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Paul Fréval

Prétextes
À une histoire de feu
(En vers)

1
Une version de Prétextes à une histoire de feu
a été édité par Le Crut en 2014, 30 exemplaires
numérotés sur papier ivoire 180 g
Une version a été autopubliée en 2017, sur la plateforme Amazon.
Cette version 2022 est destinée à être diffusée gratuitement, comme on dit.

2
Avertissement :

Cet ensemble de poèmes ne convient pas à un public trop jeune,


en raison de son propos à quelques reprises volontiers grivois.

3
Prétextes
A une histoire de feu
(en vers)

4
L'encre et le papier savent seuls tenir l'imagination en éveil.

Les pas perdus


André Breton
(1924)

5
6
L'âme yaourt
Petit pas de danse

7
« L’entrée en couple est désormais marquée par les rapports
sexuels qui sur ce point ont remplacé le mariage. La
modification des mœurs a été profonde depuis trente ans. [...]
La danse, en tant que rite d'interaction, est un langage à double
entente qui laisse planer le doute sur le degré d'investissement
réel de l'acteur. Chacun peut profiter de cette introduction
reconnue pour s'investir aussi loin que possible dans la
relation ; chacun aussi peut aussi, à l'inverse, rompre la relation
entamée en se réfugiant derrière sa définition institutionnelle.
Ce n'était qu'une danse. (...) C'est parce qu'elle fonctionne à la
manière d'un libre-service où le visiteur peut toujours se
reprendre que la danse est devenue aujourd'hui une forme
acceptable du marché matrimonial »

Michel Bozon, La découverte du conjoint, Population n°6, 1987

8
Pour commencer rêver d'amour

Il a rêvé de l’amour !
Durant son rêve le sentiment de l'amour est revenu
et le jour il a cherché
cette fille si douce qu'il aimait
Il a repensé à ce beau rêve
plutôt merveilleux de l'amour
qu'il avait oublié

Imiter les poètes

Il fait souvent ce rêve étrange et pénétrant


D'une femme inconnue, et qu'il pénètre
Et qui n'est chaque fois ni tout fait la même
Ni tout à fait une autre

Méditer, ressentir

« J'ai peut-être besoin d'amour »,


pensait-il,
en avalant
pour ce jour
son soixante-huitième yaourt

9
L’estime de soi

Il est beau-
Coup trop moche
Pour qu'elle approche

Mis en boîte

A force de prendre des vents


Il commençait à ressembler à
une éolienne

La Recherche

Il est un peu dans les vapes


Et cherche une femme
Sur Google Maps

La course

Elle était hôtesse d'accueil au Super U


En bikini tout le monde s'accordait
plus ou moins pour dire
qu'elle avait un superbe cul

10
La Rencontre
Il la trouvait si jolie
Qu’il en baissait la tête.
Lui vint l'idée de mettre des miroirs
Sur le bout de ses chaussures,
Pour voir le ciel et les dessous de ses cils
Dans les reflets.
Or d’elle il vit tout de ses dessous
Et releva la figure et plongea ses yeux,
Dans ses yeux ;
Ce fut le début
De l'aventure !

Esthète

Premiers verres en terrasse


Loin de Montparnasse
Tous les deux
Un peu prout prout
Derrière eux un groupe de jeunes chantent
En chœur Balavoine

Il y a ce qu'on désire...

Rien ne l’excitait plus que l'éclat de rire d'une femme


dans un couloir

11
Etc.

Montre-moi tes seins et


tout ira bien
Etc.

Il avait bu du Jack Daniel's


et tétait la plus belle

Et ce qui arrive vraiment (on est parfois déçu)

Elle lui avait soufflé sur la plage "c'est qui Zola ?"
ce qui, malgré son nu corsage, le désola

Cauchemar d'un ami

Se faire souffler dans le poireau


Par le sosie de Josiane Balasko
Au rouge à lèvres goût Tabasco

Être sollicité

Ô thon suspends ton vol


Vers moi s'il te plaît !

Salles vides

Déshabiller une pas très jolie femme


et ne pas en faire un drame

12
Premiers stades

Regardant les étoiles il lui fit :


« Uranus est une planète qui restera dans les annales »

C'est parfois triste

Faire l'amour à sa poupée


puis se dire que demain
on ira draguer une vraie femme
et puis se dégonfler
Tout seul avec son drame

Intimités

On a tous besoin de confidents :


Je t'écoute
Et plus je t'entends, plus je me dis
Qu’on a tous besoin de pâte à dents

Parfois beau

Elle a
un cul d'enfer
Mais
va-t-elle plaire à sa mère ?

