Introduction :
L’avènement de la mondialisation a entraîné une forte concurrence, caractéristique de
l’économie capitalistique moderne, qui requiert des moyens financiers, techniques et humains
de plus en plus importants, qu’une entreprise isolée ne parvient pas toujours à rassembler.
Comme nous le savons, l’objectif que poursuit tout dirigeant d’entreprise est en général le
développement de son entreprise. Alors, lorsque ses activités évoluent comme prévu,
l’entrepreneur peut ressentir le besoin d’étendre son réseau, de s’installer dans d’autres villes,
d’autres régions, ou d’autres pays, en vue de conquérir des marchés plus grands. Dans ces cas,
la création d'une filiale est la solution la plus adaptée à ce genre d'expansion.
Ainsi, les entreprises, peu importe leur taille, rassemblent leurs ressources afin d’accroître
leurs parts de marché, ce n’est pas juste le souci de se maintenir sur le marché qui prévaut,
mais aussi, celui d’évoluer et de se développer sur ce dernier
Lorsqu'on crée une société, il faut injecter au départ un capital important. Parfois le créateur
de celle-ci ne possède pas ce capital, il lui faut donc faire appel à des investisseurs qui
prendront une participation au capital de la société.
Les entreprises peuvent entretenir des liens financiers par la constitution de filiales et de sous
filiales et par de prises de participation simples ou croisées en vue de constituer des groupes
de sociétés . Pour faire face à l'ouverture des marchés et à la forte concurrence qui en résulte,
les entreprises sont à la recherche de la taille critique pour suivre ou pour se développer. Les
pouvoirs publics encouragent la constitution de champions nationaux pour pénétrer des
marchés étrangers, notamment dans le cadre de la politique africaine du Maroc .
La loi 17-95 a , pour la première fois , donné une définition légale des filiales et participations.
Cette définition qui figure à l'article 143 est donnée pour préciser les éléments d'information
qui doivent être contenues dans le rapport de gestion du conseil d'administration ou du
directoire et qui figurent à l'article 142 , en particulier lorsque la société possède ou acquis au
cours de l'exercice de référence des filiales ou des participations.
Ce qui explique d’ une part, pourquoi cette définition se trouve au titre 5 sur l'information
des actionnaires et d'autre part , pourquoi l'article 143 définit les filiales et participations en
se référant expressément à l'article 142 . Les deux articles sont liés, l'article 143 explique le
contenu de l'article 142 sur les mentions obligatoires devant être contenues dans le rapport
de gestion .
Au sens de l'article 142 , on entend par :
- filiale , une société dans laquelle une autre société , dite mère , possède plus de la moitié du
capital ( en droit commercial une société filiale est une entreprise dont 50% du capital a été
formé par des apports réalisés par une autre société dite société mère qui en assure
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généralement la direction, l'administration et le contrôle par l'intermédiaire d'une ou de
plusieurs personnes, administrateurs ou gérants qu'elle a désignés ) ,
- participation , la détention dans une société par une autre société d'une fraction de capital
comprise entre 10 et 50 % .
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qui, suivant son amplitude peut être exclusif ou conjoint. La participation exprime l’avoir alors
que le contrôle exprime le pouvoir.
En effet on parle de « participation » lorsqu’une société détient dans une autre société une
fraction du capital, supposant la volonté de créer des liens durables avec la société dont les
parts ou actions sont souscrites ou achetées, et d’exercer sur cette société une certaine
influence dans le but d’en retirer un avantage. La prise de participation permet de bénéficier
d’une structure immédiatement opérationnelle sur le marché étranger, mais nécessite en
amont d’effectuer un audit de la structure dans laquelle elle doit avoir lieu.
En tout état de cause, si un entrepreneur décide la prise de participation dans une société ceci
peut présenter plusieurs avantages. Outre l’apport en capital qui représente des fonds
supplémentaires pour développer l’ activité, et le bénéfice de l’expérience et du réseau
professionnel de l’ investisseur et d’un meilleur accès au crédit.
Admettons que le capital d’une société X soit réparti de la manière suivante : 65% des parts
sont détenues par la société A, 20% par la société B et 15% par une personne physique C. Ici :
• Seule la société A est la mère de la société X et, inversement, la société X n’est la filiale
que de la société A.
• La société B et la personne physique C ont pris une participation dans le capital de
la société X.
Alors que la filiale est toujours créée dans une structure mère-fille, ce n’est pas forcément le
cas pour la participation.
L’autonomie : La principale différence entre une filiale et une succursale concerne leur
autonomie. Contrairement à la succursale, la filiale dispose de la personnalité juridique dont
découle de nombreux effets sur le plan juridique et sur le plan fiscal.
En effet, la filiale est une véritable personne morale. Le seul lien qu’elle entretient avec la
société mère repose sur la détention de son capital (puisqu’elle est détenue à plus de 50% par
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la société mère). De son côté, la succursale constitue simplement une extension de la société
dont elle dépend. La succursale est juridiquement une émanation de la personnalité morale
de sa société mère. De ce fait, elle peut exécuter des contrats contractés par la société mère
et répondre de ces obligations. Ainsi, un marché par exemple gagné par une multinationale à
son nom, peut être exécuté par sa succursale qui est considérée juridiquement comme la
même entité.
Ainsi, la filiale dispose d’un patrimoine qui lui est propre. Cela correspond à l’actif (biens
qu’elle possède, créances clients, stocks…) et du passif (capital social, réserves, dettes…). Le
patrimoine de la succursale est quant à lui intégré à celui de sa société , donc la succursale ne
possède ainsi ni capital social, ni patrimoine, ni associés, ni activité propre.
La création d’une succursale est décidée par le dirigeant de la société dont elle dépend. Tandis
que la création d’une filiale est décidée entre autre par les associés ou actionnaires de la
société mère.
La fiscalité : Sur le plan fiscal, la succursale est rattachée à sa société. Ainsi, elle n’est pas
soumise à la TVA et ses bénéfices sont associés à ceux de ladite société.
Après la comparaison entre filiale et succursale , il est préférable aussi de la comparaître avec
la franchise , parce que ces termes sont sujets de confusions.
Une franchise est une entreprise indépendante, liée par contrat à une société-mère. Un point
de vente franchisé, est une entreprise indépendante qui entretient avec une enseigne de
franchise une relation contractuelle, sans que l’enseigne ne détienne de parts sociales de
l’unité franchisée.
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La transmission d’un savoir-faire : La transmission d’un savoir-faire est l’un des trois piliers de
la franchise. Le franchisé reçoit, contre une redevance, l’utilisation d’une marque et d’un
savoir-faire avec une assistance de la part du franchiseur et de son réseau. Cette transmission
est une obligation légale.
