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METHODOLOGIE DU COMMENTAIRE HISTORIQUE

FRANÇOIS FAYE
CPI H-G, PRF DE DAKAR

Le commentaire historique est un exercice littéraire destiné à vérifier les aptitudes des élèves et étudiants à
utiliser leurs connaissances pour expliquer un document historique.
Les documents historiques sont nombreux et variés ; ils vont du texte simple aux documents visuels comme les
caricatures, les photos, les affiches de propagande politique ou commerciale etc. Les textes ou autres documents
visuels proposés à l’étude ont toujours une valeur historique inestimable.

Quel que soit le document à commenter, le candidat doit donc pouvoir mobiliser le contenu des cours mais aussi
les connaissances en dehors du cours pour juger de manière critique un document.

I LE COMMENTAIRE DE TEXTE
Dans les lycées et collèges du Sénégal, le commentaire historique porte généralement sur un texte ou, - ce qui est
rare – sur plusieurs petits textes à la fois. Le commentaire peut être libre ou dirigé. Dans ce dernier cas de figure,
le commentaire est accompagné de questions qui guident le candidat afin que les réponses constituent un devoir
organisé.

Dans le cas d’un commentaire libre, les précautions ci-après doivent nécessairement prisses avant
l’entame du devoir :
- lire le texte plusieurs fois, afin de bien le comprendre dans le fond (quelle est l’idée ou les idées qui le
sous-tendent ?), mais aussi dans la forme (comment est-il structuré ?)
- numéroter le texte ligne par ligne, du début jusqu’à la fin, afin que les passages à commenter, ainsi que
les les lieux et les personnages à identifier soient parfaitement localisés. (ATTENTION ! une ligne d’un
seul mot est toujours une ligne)
- souligner les passages importants à commenter, ainsi que les lieux et les personnages qu’il faudra
identifier.

A – LE COMMENTAIRE LIBRE
Le candidat pourra ensuite aborder son devoir selon la démarche suivante :

- PRESENTATION DU TEXTE ET DE L’AUTEUR


- CONTEXTE HISTORIQUE
- ANALYSE OU RESUME
- PLAN
- COMMENTAIRE PROPREMENT DIT
- CONCLUSION

La présentation du texte, le contexte historique, l’analyse ou le résumé et le plan constituent la partie introductive
du commentaire. Certains l’appellent « commentaire externe »

NB : la méthodologie du commentaire libre en histoire s’articule autour de ces 6 rubriques exclusives. Il est donc
impératif de suivre scrupuleusement cette démarche et, traiter l’une après l’autre les différentes parties. A défaut,
le candidat risque de ne même pas être lu à l’examen.

1 F. FAYE : Les Méthodes de l’Histoire


Editions Faramax, Joxaar, Octobre 2001
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1- PRESENTATION DU TEXTE ET DE L’AUTEUR

Présenter le texte signifie :

- préciser la nature du texte : s’agit-il d’un document d’archives ? d’un procès-verbal ? d’un récit de
voyage ? d’un discours ? d’un article de journal ? d’une correspondance ? etc.
- indiquer sa date de publication
- préciser le cas échéant qu’il s’agit d’un texte incomplet (y a-t-il des coupes ?)

Présenter l’auteur signifie :

- préciser sa date et lieu de naissance, sa nationalité, sa carrière, ses fonctions, son opinion, c-à-d les idées
qu’ils défend. Il est aussi bon de préciser s’il y a lieu, si l’auteur est témoin ou acteur des événements qu’il
raconte.