13
Stade du miroir

Séduire
c'est se
réduire
C'est s'enduire de crèmes lactées,
De magie saupoudrée,
Et d'amour en chimères

Succès

Devenir psy, lacanien,


bien réputé
Depuis L'Homme-Chien
mais en se promenant
Bien
Accompagné
personne pour se retourner
tandis qu'elle
rien
que par sa beauté
elle leur casse le coup
à cette meute de loups

On provoque la colère

On ne baise jamais que des allégories

14
Fortuna !

Faire l'amour par hasard


par chance et par amour !

Un peu osé

A force de baiser
ils ne pouvaient plus se baisser

Porn-poèse et lâcher-prise

Pendant que ton cul claque


ma bave fait une flaque
dans le bas de ton dos

On pense mieux en aimant !

Il cherche en elle comme les penseurs cherchent les idées, fébriles et


conquérants, portés par le sens de la vie

Avoir évité les poufs (ouf !)

Elle était devenue véritablement infecte


Depuis qu'on la draguait sur Adopte un Mec

15
Ducasse social

Elle est belle


Comme une échelle

Matin

Faire l'amour
avec l'âme ou rugit la bête

Rue

Ses fesses absorbent tous les chocs de la pierre


Où claquent ses chaussures légères
Une onde comme sur la mer
Les muscle et les caresse

Timide ?!

Être heureux en regardant une jolie fille,


Comme un enfant qui écrit
Sa première poésie
Et qui ne sait pas qu'il faudra penser à conclure

Ah !

Il n'est plus seul


Elle n'est plus pucelle.

16
Réciproque, plus ou moins

Elle était tellement


amoureuse de lui
qu'elle sauta d'un pont
à l'élastique
pour l'oublier
quelques secondes

La tendresse

Il aime la fille qui passe


son temps à le tenir
debout

Fleur bleue

Les femmes sont belles quand elles sont celles


qu'on aime éperdument

Financer ces fiancés !

Voulez-vous m'épousseter ?
Fit le pou à la fée
Qui se mit à pouffer !

17
Ils ont beaucoup d'enfants

Tout va bien au fond des mères


des bébés pourraient presque
lever le pouce

Ils grandissent si vite !

Tout ce qui naît file,


file en mot(s) et
file en trop.

Et deviennent ébahis !

Tout ce qui naît bat


la mesure avec le cœur
avec le mal avec les pleurs
mais aussi avec sa joie

L'amour se multiplie

Tu t'endors dans mes bras ma toute petite fille


Ma fille ma fille ma fille
Mon étoile adorée

Ma fille, je t'aime
Comme la tendre enfant charmée
Par l'horizon du monde.
Découvre les merveilles
enchantées de la vie !

18
Ombres

La lune est dans la nuit


La lune est dans le jour
L’un verse et ment
du vin trouble fête
quelque chose nous ment

Et les Dieux!

Nous nous consacrons du Temps.

19
La vie ce manège

Papi part,
Meurt, le cimetière c'est l'enfer
On se retrouve cons pour de bon

Toi cet été devant nos yeux plein de buée


Tu arrachais le pompon
Girl

Toute la nuit file et fond


En rappel

Poète sur Youporn


Pompiers sur le pont
De la meuf en feu

Tout file et

Part à veau l'eau

Et vous, enfants, qui allez vous fier à nous


Avec nos fières allures !

Bébé naît et croise


Pépé

Voilà nous ne sommes


Jamais totalement
Désespérés

20
La fatigue des classes moyennes
(Et pop !)

21
« Quelque plaisir que l'homme éprouve à agir, à se mouvoir, à faire
effort, encore faut-il qu'il sente que ses efforts ne sont pas vains et
qu'en marchant il avance. Or, on n'avance pas quand on ne marche
vers aucun but ou, ce qui revient au même, quand le but vers lequel
on marche est à l'infini.
(...) C'est cette limitation relative et la modération qui en résulte qui
font les hommes contents de leur sort tout en les stimulant avec
mesure à le rendre meilleur ; et c'est ce contentement moyen qui donne
naissance à ce sentiment de joie calme et active ; à ce plaisir d'être et
de vivre qui, pour les sociétés comme pour les individus, est la
caractéristique de la santé. »

Emile Durkheim, Le suicide

« La filiation adoucit »

« Les individus cessent, d'un point de vue identitaire de se définir


massivement et exclusivement par leur rapport au travail, et
s'inscrivent dans un horizon pluriel où ils se réclament d'autres
appartenances. »

« C'est le fait d’effectuer un « bon travail » et d'être un bon


professionnel qui est désormais un critère moyen de l'excellence
personnelle. »

