Explorer les Livres électroniques
Catégories
Explorer les Livres audio
Catégories
Explorer les Magazines
Catégories
Explorer les Documents
Catégories
Mots-clés : kyste du cholédoque, canal commun biliopancréatique, cirrhose biliaire, cancer des voies
biliaires, pancréatite, échographie anténatale, anastomose biliodigestive, cholangiographie
percutanée.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Branchereau S et Valayer J. Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant : dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical. Encycl Méd Chir
(Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-976, 2002, 10 p.
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
40-976 Techniques chirurgicales
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
forme particulière d’atrésie des voies biliaires. Il s’agit de cas où, à l’anomalie caractérisant Ainsi, l’importance de la dilatation est d’aspect très différent d’un
toute atrésie, la dysmorphie de caractère hypoplasique de l’ensemble des voies biliaires intra-
et extrahépatiques, peut s’associer, de manière peu fréquente (un cas sur 20 environ) une
cas à l’autre. On peut observer chez le nourrisson une masse
formation kystique située dans le hile. Elle est le plus souvent de petite taille et ne présente par kystique palpable au niveau de l’hypocondre droit ; à l’inverse, il
ailleurs aucune communication avec le duodénum. Elle représente en fait la kystisation d’une
extravasation locale de bile et sa pathogénie est tout à fait différente de la DCVPB. Certains est des cas où l’obstruction peut être plus ou moins intermittente,
articles [7] l’incluent encore, à notre avis à tort, dans les kystes du cholédoque. sans accumulation notable de bile dans la VBEH. De plus, et tout au
2
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
Techniques chirurgicales 40-976
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
3
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
40-976 Techniques chirurgicales
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
LITHIASE du meilleur moment pour l’intervention doit tenir compte à la fois de
La stase biliaire favorise la constitution de concrétions qui aggravent la sensibilité particulière de l’enfant les premiers jours de vie à toute
l’obstruction. Ces concrétions peuvent aussi se développer dans la agression de type chirurgical et anesthésique d’une part, et d’autre part
partie résiduelle intrapancréatique, si l’on a dû laisser un « fond de de la notion souvent vérifiée du retentissement hépatique précoce de
coquetier » lors de l’exérèse du kyste. En outre, la simple disposition la rétention biliaire. En pratique, c’est aux alentours du premier mois
de canal commun, accompagnée d’une dilatation modérée et diffuse que l’intervention doit être effectuée.
de l’ensemble de la VBEH, est aussi très souvent associée à une
lithiase de la partie basse des canaux [28]. BILAN MORPHOLOGIQUE DES LÉSIONS
L’échographie est le plus souvent l’examen qui a permis le dépistage
PERFORATION de la lésion. Les qualités actuelles de cet examen pourraient parfois
La distension et l’inflammation peuvent aboutir à la fissuration de permettre de se dispenser d’explorations radiologiques, dans les cas
la voie biliaire avec péritonite [1, 2] ; cette inflammation explique aussi où la région de la convergence peut être parfaitement analysée.
le caractère souvent très épais et très vascularisé de la paroi La cholangiographie intraveineuse ne présente plus d’intérêt, en
kystique. Cette péritonite biliaire peut être très grave ; une enfant, regard de la précision des autres examens.
dans notre série à l’hôpital de Bicêtre, est décédée du fait de cette Parmi ceux-ci, la cholangiopancréatographie rétrograde par voie
complication. endoscopique (CPRE) a la faveur de certains [16] ; elle apporte parfois
de bonnes images de la terminaison commune des voies biliaires et
CIRRHOSE BILIAIRE pancréatiques. Elle risque, en revanche, de ne pas permettre de bien
analyser la zone de la confluence hépatique, si celle-ci est en amont
Un point important qui n’est pas toujours signalé dans les articles d’un segment très dilaté de la voie biliaire [37]. Pour ses utilisateurs,
sur le sujet est l’état du foie. Si, dans certains cas, il peut apparaître il s’agit d’un examen sans danger, même chez le très jeune enfant [37],
normal macroscopiquement et à l’histologie, il arrive ce qui nous paraît contestable
fréquemment [30] que des lésions du parenchyme hépatique
témoignant de la stase et de la fibrose soient déjà très marquées. Enfin, la résonance magnétique a aussi ses partisans, du fait de son
caractère non invasif par rapport aux autres examens [25] . De
Il faut d’ailleurs noter que ces lésions peuvent très bien être nombreuses publications récentes ont mis l’accent sur l’intérêt des
retrouvées chez le jeune nourrisson, où elles ont une signification images obtenues par cholangiographie par résonance magnétique [3,
encore plus grave et où leur regression totale est aléatoire [35]. 13, 21]
.
