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deco mpensatio n-cardiaque

Les mécanismes de la décompensation cardiaque autorisent-


ils une anticipation de l’hospitalisation ? | Journal Cardiologie
Pratique

F. BAUER, Unité d’insuf f isance cardiaque, hypertension pulmonaire et échographie cardiaque, Hôpital
Charles-Nicolle, Rouen

12es Journées de rythmologie

“T he very essence of cardiovascular medicine is the recognition of early heart f ailure.” Sir T homas Lewis,
1933.
L’insuf f isance cardiaque aiguë (ICA) se déf init par un début ou un changement rapide des signes et
symptômes d’insuf f isance cardiaque nécessitant un traitement rapide. L’Observatoire f rançais de
l’insuf f isance cardiaque aiguë (OFICA), piloté par Damien Logeart au nom du groupe insuf f isance
cardiaque, est riche d’inf ormations. L’ICA a une mortalité de 28,6 % à 1 an, nettement supérieure à celle de
l’insuf f isance cardiaque chronique congestive. Le décès est essentiellement lié aux récurrences
d’insuf f isance cardiaque et plus exceptionnellement aux morts subites. Aucun des essais thérapeutiques
récents n’a montré d’amélioration du pronostic de l’ICA.

Physiopathologie de l’insuffisance cardiaque aiguë

L’anticipation de l’ICA, par l’éducation thérapeutique agressive ou le dépistage précoce au moyen de


systèmes à domicile ou embarqués dans les pacemakers/déf ibrillateurs, constitue un véritable champ
d’investigation et d’application aujourd’hui. Af in de comprendre les succès et échecs de ces « anges
gardiens », il convient de connaître le mode d’installation de l’ICA, son mode de présentation et enf in son
mode de déclenchement.

L’insuf f isance cardiaque aiguë se décline en 3 phénotypes comme l’indique la f igure 1 :


premier épisode d’ICA, ICA par paroxysme et ICA récurrente. Le mode de présentation réunit le choc
cardiogénique, l’insuf f isance cardiaque droite, la crise hypertensive ou le syndrome coronaire compliqué
d’insuf f isance cardiaque, l’ICA sur insuf f isance cardiaque chronique et l’œdème pulmonaire. Dans le registre
OFICA, ces 2 dernières entités représentent 90 % des modes de présentation.
Figure 1. Mode d’installation de l’insuffisance cardiaque aiguë.

Quant au mode de déclenchement, il est loin d’être élucidé. On distingue une phase initiale et une phase
d’amplif ication qui aboutit à la présentation clinique dont le dénominateur commun est la congestion (f igure
2). La voie vasculaire, initiée par la vasoconstriction, entraîne une décompensation aiguë à volémie
constante par redistribution des f luides. La FE est préservée. La voie cardiaque se produit sur un ventricule
à f aible réserve contractile (FE basse) éprouvant des phénomènes initiateurs tels que l’ischémie
myocardique, l’inf lammation, de désynchronisation aiguë, de déplacement de la loi de Frank-Starling, etc. La
congestion survient par accumulation de f luide. Ce déséquilibre est amplif ié par des phénomènes
d’ischémie, d’arythmie, de dysf onction ventriculaire droite, d’insuf f isance rénale et respiratoire.
Figure 2. Physiopathologie de l’insuffisance cardiaque aiguë.

Le monitoring

La f igure 2 aide à comprendre les 2 niveaux de monitorage des patients. Il existe, d’une part, les f acteurs
précipitants (ischémie, trouble du rythme, inf ection, réserve contractile, élévation de postcharge …) et,
d’autre part, les conséquences (élévation des pressions de remplissage et pulmonaire, rétention
hydrosodée, poids, dyspnée, baisse d’activité, f réquence cardiaque…). Ces paramètres, pour certains
d’entre eux, ont été embarqués dans des outils plus ou moins élaborés allant de la balance de pesée au
déf ibrillateur/resynchronisateur.