Danilo Martucelli, Forgés par l'épreuve, L'individu dans la


France contemporaine

22
Sociologie urbaine

Ils dérivèrent, pas très tranquilles,


Vers le bout des bords des grandes villes
C’était la rentrée des classes
Sociales dans les marges ils marchaient

L’absence de lumière semble désormais les conduire


Au regret de ne pouvoir, esthétiquement
Et moralement, sombrer encore

Car tout tombe,


Se tue, dans cette brousse.
Puis peu à peu des secousses : c’est que
Le cœur bat de nouveau, sec,
Et à hue et à dia,

Et ils soufflent dans les nuages


Et sortent du coma
Nature sexuelle, érotisme hivernal,
C’est le soleil dans un champ de vaches vides
(Sans papillons les idées s’éparpillent) !

Et ils courent, eux aussi


Portés par une force mystérieuse

Ils courent et rient


Dans le soleil

Et la verdure

Qu’ils aiment
Parce qu’elle leur faire tant de bien

23
La bonne résolution

Nous allons être modernes

Pot-pourri

Femme de ménage, elle aspirait


à autre chose

*
Il était cadre et roux ?
Alors c'était un vélo !

Vélo
Love
Pédale

Peut-on congeler
des mandarines?
(Et des doigts de pieds ?)

Mourir d'être mou


Et moy-
-en

24
Alcools et hyper
(Et paronomase)

Ce soir au bar du bourg ils descendent des bières


comme des potions magiques
Espèrent des philtres d'amour
Mais rien n'opère
Avec la bière
et les petites misères
Ni le rosé, ni le rouge, ni le café.
L’envie
reste au bord de leurs bouches baveuses.

Et par-dessus-ça certains fument


De colère et de douleur.

Rêveuse, laide mais idéale, la serveuse


En avance (dans tout ce retard) écrit
À la main d'une craie qui crisse
Face aux estomacs vides
Et le soleil couchant
Du petit bourg touchant
À sa fin,
Au milieu de la crise,
le menu de demain midi

Et

La poétesse aux cheveux longs


Dessine à la terrasse
Un énième canevas
Et personne n'en fait vraiment cas.

25
Dies iræ

Sa vie était devenue complètement vide


donc il a pris une grande bière fraîche
au bar du centre Leclerc

Et il l'a bue suffisamment vite


pour que son ventre s’emplisse

Vite et son esprit


et lui dont la vie était si vide
a été pris du beau vertige de l’ivresse ;

Fragile et beau, il fut aspiré,

Finit par s'effondrer dans le hall


Dans sa chute a retrouvé l'all
Le grand tout qui rigole

La vie se consume

Leurs vies n'avaient pas super bien marché


Alors ils les passaient
Dans les supermarchés

Le Cora et la bannière

Aller au Centre Leclerc


Pour avoir les idées claires

26
Le rêve tient la tête hors de l'eau

Mois d'avril, un mercredi, tondre la pelouse


En s'imaginant au milieu d'une partouze

Grant écart

Relire Platon
un peu absorbé par l'idée de changer
de voiture

Plomberies

Nus avns subi un dégât des O

Mon plombier, la raie découverte,


débouche le siphon de tes beaux cheveux noirs

Couple-poulpe

Acquérir un 4x4
pour qu'elle dise il m'épate
Investir des millions
pour qu'elle pense : « Quel couillon !»
Et manger un enfant
pour passer à
La télévision

Ma vie serait plus belle


si de temps en temps tu
vidais le lave-vaisselle

27
Sortir les poubelles
Et rentrer bien plus belle

Couple
Poulpe

Sois l'autre !

Je ne comprenais plus rien aux sociétés


alors je vivais au jour le jour, avec de vagues projets.
Dans quelle situation allais-je mourir ?
Et le temps me submergeait :
Que faire d'autre que jouer
Et rire ?

Homme-Femme

Pendant que des femmes rêvent en sourdine


Qu’elles aiment, qu'elles butinent,
Que font les hommes ? Ils jardinent !

Boire des demis avec les amis

Boire des verres avec des gars et des filles


et se dire à la fin :
« C’était une super soirée »
Tandis que le reste est foiré

28
Les vacances, le paradis et l'enfer

Le camping est complet


les chalets se ressemblent –
Où va l’humanité ?

