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2. L’énergies renouvelable la plus utilisée :


l’énergie biomasse

2.1. La diversité de la bioénergie Figure 2 1


Le cycle CO2 végétal
Tous les êtres vivants sont constitués de molécules
contenant du carbone : glucides, protéines et lipides.
Le cycle du carbone intègre toutes les réactions per-
mettant aux êtres vivants d'utiliser le carbone pour fa-
briquer leurs tissus et libérer de l'énergie.

Les végétaux représentent le point de départ du cycle


du carbone. Grâce à la photosynthèse, les plantes ab-
sorbent le carbone de l'air (CO2) et l'intègrent à leur
21
propre biomasse (feuilles, bois, racines, fleurs et
AIE, Word Energy Outlook, Source : PERACOD
Paris 1998. D’après Jargstorf fruits). Cette matière organique sert de nourriture aux
2004.
organismes hétérotrophes (consommateurs). En libé-
rant de l'énergie, la respiration des hétérotrophes et
des autotrophes renvoie du carbone dans l'atmo- Figure 2 2
sphère (CO2). La diversité de la bioénergie

Une forêt en croissance constitue un puits de car-


bone, c'est-à-dire qu'elle fixe (ou accumule) plus de
carbone par la photosynthèse qu'elle n'en libère par la
respiration. Lorsque la forêt atteint sa maturité, l'équi-
libre se crée entre la quantité de carbone fixé et la
quantité de carbone libéré. La forêt contient évidem-
ment du carbone dans ses arbres.

Grâce à la photosynthèse, les plantes peuvent créer 2.2. L’importance de la biomasse


de la biomasse et stocker ainsi de l’énergie. L’utilisa-
La biomasse – ou plus précisément la biomasse tra-
tion énergétique de la biomasse, c’est-à-dire du bois,
ditionnelle – est essentielle à l’égard de la demande
des déchets biologiques, du lisier et d’autres subs-
énergétique locale dans de nombreuses régions du
tances d’origine animale ou végétale, représente un
monde en développement . La biomasse est la pre-
potentiel important pour la production de chaleur et
mière source d’énergie pour plus de 2,4 milliards de
d’électricité, ainsi que pour la production de carburant.
personnes dans les pays en développement21. Dans
la majorité des régions du monde, elle est facilement
disponible auprès de la plupart des personnes en si-
tuation de pauvreté et fournit une énergie vitale à un
coût abordable pour la cuisson et le chauffage.

Les industries basées sur la biomasse sont une


source significative pour le développement de l’en-
treprise, la création d’emplois et sont une source de
27
revenus dans les régions rurales .22 L’énergie bio- Figure 2 3
masse moderne, au contraire est largement utilisée Les taux d’énergie primaire au Sénégal
dans de nombreux pays industrialisés ainsi que dans
certaines parties du monde en développement. Dans
les zones à climat favorable et avec une gestion pro-
pre en adéquation avec des pratiques écologiques
appropriées, la biomasse moderne peut être une
source durable d’électricité aussi bien que les com-
bustibles liquides et gazeux. La biomasse par consé-
quent n’est pas seulement une source énergétique
vitale pour beaucoup aujourd’hui, mais est probable-
ment en voie de devenir une source énergétique im-
portante dans le futur, à condition que des mesures
appropriées soient adoptées pour une exploitation du- % de la consommation totale d’énergie

rable. Source : SIE 2007 Sénégal

Un certain nombre de faits parmi les suivants ont été 2.3. La biomasse : l’énergie des pauvres
constatés et ont suscité un intérêt croissant dans
À l’échelle mondiale, l’Agence internationale de l’éner-
l’énergie biomasse :
gie (AIE) estime le taux de biomasse à 14 % de la
• elle contribue à la réduction de la pauvreté dans les 22
consommation énergétique totale. Le taux de com- Les paragraphes suivants sont
pays en développement ;
bustibles fossiles (pétrole, gaz naturel, et charbon) tirés de : Dossier thématique
n°11, Renewables 2004. Kare-
• elle répond aux besoins énergétiques en perma- dans le monde s’élève à 79 %. kezi, Stephen et al. : Traditional
nence, sans transformation onéreuse des installations ; Biomasse Energy : en amélio-
Cependant, au niveau régional, la part de biomasse rant son utilisation et en transi-
• elle peut être stockée et elle est disponible de ma- tant vers une utilisation
énergétique par rapport à la consommation énergé-
nière flexible ; énergétique moderne.
tique totale, varie de façon significative. Les régions
• elle peut fournir de l’énergie sous toute forme selon en développement (Afrique, Asie et Amérique Latine) 23
Elle est en grande partie neutre
les besoins des personnes (combustibles liquides et ont des taux record de consommation énergétique de en émissions de CO2. Seul est
gazeux, chaleur et électricité) ; émis le dioxyde de carbone qui
biomasse en comparaison aux régions développées. a été absorbés par les plantes
• elle peut améliorer l’élimination des déchets au ni- lors de leur croissance. Pour le
De plus, dans les pays développés (Organisation de bilan de CO2, le fait que le bois
veau des communes et fournit en même temps de pourrisse en forêt ou qu’il soit
Coopération et de Développement Économique,
l’énergie ; brûlé ne change rien.
OCDE), on a constaté pendant les 30 dernières an-
• elle est pauvre en dioxyde de carbone 23 ; et nées une légère augmentation de la part de biomasse
• elle peut aider à rendre les terres jusqu’alors im- énergétique alors que les pays non membres de
productives et dégradées, cultivables en augmentant l’OCDE montraient une diminution.
la biodiversité, la fertilité du sol et la rétention d’eau.
En règle générale, la diminution de la part en énergie
Des statistiques disponibles indiquent que le taux de biomasse a été plus importante dans les régions dont
biomasse dans la consommation énergétique mon- le taux de développement économique est élevé.
diale est resté à peu près stable ces 30 dernières an- Ainsi, l’Asie a-t-elle réduit sa dépendance en bio-
nées. L’énergie biomasse représentait respectivement masse de 48 à 25 % pendant la période 1971-2001,
14 % et 11 % de la consommation énergétique finale alors que l’Afrique la diminuait de 62 à 49 % pendant
dans le monde en 2000 et 2001. ce même laps de temps.

En Afrique subsaharienne, environ 50 % de toute Cependant, les chiffres relatifs (biomasse en % du


l’énergie primaire provient de la biomasse, au Sénégal total) ne sont pas complètement représentatifs car
sa part se chiffre à 47 %. même si la dépendance relative en biomasse décroît
(comme en Afrique), le nombre absolu de personnes
faisant confiance à la biomasse pour faire la cuisine et
28
se chauffer augmente, augmentant ainsi la pression de personnes dépendent de l’agriculture pour vivre.
sur les ressources naturelles et l’environnement.
Cette situation est alarmante : réduire la dépendance
Comme une forte dépendance dans l’utilisation de la aux combustibles issus de la biomasse ainsi qu’équi-
biomasse cause souvent des destructions environne- librer l’offre durable et la demande doit être considéré
mentales, érosion du sol et perte de la fertilité du sol, comme une priorité en matière de politique énergé-
elle représente un double inconvénient pour un pays tique renouvelable. Ainsi – spécialement en Afrique –
pauvre. les mesures prises pour réduire la dépendance aux
combustibles issus de la biomasse sont-elles une très
Des projections pour l‘année 2030 montrent qu’avec
grande priorité comme l’adoption de stratégies pour
une même tendance, le nombre de personnes dé-
réduire la pauvreté même si ces deux contraintes vont
pendantes de la biomasse va augmenter en Afrique
de pair.
de 27 % (figure 2-4)24.

Pendant qu’en Amérique Latine (-33 %), en Indonésie


(-25 %) et en Chine (-9 %), on verra leur dépendance 2.4. La biomasse au Sénégal
décroître, le nombre de personnes dépendant de la Le Sénégal est doté d'un climat tropical sec caracté-
biomasse dans tous les pays en développement, aug- risé par des températures modérées sur la côte qui
mentera de 10 % et représentera un total de plus de s'élèvent au fur et à mesure que l'on s'en éloigne. Du
2,6 milliards de personnes en 203025. nord au sud, quatre zones se distinguent:

Figure 2 4 • une zone aride ou semi désertique avec des préci-


Nombre de personnes dépendant des pitations annuelles ne dépassant pas 350 mm ;
combustibles issus de la biomasse (projection)
• une zone semi-aride, de type continental sec, com-
24 prise entre les isohyètes 350 et 700 mm ;
Ces projections sont issues
de l’avant-dernier World • une zone subhumide, moins chaude et moins sèche
Energy Outlook 2002
(d’après Jargstorf 2004) et
que la précédente, caractérisée par une pluviométrie
ne tiennent donc pas compte annuelle oscillant entre 700 et 900 mm ; et
des derniers scénarios dont il
a été question. • une zone humide caractérisée par d'importantes
25 précipitations de l'ordre de 1 000 à 1 200 mm.
D’après Jargstorf 2004.
La répartition des ressources sylvogénétiques est condi-
26
http://www.fao.org/do-
tionnée principalement par le gradient climatique. On dis-
crep/004/x6815f/X6815F04.ht tingue six zones écogéographiques correspondant à
m [consulté le 3 juin 2010 à
11h36] différents types de formations végétales26.

En million d’individus Figure 2 5


Source : CSE 2009 :
Source : AIE, ’World Energy Outlook’ Paris 2002, Zones écogéographiques du Sénégal
d’après Jargstorf 2004 annuaire de l’environnement

