses incongrues (Cass. 3e civ.,
11 mai 2005, no 03-21.136, note L. Leveneur, CCC no 11, novembre 2005, comm.
187 ; J. Mestre et B. Fages, RTD civ. 2005, p. 596 ; D. Mazeaud, RDC 2006/2, p. 323,
affirmant avec intransigeance que « la partie envers laquelle l’engagement n’a
point été exécuté peut forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle

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Partie II • L’exécution du contrat
est possible », et cassant un arrêt d’appel qui avait refusé de condamner le
constructeur d’une maison à la démolir puis à la reconstruire au seul motif
que le bâtiment présentait une insuffisance de niveau de 33 centimètres
par rapport aux stipulations contractuelles, sans que cette circonstance ne
rende l’immeuble impropre à sa destination ou à son usage et ne porte sur
les éléments déterminants du contrat).

B. Conditions procédurales
211. Mise en demeure préalable. – Avant toute mesure d’exécution forcée,
le créancier doit laisser à son débiteur l’opportunité d’exécuter volontairement
son obligation. Dans cette perspective, le créancier doit mettre le débiteur en
demeure d’exécuter sa prestation (C. civ., art. 1221). Cette mesure constitue
ainsi la constatation formelle de son retard.
212. Titre exécutoire. – Contrairement au droit de rétention (V. supra
no 185) ainsi qu’à l’exception d’inexécution (V. supra no 191), qui constituent
des instruments de justice privée, l’exécution forcée en nature est une mesure
judiciaire, i.e. ordonnée par un juge, et mise en œuvre au besoin par le concours
de la force publique.
Un créancier ne peut en effet mettre en œuvre par lui-même, des moyens
de contrainte destinés à forcer son débiteur à exécuter la prestation due. Le
créancier doit donc disposer d’un titre exécutoire, c’est-à-dire un acte juridique
constatant la titularité de la créance et permettant au créancier d’en poursuivre
l’exécution forcée, avec le concours éventuel de la force publique.
L’article L. 111-3 du Code des procédures civiles d’exécution dresse la liste
des différents actes constituant un titre exécutoire. À l’évidence, constitue
au premier chef un titre exécutoire, toute décision de justice, par laquelle
un juge entérine l’existence d’une créance, et ordonne son exécution. Mais
un acte notarié, revêtu de la formule exécutoire, peut également constituer
un titre exécutoire (tel sera notamment le cas d’un contrat de vente immobi-
lière). La loi no 2015-990 dite « Macron » du 6 août 2015, visant à simplifier
le recouvrement des créances de petits montants, a par ailleurs introduit
la possibilité pour un huissier de délivrer un titre exécutoire, à l’issue d’une
procédure d’accord amiable menée par ses soins. Cette procédure simplifiée
est réservée aux créances dont le montant est inférieur ou égal à 5 000 euros
(CPC exéc., art. R 125-1, al. 2).

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Les conditions de l’exécution forcée

§ 2. La mise en œuvre de l’exécution forcée en nature

213. Options distinctes selon qu’il s’agit d’obtenir l’exécution d’une


obligation de faire ou de ne pas faire. – La mise en œuvre de l’exécution
forcée en nature peut être opérée par le biais de moyens divers. Les options
ouvertes au créancier diffèrent à certains égards selon qu’il s’agit d’obtenir
l’exécution d’une obligation de faire (A) ou de ne pas faire (B).

A. La mise en œuvre de l’exécution forcée d’une obligation de faire


214. Paiement d’une somme d’argent et autres types d’obligations de
faire. – Si l’exécution forcée du paiement d’une somme d’argent apparaît
relativement évidente (2), l’exécution forcée d’obligations de faire d’un autre
type peut se révéler plus délicate (1).

1. Exécution forcée d’une obligation de faire autre que le paiement


d’une somme d’argent
215. Injonction de faire. – Pour certaines obligations de faire, l’exécution
forcée directe apparaît impossible dès lors qu’elle suppose une contrainte
physique contraire aux principes de l’intangibilité et de la liberté de la personne
humaine (V. supra no 207). Plusieurs voies d’exécution forcée indirectes,
préservant l’intégrité physique du débiteur, restent néanmoins à la disposition
du créancier. Ces mesures peuvent en effet permettre de faire pression
(financièrement) sur le débiteur et de l’amener ainsi à exécuter son obligation.
Le créancier peut tout d’abord obtenir du juge la condamnation de son
débiteur à une injonction de faire (CPC, art. 1425-1 à 1425-9). Il s’agit là d’une
mesure d’intimidation visant à rappeler solennellement ce dernier à ses
devoirs.

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Partie II • L’exécution du contrat
216. Astreinte. – L’injonction de faire n’apparaît toutefois pleinement
efficace que si elle s’accompagne d’une astreinte. Cette mesure judiciaire
consiste en une condamnation du débiteur à verser au créancier une somme
d’argent périodiquement (par jour, semaine ou mois), aussi longtemps qu’il
n’exécute pas son obligation.
Le débiteur peut ainsi par exemple être condamné à verser 1 000 euros par
jour de retard dans l’exécution de sa prestation. Le montant de l’astreinte,
étranger à toute idée de réparation, est fixé souverainement par le juge,
compte tenu des circonstances de l’affaire et de la situation patrimoniale
du débiteur, de sorte qu’elle représente une perte substantielle s’il s’obstine
dans son refus. Issue d’une pratique jurisprudentielle ancienne (Cass. req.,
29 janvier 1834, DP 1834, 1, p. 81), les modalités de fixation de l’astreinte sont
aujourd’hui régies par les articles L. 131-1 et suivants du Code des procédures
civiles d’exécution.
À titre d’illustration, une astreinte a pu être imposée afin de contraindre
un bailleur à effectuer des travaux dans un immeuble loué (Cass. 3e civ.,
9 juillet 1970, Bull. civ. III, no 471), faire pression sur un vendeur et l’obliger
à livrer l’objet commandé (Cass. req., 4 août 1947, Gaz. Pal. 1947, no 2, p. 30),
obliger l’occupant d’un local à vider les lieux (Cass. com., 15 novembre 1967,
Bull. civ. III, no 369).
217. Faculté de remplacement. – Une autre alternative ouverte au créancier
réside en la possibilité de faire exécuter la prestation en nature, non pas par
le débiteur lui-même, mais par un tiers. Dans cette hypothèse, le créancier
peut alors obtenir du débiteur le remboursement des sommes engagées
à cette fin, pourvu que la prestation soit fournie dans un délai et un coût
raisonnable. Cette mesure, communément désignée sous l’expression « faculté
de remplacement », est expressément prévue par l’article 1222 du Code civil.
Elle peut s’avérer très utile lorsque la prestation consiste en la réalisation
de travaux (le locataire peut ainsi par exemple faire exécuter par un tiers,
les travaux de l’immeuble incombant au bailleur, aux dépens de ce dernier :
Cass. soc., 5 juin 1953, D. 1953, jurispr. p. 601).

2. Exécution forcée d’une obligation de paiement d’une somme d’argent


218. Injonction de payer assortie d’une astreinte. – Lorsque l’obligation
a pour objet le versement d’une somme d’argent, l’exécution forcée ne peut
a priori qu’être envisagée « en nature », l’exécution par équivalent ne faisant
alors pas sens. Une injonction de payer (CPC, art. 1405 s.), éventuellement
assortie d’une astreinte est alors envisageable.
219. Saisie-attribution des comptes bancaires du débiteur. – L’exécution
forcée peut aussi logiquement être opérée par la voie d’une saisie-attribution
des comptes bancaires, permettant au créancier d’être désintéressé par la saisie

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des sommes inscrites sur le(s) compte(s) de son débiteur. Certaines sommes
demeureront toutefois insaisissables (prestations familiales minima sociaux) ;
en toute hypothèse, le compte bancaire devra obligatoirement rester crédité
du solde bancaire insaisissable, d’un montant minimum de 564,78 euros, que
le créancier ne pourra pas saisir (la saisie-attribution des comptes est régie
par les articles L. 162-1 s. du Code des procédures civiles d’exécution).
220. Saisie des biens du débiteur. – Si les sommes disponibles sont
inférieures au montant de la créance à recouvrer, l’exécution forcée d’une
obligation de somme d’argent pourra encore être opérée via une saisie des
biens du débiteur. Ceux-ci seront alors liquidés (rendus liquide), au moyen
d’une vente forcée, permettant au créancier d’être payé sur le prix de vente
des meubles (CPC exéc., art. L. 221-1 s.).

B. La mise en œuvre de l’exécution forcée d’une obligation


de ne pas faire
221. Contraintes propres à l’exécution forcée d’une obligation de ne pas
faire. – À première vue, l’exécution forcée en nature paraît mal adaptée aux
obligations de ne pas faire. Cette inadaptation résulte des limites morales
tenant à la coercition physique des personnes (Voy. supra no 207).
Elle résulte aussi et surtout de la nature particulière de l’obligation de
ne pas faire : ce type d’obligation suppose une abstention de la part de son
débiteur, c’est-à-dire un acte négatif, passif.
Le manquement à une obligation de ne pas faire est donc caractérisé par
l’accomplissement d’un acte positif. Ainsi, contrairement à l’obligation de
faire, dont l’exécution forcée consistera à contraindre le débiteur à sortir
de sa passivité pour agir, l’exécution forcée d’une obligation de ne pas faire
implique un retour en arrière. L’exécution forcée d’une obligation de ne pas
faire peut alors s’avérer impossible lorsque l’acte litigieux accompli par le
débiteur est irréversible.
222. Efficacité de l’astreinte pour l’avenir. – Pour autant, toute mesure
d’exécution forcée d’une obligation de ne pas faire n’est pas nécessairement
inenvisageable. Tout d’abord, bien que l’acte litigieux apparaisse irréversible,
une mesure d’astreinte pourra tout à fait s’avérer efficace pour l’avenir, en
contraignant le débiteur à cesser son manquement. Une telle mesure a par
exemple pu être prononcée pour faire cesser la violation d’une clause de
non-concurrence (Cass. soc., 16 avril 1975, Bull. civ. V, no 189), ou contraindre
un comédien à cesser de se produire sur d’autres scènes que celle pour laquelle
il a été engagé (CA Paris, 21 avril 1896, DP 1897, 2, p. 177).

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223. Destruction de ce qui a été fait en violation de l’obligation. – Enfin,

Partie II • L’exécution du contrat


lorsque l’acte accompli en violation d’une obligation de ne pas faire n’est pas
irréversible, une remise en l’état antérieur est parfaitement concevable.
L’article 1222 alinéa 1er du Code civil prévoit expressément la possibilité
pour le créancier, sur autorisation préalable du juge, de faire détruire ce qui
a été fait en violation de l’obligation de ne pas faire (Voy. pour la destruction
d’ouvrages et travaux exécutés en violation d’une telle obligation : Cass. 3e civ.,
19 mai 1981, Bull. civ. III, no 101 ; Cass. 3e civ., 22 mai 1997, no 93-20.957, obs.
G. Viney, JCP G 1997, I, 4070, no 26 ; Ph. Delebecque, Defrénois 1997, p. 1005 ;
Cass. 3e civ., 30 septembre 1998, no 96-19.771).

Mise en œuvre de l’exécution forcée

Section III. La résolution du contrat

224. Rupture unilatérale en l’absence d’inexécution contractuelle. – En


principe, une partie ne peut rompre unilatéralement le contrat (C. civ.,
art. 1193). Cette règle, tirée de la force obligatoire du contrat (Voy. supra no 149
s.), connaît toutefois plusieurs tempéraments, au premier rang desquels figure
la possibilité de résilier unilatéralement un contrat à durée indéterminée. En
corollaire du principe de prohibition des engagements perpétuels (C. civ.,
art. 1210, al. 1er), chaque partie à un contrat à durée indéterminée est ainsi
en droit de le résilier de manière unilatérale, à tout moment, pourvu qu’un
délai de préavis soit respecté (C. civ., art. 1211).
225. Trois types de résolution contractuelle. – Chacune des parties peut
encore procéder à une résolution unilatérale du contrat (y compris à durée
déterminée) en cas d’inexécution de la part de son partenaire. Les articles 1224
et suivants du Code civil prévoient en effet trois types de résolution pour
inexécution soumis à des conditions de mise en œuvre distinctes, selon qu’elle
est mise en œuvre après notification du débiteur par son créancier, en vertu

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d’une clause résolutoire, ou en application d’une décision judiciaire (§ 1). En
revanche, les effets seront sensiblement les mêmes, quel que soit le mode de
résolution considéré (§ 2).

