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Matière : Droit Commercial

Enseignant : Pr. Asmaa BOUKHIMA

Année Universitaire : 2020-2021


Filière : Droit en français
Semestre 2
INTRODUCTION

1- Définition du droit commercial :


Le droit commercial est une branche de droit privé qui s’applique spécialement à certaines personnes (Les
commerçants) et à certaines opérations juridiques (Les actes de commerce).
Le droit commercial a un domaine d’intervention large dans la mesure où il régit la majeure partie de l’activité
économique à savoir :
- Le commerce proprement dit, c’est-à-dire la circulation et la distribution des biens
- L’artisanat et l’industrie qui concernent la production et la transformation des biens
- La finance, c’est-à-dire les opérations de banque, de crédit, d’assurance et les transactions financières.
Reste en dehors du droit commercial une partie de l’activité économique : l’agriculture, les professions libérales,
la production littéraire et artistique et activités subordonnées, c’est-à-dire celles exercées par les salariés.
2- Les raisons d’être du droit commercial
Deux raisons correspondant à des besoins nés de la pratique des affaires, justifient l’existence du droit
commercial distinct du droit civil caractérisé par son formalisme lourd : la rapidité et la sécurité
- La rapidité : les opérations commerciales doivent se faire rapidement. Plus les opérations sont rapides et
plus les commerçants accumule le profit. Il en résulte quelques règles originales, exemple : la preuve d’un
acte de commerce peut se faire par tout moyen.
- La sécurité : le recours au crédit est une pratique courante entre les commerçants. Ces derniers achètent
à crédit et revendent à crédit. A cette importance du crédit se rattache des règles spécifiques protectrices
des intérêts des créanciers, exemple : la règle de solidarité. En droit civil, la solidarité ne se présume pas
conformément à l’article 164 du DOC. Cependant, en droit commercial, l’article 335 du code de
commerce dispose « En matière commerciale, la solidarité se présume ».
3- Les sources du droit commercial (Rappel)
 La loi
Elle constitue la source principale. On distingue entre les textes généraux et les textes spéciaux

- Les textes généraux : on peut citer le dahir du 12 Aout 1913 formant code des obligations et des contrats :
ce texte est le droit commun. Cela veut dire que chaque fois que la législation commerciale ne prévoit
pas de solutions particulières, le droit civil s’applique, et de ce fait il demeure la base du droit des affaires.
La loi 15-95 promulguée par dahir du 1 Aout 1996 formant nouveau code de commerce. Ce dernier
traite essentiellement les matières suivantes : le commerçant, les actes de commerce, le fonds de
commerce, les contrats commerciaux, les effets de commerce, les difficultés de l’entreprise.

- Les textes spéciaux : on peut citer la loi 49-16 relative aux baux des immeubles ou des locaux à usage
commercial, industriel ou artisanal; la loi 17-95 sur la société anonyme promulguée par dahir du 30 Aout
1996 ; la loi 5-96 promulguée par dahir du 13 février 1997 sur les sociétés autres que la société anonyme.

 Les conventions internationales :

Les conventions internationales sont de deux sortes :


-Les conventions portant unification internationale : elles ont pour objectif de mettre en place une loi
nouvelle qui ne s’’applique que dans les relations internationales, de sorte que chaque Etat signataire reste
régi sur le plan interne par sa propre loi (Exemple : les conventions de Varsovie de 1929 sur les transports
aériens, la convention de Vienne de 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandise).
- Les conventions portant loi uniforme : elles ont pour objectif de mettre en place une loi qui s’applique aussi
bien dans les relations interne que dans les relations internationales (Exemple : les conventions de Genève
de 1930 et 1931 sur la lettre de change, le billet à ordre et le chèque qui ont été intégrées dans notre
législation par le dahir de 1939, et récemment par le nouveau code de commerce).

 Les usages commerciaux :


Les usages sont des règles d’origine coutumière qui ne sont inscrites dans aucun texte juridique, et qui sont
suivies et considérées comme normales dans un milieu déterminé.

Ce cours de droit commercial portera sur trois notions :


Actes de commerce (Chapitre 1)
Le commerçant (Chapitre 2)
Le fonds de commerce (Chapitre 3)
CHAPITRE 1 : LES ACTES DE COMMERCE :
Le législateur ne définit pas l’acte de commerce. Il se contente de donner la liste des opérations considérées
comme commerciales. Qu’est-ce que donc un acte de commerce ? Quelles sont les différentes catégories d’acte
de commerce ? Quels sont les intérêts de la distinction des actes de commerce et des actes civils ?

Section 1 : Tentatives de définition des actes de commerce par la doctrine


La doctrine a proposé des critères de la commercialité, c’est-à-dire des critères permettant de déterminer si
l’opération donnée peut être considérée comme un acte de commerce. Autrement dit, il s’agit de distinguer ce
qui est commercial de ce qui ne l’est pas.
A ce propos, on peut retenir trois critères de distinction : le critère de la spéculation, le critère de l’entremise
dans la circulation des biens et le critère de l’exercice dans un cadre organisé préétabli.
 Paragraphe 1 : l’intention de spéculation
Suivant cette théorie, tout acte de commerce implique nécessairement la recherche d’un profit. Autrement dit,
toute activité commerciale est accomplie avec l’intention de réaliser un bénéficie pécuniaire. Dès lors, les actes
philanthropiques ou à titre gratuit ne sont pas considérés comme des actes de commerce.
Cependant, malgré que le critère de spéculation se retrouve dans tous les actes de commerce, certaines critiques
lui ont été adressées. En effet, il est trop large dans la mesure où la spéculation n’est pas l’apanage exclusif des
opérations commerciales. On retrouve la notion de spéculation au niveau de certaines activités qui sont
fondamentalement des activités civiles tel que l’exploitation agricole ou les professions libérales.

 Paragraphe 2 : L’entremise dans la circulation des biens


Selon les partisans de cette thèse, à l’origine de la chaine des activités économiques, les opérations de production
tirant du sol les matières premières (agriculture) seraient écartées de la qualification d’acte de commerce. Seul
l’agent économique intermédiaire qui s’entremet dans la circulation des biens réaliserait un acte de commerce.
Le défaut de ce critère est qu’il est restrictif car il exclue certaines activités de production comme l’exploitation
des mines et des carrières.

