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« LA COMPREHENSION ENIGMATIQUE DE LA MORT CHEZ LES BANTU


SELON MUJYNYA »

0. INTRODUCTION

Constituant une réalité inépuisablement connue, le continent africain reste à


découvrir et à redécouvrir au jour le jour. Il est un arsenal de connaissances dans
lequel le monde ne cessera de puiser des surprises, tel un arc en ciel qui apparait dans
le firmament par ses différentes couleurs en parcourant toute la courbe céleste ; car,
par son potentiel culturel, l’Afrique se range du côté des continents cosmopolites. Ne
disons-nous pas qu’un peuple sans culture est un peuple appelé à disparaitre de la
surface de la terre ! Et puisqu’à tout seigneur, toute gloire, il s’agit, dans le cadre
échéant, du «  Bantu ». Comme toute personne, les Bantu surgissent, vivent et
meurent.

Qui sont alors le Bantu ? Quelle est la finalité de son existence terrestre ?
Quelle est sa vision sur la mort ?

Telles sont les questions auxquelles nous essayerons de répondre dans les lignes
qui suivent en des points essentiels que voici : envergure géographique, considération
de la vie chez les Bantu, l’énigme de la mort chez les Bantu, à propos de l’au-delà, une
conclusion parachèvera ce travail.

I. ENVERGURE GEOGRAPHIQUE DE LA SOCIETE NTU

La race bantu est une dérivée de plusieurs peuples entre autres: les Chamites et
les nègres. Elle occupe la région située «au sud de la bordure du Sahara, baptisée par
les ethnologues de The Black Belt et considérée par eux comme l’incontestable patrie
des vrais Nègres. »1 Autrement dit, ce peuple va de l’Equateur au Cap de bonne
espérance et de l’est à l’Ouest. D’où la quasi-totalité de l’Afrique à partir de
l’Equateur.

II. CONSIDERATION DE LA VIE CHEZ LES BANTU

1
N. MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, Ed. P.U.N.Z, Zaïre, 1972, p. 1.
2

Les Bantu considèrent l’homme comme un tout composé de l’âme (nitu) et du


corps au premier plan ; puis des principes vitaux inferieurs que Mujynya nomme :
« l’ubuzima » et « l’igicucu ». Et de ce point de vue, la mort est comprise comme
séparation entre le corps et l’âme.

Contrairement à la considération incorrecte de plusieurs écrits des voyageurs,


voire de certains hommes de science qui corrompent le monde par des images erronées
délibérément du Bantu qui laissent entendre, depuis des temps immémoriaux, que le
Bantu est un animiste parce que projetant la vie dans chaque être de la nature, nous
tenons à relever sous la plume de MUJYNYA qu’il n’y a rien d’animiste dans le chef
du Bantu2; Parce que le bantu croit en la vie dans les seules êtres sensibles ; c’est-à-
dire les hommes et les animaux qui constituent le monde visible.3

III. L’ENIGME DE LA MORT CHEZ LES BANTU

1. APPROCHE DEFINITIONNELLE DE LA MORT CHEZ LES BANTU

Le concept « mort » dans l’idée bantu n’est rien d’autre que  « un passage en ce
monde vers un autre monde4 ». Pour dire, mourir c’est avant tout partir, c’est quitter ce
monde pour un autre. Mais l’idée dominante qu’on trouve à maintes reprises aussi bien
dans les chants funèbres que dans les proverbes concernant la mort est celle d’un
« départ ». En effet, en parlant de la mort, les bantu disent : il est parti, il est rentré, il
nous a précédés chez nos ainés « les ancêtres », ou il a dit adieu à la terre. Ces paroles
signifieraient que personne n’en doute, le « départ » dont il est question dans ce
contexte n’est qu’une forme imagée que le défunt n’a pas été anéanti par la mort mais
qu’il continue à exister dans l’au-delà.

