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Valéry Malécot
UMR A 462 et Département de Sciences biologiques, Institut ntional d’horticulture, 2 rue Le Nôtre,
F-49045 Angers Cedex 01
I. INTRODUCTION
Les disciplines naturalistes, telles que la botanique, sont généralement perçues comme sur-
années ou désuètes par les décideurs actuels des politiques scientifiques. Selon une per-
ception plus courante, les botanistes sont généralement considérés comme de doux
dingues, se promenant dans la nature les yeux rivés au sol à la recherche de la plante rare.
Ces descriptions, colportées depuis des décennies, correspondent-elles à une réalité, en
particulier en ce qui concerne les disciplines de la systématique et de la taxinomie végé-
tales en France ? C’est à cette question que nous allons tenter de répondre en utilisant au
maximum des indices d’activité telles que l’enseignement dans ces disciplines et les pro-
ductions scientifiques qui sont disponibles dans un nombre de plus en plus important de
bases de données.
En 1992, Poncy a réalisé une enquête sur l’enseignement de la botanique en France et
en publia les résultats dans la revue Biosystema (Poncy, 1994). Elle concluait que les pro-
jets d’ordre systématique ne manquaient pas, mais que c’étaient les moyens humains qui
pêchaient par leur faiblesse. Elle signalait ainsi la carence française dans ces grands pro-
jets mais, reprenant Chauvet et Olivier (1993), signalait que « pour coopérer il faut exis-
ter ». Ainsi il y a dix ans, Poncy (1994) considérait que l’une des conditions du
renforcement des moyens humains en systématique végétale était la mise en place d’une
formation doctorale adéquate afin d’assurer le renouvellement des botanistes systémati-
ciens français.
Dix ans après, notre démarche a été d’une part de tenter de recenser les formations à la
botanique et à la systématique végétales proposées par des établissement d’enseignement
supérieur français et d’autre part d’identifier les lieux où des activités de recherches en sys-
tématique végétale étaient conduites, via la soutenance de thèses et les publications scien-
tifiques, et enfin d’étudier l’évolution de ces activités au cours des 25-30 dernières années.
Avant d’aborder ces points, ils nous a semblé nécessaire de préciser le cadre de travail en
donnant les définitions des termes utilisées dans la suite de ce document, les relations de
la systématique avec les autres disciplines et les enjeux de cette discipline.
II. DÉFINITIONS
A. Taxinomie et systématique
Historiquement taxinomie est un synonyme de systématique et aujourd’hui, l’usage est :
- soit de restreindre la taxinomie à l’étude des classifications alors que la systématique
est la science qui s’occupe de la classification des êtres vivants, de leurs variations et de
leur évolution,
- soit d’utiliser le terme taxinomie pour désigner la science qui s’occupe de la classifi-
cation des êtres vivants, de leurs variations et de leur évolution.
Dans le reste de cet exposé, ou s’efforcera de n’utiliser que le premier de ces deux usages,
c’est-à-dire de considérer la taxinomie comme une subdivision de la systématique.
sance de la discipline (ou du terme lui même) qu’une réalité. Ainsi, au sein de leur disci-
pline, le discours est tout autre et Sivarajan (1991) écrit : « La [systématique] a une posi-
tion unique en biologie […] elle est à la fois la "reine" et la "servante" de la biologie ; la
"reine" dans le sens où elle en est l’aspect ultime, tous les autres champs de la biologie
mènent à l’établissement ou l’amélioration d’une classification. Elle est la "servante" car
l’une des fonctions de base de la [systématique] est d’assurer un besoin primaire d’infor-
mation sur l’identité, les taxons proches et les caractéristiques des organismes, à destina-
tion des personnes qui en ont besoin, en particulier ceux réalisant d’autres recherches en
biologie ». En ce sens la systématique a un rôle central dans les sciences biologiques, elle
fait figure de langue pour communiquer, chacun pouvant contribuer à l’évolution de cette
langue. Cet aspect central de la discipline est largement représenté par Radford et al.
(1975). De même le Livre blanc de la systématique (Anonyme, 1989) et les titres de série
Biosystema éditée par la Société française de systématique illustrent avant tout les liens
possibles entre la systématique et toutes les autres disciplines des sciences biologiques.
logie (la botanique pouvant alors se pratiquer pendant les stages, mais il ne s’agit plus
d’enseignement au sens commun du terme).