Dans le cas de la filiale, l’enseigne a intérêt à transmettre son savoir-faire au gérant mais cette
transmission n’est pas inscrite dans un cadre légal. Par ailleurs, le gérant de la filiale peut avoir
un rôle exclusivement de gestionnaire et de manager et la dimension technique confiée à un
autre collaborateur de la structure.
La propriété des biens : Dans les deux cas, les biens sont la propriété de la structure
indépendante. Franchisé et gérant-salarié d’une filiale achètent, gèrent et distribuent leur
stock. La différence tient au fait que le franchisé ne rend de compte à personne tandis que le
gérant-salarié d’une filiale doit rendre compte de sa gestion à la société-mère.
Dans une filiale, le gérant-salarié génère un chiffre d’affaires par son activité et ce chiffre
d’affaires permet de couvrir les frais de structures y compris sa rémunération, basée sur une
part fixe et une part variable. En revanche :
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parallèle également 15,54 % de Wafa Bank. Cette opération représente donc pour BCM une
prise de capital de 35,25 % et le double de ce nombre en droit de vote.
En 2004, à la suite de la fusion entre BCM et Wafabank, le groupe adopte une nouvelle identité
et dénomination sous le nom « Attijariwafa bank ».
En 2010, le groupe bancaire crée Dar Assafaa, filiale marocaine et première banque de finance
islamique du Maroc.
○ Création de la Société des Ciments d’Agadir (SCA), filiale à 100 % de la Société Ciments
Français en 1951 . En 1969 , elle a été introduite à la bourse des valeurs de Casablanca de la
Société des Ciments d'Agadir puis quatre ans plus tard, ouverture du capital de la société aux
actionnaires marocains. La part de Ciments Français passe alors à 37%. En 1989 , la création
de deux filiales dans les matériaux de construction : Bétomar pour le béton prêt à l'emploi
(BPE) et Sagram pour les granulats. Ces deux sociétés fusionneront 10 ans plus tard sous le
seul nom de Bétomar.
Plan :
1) Filiales et participations en tant que techniques de
prise de contrôle
A- Atouts et écueils de la filialisation et de la prise
de participation
B- Modalités de la constitution d’une filiale et de
la prise d’une participation
2) La mise en œuvre des filiales et des participations
A- Le régime juridique des filiales et des
participations
B- La relation de la société mère avec sa filiale
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1) Filiales et participations en tant que techniques de
prise de contrôle
• Avantages de la filialisation :
L’intérêt de la constitution de filiales réside précisément dans cette autonomie de gestion et
dans l’indépendance que la société et la personnalité morale confèrent. La filialisation est un
instrument puissant de rationalisation de l’entreprise en ce qu’elle permet d’organiser et donc
de déléguer le pouvoir.
Dans ce sens, on opte pour des intérêts stratégiques. En effet, la création de filiales permet
de structurer un groupe, c’est-à-dire de gérer la croissance d’une entreprise et le
développement de ses activités. Une telle démarche assure une certaine sectorisation des
activités exercées. Autrement dit, elle consiste à affecter à chaque filiale une activité bien
précise.
Filialiser permet de faire de chaque branche d’activité un centre de profit économiquement
autonome. L’activité commerciale de la société est placée dans une autre société constituée
pour la circonstance. Cette dernière société est dite « opérationnelle ». Les résultats de la
branche filialisée sont ainsi aisément et nettement mesurables. Individualisée au sein d’une
société fille, la branche d’activité peut alors être cédée à des acquéreurs intéressés par ce seul
champ d’activité de l’entreprise. Par exemple, la restructuration de Google autour d’Alphabet
permettra au groupe de céder le contrôle dans les filiales abritant les activités les plus
expérimentales.
La filialisation permet encore de rassurer les investisseurs en isolant une branche d’activité,
endiguée par la personnalité morale. Les établissements de crédit peuvent être réticents à
octroyer des prêts à une société qui mène une collection d’activités dont la rentabilité n’est
pas uniforme. Filialiser permet d’isoler les activités financièrement malades des branches qui
dégagent du cash.
Sur le plan fiscal : La législation fiscale marocaine n’a pas mis en œuvre le régime de
l’intégration fiscale à l’instar du droit français permettant de soumettre à l’impôt sur les
sociétés un résultat consolidé obtenu en faisant la somme algébrique des résultats des filiales
formant le groupe. Toutefois, une tentative d’institution d’un régime d'incitation fiscale aux
opérations de restructuration des groupes de sociétés a été introduite par la loi de finance
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2017, en instituant le principe du régime de la neutralité fiscale des opérations de transfert
des biens d’investissement entre les membres d’un groupe de sociétés.
En fait, l’article 161 bis-I du Code Général des Impôts (CGI) prévoit que les opérations de
transfert de biens d’investissement peuvent être réalisées entre les sociétés soumises à l’IS
sans incidence sur leur résultat fiscal, si lesdites opérations sont effectuées entre les membres
d’un groupe de sociétés éligibles. Le bénéfice de la neutralité fiscale est subordonné à un
certain nombre de conditions :
- la société-mère qui détient d’une manière continue directement ou indirectement 80%
au moins du capital social des filiales membres du groupe doivent être soumises à l’IS au
Maroc, y compris celles exonérées en partie ou en totalité dudit impôt ;
- les biens d’investissement, objet du transfert, doivent être inscrits à l’actif immobilisé
des sociétés effectuant l’opération de transfert ;
- les biens d’investissement précités ne doivent pas être cédés à une société ne faisant
pas partie du groupe ;
- les biens d’investissement précités ne doivent pas être retirés de l’actif immobilisé des
sociétés bénéficiaires du transfert desdits biens ;
- les sociétés concernées par les opérations de transfert ne doivent pas quitter le
périmètre du groupe.
De même, la loi fiscale marocaine n’a pas mis en œuvre à proprement dit le régime de mère
fille exonérant les dividendes distribués entre les filiales et leur mère afin que ces distributions
ne soient pas doublement imposées à l’impôt sur les sociétés.
Toutefois, l’article 6-C du CGI exonère de la retenue à la source les dividendes et autres
produits de participation similaires versés par des sociétés soumises ou exonérées de l’impôt
sur les sociétés à des sociétés ayant leur siège social au Maroc et soumises audit impôt, à
condition qu’elles fournissent à la société distributrice ou à l’établissement bancaire délégué
une attestation de propriété de titres comportant le numéro de leur identification à l’impôt
sur les sociétés.
Par ailleurs, ces produits sont compris dans les produits financiers de la société bénéficiaire
avec un abattement de 100%.
