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produit caustique :
L’ingestion d’un produit caustique est une urgence médico-chirurgicale, car celui-ci entraîne des
lésions mettant en jeu le pronostic vital à court terme et le pronostic fonctionnel à long terme. On distingue :
Une phase initiale : L’ingestion de caustique peut se compliquer de médiastinite (Perforation de
l’œsophage), de péritonite (Perforation de l’estomac) etc…
Une phase intermédiaire : C’est la dénutrition et la défaillance psychologique.
Une phase séquellaire : L’ingestion de caustique peut se compliquer plus tardivement de sténoses
séquellaires œsophagienne et/ou gastrique, avec risque de dégénérescence.
I- Introduction et généralités :
1- Epidémiologie :
L’enfant : Elle est le plus souvent accidentelle, par négligence des parents. Les lésions sont moins
sévères car les quantités ingérées sont faibles.
Les produits de contrastes les plus souvent mis en cause en Algérie sont l’eau de Javel, l’acide de
batterie, l’olivette (Produit basique servant au conditionnement des olives) et l’esprit de sel.
2- Le produit caustique :
Un produit caustique est un produit chimique susceptible d’entraîner des lésions tissulaires au niveau
de son lieu d’application, par action chimique ou physico-chimique. Le plus souvent, les lésions tissulaires
intéressent le tractus digestif supérieur (BCTDH : brûlures caustiques du tractus digestif haut), mais également
la sphère ORL et l’arbre respiratoire (Brûlures graves).
Ce sont le plus souvent des produits à usage domestique. Ces produits peuvent être divisés en 3 types :
Les bases (NaOH, KOH) : Comme l’olivette, les déboucheurs de tuyaux, les nettoyants de four,
l’ammoniac liquide (Très volatile, avec atteinte pulmonaire)… Du fait de leur caractère visqueux, les lésions
intéressent principalement l’œsophage, plutôt que l’estomac. Ils entraînent une nécrose de liquéfaction et
diffusent au niveau de la paroi pouvant atteindre le médiastin.
Les acides : Comme l’acide chlorhydrique (Esprit de sels), l’acide sulfurique (Acide de batteries), ou la
rubigine (Antirouille, puissant chélateur du calcium entraînant donc une hypocalcémie avec troubles de
l’hémostase). Ils ont un caractère liquide est entraînent un spasme au niveau du pylore, les lésions sont donc
situées principalement au niveau de l’antre plutôt que l’œsophage. Ceux-ci causent une nécrose de
coagulation, ce qui limite la pénétration vers les plans profonds.
Les oxydants : Comme l’eau de Javel (A haute concentration et en quantité importante), l’eau
oxygéné, les sels de sodium (Lave-vaisselle) ou le KMnO4. Ils entraînent des brûlures thermiques par dégagent
de chaleur. Les lésions sont retardées et plus souvent retrouvées au niveau de l’estomac.
3- Anatomopathologie :
C’est-à-dire à domicile et pendant le transport. Il faut savoir qu’il n’y a pas d’antidote, il faut donc
plutôt connaître les gestes à proscrire afin de ne pas aggraver les lésions déjà constituées :
- Ne pas faire vomir le patient.
- Ne pas poser de sonde nasogastrique et ne pas faire de lavage gastrique.
- Ne pas administrer des produits par voie orale.
- Mettre le patient en position ½ assise.
- Transférer le patient vers un centre hospitalier avec une équipe multidisciplinaire.
2- A l’hôpital :
A- Etape clinique :
Pneumo-médiastin.
Examen clinique :
- Etat hémodynamique, avec examen digestif, respiratoire,
neurologique, ORL…
- Recherche d’une complication immédiate :
Médiastinite : Fièvre, tachycardie, douleur avec collapsus
cardio-vasculaire. Le téléthorax montre un pneumo-
médiastin.
Péritonite : Douleur abdominale extrême avec fièvre et
contracture abdominale. Le téléthorax montre un
pneumopéritoine.
Examens paracliniques :
- Radiologique :
Téléthorax : Recherche de pneumo-médiastin, de pneumopéritoine et d’un épanchement
pleural.
ASP : Recherche de pneumopéritoine.
- Biologique : Bilan rénal, gazométrie, bilan de CIVD et d’hémostase, ionogramme, groupage
sanguin.
C- Facteurs de gravité :
L’étendue et la sévérité des lésions dépendent de plusieurs facteurs :
La nature du produit : Acide, base, oxydant…
Forme : Liquide, solide, visqueuse, volatile…
Quantité et concentration.
Durée de contact : Entre le caustique et la muqueuse digestive (Motilité).
A noter qu’il n’y a pas de parallélisme entre l’intensité des signes et la gravité des lésions. Des études
ont montré que les signes mineurs s’ils sont associés sont corrélés statistiquement à la gravité endoscopique.
