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Preface

Je remercie par avance, le


ou les lecteurs qui
prendront le temps de lire
ce travail important et
passionnant. Important, car
même si j'ai largement
puisé dans le récit d'Alice
JOLY et donc sut profiter de
l'excellent travail de
recherches, de
compilations que cet
auteur a réalisé en 1937,
celui-ci m'a permis d'aller à
l'essentiel en confiance,
d'en extraire le plus
intéressant en y ajoutant
des « Commentaires ciblés
et vécus» selon mon regard
d'Initié de cette science que
je pratique avec humilité
depuis 35 ans et que
beaucoup connaisse sous le
terme dépouillé de « Rit
Écossais Rectifié ».

Passionnant, car ce siècle des lumières a fait beaucoup écrire, beaucoup parlé, a vu se
terminer une forme de société avec la royauté en son centre pour disparaitre en surface et
être remplacée par l'émanation de la conscience du peuple français et pour aboutir dans la
révolution de 1789 qui a modifié toutes les lignes de vie et de pensée de nos concitoyens.

Impressionnant, car ce siècle a été le temps de tous les excès philosophiques, tantriques,
expressifs et révolutionnaires tant au niveau du besoin de révolte civile mais aussi dans ses
deux premiers tiers, de l'explosion philosophique et métaphysique de bon nombre de
penseurs, d'illuminés au sens propre comme au sens figuré. Toutes les connaissances
religieuses sont bousculées, l'intelligence humaine a soif d'extraordinaire, de nouveautés
spirituelles et donc se laisse emporter par la spirale des plus « fous » de ces nouveaux
inventeurs de la dimension humaine et de son rapport avec DIEU.

Ce travail est aussi un témoignage compréhensif mais aussi critique sur certains faits ou
situations ou évolutions de la pensée du fondateur du Régime Ecossais Rectifié et il me semble
que c'est nécessaire quand on étudie cette science qu'il a rassemblée dans une seule et unique
doctrine.

Édition personnelle depuis mars 2007 et remise à jour

Merci à chacun de mes Supérieurs Inconnus qui m'ont permis ces révélations
LYON, Carrefour de L'Europe Maçonnique
Au XVIIIe siècle, la politique centralisatrice des obédiences parisiennes, la Grande Loge puis le
Grand Orient de France, s'est heurtée très tôt aux ambitions d'indépendance d'un Orient
lyonnais désireux de mettre à profit sa situation de carrefour pour se constituer en métropole
maçonnique de rang européen dotée d'une large autonomie. Pendant de nombreuses années,
les rapports des Francs-Maçons Lyonnais, tant vis-à-vis de Paris, que de leurs Frères Allemands,
seront complexes et ambigus, mêlant tour à tour, quand ce n'est pas simultanément,
fascination et prise de distance, reconnaissance de l'autorité de tutelle et désir inassouvi
d'autonomie. Mais l'attrait de Lyon, terre d'élection de la Franc Maçonnerie mystique et fief
des Élus Cohen, ordre fondé par Martines de PASQUALLY puis poursuivi par Louis-Claude de
SAINT-MARTIN et Jean-Baptiste WILLERMOZ, sera suffisant pour que cette ville attire les plus
célèbres aventuriers de toute l'Europe. Ils sont italiens et ont pour noms CASANOVA ou
CAGLIOSTRO.

Leur présence n'est pas totalement surprenante dans cette ville où l'influence italienne est fort
ancienne. Non seulement les italiens arrivent en seconde position des correspondants et
visiteurs étrangers de WILLERMOZ, mais il s'agit, comme les allemands, de figures clés de la
Franc Maçonnerie européenne. Ils seront d'un précieux secours à WILHEMSBAD où ils
accentueront le caractère chrétien et mystique de la Franche Maçonnerie rectifiée et
renonceront à la vieille légende de la filiation templière.

A cette époque, Lyon est bien le carrefour européen de la Franche Maçonnerie avec un
premier cercle de rayonnement composé de l'Italie du Nord, des cantons suisses et de
l'Allemagne occidentale, avec un double prolongement vers le nord-est en direction de la
Scandinavie et des provinces baltes, et vers le sud est en direction du pôle maçonnique
napolitain. Mais Lyon regarde aussi vers les profondeurs de l'espace européen en direction de
la Russie et de la Pologne car la vie maçonnique y est intense. Comme pour les allemands et les
italiens, Lyon devient alors une destination obligée pour les aristocrates Francs-Maçons, qu'ils
soient polonais ou russes. Et ce n'est pas un hasard si Louis-Claude de Saint-Martin, le
Philosophe Inconnu, a une audience exceptionnelle en Russie. Les lettres que nous possédons
de SAINT MARTIN à WILLERMOZ sont un bon témoignage de la vie de ces Francs Maçons
cosmopolites qui sillonnent l'Europe des Lumières pendant des années, se croisent ou se
manquent au hasard des étapes. Fernand Braudel ne se trompe pas lorsqu'il écrit dans «
l'Identité de laFrance que Lyon ne trouve son ordre et les conditions de son épanouissement
que sur leplan international, il lui faut la complicité du dehors et les fées qui la favorisent
sontétrangères ... »

1730 - Jean Baptiste WILLERMOZ est né le 10 juillet 1730, d'une famille de 13 enfants, ainé des
garçons, et dont la sœur ainé Claudine Thérèse devint Madame PROVENCAL. D'une famille de
marchand mercier issue de Franche Comté et qui vient s'installer à Lyon pour y faire fortune. Il
a deux jeunes Frères Pierre Jacques et Antoine. Devenu très rapidement commis de magasin, il
s'installa comme Maître fabricant en 1754 à son compte. Ayant quitté l'école à 12 ans, il avait
cependant acquis une orthographe appliquée et une écriture élégante.

1750 - Il fut reçu Franc Maçon en 1749 dans une loge dont le nom n'est pas connu et il a vingt
ans. La Maçonnerie lyonnaise était constituée de trois loges mais nous n'avons pas trouvé avec
certitude son nom lors de l'assemblée de la tenue de la Grande loge en 1744. Sans pouvoir
l'affirmer les trois loges étaient l'Amitié, la Parfaite Amitié et les Amitiés choisis.
On ne sait pas exactement quel type de Maçonnerie était pratiqué sinon que les trois grades
symboliques étaient transmis »Apprenti, Compagnon, Maître » et le mythe de SALOMON et la
légende d'HIRAM ABIF y était proposé.

1752 - Très rapidement Jean Baptiste WILLERMOZ est déçu par la loge où il est Membre, mais
la société maçonnique le passionne et il déploie une forte activité dans les loges de Lyon.
Lorsque le VM de sa loge doit quitter Lyon, il remplace celui-ci à l'âge de 22 ans.

1753 - Insatisfait de l'engagement des Frères de sa loge, il décide de créer la « Parfaite Amitié»
avec neuf de ses frères et à la Saint Jean Baptiste de 1753 il est installé Vénérable Maître du
nouvel atelier. Il fait prospérer la loge avec 29 frères en 1760 et plus de cinquante-trois
Membres en 1763. Il occupa la fonction près de 10 ans.

Commentaires : nous pouvons constater et des faits détaillés dans les archives du fond
WILLERMOZ nous le confirment que dès le début, notre ami avait une attente énorme, une
envie importante de savoir, de comprendre les origines et le but mystique de la Franche
Maçonnerie. Son exigence était totale.

1756 - Jean Baptiste WILLERMOZ étant engagé pour une Maçonnerie supérieure, il fait
reconnaitre sa loge par la Grande Loge de France le 21 novembre 1756, qui lui permettait
d'être rattaché au comité des Maîtres parisiens sous le patronage du Comte de CLERMONT.

1760 - Sous son instigation, Jean Baptiste WILLERMOZ fit reconnaitre les trois loges de Lyon
dont la Parfaite Amitié avec trente membres à cette date, l'Amitié avec vingt membres et les
Vrais Amis avec douze membres. Le 4 mai 1760, les trois Vénérables Maîtres décident de créer
une loge supérieure appelée Mère Loge et par anticipation, la 1ère loge écossaise sans le nom
était constituée où seul les Maîtres des loges régulières étaient admis.

1761 - Chez Jean Baptiste WILLERMOZ, un prosélytisme bien ordonné comme sa charité,
commençait à la maison. Aussi fit-il admettre ses deux Frères cadets en Maçonnerie : Pierre
Jacques en 1759 à la Parfaite Amitié et Antoine ensuite. Cette situation le rassurait surtout
pour Pierre Jacques qui après s'être égaré dans la fabrication de l'or avec Pierre Antoine
PERNETTI bénédictin convertit aux sciences arbitraires et hermétiques qui n'ont démontré,
passa son doctorat de médecine en 1761 et fut nommé préparateur et démonstrateur royal de
chimie à la Faculté de Montpellier.

1765 - La Grande Loge des Maîtres Réguliers de Lyon était constituée de Quarante Neuf
Maîtres réguliers y compris des députés de cercle, elle avait des correspondances dans toutes
les loges régulières de France et s'agrégea des filiales de 1765 jusqu' en 1767, à savoir la
Sagesse, les Amis choisis, Saint Jean de la Gloire, le Parfait Silence. Jean Baptiste WILLERMOZ
en fut le Vénérable Maître pendant 2 ans et il devint ensuite son Garde des Sceaux et son
Archiviste.

La fonction était commode pour satisfaire sa curiosité ardente pour tout ce qui pouvait lui
apporter enfin le vrai secret de l'Ordre. La grande loge de Lyon reconnaissait officiellement 7
grades maçonniques : Apprenti, Compagnon, Maître, Maître Elu, Maître Parfait, Maître
Ecossais et Chevalier d'Orient. Mais à cette époque, il était courant de recevoir de multiples
grades et en 1762, plus de 25 grades sont répertoriés. Plus particulièrement, parmi les grades
des Frères de Lyon se trouvent aussi ceux de Chevalier du soleil, de l'Aigle, du Pélican, de Saint
André ou Maçon d'HEREDON. L'inspiration est alchimique et la pierre philosophale est le
centre de toutes les recherches. Le grade suprême en 1761 de Lyon était justement celui de
Chevalier de Saint André. Deux sections spéciales existaient au sein de la Grande Loge
régulière de Lyon : la Grande Loge Ecossaise et la Souveraine Loge des Chevaliers d'Orient.
1766 - Jean Baptiste WILLERMOZ était obligé pour ses affaires de faire un voyage à Paris tous
les ans et cela lui permettait de se rapprocher des loges parisiennes. La Grande Loge de France
était dans un gâchis parfait. Le Comte de CLERMONT n'était en réalité qu'un directeur
indolent, ses substituts menaient les affaires à leur gré. Il se formait des parties, des intrigues.
Malgré cela, elle tenta de restreindre la prolifération des hauts grades, en 1766 elle imagina
une série de règlements pour la Maçonnerie régulière. Ces prétentions adressées à toutes les
grandes loges provinciales, la Grande Loge de Lyon des Maîtres Réguliers se fâcha. Ils
entendaient rester maître chez eux et ils firent signifier par l'Abbé ROZIER en 1766 leur rupture
entière.

Commentaires : nous pouvons être surpris mais cette période révèle que la Franche
Maçonnerie dont les loges militaires sont le point de départ en France, recensait surtout des
nobles et c'est difficilement ouvert à la bourgeoisie sinon pour faire rentrer des cotisations. Et
selon l'origine sociale, certains grades ou états n'étaient transmis qu'à la noblesse. Nous
sommes loin de la volonté et manifestation divine où le symbole de la fraternité agissante
n'est pas vraiment le cœur de cette maçonnerie.

Jean Baptiste WILLERMOZ perplexe devant ces situations, eu connaissance lors de son passage
dans la capitale d'un nouveau système maçonnique. Ce fut BACON de la CHEVALERIE qui
l'entretint de la société nouvelle. Il lui expliqua que son fondateur et Chef était Martinés de
PASQUALLY qui habitait Bordeaux. Les grades y étaient au nombre de Dix (voir tableau
comparé). Tiraillé par le désir de savoir, il fut reçu à VERSAILLES le 7 mai 1767 aux premiers
grades des Chevaliers Maçons Elus Coëns de l'Univers jusqu'au grade de Commandeur d'Orient
et d'Occident et malgré le faste déployé cette réception lui laissa un sentiment d'inachevé car il
n'avait pas perçu les pouvoirs magiques du Maître MARTINES. Le Maître bien que méridional
besogneux et vulgaire et presque illettré, possédait une connaissance superficielle des
commentaires talmudiques de l'Ancien testament et des thèmes cabalistiques, quelques
notions d'Hébreu mais ce qu'il savait, il le savait de tradition.

Commentaires : Nous savons désormais par la Charte Royale de mai 1738 que Charles Edward
Stuart (1720-1738), dit le Jeune Prétendant, comte d'Albany, prince d'Angleterre, d'Ecosse et
d'Irlande donna au Père Martinés de notre Mystique âgé de 64 ans « Dom Martinés Pasqually
de la Tour de la Case Ecuyer et gentilhomme d'Espagne » né à Alicante en 1671 et que son fils
unique avait 28 ans.

Sur les déclarations imaginaires d'une origine juive convertie en marrane, il est intéressant de
lire l'histoire de l'Espagne à cette époque. Le Père Pasqually ne pouvait pas être d'origine juive
en étant né à Alicante en 1671 puisque l'extrait ci-dessous nous démontre cette impossibilité.

« Rendu public le 29 avril 1492, le décret ordonne l'expulsion définitive avant le 31 juillet 1492
des Juifs refusant le baptême, tous âges et catégories sociales confondus et ne leur permet
d'emporter qu'une infime partie de leur patrimoine. Isabelle, encouragée par son confesseur
Tomas de Torquemada, table sur une conversion massive de Juifs profondément attachés à
leur patrie. Bien que ses plans soient partiellement couronnés de succès avec la conversion
d'un grand nombre de Juifs dont celles d'Abraham Senior et d'autres notables menées en
grande pompe, la majorité des Juifs choisissent l'exil ».

Quel que soit l'origine familiale, la conversion par le Baptême purifie l'être du patrimoine reçu
et cent soixante-dix-neuf ans plus tard, le Père Pasqually ne peut être que Catholique ayant été
baptisé pour être adoubé par un prétendant d'Angleterre.
Jacques de LYORON « Joachim de la Tour de la Case Martinés de Pasqually » reprenant le
patronyme de son père espagnol est né à Grenoble en 1710 (1738-28) de Madame Suzanne
DUMAS de RAINAU et il mourut à Saint Domingue le mardi 20 septembre 1774.

Et son acte de mariage dans les archives de Bordeaux confirment qu'il a épousé une pieuse
catholique et son certificat de baptême confirme sa situation catholique en date du 29 avril
1772 lors de son départ pour Saint Domingue. Il finit par s'établir à Bordeaux, où il épousa le
28 avril 1772 la nièce d'un ancien Major d'un régiment de Foix du nom de Mademoiselle
Marguerite de Collas.

Avant tout, il nous faut prendre en compte que de 1738 à 1758, 20 années se sont passées où
le nom de Pasqually n'apparait plus nulle part. Dans une lettre du 2 septembre 1768, il fait
mention que depuis 10 ans, les Frères d'Aubenton, Commissaires de la Marine Royale sont ses
adeptes.

Parcourant mystérieusement le sud de la France en propageant sa doctrine, il recueillit des


Francs Maçons des loges de Marseille, Avignon, Montpellier, Narbonne, Foix, Toulouse.

Dans son voyage dans le sud de la France, il va fonder en 1755, le Chapitre « Des Juges Ecossais
», à Foix, la loge « Josué » lui réserve un accueil intéressé et il fonda un Chapitre « Le Temple
Cohen ». Il se fait Affilié en 1761 par le parrainage du Comte de Maillial d'Alzac, Marquis de
Lescourt auprès de la loge de Bordeaux « La Française ». Il y construit son Temple Personnel et
cette loge devient « La Française Elue Ecossaise » dissoute en 1766. Pendant cette période,
Martinés avait un secrétaire du nom du PèreBULLET, aumônier du Régiment de Foix. A noter
qu'il portait déjà le titre de Souverain Juge au sein de l'Ordre des Cohen. Se rendant à Paris en
1764, il est hébergé par les Augustins, quai de Seine et il se met en rapport avec de grands
Maçons de l'époque, Bacon de la Chevalerie, de Lusignan, de Loos, de Grainville qui seront ses
colporteurs vers l'extérieur. Avec leurs concours, il constitue son 1er Tribunal Souverain le 21
mars 1767 à Versailles et il nomme Bacon de la Chevalerie comme son 1er Substitut.

