John T. MENTZER,
Harry J. et Vivienne R. Bruce Excellence Chair of Business – University of Tennessee
William DEWITT,
Professeur de Logistique, Transport et Supply Chain Management – University of Maryland
James S. KEEBLER,
Professeur assistant de Marketing – St. Cloud State University
Soohong MIN,
Professeur assistant de Logistique et Marketing – Georgia Southern University
Nancy W. NIX,
Directeur du “Center for Value Chain Management” – Texas Christian University
Carlo D. SMITH,
Professeur Associé de Marketing – University of San Diego
Zach G. ZACHARIA,
Professeur Assistant, département Marketing – Texas Christian University
Une construction managériale ne peut pas être utilisée efficacement par les ges-
tionnaires et les chercheurs si tous ne sont pas d’accord sur sa définition. C’est le cas
existe tellement de définitions différentes qu’il y a peu de consensus sur ce qu’il si-
gnifie. L’objet de cet article est de faire le point sur la recherche afin de comprendre
tique) sont passés en revue, classées et synthétisées. Des définitions des construc-
SCM. Après avoir identifié les conditions et les conséquences du SCM, ainsi que les
« Le management est à la veille d’une avancée Selon lui, du fait de l’extrême imbrication des
majeure dans la compréhension du rôle que entreprises, la dynamique des systèmes peut
fluctuations permettra d’anticiper les effets des mande afin de démontrer son influence sur la
gration des relations organisationnelles. « Beer Game » et la recherche sur le « Bull- donné l’autorisation de traduire.
whip Effect » (Lee, Padmanabhan et Whang, comme une condition sine qua non pour être
sons. Des déterminants spécifiques qui peu- démarche de SCM sur la stratégie et la perfor-
vent être associés aux tendances de la mance de l’entreprise. Cet article se propose
et la qualité et leurs contributions respectives à rentes définitions des termes « supply chain
Les sources d’approvisionnement des entre- examinées puis classées et résumées. On pro-
Elles ont donc été conduites à améliorer l’effi- cadre de travail afin d’établir un chemin cohé-
cacité de la coordination des flux d’entrée et rent pour conceptualiser le phénomène. Ses
de sortie de matières. Un élément clé de cette conditions et ses conséquences seront identi-
coordination est le resserrement des relations fiés et ses limites en termes de fonctions et
avec les fournisseurs. Par ailleurs, les entre- d’entreprises seront délimitées. Enfin, nous
produit sans défaut, plus rapidement et effica- châne logistique. Le modèle est accompagné
cement que la concurrence n’est plus consi- d’une série de retombées managériales et
chain » et « supply chain management » les À l’intérieur de cette définition, on peut iden-
plus couramment utilisées par le monde aca- tifier trois niveaux de complexité pour une
démique et les professionnels. Le but est de châne logistique, selon qu’elle est « directe »,
parvenir à une définition unique et exhaustive « élargie » ou « globale ». Le premier niveau
sur laquelle les dirigeants d’entreprise et les est composé d’une entreprise, d’un fournis-
futurs chercheurs peuvent s’appuyer. seur et d’un client intervenant dans les flux
Il semble qu’il existe un certain consensus deuxième comprend les fournisseurs du four-
entre les auteurs sur la définition de “châne nisseur immédiat et les clients du client immé-
logistique”, ce qui n’est pas le cas pour diat, tous impliqués dans les flux amont et/ou
per et Ellram 1993 ; La Londe et Masters information (figure 1.b). Le troisième englobe
1994. Lambert, Stock et Ellram 1998). Selon tous les acteurs impliqués dans l’ensemble
La Londe et Masters, une châne logistique est des flux amont et aval de produits, services,
de la châne.
(Christopher 1992). En
plusieurs entreprises, en
ques entre les deux premiers acteurs ; et une gers et beaucoup d’autres produits. Cette mul-
société d’études de marché fournit des infor- tiplicité explique que de nombreuses chânes
mations sur le consommateur final à une logistiques se présentent comme des réseaux.
entreprise située très en amont dans la châne Pour AT&T, par exemple, Motorola peut être
logistique. Très schématiquement, on voit un client dans une châne logistique, un parte-
ainsi certaines des nombreuses fonctions que naire dans une autre, un fournisseur dans une
les chânes logistiques complexes peuvent troisième et un concurrent dans une qua-
Nous reviendrons plus longuement sur ce On notera aussi que dans notre définition de la
point plus loin dans cet article mais il est châne logistique, le client final est considéré
important de comprendre que ces définitions comme un acteur à part entière. Ce point est
partent implicitement du principe qu’il y a important car il reconnât que des distribu-
toujours une châne logistique, qu’elle soit ou teurs comme Wal-Mart peuvent faire partie
non gérée. Si aucun des acteurs de la figure 1 des flux en amont et en aval qui constituent
n’applique activement les concepts étudiés une châne logistique.