Les petits bourgeois

Elle était moche,


il était con,
ils ne s'aimaient plus
mais ils étaient propriétaires
d'une grande maison
face à la mer

Manger des fruits de mer


Un jeudi après-midi
La grande vie de trader
Et les plaisirs inouïs

Ou bien

Manger des fruits de mer


un jeudi après-midi
la grande vie de précaire
et les désirs enfuis

Poète maudit

Il descend une bière


Puis vers la plage
L’été culmine en un orage

29
Les murs se craquellent

Quelques vieux couples s’acharnent, indolents,


à réveiller leurs cœurs (ou à le stabiliser) :
un plateau de fruits de mer, la jouissance
d'une huître sensuelle avec du pain et du beurre, pour elle
et pour lui une saveur nouvelle, ce vin de cristal,
un grand trait blanc dans le ciel à la terrasse
et l'onde un peu salope qui passe et repasse
la plage où les amoureux dorment dans les coquillages cassés
le sexe toujours possible à la vue d'une femme
Qui suce ses moules gingembre citron avec fureur

Dernière volonté

Avant de mourir il avait demandé


à se faire enculer
ce qui les avaient tous beaucoup choqué
les tristes mines compassées
voyant la mort approcher
et le délire venir
chez cet être sacré

Situations précaires

Chercher un travail
dans une botte de paille

30
Entretiens d’embauche

Fumer un pétard
et arriver un peu
en retard

*
Rater le train-
train
de la vie

*
Depuis qu'il était chômeur
il faisait du rameur

Sur le dehors tirer une croix


et acheter une PS 3

Se sortir de l'engrenage
et de l'emprise sociétale

Il attendait le car scolaire


Quand par téléphone son psychologue
Lui a annonça qu'il était plus ou moins bipolaire

Toucher à la hache
puis toucher l'AAH

31
Sdf

Ta haine est propre


La nuit tombe juste sur tes chaussures
Une gastro-entérite ravage cent oiseaux
Juste au-dessus de ta voiture
Tu as tiré le mauvais numéro
Mais tu vas finir par rire
Ou faire l'amour
Et te sortir de ce mauvais pas

Elle

Si déprimée,
Elle craque et
Croque
Un petit bout
De fromage périmé

32
Désaffilié mais connecté

Depuis le très haut débit


Il y a de plus en plus de très gros débris

Mécanique

Perdre sa peau
d'échappement

Repos

Glander
Jusqu’à l'extase

Geek

Il va de blog en blog
et finit par tout dégobiller

Narcisse.com

Se dégrader à force
de se regarder

HTML

L'amour a son réseau que le réseau ne connaît pas

33
HP

Aller voir son pote à l'H.P.


se faire entourer de braves blouses blanches
faire le tour du parc
frôler la pelouse
parler de football,
de mal être, de société
et de tous ces cons dans les
supermarchés

La beauté des flemmes

Je ne plais plus aux femmes.


Je ne vais pas en faire un drame
mais je suis triste,
les yeux sur mes chaussures,
dans la lumière des réverbères
dans la nuit solide, bien installée ;
car elle revient toujours,
pas la jeunesse,
pas la beauté de nos premières caresses !
Et la danse sinusoïdale du jour et de la nuit
nous dessine le chemin vers la mort

34
Ceux qui partent sans laisser d'adresse

Dépenser 250 euros en parapharmacie


en apparences en paradoxes en superfi
cielles ficelles pour être beau (si!)
Préparer son divorce et vendre son cabinet
d'anarchiste architecte
Décider d'aller vivre aux Seychelles et sé-
Cher ses larmes mais prendre le mauvais avion
puis le mauvais nuage
puis le mauvais orage
et dans l'explosion rire
Nerveusement
de ces mauvais présages

Luxe

Changer de vie comme


de chemise

L’amour et la violence

Se faire exclure par sa femme


et tout conclure par un drame

Tuer sa compagne
Et ouvrir le champagne
(ou inversement)

35
Remuer le couteau
Dans celle qui te plaît

*
Elle me hait
d'honneur

Devenir tueur d'un nouveau style


en claquettes et en short
supprimer le G.O.
d’un Marmara de Sicile
Finies les excursions
mais peut-être la Une
de(ux) Libération(s) !

Souffrir

Rater sa vie
mais de
peu

36
Le laisser-aller puis la haine

Il ne faisait plus attention à rien, ni au monde ni à ses chaussures

Deux mille onze


couler un bronze
de l'art moderne
la vie la merde

Supprimer le RSA aux Artistes


c'est mon programme politique
leur ajouter des guillemets
comme seul cadeau désormais

Le feu n'a jamais pris


La terre n'était pas sèche_
Je rejoue au football
J’ai de petits projets,
J’ai Acheté une maison
Et je remue la terre
Où poussent des fleurs
Non sans mal

37
Roman

Sortir d'une dépression assez nerveuse


et tomber sur une huître laiteuse
dans un grand restaurant
avec une nana plutôt chieuse
Et s'imaginer écrire un beau roman
ayant pour titre "La Vie Heureuse"

Pom-pom

Après beaucoup de cidre


Finir par se décider

Fuites (la route)

Sur la route il y avait un beau soleil


très fort et j'ai mis mes lunettes noires
c'était classe avec la musique
ah ! La belle musique pas classique !