L’utilisation de la biomasse et la pauvreté ont encore


une autre conséquence : partout dans le monde (et
en particulier en Afrique), le plus pauvre des pauvres
utilise des déjections animales comme combustible
domestique. Comme conséquence, en plus d’encou-
rir davantage de dangers pour la santé qu’avec le
bois de chauffage ou avec les résidus agricoles, ils
privent les sols de substances nutritives précieuses.
En effet, en utilisant des déjections animales, les per-
sonnes réduisent la fertilité des sols exactement là où
ils en ont le plus besoin : c’est-à-dire là où beaucoup
29
lanites aegyptiaca, fortement affectée par l’homme.
Suivant les sols et la topographie, des espèces telles
Le delta et la vallée du fleuve Sénégal couvre, sur
que Acacia senegal, Commiphora glutinosum appa-
une bande de 10 à 15 km de large en moyenne, un
raissent. En saison des pluies, les dépressions dans
ensemble de plaines alluviales et de hautes terres sa-
les zones basses collectent les eaux de ruissellement
bleuses s’étendant sur la rive gauche du fleuve, de
et forment des mares temporaires autour desquelles
Bakel à l’embouchure. Cet ensemble se décompose
s’organise la vie pastorale. En saison sèche par
en trois sous-zones distinctes :
contre, l’activité est polarisée par les forages qui res-
Le Walo, partie inondable caractérisée par des sols tent les seuls points d’eau ce qui a conduit à une forte
lourds avec un potentiel de rendement très élevé. La dégradation de la végétation sur un rayon de 3 à 5 km
strate arborée est très nettement dominée par Acacia autour des dits forages.
nilotica var.tomentosa (Gonakié) qui constituait une
Le Ferlo latéritique est caractérisé par une strate li-
vaste forêt ripicole dont seuls quelques vestiges sub-
gneuse relativement dense, dominée par Pterocarpus
sistent encore dans les dépressions “Hollaldés“ et
lucens, souvent rencontrés en formations assez
dans certaines zones classées. Le tapis herbacé a
pures. Selon la topographie et le type de sol, d’autres
quasiment disparu sous l’effet des sécheresses per-
espèces comme Acacia seyal, Combretum micrathum
sistantes, laissant le sol exposé à l’action érosive de
et Combretum nigrican lui sont associées. La strate
vents forts et constants.
inférieure, moins consistante qu’au nord, est dominée
Le delta se distingue nettement du reste de la vallée par Loudetia togœnsis sur les sols gravillonnaires.
par la présence de sols glaiseux alluviaux, souvent
Les sécheresses successives et les feux ravageant la
salins, et un climat fortement influencé par la proximité
zone chaque année ont accéléré la dégradation de la
de la mer. Plusieurs types de végétation se sont im-
couverture végétale, créant de vastes plages de mor-
plantés : mangrove dans les zones accessibles à la
talité dans la strate arborée et appauvrissant les pâ-
marée, prairies herbeuses entrecoupées de larges
turages.
plages dénudées ou parsemées d’espèces halophiles
Le système rural de production est essentiellement
(Tamarix senegalensis) dans les zones basses inter-
pastoral, avec une agriculture vivrière très limitée.
médiaires, et steppes arborées sur les hautes terres
sableuses où dominent Acacia tortilis et Acacia sene- La zone du Bassin Arachidier concentre environ la
galensis. moitié de la population totale du pays et 60 % de la
Le proche Diéri, zone des hautes terres bordant le lit population rurale sur le quart de sa superficie (25,16
majeur du fleuve. Par ses sols sablonneux et sa vé- %).
gétation de type steppe arbustive à arborée, le Diéri L’intense activité agricole, dominée par la culture de
est nettement différent de la zone avec lequel il forme l’arachide et des cultures vivrières (mil et maïs), et la
un système agrosylvo-pastoral cohérent. La strate su- densité de la population (50 à 140 hbts/km²) ont for-
périeure de la végétation est dominée par différentes tement perturbé l’environnement et donné au paysage
espèces d’acacias. C’est aussi la zone des cultures son aspect typique de savane parc à Acacia au nord
pluviales (en régression cependant du fait des pluies et au Centre, à Borassus et Adansonia à l’ouest, et à
aléatoires) et du pastoralisme. Cordyla et Sterculia au sud et à l’est.
La zone Sylvo-Pastorale se subdivise en deux par- Les sols légers, de type brun, brun rouge et ferrugi-
ties relativement distinctes : une partie nord-ouest neux, continuent à se dégrader sous l’effet combiné
(Ferlo sableux) caractérisée par des sols bruns- des sécheresses, de l’érosion et de l’abandon de la
rouges et des sols ferrugineux, et une partie sud-est jachère forestière. Dans les régions de Fatick et de
(Ferlo latéritique) où les dépôts sableux disparaissent Kaolack, la salinisation affecte de plus en plus les sols
au profit de sols gravillonnaires avec, par endroits des du bassin inférieur du Sine et du Saloum.
affleurements latéritiques.
Le Ferlo sableux est marqué par une végétation de
type pseudo-steppe arbustive à Acacia tortilis et Ba-
30
La zone des “Niayes“ occupe une bande d’environ Daniellia oliveri (Santan) et Sterculia setigera (Mbepp),
5 km de large longeant le littoral de Dakar à l’embou- et d’un sous-bois à combrétacées et hautes grami-
chure du fleuve Sénégal. Elle est caractérisée par une nées.
succession de dunes et de dépressions interdunaires
La zone sud ou Casamance se distingue nettement
au fond desquelles apparaissent souvent des mares
de celle du reste du Sénégal par une plus grande hu-
liées aux fluctuations de la nappe phréatique.
midité et une végétation plus dense.
Dans les dépressions interdunaires, les sols sont
Cette zone constituée par le bassin hydrogéogra-
riches et constituent un milieu idéal pour les cultures
phique du fleuve Casamance, se subdivise en trois
maraîchères et fruitières, largement dominantes dans
sous-zones relativement distinctes, se présentant
le système de production, lequel intègre la pêche,
comme suit.
l’élevage et les cultures pluviales.
La Basse Casamance, correspondant à la région ad-
La végétation, d’origine sub-guinéenne dans la partie
ministrative de Ziguinchor, englobant le bassin versant
sud, a été fortement dégradée par l’action anthro-
inférieur et l’estuaire du fleuve Casamance. La végé-
pique et par les sécheresses qui ont notamment en-
tation est de type forêt demi-sèche dense dans sa ma-
traîné la baisse de la nappe phréatique, la salinisation
jeure partie. Elle est caractérisée par des espèces
progressive et l’accélération du processus d’envahis-
sub-guinéennes dont les plus représentatives sont
sement des bas-fonds par les dunes vives.
Khaya senegalensis (Caïlcédrat), Afzelia africana
Cette zone renferme l’une des plus belles réussites du (Linké), Parinari excelsa (Mampato), Ceiba pentandra
Service forestier en matière de reboisement, avec les (Fromager), Chlorophora regia (Iroko), Antiaris afri-
plantations côtières de Casuarina equisetifolia (Filao), cana (Tomboiro), Detarium senegalense (Detah) et
sous forme de bande discontinue de 200 à 500 m de Erythrophleum guineense (Tali). Dans l’estuaire, la
large, de Cayar (Thiès) à Sag (Ndar-St Louis), sur une mangrove à Rhyzophora et à Avicennia prend le re-
longueur de 182 km. lais sur une superficie d’environ 100 000 ha. La végé-
La zone du sud-est correspond à la région adminis- tation y est également en régression depuis au moins
trative de Tambacounda et se caractérise par une vé- deux décennies, sous l’effet des défrichements, des
gétation de type soudano-sahélien et des sols peu coupes anarchiques, des feux de brousse et de la sé-
profonds sur cuirasse latéritique. cheresse. Le système rural de production comprend
essentiellement une agriculture avec une forte com-
Elle est principalement une zone de culture et d’éle-
posante de riziculture aquatique dans les vallées, un
vage, mais constitue avec la Casamance, la princi-
élevage à base de bovins, de type sédentaire semi-
pale région d’exploitation forestière des produits
extensif, une exploitation traditionnelle des ressources
ligneux (bois énergie et bois d’œuvre) et produits et
forestières, portant essentiellement sur le bois de feu,
services non ligneux (fruits, chasse, exsudats, plantes
les fruits et les exsudats, et sur une exploitation des
médicinales,...).
ressources halieutiques. Ce système, relativement ho-
L’exploitation forestière ligneuse de type minier, les
mogène et stable, a été perturbé par les sécheresses
défrichements agricoles, les feux de brousse et les
et l’exploitation forestière commerciale.
pratiques pastorales destructrices, ont entraîné une
La Moyenne Casamance couvre environ tout le dé-
dégradation accélérée de la végétation et des sols,
partement de Sédhiou. La végétation est caractérisée
notamment le long des voies de communication et
par des formations de type soudano-guinéen où do-
des vallées dans les deux tiers nord.
minent Daniellia oliveri, Pterocarpus erinaceus et
Le Parc National du Niokolo-Koba (914 000 ha), oc-
Bombax costatum. Elle est aussi très affectée par la
cupe une bonne partie du tiers sud, non encore tou-
sécheresse (disparition de la mangrove, mortalité
ché par le front charbonnier, et constitue actuellement
dans la palmeraie), l’intensification des coupes et les
la plus grande réserve faunique nationale.
feux de brousse. Le système rural de production est à
Le couvert végétal est formé d’espèces ligneuses peu près du même type que celui de la Basse Casa-
soudaniennes, généralement dominées par Bombax mance, mais avec un cheptel plus important et des
costatum (Kapokier), Pterocarpus erinaceus (Venn), cultures pluviales plus variées et plus extensives.
31
La Haute Casamance (Fouladou) couvre les départe- Les sols, en général, sont exploités de manière ex-
ments de Kolda et de Vélingara. La végétation est cessive et pas durable, autant dans le domaine de
marquée par des peuplements à affinité soudano-gui- l’agriculture que dans le pâturage/élevage.
néenne qui s’éclaircissent au fur et à mesure qu’on
Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimen-
progresse vers l’Est. Quatre espèces prédominent
tation et l’agriculture (FAO), environ 40 000 hectares
dans la strate arborée Bombax costatum, Pterocarpus
de forêts (Forest Ressource Assessment 2010) dis-
erinaceus, Daniellia oliveri et Cordyla pinnata, avec un
paraissent chaque année au Sénégal. Seules dans
sous-bois composé de combrétacées et de Termina-
quelques zones hantées par le conflit armé et forte-
lia macroptera (Wolosa). Le tapis herbacé, plus
ment minées de la Casamance, la végétation fores-
consistant que dans le reste de la zone, est essentiel-
tière récupère et se régénère 27. Les autres parties du
lement composé de hautes graminées.
Sénégal se démarquent par des défrichements illégaux.
Le système rural de production est dominé par les cul-
La colonisation des espaces boisés par l’agriculture
tures pluviales (arachide, mil, maïs et coton), un éle-
extensive a accentué les phénomènes de déforesta-
vage semi-extensif et l’exploitation forestière
tion. Le front forestier recule de plus en plus sous la
(notamment les produits non ligneux).
pression des principaux centres de consommation du
Le Sénégal en tant que pays sahélien rencontre les bois énergie (bois et charbon de bois) que sont les villes.
problèmes typiques de cette zone climatique. Depuis
L’approvisionnement en énergie du Sénégal repose à
la première grande sécheresse au cours des années
47 % sur l’usage traditionnel de la biomasse. Le bois
70, les pluies sont irrégulières et des saisons sèches
de chauffe et charbon de bois demeurent la principale
prolongées plus ou moins fréquentes. L’équilibre éco-
source d’énergie de cuisson du pays. Ils constituent
logique est fragile. Dans la quasi-totalité du pays, on
environ 85 % de la consommation en énergie des mé-
rencontre les phénomènes de la déforestation et l’éro-
nages.
sion des sols souvent liée à la salinisation des sols.

Figure 2 6
Zones de végétation Sénégal Source : CSE 2009 : annuaire de l’environnement

27
Projekterschließung Senegal.
Erneuerbare Energien und
ländliche Elektrifizierung. Län-
derreport & Marktanalyse. Par
Rolf Peter Owsianowski: Bun-
desministerium für Wirtschaft
und Technologie, GTZ, p.40.
32

Figure 2 7
Transport de bois
combustible

Source : GIZ / Kamikazz

Figure 2 8
Vendeuses de charbon
de bois à Kaolack

Source : GIZ / Kamikazz

2.5.  La crise du bois combustible forêts et arbres. Au stade 2, la demande en bois éner-
gie dépasse l’offre, une surutilisation des ressources
2.5.1.Les étapes de la crise du bois énergie biomasse prend place. A cela s’ajoute l’agriculture ex-
La crise du bois énergie a été étudiée dans de nom- tensive qui aggrave la disparition des ressources.
breux pays dans le monde. Il y a des similitudes frap- Si la biomasse en tant que source d’énergie renouve-
pantes, peu importe que nous considérions les pays lable est surexploitée, la revanche de la nature inter-
africains, asiatiques ou d’Amérique latine. vient : le développement de la couche de végétation
L’historique des problèmes de la biomasse en Europe est détruit et il en résulte une destruction de la base
pendant le Moyen Âge révèle quelques similitudes. écologique à moyen et long terme. L’érosion du sol
Cependant cela concerne non pas les besoins pour la peut être dû à l’effet du compactage du sol sur des
cuisson mais pour la construction navale qui provo- grandes surfaces, ou bien du ruissellement incontrôlé
quent la désertification dans les pays méditerranéens. des eaux de surface, ou bien encore à cause des me-
sures de conservation qui n’auraient pas été suffi-
Mais principalement on a pu observer des étapes si-
samment bien observées. Mais toutes ces causes
milaires dans toutes les régions du monde.
individuelles sont en relation directe avec l’abattage
Dans le système traditionnel d’approvisionnement en incontrôlé des arbres et par conséquent les dégâts
bois énergie durable (stade 1), l’offre en bois naturel causés à la couche.
est de loin supérieure à la demande. La consomma-
Comme la pénurie de bois augmente, de plus en plus
tion de bois énergie ne diminue pas les ressources en
de personnes se tournent vers les déjections comme
33
combustible domestique accélérant ainsi les dégâts • l’augmentation de la population qui nécessite un ac-
environnementaux car elles manquent dorénavant de croissement de la production ; et
fertilisants pour les champs et la fertilité des sols est • la baisse des rendements compensée par une aug-
réduite. mentation des surfaces cultivées.
Au stade 3, l’approvisionnement en bois naturel est En effet, après quatre siècles de stagnation, la popu-
réduit de façon drastique et la population doit se tour- lation du Sénégal connaît depuis une centaine d’an-
ner vers d’autres alternatives, comme les résidus agri- nées une progression constante avec une nette
coles et les formes modernes d’énergie domestique accélération depuis 25 ans passant de 3 millions en
comme le kérosène, le gaz de pétrole liquéfié (GPL) 1960 à 12 millions aujourd’hui. Ce phénomène consti-
ou l’électricité (voir section 2.6. Les stratégies pour tue un changement radical dans la relation “homme –
combattre la crise du bois énergie). espace“ et représente un élément déterminant en ma-
tière de gestion des ressources naturelles. L’espace
Au stade 3 de la crise du bois énergie, on voit aussi
autrefois infini se trouve en voie de saturation relative.
que les sources d’énergies renouvelables deviennent
Le système de production fondé sur la reconstitution
de plus en plus acceptées depuis que les combusti-
de la fertilité par jachères naturelles de longue durée
bles traditionnels issus de la biomasse sont si rares et
(15-25 ans) n’est plus adapté car consommateur d’es-
onéreux que ces nouvelles formes d’énergie devien-
pace. Le temps de jachère est de plus en plus court
nent économiquement viables.
(moins de trois ans), parfois les champs sont cultivés
Pour exploiter durablement l’énergie de la biomasse sans relâche. Ceci entraîne un appauvrissement des
bois – aussi bien pour les besoins domestiques que terres. Les rendements diminuant, pour conserver la
pour les usages de construction et de fabrication de même production, les paysans choisissent d’étendre
meubles etc. – il va falloir introduire à ce stade des les surfaces cultivées. Ceci est rendu possible par
mesures sociales en matière de sylviculture et de une main d’œuvre disponible au niveau des unités de
plantation de bois après que les forêts naturelles aient production et par des terres libres prises sur les es-
été détruites. paces forestiers.

2.5.2.Crise du bois combustible au Sénégal Lorsqu’il y a saturation du terroir villageois, les popu-
lations peuvent décider de migrer et ainsi occuper les 28
Les principales causes de la dégradation des forêts Les paragraphes suivants
espaces interstitiels entre les finages villageois (zones sont tirés de : Mise en aména-
sont nombreuses et variées. Elles sont dues à trois
sylvo-pastorales), voire même les forêts classées (le gement participatif des forêts.
principales causes : Bilan d’une expérience réussie
cas le plus exemplaire est la colonisation de la forêt au Sénégal. Par Chesneau,
• les causes naturelles (sécheresse et ses corollaires de Patha en Casamance). Les conséquences directes Christophe ; Bodian, Mamadou
Lamine et Decleire, Yanek.
comme l'érosion éolienne, la salinisation, l'acidifica- sont d’une part la disparition des forêts qui sont les PSACD. Décembre 2002.
tion, etc.) ; zones de pâturage et de productions de multiples pro-
• les causes anthropiques (feux de brousse, exploi- duits mais aussi la multiplication des conflits fonciers
tation abusive des ressources forestières, l’extension notamment entre éleveurs et agriculteurs autour d’une
des terres agricoles, surpâturage, etc.) ; et ressource forestière commune. Cependant, la limita-
• les causes d'ordre institutionnel et juridique (régle- tion des aires de culture et l’augmentation de la po-
mentation inexistante, non ou mal appliquée, incohé- pulation va obliger les paysans à une intensification
rente, etc.). qui permettra une augmentation des rendements.

Une différentiation chiffrée entre ces facteurs n’a pas Les paysans sont obligés de trouver un équilibre entre
encore été entreprise. Il manque ainsi des informa- les espaces agricoles et forestiers. Ces deux espaces
tions détaillées sur l’ampleur et les causes du phéno- qui ont une utilisation et un mode de gestion spéci-
mène de la déforestation au Sénégal. fique sont étroitement liés dans le système de pro-
duction et sont ainsi tous deux indispensables. Par
L’extension des terres agricoles est sans aucun doute
exemple les animaux allant pâturer durant la journée
une des raisons principales de la déforestation 28.
et étant parqués la nuit dans les champs réalisent un
Celle-ci est la conséquence de :
transfert de fertilité.
34
Les feux de brousse font partie du “paysage“ des sa- tions riveraines qui trouvent dans la forêt un ensem-
vanes sèches et les espèces sont assez adaptées au ble de produits indispensables à leur survie mais cela
feu. Il est surprenant de constater que même en sai- est aussi inquiétant au niveau national notamment pour
son sèche, un mois après le passage d’un feu de nou- l’approvisionnement des ménages en combustibles li-
velles feuilles vertes apparaissent sur les arbustes. gneux.
Cependant si le feu passe chaque année, comme
D’après une étude du Centre de Suivi Écologique, les
c’est devenu le cas dans de nombreuses forêts, il re-
forêts au Sénégal couvraient une superficie de 12,7
présente un véritable fléau. Il brûle la régénération na-
millions d’hectares soit 64,5 % du territoire national,
turelle, endommage les grands arbres qui peuvent en
en 1981. En 1990 cette superficie serait passée à 11,9
mourir et détruit le fourrage herbacé qui constitue la
millions d’hectares, ce qui correspondrait à une ré-
principale source d’alimentation pour les animaux.
gression du couvert forestier de 80.000 ha/an. Selon
Le surpâturage est lui dû à une augmentation du la FAO, ce rythme se serait ralenti à 40.000 ha/an. (Fo-
cheptel et à la diminution des espaces sylvo-pasto- rest Resources Assessment 2010).
raux. Cependant il est rare de rencontrer des zones
de surpâturage proprement dites. En effet, les éle-
veurs assurent une gestion optimale des pâturages. Figure 2 9

Les zones “surpâturées“ sont souvent des zones de Dégradation des zones forestières au Sénégal

passage de transhumants.