La filialisation peut également apporter des avantages de contrôle de gestion et de
motivations des troupes. En effet, Filialiser des divisions permet d'abord souvent de mieux
mettre en valeur les résultats réels d'une branche autrement noyés dans la masse des
résultats de la mère, et donc de mieux responsabiliser et intéresser, le cas échéant, les
dirigeants de cette division (participation au capital, stock option... qui seront tôt ou tard
rachetés par la mère à moins que la nouvelle société soit mise en bourse)
Ensuite le capital de ces nouvelles filiales peut être ouvert à des tiers. C'est donc un moyen de
financement que l'entrée des tiers ait lieu par augmentation de capital (financement de la
filiale) ou par cession d'actions (financement de la mère). C'est aussi une façon de pouvoir
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nouer des alliances capitalistes (prise de participation, fusion) avec un groupe qui peut n'être
intéressé que par les activités de la nouvelle filiale et pas par celle de la mère.
Dernier avantage est relatif à la possibilité d’une filialisation d’être un moyen anti OPA. Il
faut noter que la filialisation en tant que telle n'est pas un moyen anti OPA, mais l'ouverture
du capital de la nouvelle filiale peut en être un si la filiale est importante relativement au
groupe et si le tiers a négocié le droit de racheter la participation (majoritaire) de la mère dans
la filiale en cas de changement du contrôle de la mère. Ce type de dispositif doit être mis en
place à l'avance et non pas la veille du lancement de l'OPA.
Quant à la prise de participation au capital, celle-ci présente plusieurs avantages pour la
société :
• Un capital plus important : grâce aux prises de participation, une entreprise peut avoir
davantage de fonds propres pour démarrer son activité, ou même pour se développer.
Ce type de financement est particulièrement avantageux pour les start-ups ou les
entreprises faisant beaucoup de recherche et développement, face auxquelles les
banques sont généralement frileuses.
• Un meilleur accès aux prêts : la présence d’un investisseur professionnel parmi les
actionnaires d’une société a tendance à rassurer les organismes financiers, qui sont
alors plus enclins à accorder des prêts. La prise de participation améliore donc l’accès
au crédit de l’entreprise.
• Un réseau de professionnels : souvent (et c’est le cas à l’instar de ce sujet), les
investisseurs ont un rôle actif dans l’entreprise à laquelle ils participent. Ils partagent
ainsi leur expérience (gestion, financement, développement, marketing, etc.) et font
également profiter la société de leur réseau professionnel. La contrepartie est que le
capital-risqueur a un droit de regard sur le fonctionnement de l’entreprise.
• L’avantage le plus pertinent à notre sens et dans le cadre de ce sujet est qu’une prise
de participation importante permets une influence déterminante sur la société qui ne
peut être que bénéfique si c’est justement le but poursuivi.
Lorsque l'entreprise fait face à une acquisition malveillante, la direction de l'entreprise acquise
peut effectivement empêcher l'acquisition malveillante en recherchant une société « amicale
» pour augmenter sa participation dans l'entreprise en détenant des actions croisées.
Par exemple, en 2002, la direction de l'entreprise n'était pas d'accord avec le principal
actionnaire Everbright Group, qui avait l'intention de transférer la totalité de ses actions à son
partenaire Dongsheng Technology.
Afin d'éviter que le contrôle de l'entreprise ne tombe entre les mains de Dongsheng
Technology, la direction de l'entreprise a pris l'initiative de coopérer avec Mme
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Pharmaceutical pour transférer toutes les actions du Groupe lizhu détenues par Lishi
Investment, le deuxième actionnaire le plus important de l'entreprise, à Mme Pharmaceutical
à un prix plus favorable, et Lishi Investment est détenue à 90% par le Conseil d'administration
du Groupe lizhu.Mme Pharmaceutical a également acquis des actions a et B en circulation par
l'intermédiaire du marché secondaire et a finalement été le Contrôleur effectif du Groupe
lizhu par l'intermédiaire d'un accord d'acquisition d'actions de personnes morales.
• Deuxièmement, les participations croisées peuvent créer des synergies entre les
parties
L'actionnariat croisé contribue à la coopération horizontale et à l'intégration verticale entre
les entreprises, par exemple en complétant les ressources dans les domaines de la
technologie, des ventes, de l'information, etc., ou en intégrant verticalement les entreprises
en amont et en aval, de sorte que les capacités des entreprises puissent être utilisées de
manière coordonnée et efficace.
Les participations croisées entre les sociétés et les institutions financières peuvent aider les
entreprises à introduire des sources de financement fiables, tandis que les participations
croisées entre les sociétés mères et les filiales (ce qui touche essentiellement notre sujet)
peuvent aider les entreprises à améliorer l'efficacité de l'utilisation des fonds et à obtenir un
plus grand contrôle avec moins de fonds.
• Inconvénients de la filialisation :
• Manque de couts de financement : De toute évidence, la constitution de sociétés
suppose un coût de structure (droits d’enregistrement, tenue des assemblées,
rémunération d’un CAC …) que toutes les entreprises ne peuvent se permettre. Les
sociétés commerciales sont soucieuses de réduire leurs coûts de structure et de
réaliser des économies. La disparition de filiales pourra alors être décidée et mise en
œuvre, par exemple, par fusion de sociétés.
• Distanciation entre le centre d’exploitation (la filiale et la sous filiale) et le centre de
décision (la mère) : L’instrument privilégié de la constitution de filiales est l’apport
partiel d’actif. Or, en réalisant un apport partiel d’actif, la société apporteuse – c’est-
à-dire la future société mère – peut voir ses titres capitalistiques perdre de leur valeur
du fait de l’éloignement de ses actifs vers une société filiale voire une société sous-
filiale.
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• L’abus de majorité : la transmission d’actifs d’une société à une autre société, dans
laquelle les associés majoritaires sont intéressés et sans que ces derniers n’aient
proposé de garanties suffisantes aux minoritaires, peut constituer un abus de majorité.
D’une part, la filialisation ou la sous-filialisation par le bas peut amener les minoritaires
à être privés de leurs droits financiers lorsque la fille ne fait pas remonter les bénéfices
qu’elle réalise vers la mère. D’autre part, la rupture d’égalité entre les actionnaires
peut résulter du préjudice porté au droit à l’information et au droit de critique
reconnus aux minoritaires. Dans ce sens, La Cour de cassation française a déjà été
portée à reconnaître le caractère abusif de l’usage de la filialisation. Certains auteurs
considèrent d’ailleurs que la décision de filialiser, considérée objectivement et
indépendamment de l’usage qu’il en est fait, puisse par elle-même être considérée
comme abusive dès lors qu’aucune disposition de nature à protéger les intérêts des
minoritaires n’est prévue.