C'était cool ce mercredi chômé


je ne sais pas où j'en suis de ma vie

Mais j'ai l'impression d'en être au milieu


comme, si l'on veut, au centre de gravité
À l'heure grave j'ai roulé
j'ai roulé une heure à cent vingt à l'heure
et même
jusqu'à 133 km/h

Et puis ce soir je me dis que je passe le plus clair de mon temps


à rechercher les flash
ou à les éviter

38
Errances

Partager sa coke
Avec un clochard
Jeune, abîmé et
Prendre un coquard

*
J'avais la nuit dans le dos
Et la trace des coups de couteaux
La liberté bien méritée
Le froid et la dureté
*

Dans l'errance j'avais perdu l'amour


un jour je quitterai la France
me disait Claude le clochard
avant de se faire trancher la gorge

L'alcool génère hic


Et hoquet et heurts et pas la quiétude
Qui est l'étude
De la douleur

Perdre deux kilos mais d'héro


-ïne
Dans les toilettes d'un aéro-
port
Chasse d'eau divine

39
*
Prendre un Tranxène
et se jeter dans la Seine
dans la chienne de nuit

Couteau dissimulé,
bien enragé
l'histoire de la Roumanie
passe la BAC d'abord
et peut-être pourquoi pas
en souvenir des grandes heures
une peu de torture version
deux mille onze

Rester perché
Plus vraiment maître de soi
des corbeaux dans le champ ne nous sortiront pas du coma

Manger une fourchette


pour quitter les Baumettes

L’écart s'est creusé :


Il est loin
qui lutte
encore
de vous

40
La souffrance de l'auteur

41
Mais que serait un châtiment incorporel ?
Michel Foucault, Surveiller et Punir

L'angoisse devant n'importe quel commentaire, même favorable, vient de la


conscience obscure des cadavres dans le placard, de les voir surgir et de se retrouver
subitement imposteur ou criminel. Le ridicule ou la médiocrité de ce qu'on a de
plus intime, de celui que nous sommes pour le meilleur et pour le pire, et dont nous
nous sommes faits un rempart, y compris dans l'écriture si tout cela est percé à
jour, on peut être anéanti.

Jean Baudrillard, Cool mémories

42
Il avait fini par sortir des Beaux-Arts
mais était devenu un peu bizarre

Retourner chez maman

Antonin Artaud est mort


et il a plus quinze ans
il écoute Zemmour
avec maman
en gobant des yaourts
à 100 %
les auteurs au scalpel
on ne sait pas trop comment
mais on peut vivre sans

Prendre la pause de l'artiste

Attendre tranquillement, presque idiot,


que l'art se fasse et passer le temps
en consolations et divertissements

Poème bio

Il se mettait de l’ail dans le cul


Pour souffrir
Et faire de beaux haïkus

Hypersensible !

Il était si sensible que lorsqu'une personne appuyait sur l’interrupteur


Il s’allumait ou s'éteignait

43
Modèle

Il se prend pour Philippe Muray


Mais il ne dit que des conneries
Et il a une gueule de raie

Les coups

Oh oui l'haïku
ça fait mal

Petit présent funeste

Donner son corps à l'art


ou bien ce qu'il en reste
petit présent funeste
ordalie sur le tard

Et oui

Faire des vers


comme un mort

Commencer à rêver de gloire

Peut-être qu'un jour on commentera vos statues

S'arracher les cheveux

Une seule lettre vous manque et tout est dépeupé

44
Travailler dur (plus qu'aux champs)

Cultiver du mais
et de l'or je

Se sentir maudit !

Mourir de faim
en attendant des commentaires,
perdre peu à peu l'usage de son cœur,
de son souffle et de ses yeux,
s'éteindre connecté
en approximatif vortex

« Nous rêvions tous d’écrire de jolis textes »

Le manque de succès succède aux cascades


De souffrance
Tu as mal lu ta notice d'artiste

Se moquer des idoles

Le Baudelaire a une bosse


Le Rimbaud deux bosses

45
A quoi bon continuer ?

Il abandonne doucement
sa molle passion
et se demande ce qu'il va faire dans la vie :
faire comme eux des petits tas de commentaires
et donner son avis ?

