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 13-000-R-60

Hémoglobines : structure et fonction


H. Wajcman

La superfamille des globines est apparue il y a environ 3 milliards d’années à partir d’un ancêtre commun
déjà présent dans les protéines indispensables à la vie de LUCA (last universal common ancestor).
Les globines sont observées dans les trois règnes du monde vivant. Le caractère commun à toutes ces
molécules, affirmant leur appartenance à cette famille, est une structure tridimensionnelle caractéristique
(globin fold), détaillée dans cet article. Chez tous les vertébrés, l’hémoglobine contenue dans les globules
rouges est un hétérotétramère constitué de deux types de sous-unités, formées chacune par le repliement
de huit hélices autour d’une molécule d’hème. La fixation réversible d’oxygène est la fonction essentielle
de cette hémoglobine. Dans cette molécule, plusieurs régions jouent des rôles fonctionnels importants :
c’est notamment le cas des résidus entourant l’hème, des zones de contact entre sous-unités et des sites
où se fixent les ligands régulateurs. Chez l’homme, plusieurs hémoglobines se succèdent au cours de la
vie, et, à tout moment, il en existe plusieurs simultanément. La fonction oxyphorique de l’hémoglobine
résulte d’un équilibre entre une forme relâchée à forte affinité pour l’oxygène et une forme contrainte
à faible affinité. Nous rappelons ici les principaux paramètres de la fonction oxyphorique et exposons
quelques modèles proposés pour la décrire. Les plus récents font jouer un rôle prépondérant aux ligands
régulateurs et à l’existence de structures intermédiaires. La mutagenèse dirigée permet aujourd’hui de
réaliser des molécules parfaitement adaptées à l’exploration des relations entre structure et fonction et
peut-être d’ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques.
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : Hémoglobine humaine ; Hème ; Structure de protéine ; Transport d’oxygène

Plan Les hémoglobines humaines appartiennent à une très ancienne


famille de molécules, apparue dans l’évolution des espèces bien
■ Introduction 1 avant la vie aérobie. Des hémoglobines sont donc présentes dans

tout le monde vivant, végétal et animal, de la bactérie à l’homme.
Structure des hémoglobines humaines 2
Les premières molécules de cette famille remontent à plus de
Différentes hémoglobines humaines 2
3 milliards d’années. C’est à partir d’un ancêtre commun, déjà
Anatomie d’une sous-unité d’hémoglobine 3
présent dans l’équipement protéique nécessaire à la vie de LUCA
Molécule d’hème 3
(last universal common ancestor), que cette famille de protéines
Tétramère hémoglobinique 4
a développé des propriétés fonctionnelles allant de la protec-
■ Fonction oxyphorique de l’hémoglobine 5 tion contre les radicaux oxydants au transport et au stockage de
Sang et transport d’oxygène : équations de base 5 l’oxygène, avec parfois des rôles totalement inattendus. Le trans-
Notion de coopérativité et modèle de Monod, Wyman, port et le stockage d’oxygène qui, a priori, sont considérés comme
Changeux/Perutz 6 les fonctions essentielles des hémoglobines, ne sont sans doute
Rôle régulateur des facteurs environnementaux 8 que des propriétés récentes, apparues chez les organismes com-
Interaction avec les phosphates organiques 8 plexes pluricellulaires [1, 2] . On parle le plus souvent de myoglobine
Interaction avec les anions inorganiques 8 pour désigner cette molécule lorsqu’elle est contenue dans une
Effet Bohr 8 cellule musculaire et de neuroglobine lorsqu’elle l’est dans une
Carboxyhémoglobine 9 cellule nerveuse. Le caractère commun à toutes ces molécules,
Hémoglobine et transport du monoxyde d’azote 9 affirmant leur appartenance à la superfamille des globines, est une
■ Mutagenèse dirigée : nouvel outil d’exploration structure tridimensionnelle constituée par six à huit hélices enrou-
de l’hémoglobine 9 lées autour de l’hème selon un même repliement caractéristique
■ Perspectives 9 (appelé globin fold dans la littérature anglo-saxonne). Chez les êtres
unicellulaires et les invertébrés les plus primitifs, le transport et la
diffusion d’oxygène sont physiologiquement bien moins impor-
tants que ne l’est la protection contre l’effet toxique des ions et
 Introduction radicaux libres produits par l’oxygène, le monoxyde de carbone
(CO) et le monoxyde d’azote (NO). Leurs hémoglobines ont, le
En 1862, le physiologiste allemand Hoppe-Seyler a créé le terme plus souvent, une affinité pour l’oxygène particulièrement forte,
« hémoglobine » pour désigner le pigment respiratoire, transpor- et de ce fait sont plus aptes à jouer un rôle dans la dépollution des
tant l’oxygène, contenu dans les globules rouges. radicaux libres actifs que dans un transport réversible d’oxygène

EMC - Hématologie 1
Volume 14 > n◦ 3 > août 2019
http://dx.doi.org/10.1016/S1155-1984(19)88362-0

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HC11.2
0,5 milliard
1,8 milliard 1,5 milliard 0,8 milliard 0,75 milliard d’années G7.0
d’années d’années d’années d’années
Cytoglobine B12.2
Divergence Chr 17
animal/végétal
Myoglobine

Gène ancestral Chr 22 ζ

G7.0 α-globines
α2
E? Chr 16
α1
G7.0
B12.2 Hémoglobines ε
B12.2

G7.0

β-globines
Hémoglobine des Aγ
B12.2
micro-organismes
Chr 11 δ
β

Neuroglobine

G7.0
Chr 14 E15.0
B12.2

Figure 1. Histoire de l’hémoglobine (Hb) humaine. Les hémoglobines ancestrales sont apparues il y a 1,8 milliard d’années, soit 0,5 milliard d’années après
les algues bleues. Dans les gènes de ces hémoglobines, les limites entre exons et introns occupent déjà les positions qu’elles ont actuellement. La divergence
entre myoglobine et hémoglobines remonte à 750 millions d’années et la séparation entre chaînes ␣ et ␤ à 500 millions d’années. Chez tous les vertébrés,
à l’exception des poissons agnathes, témoins des espèces les plus anciennes, l’hémoglobine est donc sous forme de tétramère hétérologue. Les duplications
qui ont conduit aux diverses chaînes de types ␣ et ␤ sont bien plus récentes, remontant à environ 50 millions d’années.