 Paragraphe 3 : Le critère de l’entreprise


Selon cette thèse, l’acte de commerce doit être accompli dans le cadre d’une entreprise. Sa réalisation nécessite
donc la mise en œuvre de moyens humains, financiers et matériels.
Ce critère est imparfait car l’entreprise ne fait pas l’objet d’une définition unitaire.

Section 2 : Classification des actes de commerce


Les actes de commerce peuvent être classés en trois catégories :
- Les actes de commerce par nature
- Les actes de commerce par la forme
- Les actes de commerce par accessoire
A ces actes, on peut rajouter les actes mixtes qui représentent le caractère commercial pour l’une des parties, et
le caractère civil pour l’autre.

 Paragraphe 1 : Les actes de commerce par nature


Ce sont des actes qui sont par leur nature même des actes de commerce. Ils sont prévus aux articles 6 et 7 du
code de commerce.
L’article 6 cite les activités suivantes :
- l'achat de meubles corporels ou incorporels en vue de les revendre soit en nature soit après les avoirs
travaillés et mis en œuvre ou en vue de les louer ;
- la location de meubles corporels ou incorporels en vue de leur sous-location ;
- l'achat d'immeubles en vue de les revendre en l'état ou après transformation ;
- la recherche et l'exploitation des mines et carrières ;
- l'activité industrielle ou artisanale ;
- le transport ;
- la banque, le crédit et les transactions financières ;
- les opérations d'assurances à primes fixes ;
- le courtage, la commission et toutes autres opérations d'entremise ;
- l'exploitation d'entrepôts et de magasins généraux ;
- l'imprimerie et l'édition quels qu'en soient la forme et le support ;
- le bâtiment et les travaux publics ;
- les bureaux et agences d'affaires, de voyages, d'information et de publicité ;
- la fourniture de produits et services ;
- L’organisation des spectacles publics ;
- la vente aux enchères publiques ;
- la distribution d'eau, l'électricité et de gaz ;
- les postes et télécommunications ;
- la domiciliation.
S’ajoute à cette liste toutes les opérations portant sur les navires et les aéronefs et leurs accessoires, et celles se
rattachant à l’exploitation des navires et aéronefs et au commerce maritime et aérien (Article 7).
Comme on peut le constater, l’énumération faire par le législateur est anarchique. Pour mettre de l’ordre dans
cette liste et répartir les activités commerciales, plusieurs classifications ont été proposées.
Parmi ces classifications, on peut retenir celle qui repose sur cinq catégories d’activités :
- Activités de distribution
- Activités de production
- Activités de service
- Activités d’intermédiaire
- Activités financières

A- Les activités de distribution :


