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ET CYNTHIA §VMMER§
~,.... -.' .__-:'!.• - ~ ·~:.·---x- -
Le matériel de ce livre suit un format d'ensemble conçu pour faciliter son utilisation. Chaque
section commence avec une courte introduction destinée à donner au lecteur une idée de la façon
de penser du clan. Ensuite viennent des informations sur l'organisation du clan et ses relations avec
le reste du monde médiéval sombre. Ne vous attendez pas cependant à un simple réchauffé de ce
qu'on trouve à l'époque moderne. Les Artisans, les Zélotes et les Usurpateurs de cette époque ne
sont pas ceux que vous croyez.
Eosuite vient "le meilleur" : atouts, handicaps, historiques, nouveaux pouvoirs de disciplines et
ainsi de suite. Toute la technique de jeu est concentrée dans cette partie. Enfin, il y a une brassée de
modèles pour chaque clan, et une tranche particulièrement révélatrice de son histoire. D'où vien
nent les Filles de la Cacophonie? Qu'est-ce qui a vraiment provoqué la chute de la Troisième Cité?
Vous pourriez découvrir ici ces secrets - en supposant que vous croyiez le narrateur. Et ce n'est
pas toujours sage quand il s'agit de Caïnites ...
10
- Il aura les manières d'un galant chevalier dès qu'il aura "J'espère être toujours digne de vos bonnes grâces." Il ne
appris la vraie humilité. Je pense que quelques semaines sous suspecte rien.
ses ordres auront un effet des plus satisfaisants sur notre jeune "Êtes-vous allée à la messe récemment? Je ne voudrais pas
et fier bellâtre. Il doit apprendre que ce n'est pas un jardin que vous négligiez votre catéchisme." Continuez pendant deux
d'empereur aux délices terrestres." Elle avança à nouveau son semaines. Nous n'en avons pas fini avec lui.
ca valier et recula sa main, renversant le cavalier de son adver "Oui, ma Dame, et non, ma Dame." Et quoi ensuite?
saire comme par accident. Bien que ses doigts fussent glacés "Bien. Au fait, entretenez-vous un peu avec sœur Avis -
depuis bien des années, leur toucher était toujours exaltant, du cela ne vous fera pas de mal de passer un peu de temps en sa
moins à en juger par la réaction de Paulo. Elle sourit alors qu'il compagnie. La cour ne souffrira pas de votre absence si vous
enlevait la main précipitamment, heurtant une tour qui tomba recherchez la vertu. Une dame digne de ce nom ne néglige pas
en entrainant deux pions. "Et bien, Don Paulo, cette maladres le spirituel en quête du matériel." Voyez quels sont ses senti
se ne vous ressemble pas." ments à l'égard de Marianne et de son sire ridicule. Je pense
L'Espagnol repositionna les pièces rapidement en se pen qu'il y a encore du travail à faire. Continuez son instruction -
chant en avant. Le velours tranchait maintenant sur son revers, il sera plus de notre côté que du leur lorsque nous en aurons
et elle put ainsi voir un soleil en plus de la lettre. "Mes fini.
excuses, ma Dame. "Bien sûr, ma Dame." Que faire de Severus?
-Je les accepte, bien sûr," et elle le gratifia d'un gracieux "Vous me faites grand honneur Rosamund. C'est un grand
sourire bien qu'elle fût déjà fatiguée de ce jeu. plaisir de voir à quel point vous êtes arrivée." Laissez-le moi.
Après une demi-heure de plus de discussions oiseuses et de "Je suis heureuse de vous plaire, ma Dame." Comme il
mouvements sans but, Isouda renvoya Paulo, prétextant des vous siéra.
lettres à écrire avant Je lever du soleil. Paulo ne discuta pas (un !souda sourit, un vrai sourire celui-là. Rosamund avait les
bon signe - il commençait à comprendre qu'un galant che qualités d'une future déesse de l' Amour ; avec un peu plus
valier bien élevé ne pressait pas les choses de temps pour muer les derniers faux pas en
lorsqu'une dame en faisait la demande), et se grâce féminine, !souda aurait à la considérer
retira sur une dernière courbette. Isouda comme une rivale sérieuse. "Bien. Vous
étudia l'échiquier durant quelques . , , • pouvez disposer, et je vous verrai demain
'
minutes, considérant ce qui avait été ' - ' à la cour. N'oubliez pas ce que je vous ai
laissé : un certain nombre de pions était dit." Rosamund fit une révérence. "Bien sûr que
avancé (aucun bien loin), la reine blanche non. Bonne nuit madame." Et elle repartit
restait sans défense, un cavalier noir était ;-·, aussi silencieusement qu'elle était entrée.
placé bien trop en avant, une tour blanche · - L'Artisan observa une fois de plus l'échi-
était menacée et un fou noir avait été déplacé quier devant elle. Severus, bien sûr, était un
de quelques cases - de bien intéressants point indécis. Après la perte de son infant, il
signes en effet. n'avait pas vu l'intérêt de continuer ses rela-
Quand un temps raisonnable pour la tions avec les Magisters et donnerait certaine
contemplation fut passé, elle étendit ses pen- -<-x�-.::,,., ment beaucoup pour que l'ensemble des
sées, à la recherche du jeune esprit qu'elle ' Toréadors fasse de même. Le montant exact de
connaissait presque aussi bien que le sien. Quelques ce qu'il serait prêt à donner était toujours objet de
minutes plus tard, Rosamund toquait doucement à la porte, débat, mais !souda pensait que cela serait plus que suffi
entrait sans attendre de réponse et la fermait derrière elle sans sant pour la satisfaire. La perte de Fulk n'avait pas été pleurée
mot dire. Durant un instant, Isouda fut prise d'admiration pour longtemps ici ; !souda pensait que ce galopin avait été l'une
son travail. Il était étonnant que cette crinière flamboyante et des plus grosses erreurs de jugement de Severus.
ces yeux gris vert soient devenus, avec un peu d'attention, La venue de Marianne lui offrait cependant une autre
l'une des roses les plus remarquables de la cour. Mais il restait opportunité intéressante. Si son invitée était dans le vrai lors
du travail à entreprendre, et elle considéra gravement sa proté qu'elle supposait qu'un Lasombra avait mené le siège qui avait
gée qui se tenait devant elle. coûté la vie à Merrit, alors Don Roland pourrait se laisser
"Nous devrions parler français car vous devriez le prati convaincre de prêter main-forte pour connaître les tenants et
quer plus souvent," dit !souda sachant que cela sous-entendait, aboutissants de la chose, en échange de la promesse d'un
Parlez comme nous le faisons toujours en privé. retour dans les bonnes grâces de Severus. Comme cela avait
Rosamund répondit gentiment, bien que son comporte demandé aux Magisters des dizaines d'années pour nouer des
ment ne fût pas tout à fait si effacé "Bien entendu, ma Dame." relations avec l'artiste, il ne serait pas plausible qu'il rejette un
Je vous comprends parfaitement. tel investissement aussi vite. Qu'on puisse le persuader de tra
"Comment se passent vos leçons ?" J'ai vu qu'il portait hir l'un des siens afin de préserver cette relation était un autre
votre marque. problème, mais !souda pensait que la perte des faveurs de
"Fort bien, merci, ma Dame." J'ai fait comme vous me l'Artisan (de sa cour et de ses jeux) prélèverait un lourd tribut
l'aviez demandé. sur le caractère de Roland et que cela suffirait à le ramener à
"Votre tuteur m'a rapporté beaucoup de bonnes choses. Je un comportement plus favorable.
suis très contente de vous, infante." Suspecte-t-il quelque "La reine noire prend le roi blanc : échec et mat," murmu
chose ? Tout se passe-t-il comme prévu? ra-t-elle de satisfaction.
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te ttaate montie et
aea metuetllea
l'opportunité de progresser dans le monde des Anciens, si tant
LE§ ARTISAN§ DÉCRKTS est qu'il attire les bons regards, dise les choses appropriées et
fasse preuve d'initiative au bon moment. Certains prétendent
PAR EUX-IYUÊME§ que, aux plus hauts échelons, l'art devient souvent secondaire
Les Toréadors sont, pour la plupart, des séculiers. plus par rapport aux bonnes manières en société. Ces affirmations
temporels que les autres Cainites. Ils vivent au présent, ne sont en général assez justes.
regardant ni trop en avant ni trop dans le passé. L'histoire est Ces Toréadors qui viennent des classes paysannes ou mar-
composée de choses vécues et vaincues, peut-être significa- chandes (et ils sont bien peu nombreux), et qui pensent avoir
tives sur Je moment, mais dont la lecture n'apporte rien. Le été propulsés, par !'Étreinte, dans un monde où les opportuni-
futur est sombre et imprévisible, et seule une arrogance extrê- tés sont les mêmes pour tous vont tomber de haut. Le Caïnite
me pourrait faire dire à quelqu'un qu'il sait ce qui doit arriver. du château est leur seigneur et ils feraient mieux de ne pas
Lorsque l'on considère le caractère éphémère de la beauté l'oublier. Un petit nombre croit que la mort devrait aplanir
- la fleur qui s'ouvre aujourd'hui mourra le lendemain - toutes les différences. Pourquoi un paysan, Étreint avec de la
l'attitude des Artisans n'est pas surprenante. Cependant, pour paille dans les cheveux et de la fange collée aux bottes devrait-
un groupe de personnes qui peut jouir d'une vie sans fin, cela il être subitement élevé au même niveau que le sire du domai-
représente une multitude de moments éphémères. Pour les ne ? Ce paysan devra faire preuve d'abord de grâce sociale
Toréadors, l'astuce de la vie éternelle est de boire les instants avant de pouvoir faire de tels rêves de grandeur, et aucun sire
de la vie comme ils arrivent, chacun créé par la recherche de digne de ce nom ne perdrait de temps pour un tel entraînement.
la beauté et de la vérité. Après tout, l'éducation d'un infant peut se répercuter, et c'est
Les Toréadors croient sincèrement en l'existence de la le cas, sur son sire, et aucun d'entre eux ne souhaite entrer en
beauté et de l'Amour à travers Je monde, même si le leur est disgrâce à cause d'un infant. Pour un clan qui insiste tant sur
particulièrement sombre et ce malgré leurs goûts particuliers. l'importance de l'art et des "projets" aboutis, les Toréadors
Un monde sans beauté ne laisse rien à espérer, et sans inspira- voient en l'apprentissage d'un infant rien d'autre que la créa-
tion, quelle raison invoquer alors pour rallonger son tion d' un vitrail ou d ' un manuscrit enluminé.
existence ? Les faits sont les mêmes avec l'amour, mais aux Les Toréadors choisissent soigneusement leurs infants
yeux des Toréadors, l'amour est une chose des plus sérieuses. potentiels selon leurs capacités artistiques, leur "potentiel
Un monde sans amour est dénué de vie (ce qui, assurément, a nobiliaire" et leur possible utilité politique (et pas toujours
l'air étrange dans la bouche d'un Caïnite, mais la définition du dans cet ordre). L' aspirant infant ne doit pas seulement avoir
mot "vie" est, pour un Toréador, plus proche du terme "exis- des qualités à préserver, mais aussi des capacités pour se
tence" que de "du flux et du reflux du sang dans les veines"). dépasser. C 'est une chose d'Étreindre un harpiste élevé par
des paysans, mais il ne servira à rien pour son sire s'il est
toujours incapable, après dix années d'instruction, de parler
STRUCTURE DU CLAN et manger autrement qu'un paysan. Un tel infant, qui porte
Au contraire de nombre d'autres fratries, les Toréadors sur lui la marque de son humble origine, est généralement
maintiennent une structure de clan assez serrée. Tous les envoyé dans un endroit éloigné, ou il est contraint à un exil
Toréadors sont censés connaître leur place et s'y tenir. La posi- volontaire après de trop nombreux incidents humiliants
tion sociale peut être aussi rigidement imposée dans les plus devant la cour.
hautes sphères que dans la société des mortels, mais il existe En dépit de ces précautions, il existe toujours des Étreintes
une certaine liberté de progression qu' on ne trouve pas aisé- spontanées de beaux mortels quand un Toréador décide qu'il
ment chez les Bestiaux. Un Toréador nouveau-né peut avoir souhaite préserver cette beauté mortelle des périls du temps
sans penser un seul instant à l'inutilité de cette recrue pour le
clan. De deux choses l'une : soit l'infant apprend rapidement
à se rendre utile d'une quelconque manière soit il est placé à
un endroit où il ne pourra causer aucun dégât. Il est rare qu'un
Toréador se débarrasse d'un infant, à moins que !'Étreinte ne
l'ait rendu fou où qu'il ait causé de terribles problèmes au clan
et à son sire.
Une autre Étreinte impulsive, plus grave encore que pour
sauvegarder la beauté, est celle faite par amour. Un seigneur
Toréador pourrait souhaiter que sa jeune femme aimante 1'ac
compagne pour l'éternité, ou une dame caïnite pourrait décider
qu'elle veut le jeune comte qui a dérobé son cœur. Ces
Étreintes ont souvent une fin des plus tristes : des changements
imprévus peuvent rendre le nouvel infant plein de rage, de res
sentiment ou de folie. Parfois, la vue de l'être aimé empli des
mêmes instincts de prédateur que son sire plonge ce dernier
dans les remords ou la folie. Rares sont les Étreintes roman
tiques finissant en une union heureuse, mais de temps à autre
le Destin où quelque autre pouvoir supérieur sourit au couple.
S'ils peuvent survivre aux premiers mois tumultueux de leur
nouvelle relation, ils auront plus de dizaines d'années qu'ils
n'en avaient espérées.
LES FEMME§
ÎOJRÉADOR§
Il est plus que naturel qu'un clan dont les origines remon
tent à une sculpteuse de génie soit tellement protecteur
envers les femmes qu'il soutient. En des temps où les
femmes sont plus que couramment considérées comme des
marchandises que l'on déplace d'un foyer à l'autre, les
Artisans font grand cas de leurs dames. Elles sont bien plus
nombreuses au sein du clan que les hommes et leurs voix font
preuve d'une autorité toujours obéie. Pour un certain
nombre, elles détenaient déjà les rênes du foyer, car nées en
position de force. D'autres n'avaient jamais connu le pou
voir, mais elles apprenaient vite.
Étrangement, la chevalerie trouve ses plus grands admi
rateurs parmi les Toréadors. Certains ont argué du fait que
pour cette école de pensée, les femmes n'étaient pas mieux
considérées qu'auparavant, traitées comme des laquais et
non plus comme du mobilier, ce qui n'était pas un mieux.
Ces critiques sont avancées par des femmes des clans plus
engagés, comme les Brujahs ou les Gangrels. L es Artisans et
leurs pairs ne sont pas d'accord ; lorsque le silence est
demandé pour qu'une dame puisse s'exprimer, il est néces
saire d'écouter, voire même (Dieu nous en préserve !) d'ap
prendre quelque chose. El la chevalerie éduqua des hommes,
et non des bêtes capables de manier l'épée.
Beaucoup de femmes Toréadors tentent de ressembler aux
grandes reines ou autres grâces de l'Antiquité (Hélène de
Troie, Esther, l'Amazone Hyppolite, les déesses de la Grèce ou
de Babylone), et aspirent à les égaler en termes de pouvoir,
d'astuce et de beauté. L'accession d'Aliénor d'Aquitaine à son
poste actuel de déesse de l'Amour et patronne de la chevalerie
a placé son nom sur la liste des personnalités éternelles, prou
vant que les sommets auxquels les Toréadors aspirent sont
encore accessibles.
LIVRE 1 : LES TOREADORS
13
Certains clans considèrent ces largesses comme d'inutiles
bibelots : "Laissez les femmes parler chiffons, disent-ils. Il §JÉCULIER
faut que les hommes fassent le vrai travail de gouvernement."
Les Artisans, cependant, viennent en majorité des rangs qui CONTRE SACRÉ
connaissent le pouvoir que peut détenir une femme, et l'usage Peu de clans ont ressenti la séparation de ! 'Église et de la
qu'elle peut en faire. Ces Caïnites savent qui règne dans les Couronne autant que les Artisans. Brouillée comme l'est la
foyers, qui encourage les arts, qui connaît les vrais secrets et frontière entre ces deux mondes, les Artisans ont eu bien plus
qui rassemble les murmures et autres contes entendus sur de querelles intestines que les autres clans, avec les deux oppo-
l'oreiller - et ce pouvoir est bien au-delà de la compréhension sants se chamaillant comme des enfants dont les parents sont
de nombreux Caïnites. absents. Le pouvoir de l'Église est considérable, mais non
absolu. Pour chaque Saint Empereur Romain obligé de s'age-
nouiller dans la neige durant trois heures afin d'obtenir la
RA.....G ET PJR1VILÈGE faveur du Pape, de nombreuses églises et monastères locaux
sont mis à sac par des chevaliers avides de profits. L'équilibre
Il est possible de gagner du galon par ses seuls mérites et
est instable et toujours changeant, et les demandes et désirs des
talents, mais le processus est ardu et lent. Sans la moindre
Toréadors des deux bords font de l'égalité de ces affaires un
garantie concernant la politique, l'art et le lignage d'un nou-
mythe.
veau-né, de nombreux Toréadors plus anciens tendent à se
méfier, et à raison, de ceux qui apparaissent simplement à leurs
côtés. IJ peut être diablement aisé de se fondre dans la peau JL:ÉGLI§E
d'un Toréador (si tant est que la personne soit capable de fre- En des temps où l'Église est au centre du pouvoir, il est
donner un air, de parler d'une manière élégante et de se sou- évident que les Toréadors prennent une grande place dans ces
venir de fixer le regard au moment propice), et le clan craint agissements. Le fait que les Artisans doivent partager cette
terriblement les espions. Un nouveau-né fraîchement arrivé chaire avec d'autres n'est pas toujours source de discorde. Le
dans les rangs, mais sans aucun sire ou ancien pour le présen- travail de l'Église couvre des centaines de kilomètres et des
ter peut s'attendre à être testé des milliers de fois avant que millions de vies, des tailleurs de pierre aux Croisés, des
quelqu'un ne soit à peu près satisfait de ses dires. Et. même croyants au Saint Père. Aux plus basses marches du pouvoir de
alors, il sera observé durant un long moment. l'Église, les Caïnites peuvent dédier leur non-vie au travail,
Obtenir un protecteur ou un mentor parmi les anciens est sans jamais croiser (ou combattre) un des leurs. Comme ils
l'un des meilleurs moyens d'être reconnu et accepté. On ne gagnent en puissance, le plus petit nombre de places dispo-
choisit pas son protecteur, bien qu'un artiste ou un autre nibles dans la hiérarchie apporte inévitablement son lot de fac-
membre du clan de basse classe puisse solliciter le protectorat tions et de clans en assemblée plus restreinte et cela provoque
d'un Toréador de rang plus élevé. Le critère de sélection d'un des rivalités. Mais dans la plupart des cas, un Toréador qui sou-
artiste comme protecteur varie d'un ancien à l'autre, et per- haite construire une cathédrale peut travailler avec un
sonne ne semble savoir comment ou pourquoi certains choix Lasombra dont le but est de montrer l'autorité de l'Église en
sont faits. Il est arrivé qu'un ancien délaisse un nouveau-né détournant les fonds du seigneur local.