1768 - Dans cette période d'expansion, des officiers du régiment de FOIX tels que BALZAC,
CHAMPOLLON, GRAINVILLE, s'étaient fait initier à la société nouvelle. Ce régiment fut une
vraie pépinière et il y recruta Louis Claude de Saint Martin. La carrière du Franc Maçon COHEN
est divisée en trois étapes. La première comprend les grades symboliques maçonniques que
sont : Apprenti, Compagnon, Maître, auquel s'ajoutent ensuite les grades COHEN que sont :
Apprenti Cohen, Compagnon Cohen, Maître Elu Cohen, Grand Architecte, Chevalier d'Orient,
Apprenti Réaux Croix et le sublime grade de Réaux-Croix ce qui fait 10 états au total. Ce
dernier grade n'étant donné qu'à un cercle restreint capable de comprendre la doctrine de
MARTINES. Un peu comme celui de Profès et Grand Profès dans la Maçonnerie Rectifiée qui
sera construit par WILLERMOZ sur le modèle du R+C.

Commentaires : Il serait trop long de rentrer dans le détail de la profession de MARTINES, mais
la théosophie théurgique qu'il développe dans sa méthode prétendait pouvoir permettre à
l'homme de retrouver l'état de gloire sur lequel l'homme a été créé. Grâce à l'humilité des
formules pendant les équinoxes, le Réaux-Croix peut redevenir « homme Dieu créé à la
ressemblance de Dieu » et Dieu les inscrira sur le registre des sciences qu'il ouvre aux hommes
de désir. Mais ce sujet est trop complexe pour le développer simplement ici et nous y revenons
plus loin.

MARTINES écrivait régulièrement à WILLERMOZ afin de lui révéler ses enseignements et ne pas
laisser tomber la flamme de son élève. WILLERMOZ dont sa volonté était pur et son désir très
vif d'avancement spirituel hésita presque un 1 an avant de répondre. BACON de la CHEVALERIE
Substitut Universel décida de recevoir Jean Baptiste WILLERMOZ Apprenti Réaux-Croix.

Le 7 mai 1768 MARTINES accorda sa permission de principe accompagnée de quelques


réserves. Il considérait que cette réception était prématurée et surtout il donna beaucoup de
précisons afin que cette cérémonie se passe au mieux. Vu la complexité de l'ordination de
Réaux-Croix, je ne détaillerais pas celle-ci dans ce document. Ce que je peux en dire c'est que
cette réception passe par une magie cérémonielle à laquelle on se prépare par l'abstinence et
une rigoureuse discipline intérieure. Les opérations se font pendant les équinoxes du
printemps et de l'automne, les nuits de lune croissante et dures plusieurs jours.

Commentaires : Les opérations cohen pourraient faire penser que nous sommes très loin des
recherches morales ou matérielles que l'on trouvait dans la Maçonnerie de l'époque, mais Jean
Baptiste WILLERMOZ considérait bien qu'étant profondément croyant et catholique que le
pouvoir surnaturel auquel MARTINES le conviait ressemblait aux hypostases que reconnaissait
l'église par ses Saints : clairvoyance, extase, miracle, chasser les démons et évoquer les anges.
Et puis MARTINES se montrait très respectueux des valeurs chrétiennes, et la science des
Coëns gardait un cadre proche des Rose-Croix et de la Franche Maçonnerie. Mais
malheureusement, ces espoirs ne furent pas positifs, à l'équinoxe d'automne le 27, 28 et le 29
septembre 1768, il devait recevoir son ordination sympathique. En tant qu'Apprenti R+C il ne
travaillait que le quart du cercle des opérations. Mais les éléments ne seront pas au rendez-
vous et MARTINES informa WILLERMOZ qu'il devra patienter 6 équinoxes, c'est-à-dire trois ans
pour être complètement promu Réaux-Croix.

1769 - Jean Baptiste WILLERMOZ vint à Paris au printemps, il avait beaucoup de


renseignements et de conseils à demander au Substitut Universel et au Marquis de LUSIGNAN.
Selon la lettre qu'il écrivit de Paris à PASQUALLY le 29 avril 1769, ayant connaissance des
inconséquences de MARTINES, il exposa en des termes très sévères, toute l'étendue de sa
désillusion. Le Maître lui conseilla de se rapprocher de M. de GRAINVILLE et celui-ci ne fit que
confirmer que si les pouvoirs de MARTINES n'étaient pas contestés, sa capacité à développer
l'ordre semblait impossible.

1770 - Cette année là, les opérations d'équinoxe furent encore remises à plus tard. Dans les
opérations plus simples, Jean Baptiste WILLERMOZ n'obtenait aucun résultat. Il souhaita que le
Maître vienne à Bordeaux pour en discuter avec lui, de le faire participer à un colloque, mais
celui-ci se dérobait en prétextant la maladie de sa femme au printemps 1770. Devant cette
dérobade, BACON de la CHEVALERIE, LUSIGNAN et WILLERMOZ organisent une réunion à Paris
afin de mettre au point un plan sérieux de réforme de l'Ordre et ils rédigent en commun une
lettre à MARTINES. Celui-ci laissa passer du temps et il répondit aux conditions posées par le
désir très net de ne pas s'en laisser poser tout en évitant d'exaspérer ses élèves. Pris au piège,
le Maître décida cependant de conserver les principes qui lui convenaient le mieux et affirma à
ses élèves que le secret de la « Chose » que ses disciples lui réclamaient résidait exclusivement
en eux. Pour former un Réaux-Croix, comme il l'avait écrit à WILLERMOZ, il ne suffisait pas
d'être un honnête homme, il fallait surtout avoir des dons personnels et capables de saisir les
manifestations surnaturelles. Il confirma d'ailleurs qu'un noviciat de 7 ans était nécessaire pour
avancer dans les sciences naturelles. Pour calmer le jeu, il informa ses disciples qu'il était en
train de rédiger un ouvrage conséquent et qui apporterait aux Réaux-Croix un outil
pédagogique et initiant sur la vérité de la doctrine du Maître. Il en dévoila le titre alléchant : «
La Réintégration et la réconciliation de tout être spirituel créé avec ses premières vertus force
et puissance dans la jouissance personnelle dont tout être jouira distinctement en la présence
du créateur ». Malgré cette promesse, WILLERMOZ n'était pas satisfait et on peut constater
que malgré son désir de découvrir ce fameux secret, il n'était pas prêt à toutes les concessions.

Commentaires : il faut savoir que des hommes comme MARTINES de PASQUALLY n'étant pas
de noblesse, n'ayant pas de métier particulier sauf celle de l'armée pendant une période, donc
il ne bénéficiait pas de fortune personnelle. La science de l'esprit devait leur permettre
d'obtenir des revenus conséquents et lui permettre d'en vivre.

Les autres Réaux-Croix que sont BACON de la CHEVALERIE, LUSIGNAN, de GRAINVILLE et Louis
Claude de SAINT MARTIN continuent de croire au monde spirituel ou PASQUALLY les a
introduit. Alors que WILLERMOZ n'en avait pas encore vu les bienfaits malgré tous ces efforts.
MARTINES pris un secrétaire particulier pour rédiger les rituels en la personne de l'abbé
FOURNIER et fin 1770, plusieurs instructions et rituels sont prêts surtout pour les opérations
d'équinoxe. Un autre secrétaire bénévole vint renforcer le Grand Souverain des Coëns dans ses
travaux en la personne de ST MARTIN qui avait abandonné la carrière de l'armée. Il essaya de
mettre de l'ordre dans les papiers de MARTINES pour répondre aux demandes incessantes de
WILLERMOZ.

1771 - Le 2 mai 1771, WILLERMOZ n'a pas le cérémoniel d'ordination des Réaux-Croix, ce qui
est plus grave pour un Maître de Loge, c'est qu'il n'a pas non plus les premiers grades dits
bleus, l'Elu et les trois Coëns lui font également défaut.

Tous ces manques mettaient mal à l'aise WILLERMOZ qui devait transmettre à ses Frères
lyonnais la fibre spirituelle dans laquelle il s'était lancé. Il essaya de rencontrer de nouveau
PASQUALLY en avril 1771 mais celui-ci ne fera rien pour faciliter la rencontre. On ne sait pas si
le résultat de cet entretien fut convaincant pour WILLERMOZ, jusqu'à son Frère docteur qui lui
écrivait : « La croyance ne se donne pas par l'envie d'y croire expliquait-il, cependant je ferais
ce que je pourrais pour y parvenir et je tiendrais tous les engagements que tu prendras pour
moi ». En dépit de tout cela, le pouvoir de séduction du mage bordelais eu encore une fois gain
de cause. WILLERMOZ se décida à rester Réaux-Croix pratiquant non satisfait. Il recruta pour
l'Ordre un de ses amis en la personne de l'abbé ROZIER, franc maçon expérimenté, naturaliste
distingué. Le concept de MARTINES le séduira et il passa de longues heures en compagnie du
Maître pour être témoin de phénomènes extraordinaires. Tout flatté de l'intérêt que lui portait
ROZIER, le Maître se tint sur la réserve; lui fit marquer le pas en le laissant au grade de Coëns.
PASQUALLY se méfiait des Prêtres et cette méfiance était aussi pratiquée par GRAINVILLE et ST
MARTIN. Mais WILLERMOZ supporta tous ces revers et St MARTIN devint un correspondant
avisé, en lui envoyant les cahiers des grades, instructions pour les cérémonies, pour les
réceptions, pour les ordinations que les lyonnais ne savaient pas encore exécuter
correctement. Ainsi St MARTIN, FOURNIE, GRAINVILLE apportaient à WILLERMOZ la possibilité
d'entrevoir la lumière, sinon par illumination surnaturelle, du moins dans les envois de l'Orient
de Bordeaux. La doctrine se dégageait de mieux en mieux de ses pratiques cérémonielles pour
devenir une théosophie hardie. La première partie du Traité de la Réintégration était écrite.

Commentaires : Selon MARTINES, la chute originelle a été générale. La révolte des êtres
spirituels a précédé celle de l'homme. Dieu avait créé ceux-ci pour célébrer sa gloire, mais les
ayant émanés de lui, ils les avaient fait distincts et libres et les avaient placés dans un premier
cercle. Cette contemplation ne leur ayant pas suffi à tous, ni le soin des causes secondes,
puissances, vertus, opérations qui leur étaient dévolus, certains voulurent égaler DIEU par leur
volonté criminelle. En punition DIEU créa l'univers pour être leur prison, lieu fixe où ces esprits
pervers avaient à agir, à exercer en privation de toute malice. L'univers crée, DIEU émana un
être qui en devait être le gardien et le maître ; l'homme. Venu après les premiers esprits, il leur
était pourtant supérieur de par la volonté divine qui l'avait créé son émule, homme -Dieu et
Réaux-Croix véritable. Il était le maître de l'univers et de ses trois parties : l'univers, la terre, le
particulier. Le particulier comprenant tous les esprits terrestres et célestes, l'homme primitif
était donc le maître des bons comme des mauvais anges. L'homme aussi était libre et fut grisé
de sa puissance. Son choix le porta à entrer dans le plan démoniaque, au lieu de suivre le plan
divin. Son esprit enfanta le mal : Il essaya d'égaler DIEU. Sa prévarication répète celle des être
spirituels. Le résultat de son opération criminelle fut une forme matérielle, qui ressemblait à sa
propre forme glorieuse mais avec le défaut d'être passive et sujette à la corruption. ADAM
avait par son orgueil opéré la création de sa propre prison. La punition ne se fit pas attendre.
DIEU le transmua dans cette enveloppe impure qu'il avait créée et ainsi, au lieu de pouvoir
avoir une postérité spirituelle, en associant sa volonté à celle du créateur, il n'eut qu'une
postérité d'homme impur et passif. Il fut précipité du paradis terrestre, couche glorieuse qui
était son domaine, sur la terre qu'il dominait autrefois, pour y habiter comme le reste des
animaux. Telle est la façon dont MARTINES considère la chute du monde et de l'homme.

La religion selon MARTINES ce moyen de réconciliation doit donc nous mettre en mesure de
communiquer avec les esprits purs et de dominer les esprits impurs, afin de nous tenir le plus
près possible du créateur. Il y a donc dans la théosophie de MARTINES toute une série de
réconciliation dont les sacrifices furent acceptés par le Seigneur, pour effectuer le salut du
genre humain. Abel, Enoch, Noé, Isaac, Moïse surtout, ensuite Salomon, sont les vrais types de
ces sages « mineurs spirituels ».

PASQUALLY écrit que l'avènement du Christ est le point culminant de ces réconciliations
successives et que sa religion est supérieure à toutes les autres. Le malheur veut que les
hébreux aient par des apostasies répétées, perdu le sens vrai du sacerdoce et que les prêtres
chrétiens, tout comme les prêtres israélites, soient en train de faire de même et d'oublier la
religion de «l'être régénérateur universel ».

Jean Baptiste WILLERMOZ ne s'en détachera jamais. Il avait espéré en cette révélation avant de
la connaitre. Certes pour une part modeste, il contribua à la faire naître en insistant pour
recevoir écrites, codifiées, transformées en corps de doctrine, les vaticinations de Don
MARTINES de PASQUALLY de la TOUR de la CASE.

A suivre quelques éditions du Tableau Universel produit par Louis Claude de Saint Martin dit le
Philosophe Inconnu et qui permet de visualiser la Chute et la Réintégration humaine et divine
dans la Jérusalem Céleste.

1772 - Au mois de mai 1772, parvint à Lyon une lettre officielle de l'Orient de Bordeaux. Elle
annonçait l'ordination de deux nouveaux Réaux-Croix que sont Louis Claude de SAINT MARTIN
et de SERRE, investis de la confiance du Maître et gratifiés d'un pouvoir opératoire complet.
Sur la deuxième partie de la lettre, on annonçait que le Maître devait partir pour Saint
Domingue pour réclamer un héritage. Il s'embarqua le 5 mai 1772. BACON de la CHEVALERIE
ayant reçu délégation des pouvoirs de MARTINES, il finalisa l'ordination supérieure de 5 Réaux-
Croix : SAINT MARTIN, WILLERMOZ, de SERRE, d'HAUTERIVE, et LUSIGNAN. JEAN BAPTISTE
WILLERMOZ n'avait d'autres délassements que la Maçonnerie. Il ne jouissait d'aucune
consolation philosophique ou surnaturelle. Sa disgrâce le privant de toute importance chez les
Coëns, il demeurait incertain même d'être un « mineur spirituel ». Chef de Loge sans
expérience théurgique et sans pouvoir, le Réaux-Croix lyonnais était comme l'écrivait
MARTINES en avril 1774, en regard de la Chose, le dernier. WILLERMOZ s'était repris d'intérêt
pour la Franche Maçonnerie Régulière. Il ne faut pas oublier que de tous ses Frères,
WILLERMOZ en tête s'était attaché à ce nouvel ordre pour réformer la Maçonnerie Française
qui était éparpillée dans ses doctrines, dans ses grades et dans ses fonctionnements. Le 5 avril
1772, le Duc de Chartres, Louis Philippe d'Orléans cousin du Roi, accepte sa nomination
comme Grand Maître. Il envoi dans les provinces une circulaire pour y retrouver l'autorité que
la Grande Loge du Comte de CLERMONT avait essayé d'exercer. Ce fut une forme de
résurrection pour les Frères lyonnais et la question est posée de savoir si Lyon va s'agréger à
cette nouvelle Grand Loge. Les lyonnais envoient un mémoire avec les attentes et les griefs
pour être présenté aux réunions de décembre 1772 afin d'unifier les codes, les grades, les
instructions etc. Sous l'impulsion du Duc du Luxembourg accesseur du Grand Maître que fut
transformée la Grande loge nationale en Grand Orient, son nouveau titre. Sous ce nouveau
souffle, WILLERMOZ repris de l'activité sur la région lyonnaise et œuvra pour réformer
localement. Sa préoccupation de trouver la meilleure maçonnerie est si vive que certainement
il devait se sentir inquiet de revenir avec ses amis au sein de la société lyonnaise dont il avait
blâmé le peu de sérieux, la frivolité, le vide. La concertation avec les autres loges provinciales
permis d'obtenir une réponse aux questions posées par les Lyonnais. Le 18 décembre 1772, les
loges suivantes ont répondu : Union parfaite de la Rochelle,, Saint Jean d'Ecosse de Marseille,
Saint Jean d'Ecosse et Etroite Observance d'Aix en Provence, Saint Jean d'Ecosse de Toulouse,
Deux réunies et Bonne Foi de Montauban, Sagesse de Valence, Parfaite Union et Parfaite
Vérité de Carcassonne, Sincérité de Besançon autant de soutien que WILLERMOZ a fait réagir.
Aussi se jette-t-il plein d'espoir suite aux correspondances des Frères strasbourgeois et il
découvre que la loge la CANDEUR s'était rattachée en adhérent à une réforme allemande qui
représentait le nec plus ultra de la Franche Maçonnerie. Deux cent loges du nord de
l'Allemagne s'étaient mises sous cette bannière. Bien qu'échaudé à plusieurs reprises,
WILLERMOZ à 42 ans s'est précipité dans cette nouvelle voie et dès le 14 décembre il demanda
à s'y affilier.

