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Sémiologie des pathologies hypophysaires

Dr Faten Hadj Kacem Akid

I- RAPPEL PHYSIOLOGIQUE :
L’hypophyse est une glande située dans la selle turcique creusée dans l’os
sphénoïdal à la base du crâne.
C’est un véritable "chef d’orchestre" du système endocrinien.
Elle dépend de l’hypothalamus, qui est reliée à l’hypophyse par la tige pituitaire.
L’hypophyse est constituée d’un lobe antérieur (anté hypophyse) et d’un lobe
postérieur (post hypophyse).
L’antéhypophyse est constituée de 5 types de cellules secrétant 6 hormones : FSH,
LH, ACTH, GH, TSH, PRL.
Le lobe postérieur ou neurohypophyse, lui, est le lieu de stockage de l’ocytocine et
de la vasopressine (ADH).
La sécrétion hormonale hypophysaire est sous la dépendance des neurones
hypothalamiques qui traversent la tige pituitaire.
Ces neuro-hormones sont relayés dans un réseau capillaire à l’éminence
médiane, ainsi les hormones arrivent à l’antéhypophyse, tandis qu’il y a un
acheminement neuronal à Travers la tige de l’ocytocine et de l’ADH jusqu’à la post
hypophyse ou ils seront stockés avant d’être libérés de la circulation générale.
6 neuropeptides hypothalamique sont secrétés : TRH, CRH, LHRH, GHRH.
Toutes ces neuro hormones sont simulatrices sauf la dopamine et la somatostatine
qui sont inhibitrices.
A l’inverse, chacune de ces hormones est sous le contrôle négatif des hormones
périphériques (Feed back négatif)
La prolactine freine sa propre sécrétion par un effet hypothalamique
dopaminergique.
II- INSUFFISANCE ANTEHYPOPHYSAIRE (IAH) :
II-1. Définition :
C’est un déficit complet ou partiel d’une ou de plusieurs hormones hypophysaires.
Elle est secondaire à une atteinte directe de l’antéhypophyse ou à une rupture de la tige
ou à des lésions hypothalamiques (IAH secondaire). Elle peut être organique ou
fonctionnelle.

II-2. Insuffisance antéhypophysaire globale :


II-2.1. Clinique :
Le début est progressif, ce diagnostic peut être méconnu pendant des mois voir des
années.

II-2.1.1. Insuffisance thyréotrope :


Asthénie, lenteur, constipation, frilosité, bradycardie
La peau est fine, sèche, dépilée surtout au niveau des aisselles
Il n’y a pas d’infiltration cutanéomuqueuse à la différence de l’hypothyroïdie
périphérique.

II-2.1.2. Insuffisance corticotrope :


Asthénie, hypotension artérielle, amaigrissement, troubles digestifs (nausées,
vomissements).
Il existe surtout une dépigmentation cutanée prédominante au niveau des zones
normalement pigmentées : aréoles mamelonnaire et organes génitaux externes, les
muqueuses sont normocolorées.

II-2.1.3. Insuffisance gonadotrope :


 Chez la femme : aménorrhée secondaire sans bouffées de chaleur, diminution
du volume mammaire, atrophie vaginale, diminution de la libido
 Chez l’homme : diminution de la libido, impuissance érectile, petits testicules,
mous insensibles avec raréfaction de la barbe.

II-2.1.4. Insuffisance somatotrope :


 Sans traduction clinique chez l’adulte sauf quand elle est associée à un déficit
en ACTH qui peut donner des épisodes d’hypoglycémies.
 Chez l’enfant, elle se manifeste par un nanisme harmonieux

II-2.1.5. Insuffisance lactotrope : Aucun signe clinique


L’ensemble de ces déficits donne un aspect caractéristique : visage bouffi, pâle,
finement ridé avec de cheveux fins et raréfiés.
L’aspect est à la fois juvénile et précocement vieilli. Dans l’insuffisance
antéhypophysaire, trois signes sont importants : pâleur, dépilation et
dépigmentation.

II-2.2. Biologie :
II-2.2.1. Retentissement périphérique du déficit hormonal :
 Anémie modérée (8 - 10 g d’hémoglobine)
 Glycémie à jeun basse
 Hyponatrémie inconstante

II-2.2.2. Explorations hormonales :


Permettent de confirmer le diagnostic d’une insuffisance antéhypophysaire.
 Déficit thyréotrope :
 FT3  FT4 TSH  ou normale ne répondant pas à la TRH
 Déficit corticotrope :
Cortisolémie 
Test au synacthène ® ordinaire/cortisol : négatif
ACTH plasmatique  ne répondant pas au CRH.
 Déficit gonadotrope :
Chez l’homme : testostéronémie 
Chez la femme : oestradiolémie 
Chez les 2 sexes : FSH  LH , test au LHRH (Gn RH) sur FSH - LH
négatif
 Déficit somatotrope :
GH  non stimulable sous hypoglycémie insulinique
 Déficit lactotrope :
Prolactinémie basse