dans cet article pour gérer la châne logistique,
celle-ci n’en existe pas moins. Ainsi, nous fai- Définir le SCM
étant innombrables, il est important de noter terme « Supply Chain Management » est une
qu’une entreprise peut faire partie de plusieurs source de confusion pour ceux qui étudient le
chânes. Wal-Mart, par exemple, peut être phénomène mais également pour ceux qui
membre d’une châne logistique pour des tentent de mettre en place une démarche de
bonbons, des vêtements, des appareils ména- SCM. La recherche comme la mise en appli-
Monczka, Trent et Handfield (1998) Le SCM nécessite généralement l’intervention de plusieurs fonctions pilotées par un responsable
également des relations mutuelles avec des fournisseurs à plusieurs niveaux. Le SCM est un concept
« dont l’objectif principal est d’intégrer et de gérer les achats, le flux et le contrôle des matières dans
La Londe et Masters (1994) Une châne logistique stratégique comprend « ... au moins deux entreprises d’une châne logistique
qui passent un contrat à long terme ; .... le développement de la confiance et de l’engagement dans
la relation ; ... l’intégration des activités logistiques avec partage des données relatives à la demande
et aux ventes ; ... la possibilité d’une évolution dans la localisation du contrôle du processus
logistique. »
Stevens (1989) « La gestion de la châne logistique a pour but de synchroniser les besoins du client et le flux des
matières provenant des fournisseurs afin de parvenir à un équilibre entre des objectifs – service de
haut niveau, stocks minimum et réduction des coûts unitaires – souvent considérés comme
contradictoires. »
Houlihan (1988) Différences entre le Supply Chain Management et la gestion classique des achats et de la
de ses différents maillons n’est pas fragmentée et déléguée à plusieurs fonctions : production, achats,
distribution et ventes. 2) Le SCM nécessite et, in fine, s’appuie sur des décisions stratégiques.
« Fournir » est un objectif commun à la quasi-totalité des maillons de la châne et a une importance
stratégique particulière en raison de son impact sur l’ensemble des coûts et la part de marché. 3) Le
SCM appelle une conception différente des stocks qui servent de balancier direct et non plus
indirect. 4) Une nouvelle approche des systèmes s’impose, qui tend vers l’intégration de préférence
à la création d’interfaces. »
Jones et Riley (1985) « Le management de la châne logistique concerne l’ensemble des flux de matières, depuis les
Cooper et al (1997) Le management de la châne logistique est « ... une philosophie qui tend vers une gestion intégrée de
cation seraient facilitées par l’adoption d’une stratégiques endogènes et exogènes en vue
Le SCM comme philosophie de management 3. Une focalisation sur le client pour créer à
tes :
Corollaire de l’intégration des comporte-
2. Une orientation stratégique vers un effort tion et la surveillance des processus (Cooper
commun pour synchroniser et faire et al. 1997 ; Cooper, Lambert et Pagh 1997 ;
Lambert et Pagh ont souligné l’importance de évaluation conjointes passent par des proces-
fréquentes mises à jour des bases de données sus mis en œuvre de manière continue sur plu-
parmi les membres de la châne logistique sieurs années (Cooper et al. 1997). Outre ces
recherche logistique (Global Logistics pour réduire les stocks de la châne logistique
comme la volonté de mettre des données stra- et al. 1997 ; Dowst 1988). Les membres de la
tégiques et tactiques à la disposition d’autres châne doivent aussi collaborer dans le déve-
rence des informations concernant les niveaux des décisions relatives au portefeuille (Droz-
de stocks, les prévisions, les stratégies de pro- dowski 1986). Enfin, la conception des systè-
motion des ventes et les stratégies marketing mes de contrôle de la qualité et de livraison
lève les incertitudes qui peuvent exister entre doit également être menée conjointement
L’efficacité du SCM passe aussi par un par- volonté de servir les clients. Définir un
tage mutuel des risques et des récompenses objectif commun et établir une même volonté