Cette catégorie est la plus importante dans le domaine du négoce. Elle comprend des activités se rapportant à
différents domaines. On peut citer : l’achat de meubles ou immeubles en vue de les revendre en l’état ou après
transformation. Cette activité est réputée commerciale par le code de commerce. Trois conditions sont requises :
-Il faut d’abord qu’il agisse d’un achat c’est-à-dire d’une acquisition moyennant un prix.
-Il faut ensuite qu’il agisse d’un achat portant sur des meubles corporels (denrées, marchandises… ou
incorporels (des créances, des valeurs mobilières, des brevets d’invention, un fonds de commerce…) ou sur
des immeubles.
-Il faut enfin qu’il agisse d’une revente, avec ou sans transformation, avec l’idée de spéculation.
B- Les activités de production :
On peut citer dans ce cadre :
- L’activité industrielle ou artisanale : l’activité industrielle et artisanale consiste en des travaux de production,
de transformation ou de réparation. Les principales industries marocaines sont : les textile, le cuir, les produits
chimiques, l’industrie pharmaceutique, le métallurgie, le raffinage des produits pétroliers.
Quant aux principales activités artisanales, on peut citer les activités exercées par les couturiers, les menuisiers,
les plombiers, les électriciens, les mécaniciens, les maçons.
- La recherche et l’exploitation des mines et des carrières : les mines concernent essentiellement le charbon, les
métaux, le pétrole et le gaz. Les carrières servent à extraire des matériaux de construction comme le ciment,
l’argile, pierre, marbre…).
- Le bâtiment et les travaux publics : le bâtiment et les travaux publics sont constitués par tout travail immobilier
entrepris dans un but d’intérêt général soit par une personne publique ou pour son compte, soit dans le cadre
d’une mission de service public (régie, concession, marché). C’est le cas de la construction de gros ouvrages
comme les routes, l’autoroute, les ports, les barrages…
C- Les activités de service
On peut citer dans ce cadre le service de transport et l’organisation de spectacles publics.
-Le service de transport : l’article 6 vise le transport en général, c’est-à-dire tous les types de transport de
marchandises ou de personnes, par air, mer, fer ou voie routière. Cette prestation de service est commerciale
qu’elle soit effectuée par une entreprise publique ou privée.
-L’organisation de spectacles publics : la notion de spectacles publics est entendue dans un sens large puisqu’elle
recouvre toutes les activités destinées à procurer des distractions au public, notamment les concerts, les théâtres,
les cinémas, les cirques, l’exploitation de salles de conférence, les bals publics…
D- Les activités d’intermédiaires
Il s’agit ici du courtage, de la commission, des agences et bureaux d’affaires.
-Le courtage : il est défini par l’article 405 comme étant la convention par laquelle le courtier est chargé par une
personne de rechercher une autre personne pour les mettre en relation en vue de la conclusion d’un contrat.
L’activité du courtier est donc le rapprochement de deux personnes pour la conclusion d’un contrat sans qu’il
s’engage personnellement dans l’opération. En contrepartie de son intermédiation, le courtier perçoit soit un
certain pourcentage de la valeur de la transaction, soit un montant d’argent déterminé d’un commun accord
entre lui et son client.
-La commission : c’est l’activité exercée par un commissionnaire. Ce dernier est un professionnel qui s’entremet
dans la formation des contrats pour le compte de l’une des parties (le commettant). Autrement dit, il prend la
place d’un contractant puisqu’il signe le contrat en son nom. La rémunération du commissionnaire n’est due
que si le contrat est conclu.
-Les bureaux et agences d’affaires : c’est l’activité qui consiste à se charger habituellement de gérer les affaires
d’autrui moyennant une rémunération. C’est le cas des agences de voyage, les gérants d’immeuble, les agences
de publicité… Ces agences ne font pas uniquement des opérations de courtage, mais rédigent des contrats,
donnent des conseils, opèrent des recouvrements…
E- Les activités financières
Il s’agit des activités bancaires et des activités d’assurance.
-Les opérations de banque : il s’agit des opérations portant sur la monnaie, les métaux précieux et les titres
fiduciaires, par exemple les opérations d’escompte d’effets de commerce, les dépôts de fonds, les prêts, les
opérations en compte courant…
-Les opérations d’assurance : l’assurance est l’opération par laquelle une entreprise d’assurance s’engage à
indemniser l’assuré contre les conséquences d’un sinistre moyennant le versement d’une prime.
Le législateur cite les opérations d’assurance sans donner de précisions, ce qui sous-entend toute opération
d’assurance qu’elle soit terrestre, maritime, aérienne ou autre.
 Paragraphe 2 : Les actes de commerce par la forme
Ce sont des actes qui revêtent le caractère de la commercialité indépendamment de la qualité de la personne qui
les accomplit (commerçant ou non) et quel que soit l’objet de l’acte (civil ou commercial). C’est le cas des effets
de commerce notamment la lettre de change et le billet à ordre, et des sociétés commerciales.
-La lettre de change : c’est l’écrit par lequel une personne, le tireur, donne l’ordre à une autre personne, le tiré,
de payer une somme déterminée à l’ordre d’une tierce personne, le bénéficiaire ou le porteur. La lettre de change
est commerciale quel que soit la personne qui la signe et quel que soit l’objet et le but de l’opération.
-Le billet à ordre : L’article 9 du code de commerce répute aussi acte de commerce le billet à ordre signé par un
non commerçant, lorsqu’il résulte d’une transaction commerciale. Cela veut dire que lorsque le souscripteur est
un non commerçant, la forme ne suffit pas à donner le caractère commercial au billet à ordre, il faut en plus
que la transaction soit commerciale.
-Les sociétés commerciales : sont commerciales à raison de leur forme, les sociétés anonymes, les sociétés en
commandite par actions, la SARL, la société en nom collectif et la société en commandite simple.
 Paragraphe 3 : Les actes de commerce par accessoire
Ce sont des actes de nature civile mais qui deviennent commerciaux car ils sont accomplis par un commerçant
accessoirement à son activité commerciale, exemple : achat d’un équipement par un industriel.
 Paragraphe 4 : Les actes mixtes
Ce genre d’actes fait intervenir un commerçant et non commerçant. Dans ce cas, l’acte est commercial pour l’un
et civil pour l’autre. C’est le cas par exemple de tous les achats effectués auprès des commerçants pour la
consommation.
Section 3 : Les intérêts de la distinction des actes de commerce et des actes civils
L’intérêt de la distinction entre un acte de commerce et un acte civil se manifeste à plusieurs égards dans la
mesure où chacune de ces deux catégories d’actes est régie par un système juridique différent. C’est ce qu’on
peut remarquer au niveau des règles de preuve, de la prescription, de la solidarité et de la compétence judiciaire.
 Paragraphe 1 : La preuve
En matière civile, l’écrit est exigé pour preuve des obligations dont le montant excède dix mille dhs (article 443
du DOC). En matière commerciale, le principe est la liberté de la preuve.
 Paragraphe 2 : La prescription
C’est le délai à l’expiration duquel l’action qui nait d’une obligation est éteinte, c’est-à-dire qu’on ne peut pas
obtenir l’exécution de cette obligation.
En matière commerciale, la prescription est de 5 ans alors qu’elle est de 15 ans en matière civile.
 Paragraphe 3 : La solidarité
En matière civile, la solidarité entre codébiteurs ne joue que si elle est expressément stipulée dans le contrat.
Cette solidarité joue de plein droit dans les obligations contractées entre commerçants.
 Paragraphe 4 : La compétence judiciaire
En matière commerciale, la compétence revient aux tribunaux de commerce institués par la loi n°53/95
promulguée par dahir du 12/02/97.
Ces tribunaux sont compétents pour statuer à l’occasion des litiges portant sur les contrats commerciaux, les
opérations relatives aux effets de commerce, les actions entre commerçants à l’occasion de leur activité
commerciale, les litiges entre associés dans une société commerciale et les litiges en raison d’un fonds de
commerce.