Dans notre expérience, une fibrose dense correspondant à des
Dans l’expérience de l’équipe de radiologie de Bicêtre [33], c’est en
lésions de cirrhose biliaire a été retrouvée dans un tiers des cas sur
fait la cholangiographie percutanée faite en préopératoire immédiat
23 observations [31]. Il faut donc faire une biopsie hépatique lors de
qui est en mesure de fournir d’excellentes images.
l’intervention.
Lors de l’entretien avec les parents, qui doit comporter une
explication illustrée d’un schéma du montage prévu, il importe
CANCER SECONDAIRE DES VOIES BILIAIRES surtout de les prévenir de la nécessité d’une surveillance à très long
Un cas de cancer des voies biliaires sur kyste du cholédoque à l’âge terme. Il ne nous semble cependant pas justifié de les alerter sur des
de 12 ans a été rapporté [19], deux autres cas chez des sujets de moins possibilités de cancérisation tardive, tant ce risque apparaît minime
de 18 ans étant signalés à l’époque dans la littérature par les mêmes dans les cas habituels qui ne comportent pas une dilatation majeure
auteurs. En fait, cette complication concerne essentiellement des des VBIH, et à condition d’être opérés selon une technique correcte.
adultes, dont l’anomalie est restée méconnue jusqu’alors, ou aussi
pour d’autres, après une chirurgie faite dans l’enfance. C’est
notamment le cas pour ceux dont l’intervention n’a comporté qu’une Anesthésie
dérivation biliodigestive sans exérèse [9, 14, 23]. Mais la cancérisation
peut aussi survenir au niveau du foie après ablation complète, Sachant que du fait du diagnostic souvent précoce, il s’agit parfois
notamment lorsque les VBIH étaient et sont restées très dilatées. d’enfants très jeunes, une anesthésie spécialisée est indiquée.
Ainsi, une étude importante faite par les Japonais [43] a recensé 23 cas Lorsque l’exploration radiologique avec opacification de la voie
de cancers survenus chez des malades porteurs d’un kyste du biliaire a été décidée avant l’intervention, ce qui est préférable en
cholédoque, chez des sujet âgés de 18 à 60 ans (moyenne de 32 ans). dehors d’une situation d’urgence, il est bien entendu souhaitable
La localisation est très variable : intrahépatique, résidu du canal d’organiser l’examen sous la même anesthésie que celle qui sera faite
hépatique, résidu intrapancréatique, anastomose biliojéjunale. Chez pour l’intervention.
les malades non encore opérés de leur kyste, la fréquence du cancer
a été évaluée à 10 % [8] et même à plus de 16 % [43]. Il a aussi été
décrit des cas de cancer en amont d’un CCBP isolé, sans dilatation Exploration radiologique
de la voie biliaire sus-jacente, justifiant par là même l’exérèse préopératoire immédiate
préventive de la voie biliaire dans le traitement de cette anomalie [36].
Le reliquat intrapancréatique de la dilatation kystique peut aussi être On a vu que l’exploration par cholangiographie transhépatique
le siège d’une dégénérescence, jusqu’à 17 ans après l’opération… [15]. percutanée est l’examen qui nous semble le plus utile, même s’il n’est
Le type de cancer est le plus souvent un adénocarcinome [40]. pas toujours en mesure de fournir une image complète du CCBP [34].
Outre les données morphologiques sur l’ensemble des voies biliaires,
notamment sur l’emplacement de la future anastomose
Moment et préparation biliodigestive, cet examen permet, par prélèvement de bile, d’y doser
à l’intervention les sécrétions pancréatiques et d’en faire une étude bactériologique.
