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II) Quel rôle jouent le PROGRES TECHNIQUE et les

innovations dans la dynamique de la croissance ?


Fours à micro-ondes, cuisine moléculaire, ordinateurs, GPS, lecteurs mp3, smartphones, tablettes, voitures électriques
ou sans chauffeur, etc. : aujourd'hui, tout nous parle du progrès technique, tant il est vrai que celui-ci a envahi notre vie
quotidienne. La nouveauté de ces objets est telle qu'on ne peut s'empêcher d'associer « nouveauté » et « progrès
technique ».
Pourtant, le progrès technique est vieux comme le monde. Très tôt, l'homme a fait preuve d’ingéniosité : pour être plus
efficace dans son travail, pour alléger sa peine, pour satisfaire des besoins croissants, il a dû inventer de nouveaux
outils, en perfectionner de plus anciens, fabriquer des objets de plus en plus nombreux et différents. Ainsi les historiens
peuvent-ils retracer toute l'évolution des techniques mises en œuvre, des objets qui sont apparus au fil du temps, des
origines de l'humanité jusqu'à nos jours. Mais, ce qu'ils font ressortir, aussi, c'est l'accélération de cette évolution à partir
de la révolution industrielle. Jusque-là, des progrès avaient été réalisés, certes, mais de loin en loin, les méthodes
comme les produits ayant des « durées de vie » séculaires.
A partir de là, les innovations ne vont plus cesser de se multiplier à un rythme soutenu, particulièrement spectaculaire
dans ces soixante-dix dernières années. L'accélération du progrès technique peut s'expliquer :
- par son caractère cumulatif qui accélère sa diffusion dès lors que la communication entre les hommes est facile
(« Nous sommes des nains montés sur les épaules de géants », disait Newton) ;
- par l'enjeu économique qu'il représente, en tant que moteur de la croissance des entreprises et instrument de leur
compétitivité. Cette dimension du progrès technique a pris une ampleur considérable avec la mondialisation de
l'économie et entraîne un changement de perspective : au lieu de dépendre du développement autonome des sciences
et des techniques, le progrès technique fait l'objet d'une stratégie économique de développement : on le considère
désormais comme « endogène ».
En quoi le progrès technique favorise-t-il la croissance ?

Dans ce II), le propos passe d’une approche exogène du progrès technique à une approche
endogène. Il s’agit de déterminer quelles sont les décisions économiques privées et publiques
favorisant le progrès technique (A et B).
Ces décisions se prennent dans un cadre institutionnel définissant les incitations auxquelles sont
confrontés les agents. Il conviendra donc de réfléchir aux caractéristiques que doivent revêtir les
institutions pour être favorables à la croissance économique(C).

A) Les INNOVATIONS sont à l’origine du progrès technique et


s’accompagnent d’un processus de destruction créatrice

1) Définitions : inventions, innovations, progrès technique


Doc. 1 : Qu’est-ce que le progrès technique ?

Progrès technique = ensemble des innovations qui entraînent une transformation ou un bouleversement des structures
économiques et sociales : moyens et méthodes de production, organisation du travail, produits, marchés, lien social,
inégalités…
Innovation = application économique et commerciale d’une invention.
Le mot « invention » a une portée qui n'est que technique (c'est par exemple la découverte d’un nouveau principe,
d’une loi scientifique, d'un nouveau procédé…), alors que le mot « innovation » renvoie à un processus économique
(c'est par exemple la mise en œuvre dudit procédé dans tel processus productif). Voir diapo 39
On distingue deux grandes catégories d’innovations technologiques :
- Innovations de produit : biens et services nouveaux. Les innovations de produit sont dites radicales lorsque les
produits n'ont aucun équivalent préexistant ; elles sont incrémentales lorsqu’elles se traduisent par l'amélioration
significative des performances de produits existants).
- Innovations de procédé : nouvelles techniques de production ou de commercialisation (on y inclut souvent aussi
les innovations organisationnelles). Elles sont à l’origine de gains de productivité et de réduction des coûts.