WILLERMOZ écrit au baron de HUND et des échanges de lettre avec la loge de METZ
s'établissent et la Vertu l'avait mis au printemps 1761 sur la piste d'un Mystère à éclaircir. Il
obtint de MEUNIER PRECOURT ancien Vénérable Maître de la Loge de METZ, le catéchisme du
grade de « Grand Inspecteur, Grand Elu » avec des explications que peu de personnes
possèdent. Ses révélations viennent se confirmer à l'été par une lettre démontrant que les
Francs Maçons sont les descendants des Chevaliers du Temple et plus particulièrement ceux
qui connaissent le Grand Œuvre. L'histoire des Templiers et de Jacques de MOLAY leur Grand
Maître venait de se manifester à WILLERMOZ. Il fut très intéressé par les précisions de son
correspondant. Bien que peu connu en France, ce rite était très connu en Allemagne. MEUNIER
de PRECOURT connaissait cette source et il cita les Chevaliers Teutoniques, les Rose Croix
Allemands comme ayant été les intermédiaires entre l'Ordre du Temple et la Franc
Maçonnerie. Depuis la seconde moitié du 18ème siècle, les occultistes espéraient trouver chez
les Maçons quelques initiés portant des secrets inconnus et à partir de 1760, le grade de Rose
Croix apparait dans les hauts grades du rite français.

1773- le Baron HUND lui fit répondre que le 18 mars 1773 par le baron WEILER.

Cette réponse partait du principe que WEILER n'avait pas très bien compris le sens de la longue
lettre de WILLERMOZ, et il réclama la liste des Frères intéressés par cette affiliation pour faire
une nouvelle loge. Les Frères lyonnais comprirent dans la réponse que cet ordre nouveau
allemand voulait rétablir l'Ordre du Temple de Jacques de MOLAY, divisé en 9 provinces dont
Lyon serait la 9ème sous le titre de province d'Auvergne. WILLERMOZ dut à partir de cette
réponse convaincre les Frères les plus importants de la nécessité de s'affilier à cet ordre
allemand. Il sut les convaincre (Prost de Royer, Boyer de Rouquet, Pagannuci) et obtenir leur
accord le 21 juin 1973. Malgré certaines informations contradictoires sur la Grande Loge
Allemande, WILLERMOZ avait trop envie de croire en l'excellence de la réforme de DRESDE,
trop besoin d'espérer d'elle un complément d'organisation et peut être de sciences secrètes
pour qu'il ne fût prêt à accepter toutes les explications et à les faire admettre à ses amis
encore réticent. WILLERMOZ voulait jouer sur les deux tableaux en restant pour les grades
symboliques au Grand Orient et s'affilier à la loge allemande pour les hauts grades. Il
s'appliqua à cette contradiction jusqu'en 1774 mais cela ne fonctionna pas et la Stricte
Observance Templière ne pouvait le concevoir. En 1773, il y avait environ 80 loges rectifiées,
dont une trentaine comprenait des chapitres de chevaliers. Malgré cela, la SOT montrait des
signes de décadence et le Baron HUND avait monté son ordre sur une mystification. Il avait
prétendu que le secret mystérieux de cet ordre lui avait été révélé à Paris par des dignitaires
qui devaient rester inconnus et que c'était ses Supérieurs Inconnus qui étaient les maîtres des
destinées de la Stricte Observance. Au convent de KOHLO le 24 juin 1772, les Frères allemands
se réunirent et ils décidèrent d'enlever toute autorité au Baron de HUND et de nommer à sa
place Ferdinand de BRUNSWICK, Eques a Victoria comme Supérieur et on changea même le
nom de l'ordre en » Loges Ecossaises Réunies ».

Commentaires : à la lecture de ses épisodes à histoire multiple, au changement de chef, à la


tergiversation sur les origines de la doctrine enseignée, on peut s'étonner et se poser
beaucoup de questions sur le sérieux des Frères de l'époque qui suivaient tel noble, tel
illuminé, tel aventurier, sans contrôler la véracité de sa source ou de sa doctrine au bénéfice
que s'il avait su enrôler quelques nobles ou frères déjà connus, la réussite du projet avait de
grandes chances de perdurer. On ne peut que s'étonner voir être stupéfait que la tradition
maçonnique servait de faire valoir à un grand nombre d'imposteurs qui arrivaient à prospérer.

1774 - il est vrai que trente cinq ans après cette date, et retrouvé depuis dans les protocoles du
Chapitre Ecossais de Lyon, JEAN BAPTISTE WILLERMOZ écrivait aux Frères de la Triple Union de
Marseille que l'adhésion à la réforme allemande ne se fit pas aisément, qu'il passa de long
moment de réflexion avec les Frères lyonnais, qu'il lui aura fallut deux ans d'effort pour obtenir
la permission d'associer tout un groupe de « bons Frères » à son initiation personnelle.
Mais en réalité, il reconnait qu'il a négocié seul cette affiliation pour ses Frères à leur insu, et
ce fut ensuite lorsque tout fut terminé qu'il informait ses amis de ce qu'il avait fait pour eux et
je les comblais de joie (sic).

Jean Baptiste WILLERMOZ tout en restant affilié au Grand Orient, tout en ayant affilié ses
frères lyonnais et lui-même à la Stricte Observance Templière, continuait de travailler comme
Réaux-Croix, s'occupant activement des Elus Coëns de Lyon et l'organisation du Temple des
Philosophes Elus Coens de la région. On peut constater son éclectisme et sa grande capacité à
s'engager sur plusieurs fronts et doctrines en même temps. Très attaché à sa famille, il
accueillit Madame PROVENSAL sa sœur veuve en 1769 avec un fils à élever. Cette femme très
pieuse apporta un réconfort à WILLERMOZ et lui tient sa maison. Elle était fort attirée par la
voie mystique et très croyante, WILLERMOZ décida de la recevoir dans l'ordre Coëns malgré
l'avis éloigné et négatif de MARTINES. Mme PROVENSAL fut régulièrement admise avec un
accord de sympathie de MARTINES de l'autre coté de l'atlantique et un cérémonial spécifique
pour le sexe faible devait être rédigé. Mais le Maître tardant à envoyer cette instruction,
WILLERMOZ décida de s'en passer et suivant les conseils de SAINT MARTIN de BORDEAUX, il
ordonna sa sœur.

Cet acte donna l'occasion à SAINT MARTIN de se rapprocher de WILLERMOZ et celui-ci


demanda à ce qu'il vienne enseigner l'instruction aux Frères Lyonnais.

Partis de Tours en aout, il arriva le 10 septembre à Lyon. Ce rapprochement fait que SAINT
MARTIN demanda à WILLERMOZ de l'héberger ce qu'il accepta et une amitié très forte se noua
entre les deux hommes. Ils purent travailler ensemble sur les exercices de Réaux-Croix et la
maternelle attitude de Madame PROVENSAL augmenta les liens qui les unirent. Mais malgré
tous leurs efforts, les grâces surnaturelles provoquées à l'équinoxe d'automne ne furent pas
accordées à leurs opérations communes et SAINT MARTIN lui-même généralement favorisé,
éprouva en compagnie de son ami un repoussement très marqué dans l'ordre spirituel. Le
bénéfice de ce séjour fut plus intellectuel que surnaturel.

Commentaires : Lorsque l'on y réfléchit et que l'on regarde avec attention les différentes
manifestations que les équinoxes doivent provoquer dans les opérations coëns dites «
théurgiques », on constate que BACON de la CHEVALERIE, LUSIGNAN, HAUTERIVE, SAINT
MARTIN se félicitaient d'avoir pu constater certains phénomènes ou en tout cas ils en parlaient
comme tel, alors que WILLERMOZ échouera tout au long de sa vie et cela explique peut être sa
détermination à renouveler sans cesse ses opérations pour obtenir les mêmes phénomènes.
Comme le disait d'ailleurs MARTINES, il ne suffit pas d'être un homme honnête pour réussir
ces opérations, il fallait ressentir autre chose.

A la lecture de ce constat, on peut se demander si WILLERMOZ avait bien les qualités requises
et que si son parcours ou sa carrière maçonnique confirme qu'il avait de formidables qualités
d'organisation, une autorité naturelle sur ces Frères en rapport aussi avec ses qualités
humaines, sa capacité à rassembler, sa capacité humanitaire avec le rôle joué dans les hospices
de Lyon mais que tout cela ne faisait pas de lui un visionnaire ni un mineur spirituel selon
l'Ordre de MELCHISEDECH. (Référence : Epitre aux Hébreux)

En juillet 1774, le baron WEILER vint à Lyon pour rectifier tous les Frères lyonnais selon le rite
allemand. Le Commissaire et visiteur spécial dit « Chevalier de l'Epi d'Or » se présentait comme
l'envoyé spécial de l'Ordre. On pouvait penser que des Maçons aussi instruits, la cérémonie
serait rapide. L'ordination en Chevalier Templier ne fut pas simple, l'initiation fut longue, et il
fallut pendant le 1er mois près de 17 séances. Le 23 juillet, tous reçurent leur nom d'ordre en
latin, leur devise.

Jean Baptiste WILLERMOZ fut reçu BAPTISTA AB EREMO pour nom d'ordre, son blason
représentait « un Hermite avec la lance sur l'épaule en champ d'azur » et pour devise «vox in
déserto» et l'inscription «verba ligant ».Les Frères avaient autant besoin de s'initier que de se
représenter appartenir à un ordre structuré : L'Auvergne 2ème province de l'Ordre comprenait
24 districts : la Picardie, La Normandie, la Bretagne, l'Ile de France, la Champagne, le Blésois, la
Touraine, l'Anjou, le Maine, le Berry, le Nivernais, le Bourbonnais, l'Auvergne, le Lyonnais, le
Forez, le Beaujolais, les Dombes, le Viennois, le Dauphinois,, le Comtat Venaissin, la
principauté d'Orange, la Savoie, le Comté de Nice, la Principauté de Monaco, territoire
immense où devait prospérer autant de Grandes Loges Ecossaises.

Les Chefs de ses grandes loges, les Maîtres et les officiers n'étaient pas élus au suffrage
universel, à cette époque ils étaient nommés à vie. WILLERMOZ toujours dans le souci de
rester en arrière, refusa toute charge de 1er rang et inscrivit son nom comme Chancelier en
5ème rang. Le 10 août BAPTISTA AB EREMO prononça son engagement de Chancelier et
Archiviste à genoux devant le Frère Augustus a Spica Auréa(WEILER) et ensuite le 11 et 13
août, il fut reçu dans la Grande Profession avec un certain nombre d'autres Frères. Seul BACON
de la CHEVALERIE à cause de ses fonctions au Grand Orient, fut SOCIUS. (cette pratique est
toujours en vigueur de nos jours).

A cet époque, les grades et degrés étaient composés de 8 niveaux : Apprenti, Compagnon,
Maître pour la classe symbolique, Ecossais Rouge et Chevalier de l'Aigle Rose-Croix pour la
2ème catégorie qui se voulait intermédiaire et d'attente, et la troisième partie dit Ordre
Intérieur où se transmettait des dignités cachées et les secrets de l'Ordre, et il comptait
l'Ecossais Vert, le Noviciat d'Ecuyer et de Chevalier.

1775- WEILER mourut le 19 novembre 1775 et Charles de HUND resta le seul allemand avec
lequel WILLERMOZ correspond mais il mourut quelque temps après. Les Templiers lyonnais
enterraient aussi ce jour là toutes les illusions et le respect qu'ils avaient porté au temple de la
Stricte Observance Templière. Mais WILLERMOZ toujours quémandeur reçu grâce au baron de
DURKHEIM, Frater ab Arcu, Ministre de la cour ducale de SAXE des premières informations
sérieuses.
Commentaires : cette synthèse des périodes fortes de la vie maçonnique et initiatique de
WILLERMOZ ne peut reprendre en totalité les avatars que la maçonnerie française ou la
maçonnerie réformée allemande de cette période mouvementée lui faisait subir. On peut
considérer que la maçonnerie était devenue un enjeu politique d'un pays à l'autre et c'était un
moyen de galvaniser les nobles et leur désir de conquête. Je n'ai pas voulu en faire le détail car
cela n'a aucun intérêt sémantique. De 1776 à 1778, WILLERMOZ avait compris le désarroi qui
régnait au sein de la Stricte Observance Templière, incapable de trouver la source qui
accréditait le trésor des Templiers et donc par voie de conséquences, les Chapitres allemands
doutaient de l'authenticité de leur système et de la réalité de leurs connaissances secrètes.
Ferdinand de BRUNSWICK réunissait convent sur convent afin de trouver la doctrine et la
cohésion qui faisait défaut à l'ordre.

1777- Le 1er mars 1777 le Grand Maître a Victoria fit conseiller aux Lyonnais de réunir les trois
provinces françaises en convent national pour élire leurs Grands Maîtres afin de pouvoir
participer ensuite aux convents généraux de l'Ordre tout entier. L'ardeur réformatrice de
WILLERMOZ n'avait pas besoin d'être stimulée, et des échanges productifs se mirent en place.
Le protocole du 28 mars 1777 enregistre qu'on aura désormais quatre grades symboliques :
Apprenti, Compagnon, Maître et Ecossais, et qu'ensuite on passe directement à l'ordre
intérieur sans aucune autre distinction intermédiaire. Les Ecossais devenant les dirigeants des
loges symboliques ; ils formeraient les conseils ou comité écossais et choisiraient les candidats.

1778- Mais comme d'habitude des désaccords font surface, des pouvoirs obtenus ou des titres
adoubés par l'un ou l'autre de ces Grands dignitaires mit la zizanie entre les Provinces de
France et les trois Provinces demandèrent qu'un Convent soit organisé à Lyon pour aplanir
tous ces problèmes. Le 28 août 1778 dans une séance bien remplie, il est décidé suite à la
demande venue de l'Orient de Strasbourg et dont l'idée avait germé en Allemagne de
programmer un Convent international en Octobre 1778. A la veille de la réunion des
Directoires Ecossais en un convent appelé Convent des Gaules. WILLERMOZ se trouvait tout à
fait dégouté de cette société, (cette information a été trouvée dans la lettre écrite par lui au
Prince Charles de HESSE le 12 octobre 1781). Il s'était rendu compte que tous ces espoirs et
son empressement de s'affilier à cette réforme allemande avait été une erreur et ne lui avait
apporté aucune satisfaction spirituelle et initiatique. Certes, il cherchait dans la Maçonnerie les
rares et mystérieux secrets dont il la croyait dépositaire, mais il voulait aussi par elle étendre
son influence et devenir à huit clos, un personnage important. Il poursuivait un rêve de
domination personnelle. Rétrospectivement il se fâcha d'ailleurs en 1775 avec Louis Claude de
Saint Martin qui quitta le domicile du lyonnais et renonça aux avantages de l'hospitalité très
appréciable sachant qu'il était sans fortune et privé de ressources.

