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Matière: Nutrition et Pathologies Responsable de la matière : Dr. REGGAMI.

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CHAPITRE I : Maladies métaboliques
SOUS-CHAPITRE 4 : Métabolisme des lipides

Introduction
Les lipides ou « graisses » regroupent des molécules très diverses ayant en commun leur hydrophobie. Ils se
trouvent dans les membranes cellulaires qui séparent les compartiments hydriques intra- et extracellulaires, ou à
l'intérieur des adipocytes dans des vacuoles délimitées par des membranes où ils constituent l'essentiel des réserves
énergétiques de l'organisme. Ils sont constitués d'acides gras à chaîne carbonée plus ou moins longue dont
l'estérification des fonctions alcool permet de synthétiser des lipides de composition variée : le glycérol est à la base des
glycérides, la sphingosine des sphingolipides, le cholestérol des stéroïdes, etc.

1. Classification des lipides


Les acides gras (AG) sont composés de chaînes linéaires de 4 à 24 carbones (C) avec une fonction acide
organique à une extrémité. Ils sont classés en AG à chaîne courte (< 8 C), moyenne (8 à 14 C) et longue, et en
AG saturés ou insaturés selon le nombre de doubles liaisons entre les carbones (fig.1). Les AGMIS possèdent
une double liaison (ex.: acide palmitoléique C16:1 ou oléique C18:1). Les AGPIS, dont la plupart sont synthétisés
à partir d'AG dits essentiels apportés par l'alimentation, appartiennent soit à la famille de l'acide linoléique
dont la première double liaison se situe à 6 carbones du radical méthyl-terminal (AG n-6 ou oméga 6), soit à la
famille de l'acide -linolénique (AG n-3 ou oméga 3). Les AG sont les unités de base de la synthèse lipidique et,
notamment, des graisses de réserve. Les AG estérifient le glycérol pour former des mono-, di- ou triglycérides.
Les triglycérides (TG) sont les molécules de réserve énergétique du tissu adipeux (TA). Leur synthèse se fait
majoritairement dans le TA et un peu dans le foie (fig.2).

Figure.1 Formule des acides gras : chaîne carbonée terminée par un Figure.2 Représentation d'un triglycéride :
groupe méthyl à partir duquel se fait la numérotation des carbones, un radical glycérol sur lequel sont
sans (en haut) ou avec double liaison (en bas). branchés trois AG.

Les phospholipides sont des lipides membranaires qui ont la particularité d'être amphiphiles. Ce sont soit des
glycérophospholipides qui sont des diglycérides dont le 3e radical hydroxyle est estérifié par l'acide
phosphorique, soit des sphingomyélines où le glycérol est remplacé par la sphingosine qui possède une chaîne
grasse très longue (fig.3). Les phospholipides membranaires sont renouvelés en permanence, la composition en
AG de la membrane assurant une fluidité essentielle aux échanges transmembranaires des protéines.
Le cholestérol appartient à la famille des stérols. Il est présent sous une forme estérifiée dans la plupart des
tissus et, notamment, dans le cerveau. C'est également un composant des membranes dont il assure la rigidité.
C'est le précurseur des hormones stéroïdes et de diverses protéines. Il est d'origine alimentaire et endogène
par une synthèse principalement hépatique.
Les lipoprotéines (LP) forment un système macromoléculaire de transport dans le secteur vasculaire dont le
centre est composé de lipides hydrophobes – triglycérides et cholestérol –, et la périphérie d'une couche de
phospholipides amphipathiques et d'apoprotéines hydrophiles (fig.4). Elles assurent le transport des molécules
lipidiques et leur exposition aux enzymes contenues dans l'endothélium vasculaire.

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Figure.3 Structure des phospholipides. Figure.4 Représentation schématique de l'édifice


