1. Le rôle de la littérature française et sa périodisation.
2. Le Moyen Âge : tendances générales. 3. Les étapes du développement littérature française à l’époque du Moyen Âge. 4. Les genres littéraires (auteurs, œuvres) de l’époque : littérature hagiographique, chanson de geste, poésie des troubadours, roman courtois, fabliau, poésie courtoise.
1. La littérature française est une des plus riches en Europe Occidentale et
même dans le monde entier. La littérature française a formé au monde des chefs- d’oeuvres dans tous les genres et courants littéraires. Les noms de Rabelais, de Molière, de Stendhal, de Balzac, de Maupassant, de Rolland, de Camus, de Sartre........ peuvent être inscrits en lettres d’or dans l’histoire de la littérature euro- péenne. Mais qu’est-ce-que c’est « la littérature française » ? La littérature fran- çaise comprend l'ensemble des œuvres écrites ou orales par des auteurs de nationa- lité française ou de langue française ; la littérature écrite en langue française par les personnes d'autres pays tels que la Belgique, la Suisse, le Canada, le Sénégal, l'Al- gérie, le Maroc, etc. se réfère à la littérature francophone. Les particularités du développement de la littérature française sont étroitement liés au caractère général du développement de la France. Il faut noter que l’histoire de la littérature française ce n’est pas une évolution linéaire qui ferait progresser régulièrement la langue, les genres, les thèmes, vers un quelconque point de per- fection. L’histoire se fait par soubresauts et stagnations, à travers des héritages, mais aussi des ruptures et des conflits. D’où la nécessité de présenter une histoire périodisée dans l’ordre chronologique : littérature du Moyen Âge (XI-XV siècles) ; littérature de la Renaissance (XVI siècle) ; littérature baroque et du Classicisme (XVII siècle) ; littérature de l’époque des Lumières (XVIII siècle) ; littérature de la Modernité (XIX, XX, XXI siècles). 2. La période médiéval est fort longue et ne forme pas un ensemble homogène : du VIIIe au XVe siècle, les structures de la civilisation ont totalement changé ; la culture française est marquée par la féodalité qui laissera bientôt la place à l'absolu- tisme des rois. Selon les historiens, trois événements majeurs ont marqué le Moyen Âge : 1) la formation des pays et des peuples européens ; 2) le développement des villes ; 3) la naissance de l’université. Il est à noter que la société médiévale est divisée en trois classes : ceux qui prient, c’est-à-dire les clercs et les hommes d’Église ; ceux qui combattent et qui dirigent, les guerriers (chevaliers et sei- gneurs) ; la chevalerie est une caste supérieure de guerriers au code moral très strict, se donnant pour mission de protéger la veuve et l’orphélin ; ceux qui travaillent, soit les paysans et les artisans. Il est important de comprendre qu’à cette époque l’influence de l’Église chré- tienne est fondamentale. Elle établit les fondements de la philosophie, de la repré- sentation du monde et de l’histoire à travres son interprétation de la Bible. À ce contexte on peut constater six caractéristiques principales de l’époque du Moyen Âge : 1). Il n’y a pas de culture spécifique pour chaque nation : la culture est internatio- nale grâce au latin. La vie religieuse détermine et influence toute l'activité sociale et culturelle. 2) La langue officielle (administration, sciences, poésie) c'est le latin ; il n'existe d'ailleurs pas une langue française, mais deux groupes des langues locales : au Sud de la France – langue d'Oc, au Nord – la langue d'Oïl. Le français (dialecte de l'Ile-de-France) ne s'imposera que vers 1539 (Ordonnance de Villers-Cotterêts), au même rythme que la consolidation du pouvoir royal. 3). La culture latine est réservée à une élite soit qu'elle possède les livres très coû- teux, soit qu'elle sache les lire. Les gens d'Église sont les seuls à détenir simultané- ment ces deux capacités. 