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Séance 5 : les vices du consentement

La première Chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 21 octobre 2020 portant sur
la reconnaissance de la rentabilité économique comme qualité essentielle d’une installation
photovoltaïque.

A la suite d’un démarchage à domicile, un couple a acquis une installation photovoltaïque par une
société. Ils ont financé cette installation par un crédit d’un montant de 22 000 euros.

Les acquéreurs ont assigné le vendeur liquidateur de la société et la banque en nullité des contrats
principal et de crédit affecté en restitution des sommes versée au titre du crédit et en paiement de
dommage et intérêt. Ils soutiennent notamment que leur consentement a été vicié en raison de
manœuvres dolosives du vendeur, qui aurait manqué à son obligation de les informer sur la
rentabilité économique de l’installation.

Après une décision de première instance, la Cour d’appel de Bourges le 25 octobre 2018 a rendu un
arrêt rejetant les moyens des demandeurs, soit les acquéreurs de l’installation. Elle retient que
l’information manquante portait sur la rentabilité économique des panneaux, et que celle-ci ne
pouvait pas être déterminante du consentement. De plus, elle retient que le défendeur soit le
vendeur n’a pas commis de dol.
Les demandeurs ont formé un pourvoi en cassation soutenant le fait que des irrégularités entachées
le bon de commande dans le sens où il n’y figurait pas la rentabilité économique de l’installation. Ils
soutiennent également le fait que la rentabilité économique constitue une caractéristique essentielle
de l’installation et qu’elle rentre dans le champ contractuel. De plus, ils soutiennent que la violation
d’une disposition d’ordre public relative à l’information du consommateur suffit à établir que leur
consentement est vicié.

La Cour de cassation a dû se demander, si la rentabilité économique rentre-t-elle dans les


caractéristiques essentielles d’une installation photovoltaïque ?

La Haute juridiction, à confirmer dans son arrêt rendu le 21 octobre 2020 la décision de la Cour
d’appel en rejetant les moyens du demandeur. Elle soutient le fait que « la rentabilité économique
ne constitue une caractéristique essentielle d’une installation photovoltaïque au sens de
l’article L.111-1 du code de la consommation, qu’à la condition que les parties l’aient fait entrer
dans le champ contractuel ». Elle affirme également que le vendeur n’a pas manqué à ses
obligations contractuelles de ce fait les demandes sont rejetées.

Dés lors nous verrons dans un premier temps une réponse commune relative à l’erreur (I) puis nous
verrons dans un second temps l’absence d’appréciation du dol ( II).

I- une réponse commune relative à l’erreur

Il est possible d’étudier dans un premier temps la solution unanime concernant l’erreur sur les
motifs ( A) puis l’hypothèse de l’insertion dans le champ contractuel ( B).

A) Une solution unanime concernant l’erreur sur les motifs

La Cour de cassation dans cet arrêt soutient que « la rentabilité économique ne constitue une
caractéristique essentielle d’une installation photovoltaïque au sens de l’article L.111-1 du code de
la consommation ».

En effet, la Cour de cassation comme dit précédemment ne considère pas que la rentabilité
économique constitue une caractéristique essentielle du contrat. C’est ce qu’affirme également la
Cour d’appel de Bourges lorsqu’elle énonce ces motifs. Il semble opportun de définir l’erreur pour
pouvoir ensuite définir l’erreur sur les motifs invoqué par les acquéreurs.

L’erreur est une représentation inexacte de la réalité que le droit n’accepte de considérer comme une
cause de nullité du contrat que dans certains cas. Les conditions d’admission de l’erreur
sont définit aujourd’hui à l’article 1132 du code civil qui prévoit que l’erreur peut être une cause de
nullité lorsque celle-ci porte sur les qualités essentielles de la prestations due ou celle de son co-
contractant. Elles étaient définies antérieurement à la réforme au sein de l’article 1110 du code
civil.

Il est possible de définir les qualités essentielles de la prestation, car comme le précise la décision,
l’erreur doit porter sur les qualités essentielles qui sont « par nature dans le champ contractuel » en
effet, selon le nouvel article 1133 du code civil ce sont « celles qui ont été expressément ou
tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté ». Cet article reprend
les bases de l’ancien article 1110 du code civil qui prévoyait « qu’il n'y a point de consentement
valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou
surpris par dol ».

Autrement dit, l’erreur est admise si elle porte sur les qualités essentielles de son cocontractant,
l’erreur est également admise si elle porte sur la substance c’est-à-dire les qualités essentielles de la
chose. L’erreur est le caractère déterminant du consentement du contractant.
En l’espèce, on fait face à une erreur sur les motifs, il est possible de définir le motif comme étant
une raison purement personnelle et étrangère à la substance de la chose ou à la personne, qui
a poussé une partie à contracter. Par principe, ce type d’erreur n’est pas admise pour invoquer la
nullité.