Dispensant du temps radiologique peropératoire et de ses
La présence d’un ictère n’est pas une contre-indication à inconvénients, l’examen ne présente aucun risque puisque le produit
l’intervention. En cas de fièvre, témoignant d’une cholangite, de contraste est évacué au cours de l’opération.
l’intervention peut même être envisagée rapidement avec Une opacification peropératoire n’est nécessaire que dans la mesure
l’indication du drainage de la collection biliaire. Une antibiothérapie où il n’a pas été possible de faire l’examen avant l’intervention. Elle
adaptée doit alors être instituée avant l’intervention. n’est cependant pas recommandée s’il s’agit d’une situation aiguë,
Un cas particulier et de plus en plus fréquent est celui du nouveau-né avec une bile infectée, où une injection sous pression comporterait
où le diagnostic a été fait par échographie avant la naissance : le choix des risques de bactériémie.
4
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
Techniques chirurgicales 40-976
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
Intervention
De multiples procédés ont été utilisés pour le traitement de la
DCVBP, allant de la dérivation externe à titre de drainage temporaire
aux différentes modalités de drainage interne.
Un traitement correct doit comporter l’ablation de la VBEH dans sa
totalité, jusqu’à l’emergence des canaux hépatiques, suivie d’un
rétablissement de la continuité avec le tube digestif.
La technique de l’anastomose directe du tube digestif dans la voie
biliaire dilatée, sans résection de celle-ci, a longtemps été utilisée :
elle est à proscrire. Elle expose aux complications de stase (infection
et lithiase dans la cavité biliaire qui a été laissée en place) et surtout
à la cancérisation secondaire. Certains auteurs ont d’ailleurs été
conduits à rappeler en consultation d’anciens patients qui avaient
subi ce montage, afin de compléter l’intervention avec exérèse de la
portion dilatée de la voie biliaire [14].
Bien que le rôle du sphincter d’Oddi ait été incriminé dans le
mécanisme de la lésion [10], il n’apparaît pas raisonnable d’intervenir
à ce niveau.
INSTALLATION
L’enfant est en décubitus dorsal. Une couverture chauffante est
nécessaire chez les nourrissons. Un billot soulève légèrement la base
du thorax et la région épigastrique. L’opérateur est à droite avec
l’aide et l’instrumentiste en face. 7 Après décollement de la vésicule utilisée ensuite comme élément de traction, on in-
cise la paroi antérieure du kyste pour guider la dissection.
5
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
40-976 Techniques chirurgicales
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
10 A. Ablation complète
du pôle inférieur du
kyste cholédocien lors-
que le canal de Wir-
sung reste à distance
du kyste.
B. Exérèse partielle du
pôle inférieur du kyste.
mieux mettre en place une petite lame de drainage sortant par une
contre-incision tout en évitant de fermer cette cavité sur elle-même.
Sur une série d’enfants opérés à Bicêtre et publiée en 1995, 16 enfants
sur 40 ont eu cette exérèse partielle, laissant une petite cavité biliaire
résiduelle dans la tête du pancréas [31].
L’ablation de la voie biliaire anormale est complétée ensuite de bas
*
A
en haut jusqu’à la zone de la convergence. En surveillant la
progression de la dissection par l’intérieur de la voie biliaire, on
s’assure que la section de cette dernière ne porte pas au-dessus de la
convergence, afin de ne pas avoir à faire une anastomose complexe
entre deux canaux hépatiques séparés et l’anse digestive.
RÉPARATION
– Il s’agit de faire une anastomose hépaticojéjunale sur une anse en
Y (fig 11A, B). Après section de l’arcade vasculaire, le jéjunum est
sectionné au niveau de la deuxième anse, la première des anses qui
monte aisément sous le foie. La tranche du bout distal est fermée
par agrafage ou par un surjet extramuqueux de fil résorbable de 5/0
ou 6/0, selon le diamètre de l’intestin. Ce segment est ensuite amené
au travers de la partie droite du mésocôlon transverse, en regard de
la section du canal hépatique. L’anastomose biliojéjunale est
effectuée sur la convexité antémésentérique de l’anse montée, près
de son extrémité refermée. Comme pour le rétablissement de la
continuité intestinale au pied de l’anse, les sutures peuvent se faire *
B
au fil fin, résorbable, en points séparés ou en surjet. Il importe que
l’anastomose biliodigestive soit bien étanche, et aussi sans tension.