d'une lipoprotéine.
2. Fonction des lipides
2.1. Stockage énergétique
Les TG constituent l'essentiel des réserves énergétiques de l'organisme : plus de 10 kg chez un adulte, soit
100 000 kcal localisées principalement dans le tissu adipeux (TA). L'hydrolyse des TG fournit des AG véhiculés
par l'albumine qui sont utilisables pour la synthèse d'ATP par tous les tissus non strictement glucodépendants.
La synthèse de l'ATP se fait dans les mitochondries par la voie de la phosphorylation oxydative par
l'intermédiaire d'une bêta-oxydation. La mobilisation des AG à partir du TA est contrôlée par le glucagon et les
catécholamines qui la stimulent, et par l'insuline qui l'inhibe.
2.2. Déterminants de l'architecture et des fonctions membranaires
La double couche de phospholipides et de protéines composant la membrane cellulaire est un des
éléments variables qui modulent les propriétés des membranes. La néosynthèse des phospolipides est à la
base de l'homéostasie cellulaire. La mise en jeu de phospholipases avec un mécanisme de désacétylation-
réacétylation assure une composition fonctionnelle optimale des membranes. Les phospholipides dont la
nature est remodelée en fonction des apports alimentaires en AG, notamment en fonction de la part des
oméga 6 et des oméga 3, participent aux mouvements trans- et intramembranaires, contribuent à l'identité
antigénique cellulaire et favorisent la formation de vésicules de transport. La fluidité membranaire est
proportionnelle au degré d'insaturation, la rigidité est liée à la teneur en sphingomyéline alors que le
cholestérol joue un rôle tampon et d'équilibre entre fluidité et rigidité.
2.3. Médiateurs
Les lipides ont un rôle de médiateur et agissent comme des molécules d'information à l'intérieur même de
la cellule où ils naissent, et autour d'elle sur un mode paracrine et endocrine. Ils activent de nombreuses voies
de signalisation cellulaire et modulent directement ou indirectement de nombreux gènes. Ainsi, les
eicosanoïdes, dérivés de l'acide arachidonique sous l'effet d'une lipo-oxygénase et d'une cyclo-oxygénase,
sont à l'origine de prostacyclines, de leucotriènes et de thromboxanes qui interviennent sur les voies de
l'inflammation et de la thrombose. Les stérols sont à l'origine des hormones stéroïdes surrénaliennes,
gonadiques et de la vitamine D. Ces médiateurs agissent par l'intermédiaire de récepteurs spécifiques.

3. Absorption des lipides


Les lipides alimentaires qui sont principalement des TG sont brassés dans le chyme avant de parvenir dans le
duodénum où ils sont émulsifiés par les sels biliaires et hydrolysés par les enzymes pancréatiques. Le cholestérol

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estérifié alimentaire devenu libre sous l'action d'estérases est absorbé de façon active avec un seuil maximum de l'ordre
de 800 mg/j ; son absorption entre en compétition avec celle des stérols d'origine végétale. Les produits de la digestion
– monoglycérides, AG, cholestérol, phospholipides – sont absorbés par les entérocytes où ils sont synthétisés en TG et
en phospholipides. Le cholestérol estérifié est en partie réexcrété dans la lumière intestinale.
Les chylomicrons produits par les entérocytes, dont le cœur est constitué par des TG et un peu d'esters de
cholestérol, et dont la couche périphérique contient des phospholipides, du cholestérol libre et des apoprotéines (apoB-
48), sont de grosses molécules drainées par les lymphatiques avant d'être déversés dans le sang veineux. Les
chylomicrons sont hydrolysés par une lipoprotéine lipase (LPL), ce qui libère des AG utilisés comme substrat énergétique
par les cellulaires musculaires et pour la synthèse des TG par les cellules adipeuses. Les lipPliporésidus de chylomicrons
enrichis en cholestérol et en apoB48 sont captés par le foie où ils sont dégradés. Les AG y sont utilisés pour
resynthétiser des lipoprotéines (LP) de type VLDL qui sont le véhicule des TG dans le sang. La dégradation des VLDL est
identique à celle des chylomicrons et aboutit à la formation de LP enrichies en cholestérol, les LDL.