prometteur au profit d'un orgueilleux âne bâté ; de tels choix Un certain nombre de Toréadors entrent dans les Ordres,
peuvent être en rapport avec ceux qui ne cadrent pas de suite ou ressentent un regain de piété, après l'Étreinte. L'Église
dans le tableau. Il se peut que l'âne bâté ait un sire particuliè- incarne la sécurité - on peut ressentir la force de ses solides
rement puissant qui ne souhaite que le meilleur pour son murs de pierre et de ses rituels familiers, dans l'espoir qu'au
infant, ou on lui devait une faveur qu'il utilise pour obtenir un service de Dieu, Il pourrait finalement, dans Sa pitié, ôter la
marque de Caïn. N'y a-t-il pas, dans la Bible, des passages où
protecteur. Le nouveau-né délaissé peut avoir des idées qui
le Christ pardonne aux faibles et aux pêcheurs ? La passion est
n'intéressent pas les anciens ou c'est l'infant d'un exilé de la
pleine d'extase et les extatiques de cette époque étaient consi-
cour. L'ancien lui-même peut avoir certaines exigences qui
dérés comme touchés par Dieu. Cette ferveur se révèle parfois
doivent être satisfaites avant même qu'il n'envisage d'avoir un
être une Vraie Foi - et un Ca't"nite qui a la foi est un vrai
filleul, comme une certaine fortune, une lignée irréprochable,
miracle.
certaines croyances politiques, ou quelque chose d'aussi
L'Église préserve aussi un lien avec la vie mortelle qui est
simple qu'une nationalité.
souvent perdu après l'Étreinte. Les abbayes et les cathédrales
Le protectorat est, assez simplement, le procédé par lequel ne sont guère des endroits où se dérober à la vue du monde. Il
un protecteur prend l'infant sous son aile. Il lui apprend ce existe des communautés vitales et florissantes dont de nom-
qu'il doit savoir sur les manières et les affaires de la cour, et lui breux groupes de personnes dépendent. Les abbés et abbesses
présente les "bonnes" personnes. L'infant, lui, travaille pour qui dirigent de tels endroits ont un pouvoir étendu sur les terres
son protecteur en créant des œuvres d'art sur commande ou en entourant l'abbaye et les paysans qui y habitent, et ils peuvent
signant du nom de son protecteur les sommets de son art. Le être appelés à la cour ou faire régner la justice au nom de la
protectorat peut durer de longues années, voire des siècles, si Couronne. Les cathédrales sont souvent des lieux de pèlerina-
les bénéfices sont appréciables des deux côtés. Il y a peu de ge, et les assises du pouvoir des évêques. Les Toréadors dési-
meilleures récompenses au sein du clan que la promesse d'un reux de sauvegarder leur nature humaine gravitent souvent
protectorat - accordé ou retiré. dans ces milieux, à la recherche d'eux-mêmes tout en assistant
TRWfYQl'E SA~GLA, .T 2
ou désenvoûtant les autres. Quelques Artisans aimeraient avoir
la mitre de l'évêque pour le pouvoir temporel que cela leur
donnerait sur une région, en plus du considérable pouvoir spi-
rituel que cela leur apporterait. Cependant, le pouvoir dont use
le clergé n'a pas toujours besoin de prendre la forme d'un
poing de fer marqué du sceau d'un évêque ou provenant d'une
abbaye. Dans de plus modestes paroisses, le bas clergé est
considéré comme le maître spirituel de la communauté, res-
pecté et même aimé. L'acte de confession ou de bénédiction a
grand poids sur les gens simples, et refuser ces sacrements
peut avoir de remarquables résultats quand cela est nécessaire.
Dans les jours qui suivirent la Troisième Croisade, la majorité
du clergé s'est tourné vers les brutes qui se disaient chevaliers,
en les incitant à ajouter la piété, l'humilité et la protection des
pauvres et des faibles à leur liste de vertus. Comme le clergé
exhortait ces moins que rien de chevaliers à améliorer leur
comportement, la société les poussait à continuer ainsi.
L'approbation (ou non) du clergé, bas ou haut, eut un bien plus
grand impact que celui qui fut reconnu par les Caïnites, et les
Toréadors avisés apprirent à profiter de la négligence de leurs
confrères.
L ART SACRÉ
Sans l'Église, l' art existerait certainement, mais il n'aurait
pas eu la possibilité de s'épanouir durant les années décrites par
Vampire : l'Âge des Ténèbres. La construction des cathé-
drales est le résultat du grand travail des Toréadors, qui cher-
chaient à atteindre de nouveaux sommets de par leurs efforts
créatifs. Le mécénat de l'Église permit aux Artisans une plus
grande licence artistique ; après tout, chaque évêque souhaite
une belle cathédrale pour sa chaire (et un magnifique point de
chute pour les pèlerins fortunés), et il serait du plus mauvais
effet d'avoir une église identique à ceUe d'un village à peine
plus lointain. Mais les efforts des Artisans qui travaillent sur
une cathédrale sont-ils dédiés à Dieu ou destinés à rivaliser
avec ceux qui travaillent sur une autre ? Finalement, savoir si la
dimension que I' Artisan désire atteindre est artistique ou spiri-
tuelle reste une question à débattre. La musique, les vitraux, les
sculptures de pierre ou de bois, les mystères - l'art trouve sa
voie, et au final l'art est le seul fait d' importance.
15
certains Toréadors, ayant été membres des Ordres durant leur Le couvent de Nogent-sur-Seine restait aussi sous l'œil
vie, ne peuvent imaginer leur non-vie sans cela. vigilant des Toréadors, comme depuis sa fondation en 1123.
Presque tous les ordres religieux de cette époque comp- Fondé par Pierre Abélard pour son Héloïse bien-aimée, il fut la
taient au moins un Toréador panni leurs membres. La seule destination d'un nombre non négligeable de Toréadors lors de
exception étant les ordres mendiants, comme les cannélites ; pèlerinages volontaires, ils venaient prier dans la chapelle et
même les soi-disant ordres mendiants ne quémandaient pas espérer un amour aussi passionné que celui d'Héloïse et
tant. L'extrême pauvreté ne sied pas souvent aux Artisans, la Abélard. Certains Caïnites amoureux prient aussi ce couple
logistique des transports était effarante à contempler et on ne comme des protecteurs de 1' amour qui avaient surmonté Les
rencontre que trop ,de Nosferatus parmi les mendiants. différences.
Les Toréadors Etreints durant ou après les Croisades choi-
sissajent souvent les ordres militaires : Templiers, Hospitaliers,
Chevaliers Teutoniques ou divers autres ordres plus petits spé- LHÉRɧiE ,
cifiques aux royaumes individuels. Ces chevaliers caïnites se L'hérésie est un sujet délicat pour les Toréadors de l'Egli-
regroupaient rapidement, formant des groupes ne nécessitant se. Ces Caïnites entrés dans les ordres dans l'espoir d'être
pas de commentaires particuliers car tout y était simple routine. absous du péché qu'est le vampirisme préfèrent souvent des
On dissuadait de tels chevaliers de passer de ces bandes de va dogmes plus stricts et une théologie des plus conservatrices,
nu-pieds aux ordres chevaleresques des Toréadors, cependant : croyant
,
ainsi être durcis par l'épreuve. Ils se sont tournés vers
chaque nouvelle conversion augmentait le risque de faire l'Eglise en quête d'un refuge pour leur art ou pour servir
découvrir que les ordres n'étaient pas vraiment tels qu'ils comme chanoines convers. Mais ils préfèrent sentir une main
devaient. En effet, 1es Toréadors apportaient un soutien discret plus douce sur les rênes de leur dévotion et sont moins mora-
sous forme d'or et d'hospitalité à ces bandes, dans le but de les lisateurs et plus attentifs à Dieu qu'aux rituels et aux dogmes.
empêcher de regarder plus loin que leur situation actuelle dans Il en résulte des querelles religieuses au sein du clan et, par-
ce qui était une organisation mieux structurée. fois, une équipe sort son cheval de bataille et, au travers des
Les cisterciens occupent également une place dans la vie pions que sont les mortels, déclare l'autre clan coupable d 'hé-
, .
de-s Toréadors, ne serait-ce que par le nombre. En 1152, 54 res1e.
monastères étaient déjà implantés dans les seules îles britan- Les anciens Toréadors réclament la fin de ces querelles, ou
niques; c'est l'effort cistercien qui soutient le commerce de la au moins qu'elles restent dans un domaine plus privé. Une
laine et des vête1nents, faisant ainsi des îles les pionnières de enquête sur l'hérésie amène des étrangers. Et beaucoup de
ces industries. Les sœurs cisterciennes posent un autre problè- questions indésirables pour tous, partict1lièrement pour les
me aux Artisans, cependant. Le mouvement cistercien a pris, Cal'nites, sont posées. Cependant, il existe des preuves d'une
pour les femmes, naissance en Espagne et en Italie, quelque bataille, pour motif d'hérésie, particulièrement vive malgré les
peu à la consternation des Toréadors ; après tout, être cloîtrée avertissements contre les Albigeois (ou Cathares) qui vivaient
dans une abbaye des Laso1nbras au beau milieu d'un pays gou- dans le Languedoc, en France. L'ascétisme extrême des
verné par eux peut être une proposition dangereuse. Les Cathares et leur croyance, claironnée, que Satan gouverne le
femmes caïnites qui avaient choisi la voie cistercienne se sont monde matériel comme Dieu le monde sacré avaient commen-
bien souvent, à leur insu, retrouvées dans les filets des cé, à énerver les autres - en particulier les hauts pouvoirs de
intrigues des Lasombras. Les abbayes tissaient leurs fils autour l'Eglise que les Cathares ne servaient plus et les dirigeants
des écheveaux. séculiers quj ne percevaient plus leurs taxes.
L'autre ordre largement soutenu par les efforts Toréadors Un nombre étonnant de Cal'nltes, et beaucoup de Toréadors
est celui des nonnes gilbertines. Fondé par saint Gilbert de parmi eux, avait reçu le consolamentum cathare (rite d'initia-
Sempringham aux environs de 1131, cet ordre de nonnes, tion) et figuraient au nombre des perfecti (c'est-à-dire "par-
frères et sœurs convers, et chanoines est devenu une cause faits"). La dichotomie entre un Toréador qui décide que la
populaire que les Toréadors anglais et normands ont soutenue. frontière entre le monde matériel et le monde physique est le
La plus grande partie de cet intérêt provient des faveurs mal et qui refuse de la perpétuer est presque trop incroyable,
d' Aliénor d'Aquitaine. Elle soutenait et respectait Gilbert, ce qui rendit plus d'un ancien pensif sur la santé mentale de
même lorsqu'il encourageait Thon1as Becket aux dépens de ces Caïnites convertis. Le nombre de Caïnites qui choisirent de
son mari Henry Il. Dans les années 1160, les frères convers se rattacher aux Cathares comme croyants (ou credenti) est
accusèrent les abbayes gilbertines d'être immorales (une accu- inconnu, mais les nombres présumés sont frappants. Comme
sation sans doute liée à la frustration des frères lais à l'en- les exigences des perfecti ne sont pas un grand effort pour les
contre de la piété des sœurs), accusation jamais prouvée et Caïnites (abstention de toute viande à l'exception du poisson,
balayée par Je Pape. A ' cette époque, la Toréador Héloïse de ne jamais se marier, ne pas avoir d'enfants, un perpétuel céli-
Coucy était abbesse dans une maison gilbertine du bat et l'extinction de la vie pour libérer l' âme des attaches de
Lincolnshire alors que trois hommes Toréadors étaient frères la chair), certains meneurs Toréadors craignaient que les vam-
lais dans une autre maison plus au nord. Héloïse, en remercie- pires, comptés dans les rangs de la secte. n'attirent 1' attention
ment du soutien des Malkaviens contre les tentatives de saisie du clergé extérieur sur eux de la mauvaise manière. Déjà, les
de la maison par un prince ventrue, avait commencé à ajouter vampires peuvent tuer sans crainte du châtiment; il n'est pas
les soins aux fous à la liste des devoirs des gilbertines. Cet étonnant qu'ils le fassent avec la bénédiction des meneurs
arrangement avait convenu à toutes les _personnes concernées cathares. Et à cela s'ajoutent des rumeurs inquiétantes selon
jusqu'alors. lesquelles les Caïnites qui font partie des perfectî ne font que
TRIPTI"QL"'E Si\.1'1GLAL'\JT 2
16
Comme les autorités séculières commençaient à s'intéresser
aux Cathares, les anciens Toréadors craignaient que des
LA CROISADE ALBIGEŒSE regards attentifs n'attirent les yeux des mortels superstitieux et
En 1208, le Pape Innocent III, soutenu par le de l'Église sur les Caïnites. Déjà, les anciens Toréadors cher-
roi de France, commença ses appels à la chaient à connaître les identités de ceux qui commençaient les
Croisade contre les Cathares. Elle démarra par premières campagnes contre les Cathares - peut-être des
Je massacre de Béziers (la cité refusa de livrer "" Lasombras tentant de réduire le nombre des Toréadors, ou un
ses quelques résidents Cathares, les Croisés mortel qui en savait trop, ou éventuellement un autre vampire
massacrèrent toute la population - hommes, qui espérait monter les Toréadors et les Lasombras définitive-
femmes et enfants, dont la majorité n'était pas ment les uns contre les autres.
Cathares, en réponse). La Croisade fit rage jus-
qu'en 1229, à tel point qu'il ne resta plus grand-
chose, pour les Croisés, à piller dans le
JLA POJL[TliQUE
Languedoc. Avec la chute de la forteresse de Créer des rois est un jeu dangereux et un grand nombre de
Montségur dans les Pyrénées en 1244, les der- Toréadors admettent volontiers avoir peu de talent. TI y a des
niers soupirs de l'hérésie cathare furent balayés domaines que les anges craignent de fouler, et voilà certaine-
en grande majorité et la majeure partie de ses ment l'un d'entre eux. Le manque d'intérêt perceptible et la
adhérents Toréadors avec. maladresse des Toréadors dans ce domaine conduit souvent les
autres clans à penser d 'eux qu' ils sont la lie du monde poli-
tique. Pour les Artisans qui choisissent de se piquer au jeu, la
peu d'efforts pour cacher leur vraie nature. Leurs plus grands docilité de leurs cousins leur procure une couverture inatten-
détracteurs sont de jeunes Toréadors. Des rumeurs terrifiantes due, quoique bienvenue.
sont maintenant répétées comme des faits établis à travers Bien que la création de rois soit un jeu que les Toréadors
l'Europe: que le vidage du sang soit devenu la méthode de sui- ignorent, il leur plaît, par ailleurs, de créer des ducs et des
cide des perfecti pour que les mourants puissent nourrir les barons, jeu que les Artisans utilisent en leur faveur. En 1197,
immortels, et que les Caïnites qui sont des perfecti pratiquent la plupart des pays sont des mosaïques de duchés et de baron-
I' Amaranthe sans peur du châtiment. nies gouvernés par un roi unique. Un duc ou baron bien placé
Quand Raymond VI devint comte de Toulouse en 1194, le (et suffisamment fortifié) peut rendre la vie difficile à ses supé-
Catharisme entra dans les hautes sphères de la politique. rieurs, et certains grands duchés (tels que la Bourgogne ou
-
- -~-
IJ- •.
'
Orléans) peuvent être très influents lorsqu'un duc talentueux parties du réseau, alors le Toréador cautérise rapidement la
les gouverne. Un roi qui doit continuelJement faire face aux fuite par tous les moyens appropriés. Par nécessité, les
bouffonneries de quelques barons rebelJes ne peut pas passer Toréadors échangent la correspondance la plus acharnée pos-
son temps à repousser les frontières de son royaume. Il ne peut sible et sont toujours en quête de nouveaux moyens pour pas-
pas s'occuper d'une abbaye qui garde les taxes ni traiter avec ser plus rapidement leurs messages.
un diplomate caïnite qui vient en tant que représentant d'un
ennemi ... Et ainsi les plans les mieux échafaudés des groupes
de souris, d'hommes et de monstres prennent l'eau. Bien sûr, LA VIE DE§ ~1ûlRTEL§
même les plus revêches des duchés et des baronnies peuvent Les Toréadors font partie, par nécessité, de la vie des mor-
être soumis par un roi suffisamment compétent, mais rarement tels en dépit des protestations et des tentatives de séparation.
avant que les Toréadors ne soient prêts à les laisser capituler. Les tribunaux mortels, les villes et les églises sont les terrains
Grâce à certains de leurs dons innés, les Toréadors sont des de jeu des Toréadors, et ceux qui essaient de s'isoler complè-
politiciens et des diplomates chevronnés. Quand on est tement de la vie des mortels trouvent assez rapidement la com-
capable d'apaiser un chambellan énervé et, dans le même pagnie de leur fratrie pauvre et limitée à les rendre fous.
souffle, informer le roi qu'il est servi par un incapable, une Beaucoup de Cai'nites ont constaté que les Toréadors ont
carrière de diplomate devient une simple question d'opportu- besoin des mortels - comme des miroirs d'eux-mêmes, des
nités - et le clan excelle à créer ce genre d' opportunités. muses et un public. Certains prétendent que c'est la raison
Considérez les nécessités de la vie d'un diplomate : une maî- pour laquelle la notion d'ermites ou d'ascètes toréadors tient
trise de la grâce et des manières de la cour, une aisance dans du burlesque ; comment un Toréador si sociable pourrait envi-
les volte-face complexes de l'Église et des cours séculières et sager de se retirer sur une montagne avec les seuls oiseaux à
savoir endurer la proximité de ses pairs et sujets. Tout ceci est caresser?
une seconde nature pour la plupart des Toréadors. En effet, Où que l'on regarde dans la vie du clan, on trouve des mor-
même s'ils ne font que peu de cas de la chose, les Artisans sont tels - comme sujets, amis, alliés, partenaires, contacts,
parmi les premiers désignés par les princes pour mener à bien amants, conjoints, étudiants ou enfants. Bien que les Toréadors
des missions diplomatiques, particulièrement si ces Artisans ne soient pas les seuls Caïnites à avoir des liens avec les mor-
ne sont pas spécialement reconnus par la communauté (qu'el- tels, peu d'autres tiennent tant et aussi profondément aux
le soit vampirique ou mortelle). Les Toréadors, renommés vivants. Car, quels que soient les avantages de tels liens, une
pour leur décadence et leur manque de concentration, sont attaque des relations mortelles d'un Toréador cause des bles-
rarement suspectés d'être une menace. Ils sont suffisamment sures des plus profondes. La perte d'un allié fiable ou d'un ami
éblouissants par leurs manières et leurs arts pour apaiser toute occasionnel peut plonger un Artisan dans une vague de mélan-
suspicion qui s'élèverait. Et ils sont assez doués pour l'obser- colie alors que la mort ou la destruction d'un parent, amant,
vation pour éviter d' attirer l'attention sur eux. Certains enfant ou épouse le réduira en cendres. Cependant, si un vam-
Caïnites se moquent que Toréadors et Nosferatus trouvent les pire trouvait la force d'esprit, dans les affres du désespoir, de
mêmes ragots ; les Toréadors 1'apprennent à table lors des se retourner contre ses ennemis, ceux-ci ne peuvent espérer ni
dîners et non sur les monceaux d'ordures. Les dirigeants cai'- sursis ni pitié.
nites avisés savent qu'alors qu'un Nosferatu apprendra tous les De toutes les possibilités existantes pour s'introduire dans
détails de chaque intrigue du château, un Toréador saura qui la vie des mortels, la structure en pleine ascension des guildes
fomente les plans, pourquoi et qui informera les Lépreux. d'ouvriers offre aux Toréadors des moyens nouveaux et inat-
Dans la politique caïnite, chaque contact que peut avoir un tendus de s'intégrer aux villes. La plupart des guildes se
Toréador sera exploité au maximum, habituellement sans que concentrent sur des métiers ou des commerces qui contiennent
l'exploité ne se rende compte de quoi que ce soit. Par exemple, de l'art d'une certaine façon - du tissage à l'orfèvrerie ou la
la demande du prêt d'un cheval peut paraître une bagatelle maçonnerie - et pour les Toréadors, une organisation de tels
entre amis, mais le Toréador qui emprunte le cheval l'acquiert talents est une Mecque devant laquelle ils se prosternent. Les
pour un messager prêté par un autre ami pour porter un mes- maîtres des guildes imposent des épreuves d'entrée, à l'occa-
sage à un troisième, qui doit le communiquer à un quatrième sion pour révéler un niveau certes élevé (comme celuj dénigré
- le réseau des faveurs dues et rendues peut rapidement par le protecteur de la guilde), créant une guilde riche et forte
prendre des proportions byzantines. La toile tissée entre res- de talents. Un certain nombre de guildes est même amené à
sources, contacts et alliés, Caïnites et mortels, peut même per- faire du mécénat pour les vitraux d'églises ou pour des mys-
turber le plus doué des Toréadors, et tout est si artistiquement tères joués pour les jours saints (certaines après avoir reçu
et délicatement équilibré qu' un seul faux mouvement peut rui- quelque "encouragement"). Dans certaines villes, une bataille
ner toute la structure. Inutile de dire qu'aucun Artisan ne lais- subtile pour sortir du lot a débuté parmi les nouvelles guildes
se des faveurs filer si périlleusement ; si un contact avec le car de nombreux Caïnites exhortent leurs favoris à briguer de
maître humain d'une guilde se fragilise, menaçant d'autres plus hautes influences dans toutes les sphères de la vie urbaine.