REPÈRES
L'INNOVATION consiste à industrialiser l'objet d'une découverte puis à l'introduire avec succès sur le marché.
L'INVENTION consiste en la découverte d'un principe ou d'un procédé nouveau et participe au renouvellement des
connaissances indépendamment des applications commerciales susceptibles de lui être données.
LE PROGRES TECHNIQUE : Jusqu'à une époque récente, progrès technique était synonyme de « Grandes
découvertes » (domestication du feu, l'invention de la roue, électricité ...) Or, il est évident que les grandes révolutions
de l'histoire de l'humanité ne sont pas uniquement liées aux prouesses de techniciens de génie mais qu'elles sont aussi
déterminées par la capacité des individus à s'organiser, à communiquer, à vendre ...
La notion de progrès technique revêt donc deux sens :
-au sens strict, c'est l'amélioration des techniques de production qui permettent d'obtenir une unité produite avec moins
de travail humain. Donc P.T. au sens strict = tout ce qui permet d’accroitre la PGF.
-au sens large, c'est l'ensemble des innovations qui permettent la diffusion de nouvelles connaissances, de nouveaux
biens et services, un changement des méthodes
Doc. 2 : Les apports du progrès technique
Le progrès technique est défini de façon générale comme un accroissement de la connaissance que les hommes ont
des lois de la nature appliquées à la production. Il consiste donc en l'invention de produits et procédés nouveaux qui
augmentent le bien-être des individus soit par un accroissement soit par une transformation de la consommation. De
plus, ces inventions vont s'ajouter au stock des produits et procédés déjà existants. Le progrès technique a été de
longue date reconnu par les économistes comme le moteur principal de la croissance, pour de multiples raisons. [...]
Les comparaisons entre nations de niveau de vie différent montrent l'utilisation de technologies d'efficacité très
différentes. Et les analyses temporelles soulignent les changements profonds qui interviennent dans ce domaine. Des
indicateurs simples peuvent en rendre compte partiellement : par exemple, la consommation de carburant d'un véhicule
de type donné, ou la possibilité de soigner telle maladie. [...] Ces évidences partielles peuvent toujours être
questionnées. Ainsi, si l'on sait maintenant soigner certaines maladies grâce à la technologie, il est vrai aussi que celle-
ci, au moins indirectement, a entraîné l'apparition de nouvelles maladies ou de nouveaux risques pour la santé. Une
comparaison de l'espérance de vie à la naissance de populations vivant dans des contextes techniques différents
montre que le bilan est assez largement positif.
O. Guellec, P. Ralle, Les Nouvelles Théories de la croissance, coll. « Repères », Éditions La Découverte, 1995.

1) Comment les auteurs définissent-ils le progrès technique ? Distinguez innovation de procédé et innovation de produit.
2) Illustrez par des exemples le premier passage souligné.
3) Le bilan du progrès technique est-il globalement positif ?
Doc. 3 : D’où vient le progrès technique ?
2) Les innovations : formes et origine

a) Les différentes formes d’innovation


Doc. 4 : Les différentes formes d’innovation

Lire le document, puis répondre aux questions du document suivant


10

Doc. 5 : Innovations de produits et innovations de procédés Voir diapos 40 à 45


L’économiste autrichien Joseph Aloïs Schumpeter (1883-1950) a souligné le rôle fondamental du progrès technique
dans la croissance économique. Dans un sens plus large, il considère que le PT englobe les différentes formes
d'innovations mises en œuvre par l'entrepreneur, lesquelles peuvent concerner aussi bien la fabrication d'un produit
nouveau, la mise en œuvre de nouvelles méthodes d'organisation de la Y, ou l'ouverture de nouveaux débouchés.
On peut donc définir le progrès technique comme la somme des innovations.
- Une innovation correspond à l’introduction dans le processus de production et sur un marché d’une invention. Elle
désigne l’application industrielle et commerciale d'une invention. C’est donc l’entrepreneur ou l’entreprise qui est
responsable de l’innovation. Elle se situe en aval de l'invention.
- Une invention est le résultat d’une découverte ou d’une idée nouvelle qui pourra éventuellement prendre la forme
d’un produit ou d’un procédé nouveau. C’est le chercheur ou le savant qui découvre des inventions lorsqu’il émet des
idées ou des principes explicatifs nouveaux qui se réalisent en nouveautés.
Les inventions et les innovations sont le fruit de la recherche. Elle s’exerce à trois niveaux :
- La recherche fondamentale élargit le champ des connaissances scientifiques en trouvant les principes de
fonctionnement de la nature. En général, les découvertes de la recherche fondamentale ne sont pas brevetables. Elle
est donc considérée comme un « bien public » car elle augmente le stock de connaissances de tous sans qu’ils en
aient à payer le prix. C’est la raison pour laquelle elle est financée par l’Etat.
- La recherche appliquée est à l’origine d’une invention c'est-à-dire d’un procédé technique brevetable. Elle cherche
des applications aux découvertes de la recherche fondamentale. Ainsi, la découverte des rayons laser a trouvé plusieurs
applications dans la chirurgie, la découpe de textiles…
- La recherche développement met au point un produit ou un procédé directement utilisable (le prototype). Elle
débouche en général sur brevet et est financée par les entreprises.