4). Nous ne saisissons plus aujourd’hui que des fragments de la littérature médié- vale : beaucoup de textes se sont perdus ce qui nous laisse une impression d'inco- hérence ; l’analphabétisme de la population laïque fait que la transmission est es- sentiellement orale ; l’anonymat est la règle d’or pour les écrivains du Moyen Âge. 5). Les textes de cette époque sont destinés à être dits (rythme, versification, résu- més, reprises, refrains...) ; ils ne sont pas réglés, codifiés, normalisés), mais modi- fiés au hasard du plaisir des diseurs ; le texte n'est qu'un aide-mémoire à l'inter- prète. On ne cherche pas, comme aujourd'hui, l'originalité, mais plutôt la présenta- tion de la tradition. L’œuvre médiévale n’est jamais stable et achevée, elle com- porte une possibilité d’adaptation aux publics et aux modes. Les genres littéraires ne sont pas encore codifiés, mais les auteurs apportent une grande attention à la forme de leurs écrits. 6). À côté de textes sérieux, il y a tout un courant parodique, assuré par les mêmes auteus, pour les mêmes publics. La culture médiévale est en effet assez forte pour intégrer sa propre parodie, qui culmine dans les fêtes du Carnaval où tous les usa- gers ordinaires sont inversés. 3. La littérature à l’époque du Moyen Âge passe quelques étapes de son déve- loppement : 1) la littérature du Moyen Âge prématurée (VIII-XI siècles) ; 2) la littérature du Moyen Âge avancée (XII siècle) ; 3) la littérature du Moyen Âge bourgeoise (XIII sècle) ; 4) la littérature du Moyen Âge du XIV-XV siècles. 4. La littérature à l’époque du Moyen Âge est illustrée surtout par des textes re- ligieux en latin et est connue comme la littérature hagiographique (du grec ancien hágios (« saint ») et gráphein (« écrire »)). Le texte hagiographique était destiné à être lu. On lui donne souvent le nom de légende (du latin legenda, « ce qui doit être lu », terme utilisé dans son acception la plus littérale et non dans son sens péjoratif de récit dépourvu de tout enracinement dans l'histoire événementielle). Le sujet du texte hagiographique présente en premier lieu le récit biographique de la vie du saint, hymnes, prières. Par rapport à une biographie l'hagiographie est un genre littéraire qui veut mettre en avant le caractère de sainteté du personnage dont on raconte la vie. L'hagiographie est ainsi un récit fortement stéréotypé dont la fonction est de servir à l'instruction religieuse, mais qui peut avoir aussi une fonction normative, politique et de propagande religieuse. L'hagiographie est un important genre littéraire pendant le premier millénaire du christianisme. Ces textes donnent des informations historiques tout en les mêlant à des légendes et des récits inspirés, souvent peuplés de merveilleux : les saints en effet sont réputés pour faire des miracles. Exemples : Vie de saint Alexis, poème du VIe siècle ; Le Pré spirituel de Jean Moschus, fin du VIe siècle ; Actes des saints Nérée et Achillée, VIe siècle ; La Vie de saint Léger, Xe siècle ; La Légende dorée de Jacques de Voragine ; Vie de saint De- nis, 1317 ; Acta Sanctorum, des Bollandistes, à partir de 1643 ; Les Petits Bollan- distes de Paul Guérin. Chanson de geste est un récit versifié (un long poème) racontant des exploits guerriers appartenant, le plus souvent, au passé. La geste, du latin geste, est une « action » de caractère guerrier ou fantastique, exploit. Tous les modes d'expression sont utilisés : la parole, le chant, le mime. Ce type de récit apparaît à l'aube de la littérature française, vers la fin du XIe siècle. Souvent anonyme, l'auteur de la geste est un troubadour (ainsi appelé au Sud) ou trouvère (au Nord) qui la destinait à être chantée et accompagnée musicalement, devant un public large, populaire ou noble. La chanson de geste est l’incarnation française du poème épique. Elle est écrite en vers, divisés en laisses. Elle est toujours plus ou mpoins liée à Charlemagne. Elle valorise la vie militaire par l’apologie de la force physique, des exploits, de la bravoure, et la condmnation parallèle de l’infidèle. Le héros épique est un chevalier doué d'une force surhumaine, capable d'endurer toutes sortes de souffrances physiques ou morales. Exemplaire par sa fidélité à son seigneur, il est élu pour sa perfection et représente toujours une collectivité dont l'existence est en jeu. Les autres personnages ont des rôles définis : ami confident, traître, ennemi, lâche, etc. Ils figurent dans le récit pour souligner davantage l'héroïsme et les vertus du héros principal, comme dans la Chanson de Roland. Chanson de Roland ce sont 4000 vers en ancien français répartis en laisses assonancées transmises et diffusées en chant par les troubadours et jongleurs. Cette chanson expose le combat fatal du chevalier Roland, marquis de Bretagne et de ses fidèles contre une puissante armée maure à la bataille de Roncevaux puis la vengeance de Charlmagne. La chanson peut être divisée en quatre parties : 1. La trahison de Ganelon. 