Les facultés de pharmacie forment un groupe particulier : sur les deux premières années,
il y a toujours 80 à 90 heures de « botanique » (dont de la phytosociologie dans certains
établissements) et des enseignements de mycologie en troisième ou quatrième années à
hauteur de 30 à 50 heures. Selon certains, l’ambiance (pour l’étudiant) est plutôt du style
classe préparatoire et l’entrée dans ces établissement est soumise à concours, ce qui ne
facilite pas l’accès à ses formations.
Le dernier type de formation post-baccalauréat en France correspond aux classes pré-
paratoires et aux écoles d’ingénieur. La botanique reste présente dans certains concours des
filières BCPST (en particulier le concours commun aux écoles d’agronomie) ; en consé-
quence le programme de classes préparatoires inclut une formation à la morphologie et à
l’identification végétales. Il semble cependant que le niveau d’exigences demandé en bota-
nique au concours ait décru au cours des dix dernières années. Dans les écoles d’ingénieur
dépendant du ministère de l’Agriculture (couramment qualifiées d’ENSA et d’ENIT), les
enseignements de botanique peuvent subsister, sous des formes généralement éloignées de
la floristique ou de la morphologie. Dans tous les cas il s’agit d’une botanique appliquée,
telle que la malherbologie ou la connaissance des espèces fourragères, de grandes culture
ou de boisements. Dans les écoles assurant une formation sur cinq ans, c’est-à-dire ayant
recrutement après le baccalauréat, il est parfois mis en place des enseignement de bota-
nique afin d’assurer un parallèle avec l’enseignement réalisé en classes préparatoires (50
heures en première année à l’ENIHP à Angers, l’une des composantes de l’INH). Comme
dans les écoles recrutant sur concours après classes préparatoires, cet enseignement sera
exploité de manière plus appliquée (reconnaissance des végétaux horticoles par exemple).
Dans tous ces cas, il y a là aussi des concours d’entrée, en général sur la base de connais-
sances assez éloignées de la botanique.
Ces seuls éléments rendent difficile toute interprétation précise de l’enseignement de
connaissance des espèces végétales, de leur morphologie ou de leur anatomie.
D’un point de vue plus général, l’une des explications possibles de la faiblesse de l’en-
seignement sur l’organisme végétal tient peut-être aussi à la dissociation fréquente entre
celui-ci et les disciplines de recherche de plus en plus pointues et indépendantes qui sont
le commun des enseignants-chercheurs. En d’autres termes, du point de vue de ses activi-
tés de recherche, l’université n’a pas besoin de floriste ou d’expert en morphologie végé-
tale, ces compétences doivent s’ajouter à d’autres (par exemple en archéologie ou en
paléoclimatologie où la reconnaissance du pollen ou des fragments de plantes est utilisée,
mais où l’exploitation des données relève de l’histoire ou de la géographie).
Fig. 1.- Nombre de thèses de doctorat en systématique végétale en France par année,
entre 1979 et 2004, et « prévisions » pour 2005 à 2007. Source des données 1979-2003
: SUDOC, critères de recherche : type de document = thèse + mots clés = systématique
; type de document = thèse + mots clés = phylogénie, suivis d’une analyse des résultats
à partir du titre et du résumé. Données de l’auteur pour 2004 et pour les prévisions 2005-
2007.
Fig. 1.- Number of PhD thesis in plant systematics in France per year, between 1979 and
2004, and expectation from 2005 to 2007. Sources of data for 1979-2003: SUDOC, sear-
ch criteria: document type = thèse + key words = systématique; document type = thèse
+ key words = phylogénie, followed by checking the results on the basis of title and abs-
tract. Author data for 2004 and for 2005-2007.
l’évolution du nombre de thèses soutenues, il faut aussi signaler une périodicité de trois-
quatre ans des années les plus « abondantes ». Cette périodicité semble liée à la durée des
thèses de doctorat et au nombre de personnes susceptibles d’encadrer de tels travaux, dans
la mesure où il est souvent rare qu’il y ait plus d’une thèse encadrée par une même per-
sonne.
