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Annales.

Economies, sociétés,
civilisations

Jacques J. Maquet, Afrique, les civilisations noires.


Irmelin Lebeer

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Lebeer Irmelin. Jacques J. Maquet, Afrique, les civilisations noires.. In: Annales. Economies, sociétés, civilisations. 19ᵉ année,
N. 2, 1964. pp. 378-379;

https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1964_num_19_2_421159_t1_0378_0000_2

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ANNALES

récente qu'elles sont devenues », p. 23 ; « une apogée », p. 189 ; des


civilisations « constructrices en pierres », p. 253).
Au total, l'ouvrage splendidement illustré (par 32 planches
photographiques) et bien documenté (surtout dans le domaine de l'archéologie)
sans être alourdi par un appareil critique encombrant (peu de notes ; des
indications bibliographiques succinctes mais précises) est une remarquable
mise au point de nos connaissances actuelles sur l'Afrique noire, accessible
au grand public mais utile également à l'étudiant et au chercheur. —
Catherine Coquery-Vedrovitch.

Sur les problèmes d'hier : une bonne initiation...

Afrique, les civilisations noires est un livre d'initiation qui vient à


son heure. Son auteur, Jacques J. Maquet, directeur d'études à l'École
Pratique des Hautes Études de l'Université de Paris, a consacré plus de
dix ans de sa vie à étudier sur le terrain de nombreuses sociétés
traditionnelles. Mais il s'est soucié également d'observer les phénomènes
d'acculturation entre les civilisations africaines et celles des autres parties du
monde. Son dernier ouvrage est un livre de synthèse comme il en existe
peu, car l'auteur ne s'est pas contenté, toutefois, de résumer des travaux
antérieurs : il a fait œuvre originale.
Pour la première fois dans un ouvrage de cet ordre, nous trouvons
l'Afrique divisée en six grandes civilisations, dont chacune est caractérisée
par une certaine technique qui permet aux hommes de tirer leur
subsistance du milieu ambiant. Mais la nouveauté de son propos réside
davantage encore dans le fait d'introduire l'étude de ces civilisations par une
analyse très sensible de l'art qui les reflète. Le lecteur est ainsi amené à
saisir d'une façon intuitive chaque civilisation avant de la comprendre par
les procédés habituels de la pensée discursive.
La première civilisation décrite par l'auteur est celle de l'arc,
civilisation des chasseurs pygmées et bochimans qui tirent tout juste leur
subsistance de la nature et qui vivent en parfaite symbiose avec elle. Mais si cette
civilisation est en voie de disparition, il n'en va pas de même pour celle des
clairières, ainsi dénommée parce qu'elle se développe dans les grandes
forêts équatoriales du Congo et du golfe de Guinée : c'est une civilisation
de défricheurs et de sculpteurs incomparables, dont la vie est liée à la
naissance de l'agriculture. Avec la civilisation des greniers, qui s'est
développée dans la savane, nous découvrons des agriculteurs qui produisent plus
qu'ils ne consomment ; cette notion essentielle de surplus explique
l'apparition des chefferies traditionnelles, au sein desquelles les chefs disposent
de la surproduction et peuvent se livrer à une activité politique. Quant à
la civilisation de la lance, elle est liée à l'élevage et à la nécessité de
développer des vertus guerrières, s'épanouissant dans des sociétés à castes,
lorsque les pasteurs vivent au contact de groupes d'agriculteurs, comme
dans l'Est africain. Dernière civilisation traditionnelle, enfin : celle des

1. Jacques J. Maquet, Afrique, les civilisations noires, Éditions Horizons de France,


Paris, 1962.

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AFRIQUE NOIRE

cités, qui caractérise les grands royaumes de la région soudanaise (Bénin,


Mali, Ghana...) issus du développement des relations commerciales trans-
sahariennes.
Mais que ce soient la civilisation des greniers, de la lance ou des cités,
toutes sont présentes dans la dernière, celle de l'acier, civilisation de l'Afrique
contemporaine. L'auteur pense que cette civilisation de l'Afrique en voie
d'industrialisation ne pourra que ressembler aux autres civilisations
industrielles du monde moderne. Mais elle n'en conservera pas moins des valeurs
traditionnelles dans des domaines autres que technologiques.
Par son caractère prospectif, le livre de Jacques J. Maquet, écrit dans
une langue claire et vivante, est une introduction exemplaire à la
connaissance globale de l'Afrique. Il est admirablement illustré de photos
originales, et accompagné de cartes indispensables à la compréhension de
l'exposé. — Irmelin Lebeer.

...et un modèle d'érudition aimable.

A short History of Africa est un excellent précis d'histoire africaine г,


le premier et le seul qui, des origines à nos jours, retrace l'ensemble de
l'histoire du continent, de la Méditerranée au Cap et de l'Afrique
Occidentale à l'Océan Indien. Ses auteurs, les éminents spécialistes britanniques
R. Oliver et J. D. Fage, viennent ainsi combler une criante lacune, quitte
à retarder la venue ultérieure d'un ouvrage beaucoup plus vaste qu'ils
préparent sur le même sujet.
Après avoir rappelé que la civilisation de l'Afrique était avancée
lorsqu'elle fut découverte par les Européens, et que ceux-ci ne pénétrèrent pas
à l'intérieur du continent parce que les Africains exploitaient déjà eux-
mêmes leurs ressources et tenaient entre leurs mains le commerce intérieur,
les auteurs retracent les grands traits de la préhistoire (chapitre I : The
Hunters), puis de la révolution de Y agriculture (chapitre II : The Farmers).
Née dans le Croissant Fertile (VIe millénaire avant J.-C), puis en Egypte
(Ve millénaire avant J.-C.) ; l'agriculture, remontant la vallée du Nil vers
l'Afrique noire, atteignit Khartoum dans la seconde moitié du IVe
millénaire, puis s'étendit à la savane (IIIe et IIe millénaires) ; à la veille de
l'ère chrétienne, elle était associée à la civilisation des Figurines de Nok
(Nigeria) et gagna ensuite la forêt avec l'expansion des peuples de langue
Bantoue du Soudan occidental, expansion (de repopulation plutôt que de
conquête) rendue possible par l'implantation en Afrique des plantes
vivrières de l'Asie du Sud-Est (banane et igname) qui permirent d'accroître
les densités de population.
L'exposé n'est pas moins lumineux des civilisations successives qui,
de relais en relais, se propagèrent vers le Sud dans l'Afrique toute entière :
née du sol exceptionnellement fertile de la vallée du Nil, la civilisation
égyptienne s'infiltra vers la Nubie puis le royaume de Kouch où Méroé
(« Birmingham of Central Africa ») prit le relais avant d'être supplanté par

1. R. Oliver et J. D. Fage, A short History of Africa, Penguin African Library,


Londres, 1962, 280 p., Orientations de lecture, Index, 19 cartes.

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