§ 1. Les conditions de la résolution du contrat

226. Conditions distinctes selon le mode de résolution. – Les conditions


à réunir pour résoudre le contrat diffèrent selon que le créancier entreprend
une résolution en application d’une clause résolutoire (A), après notification
du créancier (B), ou par la voie judiciaire (C) ; mis à part la mise en demeure
préalable du débiteur, requise dans chacun des trois cas (Voy. C. civ., art. 1225,
al. 2, pour le premier cas ; C. civ., art. 1226 al. 2, pour le deuxième ; l’acte
introductif d’instance valant mise en demeure dans le troisième cas : Cass.
3e civ., 11 juin 1992, no 90-14.648, obs. L. Leveneur, CCC 1992 no 219).

A. Conditions de la résolution par application d’une clause


résolutoire
227. Stipulation expresse des cas d’inexécution sanctionnés par la
résolution. – La clause résolutoire prévoit qu’en cas d’inexécution de
la part d’une partie, le contrat sera résolu de plein droit (Voy. M. Storck,
« Contrat. – Inexécution du contrat. – Clause résolutoire », in Encyclopédie du
JurisClasseur : Civil Code, art. 1224 à 1230, LexisNexis, 2019, fasc. 20). Admise
depuis longtemps en jurisprudence (Cass. civ., 2 juillet 1860, DP 1860, 1, 284),
sa validité est aujourd’hui consacrée dans les textes (C. civ., art. 1225).
La clause doit préciser les engagements dont l’inexécution entraînera la
résolution (C. civ., art. 1225, al. 1er). En conséquence, la résolution ne pourra
pas sanctionner n’importe quelle inexécution mais seulement celles explici-
tement visées par la clause (Cass. 3e civ., 12 juin 2001, no 00-11.635 ; Cass. 3e
civ., 15 septembre 2010, note Y. Rouquet, AJDI 2011. 287).
228. Indifférence de la gravité du manquement. – Aucun seuil de gravité
dans l’inexécution ne doit en revanche être franchi. Afin de pouvoir faire
jouer la résolution, il n’est ainsi pas nécessaire d’apprécier la gravité du
manquement. Il conviendra seulement d’établir la matérialité de l’inexécution.
Tout manquement peut donc être sanctionné par la résolution pourvu qu’il soit
expressément visé par la clause (Cass. com., 10 juillet 2012, no 11-20.060, note
B. Fages, RTD civ. 2012, p. 726 ; S. Amarani-Mekki et M. Mekki, D. 2013, p. 391).
229. Bonne foi du créancier. – Celui qui se prévaut de la clause résolutoire
doit la mettre en œuvre de bonne foi (sur cette question, de manière générale,
Voy. M. Storck, « Contrat. – Inexécution du contrat. – Clause résolutoire »,
fasc. préc., pt. 28). La mauvaise foi ne s’apprécie pas tant au regard de la
disproportion entre la sanction et le manquement, mais plutôt en considération

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Partie II • L’exécution du contrat
d’un éventuel détournement de la finalité de la clause résolutoire (Cass. 3e civ.,
1er février 2018, no 16-28.684, pour un bailleur ayant mis en œuvre la clause
résolutoire insérée dans le contrat de location dans le but de se soustraire
aux travaux qui lui incombaient).
Les juges vérifient ainsi la bonne foi du demandeur et pourront s’opposer
à la mise en œuvre de la clause résolutoire en cas de mauvaise foi du créan-
cier (Cass. 3e civ., 25 novembre 2009, no 08-21.384).
230. Prohibitions spéciales. – La clause résolutoire est admise par principe.
Mais elle est interdite dans certains contrats particuliers (ainsi du contrat
de bail rural : C. rur., art. L 411-31), ou réglementée dans d’autres (tel le bail
commercial : C. com., art. L 145-41).

B. Conditions de la résolution par voie de notification


231. Notification de la résolution adressée au débiteur par le créancier. – En
l’absence même de clause résolutoire, l’article 1226 du Code civil permet au
créancier de résoudre le contrat après en avoir notifié son débiteur. Lorsque
l’inexécution du débiteur persiste après que ce dernier ait été mis en demeure,
son créancier doit ainsi lui « notifier » la résolution ainsi que les raisons qui
la motivent (C. civ., art. 1226, al. 3). Cette disposition ne prévoit pas de forme
particulière attachée à la notification, qui ne devrait ainsi pas être soumises
aux mêmes exigences formelles qui s’imposent pour les autres modes de
rupture (B. Fages, op. cit., p. 263). La notification ne prend alors effet, et
emporte la résolution du contrat qu’à compter de la réception faite par le
créancier (C. civ., art. 1229, al. 2).
232. Inexécution suffisamment grave. – Contrairement à ce qui prévaut
pour la clause résolutoire, l’article 1224 du Code civil soumet la résolution
unilatérale à l’existence d’une « inexécution suffisamment grave » de la part
du débiteur. Cette gravité pourra s’apprécier au regard du caractère essentiel
de l’obligation considérée (Cass. 1re civ., 24 septembre 2009, no 08-14.524), ou du
comportement très critiquable du débiteur, entraînant une perte de confiance
incompatible avec la poursuite normale des relations contractuelles (Cass. 1re
civ., 22 septembre 2016, no 15-20.614 : jugeant légitime de la part d’une société
exploitant un centre équestre, la résolution unilatérale de l’inscription de l’un
de ses membres, en raison du comportement déplacé dont il avait fait preuve
à l’égard d’autres adhérentes mineures).
233. Aux risques et périls du créancier. – La résolution par voie de
notification peut intervenir sans recours au juge. Mais le débiteur demeure
en droit de contester en justice la résolution. Le créancier devra donc établir
la preuve de la gravité de l’inexécution (C. civ., art. 1226, al. 4), faute de quoi le
juge pourra lui imposer le maintien du contrat. C’est ce qu’exprime l’article 1226
alinéa 1er du Code civil, précisant que le créancier agit « à ses risques et périls ».

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C. Conditions de la résolution judiciaire
234. Demande en justice. – La résolution judiciaire peut être recherchée
« en toute hypothèse » suivant la lettre de l’article 1227 du Code civil. En
d’autres mots, l’existence d’une clause résolutoire ou la tentative (infructueuse)
de résolution par voie de notification ne sont pas exclusives de la résolution
judiciaire.
En toute logique, la demande doit en être formée devant le juge du fond,
suivant les prescriptions du même article, par le créancier victime de l’inexé-
cution, ou un créancier de ce dernier, agissant par la voie oblique (Cass. 3e
civ., 14 novembre 1985, no 84-15.577), ou encore par un subrogé (Cass. 1re civ.,
13 février 1963, no 59-10.999, obs. P. Voirin, D. 1963, p. 316).
235. Gravité suffisante de l’inexécution. – La résolution judiciaire ne peut
être prononcée que si celui qui en fait la demande établit l’existence d’une
inexécution suffisamment grave. Cette exigence, imposée par l’article 1224
du Code civil, est gouvernée par la même grille d’appréciation que celle
applicable en cas de résolution par voie de notification (Voy. supra no 231 s.).
La gravité peut être retenue en cas de retards (Cass. civ., 30 novembre 1949,
Gaz. Pal. 1950, 1, p. 38 ; Cass. 1re civ., 27 juin 1955, Bull. civ. I, no 266) ou de
manquements répétés (CA Versailles, 7 novembre 2002, RJDA 2003, no 378).

Les conditions de la résolution

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§ 2. Les effets de la résolution du contrat

Partie II • L’exécution du contrat


236. Anéantissement du contrat. – « La résolution met fin au contrat »
(C. civ., art. 1229, al. 1er). Quel que soit le mode de résolution, celle-ci a pour
effet d’anéantir le contrat : la force obligatoire du contrat cesse, et toute
obligation d’exécuter une prestation disparaît.
L’article 1230 du Code civil prévoit néanmoins que certaines clauses
pourront survivre à la résolution, et produiront ainsi leurs effets postérieu-
rement à l’anéantissement du contrat ; ainsi des clauses de confidentialité et
de non-concurrence (Cass. soc., 8 décembre 1982, no 80-40.531), ou de règle-
ment des différends (Cass. 2e civ., 11 janvier 1978, no 76-11.237).
237. Rétroactivité de la résolution. – Outre l’anéantissement du contrat pour
l’avenir, la résolution est en principe rétroactive : les effets déjà produits par le
contrat depuis sa conclusion disparaissent. En vertu de l’article 1229 alinéa 3
du Code civil, la rétroactivité ne vaut toutefois que lorsque les prestations
échangées « ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète
du contrat résolu ». Dans une telle hypothèse, « les parties doivent restituer
l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre ». Tel sera notamment
le cas en présence d’un contrat à exécution instantanée (à l’exemple du contrat
de vente : Cass. 3e civ., 22 juillet 1992, no 90-18.667).
Le même article prévoit en revanche, que « lorsque les prestations échan-
gées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du
contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière
prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ». Dans cette situation, l’inexécution
peut être sanctionnée sans besoin de faire disparaître les effets antérieurement
produits par le contrat valablement exécuté. Sont ainsi tout particulièrement
visés les contrats à exécution successive ou échelonnée (à l’instar du contrat
de bail ; Voy. Ph.-H. Brault, « Bail commercial. – Fin du bail. – Résiliation
judiciaire ou amiable », in Encyclopédie du JurisClasseur : Bail à loyer, LexisNexis,
2020, fasc. 1282).
Le contrat n’est alors pas rétroactivement anéanti ; il ne l’est que pour l’ave-
nir. Dans ce cas, la résolution est qualifiée de « résiliation ».
238. Date de la prise d’effet de la résolution. – La résolution (ou résiliation)
prend effet, selon le mode de résolutoire, à la date convenue dans la clause
résolutoire, soit à celle de la réception par le débiteur de la notification faite
par le créancier, soit au jour de l’assignation en justice (C. civ., art. 1229, al. 2).

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Les effets de la résolution

Section IV. La responsabilité contractuelle

239. Définition et source de la responsabilité contractuelle. – En substance,


la responsabilité contractuelle se comprend comme la réparation du dommage
subi par une partie du fait de l’inexécution du contrat par son partenaire, via
l’allocation de dommages et intérêts. Anciennement fondée sur l’article 1147
du Code civil dans sa rédaction antérieure à la réforme du droit des contrats
de 2016, la responsabilité contractuelle puise aujourd’hui sa source textuelle
dans le nouvel article 1231-1 du même Code. Celui-ci dispose : « le débiteur
est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison
de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne
justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure » (en doctrine,
Voy. H. Boucard, « responsabilité contractuelle », in Rép. civ. Dalloz, 2018 ;
G. Viney, « La responsabilité contractuelle en question », in Études offertes à
Jacques Ghestin. Le contrat au début du XXIe siècle, LGDJ, coll. Anthologie du
droit, 2014, p. 921 ; E. Savaux, « La fin de la responsabilité contractuelle ? »,
RTD civ. 1999, p. 1 ; P. Jourdain, « Réflexions sur la notion de responsabilité
contractuelle » in P. Michaux (dir.), Les métamorphoses de la responsabilité, PUF,
1998, p. 65 ; Ph. Rémy, « La « responsabilité contractuelle », histoire d’un faux
concept », RTD civ. 1997, p. 323 ; D. Tallon, « L’inexécution du contrat, pour
une autre présentation », RTD civ. 1994, p. 223 ; A. Tunc, « La distinction des
obligations de résultat et des obligations de diligence », JCP G 1945, I, 449 ;
P. Esmein, « Le fondement de la responsabilité contractuelle rapprochée de
la responsabilité délictuelle », RTD civ. 1933, p. 627).
240. Distinction avec la sanction de réduction du prix. – La responsabilité
contractuelle ne doit pas se confondre avec la réduction du prix, sanction bien
distincte, prévue par l’article 1223 du Code civil, dans sa rédaction issue de