2. La bataille de Roncevaux. 3. La vengeance de Charlemagne sur les Sarrasins. 4. Le jugement de Ganelon. Il est à noter qu’il reste moins de cent chansons de geste. Les trouvères des XIIIe et XIVe siècles ont groupé les chansons de geste en trois grandes séries appelées des Cycles ou des Gestes. Chaque Cycle comprend des poèmes épiques qui se déroulent autour des exploits d'un même héros ou des membres de sa famille. Exemples : Cycle du roi (Charlemagne), Cycle de Guillaume d'Orange, Cycle de Doon de Mayence (également appelé Cycle des barons révoltés). Poésie des troubadours est une littérature poétique en vers réguliers, destinée à être chantée par un troubadour. Un troubadour est un compositeur, poète, et musicien médiéval de langue d'oc, qui interprétait ou faisait interpréter par des jongleurs ou des ménestrels ses œuvres poétiques. Le mouvement troubadour a commencé vers la fin du XIe siècle en Occitanie, au sein de la haute noblesse occitane. Puis, il s'est répandu dans d'autres couches sociales et s'est étendu au nord de l'Italie et de l'Espagne. Les troubadours ont participé activement à la vie sociale, politique et religieuse de la société de l'époque. Sous l'influence des troubadours, des mouvements du même type se sont levés partout en Europe. Après la période « classique » vers le XIIIe siècle et d'une résurgence (renouvelement) au milieu de ce siècle, l'art des troubadours a décliné au XIVe siècle puis a finalement disparu à l'époque de la Peste noire (1347-1352). Les thèmes abordés dans les chansons des troubadours portent principalement sur la chevalerie et l'amour courtois. Auteurs significatifs : Bernart de Ventadour, Cercamon, Marcabru, Jaufré Rudel. Roman courtois est un long récit écrit au Moyen Âge (XIe et XIIe siècle). Il met en scène des chevaliers qui combattent pour leurs dames. Les romans courtois représentent la notion d'amour courtois. Dans le roman courtois, les exploits chevaleresques ont pour but de plaire à la Dame du cœur et de faire valoir les qualités individuelles du héros. L'adjectif « courtois », formé sur le mot cour, renvoie au contexte aristocratique du récit. La vie de cour, autour des grands seigneurs, propose comme idéal la noblesse du chevalier, caractérisé par un art de vivre et une élégance morale : politesse, fidélité, gloire, contrôle de soi, refus de toute chose basse. Le parfait héros courtois est partagé entre l'aventure et l'amour. Le merveilleux chrétien et le surnaturel occupent une grande place dans le récit et sont les éléments permanents. La nature et certains personnages sont décrits en détail. La vie matérielle y est présentée aussi : la description des châteaux, des tenues (habits), des tournois, des cérémonies manifestent une nouveauté par rapport au récit épique. Une place particulière dans la littérature courtoise occupe Le Roman de la Rose. C'est une œuvre de visée didactique, composée de deux parties, écrites à une quarantaine d'années d'intervalle au XIIIe siècle par deux auteurs différents. Ce roman va à la recherche de l'Amour et de la Vérité. C'est un songe (rêve), ordonné autour du symbole de la Rose, emblème de la féminité qu'il faut conquérir. À la suite du succès du roman, l'allégorie devient l'un des principaux moyens de s'exprimer en littérature à travers des songes et des récits d'aventures. Les romans de Chrétien de Troyes très connus à l'époque. Exemples : Le Roman de Thèbes (vers 1150), Le Roman d'Énéas (vers 1160), Le Roman de Troie (vers 1160), Tristan et Iseut (1170-1190), les romans de Chrétien de Troyes (1135-1181) Le Chevalier au papegau, Yvain ou le chevalier au lion, Lancelot ou le Chevalier de la charrette, Perceval ou le conte du Graal. Fabliau (issu du latin fabula qui donna en français « fable », signifie littéralement « petit récit ») est le nom qu'on donne dans la littérature française du Moyen Âge à de petites histoires simples et amusantes, définies par Joseph Bédier comme des contes à rire en vers. Leur vocation est de distraire ou faire rire les auditeurs et lecteurs, mais ils peuvent prétendre offrir une leçon morale. Les fabliaux commencent généralement par une phrase d'introduction du narra- teur et se terminent par