NB : Dans la plupart des cas, une biographie sommaire est mentionnée à la fin du texte ; l’élève pourra recopier
cette biographie en guise de présentation. A défaut d’indications biographiques, et si l’auteur est réellement
inconnu du candidat ,celui-ci s’abstiendra de lui inventer une vie. Cependant certains auteurs sont si familiers au
programme d’Histoire qu’il serait très préjudiciable à l’élève de ne pas les présenter même si leur biographie
n’est pas mentionnée. C’est le cas notamment de Jules FERRY pour les élèves de 1ère, des hommes politiques du
programme de Terminale : ROOSEVELT, TRUMAN, MARSHALL, STALINE, JDANOV, KROUCHTCHEV,
CHURCHILL, de GAULLE, HÔCHI-MINH, HITLER, MUSSOLINI etc.

Dans la présentation de l’auteur, il ne s’agit pas de tout dire sur lui ; il faut plutôt se limiter aux aspects de sa
biographie susceptibles d’aider à la compréhension du texte.

Si nous devions nous résumer, présenter le texte et l’auteur revient à répondre aux questions suivantes :
- quel type de document avons-nous à commenter ?
- D’où vient –t-il ?
- Que sait-on de celui qui l’a produit ?

La présentation du texte et de l’auteur ne doit jamais dépasser 6 à 8 lignes.

2 – CONTEXTE HISTORIQUE

Le contexte historique pose souvent problème car deux cas peuvent se produire:

Dans les cas classiques il s’agit de préciser en quelques lignes (maximum 06) les faits marquants de la période à
laquelle se rapportent les faits relatés dans le texte, l’atmosphère générale dans laquelle le texte a pris naissance.
Pour cela, il n’est pas nécessaire de remonter au-delà de quelques mois ou de quelques années en arrière.

EXEMPLE: le texte de JDANOV qui jette les bases de la doctrine qui porte son nom, ou encore le discours de
TRUMAN sur la doctrine du « containment »

Un autre cas peut se présenter : un auteur peut être amené à écrire aujourd’hui, pour apporter un éclairage nouveau
sur des faits bien antérieurs pour confirmer ou infirmer une thèse ou une hypothèse préétablie. (N’est-ce pas là la
tâche de tout historien ?) Dans ce cas de figure, il est plus pertinent de préciser les circonstances particulières ou
contexte de narration.

EXEMPLE : C’est le cas de plusieurs textes sur la réécriture de l’histoire de l’Afrique par les Africains eux-mêmes.

3 – ANALYSE ou RESUME

Après la présentation et le contexte historique, le candidat est invité à passer l’étape certainement la plus délicate. Il
s’agit de choisir entre faire une analyse, ou faire un résumé.
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Editions Faramax, Joxaar, Octobre 2001
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Contrairement à ce que beaucoup pensent, analyse et résumé ne signifient pas la même chose. Pour s’en
convaincre, il suffit d’ouvrir n’importe quel dictionnaire de la langue française.

Résumer le texte signifie simplement réduire le texte dans sa longueur. Le candidat résumera le texte en se
mettant dans la peau de l’auteur. Donc en respectant son style.

Analyser le texte revient à présenter dans son style propre le thème et les sous thèmes du texte. ( idée générale )

Résumer un texte ou l’analyser signifie en un mot ressortir la quintessence du texte, l’essentiel. Il ne faut pas le
trahir par l’introduction de commentaires étrangers, hors propos.

En tout état de cause, « l’analyse ou le résumé doit être si dense et si précis que si l’original dont il est le
condensé venait à se perdre, il soit possible d’en restituer la teneur à partir des seuls éléments retenus. »
Une bonne analyse ou un bon résumé augure d’un bon plan, voire d’un bon commentaire. Cela montre que l’élève
a bien compris le texte et donc qu’il devrait pouvoir bien l’expliquer.

L’analyse ou le résumé doit pouvoir tenir entre 6 et 8 lignes pour un texte d’une vingtaine de lignes.

4 – LE PLAN

Le plan est la suite logique de l’analyse. Un bon plan augure aussi d’un bon commentaire.
Le plan annonce la démarche que l’on se propose de suivre pour mener son commentaire. Il s’agit de diviser
judicieusement le texte en autant de parties que nécessaires (rarement plus de trois parties). Ces parties doivent
être nettement délimitées à partir des numéros des lignes ou des paragraphes et doivent obligatoirement porter
un titre qui résume le thème de chacune d’elles.