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Partie II • L’exécution du contrat
l’ordonnance du 10 février 2016. Cette disposition permet en effet au créancier
de demander une réduction du prix sanctionnant l’exécution imparfaite de
la prestation de son cocontractant.
Le premier alinéa de l’article 1223 offre ainsi au créancier qui n’a pas encore
réglé la totalité du prix, la possibilité de notifier au débiteur, après sa mise
en demeure, de sa décision d’en réduire le montant à proportion de l’inexé-
cution. L’accord du débiteur doit alors être donné par écrit.
Le second alinéa du même article prévoit en outre que si le créancier a
déjà payé la totalité du prix, il peut demander à l’autre partie de lui en resti-
tuer une partie, et en cas de désaccord du débiteur formuler une demande
en ce sens au juge. La réduction du prix ne vise donc à sanctionner que l’exé-
cution imparfaite du contrat. Elle n’a pas pour objet de réparer un éventuel
préjudice causé par l’inexécution, caractéristique de la responsabilité contrac-
tuelle. La réduction du prix est du reste, parfaitement cumulable avec une
demande de dommages et intérêts (C. civ., art. 1217, al. 2).
241. Distinction avec la responsabilité extracontractuelle. – La
responsabilité contractuelle n’a pour objet que la réparation d’un dommage
trouvant sa cause dans l’inexécution d’un contrat. Elle ne doit donc pas non
plus se confondre avec un autre régime de responsabilité, à savoir celui de
la responsabilité extracontractuelle (régi par les articles 1240 et suivants
du Code civil), relative à la réparation d’un préjudice trouvant sa source
dans un fait extérieur au contrat. Pourra donc être par exemple engagée, la
responsabilité non pas contractuelle mais extracontractuelle de la personne
fautive, en cas de rupture abusive des pourparlers (V. supra no 41 s.) ou de dol
viciant la formation du contrat (V. supra no 100 s.).
La jurisprudence applique d’ailleurs un strict principe de non-cumul des
responsabilités contractuelle et extracontractuelle aux fins de réparation d’un
même dommage : soit l’une, soit l’autre est applicable, selon que le dommage
peut ou non être rattaché à l’exécution d’un contrat.
Autrement dit, une même demande à dommages et intérêts ne pourra se
fonder à la fois sur le registre contractuel et extracontractuel, sauf à retenir l’un
à titre principal et l’autre à titre subsidiaire (Civ. 3e, 28 avril 2011, no 10-13.646 ;
Com. 13 juillet 2010, no 09-14.985, obs. Y.-M. Laithier, RDC 2011, p. 51).
242. La responsabilité contractuelle régie par les textes, la jurisprudence
et le contrat lui-même. – Le régime de la responsabilité contractuelle,
principalement gouverné par les textes (C. civ., art. 1231-1 s.) et la jurisprudence
(§ 1), peut néanmoins faire l’objet d’un aménagement conventionnel, à maints
égards. Sur ce terrain, les parties conservent en effet une marge de manœuvre
non négligeable (§ 2).

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§ 1. Le régime légal de la responsabilité contractuelle

243. Conditions et effets de la responsabilité contractuelle. – Dès lors


que les conditions de sa mise en œuvre sont réunies (A), l’engagement de la
responsabilité contractuelle d’une partie se traduit par la condamnation de
cette dernière au versement de dommages et intérêts destinés à réparer le
dommage causé par l’inexécution du contrat (B).

A. Les conditions de la responsabilité contractuelle


244. Trois conditions cumulatives. – La responsabilité contractuelle du
débiteur ne peut être engagée qu’à la réunion de trois conditions. Le créancier
victime doit établir ainsi l’inexécution contractuelle de son cocontractant (1),
l’existence d’un préjudice (2), ainsi qu’un lien de causalité entre l’inexécution
et le dommage (3).

1. Une inexécution contractuelle


245. Tout type d’inexécution. – À la lecture de l’article 1231-1 du Code civil,
la première condition de la responsabilité contractuelle est « l’inexécution de
l’obligation ». « L’inexécution » du contrat équivaut à une « faute », ces deux
expressions pouvant dans ce contexte, être utilisées de manière indifférente.
Du reste, la circonstance que le manquement soit volontaire ou involon-
taire est sans incidence sur l’engagement de responsabilité, de même qu’il
importe peu que la faute soit légère ou lourde : toute inexécution du contrat
est susceptible d’engager la responsabilité de son auteur (Sur ce point, Voy.
B. Fages, op. cit., p. 272).
246. Preuve de l’inexécution. – Il appartient au créancier de prouver
l’inexécution contractuelle commise par l’autre partie, afin de pouvoir engager
sa responsabilité. Or le régime de la preuve varie en fonction de la nature
de l’obligation – de moyens ou de résultat (Sur cette distinction, Voy. supra
no 152)  –, dont l’exécution fait défaut.
Dans l’hypothèse d’une obligation de résultat, le seul fait que le résultat
ne soit pas atteint suffit à caractériser l’inexécution contractuelle, indépen-
damment des moyens mis en œuvre par le débiteur pour y parvenir. Il s’agira
donc pour ce dernier de prouver l’existence d’une cause d’exonération permet-
tant d’écarter sa responsabilité (Civ. 1re, 16 octobre 2001, no 99-16.854, obs.
P. Jourdain, RTD civ. 2002, p. 514 ; Civ. 1re, 24 octobre 1995, no 93-19.695).
En présence d’une obligation de moyens, pèse au contraire sur le créan-
cier la charge de prouver que son débiteur a commis une faute en ne mettant
pas en œuvre tous les moyens nécessaires pour parvenir au résultat souhaité
(Cass. com., 6 mars 1984, no 82-11.350 ; Civ. 1re, 4 janvier 2005, no 03-13.579).

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2. Un préjudice

Partie II • L’exécution du contrat


247. Préjudice patrimonial. – Tout d’abord, le préjudice réparable peut
évidemment être de nature patrimoniale. Les différent types de préjudices
compris dans cette catégorie sont d’ordre pécuniaire ; ils affectent la valeur
et la consistance du patrimoine de la victime.
Au premier rang des préjudices patrimoniaux, figure la « perte subie » (ou
damnum emergens), se caractérisant par un « appauvrissement » de la victime,
soit une diminution de la valeur de son patrimoine (« la perte qu’il a faite »
selon l’expression de l’article 1231-2 du Code civil).
Constituent ainsi par exemple une perte subie, les honoraires versés inutile-
ment à un avocat à l’occasion de vaines procédures (Cass. civ. 1re, 30 janvier 2007,
no 04-11.351), des agios bancaires associés à des dépenses causés par l’inexé-
cution contractuelle (Cass. com. 17 mars 1987, no 85-15.711), la diminution de
valeur d’un véhicule destiné à être revendu et le coût de sa remise en état (Cass.
civ. 1re, 28 novembre 2012, no 11-11.912), la perte de titularité d’une créance
(Cass. civ. 1re, 12 avril 2005, no 02-21.223), l’alourdissement du montant d’un
impôt (Cass. com. 1er décembre 1998, no 96-22.725).
Le « gain manqué » (ou lucrum cessans), constitue une autre forme de préju-
dice patrimonial, caractérisé par une absence d’enrichissement, dont aurait
dû pourtant profiter la victime en l’absence d’inexécution : un gain aurait dû
être réalisé, mais ne l’a pas été à cause de l’inexécution (« le gain dont il a été
privé » tel que cela ressort de l’article 1231-2 du Code civil). À titre d’illustration,
caractériseront un gain manqué, la privation du bénéfice de salaires devant
être versés jusqu’au terme de la garantie d’emploi (Cass. soc. 2 février 1999,
no 96-40.773), ou de droits à la retraite (Cass. soc. 26 octobre 2011, no 10-20.991),
de même que le fait de ne pas pouvoir bénéficier des avantages financiers
afférents à un plan d’épargne logement (Cass. com. 21 novembre 2000,
no 98-12.741).
248. Préjudice extrapatrimonial. – La victime de la faute contractuelle
peut être également légitime à revendiquer la réparation d’un préjudice
extrapatrimonial, affectant un élément qui non rattachable au patrimoine
d’une personne. Ce type de préjudice, d’ordre purement moral, peut affecter
toute forme de sentiment humain – atteinte à l’honneur, à la réputation,
à la pudeur etc. Quoique le préjudice extrapatrimonial soit insusceptible
d’appréciation pécuniaire, il n’en demeure pas moins réparable au moyen
d’une compensation monétaire (Cass. civ. 3e, 6 mars 2002, no  00-19.674 ; Cass.
com. 25 janvier 2017, no 15-16.060).
249. Préjudice corporel. – À part est le dommage corporel, composé de
postes de préjudices de nature tantôt patrimoniale – frais médicaux, invalidité
professionnelle  –, tantôt extrapatrimoniale – souffrances endurées, déficit
fonctionnel, préjudices d’agrément, d’établissement, esthétique ou sexuel – (sur

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le dommage corporel, Voy. Y. Lambert-Faivre et St. Porchy-Simon, Droit du
dommage corporel. Systèmes d’indemnisation, Dalloz, coll. Précis Droit privé,
2022).
250. Préjudice licite. – Mais en toute hypothèse, le dommage n’est réparable
que s’il est licite : l’illégitimité de l’intérêt lésé fait obstacle à l’indemnisation.
Tel ne sera par exemple pas le cas du préjudice financier invoqué par un maître
d’ouvrage, espérant tirer un revenu de logements qu’il n’avait pas le droit
de construire (Cass. civ. 3e, 21 janvier 2016, no 14-28.014). N’est pas non plus
réparable la privation d’un bénéfice espéré d’une procédure abusive (Cass.
civ. 1re, 23 novembre 2004, no 03-15.090, note J. Hauser, RTD civ. 2005, p. 371).

3. Un lien de causalité entre l’inexécution et le préjudice


251. Un préjudice réparable, pourvu que l’inexécution contractuelle en
soit la cause prépondérante. – L’article 1231-4 du Code civil requiert en outre
l’existence d’un lien de causalité entre l’inexécution du contrat et le dommage
subi par la victime (a). La responsabilité contractuelle du débiteur ayant
manqué à l’exécution de ses obligations pourra donc être écartée lorsque le
dommage est le produit d’une cause étrangère à l’inexécution contractuelle (b).

a. L’exigence d’un lien de causalité


252. Définition et illustration. – L’article 1231-4 du Code civil exige que
soit établi un lien de causalité afin de pouvoir engager la responsabilité du
débiteur ayant manqué à son obligation. Le lien de causalité constitue la
relation qui existe entre une cause et son effet. Sur le terrain contractuel, le
lien causal est caractérisé dès lors que l’inexécution a pour effet le dommage
dont il est demandé réparation.
Le lien de causalité ne se déduit pas de l’existence d’un préjudice ni de
l’inexécution contractuelle. Il s’agit d’une condition à part entière de la respon-
sabilité, cumulative aux deux autres : les juges exigent avec fermeté la démons-
tration d’un lien causal, dont la preuve pèse sur le créancier (Cass. civ. 1re,
18 novembre 1997, no 95-19.516), faute de quoi, la responsabilité du débiteur
ne saurait être engagée (Cass. civ. 3e, 7 janvier 2016, no 14-18.561, note P.
Jourdain, RTD civ. 2016, p. 373, considérant qu’il n’y a pas de lien de causalité
entre l’erreur de diagnostic technique sur un immeuble dressé par un archi-
tecte et les dégâts survenus sur l’immeuble construit par un autre architecte,
l’erreur de diagnostic commise postérieurement à la construction étant seule-
ment la cause du « surcoût des travaux rendus nécessaires par l’aggravation
des désordres »).
253. Deux approches possibles du lien de causalité. – Si la démonstration
du lien causal ne soulève généralement pas de difficulté dans l’hypothèse
où le dommage a été provoqué par l’effet d’une cause unique, la vérification

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Partie II • L’exécution du contrat
de cette condition peut apparaître malaisée lorsqu’il existe une pluralité de
causes du dommage. Dans cette situation, deux approches théorisées par la
doctrine s’affrontent (Voy. H. Boucard, art. préc., pt. 458).
La première, dite « de l’équivalence des conditions » permet de retenir
comme une cause du dommage tous les évènements sans lesquels le dommage
ne se serait pas produit. Sont ainsi retenues comme causes du préjudice, toutes
celles qui constituent une condition sine qua non du dommage.
La seconde approche, plus restrictive, est celle « de la causalité adéquate »,
suivant laquelle ne sont retenues, parmi les différentes causes envisageables,
que celle(s) qui ont joué un rôle prépondérant dans la survenance du préju-
dice. Autrement dit, n’est une cause du dommage que celle qui est propre à
le produire selon le cours normal des choses, à l’exclusion donc des causes
accessoires ou de celles qui ont joué un rôle causal par un concours de circons-
tances extraordinaires.
En précisant que les « intérêts ne comprennent que ce qui est une suite
immédiate et directe de l’inexécution », l’article 1231-4 du Code civil fait
manifestement prévaloir la théorie de la causalité adéquate. Pour autant, tout
est en réalité question de circonstances et d’appréciation des juges du fond, la
jurisprudence variant au « gré des espèces », entre les deux approches conce-
vables (Ph. le Tourneau [dir.], Droit de la responsabilité et des contrats, Régimes
d’indemnisation, Dalloz, coll. Dalloz Action, 11e éd., 2017, no 2131.56).

b. Les causes d’exonération


254. Obligation de garantie. – Le débiteur ne peut en aucun cas échapper
à sa responsabilité en cas d’inexécution contractuelle lorsqu’il est tenu d’une
obligation de garantie (situation dans laquelle une clause stipule que le débiteur
n’est point libéré en cas d’impossibilité d’exécuter sa prestation : C. civ.,
art. 1351).
En l’absence d’obligation de garantie, le débiteur coupable d’une inexé-
cution contractuelle peut évoquer différentes causes d’exonération, faisant
obstacle à l’engagement de sa responsabilité. Lorsque le dommage trouve
en effet sa source dans une cause étrangère prépondérante, l’inexécution
contractuelle n’est alors pas imputable au débiteur. Parmi les diverses causes
d’exonération, peuvent être mentionnés le cas la force majeure (i), ainsi que
le fait du tiers ou du créancier (ii).