qui crée un avantage concurrentiel (Cooper et parmi les acteurs de la châne est une forme
al. 1997). Ce partage est important pour d’intégration politique. Lassar et Zinn (1995)
terme entre les membres de la châne logis- intégrer la politique de la châne logistique
tique (Cooper et al. 1997 ; Cooper, Lambert et afin d’éviter les doublons et les chevauche-
Pagh 1997 ; Ellram et Cooper 1990 ; Novack, ments, tout en cherchant un niveau de coopé-
Langley et Rinehart 1995 ; Tyndall et al. ration qui permette aux participants d’être
Tyndall et al. 1998). Par coopération, on La mise en œuvre du SCM passe par l’inté-
entend des activités similaires ou complémen- gration des processus de la châne logistique,
taires, menées de manière coordonnée par des depuis les achats jusqu’à la distribution en
entreprises dans le cadre de leur métier en vue passant par la fabrication (Cooper et al. 1997 ;
d’améliorer la performance ou d’obtenir Cooper, Lambert et Pagh 1997 ; Ellram et
progressivement des résultats spécifiques Cooper 1990 ; Novack, Langley et Rinehart
mutuellement désirés (Anderson et Narus 1995 ; Tyndall et al 1998). L’intégration peut
1990). La coopération n’est pas limitée à une être réalisée par des équipes interfonctionnel-
opération ponctuelle et se situe à plusieurs les, des personnels détachés des fournis-
niveaux hiérarchiques (dirigeants et responsa- seurs et des prestataires de services
bles opérationnels par exemple) ; elle suppose indépendants (Cooper et al. 1997 ; Cooper,
une coordination interfonctionnelle entre tous Lambert et Pagh 1997 ; Ellram et Cooper
les membres de la châne logistique (Cooper 1990 ; Manrodt, Holcomb et Thomson 1997 ;
et al. 1997). Novack, Langley et Rinehart 1995 ; Tyndall
et al 1998).
Une action conjointe dans le cadre de relations
de la châne logistique et de la châne dans son logistique est constituée d’une mosäque
ensemble (Cooper et al. 1997 ; Cooper, Lam- d’activités dans une même entreprise et se
bert et Pagh 1997 ; Ellram et Cooper 1990 ; caractérise par des stocks planifiés, des systè-
Novack, Langley et Rinehart 1995 ; Spekman mes et des procédures de contrôle indépen-
La troisième est celle de l’intégration interne services jusqu’au marché. En d’autres termes,
générale, avec une transparence totale depuis un processus est une séquence particulière
les achats jusqu’à la distribution, une planifi- d’activités qui se déroulent dans le temps et
cation à moyen terme, une orientation tactique l’espace, avec un début, une fin, des apports et
plus que stratégique, la priorité à l’efficacité, des résultats clairement identifiés et un cadre
l’utilisation de supports électroniques pour d’action (Cooper et al. 1997 ; Cooper, Lam-
les liaisons et une démarche client qui reste bert et Pagh 1997 ; Ellram et Cooper 1990 ;
contrat – peut-être à l’infini – et, dans le même Si ces différentes conceptions du SCM sont
temps, le nombre de partenaires doit être intéressantes, leur examen attentif montre que
limité pour favoriser une coopération plus la littérature, en fait, essaie de définir deux
Alors que certains auteurs traitaient des acti- tion châne logistique est la reconnaissance
vités qui constituent le supply chain manage- par une entreprise des implications systémi-
ment, d’autres se penchaient sur les ques et stratégiques des activités tactiques
processus. Davenport (993) définit les proces- liées à la gestion des différents flux à l’inté-
sus comme un ensemble structuré et quantifié rieur d’une châne logistique. Ainsi, une
service spécifique pour un client ou un mar- logistique (SCO) si ses dirigeants perçoivent
ché déterminé. Selon La Londe, le SCM est le les retombées de la gestion des flux amont et
processus qui permet de gérer des flux rela- aval de produits, services, finances et infor-
n’a pas de SCO si elle perçoit les retombées fournisseur et du dernier client. Parce qu’ils
systémiques et stratégiques de manière sont focalisés exclusivement sur son client pour
purement unilatérale. Ainsi, dans la figure l’un et sur son fournisseur pour l’autre, ils ne
1a, l’entreprise au centre de la châne logis- regardent ni vers l’amont ni vers l’aval.