4. Métabolisme des lipides


4.1. Métabolisme des AG
La plupart des tissus sont capables de synthétiser des AGS à partir des sucres ou des acides aminés ainsi
que des AGMIS à partir des AGS en raison de la présence de désaturases. En revanche, les AGPIS doivent être
apportés de façon exogène d'où leur nom d'AG essentiels. La conversion des AGPIS alimentaires « chefs de file
» que sont l'acide linoléique (famille des oméga 6) et l'acide linolénique (oméga 3) par une cascade
enzymatique utilisant les mêmes enzymes qui sont en compétition de substrat – la lipoxygénase et la cyclo-
oxygénase– produit des AG « fonctionnels » de façon inégale selon les tissus, d'où l'importance de l'apport
alimentaire en EPA (acide éicosapentanoïque). Les AG et leurs dérivés, les corps cétoniques, jouent aussi un
rôle considérable dans l'homéostasie énergétique en proposant une alternative au glucose en cas de pénurie
glucidique de façon à épargner le capital protéique.
4.2. Oxydation des AG
L'oxydation mitochondriale de l'acétyl-CoA issu de la bêtaoxydation des AG dits « libres » fournit de l'ATP
par leur intégration dans le cycle tricarboxylique de Krebs après une activation préalable sous forme d'acyl-
CoA et intervention d'un système complexe de transport dans la mitochondrie.
Les peroxysomes assurent le catabolisme de certains AG à longue chaîne par un système d'oxydation
distinct.
Dans le foie, l'acyl-CoA sert de surcroît à la synthèse des corps cétoniques (acéto-acétate et -hydroxy-
butyrate) qui se comportent comme des substrats énergétiques alternatifs au glucose pour les organes
glucodépendants (cerveau). L'activation en acyl-CoA se fait dans la mitochondrie où l'acétyl-CoA pénètre par
l'intermédiaire de la carnithyl-palmitoyl transférase et d'une translocase modulées par l'insuline. L'oxydation
des AG s'accroît lorsque la lipogenèse et l'insulinémie diminuent. Elle fournit l'énergie nécessaire pour la
néoglucogenèse et la cétogenèse.
Dans le muscle, il n'y a pas de cétogenèse. Les AG sont totalement oxydés grâce à l'AMP kinase qui stimule
les voies de production énergétique. La leptine et l'adipokine ainsi que l'exercice musculaire activent l'AMPK et
améliorent, indirectement, la sensibilité à l'insuline des tissus en diminuant l'accumulation intracellulaire des
AG.
4.3. Lipogenèse
La lipogenèse à partir des AG est essentiellement hépatique et intra-adipocytaire. Elle a pour but de stocker
en temps réel les excédents glucidiques. L'arrivée du glucose lors du repas déclenche la lipogenèse par
l'expression de plusieurs gènes stimulés par l'insuline (et le glucose) aboutissant à la formation d'acétate activé
en malonyl-CoA qui produit de l'acide palmitique. Le palmitoyl-CoA est utilisé pour la synthèse des lipides par
un mécanisme d'interconversion par des procédés d'élongation, de désaturation ou de rétroconversion par
des enzymes spécifiques.

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L'acide pyruvique issu de la glycolyse est transformé dans les mitochondries en acétyl-CoA puis retourne
dans le cytoplasme où il est carboxylé en malonyl-CoA puis polymérisé en acyl-CoA. Ce composé est soit
orienté vers la lipogenèse lorsque le capital d'ATP est suffisant, soit réintroduit dans les mitochondries pour
poursuivre les étapes d'oxydation du cycle de Krebs et fournir de l'ATP, lorsque le capital d'ATP est insuffisant
(fig.5). La lipogenèse hépatique est maximale lorsque le régime est riche en glucides et aboutit à la
constitution d'un « foie gras ». Le glucagon inhibe la lipogenèse en modifiant l'état de phosphorylation des
enzymes spécifiques en élevant le taux d'AMPc. Il en est ainsi en cas de jeûne. Le rapport insuline/glucagon est
le paramètre essentiel de la régulation à court terme et à long terme de la lipogenèse.
La lipogenèse dans le tissu adipeux est comparable, à la différence près qu'elle est moins sensible au
glucagon et plus sensible aux catécholamines.
4.4. Lipolyse
La libération des AG par hydrolyse des TG de réserve sous l'effet d'une lipase hormono-sensible survient en
cas de diminution des apports énergétiques (jeûne court ou long) ou d'augmentation des besoins (activité
physique prolongée). La mobilisation des AG permet leur mise à disposition à des fins énergétiques pour les
tissus à potentiel oxydatif comme le muscle (fig.6). Elle est stimulée par le glucagon et les catécholamines et
inhibée par l'insuline qui est une véritable hormone antilipolytique.

Figure.6 La voie de la lipopyse. Figure.5 Les étapes de la lipogenèse.