L'ordre de PASQUALLY n'est pas à l'origine de ce profond différent mais cette société nouvelle
dit Stricte Observance Templière auquel le Philosophe inconnu veut rester à l'écart. Toute
autre occupation est secondaire, toute tutelle même généreuse est refusée : « Quand il s'agit
de sa vie intérieure, aucune question de convenance, de reconnaissance n'a de valeur à ses
yeux ». Cette conviction lui donnera raison, la Stricte Observance Templière malgré les
convents et réformes suscitait de moins en moins d'intérêt et le zèle des Frères faiblissait. Le
jeune Frère de WILLERMOZ Antoine exprimera ses craintes en tant que Maçon et Coën. Il avait
confié souvent à Madame PROVENSAL l'étonnement qu'il éprouvait de constater que leur
frère, qui connaissait « un chemin plus court » eut engagé ses disciples en des voies si peu
sures. Quel besoin d'aller chercher ailleurs les connaissances sublimes que leur société
particulière possède déjà ? Y a-t-il deux vérités possibles ? L'ainé des WILLERMOZ n'était pas
très éloigné, à cette époque, de juger la Réforme avec autant de sévérité que son frère
Antoine.

Un seul moyen s'offrait à WILLERMOZ celui de refondre complètement l'ordre.

Ainsi deviendrait-il la main secourable qui la mènerait à son vrai but.

Les lumières en question était celles qui lui venait de PASQUALLY, elles devaient paraître à
WILLERMOZ tellement précieuses que ces années où il dépensa tant de temps et d'énergie
pour propager en France la SOT, sont aussi celles où il étudia le plus sérieusement la doctrine
Coëns et comprit enfin les fondements de la théurgie originale. Le Réaux-Croix accomplissait
régulièrement ses devoirs de prières, de méditations et d'opérations magiques. Un petit livre
rouge broché d'argent, composé après la mort de PASQUALLY et qui contient l'office des
prières, de six en six heures des Elus Coëns de l'Univers, est usé à force de lui avoir servi. Les
lyonnais durent étudier les redoutables problèmes de la nature de Dieu, selon les conceptions
de PASQUALLY. Elles s'accordaient assez mal avec ce que l'Eglise enseigne de la Trinité,
puisqu'elles considèrent le Père, le Fils et le Saint Esprit non comme trois personnes mais
comme trois facultés de l'Etre Créateur. Ce n'est pas par trois, mais par quatre qu'ils divisaient
l'essence même de DIEU. Selon eux, Dieu est trinitaire par ses facultés et quadruple par sa
nature. Quatre essences ou puissances le constituent entièrement ; pensée, action, volonté,
opération. L'univers créé reproduit cette même division avec l'immensité divine, sur céleste,
céleste et terrestre.

L'homme lui-même, tel que Dieu l'a crée est aussi d'essence quaternaire, reflétant l'image de
son créateur. Si nous entendons bien les termes employés, il parait évident que les disciples de
MARTINES ne séparaient pas DIEU de son œuvre et que leur conception de la divinité se
résolvait, en dernière analyse, dans un panthéisme curieusement précis et compliqué. L'œuvre
divine comprenait le monde des esprits, le monde physique et la création de l'homme.

Commentaires : Si je devais résumer le système de PASQUALLY : Pensée, Volonté, Action : le


tableau des trois facultés puissantes, innées dans le créateur, nous donne une idée du mystère
incompréhensible de la Trinité : la Pensée donnée au Père ; le Verbe ou l'intention donnée au
Fils ; et l'opération attribuée à l'Esprit. Comme la volonté suit la pensée, l'action est le résultat
de la pensée et de la volonté. L'émanation quaternaire de l'homme provenant de la quadruple
essence divine. Représentée par la pensée, la volonté, l'action, l'opération ; dont l'addition
complète le nombre dénaire(10) ou la circonférence qui est l'emblème de la puissance
éternelle et de la création universelle, et son centre invisible, qui représente l'unité invisible
d'où tout provient et dans lequel tout sera réintégré. Distinction importante entre les êtres
spirituels corporels, les êtres spirituels temporels, les êtres spirituels purs et simples. Ils
établissent une classification très précise de ces êtres avec leurs rapports entre eux et ceux
qu'ils avaient envers leur Créateur. Classification que MARTINES avait dessinée d'une façon
imagée dans son tableau universel et sur lequel les instructions rapportent des commentaires
plus ou moins clairs. Lorsqu'on lit avec attention les affirmations de MARTINES, on peut
s'interroger si nous avons à faire à un illusionniste de la connaissance mystique où bien si son
œuvre est d'une telle profondeur et orthodoxie, que l'enseignement des Eglises devient
superficielle et ne présente que le noyau administratif du message de Dieu. On peut soutenir
cette affirmation avec d'autant plus de force que tous ces Frères du siècle des lumières étaient
en grande partie des catholiques très croyant et endoctrinés dès le plus jeune âge du mystère
de la chrétienté. Dans toutes les sources mises à notre disposition, et surtout celle de celui qui
nous intéresse à savoir WILLERMOZ, pieux catholique, croyant engagé auprès des actions de
l'église, son attitude et sa réaction face à cette affirmation de PASQUALLY remet
obligatoirement en cause non pas sa Foi ni sa Croyance envers DIEU mais intellectuellement la
maison « Eglise » qui est censé le nourrir et entretenir sa FOI. On peut donc s'interroger
légitimement sur son rapport avec le message catholique et sa dogmatique qui si elle était
suffisamment claire et riche, si elle avait une valeur d'exemple comme le message du Christ l'a
donné, pourquoi elle détourne d'elle les Hommes et les femmes qui ne trouvent pas les
réponses dans le message de l'église déformée par rapport au message de Dieu par son fils
Jésus Christ dans lequel il s'est incarné pour nous rappeler notre sacerdoce. Et on peut aussi
légitimement ce poser la même question pour la Franche Maçonnerie traditionnelle qui bien
que dévoyée aux yeux de l'église par les bulles papales, s'appuyait sur la liturgie catholique
auquel elle a rajouté des légendes et des mythes comme celui de l'architecte HIRAM ABIF...

La réflexion reste posée et entière et plus j'avance dans ma relation avec DIEU plus je m'écarte
des églises conditionnées par des hommes souvent impurs qui ont su profiter de la croyance et
de la peur populaire pour s'octroyer des droits, des pouvoirs et des privilèges répétés sans
ostentation depuis des siècles..On comprend bien que la rédemption ne peut être quantitative
par le nombre mais seulement qualitative par le peu d'Elus qui sauront s'élever au plus près du
Père pour que son attention soit attirée afin qu'il nous ouvre la porte de son jardin céleste.
Amen...

Les thèses de MARTINES dans son traité de la Réintégration partaient du postulat que les êtres
spirituels étaient coéternels avec le créateur et n'avaient d'autre existence et d'autre
intelligence que celle de DIEU ; seule une libre volonté, dont ils avaient été doués au moment
de leur émanation constituait leur personnalité. Le monde physique était une conséquence de
la révolte des anges. PASQUALLY comblait une lacune de la Bible, enseignait que la matière,
l'espace, le temps, étaient en somme la punition des pervers, la prison où DIEU les avait
enfermés pour y limiter les effets de leur volonté révoltée. Rejoignant les thèses gnostiques,
ces théories voyaient dans le mal l'origine de la matière.

Elles entraient dans toutes sortes de précisions au sujet de la hiérarchie des êtres qui
constituent le monde physique : esprits planétaires majeurs et inférieurs, esprit de l'Axe Feu
central dont dépendent les véhicules ou âmes passives, des animaux, des végétaux, des
minéraux, destinés à l'entretien des formes. Cette classe inférieure des êtres spirituels
corporels se distinguait surtout des autres parce que l'Etre Créateur ne leur avait pas donné de
libre arbitre. Il ne s'agissait pas seulement d'assimiler la doctrine de PASQUALLY, mais aussi de
la compléter. Le Traité de la Réintégration fort complet au sujet de la chute du monde, avait à
peine ébauché ce qui faisait son principal objet c'est à dire pour l'homme : sa régénération(1)
ou sa réédification(2) où sa réintégration(3) au plan divin.

Commentaires : Ces trois appellations sont souvent utilisées dans la textuelle des travaux
maçonniques et très souvent également, des oppositions exégètes se font entre les uns et les
autres souvent sous forme d'un corporatiste exacerbé ou d'une remise en cause de la Foi
chrétienne que chacun porte. Voulant conserver la neutralité de l'auteur qui ne prédispose de
rien mais seulement d'un regard consensuel sur les choses à traiter, j'ai écrit ci-dessous les
définitions de chacun de ces mots ou expressions tels qu'elles sont codifiées dans le Larousse,
dans le dictionnaire des lettrés ou dans l'encyclopédie universelle. En se référant au trois
sources, j'apporte la garantie de bonne foi. Hors en chrétien que je suis et si je travaille à
revenir dans le jardin du Père, seul l'appellation REINTEGRATION me convient et correspond à
ma quête de mineur spirituel. Pour les deux autres, je ne risque pas de me faire ouvrir la porte
de DIEU.

(1)La régénération est la faculté d'une entité vivante à se reconstituer après destruction d'une
partie de cette entité.

(2)La réintégration est l'acte par lequel un élément qui avait été suspendu reprend sa place
dans l'état où il était précédemment.

(3) la réédification est l'acte par lequel une entité se reconstruit après avoir été détruite.

ADAM a dont été réédifié ainsi que tous les hommes, ses descendants, par le CHRIST, mais la
grâce de sa réédification a procuré sa réconciliation personnelle mais sa REINTEGRATION dans
ses droits est retardée jusqu'à la purification universelle de sa prospérité. Le Créateur a voulu
que le Prince de la cour démoniaque put réagir et gouverner par sa pensée mauvaise tout son
empire et que cette triste similitude, fruit de leur crime fut conservée jusqu'à leur repentir la
fit cesser. La science du mal ne peut cesser que par le repentir de ceux qui la professent et ils
sont incapables de se repentir eux-mêmes, si ce sentiment ne leur est pas suggéré par le seul
être qui en eut le pouvoir, qu'ils ont eu le malheur de séduire et d'entrainer avec eux. Si la
miséricorde de DIEU veut opérer quelque chose en faveur des pervers, ce sera par la seule
communication de l'Homme, c'est-à-dire la disparition du mal et la reconstitution de l'Univers
selon le plan divin.

Les notes prises par WILLERMOZ limitent tout de même les ambitions de l'initié, en insinuant
que pendant la vie terrestre, toute réconciliation et à plus forte raison toute réintégration, ne
peut être qu'imparfaite. Le salut était affaire de discernement, il dépendait de trois colonnes :
celle du midi qui est la faculté de choix, celle du nord, qui est la volonté courageuse, celle de
l'Orient, l'humilité.
Les sept grades de l'Ordre étaient les sept degrés de purification qui menaient à l'état de
mineur spirituel apte à se réintégrer. Les symboles et les thèses maçonniques surtout celui du
Temple de SALOMON étaient expliquées à la lumière des doctrines de PASQUALLY. Toute
autre forme de maçonnerie était proclamée Apocryphe. La purification corporelle et
intellectuelle était transmise jusqu'au grade de Maître Elu, la purification spirituelle réservée
aux degrés supérieurs, l'accès aux opérations théurgiques étaient réservées exclusivement à
partir de l'état de Réaux-Croix.

Ce qui est particulier chez PASQUALLY est que son Traité de la Réintégration s'arrête à l'Exode,
donnant MOISE comme le dernier des réconciliateurs étudiés, et on ne sait pas vraiment quel
rôle il attribuait au CHRIST malgré bon nombre de vénération à son égard et qu'il a toujours
prétendu être un bon chrétien.

La Maçonnerie apocryphe dérivée de l'Ordre appelle ses assemblées Loges et non Temples, ils
se nomment Maçons et nous aujourd'hui pour nous distinguer nous nous disons Philosophes
Elus Coëns, instruisait MARTINES.

Mais WILLERMOZ et ses Frères donnaient au CHRIST une place la plus importante afin
d'appliquer au symbolisme les Evangiles dans le vocabulaire coëns. Pour eux, le CHRIST n'est
pas seulement le dernier des réconciliateurs, c'est le DIEU fait homme, le seul rédempteur du
monde. En se substituant à ADAM, son sacrifice dépasse celui d'Abel, d'Abraham, de Moise et
de Salomon. C'est l'opération parfaite grâce à quoi l'homme a obtenu la faveur d'une seconde
naissance spirituelle. Aussi attache-t-il une grande importance à l'Eucharistie, sacrement et
sacrifice, qui continue dans l'Eglise le sacrifice du Calvaire.

PASQUALLY leur avait enseigné que le vrai culte cérémonial a été enseigné à Adam après sa
chute par l'Ange réconciliateur, qu'il a opéré saintement par son fils Abel en sa présence,
rétabli sous Enoch qui forma de nouveaux disciples, oublié ensuite par toute la terre, il a été
restauré par Noé et ses enfants, renouvelé ensuite par Moise, David, Salomon et Zorobabel et
enfin perfectionné par CHRIST, au milieu de ses douze Apôtres. Certes dans cette chaine, le
Christianisme avait une place importante, mais la Franche Maçonnerie y avait aussi sa place
avec d'autres croyances qui venaient de toute la tradition biblique. Les Coëns étaient
persuadés que toutes les formes religieuses ne sont que les restes dégradés du vrai Culte de
l'Eternel et qu'elles ont entre elles de secrètes correspondances. Les églises chrétiennes
n'avaient pas mieux que les autres conservées la tradition qu'un DIEU était venu leur répéter.
Les prêtres avaient perdus le sens du culte qu'ils célébraient. La légende maçonnique du grade
de Maître trouvait ici sa chute et application : les Coëns avaient retrouvé la Parole perdue.
WILLERMOZ se pénétra de l'idée que le secret du vrai culte avait été transmis d'âge en âge par
quelques initiés. Il tenta des rapprochements significatifs entre le cérémoniel des sacrifices de
l'ancien culte et le cérémonial institué par le CHRIST.

Il s'appuyait sur un fragment de Saint Basile de Césarée, d'une lettre écrite par le Pape
Innocent I à l'Evêque DECENTIUS, parce que ces extraits lui semblaient prouver que le
Christianisme primitif était un mystère que seuls connaissaient quelques initiés. Les Cohen se
croyaient parfaitement autorisés à rechercher les analogies entre la religion chrétienne et la
doctrine de PASQUALLY. Parmi les documents laissés par WILLERMOZ se trouve une
instruction à suivre pendant l'élévation qui parait avoir été écrite par Louis Claude de Saint
Martin. Elle associe intimement le triangle maçonnique, la mystique des noms divins,
l'invocation au DIEU quaternaire, l'appel aux Esprits majeurs avec la dévotion au CHRIST,
présent dans l'hostie consacrée. Voici le texte tel qui l'est : A l' instant où le Prêtre prend
l'hostie pour la consacrer, on met les deux genoux à terre, on fait, avec le pouce de la main
droite en équerre, une croix sur le cœur, sur la partie opposée et sur le haut de l'estomac, ce
qui fait un triangle ; on fait une quatrième croix sur la bouche en disant trois fois : KADOZ.

Au moment de l'élévation, on dit : (1) conjuro vos, angeli, archangeli, cherubini et sépharini par
les saints noms de DIEU, intercéder pour moi auprès du Créateur tout puissant... In
quacumque die invocavero te, velociter exaudi me per Christum filium tuum. Amen.

(1)Traduction de l'invocation : je vous en conjure, les anges, les archanges, les chérubins, et les
séraphins par les saints noms de DIEU, intercéder pour moi auprès du Créateur tout puissant,
afin que dans la journée quand je l'appelle, il me réponde à bref délai par le Christ ton fils.
Heureux sont les saints d'esprits car le royaume des cieux leur appartient. St Jean.

Cet éclectisme pourrait paraitre choquant pour un croyant non élevé s'il ne montrait pas
surtout la profonde conviction de ces initiés et leur effort pour associer réciproquement leur
religion traditionnelle et leur foi nouvelle (sic). Cette réflexion est trop complexe pour la
dénaturer dans une caricature et il faut puiser dans le Traité de la Réintégration pour en
connaitre toute la substance avant de tancer les travaux de ces Frères Lyonnais en général et
de WILLERMOZ en particulier.