• Au-delà de la protection des minoritaires, l’opération de filialisation peut prêter le
flanc à la critique lorsqu’elle est réalisée pour se débarrasser d’une branche d’activité
en mauvaise santé financière. Il est tentant pour une entreprise de filialiser une
activité déficitaire sans transférer à la filiale qui l’accueille des moyens financiers
suffisants. En la matière, les tribunaux pourraient décider d’engager la responsabilité
de ces sociétés mères déraisonnables.
Le fait de constituer une société fille, sans lui donner les moyens financiers de subsistance
pourrait alors constituer une faute et faire naître un préjudice à l’endroit de la société filiale.
La mère pourrait ainsi être condamnée à contribuer à l’insuffisance de moyens. Cette
insuffisance devrait néanmoins être rigoureusement démontrée comme l’illustre un arrêt
récent.
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• Troisièmement, les participations croisées sont susceptibles de créer un déséquilibre
dans la structure de gouvernance d'entreprise.
Dans l'état de la propriété croisée, la direction d'une société a souvent un pouvoir de décision
important sur une autre société. Si les deux dirigeants agissent de concert pour exercer le droit
de vote, la structure de gouvernance d'entreprise sera déséquilibrée.
- la procédure de vérification des apports par le commissaire aux apports dans le cadre de
l'apport partiel d'actif,
- l'intervention du commissaire aux comptes dans le cadre de la scission partielle .
En revanche , elle présente deux inconvénients :
1. Elle est fiscalement coûteuse dans la mesure où elle donne lieu à la perception d'un double
droit d'enregistrement sur la vente et sur l'augmentation de capital . Sur la vente , il est perçu
le droit d'enregistrement au taux plein , en particulier 6% sur la cession du fonds de commerce,
auquel il faut ajouter 1% pour l'augmentation de capital s'il y a lieu .
Si le transfert est effectué sous forme d'apport partiel ou de scission , le droit d'enregistrement
sera perçu une seule fois au taux unique de 1% .
2. La loi prévoit que lorsque la société , dans les deux ans suivant son immatriculation , acquiert
un bien appartenant à un actionnaire et dont la valeur est au moins égale à un dixième du
capital , le président du conseil d'administration doit demander en référé la désignation d'un
commissaire chargé d'apprécier , sous sa responsabilité , la valeur de ce bien.
Le commissaire désigné par le tribunal établit un rapport qui est mis à la disposition des
actionnaires. À la lumière des conclusions de ce rapport l'assemblée générale ordinaire statué
sur l'évaluation du bien , à peine de nullité de l'acquisition. Le vendeur ne prendre part au vote
ni par lui-même , ni comme mandataire ( article 112 ).
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Au niveau de l'impôt sur les sociétés les plus-values dégagées sur les éléments d'actif cédés
sont intégrés au résultat fiscal de l'exercice au cours duquel la cession d'actifs est intervenue.
La filialisation peut résulter soit de la création d'une société nouvelle soit de la prise de
contrôle d'une société existante par achat de titres ou par souscription à une augmentation
de capital , soit de la constitution avec une autre société de filiale commune .
La filialisation peut-être totale ou partielle . Dans le premier cas , la société mère continue à
exploiter la ou les autres activités relevant de son objet social . Dans le second cas , la société
mère filialise l'ensemble de ses activités en les transférant à deux ou plusieurs entités et soit
abandonne toute activité opérationnelle et se transforme en une société holding dont l'objet
est cantonné à la gestion de ses participations dans les filiales , soit disparaît totalement.
Toute société mère souhaitant créer une filiale doit donc déterminer, au préalable, son statut.
La plupart des filiales sont créées sous la forme de SAS – sociétés par actions simplifiées. Cette
structure offre effectivement beaucoup plus de souplesse que les autres statuts. Toutefois, il
convient de mener une analyse plus pointue car ce n’est pas forcément le statut le plus
approprié à chaque situation.
Comme toute société, une filiale se caractérise par différentes informations. La société mère
doit notamment lui attribuer :
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• Une activité (son objet social),
• Un dirigeant (son représentant légal).
Lorsqu’elle a identifié toutes ses caractéristiques, la société mère doit rédiger des statuts. Elle
aura la possibilité d’y insérer les clauses de son choix, notamment pour structurer
l’actionnariat de sa filiale et :
Le représentant légal de la filiale doit ensuite rédiger un avis de création de société et le faire
paraître dans un journal d’annonces légales. La publication d’une annonce légale a pour
objectif d’informer toute personne intéressé de la création d’une société.
Lorsqu’une société détient dans une autre société une fraction du capital comprise entre 10
et 50 %, la première est considérée comme ayant une participation dans la seconde.
A s’en tenir à cette définition de participation, on devrait considérer que la détention de moins
de 10 % d’une autre société constitue dans tous les cas un simple placement, tandis que celle
égale ou supérieure à 10 % correspond à une participation.
En fait, ce critère n’est pas significatif. Il est bien certain que la détention de 4 % par exemple,
dans le capital d’une importante société cotée en bourse constitue bien souvent davantage
une participation au sens général de ce terme qu’un simple placement de capitaux. A l’inverse,
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acquérir 15 % ou 20 % du capital d’une société « fermée » ne suffit pas toujours pour exercer
une influence au sein de cette société.
La répartition initiale du capital social lors de la création d’une société n’est pas figée dans le
temps, elle peut évoluer à tout moment. Les prises de participation sont des opérations qui
entraînent l’arrivée d’un nouvel associé au capital de la société.
Une prise de participation dans le capital d’une société consiste soit à devenir associé ou
actionnaire en souscrivant des titres que l’entreprise émet, soit à acquérir certains de ses
titres déjà émis.
Pour prendre une participation dans le capital social d’une société, il est notamment
nécessaire :
Une prise de participation peut être réalisée dans le but de réaliser différents projets.
Ensuite, d’un point de vue juridique, la prise de participation peut être réalisée par un rachat
de titres aux associés en place, ou par l’émission de nouveaux titres dans le cadre d’une
augmentation de capital social.
• D’une levée de fonds, avec l’arrivée d’un investisseur dans la société. L’intérêt
principal du nouvel associé est de réaliser un placement lucratif, notamment à
travers la potentielle plus-value qu’il réalisera lors de la cession de ses participations.
Ce type de prise de participation vise les sociétés qui ont besoin de fonds pour se
développer.
• D’une prise de contrôle par un nouvel associé. Dans ce cas, l’acquéreur doit
analyser les statuts de la société afin de vérifier quelles sont les quotités nécessaires
pour décider. Il s’agira notamment de vérifier les règles de quorum et de majorité
pour les décisions ordinaires et extraordinaires, ainsi que les conditions de
nomination des dirigeants de la société.