Il est possible de voir que l’un des arguments au pourvoi des demandeurs porte sur le bénéfice
qu’aurait rapporté cette installation, autrement dit ils comptaient sur la rentabilité économique
de l’installation pour réaliser des gains. Ils soutiennent d’autant plus « qu’elle constitue l’un des
résultats attendus de son utilisation ». Le motif en l’espèce est la rentabilité économique, au regard
de la définition de l’erreur sur les motifs, lorsque celui-ci porte sur une raison purement personnelle,
il n’est pas admis et donc la nullité ne peut pas avoir lieu. Par conséquent, le jugement de la Cour
d’appel qui est confirmé par la Cour de cassation refuse tout deux d’admettre l’erreur sur le motif
car, c’est la raison qui a poussé les époux à contracter.

En l’espèce, la Haute juridiction a jugé que l’erreur est étrangère à l’objet du contrat car elle ne
porte pas sur les caractéristiques essentielles du contrat, elle affirme que pour que l’erreur soit
admise, les parties doivent « l’inscrire dans le champ contractuel » .
Ici, elle indique l’une des exceptions au rejet de l’erreur sur les motifs, qui est la contractualisation
du motif.

Par ailleurs, les juges du quai de l’horloge soutiennent qu’il n’y pas d’erreur sur les qualités
essentielles du co-contractant c’est-à-dire d’erreur portant sur la personne avec laquelle on
contracte, pour que cette erreur soit admise en principe il faut que le contrat soit conclu en
considération de la personne, sur son identité ou sur son expérience professionnelle, on dira alors
que c’est un contrat dit intuitu personae.

Dans les faits, le vendeur ne semble pas avoir commis un manquement à ses obligations
contractuelles, la haute juridiction qui a confirmé le jugement de la Cour d’appel affirme « qu’il
n’était pas établi que le vendeur se serait engagé sur une rentabilité particulière qui serait
inatteignable ». Elle suit le raisonnement de la Cour d’appel et soutient que « le vendeur n’avait pas
manqué à ses obligations contractuelles ». Dès lors, malgré que le vendeur de la société n’a pas
communiqué les informations sur la rentabilité économique, il n’a pas manqué à son obligation
contractuelle, puisque « la rentabilité économique ne constitue pas une caractéristique essentielle
d’une installation photovoltaïque ».

La première Chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt le 13 février 2001 soutenant le
fait que « la voie de l’annulation n’est ouverte qu’en cas de stipulation express qui aurait fait entrer
ce motif dans le champ contractuel en l’érigeant en condition de contrat »
Dès lors il semble opportun de voir l’hypothèse de l’insertion de la rentabilité économique dans
le champ contractuel ( B)

B) L’hypothèse de l’insertion de la rentabilité économique dans le champs contractuel

L’arrêt relate que « la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d’une
installation photovoltaïque au sens de l’article L.111-1du code de la consommation, qu’à la
condition que les parties l’aient fait entrer dans le champ contractuel ». La Cour exprime ici l’un
des tempéraments au rejet de l’erreur sur les motifs.

En effet, afin que la rentabilité économique soit constituée comme une caractéristique essentielle de
l’installation photovoltaïque, celle-ci aurai dû être intégrée dans le champ contractuel. Dans
l’hypothèse ou les parties avait contractualisé le contrat, c’est-à-dire fait du motif un élément
déterminant de leur consentement alors, l’erreur sur les motifs aurait pu être reconnue. Dans cette
hypothèse, la rentabilité économique de l’installation photovoltaïque serait devenue une qualité
essentielle du contrat, est l’erreur sur les motifs deviendrait alors admise.

Autrement dit, dès que l’erreur porte sur une qualité essentielle du contrat, soit un motif déterminant
du consentement, la nullité est admise. Mais en l’espèce, la rentabilité économique n’est pas
intégrée dans le champ contractuel, les juges du quai de l’horloge ont révélé le fait que « qu'il
n'était pas établi que le vendeur se serait engagé sur une rentabilité particulière qui serait
inatteignable ou n'aurait obtenu le consentement des acquéreurs qu'en leur communiquant une
étude économique fallacieuse ». La nullité pour erreur sur les motifs est alors rejetée, puisqu’il n’y a
pas de preuve qui met en avant l’engagement du vendeur concernant la rentabilité économique de
l’installation faite par les époux.

Dès lors, à travers cet arrêt il est possible d’évoquer deux hypothèses, la première étant celle ou la
rentabilité économique constitue la finalité directe du contrat. Par conséquent l’erreur est admise
car elle porte sur une qualité essentielle du contrat. Afin d’illustrer cette hypothèse il est possible de
prendre comme exemple l’arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 4 octobre
2011 qui porte sur l’annulation d’un contrat pour erreur sur la rentabilité de l’activité. En l’espèce,
la Cour de cassation soutient que le consentement du franchisé avait été déterminé par une erreur
substantielle sur la rentabilité de l’activité entreprise. Dès lors, la rentabilité de l’activité
d’entreprise a été déterminante pour le consentement du franchisé, la Cour a donc admis l’erreur sur
les motifs dans cette espèce.

La seconde hypothèse, est notre cas d’espèce. En effet de la manière qu’il n’y ait aucune preuve qui
montre que le vendeur de la société s’est engagé sur une quelconque rentabilité, c’est à dire qu’il est
notifié en aucun lieu que la rentabilité économique soit essentiellement destinée à être rentable
financièrement, l’erreur sur les motifs ne peut pas être admise.