Commentaires : Ces Frères avaient appris sur la Foi de leur Maître, et sur la confiance accordée
par WILLERMOZ à cet enseignement qu'il avait maintes fois transmis à ces Frères Lyonnais, à
concilier des notions contraires, à croire en un DIEU personnel, tout en ne séparant pas la
puissance éternelle de la création universelle ; à baser un enseignement moral et religieux sur
le libre arbitre des êtres spirituels, tout en refusant à ces mêmes êtres toute existence et toute
pensée en dehors de DIEU ; à donner au Pervers l'initiative et la responsabilité de la création
du mal, tout en croyant à un DIEU unique et seul créateur. On pourrait allonger la liste. Est-il
sage de le faire si nous désirons la comprendre et comprendre ceux qui, sans être atteint de
débilité mentale, purent s'y attacher. Regarder le monde de l'Illumination à travers les verres
du sens commun, de la logique et d'une froide critique, c'est risquer de n'en voir qu'une image
caricaturale et brouillée. Le raisonnement n'est pas l'origine des convictions du mystique. Il
voit, sait et croit tout d'abord ; sa raison ne s'exerce qu'ensuite sur une matière qu'il ne peut
changer, comme un physicien construisant une science sur les données des phénomènes qu'il
observe.

Lecteurs qui que vous soyez, nous conviendrons ensemble que nous sommes très très loin de
la Franche Maçonnerie Traditionnelle et Opérative dans le sens spéculatif du terme. Devant
cette évidence, on comprend mieux pourquoi les Frères nourris aux symbolismes salomoniens
dont la source bien que chrétienne est compagnonnique, ne comprennent pas pour la plupart
dans quelle église ils sont entrés et quand un homme ne comprend pas, il dérive et blasphème
en permanence dans son chemin initiatique.

Le viatique maçonnique permet malheureusement à un trop grand nombre de Frères d'être


comme les brebis égarées et de venir aux tenues de sa loge que pour partager une fraternité
certes, indispensable à son épanouissement, ainsi qu'aux agapes, mais l'essentiel n'est pas là
et les Elus qui sont à coté d'eux souffrent en silence d'une telle iniquité. Prière personnelle : «
quærens, perseverent dolore introducet te dominus sacrificium res ego diligo vos in hoc
respondet petitionem tuam perpetuam tutis area, nisi plenus indigents credentibus sine
cupiditate et sine prudentia. Amen ». Salve Régina des Coëns traduite :

Je vous salue, Reine des anges, mère de miséricorde ;

ma vie, ma douceur, notre espérance, soyez donc notre avocate ;

Et tournez vers moi vos yeux de bonté, et lorsque je serais sorti de cette prison de matière
ténébreuse dans laquelle je suis enfermé ;

Tourner, ces yeux de miséricorde vers nous.

Et Jésus, le fruit béni de tes entrailles, et après ce spectacle de notre exil.

Ô clémente, ô pieuse, ô douce Vierge Marie.

Rodolphe SALTZMAN vient donc à Lyon en Maître des Novices de Strasbourg fin 1777. Le Frère
ab HEDERA resta à Lyon jusqu'à fin 1778 et c'était un homme sérieux, un esprit religieux qui
avait songé à se faire Pasteur et il avait entamé des études théologiques. WILLERMOZ et lui
étaient faits pour s'entendre ayant la même rigueur, le même sentiment que l'ordre bien
organisé était indispensable pour se consacrer à l'étude de la Chose. Ils travaillèrent donc
d'abord à établir une réforme administrative de l'ordre mais WILLERMOZ voulut aller plus loin.
Pour convaincre son invité, il l'initia aux premiers degrés COENS et à sa doctrine secrète.
SALTZMAN fut captif et conquis par les révélations de WILLERMOZ. Il lui conseilla de tenir
TURKHEIM dans la confidence afin d'obtenir son appui. Il fut convenu que l'un favoriserait la
réforme, l'autre la doctrine et le troisième l'administration lors du prochain Convent. Un
Convent général des directoires français serait convoqué.

WILLERMOZ décida de créer une classe secrète celle de la Profession tout en préservant le plus
grand secret de sa réforme. Les nouveaux Chevalier Profès pourraient s'instruire à la source de
la pure tradition rectifiée, puisque WILLERMOZ voulait pouvoir y enseigner la partie
scientifique relative à la maçonnerie primitive. Acceptant de conserver la fiction des rapports
de la Maçonnerie avec l'Ordre des Templiers, il décida de rejeter la légende templière du
régime écossais rectifié et cela dès les grades symboliques. Il devra conserver par contre le
4ème grade d'Ecossais Vert dont les Directoires Français ne savaient que faire mais qui
pourrait être un trait d'union avec les autres rites écossais du royaume. Aidé de SALTZMAN,
WILLERMOZ et ses amis se chargèrent de la réforme des 4 grades symboliques ; l'ordre
intérieur fut confié à THURKEIM tandis que la Profession resta l'œuvre personnelle de
WILLERMOZ.

Sa tache était délicate, il devait y intégrer un précis de la doctrine de PASQUALLY, telle qu'il l'
avait comprise après tant d'années d'expériences, mais il devait faire attention à la part qu'il
pouvait dire et à celle qu'il ne devait pas dire dans ces rituels qui n'étaient pas destinés aux
COENS mais à des Francs Maçons nourris de la légende d'HIRAM.

L'Ordre COENS conserverait seul le secret de son culte singulier, le pouvoir d'y admettre les
néophytes et le soin de les guider dans la pratique des opérations de sa merveilleuse théurgie.
Mais c'était un travail gigantesque de tout réécrire, de tout refaire et au 20 mars 1778, la
commission du directoire déclara qu'elle n'avait pas encore terminé.

Commentaires : arrêtons-nous un instant même si plus en avant nous avons déjà dit et écrit
que la Franc Maçonnerie de tradition était remise en cause dans ses fondements. Nous voyons
bien là que même si nous ne pouvons pas douter de la sincérité de WILLERMOZ et de ceux qui
adhéraient à sa volonté, on distingue que la Franche Maçonnerie de tradition était bien loin de
remplir les esprits mystiques des fondateurs du Régime Ecossais Rectifié. Et que les
préoccupations des uns et des autres étaient de réformer ces doctrines usées et qui se vidaient
progressivement de leur sens, de leur vérité et on peut établir sans offenser qui que ce soit,
que tous les rites qui ont perduré en dehors du Rite Ecossais Rectifié se réunissent toujours sur
des fondations qui n'existent pas ou qui n'ont jamais existé en dehors des légendes que le
temps a rendu crédible et qui continuent de faire croire au profane que la voie de la chose
passe obligatoirement par ces systèmes devenus iniques et sans Foi salvatrice. Mais ma
conviction ne veut blesser personne mais seulement réveiller celui qui lira cette affirmation.
Tout le monde peut croire dans ce qui n'existe pas dès lors qu'il rentre dans un monde que la
vérité populaire présente comme un secret de la nuit des temps mais s'il prend le temps de
travailler à fond le sujet, il doit découvrir et prendre conscience, que celui-ci prend ses sources
sur des apocryphes erronés et apostatiques.

Le 25 novembre 1778 eu lieu le Convent des Gaules à Lyon. Toutes les provinces envoyèrent
un ou des représentants sauf le représentant des Philalèthes SAVALETTE de LANGE que
WILLERMOZ avait insisté pour le faire venir mais celui-ci se déroba. Tout était déjà préparé à
l'avance et les accords tacites pris en amont furent respectés. Le nouveau nom de « Chevalier
Bienfaisant de la Cité Sainte » fut adopté pour l'ordre intérieur à la place de celui de Templier.
Sinon tous ce que nous connaissons de la structure et de l'organisation qui est pratiquée à ce
jour est à l'identique. Mais WILLERMOZ pouvait être satisfait car sous le couvert du secret, il
réussit à faire valider toute sa réforme.

Le Chancelier A FLUMINE révélait ensuite qu'il existait déjà des sages maçons qui se
consacraient à la recherche et à l'étude des vérités éternelles; et que ces « êtres privilégiés »
devaient être autorisés à continuer les fonctions augustes du sacerdoce primitif sans être
troublés par les indiscrétions de leurs Frères.
Pour le plus grand bien de l'Ordre, chacun devait admettre qu'à coté des loges et des chapitres
officiels de Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte existerait des cercles occultes qui ne
seraient communiqués qu'à un petit nombre...

Commentaires : Afin de montrer la véracité de la Profession, un nouvel engagement fut exigé à


ceux que l'on jugerait digne d'y accéder et qui effaçaient tous les serments préalables des
Maçons : « Je promets devant DIEU, dont j'avais hautement professé l'existence, et je
m'engage envers tous mes Frères, sur ma parole d'honneur, de ne jamais communiqué ni faire
aucune mention verbalement, ou par écrit, à aucun homme qui ne sera pas engagé, comme je
me reconnait l'être dès à présent, des intentions secrètes de l'ordre qui vont m'être
communiquées, ou pourront l'être par la suite, à moins d'y être autorisé par mes Frères réunis,
qui auront les mêmes, me reconnaissant dès ce moment indigne de leur estime et de toute
communication envers eux, si je contreviens en aucune manière au présent engagement, que
je contracte librement et volontairement pour mon avancement dans la vertu et la
connaissance de la vérité. Que DIEU me soit en aide.

Sous la date de 1778, signèrent : THURKEIM, WILLERMOZ Pierre Jacques, SALTZMAN, PROST
DE ROYER, BAYERLE, DUPERRET, WILLERMOZ JB, BOYER DE ROUQUET.

Quelques mots sur la Classe Secrète du Régime dit Collège Métropolitain

Commentaires : L'instruction secrète des Profès a été conservée, ce n'est guère qu'un tableau
brossé à grands traits de l'histoire de l'homme telle que l'enseigne la doctrine de la
réintégration. Elle expose sa création comme être spirituel divin jouissant d'une puissance et
d'une science parfaite, sa prévarication qui le dégrade et sa destinée à la recherche des biens
qu'il a perdus. C'est aussi un historique si l'on peut dire, des divers avatars qu'a subis la vérité à
travers les âges et les diverses sociétés humaines ; les initiations primitives d'Adam jusqu'à
l'initiation chrétienne, en passant par l'égyptienne, celle de Moise, du peuple d'Israël et du
temple de Salomon. Certaines étaient d'inspiration divine, comme le Judaïsme et le
Christianisme, d'autre l'œuvre de sages inspirés. Les unes avaient vite succombé à la
corruption, telle l'initiation égyptienne (pour condamner la Maçonnerie égyptienne de
CAGLIOSTRO) qui s'était perdue dans les recherches matérielles ou arbitraires, d'autres
s'étaient associées telle la Maçonnerie issue de l'initiation du Temple qui avait accepté la
révélation chrétienne et qui conservait sa forme ancienne que parce que les Maçons
considéraient que cette forme avait autrefois éclairé leur esprit sur les mystères de l'homme et
de l'Univers.

Il faut remarquer et accepter qu'aucune distinction n'était faite, en pratique, entre le sens du
mot « vérité » et celui que nous donnons au mot religion. Pour le Profès, toute science n'est en
dernière analyse que connaissance de DIEU, et toute la sagesse de l'homme est venue des
souvenirs qu'Adam conservait de l'état de gloire où avant sa faute, il pouvait contempler l'Etre
divin, source unique, d'où découlaient toutes les vérités, toutes les sciences, toutes les
religions humaines et même tous les rites de la classe secrète de la Profession. (Extraits des
statuts de la profession). Le dernier livre de 2017 sur l'origine du Régime Ecossais Rectifié de
Jean Marc VIVENZA confirme que la classe métropolitaine n'a jamais cessé de fonctionner mais
que seuls les Initiés inscrits à la plume sur le Grand Livre de la Profession depuis 1778 à nos
jours, ont été reçus dans celle voulue par Jean Baptiste Willermoz. Tous les autres sont
apocryphes, dénaturés, et inventés par des hommes de peu de foi et instruits sur un Rituel de
même nature.

Extraits des Statuts de la Porfession

Article 1er

La Grande Profession de l'Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte est l'acte par
lequel les Chevaliers et les Frères des classes inférieures du même ordre qui en seraient
trouvés dignes, sont initiés après les épreuves requises à la connaissance des Mystères de
l'ancienne et primitive maçonnerie, et sont reconnus propres à recevoir l'explication et le
développement final des emblèmes, symboles et allégories maçonniques.

Article 2

La Profession se fait en deux temps ou actes qui exigent chacun des engagements particuliers
relativement à leur objet. Le premier, uniquement destiné à indiquer la nécessité et le but des
initiations, n'est que préparatoire au second. Le Chevalier qui est admis à faire ce premier acte
acquiert par là le simple titre de Profès, ou de Chevalier admis à la Grande Profession, à
laquelle il est invité à se préparer sérieusement. Le second, qui est le dernier terme de la
Grande Profession, donne le titre de Grand Profès. Chacune de ces classes à un mot particulier
pour servir aux Frères à se reconnaître entre eux.

Article 3

Les Profès et Grands Profès ne prendront jamais ce titre devant ceux qui ne sont pas de l'une
de ces classes. Ils auront grand soin de ne pas se faire connaître les uns et les autres en cette
qualité aux simples Chevaliers, afin de ne pas exciter en eux une curiosité importante et peut
être leur jalousie. Cet article est d'observance stricte et fait partie des engagements prêtés lors
de leur admission.

On peut penser que les premiers élus ne trouvèrent qu'un moyen pour préserver leurs
connaissances précieuses ; ils décidèrent de les cacher et de les enseigner qu'à des disciples
éprouvés. De là, on peut estimer que toutes les écoles de sagesse et toutes les religions
héritèrent en partie ou en totalité de la sagesse véritable qui avait été cachée. L'instruction des
Profès ne s'y dérobait pas. Elle développa cette opinion chère à WILLERMOZ que l'institution
chrétienne primitive n'avait été qu'une initiation à des mystères sacrés et ineffables. Ainsi,
prétendais-t-on établir que le Christianisme primitif avait été un secret confié à un petit
nombre d'Elus.

Mais le but poursuivi par JEAN BAPTISTE WILLERMOZ était atteint. Le Convent des Gaules
venait de transformer les Directoires Ecossais de la S.O.T en une société mystique fort éloignée
de l'institution allemande dont elle se réclamait. Le tour était joué, malgré des affectations de
modestie, le Chancelier de Lyon était devenu le Maître d'un Ordre Maçonnique nouveau ; le
vrai Supérieur Inconnu des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, de la Jérusalem Céleste et
du saint sépulcre en Palestine, Chevalier du Silence.

Commentaires : La nature a une marche mystérieuse, mais qui peut être saisie. Le voile dont la
vérité se couvre pour être mieux sentie, ne parait point impénétrable à l'homme qui la désire
et qui la cherche sans prévention et sans orgueil.

Les années qui suivirent le Convent des Gaules furent pour Jean Baptiste WILLERMOZ des
années d'intense travail. Dès la clôture le 10 décembre 1778, le nouveau régime fut instauré
dans le Grand Chapitre. Lyon serait selon les plans du Convent comme bien d'autre, le siège de
trois organismes distincts et permanent : Un Prieuré, une Préfecture, une Commanderie.

1779 - Ce ne fut que le 10 mai 1779, que le Code Maçonnique fut imprimé, que les rituels et
documents nécessaires à leur transformation furent remis par le Chancelier national. Dans la
province Lyon, l'ordre se développait, des Frères de qualité venaient en nombre important à
Lyon pour se faire recevoir C.B.C.S par WILLERMOZ.

1780 - Un tableau imprimé des Membres de la Bienfaisance de Lyon compte 16 officiers, 15


Frères agrégés sans offices et 13 affiliés. Mais les intérêts des uns et des autres n'étaient pas
enclin à ne pas provoquer des conflits d'intérêts.

En octobre 1780, Bacon de la Chevalerie vient à Lyon pour exposer au Directoire les difficultés
qu'il rencontrait dans son rôle de défenseur de l'ordre Rectifié. Il avertissait les Frères lyonnais
qu'ils avaient tort de se croire Maître de leur société, même en France, il leur apprend qu'à
Paris des Frères Ecossais Suédois du rite allemand avaient ouvert une loge et ils distribuaient
des grades et des titres sans se soucier de l'autorité de Lyon. Il offrit sa démission. WILLERMOZ
s'employa à calmer son Frère et obtint qu'il conserve ses fonctions. Mais au-delà de ses
querelles, de ses égos récurant, Le Sérénissime Grand Maître a Victoria avait annoncé fin 1979
son intention de réunir un convent général de l'ordre rectifié avec tous les pays représentés et
particulièrement les Français.