TRIPTYQl'E S•.\.~GLA!\ï 2
18
l'art au
~ouen~ oe
ÜU ~ QUE lFONT LES
de pierre ou peintre sur verre travaillant sur le même bâtiment
depuis des siècles (après quelques changements stratégiques
d'identité bien sûr).
BELLE§ GENS POUR Même dans les temps les moins permissifs, la musique
PASSER LE TEMPS était toujours demandée. Il existait moins de possibilités pour
les musiciens durant ces sombres années, mais ce "moins" est
Un occasionnel érudit du vingtième siècle pourrait regar-
bien loin du "aucune". Comme les Cours d' Amour prenaient
der en arrière l'époque de Vampire : I'Âge des Ténèbres et,
de l'importance, il y avait de grands besoins de troubadours et
sans savoir, penser que les Toréadors se complaisent dans
ménestrels pour chanter la beauté des dames ou la bravoure
l'immobilité. Après tout, il n'y a rien qu'ils puissem faire, pas
des chevaliers qui recherchaient les faveurs de ces dames. Les
vrai ? Absolument tout Je monde sait que les mortels ne font
meilleurs troubadours aimaient avoir un marché d'échange
qu'effleurer la vie en général et que l'art est un luxe inabor-
pour leurs talents, et certains Artisans pouvaient conclure des
dable pour chacun d'eux. En conséquence, quelle est l' utilité
accords à des prix remarquables pour la composition d'une
des Toréadors, sauf en tant que reliques d'un autre âge, de
chanson particulièrement réussie pour un amoureux ou une
beaux fossiles qui se souviennent encore des schémas poé-
satire mordante pour un rival. Pour les musiciens aimant voya-
tiques de vieux péans grecs ?
En fait, les Toréadors ont beaucoup de choses à faire pour ger, les villages et manoirs affamés de divertissements et de
s'occuper, même durant ces "bons vieux jours sombres". Bien nouvelles du monde extérieur sont accueillants envers ceux qui
que les arts n'atteignent pas leur apogée avant le début de la arrivent à leurs seuils. Bardes gaéliques, jongleurs français,
Renaissance, il y a toujours des endroits où l' art est le bienve- skomoriki russes, musiciens itinérants de toutes nationalités -
nu. Chaque société a inéluctablement besoin de ses artistes. et tous s'accordaient à dire que celui qui souhaitait voyager
les Toréadors sont toujours là pour combler ce manque. "La devait apprendre à jouer d'un instrument.
création, que ce soit celle d'une épée, d'un chant ou d'une L'Église commandait souvent de nouvelles musiques pour
âme, n'est jamais un acte perdu - il y aura toujours quelqu'un les messes. À cette époque, les harmonies polyphoniques
qui en aura besoin;' prétend un Toréador toscan. tirent leurs premières apparitions, produisant de nouvelles
Les cathédrales par exemple. Ces glorieux monuments sonorités musicales osées (pour l'époque). La monodie avait
dédiés à Dieu par Ses sujets aimants produisent à elles seules toujours sa place (les chants monastiques étaient toujours des
des débordements déchaînés d'expression artistique dès leur monodies}, mais la polyphonie ouvrait de nouvelles perspec-
commencement même. De l'architecture à la taille des pierres tives à conjuguer avec des harmonies, des mélanges de voix et
en passant par les vitraux et les vêtements du clergé, tout d'instruments de genres différents.
autour n'est que beauté qui attend d'être révélée. Pour les Le théâtre était tout sauf clandestin durant cette période.
Toréadors désireux de servir Dieu de quelque manière et où Les travaux d'Achille et d'Euripide qui réjouissaient les
que ce soit selon Sa volonté, voilà le mieux qu'ils puissent amphithéâtres de Grèce et de Rome ne sont pas détruits, mais
obtenir. Certains ont pourtant découvert, à leur grand dam, que grandement oubliés et probablement jugés trop païens pour
certains sites, reliques ou ouvriers peuvent leur causer beau- être joués. Beaucoup de productions théâtrales de cette époque
coup d'inconfort : ils irradient d' une Vraie Foi qui annihile sont des "mystères de la Passion", pièces mettant en scène la
leurs tentatives de dévotion. Les cathédrales ne se construisent vie de Jésus, ou des "mystères" qui relatent d'autres histoires
pas en un jour, ni même en une année. Certaines nécessitent bibliques. Certaines de ces pièces narraient, de temps à autre,
dix années ou plus, selon les rentrées d'argent, la disponibilité des fables morales ou des contes. De cette manière beaucoup
de main-d'œuvre et les conditions climatiques générales; il est de paysans illettrés apprirent la Bible. Sur les places des villes
tout à fait possible d'avoir le même architecte vampire, tailleur et les parvis des églises, les mystères étaient patronnés par les
LIVRE 1 , LES TOREADORS
guildes et les marchands pour faire preuve de leur fortune. Des manière les prêtres de l'Église, lesquels croient qu'une telle
amuseurs itinérants, jongleurs et autres, montraient des spec- vanité reflète un manque d'attention envers l'âme.
tacles stupides, durant le Carnaval, d'un monde tête-bêche, se Qu'en est-il du monde des écrits ? Bien que les livres
moquant autant de la royauté que des paysans dans des spec- reviennent chers à la reproduction. leur écriture continue. Ils
tacles paillards qui provoquaient la colère de l'Église. sont souvent accessibles aux seuls protecteurs riches qui les
Des manuscrits enluminés brillamment colorés sont sou- commissionnent fréquemment. La chevalerie doit beaucoup
vent des œuvres d'art par le travail et Je résultat engendré. aux idylles de Marie de France et aux histoires des chevaliers
Souvent dorées sur tranche, aux lettres majuscules qui pre- de la Table Ronde de Chrétien de Troyes. Andreas
naient une bonne part du vélin ou du parchemin, ces pièces Cappallanus, auteur de l'A11 de l'amour courtois est vénéré
magnifiques sont les joyaux les plus précieux de plus d'une par chaque Toréador qui ait déjà assisté à une cour ou fait la
bibliothèque. Le Livre de Kells, écrit au huitième siècle, est cour à son aimée (bien qu'il soit dénigré en privé par un ancien
considéré comme le plus bel exemple de cet art. Une telle Toréador pour sa parodie d'Ovide). Bède le Vénérable bénéfi-
beauté, cependant, nécessite du temps pour copier le manuscrit cie aussi grandement de l'adoration tranquille des Toréadors,
à la main et y rajouter d'aussi belles images. Pour les moins pour ses écrits sacrés que pour sa sauvegarde de nom-
Toréadors. essayer de travailler à la lueur des bougies dans une breux vieux contes au nombre desquels figure Beowulf
petite pièce peut être mortel. Certains se servent d' Augure afin À cette époque, tout Je monde ne s'intéresse pas à l'art
d'améliorer leur vue suffisamment pour bien voir leur ouvra- sacré. Bien qu' il soit considéré comme plus haut et plus noble,
ge, sans risquer plus qu'avec quelques petites bougies (car la la création représente plus que de poser des halos sur toute
lumière est chère et peut causer une frénésie potentiellement chose. La musique séculière existe certainement.jouée et sou-
désastreuse au beau milieu d'un travail). vent apprise par cœur par des musiciens principalement illet-
La peinture s'est fort éloignée d'un trop grand réalisme trés qui l'interprétaient pour des paysans ou pour le divertisse-
depuis la période romane car on considérait que c'était trop ment de la cour. Un certain nombre de ces chansons sont truf-
s'approcher du travail de Dieu. Et bien que l'artiste puisse s'en fées de doubles sens qui délivrem d'importants messages aux
moquer, l'acheteur ne saurait souhaiter acquérir une œuvre Caïnites tout en divertissant Je Bétail. Lorsque la musique
éventuellement blasphématoire. La perspective n'est pas tota- séculière est transcrite par des moines en vue de sa sauvegar-
lement inconnue, mais pas toujours mise en œuvre, ce qui de, nombre de ses paroles et refrains les plus obscènes sont
donne des images de tours surmontées de dames aussi grandes remplacés par des syllabes dénuées de sens (résultant en des
qu'elles ou des villes suffisamment petites pour être enjam- "hey ho hey nonino !", des "Dom-da-dom", et bien d'autres).
bées par les chevaux des envahisseurs. De la même manière, Ces chansons portant J'estampille caïnite sont (plus ou moins)
1 1 les ponraits sont affectés par ce manque de perspective et de gentiment réécrites en des paroles plus acceptables ; d'autres
réalisme. Les visages semblent plats, de temps à autre même manqueront simplement. Moines et élèves, emplis d'ennui,
déformés. C'est suffisant pour donner une idée générale de gribouillent leurs songes et pensées inavouables en marge des
quelqu'un. mais certains peuvent confondre Je dessin avec textes qu'ils sont censés lire. Récits folkloriques et héros
autre chose. épiques des temps anciens (comme Beowulf. le Mabinogion et
Les travaux d'aiguille, la création de tapisseries et de den- les Vainimoinen) sont couverts de descriptions de champs de
telles, et la mode (bien que considérés comme des arts batailles ensanglantés et de chamjers de sorcières, de monstres
"mineurs" par certains anciens) sont très populaires. La plu- mangeurs d'hommes et de tours fatals des fées ; certains
part des clans reconnaissent (bien qu'en rechignant) que même conteurs Artisans sont tellement absorbés par le sang et la faim
en portant des habits des plus simples, les Toréadors ont l'air des monstres de Jeurs récits qu'ils sont obligés d'aller se sus-
magnifiques. À l'Église ou à la cour des rois. les magnifiques tenter juste après.
vêtements font usage d'or, d'argent et d'autres métaux pré- Certains Toréadors parlent de faire usage de Jeurs disci-
cieux, ou de matières riches telles que la soie de Cathay et le plines, surtout la Célérité, pour leur permettre plus de rapidité
brocart du Levant. Bien que les Artisans se soumettent à des ou un toucher plus fin, mais en général les Artisans voient cela
lois somptuaires dans le monde des mortels, les faits sont tout d'un mauvais œil. Ils prétendent que les disciplines ne subli-
autres dans Jeurs propres cours ; un chroniqueur ventrue rap- ment pas l'art mais peuvent le brouiller occasionnellement. La
porte que·· ... telle était la magnificence des robes, la mulùtu- vitesse que procure la Célérité peut permettre d'abattre plus de
de des boutons sur les manches des femmes, et les accessoires travail en une nuit. Mais les critiques disent que le travail fait
d'or incrustés de joyaux, que je me crus réeUement dans un avec Célérité est souvent négligé ou manque de finesse dans le
champ de fleurs vivantes." D'une telle somptuosité résulte une détail. Utiliser I' Augure pour donner un résultat plus fin et un
légère émulation pour savoir qui portera le premier un acces- œil plus aiguisé produit des détails presque aveuglants, tel que
soire ou une matière. ou même créera un nouveau style. C'est le scintillement des boutons sur la tranche d'une broche dans
à cette époque qu'une jeune couturière inconnue eut l'idée de un poruait ; la plupart du temps, les yeux des mortels ne peu-
couper la robe de sa maîtresse avec des emmanchures incur- vent pas voir de telles choses et ces travaux sont donc surtout
vées et des épaulettes ce qui améliorait l'ajustement et la sil- faits pour les seuls protecteurs caïnites.
houette. Des conjectures fréquentes prétendent que cette cou-
turière travaillait pour une dame caïnite. car ce modèle n'avait
jamais été vu par les mortels avant que cette dame ne com- Il:ART POUR LAIRT
mence à porter ce nouveau style dans les cours des mortels. L'art, à cette époque, est considéré comme existant seule-
Cette mode qui ose tout exaspère cependant d'une certaine ment pour la glorification de Dieu, d'une manière ou d'une
TRIPTYQUESA~GLANT2
20
autre. Que ce soit sous la forme des musiques qui résonnent
dans les cathédrales, des glorieux vitraux, de la voix mer-
veilleusement saisissante d'un chanteur ou des personnes
jouant les anges à la naissance du Christ, l'art vient de Dieu, et
l'homme doit lui retourner ses faveurs. Les Toréadors cepen-
dan" trouvent cette simple constatation difficile suite à leur
état de non-vivants. L'art est là pour glorifier les voies de Dieu.
Les Toréadors créent leur art avec le même but en tête, mais en
tant que vampires (créatures non créées par Dieu et donc dam-
nées). Peut-on considérer leur art comme dédié à Dieu ? Pas
selon les croyances actuelles. Alors que reste-t-il aux Artisans
privés (voire même dépouillés) de la raison d'être de leur art ?
Si leur art est rejeté par Dieu, alors pour qui devraient créer
les Toréadors ? Que valent leurs créations ? C'est l'une des
questions les plus explosives posées par Élysium, et les débats
sont passionnés. Grand nombre de Toréadors insistent sur le
fait qu'ils devraient toujours respecter la volonté de Dieu et
créer pour Lui, même s'U rejette leur création (tout comme Il
a rejeté le sacrifice de Caïn). Ces Toréadors pensent que leurs
œuvres pourraient être ce qui est juste pour les racheter à ses
yeux. D'autres estiment qu'ils devraient se concentrer sur
autre chose et faire de l'art pour ceux qui l'apprécient, princi-
palement des Caïnites et peut-être de rares exceptions mor-
telles. Ces Toréadors arguent du fait qu'hommes et Toréadors
font du très bon travail sans intervention divine. Us ne com-
prennent donc pas pourquoi ils ne devraient plus pouvoir
recourir à l'art Si l'art des Caïnites ne peut être dédié à Dieu,
puisqu'il est souillé, alors pourquoi ne pas l'offrir à ceux qui
peuvent et savent lui sourire ? Cette querelle est source d'une
tension constante entre les artistes souhaitant la reconnaissan-
ce et les Caïnites en quête de rédemption.
Pourtant, de telles pensées bumanjstes sont censées être
strictement gardée pour les Élysiums ou dans les sombres
recoins des pensées de chacun. Une inculpation pour hérésie
était chose facile en ces temps de suspicion. Et des Toréadors
qui prenaient leurs rivalités artistiques trop au sérieux avaient
découvert que quelques avertissements pour pensées sédi-
tieuses murmurées aux autorités adéquates pouvaient éliminer
un concurrent sans grand bruit ni culpabilité. Ces Artisans qui
disposaient ainsi de leurs rivaux (et étaient démasqués) avaient
tout intérêt à avoir des voyages prévus ou des protecteurs
extrêmement riches qui pouvaient les entretenir pendant une
longue durée. La rivalité amicale et la compétition sont une
chose, mais dénoncer un membre de son clan est une trahison
de premier plan et rencontre habituellement une réponse dras-
tique. Le clan croit dans son ensemble que l'art ne doit pas être
détruit et que la destruction d'un artiste n'est qu'une attaque
préventive envers tout ce qu'il aurait pu créer. Après tout, qui
peut savoir ce que la victime aurait créé en son temps. si son
autel sculpté n·aurait pas embelli une chapelle royale ou si ses
chants n'auraient pas ému aux larmes un ennemi intransi-
geant?
Il a été dit que le devoir d'un artiste est de saboter le quoti-
dien, de toujours éprouver les frontières en quête de création.
Tailler une pierre pour qu'elle prenne la fonne d'un saint en
toge est une chose. Mais quelqu'un qui cherche à faire mieux
que la simple imitation de ce qui a déjà été fait explore de nou-
velles techniques et met à l'épreuve les limites de ce qui est
acceptable. en quête de quelque chose de mieux qu'une simple
imitation. Ceci dit, les artistes sont souvent vus en compagnie reg11rèer res e111preintes èr &, créAtlott. nperrev1'111t ce qui est
de filous, qu'ils en soient ou non conscients, et maintes fois resté èe rhaq11e coup èe pinrt'lttJ. i,1111gù1t111t Ir prt>réèé même.
finissent entourés d'érudits, de philosophes, de parieurs, de 11t"émervelll1111t èe ce qui va 11ève11fr è ·,mr trlle 6e1111té è,ms
filles de joie, de voleurs el autres libertins - des personnes ce 111onèe. -:Et. lors111e mes pensées retom6n1t m /JÜce.
dont la compagnie est dangereuse. En des temps où le clergé lorsque je me réveiUe. le temps s ·est écoulé s,tJts moi.
peut accuser l'art d'être une menace pour Dieu - et en lesquels J11i entenèu è,re par èdutres 11dl existe une sorte èe
tout supposé ordre divin est strictement fait respecter par ceux UCJ1 Sacré è1111s notre sanlf '{Ill èe1t1A11èe IIHlîmt èe /,ea11té et
qui bénéficient le plus de ce nouvel ajout - les artistes d'une è';,rc lfll it d 6esoùt èe vit11e. .le "" saurAls èi're si ce& est
mouvance à part qui ne travaillent que selon les inspirations de exAcC-. /Jt'e11 1ue & /èliè èe reu.,· q11l solll restés trop UJttg-
leurs muses sont des hérétiques par définition. Il reste quelques te111/1s privés è itrt sem6le élltJ!er cette s11pposltû111.
endroits panni l'ordre naturel des choses où un artiste pourrait 'llne mitre SUIJtJeStio,1 que Jai e11tef!è11e récemment est
trouver sa place, mais dans l'ensemble, ce n'est pas conseillé. que le r&11 est 1111111èit. suite d ln vanité èe s11 fo11è11trlre.
Le quotidien, la routine, l'ordre accepté sont confortables et Ârfkel -:EUe étAit folle ènmour èe SA propre 6eauté et
sûrs (pour ne pas dire puissants). S'éloigner de cet ordre peut re{t,st1/C èe SeH[OUrer 0/lll(f'e rftose lfUe Oe lledllté. 'l/,t four.
causer le chaos et entrâme les problèmes (comme inciter de 'Notre ?ère Caii1 luf èemanèa èe veJ1fr d lui et elle refi,s11.
suspicieux membres du clergé à rallumer les bûchers à sor- tout éprrè11e èe la 6eauté è im fevne esclave 111011 !t1{ avait
cières). Nombre de jeunes Toréadors prennent des risques en ((111e11é. C11li1 "1 rappe& une seconèe fois et elle re{t,sA e,,co-
hésitant. en cherchant l'approbation de mentors, de protecteurs re. .A" trofsième refi1s. C11rn lui-même la mauèit .1 èevmir
et d"anciens avant de trop franchir les limites préalablement l'esclave èe ce qu'elle aè1tflr11lt f'l11s q11r /.11{-méHte. .le 11e stt1.r
établies. Les Artisans plus âgés, qui ont traversé de nombreux rAfs certlfler UI VoU'è/té Oe cette t/,for/e. !!/tifs elfe esC tunu-
changements de pensées sociales, continuent simplement tel Slfll(e. ne rro.!Jez-vous /lltS f'
qu'ils l'ont toujours fait ; à Jeurs yeux, les temps changeront 1."tt nuic touche d SA fi,,. 111l'11 6011 11111,: et mon rlr,1111/Je!lm
toujours assez tôt pour qui attend suffisamment longtemps. 111 ·t,-,forme 1ue Jai èes ù1vit'és.