moléculaire. L’histoire de la molécule d’hémoglobine est résumée interactives [5] qui viennent compléter les classiques descriptions
dans la Figure 1. On peut noter que les limites entre exons et trouvées dans les atlas de structures protéiques [6, 7] . L’épopée de
introns des gènes d’hémoglobines se situent aux mêmes positions la découverte de la structure de l’hémoglobine est remarquable-
depuis la divergence entre monde animal et végétal. ment narrée dans les récits écrits par trois des partenaires de cette
La molécule d’hémoglobine, formée d’un hétérotétramère, telle aventure [8–10] . Dans cet article, nous utilisons la nomenclature
qu’elle est présente chez tous les vertébrés, provient d’une dupli- historique des molécules d’hémoglobines, qui diffère de celle pré-
cation remontant à environ 750 millions d’années. Elle a donné conisée par la Human Genome Variation Society (HGVS) : la
naissance d’une part à la myoglobine, structure monomérique, position 1 correspond au résidu présent en début de chaîne et
spécialisée dans le stockage d’oxygène à l’intérieur des organes, non à celui de la méthionine initiatrice, éliminée de la protéine
à proximité de son lieu de consommation, et d’autre part à mature et désignée comme .p1.
l’hémoglobine proprement dite, spécialisée dans le transport
d’oxygène de la périphérie vers les tissus.
Différentes hémoglobines humaines
 Structure des hémoglobines Plusieurs hémoglobines se succèdent au cours de la vie, et, à tout
moment, il en existe plusieurs simultanément. Ces hémoglobines
humaines se distinguent par la nature des sous-unités qui les constituent.
Chez l’homme, au cours de l’évolution ontogénique, le profil des
Autour des années 1960, John Kendrew et al. [3] et Max Perutz hémoglobines change deux fois. La première de ces commutations
et al. [4] ont élucidé, par diffraction de rayons X, la structure spa- (ou switch) coïncide avec le passage de la vie embryonnaire à la
tiale de la myoglobine et de l’hémoglobine. Ces résultats ont été vie fœtale, la seconde avec celui de la vie fœtale à la vie adulte.
obtenus avant même que l’on ne connaisse la structure primaire Durant la vie embryonnaire, deux chaînes de la famille ␣
de ces molécules. Kendrew a montré que la structure spatiale de coexistent : ␨, qui apparaît la première, puis ␣. Elles sont codées
la myoglobine du muscle de cachalot consistait dans le replie- respectivement par les locus HBZ, HBA1 et HBA2 (HUGO Gene
ment d’une chaîne polypeptidique, appelée globine, autour d’un Nomenclature Committee [HGNC]). De même, il existe deux
groupement prosthétique, l’hème, pris en « sandwich » dans les chaînes de type ␤ : ␧, spécifique de cette période initiale de la
repliements de la protéine (Fig. 2A). L’hémoglobine de cheval, vie, et les chaînes ␥ (ou fœtales), codées respectivement par les
alors étudiée par Perutz à plus faible résolution que la myoglo- locus HBE1, HBG1 et HBG2. Ces diverses sous-unités permettent
bine, s’avéra être un tétramère hétérologue constitué de deux de réaliser les trois hémoglobines de l’embryon, l’hémoglobine
types de chaînes de globine, dont l’aspect était identique à celui Gower 1 (␨2 ␧2 ), l’hémoglobine Gower 2 (␣2 ␧2 ) et l’hémoglobine
de la myoglobine (Fig. 2B). Ces chaînes sont de tailles légère- Portland (␨2 ␥2 ) [11, 12] . L’hémoglobine fœtale (HbF) de structure
ment différentes, la plus courte est appelée ␣ et la plus longue ␤. ␣2 ␥2 est détectable à partir de la 5e semaine de vie intra-utérine.
Aujourd’hui, les coordonnées cristallographiques de ces molécules Parallèlement à cette modification de la nature des sous-unités de
sont disponibles, avec une résolution de l’ordre de 2 Å, auprès de globine, le lieu où s’effectue l’érythropoïèse change : sac vitellin
la Protein Data Bank (www.rcsb.org), et plusieurs logiciels publics dans la vie embryonnaire, puis foie et rate dans la vie fœtale, et
permettent d’en donner des représentations tridimensionnelles enfin moelle osseuse chez l’adulte [13] .

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C-term.
HisF8
(proximale)
Phe CD1 α2 α1
C
H His E7
F (distale)

E D

G
N-term.

Myoglobine A β2 β1 B
Figure 2.
A. Représentation tridimensionnelle de la myoglobine de cachalot. La protéine est formée par le repliement de huit hélices (désignées de A à H de l’extrémité
N- vers l’extrémité C-terminale). Les seuls résidus constants dans toutes les familles de globines sont l’histidine proximale F8 et la phénylalanine CD1.
B. Représentation tridimensionnelle d’un tétramère d’hémoglobine. Chacune des sous-unités a une structure spatiale très proche de celle de la myoglobine.

L’HbF est donc le constituant principal de la période fœtale. Sa Tableau 1.