Mais dans le contexte philosophique, la mort comme affirme d’autres philosophes


est : « cette séparation de l’âme et du corps 5» du faite que l’homme est composé de
l’âme et corps. Ce qui est contraire à celle des bantu qui confirment que: la mort
consiste à la fois dans la destruction du corps et dans celle des principes vitaux

2
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 27.
3
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 29.
4
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 119.
5
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 120.
3

inferieurs, en l’occurrence de l’ubuzima et l’igicucu, ce qui a pour effet, dans les deux
cas, la libération du principe Vital spirituel qui sépare définitivement du corps. Cette
séparation du NITU d’avec le corps apparait une conséquence de la destruction de
l’un ou de tous les éléments matériels qui, avec ce que nous avons appelés l’âme-
esprit constituant le vivant homme.

Selon les bantu le nitu étant, dans l’homme est le seul élément spirituel et partant
indestructible, cela équivaut a dire que la mort peut résulter soit de la destruction du
corps soit celle de l’igicucu, ou celle de l’ubuzima. Pour dire, le corps ne cesse de
vivre que s’il est détruit totalement ou partiellement dans ses «  centres vitaux » dits
VIJIMBA, INGUSHO , ou si l’igicucu s’évanouit, ce qui entraine la destruction de
l’ « âme -vie », principe vital que nous connaissons sous le nom d’ubuzima.

Les bantu ne croient pas généralement à la mort naturelle, c’est –à-dire toute
personne meurt âgée, disent –ils, elle peut mourir sans qu’un autre la tue. Si elle meurt
jeune, c’est que d’autres l’ont fait mourir. Pour eux l’homme jeune ne meurt pas sans
raison, sans qu’un autre l’ait tué. Toutes ses observations relèvent le fait que toute
destruction du corps ou des principes vitaux qui entraine la mort, est ordinairement
attribuée à l’action d’un être intelligent, un homme ou un esprit. Mêmes les cas des
maladies ou des simples accidents sont considérés comme étant l’effet de l’action
d’un être intelligent qui, se servant de sa puissance d’être-force supérieur. Cette
croyance est si profondément enracinée dans la mentalité que si jamais quelqu’un
tombait malade , les membres de sa famille s’empresseraient de faire venir l’umlaye
ou médecin spécial non seulement pour diagnostiquer la maladie et déterminer ses
causes mais aussi pour découvrir le mulozi ou l’être intelligence qui aura ainsi
attenté à la vie. Mais en cas de décès, on consulter le devin et toutes les personnes
censées posséder le pouvoir de découvrir le « meurtrier ».

2. LA MORT EN TANT QUE DESTRUCTION ?

Le Muntu en général est attaché à la vie dans sa plénitude. Il y tient car pour lui
la vie est précieuse et noble. Ainsi, même après la mort de l’un de sa communauté, il
croit fermement que l’illustre disparu est toujours vivant. Les Bantous considèrent
4

l’aude-là comme le lieu propre des hommes d’où ils sont venus et où ils doivent
retourner. De ce fait, ils disent en proverbe : « Nous sommes tous des passants en ce
monde et tout étranger doit songer à rentrer chez lui »6. Ce monde physique, le muntu
le considère comme un lieu de passage, de pèlerinage. Dans cette optique, « mourir
c’est avant tout partir, c’est quitter ce monde pour un autre »7. Dans la même
perspective, Vincent MULAGO explique que chez les Noirs, les Bantu, les hommes
meurent dans la tranquillité. Ceci se justifie par le fait que ceux-ci ignorent la
« rétribution future »8 et la séparation qui brise l’abondance vitale. Il va jusqu’à dire :
« Les dernières paroles du mourant peuvent nous donner une réponse : ’’portez-vous
bien, je m’en vais rejoindre les nôtres’’ : c’est l’adieu suprême. La mort n’est donc pas
un néant ; ce n’est pas une incertitude, c’est un changement de lieu et de condition »9.