On doit s’assurer que la longueur du méso de l’anse l’autorise à savoir que la protection vis-à-vis du reflux n’en est pas pour autant
bien monter jusqu’au niveau de tranche supérieur de section de la assurée, puisqu’il n’est pas rare d’observer une aérobilie
voie biliaire, et aussi qu’il n’y a aucune striction de l’anse ou de son intrahépatique à distance de l’intervention.
méso au passage du mésocôlon transverse. Concernant la longueur – Une autre technique de réparation consiste à interposer une anse
de l’anse, on considère que 40 cm constituent un minimum, une jéjunale isolée, d’une longueur d’une vingtaine de centimètres entre
longueur plus importante étant fixée chez l’enfant plus grand. Il faut la section du canal hépatique et le deuxième duodénum [29, 32]. L’anse
6
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
Techniques chirurgicales 40-976
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
Pour pallier cet inconvénient, les auteurs chinois [14] l’ont appliquée
en y adjoignant un artifice de réduction de la lumière de l’anse de
dérivation, créant d’après eux un effet antiretour, appelé en anglais
spur valve. C’est ce qu’ils décrivent sous le nom de « technique de
Chicago-Beiging »… Dans leur série de kystes du cholédoque
portant sur plus de 500 patients, il y a 120 cas suivis plus de 10 ans
après cette technique ; le taux de complications rapporté est très
faible, en rapport surtout avec des problèmes de sténose des
anastomoses.
– L’interposition de l’appendice a également été proposée pour la
réparation. Une étude multicentrique faite en Europe [11] a démontré
en fait la mauvaise qualité de ce type de montage.
7
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
40-976 Techniques chirurgicales
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
– un bilan clinique, où il s’agit surtout de s’enquérir de signes
12 Image rare de cholédo-
fonctionnels, tels que des douleurs abdominales, ou une
chocèle chez l’enfant. 1. Vé-
sicule ; 2. cholédoque dilaté ; décoloration épisodique des selles ;
3. convergence hépatique ; – un bilan biologique qui doit apprécier l’existence éventuelle de
4. cholédochocèle ; 5. duodé- signes de rétention biliaire ou de réaction pancréatique ;
num.
– un bilan morphologique comportant échographie et radiographie
abdominale en position debout, à la recherche d’une aérobilie ou
d’une dilatation des VBIH.
Dans la règle, les suites de l’intervention sont simples et la
surveillance à long terme ne révèle pas de complications
particulières. Cependant, la survenue de quelques douleurs
abdominales « banales » pose parfois le problème de leur relation
avec les antécédents hépatobiliaires. Elles impliquent de procéder à
tous ces examens de manière systématique.
Certaines anomalies sont tout à fait asymptomatiques et ne doivent
pas alarmer outre mesure. Il s’agit de :
inférieure de la voie biliaire. Dans certains cas où la dilatation en – une aérobilie intrahépatique, bien visible sur les clichés sans
amont n’a qu’un caractère fusiforme et non kystique, on peut même préparation et notée souvent et surtout lorsque les VBIH restent
se poser la question du rôle éventuel de cette lithiase dans la dilatées ;
formation de cette dilatation. Il ne paraît cependant pas raisonnable
de ne procéder qu’à l’ablation du calcul, s’il existe une disposition – la régression de cette dilatation n’est parfois que très partielle,
de canal commun évidente ; l’intervention de dérivation surtout lorsqu’elle apparaissait très marquée avant l’intervention ;
biliodigestive est le seul moyen d’éviter la récidive. Chez l’adulte, il – l’image d’un « fond de coquetier » intrapancréatique, résultant du
peut être nécessaire de recourir à une sphinctérotomie [28] dans un caractère partiel de l’ablation du kyste, est également le plus souvent
premier temps avant de traiter le problème du canal commun. bien tolérée. Cette image pose cependant un problème
psychologique pour les parents, qui ont entendu parler de « kyste »
¶ Dilatation congénitale de la voie biliaire principale par le radiologue parfois mal averti des conditions opératoires, et
et cirrhose qui ne comprennent pas que l’anomalie persiste malgré
l’opération…En général, une explication claire permet de les
Le retentissement hépatique de l’anomalie peut être précoce et
rassurer.