Mais WILLERMOZ trop occupé à faire fonctionner son cercle de C.B.C.S et celui de PROFES a
délaissé les choses administratives.
Sa motivation principale était les cercles de PROFES où se conservaient le secret de la
Maçonnerie primitive et après le Convent des Gaules, il avait du avec l'aide de ses
collaborateurs mettre en forme les statuts et règlements ainsi que les instructions des Profès
et des Grands Profès.

Le but était de recevoir les C.B.C.S qui étaient jugés dignes à la connaissance des mystères de
l'ancienne et primitive maçonnerie et propre à recevoir l'explication et le développement final
des symboles et allégories maçonniques.

Commentaires : je renvoi le lecteur à la page 23 où dans les commentaires, il est déjà fort bien
explicité l'instruction et le but du Profès. Sans vouloir être trop présomptueux et reconnaissant
les vertus d'orientation au travail que préconisait WILLERMOZ, on peut se poser une question
fondamentale à ce stade du raisonnement : WILLERMOZ cherchant désespérément le secret
maçonnique comme ultime Graal de la condition humaine, ayant quelques difficultés à se le
faire manifester dans ces travaux de R+C aux équinoxes, on a le sentiment qu'il avait créé dans
cette classe de Profès et Grand Profès une copie plus simple, plus pragmatique dans cette
profession, en tout cas celle dont il était capable de pouvoir l'expliquer, ce qui n'était pas le cas
dans la réception complexe voir imaginaire de l'initiation sacerdotale de PASQUALLY. Si l'on
met bout à bout la chronologie de la vie initiatique de WILLERMOZ, je vais me répéter en
disant que le secret maçonnique n'existe pas au sens propre mais il est né de l'imaginaire des
hommes qui ont besoin de la forme inconnue, de la forme cachée pour se persuader des
mythes etlégendes qu'on leur délivre et qu'ils perpétuent voir pour certains qu'ils font grandir.
Ce qui fait toute la différence avec SAINT MARTIN ou BOEHME.

Et la citation ci-dessous ne fait que confirmer mon sentiment :

« Profès et Grand Profès avaient l'obligation stricte de cacher leur qualité, et naturellement
leurs instructions, au commun des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte. Les statuts et
cérémonials de l'Ordre étaient simples et tout imprégnés de religiosité ; ils employaient les
expressions caractéristiques des Elus Cohen(Henoch) et leur symbolisme original. »

J'ose encore allez plus loin en affirmant que le grade de Profès et de Grand Profès se donnaient
de la même manière « A genoux devant le président de séance, le candidat prononçait son
engagement spécial, faisant de la main le signe maçonnique de Compagnon dans le Rite
Rectifié. Puis, il apposait sa signature au bas de l'engagement. La réception se terminait par la
lecture d'une instruction spéciale, dont nous savons qu'elle expliquait la »vraie cause de
l'initiation et donnait un mot de passe »

Ainsi, introduit dans le cercle des Profès (identique à l'apprenti R+C et au supérieur inconnu) et
Grand Profès (Réaux-Croix et Supérieur Inconnu Initiateur) il pouvait prendre part aux cercles
d'instruction, où régnait la plus grande égalité et où l'on ne faisait rien d'autre, après les
prières rituelles, que de lire et d'expliquer les vérités de la doctrine secrète.

Tout est dit et résumé, nous comprenons mieux pourquoi Louis Claude de Saint Martin s'en
était ouvert à MARTINES et qui en résumé, lui demandait à quoi servait toutes ses
calligraphies, ablutions et cérémonies fort longues etc. pour rentrer en contact avec les
représentants spirituels de DIEU et que celui-ci lui répondit que la nature humaine a besoin de
ce scénario pour y croire. Nous comprenons ainsi que SAINT MARTIN avait compris que seul le
rapport direct avec DIEU était constructif et la Prière était la seule voie de respiration par le
Cœur qui permettrait à l'homme d'y arriver.

Donc, les travaux des cercles martinistes dès lors qu'ils sont engagés avec sérieux, avec des
Supérieurs Inconnus instruits et qui ont compris la pensée de SAINT MARTIN, ils réalisent
exactement le même travail mais épuré de toutes ses manifestations externes.

D'ailleurs, le vrai nom du C.B.C.S réédifié dans la profession est : » Supérieur Inconnu,
Chevalier Bienfaisant de la Cité Sainte, du Saint sépulcre de Jérusalem en Palestine, du
Chevalier du Silence, du Parfait Maçon. »

Ce n'est pas innocent que l'appellation commence par Supérieur Inconnu... la Coagulation est
parfaite.

WILLERMOZ n'avait pas voulu fonder un institut de sciences secrètes à la manière des
PHILATHETES, mais une école de vie spirituelle et de perfectionnement mystique.

Pour connaitre la Vérité, le Profès devait tout d'abord le mériter ; il avait recommandé de
dompter ses passions, de pratiquer la Charité, de faire preuve de courage et de Foi.
L'engagement de la profession était un serment de silence mais surtout un acte de Foi en un
DIEU tout puissant. Le Grand Profès lui affirmait son attachement à la religion chrétienne et
surtout il faisait vœux de perfection.

A la fin de chaque cercle, au moment de la prière où des prières, ils imploraient l'aide de DIEU
et ses lumières. Amen.

WILLERMOZ avait une telle volonté de perfection et il était si convaincu que son enseignement
dépendait des dispositions de ses disciples, qu'il conseillait à ses instructeurs de ne pas trop
user de persuasion envers les sujets lents à comprendre ou portés à la discussion ; le mieux
serait d'attendre plutôt que de hâter artificiellement une instruction qui devait être une
véritable conversion. Il s'entendait rappeler qu'un vrai désir sans mélange de motif humain est
ce qui importe le plus et que le chemin de la science passe par les régions arides du sacrifice et
de la mortification du cœur et de l'esprit. C'est ce que rappelait l'épreuve du miroir au grade
de Compagnon. La doctrine Coën nous le savons établissait entre la nature de l'homme et celle
du monde, d'étroites relations ou correspondances, elle prétendait que celui qui sait lire en lui-
même, connait en même temps le plan divin, et avait toujours accordé une primordiale
importante au désir et au libre arbitre. C'est une donnée de l'expérience que toute vocation
spirituelle exige surtout l'effort. L'âme soit qu'elle cherche la vérité, l'art du divin, a besoin
d'une volonté ferme pour s'abstraire des habitudes et des apparences et tendre vers le monde
spécial de sa contemplation.

WILLERMOZ qui n'était pas parmi les mieux doués, restera toute sa vie assoiffé de merveilleux,
tout en croyant de bonne foi vivre dans les pures régions du monde de l'esprit. Pour tous ceux
qui lui semblaient transgresser ou profaner cette dimension à ses yeux, loin d'irriter sa
curiosité en prononçant son exclusion, on s'efforcerait de le lasser. On ne le ferait avancer ni
en grade, ni en science, on le convoquerait plus, on lui cacherait la date des conférences. Ainsi
serait il repoussé tout doucement et exclu de fait « soit qu'il soit besoin de l'en prévenir ».

Mais malgré cela, la classe des Profès entre l'Allemagne, la France et l'Italie étaient constituée
de plus de soixante membres en 1782.

Commentaires : je peux ne pas retenir mon envie de dire que la disposition d'écarter un Frère
méritant hors du format standard du « bon soldat » comme cet adage l'exprime, fait que
l'exclusion par l'oubli ou le dédain pratiqué vis-à-vis du Frère marginalisé de fait, perdure au
XXIème siècle. Mais DIEU a pourvu à la trahison de l'humain car à chaque époque, il revoit le
monde qu'il a créé et il a le souci de protéger ses fils. Non seulement l'évolution technique à
réduit les distances mais l'intelligence artificielle qui a créé Internet, permet à celui qui est
banni par défaut ou écarté sans motifs sinon celle des hommes prévaricateurs, d'aller
s'abreuver à d'autres sources aussi crédibles et même de progresser plus vite par ce moyen
que les judas qui l'ont écartés. Le syndrome du fils chassé de sa propre famille et qui va faire
fortune ailleurs et qui revient un jour pour montrer au Père que ce bannissement a été un
révélateur magique de ses vraies possibilités ou de cette richesse que DIEU avait déposé en lui
est démontré dans les livres de vie.

Donc, j'encourage tous mes Frères subissant l'opprobre de faux Frères, de croire en eux, il n'y a
pas de malédiction inscrite d'avance, la miséricorde divine veille sur chacun de nous dès lors
que nous prenons le temps de chercher parmi toutes les sources disponibles la vraie lumière
inscrite dans leurs cœurs et ils progresseront plus vite par eux-mêmes que par ceux qui les
écartaient de la voie divine dont ils ne sont pas maître et très souvent incompétent.

Une chose est frappante, c'est que la doctrine des Profès n'est nullement originale et qu'elle
vient de l'enseignement de PASQUALLY. WILLERMOZ n'a ajouté à la science de son maître
qu'un seul complément : l'ingénieuse filiation qui fait remonter aux fils de NOE l'origine des
initiations secrètes, encore ce soit disant, d'une addition originale. « On voit assez qu'elle vient
des instructions de PASQUALLY, enseignant que c'est de sages en sages, au moyen de
l'initiation de quelques élus que s'est transmis le vrai culte divin. Les papiers personnels de
WILLERMOZ contiennent des traces de l'importance qu'eut pour lui cette idée des initiations,
et de la permanence de la vraie doctrine, sous les apparences des cultes divers. » Après le
travail effectué dans les conférences du Temple Elus Coëns lyonnais, les instructions
composées pour les Profès étaient le résultat des efforts que WILLERMOZ avait fait pendant
bien des années pour comprendre la doctrine de la Réintégration et aussi pour la concilier
autant que possible avec l'orthodoxie catholique. »Quelques études, copies, fragments de
lettres conservées dans les papiers de WILLERMOZ attestent cet effort persistant. On peut citer
copie d'un sermon de Pâques 1773 sur la mort du Christ et l'état de l'homme après sa mort. »

Commentaires : comme le Cohen, le Profès apprenait que DIEU est UN, triple et quadruple,
selon qu'on considère sa puissance et sa nature ; que le monde physique a été créé, après la
révolte des esprits, pour être la prison des pervers ; que la matière est d'essence trine, formée
par la combinaison des trois éléments : sel ; soufre ; mercure ; que toute la matière se
résorbera finalement, amenant la disparition de tous les êtres du monde minéral, végétal et
animal ; que tous ces êtres sont des esprits répartis en quatre classes, de plus en plus éloignés
du centre divin selon que leur mission est plus temporelle et leur forme plus matérielle ; qu'il
faut distinguer parmi les êtres, ceux qui sont émanés et sont les instruments passifs de la
divine volonté, et ceux qui sont émancipés et jouissent de leur libre arbitre ; enfin, que deux
forces opposées, le bien et le mal agissent sur l'Univers.

L'histoire de la destinée humaine tenait une place importante dans l'initiation.

L'homme n'a qu'une tache : celle de se réconcilier avec DIEU. Cette tache n'est pas impossible
d'abord parce qu'ADAM a reçu des secours très puissants et ensuite l'œuvre du CHRIST, divin
réparateur universel et son enseignement dont le secret a été connu des seuls disciples, nous a
ouvert la voie et nous promet le succès. Les emblèmes maçonniques se rapportent à cette
mystique et doivent être interprétés d'après elle. Le Temple de SALOMON, d'après les plans
mystérieux reçus de DAVID, et exécutés par SALOMON avec l'aide de HYRAM et HYRAM ABIF
et des premiers maçons opératifs, est construit à l'image de l'homme et de l'univers. Etudier
les symboles du Temple, c'est étudier l'un et l'autre. Quelques éléments d'arithmosophie
(science des nombres), le sens des nombres 3,6,9 par exemple, et du nombre de 4 divin,
complétaient l'instruction des grands Profès.

Commentaires : il me semble que le texte proposé ci-dessus nous prévient d'une chose
importante. Si DIEU a demandé à DAVID puis à SALOMON de construire le Temple sur les
proportions de l'homme, afin que le monde fixe son regard sur cette confirmation, il apparait
évident que sa destruction ensuite était nécessaire pour que l'homme ayant imprimé cette
image aux divines proportions, la transmette oralement à ses proches et ensuite dans des
manuscrits. Sinon DIEU aurait assuré que cette construction devait rester visible. J'ose affirmer
que l'âme des sages de cette époque ou grands prêtres ont conservé cette manifestation de
DIEU dans des secrets bien gardés afin de les transmettre qu'aux Elus susceptibles de les
comprendre ou de les étudier. Je prends en référence d'ailleurs dans le rituel du 1er grade au
Rite Ecossais Rectifié que l'allégorie suivante est rappelé dans les instructions « Pour réédifier
mystiquement le Temple de Salomon » ce qui affirme que le profane reçut doit chercher par
son âme dans son cœur et par une forte spiritualité, ce temple mystique pour en réactiver la
lumière divine et son corps glorieux.

Nous n'allons pas nous arrêter à différentes situations qui n'ont pas d'intérêt particulier sinon
que WILLERMOZ a été victime d'une maladie dans la cinquantaine payant certainement les 30
années passées où il dut continuer son activité de soyeux, s'engager plus avant dans la
profession de foi et sa recherche effrénée et se protéger vis-à-vis de tous les conflits dont il fut
l'objet. De 1778 à sa maladie en 1782, plusieurs tourments viendront l'accaparer et ses amis et
ses collaborateurs décideront de le laisser se reposer. Mais la paix ne vint pas car le
prosélytisme de WILLERMOZ loin de se contenter du milieu maçon français, étendait déjà son
ambition au-delà des frontières. A l'automne de l'année 1779, en octobre un Danois du nom
de PLESSEN qui portait le nom rectifié de : A TAURO RUBRO arriva à LYON muni de lettres
d'introduction d'Italie. Il venait demander au Chancelier de la Réforme du Directoire
d'Auvergne de l'instruire. Le hasard servit à merveille son désir de se renseigner sur les loges
allemandes et de PLESSEN était par ses fonctions en rapport direct avec : de BRUNSWICK et de
HESSE. WILLERMOZ put savoir le résultat négatif des démarches auprès du prétendant Charles
Edouard et de fait cela mettait un terme à la fiction qui faisait des STUARTS les fondateurs et
les directeurs secrets de la Maçonnerie.

1781- La STRICTE OBSERVANCE TEMPLIERE n'avait jamais eu de Chefs Mystérieux, que dans
l'imagination de son Chef fondateur le Baron de HUND.

Malgré tous ses avatars, WILLERMOZ continua d'essayer de plaire à ces princes ou ducs ou
nobles de haute lignée pour faire avancer ses thèses. Le Sérénissime Frère a VICTORIA après
avoir écarté de la grande maîtrise Charles de SUDERMANIE qui en réclamait l'autorité en sa
qualité de Visiteur Général de l'Ordre, Grand Maître de la VIIème province hérité de Charles de
HUND, fort de l'appui de la Maçonnerie suédoise. Le directoire de BRUNSWICK par une
délibération du 14 mars1781 repoussa ses réclamations approuvant ainsi la suprématie de
BRUNSWICK. Le Duc de SUDERMANIE démissionna de toutes ses charges et se sépara de
l'ordre allemand.

Le 18 juin 1781 le Sérénissime fixa par une circulaire la date du Convent de WILHEMSBAD au
15 octobre 1781. Trois mois après, il fait reporter le convent à PAQUES 1782, puis le 20 Mars
1782 fait encore déplacer en juillet 1782.

Entre 1778 et 1781, WILLERMOZ avait rencontré d'autres initiateurs de maçonnerie qu'il avait
su convaincre du secret qu'il détenait. Entre les secrets de WAECHTER et HAUGWITZ,
WILLERMOZ hésitait à s'engager avec eux. WAECHTER déclina l'offre du convent qui devait
unifier toutes ses courants. Le système de HAUGWITZ semblait plus simple et se rapprochait
de celui de LYON. Sur la demande de BRUNSWICK, il accepta de recevoir comme Profès
HAUGWITZ sous la réserve de comprendre sa doctrine et il tenta de le convertir à sa
conception de la nature de l'homme.
Tous les occultistes n'admettaient pas forcément que cette nature triple, était faite du Corps,
de l'Ame et de l'Esprit. La difficulté venait de la définition que chacun donnait à ces éléments
et du rôle qu'ils leur reconnaissaient. WILLERMOZ voyait dans l'âme l'élément secondaire
chargé de gouverner la matière et de diriger le corps; il donnait la prééminence à l'esprit,
tandis qu'HAUGWITZ enseignait que l'âme est la partie supérieure et qu'elle est douée d'une
force magique. En fait il leur aurait suffit de s'entendre sur les mots de cette très ancienne
conception de la psychologie antique, venue d'Aristote et transmise par Saint PAUL.