CHAPITRE 2 : LE COMMERÇANT
Section 1 : définition de la notion de commerçant
Conformément à l’article 6 du code de commerce, la qualité de commerçant s’acquiert par l’exercice habituel et
professionnel des actes de commerce :
-Exercice des actes de commerce : il doit s’agir d’actes de commerce par nature.
-Exercice à titre habituel : l’habitude implique la répétition des actes et des opérations concernés. Elle suppose un
prolongement dans le temps avec l’intention de répéter les mêmes actes ou les mêmes opérations.
-Exercice à titre professionnel : la profession suppose soit une entreprise organisée, soit au moins un fonds de
commerce et une clientèle.
Conformément à la jurisprudence française, une profession habituelle consiste dans l’exercice d’une activité
permettant à son auteur de satisfaire à ses besoins financiers.
-Exercice à titre personnel : seul a la qualité de commerçant celui qui court le risque du commerce, qui agit de façon
indépendante, c’est-à-dire en son nom et pour son compte personnel. C’est ainsi par exemple que les salariés ne
sont pas des commerçants car ils agissent au nom et pour le compte d’autrui.
Section 2 : Le statut de commerçant
En matière commerciale, le principe qui domine est celui de la liberté du commerce et de l’industrie. Cela veut
dire que toute personne physique ou toute société a le droit de se livrer au commerce ou à l’industrie de son
choix.
C’est d’ailleurs un principe constitutionnel : le droit d’entreprendre.
La liberté d’entreprendre est très étendue, mais connait des limitations qui sont au nombre de quatre : les
incapacités, les incompatibilités, les interdictions et les déchéances.
 Paragraphe 1 : les incapacités
C’est le cas du mineur et du majeur incapable
A- Le mineur
Conformément à l’article 12 du code de commerce, la capacité commerciale et régie par le code de la famille
(art 209).
Au Maroc, la capacité commerciale coïncide avec la capacité civile. Celle-ci est fixée à l’age de 18 ans.
Avant cet âge, le mineur doit être représenté par son père ou son tuteur. Mais, à ce principe, il existe une
exception : le mineur de 16 ans peut faire l’objet d’une déclaration anticipée de majorité, c’est-à-dire d’une
émancipation (Tarchid).
En effet, à 16 ans, le mineur ou son représentant légal peut demander au tribunal de déclarer sa majorité de
manière anticipée, c’est-à-dire que le mineur devient capable juridiquement d’exercer une activité commerciale
dans les mêmes conditions que toute personne majeure. La décision judiciaire de déclaration de majorité doit
être inscrite au registre du commerce (article 13 du code de commerce) pour informer les tiers qu’ils traiteront
avec un mineur émancipé.
B- Les majeurs incapables
Il s’agit des personnes qui ont atteint l’âge de majorité, mais qui ne sont pas capables de gérer leur patrimoine
en raison de maladies mentales (les déments) ou de prodigalité ( les prodigues).
Le dément est celui qui a perdu la raison, que sa démence soit continue ou intermittente, c’est-à-dire coupée de
période de lucidité.
Le prodigue est celui qui dilapide son patrimoine par des dépenses sans utilité ou considérées comme futiles par
des personnes raisonnables.
 Paragraphe 2 : les incompatibilités
L’incompatibilité est l’interdiction faite à certaines personnes d’exercer le commerce en raison de leurs fonctions
ou de leurs professions. Le législateur assure ainsi l’indépendance de la fonction publique (exemple : magistrat,
fonctionnaire, militaire…) ou la dignité de certaines professions qui s’accommode mal de la recherche du profit
(exemple : médecin, notaire, avocat…).
 Paragraphe 3 : les interdictions
L’exercice de certaines activités est interdit par la loi, soit parce que l’Etat s’est réservé le monopole de certains
domaines, soit pour des considérations de moralité (exemple : interdiction de faire le commerce portant sur
certains produits, comme les stupédiants).
Par ailleurs, certaines professions sont soumises à autorisation (exemple : pharmacie, banque, assurance…).
Signalons que les associations, les syndicats et les fondations ne peuvent se livrer à des activités commerciales.
 Paragraphe 4 : les déchéances
Le législateur frappe de déchéance ceux qui ont déjà fait preuve de leur indignité dans le souci d’assurer la
moralité commerciale, et interdit le commerce aux personnes condamnées pour certaines infractions (exemple :
vol, escroquerie…).

Section 3 : les obligations du commerçant


Deux obligations spécifiques pèsent sur le commerçant : la publicité commerciale et la comptabilité commerciale.
 Paragraphe 1 : la publicité commerciale
Elle résulte de l’immatriculation au registre du commerce. Ce dernier constitue en quelque sorte l’état civil du
commerçant. Le système est conçu comme une sorte de bureau de renseignement qui a pour fonction de recevoir
et de donner un certain nombre d’informations sur les commerçants.
De ce fait, la publicité présente une grande utilité. Elle sert à renseigner les banquiers qui prêtent des capitaux,
les fournisseurs qui accordent des délais de paiement, les entreprises et les clients qui traitent avec le
commerçant.
Comment est organisé le RC, et comment fonctionne-t-il ? Quels sont les effets et les sanctions de l’obligation
de publicité ?
A- Organisation du RC :
Conformément à l’article 27 du code de commerce : « le RC est constitué par des registres locaux et un registre
central ».
-Le registre local est tenu auprès du secrétariat greffe du tribunal compétent. Il est placé sous la surveillance du
président du tribunal ou un juge qu’il désigne chaque année à cet effet.
Le registre local se divise en deux parties : le registre chronologique et le registre analytique.
Le registre chronologique recueille toutes les demandes et déclarations faites par les commerçants dans l’ordre