•-Oe m11 mai,1 et 1111 110111 èe [.Amour.
Isouètt
DE LART ET DJE SA
CONTEMPLATITON PENSÉES rriuN !BARON
J\10,r rHer ?errevAL
Je vous remerrie è ';,vofr Acce/1té mes exmses ro11rentAflt SU!R LAMOUR
lü1dèent è it .!/ A èeux se111Al11es. 'Vous m ';,vu èe,nAnbé une Qui est-elle, vous demandez-vous, cette femme dessinée
exp/Jr11tio11 sur Id ,n1111ière èont èe telles rhoses pe11ve11t se ici dans l'ivoire? Ah, vous avez trouvé Annelise - le travail
proèulre et Ali ttom èe votre èe1t1Anèe et èe ttotre 11111itié. jè est mon effort vain de capturer ce que Dieu avait façonné. Oui,
111r sms o6li1Jée èr répo11ère. Je me èoi.f èe vous avertir 111e je l'aimais et l'aime encore. Pensez-vous que lorsque nous
jè nr suis pofnt éroèlt.c. et je 111e sers sl111ple111e11t èe suppo- acceptons !'Étreinte nous laissons tout ce qui nous a fait ?
sitiotts et répète les théories les plus p&usi6les éu6lles p11r Nous sommes les produits de notre artiste - pourquoi ne
Jfles p,1,rs. .le vous présente èo11c ri-après les fn,1its èe "1es devrions-nous pas garder quelque chose du grand artisan Lui-
èermëres nuits è ëtuèe. même, même si Sa main n'a plus de prise sur nous?
"Touces lrs sortes è';,rt ont toujours exerré 1111e gr1111èe Bien que nous ne prétendions pas que les autres clans
fitsri1111tûm sur nous. 6im /JU1s q11e sur è~mtre.>- èe nos p11irs. n'éprouvent pas d'amour, peu débattraient du fait que nous
'Nul ne semble jJOuvofr se souvemr è im t'e"1/Js où ce 11 ët11lt sommes les plus passionnés des enfants de Caïn. Immergés dans
/MS le r11s. 111ê"1e ceux 111{ se targuent èAvoir ronversé .-,vrr l'art et dans la société des mortels comme nous le sommes. com-
notre géttltrfce. 'Nous rltercltons [art. 11011s nous e,1 èéler- ment pourrions-nous éviter d'aimer ceux qui nous entourent ?
tons. le souteno,ts èe toutes les 1111tJ1fëres 11écess11fres, nous Certains ont dit que cet "amour" en question n'est guère que le
le 6uvons et I.e mangeons co,n,ne nourriture et 11,11a11t. Il se comportement courtois et chevaleresque que nous empruntons
peut que cela nous scie plu.~ 111e vital Mr Jai e11tenè11 /Nlr- ces temps-ci, mais tous ceux qui auront la bonne fortune de
lrr èe eert11lns èe ,no11 e&11 qui11v111ent vo11!t1 èevenlr ascète, l'éprouver ne pourront pas le confondre avec autre chose.
n qui ètint èevem,s fous par 111a,u1ue è drt. La différence entre la recherche et la possession, cependant.
Je crois que litre 11 'est pns qu ime plèce ttchevée 011 ut1 n'est que pure angoisse. Le Livre de Nod- les mots mêmes de
jitrc 11rcomj1li - sûwn /JOurquoi seuls les 1"oré11èt>rs le ver-- Caïn - constate que les Caïnites ne devraient pas chercher
ratent et le compre11èr11it f' - ce.>·t f 11cte èe création. èe l'amour parmi les mortels. Selon les restrictions de l'Église et
mettre en avn11t 1111e chose nouvelle d jJlfrtir è une v11str 111rr nos propres mots, les Caïnites sont considérés comme damnés
è i'èées v11g11es. èr pmsées, èe souvmlrs. èe 111otfvntùms et et souillés, censés exister en deçà des bienfaits de l'amour. Et
è"émotfo11s. J:11 cré.-ttfon qui nous apporte ,me m,uvelle /"êre pourtant, le piège est là, l'espoir de la rédemption dans les yeux
èe trllVAtt u{sse son e!flprei,1te sur rette pière. (0111/fte èes d'au moins une personne, et ce piège est peut-être la tentation
tr11ces è dttimaux è1111s & 11eilJr fr11irlremem to1116ée ou lêrri- la plus puissante jamais créée. La notion d'aimer, et d'être aimé
ture sur 1111e f'lllfe vt'erlfe· ?our 11111 part. q1111nè /écoute 1111 en retour, conduit souvent nombre d'entre nous à de hauts faits
morce1111 èe musique réussl qua11è je fixe 1111 joli visage 011 de création et de bravoure. Les Cours d' Amour ne fleuriraient
rt>ntrmple l'nrrltiterture è ime église. jè me surprenès d pas ainsi si nous refusions de croire en l'amour.
TRIPTYQUE SA~GLANT 2
22
Et qu'en est-il de l'amour courtois? Il semble être la solu
tion idéale à cette situation embarrassante. À la base, l'amour
courtois propose qu'un chevalier tienne une dame (en particu
lier inaccessible) pour le pinacle de la vertu et de la beauté,
qu'il accomplisse de grands actes en son nom, tout cela dans
l'espoir d'un sourire, d'un mot flatteur ou d'un doux regard.
La dame, en retour, se doit de soutenir son "soupirant", mais
n'est pas tenue de lui donner une preuve d'amour physique (un
baiser ou une accolade). Comme le physique n'est pas censé
entrer dans le calcul, l'amour chevaleresque devrait soutenir
également un vampire chevalier se languissant d'une belle
dame mortelle et une femme caïnite qui a attiré l'œil d'un che
valier mortel. Parlant en connaissance de cause, ayant moi
même cherché refuge dans les cours chevaleresques, je pense
cependant que cela ne satisfait qu'une part du besoin -
comme de s'asseoir à un banquet somptueux, entouré des
odeurs de tous mes plats préférés, et d'être incapable d'en ava
ler le moindre morceau.
Notre noblesse a souvent des considérations particulières
concernant l'amour et le mariage. Les nobles non-mariés font
l'objet de suspicions, et un noble qui n'aurait pas d'héritier de
son sang prendrait le risque de voir ses terres saisies par une
autre dynastie. Certains endroits reconnaissent les héritiers
adoptés, mais hélas, seuls les "barbares" perpétuent cette cou
tume. Beaucoup d'entre nous prennent des épouses pour
endormir les soupçons, particulièrement si nous maintenons
nos vies mortelles. Quelquefois, l'épouse connaît la vérité,
d'autres fois non. Certains d'entre nous ont poussé les appa
rences jusqu'à demander de l'aide à des suppléants pour pou ;�...,.-:
11:;,.
voir "porter" descendance (comme la femme mortelle d'un
;f/
seigneur Toréador qui coucha avec le frère mortel de son mari
/
pour donner un enfant à ce dernier). C'est un pari dangereux /
l
car cette information, placée en de mauvaises mains, pourrait
donner suite à des accusations d'inceste ou d'illégitimité au
jour de la succession.
Et qu'en est-il des ascètes dont on vous parle tant? Qu'en
est-il du clergé et de ses Caïnites dévoués qui cherchent le par ,
i :--
don du Seigneur en Le servant? Vous devez penser qu'ils lais
sent certainement derrière eux la notion d'amour. Mon infant,
··f
si cela était vrai, alors, assurément, cette vie serait morne.
Votre sire vous a certainement raconté l'histoire de Pierre
Abélard et d'Héloïse qui, comme nous, se sont vus obligés de
reconsidérer la notion de toute consommation physique. Bien
qu'ils se soient donnés tous deux à l'Église après la frustration
de leurs desseins, ne pensez pas un seul instant que leur pas
sion mourut simplement telle une fleur gelée. Leur ardeur resta
presque inchangée, mais nécessairement tempérée par quelque
chose de nature plus spirituelle - l'amour de deux âines
jointes dans la douleur et trouvant la passion dans leurs délires
célestes. J'ai entendu parler de quelque chose d'assez sem
blable chez les ascètes. Ceux d'entre eux qui doivent rester
"chastes" souscrivent à la Société de Marie avec une ferveur
qui effraie certains hommes <l'Église. Ils idolâtrent la Sainte
Mère avec une dévotion qui outrepasse quasiment la pensée de
Dieu et du Christ. J'oserai ajouter que certains voient le Saint
Père comme un rival potentiel. D'autres se tournent vers le
mysticisme dans leurs voyages solitaires et leurs travaux, cher
chant, par tous les moyens, à faire le tour des idéaux d'un Dieu
aimant. Et, dans ce mysticisme, ils parlent des relations entre
Dieu et l'Homme de plusieurs façons. Un des idéaux récur- comme infante et Ciünite, je pense que vous êtes prête à fran-
rents venanl de la bouche même du Christ est que 1' homme e~l chir la prochaine étape. celle de ,·oue naissance comme
comme une fiancée, el l'esprit de Dieu un fiancé dans un Toreador. Quand vous étiez mortelle. étiez-vous familière des
mariage chaste et spirituel. J'ai lu des poèmes sur ces chastes Cours d'Amour '? "Pas en tant que telles," dites-,·ous. je vais
myslÏqucs, el ils pourraient aisément passer pour des chantl> com,tdérer que c'est un non. Très bien, alon. - con idérez ceci
d'un chevalier passionné à sa bien-aimée. ''Ln chanson de comme votre première leçon.
Salomon" vous serait la plus familière, mais je vous suggére- Les Cours d'Amour, fondées par notre Aliénor
rais également n'importe quel écrit de Léonidas d' Athos, si d'Aquitaine, font partie des fleurons de nos travaux. Au sein
Jamais vous deviez mettre la main dessus. Un avertissement même de la cour, nobles dames et chevaliers jouent aux jeux
cependant : certains de ces mystiques sont considérés dans des courtisans et de l'amour, donnant naissance à l'imagerie
l'esprit d'aucuns comme étant proche de l'hérésie. et vous ne romantique des chevaliers errants el des belles dames grâce à
savez jamais qui tombera en disgrâce. Si vou!i gardez des écrits laquelle nos troubadours gagnenl leur vie. Cependant, un
de ces écrivaillons, assurez-vous d'avoir une bonne cachette grand nombre de ces chevaliers et de ces dames font de la poli-
pour ranger leurs créations. tique pendant qu'ils folâtrent avec leurs "soupirants". et ces
D'autres races surnaturelles pourraient bien nous séduire à innocents ainsi séduits servent nos plans sans même sans
en perdre la raison. En Irlande, plus d'un d'entre nous esL rendre compte.
tombé amoureux d'une fée venue danser la nuit de la Saint- La cour est composée ainsi : il y a une seule déesse de
Jean et cenains du Beau Peuple leur rendaient la pareille. Des l'Amour, généralement choisie d'un commun accord, qui mène
amoureux fantômes ou del. sorcières passionnées peuvent la cour et édicte les règles ·elon lesquelles il faut jouer. C'est
aussi en amener plus d'un à leurs pieds - je me souviens elle qui donne les punitions aux soupirants égarés ou encoura-
d'une d'entre elles, aux cheveux de la couleur d'un soleil ge les dames, et de temps à autre entraîne les nouveaux venus
oublié et aux yeux plus bleus qu'un ciel d'été. Elle avait ren- inexpérimentés. El le est considérée comme un modèle de beau-
contré le jeune Gervais pendant les danses d'une fête et leurs té et d'intelligence. et la cour la suit. Ceux qui se retrouvent
cœurs s'enflammèrent au premier regard. Malheureusement. dans nos assemblées sont habituellement reconnus pour être les
quand on sut que Gervais pas ait son Lemps avec une belle {et meilleurs et les plus brillants des cours ..mortelles".
mortelle) sorcière, Rosalba, l'une des femmes du clan, devint Commenl celte cour fonctionne ? Chacune est différente
presque folle de jalousie et pourchassa l'infortunée mortelle dans ses spécificités. bien sûr, mais il existe un modèle géné-
(ainsi que Gervais, il m'en souvient) telle une bête en furie. De ral pour que l'on puisse aller de l'une à l'autre en tant qu'invi·
1elles alliances lorsqu'elles arrivent (et elles arrivent) sont lé sans trop risquer de faux pas. Un chevalier pose ses yeux l>Ur
considérées comme maudites dès le départ et tout ce que les une dame el lui offre son cœur, il cherche alors à gagner ses
amants peuvent espérer c'est la fuite et la tromperie dans l'at- faveurs de toutes les manières possibles. Il annonce rarement
tente des trop rares instants où ils peuvent être ensemble. C'est ses imenllons devant toute la cour ; après tout. CappaUanus
le cas de Gervais el de sa sorcière. ils ont finalement fui et nul nous rappelle qu' un amour rendu public perdure rarement,
n'a plus jamais entendu parler d'eux. Au mieux, ils ont été sans mentionner l'embarras fait à la dame si elle ne l'apprécie
chassés - au pire, poursuivis et tués. Cruel ? pas. Le chevalier se doit donc d' accomplir des actes qui feront
Malheureusement, pendant que nous soupirons aux récits honneur à sa dame, d'entreprendre des tâches sur l'ordre de sa
d'amoureux séparés. nous ne nous montrons pas très habiles à reine ou de sa dame, de supporter sam, plainte les moqueries et
les tolérer parmi nous. Regardez les pratiques de dénigrement les longues attentes entre ses attentions. de toujours traiter sa
donl on use pour diminuer le statut d'un rival. Quand, par "bien-aimée'' comme ncn motns que la perfection fémirune. et
exemple, la comtesse B... est dénigrée pour avoir épousé un de braver d'infinis dangers pour un doux regard ou un sourire.
chevalier sans le sou. il n'est pas élevé à son rang. Au contrai- À chaque pas franchi sur cette route. les troubadours chantent
re. elle est rabaissée au sien. les réussites du chevalier pour anirer les pensées el le cœur de
Vous me parliez d' Annelise? Je l'ai rencontrée quand nous sa darne vers lui ou pour modifier l'attitude de la cour.
n'étions tous deux que de simples mortels, il y de cela fort FinaJement, La dame peul refuser ou accepter cette attention.
longtemps. Comme JC l'ai dit, ce portrait ne lui rend pas justi- Car elle choisit sans perdre la face. bien qu·une dame qui soit
ce. li est difficile de faire une étude vivante lorsque le sujet est trop capricieuse puisse perdre plus d' alliés qu'elle n'en gagne-
mon depuis un siècle. rait dans ceuc valse des soupirants. L'acceptation de cet amour
ne finit habituellement pas en consommation physique. bien
que cela soit déjà arrivé. Un chevaJier peut courtiser une dame
LES A-CÔTÉS mariée. s'il comprend qu'il doir accepter les vœmc. faits à on
mari. Il ne fait aucun doute que bien des jeunes femmes
DE LA COUR AVEC mariées malheureuses cherchent à s'échapper d'un mari rustre
ou très âgé en choisissant parmi les jeunes étalons, mais je
DA2\1E CATRlO.....A Lli .. DSAY donnerai d'autres détails sur ces étapes particulières plus tard.
Entrez, chéne, et fermez la porte derrière vous. Vous êtes Grâce à nos tentatives d'apporter un peu de grâce et d' hon-
magnifique ce soir et avez un port tellement gracieux ! J'étais neur à un monde brutal el dénué de toul honneur. ici, la che-
très fier de vous faire reconnaîlre comme mienne. Venez. valerie s'épanouit. Les idéaux chevaleresques veulent qu'un
asseyez-vous près de moi car j'ai de nombreuses choses à vous chevalier ne frappe jamais un ennemi désarmé, qu •il se com-
dire. Maintenant que vous avez passé votre première épreuve porte en exemple devant les paysans, qu'il chérisse les dames
TRIPTYQl'E SA~GLA.""T 2
24
et les protège pour la beauté et la grâce qu'elles apportent au un petit groupe de chevaliers. La déesse Toréador du tribunal
moode. Les valeurs d'humilité et de piété sont également l'encourage à préférer un chevalier en particulier. Ou bien l'on
encouragées, souvent avec des résultats des plus surprenants. donne indices et aide à ce chevalier et rien aux autres. Une
Récemment, j'ai vu comment messire Julien, l'un des nôtres, goule sen d'intennédiaire entre les amants, peut-être aussi le
montra une qualité remarquable ... oserais-je dire de la Foi ? troubadour pour le chevalier, amassant autant d'informations
Dans la quête de sa bien-aimée - qui est gentille et pieuse, pour ses maîtres que pour les amants. Les choses se passent à
sans être abêtie. li a commencé à s' interroger sur ses propres merveille au point que la dame accepte les faveurs de son sou-
croyances et à assister à la messe de minuit plus fréquemment. pirant, et le couple finit par consommer physiquement ! 'union.