L’accélérométrie cardiaque (PEA pour peak endocardial acceleration, SORIN) est susceptible de détecter
une diminution de la contractilité myocardique qui précède une décompensation cardiaque. La baisse de
l’impédance pulmonaire est un ref let de l’accumulation d’eau intrathoracique. De f açon élégante, la mesure
de l’impédance par le déf ibrillateur/resynchronisateur (OptiVol, MEDT RONIC) a permis de détecter des
épisodes d’insuf f isance cardiaque avant que ceux-ci ne deviennent cliniquement bruyants. C’est ainsi que
ces paramètres permettent d’anticiper un épisode d’ICA de 6-12 jours pour la dyspnée, 7-11 jours pour la
surveillance du poids, 15 jours pour l’impédance, 16 jours pour la variabilité de la f réquence cardiaque ou
encore 4-7 jours pour l’hémodynamique (pression pulmonaire et ventriculaire droite).
L’accélérométrie cardiaque est susceptible de détecter une diminution de la contractilité
myocardique qui précède une décompensation cardiaque.

Difficultés et perspectives d’une anticipation de l’insuffisance cardiaque aiguë

COMPASS-HF est la première étude randomisée à évaluer le dépistage précoce d’un épisode d’ICA. Cent
trente-quatre patients monitorés par le système Chronicle (impédance) ont été comparés à 140 contrôles.
Au terme de l’étude, le critère principal d’hospitalisation pour insuf f isance cardiaque et de recours à un
traitement intraveineux a été non signif icativement réduit chez les patients monitorés. Issu d’une analyse
uniparamétrique, ce travail a permis d’appréhender les problèmes de sensibilité et de spécif icité des
systèmes de détection. Si la sensibilité de 76 % est acceptable, la spécif icité est l’écueil principal avec un
taux de f ausse alarme de 1,9 %/patient/an, 88 % de dépassement de seuil non lié à un problème cardiaque
entraînant parf ois des réajustements thérapeutiques excessif s, au point d’aggraver l’insuf f isance rénale.

Les perspectives d’anticipation des ICA et des hospitalisations sont une meilleure sensibilité et spécif icité
des paramètres de monitorage qu’ils soient précipitants (arythmie, ischémie, inf ection, etc.) ou résultants
(rétention hydrosodée, élévation des pressions, etc.).

Concernant les f acteurs précipitants, le registre OFICA nous indique que l’inf ection, présente dans un quart
des décompensations cardiaques, ne doit pas être négligée.

D’autres registres nous indiquent que la rétention hydrosodée manque de sensibilité. L’approche
multiparamétrique est sans doute la meilleure en combinant de nombreux f acteurs mixtes de sensibilité et
de spécif icité variables.

L’étude PART NERS HF


Cette étude a porté sur 694 patients porteurs d’un déf ibrillateur/resynchronisateur, suivis pendant 1 an.
Huit paramètres (nombre de chocs, durée de resynchronisation, variabilité du rythme cardiaque, f réquence
cardiaque nocturne, activité du patient, f ibrillation auriculaire, cadence ventriculaire en f ibrillation atriale et
indice de f luide) ont été intégrés dans un algorithme et conf rontés au taux d’hospitalisations dans le mois
qui suivait. Le risque d’hospitalisation était multiplié par 5,5 lorsqu’au moins 2 paramètres étaient détériorés
(ou 1 seul paramètre de f luide très élevé). Dans moins de 1 % des cas, l’algorithme n’a pas pu anticiper une
hospitalisation.

En pratique

• La physiopathologie de la décompensation cardiaque aiguë est complexe et mal connue. Toutef ois, les
mécanismes physio-pathologiques de la décompensation devraient permettre une anticipation des
hospitalisations.

• La détection précoce doit inclure un ou des f acteurs de précipitations et ou/des conséquences telle que la
rétention hydrosodée. En raison du manque de sensibilité, l’approche multiparamétrique est indispensable.

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