Passer d’un monde à un autre sans connaitre d’anéantissement, tel est le souci
majeur que se fait l’homme africain, spécialement le Muntu. Ceci s’exprime sans
ambages dans les chants de funèbres, voire dans maints proverbes africains.
Concrètement, les bantous ne disent ne disent pas que tel est mort ou bien qu’il est
décédé, mais plutôt « il est parti, il est rentré, il nous a précédés chez nos aînés ’’les
ancêtres’’ »10. Il s’agit là d’une séparation qui s’opère entre ceux qui partent dans
l’autre monde et ceux qui restent dans ce monde physique, matériel. Et, nul n’en est
ignorant, la séparation est douloureuse, mais elle porte en même temps un espoir de se
revoir ultérieurement. Il est mieux de relier ce départ inopinément physique à la
question d’une nouvelle naissance, une « renaissance » d’un nouvel être qui actualise
celui qui vient de se séparer de ceux sont encore physiquement vivants d’autant plus
que toute naissance est la renaissance d’un ancêtre admettent les africains.

En outre, la mort chez les Bantu « consiste à la fois dans la destruction du corps
et celle des principes vitaux inférieurs »11 et « les Bantu ramènent ainsi la mort à

6
E. MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, in Cahiers des Religions Africaines, Vol.
3, 5(1969), p. 25.
7
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 25.
8
V. MULAGO, Un visage africain du Christianisme, Présence Africaine, Paris, 1962, p. 64.
9
MULAGO, Un visage africain du Christianisme, p. 64.
10
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 25.
11
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 25-26.
5

l’arrêt définitif ou à la cessation de l’action vivifiante des principes vitaux sur le corps
»12.

Toutefois, les Bantu ne séparent ni l’âme ni l’esprit du corps, parce que, pour
eux, le Muntu ou l’homme est un tout vivant, un tout composé. Par conséquent,
l’absence de l’un de ses composantes entraine « la paralysie » ou mieux la destruction
de la vie elle-même.

« En Afrique Noire, comme partout ailleurs dans le monde, la mort se présente comme
un fait inéluctable. Elle mange le petit, emporte l’adulte, détruit le fort et n’épargne
personne, dit un proverbe. Souvent personnifiée, la mort apparait dans les légendes et
les mythes africains sous les traits d’un mauvais génie poursuivant sans relâche son
œuvre de destruction. Tout ce qui conduit au décès, à savoir la maladie, les accidents
de tout genre, le maléfice, la sorcellerie »13 et « sont autant d’armes puissantes au
service de la mort »14.

Citant Abrahamsson, Mujina écrit : « D’après les légendes, la mort fit son
aspiration dans le monde à la suite de la déformation, par certains animaux, du
message divin concernant l’immortalité que l’Auteur de la vie voulait accorder aux
hommes »15. En fait, Abrahamsson a étudié profondément la question de l’origine de la
mort. Il retrace des témoignages rapportant les causes telles que la désobéissance et
l’inconduite de l’homme qui auraient été à l’origine de la mort. Ainsi « c’est pour
punir l’homme que Dieu lui aurait refusé le don de l’immortalité »16. En outre, « la
mort aurait pénétré dans le monde par la négligence de certaines créatures,
(généralement le caméléon, le mille-pattes, et parfois les hommes), d’une part et par
décret divin d’autre part »17.

Certainement, aux yeux des Bantu, « la mort consiste avant tout à la destruction.
D’où qu’elle vienne et quelle que soit sa cause, elle est considérée comme étant le
résultat de la destruction de l’un des éléments matériels dont résulte la vie »18.
12
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 27.
13
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 27.
14
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 27-28.
15
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 28.
16
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 28.
17
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 28.
18
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 29.
6

Toutefois, « cette destruction du corps, de l’ubuzima ou de l’igicucu est rarement


attribuée à une cause naturelle. En dehors des cas de décès occasionnés par la
vieillesse… les Bantu ne croit généralement pas à la mort naturelle »19. Ainsi, la mort
d’un vieillard n’est qu’un épuisement graduel, il peut mourir sans intervention d’une
autre personne car ayant atteint le paroxysme de sa vie.

Mais quand il s’agit de la disparition d’un jeune, pour les Bantu, sa mort serait
occasionnée précipitamment d’autant plus que l’homme jeune ne meut pas sans raison,
même en cas des maladies ou accidents les Bantu y trouvent des raisons de la
destruction ou du détriment du principe vital. A cet effet, les Bantu considèrent que la
vie devrait normalement s’éteindre au terme d’une extrême vieillesse, dernière étape
l’homme soupirant pour la dernière fois remet le principe vital d’où il est venu. A ce
propos, Alexis KAGAME admet aussi que « les Bantu ont affirmé l’existence en
l’homme d’un principe vital d’animalité, celui qui conditionne le surgissement du
vivant sensitif. Ce principe vital, commun à l’animal et à l’homme, est appelé ombre…
qui s’évanouit à l’instant de la mort » et « continuerait à exister même après l’instant
où l’homme a expiré »20.