synthèse débute dès les stades précoces de la gestation et s’élève, Résidus les mieux conservés au cours de l’évolution des chaînes de globine.
entre les 8e et 10e semaines, à un taux de 90 %. Peu avant la nais- Résidus hydrophobes assurant un A8, A11, A12, A15, B6, B9, B10,
sance, entre les 32e et 36e semaines de gestation, les chaînes ␥ contact entre hélices B13, B14, C4, E4, E7, E8, E11, E12,
sont progressivement remplacées par les chaînes ␤ de l’adulte. La E15, E18, E19, F1, F4, G5, G8,
sous-unité ␥ est elle-même un mélange de deux espèces molécu- G11, G12, G13, G15, G16, H7,
laires très voisines, produits de deux gènes distincts. Les structures H8, H11, H12, H15, H19
primaires des chaînes ␤ et ␥ diffèrent en une quarantaine de posi- Résidus interhélicoïdaux CD1, CD4, FG4
tions. Les deux chaînes, A ␥ et G ␥, se différencient par la nature
Liaison avec l’hème His F8
du résidu en position 136, Ala dans le premier cas (codée par le
locus HBG1), Gly dans le second (codée par le locus HBG2). Leur
proportion relative évolue avec l’âge : le type G ␥, qui représente
environ 75 % de l’ensemble des chaînes ␥ à la naissance, n’en enfouie la molécule d’hème. La surface externe de la sous-unité
constitue plus que 30 % dans les traces d’HbF qui subsistent chez est tapissée par les chaînes latérales de résidus hydrophiles, faci-
l’adulte [14] . Plusieurs polymorphismes sont connus pour moduler litant les interactions avec le milieu aqueux ambiant. Les régions
le taux d’HbF chez l’adulte (par exemple XmnI, BCL 11A, HBS1L- internes sont au contraire essentiellement occupées par des rési-
MYB, etc.) [15] . L’HbF-Sardinia (A ␥T ), où une Thr remplace l’Ile dus hydrophobes qui, en échangeant entre eux un très grand
en position 75, est un polymorphisme fréquent de la chaîne A ␥ nombre de liaisons de faible énergie, stabilisent l’édifice molécu-
observé dans toutes les populations. Chez l’adulte, le constituant laire. La cavité où est enfouie la molécule d’hème a la forme d’un
majeur est l’HbA (␣2 ␤2 ) à côté duquel on trouve un constituant V dont l’ouverture est partiellement occupée par l’hélice C et le
mineur, l’HbA2 (␣2 ␦2 ). Les chaînes ␤ et ␦ sont respectivement sous segment CD ; le plancher est formé par les hélices B, G et H et les
le contrôle des locus HBB et HBD. La structure primaire de la parois par les hélices E et F. L’hème échange une soixantaine de
chaîne ␦ diffère de celle de la chaîne ␤ en dix positions. liaisons de faible énergie avec les groupements latéraux des résidus
qui l’entourent [3–7] . Les résidus des diverses chaînes de globine,
les mieux conservés au cours de l’évolution, sont récapitulés dans
Anatomie d’une sous-unité d’hémoglobine le Tableau 1.
Une même géométrie d’ensemble est retrouvée dans toutes les
hémoglobines : 75 % de la molécule est sous forme d’hélices ␣, Molécule d’hème
arrangement classique de la structure secondaire d’une protéine
où chaque tour de spire comporte un peu plus de trois rési- Par la nature et la disposition de ses groupements latéraux,
dus d’acides aminés. Chez les vertébrés, dans chaque sous-unité la molécule d’hème est définie comme étant une ferroproto-
d’hémoglobine, on distingue, en allant de l’extrémité N-terminale porphyrine de type IX. L’atome de fer situé en son centre est
vers l’extrémité C-terminale, huit segments hélicoïdaux, désignés sous forme réduite ferrique (Fe++ ), aussi bien dans l’hémoglobine
par une lettre de A à H, et des zones interhélicoïdales, portant le oxygénée (HbO2 ) et la carboxyhémoglobine (HbCO) que dans
nom des deux hélices qui leur sont adjacentes. À l’intérieur de l’hémoglobine désoxygénée (désoxy-Hb). La forme oxydée fer-
chacun de ces segments, les résidus sont numérotés d’après leur reuse (Fe+++ ) est impropre au transport de l’oxygène ; elle est
position (Fig. 2A). caractéristique de la méthémoglobine (metHb) [16] . Dans cette
Cette nomenclature est commune à toutes les hémoglobines, forme, l’atome de fer est lié sur sa face distale à un groupe
quelle que soit l’espèce à laquelle elles appartiennent. Elle permet hydroxyle. Les hémichromes sont une autre forme d’oxydation
donc de comparer la structure d’une même position à travers des où le fer ferrique est directement lié à un résidu de la face dis-
hémoglobines de différentes origines. Ainsi, le huitième résidu de tale. Cette structure est génératrice de radicaux libres dangereux
l’hélice F (F8) est toujours une His liée au fer de l’hème. Les huit pour la membrane érythrocytaire, partiellement responsables
hélices, repliées sur elles-mêmes, réalisent une structure globulaire des complications hémolytiques observées chez les patients por-
compacte avec, près de la surface, une poche hydrophobe où est teurs d’hémoglobines instables ou thalassémiques. Dans l’HbO2 ,

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Fe++ Fe++ Fe++


His E7

C O
His F8

O2

Val E11 A B C
Figure 3. Structure de l’hème. L’atome de
fer est sous forme (Fe++ ) dans la désoxy-
hémoglobine (A), l’oxyhémoglobine (B) et la
Fe+++ Fe+++
carboxyhémoglobine (HbCO) (C), et sous forme
(Fe+++ ) dans la méthémoglobine (D) et les
hémichromes (E). Des ligands différents sont
complexés au fer dans les quelques structures
représentées.

O H

D E

l’atome de fer présente six liaisons de coordinence : quatre inter- affinité, dite « R » (« relâchée »), et une forme de faible affinité,
viennent dans la structure de l’hème, la cinquième amarre l’hème dite « T » (« tendue »). Le modèle de Perutz a apporté un support
à la globine au niveau de l’His F8 (dite « histidine proximale ») expérimental à cette théorie en prouvant la réalité de ces deux
et la sixième fixe la molécule d’oxygène entre l’His E7 (dite « his- états [17, 18] .
tidine distale ») et la Val E11. Dans la désoxy-Hb, l’atome de fer, Dans la structure tétramérique, les dimères sont disposés de
plus volumineux que dans l’HbO2 , est pentacoordonné. Ces dif- façon à ce que la sous-unité ␣1 soit au contact de la sous-unité ␤2 ,
férentes formes de ligation sont représentées dans la Figure 3. Le et ␣2 de ␤1 . La disposition des chaînes est telle que des rapports
modèle stéréochimique de Perutz [17, 18] place ces modifications de très intriqués existent entre les chaînes latérales de résidus appar-
taille de l’atome de fer à l’origine des différences de la structure tenant aux sous-unités non homologues. À l’inverse, il n’existe
protéique qui accompagnent la fixation d’oxygène sur la molécule qu’un très petit nombre de contacts entre sous-unités identiques.
d’hémoglobine. Dans le tétramère d’hémoglobine humaine adulte (HbA), trois
zones de contact sont à distinguer.
Tétramère hémoglobinique Contacts entre sous-unités d’un même dimère
Chez tous les vertébrés, à l’exception de la classe primi- ␣1␤1 ou ␣2␤2
tive des poissons cyclostomes, où les chaînes sont identiques,
Cette zone relativement rigide implique essentiellement les
l’hémoglobine est un hétérotétramère constitué de deux types de
hélices G, C et H, où 34 résidus et plus d’une centaine d’atomes
sous-unités. Ainsi, chez l’homme, on distingue des sous-unités de
interagissent. Lors de la transition entre les configurations T et
type ␣, longues de 141 résidus d’acides aminés, qui ont une Arg
R, la structure spatiale de cette région n’est que peu modifiée
en position C-terminale et dont la synthèse est sous le contrôle de
mais, selon certains, elle jouerait cependant un rôle non négli-
gènes localisés sur le chromosome 16, et des sous-unités de type ␤
geable [20] . On admet en effet que lors de l’oxygénation d’un
qui possèdent 146 résidus, se terminent par une His et sont sous
tétramère désoxygéné, la première molécule d’oxygène se fixe sur
la dépendance de gènes portés par le chromosome 11. Deux sous-
une sous-unité ␣ ; cette information serait ensuite transmise à la
unités ␣ s’associent donc à deux sous-unités de type ␤ selon une
sous-unité ␤ du même dimère pour donner une espèce intermé-
symétrie tétraédrique pour former la molécule d’hémoglobine,
diaire où les sous-unités ␣1 ␤1 (ou ␣2 ␤2 ) sont oxygénées avant que
structure globulaire de 65 × 50 × 55 Å (Fig. 2B). ne s’effectue la transition T → R du tétramère [21] . Cette région,
La présence des deux types de chaînes est essentielle pour dans la chaîne ␣, intervient également dans le contact avec l’alpha
assurer une oxygénation correcte des tissus. En effet, un homo- hemoglobin stabilizing protein (AHSP), protéine chaperon qui sta-
tétramère (comme l’hémoglobine H, qui est constituée de quatre bilise la chaîne ␣ immédiatement après sa synthèse et aide à sa
sous-unités ␤, rencontrée dans certaines formes d’␣-thalassémies) fixation sur la chaîne ␤ partenaire [22, 23] .
fixe l’oxygène avec une très forte affinité mais est incapable de le
libérer efficacement. Contacts entre chaînes non homologues de deux
À la concentration intraérythrocytaire (5 mM), l’hémoglobine
est essentiellement sous forme de tétramères. En solutions diluées,
dimères différents (␣1␤2 ou ␣2␤1)
ces tétramères se dissocient d’abord en dimères désignés ␣1 ␤1 et Cette zone de contact implique essentiellement des résidus des
␣2 ␤2 , puis en monomères. hélices C, G et du segment FG et comporte deux régions distinctes.
Selon la théorie allostérique, formulée par Monod, Wyman et La première, appelée « région charnière », concerne l’angle ␣FG
Changeux en 1965 [19] , à chaque pression partielle d’oxygène et l’hélice ␤C ; elle est centrée autour de la liaison entre l’Asp
(pO2 ), l’hémoglobine serait en équilibre entre une forme de forte ␣94 (G1) et le Trp ␤37 (C3), pivot du mouvement de rotation et