Nous verrons bien ce que cela donnera ; nul doute que certains Dès lors commence le vrai jeu : l'idylle peut être révélée au
se montreront assez intéressés de savoir comment cela a pu monde en détail pour disgracier le mari cocu, gardée secrète
arriver. pour du chantage. Sinon l'enfant de cette dame, né hors maria-
Mais, quel était mon propos ... ah oui, la chevalerie. Elle ge pourra revendiquer une autre filiation que celle du mari.
est presque part intégrante de l'amour courtois, et certaines Une dame prise en flagrant délit plusieurs fois peut se retrou-
concessions attendues d'un chevalier au cœur de la bataille ne ver sur la liste des chantages des Toréadors, forcée de fournir
dépareraient pas à la cour. L'amour qui est attendu ou présen- argent et refuge à son tourmenteur pour garder cette affaire
té gauchement est perçu comme indigne d'être donné. Un but secrète. Le chevalier peut aussi avoir des problèmes - il peut
atteint trop facilement est dénué de valeur, comme celui pris de être contraint de prêter son épée à une cause des Toréadors,
force. Un amoureux ne devrait souhaiter d'autres bras que envoyé pour servir d'espion, ou même dénoncé à la justice
ceux de sa bien-aimée, et chacune de ses pensées devrait lui locale, qui peut le condamner à une peine allant de l'exécution
être destinée. L'objectif du tribunal est moins d'atteindre un à l'envoi aux Croisades. Selon le désir qu'ont la dame et son
but que de paver la route pour l'atteindre, une philosophie peu chevalier de garder leur liaison secrète, l'un ou l'autre accep-
différente des Voies. J'ai l'impression que la chevalerie est tera de donner beaucoup de choses lors d'un chantage cour-
devenue une Voie propre pour un certain nombre de nos che- tois. Ce cas arriva il y a un an environ - la pauvrette de I' his-
valiers, et qu'ils s'y tiennent aussi promptement qu'à n'impor- toire est une dame qui avait été "découverte" avec son favori,
te quelle autre Voie. Je méprise ceux qui prétendent que les tri- ce qui lui valut d'avoir un enfant. Comme la dame en question
bunaux sont inutiles ou frivoles. Par ces fonnaùons, nous leur était mariée, et son mari toujours parti, cela la plaçait dans une
donnons des hommes et non des bêtes qui se voudraient des situation difficile. En échange d'un refuge dans le donjon
hommes, et par notre travail, vous devriez les reconnaître. Ces durant plusieurs mois, notre clan fit croire aux domestiques
seigneurs méprisants, rassasiés par leurs repas du soir dans les que leur seigneur était revenu brièvement partager la couche
donjons, seraient-ils aussi moqueurs s'ils savaient que nombre de sa femme au bon moment. Entre temps, l'enfant était né, un
de leurs ouailles donneraient beaucoup pour se joindre à nos beau garçon qui hériterait des terres et du titre qui lui étaient
festivités? Viendra un jour où ils regretteront d'être tellement dus ; le passage du temps nous indiquera La réussite de notre
illettrés, lorsqu'ils ne sauront que manier l'épée et non la travail.
remettre au fourreau. Les troubadours toréadors opposés à leurs analogues mor-
Pour nous. les tribunaux nous procurent des possibilités tels peuvent humilier leurs rivaux sans y penser une seconde
inégalées. Préparer des compétitions, encourager ou découra- ou éduquer leurs successeurs à l'élévation. De la même maniè-
ger les prétendants choisis, faire travailler les meilleurs trou- re, ils peuvent accidentellement "rédiger" les paroles d'une
badours contre un rival, même s'élever à la position de déesse chanson sous prétexte que les mots "ne s'ajustaient pas bien"
et dicter le mode de fonctionnement de la cour - toutes ces à l'air ou quelque chose comme ça, ou broder la vérité aussi
occupations sont dignes des artistes et des Anisans. Ici, où les sauvagement qu'une noble dame le ferait d'une tapisserie. Un
enjeux sont relativement peu importants, les jeunes viennent soupirant éconduit (qu'il soit mortel ou Caïnite) pourrait être
s'éduquer et engranger des Leçons qui leur seront utiles dans le suffisamment irrité pour poser problème à son rival ou à la
111onde extérieur. L'une des nôtres, Dame !souda de Blaise, dame qui l'a repoussé. Et comme les commérages sont le quo-
préside une Cour d' Amour, une plus petite que celles tidien de la cour, qui saurait dire d'où est issue l'intrigue?
d'Aquitaine ou des Flandres. Mais par ses œuvres et ses parti- Dans l'ensemble, les Cours d' Amour n'ont pas été unani-
cipants elle est parvenue à avoir beaucoup plus d'influence mement acceptés par la plupart des clans. Les Brujahs, bien
qu'on ne pouvait si attendre. Lorsque certains souhaitent y qu'ils soient intrigués par les idéaux mis en avant, demeurent
entrer, ils peuvent demander des droits d'entrée, si vous voyez un tant soit peu suspicieux - il y a quelque chose à propos des
ce que je veux dire. J'ai entendu dire qu'un jeune petit sei- ·'jeux" qu'ils trouvent déconcertant. Ces dénigreurs sont les
gneur ventrue ne paya pas qu'en or, mais de la bonne volonté jeunes du clan ; les anciens sont au nombre de nos visiteurs
de son maître, sa place à la cour d'Isouda ; soyez assurée que favoris. Les Ventrues et les Lasombras, par leur nature même,
ce présent ne sera pas dilapidé en broutilles. trouvent que les cours sont des endroits idéaux et les appré-
Beaucoup d'entre nous profitent de la chance qui leur est cient. Il est vrai qu'ils ont tenté de s'approprier les cours à de
donnée pour organiser des alliances entre chevaliers et dames, nombreuses reprises, mais ils ont toujours subi un échec
dans l'attente que ces unions puissent servir plus tard au logique. À la décharge de ces prétendus parangons de l'amour,
monde ·'extérieur". Prenons un exemple : une dame malheu- ils savent quand reconnaître la défaite lorsque cela leur arrive.
reuse avec son mari (qui est un ennemi des Toréadors, peut- Je vois le ciel s'éclaircir à l'est. Il est l'heure que nous
être le pion d'un ennemi cai'nite) est invitée à rejoindre les allions au lit, et vite ! De quoi auront l'air ces yeux s'ils sont
rangs du tribunal, et elle est promptement prise en charge par rouges de sommeil. À ce soir, ma douce.
LIVRE 1 , LES TOREADORS
 IIM 'R">~IHII""'- fa ;,lus /,elle rl'se
Q'Is/bltft<IFI.
,fe 11u• som'iens. lfllt 6ie11-4tinée. m 'oir /itil
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leur u:,,tge e,1 1'11r èe t,, ;,rést•11t,1ti<m II fa cour.
'l'11lsq11e tu e11 n èijd ,i ce st,rèe. Je èoù 111 "en
" temi· ,i IIW> ;,,,r,,les t'( ci11slr11{re.
Uœ {tteeur est 11,re 11111n111e ,\e D1flèrcùm
è une ,'11me /'"",. celui qui se 61tt j•o11r so11 ho,r-
11e11r 011 qNi /1l'ss-èèe so11 C<'e11r <.è.f 11111rq111·s
è'ntu11titw so11t /dites /J(Jllr ftrr ,rccorèées.
111,rü al i•r ;,n,èe11rr ,:ar lrs t>istri6urr e11tre
trop èe >'<Utflinmts l'eut. e11suit,, e.tiger 1111
11n111è 110111/we èe èr,1111m\es è'atce11tio,1. et peut
i:réer èrsJ,1w11slrs. ·Pour 11111 p11n. je !es gt1rèr
/'Ntr nu,11 11111n: mon ,u11,111t. ,non che1'"1/ier et
111.111 in/:mt fovori. et jus,p, ~i J,résent.. tout.
s est /,fe>I /Mssé. Je èl'tS /INll"lllll( 1tè1t1rUre
tflle 11/tW lllfldll( jitt ,t:,:,·ez /iïc/,f /orStfHÎi
èrromlr/t q11r s,r /dveur p.,n11it Ir 111ê111r ar6rr
6roèè que r,·lui èe 111011 ti1fi111t
..Le.> /in'eur.f 11écessftc'llt SOtll 'ellt Ill/ peu èc
trt1~'r1il èr notre J111rr. 'fo11r le mobts. !e111·
rrér1tlt111 ~'""s J1,,11.f.,;r à ne J1,u· ètre tro/1 /(/,é-
raie 111'ec ~'"11,·-mh11e. ·Oh e.t·e11f/'/e, sentfetlt
un 11etlt t1m 'rage èt• 6r",'erie èe.s rl111te., èe
tls.~tts èe VDtre èen1fère rt16r. ott fr n,6,m 'f/.ll
11 11011é ,~,· che1 1e11.t èrn1lère111r11t. 'Fo11r 111n
;,11rt. 1/Pt111è 111es r,,6es .f(tllt forces. je ~r,nnnèt•
,i re que solt ct1uj,ér une 111,mchr ,,e ;,!i,s. c,rr
ces( /.fil élé,11eFJ( èe 6em,té l{tll' ,~tri' che1'1t!ier
;,ar11èe 111 PC t~s m11/e11rs II son 6nt.f.
Il e11 est èes fo, 1e11r.,; m111111e èr t,,11tes
cht1ses. elles s"11t r,w11ttr 1111 {A're c,m'rrt. si
hmC est If" ;w ,rit ,t/'firts à les !trr "!'reno11s
f e:œm;,ft• .f11lVn11t . """ è1111,r "/fre À SNI r/,e-
~'alier !lite faveur èe c,:..su J>cwrfre 6r"èé ~ ,me
t(itrcssr. ,, 1111 èr,'lf"" rt111r/,é N ~ 1111 rhfne flé-
tri. JUême sl re/;, Jktrd[t dssu 6t111t1l ronsi~é-
rons le,· S.!fllllll'les - !,, tigressr /'"tir /11 1'1111/-
té. le èrt{tr"'' rt111c/,t >l't{,l{ère /.,, /"rssllllte et le
r/,ê,re flétri &1 stérdite. Ce q11l se1116/e être
1111e /4~'eur èe v,t!rur ut e,, j;,it ,me (11s11!te
èe & ;,arc èe ht ,,1,11,r.
Q11e !111.,;11/te ,rit été û1tr11tii>mte!!e 01, 1m11
est 1111e 11utr,• rl,"se 11,il 11cus /;mèra
,rj1J1rr11ère...
IstJtt~,1 èe 'ôh,ise, è11,,... se.f !eures.
Les Caïnites qui entrent dans la chevalerie suivent souvent la Via Equitum (Voie des Chevaliers).
s'en servant comme d'une base pour Jeurs codes personnels. Les membres des ordres les plus
récents se sont mis à modifier la Voie en fonction de leurs croyances personnelles. des écrits popu-
laires et des accords des membres. Alors que les Caïnites viennent d'achever leur travail. le code
original est à peine reconnaissable. Ce qui suit est une reconstitution approximative de l'original.
1- Tu seras honorable et juste dans tes relations avec les autres.
2- Tu te montreras ferme et ne reculeras point devant ton ennemi.
3- Tu respecteras ta hiérarchie.
4- Tu secourras et aideras les faibles qui demanderont ton aide.
5- Tu honoreras ta dame, ton seigneur et les recommandations qui te seront faites. Si cet hon-
neur devait être perdu, il t'incomberait de le venger.
6- Tu considéreras les hommes comme tous égaux.
7- Tu protégeras toutes les femmes de ce monde avec ton épée. ta force et ton honneur.
8- Tu ne manqueras point à la parole donnée.
9- Tu n'abuseras point de l'honneur et des devoirs qui te sont confiés.
10- Tu traiteras ton adversaire avec le respect dû à un pair.
Bien sûr, ce code a été réinterprété de nombreuses fois afin de favoriser les opinions et les sou-
haits d'un groupe en particulier. Par exemple, l'article huit fut interprété avec l'ajout " ... à tes sem-
blables cainites", ou seulement à la noblesse. ce que l'on peut faire aux monels, aux paysans ou aux
animaux est une autre affaire. De la même manière, l'article six fut réécrit afin qu··'bommes·· ne
concerne que les Caïnites chrétiens masculins de noble naissance, tous les nobles chrétiens (Caïnites
ou mortels), chaque enfant mâle, ou toute "personne" (ce qui excluait les Maw·es, les Gangrels. les
Malkaviens, les paysans ou tout autre individu n'arrangeant pas les affaires des chevaliers). Une
affirmation courante est que le code ne fait que reprendre quelque chose de beaucoup plus ancien.
L'auieur présumé, un certain Aloïse d'Étienne, couvrit les traces de son inspiration, mais dans un
instant où il relâcha sa vigilance, il mentionna w1 ensemble de parchemins fragiles qui contenaient
un code écrit d'une étrange manière mais dont il trouva l'essence à son goût.
Pour ceux qui honorent le code dans sa forme la plus pure, le réarrangement de la ·'vérité" du
code par leurs camarades de clans est perçu comme une violation de tout ce que la chevalerie est
censée représenter - à savoir une manière de se comporter face à ses pairs, supérieurs, ennemis et
subordonnés avec honneur et efficacité. Ceux qui interprètent le code avec trop de libertés pour-
raient se retrouver chassés par Jeurs pairs caînites pour leurs crimes et contraints de "partir en quête''
afin de purifier leur honneur souillé. Ces réfractaires au code ne sont habituellement jamais revenus
car ils sont envoyés à des tâches souvent prévues pour tuer Je quêteur - la recherche de reliques
sacrées ou les pèlerinages sont choses communes. Ceux qui survivent à l'épreuve et qui reviennent
connais quelque peu votre sire et je sais que c'est lui qui vous
a envoyé. Alors, asseyez-vous là et écoutez car je n'aime pas
me répéter.
Les ordres de chevalerie caïnites sont parmi les premiers à
Entrez, mon infant, et ne restez pas à la porte comme un
considérer de tout cœur que la chevalerie est un idéal et un sys-
chien affamé. Vous êtes un Toréador après tout, votre sire ne
tème de croyances. Certains de nos érudits supposent que les
serait pas heureux de vous voir si mélancolique.
Toréadors de ces ordres étaient aussi les créateurs de la Via
Comme ça, vous êtes venu apprendre les ordres. Vous cher-
chez à entrer dans leurs rangs ? Hmmmph, ils ne prennent pas Equitum (Voie des Chevaliers), et peu de choses contredisent
les nouveaux au sang comme vous - ils attendent de voir si cette spéculation. D' où venaient les ordres ? C'est une autre
vous allez trébucher sur votre épée avant de considérer votre affaire. J'ai entendu parler de toutes les théories imaginables,
cas. Mieux vaut vous laisser vous embrocher en jouant au che- même des moins plausibles, je ne suis donc pas intéressé par
valier dans la cour plutôt que sur un champ de bataille. Mais je une idée de plus sur ce sujet. Les ordres prétendent d'habitude
Lf\'RE l , LES TOREADORS
qu'ils proviennent d'un décret divin ou selon une inspiration Avant qu'une décision ne soit prise, l'incertitude les fait hési-
des Hospitaliers ou des Templiers, dans les rangs desquels ter, incapable de faire un pas vers une quelconque issue, et prê-
vous retrouverez certains des nôtres. tant le flanc aux alliés attentifs des Baali.
Certains Caïniles trouvent l'idée même des ordres de che-
valerie caïnite stupide ou hors de propos. D'autres sont intri-
gués par le fait qu'une organisation familière du Bétail a été LA BKBLIOTHÈQUE
modifiée afin de satisfaire à nos besoins particuliers. Pour le
moment, je ne parlerai que de ceux fondés et dirigés par des DE MALTE
Toréadors. Les membres des autres clans peuvent demander à Il serait tentant d'associer les grimoires interdits des savoirs
entrer, ou, s'ils prouvent qu'ils one les tripes nécessaires, ils secrets avec les Tremeres ou les Cappadociens, mais beaucoup
peuvent être invités, mais les étrangers ont droit à peu d'er- ne songeraient jamais aux Toréadors pour en être les déposi-
reurs. Dans le cas des Chanteclercs, la première erreur d'un taires. Pendant que les Tremeres s'absorbent dans l'étude de
étranger est aussi sa dernière. leurs grimoires de sciences hermétiques et que les Cappadociens
La compagnie blanche. Prenant pour modèle les fleurons explorent Les mystères de la mort, les Toréadors gardent en vie
de la chevalerie que sont Galaad et Perceval, ces Cainites se les bibliothèques d'Égypte, de Grèce et de Rome.
tiennent à des vœux d'honneur des plus stricts, à l'obéissance Comme le monde classique s'est effondré sous Le poids du
de Dieu et au célibat (d'où leur refus de s'abreuver sur une massacre des hordes barbares et des excès des empereurs tout-
femme pour le plaisir ou d'avoir des relations intimes de n'im- puissants, de nombreux Caïnites se sont précipités pour empê-
porte quelle sorte avec une femme caïnite). Ils choisissent cher tout Je savoir existant de le rejoindre dans la tombe, sou-
leurs membres seulement après les avoir observés sur le terrain vent en y ajoutant leurs propres collections. Dans les tombes,
et avoir reçu des preuves de leur personnalité et de leur hon- les greniers, les recoins moisis et les grottes, le savoir des
neur. Ces Cainites disposent prestement des sans honneurs et siècles passés est rassemblé sur des rouleaux, des tablettes
des parjures. Beaucoup se reconnaissent au port d'une écharpe d'argile, des fragments de pierre, des papyrus et des livres.
blanche ou d'un tabard blanc immaculé. Pour le moment, les Caïnites sont heureux de cacher leurs tré-
Les compagnons de Notre Dame. Ce groupe de cheva- sors, dans l'attente d'un signe pour qu'ils puissent faire profi-
Jjers est réduit, au nombre de neuf au plus, mais ils sont remar- ter le monde entier de ces œuvres.
quables de dévotion envers leurs idéaux : la Société de Marie La plus grande de ces bibliothèques secrètes est une col-
et la protection des femmes. Ce choix inhabituel est expliqué lection déposée à l'air froid et sec d'une caverne de Malte, pré-
par leur meneur, un certain William Grey, qui prétend avoir été servée là-bas par un Toréador connu sous le seul nom de
illuminé par une apparition de la Vierge alors qu'il était en Simon. Peu savent s'il possède un patronyme, bien qu'il ait
Croisade. Selon lui, elle l'a chargé d'une mission de protection signé quelques lettres du nom de "ben-Jacob", une référence à
et d'assistance envers les femmes, mission qu'il croit suscep- son passé de monel dont il refuse de parler. Certains indices
tible de le purifier de la souillure vampirique. La compagnie ne dans les paroles et les manières de Simon permettent de pen-
prend pas de femmes conune calices, sauf sous le coup de cir- ser qu'il fut étreint au Moyen Orient durant l'occupation
constances extrêmes. Ils croient que chaque femme devrait romaine, peut-être dès l'époque du Christ, et qu'il était très
être traitée comme la sœur de la Reine des Cieux. La récente instruit pour cette époque.
querelle de William avec le prince ventrue d'Avignon aurait Simon reçoit peu de visiteurs, et l'ordre des chevaliers
cependant pu les dissoudre ; les chevaliers de la confrérie sont mortels qui siège à Malte sert à repousser les curieux en
maintenant soupçonnés d'hérésie, et toute la Société de Marie goguette. Ceux qui s'aventurent dans la maison qu'occupe
est devenue hautement suspecte pour les mortels. La plupart Simon viennent souvent pour le travail ; les visiteurs inatten-
porte des lys blancs, symbole de la Vierge, quelque part sur dus ne sont pas bienvenus sauf s'ils peuvent le convaincre de
leurs armoiries ou leur sellerie. l'urgence de leur tâche. Si un voyageur vient en visite en quête
L'Ordre de Chanteclerc. Le nom de cet ordre provient d'un texte particulier, Simon lui demande d'attendre pendant
d'un coq astucieux d'un conte folklorique paysan. L'ordre est qu'il va le chercher dans la grotte. Seule une minorité privilé-
cependant plus sérieux que des contes pour enfants. Il fait giée a été autorisée à Je suivre sur la piste serpentant entre les
usage du nom du coq pour identifier leur ordre comme étant bosquets jusqu'à la caverne à plusieurs niveaux où repose le
celui des chasseurs de démons (essentiellement les Baali). Les savoir des temps passés.
Chanteclercs portent comme insigne sur leur bouclier un soleil La caverne est composée de nombreuses salles de taille
Levant, symbolisant la lumière purifiante du matin, ou portent réduite reliées par un seul tunnel, toutes entourant la galerie
une plume de coq à leur casque. Beaucoup tentent de pousser principale. Sur certains murs, les restes de vieilles peintures
l'endurance jusqu'à rester éveillés pour saluer l'aube, ne se peuvent être vus à la lueur vacillante des lampes - des traces
retirant que lorsque Je soleil est déjà pleinement levé. Le zèle de mains humaines et des créatures animales peintes en indigo
des chevaliers, leur xénophobie et leur piété arrogante ne leur délavé et rouge sombre. Dans la galerie principale se trouve
ont procuré que peu d'alliés, laissant à ceux qui font appel à une énorme dalle de pierre, striée de coups de couteau et de
eux la tâche difficile de savoir ce qui de la maladie ou de son marques, et souvent utilisée comme table de lecture. Juste au-
traitement est le moins supportable. La lutte de l'ordre contre dessus de l'autel se trouvent d'autres peintures, celles-ci mon-
les Baali les a engagés dans un conflit direct avec les plus trant des spirales et des formes d'étoiles. Simon prétend que la
décadents des anciens Toréadors qui nichent dans le sud, galerie et les salles sont inchangées depuis la nuit où il en a
engonçant les Chanteclercs entre deux croyances du Code. pris possession.
TRlPTYQvE SA:--.GLAi"'\T 2
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La première pièce abrite principalement des travaux grecs
et romains mineurs, surtout de J"histoire et des archives. avec
quelques vieux discours et de la poésie sans intérêts rajoutés
pour faire bonne mesure. La seconde salle porte d'étranges
inscriptions écrites au charbon et d'autres peintures indigos ;
d'aucuns prétendent que certains mots sont écrits en énochien,
la langue des Première et Seconde Cités. La poésie, les drames
et les agendas embrassant les siècles de la vie des Grecs et des
Romains emplissent cette salle. Une autre contient des écrits
arabes de toutes sortes. de la poésie à la religion jusqu'aux
décrets royaux. La quatrième, un peu plus basse en niveau,
garde les travaux "barbares", incluant même un ensemble de
baguettes de bois portant des glyphes druidiques ; un visage
bumain au regard polisson orné d'oreilles et de dents animales
regarde ici les visiteurs. Sous la quatrième, dans une petite
pièce dont le montant de la porte est couvert de caractères
hébraïques, Simon garde une collection prisée de travaux
hébraïques et araméens. Une sixième salle, portant des sym-
boles de protection peints en rouge et un sceau de Salomon sur
le sol, contient les trésors les plus noirs de la collection de
Simon - les sciences occultes, les traités de démonologie, les
textes érotiques et les manuels de stratégie et de torture.