■ Le cas de force majeure


255. Définition légale de la force majeure. – La principale cause
d’exonération est l’événement de force majeure. Celle-ci est définie à
l’article 1218 alinéa 1er du Code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance
du 10 février 2016 : « il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un

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événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être
raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne
peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de
son obligation par le débiteur. » La caractérisation d’un événement de force
majeure suppose la réunion de trois conditions.
256. Un événement échappant au contrôle du débiteur. – L’événement
doit tout d’abord, « échapper au contrôle du débiteur ». Cette exigence se
comprend comme un critère d’extériorité, entendu au sens large : l’événement
de force majeure est de ceux sur lesquels le débiteur n’a pas prise. Ainsi
d’une grève imposée par des salariés à l’entreprise débitrice (Cass. civ. 1re,
24 janvier 1995, no 92-18.227), de même que la maladie du débiteur, qui sans
être extérieure à celui-ci, échappe à son contrôle (Cass. civ. 1re, 10 février 1998,
no 96-13.316). Tel ne sera en revanche pas le cas d’une panne de moteur d’un
engin appartenant et contrôlé par le débiteur (Cass. civ. 1re, 19 mars 2014,
no 12-20.917, note L. Bloch RCA 2014, no 205).
257. Un événement imprévisible. – En second lieu, l’événement ne devait
pas pouvoir être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat. Si
l’événement était prévisible au moment de la conclusion du contrat, le débiteur
est réputé devoir en assumer le risque (Cass. civ. 1re, 25 mai 1983, no 82-11.386,
exonérant la SNCF de sa responsabilité après avoir jugé imprévisible par les
parties et constitutif d’un événement de force majeure, le fait qu’un voyageur
perde l’équilibre alors qu’il se tenait sur un quai de gare et chute sur les rails,
entraînant des blessures).
258. Un événement irrésistible. – L’événement de force majeure doit enfin
s’accompagner d’effets qui ne pouvaient être évités par des mesures appropriées.
En d’autres termes, l’événement doit être irrésistible, insurmontable. Entendu
strictement, l’événement de force majeure entraîne ainsi l’impossibilité
totale d’exécuter la prestation (Cass. civ. 1re, 8 mars 2012, no 10-25.913, note
L. Leveneur, CCC 2012, no 145 ; P. Jourdain, RTD civ. 2012, p. 533, jugeant
insurmontable et constitutive d’un cas de force majeur, la fermeture de
l’espace aérien en raison d’une éruption volcanique, permettant d’exonérer
une agence de voyages de sa responsabilité pour inexécution de sa prestation).
Ne sera cependant pas constitutif d’un cas de force majeure, un événe-
ment n’empêchant pas totalement l’exécution du contrat, bien que rendant
celle-ci plus difficile ou onéreuse (Cass. civ. 1re, 30 mai 2006, no 03-16.335).
259. Effets de la force majeure. – En cas de force majeure, le débiteur
est exonéré de sa responsabilité contractuelle en raison de l’inexécution.
Il ne pourra donc se voir condamné au paiement de dommages et intérêts
réparateurs.

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Partie II • L’exécution du contrat
Les effets de la force majeure diffèrent toutefois selon que l’empêchement
est temporaire ou définitif. Dans la première situation, l’exécution de l’obli-
gation sera suspendue le temps de l’empêchement, à moins que le retard qui
en résulterait ne légitime la résolution du contrat ; dans la seconde, le contrat
sera résolu de plein droit et les parties seront libérées de leurs obligations
respectives (C. civ., art. 1218, al. 2).

■ Le fait du tiers ou du créancier


260. Le fait du créancier. – Lorsque le dommage subi par le créancier
trouve sa source dans son propre fait, le débiteur pourra y trouver une cause
d’exonération. Mais selon que le fait du créancier est la cause exclusive
ou partielle du dommage, l’exonération sera elle-même totale (Cass. civ.
1re, 22 janvier 1962, Bull. civ. I, no 45) ou partielle (Cass. com., 24 mai 2005,
no 03-20.826 ; Cass. com. 10 janvier 1995, no 92-21.975, retenant un partage
de responsabilité entre le titulaire d’une carte bancaire volée, ayant laissé
le code secret apparent sur l’instrument de paiement, et la banque, ayant
enregistré des opérations au débit de son client dont les ordres avaient été
passés par le voleur).
261. Le fait du tiers. – Le débiteur peut encore obtenir l’exonération de sa
responsabilité lorsque l’inexécution contractuelle a été casée par le fait d’un
tiers, pourvu que cet événement revête les caractères de la force majeure. A
été jugé par exemple que tel était le cas, dans une affaire où le locataire d’une
chose n’avait pas exécuté son obligation de restitution, dès lors que la chose
louée avait été volée par un tiers (Cass. civ. 1re, 26 avril 2017, no 16-12.850, note
L. Leveneur, CCC 2017, no 141).

B. Les modalités de la réparation


262. Principe de la réparation intégrale. – Une fois engagée, la
responsabilité contractuelle du débiteur se traduit par sa condamnation au
paiement de dommages et intérêts destinés à réparer le préjudice causé au
créancier. Le calcul des dommages et intérêts est gouverné par le principe
dit « de réparation intégrale » (D. Boustani, « La réparation intégrale et les
règles de procédure : principe prétendu ou droit effectif ? », D. 2014, p. 389),
ou « principe d’équivalence » (entre les dommages et intérêts et le préjudice
contractuel). Suivant ce principe, la réparation a pour objet de replacer la
victime dans la situation la proche possible que celle où elle se serait trouvée
en l’absence de l’inexécution contractuelle dommageable (Voy. H. Boucard,
art. préc., pt. 527 à 589).

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Les dommages et intérêts doivent donc réparer le préjudice, tout le préju-
dice, rien que le préjudice. Ainsi indemnisé, le créancier victime de l’inexécu-
tion ne doit réaliser ni perte (Cass. civ. 1re, 30 janvier 2007, no  04-11.351 ; Cass.
civ. 3e, 4 novembre 2010, no 09-70.235), ni profit (Cass. civ. 1re, 24 octobre 2006,
no 05-16.522 ; Cass. civ. 3e, 20 avril 2017, no 16-13.885).
263. Réparation du dommage prévisible, lors de la conclusion du
contrat. – « Le débiteur n’est tenu que des dommages et intérêts qui ont été
prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf
lorsque l’inexécution est due à une faute lourde ou dolosive » (C. civ., art. 1231-3).
Cette disposition est sans équivoque : en principe, ne sont réparables sur le
terrain de la responsabilité contractuelle que les dommages prévisibles au
moment de la conclusion du contrat. La jurisprudence est du même avis (Cass.
com., 17 mars 1987, no 85-15.711 : « Le créancier d’une obligation contractuelle
est fondé à demander la réparation de l’intégralité de son préjudice prévisible
directement causé par l’inexécution »).
Cette solution repose sur l’idée que les contractants sont réputés avoir
mesuré et accepté l’étendue de leur responsabilité lors de la conclusion de la
convention, en même temps qu’ils se sont engagés à exécuter leurs obligations.
Dès lors qu’un dommage était imprévisible, il doit en revanche être exclu du
domaine de la responsabilité contractuelle (Voy. B. Fages, op. cit., p. 280).
Deux réserves non négligeables à ce principe sont explicitement envisa-
gées par l’article 1231-3 du Code civil : l’hypothèse dans laquelle l’inexécu-
tion est due à une faute lourde du débiteur et celle dans laquelle il a commis
un dol lors de la formation du contrat.
264. Obligation du créancier de minimiser son propre préjudice ? – Une
question débattue en doctrine est celle de savoir si le créancier peut être tenu de
minimiser son propre préjudice, afin de ne pas faire peser sur son cocontractant
une charge d’indemnisation trop lourde (S. Tisseyre, « Le devoir de minimiser
son dommage. L’hostilité du droit français est-elle toujours opportune ? »,
Resp. civ. et assur. no 1, janvier 2016, étude 1 ; S. Reifegerste, Pour une obligation
de minimiser le dommage, PUAM, 2002). Mais la jurisprudence s’y oppose,
tant en matière de responsabilité contractuelle (Cass. civ. 3e, 10 juillet 2013,
no 12-13.851), que sur le terrain de la responsabilité extracontractuelle (Cass.
2e civ., 26 mars 2015, no 14-16.011). Il est toutefois notable que le projet de
réforme de la responsabilité civile de la Chancellerie de mars 2017 prévoit
toutefois de renverser cette solution et d’introduire une obligation pour le
créancier de minimiser son dommage au regard notamment de sa capacité
contributive, sauf s’il s’agit d’un préjudice corporel (art. 1263 : « les dommages
et intérêts sont réduits lorsque la victime n’a pas pris les mesures sûres et
raisonnables, notamment au regard de ses facultés contributives, propres à
éviter l’aggravation de son préjudice »).

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265. Intérêts moratoires en cas d’inexécution de versement d’une

Partie II • L’exécution du contrat


somme d’argent. – L’article 1231-6 du Code civil prévoit que l’inexécution
d’une obligation de paiement d’une somme d’argent donne lieu au paiement
d’intérêts de moratoires, calculés à proportion de la somme due, destinés
à réparer le retard dans le versement de ladite somme d’argent. Le retard
commence à courir à compter de la mise en demeure du débiteur. En principe,
le taux d’intérêt est un taux légal, fixé annuellement par décret, conformément
à la formule prévue par l’article L. 313-2 du Code monétaire et financier.
Mais le taux légal n’est que supplétif et s’applique à défaut d’un éventuel taux
conventionnel distinct.

Régime légal de la responsabilité contractuelle

§ 2. L’aménagement conventionnel


de la responsabilité contractuelle

266. Accroître, limiter ou écarter la responsabilité contractuelle. – Les


parties ont la possibilité d’aménager leur responsabilité contractuelle de deux
manières principales : d’une part, en insérant au contrat une clause limitative
ou exclusive de responsabilité (A), d’autre part, en stipulant au contraire une
clause pénale, prévoyant une réparation forfaitaire d’un montant supérieur
au préjudice escompté (B).

A. Les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité


267. Validité des clauses limitatives de responsabilité en droit commun
des contrats. – En tant qu’il restreint la réparation aux seuls dommages prévus
lors de la conclusion du contrat, l’article 1231-3 du Code civil laisse ouverte
la possibilité pour les parties de prévoir une limitation conventionnelle de
leur responsabilité. La jurisprudence admet en effet de longue date la validité
des clauses ayant pour objet de limiter, voire d’exclure, la responsabilité
contractuelle en cas d’inexécution (Cass. civ., 15 juin 1959, D. 1960, p. 97).