Parmi les causes de dégradation de la forêt, la pro-


duction de charbon de bois peut avoir un effet parti-

29
culièrement dévastateur de par sa concentration
PAN/LCD, 2004. Plan d’ac- spatiale et son intensité. Dans les années 60, plus de
tion national de lutte contre la
désertification. Rapport
80 % du charbon de bois était produit autour de Thiès
2004. D’après : Définition de et dans la région du Sine Saloum (70 à 200 km de
la Forêt au Sénégal , dans le
cadre des mécanismes de Dakar). Vers la fin des années 80 déjà, plus de 80 %
mise en œuvre de la Conven- de la production totale de charbon de bois se situait
tion Cadre des Nations Unies
sur les Changements Clima- dans les régions de Tambacounda et de Kaolack (voir
tiques. Ministère de l’Environ-
la section 2.9.1.).
nement, de la protection de
la nature, des basins de ré-
tention et des lacs artificiels /
Les impacts écologiques et sociaux de la production
Direction de l’environnement du charbon peuvent être attribués à la production réa-
et des établissements clas-
sés. Par Niang, Amsatou ; lisée autour des villages. Suite à une coupe, la pres-
Thomas, Ibrahima ; Kaire, sion continuelle exercée par les villageois compromet
Maguette. Décembre 2009.
la bonne régénération de la forêt. Les villageois ne
peuvent pas attendre les 4 à 12 ans, nécessaires à la
forêt pour repousser, pour aller chercher les produits
dont ils ont besoin. De plus, les bûcherons n’épar-
gnent aucune espèce, pas même celles utiles aux
paysans comme le Cordyla pinnata (Dimb) par exem-
ple.

Les conséquences directes de cette dégradation des Source : Evolution du potentiel des forêts du Sénégal de 1965 à
1994 (source Eros Data Center/CSE, 2004)
espaces forestiers sont importantes pour les popula-
Une autre étude chiffre la superficie totale de terres
dégradées au Sénégal à environ 12,5 hectares. La
principale cause de dégradation serait l’érosion hy-
drique29.
35
Figure 2 10 demande en bois énergie peut être diminuée de ma-
Dégradation des terres au Sénégal nière considérable, si l’on se préoccupe de distribuer
de façon massive ces cuisinières.

2.7. Stratégies pour combattre


la crise du bois combustible au Sénégal

Au niveau national, nous retrouvons les mêmes types


d’approches. Une des priorités du gouvernement du
Sénégal, formulée dans la Lettre de Politique Secto-
Source : PAN/LCD, 2004
rielle du Sous Secteur des Combustibles Domestiques
(LPSSCD) 30, consiste à assurer de manière durable,
2.6. Stratégies pour combattre l’approvisionnement des ménages urbains et ruraux
la crise du bois combustible en énergie de cuisson, en diversifiant les sources
d’énergie, tout en préservant les ressources fores-
Dans une situation où la demande en bois combusti- tières et l’environnement.
ble est de loin plus importante que l’offre, il existe prin-
L’État sénégalais s’appuie sur quatre axes principaux
cipalement deux types d’approches :
dans sa stratégie nationale pour équilibrer l’offre et la
• des interventions au niveau de l’approvisionnement, demande en combustibles domestiques.
c’est-à-dire en augmentant l’approvisionnement dura-
De surcroît, l’État a subventionné, pendant longtemps,
ble en bois combustible (en aménageant des forêts
le prix du gaz butane en tant que produit de substitu-
ou en plantant des arbres) ou en introduisant des
tion pour compenser la dépendance unilatérale aux
substituts aux combustibles (comme le kérosène, le
réserves de biomasse traditionnelle en matière d’éner-
GPL, l’électricité, la cuisson solaire, le biocharbon,
gie domestique. Ceci a eu un impact très positif,
etc.) ; et
surtout en milieu urbain. Cependant des contraintes
• des interventions au niveau de la demande, à sa-
financières ont nécessité la suppression de cette sub-
voir en améliorant la transformation énergétique et les
vention en juin 2009, ce qui provoque une augmenta-
rendements de l’utilisation finale (par exemple en in- 30
tion progressive des prix du gaz pour le consommateur
Signée en février 2008
troduisant des cuisinières à économie d’énergie, en
final. En conséquence, on pourra s’attendre à un
améliorant l’efficacité des cuisinières existantes).
accroissement de la demande en bois énergie et ainsi
En pratique, ces approches ne constituent pas de une plus forte exploitation des ressources forestières.
réelles alternatives mais doivent être suivies parallè-
Les axes principaux d’intervention de l’État sont les
lement et ce, dans un effort conjugué.
suivants :
Cependant, il y a un net avantage pour les interven- • promouvoir des combustibles de substitution, no-
tions au niveau de la demande parce qu’elles pré- tamment les biocombustibles, le biogaz et le biochar-
sentent généralement des résultats beaucoup plus bon issu des résidus agricoles et de plantes nuisibles ;
rapides.
• améliorer l’offre en bois énergie à travers l’aména-
Ceci ne veut pas dire que les programmes d’aména- gement des forêts ;
gement et de reboisement ou les stratégies pour la • réadapter le cadre institutionnel, réglementaire et
substitution inter combustible ne soient adaptés, c’est fiscal ; et
qu’ils prennent beaucoup de temps jusqu’à ce qu’ils
• capitaliser les expériences vécues pour une diffu-
soient efficaces. Les premières mesures devraient
sion des meilleures pratiques.
tendre à réduire les besoins spécifiques en combus-
tible grâce aux cuisinières améliorées. Comme ces S’y ajoute comme stratégie la réduction de la de-
cuisinières sont disponibles sur le marché et nécessi- mande en combustibles par la promotion des four-
tent beaucoup moins de temps qu’habituellement, la neaux améliorés.
36
2.7.1. L’aménagement participatif l’offre en bois énergie tout en préservant les forêts.
des forêts au Sénégal
L’Allemagne, par le biais de la Mission Forestière Al-
Le Sénégal est engagé dans une dynamique de fores- lemande et la GIZ à travers son programme PERA-
terie participative depuis 1990. Depuis la loi sur la dé- COD 31 et des programmes précédents comme le
centralisation de 1996, certaines compétences dans la PAGERNA et le PSPI, soutient cette approche depuis
gestion de l'environnement ont été conférées aux col- 35 ans32.
lectivités locales. La politique forestière met ainsi l’ac-
D’autres bailleurs comme l’USAID et la Banque Mon-
cent sur une approche plus participative de la gestion
diale, à travers leurs projets Wula Nafaa et PROGEDE,
des ressources forestières. Les collectivités locales et
s’investissent aussi dans la gestion participative des
les populations riveraines s’engagent de manière dy-
forêts au Sénégal.
namique dans la gestion et l’exploitation de ces ressources.
La procédure consiste en l’élaboration et la mise en
En sachant que les combustibles issus des forêts de-
œuvre de Plans d’Aménagement et de Gestion (PAG)
meureront encore longtemps la principale source
des forêts, validés par les parties prenantes telles que
d’énergie de cuisson du Sénégal, il est absolument in-
les services forestiers, les collectivités locales, et im-
dispensable d’arriver à un état d’équilibre durable
plémentés par les organisations paysannes de base.
entre la consommation et la régénération des forêts.
Le PAG repose sur des analyses de la richesse et des
Un des procédés pour atteindre cet objectif est l’amé-
potentialités de la forêt et assure que les ressources
nagement participatif des forêts par les populations
forestières soient gérées durablement afin de répon-
locales. Il vise, entre autres, à assurer durablement
dre aux besoins sociaux, économiques et écolo-

31
Programme pour la promo-
tion des énergies renouvela-
bles, de l'électrification rurale
et de l'approvisionnement Figure 2 11
durable en combustibles do-
mestiques
Régénération naturelle de
la forêt de Dankou
32
Citons à titre d’exemple le
Projet Sénégalo-Allemand de
Reboisement de la Zone
Nord (1975-1980), le PA-
GERNA (1993- 2003), le PSPI
(1994-2004) ou le PERACOD
(depuis 2004). Source : GIZ / Kamikazz
Le PERACOD, programme
pour la promotion des éner-
gies renouvelables, de l’élec-
trification rurale et de
l’approvisionnement durable
en combustibles domes-
tiques, a pour objectif d’amé-
liorer l’accès des populations
rurales aux services énergé-
tiques modernes. L’accent
est mis sur les énergies re-
nouvelables, particulièrement
Figure 2 12
sur des systèmes solaires et Pare-feu au niveau
l’utilisation durable des com- d’une forêt aménagée
bustibles non-fossiles.

Source : GIZ / Kamikazz


37
giques des générations présentes et futures. porte des revenus supplémentaires aux populations
et cela les incite davantage à mieux gérer les forêts.
Il y a des forêts classées, dont la gestion relève de
l’État représenté par le service forestier, des forêts En complément des actions d’aménagement forestier
communautaires, gérées par les collectivités locales, relatives à la production de bois et de charbon de bois
et des forêts privées. et afin d’améliorer les bilans régionaux offre/demande
en bois énergie, il est nécessaire de développer des
Hormis les forêts de leur domaine, les collectivités lo-
stratégies de réduction de la demande en bois énergie.
cales ont aujourd’hui également la possibilité de de-
mander, sur la base d’un protocole d’accord, une forêt Les stratégies possibles visent principalement la pro-
ou partie de forêt du domaine de l’État en vue d’en as- motion de l’utilisation des foyers améliorés (voir sec-
surer une gestion rationnelle et durable. tion 2.9.3.), permettant de réduire la consommation
de bois et charbon de bois entre 25 et 45 %. De plus,
La mise en œuvre des PAG avec l’implication forte
la vulgarisation de la meule améliorée “Casamance“
des populations permet aux localités riveraines de
pour la carbonisation du bois (voir section 2.9.1.1.)
disposer de zones régulièrement boisées. Les mé-
permet une production plus efficace de charbon de bois.
nages sont soulagés d’être à proximité d’un espace
forestier qui leur fournit du bois de chauffe et du char- Enfin, il est envisageable de promouvoir les combus-
bon de bois régulièrement et à long terme. Outre le tibles alternatifs, c'est-à-dire tout combustible bio-
bois, les forêts fournissent tout un ensemble d’autres masse autre que celui provenant du bois (par
produits non-ligneux, comme le miel et des fruits fo- exemple le charbon à base de coque d’arachide, de
restiers. La commercialisation de ces produits rap- typha et de poussier de charbon) (voir section 2.9.2).

Figure 2 13
Réunion de
sensibilisation au village

Source : GIZ / Kamikazz

Figure 2 14
Production du charbon
de bois dans une zone
aménagée

Source : GIZ / Kamikazz


38
2.8. Les technologies de transformation autre du charbon, du gaz combustible, des minéraux
de la biomasse solides (recyclables en agriculture) et de l’huile de py-
rolyse. Avec une pyrolyse longue à températures mo-
L’utilisation énergétique de la biomasse est possible
dérées (400 °C), on obtient plus de charbon que de
grâce à des procédés de transformation thermochi-
gaz, et à températures élevées (500-800 °C), à l’in-
mique ou biochimique ou aussi par l’extraction (p.ex.
verse, on produit plus de gaz que de charbon.
dans le cas des graines oléagineuses).
La pyrolyse est également une phase préalable à la
La figure 2-15 représente tous les procédés montrant
gazéification, autre voie prometteuse parmi la trans-
le produit fini que l’on obtient, soit sous forme de cha-
formation de la biomasse en énergie.
leur, soit d’électricité ou soit de combustibles.
Le processus technique global est important : quand
La combustion, la pyrolyse (carbonisation), la gazéifi-
les processus de combustion et de carbonisation ont
cation et la digestion (biogaz) (voir section 2.10.1.) re-
lieu dans la même chambre, on parle de fours. Si la
présentent aujourd’hui les technologies de
combustion et la carbonisation sont effectuées dans
transformation de la biomasse les plus importantes.
des chambres séparées, il s’agit alors d’une installa-
La pyrolyse est définie comme étant un changement tion de cornue.
irréversible provoqué par la chaleur en l’absence
Ainsi, pour démarrer le processus de pyrolyse, le brû-
d’oxygène. Il s’agit de la décomposition d’un com-
leur (chambre de combustion) doit être allumé à part.
posé organique par la chaleur (sans flammes) pour
Une fois que les denrées à carboniser sont suffisam-
obtenir d’autres produits. Tous les procédés de pyro-
ment chaudes pour dégager des gaz inflammables,
lyse de la biomasse produisent d’une façon ou d’une
on n’a pas besoin d’autre combustible.

Figure 2 15
Les technologies de
transformation de la biomasse

Source : PERACOD, inspiré par Wim C. Turkemberg, ‘les technologies énergétiques renouvelables’
39
Figure 2 16
Cornue industrielle pour
la production de charbon

Dans la figure 2-16, on peut voir les chambres séparées pour


la carbonisation et pour la combustion. De telles installations
de cornue produisent la plupart du charbon utilisée dans les
pays de l’OCDE et opèrent avec un débit de 200 t/h et un
rendement en charbon de 45 %.

La plupart d’entre elles utilisent des rebuts de bois en pro-


venance de fabriques de mobilier ou de parquet ; mais les
cornues industrielles pour les déchets organiques agricoles
(noyaux d’olive, bagasses de canne à sucre, tiges de coton,
enveloppes de café et enveloppes de riz) ont également été
opérées pendant les 15 dernières années.

Source : Factor 4 Energy Projects / GTZ (B. Jargstorf), Biocharbon


à partir de coques d’ arachides – projet pilote auprès de NOVA-
SEN, Kaolack (Sénégal). Wismar 2001, p.48. D’après Jargstorf
2004.