Une des pièces attenantes à la galerie demeure un mystère,
même pour Simon. Condamnée par une seule roche massive
gravée du symbole du cèdre, la salle est fermée depuis que
Simon s'est installé. Il n'est jamais allé derrière cette pierre et
a repoussé toutes les offres de faire ouvrir cette salle. Si c'est
une chambre mortuaire, aucun esprit irrité ne s'est fait sentir.
Simon a ressenti une présence de temps à autre à côté de cette
roche, mais n'a aucune idée de ce qui peut se tapir dans la
pièce. Pour l'instant, la pièce peut garder ses secrets.
On prétend que l'érudit effectue quelques excursions pour
rassembler d'autres ouvrages en dehors de Malte, à Salerne,
Boulogne, Palerme et Naples, où il parle de Uvres avec ses
"pairs" mortels et de choses plus graves avec ses frères caïnites.
Il ne répond pas aux convocations de la cour alors que des
Toréadors avisés ne s'y risqueraient pas. Il a acquis une grande
influence en vertu de son âge et de son travail et a ainsi gagné le
droit à l'intimité. Effectivement, Simon possède un grand
nombre de protecteurs et de soutiens puissants qui préfèrent que
la collection ne soit pas dérangée, mais l'érudit est aussi capable
de défendre seul sa vie privée et sa bibliothèque. Une fois, un
rustre ventrue décida de donner une bonne leçon à cet "ancien
gaga" et déchira en lambeaux, sous les yeux de Simon, un par-
chemin hébraïque de valeur. Ce qui arriva ensuite est toujours un
secret entre Je Ventrue et Simon, mais le simple nom de Simon
fait rentrer le Ventrue dans ses petits souliers.
Les nouvelles universités sont récemment devenues le
"projet préféré" de Simon. Fournis en copies de nombre de ces
travaux, de nombreux professeurs peuvent modeler les esprits
des jeunes mortels selon un programme d'études directement
imposé par Simon à travers des textes "trouvés'' dans sa biblio-
thèque. D semble éprouver beaucoup de plaisir à décider ce qui
sera, ou non, étudié, comme s'il prenait une revanche perverse
ou suivait un programme connu de lui seul. D'autres anciens
qui s'intéressent également aux universités interfèrent rare-
ment avec les caprices de Simon, soit par amitié soit par un
sain respect.
forme d'art, que ce soit leur manière de livrer bataille, de forger
LES RELATIONS une épée ou de peindre les tuiles d'une mosquée." Les habitants
AVEC LE§ AUTRE§ du Levant considèrent ces étrangers avec une juste méfiance,
mais le désir de partager leurs connaissances dépasse souvent
leur défiance. Finalement, de nombreux artisans (et Artisans)
LES ASSAMHTES sont heureux d'avoir des élèves attentifs comme savent l'être les
... Mon instructeur est resté plus que silencieux quant à mes Toréadors occidentaux. Durant l'ère du califat des Abassides,
progrès, sauf pour me critiquer. J'ai commencé à croire que l'échange de programmes entre les Toréadors occidentaux et les
j'étais vraiment fou, comme Jacques me le disait à propos de Assamites orientaux se développa, et même les plus habiles des
cette quête en Andalousie. J'ai passé une bonne partie de la soi- artisans Toréadors pouvaient encore se vanter d'avoir étudié en
rée à la forge, m'échinanl à maîlriser ce coup qui est à la base Terre Sainte. En Europe, les avancées maures en Espagne
accueillaient d'occasionnels visiteurs Artisans, selon l'état des
de tour ce que je vais apprendre selon Maftre Ibrahim. IL est
relations entre les Lasombras et les Toréadors.
entré et a inspecté mon travail, pipant à peine mot, se conten-
tant de m'indiquer où je n'avais pas assez tiré ou frappé trop Assamites et Toréadors auraient eu beaucoup plus de sujets
fort. J'étais autant en colère contre moi que contre lui, et quand de discussion si tous avaient pu être persuadés de regarder les
il panir, j'étais abatn,. Alors, un visiteur vint à la forge, un awre autres sans les œillères que leur avaient posé leurs aïeuls.
membre du clan des Assassins à en croire sa peau basanée, et il L'amour de la philosophie des Toréadors est égalé par les
parut surpris de me voir. Nous pari-âmes, et il inspecta aussi Assarnites qui débattent des sujets du Coran autant que des
mon travail, me faisant des compliments, les premiers que j'en- anciennes théories des Grecs, alors que les assassins assamites
tendais depuis des mois. Je ne pensais pas qu'ils me mellraiellt pourraient bien utiliser les réseaux de contacts et de faveurs
tant de baume au cœur. Puis il m'avoua combien il était rare que que les Toréadors tissent pour leurs usages personnels.
Maître Ibrahim tolère la présence d'un infidèle - je devais être
vraiment doué s'il prenait tant de peine avec moi... LES BRUJAHS
- Denis D'Orléans, issu de ses mémoires.
Écoutez les maintenam, comme ils crient devant les portes !
De nombreux Toréadors ont été attirés par la Terre Sainte Frères d'armes, prenez vos lances
même avant que Josué ne rassemble ses troupes au son des Et sachez que celle-ci est la toute dernière nuit.
trompettes, attirés par une architecture d'inspiration divine et J'entends déjà Tamar. la Rose du Mur Blanc, geignant sur
par l'art que cela représentait. Comme le fit constater un visi- celui qu'elle a perdu,
teur : "U semblerait que tout ce qu'ils fassent devienne une L'Érudit Relan, le premier à tomber, son nom aux lèvres.
TRIPTYQL'E SA.:-;GLANT 2
Les bêtes de guerre, et les créatures qu'elles chevauchent, porter longtemps la compagnle
démolissent les portes à nouveau ! Certains Épicuriens sont révulsés par l'apparence de leur
Alors laissez-nous mourir ensemble s'ils ne nous laissent corps, et refusent de rester dans la même pièce qu'eux.
pas vivre! Cependant, la perspicacité des Cappadociens concernant la
- Curran o'Liam, du clan des Brujahs, extrait de l'épo- mort donne de quoi penser aux membres les plus morbides des
pée "Hymne à Carthage" clans. Récemment, un Toréador, tailleur de pierre renommé,
commença à s'intéresser aux Cappadociens, pour des raisons
Les souvenirs de Carthage et de la Dacie sonnent encore
que peu de gens souhaitent imaginer. En fait, il a été chargé de
funestement aux oreilles des anciens Toréadors et de leurs
sculpter des gargouilles et s'est tourné vers le Clan de la Mort.
infants quïls éduquent dans la tradition humaniste. Les
dans l'espoir qu'ils pourraient avoir quelque chose à lui dire
anciens des clans débattent encore de philosophie et d'histoire
sur les habitants de !'Enfer. Jusqu'ici ses rencontres ont été
lorsqu'ils se rencontrent, et les anciens Brujahs viennent sou-
plutôt instructives ...
vent à la cour des Toréadors. Certains des plus anciens des
deux clans entretiennent des relations datant de la fondation de
Carthage, voire d'avant. Bien mal avisé serait le nouveau-né LES GANGIREL§
qui souhaiterait déterrer les racines de telles alliances.
Je les connais bien, mes frères et frères des animaux,
La plupart des plus jeunes Brujahs qui sont tombés amou-
Je les reconnais à leur chevelure d'elfes et à la spirale
reux de la chevalerie se retrouvent avec les Toréadors, parfois
au mécontentement des Zélotes. L'insistance des Toréadors sur Qu 'ils se peignent en bleu sur la poitrine.
les manières et le décorum peut irriter même le plus raison- Leurs chants sont gutturaux comme ceux des loups
nable des étudiants-soldats, et nombre de Brujahs partent en Qui saluent la lune lorsqu'elle montre sa face.
quête comme punition pour avoir perdu son sang-froid devant Lorsqu'ils entonnent leurs chants de bataille - criez fort,
la Déesse de r Amour. De la même manière, l'insistance des mortels,
Toréadors sur certains modes de conduite durant la bataille est Et fermez vos yeux par peur de ceux qui passent à vos côtés,
une épine de plus dans le tlanc de tous les Brujahs. Étant éle- Des tueurs de l'armée des noirs Formoriens,
vés dans une certaine sorte d'égalitarisme au sein du clan, les Assassins des dix mille de Rome la brillante
jeunes Brujahs qui ne sont pas de "noble naissance" subissent Dont les cris de guerre so111 meilleurs que les soupirs d'un
un choc quand ils sont confrontés à l'élitisme des Toréadors. amam !
- Padraic, "le Chant de Brendan"
Lorsqu'ils parlent des Gangrels, beaucoup de Toréadors
LES CAPPADOCllEN§ tendent à utiliser des mots tels que "nobles". "remarquables",
... J'avais pensé que je pourrais entrer rapidement et étu- "sauvages" - des mots qui pourraient tout aussi bien décrire
dier brièvemelll le corps en décomposition pour ma nouvelle les animaux des forêts. En ce qui concerne la quasi totalité des
traduction de "La Mort et la Vierge". Après tout, dans de tels Toréadors, il n'y a pas grande différence. Le seul endroit où les
endroits l'air est fétide et nocif, même pour ceux de notre clan Artisans et les Animaux sont parvenus à une sorte d'arrange-
qui n'om pas besoin de le sentir. Je venais de me détourner du ment ce sont les Îles Britanniques. En Irlande, on pourrait
corps que j'avais choisi d'examiner lorsqu'il s'assit et me même dire que les clans ont conclu une alliance, bien que per-
parla, s'interrogeant sur ma venue. Dès que j'eus récupéré de sonne n'aille jusqu'à dire qu'il s'agisse d'amitié. En
cette effrayante surprise, le cadavre m'assura qu'il faisait par- Angleterre, les relations sont moins chaleureuses, mais au
tie de La même grande famille que moi, et commença une moins chaque groupe accepte que l'autre fasse partie du pay-
démonstration de ses pouvoirs en prenant une fonne plus fami- sage. Dans d'autres parties de l'Europe, les Gangrels sont
lière, qui était celle d'un jeune homme à la fleur de l'âge, dont dédaignés, voire repoussés ouvertement, par les Toréadors.
la peau était aussi froide et pâle qu'une personne ayant vu Ceux qui sont suffisamment malchanceux pour être capturés
passer bien des années après l 'Étreinte. Nous commençdmes à sont traités comme des animaux par des Toréadors qui se
discuter de la nature de la mort, et il était tellement doué pour croient drôles ; les plus malchanceux sont parfois "gardés" à la
le débat que je faillis oublier l'approche du matin. Il me pro- cour, comme dans une ménagerie, bien que le "gardien"
posa de passer La journée dans les profondeurs de la crypte, ce conserve d'habitude jalousement le secret - un Gangrel qui
que je fis, ayant peu d'autres choix. Lorsque je me réveillais, se coule hors de ses chaînes est une vision terrifiante. En bref,
il était parti, mais un feu étrange brûlait dans mes pensées, à moins qu'un Gangrel ne parvienne à prouver qu'il n'est pas
"La Mort et la Vierge" était devenu moins une image qu'une qu'un sauvage musculeux revêtu de peaux d'ours, il n'ira
fenêtre sur cette étrange rencontre ... jamais très loin avec les Artisans.
- Sébastien de Tours, extrait de ses mémoires.
Lorsque l'on parvient à les faire lever le nez de leurs livres,
les Cappadociens sont de remarquables partenaires de débat LE§ DrrscrrPLE§ DE §JETH
sur la mortalité et l'approche temporelle. De nombreux ... Je préférerais me jeter à corps perdu dans le feu sacré
Toréadors frissonnent à l'idée de la mort et de la vie qui s'en- de la colère de notre Seigneur plutôt que de suivre un Serpent
suit ; pour un clan obsédé par la beauté, Les Cappadociens sont jusqu'aux portes que garde saint Pierre en personne. Ce qui est
des rabat-joie qui ne cessent de leur rappeler la fragilité de réellement effrayant c'est que les plus dévoués disciples du
toute forme de vie. Rares sont les Toréadors qui puissent sup- Serpent se laissent corrompre de leur plein gré, de bon cœur et
LIVRE l , LES TOREADORS
avec joie. En vérité, la plus grande des corruptions n'arrive
q11 'aux persormes inconscientes de se faire ainsi manipuler...
- Dieter Geisfleich, dans un discours donné à La cour Le plus étonnant de tour était ce Malkavien gardé enchaî-
d'Avignon né au trône comme un prophète ou un devin quelconque. Il uti-
lisait les augures pour travailler son don de double vue, usant
Au sud, où règne la décadence, les Séthites ont gagné une des entrailles de Bestiaux vivants - les très vieux ou très
effarante emprise sur les anciens éreintés. Ils encouragent les jeunes, les femmes, les vieillards encore robustes, ou tout ce
excès qui sont devenus habituels dans les Élysiums secrets, et qu'on lui apportait. Durant le remps où j'ai été votre invité, je
fournissent souvent les vitae droguées dans ces antres de l'ini- suis devenu aguerri à un grand nombre de visions déroutantes.
quité. De la même manière, ils encouragent le trafic du marché Cependant, voïvode, je pense que même vous, vous seriez ému
du vice - esclavagisme, drogues, prostitution. Un membre de par les souffrances infligées au Bétail pour qu'un Fou puisse
la Compagnie Blanche, Dieter Geisfleich, prétend avoir trouvé prétendre Livrer des prophéties.
des preuves que les Séthites (et certains de leurs homologues - lida Mateuz, dans une lettre au voïvode Vlad Jonescu
Toréadors) sont responsables des disparitions de femmes et
Bien qu'une grande majorité de Toréadors perçoive les
d'enfants sur le chemin d'un pèlerinage à travers le sud vers la Malkaviens comme de pitoyables aliénés macabres, les
Terre Sainte. Des Toréadors plus jeunes croient fennement que Toréadors du sud s'en servent beaucoup en tant que prophètes
les Serpents sont responsables de la perdition des anciens, et ou visionnaires. Des récits d'augures humains, de prophéties
les évitent comme les diables qu'ils sont. livrées par des crachats de sang ou d' utilisation des mortels
comme de supports pour certaines fonnes de divination ne
sont qu'un petit nombre des rumeurs injurieuses courant sur le
LIES LASOMBRA§ comportement des Fous - et plus d'un de ces récits est véri-
. . . En conclusion, Votre Excellence, je pense que Dame dique. Il est inutile de dire qu'un tel manque de maintien n'a
!souda sera un bon apport à natre cercle d'amis. Quelques pas rendu les Malkaviens chers au cœur de leurs fratries "plus
mois sans que nous ne venions à la cour ou répondions aux civilisées" ; non seulement leurs méthodes sont inefficacement
appels. et nous nous réjouirons de voir cette belle dame reve- cruelles, mais elles manquent de style.
nir en rampant vers nous. Le Toréador qui découvre un Malkavien raisonnablement
- Paulo de Castille, Lasombra, dans une lettre intercep- lucide utilisera cette source comme il le pourra. Les Fous sont
tée pour Don Simon Isidore considérés par beaucoup comme étant des alliés "endormis", et
... Quam à l'allusion ridicule selon laquelle je pourrais me un afflux soudain de Malkaviens aux côtés des Artisans fut suf-
retrouver à genoux suite à votre défection et à celle des vôtres fisant pour faire tourner un vent politique dans plus d'une cour.
de ma cour; puis-je rappeler à Sa Seigneurie que votre deman- Les Malkaviens qui savent se faire comprendre et interpréter la
de actuelle devant la Cour d'Amour n'est toujours pas accep- folie de leurs frères se feront tolérer, mais rarement aimer.
tée et que vous ne reviendrez pas avant que cela ne soit termi- Cependant, du point de vue des Toréadors, c'est suffisant.
En échange de toute aide que les Malkaviens fournissent,
né - nul apport d'une prestation judicieuse, d'accords ou
les Toréadors de l'Église ont travaillé à garder des relations
simples supplications ne vous donneront le droit d'entrée avant
amicales entre les deux clans en établissant que des monastères
cela. Mais, je vous en prie, continuez donc vos fanfaronnades
sous leur coupe s'occupent des troubles mentaux - rassem-
si c'est votre plaisir. Vos lettres nous amusent beaucoup.
blant les aliénés là où les Malk.aviens les trouveront facilement.
- !souda de Blaise, dans sa réponse à La lettre précédente.
Nombre de Caïnites pensent que les Ventrues et les
Toréadors sont les deux derniers adversaires en lice, se com- LES NüSF!ERATUS
baltant mutuellement pour obtenir plus de contrôle sur des Je donnerais beaucoup pour être débarrassé de Ximénes le
affaires d'état ou d'Église. Après tout, existe-t-il un couple Lépreux. Il ne me Laisse aucun répit, même quand je suis à la
mieux assortie que les étatiques Patriciens et les beaux messe. Aujourd'hui il s'esr frotté à moi alors que je sortais de
Artisans ? Suggérez cette idée à un Ventrue et il acquiescera. l'église, geignanr devant tous qu'il n'était qu'un pauvre men-
Proposez-la à un Toréador et il rira. diant sollicitant de quoi manger. alors qu'il ne désirait que
En privé, les Toréadors pensent que leurs véritables homo- m'embarrasser devant l'évêque. Qu'il ait aussi tâché d'im-
logues sont les élégants prédateurs Magistrats. Ce sont les mondices mon manteau de valeur avec sa broderie de la
Lasombras qui sont considérés comme au summum de la Vierge en fils d'argents m'a amené à Le haïr. Il exisre proba-
manœuvre politique et les Toréadors cherchent l'apogée en blement une tâche que je pourrais lui assigner et dont il ne
tout. Selon ce raisonnement, leurs opposants doivent donc être reviendrait pas...
également choisis au faîte de la réussite. Oh, les Ventrues ont - Vassily de Kiev, extraits de son journal
toujours leur place (quelqu'un doit bien lrouver les œuvres La plupart des Artisans moumrient plutôt que de se retrou-
d'art et s'occuper de la cour), mais leurs intrigues sont ver en compagnie d'une de ces créatures horribles et dégoû-
visibles, voire même prévisibles. Les Ventrues sont adéquats tantes. Les invectives constantes des Nosferatus sur le fait que
pour que les infants se fassent les dents en politique, mais les les premiers seront les derniers et que sais-je encore, mêlées à
Lasombras sont un défi ; des ennemis qui tiendront aussi long- une bonne dose de diverses autres oraisons pseudo-bibliques
temps que leurs opposants, et avec autanl de style et de grâce. les rendent ennuyeux. Même les ordres de chevalerie toréadors
TRIP'f 'fQUE SAl'iGLAl~T 2
32
voient leur patience malmenée par les excès des Nosferatus. Pour beaucoup de Toréadors, le fait que les Tremeres
Pour ceux qui cherchent des informations, les Nosferatus n'ont avancent à grand pas dans leur exigence d'une place parmi
pas de prix, mais les tentatives des Lépreux. pour éclipser la les autres clans est un outrage plus grand que la mort de
piété des Toréadors ne leur gagne pas d'amis. Les Nosferatus Saulot. Quelques anciens sont devenus mal à l'aise devant la
peuvent avoir d'excellentes sources d'information, mais le facilité avec laquelle les Tremeres ont accompli l'intégration
caveat emptor est la première règle des Artisans à l'achat de de Saulot, et craignent qu'ils ne cherchent bientôt d'autres
ces informations ; vérifier les secrets que vendent les prix. La lenteur des Toréadors à entrer dans la bagarre dans
Nosferatus nécessite souvent de se rendre où ils vont, ce que le but de protéger les Salubriens a conduit quelques
peu de Toréadors apprécient. Toréadors à penser qu'ils pourraient avoir des alliés parmi
li n'y a rien de pire pour un Toréador que de se faire pié- les Artisans, mais la majeure partie de la cour s'est moquée
ger par un Nosferatu se servant de !'Occultation pour changer de la récente et gauche tentative de corruption des
son apparence, un tour où de nombreux Lépreux commencent Usurpateurs.