• De l’entrée d’un nouvel associé actif qui intègre l’équipe en place. Ici, le nouvel
associé souhaite avant tout s’intégrer dans la société existante pour y jouer un rôle
actif et contribuer à son développement. Ce type de prise de participation vise les
sociétés qui ont besoin de compétences supplémentaires ou de nouvelles
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compétences pour se développer, et de manière pérenne. Il peut également s’agir de
proposer une participation à un salarié précieux pour l’entreprise.
Concernant l’opération, nous avons indiqué précédemment qu’il existe plusieurs possibilités:
le rachat de titres existants ou la création de nouveaux titres dans le cadre d’une
augmentation de capital social.
L’augmentation de capital social par émission de nouveaux titres est plutôt employée lors
de l’entrée d’un investisseur dans la société, comme lors d’une opération de levée de fonds
par exemple. L’investisseur prend généralement une participation minoritaire.
Les prises de participation par rachat de titres sont réservées aux opérations réalisées dans
le cadre d’une prise de contrôle par un nouvel associé, ou de l’entrée d’un nouvel associé
actif au sein de la société.
On parle de participation croisée ou réciproque, lorsque par exemple la société A détient une
fraction considérable du capital de la société B et que la société B détient à son tour des
participations dans le capital de la société A.
Ces relations imbriquées facilitent très certainement une collaboration profonde entre les
différentes sociétés en cause et constituent également une défense anti-OPA.
Cette pratique n'est pas toujours bien vue pour deux raisons au moins:
- une partie du capital des sociétés imbriquées devient fictif puisque chaque société devient
indirectement propriétaire de ses propres titres de capital, ce qui a pour effet de gonfler
artificiellement l'actif des sociétés concernées ,
- cette situation peut aboutir à l' autocontrôle qui verrouille le capital et qui met les dirigeants
dans une situation quasi inamovible , empêchant un renouvellement des gestionnaires.
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La tendance des participations croisées bat sont plein dans le marché financier marocain. La
raison est purement stratégique, d’après les financiers de la place, mais les besoins changent
d’une entreprise à l’autre. Le mouvement croissant de la pratique des participations croisées
peut s’expliquer par le fait que les générations soient en train de changer de main. Les patrons
d’entreprises marocaines essaient d’assurer une certaine sérénité pour le développement de
leurs entreprises.
Concrètement, c’est une «fuite en avant» que font les opérateurs, en optant pour cette
pratique. Puisque chaque entreprise a un besoin stratégique imminent, alors la meilleure
façon de le combler est de partager le risque lié à ce besoin avec une autre entreprise et vice-
versa. Dans ce sens, un analyste financier affirme que l’objectif de la pratique des
participations croisées, est de lier l’avenir d’une société à l’autre et ainsi partager le risque en
créant de la valeur et en transférant les richesses. Ainsi, les entreprises, par un simple échange
de participations, se repositionnent chacune dans son secteur d’activité, en vue de se
développer, en créant conjointement de très fortes synergies.
Un croisement win-win :
Les exemples dans ce sens ne manquent pas dans l’échiquier économique marocain. Prenons
l’opération de la Banque Centrale Populaire et le Groupe OCP. En effet, aujourd’hui, chaque
entreprise détient 6% du capital de l’autre. Le paquet d’actions de la banque est valorisé à un
1 milliard de dirhams, alors que celui de l’Office à 5 milliards. L’objectif de cette opération a
été de donner une nouvelle impulsion aux deux groupes, dont les stratégies convergent. D’une
part, renforcer l’assise financière de l’OCP et augmenter sa visibilité sur la place mondiale.
D’autre part, permettre à la BCP de réaliser une croissance externe dans les métiers de la
finance et de l’investissement.
Un environnement avantageux :
L’aspect fiscal joue un rôle important dans la floraison de la pratique des participations
croisées, liés aux mesures incitatives de la loi de finances qui offre des avantages fiscaux au
système des participations. Coté bourse, l’ AMMC ne publie pas de réglementation pour les
participations croisées, sauf s’il s’agit de franchissement de seuil, afin de préserver les intérêts
des minoritaires. Mais, au-delà, un retour dans le temps est capital. Dans les années 80, il y a
eu une montée de la pratique des participations croisées chez les entreprises. Ce qui a
engendré des relations illicites, d’où la perte de la confidentialité des informations. Après cette
vague, il y a eu un décroisement de cette pratique financière, justement pour protéger
l’information. Mais aujourd’hui, la tendance reprend.
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2) La mise en œuvre des filiales et des participations
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Lorsque la société possède des filiales ou des participations ou si elle contrôle d’autres
sociétés, l’article 142 exige en vertu de la loi 17-95 : “Le rapport de gestion du conseil d'
administration ou du directoire doit contenir tous les éléments d' information utiles aux
actionnaires pour leur permettre d' apprécier l' activité de la société au cours de l' exercice
écoulé, les opérations réalisées, les difficultés rencontrées, les résultats obtenus, la formation
du résultat distribuable, la proposition d' affectation dudit résultat, la situation financière de
la société et ses perspectives d' avenir.
Si la société possède des filiales ou des participations ou si elle contrôle d'autres sociétés, le
rapport doit contenir les mêmes informations à leur sujet, avec leur contribution au résultat
social ; il y est annexé un état de ces filiales et participations avec indication des pourcentages
détenus en fin d'exercice ainsi qu'un état des autres valeurs mobilières détenues en
portefeuille à la même date et l'indication des sociétés qu'elle contrôle.
Si la société a acquis des filiales ou des participations ou le contrôle d'autres sociétés en cours
d'exercice, il en est fait spécialement mention.”
Lorsqu'au cours de l'exercice la société a acquis une filiale, pris le contrôle d'une autre société
ou pris une participation dans une autre société au sens de l'article 143, le ou les commissaires
aux comptes en font mention dans leur rapport. (Art 172, al.2)
C- Franchissement de seuils
Toute personne physique ou morale qui vient à posséder un nombre d’actions supérieur à 5%,
10%, 20%, 33,33%, 50% ou 66,66% du capital ou des droits de vote d’une société cotée en
informe ladite société, l’AMMC et la Bourse des valeurs dans les 5 jours ouvrables à compter
de la date du franchissement de seuil. (Art 2-1, CIRCULAIRE N° 01/04) En cas d’action de
concert, chaque concertiste est tenu de faire une déclaration individuelle ou signer une
déclaration globale avec les autres concertistes.
Lorsque le nombre ou la répartition des droits de vote ne correspond pas au nombre ou à la
répartition des actions, les pourcentages prévus au premier alinéa du présent article sont
calculés en droits de vote. (Art 2-2 du même circulaire)
La déclaration doit porter sur le nombre total des actions acquises, mais également sur le
nombre de titres donnant à terme accès au capital et des droits de vote qui y sont attachés
(obligations convertibles, échangeables ou remboursables en actions, bons de souscription
secs ou attachés à des actions ou à des obligations). Cependant, s’agissant de droits de vote
potentiel, ils ne sont pas pris en considération pour le calcul des seuils de franchissement. Ce
calcul ne prend en compte que les droits de vote effectifs au jour de la déclaration et qui ne
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peuvent concerner que les actions ordinaires ou à vote double et les certificats de droit de
vote.