Dans leur contenu, les thèses de systématique végétale ont sensiblement évolué. Entre
1980 et 2004, les méthodes utilisées sont passées des disciplines de la phytochimie, de la
cytologie et de la palynologie à une discipline majoritaire, la phylogénie. Cela reflète une
tendance à la catégorisation des disciplines de plus en plus marquée, associée à une forme
de « course » à la productivité scientifique (il est aujourd’hui plus rapide d’avoir des
séquences d’ADN que des comptages chromosomiques) et une forme de « mode » dans
l’activité des systématiciens. En ce qui concerne l’évolution récente, on passe progressi-
vement de thèses de phylogénie à des thèses associant la phylogénie à d’autres disciplines
(biogéographie, anatomie…).
Du point de vue des sujets étudiés, la tendance est d’un passage du mélange flore tem-
pérée / flore tropicale à des thèses portant quasiment exclusivement sur des taxons tropi-
caux. Les thèses traitant de taxons tempérés pour la flore tempérée présentent pour leur
part presque toujours un contexte « économique » (graminées fourragères, légumineuses
fourragères, ligneux de boisement).
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Fig. 2.- Répartition géographique des lieux de soutenance des thèses de doctorat en sys-
tématique végétale en France, entre 1979 et 2004, par période de cinq ans. Source des
données : SUDOC avec les critères de recherche utilisés pour la figure 1. Les valeurs
correspondent à l’ensemble des thèses sur 5 ans.
Fig. 2.- Geographical distribution of location of plant systematics PhD thesis defences in
France, between 1979 and 2004, on a 5 years period. Source of data: SUDOC with
search criteria used for figure 1. Values are thesis number for 5 years.
Afin de préciser le nombre de lieux d’accueil de thésards, une étude spatiale des uni-
versités de soutenance a été effectuée. Pour plus de précision, il nous a semblé nécessaire
de travailler par période de cinq ans. La figure 2 représente cette répartition géographique
des thèses de doctorat. Sur l’ensemble de la période d’analyse, une vingtaine d’universités
ont été le lieu de soutenance d’une thèse de doctorat en systématique végétale. Deux
centres majeur se distinguent cependant, la région parisienne (universités Paris VI, Paris
XI et MNHN) et la région de Montpellier (université, ENSAM, INRA). La région pari-
sienne a « produit » presque deux thèses par an pendant toute cette durée, avec une ten-
dance à l’augmentation dans les dernières années. La région de Montpellier a assuré,
depuis 1984, à peu près une thèse par an. À ces deux centres s’ajoutent les universités de
Marseille qui ont produit, jusqu’en 1999, environ une thèse par an.
L’évolution de cette distribution reflète d’abord les modifications dans les diplômes
(formations essentiellement assurées à Paris et Montpellier), mais aussi dans les structures
d’accueil (fermeture de certains laboratoires). Il aurait été nécessaire d’avoir une étude
plus approfondie sur le devenir des thésards pour expliquer les thèses réalisées dans des
universités « plus isolées ». Elles semblent correspondre à la formation des futurs ensei-
gnants-chercheurs de l’université en question. Alors que les thèses produites à Montpellier
et en région parisienne semblent avoir plus tendance à se « disséminer », à ce sujet il est
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Fig. 3.- Nombre de thèses d’exercice en pharmacie en France par année entre 1982 et
2003. Source des données : SUDOC, critères de recherche : type de document = thèse
+ type de thèse = pharmacie + mots clés = botanique.
Fig. 3.- Number of pharmacy thesis in France per year, between 1982 and 2003. Sources
of data: SUDOC, search criteria: document type = thèse + thesis type = pharmacie + key
words = botanique.
Fig. 4.- Répartition géographique des lieux de soutenance des thèses d’exercice en phar-
macie entre 1999 et 2003. Source des données : SUDOC avec les critères de recherche
utilisés pour la figure 3. Les valeurs correspondent au nombre moyen de thèses par
année (calcul fait sur les 5 ans).
Fig. 4.- Geographical distribution of location of pharmacy thesis defences, between 1999
and 2003. Sources of data: SUDOC, with search criteria used for figure 3. Values are
mean thesis number per year (calculated for the 5 years).
sites assurent la formation de plus de quatre thèses d’exercice par an : Besançon, Lille,
Lyon, Nancy et Montpellier. Entre ces cinq sites, des différences existent quand au sujet de
ces thèses. Ainsi, à Lyon, la proportion de thèses d’exercice traitant de mycologie est plus
importante que dans les quatre autres sites. Ces valeurs ne reflètent pas forcément les éta-
blissements où la formation à la botanique est la plus développée. Dans la mesure où, pour
toutes les facultés de pharmacie, les volumes d’enseignement en botanique sont sensible-
ment les mêmes, les différences semblent plus liées à la présence ou non de laboratoires
de recherche dédiés à la discipline dans ces établissements.