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Figure 4. Liaisons stabilisant la structure


Asp 94 His 146 contrainte (T) de l’hémoglobine A. Interface
␣1␤2.
Zone de commutation

Asp 99

Tyr 42
β2
α1
Trp 37
Asp 94
Pro 36
Val 34
Zone charnière
Asp 126
Arg 141

α2
Lys 127

de glissement de ces sous-unités lors de la transition T → R. La


deuxième région, dite de « commutation » (switch region), se situe
 Fonction oxyphorique
autour de l’Asp ␤99 (G1) qui, dans la structure T, est liée par une de l’hémoglobine
liaison hydrogène à la Tyr ␣42 (C7). Les résidus en contact ne sont
pas les mêmes dans l’une ou dans l’autre des configurations. Les Les globules rouges, constitués pour 33 % de leur poids par
principaux contacts qui stabilisent la structure T sont visibles sur l’hémoglobine, sont à l’origine du pouvoir oxyphorique au sang.
la Figure 4. Des modifications de structure dans cette région sont Ainsi chez l’homme, avec un taux normal de 14 à 15 g/dl
souvent à l’origine d’altérations de la fonction oxyphorique. d’hémoglobine, la capacité de transport de 1 dl de sang est
d’environ 20 ml d’oxygène. Ce même volume de plasma ne peut
transporter sous forme dissoute que 0,5 ml d’oxygène. Il est impé-
Contacts entre chaînes homologues ratif de pouvoir libérer facilement une fraction importante de
Les deux chaînes ␤ sont séparées par une interface appelée cet oxygène au niveau des tissus pour créer un gradient de pO2
« cavité centrale », tapissée de résidus positivement chargés. Dans suffisant entre le sang artériel et la mitochondrie, lieu où il sera
la forme T, une molécule de 2,3-diphosphoglycérate (2,3-DPG) s’y finalement utilisé par le métabolisme cellulaire.
insère pour former un clamp électrostatique entre les deux chaînes En pratique, la quantité d’oxygène libérée (l/min) par le sang
␤. Il a été montré, par diffraction de rayons X, que sept liaisons (VO2 ) est donnée par la loi de Fick, où interviennent le volume
ioniques s’établissent entre les groupements négativement char- d’oxygène fixé par chaque gramme d’hémoglobine (0,136 ml),
gés du 2,3-DPG et les groupements positivement chargés de la le débit cardiaque (Q), le taux d’hémoglobine et la différence de
protéine. Ces liaisons impliquent les groupements NH2 terminaux saturation artérioveineuse en oxygène :
des deux chaînes ␤ (NA1), les deux His ␤2 (NA2), les deux His ␤143 VO2 = 0,136 × Q × Hb (SaO2 – SvO2 )
(H21) et une des Lys ␤82 (EF6) (Fig. 5). Dans les chaînes ␥, une Ser,
au lieu d’une His, occupe la position 143 (H21), ce qui expliquerait
une plus faible affinité du 2,3-DPG pour l’HbF. Sang et transport d’oxygène : équations
Dans la désoxy-Hb, des interactions électrostatiques faisant de base
intervenir l’ion Cl− s’établissent également entre l’extrémité C-
terminale d’une chaîne ␣ et l’extrémité N-terminale de l’autre. Le transport d’oxygène par le sang intéresse les physiolo-
La structure des hémoglobines, en rapport avec leur fonction, gistes depuis la fin du XIXe siècle. En 1904, Bohr a publié les
a été récemment largement discutée dans une excellente revue premières courbes de dissociation de l’oxygène [25] . Leur forme
générale particulièrement complète [24] . sigmoïde indique que l’oxygène se fixe mieux sur un globule
rouge déjà bien oxygéné que sur un globule largement désoxy-
géné. Inversement, il s’en libère d’autant plus facilement que
le globule est peu oxygéné. Ce phénomène témoigne d’une
“ Point fort fixation coopérative : l’oxygénation d’une sous-unité du tétra-
mère a pour conséquence d’augmenter l’affinité pour l’oxygène
des autres sous-unités encore désoxygénées, indiquant une
Les chaînes d’hémoglobine sont toutes construites selon interaction entre les quatre molécules d’hème. Une fixation indé-
le schéma directeur du globin fold : sept à huit régions pendante d’oxygène sur chacune des sous-unités se manifesterait
à l’inverse par une courbe hyperbolique, comme dans le cas de la
hélicoïdales repliées autour d’une molécule d’hème. Les
myoglobine.
hémoglobines normales sont des hétérotétramères formés L’affinité pour l’oxygène, un des paramètres essentiels à la
de deux chaînes de type ␣ et de deux chaînes de type ␤. description de la fonction oxyphorique, peut être mesurée à par-
Le transport d’oxygène nécessite que le fer de l’hème soit tir de ces courbes (Fig. 6A). Elle est définie par la pression de
sous forme réduite (Fe + +). demi-saturation (ou p50 ) : pression partielle en oxygène d’un
mélange contenant 50 % de formes oxygénées et 50 % de formes

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Figure 5. Résidus impliqués dans la fixation du


2,3-diphosphoglycérate sur la structure désoxy-
génée de l’hémoglobine A.