Puisque les deux composantes de la pyrolyse peu- 2.9. Améliorer les technologies
vent être optimisées de façon indépendante l’une de de la biomasse traditionnelle
l’autre dans des cornues, la fabrication industrielle
moderne de charbon est toujours effectuée au moyen L’utilisation de la biomasse traditionnelle concerne
de cornues. Alors que la fabrication traditionnelle de avant tout la combustion du bois énergie, des résidus
charbon à l’aide de cornues modernes a des rende- agricoles et des déjections animales. D’un point de
ments compris entre 35 et 45 %, ceux des fours se si- vue technique, la combustion signifie normalement :
tuent dans la fourchette en dessous des 25 %. • un faible rendement de la conversion énergétique ;

La gazéification est la transformation thermique d’un • un impact environnemental élevé (fumées, etc.) ; et
solide combustible en présence d’un composé ga- en conséquence
zeux (O , air, CO2, vapeur d'eau, etc.). Le but de la
2
• d’importants risques de problèmes de santé.
gazéification est généralement de convertir le solide
Les techniques de carbonisation traditionnelles ont
en vue de l'obtention d'un mélange gazeux combus-
également un faible rendement énergétique.
tible. Elle se distingue donc de la pyrolyse, opération
thermique s'effectuant en l'absence de gaz réagissant Transiter vers une utilisation de la biomasse moderne
avec le solide, et de la combustion dans laquelle la améliore généralement le rendement et ainsi par
plus grande partie du carbone contenu dans le solide conséquent réduit la consommation énergétique. Si-
est transformée en CO2. multanément la sécurité énergétique augmente et les
impacts négatifs sur l’environnement dus à l’utilisation
Le gaz produit à partir de ces cornues peut être brûlé
de l’énergie sont réduits.
ou utilisé dans des moteurs à combustion intégrée
pour produire de l’électricité. 2.9.1.  Améliorer les techniques
Pour résumer cette section, l’introduction des fours à de la production de charbon de bois
charbon éprouvés doit être considérée comme un vé- Une possibilité pour améliorer les technologies tradi-
ritable moyen pour ralentir les dégâts environnementaux tionnelles de transformation de la biomasse et effec-
causés par la fabrication traditionnelle du charbon de bois.
40
tuer des économies d’énergie considérables est la ligneux était pendant des années basé sur un sys-
production de charbon de bois à partir de bois, dans tème de quotas de charbon annuellement distribués
des meules améliorées. aux organismes d’exploitants forestiers agréés (coo-
pératives forestières en général).
La dissémination des techniques de meules amélio-
rées a été initiée en Afrique il y a plus de deux dé- Les approvisionnements se faisaient à partir des
cennies sans véritable réussite. Une raison essentielle zones de production (Tambacounda et Kolda). Dakar
à cela réside dans le fait qu’il n’y a pas de véritable ex- est un centre important de consommation qui se
ploitation forestière durable à grande échelle. En gé- trouve à environ 500 km. Il n’existe pas de données
néral, la matière première (le bois) est gratuite ou son fiables sur la part de la production nationale de char-
exploitation est calculée sur la base du produit final, le bon de bois consommée à Dakar.
charbon de bois, et non pas sur la base de la matière
première, le bois, comme c’était le cas des quotas au
Figure 2 17
Sénégal. Par ailleurs les effectifs réduits d’agents des
Evolution du front charbonnier
Eaux et Forêts ne permettent pas le contrôle régulier au Sénégal depuis les années 60
des activités des exploitants forestiers sur le terrain. Il
faut également noter le fait que les véritables exploi-
tants forestiers, les coopératives forestières, se trou-
vent dans les centres urbains (Dakar, Touba, Kaolack,
Ziguinchor etc.) et envoient sur le terrain des ma-
nœuvres (Surga). Ceux-ci n’ont donc aucune raison
et aucune motivation d’économiser de la matière pre-
mière. Souvent cette main d’œuvre non qualifiée coûte
moins chère qu’une main d’œuvre ayant bénéficié
d’une formation dans les techniques de carbonisation
améliorée. Par ailleurs, les utilisations de meules amé-
liorées comme la meule Casamance qui est recom-
mandée au Sénégal, nécessitent obligatoirement des Source : PERACOD
investissements financiers puisqu’il faut payer le ma-
tériel et la construction d’une cheminée. En 2008, le gouvernement du Sénégal a pris l’initia-
33 tive de domicilier la totalité de la production de char-
Pour que les meules améliorées aient un succès, il
SIE 2007 Sénégal.
bon dans les zones aménagées. De ce fait, les
faut la mise en place des mesures d’accompagne-
quantités qui sont annuellement exploitées sont dic-
ment comme les réglementations sur l’abattage des
tées par les possibilités des forêts. Ce processus de
arbres et le paiement de redevances sur le bois sur
rationalisation de l’exploitation forestière est accom-
pied. C’est seulement à partir de ce moment, que les
pagné par un processus de décentralisation avec le
avantages comparatifs de la meule améliorée se ma-
transfert de compétences aux Collectivités locales et
nifesteront.
la responsabilisation et l’organisation des populations
Au Sénégal, on espère que la nouvelle politique qui locales pour une prise en charge des aménagements.
vise à domicilier l’exploitation de bois énergie dans En 2009, le gouvernement du Sénégal a pris égale-
les zones aménagées (exploitation durable), incitera ment un arrêté portant abandon du système d’attribu-
davantage les charbonniers à une utilisation plus éco- tion des quotas aux organismes d’exploitants
nomique de la matière première. forestiers, prenant effet à partir de 2010. Ceci doit fa-
L’approvisionnement des ménages en combustibles voriser l’implication des acteurs locaux dans la ges-
tion des ressources.

Il n’y a pas de chiffres vraiment fiables concernant la


consommation annuelle en charbon de bois au Séné-
gal. Le SIE la chiffre à 490 000 33 tonnes en 2007.
41
2.9.1.1.  Techniques de carbonisation améliorées sateur des produits provenant du bois carbonisé.
– la meule Casamance
Les rendements d’une meule de carbonisation dé-
La majeure partie du charbon de bois au Sénégal est pendent d’un certains nombre de facteurs, notam-
en général fabriquée dans des meules traditionnelles. ment l’humidité du bois, les conditions climatiques, les
Les inconvénients de cette technique sont la lenteur dimensions des pièces de bois, l’espèce de l’arbre,
de la phase carbonisation due à une mauvaise aéra- etc.
tion de la meule et le rendement trop bas
On estime que, pour fabriquer 1 kg de charbon de
La meule améliorée la plus répandue au Sénégal et bois, avec un taux d’humidité du bois enfourné à 30
qui a trouvé une large dissémination sous des diffé- %, on a besoin d’environ 8 kg de bois avec la meule
rentes variantes en Afrique de l’Ouest, est la meule traditionnelle et 5 kg avec la meule Casamance.
Casamance. Elle a été mise au point et introduite dans
Montage et carbonisation d’une meule Casamance
les années 80.
1ère étape : pour une meilleure circulation de l’air, on
La meule Casamance est à combustion partielle,
étale un réseau de bois à la base qui constitue le plan-
c’est-à-dire que la combustion d’une partie de la
cher. Celui-ci est composé des bois ronds moyens qui
charge fournit la chaleur nécessaire à la carbonisa-
sont disposés radialement et sur lesquels sont placés
tion du reste de la charge.
tangentiellement du petit bois.
Ses avantages sont 34 :
2 ème étape : la charge de bois est arrangée en com-
• la réduction de la consommation en bois ; mençant par les gros bois au centre de la meule, sui-
• un coût d’investissement relativement faible ; vis par les moyens et les petits bois se trouvant à
• la facilité de construction ; l’extrémité du plancher. Elle est recouverte du petit- 34
Source : Vie Vert-Information
bois en construisant simultanément la chambre à air
• la carbonisation rapide ; Environnementale. Le bimes-
qui permet une bonne circulation de l’air. La meule est triel sur l’environnement, l’hy-
• de très bons rendements d’au moins 20 à 40 % sur giène, la santé et la sécurité au
ensuite entièrement couverte avec des herbes, de la travail. Dakar. Mai – juin 2009,
bois anhydre 35. La meule traditionnelle a un rende-
paille et de la terre. p.38.
ment de 16 à 20 % ; et
35
3 ème étape : une cheminée faite de 3 fûts de 200 litres
• permet de recueillir l’acide pyroligneux et les gou- Source : communication sur la
soudés est installée. (La durée de vie d’une cheminée carbonisation et agglo-briquet-
drons grâce à la cheminée qui joue un rôle de conden- tage au Sénégal dans le cadre
correspond à deux campagnes de carbonisation.) de l’Atelier régional de capitali-
sation de l’expérience sahé-
lienne en matière de
carbonisation et agglo brique-
tage au sahel, Ministère de
l’Énergie et des Mines, juin
2004.
Figure 2 18
Montage d’une meule Ca-
samance étape 3

Source : GIZ / Kamikazz


42

Figure 2 19
Meule Casamance étape 4
(processus de carbonisation)

Source : GIZ / Kamikazz

4 ème étape : après avoir allumé le four dans la chemi- exemple à Madagascar, soutenue par la coopération
née centrale (point d’allumage), des gaz peuvent allemande : un taux d’efficacité des foyers à bois tra-
s’échapper par la cheminée faite de bidons d’huile. ditionnels de 12 % est choisi comme référence ; la
On ouvre des appels d’air tous les 3 mètres autour de transformation du bois en charbon et l’utilisation du
la meule. Cela permet de réguler l’air dans la meule charbon au moyen de technologies traditionnelles
afin de conditionner la carbonisation. Le processus de (meule et foyers) conduisent à des pertes d’énergie
carbonisation requiert la présence des charbonniers. importantes allant jusqu’à 73 %. Par contre, les pertes
Après la cuisson (disparition des fumées), la chemi- d’énergie sont complètement compensées en recou-
née est démontée et la meule est laissée à refroidir. rant aux nouvelles technologies.

5 ème étape : le charbon est sorti de la meule et em-


ballé dans des sacs. Figure 2 20

Pertes d’énergie lors de la transformation


du bois en charbon de bois en fonction
Impacts de la carbonisation améliorée des technologies utilisées
(types de meules et de foyers)
La production de charbon de bois est souvent prati- et leur taux (%) d’efficacité

quée sans tenir compte de l’exploitation durable des


ressources forestières ni d’une économie en matière
première. Cela constitue un danger pour les peuple-
ments forestiers naturels. C’est pourquoi une impor-
tance toute particulière est accordée à l’introduction
de techniques améliorées pour la carbonisation du
bois et la combustion du charbon de bois lors de la
cuisson (voir la section 2.9.3. sur les foyers amélio-
rés). Ces techniques diminuent considérablement les Source : Le reboisement villageois individuel. Stratégies, tech-
pertes d’énergie et participent ainsi à la protection des niques et impacts de GREEN-Mad (MEM-GTZ) dans la région
d’Antsiranana Madagascar. GTZ. Projet GREEN-Mad et ECO
forêts.
Consult : Antisiranan, Madagascar et Oberaula, FRA. 2007.

Les effets de la carbonisation améliorée sont tirés d’un

2.9.2. Potentiel de la biomasse pour


produire du biocharbon au Sénégal

Dans le cadre de la diversification des sources d’éner-


gie des combustibles domestiques, le biocharbon oc-
43
cupe une place prépondérante 36. coles ou agro-industriels, du poussier de charbon ou
de la biomasse.
Les formes de biomasse, autres que le bois, valorisa-
bles en énergie de cuisson et disponibles au Séné- La réglementation existante ne s’applique qu’au char-
gal, sont : bon issu de la biomasse ligneuse. Ainsi, pour assurer
• les résidus agricoles comme les tiges de mil et de un développement organisé de la filière, les ministères
coton, des balles de riz ; concernés ont décidé de mettre en place un cadre ré-
glementaire spécifique pour la production et la com-
• les résidus agro-industriels : coques d’arachide, de
mercialisation du biocharbon pour faire de cette filière
coton, d’anacarde, de bagasse ; et
un levier porteur d’un véritable développement éco-
• les plantes aquatiques nuisibles à forte prolifération
nomique durable.
comme le typha.
En général, on peut dire que la valeur énergétique
Ces résidus, la biomasse inutilisée et le poussier de
d’une tonne de biocharbon produite au Sénégal équi-
charbon, longtemps perçus comme une menace pour
vaut environ à 80 % de celle du charbon de bois.
l’environnement et la santé des populations riveraines
sont aujourd’hui considérés comme une richesse 2.9.2.1. Le typha
36
énergétique, en tant que source d’énergies alterna- Le typha australis est un roseau local avec capacité Les indications de ce para-
tives aux combustibles traditionnels. de prolifération phénoménale dont la tige peut attein- graphe se réfèrent principale-
ment au Magazine Vie
La production des combustibles alternatifs est en dre une longueur de plus de 3,50 mètres. L’expansion Vert-Information Environnemen-
tale. Le bimestriel sur l’environ-
phase avec l’objectif de réduction des émissions de du typha dans la vallée du fleuve Sénégal se déve-
nement, l’hygiène, la santé et la
CO2, issu du protocole de Kyoto et présente un grand loppe à très grande vitesse le long des axes hydrau- sécurité au travail. Dakar. Mai –
juin 2009. Elles se réfèrent
potentiel pour des projets éligibles au Mécanisme de liques en raison d’un manque de fluctuation de niveau
aussi aux données du PERA-
Développement Propre (MDP). et de salinité de l’eau à la suite de la construction des COD.

barrages de Diama et Manantali. Sa présence mas-


Selon le protocole de Kyoto, un pays de l’annexe I (in-
sive dans le delta du fleuve et au Lac de Guiers
dustrialisé) peut financer des projets dans les pays
constitue une menace écologique très grave avec des
non annexe I (NAI) des projets de réduction des émis-
impacts socio-économiques considérables.
sions comme un renforcement des puits carbones et
sont récompensés de crédits pouvant être utilisés Ainsi le typha menace la biodiversité de la zone en
pour atteindre leurs propres objectifs d’émissions. supplantant et étouffant d’autres espèces végétales
et animales.
Cependant, au Sénégal, aucune réglementation spé-
cifique n’a été mise en place pour la production et la
commercialisation du charbon issu des déchets agri-

Figure 2 21
Typha dans le delta
du fleuve Sénégal

Source : PERACOD
44
D’autres conséquences néfastes sont l’inaccessibilité Potentiel exploitable : Le typha recouvre une superfi-
des eaux douces pour les populations riveraines pour cie supérieure à 6 500 hectares, cela représente un
abreuver le bétail ou accéder à la pêche, la diminution potentiel moyen d’environ 900 000 tonnes de bio-
des superficies cultivables et la prolifération des ma- masse fraîche. La valorisation énergétique de cette
ladies hydriques. Les tiges bouchent les canaux d’ir- biomasse fraîche permettrait de produire environ 65
rigation et de drainage qui mènent aux plantations de 000 tonnes de biocharbon, soit 37 000 TEP 37, repré-
riz ou de canne à sucre. sentant aussi 94 000 tonnes de crédits de CO2.

Des recherches de la Faculté Universitaire des Ce potentiel exploitable équivaut également à 13 % 38


Sciences Agronomiques de Gembloux en Belgique de la consommation annuelle de charbon de bois au
ont démontré que la reproduction du typha dans le Sénégal.
delta du fleuve Sénégal s’élève à 100 000 t de bio-
Projections à court terme de la Stratégie Énergie Do-
masse sèche par an.
mestique du Sénégal :
En général le typha est récolté manuellement à la fau-
L’ONG Pro-Natura s’est lancée dans la production de
cille. Cependant la coupe est souvent rendue difficile
biocharbon à partir de typha dans la région de Saint-
par la pousse en eau profonde. La récolte du côté de
Louis. La carbonisation de la biomasse est faite de
la rive est difficile à cause des terrains marécageux et
manière continue. Un prototype de machine, fabriqué
il n’existe pas encore des moissonneuses éprouvées
en France est en exploitation au Sénégal depuis fin
pour la récolte du côté du fleuve.
2007.
Utilisation actuelle : L’utilisation actuelle est presque
On utilise une technologie basée sur l’utilisation d’une
exclusivement artisanale. Le typha est traditionnelle-
cornue chauffée à 550 °C au travers de laquelle
ment utilisé par les femmes pour fabriquer des nattes
s’écoule la biomasse en absence d’oxygène et qui est
et de la vannerie ou est utilisé dans l’habitat pour
maintenue à une température constante par la com-
construire des clôtures et abris.
bustion des gaz de pyrolyse. Ces gaz sont recyclés et
brulés dans une chambre de postcombustion, évitant
ainsi l’émission de gaz à effet de serre. Le système
est ainsi presque autonome en termes d’énergie.