Prendre goût aux premiers succès

Ne pas remplir la salle


mais de jolis verres
Entre amis
Et joies sincères

Relativiser son talent

Tout le monde écrit des bouquetins


mais tout le monde ne sait pas écrire
la chèvre de monsieur Seguin

46
Prendre des claques

Tout cela est un peu nul


lui fit l'éditrice
mais vous êtes sympathique.
Il remit mon caban
(acheté chez H et M),
et pensait "je t'encule"
mais il prit du recul
et le train pour Venise
il cherchait une devise
Le rosé l'enivrait,
la pizza était bonne
et les enfants jouaient :

Bel été bord de l'eau ;


il regardait sa femme
et lui a dit :
« Je t'aime »

Méditer

Il était tout voûté


À force de se remettre en question

Faut-il que je capitule


Fit-il encore loin du Capitole ?

*
Sauter une écrivaine
en parachute
avec

47
Et puis, par chance

Lire les propositions


Des maisons d'éditions
petit sourire en coin
en partant de Venise
a six heures du matin

*
Ma cote commence à grimper
se disait le cycliste
à l'instar d'un
artiste contemporain
^

Faire des lectures

Un acteur qui a le trac est un


tracteur

*
Signer son premier autographe
à 18h00 un vendredi soir

*
L'heureux est lu

48
Petit coup de remous

Il rangea sa maison et y vit bien plus clair


il s'enferma cent jours
et n'écrivit rien ou peu
il abandonnait la vie littéraire
et
lâcha son chien
dans la nature

Tout le monde est cri

Ses idées suicidaires s’envolèrent


À la vue d'un joli derrière
(Ah ce petit artiste aux mœurs légères !)

Regarder la lune
Par pur inattention
Et arrêter d'écrire

49
Revenir en Auvergne
après l'échec du maudit livre
ça s'appelait L'Air Rance
et passer les soirées ivres
à regarder des films

Comme un subtil succès


une reconnaissance
au milieu des dérives
et de la longue absence

Ton petit pull en laine


la mémoire encore vive
de ta mauvaise haleine
au réveil Mireille

Petite chatte fondue


par un soleil de dingue
le climat s'est tendu
Et peu ont survécu
à la crise fatale

50
Pour Calliope

Tout ce qui souffre mon fou


La tristesse d’être en dessous
De tout ce qui se joue
La déception qui tape en nous
Et l'être toujours sous le joug
Du destin qui nous claque les joues

Tout ce qui souffre d'amour


le ventre tordu contre la terre
tout ce qui souffre regarde
vers le ciel

51
Re-elle

52
En deçà ou au-delà des formes instituées qui toujours existent et parfois
dominent, il y a une centralité souterraine informelle qui assure la
perdurance de la vie en société.

Michel Maffesoli, Le temps des tribus

53
Erato sur terre

Elle portait carrément des airs bleus

Poésie : étude de l'amour et des mœurs

Ses yeux s'ouvrent


Le vent entre dans la chambre
Le son de la mer perce la bulle de ses rêves
Ils crèvent de faire l'amour dans le soleil
Et nus dans les nuages,
Chutent sur le rivage
En touristes classiques et beaux
Où partout les mouettes remplacent les corbeaux

Hypothèse : le corps, c'est le réel

Le rythme de l'univers sur le bout de tes pieds


et ma langue avec un peu de chance.
Le chaos est l'amour en pleine activité,
je t'embrasse ma douce
où se rase la nuit
aux bords de nos ventres qui papillonnent
en ce début d'été

54
Se mettre à dos la société,
pour de bon, le grand combat !

Dormir dans le salon


ou dans la salle-hop!-
à manger, avec les rêves en hôtes remués
par le son du frigidaire
et ronfler

Réaliser un rêve

Il n'en est jamais vraiment revenu


de l'avoir vue toute nue

Entre experts

Tandis
Qu'une princesse russe,
Lors du gala de poésie de fin d'année
Se gratte l'anus

Petits mensonges d'amoureux

Ta beauté m'a ôté


Mon point de vue sur l'éternité

55
Ordres

Ils s'enfoncent dans la nuit


Et ne reviennent que lorsque la lumière du jour
a passé la baie vitrée

et ils se regardent

elle la plus belle


il est le plus beau

ô cils noir de jais


ô bouche d'oiseau magique
ils se connaissent depuis toujours
et s'aiment à jamais

Ils sont sombres et sevrés


par l'amour qui les a faits
Dériver jusqu'à l'ombre d'eux-mêmes
puis les a relevés
puis les a révélés

Ça faisait des je t'aime je t'aime dans les voiles


et ils avançaient dans les étoiles

Et la terre tournait et dans son bon manège


ils faisaient bon ménage
et l'âge, leurs airs un peu volages
une forte tempête eurent raison de leurs folies.

56
La colère des Dieux (société)

Tout s'effondrait à côté d'eux


les lustres éclataient sur le sol
elle était vraiment très belle !