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Fig. 5.- Nombre d’articles par an recensés sur la période 1977-2003 par la base CAB-
Abstract traitant de systématique végétale et dont le premier auteur possède une adres-
se en France. Source des données : CAB Abstracts ; critères de recherche : BD = plants
AND DE = taxonomy AND AD = France NOT DE = diseases NOT DE = enemies NOT
DE = pests NOT DE = bacteria NOT BD = fungi.
Fig. 5.- Number of publications recorded per year between 1977 and 2003 on CAB-
Abstracts, and dealing with plant systematic, for which the first author got an address in
France. Data source: CAB Abstracts, search criteria: BD = plants AND DE = taxonomy
AND AD = France NOT DE = diseases NOT DE = enemies NOT DE = pests NOT
DE = bacteria NOT BD = fungi.
par an de manière constante depuis 1993, alors que pendant la période 1977-1986 ce
nombre était quasiment toujours inférieur à dix publications par an. Cette tendance s’ap-
parente à celle du nombre de thèses de doctorat en systématique et reflète une augmenta-
tion de la publication en anglais et dans des revues internationales.
Du point de vue de la distribution géographique des auteurs, seules les cinq dernières
années ont été analysées et les données sont présentées en figure 6. La répartition des
auteurs obtenue est très proche de celle des lieux de soutenance des thèses de doctorat en
systématique végétale sur la période 1994-2003 (Fig. 2). Les lieux de soutenance des
thèses d’exercice en pharmacie sont également présents et à ces deux types d’origine se
rajoutent quelques individus isolés (qui sont parfois qualifiés d’amateurs éclairés), mais
aussi des centres INRA (Bordeaux, Colmar) qui ne sont présents ni comme lieu de soute-
nance de thèse de doctorat dans le domaine ni comme lieu de soutenance de thèse d’exer-
cice en pharmacie. Cette différence par rapport aux données issues des lieux de soutenance
seules doit être rapprochée du fait que les descripteurs sont établis par les compilateurs de
la base CAB Abstracts et qu’en conséquence certains auteurs font de la systématique sans
le savoir. Il s’agit en particulier des travaux de diversité génétique sur des espèces sauvages
ou cultivées par exemple.
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Fig. 6.- Répartition géographique des premiers auteurs d’articles de systématique végéta-
le présent dans la base CAB Abstracts sur la période 1999-2003. Source des données :
CAB Abstracts avec les critères de recherche utilisés pour la figure 5. Les valeurs cor-
respondent au nombre d’articles sur les cinq ans.
Fig. 6.- Geographical distribution of first author of plant systematic publications recorded by
CAB Abstracts database between 1999 and 2003. Data source: CAB Abstracts, with
search criteria used for Figure 5. Values are number of publication for 5 years.
Fig. 7.- Nombres d’articles, nombres d’auteurs et nombre de revues par an recensés entre
1970 et 2002 par la base d’articles botaniques du réseau Tela Botanica.
Fig. 7.- Number of publication, number of authors and number of journals recorded, per
year between 1970 and 2002, on the botanical publication database of the Tela Botanica
network.
Fig. 8.- Évolution du nombre d’articles par auteur et par an entre 1970 et 2002 à partir des
données de la base d’articles botaniques du réseau Tela Botanica.
Fig. 8.- Evolution of the number of article per author and year between 1970 and 2002,
based on data from the botanical publication database of the Tela Botanica network.
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Fig.9.- Évolution du nombre d’articles par revue et par an entre 1970 et 2002 à partir des
données de la base d’articles botaniques du réseau Tela Botanica.
Fig. 9.- Evolution of the number of article per journal and year between 1970 and 2002,
based on data from the botanical publication database of the Tela Botanica network.
Fig. 10.- Nombres d’articles publiés par an entre 1970 et 2002 pour toutes les revues recen-
sées par la base d’articles botanique du réseau Tela Botanica et pour les sept revues
vivantes sur l’ensemble de la période. Revues dites « historiques » : Bulletin de la Société
botanique de France / Acta Botanica Gallica (après 1997), Le Monde des Plantes , Pen
Ar Bed, Bulletin de la Société d'histoire naturelle de Savoie, Bulletin mensuel de la
Société linnéenne de Lyon, L'Orchidophile, Bulletin de la Société botanique du Centre
Ouest.