grave, avec développement de lésions de type cirrhotique,
notamment chez les enfants les plus jeunes [30, 35]. Dans 36 cas de
biopsie hépatique faite à l’occasion de l’intervention pour une série
publiée par l’un des auteurs (Valayer), de tels aspects de cirrhose Traitement des complications tardives
étaient notés chez six d’entre eux à l’examen histologique [31]. Une
hypertension portale peut ainsi survenir et compliquer la dissection ;
CHOLANGITES SECONDAIRES, LITHIASE
elle a été à l’origine d’une erreur de diagnostic dans un de nos cas,
où une dérivation portosystémique avait été effectuée, quelques Comme on l’a vu, la dilatation des VBIH ne régresse pas toujours
années avant que la DCVBP (de caractère minime) n’ait été complètement, sans toujours pour autant donner lieu à des
découverte. En tout état de cause, le traitement de celle-ci est complications. Mais il est certain qu’elle expose à la formation d’une
identique, en prévoyant une dissection qui pourrait être lithiase secondaire et qu’elle peut être à l’origine d’épisodes de
particulièrement hémorragique. cholangite. L’échographie et la cholangiotomodensitométrie sont
indispensables pour préciser le degré des lésions. Le traitement de
¶ Cholédochocèle ces lésions séquellaires est difficile. En effet, la dilatation qui persiste
est souvent segmentaire, avec des zones étroites séparant les
Son traitement très particulier mérite d’être cité ici, bien qu’il s’agisse portions dilatées, constituant autant de facteurs de stase et d’obstacle
d’une lésion tout à fait rare chez l’enfant. Seulement 20 % des 130 cas à la migration d’éventuels calculs. On peut avoir recours à différents
rapportés chez l’adulte ont été rencontrés chez l’enfant [44]. gestes, allant du lavage par voie percutanée sous contrôle
Cette lésion rare peut atteindre un gros volume et faire une saillie échographique à la lithotritie extracorporelle, sans compter
qui obstrue la lumière duodénale (fig 12). En endoscopie, elle d’éventuelles tentatives chirurgicales. Dans tous les cas, l’ablation
apparaît comme une tuméfaction sphérique, à surface lisse, des calculs risque fort d’être incomplète. Il se peut aussi qu’une
transparente, légèrement verdâtre, siégeant en regard de la papille. exérèse hépatique partielle soit nécessaire. Un empierrement diffus
Le traitement peut se faire par voie endoscopique, avec fenestration à l’origine d’épisodes répétés de cholangites peut même faire
de la lésion dans le duodénum. Si on a choisi l’abord chirurgical, il discuter l’indication d’une transplantation hépatique…
faut faire un large décollement duodénopancréatique, ouvrir le Il faut cependant souligner la rareté de ces cholangites secondaires
duodénum en regard de la tuméfaction, et après ouverture de la dans les cas habituels, et même lorsqu’il persiste une discrète
cholédochocèle, en ourler sa paroi à la muqueuse duodénale [42]. dilatation des VBIH, dans la mesure aussi où le traitement a été fait
de manière correcte. Dans la série des enfants publiée par l’un des
auteurs en 1995 [31], si leur fréquence en apparaît relativement
Surveillance postopératoire importante (9/41 anastomoses hépaticojéjunales), elles avaient pour
et à long terme la plupart eu un caractère éphémère et non récidivant.
En revanche, elles constituent une complication fréquente des
Dans les suites de l’intervention, la reprise de l’alimentation doit montages réalisés selon d’anciennes méthodes, comme la
pouvoir se faire vers le troisième jour, après ablation de la sonde kystojéjunostomie latéroterminale, ou la kystoduodénostomie. Dans
gastrique. Le liquide recueilli par la lame de drainage doit être ces procédés où la portion pathologique de la voie biliaire aura été
analysé pour dosage de l’amylase, sachant qu’un « fond de laissée en place, l’anastomose digestive, qui n’est déjà pas au point
coquetier » peut encore laisser passer un peu de liquide pancréatique le plus déclive et qui est faite sur la paroi souvent inflammatoire du
pendant quelques jours. La lame est enlevée vers le cinquième jour. kyste, ne manque pas de se rétrécir, provoquant sténose, infection et
Ultérieurement, la surveillance en consultation doit comporter : lithiase et aussi un reflux digestif dans les voies biliaires et
8
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
Techniques chirurgicales 40-976
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
pancréatiques. Le risque d’un carcinome secondaire sur de telles CANCÉRISATION
lésions est réel [40] . Sans affirmer que ces complications sont Il s’agit en général d’une forme grave de cancer hépatobiliaire, dans
inéluctables, le fait qu’elles peuvent mettre plusieurs années à la mesure où l’exérèse complète ne peut que très rarement être
apparaître [41] justifie de proposer systématiquement à ces patients curative.
une réintervention pour l’ablation complète de la voie biliaire Il se développe, soit sur la VBEH, s’il n’y a jamais eu d’intervention,
anormale et le rétablissement d’un drainage biliaire selon la soit sur les VBIH et particulièrement dans le cas où elles sont restées
technique habituelle. très dilatées. Au début, le diagnostic n’est pas aisé, et il se peut qu’il
ne soit fait qu’à l’occasion de l’examen histologique extemporané.