37
Tonne d’équivalent pétrole

38
Calcul PERACOD juin 2010
Figure 2 22
Biocharbon à base de
typha, Pro-Natura

Source : PERACOD
45
De manière générale, il est nécessaire pour toute pro- balle de riz au Sénégal. Dans la vallée du fleuve Sé-
duction de biocharbon d’agglomérer les fines de négal, seulement 30 % de la production du paddy est
charbon après le processus de carbonisation pour usinée dans des rizeries d’une certaine taille où la
ainsi faciliter la combustion et le transport. Les tech- balle peut être stockée et valorisée. Les 70 % restants
niques d’agglomération sont de deux types : les tech- sont consommés par les producteurs ou bien usinés
niques de compression et le bouletage. La fabrication au niveau de petite décortiqueuses (environ 350 sur la
nécessite de mélanger la fine de charbon vert avec vallée) et ne sont donc pour l’instant économiquement
un liant, cela peut être de l’amidon, de la gomme ara- pas exploitables.
bique, de la mélasse ou de l’argile. Les briquettes hu-
Utilisation actuelle : Peut-être dû à ces inconvénients,
mides passent ensuite dans un séchoir pour en
il n’existe à ce jour pas de véritable utilisation pour la
éliminer l’eau, de sorte qu’elles soient assez solides
balle de riz au Sénégal. Elle est parfois incinérée pour
pour pouvoir être utilisées dans les fourneaux do-
éloigner les moustiques des troupeaux puisque la
mestiques.
combustion en état brut est lente et produit beaucoup
Dans le cas du biocharbon Pro-Natura, on procède à de fumée qui agit comme répulsif anti-moustique.
l’agglomération à l’aide de la mélasse. Les briquettes
Elle est à la fois utilisée comme combustible et comme
humides sont par la suite séchées dans un séchoir.
isolant à l’air pour la carbonisation du bois dans des
Le site de production semi-industrielle de Pro-Natura petites meules dans la région du fleuve (à noter que la
a pu profiter d’un financement dans le cadre du MDP. carbonisation du bois dans la zone est illégale). Par-
II est prévu d’y produire environ 800 tonnes de “char- fois elle est aussi vendue comme son de mauvaise
bon vert“ par an. qualité pour l’alimentation du bétail en Mauritanie et
au Sénégal.
Une autre utilisation potentielle du typha est pour la
fabrication de matériaux d’isolation. Le matériau d’iso- Malgré les quelques inconvénients, la balle de riz offre
lation à la base de roseau égalise les performances un potentiel intéressant et on mène des expériences 39
Projekterschließung Senegal.
du matériau synthétique. En utilisant une technique et au Sénégal et à l’étranger pour mieux exploiter son
Erneuerbare Energien und
des machines adéquates, la production du matériau potentiel de combustible alternatif. ländliche Elektrifizierung. Län-
derreport & Marktanalyse. Par
d’isolation pour le marché sous-régional pourrait pré-
Potentiel exploitable : Les récoltes annuelles de paddy Rolf Peter Owsianowski: Bun-
senter un potentiel intéressant pour des entrepre- desministerium für Wirtschaft
dans le delta du fleuve Sénégal s’élèvent à 215 000 und Technologie, GIZ.
neurs. Ceci est également d’une grande importance
tonnes. Ceci représente un potentiel de 13 000 tonnes
énergétique puisque environ 40 % de l’électricité pro- 40
de balle de riz valorisable au niveau de rizeries. La va- Calcul PERACOD juin 2010
duite au Sénégal est utilisée à des fins d’isolation et
lorisation énergétique de cette biomasse permettrait
pour le chauffage de l’eau 39. Si on commençait à iso-
de produire environ 8 000 tonnes de biocharbon (1,6
ler des bâtiments avec la biomasse, ceci aurait des
% de la consommation annuelle de charbon de bois
conséquences positives sur la consommation d’élec-
au Sénégal 40) soit 4 560 TEP, représentant aussi 116
tricité à l’échelon national.
000 tonnes de crédits de CO2.
2.9.2.2. La balle de riz
Projections à court terme de la Stratégie Énergie
La balle de riz est issue du décorticage du riz paddy. Domestique du Sénégal :
La balle de riz recouvre le grain de riz paddy et est
Le producteur de biocharbon BIOTERRE utilise une
séparée de lui lors du décorticage. Elle est très riche
technique de granulation. Un appui de l’UEMOA a
en cellulose brute (40 %) et en silice (20 %), de sorte
permis l’installation d’une unité de production semi-in-
qu’elle est fortement déconseillée en alimentation
dustrielle à Ross Béthio où la capacité de production
même animale.
annuelle de biocharbon à partir des balles de riz de-
Il se pose plusieurs problèmes à la valorisation de la vrait atteindre 500 tonnes par an.

L’entreprise est également présente à Ndem, dans la


46

Figure 2 23
Agglomérateur pour la fabrication
du biocharbon, Bioterre

Source : Bioterre

région de Diourbel, où elle exploite une petite unité de million de tonnes de crédits de CO2.
production avec une capacité de production de 150
Les coques au niveau des huileries sont directement
tonnes par an. Dans ce site de fabrication, on exploite
valorisées. En conséquence, seules les coques au ni-
les déchets d’arachides mélangés à l’argile.
veau de petites unités restent disponibles à l’utilisa-
tion ultérieure par d’autres exploitants. Elles
2.9.2.3. Les coques d’arachide
présentent aujourd’hui, en théorie, un potentiel de va-
Le poids de la coque d’arachide représente environ lorisation estimé à environ 65 000 tonnes de coques.
un quart du poids de la gousse entière. La teneur en Transformées en biocharbon, on obtiendrait environ
cendres est relativement faible (2 à 5 %) mais elle est 27 000 tonnes ce qui représente environ 5,5 % de la
riche en éléments alcalins. Aujourd’hui la culture consommation annuelle de charbon de bois au Séné-
d’arachide recouvre une superficie d’environ 77 000 gal 41.
41
hectares qui produit en moyenne 700 000 tonnes
Calcul PERACOD juin 2010 Projections à court terme de la Stratégie Énergie
d’arachides par an. Les huileries Sunéor (ex-SONA-
Domestique du Sénégal :
COS) et NOVASEN achètent la majeure partie de cette
récolte, respectivement environ 400 000 et 40 000 L’usine CARBOSEN à Kaolack, une unité de produc-
tonnes. Le volume restant est traité dans de petites tion industrielle, devra produire jusqu’à 1 800 tonnes
décortiqueuses, géographiquement dispersées. de biocharbon par an en valorisant ainsi 7 000 tonnes
de coques vides.
Utilisation actuelle : Les coques sont principalement
utilisées comme combustible dans les chaudières au Il s’agit d’une joint venture entre l’huilerie NOVASEN
niveau des huileries (Sunéor) mais également pour la et l’entreprise hollandaise CARBO (fabricant de fours
fabrication industrielle de biocharbon de l’entreprise à haut rendement), soutenue par la coopération au
CARBOSEN (NOVASEN). Elles sont également utili- développement hollandaise.
sées comme compost, comme litière dans la filière
Les coques d’arachide sont transformées en logs à
avicole et pour le fumage du poisson.
l’aide d’une extrudeuse et par la suite carbonisés
Potentiel exploitable : La superficie des cultures ara- dans de grands fours à haut rendement.
chidières exploitées permet de calculer un potentiel
moyen de 175 000 tonnes de coques par an. La valo-
risation énergétique de cette biomasse permettrait de
produire environ 73 500 tonnes de biocharbon (20 %
de la consommation annuelle de charbon de bois au
Sénégal), soit 42 000 TEP représentant également 1
47
Figure 2 24
Usine Carbosen
transport des coques d’arachide

Source : GIZ / Kamikazz

Figure 2 25

Transformation des
coques en logs à l’aide
d’une extrudeuse

Source : GIZ / Kamikazz

Figure 2 26
Coques d’arachides
compactées carbonisées

Source : GIZ / Kamikazz


48
2.9.2.4. Les tiges de céréales (mil, sorgho, mais, ...) de charbon de bois an Sénégal 44) soit 10 260 TEP, re-
présentant aussi 81.000 tonnes de crédits de CO2.
Les tiges constituent les résidus végétaux qui restent
dans les champs après la récolte. La disponibilité de Dans le domaine des tiges de coton également, il n’y
cette biomasse est cependant fortement dépendante a pas encore eu de véritable essai de valorisation
des conditions de collecte et de transport ainsi que énergétique au Sénégal.
de la saisonnalité des cultures (forte disponibilité en
avril-mai). 2.9.2.6. Le poussier de charbon de bois

Utilisation actuelle : Les pailles de mil et de sorgho Il ne s’agit pas de la biomasse dans son état primaire
sont utilisées pour l’alimentation animale. Elles servent mais d’une revalorisation de la biomasse transformée
aussi à lutter contre l’érosion des sols et l’ensoleille- énergétiquement au préalable. D’après une étude du
ment quand, après la récolte, les tiges sont couchées PERACOD, la poussière de charbon de bois qui se
sur le sol et laissées en place. Cette technique per- dépose généralement au fond des sacs représente
met aussi de restituer la fertilité au sol. Avant la mise 15 % de la production de charbon de bois. On peut
en culture elles sont brûlées et participent ainsi à la ainsi valoriser un déchet à haute valeur énergétique
minéralisation des sols. qui jusque là restait inexploité et polluait les environs
des parcs à charbon.
Potentiel exploitable : Les cultures de mil, sorgho et
maïs recouvrent une superficie d’environ 1,1 million Utilisation actuelle : Aujourd’hui seule l’entreprise
d’hectares, cela représente un potentiel moyen d’en- BRADES à Saint-Louis exploite ce potentiel et fabrique
viron 4,5 millions de tonnes de biomasse sèche. des briquettes de biocharbon à partir de résidus de
charbon de bois et d’argile. Dans la ville de Saint-
La valorisation énergétique de cette biomasse per-
42 Louis seulement, 2,5 tonnes de résidus de charbon
Rendement de carbonisation mettrait de produire environ 1,6 million de tonnes de
de bois peuvent être récupérées par le BRADES en
= 30 % et augmentation de
biocharbon 42 (326 % de la consommation annuelle de
poids de 20% pour l’agglo- moyenne par mois.
mération charbon de bois au Sénégal 43) soit 912 000 TEP, soit
23,2 millions de tonnes de crédit de CO2. On projette pour l’avenir une production annuelle de
43
Calcul PERACOD juin 2010 120 tonnes par an pour cette unité de production
Les tiges de céréales offrent un potentiel théorique im-
semi-artisanale qui vise à augmenter sa productivité
44 mense, mais jusqu’à ce jour il n’existe pas d’initiatives
Calcul PERACOD juin 2010 horaire à travers un PPP avec la GIZ.
pour leur exploitation énergétique. Et comme elles ont
aussi un rôle important de fertilisant, leur exploitation Les deux matières primaires, le poussier et l’argile,
énergétique est à évaluer de manière prudente pour mélangées à l’eau, sont compactées en forme de
ne pas priver les sols de cette source vitale. boudins à l’aide d’un agglomérateur motorisé appelé
Rotor Press et ensuite séchées au Soleil.
2.9.2.5. Les tiges de coton
L’avantage du mélange à l’argile est l’augmentation
Les résidus restent dans les champs après la récolte de son temps de combustion. Le charbon a ainsi un
du coton. En général, les tiges sont brûlées sur les meilleur rendement et son utilisation est plus écono-
champs même. Leur disponibilité est également for- mique. La présence des plaquettes d’argile réduit
tement dépendante des conditions de collecte et de également l’émission de gaz carbonique et contribue
transport ainsi que de la saisonnalité des cultures ainsi aux objectifs de Kyoto.
(forte disponibilité en avril-mai).
Potentiel exploitable : Il n’existe pour l’instant pas de
Utilisation actuelle : De nos jours, les tiges de coton prévisions sur le potentiel exploitable pour l’ensemble
ne sont pas mises en valeur au Sénégal. du Sénégal.

Potentiel exploitable : Au Sénégal, la culture du coton


recouvre une superficie d’environ 40 000 hectares ce
qui représente un potentiel moyen d’environ 45 000
tonnes de tiges. On pourrait en obtenir 18 000 tonnes
de biocharbon (3,6 % de la consommation annuelle
49

Figure 2 27
Fabrication du biocharbon
à l’aide du Rotor Press

Source : PERACOD

Figure 2 28
Séchage au Soleil

Source : PERACOD

Figure 2 29
Cuisson avec du biochar-
bon à base de poussier
de charbon

Source : PERACOD
50
2.9.2.7. Resumé encore eu de véritable transfert de technologies vers
les pays du Sud. Souvent ce sont aussi les coûts de
La valorisation de biomasse en combustible engen-
production élevés qui ne permettent pas d’être
dre des effets bénéfiques pour le développement du-
concurrentiel sur le marché. Cet inconvénient peut
rable local car elle permet la création des emplois et
être plus facilement contourné par les unités de pro-
d’activités génératrices de revenus en aval par la re-
duction semi-industrielles et industrielles que par les
vente du biocharbon.
petites unités de production artisanale.
Figure 2 30
Carte des principaux tonnages de résidus 2.9.2.8. Technologies de production de biocharbon
disponibles selon les régions du
Sénégal en 2003 En fonction du potentiel existant, on a vu l’introduction
de différentes technologies et filières de production
de biocharbon au Sénégal :

La filière artisanale avec les technologies de carboni-


sation “3 fûts“ et d’agglomération avec le rotor press
manuel dont la capacité de production est, par exem-
ple, pour le biocharbon à base de typha ou celui de
poussier de charbon de 60 kg par heure.