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Il s’agit ici d’une profonde différence avec le régime de la responsabilité
extracontractuelle, la Cour de cassation ne reconnaissant pas la possibilité pour
des personnes de convenir d’une limitation de leur responsabilité délictuelle
(de telles conventions sont nulles, car contraires à l’ordre public : Cass. civ.
2e, 17 février 1955, D. 1956, p. 17).
268. Invalidité des clauses limitatives de responsabilité en droit
spécial. – Bien qu’admises en principe, les clauses limitatives de responsabilité
contractuelle peuvent être prohibées dans certaines situations en vertu de
règles spéciales.
Tel est tout particulièrement le cas en droit de la consommation, l’article R
212-1, sous 6° du Code de la consommation, faisant interdiction d’insérer dans
les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur, des clauses
supprimant ou réduisant le droit à réparation du préjudice subi par ce dernier
en cas de manquement par le professionnel à l’une quelconque de ses obliga-
tions (Voy. supra no 138 s.).
En outre, lorsqu’elle est imposée à un client ou à un partenaire commer-
cial, une telle clause peut constituer un abus de position dominante prohibé
en droit de la concurrence par l’article L. 420-2 du Code de commerce (Cons.
conc., 18 septembre 1990, no 90-D-31).
Il en va pareillement ainsi dans certains types de contrats : toute clause
limitant la responsabilité du constructeur d’ouvrage est réputée non écrite
(C. civ., art. 1792-5) ; celles qui limitent la responsabilité du transporteur sont
frappées de nullité (C. com., art. L 133-1, al. 3).
269. Quid des clauses limitatives de responsabilité en cas de dommage
corporel ?  –  La validité d’une clause limitative de responsabilité en cas
de dommage corporel est débattue (Voy. Y. Lambert-Faivre et St. Porchy-
Simon, op. cit.). Quoiqu’attentatoire à la liberté contractuelle, une règle de
prohibition des clauses limitatives de responsabilité en cas de dommage
corporel apparaîtrait, ainsi que le suggère un auteur (B. Fages, op. cit., p. 286),
conforme aux tendances actuelles du droit positif français, très attaché au
respect et à l’intégrité du corps humain (C. civ., art. 16-1 et 16-3).
C’est du reste la solution qui a été retenue par le projet de réforme de la
responsabilité civile élaboré la Chancellerie (art. 1281, al. 2 : « la responsabilité
ne peut être limitée ou exclue par contrat en cas de dommage corporel »).

B. La clause pénale
270. Rôles attribués à la clause pénale. – La clause pénale est celle
par laquelle les contractants fixent par avance le montant forfaitaire de la
réparation due par le débiteur en cas d’inexécution contractuelle (Voy. Ph.
Delebecque, « Régime de la réparation. – Modalités de la réparation. – Règles

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particulières à la responsabilité contractuelle. – Clause pénale », in Encyclopédie

Partie II • L’exécution du contrat


du JurisClasseur : Civil Code, art. 1231 à 1231-7, LexisNexis, 2020, fasc. 22). Le
montant prévu contractuellement peut être inférieur à celui du préjudice
considéré, auquel cas la clause pénale joue le rôle d’une clause limitative de
responsabilité (Voy. supra no 267 s.).
Plus communément, la clause pénale prévoit un montant très supérieur à
celui du préjudice escompté. Dans cette dernière hypothèse, telle stipulation
a une vocation non seulement réparatrice, en tant que la somme prévue tient
lieu de dommages et intérêts compensant le préjudice induit par l’inexécu-
tion ; elle comporte également une dimension comminatoire, dès lors qu’elle
fait planer sur le débiteur la menace d’une sanction sévère, et le dissuade ainsi
de manquer à son obligation (B. Fages, op. cit., p. 289).
271. Pouvoir de révision du juge. – L’article 1231-5 alinéa 2 du Code
civil reconnaît au juge la possibilité générale de modifier le montant de la
clause pénale en cas de disproportion manifeste entre le montant fixé par
les parties au contrat et l’importance du préjudice effectivement souffert
(Voy. en jurisprudence : Cass. com., 14 décembre 2010, no 09-68.275, note
B. Fages, RTD civ. 2011, p. 122). Il lui est ainsi loisible de rehausser la peine
conventionnellement convenue si elle apparaît « manifestement dérisoire »,
ou de la modérer lorsqu’elle se révèle « manifestement excessive ».

Aménagement conventionnel de la responsabilité contractuelle

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Annexe
Méthode
des exercices juridiques

I. Le commentaire de décision judiciaire

Le commentaire est un exercice pratique, amenant le candidat à explici-


ter, contextualiser et critiquer une décision de justice.

A. La lecture de la décision

À la lecture de la décision, le candidat doit être attentif à plusieurs choses,


parmi lesquelles :
• la juridiction (juridiction civile, commerciale, pénale, de première instance,
d’appel, Chambre civile, commerciale, criminelle, mixte de la Cour de
cassation ou son assemblée plénière, etc.) ;
• le visa, c’est-à-dire les textes sur le fondement desquels a été rendue la
décision. La compréhension du visa prémunit en partie contre le risque
de hors sujet. Ainsi par exemple, la nature de la responsabilité discutée
dans la décision (et donc dans le commentaire) sera a priori différente selon
que la décision est rendue au visa de l’article 1240 ou de l’article 1231-1 du
Code civil ;
• le niveau de publication de la décision, donnant une bonne indication de
son importance :
Signification des lettres de publication des arrêts de la Cour de cassation :
– I : diffusion sur le site internet de la Cour de cassation (importance
pour le grand public) ;
– R : publié au rapport annuel de la Cour de cassation (très haute
importance) ;

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– B : Bulletin d’information de la Cour de cassation (BICC), remplacé
depuis 2020 par les lettres des chambres ;
– P : publié au bulletin mensuel des arrêts des chambres civiles ou de la
chambre criminelle ;
– D : inédit. Arrêt diffusé sur le site Légifrance, mais qui n’a pas vocation
à être publié ;
– ND : non diffusé. Exclu de toute diffusion.

B. L’introduction

L’introduction doit comporter plusieurs éléments, composant ce qu’il est


parfois convenu d’appeler « la fiche d’arrêt ».
L’accroche doit tout d’abord renseigner sur les éléments d’identification de la
décision commentée (la juridiction, la date), et indiquer l’élément central de la
décision (notamment son apport jurisprudentiel), ou à tout le moins le sens de
la solution rendue. L’accroche peut consister en une citation d’un auteur ayant
lui-même commenté la décision considérée pourvu qu’elle permette d’identi-
fier la décision et aille dans le sens de la position soutenue par le candidat.
Le rappel des faits doit être synthétique. Afin de gagner en précision, les
parties en la cause doivent être qualifiées juridiquement (« l’acquéreur », « le
cessionnaire », « un tiers », « l’héritier », etc.) plutôt que de recourir aux « M.
X » et « Mme Y ».
Il convient ensuite de faire un bref résumé des principales étapes de la procé-
dure (l’arrêt d’appel doit au minimum être évoqué, dans le cas d’un commen-
taire d’arrêt de la Cour de cassation).
Les moyens (arguments) des parties au soutien de leurs demandes respec-
tives doivent être présentés.
Il s’agit ensuite de formuler le problème de droit, c’est-à-dire la question que
le juge devait trancher in casu. La question doit être la plus claire et précise
possible. Il doit en ressortir l’élément spécifique de l’affaire (si la question
retenue pourrait être transposée à l’identique dans d’autres décisions, il est
vraisemblable que la question soit trop large). Il est en outre préférable de
formuler la question de telle sorte qu’elle appelle une réponse affirmative ou
négative, plutôt que de la formuler de manière ouverte.
Pour un arrêt par exemple, dans lequel les juges distinguent clairement les
conditions cumulatives d’irrésistibilité et d’imprévisibilité de l’événement de
force majeure, au lieu de formuler ainsi la question « quelles sont les condi-
tions de la force majeure ? », il serait plus précis de se demander « si l’impré-
visibilité de l’événement constitue bien une condition de la force majeure
distincte de celle tenant à l’irrésistibilité de l’événement ».

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Il ne faut pas ensuite oublier de donner la solution de la Cour, i.e. la réponse

Annexe • Méthode des exercices juridiques


apportée à cette question ; et le fondement juridique en vertu duquel elle est
prononcée.
L’introduction s’achève par l’annonce de plan, suivant les mêmes règles que
celles régissant l’annonce dans la dissertation (Voy. infra).

C. Le corps du commentaire

De manière générale, il s’agit de commenter la décision, toute la décision,


rien que la décision. S’il convient d’apporter un commentaire à la lumière
des connaissances de cours, il faut donc à tout prix éviter de verser dans
la dissertation : le commentaire n’est pas un exercice théorique, mais un
exercice pratique ayant pour support une situation juridique concrète tirée
de la réalité et ayant fait l’objet d’une décision de justice, de laquelle le candi-
dat ne doit jamais s’écarter.
Sont donc à bannir les propos très généraux sur la matière. Tout élément
du commentaire doit être rattaché à l’arrêt et doit servir son commentaire.
Afin de se prémunir contre le risque de hors-sujet, il peut être ainsi oppor-
tun de s’astreindre à ce que chacun des paragraphes contienne au moins une
fois l’expression « en l’espèce… », ou une expression équivalente.
À l’inverse, il ne faut pas se contenter de paraphraser la décision en la
recopiant. Il convient pour le candidat de reformuler les règles mobilisées
et appliquées par le juge afin de démontrer sa compréhension de l’arrêt.
Il est fondamental de retrouver dans le commentaire des développements
consacrés à trois éléments : le sens, la valeur et la portée de l’arrêt.
Le sens de la décision renvoie à sa signification, au principe posé ou mobilisé.
Sur ce point, le candidat doit être capable de reconstituer le raisonnement
des juges pour arriver à cette solution.
La portée de la décision suppose de la replacer dans un contexte spatio-tem-
porel : l’arrêt correspond-il à un revirement de jurisprudence, ou à une juris-
prudence constante ? Quelle est sa place dans un contexte de réforme législative
récente ou à venir ?
La valeur de la décision suppose d’apporter un élément critique (positif et/
ou négatif). La critique doit être ici comprise au sens juridique du terme (et
non moral) : il ne s’agit pas de savoir si la solution est juste ou injuste, mais
plutôt de savoir si elle est opportune et conforme aux textes : la Cour fait-elle
une application stricte ou large du texte, voire a-t-elle rendu une décision
contra legem ? En conséquence, cette décision apporte-t-elle plus ou moins
de sécurité juridique ? Porte-t-elle atteinte à un droit ou principe fondamen-
tal collatéralement ? Sur le plan pratique cette solution est-elle opportune ?

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En faveur de quelle partie se positionne-t-elle ? À ce titre, il ne faut pas avoir
peur d’affirmer son opinion, mais il convient d’éviter toute position radicale :
dans la mesure du possible, il faut rester mesuré et nuancé.

D. Le plan

Si le triptyque « sens/valeur/portée » doit forcément être présent dans votre


commentaire, évitez néanmoins d’en faire votre plan ou, si vous le faites, travail-
lez particulièrement vos intitulés pour que cela ne soit pas trop visible.
Ainsi, ne cherchez pas à tout prix à faire entrer vos idées dans un plan
préconçu si l’arrêt ne s’y prête pas. Un plan se subdivisant en deux parties
correspondant aux deux parties distinctes de l’attendu de la Cour de cassa-
tion – si ces deux parties existent – peut être beaucoup plus dynamique et
pertinent.
Éléments de construction du plan :
• lorsque l’arrêt renvoie à plusieurs questions (se rapportant au thème du
cours), il peut être opportun de faire une partie par problème. S’il y a plus
de 2 problèmes, vous pouvez les rassembler, pour les faire tenir dans deux
parties.
• si vous n’avez qu’un seul problème, vous devrez trouver une subdivision,
souvent visible à la lecture de l’arrêt et notamment de l’attendu de la juridic-
tion qui rend la décision. Exemples :
– la Cour rappelle un principe (I), mais pose une exception (II) ;
– la Cour énonce une règle déjà posée par la JP antérieure (I), mais elle
y apporte une précision (II).
En cas de manque total d’inspiration, et en l’absence de plan plus perti-
nent, vous pouvez appliquer un plan par défaut :
I. 
A. Énonciation et définition de la règle de principe, position du problème.
Dans cette partie, commentez le visa s’il y en a un. Faites si néces-
saire une distinction entre plusieurs notions en cause.
Attention : dans une partie de ce type, le risque de verser dans « la
dissertation » est grand. Raccrochez toujours à l’arrêt. Citez la Cour.

B. Expliquez comment les juges appliquent en l’espèce la règle énoncée


dans votre A. Il s’agit ici de donner et de rendre le plus intelligible
possible, le sens de l’arrêt.
II.
A. Dans cette partie, donnez la portée de l’arrêt.
B. Dans cette partie donnez sa valeur.

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Rappel : les parties les plus importantes (sur le fond et en volume), sont

Annexe • Méthode des exercices juridiques


les I.B/et II.A/Dès lors, n’hésitez pas à inverser vos deux sous-parties
du II lorsque la portée est faible, mais que l’arrêt se prête à la critique.
Ce qui donnera ainsi (II A/valeur et II B/portée).