De ce qui précède, les Bantu conçoivent inévitablement la mort comme un total


dépouillement de l’homme, ce dernier est dépourvu de ses forces spirituelles qui, sans
doute, font ce que l’homme soit « Muntu ou homme vivant »21. La mort, c’est une
diminution. Elle est ainsi destruction dans la mesure où elle entraine la suppression de
la vie. Celui que la mort emporte cesse d’être un muzima et par conséquent il devient
un muzimu. L’attitude principale du Muntu en face de la mort est la désolation
profonde qu’il éprouve car ayant été coupé brutalement de l’un de ses êtres chers, une
séparation sans précédent, une rupture totale d’avec le disparu qui entraine un vide réel
dans la famille et dans la communauté.

3. LES CAUSES DE LA MORT CHEZ LES BANTU

19
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 29.
20
A. KAGAME, La place de Dieu et de l’homme dans la religion des Bantu, in Cahiers des Religions
Africaines, Vol. 3, 5(1969), p. 6.
21
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p. 32.
7

Selon les bantu la mort est une chose qui envisage beaucoup de choses qu’il soit du
côté de survivant ou du côté du défunt lui-même. En ce qui est de la question des
survivants, précisément ceux qui appartiennent à la famille ou au clan du défunt : « la
mort est un élément qui crée un vide dans les rangs de la famille en question, de ce
clan et de la tribu, mais aussi elle prive réellement ceux qui étaient étroitement unis
au défunt sur lequel ils pouvaient compter dans diverses circonstances.  Cette
frustration est cruellement ressentie surtout par les membres des familles le plus
proches. C’est dans cette perspective que les bantu disent que : «  toute mort d’un
homme est considérée, comme diminution du potentiel vital du clan et de la tribu »22.

En ce qui concerne le défunt, les conséquences sont nombreuses. Mais,

« La plus importante de toutes passe pour être l’excorporation du nitu ou de l’âme-
esprit qui jusqu’alors était censé avoir sa résidence dans le corps. La désincarnation du
principe spirituel de l’homme se produit à la fin de l’agonie, disent les Bantu… La fin
de l’agonie se dit guca en Kinyarwanda. Ce terme qui signifie aussi couper au couteau,
exiler, séparer, symbolise la rupture qui survient au moment de la mort entre le corps
qui reste là, gisant, inanimé et le principe vital spirituel qui est censé quitter ce monde
et continuer son existence dans d’autres lieux : ikuzimu »23.

C’est pour quoi chaque corps détruit, l’ubuzima et l’igicucu anéantis, et produit
d’effet dans la suppression des activités auxquelles ces deux principes vitaux
présidaient dans l’homme, a savoir : la nutrition, l’assimilation, la reproduction et la
vie psychique sensible qui poussent les bantu de voir dans la mort un véritable
dépouillement de l’homme. C’est dans ce sens qu’ils disent : «  la mort reste une
diminution »24, c’est –à- dire une destruction qui entraine la suppression de la vie, et
celui qu’elle frappe cesse d’être un « muzima » pour devenir un « muzimu », ce «u »
final indiquant qu’il est une réalité spirituelle qui a eu la vie du corps: ubuzima, mais
qu’elle a perdue et qu’elle ne l’aura plus. Cette diminution ne consiste pas dans la
privation du corps et l’ubuzima ainsi que l’igicucu, elle consiste aussi dans le fait que

22
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p.125.
23
MUJYNYA, Le mystère de la mort dans le monde bantu, p.31.
24
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 125.
8

le mort se trouve dans l’impossibilité directement , de par lui–même , des avantages


matériels auxquels il avait accès au monde.