L’extension hépatique et ganglionnaire est importante et rend en
COMPLICATIONS PANCRÉATIQUES général toute exérèse illusoire. Dans une série d’origine japonaise [40]
Il existe des séquelles pancréatiques malgré l’exérèse dans certains datant de 1987, sur 105 opérations d’exérèse, seulement deux sujets
cas. Une étude par endoscopie rétrograde [24] sur le problème posé survivaient à 6 ans.
par des douleurs persistantes chez des adultes opérés de kyste du En fait, au moment de la découverte du cancer, souvent déjà à
cholédoque a montré le rôle éventuel de lésions séquellaires du l’origine d’une rétention biliaire, sa diffusion ne permet plus qu’une
pancréas : la majorité des patients avaient encore une dilatation des dérivation interne de caractère palliatif.
canaux pancréatiques ou du résidu du canal commun, avec parfois
des résidus « protéiques » dans la partie distale des canaux dilatés.
Cette étude japonaise portant sur 38 patients opérés de manière Conclusion
radicale et présentant encore des douleurs abdominales ou des
anomalies biologiques évoquant une origine pancréatique, a montré Le traitement chirurgical du classique « kyste du cholédoque », chez
l’existence d’une dilatation résiduelle des voies pancréatiques chez l’enfant, relève d’une technique assez simple, mais dont il faut
34 d’entre eux.
souligner le caractère « réglé ». Il faut cependant reconnaître que les
montages qui sont proposés pour le rétablissement du circuit
Le traitement de certains de ces types de séquelle pancréatique peut biliopancréatique ne sont pas ceux d’une anatomie normale et que la
présenter quelques difficultés chirurgicales, car le but est d’enlever surveillance de ces patients doit être assurée à très long terme, moins
le reliquat du kyste inclus dans la tête du pancréas et qui avait été pour déceler les risques d’une rare cholangite que pour s’assurer qu’il
laissé en place lors de la première intervention. n’y a pas un développement à bas bruit d’un cancer hépatobiliaire.
Références ➤
9
Malformations kystiques de la voie biliaire chez l’enfant :
40-976 Techniques chirurgicales
dilatation congénitale de la voie biliaire principale. Traitement chirurgical
Références
[1] Alonso-Lej F, Rever WB, Pessagno DJ. Congenital chole- [18] Hsu YC, Lin TY, Lee HC, Huang FY, Sheu JC. Congenital [33] Pariente D, Husson B, Urvoas E, Rion JY. Pathologie des
dochal cyst with a report of 2 and an analysis of 94 cases. Int biliary dilatation in infancy and childhood: 74 cases expe- voies biliaires chez l’enfant. Encycl Méd Chir (Éditions Scien-
Abstr Surg 1959 ; 108 : 1-30 rience. Changgeng Yi Xue Za Zhi 1994 ; 17 : 301-308 tifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris), Radiodiagnostic -
[2] Ando K, Miyano T, Kohno S, Takamizawa S, Lane G. Spon- [19] Iwai N, Deguchi E, Yanagihara J, Iwai M, Matsuo H, Todo S. Appareil digestif, 33-496-A-10, 1996 : 1-13
taneous perforation of choledochal cyst: a study of 13 Cancer arising in a choledochal cyst in a 12-year old girl. J [34] Suarez F, Bernard O, Gauthier F, Valayer J, Brunelle F. Bilio-