Ce n’est pas pour autant que l’entreprise qui Mais avant d’aller plus loin, nous devons aussi
a l’orientation châne logistique peut la con- examiner les conditions, les conséquences et le
prise qui la possède peut mettre en œuvre Les conditions du SCM sont les facteurs qui favo-
des démarches logistiques individuelles et risent ou entravent la mise en œuvre d’une philo-
échange de données électroniques avec les coopération est un prolongement logique et direct
n’est pas du SCM, si elles ne sont pas coor- Moorman, Deshpande et Zaltman (1993) définis-
tique. Dans la châne élargie de la figure 1b, Pour Dwyer, Schurr et Oh, l’engagement est « un
tous les acteurs concernés ont une telle gage tacite ou express de continuité relationnelle
entre les partenaires. » L’engagement est un et justifiée). Cooper, Lambert et Pagh affirment
ingrédient essentiel de la qualité des relations à aussi que l’importance de la culture d’entreprise
long terme qui sont l’une des composantes du et sa compatibilité entre les membres de la
SCM (Gundlach, Achrol et Mentzer 1995). châne logistique ne peut pas être sous-estimée.
Lambert, Stock et Ellram que la mise en œuvre Si l’on s’en réfère à la définition que nous avons
du SCM nécessite aussi d’engager les ressour- donnée de la SCO, la compatibilité organisa-
ces nécessaires et de décentraliser les responsa- tionnelle au sein d’une châne logistique
bilités pour atteindre les objectifs visés. implique que les entreprises doivent toutes avoir
confiance sont des éléments « clés » parce qu’ils Selon Lambert, Stock et Ellram, il doit y avoir
encouragent les entreprises à (1) à préserver leur accord sur une vision du SCM et les processus
investissement relationnel en coopérant avec les clés. Pour Ross, il est essentiel de définir et de
partenaires de la châne, (2) résister à la tentation communiquer une vision de SCM compétitive,
des alternatives à court terme en faveur des partagée non seulement par les entreprises indi-
bénéfices à long terme d’une relation durable viduelles mais par l’ensemble de la châne logis-
avec les partenaires existants, et (3) ne pas recu- tique (une SCO telle que nous la définissons),
ler devant des actions potentiellement risquées avant de se lancer dans un projet de SCM. La
parce qu’elles ne craignent pas d’opportunisme vision précède donc le SCM. L’exercice de défi-
confiance et l’engagement favorisent directe- dégager des objectifs et des stratégies qui guide-
ment des comportements coopératifs dans la ront l’identification et la réalisation des opportu-
mise en œuvre d’une SCO dans plusieurs entre- nités du marché (Ross 1998). Nous reviendrons
prises pour parvenir au SCM. plus en détail sur les processus clés dans la partie
démontré que la compatibilité organisationnelle Plusieurs auteurs, enfin, montrent que le soutien
entre les entreprise au sein d’une alliance a un de l’équipe dirigeante joue un rôle critique
impact positif fort sur l’efficacité de la relation dans la définition des valeurs, de l’orientation et
(i.e. la perception que la relation est productive de la philosophie d’une entreprise (Felton 1959 ;
Hambrick et Mason 1984 ; Kotter 1990 ; Tosti et Logistics Research Team à l’université du
Jackson 1990 ; Webster 1988). Day et Lord Michigan 1995 ; Monczka, Trent et Handfield
(1988) ont observé que les cadres dirigeants ont 1998). Porter (1985) définit deux sources
tionnelle. Lambert, Stock et Ellram disent que férentiation. Selon Giunipero et Brand (1996), il
sont des conditions importantes à la mise en élevant le niveau général de satisfaction des
œuvre du SCM. Dans le même contexte, clients. La Londe (1997) a, pour sa part, avancé
Loforte (1991) affirme que l’absence de soutien que le SCM a pour but d’améliorer le service du
des dirigeants est un obstacle au SCM. Dans la client et la valeur économique par une gestion
figure 2, la reconnaissance par une entreprise de synchronisée des flux de matières et d’informa-
l’importance de ces éléments est indiquée tion, depuis la source jusqu’à la consommation.
comme une des conditions du SCM. Lorsque Selon Porter, l’avantage concurrentiel est, fon-
des partenaires contigus d’une châne logistique damentalement, la résultante de la valeur que
adopte chacun une SCO, ils peuvent s’engager l’entreprise crée pour le client et il a pour but
dans le processus de mise en œuvre du SCM. En d’établir une position profitable et durable
d’autres termes, la SCO est une volonté d’une contre les forces qui déterminent la concur-
entreprise à traiter les éléments cités dans la rence. Ainsi, la mise en œuvre du SCM, en amé-
figure 2 dans une perspective stratégique, systé- liorant la création de valeur et la satisfaction du
n’est possible que lorsque plusieurs entreprises rentiel de la châne et de chacun de ses membres
contiguës de la châne logistique ont cette orien- et, in fine, la rentabilité de l’une et des autres.