II-2.3. Etiologie :
II-2.3.1. Cause vasculaire : Maladie de Sheehan :
C’est une nécrose hémorragique de l’hypophyse au cours d’un
accouchement hémorragique laborieux avec une hypovolémie.
Dans le post partum, on note l’absence de montée laiteuse (déficit en PRL),
pas de repousse des poils pubiens et pas de retour des couches.
Progressivement, vont apparaître tous les autres signes d’hypopituitarisme
et le tableau peut mettre des années à se constituer.

II-2.3.2. Tumeurs hypophysaires et hypothalamiques :


 Adénome secrétant ou non secrétant entraînant une compression des autres
cellules antéhypophysaire entraînant un tableau d’insuffisance antéhypophysaire plus ou
moins complet avec un syndrome tumoral hypophysaire (céphalées, troubles visuels, voir
hypertension intra-cranienne).
 Craniopharyngiome :
Tumeurs embyonnaires se développant dans la région sellaire et supra
sellaire se caractérisent par la présence des calcifications suprasellaires.
 Autres étiologies : rares : métastase hypophysaire, lymphomes…

II-2.3.3. Causes iatrogènes :


- Chirurgie hypophysaire
- Radiothérapie hypophysaire

II-2.3.4. Causes inflammatoires et infectieuses pouvant affecter


l’axe hypothalamo-hypophysaire :
Tuberculose, sarcoïdose, mycose, histiocytose X.

II-2.3.5. Processus auto-immun :


Hypophyse lymphocytaire auto-immune.

II-2.3.6. Causes métaboliques :


- Hémochromatose
- Dénutrition ou anorexie mentale : déficit fonctionnel
II-2.3.7. Causes congénitales surtout chez l’enfant :
- Malformation de la ligne médiane
- Hypoplasie de l’antéhypophysaire
- Selle turcique vide primitive

II-2.3.8. Causes traumatiques rares : entraînant une rupture de la tige


pituitaire

II-2.3.9. Cause idiopathique :


II-2.4. Formes cliniques :
II-2.4.1. Pan-hypopituitarisme :
L’insuffisance antéhypophysaire associée à une insuffisance post-
hypophysaire définissent un hypopituitarisme global.

II-2.4.2. Insuffisance antéhypophysaire dissociée :


L’aspect le plus fréquemment touche l’axe somatotrope notamment (déficit en
GH) chez l’enfant.

II-2.4.3. IAH chez l’enfant :


Dominée par deux manifestations : le nanisme secondaire au déficit en GH
(retard staturo-pondéral avec malaises hypoglycémique et cassure de la courbe
staturale) et l’impubérisme (déficit gonadotrope).

II-2.5. Traitement :
II-2.5.1. Traitement étiologique :
II-2.5.2. Traitement substitutif à vie :
 Hydrocortisone en 1er lieu : 20-30 mg/j
 Puis thyréotrope par la L. Thyroxine
 Pour le déficit gonadotrope : Homme : testostérone retard
Femme : oestroprogestatif
III- ACROMEGALIE :
III-1. Introduction :
C’est une maladie caractérisée par un syndrome dysmorphique acquis liée à
une hypersécrétion de GH chronique non freinable, due presque toujours à un
adénome hypophysaire.
C’est une pathologie rare (40 à 70/million d’individus)
Elle touche l’adulte d’âge moyen, sexe ratio = 1

III-2. Syndrome d’hypersécrétion de GH :