cases. Eur J Pediatr Surg 1998 ; 8 : 23-25 Pediatr Surg 1990 ; 25 : 1261-1263 pancreatic common channel in children. Pediatr Radiol
[3] Arcement CM, Meza MP, Arumanla S, Towbin RB. Mag- [20] Jan YY, Chen HM, Chen MF. Malignancy in choledochal 1987 ; 17 : 206-211
netic resonance cholangiopancreatography in the evalua- cysts. Hepatogastroenterology 2000 ; 47 : 337-340
tion of pancreaticobiliary disease in children. Pediatr Radiol [35] Suita S, Shono K, Kinugasa Y, Kubota M, Matsuo S. Influ-
[21] Kim SH, Lim JH, Yoon HK, Han BK, Lee SK, Kim YI. Chole- ence of age on the presentation and outcome of chole-
2001 ; 31 : 92-97 dochal cyst: comparison of magnetic resonance and con-
[4] Babitt DP, Starshak RJ, Clementi AR. Choledocal cyst: a dochal cyst. J Pediatr Surg 1999 ; 34 : 1765-1768
ventional cholangiography. Clin Radiol 2000 ; 55 : 378-383
concept of etiology. AJR Am J Roentgenol 1973 ; 119 : 57-62 [36] Suzuki S, Nakamura S, Ochiai H, Baba S, Sakaguchi T, Tsu-
[22] Kinjo T, Aoki H, Sunagawa H, Kinjo S, Muto Y. Congenital
[5] Bismuth H, Krissat J. Choledochal cystic malignancies. Ann absence of the portal vein associated with focal nodular chiya Y et al. Double cancer of the gallbladder and common
Oncol 1999 ; 10 (suppl 4) : 94 98 hyperplasia of the liver and congenital choledochal cyst: a bile duct associated with an anomalous pancreaticobiliary
[6] Bratu I, Laberge JM, Khalife S, Sinsky A. Regression or ante- case report. J Pediatr Surg 2001 ; 36 : 622-625 ductal junction without a choledochal cyst: report of a
natally diagnosed localized Caroli’s disease. J Pediatr Surg case. Surg Today 1999 ; 29 : 651-655
[23] Kobayashi S, Asano T, Yamasaki M, Kenmochi T, Nakagohri
2000 ; 35 : 1390-1393 T, Ochiai T. Risk of bile duct carcinogenesis after excision of [37] Teng R, Yokohata K, Utsunomiya N, Takahata S, Nabae T,
[7] Chang CC. Antireflux spur valve in cholenterostomy. Jpn extrahepatic bile ducts in pancreaticobiliary maljunction. Tanaka M. Endoscopic retrograde cholangiopancreato-
Soc J Pediatr Surg 1982 ; 18 : 73-75 Surgery 1999 ; 126 : 939-944 graphy in infants and children. J Gastroenterol 2000 ; 35 :
[8] Chapman RW. Risk factors for biliary tract carcinogenesis. [24] Koshinaga T, Fukuzawa M. Pancreatic ductal morphologi- 39-42
Ann Oncol 1999 ; 10 (suppl 4) : 308-311 cal pattern and dilatation in postoperative abdominal pain
in patients with congenital choledochal cyst: an analysis of [38] Todani T, Narusue M, Watanabe Y, Tabuchi K, Okajima K.
[9] Chaudhuri PK, Chaudhuri B, Schuller JJ, Nyhus LM. Carci- Management of congenital choledochal cyst with intrahe-
noma associated with congenital cystic dilation of bile postoperative pancreatograms. Scand J Gastroenterol
2000 ; 35 : 1324-1329 patic involvement. Ann Surg 1978 ; 187 : 272-280
ducts. Arch Surg 1982 ; 117 : 1349-1351
[10] Craig AG, Chen LD, Saccone GT, Chen J, Padbury RT, Toouli [25] Lam WW, Lam TP, Saing H, Chan FL, Chan KL. Magnetic [39] Todani T, Watanabe Y, Narusue M, Tabuchi K, Okajima K.