5. Métabolisme du cholestérol
Précurseur des hormones stéroïdes et constituant des membranes, le cholestérol véhiculé par les LP est peu stocké.
Son pool représente néanmoins une centaine de grammes répartis entre les membranes et les vacuoles lipidiques sous
forme d'esters de cholestérol. L'accumulation de cholestérol dans la paroi artérielle est à l'origine de l'athérosclérose.
L'estérification est due à l'activité de l'acétyl-CoA cholestérol acyltransférase (ACAT) qui a pour substrat le cholestérol
des membranes des organelles intracytoplasmiques.
La synthèse du cholestérol est surtout effectuée dans les hépatocytes et les entérocytes mais est possible dans
toutes les cellules. L'acétyl-CoA et accessoirement les corps cétoniques sont transformés en cholestérol après une
cascade de réactions enzymatiques. L'HMG-CoA synthétase dont l'expression est sous le contrôle de la teneur
intracellulaire en cholestérol joue un rôle régulateur important visant à assurer l'homéostasie du cholestérol
intracellulaire. Celui-ci provient d'une part du captage du cholestérol plasmatique contenu dans les LP LDL qui se fixent
sur un récepteur membranaire spécifique, d'autre part de la synthèse endogène. Seules les cellules hépatiques sont
capables d'assurer le catabolisme du cholestérol, d'où la nécessité d'un système de retour du cholestérol vers le foie par
l'intermédiaire des LP HDL. Le cholestérol est ensuite éliminé dans la lumière intestinale après solubilisation ou sous la
forme de sels biliaires au terme d'une transformation comportant 15 étapes successives.

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6. Métabolisme des lipoprotéines


L'absorption et le transport des lipides vers les lieux de stockage et de transformation sont assurés par un système
complexe de transporteurs interconnectés, les LP, dont le métabolisme comporte trois voies principales :
la voie exogène : permet le transfert des lipides alimentaires vers le foie par l'intermédiaire des chylomicrons
qui contiennent l'apoprotéine 48 et l'apoC-II, cofacteur de la liporotéine lipase (LPL) qui hydrolyse les
chylomicrons dans le compartiment vasculaire et libère des AG libres. Les anomalies de la LPL se traduisent par
une accumulation de chylomicrons riches en TG ;
la voie endogène : elle répartit les TG et le cholestérol du foie vers l'ensemble des tissus par l'intermédiaire des
VLDL et des LDL. L'apoB-100 qui en est la charpente, est reconnue par les récepteurs membranaires qui
permettent l'internalisation du cholestérol dans les cellules par un mécanisme d'endocytose. Les apoC et E,
abondantes, sont échangeables. La lipase hépatique ou triglycéride lipase hépatique hydrolyse les glycérides des
VLDL et IDL qu'elle transforme en LDL plus concentrées en cholestérol, achève l'hydrolyse des lipoprotéines
légères et prépare le captage des LDL par leur récepteur ;
la voie de retour ou voie inverse : elle permet au cholestérol en excès dans les tissus de revenir vers le foie qui
l'excrète, par l'intermédiaire des LP HDL. L'efflux de cholestérol des cellules dépend d'une interaction entre
l'ApoA-I du HDL et les récepteurs membranaires et, surtout, de la lécithine cholestérol acyltransférase (LCAT).
Cette enzyme plasmatique hydrolyse les lécithines des LP et produit des esters de cholestérol. Elle catalyse
l'estérification du cholestérol, ce qui le rend apolaire et lui permet de s'accumuler à l'intérieur des particules
HDL naissantes qui deviennent sphériques. Elle agit sur les LP HDL qui ont capté le cholestérol des membranes
périphériques. Le HDL enrichi en ester de cholestérol à l'issue de l'action de la LCAT conduit le cholestérol vers le
foie (fig.7).

Figure.7 Le métabolisme des lipoprotéines. CL : Cholestérol libre, CE : Cholestérol estérifié, TG : Triglycérides.

La synthèse des LP se fait dans le réticulum endoplasmique. Elle consiste à assembler des apoprotéines de nature et de
fonction variées qui déterminent la structure des LP avec des TG, des phospholipides et du cholestérol. L'apoB, protéine
de grande taille, est la véritable charpente des chylomicrons et des VLDL.
Le catabolisme des LP est dominé par une hydrolyse catalysée par la LPL activée par l'apoC-II qui libère des AG et des
monoglycérides. L'appauvrissement des LP en TG génère des LP denses et plus riches en cholestérol. Les LP peuvent être
captées par des récepteurs membranaires plus ou moins spécifiques : le récepteur des LDL assure l'endocytose des
résidus de chylomicrons et de VLDL par une interaction spécifique avec l'apoB-100. Un autre type de récepteur porté
par les macrophages est capable de capter les LDL oxydées ou modifiées (glycation, acétylation) qui sont accumulées
dans le cytoplasme de ces macrophages qui se transforment en cellules spumeuses à l'origine de la lésion initiale
d'athérosclérose.

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