La déclaration s’impose pour les actions détenues par le déclarant directement ou pour le
compte d’autres personnes (enfants mineurs) ou indirectement par le biais des sociétés qu’il
contrôle. [Lorsqu’une société mère acquiert des titres d’une société, elle doit pour le calcul du
seuil, ajouter les titres éventuellement détenus par ses filiales dans la même société. Il en est
de même pour les actions acquises ou cédées à titre temporaire dans le cadre d’un contrat de
prêt de titres ou de pension.]
La date de franchissement qui est le point de départ du délai de 5 jours ouvrables pour faire
parvenir la déclaration correspond à celle de l’exécution en bourse de l’ordre d’achat ou de
vente transmis par le déclarant. (Art 7-1)
2- Droit comptable
Il est opportun d’avoir une vision globale de la santé financière d’un groupe de sociétés d’où
la nécessité de comptes consolidés. Bien qu’il n’existe pas d’obligation générale de
consolidation des comptes, 3 textes sont eux très explicitent en la matière venant imposer la
consolidation :
Le dahir du 21 septembre 1993 sur la Bourse tel qu’il a été modifié par la loi 52-01 dans
son article 14 : “Avoir établi et fait certifier les états de synthèse des trois exercices
précédant la demande d’admission à la cote. En outre, les personnes morales ayant
des filiales telles que définies à l’article 143 de la loi n° 17/95 relative aux sociétés
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anonymes, doivent présenter des comptes annuels consolidés selon la législation en
vigueur, ou, à défaut, selon les normes internationales en vigueur.”
La loi 103-12 impose la même obligation aux établissements de crédit qui sont tenus
d’établir à la fin de chaque exercice des états de synthèse sur une base individuelle et
consolidée ou sous consolidée (art 73)
La loi 38-05 relative aux comptes consolidés des établissements et entreprises publics
impose aux établissements publics ainsi qu’aux sociétés d’Etat, filiales publiques et
sociétés concessionnaires possédant ou contrôlant des filiales et des participations au
sens des articles 143 et 144 de la loi 17-95 d’établir et de présenter des comptes
annuels consolidés selon la législation en vigueur ou, à défaut, selon les normes
internationales en vigueur.
Le référentiel comptable de la consolidation ne fait pas de différence entre les entreprises
publiques et les entreprises privées au niveau des méthodes de consolidation. La
consolidation porte sur le bilan, le compte de produits et charges et sur l’état des informations
complémentaires (ETIC).
Malgré ces différents dispositifs, le contrôle exercé sur les données exclusivement comptables
peut montrer certaines limites. Le Professeur Schmidt, expose dans son ouvrage sur les
conflits d’intérêts, l’incapacité du contrôle des comptes sociaux à faire apparaître
distinctement les abus. Celui-ci reste occulte, « enfoui dans les comptes d'une filiale et noyé
dans les comptes consolidés de la société mère. Le conseil d'administration et l'assemblée
générale, qui n'ont pas accès à la comptabilité et aux archives sociales, ne peuvent percer le
secret. En l'absence d'une dénonciation provenant d'un préposé aux écritures ou aux
virements de fonds, la société, victime représentée légalement par l'auteur de l'infraction, ne
pourra se plaindre »
En France, par une nouvelle disposition légale issue de la loi Sapin II n° 2016-1691 du 9
décembre
2016. Cette dernière impose aux sociétés qui établissent des comptes consolidés de mettre
en place des actions de prévention et de détection portant sur la société consolidante ainsi
que sur l’ensemble des filiales ou des sociétés qu’elle contrôle.
3- Droit de la concurrence
Le groupe de sociétés est appréhendé par le droit de la concurrence à travers la notion
d’entreprise. Cette notion est au cœur du droit de la concurrence. Selon cette logique, le
groupe sera appréhendé comme une unité économique constitué par ses différentes
composantes qui ne seront pas considérées comme des entités juridiques distinctes, de sorte
que le droit de la concurrence peut s’appliquer indifféremment et selon les circonstances à la
société tête de groupe, à une ou plusieurs filiales ou à l’unité économique constituée par la
société mère et les filiales. La notion d’entreprise transcende la notion de personnalité morale
en faisant prévaloir les considérations économiques sur les considérations juridiques. Dans la
mesure où plusieurs sociétés constituent une unité économique, elles seront considérées
comme une seule entreprise. Partant de ce constat, il n'y aura plus de distinction entre la
société mère et les filiales ; c’est le groupe dans son ensemble qui se verra appliquer les règles
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du droit de la concurrence. L’unité économique du groupe crève l’écran de la personnalité
morale des filiales.
Les pratiques anticoncurrentielles commises par une filiale sont réputées être commises par
l’ensemble du groupe et peuvent engager la responsabilité de la société mère lorsqu’elle
constitue avec sa filiale, auteur de la pratique incriminée, une unité économique.
Lorsque la société mère est une holding pure, le comportement ou les agissements de la filiale
ne peuvent lui être imputées puisqu’elle n’exerce pas une activité économique, sauf lorsque
la filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais ne fait
qu’appliquer les instructions qui lui sont données par la société mère. L’imputabilité est liée à
l’exercice effectif par la société mère d’une influence déterminante sur sa filiale et qui résulte
des liens économiques, juridiques et organisationnels existant entre les deux sociétés.
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Donc, il y une autonomie juridique totale et une domination économique, ce qui pose
plusieurs problèmes :
Juridiquement elle est censée agir de manière autonome, mais économiquement elle ne fait
qu’exécuter une politique décidée par la société mère. Comment dégager la responsabilité de
la filiale ?
La notion de contrôle majoritaire permet de définir une société mère d'un groupe comme
étant une société qui possède une ou plusieurs filiales, c’est-à-dire qui détient plus de 50 %
du capital d'autres sociétés. L'ensemble de ces sociétés constitue ce que l'on appelle un
« groupe de sociétés » ( La multiplication de filiales n'empêche pas le phénomène global
de concentration des entreprises ).
Juridiquement, la filiale est bien considérée comme autonome, mais en tant que membre du
groupe de société, elle est soumise à une même direction générale, qui peut, par exemple, lui
imposer des objectifs.