à exceller. Un Nosferatu qui joue un tel tour peut gagner l'ap-
probation de ses compères, mais se fera à jamais un ennemi du
dindon de la farce. LES TznM1scEs
Ma chère, je ne saurais vous parler des merveilles que j'ai
vues ici. Vous parlerais-je des feux et des danses de la nuit de
LES RAVNO§ Kupala ? Vous parlerais-je de mon hôte Lui-même, dont Le visa-
En bref, mon seigneur, je demande réparation pour la perte ge pourrait se confondre avec ceux des Puissants et des
de ma fortune e1 de ma dignité, par faute de ce ruffian qui a osé Cou,vnnés ? Vous parlerais-je du labyrinthe au pied du don-
me défier en dehors de chez moi. Si vous n'avez pas la force de jon, où j'ai vu des choses que vous ne pourriez imaginer dans
vous occuper des éléments criminels de notre société - et en vos pires cauchemars ? Vous parlerais-je des leçons et des
vérité vous semblez les tolérer-alors il pourrait s'avérer utile dons merveilleux que mon hôte a éveillé en moi ? Ou devrais-
que les Caïnites de cette ville trouvent quelqu'un qui le pourra. je vous dire qu'à mon retour votre règne de beauté à la cour
- Seigneur Giacomo del Amici, dans sa lettre au Duc sera achevé lorsque j'en aurai fini avec vous.
d'Aquitaine Pierre Capet - Isabelle d'Aragon, dans une lettre à une rivale anonyme
Si un Toréador connaît un Ravnos qui ne soit ni voleur ni Certains Toréadors nouent d'étranges amitiés avec des
vaurien, il reste muet comme une tombe sous peine de voir son Tzimisces après s'être enivrés de ces visages finement mode-
statut régresser. Les Gitans sont fascinants et amusants comme lés. Parfois, les Tzimisces ont recours à la Vicissitude à l'égard
peut l'être un casse-tête chinois, mais La plupart des Artisans de Toréadors particulièrement persuasifs, leur accordant ainsi
refusent catégoriquement de fréquenter ou de s'associer à des un visage d'ange (bien que le prix de cet acte soit un sujet
Ravnos, car ils sont d'une "compagnie inconvenante". Ceux tabou). De même, les Toréadors qui aiment explorer la frontiè-
qui osent risquer le courroux et la désapprobation des anciens re entre la souffrance et le plaisir, préfèrent s'entourer de
passent du bon temps avec les Ravnos et deviennent des Tzimisces. Dans le sud, les Tzimisces sont très demandés par
acteurs achevés, mais après cela, ces Toréadors aventureux les débauchés qui aiment la souffrance, comme spectacle ou
seront toujours considérés comme indignes de confiance, et comme expérience. Les Toréadors plus jeunes et moins avides
seront les premiers accusés de toute malversation. Les d'expériences donnent du fil à retordre aux Démons, les trai-
Toréadors qui ont été la cible des Ravnos font de leur mieux tant comme des tyrans fous en les ménageant, mais en les évi-
pour garder la chose secrète, bien qu)l y ait toujours un sei- tant autant que possible.
gneur trop délicat pour demander à ce que le prince "fasse
quelque chose" à l'encontre de ces ruffians qui ont volé sa LES VENTRUE§
bourse de mendiant.
... Et donc, mon très gracieux seigneur, c'est avec grande
peine que je me dois de refuser votre invitation à votre cour de
lLE§ TREl\ŒIRJES Noël. Dame Franziska, de votre clan je crois, m'a envoyé une
Ce n'est pas tant que nous réprouvions leurs actes, mais gentille offre pour l'assister à sa cour de Noël et pour super-
viser certaines festivités. Le choix était évidem, particulière-
nous avons certaines idées sur ce qui nécessite ou non notre
assistance. La situation des Tremeres n'est pas de celle qui ment après que vous avez annoncé qu 'Edward Blackwater
choisirait les divertissements. Edward, bien qu'il soit un
11lcessite notre attention pour l'instant, c'est tout. Cela ne
Ventrue au caractère appréciable, manque lame111ablement de
signifie pas que je n'étais pas ennuyé par Les singeries de ce
votre bon goOt. Je crains que vous ne soyez embarrassé par ses
sorcier stupide et de son familier lorsqu'ils ont pénétré à la
efforts, swtour auprès de vos amis, et je cherche donc à vous
cour mal vêtus et faisant montre d'un effrayant manque de
épargner cette gêne. Je vous adresse à nouveau mes plus
bonnes manières. Je pense que l'humiliation qu'ils ont subie
humbles excuses de devoir manquer cette fête.
sera assez pour les laisser sans voix pendant les trois mois à
- Corbett Duncan, dans une lettre au Prince Gerholm
1•e11ir au moins, le temps pour moi de leur choisir une punition
plus longue. La plupart des Toréadors, si le choix Leur était laissé une
- Nicolette Foudet, en discussion avec Isabeau nuit de Sabbat, préféreraient être gouvernés par des princes
Monstre/et, Toréador elle-même ventrues. Les Ventrues laissent habituellement assez d'espace
LlVRE l , LES TOREADORS
aux Toréadors pour s'exprimer tout en les maintenant proches Supposons qu'un Toréador entende parler des lignées iso-
du pouvoir en tant que conseillers sociaux ou "porteurs de lées, il ou elle sera alors de cette opinion : "Eh bien, je ne les
beauté" à la cour. Les Patriciens consultent souvent les ai jamais rencontrées, mais elles ont une certaine réputation et
Artisans pour tout ce qui touche l'esthétique, laissant les je ne me mêle pas à ce geme de personnes." Le Toréador
Toréadors prendre presque toutes les décisions (tant qu'ils gar- moyen, à moins qu'il n'ait un compagnon qui a beaucoup
dent à l'esprit le but ultime de l'acheteur). Chaque clan trouve voyagé ou ait lui même fait d'étranges périples pour quelqu'un
chez l'autre des éléments qui l'intéressent. mais au bout du du clan, n'a probablement jamais rencontré de membre des
compte, les Toréadors trouvent les Ventrues trop prévisibles. Lignées et n'est pas susceptible d'en trouver un.
Cependant, les tensions montantes d'une des trop nombreuses
dissensions entre l'Église et l'État provoquent une dégradation
des relations entre les clans ; les états germaniques en particu- LES §ALUJBR[EN§
lier fomentent de regrettables désaccords. Et ainsi, cela finira de cette façon entre nous - de par mon
refus de perpétuer la vanité insultée d'un Caiizite vieillissant,
LES BAALIT vous aller me chasser du clan et du pays. J'ai beaucoup appris
en mon temps panni ces gens- beaucoup d'honnêteté. d'agi-
En réponse à votre dernière lettre, mon cher Chrétien, je
lité avec les amies, de dévotion tant aux causes sacrées qu'à
dois avouer que votre séjour chez les Chanteclercs vous a lais-
mon seigneur. Que vous approuviez les actes d'une cabale de
sé des séquelles. lis poussetzt leurs cris de guerre à la moindre
sorciers à moitié mortels aux rêves de grandeur vous fait plus
provocation, un avertissement généralemetlf poussé en vain.
honte à vous qu'à moi. Si vous prisez les faveurs d'Aucassin et
Vous voyez des démons partout, et vous vous alarmez telle une
vieille femme trouvant une souris dans ses réserves de grains. son contact desséché plus que notre amitié ou le salut, alors
Pour la demière fois, vos sources sont inexactes. li n'y a pas peut-être vaut-il mieux que nous nous séparions. Je ne cher-
de Baali à Rome. cherai pas à passer une nuit de plus en compagnie d'un chien
- Lucius Gaius Valerius, domestique.
dans une lettre à Chrétien de Campienne - Rafael (précédemment nommé Amadeo de Toscane),
dans une lettre à son sire
C'est difficile à dire, mais les excès les plus remarquables
des Toréadors sont inspirés par les Baali. J'ai bien dit inspirés On pourrait penser que les Toréadors montreraient un peu
et non réalisés. Dans la bonne vieille tradition des tentations d'intérêt à aider leurs équivalents Salubriens, car le Code de
démoniaques, les Baali préfèrent donner à leurs victimes la !'Honneur veut certainement que quelque action soit entrepri-
corde pour se pendre et laisser ensuite leur va-et-vient donner se. Pour une raison quelconque cependant, un silence surnatu-
la touche finale aux nœuds. La plupart des Toréadors frisson- rel a été la seule réponse des Artisans et de leurs chevaliers.
nent à la simple évocation de ces prétendus démons et espè- Les on-dit les plus fréquents provenant de sources "non
rent ne jamais rencontrer de Baali. Ceux des Artisans qui dési- fiables" (principalement des Nosferatus et des Ravnos) ont
rent étudier l'art de la douleur ou s'essayer à d'autres passe- suggéré que les chevaliers toréadors se sont bouchés les
temps moins "respectables" cherchent les Baali, mais même oreilles pour ne pas entendre les pleurs de leur fratrie suite à
eux le font avec prudence. Seuls les vrais fous ou les déchus une querelle entre Samiel et un Toréador connu sous le seul
nomment les Infemalistes des amis ou des alliés, mais hélas, nom d' Aucassin. Ce dernier avait demandé à Samiel de
les fous et les déchus ne manquent jamais. Les Cbanteclercs rejoindre sa bande de guerriers, mais Sarniel, peu impression-
prennent très à cœur la recherche et la destruction des Baali ; né par la dévotion du jeune Caïnite ou son don des armes,
malheureusement, de connaître la déchéance de certains de l'avait repoussé. Insulté, Aucassin jura de se venger de la
leurs camarades de clans les a réduits à l'inaction, et un cer-
famille de Samiel, et les bavardages veulent qu'un aïeul
tain nombre commence à regarder ailleurs afin d'éviter tout
Aucassin prit sa revanche en exigeant de tous les chevaliers
conflit ultérieur.
Toréadors qu'ils n'aient aucune relation avec les Salubriens.
LJE RISQUE-TOUT
LE§ MAGES De nombreux Toréadors recherchent les sensations fortes,
Rares sont les Toréadors qui comprennent la magie en pas nécessairement en quête de l'émotion en elle-même, mais
dehors des simples tours de salon ou des illusions. Après tout, comme moyen de casser la routine de leur existence éternelle.
Ces Caïnites sont méprisés par les leurs, particulièrement
la magie est ce que pratiquent ces Tremeres déloyaux n'est-ce
depuis que beaucoup "perdent leurs bonnes manières" : ils
pas ? Les Artisans ne comprennent pas les différences entre
s'essayent à la sorcellerie et à la fausse magie, voyagent dégui-
magie buissonnière, tours de salon et Vraie Magye; pour eux,
sés en compagnie de bardes et de ménestrels, entrent dans des
de la magie est de la magie et un magicien reste un magicien.
ordres religieux, fraient avec des hérétiques, s'engagent dans
Les Toréadors prennent garde à ne pas se mettre de magiciens
des compagnies de mercenaires ou s'acoquinent avec d'autres
àdos, mais ne changeront pas leurs manières pour eux et ne les
phénomènes surnaturels. Si un risque-tout se contient, tout va
chercheront pas, à moins d'être dans la plus grande détresse.
bien. S'il est hors de contrôle et source de disgrâce pour le
clan, c'est totalement autre chose. La pression des pairs, sou-
L ES FÉES vent l'un des meilleurs moyens de faire filer droit les
membres, signifie peu de chose pour ceux-là, et les anciens
En Irlande, en Angleterre ou aux autres endroits où l'on
sont susceptibles de prendre des mesures extrêmes pour s' as-
peut encore trouver des fées, de curieuses amitiés se nouent
surer que les embarras potentiels seront traités efficacement.
entre Toréadors et fées. Plus d'un Toréador a sombré dans la
folie ou dans un ardent désir sans espoir après avoir posé le i:ASCÈTE
regard sur un sidhe ; un Caïnite s'est ainsi brûlé les yeux en
Ces Toréadors s'intéressent à la beauté trouvée dans la
disant que jamais plus il ne reverrait une telle beauté. Les fées
sérénité des esprits qui les environnent. Ils sont souvent décon-
sont souvent modelées par les envies créatives des Caïnites et fits par la dissolution au sein de l' Église ou des leurs. Plutôt
de Jeurs protégés mortels, alors que les Caïnites voient en elles que de tenter en vain une réforme, ces idéalistes déçus se reti-
une inspiration équivalente à celle de la visite d'un ange (ou rent du monde afin de vivre dans une grotte, une ceHule ou tout
d'un démon). autre endroit isolé. Une telle décision n'est pas prise à la légè-
En Irlande, les Caïnites ont découvert une légende accom- re, ne serait-ce que pour des problèmes d' approvisionnement.
modante pour couvrir leurs traces - celle de la leanhaun Nombre de rumeurs prétendent que ces Ascètes caïnites entraî-
sidhe. Connue pour être la muse des poètes, cette belle (et nent leur corps à n'accepter que du sang animal, ou même à
légendaire) fée est aussi buveuse de sang, tuant Lentement ses rester sans nourriture pendant plusieurs jours d'affilée. La plu-
artistes protégés alors même qu'ils créent des œuvres enthou- part des Toréadors (ainsi que plusieurs Caïnites) pensent que
siastes en son honneur. Quelques Toréadors se sont servis de l'entraînement rigoureux qu' un Ascète est censé infliger à son
cette Légende de la leanhaun sidhe pour expliquer la disparition corps est Je premier pas sur la route de Golconde ; les
de certaines de leurs victimes, mais à leurs risques et périls; il Salubriens recommandent souvent cet apprentissage à ceux
est question dans la légende d' une maison noble du nom de qui vivent dans des sociétés extrêmement laïques (comme les
cette sidhe et qui aurait été gravement insultée par les agisse- Toréadors). Les Ascètes se retirent rarement complètement de
ments des Caïnites. Plus récemment, un jeune moine toréador l'appel de leur sang. Un certain nombre pratiquent le mysti-
de l'Église celtique s'est attaché à une croix pour accueillir le cisme, s'instruisant auprès de sufis et d'ermites. Ils produisent
soleil après avoir achevé un évangile de saint Mathieu magni- de remarquables écrits et autres poésies sur les relations entre
fiquement enluminé. Bien qu'aucun lien précis n' ait pu être Dieu et l'Homme. Cette diversion théologique est peut-être la
établi entre cette mort et la légende, ses amis parlent craintive- principale raison pour laquelle la majeure partie des Ascètes
ment d'une beauté aux cheveux de braise qui a été vue en sa Toréadors ne sombrent pas dans la folie suite à l'ennui de la
compagnie durant ses dernières nuits ... solitude.
LIVRE 1 , LES TOREADORS
les bellâtres, les artisans fantasques. les pad1v11es snobs -
Le Protecteur aime à créer des gens, les modelant et les tous sont Épicuriens d'une manière ou d'une autre. Certains
aidant à fournir le meilleur d'eux-mêmes - et, ce faisant, ils sont des snobs actifs, d'autres prennent goût au luxe après
font honneur à leur Protecteur. Pour ces patriciens engagés, leur avoir vécu si longtemps sans, et les autres pensent simplement
qu'un tel comportement est norma1 pour un Toréador. Il est
art est de modeler une nouvelle personnalité à partir de l'an-
rare de voir un Épicurien débraillé ou sale, mal se conduire (il
cienne. Ils les prennent sous leurs ailes protectrices, pourvoient
a des manières courtoises - la politesse c'est autre chose) ou
à leur éducation, les habillent et les transfonnent en tous points.
boire dans des récipients mal nettoyés. Nombre de Toréadors
Les manières d'un Protecteur pour repérer un diamant dans sa
commencent par être Épicuriens puis trouvent d'autres niches
gangue varient, mais iJ va fournir tous les efforts possibles pour
moins stéréotypées avec le passage du temps.
obtenir le produit le plus fini possible. et le sujet ferait bien d'en
faire autant. Les méthodes d'apprentissage varient également,
et certains n'hésitent pas à user de la violence la plus alannan- NüU\TEAUX IPOUVOKIR§
te pour être sOrs que leurs poulains retiennent les leçons. Les
Protecteurs présentent souvent l'addition par la suite, attendant DES JDKSCKPLITNE§
des récompenses de leurs "projets" précédents pour services
rendus. Les bénéficiaires avisés y répondent ; les fous rechi-
gnent et subissent les foudres de la colère d'un Caïnite outragé. DESSEL."! DE LAlRTlSTE
Un Patron qui se sent manipulé ou trompé est une vision (AUGURE 3)
effrayante, car il ne s'arrêtera pas avant d'avoir récupéré son
dû, de préférence tiré du cœur de son protégé ingrat. Avec ce don, un Toréador peut pénétrer !'"âme" de l'objet
d'art inanimé qu'il examine. Par cet examen, il peut faire une
IL:H U~lAi'\f lST E interprétation plus fine de l'œuvre, voire même glaner l'état
d'esprit de l'artiste, sa relation avec son œuvre et les étapes du
Les Humanistes croient en l'être humain - tout spéciale-
processus créatif. Presque tout cela se découvre à travers une
ment en sa capacité de commettre le plus grand bien ou le pire
série d'images de plus en plus pâles au fur et à mesure qu'il
des maux, en sa créativité et sa valeur. Ces Caïnites ne croient
regarde dans le passé de I' œuvre. Certains Toréadors se servent
pas que les humains soient parfaits (loin de là), mais pensent
de cela pour critiquer une œuvre, alors que d'autres utilisent la
que les mortels ont des choses à offrir et que les Caïnites ont
capacité à surveiller Jeurs protectorats pour une rébellion silen-
tort de les repousser. Les Humanistes luttent pour garder actifs
cieuse ou de la tri.ss.esse ou pour obtenir la "véritable" histoire
les liens avec leur propre humanité, ce qui leur procure une
cachée dans une lettre de proposition d'alliance.
certaine empathie avec les luttes et les peurs des mortels. Leur
Jusqu'ici. cette discipline s'est montrée inutilisable sur du
art est généralement le plus beau que les Toréadors puissent
matériel "vivant'', comme du théâtre, des chansons ou des
créer, car il atteint le cœur de son public et lui rappelle, bien
musiques en cours de jeu, ou des histoires en cours de narra-
que brièvement, tout ce qu'il a perdu. Les Humanistes mortels
tion. Les hypothèses sur ce fait suggèrent qu'un tel travail
qui choisissent d'agir de concert avec les Toréadors s'en sor-
dépend des intentions de 1'exécutant et les transmet, même
tent souvent moins "endommagés" que s'ils avaient traité avec inconsciemment, alors qu'une pièce inanimée ne sera pas
certains autres Caïoites. "corrompue" de cette manière.