3- Prise en charge :
Au terme du bilan fait (Interrogatoire, examen clinique et paraclinique), 2 situations se présentent :
Les formes compliquées : Ce sont les complications immédiates :
- Dyspnée, détresse respiratoire : Instauration d’une corticothérapie à forte dose, si échec on aura
recours à l’intubation trachéale. Si même celle-ci échoue on passera à la trachéotomie.
- Etat de choc (Hypovolémique, par œdèmes) : Instauration des mesures de réanimation, si échec
on aura recours à la chirurgie.
- Troubles neurologiques (Agitation, confusion mentale), acidose métabolique, CIVD ou insuffisance
rénale : Recours direct à la chirurgie.
- Signe de perforation : A type de douleurs rétro-sternales, défense, contracture, pneumopéritoine,
pneumo-médiastin… On aura la aussi directement recours à la chirurgie.
Les formes non-compliquées : Il faudra poser une triple évaluation : Digestive, pulmonaire et ORL.
A- Evaluation digestive :
Clinique : Recherche de signes fonctionnels (Douleur, hémorragie, vomissements, hypersalivation) et
physiques (Contracture…).
Examens complémentaires : Biologie, radiographies, mais surtout l’endoscopie digestive haute en
urgence.
Elle est réalisée en dehors d’anesthésie (locale ou générale) mais sous analgésie, sans insufflation ni
rétro-vision, avec aspiration au maximum. Elle permettra de classer les lésions (Préciser si lésion
œsophagienne ou gastrique) selon :
La classification de Di Costanzo :
- Stade 0 : Normal.
- Stade I : Présence d’érythème ou de pétéchies.
- Stade IIa : Présence d’ulcérations linéaires ou arrondies.
- Stade IIb : Présence d’ulcérations circulaires ou confluentes.
- Stade IIIa : Présence d’une nécrose localisée (En îlots).
- Stade IIIb : Présence d’une nécrose diffuse.
La classification de Zargar :
- Stade 0 : Muqueuse normale.
- Stade I : Œdème, érythème de la muqueuse.
- Stade IIa : Friabilité, hémorragie, fausse membrane, ulcérations superficielles.
- Stade IIb : C’est le stade IIa, mais avec présence d’ulcérations circonférentielles.
- Stade IIIa : Nécrose localisée (En îlots).
- Stade IIIb : Nécrose étendue.
L’endoscopie a aussi un intérêt pronostic, les stades 0, I et IIa sont de bon pronostic, les stades IIb et
IIIa de moins bon pronostic (Risque élevé de sténose et de perforation). Le stade IIIb et de pronostic sombre
(Mortalité élevée).
B- Evaluation pleuropulmonaire :
Remarque : L’atteinte de l’appareil respiratoire se fait de 3 manières : Par diffusion à travers la paroi
(Principale cause de mortalité), par inhalation de caustique, ou du fait de l’acidose métabolique (Polypnée
compensatrice).
C- Evaluation ORL :
Cliniquement, on recherchera des troubles de la déglutition, une dyspnée laryngée ou une dysphonie.
Une fibroscopie ORL lors de l’intubation ou en post-opératoire si malade déjà intubé est nécessaire.
Œsophagectomie par stripping (Taux de mortalité faible) : L'œsophage cervical est abordé par une
incision pré-sternocléïdo-mastoïdienne gauche, puis est sectionné le plus bas possible. Une sonde en silicone
est introduite dans la lumière œsophagienne et poussée jusqu'au pylore. La sonde est fixée à l'œsophage et un
drain est solidarisé à l'ensemble. Après dissection au doigt au niveau cervical et hiatal, une traction douce sur
la sonde provoque l'invagination de l'œsophage et son stripping. L'intervention se termine par une
œsophagostomie cervicale et une jéjunostomie d'alimentation.
Oeso-gastréctomie par stripping : Semblable à la précédente, elle sera juste suivie d’une
gastrectomie.
Oesophagectomie et plastie trachéo-bronchique (Taux de
mortalité élevée) : L'oesophagectomie est réalisée avec dissection
minutieuse du plan trachéobronchique, afin d'éviter la perforation
de la membraneuse nécrosée. La plastie pulmonaire utilise le
segment dorsal du lobe supérieur droit ou le lobe de Nelson. Le
parenchyme pulmonaire est suturé aux anneaux trachéaux et à la
membraneuse saine, de telle façon que le parenchyme recouvre
parfaitement la lésion sans fuite aérienne. Le poumon vient combler
le médiastin et obstruer la perforation ou la zone trachéale suspecte.
La thoracotomie est fermée sur plusieurs drains thoraciques et
médiastinaux. La suite de l'intervention abdominale et cervicale ne
présente pas de particularité par rapport au stripping.
Oseo-gastréctomie et plastie trachéo-bronchique : Semblable à la précédente, elle sera juste suivie
d’une gastrectomie.