où elles interviennent. On y inscrit différentes informations concernant le commerçant et l’établissement (le
nom, siège social, domicile des déclarants…). La demande est constatée par un récépissé constatant le dépôt.
Le registre analytique : c’est un registre auquel on fait appel durant l’exploitation. Il reprend les différents
renseignements modificatifs et complémentaires qui interviennent en fonction de l’évolution de l’activité. Il
mentionne également les radiations.
-Le registre central
Le registre central de commerce est tenu par l’office marocain de la propriété industrielle et commerciale. Il est
destiné à :
-Centraliser pour l’ensemble du royaume les renseignements mentionnés dans les différents registres locaux.
-Délivrer les certificats relatifs aux inscriptions des noms des commerçants et des dénominations commerciales
ainsi que les certificats et copies relatifs aux autres inscriptions qui y sont portées.
-Publier au début de chaque année, un recueil qui reprend les renseignements sur les noms des commerçants et
les dénominations commerciales qui lui sont transmises.
B- Le fonctionnement du registre de commerce
Les inscriptions au registre de commerce comprennent selon l’article 36 du code de commerce, les
immatriculations, les inscriptions modificatives et les radiations.
-Les immatriculations : toute personne physique ou morale, marocaine ou étrangère ayant la qualité de
commerçant au regard de la loi marocaine et exerçant son activité sur le territoire marocain, doit dans les trois
mois de l’ouverture d son établissement, agence, ou succursale, ou l’acquisition de son fonds de commerce ou
de la constitution d’une société commerciale, requérir du secrétariat-greffe du tribunal dans le ressort duquel est
situé son principal établissement, son siège social, agence ou succursale, son immatriculation au registre du
commerce.
-Les inscriptions modificatives : Tout changement ou modification intervenus dans les mentions qui figurent
dans la déclaration d’immatriculation doivent faire l’objet d’une inscription modificative. C’est le cas par
exemple des décisions prononçant l’interdiction du commerçant ; tous les faits intéressant les commerçants
n’ayant pas leur établissement principal au Maroc, mais possédant une succursale ou une agence, ainsi que les
décisions judiciaires rendues à l’étranger à l’encontre des mêmes commerçants et déclarées exécutoires par un
tribunal marocain ; des décisions judiciaires prononçant la dissolution ou la nullité de la société…
-Les radiations : il s’agit de la suppression des commerçants déjà immatriculés et qui n’exercent plus l’activité
commerciale.
C- Les sanctions liées aux inscriptions
Le défaut d’immatriculation est puni d’une amende de 1000 à 5000 dirhams à l’expiration d’un délai d’un mois
à partir de la mise en demeure adressée par l’administration, et à une seconde amende de même montant après
injonction d’y satisfaire dans un délai de deux mois.
Toute indication inexacte donnée de mauvaise foi lors de l’immatriculation ou d’une inscription modificative
ou sur les papiers de commerce est punie d’un emprisonnement d’un moins à un an et d’une amende de 1000
à 50 000 dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement. Le jugement prononçant la condamnation ordonne
également, que la mention fallacieuse soit corrigée dans les conditions qu’il établit. En cas de récidive, la peine
est portée au double.
 Paragraphe 2 : La comptabilité du commerçant
Tous les commerçants, (personnes physiques ou morales) sont tenus à cette obligation qui présente plusieurs
intérêts :
-Pour le commerçant lui-même dans la mesure où elle permet d’assurer une gestion convenable de son entreprise
et la preuve de ces droits.
-Pour les tiers dans la mesure où elle permet d’assurer la protection des créanciers.
-Pour l’Etat dans le but de contrôler les déclarations fiscales.
A- Organisation de la comptabilité :
En vertu de cette obligation, les commerçants doivent enregistrer les différents mouvements affectant les actifs
et les passifs de l’exploitation sur des livres, d’une manière chronologique et continue. De même, ils doivent
conserver leurs correspondances commerciales.
1- Les livres comptables
-Le livre journal : il s’agit d’un document où sont récapitulés et enregistrés, opération par opération et jour après
jour, tous les mouvements affectant le patrimoine de l’entreprise, par exemple les achats et les ventes, les
paiements de factures ou les versements de salaires…
-Le grand livre : les écritures du livre journal sont portées sur le grand livre. Elles sont ventilées et récapitulées
selon le plan de comptes du commerçant conformément à la nature de l’opération (achat, ventes…) de façon à
suivre l’évolution des différents comptes.
Conformément à la loi, le plan de comptes doit comprendre les classes de comptes de situations, les classes de
comptes de gestion et les classes de comptes spéciaux.
-Le livre d’inventaire : on y trouve l’ensemble des éléments actifs et passifs. Figurent notamment dans cet état les
immobilisations corporelles, les immobilisations incorporelles, les immobilisations financières, les stocks, les
dettes fournisseurs…
Les trois livres doivent être cotés (on donne aux feuilles des numéros allant de la première à la dernière) et
paraphés (on appose le signe qui va permettre de les identifier) par le secrétariat général du tribunal compétent.
Signalons que les documents comptables doivent être établis en monnaie nationale.
2- Conserver de la correspondance
L’article 26 du code de commerce impose au commerçant de classer les originaux des correspondances reçues et
les copies des correspondances envoyées et de les conserver pendant dix ans à compter de leur date. Cette
correspondance peut être utilisée comme moyen de preuve pour faire valoir ses droits en justice.
B- La force probante de la comptabilité

