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I. PRÉSENTATION DU CHAPITRE
Ce deuxième chapitre s’interroge sur les raisons de l’instabilité de la croissance.
Après avoir défini et observé la diversité des fluctuations, des cycles et des crises en
s’appuyant sur des exemples historiques (Dossier 1. L’instabilité de la croissance :
fluctuations, cycles et crises), on explique les principales causes de l’instabilité de
la croissance et leurs limites (Dossier 2. Quelles sont les causes de l’instabilité de
la croissance ?) puis les conséquences économiques et sociales des crises (Dossier 3.
Quelles sont les conséquences de l’instabilité de la croissance ?).
Date
Cycles Durée Causes Critiques
de découverte
Kitchin 1923 40 mois Variation des stocks. Surtout vérifié aux États-Unis.
Bien vérifié en Europe au xixe siècle mais
Facilités de crédits accordés
Juglar 1862 8-10 ans atténuation du cycle après la Seconde Guerre
par les banques.
mondiale.
Bien vérifié jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Kondratieff 1922 50-60 ans Innovations.
Difficile à mettre en évidence ensuite.
2. En période d’expansion (cycle Juglar) ou de phase A 6. Les crises qui ont secoué l’économie française sont :
(cycle Kondratieff, la production augmente, ce qui permet – les deux crises pétrolières
de distribuer des revenus supplémentaires entraînant une – la crise des valeurs Internet en 2000-2001
pression sur la demande et une hausse des prix. C’est l’in- – la crise des subprimes
verse en période de récession ou de dépression.
3. Le cycle Kondratieff est bien vérifié jusqu’à la Seconde Doc. 3 Les fluctuations de la croissance française
Guerre mondiale mais ne parvient pas à intégrer les depuis 1950
multiples crises de l’économie mondiale depuis les années 7. • Évolution du PIB : 1950-1974 ➝ forte croissance
1970. (environ 5 % par an) ; 1974-2014 ➝ faible croissance et
4. Le mouvement cyclique est amplifié à la hausse ou à net ralentissement au cours du temps de cette croissance.
la baisse quand les trois cycles se superposent. C’est par Période des « Trente Glorieuses ».
exemple le cas en 1929 où les cycles Juglar et Kondratieff • Évolution des prix : 1950-1974 ➝ inflation assez forte
se retournent. (liée à la croissance ou à des événements extérieurs comme
la guerre de Corée) ; 1974-1983 ➝ forte inflation atteignant
Doc. 2 La conjoncture en France depuis 1950 : plus de 10 % par an due aux chocs pétroliers ; 1983-2014
repères historiques ➝ désinflation, net ralentissement de la hausse des prix.
5. Des années 1950 aux années 1980, la France a connu des 8. Selon l’analyse de Kondratieff, on aurait une phase A
périodes fortement inflationnistes. pendant les Trente Glorieuses suivie d’une phase B avec les
Les causes de ces périodes inflationnistes sont différentes : chocs pétroliers et se poursuivant aujourd’hui. Donc un
– 1951-1952 : hausse du prix des matières premières (infla- cycle inhabituellement long, ce qui pour certains remet en
tion importée). cause l’existence des cycles Kondratieff. La croissance de la
– 1958-1968 : hausse de la demande et croissance + hausse fin des années 1980 et des années 1990 est trop brève pour
des dépenses publiques (élément de la demande). y voir la naissance d’un 5e Kondratieff.
– 1979-1974 et 1979-1980 : forte hausse du prix de baril de 9. Pendant les Trente Glorieuses, on n’assiste pas à des
pétrole (inflation importée). périodes de baisse du PIB mais les phases de récession se
ACQUIS DE 1 : • chômage
à 2013. Dans la zone euro qui, en 2009, connaît un taux de
RE
Exercices p. 67-68
Surinvestissement et prise
Baisse du taux Hausse du taux Éclatement de la bulle
de risques excessifs, endette-
d’intérêt d’intérêt spéculative
ment, bulle spéculative
3. Analyser un texte factuel sur la conjoncture Exportations : vente de biens et de services à l’extérieur.
1. Produit intérieur brut en euros constants : le PIB est la Échanges extérieurs : différence entre les exportations et les
somme des valeurs ajoutées de tous les agents économiques ; importations de biens et de services.
euros constants signifie que le PIB est calculé hors inflation. Pouvoir d’achat du revenu disponible brut : le revenu dispo-
PIB en euros constants = (PIB en euros courants/indice des nible brut est la somme des revenus primaires + les revenus
prix) x 100. de transferts – les impôts directs et les cotisations sociales.