5 – LE COMMENTAIRE PROPREMENT DIT

Tout ce qui précède (présentation, contexte, analyse /résumé, plan) peut être considéré comme une introduction au
commentaire proprement dit. C’est à ce titre qu’on les réunit sous les vocables de « commentaire externe ». Le
corps du devoir commence véritablement avec le commentaire proprement dit appelé encore « commentaire
interne ».

Il faut garder à l’esprit que le commentaire est un exercice littéraire qui cherche à expliquer une idée générale ou
plusieurs idées contenues dans un texte. Ce n’est pas une explication mot après mot, mais une explication d’une
idée traduite par des phrases bien claires, par des mots-clés bien choisis, ayant un sens bien déterminé. Voilà
pourquoi dès le départ, il est important de souligner les passages importants, les mots-clés, les termes spécifiques,
les allusions, les faits et événements marquants, les noms de lieu et les personnages. Il faut aussi être sensible au
ton et au style de l’auteur ; ils peuvent aider à mieux comprendre, donc à bien expliquer.

Comment commenter ?

Il faut rigoureusement suivre le plan qu’on s’est librement choisi. Il faut donc mettre clairement le titre de chaque
partie avant de la commenter.
Le commentaire part toujours du texte et revient toujours au texte. Cela veut dire qu’il faut amorcer son
commentaire :
- en citant d’abord le texte (utiliser les numéros des lignes ou les paragraphes) ;
- en expliquant ces passages cités par le recours à des faits historiques précis
- en complétant ces passages s’il y a lieu
- en discutant ces passages si cela est nécessaire. Le cas échéant, ne pas discuter une idée…discutable laisse
supposer qu’on la partage.

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Editions Faramax, Joxaar, Octobre 2001
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6 – CONCLUSION

La conclusion se subdivise en deux parties distinctes :


- Dégager l’originalité, l’intérêt et la portée historique du texte. Les arguments de l’auteur ont-ils été
vérifiés par la suite ?
- Faire une critique d’ensemble du texte : apporter s’il y a lieu des précisions sur la langue du texte ex : le
vieux français des écrivains du 16è et 17èS ; le texte est-il le fruit d’une traduction ?, sur le style du texte
(est-il difficile à comprendre ?), sur le ton du texte (fermeté ou conciliation, persuasion)

B - LE COMMENTAIRE DIRIGE
Il est destiné aux élèves du premier cycle ( 4ème et 3ème ) mais on le retrouve aussi dans les sujets du deuxième tour
au baccalauréat.
A la différence du commentaire libre, le commentaire dirigé est accompagné de questions qui guident le candidat
afin que ses réponses constituent un commentaire organisé. Les questions ne couvrent jamais la totalité du
document proposé à l’étude et peuvent donc laisser de côté des pans entiers : le candidat ne répond donc qu’aux
questions posées.

Les questions posées peuvent porter sur quelques rubriques du commentaire historique mais jamais sur toutes les
rubriques à la fois.

En général une première question invite à présenter le document ou à lui donner un titre.
Une deuxième question porte souvent soit sur l’analyse/résumé, ou alors sur le commentaire d’un passage souligné
ou d’un paragraphe.
Le plus souvent, la dernière question invite à conclure, en réfléchissant sur l’impact du document (portée
historique) ou à en donner une approche critique.

Il faut répondre aux questions de la manière la plus explicite et la plus exhaustive possible, en puisant
abondamment dans le cours et en dehors du cours.
Les questions étant numérotées, les réponses doivent donc être numérotées.

En 4ème et 3ème, le candidat répond directement aux questions et par ordre. Il n’est pas tenu de faire « une
introduction « et « une conclusion », à moins qu’il ne le lui soit explicitement demandé dans les questions.
Par contre dans le second cycle, le candidat est tenu de présenter le texte même si on ne le lui demande pas.