Conformément à l’article 19 du code de commerce, lorsque la comptabilité est régulièrement tenue, elle est
admise par le juge pour faire preuve entre commerçants à raison des actes de commerce.
Une distinction doit être faite entre deux situations :
Contestation entre deux commerçants à l’occasion d’une opération commerciale : chacun d’eux pourra faire la
preuve contre l’autre à l’aide des documents comptables dont la tenue est prescrite.
Contestation entre un commerçant et un non commerçant : les documents comptables du commerçant n’ont
en principe aucune force probante à l’égard du non commerçant.
C- Les sanctions relatives au défaut de la tenue d’une comptabilité commerciale
Plusieurs sanctions sont prévues par la loi. C’est ainsi que l’article 754 du code de commerce oblige le tribunal
à se saisir en vue de prononcer la déchéance commerciale de toute personne physique commerçante, qui aurait
omis de tenir une comptabilité conforme aux dispositions légales, ou fait disparaitre tout ou partie des
documents comptables.
De même, l’article 754 du code de commerce a prévu des sanctions pénales liées à la tenue de la comptabilité.
C’est ainsi que les dirigeants d’entreprises qui tiennent une comptabilité fictive ou font disparaitre des
documents comptables ou s’abstiennent de tenir une comptabilité sont coupable de banqueroute.
L’article 755 du code prévoit des peines de un à 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 10 000 à 100 000
dirhams ou de l’une de ces deux peines seulement en cas de banqueroute.
CHAPITRE III : LE FONDS DE COMMERCE
Le Fonds de Commerce est un bien meuble incorporel constitué par l’ensemble de biens
mobiliers affectés à l’exercice d’une ou de plusieurs activités commerciales.
Ces éléments sont réunis en vue de rechercher et de retenir une clientèle.
Le Fonds de Commerce est régi par le livre II du Code de Commerce (art 79 à158 du Code de
Commerce ).
Quels sont les éléments du Fonds de Commerce et quelles sont les différentes opérations qui
peuvent porter sur le Fonds de Commerce ?
Section I : Les éléments du Fonds de Commerce
Aux termes de l’art 80 du Code de Commerce : «le fonds de commerce comprend
obligatoirement la clientèle et l’achalandage.
Il comprend aussi, tous autres biens nécessaires à l’exploitation du fonds, tel que le nom
commercial, l’enseigne, le droit au bail, le mobilier commercial, les marchandises, le matériel et
l’outillage, les brevets d’invention, les licences, les marques de fabrique, de commerce et de
service, les dessins et modèles industriels et, généralement, tous droits de propriété industrielle,
littéraire ou artistiques qui y sont attachés. »
Comme on peut le constater l’énumération de l’art 80 n’est pas exhaustive puisque la loi parle
de « tous autres biens… ». Cela veut dire que d’autres éléments peuvent s’ajouter à tout moment
au Fonds (ex : contrat de crédit de bail mobilier).
Les éléments du Fonds de Commerce sont regroupés en deux catégories : les éléments corporels
et les éléments incorporels.
I- Les éléments incorporels :
A/ La clientèle et l’achalandage :
La clientèle est constituée par l’ensemble des personnes qui se fournissent habituellement chez
le même commerçant. Ces personnes sont attirées par la personnalité du commerçant (qualité
d’accueil, qualité du produit, compétence, notoriété…)
L’achalandage concerne les clients de passage attirés par la localisation du fonds.
Mais la pratique s’en tient à une définition unique considérant la clientèle comme l’ensemble
des personnes en relation d’affaire avec un commerçant.
La clientèle est l’élément nécessaire du Fonds de Commerce et il n’y a pas de Fonds sans
clientèle. Elle doit répondre à 3 conditions :
- Elle doit être réelle et certaine et non seulement potentielle. Elle doit exister de manière
actuelle
- Elle doit être personnelle au commerçant, c’est-à-dire il faut qu’elle lui soit attachée en
raison de la qualité de ses produits, de sa compétence…
- Elle doit être commerciale : la relation entre la personne et le commerçant doit reposer
sur l’échange d’un bien dans le cadre d’une relation de commerce
B/ Le nom commercial :
Le nom commercial est l’appellation sous laquelle un commerçant exerce son activité
commerciale. Il peut s’agir d’un nom patronymique, d’un pseudonyme ou d’un nom de
fantaisie.
Le nom commercial a une valeur patrimoniale. Il est un élément du Fonds de Commerce et peut
être cédé avec lui-même s’il s’agit d’un nom patronymique.
C/ L’enseigne :
Il s’agit d’un signe extérieur qui permet d’individualiser l’établissement ou le magasin. Le
commerçant peut choisir son nom patronymique, un nom de fantaisie ou un emblème.
Comme le nom commercial, l’enseigne peut être cédée ou louée avec le Fonds.
Le nom commercial et l’enseigne sont protégés afin d’éviter qu’ils ne soient utilisés par autrui
pour détourner la clientèle. En effet, l’action en concurrence déloyale permet à des commerçants
qui s’estiment lésés de ce fait, d’obtenir des tribunaux les mesures propres à faire cesser toute
confusion, ainsi que les indemnités compensant les pertes éventuelles subies du fait de tels
comportements.
D/ Le droit de propriété industrielle :
Ce sont des biens corporels qui procurent à leurs titulaires un monopole d’exploitation. Ils
désignent traditionnellement les brevets, les marques, les dessins et modèles. La propriété
industrielle est régie au Maroc par la loi 17-97 (2004) modifiée et complétée par la loi 31-05, et
par la loi 23-13.
- Le brevet d’invention :
Il s’agit d’un titre de propriété délivré par l’office marocain de la propriété industrielle et
commerciale (l’OMPIC), et qui confère à son titulaire un droit exclusif d’exploitation de son
invention, le but étant d’encourager la recherche et de récompenser l’inventeur.
L’invention doit être personnelle et nouvelle : elle doit apporter une nouvelle solution à un
problème technique.
L’objet de l’invention peut être un produit (exemple une machine) ou un procédé (ensemble
d’opérations industrielles permettant de fabriquer un produit quelconque).
Le droit de brevet est un droit dont la durée de validité est limitée à 20 ans. A l’échéance de cette
durée, l’invention tombe dans le domaine public et enrichit donc le patrimoine de la collectivité.
- Dessins et modèles :
Il s’agit de l’aspect ornemental ou esthétique d’un objet. Le dessin industriel est tout assemblage
de lignes ou de couleurs appliqué à un article par un procédé ou à l’aide d’un moyen industriel
pour produire un effet décoratif original
Le modèle industriel est toute forme associée ou non à des lignes ou des couleurs, pourvu que
cet assemblage ou cette forme donne une apparence spéciale à un produit industriel ou artisanal.
Le dessin se distingue du modèle en ce qu’il suppose une surface plane, alors que le modèle
opère dans l’espace.
Le dessin et modèle peuvent concerner tous les produits industriels ou artisanaux, et donnent à
ces produits un avantage concurrentiel sur le marché comme par exemple un flacon de parfum,
montre, bijoux, carrosserie d’une voiture, appareils électriques…
Le modèle et dessin diffèrent du brevet dans la mesure où ils ne protègent pas l’aspect technique
ou fonctionnel d’un produit, mais uniquement son design et son apparence.
- La marque :
La loi définit la marque comme étant un signe susceptible de représentation graphique servant
à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.
La marque doit répondre à certaines conditions. C’est ainsi qu’elle ne doit pas comporter
d’indications susceptibles de tromper le public sur l’origine, la nature et la qualité du produit ou
du service. Elle doit être nouvelle et disponible et non usée. Elle doit enfin être originale et
permettre de faire une distinction effective du produit ou du service.