IV. A PROPOS DE L’AU-DELA

1. LE SORT DE L’HOMME DANS L’AU-DELA

Parler du sort de l’homme dans l’au-delà après la mort est une question
importante et facile pour le bantu. Dans ce sens qu’il n’y a que deux possibilités qui
se représentent : être accueilli dans le village des ancêtres ou en être rejeté.

Chez les bantu, parmi les cérémonies funèbres, il en est une qui mérite une mention
toute particulière. C’est-à-dire avant de descendre le corps du mort dans la tombe,
chacun de ceux qui le désirent s’adresse au défunt en ces termes : «  va en avant, nous
te suivons, Dis à ceux qui nous ont devancé que nous suivons. Salue tout le monde de
notre part, et n’oublie pas de nous rendre visite 25». Disons que toutes ses paroles
d’adieu et des prières adressées aux morts pendant les sacrifices qui leur sont offerts
sont centrés chez les bantu sur le culte des ancêtres, qui ne laisse aucun doute sur le
fait que tout les bantu croient à l’existence de l’homme au-delà.

Cependant, aux yeux des bantu, le muzimu ne signifie rien d’autre que la personne
même du défunt, c’est –à-dire ce terme ne désigne pas ce qui ne reste de l’homme
après la mort, mais plutôt ce que devient l’être humain en sortant de ce monde. En
d’autres mots, le Muzima est l’homme à l’état désincarné. C’est pour quoi dans la
conception de MUJYNYA tout défunt est considéré, partout dans le monde bantu,
comme « une réalité incorporelle jouissance de deux facultés spirituelles qu’il
possédait déjà en ce monde : L’intelligence et la volonté 26» pour dire que les bantu
reconnaissent au Muzimu les qualités essentielles d’un esprit, l’incorporéité d’une
part, l’intelligence et la volonté de l’autre part.

Chez les bantu selon MUJYNYA, le village des ancêtres est un lieu au seuls les
justes trouvent un bon d’accueil. Et ces mêmes bantu pensent que seuls les ancêtres
ont le pouvoir de communiquer avec certains de leur descendant vivants encore en ce

25
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 131.
26
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 133.
9

monde. Ils pensent que les justes sont ceux qui ont bien vécu ici sur terre avec les
autres et ont bien respecté les lois des ancêtres basées sur le respect de la vie humain.
Il s’agit d’une personne qui a procrée qui prenait soin de sa progéniture, une
personne qui a semé l’amour dans sa famille et autour de lui et qui a connu une bonne
mort après s’être rassasiés des jours. Ici une bonne mort est à comprendre dans le sens
de quelqu’un qui meurt gorgé d’années, et qui a pu dire le dernier mot à ceux de sa
famille. Ce qui veut dire ceux meurent accidentellement ne sont pas reçus dans l’au-
delà ou chez les ancêtres parce que l’accident est juge comme sanction, une
malédiction qui vient des ancêtres.

Outre le sort qui frappe ceux qui meurent accidentellement : il y a aussi des
sorciers, des jeteurs de mauvais sort, de celui qui s’est suicidé qui n’a pas procrée ;
tous ne seront pas accueilli dans l’au- delà ou dans les villages des ancêtres soit
parce qu’ils ont porté atteindre à la vie des autres, soit parce qu’ils ont été puni par
les ancêtres en le privant de la capacité de procréation. C’est pour quoi ils n’ont pas de
place fiée, ils iront dans l’espace et se nourrissent des racines que les ancêtres
considèrent comme un aliment impropre à l’être humain.

A cet effet, pour arriver à prévenir un bon accueil dans l’au- delà chez les
ancêtres. On demande au mourant s’il a une dette quelque part, s’il a un problème
avec quelqu’un, s’il garde rancune et ne parle plus avec quelqu’un. Où il s’agit d’une
dette à payer. Les membres de la famille feront de leur mieux pour s’acquitter de
celle-ci. Et s’il s’agit d’un problème à résoudre sur place, un dialogue sera organisé
pour faciliter la réconciliation des personnes concernées avant l’expiration du
mourant. Tout cela est fait pour que l’accès dans le l’au –delà ne soit pas rendu
impossible par des fautes commises dans ce monde.