His 143 His 2

Val 1

β1
Lys 82 β2

Val 1 Lys 82

His 143
His 2

désoxygénées. Cette grandeur dépend à la fois de propriétés appelée coefficient d’interaction, ou coefficient de Hill, fournit
inhérentes à la structure de l’hémoglobine et des conditions envi- une mesure pratique de la coopérativité. Dans le cas de l’HbA,
ronnementales. Ainsi, à travers la série animale, pour répondre n50 , mesuré au niveau de la p50 , a une valeur comprise entre 2,6
aux besoins de niches écologiques variées, les diverses espèces ont et 3,0. Une courbe en « cloche », appelée profil de coopérativité,
des affinités ou des mécanismes de régulation différents [26] . Les montre la variation de n en fonction de la saturation en oxygène
espèces vivant en altitude, comme les lamas, ou dans des galeries (Fig. 6C). Les points où les asymptotes de la représentation de Hill
souterraines en atmosphère confinée, comme les taupes, ont une croisent l’axe de log pO2 permettent, par ailleurs, de déterminer
hémoglobine à plus forte affinité pour l’oxygène que les espèces les constantes d’association de l’état non ligandé (KT ) et ligandé
vivant en surface au niveau de la mer. (KR ).
En 1910, pour expliquer le phénomène de coopérativité, Hill En 1925, Adair [27] , après avoir montré par des expériences de
a émis l’hypothèse d’une association réversible des sous-unités mesure de pression osmotique que l’HbA est un tétramère, a pro-
d’hémoglobine et a proposé une équation pour décrire la courbe posé un modèle descriptif mathématique encore largement utilisé
de dissociation de l’oxygène. Bien que non valide dans les parties aujourd’hui. Ce modèle s’applique à une molécule qui aurait
extrêmes de la courbe, cette équation reste encore aujourd’hui quatre sites indépendants de fixation pour l’oxygène. Il fait appel
pratique pour mesurer la coopérativité. On admet que la liaison à des coefficients macroscopiques globaux (Ai ) ou à des coeffi-
de l’oxygène à l’hémoglobine s’effectue selon la réaction : cients microscopiques spécifiques à chaque étape d’oxygénation
Hb + nO2 → Hb(O2 )n (Ki ). Selon que l’on utilise l’un ou l’autre de ces systèmes de coef-
La constante d’association de cette réaction (Ka ) est définie ficients, la saturation en oxygène (Y), à une pO2 de valeur x, peut
comme étant : s’écrire :  
[HbO2 ] A1 x + 2A2 x2 + 3A3 x3 + 4A4 x4
Ka = Y=
[Hb] [O2 ]n 4 (1 + A1 x + A2 x2 + A3 x3 + A4 x4 )
et la fraction saturée en oxygène : ou encore :
Ka pOn2 K1 x + 2K1 K2 x2 + 3K1 K2 K3 x3 + 4K1 K2 K3 K4 x4
Y= Y=
1+Ka pOn2 4 (1 + K1 x + K1 K2 x2 + K1 K2 K3 x3 + K1 K2 K3 K4 x4 )
L’intérêt de ces équations est de permettre de modéliser une
À partir de ces deux équations, il résulte que : courbe de dissociation pour l’oxygène à partir de valeurs (KT , KR ,
Y pOn2 P50 et n50 ) obtenues graphiquement dans la représentation de Hill.
=
1−Y Ka
ce qui permet d’écrire sous forme logarithmique (équation de
Hill) : Notion de coopérativité et modèle
Y
log = n log pO2 + Cte de Monod, Wyman, Changeux/Perutz
1−Y
Cette représentation, en doubles coordonnées logarithmiques, L’étude par Monod, Wyman et Changeux de la régulation
donne une sigmoïde située entre deux asymptotes de pente égale de l’activité de certaines enzymes a conduit à la formulation
à 1,0. En effet, à très basse pO2 et à pO2 élevée, toutes les molécules d’un modèle théorique qui porte leur nom sous forme d’initiales
tendent vers une seule même forme moléculaire, soit totalement (modèle MWC) [19] . Toutes ces enzymes sont des protéines oligo-
désoxygénée, soit totalement oxygénée (Fig. 6B). Dans sa partie mériques où la réactivité du site actif de l’une des sous-unités est
médiane, entre 10 et 90 % de saturation en oxygène, la courbe modifiée par l’état des autres en l’absence de tout contact direct
est assimilable à une droite de pente égale à n. La grandeur n, entre sites. Le fonctionnement « coopératif » des sites catalytiques

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Hémoglobines : structure et fonction  13-000-R-60

100

log [Y/(1-Y)]
2
75
log KR
1

HbO2 (%)
pente = n50
50
0
p50 = 26 ± 2 mmHg
–1 log KT
25 pO2 veineuse
pO2 artérielle –2
0 log pO2

0 20 40 80 100 120 140 180 0 1 2


pO2 mm Hg A
B

n de Hill

3 Pente = effet Bohr

1,0

log p50
2
0,5

log [Y/(1-Y)]
1
–2 –1 0 1 2 6 7 8
C pH D
Figure 6. Fonction oxyphorique de l’hémoglobine.
A. Variation de la saturation en O2 en fonction de la pression partielle en oxygène (pO2 ).
B. Représentation de Hill.
C. Profil de coopérativité.
D. Représentation de l’effet Bohr alcalin.