E. Les titres
• Ils doivent être apparents ;
• évitez les intitulés trop généraux ;
• la formulation doit être simple et claire et doit se rapporter au contenu
de la partie. Il est important d’avoir une cohérence entre l’intitulé et le
contenu de la partie ou de la sous-partie en question, car bien souvent le
correcteur commence par lire le plan, et s’attend à retrouver un certain
nombre d’éléments dans les parties.
Enfin de manière générale, soyez mesuré (critiquer la décision ne veut
pas dire insulter les magistrats). Et faites attention à votre expression écrite
ainsi qu’au vocabulaire employé. En droit, les mots ont un sens très précis,
et le contresens est vite arrivé.
Ne faites pas de conclusion.

II. Le cas pratique

Le cas pratique met le candidat dans la situation d’un avocat ou d’un


consultant juridique approché pour une affaire présentant des difficultés
juridiques.
L’objectif de l’exercice n’est pas de trouver LA solution au problème de
votre client mais que vous montriez au correcteur vos capacités de raison-
nement, de construction et de réflexion :
• en d’autres termes, peu importe que vous trouviez la bonne solution, car
la note porte sur le raisonnement, et sur les différentes étapes de votre
réflexion ;
• il ne s’agit pas d’offrir au correcteur LA solution mais d’évoquer l’ensemble
des solutions possibles avant de choisir en conclusion la plus pertinente.
Toutes les hypothèses doivent être traitées.

A. La lecture des cas

Il faut dès la 1re lecture, comprendre les différents problèmes soulevés


par les faits.

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De manière générale, il y a deux types de sujets :
• les sujets avec des faits et différentes situations concernant un protago-
niste central et présenté en bloc ; et avec une seule question large à la fin
(« qu’en pensez-vous ? »), et dans ce cas, c’est à vous d’envisager les diffé-
rents problèmes ;
• les sujets présentant différents cas bien compartimentés, avec différentes
histoires, et des faits indépendants, et avec à chaque fois des questions
plus ou moins précises (M. X peut il échapper au paiement du prix ? …). Dans
cette situation, il faudra aborder les différents cas suivant la distinction
préalablement imposée par le sujet.
Ensuite, il faut relever les faits les plus importants, les plus pertinents
pour chacun des problèmes que vous avez soulevés.
Attention à ne pas tomber dans un écueil assez fréquent : certes, le cas
pratique suppose d’envisager toutes les hypothèses juridiques probables, mais
il ne faut pas créer des hypothèses qui ne figurent pas dans l’intitulé. Il faut
donc éviter d’évoquer des données factuelles qui n’existent pas. Ce qui n’est
pas dit ne doit pas être supposé.
Par exemple, si à aucun moment dans le cas on ne vous laisse entendre
que le cocontractant a été à l’origine d’un mensonge ou d’un stratagème, ou
d’une réticence dolosive, vous devez évincer rapidement cette hypothèse qui
manifestement n’a pas lieu d’être.
Mais parfois, si rien n’est précisé, vous devez envisager différentes
hypothèses possibles.
Par exemple, s’il est précisé qu’une promesse a été conclue entre X et Y et
que le promettant se rétracte. Pour savoir ce que le bénéficiaire de la promesse
pourra obtenir, il faut savoir si on a affaire à une promesse unilatérale ou à
une promesse synallagmatique de vente, la sanction de la rétractation n’étant
pas la même dans les 2 cas.
Il ne faut donc pas ajouter aux faits mais envisager différentes hypothèses
si la solution sera différente dans cette perspective.

B. La mise en forme

1. Le plan
Il n’est pas nécessaire de faire un plan en 2 parties et 2 sous-parties.
Le plan du cas pratique se divise :
• en autant de parties qu’il y a de problèmes ;

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• et autant de sous-parties qu’il y a d’hypothèses/fondements

Annexe • Méthode des exercices juridiques


envisageables.
Exemple :
M. X achète un meuble chez un antiquaire. Le vendeur (l’antiquaire) a en fait
pris un meuble ancien et l’a vieilli artificiellement pour pouvoir le vendre plus cher
en tant qu’antiquité.
Puis quelques mois après, M. X étant dans une situation financière difficile,
vend lui-même des tableaux à cet antiquaire pour un prix modique, sans être vérita-
blement conscient de sa valeur.
Ultérieurement M. X se rend compte non seulement que le meuble qu’il a acheté
n’est pas une antiquité mais également que les tableaux qu’il a vendus sont en fait
des tableaux de maître qui valaient beaucoup plus cher que le prix qu’il en a tiré.
I. Cas de la fausse antiquité achetée par M. X.
A. l’erreur.
B. le dol.
II. Cas des tableaux vendus par M. X.
A. l’erreur.
B. le dol.
C. la violence (économique)
D. l’abus de faiblesse (pénal)
Règle d’or : lorsque plusieurs fondements sont envisageables, il faut
commencer par les hypothèses les moins probables et finir par le fonde-
ment qui a le plus de chance d’aboutir.

N’oubliez pas de répondre à la question posée, même si cela peut apparaître


comme une évidence. En effet, certains étudiants évoquent parfois différentes
hypothèses sans répondre à la question posée par le cas.
Si la question est de savoir si M. X peut obtenir la nullité pour réticence
dolosive, nul besoin d’évoquer l’erreur et la violence, car la question est très
orientée et seule celle-ci doit être traitée.

2. L’introduction
Il n’y a pas à proprement parler d’introduction dans un cas pratique. Juste
un bref rappel des faits très synthétique avec une qualification juridique.
Tout dépend si c’est un cas général, auquel cas il faut un rappel des faits
général, ou si les cas sont compartimentés, et dans ce cas, il conviendra de
prendre les cas un par un et de faire un rappel des faits pour chacun.

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Il s’agit ensuite de poser le problème de droit au début de chaque partie
du cas pratique.
Parfois, une question est posée directement par le cas pratique : M. X peut-il
obtenir l’anéantissement de son contrat ? Ou Mme Y peut-elle obtenir réparation
de son dommage ? Dans ce cas, il faut reformuler juridiquement le problème
posé : M. X peut-il obtenir la nullité du contrat et sur quels fondements ? Contre
qui Mme Y peut-elle engager une action en responsabilité civile ?
Il convient ensuite de faire une annonce de plan correspondant aux diffé-
rents fondements envisageables : « plusieurs fondements sont envisageables,
à savoir, l’erreur (A), le dol (B), la violence (C). »

3. La rédaction
Dans le corps de votre devoir, votre raisonnement doit être syllogistique
et suivre trois étapes (communément appelées « majeure », « mineure »,
« conclusion »).
Les éléments théoriques (majeure) : il faut énoncer la règle de droit, c’est-
à-dire le texte de loi, ou l’article du Code, ou encore la jurisprudence si c’est
elle qui fixe la règle.
Il faut réécrire la règle si elle est courte, la résumer si elle est longue.
Et il convient surtout de décortiquer les éléments constitutifs et de ne
pas se contenter d’une référence générale.
Ex. de l’erreur prévue à l’art. 1110 du Code civil :
• cet article prévoit la nullité du contrat en cas d’erreur sur les qualités
substantielles, celles que l’on est normalement en droit d’attendre d’une
chose. Il peut s’agir de l’authenticité d’une œuvre d’art par exemple ;
• cette erreur doit être déterminante : sans cette erreur, la victime n’aurait
pas conclu le contrat ;
• l’erreur doit être également excusable, cet élément étant apprécié in
concreto ;
• l’errans ne doit pas non plus avoir accepté d’aléa qui serait un obstacle au
prononcé de la nullité.
Il convient plus rarement, de faire un exposé de la doctrine lorsqu’il s’agit
d’une question qui n’a pas encore été tranchée par la Cour de cassation ou
sur laquelle la jurisprudence est hésitante. Par exemple, le décès du pollici-
tant rend-il l’offre caduque ? Sur ce point les arrêts sont contradictoires, il faut
alors renforcer sa prise de position par une réflexion doctrinale.
Si au sein de la règle de droit, il y a un principe et des exceptions, il faut
envisager d’abord les différentes conditions du principe avant d’aborder
l’exception.

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Confrontation des faits et du droit (mineure) : Ne surtout pas négliger

Annexe • Méthode des exercices juridiques


cette étape ! C’est à ce moment-là qu’il est important d’avoir sélectionné les
faits pertinents.
Solution/conclusion : il faut enfin conclure en précisant si oui ou non la
personne qui vous a sollicité pourra obtenir gain de cause.
Il ne faut surtout pas se cacher derrière l’appréciation des juges.
Il s’agit de dire clairement quel est le fondement qui a le plus de chance
d’aboutir, ou d’affirmer que la prétention n’a aucune chance d’être retenue
par les juges.
Retenez l’essentiel :
• être structuré, clair, précis ;
• répondre aux questions posées ;
• envisager toutes les hypothèses probables et éviter les hypothèses purement
éventuelles ;
• commencer par l’hypothèse la moins probable ;
• si vous reconnaissez les faits qui se rapprochent d’un arrêt, ne vous focali-
sez pas sur cet arrêt, cette décision n’étant qu’un fondement possible à
aborder uniquement à la fin.

III. La dissertation

La dissertation est un exercice de réflexion théorique, permettant de


formaliser un cheminement de pensée. Il s’agit d’un travail d’argumentation
répondant de manière structurée à une question posée.

A. Le travail préparatoire

Le travail préparatoire est crucial. La lecture attentive du sujet doit avant


tout conduire le candidat à bien cerner son domaine : quels sont les thèmes qui
s’y rattachent ? Et à l’inverse, lesquels s’en détachent ?
Ce premier travail doit ainsi permettre d’éviter les deux principaux écueils
de la dissertation, à savoir le hors-sujet (c’est-à-dire évoquer des éléments
superflus, sans rapport avec la question posée) et le traitement partiel du sujet
(passer sous silence certains aspects essentiels du sujet). Un correcteur parti-
culièrement sévère pourrait sanctionner ce type de défaut majeur par une
note « sanction », très inférieure à la moyenne.

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Il est donc primordial de bien recenser les éléments importants du sujet et
de fixer ses limites, à la fois thématiques (un sujet sur les vices du consentement
conduira à aborder l’erreur, le dol, la violence, ni plus ni moins), mais aussi
spatiales (droit français, européen, étranger), et temporelles (sujet historique,
contemporain, postérieur ou antérieur à une réforme importante, etc.).
Il convient ensuite de s’interroger sur l’articulation des différents termes
du sujet entre eux. Une attention toute particulière doit être ici portée sur les
conjonctions employées dans l’intitulé du sujet. Par exemple, un sujet intitulé
« exécution forcée et dommages-intérêts » ne sera pas traité de la même manière
qu’un sujet intitulé « exécution forcée ou dommages-intérêts ». Le premier suppose
d’envisager une application cumulative des deux sanctions de l’inexécution
contractuelle alors que le second conduira plutôt à s’interroger sur une appli-
cation alternative des deux sanctions.
Le travail préparatoire s’achève avec la mobilisation des connaissances
afférentes au sujet : une fois celui-ci bien délimité, le candidat dresse la liste au
brouillon de toutes les informations dont il dispose sur le sujet. Ces éléments
seront mobilisés et développés par la suite dans le corps du devoir. Une fois
recensés, ils doivent être alors regroupés en différents thèmes généraux, qui
formeront les différentes parties du raisonnement.

B. La définition de la problématique

La définition de la problématique est indispensable. Elle permet de distin-


guer la dissertation – exercice de réflexion  –, de la simple récitation de cours,
qui doit être évitée à tout prix.
De manière générale, la problématique se construit autour d’une tension
entre deux idées, deux impératifs, ou deux principes, qu’il convient de résoudre
ou de dépasser. Par exemple, un sujet sur la révision du contrat pour imprévi-
sion, soulève la question d’une tension entre deux principes fondamentaux
du droit des contrats, à savoir d’une part, l’intangibilité du contrat, qui inter-
dit à une partie seule de remettre en cause les stipulations et, d’autre part,
l’équilibre du contenu contractuel, menacé par la survenance d’un événement
imprévisible. Comment à la fois préserver l’équilibre du contrat, sans porter
atteinte à son intangibilité ? Comment concilier ces deux principes ? L’un
doit-il prévaloir sur l’autre ? Une dialectique est-elle possible ?