Investissement : ou formation brute de capital fixe des Le pouvoir d’achat du revenu disponible brut est le revenu
entreprises, des ménages, des administrations publiques disponible brut hors inflation ou (revenu disponible brut/
ou achat de biens de production pour les entreprises et les indice des prix) x 100.
administrations publiques, de biens immobiliers pour les Désinflation : baisse du taux d’inflation, de la hausse des
ménages. prix.
Demande intérieure : consommation + investissement ou Taux d’épargne des ménages : épargne brute/revenu dispo-
demande globale – exportations. C’est la demande des nible brut en %.
agents économiques résidant sur le territoire national. Taux de marge des entreprises : excédent brut d’exploitation
Importations : achat de biens et de services à l’extérieur. ou profit d’exploitation/valeur ajoutée en %.
Hausse du prix Demande peu élastique Demande très élastique Offre peu élastique Offre très élastique
Quantités Baissent peu Baissent beaucoup Baissent peu Augmentent beaucoup
5. Analyser le cycle en observant le déplacement des 3. A. Vrai ; b. Faux ; c. Vrai ; d. Faux ; e. Vrai
courbes d’offre et de demande 4. a. oui ; b. impossible de répondre ; c. oui ; d. oui ; e. oui
1. Cas 1 : expansion par choc positif sur la demande. 5. Sous les effets de la crise de 2007-2008 et des plans de
Cas 2 : récession ou dépression par choc négatif sur l’offre. relance qui ont suivi, dans les six pays avancés étudiés par
2. Cas 1 : les Trente Glorieuses. le tableau du FMI, le poids de la dette publique dans le
Cas 2 : les chocs pétroliers. PIB a considérablement augmenté de 2001 à 2013. + 90
3. Dans le cas 1, comme l’offre est peu élastique, les quan- points aux États-Unis, + 22 points en Allemagne, soit
tités augmentent peu et les prix beaucoup. respectivement un doublement et une hausse de 37 % du
Dans le cas 2, comme la demande est très élastique, les poids de la dette publique. Dans certains pays, le poids de
quantités baissent beaucoup et les prix augmentent peu. la dette publique atteint des niveaux considérables : c’est
le cas du Japon même si la dette japonaise est essentielle-
ment détenue par des résidents japonais (244 % du PIB)
6. Utiliser des pourcentages ou de l’Italie (131,4 %). Dans tous les pays, le poids de la
1. Au sens de Maastricht, la dette publique comprend la dette publique dépasse désormais 80 % du PIB. Certains
dette de l’État, des collectivités locales et des organismes pays sont parvenus mieux que d’autres, même si le poids
de Sécurité sociale. de leur dette est élevé, à limiter la croissance de ce poids :
2. Poids de la dette publique dans le PIB : montant de la l’Italie (+ 21 %) et l’Allemagne (+ 37 %). La maîtrise de la
dette publique en euros courants/PIB en euros courants, dette publique est un enjeu fort pour tous ces pays dans les
en %. prochaines années.
Méthode p. 69
Vous présenterez le document puis vous montrerez les 3. Sur l’ensemble de la période, certains pays comme l’Es-
effets de la crise de 2008 sur le PIB par tête dans les pagne et l’Italie ont été violemment touchés par la crise
pays industrialisés. puisque leur PIB par tête a diminué. En effet, en 2013, cinq
ans après la crise, le PIB par tête de l’Espagne a baissé de
• Pour les remarques 2, 3, 5, 6, indiquez ce qu’il aurait 9,1 %, celui de l’Italie de 11,6 %.
fallu écrire. 5. Le PIB par tête a augmenté au cours de la période de
2. Sur l’ensemble de la période, quatre pays sur six ont vu relance budgétaire, plus ou moins vite selon les pays. Seule
leur PIB par tête diminuer. Mais, pour l’Allemagne et les l’Espagne accuse une baisse du PIB par tête au cours de
États-Unis, le PIB par tête a augmenté. cette période.
Partie 1. Mobilisation des connaissances des pays partenaires diminue et, par conséquence, celle du
1. Un choc d’offre signifie que l’offre augmente ou diminue pays à l’origine de la déflation. Ces enchaînements non
rapidement entraînant un déplacement vers la droite (choc vertueux peuvent être dramatiques et conduire à un blocage
d’offre positif) ou vers la gauche (choc d’offre négatif) de de l’économie.
la courbe de demande.