Fig. 10.- Number of publication published, per year between 1970 and 2002 for all the jour-
nals recorded in the botanical publication database of the Tela-Botanica network and for
the seven journal alive during all the period. Called « historical » journals: Bulletin de la
Société botanique de France / Acta Botanica Gallica (after 1997), Le Monde des Plantes,
Pen Ar Bed, Bulletin de la Société d'histoire naturelle de Savoie, Bulletin mensuel de la
Société linnéenne de Lyon, L'Orchidophile, Bulletin de la Société botanique du Centre
Ouest.
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Fig. 11.- Détail du nombre d’articles publiés par an par chacune de ces sept revues dites
« historiques », d’après les données de la base d’articles botaniques du réseau Tela
Botanica.
Fig. 11.- Detail of the number of articles published by each of the seven « historical » jour-
nals, based on data from the botanical publication database of the Tela Botanica network.
autre évolution importante concerne le Bulletin de la SBF (puis Acta Botanica Gallica) qui
a sensiblement augmenté son nombre d’articles après 1985, mais qui semble revenir à un
niveau plus bas après 1997. Il est possible que la création du Journal de Botanique
explique une partie de la différence (report de certains types d’articles du Bulletin de la
SBF/Acta Botanica Gallica vers le Journal de Botanique créé en 1997). Le Bulletin de la
SBCO présente une augmentation récente du nombre d’articles, alors que l’Orchidophile a
eu une augmentation régulière jusqu’en 1985 et depuis il s’est stabilisé à une cinquantai-
ne d’articles par an. Pour les autres revues, celles de la Société linnéenne de Lyon et de la
Société d’histoire naturelle de Savoie ont vu leur nombre d’articles augmenter, mais avec
des variations quantitatives moins fortes que le Monde des Plantes. Penn Ar Bed voit aussi
son nombre d’articles augmenter, mais avec une variation assez importante selon les
années, variation difficile à interpréter.
En guise de résumé, deux tendances se discernent du point de vue des revues indexées
par la base d’articles botanique de Tela Botanica :
- une augmentation sensible du nombre d’articles publiés dans les sept revues « histo-
riques » existant sur l’ensemble de la période ;
- une augmentation significative du nombre de revues, conduisant à une augmentation
parallèle du nombre d’articles et du nombre d’auteurs ; les revues créées sur l’ensemble
de la période n’ont cependant pas forcément la même audience que les revues « histo-
riques ».
Par rapport à cette analyse à partir de la base de Tela Botanica, le biais principal tient aux
revues existant dans les années 1970 qui ont pu disparaître avant la création de la base dans
les années 2000, ce qui a pour conséquence que leurs articles n’ont pas été indexés.
En guise de synthèse sur ces donnés bibliométriques (base de données CAB Abstracts
et Tela Botanica), la tendance majeure à retenir est une augmentation de l’activité de publi-
cation des botanistes français. Cette augmentation est visible sur tous les médias analysés
(revues scientifiques en anglais, revues scientifiques en français et revues de vulgarisation
en français). Au niveau des revues scientifiques en français, l’augmentation d’abord du
nombre de revues recensées et ensuite de l’augmentation du nombre d’articles par revue.
D’un point de vue géographique les revues en anglais drainent semble-t-il les articles des
laboratoires susceptibles d’accueillir des thèses de doctorat en plus de quelques autres
structures et individus. Pour les revues en anglais, une telle analyse n’a pas pu être prati-
quée compte tenu du type de données disponible, mais les titres des revues (en particulier
celles étant l’organe de diffusion d’une association) suggèrent une répartition beaucoup
plus homogène.
Le dernier élément qu’il nous a paru nécessaire d’introduire dans cette sorte d’état des
lieux de l’activité de la systématique botanique française est la répartition des herbiers en
France. Les données analysées sont principalement extraites de l’Index Herbariorum (ver-
sion en ligne : http://sciweb.nybg.org/science2/IndexHerbariorum.asp), ainsi que de don-
nées disponibles à partir de la cartographie des herbiers français réalisée par le réseau Tela
Botanica. Ces données excluent ainsi une partie des herbiers conservés dans des biblio-
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Fig. 12.- Répartition et taille des herbiers en France. Source des données : Index
Herbariorum et réseau Tela Botanica.