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C. L’élaboration du plan

Annexe • Méthode des exercices juridiques


Le plan constitue la structure de votre réponse à la problématique préala-
blement définie. La dissertation juridique est traditionnellement construite
autour de deux parties (chacune composée de deux sous-parties), sans que
cette contrainte soit absolument impérative ; étant précisé qu’en cas de plan
binaire, le cœur du sujet doit être traité dans les parties I-B/et II-A/.
Les différents modes de réflexion classiques sont tout à fait transposables
à la matière juridique. Le candidat peut ainsi parfaitement structurer sa
réponse en suivant :
• un plan dialectique, visant à confronter deux éléments en contradiction,
avant de chercher à dépasser cette relation conflictuelle pour trouver un
terrain de conciliation ;
• un plan analytique, ayant pour ambition de décrire un phénomène, puis
d’en exposer les causes, les conséquences (éventuellement néfastes) et de
proposer des solutions pour y remédier ;
• un plan comparatif, cherchant à mettre en lumière les points communs et
les différences entre deux notions ou deux phénomènes ;
• un plan thématique, envisageant différents aspects d’une même question,
ou l’abordant sous différents points de vue.
En droit, différents plans types sont fréquemment employés :
I. Les conditions d’application d’une règle.
II. Les effets de l’application de la règle.
I. Le principe posé par une règle.
II. Les limites et/ou les exceptions au principe.
I. La notion.
II. Le régime.
Plus spécifiquement en matière de droit des contrats, d’autres plans types
sont envisageables :
I. Étude d’un phénomène au stade de la formation du contrat.
II. Étude d’un phénomène au stade de l’exécution du contrat.
I. Étude d’une règle sous l’angle de la liberté contractuelle.
II. Étude d’une règle sous l’angle de l’immixtion du juge dans le contrat.
I. Les moyens préventifs de protection de certaines parties au contrat.
II. Les moyens curatifs de protection de certaines parties au contrat.

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D. La rédaction

L’introduction constitue un élément déterminant de la dissertation. À sa


lecture, le correcteur se forge un a priori (positif ou négatif) sur la qualité
de la copie, difficile à renverser par la suite. Il ne faut absolument pas négli-
ger cette étape.
L’introduction doit comporter plusieurs éléments :
• l’accroche constitue l’entrée en matière en une ou deux phrases. Dans l’idéal,
l’accroche résume votre position développée dans la dissertation. Il peut
s’agir de la citation d’un auteur de doctrine, en accord avec vos idées, ou
d’un élément d’actualité illustrant les questions abordées dans la copie ;
• la définition des termes du sujet est indispensable en ce qu’elle permet de
limiter le domaine de l’étude et prémunit contre tout risque de hors sujet
ou de traitement partiel du sujet ;
• quelques aspects historiques du sujet sont également bienvenus. Ils mettent
en exergue les principales évolutions juridiques sur le thème étudié, et le
replacent dans son contexte (celui par exemple, d’un projet de réforme) ;
• la problématique indique ensuite l’orientation suivie et l’approche du sujet
retenue ;
• l’annonce de plan doit être la plus claire possible et correspondre parfaite-
ment à la structure du raisonnement adopté. Sur la forme, sont à éviter les
formulations lourdes du type « nous verrons dans une première partie…
puis dans une deuxième partie… ». L’annonce de plan doit être formulée
comme un résumé en quelques lignes de toute la réflexion développée
dans la dissertation. Par exemple, pour une dissertation sur « les parties
au contrat », traitée dans un plan type (I) notion, (II) régime, le plan pourra
être ainsi annoncé : La notion de partie au contrat, relativement compréhen-
sive, ne se limite pas aux contractants d’origine et englobe les personnes pouvant,
dans certaines circonstances, leur succéder (I). En tant que telles, les parties sont
soumises à un régime de droits et d’obligations, gouverné par le principe de la
force obligatoire du contrat à leur égard (II).
Les différentes parties devront chacune être ensuite précédées d’un titre
apparent. Dans l’idéal, le titre doit être à la fois concis et conforme aux idées
développées dans la partie considérée. Par convention, les titres ne comportent
pas de verbe conjugué. Ils doivent être également « qualifiés » (c’est-à-dire
comporter des adjectifs qualificatifs reflétant l’approche du candidat). Plutôt
que de formuler ainsi un titre « le principe de l’effet relatif comporte des
exceptions », il sera préférable de le formuler de la sorte « les rares excep-
tions au principe de l’effet relatif ». Afin de bien faire ressortir l’articulation
du plan, les titres doivent, dans la mesure du possible, « se répondre » d’une
partie à l’autre.

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Annexe • Méthode des exercices juridiques
Par exemple :
I. La notion large de violence.
II. La sanction sévère de la violence.
Chacune des parties générales est introduite par un chapeau, c’est-à-dire
une annonce des différentes sous-parties, suivant les mêmes règles que
l’annonce de plan général. Chacune des parties se termine par une phrase
de transition vers la partie suivante.
Le corps du devoir se compose ensuite de plusieurs paragraphes, énonçant
chacun une idée, développée, argumentée et étayée par un ou plusieurs
exemples. La source (textuelle, jurisprudentielle, doctrinale) des informa-
tions données doit être systématiquement indiquée entre parenthèse ou en
note de bas de page.
La dissertation juridique ne comporte traditionnellement pas de conclu-
sion. Celle-ci peut en effet s’avérer superfétatoire si elle ne fait que reprendre
les idées fondamentales de l’étude, par définition développées dans le corps
de la dissertation.

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Bibliographie sélective

I. Ouvrages et encyclopédies
Aubert, J.-L., Notions et rôle de l’offre et de l’acceptation dans la formation du contrat,
LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 59, 1970
Aynès, A., Le droit de rétention, unité ou pluralité, Economica, coll. Recherches Juridiques,
2005
Aynès, L., Gautier, P.-Y. et Malaurie, Ph., Droit des contrats spéciaux, LGDJ, coll. Droit
civil, 11e éd., 2020
Bertrand, F., L’opposabilité du contrat aux tiers, thèse de doctorat en Droit, Université
Paris II, 1979
Bonassies, P., Le dol dans la conclusion des contrats, thèse de doctorat en Droit, Université
de Lille, 1955
Bores, P., Les cas d’application du droit de rétention, thèse de doctorat en Droit, univer-
sité de Paris, 1913
Boucard, H., « Responsabilité contractuelle », in Rép. civ. Dalloz, 2018,
Breton, A., La notion de violence en tant que vice du consentement. Étude critique, thèse
de doctorat en Droit, Université de Caen, 1925 ;
Calastreng, S., La relativité des conventions, thèse de doctorat en Droit, Université de
Toulouse, 1939 ;
Capitant, H., De la cause des obligations (contrats, engagements unilatéraux, legs), La
Mémoire du droit, Collection de la Faculté Jean-Monnet, 2012
Cassin, R., De l’exception tirée de l’inexécution dans les rapports synallagmatiques (excep-
tion non adimpleti contractus) et de ses relations avec le droit de rétention, la compen-
sation et la résolution, thèse de doctorat en Droit, Université Paris, 1914
Célice, R., L’erreur dans les contrats, étude de jurisprudence française, thèse de doctorat
en Droit, Université de Paris, 1922
Chauvel, P., Le vice du consentement, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 1981
Chantepie, G. et Latina, M., La réforme du droit des obligations : Commentaire théorique
et pratique dans l’ordre du Code civil, Dalloz, 2016

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Chevrier, G., Essai sur l’histoire de la cause dans les obligations, thèse de doctorat en
Droit, Université de Paris, 1929
Cohérier, A., Des obligations naissant des pourparlers préalables à la formation des
contrats, thèse de doctorat en Droit, Université de Paris, 1939 ;
Coulet, J., L’exécution forcée en nature, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 2007
Dagot, M., La simulation en droit privé, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 73, 1967
Deboissy, F., La simulation en droit fiscal, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 276, 1997 ;
Delebecque, Ph. Pansier, Fr.-J, Droit des obligations, LexisNexis, coll. Objectif droit,
9e éd., 2018
Delily, E., L’exécution forcée en nature des obligations contractuelles non pécuniaires, thèse
de doctorat en Droit, Université de Poitiers, 2002
Dissaux, N. et Jamin, Chr., Projet de réforme du droit des contrats, du régime général et
de la preuve des obligations, rendu public le 25 février 2015 : commentaire article par
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Duclos, J., L’opposabilité. Essai d’une théorie générale, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 179,
1984 ;
Durand, J.-F., Le droit de rétention, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 1979
Fabre-Magnan, M.,
– Droit des obligations. t. 1, Contrat et engagement unilatéral, PUF, coll. Thémis,
5e éd., 2019
– De l’obligation de renseignement dans les contrats, Essai d’une théorie, LGDJ, coll.
Anthologie du droit, 2014
Fages, B., Droit des obligations, LGDJ, coll. Manuels 10e éd., 2020
Farjat, G., L’ordre public économique, LGDJ, 1963
Flour, Y., L’effet des contrats à l’égard des tiers en droit international privé, thèse de doctorat
en Droit, Université Paris II, 1977 ;
Fontaine, M. et Viney, G., La sanction de l’inexécution des obligations contractuelles – Études
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Fragu, E., Des bonnes mœurs à l’autonomie personnelle : essai critique sur le rôle de la
dignité humaine, thèse de doctorat en Droit, Université Paris II, 2015
Géraud-Llorca, E., L’introduction des bonnes mœurs dans le Code civil, in Les bonnes
mœurs, PUF, 1994,
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– Cause de l’engagement et validité du contrat, LGDJ 2006
Ghestin, J., Loiseau, G. et Serinet, Y.-M., Traité de droit civil, La formation du contrat,
t. 2, L’objet et la cause, Les nullités, LGDJ, coll. Traité de droit civil, 4e éd., 2013
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147

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Index terminologique

(Les chiffres renvoient aux numéros de paragraphe)

A Consentement : 32, 35, 48, 52 s., 75, 76,


92 s, 153, 158, 160
Acceptation : 20, 61 à 64, 69 à 77, 174
Consensualisme : 65, 75
Accord de principe : 37
Consommation : 11, 121, 137 s., 268
Acte juridique : 3,4, 86, 178, 212
Contrat
– conventionnel : 4
– à exécution instantanée : 237
– unilatéral : 4
– à exécution successive : 237
Astreinte : 207, 208, 216, 218
– à titre gratuit : 15, 90, 91, 170
Autonomie : 123
– accessoire : 64, 70, 134, 253
Avant-contrat : 47 s.
– aléatoire : 16
B – commutatif : 16
Bonne foi : 24, 31, 37, 41, 164, 197, 203, – consensuel : 75
209, 225 – d’adhésion : 134
C – de Hardship : 22, 158, 163
Capacité : 78 s. – innommé : 10, 64
Causalité (lien de) : 186, 251 s. – international : 12
Cause : 32, 251 s., 110 à 112 – interne : 12
Chose : 33, 34, 57, 58, 64, 75, 92, 98, 99, – intuitu personae : 96, 208
110, 111, 131,151, 186 à 190, 261 – négocié : 19, 140
Clause – nommé : 10, 64
– abusive : 138 s. – onéreux : 15, 16, 78, 110, 135
– de compétence : 171 – synallagmatique : 14, 52, 57 s.
– de différend : 236 – unilatéral : 14, 53 s.
– de non-concurrence : 117, 124, 151, Convention (notion de) : 3
177, 222, 236
– limitative de responsabilité : 266 s.
D
Déséquilibre significatif : 13, 134 s.
– pénale : 270 s.
Détermination du prix : 129, 130
– résolutoire : 199, 225 s.
Dol : 241, 263, 33, 35, 100 s.
Codification : 25
Dommage : 36, 45, 46, 51, 107, 239 s.
Confiance : 29, 232

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E – de donner : 151
Effet relatif : 168 s. – de faire : 33, 151, 205, 213 s., 221
Enrichissement sans cause : 5 – de mise en garde : 34
Équilibre : 133 s., 162, 163, 166 – de moyen : 152, 246
Équivalence : 16, 133, 218, 253, 262 – de ne pas faire : 151, 221 s.
Erreur : 93 s., 102, 103, 252 – de renseignement : 34
Exception d’inexécution : 191 s. – de résultat : 152, 246
Exécution forcée : 165, 239, 203 s. Offre : 20, 21, 43, 48 à 50, 55, 60 s.
Opposabilité : 70, 138, 175 s.
F
Ordre public : 111, 114 s., 202, 209, 267
Force majeure : 255 s.
– de direction : 120
Force obligatoire : 148 s., 224, 236
– de protection : 121
Formalisme : 62, 73