Une analogie peut aider à mieux comprendre. l’avantage concurrentiel et la capacité de créer
Une châne logistique est comme une rivière, de la valeur/satisfaire le client tant pour la châne
dans laquelle circulent non pas de l’eau mais des logistique que pour les entreprises qui y partici-
produits et des services. Même si personne ne pent. Par exemple, un objectif clé du SCM est de
perçoit les retombées systémiques, stratégiques, réduire le coût du niveau de service requis par
de la gestion du bassin de rivière, la rivière les clients d’un secteur (Houlihan 1988 ; Jones
existe. De la même manière, même si une entre- et Riley 1985 ; Stevens 1989). Un autre est de
prise ne perçoit pas les retombées systémiques, mieux servir le client en augmentant la disponi-
stratégiques, de la châne logistique dont elle fait bilité des produits et en réduisant la durée du
partie, celle-ci existe. Lorsqu’une région tra- cycle de commande (Cooper et Ellram 1993).
versée par la rivière reconnât la nécessité pour Le service du client est également amélioré par
les régions situées en amont dans le bassin de des systèmes logistiques capables de dévelop-
rivière de conserver et préserver la source d’eau per des solutions innovantes et de synchroniser
et la nécessité de faire de même pour les régions les flux de produits, de services et d’information
en aval, elle a adopté une orientation systémique de manière à créer des sources uniques et per-
stratégique – l’équivalent en l’occurrence d’une sonnalisées de création de valeur pour les clients
orientation châne logistique. Toutefois, sans la (Ross 1998). Enfin, des coûts faibles et un ser-
aval, cette région n’a guère les moyens de mettre avantage concurrentiel pour la châne logistique
en œuvre cette orientation. C’est après seule- (Cavinato 1992 ; Cooper et al. 1997 ; Cooper et
ment qu’un certain nombre de régions contiguës Ellram 1993 ; Cooper, Lambert et Pagh 1997 ;
adoptent une orientation similaire et gèrent acti- Ellram et Cooper 1990 ; Lee et Billington 1992 ;
vement les ressources de la rivière que l’on peut Novack, Langley et Rinehart 1995 ; Tyndall et
dire que le bassin est géré. Tout comme il n’y a al 1998). À ce titre, le SCM vise à améliorer à la
de véritable management de la châne logistique fois la rentabilité (réduction des coûts) et la per-
que lorsque plusieurs entreprises qui ont des formance (service du client) dans un contexte
liens directs au sein de la châne ont une SCO et stratégique (i.e. créer de la valeur pour le client
la gèrent activement en fonction de cette orienta- et satisfaire à ses attentes par une gestion
Améliorer la compétitivité est la raison d’être de Si l’on fait une distinction entre la fonction opé-
sous la forme d’objectifs de création de valeur et nifie, met en œuvre et contrôle le flux et le stoc-
de satisfaction du client, on est amené à conclure kage efficaces des biens, des services et des
que le SCM a pour conséquence de réduire les informations les concernant, depuis le point
coûts, d’accrôtre la création de valeur et d’amé- d’origine jusqu’au point de consommation dans
liorer la satisfaction du client et donc d’obtenir le but de répondre aux « attentes » des clients ».
un avantage concurrentiel. Une conclusion sou- Cet organisme a donc également fait une dis-
tenue par des rapports de sources spécialisées tinction entre logistique et management de la
(Performance Measurement Group 2001). châne logistique et reconnu que la logistique est
management.
Champ d’application du SCM
Ross explique que le rôle de la logistique va du
Le SCM a un champ d’application fonctionnel
stockage et du transport à l’intégration des acti-
et organisationnel. Le premier détermine les
vités de l’ensemble de la châne logistique, alors
fonctions qui participent à la mise en œuvre et
que le SCM associe le marketing et la produc-
au processus de supply chain management et
tion aux fonctions de distribution pour apporter
celles qui en sont exclues. Le second définit le
à l’entreprise de nouvelles sources d’avantage
type des relations qui doivent unir les entreprises
concurrentiel (Ross 1998). La logistique met
participantes.
