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Le prix du cuivre, en chute libre,

provoquera-t-il la prochaine pénurie


catastrophique?
Charly Pohu - Il y a 11 h

Le prix du cuivre chute et se trouve en dessous du niveau auquel il est lucratif.


Cela freine l’intérêt pour ce métal crucial. Une dangereuse pénurie pourrait
couver.

Le prix du cuivre, en chute libre, provoquera-t-il la prochaine pénurie


catastrophique?© Fournis par Business AM
Le cuivre est dans tout. Ordinateurs, smartphones, machines à laver, et même dans
n’importe quel câble. Depuis mars, son prix est en chute libre : il a baissé de près
d’un tiers. Mercredi à la clôture de la bourse des métaux de Londres, une tonne valait
7,690 dollars. En cause : des peurs de récession. En situation de récession, la
production de différents produits manufacturés reculerait, et la demande en cuivre
également. Selon certaines estimations, son prix pourrait chuter jusqu’à 6.600 la
tonne dans les mois à venir.
Pour cette raison, la chute du prix de « Dr Copper » est souvent vue comme un
indicateur d’une récession à venir. Mais au-delà de ces fluctuations de marché en
fonction du contexte macro-économique, un vrai danger se profile à un horizon plus
lointain, rapporte Bloomberg.

Désintérêt des investisseurs


Cette chute du prix du cuivre entraine une baisse de l’intérêt pour ce métal. Financer
quelque chose dont le prix ne fait que chuter est un horizon qui ne motive pas les
investisseurs. C’est ce que constate déjà Freeport-McMoRan Inc., un des plus
grands fournisseurs de cuivre au monde. Les prix seraient maintenant
« insuffisants » pour soutenir de nouveaux investissements, s’alarme le groupe, cité
par Bloomberg. Le cuivre devrait actuellement valoir 9.000 dollars la tonne pour être
lucratif, estime Goldman Sachs.
Dans ce climat où les investissements s’effacent, les réserves futures de cuivre
commencent à être en péril. Les inventaires des différentes plateformes d’échange
sont au plus bas. Newmont Corporation, un mastodonte du secteur minier, vient de
mettre en suspens un projet de construction d’une mine de cuivre (et d’or) au Pérou,
estimé à 2 milliards de dollars.

Risques multiples

Malgré ces peurs de récession, la demande ne va pas entièrement disparaître. Les


crises, comme une récession, sont temporaires, comme l’a montré l’Histoire. Pa la
suite, la demande pour le cuivre devrait rebondir. De plus, avec la transition
énergétique, le monde aura de plus en plus besoin de cuivre (malgré la pollution
résultant de l’extraction minière). Un véhicule électrique comporte par exemple deux
fois plus de cuivre qu’une voiture thermique (qui en contient déjà 30 kilos en
moyenne).

« Nous regarderons en arrière vers 2022 et nous nous dirons ‘oups' », lance John
LaForge, responsable de la stratégie des actifs réels chez Wells Fargo, cité
par Bloomberg. « Le marché ne fait que refléter les préoccupations immédiates. Mais
si vous réfléchissez vraiment à l’avenir, vous pouvez voir que le monde est
clairement en train de changer. Il va être électrifié, et il va avoir besoin de beaucoup
de cuivre. »
Voilà tout le danger. Si aujourd’hui les investissements se tarissent et que les
nouveaux projets de mines sont reportés, au moment où la demande va repartir en
flèche, l’offre sera incapable de suivre. Construire une mine prend au moins dix ans.
Cela mènera à des pénuries, à une hausse violente des prix, des retards sur les
chaines d’approvisionnement et à un nouvel épisode d’inflation (rappel : le cuivre est
dans tout). Les objectifs de transition énergétique et de réduction des gaz à effet de
serre risquent aussi d’être mis à mal par ce goulet d’étranglement qui se profile.

Déficits à venir

Voilà pour la théorie. Il existe également quelques estimations chiffrées, qui dressent
un tableau assez sombre. D’abord, dès 2024, on s’attend à ce que la croissance de
la production des mines ait atteint un sommet. Cela est calculé en fonction des mines
existantes qui se vident, et des projets de nouvelles mines qui verront le jour. C’est là
que le report de la construction de la mine au Pérou sonne encore comme plus
alarmant.
Selon une étude de S&P Global, en 2035, le monde sera confronté à un déficit de 10
millions de tonnes (la demande étant alors de 50 millions de tonnes). En 2015, à titre
de comparaison, 19 millions de tonnes ont été produites, moins de 17 en 2020, et un
peu plus de 20 en 2021.
Selon une étude de Goldman Sachs, le déficit sera de 8 millions de tonnes dans dix
ans. Pour y remédier, des investissements à hauteur de 150 milliards de dollars
seraient nécessaires. Selon BloombergNEF, en 2040, le déficit de cuivre issu de
mines sera de 14 millions de tonnes. Il faudra alors recycler en masse pour couvrir
cette différence. Mais là aussi, le secteur doit être développé (16% du cuivre
disponible sur le marché, en 2021, était du cuivre recyclé) et des investissements
sont nécessaires, peut-on ajouter.
Des chiffres gigantesques comparés au déficit de 2021, atteignant 441.000 tonnes.
C’est à peine 2% de la demande (soit très peu par rapport aux 20% que suggère
l’étude de S&P Global, pour 2035)… mais les prix sont partis en flèche sur l’année,
gagnant 25%. Bref, on pourrait s’attendre à de sérieux maux de tête dans les années
à venir.

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