1) Principe de la non-responsabilité
Dans la mesure où la filiale prend elle-même et pour elle-même ses propres engagements, la
société-mère devrait ne pas avoir aucune responsabilité en cas de litiges. Elles sont
juridiquement indépendantes, donc, par principe, la relation de responsabilité devrait être
étanche.
Il existe toutefois de nombreuses exceptions, et les juridictions ont retenu différents cas de
responsabilité.
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postulant qu'une filiale à 100% est dépourvue d'autonomie. Cette présomption simple peut-
être renversée par la preuve que la filiale est en mesure de définir sa propre stratégie
commerciale, financière et technique et de s'affranchir du contrôle hiérarchique du siège de
la société dont elle dépend.
Dans le silence des textes , c'est au juge qu'il appartient d'apprécier, au cas par cas, l'état
des relations au sein du groupe pour déterminer le degré d'autonomie de la filiale et
partant, écarter ou retenir la responsabilité de la société mère. Il y a un équilibre à trouver
entre l'autonomie juridique qui doit demeurer et la règle et qui participe à l'essence même
de la notion de groupe de sociétés et la nécessité de protéger les intérêts légitimes des
partenaires de la filiale.
Lorsque la filiale connaît par exemple des difficultés et à plus forte raison lorsqu'elle fait
l'objet d'une procédure de traitement des difficultés de l'entreprise, la tendance générale
est d'essayer de mettre en cause la responsabilité de la société mère. A cet effet , on
invoque , selon le cas ou même cumulativement , comme fondement juridique de la
responsabilité de la société mère la confusion des patrimoines , la fiction et la faute de
gestion.
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• La confusion des patrimoines peut-être établie lorsqu'il y a imbrication des affaires de la
filiale ( éléments d'actif et de passif ) avec celles de la société mère qui se traduit par des
relations financières anormales : avances de fonds non remboursés ou non rémunérés ,
abandons de créances , loyers anormalement bas ou non payés , prêts de main d'œuvre
non facturés et en général tous flux financiers prestations ou avantages quelconques sans
contrepartie. Cette confusion justifie l'extension de la procédure collective à la société mère
ou à d'autres sociétés du même groupe. A cet égard, l' article 585 du code de commerce
dispose que s'il se révèle que la procédure doit être étendue à une ou plusieurs entreprises
par suite d'une confusion de leurs patrimoines, le tribunal initialement saisi reste
compétent.
• Le caractère fictif de la filiale peut-être déduit de l'immixtion de la société mère dans les
affaires de la filiale au point que cette dernière n'a que l'apparence trompeuse de
l'autonomie juridique. C'est le cas lorsque la filiale est traitée par la société mère comme
une succursale ou une agence. Il en est de même à plus forte raison la filiale à être créée
uniquement pour servir d'écran à la société mère.
La responsabilité de la société-mère peut toutefois être engagé dans certains cas, notamment
dès lors qu’elle a pris part à la relation entre la filiale et son client ou d’un tiers : négociation
commerciale, conclusion d’un contrat… En cas de litiges, la responsabilité de la société-
mère est d’autant plus engagée qu’il y a eu confusion dans l’esprit du tiers, qui ne saisit pas
vraiment le lien ou la différence entre les deux sociétés.
Il est alors plus que conseillé d’établir une communication plus que transparente entre les
tiers, la filiale et la société-mère : les contrats doivent être rédigés avec le plus grand soin, et
peuvent eux-mêmes préciser le niveau d’engagement et de responsabilité de la société-mère
vis-à-vis de la filiale.
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La société-mère engage également sa responsabilité lorsqu’elle impose à sa filiale une
décision qui éventuellement empêche la filiale de tenir ses obligations et engagements.
De même, la société-mère est tenue responsable dès lors qu’elle commet une faute de
direction qui a des répercutions pour la filiale : abus de pouvoir, abus de bien sociaux,
poursuite de bien personnels plutôt que de l’intérêt social…
La lettre d’intention, pour s’engager aux côtés de sa filiale : La société-mère n’est pas engagée
dans les affaires de sa filiale, c’est acquis. Elle peut toutefois s’engager volontairement et en
toute transparence aux côtés de celle-ci par une lettre d’intention.
Prenons le cas d’un fournisseur peut avoir besoin de garanties avant de conclure un contrat
avec une filiale : celle-ci est fragile financièrement, et le fournisseur peut hésiter à prendre un
risque. Dans ce cas, la société-mère peut s’engager au côté de sa filiale afin de servir de caution
et ainsi décrocher le contrat. A valeur juridique, la lettre d’intention constitue une garantie.
Par la lettre d’intention, la société-mère peut s’engager à une obligation de faire, une
obligation de moyens, une obligation de résultats.
La responsabilité et l’engagement dans la relation entre société-mère et filiale reste très flou,
et se traite au cas par cas : elle dépend des circonstances : Responsabilité volontaire ou non,
il reste essentiel d’établir une relation transparente, établie sur des textes complets et rédigés
avec soin.
En droit français :
La responsabilité du groupe ne pouvant pas être engagée, une autre option pourrait être de
rechercher la responsabilité de la société mère lorsqu’un acte dommageable a été commis par
sa filiale. Toutefois, la notion d’autonomie trouve une traduction particulière dans le contexte
de la relation entre une société-mère et sa fille, elle pose un écran juridique très résistant qui
protège la mère de toute action menée à son encontre du fait de sa filiale. Par principe, la
responsabilité de la société-mère pour les faits de sa fille ne peut donc être recherchée.
Ce principe, prévu notamment par l’article 1842 du Code civil14, n’est certes pas absolu, mais
des dérogations à celui-ci, sont exceptionnelles et extrêmement rares, et exigeant pour ce,
des conditions souvent difficiles à réunir. Le créancier qui a traité avec une filiale, par exemple,
ne peut, en principe, demander le paiement de sa créance qu'à celle-ci, alors que compte tenu
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de la dépendance de la filiale par rapport à la société mère et de leurs intérêts conjoints, il
devrait logiquement être en position de se retourner également contre la société mère qui se
retranche derrière le bouclier de sa filiale.
Ce « bouclier juridique » posé par le principe d’autonomie a déjà entraîné des situations
délicates, voire alarmantes. La question de la responsabilité des sociétés mères a notamment
été soulevée, lorsque la filiale d'un groupe prospère, est abandonnée à la liquidation par sa
mère sans que cette dernière ne se soucie des conséquences économiques, sociales,
environnementales que cet abandon peut engendrer : licenciements, sites à dépolluer,
victimes non dédommagées, créanciers non remboursés… En effet, si une filiale d'un groupe
est défaillante, la responsabilité de cette dernière ne peut « remonter » jusqu’à la mère qui
demeure inattaquable. La mise en liquidation judiciaire conduisant à l’effacement des dettes
de la filiale, les créanciers et les tiers peuvent, de ce fait, se trouver lésés.