davantage l’accent sur l’efficacité des mouve-
d’obtenir un résultat spécifique, toutes les toutefois, exigent plus que la simple logistique
tique et la définition de la logistique par le Coun- pointe ont compris que la vraie concurrence
cil of Logistics Management (1985) : « la n’oppose pas des entreprises à d’autres entrepri-
logistique est le processus par lequel sont plani- ses mais plutôt des chânes logistiques à d’autres
fiés, mis en œuvre et contrôlés le flux et le stoc- chânes logistiques. Cooper, Lambert et Pagh
kage efficaces des matières premières, des affirment que les relations organisationnelles
en-cours, des produits finis, des services et des lient les entreprises les unes aux autres et peu-
informations les concernant, depuis le point vent lier leur réussite à la châne logistique dans
d’origine jusqu’au point de consommation (y son ensemble. Dans ce contexte, une châne
compris les entrées, les sorties et les mouve- logistique peut avoir sa propre identité et sa
ments internes et externes), dans le but de propre fonction, au même titre qu’une entre-
répondre aux attentes du client. » Le CLM prise. Toutefois, pour parvenir à ce stade ultime,
(1998) reconnaissant apparemment ce distinguo tous les membres de la châne doivent avoir une
puisque sa nouvelle définition dit : « La logis- SCO pour aboutir à l’intégration totale de la ges-
tique est la partie de la châne logistique qui pla- tion de la châne logistique.
Ellram et Cooper estiment qu’un supply chain vités entre les fonctions et les membres de la
management efficace passe par une série de par- châne. Lorsqu’on rassemble ces multiples
tenariats entre des entreprises qui travaillent aspects, le supply chain management peut être
ensemble et partage mutuellement les informa- défini comme la coordination systémique, stra-
tions, les risques et les récompenses qui donnent tégique, des fonctions opérationnelles classi-
article, Ellram et Cooper indiquent aussi que la l’intérieur d’une même entreprise et entre des
châne logistique performante s’appuie sur des partenaires au sein de la châne logitique, dans
partenariats stratégiques qui ont des orientations le but d’améliorer la performance à long terme
à long terme. Christopher parle d’un réseau de chaque entreprise membre et de l’ensemble
Selon Webster (1992) les réseaux sont des struc- de la châne logistique et a permis de développer
tes, qui résultent d’alliances stratégiques Une châne logistique peut être visualisée sous
multiples. Un réseau est donc un mode d’organi- la forme d’un pipeline, dont la figure 3 montre
sation bien reconnu pour le SCM. La caractéris- une vue en coupe, où l’on voit les flux direction-
tique fondamentale d’une structure en réseau est nels (produits, services, ressources financières
une confédération – une coalition souple et et informations associées à ces flux et les flux
centrale dans laquelle les fonctions clés com- sions). Les fonctions traditionnelles de l’entre-
tion des métiers et des stratégies, le client – gèrent et pilotent ces flux d’un fournis-
développement de relations avec les clients et la seur à l’autre jusqu’au dernier client pour
gestion des outils informatiques qui cimentent le répondre à ses attentes et lui apporter une valeur
gement entre au moins trois entreprises qui doi- L’analyse approfondie de cette définition et de
vent toutes avoir une SCO. Cette mise en œuvre ce modèle passe par un examen du rôle indivi-
et ce processus doivent aussi comprendre la ges- duel des fonctions et de la coordination inter-
dans le tableau 2. Le champ organisationnel est appelle une définition du rôle de la confiance, de
nous semble possible de proposer une définition Les contributions de cet article à la connaissance
de la littérature a mis en lumière que le SCM multiples. En premier lieu, il apporte un cadre
plusieurs activités et la coordination de ces acti- chain management. À ce titre, il devrait aider les
le SCM, éclairer la nature de celui-ci, préciser châne logistique ? Ces rôles sont-ils différents
ses conditions et ses effets potentiels sur la per- selon la position de l’entreprise dans la châne ?
châne logistique dans son ensemble. S’il n’est ces fonctions dans l’entreprise et dans la châne
pas parfaitement compris, le SCM ne peut pas logistique ? Les flux recensés dans cette figure
être mis en pratique ou approfondi par la posent également la question de savoir qui est le
Pour les chercheurs, la figure 3 est une mine de sur la structure des chânes logistiques et du
Cette question en appelle une autre, tout aussi Cooper, Martha C. and Lisa M. Ellram
coup écrit sur le sujet mais rien n’a été publié qui Management and the Implication for Purcha-
permette de faire des comparaisons et d’évaluer sing and Logistics Strategy” The Internatio-
la réalité du SCM et de la SCO dans les entrepri- nal Journal of Logistics Management, Vol. 4,
ses, ni leur contexte. Il est clair que ce bench- No. 2 (1997), pp. 13-24.
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