Ces chocs d’offre sont l’une des explications possibles du Partie 2. Étude d’un document
cycle : expansion en cas de choc d’offre positif, récession ou Vous présenterez le document puis mettrez en évidence
dépression en cas de choc d’offre négatif. les grandes évolutions du PIB et des composantes de la
En cas de choc d’offre positif, les prix baissent et la produc- demande de 2008 à 2013.
tion augmente. Un choc d’offre positif peut être provoqué Ce document produit par Eurostat, une direction de la
par une baisse des coûts de production (matières premières, Commission européenne chargée de l’information statis-
énergie, salaires, impôts), des coûts de transaction, par tique de l’Union européenne, présente, en indices, base 100
des innovations de procédés ou de produits (par exemple au 1er trimestre 2008, l’évolution du PIB et des composantes
les NTCI) et de marché permettant de produire plus à de la demande globale de 2008 à 2013 dans la zone euro.
moindres coûts (économies d’échelle). Il a pour objectif de montrer comment l’évolution de la
En cas de choc d’offre négatif, les prix augmentent et la demande globale qui comprend la demande intérieure, la
production diminue (souvent situation de stagflation). Un consommation des ménages et des administrations ainsi que
choc d’offre négatif peut être provoqué par une hausse des l’investissement, et la demande extérieure, les exportations,
coûts de production (matières premières, énergie, salaires, a contribué à la croissance du PIB.
impôts) ou par des événements climatiques défavorables Depuis 2008, c’est-à-dire depuis la crise des subprimes, et
(sécheresse par exemple). Les crises agricoles sous l’Ancien jusqu’à 2013, le PIB de la zone euro a diminué d’environ
Régime, les chocs pétroliers à la fin des années 1970 sont 3 % : indice 100 en 2008, 97 en 2013. Cette baisse a été
de bons exemples de chocs d’offre négatifs. forte en 2008 (- 5 %). Elle a été suivie d’une hausse du PIB
jusqu’en 2011 pour connaître ensuite une relative stagna-
2. Une situation de déflation, de baisse des prix et de la tion. En 2013, le PIB de la zone euro n’a pas retrouvé son
production, peut conduire à une baisse de la demande niveau du 1er trimestre 2008.
globale, égale à la consommation, à l’investissement et Cette évolution s’explique par celle des différentes compo-
aux exportations. Il se produit un processus cumulatif. santes de la demande globale. Sur l’ensemble de la période,
Lorsqu’une situation économique dégradée provoque une seules les exportations et la consommation des administra-
chute des prix, les consommateurs retardent leurs achats en tions ont connu une croissance d’environ 5 %. Cette crois-
espérant une nouvelle baisse des prix. Cette baisse des prix sance n’a pas été suffisante pour contrecarrer les baisses de
augmente les taux d’intérêt réels, ce qui alourdit le coût de la consommation des ménages et surtout de l’investisse-
la dette privée et publique. Elle diminue aussi les marges ment (- 20 %). Au total, la demande intérieure a diminué
des entreprises qui, pour éviter la faillite, doivent baisser les de 5 %.
salaires, licencier, réduire leurs investissements. On assiste La baisse du PIB de 2008 à 2013 dans la zone euro s’ex-
donc à une chute de la consommation et de la production plique donc principalement par la chute de l’investissement,
qui affecte aussi les importations et donc les exportations ce qui constitue un handicap pour l’avenir de la zone.
des autres pays. Si l’extérieur exporte moins, la production
Quelles sont les conséquences des crises 2000 à moins de 1 % (crise Internet) et chute en 2008,
financières sur l’activité économique ? 2009 et 2013 (doc. 1).
– Le chômage augmente. Toujours dans le cas de la France,
le taux de chômage en pourcentage de la population active
▶ Introduction atteint plus de 10 % à partir de 2012 (doc. 1). Cette hausse
Les crises financières naissent dans le secteur financier de du chômage accroît la pauvreté et les situations de précarité.
l’économie. Elles peuvent prendre des formes multiples : – Les prix peuvent baisser. Certains pays de la zone euro
crise sur le marché des changes avec un effondrement de la semblent depuis janvier 2014 être en déflation. En Irlande,
valeur d’une devise nationale, crise bancaire, krach boursier, les pays augmentent peu, ils baissent fortement en Grèce et
crise des dettes privées et publiques. à Chypre, un peu moins fortement au Portugal (doc. 4). Or
la déflation est une situation dangereuse : les consomma-
Par leur violence et leur rapidité, ces crises ont de graves
teurs attendent de futures baisses de prix pour consommer,
conséquences sur l’activité économique en entraînant
les entreprises cessent d’investir. Elle peut conduire à un
une chute brutale de la demande et de la production. Le
blocage de l’économie et il est difficile d’en sortir.
chômage augmente et les prix peuvent baisser provoquant
– La reprise peut être difficile surtout si les pays, confrontés
une situation de déflation dont il est difficile de sortir.