Lui, luisant, lui disait : laisse ! Laisse !


Je regarde encore un peu tes fesses !

Fractions d'élégie

S'attacher c'est l'erreur


C’est mettre le sexe avec l'amour
C’est se tâcher de douleur
Avant de passer à la table du corps
Mais certains culs ont la forme de cœurs,
Ceux qu'on dessine sur des feuilles
À main légère et levée
À la Matisse

Rupture

Elle le rompt
À l'amour, puis à Dieu
Elle rompt : adieu,
L’exit(e) !

57
Pour finir

L'amour l'amour
Je n’en ai plus rien à foutre
Fit-elle en se faisant lécher
Par la langue d'une loutre

L’amour c’est bien quand c’est raté

L'amour c'est bien quand c'est raté,


L’amour c'est bien pour s'éreinter,
La viande et les phrases à disséquer,
Le ventre tordu par des signes mal lus.

Le mal tu vois c'est la clarté,


Les petits gars ensorcelés.
Les vampires vont s'amuser :
Avec la mort on hait, jamais déçus.

Pas de surprise à la fin de l'histoire,


Les mines grises et le long couloir,
Les souvenirs c'est dégueulasse
Alors je mets du rhum dessus !

58
Soirée diapo

Il met ses photos dans la corbeille,


Le mal ne passe pas,
Il sait que son amour est là qui veille,
Alors il fait l’hurluberlu !

Mais qu'il est bon de vénérer !

Tu étais partout dans le ciel


Quand le soleil se couchait

Devise

Travail, famille,
Et toi qui est partie

Frères perdus

Nous, on souffre en silence


et si ça nous lance
un peu trop
on se balance des falaises (fallait pas),
frères d'états, d’Etretat
et le temps d'une chute

On se dit ce sera quoi


d’être un tas
en bas
de chair croquée
Léchée
recroquevillée
presque un homme chié

59
O
O mon soleil
O tes médianes
Saignent mon cœur
Saignent mon âme
Et combien d’anges
semblables à nous
deviennent-ils fous
Dans ces triangles
où l’amour bout ?

Encore !

Ses petits seins sifflent


contre son torse presque mort
il a trop bu encore
dès le début ils se sont perdus

Angel

Il faut admirer le ciel


tous les jours
et les cieux mouillés de nos larmes d'anges
dérangés

60
Pourriture

Ça ne mourra jamais
Mais ils n'y croient plus

Les vieux embruns bretons stagnent en eux


Et la cité la pollue
Il cherche errant d'autres dimensions
De jouissants artifices

Se retrouveront-ils ailleurs, obsédés d'orifices


Comme des adultes après le sacrifice
Ou feront-ils leurs vies parallèlement ?

Elle file avec amour et la préciosité


Fantasque des femmes hantées
Par les grandes histoires
À l'opposé du Temps.

Elle est maintenant belle comme le passé

Amen

Et pour toujours

61
Retour sur terre
(Bordel)

62
Il faut accepter de perdre ou de se perdre, de mourir même, pour pouvoir
vivre mais surtout pour gagner une sensation propice de soi, se cabrer face
à un manque à être et s'en délivrer, en éprouvant finalement que la vie
vaut la peine qu'on s'y attache.

David Le Breton, La Peau et la Trace, Sur les blessures de soi

Si tu trouves, lecteur en parcourant ces pages


Quelques endroits obscurs et fautifs, ne va pas
En accuser l'auteur. Pour te livrer l'ouvrage
Plus vite, le copiste a trop pressé son pas.
Qui ne me croira pas sur parole et qui pense
Me rendre responsable, il manquerait de cœur.
Mais ton livre est mauvais_Sans nier l'évidence,
dis-moi donc franchement: le ferais-tu meilleur ?

Martial, Epigrammes (trad. Jean Malaplate)

63
Changer de style

Tu me trompes tu joues : si si chut ! Silex ! Euh silence ! En ce moment


d'feu han han j'voudrais qu'tu penses à ouam où l'âme pend han han !
QQ ! Feu l'amour ! Uh ! C’est parés d'or ne ment p-
As et paro ah qu'nous filons vers les étoiles. Moi mort
Avec la gaule qui perce les nuages-rêve d'arbres arabes.
Et des culs beaux d'femmes blondes bien faits
Levés tss tss ah arrête tu m'aimes ! Mes
Ih ih mais si mets-y de l'exil d'l'ex elle lance ! Cigare là noël 2013 ou ha...