La filière semi-industrielle de production du charbon à


base de poussier de charbon, qui utilise comme tech-
nologie d’agglomération, un rotor press manuel ainsi
Source : Étude PTMF-ASER qu’un rotor press motorisé d’une capacité de produc-
tion de biocharbon à base de poussier de charbon de
Sa consommation contribue à la longue à la protec-
140 kg par heure. La technologie de Bioterre, pour la
tion des forêts en diminuant le besoin d’approvision-
valorisation des balles de riz, est aussi de type semi
nement en charbon de bois.
industrielle.
Malgré les résultats probants lors des essais tech-
La filière industrielle de production de biocharbon à
niques, le biocharbon a des difficultés à pénétrer le
base de coques d’arachides qui a une capacité de
marché sénégalais. Ceci est surtout dû à l’acceptabi-
production de l’ordre de 1 800 tonnes par an (l’usine
lité et aux difficultés de changement des habitudes
CARBOSEN). Les coques sont transformées en logs
des ménages. Les coûts d’investissement élevés pour
à l’aide d’une extrudeuse avant d’être carbonisées. La
des techniques élaborées qui sont importées d’Eu-
carbonisation est opérée dans des grands fours à ren-
rope empêchent souvent aussi l’engagement de po-
dement élevé. Pronatura utilise aussi des techniques
tentiels producteurs. Dans ce domaine, il n’y a pas

Figure 2 31
Carbonisation artisanale
“3 fûts“ en milieu rural

Source : PERACOD
51
de production industrielle pour la fabrication du bio- dimension microscopique, elles peuvent pénétrer fa-
charbon à base de Typha. cilement dans les poumons et sont par conséquent
considérées comme particulièrement nuisibles à la
2.9.3. Les foyers améliorés santé humaine.
Dans pratiquement tous les pays en développement, Le taux de mortalité en Afrique subsaharienne, lié à la
on introduit couramment des foyers améliorés afin de présence de gaz fumigènes dans les habitations,
réduire la consommation de bois combustible et de ré- s’élève à 4,3 % et représente ainsi, après le manque
duire les risques sur la santé issus de la combustion d’hygiène (5,9 %), le deuxième risque le plus impor-
des combustibles dans des équipements de cuisson tant pour la santé lié à l’environnement 45. D’après
traditionnels comme les trois pierres. l’OMS, environ 5 400 personnes décèdent chaque
Les trois pierres ont l’efficacité énergétique la plus année au Sénégal à cause de la pollution intérieure
basse parmi tous les équipements domestiques de des habitations. Cela touche plus particulièrement les
cuisson : environ 90 % de l’énergie déployée par la femmes et les enfants.
combustion ne contribue pas à la cuisson mais part Les foyers améliorés dégagent moins de fumée no-
en fumée. cive et ont ainsi un avantage significatif sur le plan de
Les foyers à économie d’énergie représentent l’exem- la santé publique car leur utilisation permet aux mé-
ple le plus important des technologies éprouvées de nagères d’éviter certaines maladies liées aux infec-
biomasse traditionnelle. Dans de nombreux pays afri- tions respiratoires et des yeux. 45
World Health Report: Reducing
cains elles présentent un intérêt primordial. Au Sénégal divers acteurs du sous-secteur des com- Risks, Promoting healthy life.
bustibles ont développé, chacun dans son domaine World Health Organisation. Ge-
Au Sénégal, plus de 75 % des ménages utilisent les neva 2002
fourneaux traditionnels à bois et à charbon de bois. d’intervention, des projets et programmes de diffusion
46
La fumée dégagée lors de la combustion nuit grave- des foyers améliorés 46 depuis le premier choc pétro-
Les paragraphes suivants sont
ment à la santé des ménagères. lier de 1974. tirés de : Promotion des foyers
améliorés dans les zones d’in-

On estime que l’exposition à la fumée par combustion Quant aux types de foyers améliorés, on en distingue tervention du Peracod. Projet
foyers améliorés Sénégal –
de la biomasse représente la cause la plus importante essentiellement deux catégories : FASEN. Rapport provisoire. Mi-
nistère de l’Énergie et des
de pollution pour l’homme sous forme de particules • les modèles fixes massifs auto construits (foyer Mines. PERACOD. Janvier
en suspension respirables. Les particules ont un dia- “Ban Ak Suuf“ et le foyer “trois pierres“ amélioré), es- 2006.

mètre d’au moins 10 micromètres. En raison de leur sentiellement destinés aux zones rurales ; et

Figure 2 32
Dégagement de fumée
lors de la cuisson
traditionnelle

Source : PERACOD
52

Figure 2 33
Foyer amélioré “Ban ak suuf“

Source : PERACOD

• les foyers améliorés métalliques transportables: le fusé avec le soutien du projet PAGERNA de la GIZ. Au
foyer métallique “Sakkanal“ à bois, le foyer métallique total, 28 000 “Ban ak Suuf“ ont été construits dans la
“Jambar“ (“Diambar“) à charbon de bois, et un mo- région de Kaolack. L’approche auto construction a été
dèle semblable au “Sakkanal“ mono marmite fabriqué poursuivie.
en Gambie, qui sont en général destinés aux zones
Le projet “Ban ak suuf“ a joué un rôle précurseur dans
urbaines et péri-urbaines.
le domaine de la sensibilisation aux économies de
Parmi les pionniers de l’introduction des foyers amé- combustibles tant au niveau des décideurs politiques
liorés au Sénégal, figure le CERER. A partir de 1980, que celui des populations et en introduisant une ap-
il a encouragé l’utilisation des foyers améliorés à tra- proche participative à travers la formation de forma-
vers le programme “Ban ak Suuf“. À l’époque, on teurs issus directement des groupes cibles.
considérait que la mise au point de foyers fabriqués à
Mais de manière générale, le foyer “Ban ak suuf“ s’est
partir d’argile et de sable, aptes à être auto construits
avéré plutôt un échec, il n’a pu pénétrer le milieu rural
et à moindre coût devraient permettre de supplanter
et n’a pas pu se faire accepter par les ménagères.
le foyer traditionnel “3 pierres“ peu efficace et incom-
mode à l'usage. L'expérience sur le terrain a été tout Compte tenu des difficultés rencontrées dans la fa-
autre. brication et/ou dans la diffusion, le foyer “trois pierres
améliorées“ (3PA) fût adopté à la place du “Ban ak
Les premiers modèles diffusés en milieu rural et semi
Suuf“. Ce modèle 3PA était déjà diffusé au Burkina
urbain étaient des cuisinières massives à bois et à
Faso et au Niger.
charbon, faites d'un mélange d'argile et de sable, ap-
pelées communément les cuisinières “Ban ak suuf“ Une autre approche dans l’histoire des foyers amélio-
(paille et sable en wolof). Plusieurs modèles étaient rés au Sénégal était l’introduction du foyer “Sakkanal“
mis au point par le CERER, avec ou sans cheminées (économie en wolof) en 1984, un modèle de fourneau
comprenant un ou plusieurs foyers. Les modèles so- métallique, conçu sur la base du foyer malgache tra-
phistiqués de construction difficile ont été progressi- ditionnel portatif, en vue de répondre aux besoins des
vement abandonnés au profit d'un modèle de base ménages urbains.
jugé plus simple. En général, le rendement de ces Le premier modèle “Sakkanal“ mono marmite mis au
fours permet des économies de combustibles de 35 à point permet une économie de charbon de 47 à 50 %
40 %. par rapport au modèle malgache. Le seul inconvé-
Entre 1997 et 2003, le même type de foyer a été dif- nient qu'il présente, est, comme son nom l’indique,
53

Figure 2 34
Fourneau amélioré Jambar

Source : GIZ / Kamikazz

qu'il n'accepte qu'une seule taille de marmite. Ce qui cativement les dépenses énergétiques. L’utilisation du
a conduit le CERER à développer le modèle multi mar- foyer Jambar à la place d’un foyer malgache permet
mite un peu moins performant (35 à 45 %) mais mieux de ramener la consommation journalière moyenne
adapté aux besoins des ménages urbains. d’une famille de 3 Kg à 1 Kg de charbon, soit une éco-

Par la suite, toute une gamme de modèles “Sakkanal“ nomie de l’ordre de 30 %. Pour un même rythme d’uti-

a été fabriquée selon la taille de la marmite et selon le lisation, le Jambar a une durée de vie de 3 ans, contre

type de combustible ligneux. On distingue : 3 mois pour le fourneau malgache.

• le fourneau “Sakkanal“ mono marmite ; Grâce aux fourneaux améliorés, les émissions de gaz

• le fourneau “Sakkanal“ multi marmite ; et à effet de serre sont réduites. Le remplacement d’un
fourneau traditionnel par un fourneau amélioré permet
• le fourneau “Sakkanal“ mixte bois /charbon de bois.
de réduire les émissions de CO2 de 1,2 tonne par an.
Le fourneau “Rocket“ à bois et charbon de bois est
construit en céramique avec une enveloppe métal-
Figure 2 35
lique, avec des techniques pour réduire la fumée no-
Efficacité de différents modes de cuisson
cive pour la santé. Comme son prix est plus élevé que
le prix du fourneau Jambar, il n’a pas vraiment pu per-
cer au Sénégal.

Le fourneau “Jambar“ est aujourd’hui un des modèles


les plus connus et les plus répandus au niveau natio-
nal. Son insert en céramique permet une meilleure
conservation de la chaleur de la cuisson mais de-
mande en même temps un certain savoir faire artisa-
nal et la disponibilité de la matière première, l’argile,
ce qui n’est pas le cas dans toutes les régions du Sé-
négal.

Le Jambar existe également dans de différentes Légende : énergie en MJ transférée à la marmite par kilo de
tailles selon l’usage et la taille de la marmite. combustible utilisé

Source : Jargstorf 2004 (modifié) [GTZ-HEPNR, Adis Abéba, basé


L’utilisation des fourneaux permet de réduire signifi-
sur des calculs de la Banque Mondiale]
54

Figure 2 36
Cuisson avec un fourneau
Diambar à bois

Source : GIZ / Kamikazz

La fabrication des foyers améliorés est assurée par Par le terme méthanisation, on désigne la fermenta-
des menuisiers métalliques formés au préalable. La tion de substances organiques en l'absence d'air ou
promotion des fourneaux améliorés participe au dé- d'oxygène, à laquelle sont associées diverses bacté-
veloppement local car sa vente génère de nouveaux ries anaérobies, dont la composition dépend des ma-
revenus pour les opérateurs privés. tières premières organiques et des conditions propres
au processus (températures et pH). La matière orga-
Les dernières années ont vu des résultats encoura-
nique dégradée se retrouve principalement sous la
geants pour la distribution des foyers améliorés au Sé-
forme de biogaz (à plus de 90 %).
négal. La vente de foyers améliorés à Dakar et dans
le Bassin Arachidier entre 2007 et 2010, soutenue par Cette fermentation se produit naturellement dans les
le PERACOD s’élève à plus de 110 000 foyers. Le chif- marais et les rizières ou dans les décharges conte-
fre absolu au Sénégal doit être encore plus élevé nant des déchets organiques mais peut être aussi
puisque ce calcul ne prend pas en compte des pro- provoquée artificiellement dans des digesteurs.
ducteurs qui ne sont pas recensés par le PERACOD.
Le biogaz est produit à partir de ressources variées :
Chaque année, l’utilisation des foyers améliorés à
éléments organiques provenant de déchets (gaz de
charbon de bois permet de générer des économies
décharge), eaux usées communales (gaz d'égout),
d’argent importantes (environ 1,2 milliard FCFA par
déchets organiques industriels, déchets ménagers et
an).
issus de la branche commerciale, mais également ré-
La pénétration des foyers améliorés au Sénégal laisse sidus et plantes énergétiques provenant de l'agricul-
encore à désirer malgré les efforts des différents pro- ture.
jets. Avant le programme PERACOD, d’autres projets
La production naturelle de biogaz fait partie intégrante
se sont investis dans la diffusion de ces équipements
du cycle biogéochimique du carbone. Les bactéries
de cuisson modernes. Il faut entre autres se rappeler
produisant du méthane (méthanogènes) sont le der-
des expériences des projets ATI (USAID) et PRO-
nier maillon de la chaîne des micro-organismes qui
GEDE (Banque Mondiale) dans les années 1990 et
dégradent la matière organique et renvoient les pro-
2000.
duits en décomposition à l’environnement. Par consé-
quent, il s’agit d’une source d’énergie renouvelable.

2.10. La biomasse moderne Comme nous l’avons déjà vu dans le cas de la pyro-
lyse, la digestion de la biomasse peut s’effectuer sous
2.10.1. Le biogaz forme d’une technologie basique (figure 2-36) ainsi
2.10.1.1.  Vue d’ensemble que sous une forme ‘high-tech’ (figure 2-37).

Les installations de méthanisation agricoles utilisent


55
mettent d'optimiser la gestion des processus.
Figure 2 37
Configuration d’un système En principe, toutes les matières organiques peuvent
typique de biogaz
fermenter ou être digérées. Cependant, seuls les
substrats homogènes et liquides peuvent être pris en
compte pour les centrales biogaz simples : fèces et
urines des bestiaux, des cochons, et éventuellement
de la volaille ainsi que les eaux usées des toilettes.
Les déchets et eaux usées des industries de traite-
Entrée
ment des aliments ne sont souhaitables pour les cen-
trales simples que s’ils sont de forme homogène et
liquide. La production de gaz maximale, d’une quan-
tité donnée de matières premières, dépend du type
de substrats.