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La clause compromissoire est la clause qui, insérée dans un contrat, engage les parties
contractantes à avoir recours à l’arbitrage en cas de litiges.
La clause compromissoire peut cependant trouver à s’appliquer à des contrats autres que celui
qui comporte la clause, elle peut également être étendue à des parties qui ne sont pas
initialement signataires de cette clause.
Les effets de la convention d’arbitrage à l’égard des tiers est un grand classique de la
littérature juridique en droit de l’arbitrage international. Les solutions retenues par les
différents systèmes juridiques reposent sur des fondements extrêmement variés.
En effet, toute la difficulté consiste ici à déterminer l’existence d’un consentement, serait-ce
implicite, au recours à l’arbitrage d’une partie non signataire du contrat comportant une
clause compromissoire.
S’il est vrai que la volonté des parties, fondement même de l’arbitrage, et la nature
conventionnelle de la clause compromissoire imposent le respect du principe de l’effet relatif
de la clause compromissoire à l’égard des tiers, il n’en est pas moins vrai que la jurisprudence
arbitrale a, depuis fort longtemps considéré, que la volonté des parties de soumettre leurs
litiges à l’arbitrage comme mode alternatif de résolution de différends pouvait être déduite
de leur comportement.
Les spécialistes de l’arbitrage international savent que, dans la pratique, il ne s’agit nullement
d’étendre la clause compromissoire à des tiers, mais de déterminer, au-delà des termes
utilisés par les documents contractuels, qui y est véritablement partie et, par voie de
conséquence, qui pourrait à l’occasion s’en prévaloir ou éventuellement se la voir opposer.
Autrement dit, l’expérience révèle un décalage assez conséquent entre l’identité des
personnes qui figurent dans les documents contractuels et celle des personnes qui exécutent
le contrat ou encore celles qui en sont les véritables bénéficiaires. L’exemple des groupes de
sociétés est très illustratif.
Pour parer à cette difficulté et rétablir la vérité contractuelle, les arbitres et, dans leur sillage,
les juges étatiques admettent l’existence d’un consentement tacite caractérisé par l’attitude
de la société mère lors de la phase de la négociation du contrat ou de celle de l’exécution voire
même par le comportement de celle-ci lors de la résiliation du contrat.
Ceci est d’autant plus vrai lorsque les arbitres et les juges constatent que la filiale ayant
souscrit le contrat contenant la clause compromissoire est entièrement contrôlée par la
société mère qui l’a vidée de ses actifs une fois le processus contractuel terminé.
Dans ce cas, les arbitres et les juges considèrent, à juste titre d’ailleurs, que la société mère
s’est comportée comme étant une véritable partie au contrat tout en se cachant derrière le
voile social érigé par l’illusion d’une filiale créée de toute pièce pour les besoins de la cause.
Concrètement, la convention d’arbitrage lui est applicable au même titre que la filiale.
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L’arrêt de la Cour d’appel de commerce de Casablanca du 15 janvier 2015 en est un parfait
exemple. Les arbitres et la Cour d’appel de commerce de Casablanca ont dressé un constat
identique. Ils ont établi sur la base des documents qui leurs avaient été soumis que la société
mère a joué un rôle capital lors de la négociation, de l’exécution et de la résiliation du contrat.
Pour étayer cette affirmation, la Cour d’appel de commerce de Casablanca précise notamment
que :
– La rupture du contrat a été initiée par la société mère qui a décidé de retirer, pour le compte
de sa filiale, la garantie à première demande octroyée par la banque au profit de la société
française.
L’ensemble de ces éléments reflète à merveille, aussi bien pour les arbitres que pour la Cour
d’appel de commerce de Casablanca, le rôle décisif joué par la société mère tout au long du
processus contractuel et justifie, dès lors, la décision de la considérer comme étant partie au
contrat et, en toute logique, au litige arbitral qui en découle.
En somme, la signature ne constitue en aucun cas un critère concluant pour déterminer les
personnes véritablement liées par la convention d’arbitrage. En revanche, le comportement
des personnes, lui, est décisif.
Certes, c’est la première fois que la question de l’extension de la clause compromissoire à une
partie non-signataire s’est posée devant une juridiction marocaine. Toutefois, l’admission du
principe de l’extension aux personnes non-signataires de la convention d’arbitrage est une
pratique extrêmement courante sur le plan international, qu’il s’agisse des pays d’Europe, des
Etats Unis ou des pays arabes. Il suffit pour s’en convaincre de constater que la Tunisie, la
Libye, l’Égypte, le Liban, la Suisse, la France, les Etats-Unis, l’Angleterre, pour ne citer que ces
pays, consacrent, depuis fort longtemps, le principe de l’extension de la convention
d’arbitrage aussi bien au niveau de la jurisprudence arbitrale qu’au niveau de la justice
étatique.
Conclusion
En effet, responsabiliser ou pas la société mère pour les actes de ses filiales place le législateur
dans une situation assez délicate ,acculé à choisir entre laisser la société mère libre de ses
actes et agissant à sa guise et impunie, au détriment de toute une panoplie de principes de
nature assez diverse ,juridique, morale, environnementale, fiscale et sociale, ou alors établir
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un cadre normatif assez sévère au risque d’avoir des retombées économiques assez néfastes
en cas de délocalisation de ces entreprises, autrement dit, faire prévaloir la réalité
économique ou l’orthodoxie juridique ?
Bibliographie
Traité marocain de droit des sociétés – Mohamed El Mernissi
www.cimentsdumaroc.com
www.legalstart.fr
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Attijariwafa_Bank#:~:text=Att
www.dictionnaire-juridique.com
https://www.insee.fr
https://www.upsilon-consulting.com/2021/03/succursale-au-maroc/
www.toute-la-franchise.com
www.lecoindesentrepreneurs.fr
economie-entreprises.com
https://www.village-justice.com
www.captaincontrat.com
www.bensussan.fr
https://bassamat-laraqui.com
Article : L’intégration fiscale dans des groupes de sociétés : un outil d’optimisation fiscale
non encore exploité au Maroc par EL MADI Lahsen , BAHAJJOU Issam
https://www.lepetitjuriste.fr/technique-de-filialisation-entre-atouts-ecueils/
https://www.lecoindesentrepreneurs.fr/creation-filiale/#interets
https://www.vernimmen.net/Pratiquer/avantages_de_la_filialisation.html
Thèse pour le doctorat en droit présentée et soutenue par Delphine NICOLAS – BELIZON : LE
CONTRÔLE DE LA GESTION DES SOCIÉTÉS COMMERCIALES : APPROCHE SYSTÉMIQUE
https://www.avocats-amado.net/comprendre-quest-prise-de-participation-capital/
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