serait donc lié à une transition concertée entre deux états qui En réalité, le fonctionnement de l’hémoglobine ne se réduit pas
se distinguent par leur arrangement spatial, et/ou par l’existence à un modèle aussi simple et plusieurs modifications et complé-
de liaisons électrostatiques différentes en nombre ou énergie. Les ments ont dû y être ajoutés. Des mesures plus fines de la fonction
auteurs ont proposé le qualificatif « allostérique » pour caractéri- oxyphorique ont montré que si les deux structures quaternaires
ser ce mécanisme, d’où le nom de modèle allostérique à transition sont bien celles qui sont prévues dans le modèle de MWC, elles
concertée à deux états. Bien que l’hémoglobine ne soit pas à pro- correspondent en fait à une multiplicité d’états R et T d’affinité
prement parler une enzyme, les biochimistes lui ont attribué le différente [28] . Des travaux ont très tôt indiqué que des ligands
titre d’« enzyme d’honneur » et ont assimilé les molécules d’hèmes hétérotropes comme le 2,3-DPG modifiaient la valeur de KT [29] , et
à des sites catalytiques et les zones où se fixent les effecteurs à des même de KR dans certaines conditions [30] .
sites régulateurs. Le modèle MWC reste encore aujourd’hui un cadre suffisant
Selon la théorie allostérique, l’hémoglobine est en permanence pour décrire la fonction oxyphorique de l’hémoglobine dans des
un équilibre entre les formes R et T. Le rapport de leur concen- conditions proches de la physiologie ; il montre cependant ses
tration détermine l’affinité résultante globale. Dans chacune des limites lorsqu’il s’agit de comprendre une mécanique moléculaire
deux conformations, R et T, l’affinité pour l’oxygène de chacune plus générale. Il est alors nécessaire de faire appel à des modèles
des sous-unités (␣ ou ␤) est supposée identique (principe de symé- plus complexes, comme le modèle allostérique global proposé par
trie). Ce postulat permet de décrire la courbe sigmoïde de liaison Yonetani et al. [31] et Imai et al. [32] . Ces auteurs partent de la cons-
de l’oxygène avec seulement trois paramètres : KR et KT , qui sont tatation que l’hémoglobine en solution dans l’eau, en l’absence
les constantes d’association du ligand pour les formes R et T, et L, la de tout ligand régulateur, est pratiquement dénuée de toute sou-
constante d’allostérie, qui exprime le rapport des concentrations plesse fonctionnelle. Dans ces conditions expérimentales, à pH
des deux états conformationnels. 8,0, l’affinité pour l’oxygène serait l’affinité intrinsèque de la
Comme nous l’avons vu, les constantes KT et KR sont faciles protéine. En étudiant l’effet de divers ligands régulateurs, phy-
à mesurer sur la courbe de Hill. La constante allostérique L est siologiques ou artificiels, opérant dans des zones de contrainte
calculée selon la relation L = (p50 ×KR )4 . Un troisième paramètre extrêmement larges, ces auteurs observent que la représentation
« c » exprime le rapport entre les affinités de la protéine pour de log KT et log KR en fonction de log L0 et log L4 décrit un
le ligand entre les formes R et T. Ainsi, dans l’HbA, l’affinité cercle fermé. Ceci indique que L0 a une valeur maximale et L4
pour l’oxygène de la forme R est 100 fois supérieure à celle une valeur minimale et que les valeurs de KT et KR s’étendent sur
de la forme T. Dans ce modèle, les variations de p50 sont dues trois ordres de magnitude. Ce modèle montre que l’action des
aux seules variations de L, c’est-à-dire de l’équilibre de concen- effecteurs allostériques hétérotropes est bien plus importante que
tration entre R et T, avec une valeur de KT toujours inférieure ne l’est la transition R → T. Les effecteurs, utilisés par ces auteurs,
à celle de KR . Les ligands hétérotropes sont supposés déplacer se classent dans l’ordre suivant d’efficacité croissante :
l’équilibre R–T sans modifier la valeur des constantes d’associa- H+ < Cl– < 2,3-DPG < bézafibrate (BZF) < inositol hexaphosphate
tion. (IHP) < BZF + 2,3-DPG < BZF + IHP

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La p50 est multipliée par un facteur de 1000 entre une mesure Les autres phosphates organiques (adénosine triphosphate, etc.)
effectuée en l’absence de tout effecteur et une autre réalisée en sont présents à plus faible concentration dans le globule rouge
présence de BZF + IHP. On a pu vérifier que la structure ligan- humain et, de ce fait, participent moins à la régulation physiolo-
dée (HbCO ou HbO2 ) obtenue en présence du couple BZF + IHP gique de la fonction oxyphorique.
est dans la conformation R, malgré son affinité particulièrement L’IHP, dont l’effet est plus fort que celui du 2,3-DPG sur l’affinité
basse [33] . La valeur de KR obtenue dans ces conditions expéri- pour l’oxygène de l’hémoglobine, n’est qu’un réactif expéri-
mentales est bien inférieure à celle de KT observée en présence mental. Signalons toutefois que l’inositol pentaphosphate (IPP),
d’effecteurs hétérotropes de moindre efficacité. Une excellente dérivé de structure très proche de celle de l’IHP, est le régulateur
revue faisant le point sur le modèle allostérique et les réserves physiologique de la fonction oxyphorique des oiseaux. Le BZF,
qu’il peut susciter a été publiée en 2011 [34] . médicament hypolipémiant, est un effecteur artificiel très puis-
sant qui, en se fixant sur les chaînes ␣ [38] , potentialise l’action des
organophosphates liés aux chaînes ␤.
Rôle régulateur des facteurs
environnementaux Interaction avec les anions inorganiques
Ainsi, dans les conditions physiologiques de pH et de tempéra- Les anions inorganiques (chlorures, phosphates, etc.) dimi-
ture, la p50 d’une suspension de globules rouges humains frais est nuent l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène en stabilisant
de 26 ± 1 mmHg. Cette affinité est bien inférieure à celle d’une la structure désoxygénée et en majorant l’effet Bohr [39] . Ils sont
solution d’hémoglobine dans l’eau. Dans le globule rouge, de en partie responsables de la faible affinité du globule rouge pour
nombreux facteurs interviennent physiologiquement pour dimi- l’oxygène. Toutefois, comme leur concentration est à peu près
nuer l’affinité de l’hémoglobine et assurer ainsi un maximum constante, ils ne jouent qu’un minime rôle régulateur dans les
d’efficacité à la fonction oxyphorique. Un globule rouge doté processus d’adaptation physiologique du transport d’oxygène. En
d’une trop forte affinité pour l’oxygène serait en effet incapable revanche, des modifications structurelles affectant les sites de fixa-
de libérer efficacement ce gaz dans les tissus. Ceci serait particuliè- tion des anions ont été trouvées dans quelques hémoglobines
rement ressenti au niveau du rein, où se trouvent des récepteurs anormales hyperaffines pour l’oxygène.
sensibles à l’hypoxie contrôlant la sécrétion d’érythropoïétine.
Chez l’homme, ces ligands régulateurs sont les phosphates
organiques (essentiellement le 2,3-DPG), les anions inorganiques Effet Bohr
(chlorures), et les ions H+ qui déterminent le pH. En 1904, Bohr, Hasselbalch et Krogh ont montré que le CO2
diminue l’affinité pour l’oxygène, action essentiellement due à
Interaction avec les phosphates organiques l’abaissement du pH [25] . Dans les tissus, le CO2 libéré diffuse
dans le plasma puis dans les globules rouges. Sous l’action de
On connaissait depuis longtemps la présence dans les glo- l’anhydrase carbonique, l’acide carbonique se forme selon la réac-
bules rouges de la plupart des mammifères d’une concentration tion :
élevée de 2,3-DPG. Ce composé est synthétisé dans le shunt CO2 + H2 O → CO3 H− + H+
de Rapoport-Luebering situé en dérivation de la voie glycoly- et entraîne une baisse du pH intraérythrocytaire. L’énorme
tique d’Embden-Meyerhof. Sa concentration intraérythrocytaire quantité de bicarbonates formée retourne au plasma sous l’action
est d’environ 5 mmol/l, équivalente à celle de l’hémoglobine, d’une protéine de la membrane érythrocytaire, l’échangeur
alors qu’elle est faible dans les autres tissus. d’anions érythrocytaire (ou bande 3). Dans les poumons, c’est la
En 1967, Chanutin et Curnish [35] , d’une part, et Benesch et réaction inverse qui s’effectue. L’effet Bohr se résume donc à un
Benesch [36] , d’autre part, ont démontré le rôle régulateur physio- effet régulateur de la fonction oxyphorique par le pH.
logique fondamental joué par cet organophosphate. La fixation Dans l’hématie, l’hémoglobine fonctionne comme un tampon
de 2,3-DPG augmente la p50 ; ainsi, lorsque l’on passe d’une et fixe les protons H+ , en particulier au niveau des ponts salins
concentration nulle à celle de l’érythrocyte, la valeur de la p50 est stabilisant la structure désoxygénée. L’élévation de la pCO2 dans
multipliée par un facteur de 2,5. L’augmentation du taux de 2,3- les tissus a ainsi pour effet de diminuer l’affinité pour l’oxygène
DPG est un mécanisme semi-rapide d’adaptation à des situations de l’érythrocyte et de faciliter la libération d’oxygène. Dans les
anoxiques. Ainsi, lorsqu’un sujet vivant au niveau de la mer se poumons, où le CO2 est libéré, la réaction inverse se produit.
rend en altitude, où la pO2 est plus faible, on observe en quelques La structure R, à forte affinité pour l’oxygène, facilite la capture
jours une augmentation de la concentration intraérythrocytaire d’oxygène par l’érythrocyte.
de 2,3-DPG, précédant une stimulation de l’érythropoïèse, et une La Figure 6D montre les modifications de l’affinité pour
polyglobulie compensatrice. Dans tout syndrome anémique, le l’oxygène en fonction du pH. L’effet Bohr s’exprime par sous-
taux de 2,3-DPG augmente pour corriger l’anoxie. Des concen- unité d’hémoglobine. Sa valeur correspond au nombre de protons
trations pouvant aller jusqu’à des valeurs doubles de la normale libérés lorsque l’hémoglobine subit la transconformation de la
et conduisant à des p50 de l’ordre de 40 mmHg peuvent être structure désoxygénée vers la structure oxygénée. Pour l’HbA, la
observées. Un déficit génétique en pyruvate-kinase érythrocytaire, valeur de l’effet Bohr est de -0,5 aux environs de pH 7, en présence
en bloquant la voie métabolique à la sortie du cycle de Krebs, de Cl− 0,1 M. Une façon pratique de chiffrer l’effet Bohr consiste
conduit à une augmentation marquée de la concentration éry- à mesurer la dérivée de la courbe des variations du logarithme de
throcytaire de 2,3-DPG, permettant parfois de mieux supporter la p50 en fonction du pH.
l’anémie hémolytique provoquée par ce déficit. Inversement, chez Les études de diffraction de rayons X ont permis de préciser les
les sujets porteurs d’un déficit en DPG-mutase, la concentration principaux sites impliqués dans l’effet Bohr. Il est établi que l’effet
intraérythrocytaire en 2,3-DPG est basse et cause d’une augmen- Bohr alcalin est dû à l’augmentation du pKa d’un certain nombre
tation d’affinité pour l’oxygène à l’origine d’une polyglobulie de groupements impliqués dans la stabilisation de la structure
compensatrice. désoxygénée. Sont stabilisées par un pH acide :
Dans le modèle classique, il est admis que le 2,3-DPG se fixe • la liaison située entre le groupe imidazole de l’His ␤146 (HC3)
dans la cavité centrale, stabilisant ainsi la structure quaternaire et le carboxyle de l’Asp ␤94 (FG1), responsable d’environ 50 %
T [37] . Ce mécanisme n’explique toutefois pas de façon satisfai- de l’effet ;
sante comment un facteur déjà en excès peut, par une légère • la liaison impliquant les groupes NH2 terminaux des chaînes ␣,
augmentation de sa concentration, avoir un effet aussi important qui s’effectue par l’intermédiaire d’ions Cl− ;
sur l’affinité pour l’oxygène. Son action ne s’interprète que par • enfin, les liaisons qui interviennent dans la fixation du 2,3-
un effet impliquant à la fois une stabilisation de la structure qua- DPG [40] .
ternaire et des remaniements de structure tertiaire modifiant la Le transport du CO2 par l’hémoglobine est assuré de façon plus
valeur des constantes d’association. Signalons que cette régula- accessoire par un autre mécanisme, la carbamylation. Les groupe-
tion de la fonction oxyphorique par le 2,3-DPG n’existe pas dans ments NH2 terminaux des chaînes réagissent de façon réversible
certaines espèces animales, comme les bovidés et les félidés [26] . avec le CO2 selon une réaction non enzymatique. Il est difficile