Le biogaz se compose entre 55 % et 60 % de mé-


Source : PERACOD
thane, élément énergétique exploitable, mais égale-
ment de dioxyde de carbone et d'une faible
souvent du lisier comme matériau de base. Pour un proportion de sulfure d'hydrogène, d'ammoniaque et
meilleur rendement du gaz produit, des matières pre- d'hydrogène. Parallèlement au biogaz, il existe un ré-
mières végétales sont ajoutées (par ex., maïs, plantes sidu de fermentation formé à partir d'un mélange à
céréalières entières et plantes énergétiques variées base d'eau, de composants minéraux et d'une subs-
telles que le tournesol, le sorgho du Soudan, le radis tance organique non éliminée. Ce résidu peut être uti-
oléifère, le sorgho sucré, etc.). lisé dans le secteur agricole comme engrais
d'excellente qualité et servir à faire circuler les subs-
De leur côté, les installations commerciales travaillent
tances nutritives dans le cadre de la culture de
également sur la base d'eaux usées (stations d'épu-
plantes énergétiques, ou être encore vendu comme
ration), mais aussi des déchets provenant de la pro-
sous-produit pour plus de valeur ajoutée.
duction vivrière, restes de repas, séparateurs à
graisses et déchets d'abattage. La valeur calorifique du biogaz est d’environ 6 kWh/m3
(ou 22 kJ/m3) – ce qui correspond à peu près à un
Alors que plusieurs pays en développement se ser-
demi-litre de fioul. La valeur calorifique nette dépend
vent de la technologie du biogaz depuis des décen-
de l’efficacité des brûleurs ou des appareils. Le mé-
nies – notamment l’Inde et la Chine – cette technologie
thane est un composant précieux du fait qu’on peut
est utilisée seulement récemment dans les pays de
utiliser le biogaz comme carburant.
l’OCDE, en vue à la fois de se débarrasser de déchets
biodégradables et aussi pour s’en servir comme 2.10.1.2.  Possibilités d'application
source d’énergie.
Les installations de méthanisation peuvent être prati-
La connaissance des processus fondamentaux impli- quement rattachées à chaque processus de traite-
qués dans la fermentation du méthane est nécessaire ment destiné aux produits agricoles. L'utilisation
à la planification, à la construction et à l’exploitation énergétique des restes organiques constitue un
des centrales de biogaz. La fermentation anaérobie maillon important dans la chaîne de recyclage des dé-
implique les activités de trois communautés bacté- chets biogènes. Les installations de méthanisation
riennes différentes. Le processus de production bio- peuvent également être le point de départ de l'acti-
gaz dépend de paramètres variés. Par exemple, des vité économique du site local. L'entreprise évoluant
changements de la température ambiante peuvent dans cet environnement profite d'un approvisionne-
avoir un impact négatif sur l’activité bactérienne. Des ment en chaleur non seulement constant mais sûr.
connaissances biotechnologiques approfondies per-
56
Aujourd'hui, le biogaz, dans les pays OCDE, est prin- • réduction de la charge de travail notamment pour
cipalement utilisé dans les centrales de cogénération les femmes en matière de collecte des bois de feu et
afin de produire de l'électricité et de la chaleur. L'élec- de la cuisson ;
tricité produite est ensuite réinjectée dans le réseau • avantages environnementaux par la protection des
public en contrepartie d'une rémunération dont le sols, de l’eau, de l’air et de la végétation de ligneux ;
montant est fixé par la loi. La chaleur produite peut
• bénéfices micro-économiques avec les substituts
être utilisée de manière polyvalente par des groupes
énergétiques et fertilisants, sources de revenus sup-
électrogènes : traditionnellement pour chauffer éta-
plémentaires et de rendements croissants de l’éle-
bles et habitations, dans les serres ou pour sécher
vage et de l’agriculture ; et
des produits agricoles. Son utilisation est toujours plus
• bénéfices macro-économiques par la production
importante dans la production de chaleur industrielle
d’énergie décentralisée, la substitution à l’importation
ou dans l'exploitation de groupes frigorifiques.
et la protection environnementale.
En 2008, la puissance installée dans le monde pour la
Ainsi, la technologie biogaz peut contribuer substan-
génération (ou co-génération) d’électricité issue de la
tiellement à la conservation et au développement, si
biomasse s’est élevée à 52 GW 47.
les conditions concrètes sont favorables. Cependant
2.10.1.3.  Les bénéfices et coûts du biogaz les capitaux élevés d’investissement exigés ainsi que
Les systèmes de biogaz qui fonctionnent bien, peu- les autres limitations des technologies biogaz de-
vent rapporter une quantité non négligeable de bé- vraient être reconsidérées minutieusement.
néfices à leurs utilisateurs, à la société et à Un obstacle énorme à l’introduction à grande échelle
l’environnement en général : de la technologie biogaz est le fait que les couches
• production d’énergie (chaleur, lumière, électricité) ; les plus pauvres des populations rurales n’ont pas les
• transformation de déchets organiques en fertilisants moyens d’affronter de tels coûts d’investissement pour
de haute qualité ; une centrale biogaz, malgré le fait que les systèmes
47 biogaz aient, dans de nombreux cas, fait leurs
Source : Renewables Global • progrès des conditions d’hygiène grâce à la réduc-
Status Report : 2009 Update. preuves économiquement.
tion des pathogènes, des larves et des mouches ;
REN21. Paris 2009.

Figure 2 38

Unité de production de
biogaz industrielle en
Allemagne

Source : Francis Flinch /


Creative Commons
57
Des efforts devraient être fournis pour réduire les Le lisier fermenté est d’ailleurs un meilleur engrais qui
coûts de construction mais aussi pour développer des peut être employé pendant la croissance des plantes
systèmes de crédits et autres financements. Un grand car il ne possède plus l’effet corrosif du lisier frais.
nombre d’exploitants du biogaz assurent que mis à Ainsi, les substances nutritives peuvent être plus ra-
part le consommateur, la société aussi dans son en- pidement absorbées par les plantes et la charge en
semble, peut profiter du biogaz. Une aide financière nitrate pour la nappe phréatique est réduite.
de la part du gouvernement pourrait être considérée
comme un investissement puisqu’elle réduirait les fu- 2.10.1.5. La prise de conscience sociale et politique
turs coûts occasionnés, par l’importation de produits La popularisation de la technologie biogaz va de pair
pétroliers et de fertilisants inorganiques, par l’aug- avec la construction actuelle d’unités sur les champs.
mentation des coûts de santé et d’hygiène et par la Sans prise de conscience sociale de la technologie
dégradation naturelle des ressources. biogaz, de ses avantages et de ses défauts, il n’y au-
2.10.1.4. Le combustible et les fertilisants rait pas suffisamment de raisons pour propager la
technologie biogaz.
Dans les pays en développement, on constate un lien
direct entre le problème de fertilisation et la défores- Dans un même temps, la prise de conscience au sein
tation progressive due à une demande élevée en bois du gouvernement est essentielle. Depuis que les im-
énergie. Dans de nombreuses régions rurales de ces pacts et aspects de la technologie biogaz concernent
pays, la plupart des habitants sont dépendants des tant d’institutions gouvernementales différentes (par
déjections et résidus organiques comme combusti- ex. l’agriculture, l’environnement, l’énergie, l’écono-
bles pour la cuisson et le chauffage. mie), il s’avère nécessaire d’identifier et d’associer
tous les départements gouvernementaux responsa-
Brûler les déjections et les résidus nutritifs cause un
bles à un processus de prise de conscience crois-
gâchis considérable des substances nutritives. Les
sante et de diffusion.
fermiers des pays en développement ont absolument
besoin de fertilisants pour conserver la productivité 2.10.1.6.  La technologie biogaz
de leurs terres cultivées. Trois types de dispositifs simples de biogaz sont pré-
Néanmoins, de nombreux petits fermiers continuent à sentés dans la figure 2-39 :
brûler ces précieux fertilisants, bien qu’ils ne soient • les dispositifs ballon ;
en mesure d’acheter des conditionneurs de sols chi- • les dispositifs à dôme fixé ; et
miques.
• les dispositifs à flotteurs.
Dans le même temps, la teneur techniquement dis-
Le dispositif ballon
ponible en azote, potassium et phosphore contenue
dans les matières organiques est environ de huit fois Le dispositif ballon comprend un sac digesteur (par
celle contenue dans les fertilisants chimiques, actuel- ex. en PVC) dans la partie supérieure duquel est
lement consommés dans les pays en développement. stocké le gaz. L’entrée et la sortie sont directement at-
Plus spécialement pour les petits fermiers, la techno- tachées au film plastifié du ballon. La pression du gaz
logie biogaz est un instrument approprié pour tirer le est obtenue par l’élasticité du ballon et par des poids
meilleur parti de ressources peu abondantes : après ajoutés placés sur le ballon.
l’extraction du contenu énergétique des déjections et Les avantages sont le faible coût, la facilité de trans-
autres déchets organiques, le purin en résultant reste port, la construction peu sophistiquée, les tempéra-
encore un bon fertilisant tolérant toute sorte de sols tures élevées du digesteur, l’épuration facile, le vidage
aussi bien que les meilleures récoltes. et l’entretien. Les inconvénients peuvent être la rela-
58
Figure 2 39 en briquetage (une petite fêlure dans la brique supé-
Configuration d’un système rieure peut causer de lourdes pertes de biogaz). Pour
biogaz typique
cette raison, les installations à dôme fixé sont seule-
ment recommandées si leur construction peut être su-
pervisée par des techniciens en biogaz expérimentés.
La pression du gaz fluctue de façon substantielle en
fonction du volume du gaz stocké. Malgré les tam-
pons contre les températures extrêmes mis sur la par-
tie souterraine, on constate que les températures du
digesteur sont généralement basses.

Le dispositif à flotteur

Les unités à flotteur comprennent un digesteur sou-


terrain et un support de gaz amovible. Le support de
gaz flotte ou bien directement sur la boue en fermen-
Source : PERACOD
tation ou bien tout seul dans une chemise d’eau. Le
gaz est collecté dans le tambour à gaz qui monte ou
tive courte durée de vie, le fort enclin à l’endomma-
redescend selon la quantité de gaz stockée. Le tam-
gement, la faible création d’emploi local et surtout une
bour à gaz ne peut s’incliner grâce au châssis de gui-
autonomie très limitée.
dage. Si le tambour flotte dans une chemise d’eau, il
Le digesteur de type canal ne pourra s’enliser même en présence de substrats
Le digesteur de type canal est une variante du dispo- très solides.
sitif ballon mais est habituellement recouvert d’un film Les avantages sont le mode de fonctionnement sim-
plastique et d’un brise-soleil. Les dispositifs ballon ple et facile à comprendre – le volume de gaz stocké
48 peuvent être recommandés là où le film du ballon ne est directement visible, la pression du gaz est
Les paragraphes et chiffres
risque pas d’être endommagé et là où les tempéra- constante et déterminée par le poids du support de
suivants sont tirés de la Stra-
tégie Nationale de Dévelop- tures sont constantes et élevées. gaz, la construction est facile et les erreurs de
pement des Energies
Renouvelables pour la Lutte Le dispositif à dôme fixé construction ne mèneront à aucun problème majeur
contre la Pauvreté. Rapport
de fonctionnement et de rentabilité du gaz.
général (provisoire). Minis- L’équipement à dôme fixé comprend un digesteur
tère de l’Energie et des
Mines. Mai 2005. On y trouve avec un support de gaz inamovible qui est situé au Les inconvénients sont les coûts élevés du tambour
de plus amples détails sur le
dessus du digesteur. Quand la production de gaz en acier et l’enclin à la corrosion des parties en acier.
mode de calcul.
commence, la boue de vase est déplacée dans le ré- À cause de cela, les unités à flotteurs ont une durée
servoir compensatoire. La pression du gaz augmente de vie plus courte que celles dotées d’un dôme fixé et
avec le volume de gaz stocké et avec la différence de nécessitent des coûts réguliers de maintenance pour
poids entre le niveau de boue dans le digesteur et le la peinture du tambour.
niveau de boue dans le trop-plein. 2.10.1.7.  État des lieux des installations
Les avantages sont les coûts de construction relati- de biogaz au Sénégal 48
vement faibles, l’absence de parties amovibles et de La technologie du biogaz n’est pas très développée
parties oxydables. Si les équipements sont bien au Sénégal ; en ce qui concerne les unités installées,
construits, ils ont une longue durée de vie. il s’agit en général des unités expérimentales tenues
La construction souterraine permet un gain de place par ENDA TM, l’ENSUT, le CNRA, le CERER, le
et protège le digesteur des variations de température. CIRAD, l’ISRA.
La construction offre des opportunités en matière Le coût élevé des installations a constitué et constitue
d’emploi local. encore l’un des plus grands obstacles pour une diffu-
Les inconvénients sont principalement les fréquents sion en milieu rural. En 1980, l’ISRA a installé pour la
problèmes rencontrés au niveau du réceptacle de gaz première fois un fermenteur fait de fûts de récupéra-
59
tion de 200 litres. Evidemment, le même processus de biométhanisation
peut être engagé pour d’autres déchets (surtout li-
Malgré les difficultés techniques et coûts d’installation
quides) organiques industriels, comme par exemple
initiaux, la technique mériterait d’être développée da-
des usines de conserve de poisson, de fabrication de
vantage au Sénégal, vu le potentiel théorique des res-
jus de fruit, de brasserie, de production et de raffine-
sources en biomasse.
rie d’huile végétale, etc.
2.10.1.8.  Le potentiel des ressources du biogaz Les ordures ménagères
au Sénégal
La gestion des ordures ménagères pose un énorme
Le potentiel des sources éventuelles de biogaz a été problème au Sénégal. Mbeubeuss, la seule décharge
évalué pour le Sénégal. Il s’agit des sources suivantes : en banlieue de Dakar, reçoit quotidiennement environ
• les déjections des animaux ; 1 300 tonnes d’ordures 51. Au niveau des régions, les
• les déchets de type industriel ; déchets sont déposés dans les décharges situées à
la périphérie des habitations.
• les ordures ménagères ; et
• les excrétions humaines. On estime que les déchets biodégradables consti-
tuent environ un tiers de la totalité des déchets au Sé-
Les déjections animales
négal. S’il y avait tri des déchets, ils pourraient être
On trouve des déjections animales partout au Séné- compostés et ainsi contribuer à une amélioration des
gal, mais leur ramassage et collecte pose un pro- sols ou participer à améliorer le bilan énergétique à
blème de logistique dû au caractère non sédentaire travers la production de biogaz. Un effet secondaire
de l’élevage au Sénégal. Cependant, il est assez fa- positif serait la diminution des polluants environne- 49
cile de procéder à une valorisation des ces déchets à mentaux ainsi que de vecteurs de transmission de Un kilogramme de matière
sèche de ces déchets animaux
petite échelle et à court terme en installant des di- maladies. produit en moyenne 200 litres
gesteurs à biogaz dans les exploitations familiales ce de biogaz (65 % de méthane et
Même si on ne considère que les ordures ménagères 35 % de CO2).
qui est fait par le biais du PNBDS depuis 2010.
des populations urbaines, on peut estimer une quan-
50
Auparavant, le Ministère de l’Energie avait calculé la tité de 1 050 tonnes de déchets par jour (soit 630 Une première unité de biomé-
thanisation “Transpaille“ a été
production de biogaz (production théorique et pro- tonnes de matières sèches), ce qui amènerait à une installée à l’abattoir de Thiès en
duction accessible qui représente environ 40 % de la production théorique en biogaz par an de 41,4 mil- 1989.