Nokia. Contre l'ex je bois. Le Nôtre d'amour part au


Pas d'une pâtisserie dégustée comme des enf-
-ants gonflés d'joie, d'soleil. Déjà l'cul fut d'fond. C'est p'
As de refus qu'on s'prit dans les bras en croix
Fatigués et figés par le ciel pour toujours ma tige d-
Dans dansante d'han h'an d'vie dans ta figure ta joue
de proue! ô les belles fesses salope ! Ô ça ne va pas faire ffff-
Lop. Lopette tu l'diras ! Lâche ! Mais t'es très tss tss t-
oi! C'est louche l'âme jolie moi féminin, joli bru-

-ne. Tu m'ave tu m'ave dit quoi non pas qu'on s'm'


Arirai ni sessèmèsserait mais qu'assis mes cassis mec assis oh mer-
-de burnes burinées étonnées de ta beauté, de ta sensualité totale. Eh
eh !
Oui !

64
A Christian Prigent

Sa vie d'été estoit (et elle ?) _ hey ! un peu douloureuse alors.


Aux Champs il prit (Libres) (ses pas dans les pas d'Hadès)
Christian Prigent et (G)illes Deleuze.
Et Yahvé sa fille dans ses bras.
Et comme elle semble bleue heureuse, il
prie pour elle, la Poésie : ses légers ri
-res éclairent comme dans l'orage
sa Thor acide (à zik) cage.

Deale aussi bandit (mais pas vil) pour une Juliette capricieuse:
(la ciguë? Son credo), ainsi qu'une secure femme mannequin à ses heures.
D'une beauté rare, et d'un cœur doux comme un couffin.
Pas perdu il se rassemble et prend la déesse scission ambitieuse :
(En vrai man(ne!)exilé), deux meufs, de se faire, errent, dorées eh oh !-
père et duc Heures.

Aban(pas bi)donne en loque la love euh sorry my love


la liste de ses travelling intérieurs, l'amour:
"l'occasion d'une location de cul", lèche l’ange "le voca et
le coca bullaires"- prépare romans -(et déjoue l'histoire des déçus du
postérieur). Elle l'attendait là il est ailleurs.

(statues, plus de posts rieurs, il décide et ne cède pas :


sérieux! Ça rigole pas)

Gelés ils entrent dans l'éternité : est-ce la tentaculaire(dead


et euh) ou l'inspection du travail qui ramène son derrière
dans le bar SM : est-ce?
et il ou elle dira: «(tu) m'aimes plus(sse) : je te laisse
prendre ce txt comme extrait, miction et jonction
de tout, etc.»

65
La vie heureuse

Il regarde La vie d'Adèle


Elle est belle sa vie de
dad elle est belle et d'elle
Il dirait qu'elle éclate
En bouche sous la douche qu'elle est classe

Première (à part, appart) appar


Emment déminantes
Huîtres et carte bel As
Vernissent sages l'amazing l'am

Our children are sleeping


Pong et on te baise dans le jardin :
As-tu chialé devant Schiele ?

Pignes-tu pendant la mort des héro-


Ines ?

Et tant d'art et tant de beauté


Adorées à donner à trans
Vaser dans la vie des suivants
Chacun sur son île mais tenus par les
Fils de sang du temps passé en danse
Ensemble. Pour un peu d'indépendance
on fait de lourdes larmes amies,
O
Comme ils rêvent d'écrans sublimes éclaireurs de vie*!

*var: Comme elle rêve de sublimes éclaireurs de vie!

66
Retour de marché

En pleine nuit six huîtres ouvertes au bras durci :


ces magies de la nature sous l’œil en soleil
des citrons verts du Brésil résistent peu

Pendant qu'elle se réveille


C’est pas si pucelles (Queues !)
Ces petites ordures
Jouissent
En crevant dans la bataille,
Et durent

Le bras de mer qui dégueule


dans sa bouche excitée, sister du saint esprit

Tam-tam et clac : sortie de cloaque

La souffrance gicle
à coups de langue
mortelle

Et fugue, se transforme enfin


À ton parfum, en goût et en fortifiants !
Musique ! Cri ! Son palais à l'endroit rose de ses délices.

67
Poème-télé-réalité
Pour C. Hanna

Il mange avec une grande satisfaction


Un gâteau au chocolat au cœur fondant
En regardant une télé-réalité (the Bachelor)
Louise est très belle et pourtant pourtant

Si désuète. S'interroge sur la marque


De son dessert industriel. N'adore plus
Ces filles qu'Adorno aurait vomies. Comm-
Erce de perverses égéries. Et parce que

Le soleil aussi nouveau qu'un OVNI dort,


Zappe avant sur un gonzo (du porn)
Une amatrice excelle en s'ouvrant à trois hommes
Elle est belle, elle, dans ce business rebelle.

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Version achevée le 21/09/2022 à l’Hermitage

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70

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