Doc. 6 : Innovations radicales et innovations progressives


L’innovation de procédé est associée à l’adoption de méthodes de production nouvelles ou sensiblement
améliorées. Ces méthodes peuvent impliquer des modifications portant sur l’équipement ou l’organisation de la
production. Elles peuvent augmenter le rendement dans la production de produits existants. Elles peuvent aussi
conférer davantage de souplesse à la production, abaisser les coûts ou bien encore limiter les déchets, les atteintes à
l’environnement, les coûts de conception des produits ou améliorer les conditions du travail.
On distingue habituellement deux grandes formes de l’innovation de produit. D’une part, la conception de produits
très largement nouveaux. On parle alors d’innovation radicale de produit. D’autre part, l’amélioration des
performances de produits existants, on parle alors d’innovation progressive de produit ou d’innovation
incrémentale. Les premiers microprocesseurs ou magnétoscopes étaient des innovations radicales, le walkman est
une innovation progressive car il associe des technologies existantes dans une fonctionnalité nouvelle.
Robert Boyer, Innovation et croissance, La Documentation française 1998
Parmi les innovations de produit, on a pris l’habitude de distinguer :
- Les innovations radicales ou majeures qui reposent sur une conception, des matériaux et un usage présentant des
différences significatives par rapport aux produits antérieurs. L’automobile, le téléphone, le microprocesseur, ont été
des innovations radicales, en rupture avec ce qui existait.
- Les innovations incrémentales ou progressives ou mineures ne font qu’améliorer les performances, la
composition et l’utilisation d’un produit existant. Le remplacement du métal par des matières plastiques dans le mobilier
de cuisine ou dans la fabrication automobile, l’’introduction des freins ABS dans une voiture ou d’un appareil photo dans
le téléphone portable…sont des innovations incrémentales.

2) Le rôle des entrepreneurs et de la Recherche et développement (R & D) dans l’innovation

Doc. 7 : Le rôle fondamental des entrepreneurs-innovateurs

Doc. 8 La figure de l’entrepreneur schumpetérien et le progrès technique


Doc. 9 : Des dépenses de recherche et développement (R&D) au progrès technique
3) Les effet des innovations sur la croissance économique

a) Les effets des innovations sur l’offre et la demande

Exercice 1 : A partir du texte et du vocabulaire suivant, inscrivez ces différents types d’innovation dans le schéma :
Innovation radicale, hausse de la productivité, innovation de procédé, nouvelle organisation, innovation de produit,
innovation progressive ou incrémentale.
Innovations
Innovations

Nouvelle méthode
de production

Augmentation de la
demande

Exercice 2 : Innovations et croissance


A l’aide des trois schémas ci-dessous, complétez le tableau
Innovations de procédé et croissance Innovations de produit et croissance
Effets sur l'offre : Effets sur l'offre :

Effets sur la demande : Effets sur la demande:

Voir diapos 46 et 47
Remarque : Frontière technologique et nécessité de l’innovation
►Un pays qui se trouve à la « frontière technologique » (cas des PDEM) dispose des technologies les plus avancées
et donc peut facilement atteindre des niveaux élevés de productivité. Les niveaux de Y et de vie y sont élevés. En
revanche, la croissance économique est plus faible car le PT est lent, il dépend en grande partie des innovations qui
restent à découvrir. Les pays avancés ont donc un régime de croissance par innovation
Par contre, un pays en développement qui acquiert des technologies de pays où les niveaux de productivité
sont plus hauts dispose d’un facteur favorable à une croissance éco forte, plus rapide que celle des pays
avancés. Il s’agit d’un régime de croissance par imitation, dans lequel l'économie croît par adoption progressive de
changements technologiques ou organisationnels initiés par d'autres pays.
→ Pour un pays qui est loin derrière la frontière technologique, les gains de productivité passent plutôt par l'imitation
des technologies existantes (économie de rattrapage). Alors que pour un pays proche de la frontière technologique,
c'est l'innovation qui tend à devenir le principal moteur de la croissance : il s’agit de trouver de nouveaux gisements de
gains de productivité pour continuer à croître.