à une crise de la dette publique, sont obligés de mettre en
Récurrentes, les crises financières sont à l’origine de graves
place des politiques de freinage de l’activité économique (cas
crises économiques et sociales (I) qui s’expliquent par les
de la France où la dette publique passe de 58,9 % du PIB
conséquences de ces crises sur la demande et sur l’offre en 1999 à 84 % en 2013 (doc. 1).
globales (II).
II/ Ces crises économiques et sociales s’expliquent par
▶ Proposition de plan détaillé les conséquences des crises financières sur la demande
et sur l’offre.
I/ Récurrentes, les crises financières sont à l’origine de A. Les crises financières se répercutent sur la
graves crises économiques et sociales. demande.
A. Les crises financières : des crises récurrentes – Un krach boursier, effondrement du cours des valeurs mobi-
– On observe depuis le milieu du xixe siècle de violentes lières, réduit le patrimoine des agents économiques, ce qui
crises financières suivies de périodes de forte récession ou les incite à se désendetter, à augmenter leur taux d’épargne,
de dépression. à réduire leur consommation et leurs investissements.
– Un bon exemple de crise financière est la crise de 1929 qui – Cette chute brutale du cours des valeurs mobilières,
a fortement marqué les contemporains et dont le souvenir notamment des actions, est bien illustrée par le doc. 3 :
est toujours vif. chute de plus de 50 % dans les grands pays avancés en 2000
– Depuis les années 1980, les politiques de libéralisation et en 2007-2008.
financière ont provoqué le retour des crises financières – Les récessions nationales se transmettent d’autant plus
comme la crise de change au sein du SME en 1992-1993, rapidement au reste du monde que les économies sont
l’éclatement de la bulle Internet en 2000 ou la crise des aujourd’hui très mondialisées si bien que les exportations
subprimes en 2007-2008 dont les conséquences se font chutent également.
toujours sentir. – Ces conséquences des crises financières ont bien été analy-
sées par des économistes comme Juglar au xixe siècle puis,
B. Ces crises entraînent des crises économiques et pendant l’entre-deux-guerres, par J.M. Keynes qui attribue
sociales graves. un rôle central à la demande anticipée dans l’analyse des
– Les crises financières provoquent une chute de la demande dépressions.
et, par voie de conséquence, un net ralentissement de la – Il est donc nécessaire de mettre rapidement en œuvre des
production. Ainsi, en France, le taux de croissance du PIB politiques de relance de la demande à condition que ces
de plus de 3 % en 1999 et 2000 passe au début des années politiques soient efficaces sinon il deviendra inévitable de
Bibliographie
• T. Jobert, X. Timbeau, L’Analyse de la conjoncture, La Découverte, coll. « Repères », 2011.
• Les comptes de la Nation en 2013, INSEE Première n°1 499, mars 2014.
• Quel potentiel de rebond de l’économie française ? Note de conjoncture, INSEE, mars 2014.
• Revue de l’OFCE, Banques centrales, dernier rempart contre la déflation, mars 2014.
• A. Cartapanis, « Les crises financières », Comprendre les marchés financiers, Les Cahiers français,
n°361, mars-avril 2011.
• Problèmes économiques, Comprendre les crises économiques, Hors-série, novembre 2012.
• P.C. Hautcœur, La Crise de 1929, La Découverte, coll. « Repères », 2009.
• P. Gilles, Histoire des crises et des cycles économiques, A. Colin, 2004.
• B. Marcel, J. Taieb, Les Grandes crises, A. Colin, 2010.
• M. Musolino, Fluctuations et crises économiques, Ellipses, 2011.
• B. Gazier, La Crise de 1929, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2011.
À faire lire aux élèves : John Steinbeck, Les Raisins de la colère, 1939, Gallimard, coll. « Folio ».
Un livre sur les conséquences de la crise de 1929 et du capitalisme sauvage. On peut aussi passer le
film de J. Ford.
Sitographie
• www.insee.fr
• www.ocde.org (statistiques sur la croissance potentielle et les déficits notamment)
• www.alternatives-economiques.fr