Système : Le joueur teste Perception + Augure (difficulté
LE C ALI GULIEN 7) pour chaque œuvre qu'il veut examiner. Le nombre de suc-
Ces Toréadors sont appelés ainsi par leur fratrie en réponse cès détermine ce qu'il perçoit du travail. La difficulté augmen-
à ce que des vampires sérieux perçoivent comme de J'horreur et te s'il souhaite "lire" une œuvre commune à plusieurs artistes
de la honte commises au nom du clan. Les Caïnites devenus ou un long travail dans le temps. La surcharge d'informations
Caliguliens ne pensent pas seulement que les vampires sont des obtenues sur les cathédrales. les châteaux el leurs semblables
monstres et devraient le prouver, mais aussi que les "besoins du laisseront le Toréador à l'état de légume bafouillant.
sang" doivent être satisfaits sans remords ni pitié. Ils étudient I succès - Sentiments généraux, pas de contexte histo-
l'art interdit de la torture et s'entraînent sur des sujets vivants, rique ("L'artiste était mélancolique quand il a créé cela.")
affinant leur travail jusqu'à ce que le cri de la victime atteigne 2 succès - Plus précis, vagues sentiments historiques ("TI
une note plaisante. De tels Caïnites se baignent également dans était mélancolique quand il a commencé, mais devint plus heu-
te sang (dans des maisons de bain romaines quand ils en trou- reux comme le travail avançait. Peut-être commençait-il à
vent) afin de garder l'apparence de la mortalité, et affichent aimer son travail ou quelque chose a changé dans sa vie.")
souvent leur nature de vampire devant tous les mortels qu'ils 3 succès - Des détails apparaissent, accompagnés d'une
rencontrent sans exception. Ils usent de la liste des Sept Péchés grande ligne historique assez vague ("Il n'aimait pas son sujet
Capitaux pour se souvenir des divertissements de leurs soirées, au début, et détestait son œuvre à cause de cela, mais après un
et sont enclins à murmurer "Amusant... ", "Je n'aurais pas certain temps, il a commencé à se faire au sujet et son travail
pensé à ça ... ", ou "Copieur... " à l'écoute d'histoires cruelles. s'en ressentit.")
4 succès - Vous avez une idée précise de l'état émotionnel
JL:ÉPICURIEN de l'artiste, et une idée assez précise des étapes de la création.
Cette image de !'Épicurien est celle qui vient le plus faci- 5 succès - Vous pouvez voir toutes les étapes de la créa-
lement à l'esprit lorsque l'on imagine un Toréador "typique": tion et savez comment l'artiste se sentait à chaque étape.
TRJPTYQrE SA."\GLAl'\iT 2
L A CHANS ON DE MÉLU §ITNE
n'entend pas le message souhaité inconsciemment - les mots
(IPRÉSENC E 6) sont aussi clairs que si le Toréador les avait prononcés (ce qu' il
Nommée d'après la légendaire ancêtre (probablement une a fait). Ceux qui utilisent ce pouvoir régulièrement le décrivent
fée) des maisons d'Anjou et de Lusignan, ce pouvoir donne aux comme une manière d'imaginer que le message réel est enfoui
Toréadors la possibilité d'en influencer un autre par le chant. Si parmi les autres mots, par exemple : "Bonjour. Je suis
I' Artisan peut formuler sa demande en chantant, ses mots Comment allez un Toréador et vous ? Ainsi Voudriez-vous
deviennent aussi forts que des ordres presque irrésistibles. entendez mes faire mots une promenade ?" La foule entend :
Système : Utiliser ce pouvoir coûte deux points de sang et ''Bonjour. Comment allez-vous ? Voudriez-vous faire une pro-
un point de volonté, puis le joueur doit écrire à l'intention du menade?", alors que la cible entend : "Je suis un Toréador, et
Cooteur à la fois la suggestion qu'il souhaite mettre en valeur ainsi vous entendez mes mots."
dans la chanson et la forme même de la chanson. Tous ceux qui Ce pouvoir a nombre d' usages pratiques. L'un des plus
peuvent l'entendre doivent tester leur volonté (difficulté 8) ou populaires est de "faire la morale" à un serviteur ou un cheva-
se soumettre aux conséquences du chant sans en avoir lier (alors que vous le félicitez pour un travail bien fait). Un
conscience. L'effet dure tant que le Toréador chante ou tant autre sert durant des relations diplomatiques, lorsqu' un
que la cible n'est pas sortie de J'aire d'effet du chant. Les Toréador déclame des phrases attendrissantes sur la bonté d'un
ordres qui poussent la victime à s'éloigner de la présence du roi, alors qu'il fait savoir à sa cible qu' il pense que le roi est un
Toréador peuvem être repoussés sur un jet de volonté supplé- poltron risible. Dans les Cours d' Amour, le Double Sens s'est
mentaire (difficulté 8) dès que la voix enchanteresse s'éteint. prouvé inestimable lorsqu'une dame souhaite faire savoir à un
Ceux qui entendent, mais qui ne sont pas dans le voisina- chevalier qu'elle accepte ses attentions mais doit publique-
ge du Toréador, peuvent ressentir quelque chose d'étrange ment les refuser. Une telle habileté sert également les messa-
(Astuce + Subterfuge. difficulté 8) à propos de ce chant gers ; le plan le plus sensible peut être caché dans les plus terre
enchanteur, mais rien d'autre qu'un chanteur particulièrement à terre des vers dénués de sens.
doué. Les Toréadors qui peuvent entendre ce genre de repré- Système : L'effet dure un tour par point de volonté dépen-
sentation tombent de suite en extase. sé. Pour savoir si le message est bien passé, le joueur doit tes-
Bonus supplémentaire : la connaissance de ce pouvoir ter Manipulation + Empathie (difficulté de 10 moins la per-
réduit de 1 la difficulté de tous les jets relatifs au chant. ception de l'interlocuteur).
38
vous craignent car vos paroles peuvent assurer l'échec ou le
l:ÉlViiNE JCE GR[§E succès d'un jeune vampire.
Citation : Une suggestion des plus iméressanres, messire, Concept : Une faible femme ? Pas vraiment. Certains
mais avec tour le respect que je vous dois. je pense que vous pourraient être ravis de votre apparence, mais sous la chair se
avez dl2 négliger un dirai/. Puis-je ?.. cache de l'acier froid. Vous savez ce qui doit être fait et com-
Antécédents : En tant que seconde fille d'un noble mineur, ment le faire, et n'avez que peu de patience envers ceux qui
vou~ étiez fréquemment délaissée et ignorée au profit de vos veulent le pouvoir sans en avoir les tripes. Peu de personne,
deux frères et de votre sœur aînée. AJors qu'ils bénéficiaient de voire aucune, ne perçoit votre vrai rôle à la cour. Ce serait une
l'a11ention, de l'éducation et des babioles, vous étiez repoussée, erreur cependant. Spécialement alors que vous pouvez faire en
réprimandée et ignorée. Vous ne posséderez rien du domaine sorte que le fat qui vous a insultée soit anaché à l'extérieur
puisque vos frères vont héri1er et vous devez attendre que votre pour allendre l'aube.
sœur se marie avant vous (et laide comme un pou comme elle Conseils d' interprétation : Vous changez d'humeur
l'est. cela peu prendre du temps), et tout ce que vous avez à comme d'autres de chemises - toutes les occasions sont
l'aire est d'attendre de vieillir et de vous occuper de parents bonnes à saisir. Certains pourraient vous trouver artificielle,
plaintifs. Au tendre âge de l I ans, vous avez décidé de prendre mais vous préférez appeler cela de l'adaptabilité. Que vous
votre vie en main et de faire les choses à votre manière. désiriez charmer avec esprit un chevalier de la cour ou répri-
Comme on vous ignorait souvent. vous pouviez espionner mander ce même chevalier plus tardivement dans la nuit pour
les leçons de vos frères et avez ainsi appris à lire et à écrire. avoir échoué dans la tâche que vous lui aviez donnée, vous
Vous avez appris à écouter aux pones, à parler pour ne rien pouvez vous recomposer un personnage en un clin d' œil. Aussi
dire, à mentir sans rougir, à tenter les aucres sans vous com- longtemps que vous gardez une mesure d'avance sur ceux que
promettre. Vous avez appris la politique en écoutant votre père vous devez channcr ou éconduire - et jusqu'à préseol ce fut
et vos frères, et en interrogeant tous les visiteurs du donjon. le cas - tout se passe bien.
C'étrul bien beau, mais vous désiriez un combat. Équipement : Des vêtements de cour à hl mode, un rosai-
Quelqu'un a dO lire vos pensées car votre re, un des romans de Marie de France.
père et vos frères sont morts, les uns
après les autres, de maladies ou d'acci-
dents. Pendant que votre mère et votre
sœur se lamentaient, vous vous êtes .....--O&~~ili;i, lliji..--4"'
occupée d'assurer votre vie et celle de S,01, S AUTOCRAU :.... <Tif , U•
JtO(IJl. \rnt.,.I ,SÉ>llÇTRICt RU\ ••
vos héritiers. Maintenant. Les rôles sont
renversés, et votre famille a soudain
de.\ raisons de regretter de vous avoir
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:::::,
'"""""'
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1g
O
jamais entendu parler de tels
usages, alors vous avez pris votre ins- - ,.... 1 ;;;:-;~~· 6~~-;; - r.Xl....D.'Clt -
1--~_--+:~:
1 0000000000
trument, avez mis votre tunique au col
ouvert et êtes allé voir la Dame
dans ses appartements privés.
TRIPTYQUE SA:-.:GLAl\ï 2
40
Conseils d' interprétation: Vous gardez habituellement le
LERMKTE silence, non par respect d'un vœu, mais de votre plein gré.
Citation : Par Ta grâce, je vois, et par Ta mC1in je suis Vous craignez que vos paroles ne vous fassent manquer les
aveugle. murmures du Seigneur, ou alors vous pensez que vos mots
Antécédents : Vous avez été Étreint au début du siècle seraient trop lents et maladroits pour traduire vos pensées.
pour vos dons de compositeur de chants, et au début vous n' ai- Quand vous parlez, votre voix paraît rouillée et basse par
miez pas votre non-vie. Cependant, comme le temps passait, manque de pratique, et votre discours est lent et songeur.
vous en êtes venu à détester puis à mépriser votre existence. Équipement : Des parchemins et une plume, une robe de
Vous étiez miné par des rêves concernant les horreurs que vous bure, une cordelette pour la nouer, des sandales.
rencontreriez après la Mort Ultime, et votre musique sonnait
faux à vos oreilles. Vos pairs essayèrent de nombreux moyens
afin de vous faire reprendre vos esprits, de la religion à la
débauche, mais sans succès. Dans Je dernier quart du siècle,
vous aviez opté pour le suicide, dégoûté comme vous l' étiez
par vos camarades de clan dissolus et par l'Église. C' est alors
que vous avez entendu parler d'un Caïnite, un Toréador qui
vivait en ermite. passant son temps dans la contemplation.
L'idée paraissait si étrange que vous avez décidé d' aller véri-
fier cette information par vous-même.
L'ermite vous accueillit gracieusement dans sa caverne et
vous raconta son histoire. Comme vous. il avait été un
membre fêté et adulé du clan, et comme vous, il s'était lassé
de cette vie stagnante. Il était venu Jà sur le conseil d'un
Salubrien, qui avait partagé son savoir du mysticisme et de la
foi avec un étudiant avide de changement. En laissant partir
son étudiant, le Salubrien lui avait demandé de partager son
savoir avec d'autres tout aussi avides. Au moment où le
Caïnite avait achevé son récit, vous saviez que vous alliez
devenir son élève.
Après cinq années passées avec votre mentor, vous avez
voyagé à Byzance où vous avez passé votre temps en contem-
plation à côté d'un monastère. Vous avez foitié deux autres étu-
diants aux voies de la pensée et avez récemment commencé à
écrire vos prières et expériences mystiques. Vous espérez
transformer vos anciens talents de com-
positeur de chants en quelque chose de
~0~1, N <Tl •• , PÉNITENT
plus valable, et envisagez de revenir Jot11:.t·• 1 ..\TrTn.·o , SOUTArRE RE>YC,t,.
dans le monde que vous aviez l•HM.OMUL'Ji.1 Cu.~ TOOtADOR ,·,""°...,- ERMITE
- - - - - - - Al'J1UHl"l'~ _ _ _ _"""'....,_
quitté pour pouvoir faire partager Pttn:t01.•g ~'lAI. M.K.,T\L
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Cappadocien très volontaire, votre moralité se réduit comme
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Polodqut _ _000000
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ARTISANAT MO()()() .DlAlllE c-..... o
sentir le toucher divin vous effleurez quand vous êtes dans les DIJ!:Ol1.eS_oooooo • • • • • • • ooo ........ ,,... .1 o
affres de la création, et vous pouvez aller très loin pour _ _ _ _000000
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atteindre cette sensation. Vous pensez que vous partagez vos
expériences avec les autres, et souhaitez souvent que vous
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puissiez mieux les aider à comprendre les motifs de vos actes. l~:--l-:--+-:---l: 00000000001 1
TRIPTYQUE SANGLA:\"T 2
42
Hat note tatotf que ••
pluateata
~tècle~ ê'éc oa
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Il éttt[t 1111(' fois /lfl(' --r.,rhu\,r 1ui crO.!f111( a~'<Jti· IJU-eût( lttj,OtJée ,,u ch,111t et t1tl,1it
véritttbfemt'fft outMII le S(lfl le ;,/J,s pur 1ue /JJ1isn11t créer èes 111crt.els (Ill èes û11111c,rt.efr
• ~ "Elle était Cd/Mb!e è'em'ôfiur ses <1r1t1tfnrl'es èr clm:> pe11è,111t èes heures. et stt 1/(ILX ét'11it
' § ~ sipure qu 'el!e t.fr,1it Ln &n11es èes J/t'Jt.l.' èe ses t1uèite11rs. ~Puis. ,me nuit. elle e11te11èit 11m·
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femme fie clumter u11e simple &111e11tt1tion à' s"" amant ti,fi:èèle et s116t'tn11e11t. elfe ré,1-
... lis,1 q11e les so111111ecs '{Il elle at111it atteints n'étaient que les eollà1es èe1'l111t !es 11umta._({11es
;f/i'~ .. - ,111ssi ll'ttgll'!tlf'S que cetre /,elfe créttture e.w'strrttft. so11 pr"pre trt1t111ti ne ser111é q11e le
~i._1 sif/le111e11t è i.m mfimt jdce d l, musùrue l'es sphères.•Au co111111e11ee1t1N1t. elle étdit folle
~~ ''" rntrr rt chercha par tN1s les 1110.JleffS d !tr èémgrer et 11 lr ;,erère. cc111111e elle !'tn1,lf't j:lft
~~ (/Vec ses ;,airs. !IUIIS .>dlJS :,11ccès. CluU{lle chemin èc Ut t'e11,get111ce .>"eml.,la[t lui être fermé.
~ et ses t,dent., s,wil1l11ie11t effir<és et Si!IHS t'nleJtr. 'rû,aleJfleHt, sa jttlo11,ie St> 1111N1 èll ch11-
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/'"''r. elle cherehtt '" nVn!e .A11 6({.r èu tertre. Ut fière ~"rraèc,r i111;,lortt ro111me u11e m/tt11t
~E& !a clumce èjpprenl>re ,n'ec cette fée. "Je ~'~11s en prfe. Je ctJnsentfr'!fs d nïmporte 1""(. Nt-
~ e!!e. 'Dtsefg11ez-,noi ce ,rue Vo11s sa~'ez ! .A;,rès réflexion (et s être bien tflnusée èt• ·""''
;j_~"" 11ncle:me 11011rs11fv1mte). ln {e1t1111e ôes sièlrrs !'ti11 'ftt1 so11J le tertre ;,c,ur un 11pprentiss11._1fc.
Le ,\épdrt c\e la r{c,réttfôr 11e ;,tts.,11 f'IIS àurperru. 'Des chants fùrent écrfts sur cette
/,r,11 'e cht.1nte11se qui.~'enternt soHs fr t:ertre fieri1'"' ;,011r le bien ~r S(!ft 11rt. .Ces c/J,111-
~ S<'II.~ t11l11ie11t toutes l,r 111ême fi>,. 11u èétrfmtwt èe ce11.r 111! aiment l,1 11anëté : &1 ,·l,1111te1,-
~~ se partie èepuis !,w..t1te111;,.,· est censée ret'emr èe sous le tertre 'è,,ms 1111 siècle (c,u ,\e11x. 011
~./~ cti11 - les eJ·tù,1nuo11s Nf/~re,1t) en ,n,1itrisd11t les secrets èe ÙI 11111s1if11e èu "8e1111 "fn,;,le.
~f'uls. selon rrrt,'lliu>s llisicws f'UI~ l1Ctres èes c/1111tS(lflS. elle ttssom 'frtl SA terrf/Jle VtWffean-
il
~ . z ce. 111êltt11t !a m11gie èh fées et l art èes ~oré11l>ors. 6fen 111e les r111°5t111s èe cecte r/t>>ttft'/111-
12? • ce 11e S(lient /'"·' fi,rcé111n1t très c!11ires.
~ .l'es 'Tt,rédl'(!l'S se,,.fi/,les ért1rtem ceJ· rh,mts c,lln111e èe> billet 'esées NI èes foèdf..ft>.f
:;J?~ ;,se11~0-11rt.hurièm1cs. L'es plus pn,èents PLÎtissc11t leurs re{lfdes loin ,'es forten•ssn fée-
~t,;.-;t,nques refT(!lflJttées. et ccm;,tent les année> ml œ,1 st1r /'/,orizo11. "Et.. cert,:.1i11es 11uits. Aft1rs
~~· 111e ln "forétt~crs ef{ecwent èes céff/,rnt[onJ 11 !'extérieur. ils enunèe11t èe> ,mmque>
~ se,116&/,{es li celles èes fées sortir èu s,,! rlumt:mtt ;,!us Jtfl{'{flffi:111e111e11t que ttlut re 111 i1s
~ dv11ie11l ;,~, enteflère ;111r111i les 111c,rtelf c,11 lu (Ài'nftes. 'l:,1 l>e tels ii1stA11ts. ln jlrccessftut
~~ entière s arrête. pétrf{iëe. e,,111me !es ~"réaèors se C()J1ce11trent f'Nlr s11,:fir cl,114ue 11ote.
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~ - ' l i ••_,,. èeux 1't1i.'<
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TRIPTYQt;E SANGLANT 2
46
Elle mit les deux parchemins de côté et se demanda ce
qu'elle aJJait répondre à ses deux compagnons Tremeres. La
distance qui la séparait du cœur de son clan n' avait en aucun
cas atténué sa participation au conflit continuel opposant
Etrius à Goratrix. Tous deux se tournaient vers elle pour des
conseils. Comme d'habitude, elle leur en donnait - leur rappe-
lant toutefois de ne pas oublier le sang qu'ils avaient en com-
mun et les liens qui les unissaient face à une hostilité grandis-
sante à 1'extérieur des portes des fondations.
Meerlinda chassa de son esprit le contentieux entre ses
deux compagnons anciens et se concentra sur des préoccupa-
tions plus urgentes : l' octroi de !'Étreinte à son apprenti.
Concentrant son attention sur le glyphe qu'elle avait placé
sur la porte de son laboratoire, Meerlinda scruta la pièce dans
laquelle Geraint encore maintenant s'occupait des préparatifs
du rituel d' Étreinte. Elle regardait avec approbation tandis
que Je jeune apprenti mettait en place les bols d'étain qui
contiendraient sa force vitale. Une fois , Geraint fit une pause
afin de prendre une grande respiration, se forçant visiblement
à soulager les tensions manifestes dans les muscles tendus de
son cou. Ses lèvres bougeaient légèrement, articulant les
mots du serment de loyauté qu'il allait réciter immédiate-
ment après sa transformation . Meerlinda hocha la tête en
signe d' autosatisfaction tandis qu 'elle le regardait pendant
encore quelques minutes. Satisfaite de ce qu'elle avait vu,
elle rompit la connexion avec le mécanisme d'observation et
retourna à ses affaires pour répondre aux demandes d'Etrius
et de Goratrix.