Prépa Bac, partie 1 de l’EC :


« Illustrez par des exemples la façon dont le progrès technique est source de croissance »
3) Les innovations s’accompagnent d’un processus de destruction créatrice

L’économiste russe Nikolaï Kondratiev (photo de gauche) a mis en évidence l’existence de


cycles longs de l’activité économique.
Voir diapo 48
Les cycles sont composés de deux phases :
une phase A durant laquelle les prix, la production l’investissement et
le crédit augmentent rapidement ;
une phase B durant laquelle ces variables augmentent moins
rapidement ou diminuent.
Chez Joseph Aloïs Schumpeter (économiste autrichien hétérodoxe,
1883-1950, photo de droite) le capitalisme est pas essence par nature instable et donc
cyclique. Il s’est appuyé sur les travaux de Kondratiev et s’est employé, dans plusieurs
ouvrages (1913 et 1939), à expliquer ces « cycles longs ».
Document 10 : Joseph A. Schumpeter et les « vagues du capitalisme »

Doc. 11 : Les innovations majeures à l’origine de cycles longs

Voir diapo 49
Doc. 12 : L’explication des cycles Kondratieff par des innovations majeures

Doc. 13 : La « destruction créatrice » selon Schumpeter

Le PT et les innovations qui le composent induisent un processus dynamique source de croissance, mais est également
facteur de crise et est donc responsable de l’irrégularité de la croissance.
Toute innovation va rendre obsolètes les produits et les techniques du passé.
Destruction créatrice : Processus interne au capitalisme qui révolutionne incessamment de l'intérieur la
structure économique, en détruisant continuellement ses éléments vieillis et en créant continuellement des
éléments neufs engendrant ainsi la croissance économique.
Aspect destructeur Aspect créateur
- Disparition de certains produits et de manière de - Création de nouveaux produits, apparition de nouvelles
produire, donc des entreprises qui les fabriquent ou les techniques de production, donc d’entreprises innovantes
utilisent
- Destruction d’emplois, - Création de nouveaux emplois,
- Modes de vie bouleversés (exode rural,...). - Nouveaux modes de vie.
Exercice 5 : Différents exemples historiques de destruction créatrice. Complétez :
Innovations Quelles entreprises vont croître ? Quelles entreprises vont
« disparaître » ?
Voiture Producteur de voitures Vendeurs de chevaux
Energie nucléaire Mines d’uranium
Lecteur DVD
Producteurs industriels de textile Producteurs de textile au rouet manuel

Pour J.A. Schumpeter (Théorie de l’évolution économique, 1912) la dynamique de l’économie capitaliste réside dans
l’apparition, en grappe (par vagues), d’innovations (imitation des innovations qui marchent entre concurrents, les
innovations dans un secteur nécessite d’autres innovations dans d’autres secteurs amont ou aval, par exemple,
l’invention du métier à tisser ne peut pas survenir sans l’invention du filage). Lorsqu’une grappe d’innovations majeures
dans les procédés et les modes d’organisation apparaît, la rentabilité (présente ou future) des activités productives
traditionnelles va nécessairement s’avérer insuffisante. D’où un tarissement plus ou moins rapide des ressources qui
leur sont affectées et, ce faisant, des fermetures (ou des délocalisations) d’établissements et des faillites (ou des
reconversions) d’entreprises et, in fine, des problèmes d’emploi, y compris pour les actifs indépendants.
Quand une (nouvelle) entreprise innove avec succès, elle devient plus productive (elle a de meilleurs coûts unitaires
par rapport aux concurrents) et/ou elle propose de nouveaux produits, elle gagne donc des parts de marché et accroit
son profit. Les entreprises concurrentes peu innovantes vont peu à peu faire faillite à moins qu’elles ne parviennent
elles-aussi à innover avec succès. Par conséquent, dans un secteur donné, des entreprises ferment tandis que d’autres
naissent ou croissent. On appelle ce phénomène une mutation sectorielle ou le processus de destruction créatrice.
La destruction créatrice est un processus de mutation économique qui débute suite aux innovations des entreprises
innovantes et qui se traduit par la modification de la structure sectorielle due à la destruction continuelle des entreprises
les moins innovantes. Pour Schumpeter, cette « destruction créatrice » est la caractéristique fondamentale du
capitalisme qui, en permanence, détruit certains de ses éléments et en crée de
nouveaux grâce aux innovations des entrepreneurs.
L’ordre ancien commencera donc à être détruit, étant entendu qu’il ne faut pas
envisager cette destruction en des termes uniquement économiques : les valeurs,
les normes, les modes de vie, l’habitat, etc. seront également affectés (à titre
d’exemple, cf. la première révolution industrielle). Lorsque la destruction de l’ordre
ancien commence, de nombreux salariés et actifs indépendants vont être
confrontés à des difficultés très importantes. De nombreuses actions collectives
vont donc être organisées (dont celles des « canuts » lyonnais et des « luddistes
» anglais au XIXe siècle) afin de s’opposer aux innovations qui sont à l’origine de
cette destruction.
À moyen ou à long terme, les effets positifs l’emporteront sur les effets négatifs
mais le pas aura été effectivement difficile à franchir (sauf si les pouvoirs publics
sont intervenus pour que cette transition soit supportable).
TD : Mineurs, la fin d’un monde. Un exemple de « destruction créatrice »

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