Les sociétés de Francs-Maçons présentaient donc des genres extrêmement différents selon
qu'elles s'appliquaient à l'un ou l'autre des trois aspects de la science. Un bon régime
maçonnique devait comporter, selon WILLERMOZ trois classes distinctes : symbolique,
théorique et pratique. Il donnait en exemple ceux qu'il avait organisé avec l'Ordre des
Chevaliers Bienfaisants, la classe des Profès et celle des Elus Cohen.

Mais WILLERMOZ, WAECHTER et HAUGWITZ désiraient conserver chacun ses secrets, ses
croyances, sa suprématie, sa personnelle importance. La situation était donc bloquée. La
dessus après WAECHTER, HAUGWITZ se retira et refusa le rôle actif qu'on voulait lui faire
jouer. Le Grand Supérieur a VICTORIA se sentit plongé dans un grand désarroi car il voyait que
le prochain convent allait provoquer le chaos.

Parallèlement de PLESSEN écrivait le 15 mars 1782 à WILLERMOZ que les Frères de l'ordre
allemand réclamaient des comptes à leur Grand Supérieur car sa banqueroute s'élevait à 600
mille écus.

1782 - Joseph de MAISTRE maçon et Grand Profès répondit à cette invitation de Convent
Général à WILHEMSBAD. Il était un de ces maçons qui voulait rejeter le déguisement Templier,
les chimères des Supérieurs Inconnus, les folles prestations ou mystères qui couraient dans les
loges et ne menaient à rien. Pour lui, la Franche Maçonnerie devait se consacrer au service de
la religion et au progrès de l'humanité. Dans son projet, les grades symboliques doivent
enseigner « les actes de la bienfaisance en général, l'étude de la morale, celle de la politique
générale et particulière ». La deuxième classe s'élève au projet ambitieux de contribuer à
l'instruction des gouvernements et à la réunion des églises chrétiennes. Mais WILLERMOZ
s'arrangeait pour que le Frater a VICTORIA n'eut jamais connaissance de ce mémoire du
Chevalier de MAISTRE et ces suggestions n'ont eu aucune influence sur les délibérations du
Convent de WILHEMSBAD.

WILLERMOZ prépara avec soin le convent de WILHEMSBAD, il décida d'abandonner son


activité de commerce qu'il exerçait depuis 30 ans. Muni d'un passeport valable 6 mois, il arriva
quelques jours avant l'ouverture du convent. Il prit connaissance des divers courants de
l'opinion allemande, du moins ceux qui pouvaient favoriser ou contrarier son action. Le livre
des « Erreurs et de la Vérité » de Louis Claude de Saint Martin avait été traduit en allemand en
1781 et il trouvait des défenseurs passionnés dans les cercles protestants. Plus visible encore
était l'extraordinaire popularité des théories et des ouvrages du pasteur de Zurich, Jean
Gaspard LAVATER. L'auteur de la Physiognomonie jouissait du plus grand crédit, ses opinions
en matière de religion et de spiritualité se rapprochaient de celle de WILLERMOZ.

Ainsi l'orientation que les princes allemands voulaient donner à leurs loges avec l'aide de
WILLERMOZ arrivait en un temps où elle pouvait être accueillie et soutenue par un cercle plus
large, plus religieux et d'un mysticisme tout de même de meilleur aloi, que celui où s'étaient
jusqu'alors recrutés tous les amateurs de mystères et de secrets maçonniques.

De son coté WILLERMOZ vint trois jours avant l'ouverture des débats, des conférences
amicales avec les délégués d'Italie, de Bourgogne et d'Auvergne afin de compter ses
supporters. Mais le Marquis de CHEFDEBIEN qui représentait le prieuré de MONTPELLIER et
toute l'Occitanie et qui avait suivi les conférences de WILLERMOZ n'était pas enclin à le
soutenir et on peut supposer qu'il était l'émissaire secret des PHILATHETES. CHEFDEBIEN
devait se procurer des renseignements sur la Franche Maçonnerie Rectifié auprès de Frères
instruits de ses secrets et porter son enquête sur les Elus Coëns. Mais WILLERMOZ avait été
prévenu par une lettre des Grands Profès de MONTPELLIER qui l'avait mis en garde.

On le voit bien que la partie qui allait s'engager à WILHEMSBAD entre toute ses ambitions
diverses et toutes ces différentes doctrines n'était pas simple.

La bataille allait se mener entre :

s Ferdinand de BRUNSWICK qui fera toutes les concessions pourvu qu'il reste le Chef ;

s Charles de HESSE qui défend le système religieux de HAUGWITZ ;

s WILLERMOZ qui veut faire triompher en Allemagne son nouveau système rectifié ;

s Un député italien qui dit toujours oui ;

s Quelques fous hermétiques

s Un espion des ROSE CROIX ;

s Un groupe sensé qui ne veut plus que les deux princes les mènent par le bout du nez.
Le 14 juillet 1782, BRUNSWICK donna lecture du règlement établi par les articles préliminaires.

Une trentaine de députés composaient le congrès de maçons dont certains avaient été
ordonnés au dernier moment dans l'ordre intérieur pour pouvoir voter.

Evitons de développer toutes les objections, basses manœuvres, conflits sous jacents qui
eurent lieu et qui sont peu dignes de l'esprit maçonnique pour dire que le 17 août 1782 à la
18ème séance, BRUNSWICK fut réélu Grand Maître Général. Le 28 août il prêtait serment,
promulgua et signa ses capitulations et s'engagea à répudier la filiation templière et ne jamais
reconnaitre de Supérieur Inconnu.

Mais WILLERMOZ grâce à sa constance, à son art de rester en retrait tout en s'activant et avec
l'aide de ses amis réussit à faire valider par le Convent de WILHEMSBAD l'ensemble de son
œuvre et sa doctrine rectifiée.

EXTRAITS DES REUNIONS DE WILHEMSBAD (source originale)

Considérant que le Convent de Lyon avait en priorité définit les codes et règlements, le pari de
WILLERMOZ à WILHEMSBAD était de faire adopter la doctrine et les rituels et instructions qui
avaient été que des ébauches au Convent de Lyon. Pour mémoire et information détaillée,
quelques extraits ci-dessous montrent l'âpreté des échanges et de la durée des négociations.

Lors de la 14ème séance (3 août 1782)

Un comité fut chargé de préparer les cahiers des différents grades et de les soumettre à
l'approbation des délégués. Composé de sept membres -Charles de Hesse, acquis aux vues de
WILLERMOZ; le chevalier SAVARON, Visiteur Général de la 2ème Province; Sébastien GIRAUD,
chancelier du Grand Prieuré d'Italie; l'autrichien Euber BODECKER; le baron de DURCKEIM,
Grand Maître Provincial de Bourgogne, 5° Province; Chrétien de HEINE, du duché de
SCHLESVIG - ce comité reçut à disposition "les rituels approuvés au Convent de Lyon, les
grades suédois et ceux de la Grosse LANDESLOGE de Berlin, les rituels des quatre grades
intérieurs de la VII° Province et un rituel des Frères CLERICI, également de la VII° Province".

Lors de la 15ème séance (14 août 1782)

Charles de HESSE annonça au Convent réuni en sa 15ème séance qu'après avoir comparé les
anciens rituels à ceux arrêtés au Convent des Gaules, il avait chargé WILLERMOZ de la
rédaction du premier grade. Ce dernier donna lecture d'un projet qui s'intitulait "Rituel
d'apprenti des chevaliers francs-maçons rectifiés". Il s'ensuivit une vive discussion sur
l'opportunité d'un tel titre, le Convent ayant résolu en sa 13ème séance de renoncer à la
filiation templière, non sans maintenir qu'il existait "un rapport" entre l'Ordre du temple et
celui des Franc Maçons, rapport que devait expliciter une "Instruction historique" destinée au
dernier grade du Rite. Finalement on décida de ne pas adopter à ce stade l'intitulé de
WILLERMOZ, tout en reconnaissant aux loges de Vienne et de Berlin le droit de le conserver, si
elles le désiraient. Moyennant quoi le rituel d'apprenti fut approuvé par 15 voix contre 3 après
quelques corrections mineures ne portant que sur le style.

Lors de la 16ème séance (15 août 1782)

Jean de TURCKHEIM, chancelier de la V° Province et ami de longue date de WILLERMOZ,


présenta la Règle (à l'usage des loges réunies et rectifiées) qu'il avait préparée, déclarant qu'il
l'avait conçue en forme d'une prière ou d'une prescription. Une première mouture ayant paru
"trop étendue et trop chargée d'ornements oratoires", il en avait concentré l'essentiel en une
version plus courte et simplifiée. Les deux furent lues à l'assemblée, toutes deux en neuf
articles, la "longue" étant pourvue d'un préambule original et d'un épilogue. Le Convent décida
de les approuver également, la version courte devant être lue à l'impétrant lors de son
initiation, l'autre lui étant remise pour étude ultérieure.

Lors de la 17ème séance (16 août 1782)

WILLERMOZ donna lecture du catéchisme et de l'instruction finale d'apprenti, bien augmentée


depuis l'ébauche de Lyon. Celui-ci suscita un débat assez vif sur la constitution ternaire de
l'homme (esprit-âme-corps) dont le lyonnais voulait qu'elle soit un "secret" (ou "mystère") de
l'Ordre, illustré par les trois coups de maillet que reçoit le récipiendaire lors de sa consécration.
Un délégué allemand, VON KORTUM fit remarquer que la triple nature de l'homme, bien
qu'enseignée "par plusieurs anciens docteurs de l'Eglise", n'était que spéculation
philosophique. Il suffisait à un chrétien de savoir que "son âme séparée du corps était
immortelle". WILLERMOZ rétorqua que cette doctrine était conforme à l'Ecriture Sainte et
explicitement citée par Saint Paul:

"Que le Dieu de paix vous sanctifie lui-même en toute matière et que tout votre être, corps,
âme et esprit, soit gardé irréprochable pour la venue de notre seigneur Jésus-Christ "(1° épître
aux THESSALONICIENS, V.2 3).

Nonobstant cette opposition, le convent arrêta à la pluralité des voix que l'instruction serait
adoptée sous réserve de ratification.

Lors de la 21ème séance (21 août 1782)


Il fut consacré au grade de maître écossais. Certains voulaient sa suppression, d'autres
désiraient qu'il devienne le premier de l'Ordre Intérieur. A l'opinion de WILLERMOZ qui
estimait que le grade écossais devait constituer une classe intermédiaire, séparée à la fois des
grades bleus et de l'Ordre Intérieur, Charles de HESSE ajouta que la maçonnerie, par ses trois
classes, devait représenter le ternaire fondamental : la 1ère classe représentait l'Ancienne Loi,
la 2ème classe devait être l'étape intermédiaire composée d'un ou plusieurs grades, la 3ème
classe la Loi Nouvelle. CHEFDEBIEN, délégué de la III° Province (Occitanie), adversaire déclaré
de WILLERMOZ depuis que celui-ci lui avait refusé l'accès à la Grande Profession, ne voyait pas,
déclara-t-il, la nécessité de cette classe intermédiaire puisque "l'Ancien Testament s'arrête là
où commence le Nouveau". Finalement on résolut que le grade écossais serait considéré
comme le quatrième grade "symbolique" et constituerait une classe intermédiaire entre la
maçonnerie et l'Ordre Intérieur, son objet essentiel étant la résurrection d'HIRAM ABIF et la
reconstruction du Temple. La même séance vit la lecture de l'acte de renonciation à la filiation
templière, reprise en annexe (n° 147) aux protocoles du Convent.

Lors de la 22ème séance (22 août 1782)

Il fut débattu la question des "symboles" des grades dont certains voulaient qu'ils soient
remplacés par ceux en usage dans la maçonnerie habituelle, la colonne brisée et le vaisseau
démâté paraissant une allusion trop évidente à l'Ordre du Temple. On passa outre et
WILLERMOZ put donner lecture du rituel de compagnon proposé par la commission des rituels.

Il fut adopté sans difficulté.

Lors de la 23ème séance (23 août 1782)

Il vit la définition du nombre et du rang des officiers de la loge. Sept étaient essentiels -
Vénérable, surveillants, orateur, secrétaire, trésorier et éléémosynaire -, deux facultatifs -
maître des cérémonies et économe-. Plus importante fut la décision de fixer à 21 ans l'âge
minimum de réception, "de préférence prouvé par un certificat de baptême". Cette exigence
nouvelle n'était pas, on le voit, dictée par un souci d'orthodoxie religieuse (aucun des délégués
n'aurait imaginé qu'on puisse initier un non chrétien) mais bien par la volonté de s'assurer de
l'âge du candidat par le seul document probant à l'époque.

Lors de la 25ème séance (25 août 1782)

Le projet de rituel du troisième grade fut présenté, par WILLERMOZ.

Trois points particuliers furent adoptés :


Les trois coups donnés au récipiendaire le seraient au front, au cœur et à l'abdomen
curieusement WILLERMOZ ne tint aucun compte de cette décision dans ses remaniements
finaux.

L'ancien mot du maître, Jéhovah, ne serait plus enseigné au nouveau maître mais seulement sa
première (J) et sa dernière lettre (A).

Le nombre de larmes sur le tableau serait indéfini alors que WILLERMOZ en voulait 27 au grade
de maître et 81 à celui d'écossais.

Lors de la 26° séance (26 août 1782)

Le Convent, sur proposition de WILLERMOZ, estima opportun d'introduire une prière à


l'ouverture et à la fermeture de la loge,

"à l'instar de ce qui se faisait en Allemagne". Après lecture du catéchisme du 3° grade, les
délégués durent se prononcer sur l'ensemble des trois grades. Après un dernier plaidoyer de
Charles de HESSE, les rituels furent adoptés, sous réserve de ratification ultérieure par les loges
du Régime. Il fut donné aux Provinces jusqu'à la fin de 1783 pour donner leur accord final
(celui-ci ne vint jamais).

Lors de la 28ème séance(28 août 1782)

Elle fut décisive, WILLERMOZ y présenta un "Projet d'ébauche pour servir de base, au Rituel du
4e Grade" qui donna lieu à une discussion animée.

"Le F. ab EREMO a présenté la première Esquisse du nouvel écossais avec le 4ème Grade de
notre Maçonnerie Rectifiée : sur laquelle on a fait plusieurs remarques. On a demandé
l'abolition du gibet & de la corde au cou par les récipiendaires : ce qui a été convenu à la
pluralité. Le F. a CRUCE CERULEA(Hyacinthe CHAPPES de la HENRIERE, député de la Préfecture
de Nancy) a demandé la conservation des deux tableaux de l'Ecossisme du Convent des
Gaules, surtout le Maître HIRAM sortant du tombeau face à l'Orient & l'autel avec le feu sacré :
on a observé, que les nouveaux symboles présentés dans l'esquisse étaient connus depuis de
longues années en France, & y avaient été abandonnés.

Le F. a LILIO CONVALLIUM(BODE) croit que nos maçons ne sont pas encore assez préparés à un
Ecossisme aussi sublime & aussi religieux & a ajouté qu'il se souvenait que le tableau de
l'Ecossisme, il y a 20 ans avait été partagé en trois parties: l'inférieur contenant quelques
symboles & instruments Maçonniques, au milieu le Chandelier à 7 branches: autel des
parfums, table des pains de proposition: l'arche d'alliance & les colonnes du Temple brisés; à la
3ème partie Supérieure il y avait le mont Sion et l'agneau céleste. Le F. ab EREMO a désiré
qu'en adoptant le tapis conforme à celui indiqué par le F. a LILIO CONVALLIUM, on y ajouta le
Maître HIRAM Ressuscité se relevant du cercueil face à l'Orient et se protégeant de la lumière
divine & le feu sacré. Le Sérénissime Charles de HESSE étant entré dans les idées du F. ab
EREMO, on est convenu de faire la rédaction d'après ces principes. "(Orthographe
modernisée).