E/ Le droit au bail :
Le plus souvent, les commerçants ne sont pas propriétaires des locaux dans lesquels ils exercent
leurs activités commerciales, ils en sont locataires.
A ce titre, ils ont besoin d’une certaine stabilité dans l’occupation des lieux loués car ils risquent
de perdre la clientèle.
C’est pourquoi le législateur a institué un statut protecteur au profit du commerçant locataire et
ce par le biais de la loi 49-16 relative aux baux d’immeubles ou de locaux à usage commercial,
industriel ou artisanal (qui a abrogé le dahir du 24 mai 1955). Cette loi a essayé de renforcer la
sécurité des relations entre locataires et propriétaires, et d’assurer le développement de
l’immobilier commercial.
En vertu de cette loi, les commerçants ont un droit au renouvellement du bail commercial ou à
défaut une indemnité d’éviction pour les protéger contre la prétention du bailleur.
Dans ce cadre, il convient de déterminer les conditions pour bénéficier du statut protecteur.
Conformément à la loi 49-16, trois conditions sont nécessaires pour l’acquisition du droit au
renouvellement du bail commercial.
- Les conditions relatives au contrat de bail :
Conformément à l’article 4 de la loi 49-16, le locataire bénéficie du renouvellement du bail
lorsqu’il justifie d’une jouissance consécutive du local d’au moins deux ans en vertu d’un contrat
écrit à date certaine. Mails, il est dispensé de cette condition de durée s’il a payé une somme
d’argent en contrepartie du droit au bail. Lors de la remise du local, un état descriptif des lieux
doit être établi pour servir de preuve entre les parties (article 3).
- Les conditions relatives aux locaux :
Le statut s’applique aux immeubles dans lesquels on exploite un Fonds de Commerce, que ce
dernier appartient effectivement à un commerçant, à un industriel ou à un artisan. Les choses
mobilières ne rentrent pas dans le champ d’application de la loi.
En pratique, tous les immeubles peuvent servir à une activité commerciale. D’ailleurs le champ
d’application a été élargi par la loi 49-16 pour inclure les baux d’immeubles loués par les
coopératives, les établissements d’enseignement privé, les cliniques privées, les laboratoires
pharmaceutiques…
Cependant, certains immeubles ne permettent pas l’acquisition du droit au renouvellement du
bail. C’est le cas des immeubles Habous, les immeubles relevant du domaine privé de l’Etat des
collectivités publiques.
Dès que les conditions sont réunies, le locataire bénéficie du droit au renouvellement du bail
commercial.
Dans ce cas, il peut y avoir deux situations :
- Le bailleur refuse le renouvellement du bail sans motif légitime. Dans ce cas, le locataire aura
droit à une indemnité d’éviction qui correspond au préjudice qu’il a subi du fait de cette
éviction.
Toute clause tendant à faire échec au droit du locataire à l’indemnité de résiliation est nulle.
L’indemnité comprend la valeur du Fonds de Commerce estimée sur la base des déclarations
fiscales au titre des quatre derniers exercices, en sus des dépenses occasionnées par les travaux
de rénovation et de restauration ainsi que des éléments du Fonds de Commerce perdus par le
locataire. Elle comprend tous les frais de déménagement.
Le bailleur refuse le renouvellement du bail, mais n’est tenu d’aucune indemnité. Les cas sont
cités par l’article 8 :
1- Lorsque le locataire ne respecte pas ses engagements découlant du contrat. C’est le cas
lorsqu’il :
o Ne paie pas le loyer depuis au moins trois mois
o Procède à des transformations dans le local sans le consentement du bailleur
o Change l’activité de son Fonds de Commerce sans le consentement du propriétaire
2- Lorsque le local menace de tomber en ruine
3- Lorsque le local objet du bail est tombé en ruine du fait du locataire, d’une force majeure
ou d’un cas fortuit
4- Si le locataire procède à la sous location du local en infraction du contrat de bail
5- Lorsque le Fonds de Commerce perd sa clientèle et son achalandage suite à la fermeture
du local pendant deux ans au moins
II- Les éléments corporels du Fonds de Commerce
A/ Les marchandises :
Elles comprennent les stocks de matières premières ou les produits et les biens destinés à la
vente.
B/ Le matériel et l’outillage :
Ils représentent tous les biens qui servent à l’exploitation du fonds comme les machines et les
meubles (mobilier de bureau, ordinateurs…).
Section II : Les opérations sur le Fonds de Commerce
Le Fonds de Commerce peut faire l’objet de plusieurs opérations. Dans le cadre de ce cours, on
retiendra 2 opérations : la vente et le nantissement du Fonds de Commerce
I- La vente du Fonds de Commerce :
La vente du Fonds de Commerce obéit à des conditions de fond, de forme et de publicité. Elle
produit des effets à l’égard des parties contractantes et à l’égard des créanciers du vendeur.
A/ Les conditions de validité du contrat de vente du Fonds de Commerce :
- Les conditions de fond :
La vente du Fonds de Commerce est soumise aux conditions générales de validité de tout
contrat :
+ Un consentement libre
+ La capacité des contractants
+ L’objet et la cause licites
- Les conditions de forme :
Elles sont strictes et ont pour but de renseigner l’acquéreur sur le Fonds qu’il achète. Elles sont
prévues par l’article 81 du Code de Commerce.
La vente du fonds de commerce doit être constatée par un acte authentique ou sous seing privé.
Le montant de la vente est déposé auprès d’une instance habilitée à conserver les dépôts.
L’acte de vente doit obligatoirement comporter les mentions suivantes :
-le nom du vendeur, la date et la nature de son acte d’acquisition, le prix de cette acquisition en
spécifiant distinctement les prix des éléments incorporels, des marchandises et du matériel,
-l’état des inscriptions des privilèges et nantissements pris sur le fonds,
-s’il y a lieu, le bail, sa date, sa durée, le montant du loyer actuel, le nom et l’adresse du bailleur,
-l’origine de la propriété du fonds de commerce.
Ces mentions sont obligatoires. Leur absence ou leur inexactitude donne droit à l’acheteur de
demander l’annulation du contrat ou la réduction du prix lorsqu’il a subi un préjudice de ce
fait.
Dans les deux cas, l’action doit être intentée dans un délai maximum d’un an à compter de la
date de l’acte de vente.
- Les conditions de publicité :
Ces conditions tendent à renseigner les tiers et notamment les créanciers du cédant.
L’acte de vente doit d’abord être enregistré. L’enregistrement doit être fait à la recette fiscale
relevant de la direction générale des impôts et donnera lieu pour l’acquéreur au paiement des
droits d’enregistrement.
Après l’enregistrement, une expédition de l’acte notarié ou un exemplaire de l’acte sous seing
privé doit être dans les 15 jours de sa date, déposé au secrétariat-greffe du tribunal dans le ressort
duquel est exploité le fonds.
Un extrait de cet acte est inscrit au registre du commerce, et publié en entier et sans délai, aux
frais des parties, au BO et dans un journal d’annonces légales.
Cette publication est renouvelée à la diligence de l’acquéreur entre le 8 ème et le 15 ème jour
après la première inscription.
L’extrait de l’acte doit comporter les mentions suivantes :
-la date de l’acte
-les noms, prénoms et domicile de l’ancien et du nouveau propriétaire
-la nature et le siège du fonds
-le prix stipulé
-l’indication et le siège des succursales qui peuvent être comprises dans la vente
-l’indication du délai fixé à l’article 84 pour les oppositions (15 jours au plus tard après la seconde
insertion) et une élection de domicile dans le ressort du tribunal.
B/ Les effets de la vente :
La vente du Fonds de Commerce produit des effets juridiques à l’égard des parties contractantes
et à l’égard des créanciers du vendeur
1- A l’égard des parties contractantes :