Du moment que les demandeurs ajoutent volontairement au champ contractuel le motif de la


rentabilité économique, la Cour de cassation aurait admis l’erreur.

La haute juridiction à refuser d’admettre l’erreur sur les motifs, elle refuse également d’admettre
l’annulation de contrat pour le dol ( II)

II- l’absence d’appréciation du dol


Nous verrons dans un premiers temps, que la cour de cassation a rejeté l’argument des parties
concernant le dol ( A) puis nous verrons dans un deuxième temps que cette solution est une solution
d’espèce inscrite dans la lignée de la jurisprudence antérieure. (B)

A) le rejet de l’annulation pour dol

La haute juridiction affirme « qu’il n’était pas établi que le vendeur se serait engagé sur une
rentabilité particulière qui serait inatteignable ou n’aurait obtenu le consentement des acquéreurs
qu’en leur communiquant une étude économique fallacieuse ».

Il est possible de définir le dol selon l’article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à la
réforme de 2016 comme étant « une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres
pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie
n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé. ».

Autrement dit, le dol désigne le comportement malhonnête d’une partie ayant pour objet et pour
effet de provoquer une erreur déterminante du consentement de l’autre. Le dol suppose alors une
erreur dite provoqué.

Or comme nous pouvons le voir dans l’arrêt rendu par la Cour de cassation « il n’était pas prouvé
que le vendeur aurait sciemment fait état d’un partenariat mensonger avec la société EDF ou
dissimulé une information dont il savait le caractère déterminant et ainsi commis un dol ». Dans
cette affirmation, le mot « sciemment » est important, il montre que le vendeur n’a pas en
connaissance de cause commis un dol. Dès lors, il convient que les époux apportent la preuve que
le vendeur de la société est volontairement omis de leur partager la rentabilité économique de
l’installation, il convient de rappeler qu’en droit la preuve peut être rapporter par tous moyens.

D’autre part, la Cour de cassation n’a pas pu admettre le dol comme cause de nullité, puisque afin
que le dol soit caractérisé il suppose la réunion d’un élément matériel, intentionnel et déterminant
que qui veut dire que le dol doit résulter de manœuvres, de mensonges ou bien du silence, et il a
pour but de cacher volontairement une information qui a un caractère déterminant pour l’autre
partie, soit en gardant le silence sur un fait qu’elle aurait dû révéler on parle alors de réticence
dolosive soit en gardant secret un document qu’elle aurait dû communiquer.

En l’espèce, les parties forme leurs arguments en évoquant le fait que le vendeur de la société ne
leur a pas communiquer une information déterminante de leur consentement qui est ici la rentabilité
économique de l’installation photovoltaïque. Dès lors, du point de vue du couple, leur
consentement a été vicié, car le vendeur aurait commis un dol en en révélant pas cette information.

En outre, comme la rentabilité économique de l’installation photovoltaïque n’est pas précisé et


indiqué dans le champ contractuel, elle ne relève pas d’une qualité essentielle du contrat, par
conséquent le dol ne peut pas admis.

La haute juridiction soutient le fait que le vendeur n’a pas commis de dol et donc de réticence
dolosive, dès lors elle refuse l’annulation du contrat pour dol.

Cette solution peut s’inscrire dans la lignée d’une jurisprudence antérieure ( B)

B) une solution inscrite dans la lignée de la jurisprudence antérieure.

Le présent arrêt est une solution d’espèce. En effet, l’article 1135 du code civil postérieur à la
réforme de 2016 prévoit que « L’erreur sur un simple motif, étranger aux qualités essentielles de la
prestation due ou du cocontractant, n’est pas une cause de nullité, à moins que les parties n’en
aient fait expressément un élément déterminant de leur consentement ».

Autrement dit, l’erreur qui porte sur les motifs c’est à dire les raisons qui ont poussé les parties à
contracter ne constitue pas une cause de nullité. L’article prévoit également qu’il importe peu que le
motif sur lequel porte l’erreur ait été déterminant du consentement de l’errans soit celui qui invoque
l’erreur , elle demeure indifférente.

Il est possible de rapprocher le présent arrêt de l’arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2001 qui
est conforme lui aussi avec le nouvel article 1135 du code civil et qui a soutenu que « l’erreur sur
un motif du contrat extérieur à l’objet de celui-ci n’est pas une cause de nullité de la convention,
quand bien même ce motif aurait été déterminant ».

En effet, l’arrêt du 13 février 2001 est une jurisprudence constante qui affirme que les raisons qui
peuvent faire qu’une partie conclu le contrat, et qui ne sont pas dans le champ contractuel soit
extérieure à l’objet du contrat, son « sans influence sur la validité de l’opération, à moins que les
parties aient été d’accord pour en faire la condition de leur accord ». Il est possible de retrouver
cette solution dans deux arrêts de la Cour de cassation, l’un émanant de la Chambre commercial du
14 décembre 1977 et l’autre de la Chambre civil du 3 août 1942.
Il est possible de voir que le consommateur normalement protégé par le droit de la consommation
semble être négligé par la Cour de cassation

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