Ainsi la voie vers les villages des ancêtres s’ouvre et devient claire pour le
partant qui vient de recevoir pour ainsi dire un laissez-passer lui permettant d’entrer
dans l’autre monde. A ce propos ils pensent que l’homme désincarné qui jouit du
privilège de renouer avec les vivants, peut mettre ses connaissances au service du
renforcement de la force vitale de ses descendants. « Désincarné l’homme dont la
10

descendance est encore en vie c’est censé s’intéresser à ce monde des vivants, parce
que c’est en ce monde que se joue en quelque sorte sont sort »27.

2. LA VIE DANS L’AU-DELA

Les bantu croient que tout ne s’arrête pas avec la mort, la vie continue dans
l’autre monde. La personne morte n’a effectué que le passage d’un monde à l’autre,
d’un mode de vie à un autre. Ceux qui nous ont précédés dans l’au-delà vivent mais
autrement. C’est pourquoi nous les appelons les morts vivants. Mais la question est
posée : comment se présente alors la vie d’outre-tombe ?

Ceux qui nous ont précédés selon les bantu dans l’au-delà vivent dans des
villages pareils à ceux que nous avons ici sur terre. Les descendants d’un même clan
forment ensemble un village. Jamais les ancêtres de différents clans ne forment
ensemble un village. Dans l’au-delà, ces morts vivants mènent une vie pareille à la
nôtre mais avec quelques différences dues au fait qu’ils ont changé le lieu de vie. Ils
ont amélioré leur mode vie. Ils vivent désormais en paix, dans un endroit où règne le
calme.

Bien que l’on considère la vie d’outre- tombe comme étant meilleure par
rapport à la nôtre, et que l’on dise que ceux qui sont partis se reposent. Et que dans
l’au-delà, la vie est organisée de telle sorte que chacun garde son rang social qu’il
occupait de son vivant ici sur terre. C’est dans ce sens que le Père LUFULUABO
souligne quand il dit que : « Dans l’autre monde, les vieillards retrouvent la jeunesse,
les chefs y sont chefs, les esclaves y restent esclaves, les riches et les pauvres y
conservent leur situation. Chacun y garde ses qualités et ses défauts… la procréation
y est inconnue 28».

27
MUJYNYA, L’homme dans l’univers des bantu, p. 137.
28
F-M. LUFULUABO, Vers une théodicée bantoue, Ed. Louvain Casterman, Zaïre, 1962.
11

CONCLUSION

Au terme, dans le monde bantu la mort est comprise comme étant une rupture
de la force vitale, du principe vital d’avec le corps matériel. C’est ainsi que les Bantu,
étant lés par l’intérêt qu’il accorde à la vie, regrettent le vide que crée l’irruption de la
mort au sien de la famille et de la société. Cette irruption causée soit par la vieille soit
par la maladie ou l’accident, donne aux Bantu de se questionner sur la vie de l’homme
dans ce monde physique et dans le monde de l’au-delà.

Au fait, il sied de postuler avec Mujynya que la mort pour les Bantu est toujours
une destruction, mais celle-ci n’est pas forcément totale, elle est plutôt partielle
d’autant plus que le défunt fait juste un passage d’un cadre spatial à un autre. Il se rend
chez les siens qu’il retrouve après un adieu terrestre. Les Bantu croient fermement que
la vie continue dans l’au-delà, c’est ainsi qu’ils meurent tranquillement car étant
convaincus qu’ils des lieux et des conditions de vie.
12

BIBLIOGRAPHIE

KAGAME A., La place de Dieu et de l’homme dans la religion des Bantu, in Cahiers
des Religions Africaines, Vol. 3, 5(1969), p. 5-11.
LUFULUABO M-F., Vers une théodicée bantoue, Ed. Louvain Casterman, Zaïre, 1962.
MUJYNYA E., Le mystère de la mort dans le monde bantu, in Cahiers des Religions
Africaines, Vol. 3, 5(1969), p. 25-35.
MUJYNYA N., L’homme dans l’univers des bantu, Ed. P.U.N.Z, Zaïre, 1972.
MULAGO V., Un visage africain du Christianisme, Présence Africaine, Paris, 1962.

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