J. Sphincter of Oddi dysfunction associated with chole- resonance cholangiography and CT cholangiography of Congenital bile duct cysts. Classification, operative proce-
dochal cyst. J Gastroenterol Hepatol 2001 ; 16 : 230-234 pediatric patients with choledochal cysts. AJR Am J Roentge- dures, and review of thirty-seven cases including cancer
nol 1999 ; 173 : 401-405 arising from choledochal cyst. Am J Surg 1977 ; 134 :
[11] Delarue A, Chappuis JP, Esposito C, Valla JS, Bonnevalle M, 263-269
Allal H et al. Is the appendix graft suitable for routine biliary [26] Li L, Yamataka A, Yian-Xia W, Da-Yong W, Segawa O, Lane
surgery in children? J Pediatr Surg 2000 ; 35 : 1312-1316 GJ et al. Ectopic distal location of the papilla of vater in con- [40] Todani T, Watanabe Y, Toki A, Urushihara N. Carcinoma
genital biliary dilatation: Implications for pathogenesis. J related to choledochal cysts with internal drainage opera-
[12] Flanigant DP. Biliary cysts. Ann Surg 1975 ; 182 : 635-643 Pediatr Surg 2001 ; 36 : 1617-1622 tion. Surg Gynecol Obstet 1987 ; 164 : 61-64
[13] Frampas E, Moussaly F, Leaute F, Heloury Y, Le Neel JC, [27] Lilly JR. The surgical treatment of choledochal cyst. Surg
Dupas B. Magnetic resonance cholangiopancreatography Gynecol Obstet 1979 ; 149 : 36-42 [41] Todani T, Watanabe Y, Toki A, Urushihara N, Sato Y. Reop-
in choledochal cysts. J Radiol 1999 ; 80 : 1659-1663 eration for congenital choledochal cyst. Ann Surg 1988 ;
[28] Lucas S, Verhaeghe P, Stoppa R. Le syndrome du canal 207 : 142-147
[14] Fu M, Wang Y, Zhang J. Evolution in the treatment of cho-
commun associé à une dilatation kystique de la voie biliaire
ledochus cyst. J Pediatr Surg 2000 ; 35 : 1344-1347
principale. À propos d’un cas compliqué de lithiase du [42] Valayer J, Moreaux J. Kystes de la voie biliaire. Dilatation
[15] Fujisaki S, Akiyama T, Miyake H, Amano S, Tomita R, Fuku- canal commun. J Chir 1986 ; 123 : 490-496 congénitale de la voie biliaire principale. Encycl Méd Chir
zawa M et al. A case of carcinoma associated with the (Éditions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris),
remained intrapancreatic biliary tract 17 years after the [29] Moreno Gonzales E, Garcia Garcia I, Pascual MH. Chole-
docal cyst resection and reconstruction by biliary-jejuno- Techniques chirurgicales - Appareil digestif, 40-976, 1992 :
primary excision of a choledochal cyst. Hepatogastroente- 1-14
rology 1999 ; 46 : 1655-1659 duodenal diversion. World J Surg 1989 ; 13 : 232-237
[16] Guelrud M, Morera C, Rodriguez M, Prados JG, Jaen D. [30] Nambirajan L, Taneja P, Singh MK, Mitra DK, Bathnagar V. [43] Watanabe Y, Toki A, Todani T. Bile duct cancer developed
Normal and anomalous pancreaticobiliary union in chil- The liver in choledochal cyst. Trop Gastroenterol 2000 ; 21 : after cyst excision for choledochal cyst. J Hepatobil Pancreat
dren and adolescents. Gastrointest Endosc1999 ; 50 : 135-139 Surg 1999 ; 6 : 207-212
189-193 [31] Nguyen TL, Valayer J. Dilatation congénitale de la voie
biliaire principale chez l’enfant. À propos d’une série de [44] Weisser M, Bennek J, Hormann D. Choledochocele; a rare
[17] Henry X, Marrasse E, Stoppa R, Capron JP, Sevestre H. Asso- cause of necrotising pancreatitis in childhood. Eur J Pediatr
ciation maladie de Caroli-kyste du cholédoque-fibrose 52 cas. Presse Méd 1994 ; 23 : 1565-1568
Surg 2000 ; 10 : 258-264
hépatique congénitale-polykystose rénale. Proposition [32] Okada A, Oguchi Y, Kamata S, Ikeda Y, Kawashima Y.
d’une nouvelle classification des dysembryoplasies biliaires Jejunal interposition hepaticoduodenostomy for congeni- [45] Yamaguchi M. Congenital choledochal cyst. Analysis of
ectasiantes de la voie biliaire principale. À propos d’une tal dilatation of the bile duct. J Pediatr Surg 1983 ; 18 : 1 433 patients in the japanese literature. Am J Surg 1980 ;
observation. Chirurgie1987 ; 113 : 834-843 588-591 140 : 653-657
10