Fig. 12.- Distribution and size of French herbaria. Source of data: Index Herbariorum and
Tela Botanica network.
thèques publiques et ceux détenus par des personnes privées. La figure 12 présente la carte
de répartition des herbiers français et leur volume (nombre d’échantillons conservés).
Cette distribution ne présente que peu de liens avec les données précédentes. L’une des
seules corrélations possibles est que les lieux de productions scientifique les plus impor-
tant en systématique végétale française sont les villes qui contiennent deux des trois plus
gros herbiers français. Les autres lieux de soutenance de thèses ne possèdent pas forcément
d’herbier recensé par l’Index Herbariorum. Dans tous les cas, cette dispersion plus gran-
de que celle des lieux d’activité en systématique est directement liée à l’histoire de ces her-
biers et aux établissement qui les conservent. Lorsque ces herbiers sont rattachés à des
universités ou à des facultés, il semble toujours qu’il s’y maintienne un minimum d’acti-
vité scientifique qui peut être en relation avec l’herbier, c’est-à-dire qu’au cours des tren-
te derniers années il semble toujours y avoir eu au moins une thèse de doctorat ou
d’exercice en pharmacie réalisée dans ces établissements (ou au moins dans un établisse-
ment de la ville). Par contre, lorsque les herbiers sont rattachés à des musées ou à des
bibliothèques, l’activité scientifique qui est associée semble très réduite ; du moins elle ne
transparaît pas avec les données disponibles. Cette différence pourrait être liée à une dif-
férence de perception de l’herbier comme outil de travail scientifique dans un cas ou
comme objet à conserver dans un autre. L’absence de données précises sur la répartition
des botanistes français implique cependant que cette généralisation n’est peut-être pas for-
cément la plus judicieuse.
330
À partir de ces données, il apparaît que la systématique botanique française existe et qu’el-
le est dispersée. Du point de vue de sa dimension scientifique (illustrée par les thèses de
doctorat et les publications recensées par CAB Abstracts), il apparaît qu’elle a connu un
mieux au cours des années 85-95 (six thèses par an) et que sa production en nombre d’ar-
ticles en anglais a sensiblement augmenté. Cependant, cette dimension scientifique se trou-
ve un peu forcée à regarder ailleurs (tant en termes de projets que de sujets, pour des
raisons historiques ou des raisons de politique scientifique), c’est-à-dire qu’elle semble
majoritairement représentée par un travail de phylogénie sur des taxons tropicaux et dont
les résultats seront publiés en anglais. De plus certains chercheurs semblent faire de la sys-
tématique sans le savoir ou, plus précisément, CAB Abstracts catégorise leur travail
comme de la systématique.
Du point de vue de la dimension plus historique et naturaliste, celle-ci pourrait plus être
illustrée par les revues francophones et par les thèses d’exercice en pharmacie (cf. les
sujets de thèse qui, mis à part la phytochimie, correspondent souvent à un travail de flo-
ristique ou sur l’histoire de la botanique). L’évolution temporelle de cet aspect de la systé-
matique végétale française montre qu’il semble aussi augmenter (au moins en terme de
revues et d’articles en français). En l’absence de données géographiques dans la base de
données utilisée, il n’a pas été possible d’établir une cartographie de cette activité. Il
semble cependant qu’il y ait de ce point de vue une forte dispersion des botanistes fran-
çais. Et à cette dispersion pourrait être associée une difficulté d’identification de ces bota-
nistes. Un botaniste ne se reconnaît pas à son métier (botaniste n’est pas un métier, c’est
une passion, c’est une discipline scientifique) ou plus précisément il serait intéressant de
se poser la question si botaniste peut être un métier en dehors d’un cadre scientifique et
technique.