G P
Pacte de préférence : 19, 47 s.
Gestion d’affaires : 5
Porte-fort : 104
I Promesse : 19, 52 s., 68, 101, 107, 174
Imprévision : 22, 162 s. Pourparlers : Voy. « Négociation »
Incapacité : 79 s. Preuve : 7, 74, 103, 142, 176, 132, 233,
– de jouissance : 90 s. 246, 252
– d’exercice : 80 s. Prévisibilité : 22, 162 s., 257, 263
Indexation : 159 Prix : 33, 49, 53, 57 à 59, 64, 73, 110, 111,
Information : 24 s., 101, 103, 155 120 à 121, 129, 133, 134, 135, 138, 141,
144, 159, 163, 171, 178, 179, 188, 190,
L 193, 197, 202, 209, 220, 240
Lésion : 16, 83, 86, 89, 99, 136 Q
Liberté contractuelle : 65, 73, 113 s., Quasi-contrats : 5
123, 138, 143, 269
Loyauté : 197 R
Reconduction : 65
M Réparation : 239 s.
Majeur : 84 s.
Répétition de l’indu : 5
Mineur : 84 s.
Résiliation : 141, 142, 224 s.
Mise en demeure : 182, 203, 211, 226,
240, 265 Résolution : 130, 164, 167, 182, 183, 201,
224 s., 259
N Responsabilité : 152, 168, 176, 177, 182,
Négociation : 19 s., 63, 134, 158, 163 s. 183, 201, 239 s.
Nullité : 35, 51, 83, 89 à 97, 102, 103, 108, Rétractation : 55, 67, 68, 77
114, 118, 122, 124, 129, 131 à 136, 147,
268 S
Simulation : 178 s.
O Stipulation pour autrui : 172 s.
Objet : 32, 110
Obligation V
– de renégocier : 22 Violence : 35, 105 s.
– de bonne foi : 31 Vice : 35, 92 s., 133
– de conseil : 34

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Table des cartes mentales

1. Initiative des négociations�������������������������������������������������������������������������������������������17


2. Déroulement des négociations���������������������������������������������������������������������������������� 23
3. Rupture des négociations������������������������������������������������������������������������������������������� 25
4. Le pacte de préférence������������������������������������������������������������������������������������������������ 27
5. Promesse de contrat���������������������������������������������������������������������������������������������������� 30
6. L’offre������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������ 35
7. L’acceptation������������������������������������������������������������������������������������������������������������������ 38
8. Incapacités d’exercice�������������������������������������������������������������������������������������������������� 44
9. Incapacités de jouissance������������������������������������������������������������������������������������������� 45
10. L’erreur��������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 48
11. Le dol������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 51
12. La violence��������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� 53
13. Licéité du contenu�������������������������������������������������������������������������������������������������������� 63
14. Certitude du contenu��������������������������������������������������������������������������������������������������� 66
15. Équilibre en droit commun���������������������������������������������������������������������������������������� 69
16. Équilibre en droit spécial������������������������������������������������������������������������������������������� 72
17. Obligations contractuelles des parties��������������������������������������������������������������������� 79
18. L’intangibilité du contrat�������������������������������������������������������������������������������������������� 85
19. Principe de l’effet relatif��������������������������������������������������������������������������������������������� 87
20. Tempéraments à l’effet relatif������������������������������������������������������������������������������������ 91
21. Droit de rétention��������������������������������������������������������������������������������������������������������� 97
22. Exception d’inexécution������������������������������������������������������������������������������������������� 101
23. Les conditions de l’exécution forcée����������������������������������������������������������������������� 106
24. Mise en œuvre de l’exécution forcée���������������������������������������������������������������������� 109
25. Les conditions de la résolution�������������������������������������������������������������������������������� 112
26. Les effets de la résolution����������������������������������������������������������������������������������������� 114
27. Régime légal de la responsabilité contractuelle�������������������������������������������������� 123
28. Aménagement conventionnel de la responsabilité contractuelle�������������������� 125

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Table des matières

Table des abréviations....................................................................................................... 3

Introduction........................................................................................................................... 7
I.. Notion de (droit des) contrats....................................................................... 7
II.. Sources du droit des contrats........................................................................ 8
III..Typologie des contrats................................................................................. 10
Partie I. La formation du contrat................................................................................ 13
Chapitre I. Les préalables au contrat............................................................. 15
Section I. La négociation contractuelle.......................................................... 15
§ 1..L’initiative des négociations...................................................................... 16
§ 2..Le déroulement des négociations...............................................................17
A.. Le devoir d’information précontractuelle...........................................17
1.. Débiteurs et créanciers de l’obligation d’information................. 17
2.. Contenu de l’obligation d’information........................................ 19
3.. Sanctions du manquement à l’obligation d’information.............. 21
B.. Les accords de négociation.................................................................. 22
§ 3..La rupture des négociations...................................................................... 23
A.. Liberté de la rupture, sous réserve de l’abus...................................... 23
B.. La responsabilité en cas de rupture fautive........................................ 24
Section II. Les avant-contrats........................................................................... 26
§ 1..Le pacte de préférence............................................................................... 26
§ 2..Les promesses de contrat........................................................................... 27
A.. Promesse unilatérale de contrat......................................................... 28
B.. Promesse synallagmatique de contrat................................................ 29

Chapitre II. La conclusion du contrat............................................................ 31


Section I. La rencontre des volontés................................................................ 31
§ 1..L’offre......................................................................................................... 31
A.. Contenu ferme et précis de l’offre....................................................... 32
B.. Forme de l’offre.................................................................................... 33
C.. Rétractation de l’offre.......................................................................... 34
§ 2..L’acceptation.............................................................................................. 35
A.. Acceptation ferme et précise quant aux éléments essentiels
du contrat............................................................................................. 35
B.. Forme de l’acceptation......................................................................... 36
C.. Effets de l’acceptation quant à la conclusion du contrat..................... 37

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Section II. La capacité des parties................................................................... 39
§ 1..Les incapacités d’exercice.......................................................................... 40
A.. Incapacités d’exercice du mineur non émancipé................................ 40
B.. Incapacités d’exercice du majeur protégé........................................... 41
§ 2..Les incapacités de jouissance.................................................................... 44
Section III. Le consentement des parties....................................................... 46
§ 1..L’erreur....................................................................................................... 46
A.. L’erreur affectant la validité du contrat.............................................. 46
B.. L’erreur n’affectant pas la validité du contrat..................................... 47
§ 2..Le dol.......................................................................................................... 49
§ 3..La violence................................................................................................. 51

Chapitre III. Le contenu du contrat................................................................ 55


Section I. Un contenu licite et certain............................................................. 57
§ 1..Un contenu contractuel licite.................................................................... 57
A.. Licéité du contenu contractuel en considération des règles
d’ordre public....................................................................................... 57
B.. Licéité du contenu contractuel en considération des droits
et libertés fondamentaux.................................................................... 61
C.. Licéité du contenu contractuel en considération
des bonnes mœurs............................................................................... 62
§ 2..Un contenu contractuel certain................................................................. 63
A.. Une prestation déterminée ou déterminable...................................... 64
B.. Une prestation possible....................................................................... 65
Section II. Un contenu équilibré...................................................................... 66
§ 1..Les règles de droit commun....................................................................... 67
§ 2..Les règles de droit spécial.......................................................................... 69
A.. La sanction du déséquilibre significatif en droit
de la consommation............................................................................. 69
B.. La sanction du déséquilibre significatif en droit
de la concurrence................................................................................ 71

Partie II. L’exécution du contrat.................................................................................. 73


Chapitre I. Les effets du contrat....................................................................... 75
Section I. La force obligatoire du contrat à l’égard des parties.................. 76
§ 1..Des obligations contractuelles mises à la charge des parties................... 77
A.. Nature des obligations stipulées par les parties................................. 77
B.. Obligations déduites des stipulations par le juge................................ 78
§ 2..L’intangibilité du contrat........................................................................... 79
A.. L’intangibilité du contrat à l’égard des parties.................................... 80
1.. Possibilité restreinte de modifier unilatéralement le contrat...... 80
2.. Possibilité restreinte de révoquer unilatéralement le contrat...... 81
B.. L’intangibilité du contrat à l’égard du juge.......................................... 81
1.. Solution antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016 :
rejet de la révision judiciaire pour imprévision.......................... 82
2.. Solution retenue par l’ordonnance du 10 février 2016 :
consécration de la révision judiciaire pour imprévision............. 83
Section II. L’effet relatif du contrat à l’égard des tiers................................. 85
§ 1..Principe de l’effet relatif du contrat.......................................................... 85
§ 2..Tempéraments à l’effet relatif du contrat.................................................. 87
A.. La stipulation pour autrui................................................................... 87
B.. L’opposabilité du contrat aux tiers...................................................... 89

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1.. Respect par les tiers de la situation juridique issue du contrat.... 89
2.. Inopposabilité du contrat aux tiers en cas de simulation............ 90

Chapitre II. Les sanctions de l’inexécution contractuelle..................... 93


Section I. L’inexécution de sa propre obligation en sanction
de l’inexécution du cocontractant............................................................. 94
§ 1..Le droit de rétention.................................................................................. 94
A.. Conditions du droit de rétention......................................................... 95
B.. Effets du droit de rétention.................................................................. 96
§ 2..L’exception d’inexécution.......................................................................... 97
A.. Les conditions de mise en œuvre de l’exception d’inexécution.......... 98
1.. Conditions tenant aux obligations des parties............................ 98
2.. Conditions tenant à l’inexécution de la part du débiteur
de l’excipiens.............................................................................99
B.. Les effets de l’exception d’inexécution............................................. 100
Section II. L’exécution forcée en nature....................................................... 101
§ 1..Les conditions de l’exécution forcée en nature....................................... 102
A.. Conditions tenant à la prestation à exécuter..................................... 102
1.. Possibilité d’exécuter l’obligation en nature............................. 103
2.. Proportionnalité entre le coût de l’exécution
pour le débiteur et son intérêt pour le créancier....................... 104
B.. Conditions procédurales................................................................... 105
§ 2..La mise en œuvre de l’exécution forcée en nature.................................. 106
A.. La mise en œuvre de l’exécution forcée d’une obligation de faire.... 106
1.. Exécution forcée d’une obligation
de faire autre que le paiement d’une somme d’argent............... 106
2.. Exécution forcée d’une obligation
de paiement d’une somme d’argent.......................................... 107
B.. La mise en œuvre de l’exécution forcée d’une obligation
de ne pas faire.................................................................................... 108
Section III. La résolution du contrat.............................................................. 109
§ 1..Les conditions de la résolution du contrat............................................... 110
A.. Conditions de la résolution par application
d’une clause résolutoire..................................................................... 110
B.. Conditions de la résolution par voie de notification......................... 111
C.. Conditions de la résolution judiciaire............................................... 112
§ 2..Les effets de la résolution du contrat....................................................... 113
Section IV. La responsabilité contractuelle................................................. 114
§ 1..Le régime légal de la responsabilité contractuelle................................. 116
A.. Les conditions de la responsabilité contractuelle............................ 116
1.. Une inexécution contractuelle................................................. 116
2.. Un préjudice............................................................................ 117
3.. Un lien de causalité entre l’inexécution et le préjudice............. 118
B.. Les modalités de la réparation.......................................................... 121
§ 2..L’aménagement conventionnel de la responsabilité contractuelle........ 123
A.. Les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité................... 123
B.. La clause pénale................................................................................ 124

Annexe. Méthode des exercices juridiques.......................................................... 127


I.. Le commentaire de décision judiciaire.................................................. 127
A.. La lecture de la décision.......................................................................... 127
B..L’introduction........................................................................................... 128
C.. Le corps du commentaire........................................................................ 129

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D.. Le plan...................................................................................................... 130
E.. Les titres................................................................................................... 131
II.. Le cas pratique............................................................................................ 131
A.. La lecture des cas..................................................................................... 131
B.. La mise en forme..................................................................................... 132
1.. Le plan............................................................................................... 132
2..L’introduction.................................................................................... 133
3.. La rédaction....................................................................................... 134
III..La dissertation............................................................................................. 135
A.. Le travail préparatoire............................................................................. 135
B.. La définition de la problématique........................................................... 136
C.. L’élaboration du plan............................................................................... 137
D.. La rédaction............................................................................................. 138

Bibliographie sélective...................................................................................................141
I.. Ouvrages et encyclopédies.........................................................................141
II..Articles.......................................................................................................... 144
Index terminologique.................................................................................................... 149

Table des cartes mentales............................................................................................ 151

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