Il faudra fixer le siège de l’anastomose cervicale en zone saine ou cicatricielle stabilisée sur l’œsophage
ou le pharynx. On pourra :
Tubuliser l’estomac : S’il n’y a pas eu de gastrectomie.
Coloplastie transverse iso-péristaltique gauche : Surtout chez l’adulte,
Iléocoloplastie droite rétro-sternale : Surtout chez l’enfant.
Hospitalisation de 24h.
Abstention thérapeutique, l’alimentation orale peut être reprise immédiatement. Des IPP seront
cependant associés.
Si l’ingestion a été involontaire, il faut une prise en charge psychiatrique.
2- Stade IIa :
A- Gastrique :
Semblable au stade I.
B- Œsophagien :
3- Stade IIb :
A- Œsophagien :
B- Gastrique :
4- Stade IIIa :
A- Lésions situées au niveau du tiers moyen ou distal de l’œsophage :
C- Gastrique :
A- Gastrique :
Remarque : Si un stade IIIb œsophagien est associé, une œsophagectomie totale ou jusqu’en zone
saine sera réalisée.
Reevaluation
Même attitude que Absence de lésions
Guérison : Evolution des lésions : Guérison : Evolution des lésions : endoscopique après Lésions sévères :
3b. sévères :
24h.
Oesogastréctomie et
Même attitude que le Même attitude que le Surveillance après 6 à Jéjunostomie et Pas de progression des Progression des
plastie trachéo- Stripping oesophagien.
stade 1 et 0. stade 2b. 8 semanes. dilatations précoces. lésions : lésions :
bronchique
Gastrectomie totale
Jéjunostomie pendant
avec anastomose oeso-
Guérison : Evolution des lésions : 21 jours puis contrôle
jéjunale et jéjunostomie
endoscopique :
d'alimentation.
Nutrition parentérale
Même attitude que le Sténose antrale
pendant 15 autres jours Guérison.
stade 1 et 2a. (Confirmée par TOGD) :
puis endoscopie :
Sténose antrale
Guérison : Gastréctomie partielle.
(Confirmée par TOGD) :
Semblable au stade I et
Gastrectomie partielle.
IIa.
1- Complications précoces :
2- Complications tardives :
A- Sténose :
Elles sont mises en évidence par l’endoscopie et le TOGD. Elles peuvent être œsophagienne ou
gastriques, et doivent faire discuter une chirurgie ou une dilatation endoscopique (Voir cours endoscopie). On
distingue :
Les sténoses courtes, axiales et régulières : La dilatation est le traitement de choix, de préférence
précocement (4-5ème semaine), cependant la récidive s’élève à 20%. En cas d’échec on aura recours à
l’œsophagoplastie.
Sténoses longues, irrégulières, excentrées : Il y a risque élevé de perforation et d’hémorragie, c’est
pour cela que l’œsophagoplastie est favorisée.
Remarque : Les bougies de Savary sont favorisées pour les sténoses semi-rigides, tandis que la
dilatation pneumatique est réservée aux sténoses récentes.
Le 5-FU est un traitement prometteur pour éviter cette complication. Une dose unique intra
péritonéale de 5-FU a un effet préventif sur la formation de sténoses œsophagiennes après la brûlure
caustique. Des études cliniques sont maintenant nécessaires pour vérifier cette forme de
traitement. Cependant, l’application locale intra œsophagienne du 5-FU immédiatement après la brûlure n'a
pas été efficace. D'autres investigations sont nécessaires pour déterminer le moment approprié de
l'application de 5-FU sur le site local de blessure.
B- Cancer de l’œsophage :
On retrouve qu’1 à 7% des personnes atteintes d’un carcinome de l’œsophage ont un antécédent de
prise de caustique. Le risque serait 1000 à 3000 fois plus élevé que chez la population générale, et le délai
d’apparition serait de 20-40 ans après ingestion, cependant, l’extension loco-régionale est limitée par la
fibrose. Les dilatations répétées favoriseraient son apparition.
Il n y a cependant pas de recommandations à la surveillance. Elle est conseillée 20 ans après
l’ingestion.
3- Bilan définitif :
Il est réalisé après 1 à 2 mois pour le stade II, et après 2 à 4 mois pour le stade IIIa. Il se base sur :
La clinique : Etat nutritionnel, régurgitation, dysphagie.
TOGD (++) : Longueur et importances des sténoses si présentes.
Endoscopie œsogastroduodénale.
Examen ORL : Recherche de sténoses du pharynx si indication à l’œsophagoplastie.
V- Prévention :
- Respecter l’étiquetage.
- Ne pas transvaser les produits.
- Utilisation de bouchons spéciaux (la tête de mort peut « tenter » un adolescent suicidaire, ou le
bouchon récalcitrant invite à laisser le flacon ouvert ou, à transvaser).
- Eduquer la population, campagnes de prévention.
- Produits ménagers hors de la portée des enfants