Parallèlement à ce constat franco-centrique, il est cependant nécessaire de mentionner
que, à un niveau international, la systématique (botanique ou non) est considérée comme
une science fondamentale. Au niveau européen, des réseaux ont été établis pour traiter de
travaux de systématique végétale (Euro+Med) et ce avec des financements élevés. De
même, aux États-Unis, des projets d’envergure ont été mis en place et impliquent directe-
ment des systématiciens (Assembling the Tree of Life : AToL, Revisionary Synthesis in
Systematics = RevSyst), alors qu’au niveau national la seule mise en relation de botanistes
ou de systématiciens revient au réseau Tela Botanica. Ce problème, mis en évidence ici
pour la systématique botanique, est également vrai pour l’ensemble de la systématique ;
ainsi la Société française de systématique, bien que très bien intégrée au niveau des déci-
deurs européens, a des difficultés pour faire passer ses souhaits avec le niveau national.
Cette tendance semble refléter une certaine absence de poids des sociétés savantes fran-
çaises dans leur propre pays, mais pas forcément en dehors, ce qui constitue un certain
paradoxe.
À partir de tous ces éléments, quelles peuvent être les perspectives envisageables ? En
réponse à la citation de Chauvet & Olivier (1993) : « pour coopérer il faut exister », il
semble que la botanique française existe, même si elle est numériquement assez faible
(2 000 personnes au maximum ?). La mise en relation des botanistes français semble l’éta-
pe suivante qu’il faut envisager. Cette coopération peut se traduire soit par les sociétés
savantes (malgré leur faible poids national, comme mentionné ci dessus), soit via un réseau
tel que Tela Botanica. Cependant, lors de cette mise en réseau, l’un des écueils à éviter
serait la catégorisation en fonction de l’origine ou de l’activité. Dans le cadre précis de la
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Abréviations utilisées
ADN : acide desoxyribo-nucléique ENSA : écoles nationales supérieures d’agronomie
AToL : Assembling the Tree of Life (programme soutenu ENSAM : École nationale supérieure d’agronomie de
par la NSF aux États-Unis) Montpellier
BCPST : classes préparatoires biologie, chimie, phy- GBIF : Global biodiversity facilities
sique et sciences de la Terre INAPG : Institut national agronomique Paris-Grignon
CAB Abstracts : Commonwealth agricultural bureaux INH : Institut national d’horticulture
abstracts INRA : Institut national de la recherche agronomique
CBN : conservatoires botaniques nationaux IRD : Institut pour la recherche et le développement
CFPPA : centre de formation professionnelle pour JSTOR : Journal STORage
adultes
MNHN : Muséum national d’histoire naturelle
CITES : Convention internationale sur le trafic des
NSF : National science Fundation
espèces sauvages
DEA : diplôme d’études approfondies RevSyst : revisionary synthesis in systematics (program-
DEUST : dplôme d’études universitaires en sciences et me soutenu par la NSF aux États-Unis).
techniques SBCO : Société botanique du Centre-Ouest
DIREN : direction régionale de l’environnement SBF : Société botanique de France
ENIHP : École nationale des ingénieurs de l’horticulture SHNS : Société d’histoire naturelle de Savoie
et du paysage SOPHY : Système d’observations phytosociologiques -
ENIT : écoles nationales d’ingénieurs des travaux [agri- banque de données botaniques et écologiques
coles] SUDOC : système universitaire de documentation
ENS : École normale supérieure UE : unité d’enseignement
BIBLIOGRAPHIE
Anonyme, 1989.- Livre blanc de la systématique. Lebbe J. & P. Tassy 1998.- Former les systématiciens de
Société française de systématique, Paris, 115 p. demain. Biosystema, 16, 43-49.
Anonyme, 1994.- Systematics Agenda 2000: charting Leroy J.F. 1971.- La botanique au jardin des plantes
the biosphere. A global initiative to discover, describe (1626-1970). Leçon inaugurale faite au Muséum
and classify the world’s species. Systematics Agenda national d’histoire naturelle, Paris. 29 p.
2000, A consortium of the American Society of Plant Piroux A. 2002.- Évolution des classifications bota-
Taxonomists, the Society of Systematic Biologists, niques : utilitaires, morphologiques, phylogéniques.
and the Willi Hennig Society, in cooperation with the
DESS Ingénierie documentaire, Lyon, 50 p.
Association of Systematics Collections, New York, 80
Poncy O. 1994.- Botanique systématique en France :
p.
Chauvet M. & L. Olivier, 1993.- La biodiversité, enjeu pla- état actuel et perspectives. Biosystema, 10, 5-18.
nétaire. Préserver notre patrimoine génétique. Sang Radford A.E., W.C. Dickinson, J.R. Massey & C.R. Bell,
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