III-2.1. Aspect clinique et radiologique :
III-2.1.1. Syndrome dysmorphique acrofacial :
* Massif crânio-facial :
- Visage allongé lourd, menton saillant en avant, arcades sourcilières et
zygomatiques saillantes, maxillaire inférieure hypertrophié, perte de l’articulé
dentaire, écartement dentaire.
- Base du nez large, lèvres épaissies et charnues
- Macroglossie, oreilles larges
- Peau épaisse creusée de ride profonde (Aspect Besial et vieilli)
- Radiographie du crâne : épaississement de la voûte, condensation des parois
sellaires, hypertrophie des clinoïdes antérieures et postérieures avec saillie du
tubercule de la
selle (Bec acromégalique) et sailli de la protubérance occipitale (Chignon
acromégalique). Sinus frontaux hypertrophiés, sinus maxillaires hypertrophiés,
maxillaires inférieurs hypertrophiés avec ouverture de l’angle mandibulaire,
écartement dentaire.
* Extrémités :
- Arthralgies
- Paresthésies : syndrome du canal carpien et du canal tarsien
- Mains : épaisses larges, doigts boudinés (signe de retrait de bague)
- Pieds : larges infiltrés, changement de pointures
- Radiographie : hypertrophie du sésamoïde du pouce, ostéophytose, épaississement
de la corticale et des interlignes articulaires, hypertrophie des houppes des
phalanges, épaisseur du coussinet plantaire > 22 mm.
* Rachis :
- Le rachis est déformé avec une cyphose dorsale et une hyperlordose lombaire
compensatrice, projection du sternum en avant, abdomen saillant (aspect en
Polichinelle).
- Radiographie du rachis : corps vertébraux larges, ostéophytoses, ostéoporose et
déformation du rachis.
* La peau :
- La peau est épaissie, grasse, rugueuse, infiltrée avec sueurs abondantes d’odeur
fétide
- La pilosité ambo-sexuelle est abondante
- Les varices des membres inférieurs sont fréquentes
* Viscères hypertrophiés :
- Hypertrophie des organes génitaux externes, du foie, du cartilage, du larynx (raucité
de la voix), du colon (polypes colique), du rein (hyperfiltration glomérulaire) et de
la thyroïde (goitre).

III-2.1.2. Signes généraux :


* Asthénie physique
* Troubles génitaux : impuissance sexuelle, diminution du libido et trouble
des règles chez la femme
* Troubles psychiques : dépression
* Somnolence diurne avec apnée de sommeil

III-2.2. Biologie :
III-2.2.1. Examen d’orientation :
- Diabète (10 - 20 % des cas) ou intolérance aux glucose
- Augmentation des triglycérides.
- Hyperphosphorémie, hypercalciurie (50 % des cas), avec calcémie souvent normale

III-2.2.2. Confirmation du diagnostic :


- GH de base : augmentée (> 10 ng/ml)
- GH/HGPO : Absence de freinage par HGPO (la GH ne s’abaisse pas au dessous
de
1 ng/ml).
- IGF -1 : augmenté

III-3. Syndrome tumoral hypophysaire :


III-3.1. Clinique :
III-3.1.1. Céphalées : retro-orbitaires et frontales
III-3.1.2. Troubles visuels :
- Altération du champ visuel : quadrianopsie temporale supérieure uni ou
bilatérale puis hémianopsie bi-temporale.
- La diminution de l’acuité visuelle et l’atrophie optique se voient à un stade tardif.

III-3.1.3. Hypertension intra-crânienne (HTIC) :


III-3.1.4. Signes de compression hypothalamique :
Trouble thermiques, soif, troubles du comportement alimentaire…

III-3.1.5. Signes d’insuffisance antéhypophysaire avec galactorrhée :


III-3.2. Biologie :
III-3.2.1. Confirmation hormonale du déficit anté-hypophysaire (voir cours

IAH) :

III-3.2.2. Hyper prolactinémie de déconnexion hypothalamo-


hypophysaire :

III-3.3. Radiologie :
III-3.3.1. Radiographie de la selle turcique (ST) :
Selle turcique agrandie à double fond

III-3.3.2. IRM hypothalohypophysaire :


L’IRM précise la taille de l’adénome (micro ou macro-adénome) et les
rapports avec les organes de voisinage.

III-4. Evolution :
III-4.1. Evolution spontanée :
III-4.1.1. Complications liées à l’expansion tumorale :
Ce sont des complications neurophtalmiques et endocriniennes :
- Troubles visuels, céphalées
- Insuffisance anté-hypophysaire
- Apoplexie pituitaire

III-4.1.2. Complications liées à l’excès de GH :


* Complication cardio-vasculaires :
- Cardiomégalie avec insuffisance cardiaque par cardiomyopathie
- HTA volémie dépendante à rénine basse
* Diabète sucré
* Complications ostéoarticulaires :
- Rhumatisme acromégalique d’ERDHEIM
- Arthropathies acromégaliques
* Complications neuro-musculaires :
- Myopathie acromégalique
- Syndrome de canal carpien et canal tarsien
* Lithiase rénale due à l’hypercalcémie :
* Mortalité : augmente due aux complications cardio-vasculaire et
cancéreuse : mammaire, colique…

III-4.2. Evolution en cas de guérison :


Désinfiltration, diminution de l’hypersudation, disparition du syndrome du canal
carpien, céphalées, asthénie. La tension artérielle se stabilise (guérison dans 15 % des
cas)
Les déformations osseuses persistent, la cardiomyopathie et l’insuffisance
cardiaque s’améliorent.

IV- TRAITEMENT :
Chirurgie hypophysaire par voie transphénoïdales ou transfrontales :
* Radiothérapie complémentaire souvent indiquée
* Traitement médical par analogues à la somatostatines :
somatuline LP ®

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