une morale. Même s'ils comportent une visée morale, celle-ci n'est souvent qu'un prétexte. Les fabliaux visent la plupart du temps surtout à faire rire. Pour cela, ils recourent à plusieurs formes de comiques : comique de gestes : coups de bâton, chutes… comique de mots : répétitions, jeu de mot, expression à double sens… comique de situation : le trompeur trompé, renversement de rôles – maître-valet, mari-femme… comique de caractère : crédulité, hypocrisie, gloutonnerie… Ils comportent très souvent une satire sociale, qui concerne de façon récurrente les mêmes catégories sociales : les moines, les vilains (paysans), les femmes. Le genre tout entier des fabliaux est nettement marqué par le naturalisme qui se retrouve dans le choix des sujets, une grande partie étant empruntée à la réalité quotidienne de la petite bourgeoisie. La bourgeoisie est représentée sans la moindre volonté de l'idéaliser. Ce n'est pas dans les fabliaux que l'on retrouve de belles descriptions de la nature ou des trésors d'imagination : ici les éléments essentiels sont la satire et la morale. Exemples : Le Conte de Richeut, Le larron qui embrassa un rayon de lune, Le paysan de Bailleul, par Jean Bodel, Haimet et Barat, par Jean Bodel, Baillet le savetier ou le prêtre au lardier, Le boucher d'Abbeville, par Eustache d'Amiens , Le prêtre et le loup, Le Curé qui mangea des mûres. Poésie courtoise c’est la véritable chanson lyrique au Moyen Âge. La poésie médiévale atteint son sommet dans l'art des troubadours. Plus spontanées et naturelles au début, en général, les poésies courtoises évoluent vers des formes fixes. Ces chan- sons avaient toujours un refrain, leurs strophes correspondaient à une phrase musi- cale. Leur rythme chantant est défini par l'accompagnement obligatoire d'une mélo- die. Les origines de la poésie lyrique (courtoise) peuvent être recherchées dans les chants populaires et les danses. L'influence de la culture arabe se fait sentir. Dès la fin du XIVe siècle le souci de perfection technique prend le dessus et la poésie devient un exercice de rhétorique ou un divertissement de société. L'idée com- mence à se dissimuler sous les symboles, l'allégorie, l'érudition, qui viennent souvent à la place du sentiment. Exemples : Jacques Roubaud, La Ballade et le chant royal.
Sujet de « La Chanson de Roland »
Depuis sept ans Charlemagne, l’empereur de France fait la guerre en Espagne. Il a conquit tout le pays sauf la ville Sarragosse où règne Marsile – le roi des Sarra- sins. Marsile décide de tromper Charlemagne en lui envoyant des cadeaux et lui pro- mettant sa soumission. Cela se fait enfin que Charlemagne quitte l’Espagne avec son armée. Blancadrin, l’ambassadeur de Marsile apporte un message à Charlemagne. Ro- land, le brave neveu de Charlemagne propose de refuser la proposition de Marsile. Charlemagne n’est pas d’accord. Il décide, sur la proposition de Roland, d’envoyer Ganelon mener les pourparlers avec les Sarrasins. La mission est dangereuse et Gane- lon pense que Roland veut sa mort. Il décide de se venger de Roland. Voilà pourquoi il s’entend avec Marsile leur ennemi. De retour, Ganelon annonce à Charlemagne la soumission de Marsile. Il fut décidé que l’armée française regagnerait la France et Roland resterait à l’arrière garde seulement avec 20000 soldats. Ainsi tout s’accom- plit. Mais dès que Charlemagne et son armée furent partis, Roland est attaqué par 400000 Sarrasins. Olivier, l’ami de Roland lui propose de sonner du cor et d’appeler Charlemagne au secour, Roland refus. Une bataille sanglante commence. Quatre at- taques des Sarrasins furent victorieusement repousées, mais après la cinquième ce fut la défaite. Enfin Roland sonne du cor. Charlemagne l’entend, comprit le danger et ar- riva au secours. Mais il était déjà trop tard : les douze pairs sont successivement tués. Roland meurt en martyr. Il meurt en priant Dieu pour cruellement de la mort de ses 12 pairs. L’armée ennemie est massacrée, le roi Marsile est tué, la reine Bramimonde est faite prisonnière et le traitre Ganelon mis à mort. La belle Aude, ayant entendu que Roland, son fiancé est mort, ne peut le survivre, elle devient toute pâle et tombe aux pieds de Charlemagne morts de douleur.
La Comtesse de Die : sa vie, ses oeuvres complètes, les fêtes données en son honneur, avec tous les documents / Sernin Santy ; introd. par Paul Mariéton