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Hémoglobines : structure et fonction  13-000-R-60

de mesurer précisément la part dévolue à ce mécanisme dans le compréhension de certaines pathologies et permettra sans doute
transport physiologique du CO2 ; elle pourrait intéresser environ d’ouvrir de nouvelles voies thérapeutiques [44] .
10 % du CO2 libéré par la respiration tissulaire.

Carboxyhémoglobine  Perspectives
Il est classique de dire que l’affinité de l’hémoglobine pour le CO L’hémoglobine est certainement l’une des protéines actuelle-
est 250 fois plus forte que pour l’O2 . En réalité, ce gaz se fixe moins ment les mieux connues. Si, autrefois, on pouvait se contenter
rapidement sur l’hémoglobine que ne le fait l’oxygène, et lorsqu’il d’une image figée obtenue par diffraction de rayons X à partir
est en très faible quantité, la compétition est largement en faveur d’un cristal, l’introduction de la dynamique moléculaire, alliée
de l’O2 . C’est le cas pour le CO qui est produit physiologiquement aux progrès de l’informatique et des techniques biophysiques, per-
par le métabolisme. En revanche, une fois fixé, le CO se libère très met aujourd’hui de suivre d’une façon continue le mouvement
difficilement de l’hémoglobine, sa constante de dissociation étant de chaque atome de la molécule lors de la transition R → T. Un
1500 fois plus faible que celle de l’O2 . nombre considérable de structures intermédiaires sont ainsi indi-
vidualisées [45] . Le modèle MWC permet certes une description
simplifiée de la fonction oxyphorique, mais il n’apporte pas toutes

“ Point fort les réponses.