II LE CAS PARTICULIER DES DOCUMENTS VISUELS


Par jurisprudence, beaucoup de professeurs pensent que le commentaire historique ne concerne que les textes
historiques. En effet jusqu’ici les sujets proposés dans les évaluations formatives ou sommatives se présentent
toujours sous forme de texte à expliquer. Pourtant, le programme d’histoire précise nettement que les documents à
commenter peuvent aussi être des documents « visuels » : cartes, photos, caricatures, affiches de propagande
commerciale ou politique etc.

Précisions que les documents visuels proposés au commentaire ont toujours une portée historique certaine.
La démarche pour commenter les autres documents visuels est différente de la démarche classique de commentaire
de texte

Pour commenter un document « visuel », on peut appliquer une méthode simple en trois étapes :

 Décrire
 Expliquer
 Approfondir

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Editions Faramax, Joxaar, Octobre 2001
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EXEMPLE : la « une » d’un journal

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Editions Faramax, Joxaar, Octobre 2001
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PRESENTATION ET DESCRIPTION

Le document proposé est la « Une » de L’Humanité du 29 juin 1948. Quotidien fondé par le socialiste Jean Jaurès
en 1904. L‘Humanité est, depuis le Congrès de Tours en 1920 « l’organe central du parti communiste » français.
(selon la manchette en haut à droite).Pour le 2 juin 1948, le contenu et l’épaisseur des lignes ainsi que la mise en
page permet d’établir une hiérarchie dans l’actualité vue et interprétée par les communistes. Ils distinguent des
événements de première importance (la réunion du « bureau d’information des partis communistes », le « traité de
honte et de servitude », la révision des « zone de salaires ») et de faits qui pour importants qu’il soient son entrés
dans une certaine banalité (le problème de Berlin, « le Tour de France » et l’évolution de la ration de pain.

En résumé, une place importante est accordée aux événements internationaux et à leurs conséquences en France, ce
qui ne peut surprendre en ces temps de guerre froide.

EXPLICATION

Les événements internationaux

Dans la guerre froide, le parti communiste a choisi son camp, celui que Jdanov définissait comme le camp de la
« démocratie et de la paix » en 1947.
- Le PCF (parti communiste français) est membre du « Bureau d’information » communiste ou Kominform
. Il condamne la « Yougoslavie de Tito qui a refusé la satellisation. »
- Le PCF soutient inconditionnellement les thèses soviétiques et insiste sur le « désarroi des Occidentaux »
au cours du blocus de Berlin.
- Le PCF condamne l’atlantisme de la politique étrangère française…… « La France ne
veut pas être une colonie américaine ». Il rejette le plan Marshall annoncé en juin 1947 et entré en application
depuis le 16 avril 1948

La vie quotidienne en France

- Le PCF est isolé et vit dans un « ghetto » politique depuis le renvoi de ses ministres du gouvernement (5 mai
1947). Il s’oppose aux autres partis à propos de la politique étrangère ou coloniale et de la politique salariale
(« révision des zones de salaires »…).L’Assemblée nationale est le théâtre de violents affrontements.
- L’Humanité est un journal populaire. Cela explique dans une certaine mesure la part relativement importante
accordée au Tour de France dans une activité politique chargée.
- Les difficultés de la vie quotidienne dans un pays dont la reconstruction est inachevée transparaissent. Il est
question de « misère » et de rationnement du pain.

ELARGISSEMENT ET APPROFONDISSEMENT

Ce document témoigne du climat politique au temps de la guerre froide. En France, depuis les grandes grèves de
l’hiver 1947-1948, la « guerre civile froide » a rejeté le plus puissant des partis politiques dans une opposition
systématique au régime. Ce qui a largement contribué à la détérioration de la vie politique en France sous la IVè
République

(Commentaire extrait d’un manuel de terminale L)

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