production théorique) à partir des déjections animales lions de m3 (23 000 TEP) 52. 51
sur la base des chiffres de 1998. Source:http://www.idrc.ca/fr/ev-
Les excrétions humaines 109807-201-1-DO_TOPIC.html
[consulté le 23 mars 2010 à
Sur un an, les productions de biogaz à partir des dé-
Un obstacle à l’exploitation énergétique des excré- 10h56]
chets animaux seraient :
tions humaines (fèces, urine) est la défaillance des 52
Production théorique de biogaz : 2 233 millions de m , 3 systèmes sanitaires au Sénégal. La plupart des mé- En sachant qu’une tonne de
matière sèche produit 180 m3
soit 1 250 480 TEP49. nages au Sénégal ne dispose pas d’accès à un égout de biogaz.
ni à une fosse septique qui pourrait être vidangée.
Production accessible de biogaz : 933 millions de m3,
Même la capitale Dakar écoule la majeure partie de
soit 522 480 TEP.
ces excrétions directement dans la mer sans passer
Les déchets de type industriel par un système d’épuration. On ne compte que la sta-
Ici, plus spécialement, le potentiel des déchets des tion de traitement de Cambèrene pour traiter une par-
abattoirs a été examiné de près . D’après les chiffres
50 tie des eaux usées de Dakar.
de l’année 1999, on pourrait obtenir : Pour calculer le potentiel en production de biogaz,
Une production théorique égale à la production ac- seule la population urbaine a été prise en compte. En
cessible: 95 000 m3, soit 53 TEP pour les déchets so- estimant la quantité de déjections à 0,07 tonnes de
lides et 125 000 m3, soit 70 TEP pour les déchets matière sèche par personne et par an, on a supputé
liquides. une production théorique de biogaz de 267 millions
de m3, soit 149 700 TEP et une production accessible
60
de biogaz de 123 millions de m3, soit 68 900 TEP. annuellement 1 769 GWh d’électricité en sachant que
1 m3 de biogaz (60 % de méthane) peut produire 1.3
Il y a lieu d’indiquer que la méthanisation des déchets
kWh d’électricité. Cependant, le potentiel énergétique
humains procure non seulement de l’énergie et du
en matière de production d’électricité ou de chaleur
compost propre, mais assure surtout un traitement
des déchets industriels, agricoles ou communaux n’a
biologique et hygiénique peu coûteux des matières
pas encore été examiné profondément de nos jours
fécales.
au Sénégal.
Des structures communautaires comme les internats,
Aujourd’hui, l’État sénégalais n’opte pas pour une ap-
les marchés, les centres hospitaliers, les camps mili-
proche industrielle, mais pour une approche village au
taires, les prisons constituent des sites contrôlés où la
niveau des ménages.
production de biogaz à partir des déchets humains
est possible. Le Sénégal a lancé un programme national de biogaz
domestique dont la phase pilote s’étendra de 2010 à
Dans des pays secs comme le Sénégal, la possibilité
2013. La zone d’intervention est le Bassin Arachidier,
technique d’épurer les eaux usées de communautés
plus précisément les zones de Fatick, Kaolack et Kaf-
à travers un filtrage par le sable existe. Dans un tel
frine et la zone péri urbaine de Dakar.
système de filtrage, les ménages et entreprises écou-
lent leurs eaux usées et matières fécales à l’aide d’un L’objectif est l’installation de 350 biodigesteurs jusqu’à
canal de ceinture dans un bassin de décantation in- la fin de l’année 2010 et de 8 000 appareils supplé-
cliné qui sert à produire du biogaz qui est par la suite mentaires jusqu’à 2013.
capturé et peut par exemple alimenter des moteurs.
Le modèle retenu est un modèle à dôme fixe qui a
Les eaux sont par la suite épurées à travers un filtre
déjà fait ses preuves en Amérique Latine, au Burkina
lent à sable qui peut consister de jusqu’à 7 segments.
Faso et au Rwanda. Selon la taille du ménage, des
L’eau s’écoule à la partie inférieure après avoir per-
modèles de différentes tailles allant de 4 à 12 m3 se-
colé à travers la masse du sable. Les eaux ainsi épu-
ront utilisés.
rées peuvent servir à des fins d’irrigation.
Les populations ciblées au Bassin Arachidier sont les
En résumé, selon les estimations, le Sénégal dispose
ménages possédant un cheptel bovin et pratiquant
d’un potentiel moyen annuel de production de biogaz
l’élevage intensif, c’est-à-dire qu’ils associent déjà éle-
accessible provenant par ordre d’importance des :
vage et agriculture et où les animaux passent la nuit à
• déjections des animaux : 933 millions de m3, soit domicile (le problème de collecte de bouse ne se
522 480 TEP ; pose donc pas).
• excrétions humaines : 123 millions de m3, soit 68
L’utilisation du digestat pour lutter contre la dégrada-
900 TEP ;
tion des sols dans la zone sera encouragée par les
• ordures ménagères : 41,4 millions de m3, soit 23 000 autorités.
TEP ; et
2.10.2.  Les biocarburants
• déchets d’abattoir : 0,22 millions de m3, soit 123
TEP. 2.10.2.1.  Vue d’ensemble

Soit au total 1 360,62 millions de m3 de biogaz ou 761 Le biodiesel et le bioéthanol sont actuellement les
783 TEP. deux principaux biocarburants dans le monde.

En théorie, cette quantité de biogaz pourrait générer Le bioéthanol a comme base la biomasse contenant
du sucre, de l’amidon ou de la cellulose. La produc-
tion se fait en plusieurs étapes : extraction du sucre,
amidon ou cellulose, fermentation, distillation, rectifi-
cation et déshydratation.
61
Le biodiesel a comme matière de base des parties sylvicoles au lieu des plantes utiles.
des plantes oléagineuses, comme par exemple des
La plupart de la production agricole se trouve dans
graines (colza, tournesol, soja et autres), les noyaux
les pays en voie de développement et les pays émer-
de palmiers ou des noix. Après l’extraction d’huile à
gents. Ceci représente un grand potentiel pour l’éco-
partir des plantes oléagineuses, l’huile est estérifiée
nomie agricole de ces pays mais constitue aussi
en biodiesel dans un site de production chimique.
certains risques. Pour ne pas répéter les erreurs du
Les biocarburants sont principalement utilisés dans le développement de la première génération des bio-
domaine du transport. Ils couvrent aujourd’hui à peu carburants, l’utilisation actuelle de ces résidus doit
près 1,5 à 2 % des besoins en carburants de trans- être prise en compte – dans beaucoup de pays en
port .
53 voie de développement, les résidus agricoles et syl-
vicoles sont utilisés comme combustible domestique
À la mode au début des années 2000 où ils furent
ou comme fertilisant. Avant même d’engager le pro-
considérés comme la grande solution pour satisfaire
cessus d’exploitation en biodiesel, cette utilisation ac-
les besoins énergétiques du secteur du transport et
tuelle doit être prise en considération ainsi que les
furent produits massivement aux Etats-Unis et au Bré-
conséquences potentielles sur l’environnement pour
sil, les biocarburants de première génération sont
arriver à une vraie exploitation durable.
désormais critiqués comme fausse solution, gour-
mands en énergie, néfastes pour la forêt à cause de
2.10.2.2.  La filière biocarburants au Sénégal
défrichements, concurrents de la production alimen-
taire et partiellement responsables de la hausse des Le Sénégal a introduit un programme national des bio-
prix des denrées alimentaires de base. carburants.

Ceci est d’autant plus problématique dans un pays La filière bioéthanol


comme le Sénégal qui n’a pas réussi à atteindre une La filière bioéthanol repose sur la première usine de
autosuffisance alimentaire. production bioéthanol au Sénégal qui se trouve à Ri-
La nouvelle génération des biocarburants chard-Toll. La Compagnie Sucrière Sénégalaise (CSS)
y a mis en place une unité de production de 10 000
L’AIE, ensemble avec la GIZ 54, propose aujourd’hui
tonnes d’éthanol par an à partir de 35 000 tonnes de
53
une autre approche. La production des biocarburants
mélasse, un résidu du raffinage du sucre blanc, issu Source: Renewables Global
pourrait être plus que doublée jusqu’en 2030 et Status Report : 2009 Update.
de la canne à sucre. La production d’éthanol est des- REN21. Paris 2009.
Figure 2 40 tinée à l’autoconsommation de la société et à appro-
54
Production mondiale de bioéthanol visionner le marché. En dehors de cette production Sustainable Production of Se-
et de biodiesel, 2000-2008
d’éthanol, on envisage une production de 25 000 hec- cond-Generation Biofuels. Po-
tentials and perspectives in
tolitres d’alcool par an, destinée au marché sénégalais major economies and develo-
en alcool pharmaceutique, industriel et de parfume- ping countries Information
paper. iea-International Energy
rie. La vinasse issue du processus de distillation est Agency / par Anselm Eisen-
traut. February 2010.
destinée à une commercialisation en tant qu’engrais
renouvelable.

En attendant l’introduction du cadre législatif, l’usine


ne produit pas encore de bioéthanol pur qui peut être
mélangé avec l’essence, mais seulement du bioétha-

Source : REN21, Renewables Global Status Report : 2009 Update.

couvrir durablement jusqu’à 5 % des besoins mon-


diaux en carburants dans le domaine des transports,
si on utilisait seulement 30 % des résidus agricoles ou
62
nol hydraté qu’elle stocke pour l’instant. options, comme p.ex. le ricin, ne sont pas exclues
dans un avenir plus lointain 56.
Ce retard est dû :
Caractéristiques de la plante :
• à l’absence d’un cadre législatif et réglementaire :
L’État sénégalais est en train de définir les dispositifs lé- La plante Pourghère (Tabanani en Wolof) est large-
gislatifs pour incorporer l’éthanol dans la gamme des ment répandue au Sénégal. Elle est souvent utilisée
carburants disponibles sur le marché. La loi sur les bio- comme plante de haies vives dans l'agriculture ou
carburants a été promulguée et votée en 2010 55 ; comme clôture et ses feuilles sont employées pour
soigner certaines maladies de la peau. Les haies ai-
• au manque de technologie disponible : au début,
dent à protéger le sol contre l'érosion. Avec de
on envisageait d’introduire le bioéthanol dans le mar-
bonnes conditions, la plante peut atteindre des hau-
ché en le mélangeant en faible pourcentage à l’es-
teurs de 5 mètres. Entièrement toxique, la plante et
sence. Ce dosage de 5 à 10 % devait, à l’origine, se
ses fruits sont inconsommables. Mais son fruit est
faire à la SAR même, mais en fin de compte, on s’est
riche en une huile qui peut être utilisée pour produire
rendu compte que ce mélange devait se faire plus
du biocarburant, du savon ou des bougies. La plante
près du consommateur, p.ex. au niveau des distribu-
doit pousser pendant 3 ans avant de porter des fruits.
teurs, mais qui ne disposent pas encore des disposi-
tifs techniques nécessaires ; et Après le pressage et l’extraction, on obtient une huile
55
Un comité national des bio-
qui présente une grande viscosité et d’une grande
• aux coûts : les premières estimations de prix
carburants a également été qualité qui se réduit lorsqu'on la chauffe pour devenir
installé au mois d’avril 2010. n’étaient pas compétitives avec celles des combusti-
au delà de 110 °C, semblable au Diesel. Une plante
bles fossiles. Là encore, c’est le manque de cadre ré-
56 fournit chaque année de 1 à 4 kg de graines. Huit kilos
Information du professeur glementaire qui se fait ressentir et les autorités
Sana Faty, directeur des bio- de fruits donnent 1,5 litre de biocarburant. Chaque
carburants et de la bio- concernées cherchent les solutions appropriées pour
graine contient environ 35 % d'huile. Les arbustes pro-
masse, le 16 avril 2010 dans y remédier.
un entretien. duisent des fruits pendant 50 ans et poussent sans
La filière biocarburants entretien véritable dans des régions semi arides, dans

Le gouvernement du Sénégal a décidé de baser son


programme national des biocarburants sur l'huile de
jatropha curcas dans un premier temps mais d’autres

Figure 2 41
Jatropha curcas

Source : R. K. Henning ;
www.Jatropha.org
63

Figure 2 42
Extraction d’huile des
graines de jatropha

Source : R. K. Henning ; www.Jatropha.org

des conditions difficiles et en plein Soleil mais leur ren- D’autres pays d’Afrique de l’Ouest, comme le Ghana
dement dépend quand même de la fertilité des sols. ou le Burkina Faso, ont pris de l’avance sur le Sénégal
dans l’exploitation du jatropha et de grandes entre-
En dehors de programmes de fabrication de biodiesel
prises multinationales s’investissent dans le secteur.
à grande échelle, le tabanani peut être utilisé à des
Des voix critiques craignent que ce modèle de grande
fins communautaires pour faire tourner des pompes
plantation détruise la petite paysannerie et pousse les
et d’autres moteurs au niveau communal.
agriculteurs indépendants à devenir ouvriers agri-
Dans un cas optimal d’exploitation, les résidus du coles.
pressage pourraient même être utilisés pour fabriquer
En résumé on peut dire que comme pour tout le sec-
du biocharbon ou du biogaz et, avec les derniers dé-
teur des biocarburants, l’introduction de nouvelles cul-
chets de ce processus utilisés comme engrais, on ar-
tures à une grande échelle doit être maniée avec la
riverait à une exploitation véritablement équilibrée de
plus grande prudence et en pondérant les avantages
cette plante. Cependant il n’y a pas encore d’expé-
et inconvénients.
riences à ce niveau au Sénégal.
Le programme national jatropha du Sénégal repose
Même sans exploiter ces dernières possibilités d’uti-
sur les principes suivants :
lisation, cette plante représente pour beaucoup un
énorme potentiel énergétique pour l’avenir. • fixation du prix au producteur suffisamment rému-
nérateur pour susciter l’intérêt des planteurs ;
D’autres critiquent le rendement pauvre par hectare
• la majorité des parts du capital des sociétés ou en-
cultivé et la culture de cette plante pourrait supplanter
treprises doit revenir aux opérateurs privés sénéga-
des cultures vivrières autant que les autres biocarbu-
lais dans tous les domaines d’intervention de la filière
rants. S’il est vrai que la plante peut pousser presque
biocarburant ;
partout, elle ne donne cependant son meilleur rende-
ment que sous des conditions optimales, c’est-à-dire • l’affectation des terres est du ressort des collectivi-
sur les terrains irrigués, qui sont donc privilégiés par tés locales par conséquent pas de bail ni cession aux
les grandes entreprises. Ainsi, le jatropha se retrouve promoteurs de biocarburant.
en concurrence directe avec les cultures pour l’ali- Il est envisagé de planter 321 000 hectares au Séné-
mentation. gal. Ce chiffre découle du nombre des communautés
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rurales au moment de l’élaboration du programme 57. échelle ont été menées auparavant pour exploiter la
Il était prévu que chaque communauté rurale amé- plante au Sénégal dont celle du PROGEDE qui a été
nage et exploite son propre hectare. L’objectif est d’at- primée lors du ‘’Development Market Place’’, organisé
teindre, à long terme, une production de 1 190 000 par la Banque Mondiale en 2006. Le PROGEDE pro-
000 litres d’huile jatropha en état crue dont on pourrait cède depuis 2003 à des plantations de jatropha pour
obtenir 1 134 000 000 litres de biodiesel traité. Ce chif- la production de biocarburant. La prime avait permis
fre équivaut à la consommation nationale de Diesel l’acquisition de plateformes multiservices fonctionnant
tout usage confondu (carburant voitures, combustible avec l’huile de jatropha.
pour la Senelec et également carburant pour les pi-
Le programme national tient compte du fait que la cul-
rogues) au moment de l’élaboration du programme.
ture du jatropha ne doit pas concurrencer les cultures
Elle devrait donc pouvoir, en principe, remplacer les
vivrières. Les plantes se trouvent surtout au niveau
importations de Diesel.
des haies ou au niveau des cultures associées mé-
Une fois que la production aura atteint des dimensions langées avec des cultures vivrières.
vraiment significatives, une introduction du produit au
niveau national est envisagée mais pour pouvoir com-
mercialiser le biodiesel à l’échelle nationale, il faudra,
encore une fois, un cadre légal et réglementaire bien
57
défini.
Entre temps ce chiffre s’est
vu en hausse.
À ce jour, on estime les surfaces cultivées à environ 15
58 000 hectares 58. La plupart de plantes ont été plantées
Au mois d’avril 2010. Le re-
censement exact se trouve en 2007, de sorte qu’il n’y a pas encore de récoltes
encore en cours. pour ces cultures. Diverses expériences à petite

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