Chez l’homme, des hémoglobines assureraient-elles d’autres
fonctions que le transport d’oxygène ? Récemment, six familles
supplémentaires d’hémoglobines ont été décrites chez les verté-
Procédures à suivre pour l’étude de la fonction brés. Les premières ont été la neuroglobine et la cytoglobine [46–50] .
oxyphorique érythrocytaire Il s’agit de molécules hexacoordonnées, à très forte affinité pour
L’étude de la fonction oxyphorique érythrocytaire doit l’oxygène. La neuroglobine, déjà présente dans le tube neural de
toujours être réalisée sur un sang du jour, recueilli sur multiples espèces primitives, pourrait servir de réserve d’oxygène
acide citrique, citrate (anticoagulant), et dextrose (ACD), protégeant l’activité nerveuse. Dans le cerveau humain, la
et conservé à + 4 ◦ C jusqu’à l’étude. Elle doit impérati- neuroglobine est essentiellement localisée dans le noyau sous-
vement comporter un dosage du 2,3-DPG effectué sur thalamique, dans le thalamus et le lobe frontal. On la retrouve
le même prélèvement. Les paramètres essentiels sont la également, à plus faible concentration, dans d’autres tissus
comme l’hypophyse, l’appendice, le côlon ou le poumon. Quelle
p50 , qui mesure l’affinité pour l’oxygène de l’érythrocyte,
est sa fonction ? S’agit-il d’un transporteur d’oxygène au niveau
et le n de Hill, qui reflète l’interaction entre sous-unités
de structures particulièrement sensibles à l’anoxie ou plutôt d’une
d’hémoglobine. Ces mesures ne sont valides qu’effectuées molécule assurant un rôle protecteur contre les agents oxydants ?
dans des conditions strictes de pH et de température. La cytoglobine est d’apparition plus récente, puisqu’elle semble
Aujourd’hui ces études fonctionnelles tendent à être avoir divergé de la myoglobine. Elle est distribuée dans une grande
remplacées par des mesures transcutanées, mais pour les- variété de tissus, à l’exception du cerveau, et exerce une fonc-
quelles certaines réserves ont été soulevées. tion encore mal connue. Plus récemment, la connaissance de la
famille des globines s’est enrichie de plusieurs autres groupes :
les globines E, présentes dans les rétines de certains oiseaux [51] ,
l’androglobine, molécule chimérique associant un domaine de
Hémoglobine et transport du monoxyde calpaïne à celui de la globine, surtout présente dans les testi-
cules [52] ; les globines X, observées dans les tissus nerveux de
d’azote poissons et porteuses d’une extrémité N-terminale qui leur per-
mettrait une liaison directe aux membranes cellulaires [53] .
Il a été proposé qu’en plus de ses fonctions physiologiques de
Le chapitre des hémoglobines est certainement loin d’être
transporteur d’O2 et de CO2 , l’hémoglobine pourrait avoir un
clos : la variété de familles de globines identifiées apporte
rôle dans le stockage et le transport du NO. Cette théorie est très
d’intéressantes perspectives dans la compréhension de l’évolution
controversée et s’oppose au fait que l’hémoglobine sert de piège
des protéines et, dans un tout autre domaine, les progrès apportés
au NO dans le sang. Dans l’hypothèse d’une fonction de transport,
le NO se lierait à la Cys ␤93 de l’HbO2 et s’en détacherait lors de la
désoxygénation, permettant alors une meilleure oxygénation des
tissus périphériques par son effet vasodilatateur [41] . Cette fixation
de NO, qui conduirait à un effet vasoconstricteur dangereux, est
l’une des raisons s’opposant à l’usage de solutions d’hémoglobine
“ Point fort
comme substituts du sang.
• En première approximation, la fonction oxyphorique de
l’hémoglobine peut être expliquée par la théorie allosté-
 Mutagenèse dirigée : nouvel outil rique (modèle de Monod-Wyman-Changeux) qui postule
une transition entre deux états : le premier, une forme
d’exploration de l’hémoglobine contrainte, à faible affinité pour l’oxygène (état T), le
second, une forme relâchée, à forte affinité pour l’oxygène
Pour comprendre le rôle et l’importance des divers résidus de la
molécule d’hémoglobine, il était nécessaire, il y a encore quelques
(état R). Perutz a démontré la réalité de ces deux structures
années, de faire appel à des modèles animaux ou d’utiliser ceux extrêmes par diffraction de rayons X.
offerts par les mutations naturelles. Les techniques de mutagenèse • La structure T est stabilisée par des ligands hétérotropes
dirigée, apparues dans les années 1990, permettent aujourd’hui (anions, protons et surtout 2,3-DPG). Le 2,3-DPG a un rôle
d’exprimer à volonté des molécules portant une ou plusieurs essentiel en physiologie en se fixant, tel un clamp électro-
mutations [42] . Il devient ainsi possible d’étudier de façon systéma- statique, dans la cavité centrale entre les deux chaînes ␤
tique l’effet de diverses mutations sur des régions clés ou de faire de la structure désoxygénée.
apparaître de nouvelles fonctions. Elles ont été largement utili- • En réalité, le transport d’oxygène par l’hémoglobine
sées pour l’identification des résidus impliqués dans l’interaction est un phénomène plus complexe. Des approches bio-
entre les chaînes ␣ et l’AHSP [43] . La mutagenèse dirigée ne se
physiques de plus en plus sophistiquées conduisent à de
limite pas à des remplacements ponctuels : elle permet également
de créer des chaînes hybrides, et un nombre sans cesse crois-
nouveaux modèles faisant jouer un rôle prépondérant à
sant d’hémoglobines recombinantes est décrit. Ce nouvel abord l’interaction des ligands allostériques.
expérimental apporte des outils de réflexion intéressants pour la

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par la mutagenèse dirigée permettront peut-être un jour de voir [26] Poyart C, Wajcman H, Kister J. Frontiers in respiratory physiology.
le développement de transporteurs artificiels d’oxygène d’origine Molecular adaptation of hemoglobin function in mammals. Respir
hémoglobinique à visée transfusionnelle. Physiol 1992;90:3–17.
[27] Adair GS. The hemoglobin system VI. The oxygen dissociation curve
of hemoglobin. J Biol Chem 1925;63:529–45.
Déclaration de liens d’intérêts : l’auteur n’a pas transmis de déclaration de [28] Ackers GK, Dalessio PM, Lew GH, Daugherty MA, Holt JM. Single
liens d’intérêts en relation avec cet article. residue modification of only one dimer within the hemoglobin tetra-
mer reveals autonomous dimer function. Proc Natl Acad Sci U S A
2002;99:9777–82.
[29] Imai K. Analyses of oxygen equilibria of native and chemically
 Références modified human adult hemoglobins on the basis of Adair’s stepwise
oxygenation theory and the allosteric model of Monod, Wyman, and
[1] Hardison R. Hemoglobins from bacteria to man: evolution of different Changeux. Biochemistry 1973;12:798–808.
patterns of gene expression. J Exp Biol 1998;201:1099–117. [30] Kister J, Poyart C, Edelstein SJ. An expanded two-state allosteric model
[2] Wajcman H, Kiger L, Marden MC. Structure and function evolution for interactions of human hemoglobin A with non saturating concen-
in the superfamily of globins. C R Biol 2009;332:273–82. trations of 2.3-diphosphoglycerate. J Biol Chem 1987;262:12085–91.
[3] Kendrew J, Dickerson RE, Strandberg BE, Hart RG, Davis DR, Phillips [31] Yonetani T, Park SI, Tsuneshige A, Imai K, Kanaori K. Global allos-
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H. Wajcman (henri.wajcman@wanadoo.fr).
Biochimie-Génétique, CHU Henri-Mondor, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil cedex, France.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Wajcman H. Hémoglobines : structure et fonction. EMC - Hématologie 2019;14(3):1-11 [Article
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