- Les obligations du vendeur


Le vendeur est tenu à délivrance et à garantie : l’obligation de délivrance consiste à remettre à
l’acquéreur les différents éléments qui composent le Fonds.
L’obligation de garantie se décline en garantie des vices cachés et en garantie d’éviction.
La garantie des VC tend à assurer l’exploitation paisible du fonds et à éviter tous défauts
restreignant cette exploitation et en connaissance desquels l’acheteur n’aurait pas traité, ou
n’aurait payé qu’un moindre prix. Elle constitue un moyen de sanctionner les inexactitudes des
mentions obligatoires figurant à l’acte de vente.
La garantie d’éviction est celle en vertu de laquelle le vendeur est tenu de respecter une
obligation de non concurrence à l’égard de l’acquéreur.
En général, les parties insèrent dans l’acte de vente une clause de non concurrence.
Conformément au droit commun, de telles stipulations de non concurrence ne sont valables
que lorsqu’elles sont limitées dans le temps et dans l’espace.
- Les obligations de l’acheteur :
L’obligation de l’acquéreur est de payer le prix convenu. Mais le plus souvent, le paiement du
Fonds de Commerce se fait à tempérament. Pour prémunir le vendeur contre le risque de non-
paiement, le législateur a créé à son profit un privilège et une action résolutoire.
-Le privilège du vendeur de Fonds de Commerce :
Le vendeur dispose d’un privilège, c’est-à-dire d’une sûreté pour le paiement de sa créance.
Conformément à l’article 91 du code de commerce, le privilège du vendeur est soumis à
l’inscription au registre national électronique des sûretés mobilières.
Ce privilège ne porte que sur les éléments du Fonds de Commerce énumérés dans la vente et
dans l’inscription. A défaut de désignation précise, il ne porte que sur le nom commercial et
l’enseigne, le droit au bail, la clientèle et l’achalandage.
Le privilège du vendeur lui confère un droit de préférence et un droit de suite
+ Droit de préférence : c’est un droit de priorité sur le prix obtenu en cas de revente du Fonds
de Commerce par l’acquéreur originaire ou par voie de justice.
+ Droit de suite : c’est un droit permettant au créancier privilégié (le vendeur) de saisir le fonds
garantissant le paiement de la dette en quelque main qu’il se trouve, même entre les mains
d’un tiers acquéreur.
-L’action résolutoire : Elle est prévue par l’article 99 du Code de Commerce. C’est une action
qui permet au vendeur de reprendre le Fonds en cas de non- paiement du prix. Pour produire
effet, l’action résolutoire doit être mentionnée et réservée expressément dans l’inscription du
privilège. Comme pour le privilège, l’action résolutoire est limitée aux seuls éléments qui font
partie de la vente.
2- A l’égard des créanciers du vendeur :
La vente est portée à la connaissance des créanciers du vendeur grâce à la publicité, ce qui leur
permet d’exercer les droits prévus par la loi, droit de faire opposition au paiement du prix ou
encore le droit de former une surenchère.
+ Le droit de faire opposition au paiement du prix : les créanciers du vendeur peuvent faire
opposition à la remise du prix au vendeur au plus tard dans les 15 jours qui suivent la deuxième
insertion. C’est pourquoi le prix d’achat n’est pas versé immédiatement au vendeur, mais
consigné entre les mains de l’intermédiaire dont le nom figure sur l’avis publié dans le journal.
Ce dépositaire ne peut pas verser le prix au vendeur.
+ Le droit de former une surenchère : les créanciers du vendeur disposent également d’un droit
de surenchère s’ils estiment le prix insuffisant pour les désintéresser. Les créanciers devront
alors faire mettre le Fonds en vente aux enchères publiques, mais ils s’engagent à se porter
acquéreurs pour le prix initial majoré du sixième de la valeur des éléments incorporels. Pour
que la personne soit admise par le Secrétaire-greffier à enchérir, elle doit déposer entre ses
mains une somme qui ne pourra être inférieure à la moitié du prix total de la première vente.
II- Le nantissement du Fonds de Commerce :
Le nantissement du Fonds de Commerce est le contrat par lequel le fonds se trouve affecté à
la garantie du remboursement des dettes contractées par le commerçant pour les besoins de
son commerce.
Autrement dit, le Fonds de Commerce va être utilisé comme moyen d’obtenir du crédit et
servir de sûreté pour garantir la dette du commerçant.
Le nantissement ne provoque pas la dépossession dans la mesure où le commerçant demeure
à la tête de son Fonds, et poursuit son activité dans le but de payer ses dettes.
A/ La constitution du nantissement
Le nantissement peut être conventionnel ou judiciaire :
1- Le nantissement conventionnel
C’est celui qui résulte d’un contrat entre le prêteur et le commerçant emprunteur, c’est-à-dire
le propriétaire du Fonds.
Le nantissement peut porter sur les différents éléments énumérés à l’article 80, à l’exclusion
des marchandises (article 107). Cela s’explique par le fait qu’on ne peut pas obliger le
commerçant à donner son stock qui est indispensable à la survie de son entreprise.
A défaut de désignation expresse et précise dans l’acte de nantissement, ce dernier ne comprend
que le nom commercial, l’enseigne, le droit au bail, la clientèle et l’achalandage.
Le nantissement doit être constaté par un acte écrit authentique ou sous seing privé.
Après enregistrement, l’acte doit être déposé dans les 15 jours, au Secrétariat-greffe du tribunal
dans le ressort duquel est exploité le Fonds. Cette inscription n’est pas soumise à la publication
dans les journaux.
2- Le nantissement judiciaire :
Le nantissement judiciaire permet au créancier qui craint que le recouvrement de sa créance
soit en péril de demander au juge de l’autoriser à inscrire cette garantie sur le Fonds de
Commerce de son débiteur (afin de s’assurer du paiement de sa créance), et c’est au juge
d’apprécier les éléments de la requête.
B/ Les effets du nantissement
Le nantissement confère à son titulaire les droits suivants :
- Droit de préférence : en cas de vente du Fonds de Commerce nanti, le créancier a une place
privilégiée pour recouvrer sa créance. Il passe avant les autres créanciers.
- Le droit de suite : c’est un droit qui permet aux créanciers nantis de suivre le Fonds en quelque
main qu’il passe. Il en résulte la possibilité d’opposer le nantissement à l’acquéreur du Fonds
et de se faire payer par ce dernier. Le rang des créanciers gagistes entre eux est déterminé par la
date de leur inscription au registre de commerce.
- La surenchère du dixième (à ne pas confondre avec la surenchère du sixième dont
disposent les créanciers opposants en cas de vente du Fonds). Si le créancier nanti estime que
le prix de vente est insuffisant, il peut former une surenchère du dixième sur le prix de la vente
et donner caution pour le paiement des prix et charges ou justifier d’une solvabilité suffisante
(article 123).

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