La conclusion s'impose : à WILLERMOZ échut le soin de rédiger la version définitive du 4°


grade.

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Cependant, le Chancelier de Lyon reçut maintes et maintes preuves d'amitié des princes
allemands qui dirigeaient l'Ordre Rectifié. La dernière fut son initiation au système secret de
GOTTORP. Charles de HESSE y enseignait, d'après ses principes personnels, une doctrine
ésotérique venue des théories de WAECHTER et HAUGWITZ. Sans doute, le fait d'appartenir à
la petite église secrète, dont le landgrave était le pape, consola-t-il un peu WILLERMOZ de
n'avoir pu pénétrer dans l'Ordre du difficile a CERASO. Quoi qu'il en soit, il revint en France
chargé des catéchismes des premiers grades de GOTTORP, avec la mission de les faire
connaitre à quelques Frères choisis de France et d'Italie.

Il est piquant de constater que parti pour convertir les allemands à son régime, WILLERMOZ
revenait l'apôtre d'une autre société et d'un autre système. Mais il était satisfait de ce convent
parce qu'il avait fait inscrire quelques principes et quelques symboles spiritualistes dans les
grades symboliques de l'Ordre Rectifié et il croyait sincèrement avoir jeté enfin les bases de la
vraie Maçonnerie.

Le 30 septembre 1782 il était revenu à Lyon.

Mais la réunion générale de l'Ordre n'avait rien apporté de neuf aux Chevaliers Bienfaisants,
sinon dispositions contradictoires et plans inachevés. Il fallait donc tout d'abord, tracer du
convent de WILHEMSBAD et de son succès une image qui corrigerait la réalité, afin d'en faire
pour les disciples présents et à venir un sujet d'édification. Une circulaire officielle, datée du 8
décembre 1782, fut envoyée aux loges du ressort de la province d'Auvergne. La ratification des
actes de WILHEMSBAD devait théoriquement se passer à la Saint Jean d'Hiver de 1783 mais
rien ne se passa comme prévu. Mais une fois encore WILLERMOZ fit promulguer dans sa
province la règle maçonnique à l'usage des loges réunies et rectifiées et la fit traduire en
allemand.

C'est un fait, que le milieu des occultistes français se trouve au début de 1783, profondément
divisé et que c'est WILLERMOZ qui est cause de ces intrigues, de ces dissensions, de ces
discussions. Francs Maçons et Hermétistes se rendaient compte de la place envahissante que
prenait peu à peu le lyonnais dans le monde des amateurs de sciences cachées.

Dans un cercle qui touchait de plus près encore le Chancelier de Lyon, d'autres adversaires
menaient contre lui de virulentes campagnes. C'est ce qui ressort d'une lettre écrite de SAINT
MARTIN le 10 février 1783. Il semble que certains avaient imaginé d'admettre parmi eux
quelques uns des ennemis de WILLERMOZ, afin de pouvoir combattre ses projets. Où s'étaient
produites ces réceptions scandaleuses ?

A la Bienfaisance de Paris ? Dans un Temple Coën ? Nous l'ignorons.

Pourtant SAINT MARTIN se trouvait mêlé à ces réceptions et même se croyait obliger de les
présider, c'est qu'il s'agit sans doute d'une réunion de disciples de PASQUALLY. Les Coëns
avaient certes de bonne raison pour supporter les libertés que WILLERMOZ prenait avec leur
doctrine.

Ce sont là des hypothèses. Ce qui est certain, c'est que WILLERMOZ appela SAINT MARTIN à
son aide et le somma d'avoir à défendre sa personne et son œuvre, et que le Philosophe
Inconnu se récusa. SAINT MARTIN refusa de devenir le champion de la cause de WILLERMOZ. Il
jugeait sévèrement les variations de son ami. N'oubliant pas qu'il avait été l'instructeur de
WILLERMOZ, il le rappela à un sentiment plus juste de sa valeur intellectuelle et mystique :
«j'aurais désiré, qu'avant de lever l'étendard d'Israël, vous vous fussiez longtemps stylé aux
métiers des armes, j'aurais désiré que, rempli de cette foi que vous savez si bien exprimer,
vous l'eusses employée à votre propre avantage et qu'au lieu de vous lancer dans le tourbillon
des nations vous vous fussiez lancé en DIEU » ; « l'assurance qu'affichait le Chancelier de Lyon
l'irritait ainsi que son incompréhension chronique ; il lui recommandait la Prudence, en lui
faisant sentir qu'après la quarantaine il était temps qu'un sage se défendit de la moindre
considération dans sa conduite spirituelle ».

Les objections qu'il élevait étaient surtout de l'ordre plus général. Le Philosophe Inconnu
essayait de bien faire entendre à son correspondant que cette ambition d'unifier la science
mystique sous une discipline commune, cet espoir de concentrer l'esprit dans les codes et dans
les écoles, afin de pouvoir diriger ses progrès et surveiller sa diffusion, courait à un échec
certain, parce que la nature même de toute mystique est d'être individuelle, libre et presque
incommunicable.

Commentaires : il est difficile de ne pas constater que le système de WILLERMOZ pour celui ou
ceux qui le pratique depuis très longtemps et qui ont réellement travaillé le sujet, ont pris
conscience de l'effort constant et engagé qu'il devait faire pour le comprendre. Et qu'une
grande majorité de nos Frères comme je le dis souvent, en sont restés à l'écorce considérant
que s'instruire du noyau était trop difficile et ce qui rend nos tenues souvent insipides.
SAINT MARTIN reprochait à WILLERMOZ d'avoir modifié le sens profond de l'initiation Coën et
de son Traité de la Réintégration. WILLERMOZ proposait des changements importants de la
doctrine secrète, ce que ST MARTIN en Coën orthodoxe, ne pouvait ni l'accepter ni même le
comprendre, puisqu'il excluait « l'action spirituelle temporelle », le concours des esprits purs
dans les rapports de l'homme avec la Divinité ; c'est-à-dire l'essentiel de la foi secrète qu'ils
tenaient de PASQUALLY.

Pour comprendre le sens de ce passage, il faudrait savoir ce qu'entend désigner saint martin
par « action spirituelle « et «adjuvamentum ». Ces expressions sont elles employées au sens
général ou désignent-elles des cérémonies précises du culte secret. Dans les instructions du
Temple des Coëns de Lyon, l'expression « action spirituelle » est toujours prise au sens le plus
général, elle désigne le rôle dévolu aux esprits purs ; l'action spirituelle temporelle est
proprement leur tache dans le monde terrestre comme intermédiaires entre l'homme et DIEU.
Le mot adjuvamentum reste plus mystérieux. On peut supposer une sorte de cérémonie
d'initiation, communiquant l'esprit aux néophytes et effaçant les suites du pêché original. Il n'y
a aucun acte temporel corporel qui ne soit précédé d'une action spirituelle. La prévarication du
premier homme a fait subvenir un changement dans la loi d'action des esprits et les assujettit à
une action en partie spirituelle et en partie temporelle. C'est par eux que l'homme reçoit
communication de la pensée du créateur. Pour l'esprit pur, il n'y a pas de temps puisqu'il est
toujours en action, son action est la vérité spirituelle et temporelle, parce qu'il est assujetti à
opérer dans les régions du temps.

1784- Du 10 août au 9 septembre 1784, le Chapitre de la Vème Province se réunit à


Strasbourg, dans un convent régional pour essayer de liquider les questions irritantes et
proclamer enfin l'adhésion à la réforme promulguée en 1782. La réunion consacra la
réconciliation des partisans et des détracteurs de l'œuvre de WILLERMOZ et de THURKEIM y
joua un grand rôle conciliateur. Nous passerons sur la rencontre de WILLERMOZ avec
CAGLIOSTRO qui traversa la vie de notre ami sans marquer son esprit. Courant 1783 mais
surtout début 1784, on commença à se préoccuper à Lyon du fluide de MESMER. Celui
prétendait avoir décelé un fluide très subtil, qui unissait les astres et les planètes aux
organismes vivants et qui leur communiquait une sorte d'influx vital, dont dépendait leur
bonne ou mauvaise santé ; la maladie en arrêtait le cours et il fallait le rétablir pour provoquer
la guérison. MESMER avait fait des études de mathématiques et de physique avant de tâter la
médecine ; sa thèse de la faculté de Vienne datait de 1776.

Elle traitait du cours des planètes dans le corps de l'homme. Il avait aussi collaboré avec un
guérisseur viennois, qui soignait les maladies par les aimants. Obligé de quitter Vienne, à la
suite de contestations avec la famille d'une de ses malades, il était arrivé à Paris en février
1778.

Il publia un mémoire sur la découverte du Magnétisme Animal en 1779.

Il est certain que l'Autrichien avait fait de son mieux pour conserver ses procédés secrets afin
d'en tirer le meilleur profit. Après sa brouille sur Paris avec un certain DESLON médecin du
Comte d'Artois qu'il se décida à former des élèves et à vendre aussi cher que possible une
méthode thérapeutique dont il ne pouvait conserver l'exclusivité. La loge HARMONIE fut
fondée en 1783, à l'instigation de BERGASSE pour être l'école officielle où MESMER exposerait
ses découvertes et formerait des magnétiseurs. C'était une société par souscription ; elle
devait compter 100 membres versant chacun cent louis. Ainsi la pratique médicale de
MESMER passa-t-elle au rang de secret d'une Franche Maçonnerie nouvelle. En février 1784,
SAINT MARTIN adhéra au groupement et trouvait l'école encore informe, mais il espérait
qu'elle s'organiserait très vite. Le succès fut en tout cas très vif. L'Harmonie essaima par tout le
royaume. Lyon n'échappa pas à la contagion et dès mai 1784, ce fut chose faite. Un certain
Monsieur de BONNEFOY faisait parler de lui dans le journal local.

Les médecins, les chirurgiens, les apothicaires lui réservent beaucoup de malades.

WILLERMOZ sera aussi emporté par ce nouvel élan et il deviendra membre de la Concorde.
Cette société n'était pas une loge mais rassemblait des magnétiseurs à succès comme
DUTRECH et BARBERIN qui ne figurent pas comme des Francs Maçons dans les registres des
loges. Mais comme d'habitude, WILLERMOZ en s'initiant au magnétisme, initia les
magnétiseurs à ses doctrines et à sa loge la Bienfaisance si bien que Concorde en deviendra
une succursale.

On peut s'étonner de trouver que les fils spirituels de PASQUALLY soient venus dans les
sociétés de magnétiseurs. Car enfin, n'avaient-ils pas appris à mépriser la matière, à considérer
toute science physique comme imparfaite, impure et indigne de faire « l'occupation de
l'homme de DESIR ». MESMER s'était toujours efforcé de faire passer sa découverte pour une
découverte scientifiquement prouvée. Il sollicitait d'ailleurs les patronages officiels, les
suffrages des académies. Si fluide qu'il fut et si subtil, le magnétisme animal était un agent
matériel, qui se réfléchissait par les miroirs, se renforçait par les sons musicaux, s'amassait, se
diminuait, se transmettait au moyen de conducteurs appropriés. Comment les Grands Profès
de Lyon s'étaient ils laissé entrainer dans la galère mesmérienne ? Ils y étaient poussés par
cette curiosité intense, qui possède les amateurs de mystère et qui leur fait cultiver
indifféremment toutes sortes de doctrines, même contradictoires et fréquenter toutes sortes
de gens, même douteux, du moment qu'ils peuvent espérer des pouvoirs extraordinaires et
des spectacles inédits.

Commentaires : je ne ferais pas le procès de nos Frères du siècle des lumières car une fois de
plus, on voit bien que cette lumière était tellement souhaitée qu'ils en devenaient quelque peu
illuminés. D'ailleurs, une fois de plus WILLERMOZ comme avec le système de PASQUALLY et les
équinoxes coëns qui ne lui apporteront pas les apparitions ou les manifestations souhaitées, le
magnétisme n'était pas pour lui révélateur.

Je peux raconter des faits avérés que j'ai côtoyé dans la région de Brive la Gaillarde dans la
Corrèze remplie de mystères, sorciers, guérisseurs etc. L'un de nos Frères, Vénérable Maître,
maître des lieux où il nous recevait en tenue, avait reçu par transmission un don de guérisseur
ou de magnétiseur. Il était dentiste de profession et il avait la capacité par ce don d'arrêter des
hémorragies sanguines même à distance dans des situations compliquées que la médecine ne
pouvait régler. Je pense que ce don est une transmission dirigée par une volonté divine où un
don naturel reçu à la naissance et que celui qui en reçoit la Bénédiction est choisi. Et chacun
d'entre nous a en lui une bénédiction de DIEU plus forte que les autres, soit que DIEU l'a
oublié, soit que DIEU l'a laissé volontairement pour tester l'homme dont il attend tant de
choses. Un évènement peut déclencher ce Don et ensuite il faut le magnifier pour le faire
perdurer dans le but d'aider les autres. Mais cet acte d'amour universel ne peut pas se décider
par la volonté faite homme et on voit bien que WILLERMOZ était un grand maçon plein de
servitudes pour son art, mais pas un Grand Architecte car il n'a jamais fait les plans d'origine
du Régime Ecossais Rectifié, il a reproduit des secrets, des textes déjà écrits par d'autres,
assemblé ce qui était épars, intégré les axiomes coëns certes, mais pas au delà.

Comme je le pensais avant de lire sa bibliographie, il a avec passion, détermination construit le


Régime Ecossais Rectifié sur les fondations de la Stricte Observance Templière qu'il a
transformé tout en conservant sa rigueur et sa verticalité. Puis dans cette architecture sans
contenu, il a réécrit les rituels en y implémentant la doctrine théurgique de MARTINES sous le
couvert des allégories de l'ancien testament et du mythe salomonien qui avait fait ses preuves.
Mais cela ne suffisait pas pour notre maçon chrétien, il a modifié également la doctrine de
PASQUALLY en lui insufflant sa Foi sans faille dans le christianisme primitif avec une coloration
chevaleresque.

Qui mieux que la légende des Chevaliers, seigneurs qui feront allégeances à toute la chrétienté
et au Christ en allant au prix de leurs vies et de leurs fortunes défendre le royaume de
Jérusalem où tout s'est écrit depuis la résurrection du Seigneur. Cela n'enlève rien à la
persévérance de cet homme qui a cherché toute sa vie a renforcé son intuition mais cela ne
fait pas lui, un visionnaire ni un prophète seulement un grand maçon bâtisseur.

Définition du Mesmérisme à notre époque...

Cette technique fut conçue par Franz Anton Mesmer, un médecin et faiseur de miracles qui
accomplit des guérisons des plus spectaculaires. Ce médecin allemand croyait en un fluide
invisible et curatif qui, circulant dans l'univers, possédait la capacité d'influencer le corps
humain et de soulager les douleurs de ses patients. Une sorte d'onction si vous préférez. Selon
lui, un déséquilibre de ce fluide dans le corps ferait la différence entre la santé et la maladie.
Par conséquent, il développa le mesmérisme qui se définit comme suit: la capacité d'élever
l'état émotionnel d'un individu, ou d'une foule, à un niveau anormal, mais contrôlable. Ce
système est le précurseur de l'hypnotisme. La musique joue un rôle de premier plan pour
obtenir le contrôle mental et nerveux des gens, c'est pourquoi certains "évangélistes" misent
autant sur une forme bruyante et émotionnelle de louange et d'adoration.

Le verbe "mesmériser" signifie hypnotiser, envoûter et son synonyme occidental se dit "entrer
en transe" parce que les sujets se retrouvaient dans un état de semi-conscience. FRANZ
MESMER assembla de façon méthodique et systématique des idées telles que la suggestion,
l'autosuggestion et la médecine, puis en popularisa le concept. Il pratiquait sa technique de
guérison de la même façon que quelques faiseurs de miracles opèrent de nos jours. Cette
méthode, sous une apparence bénéfique, est bien loin d'être inoffensive et sans danger. Le
mesmérisme contourne la raison, laissant la personne incapable de distinguer entre le réel et
l'incroyable, le chrétien du non chrétien, la vérité du mensonge. Une personne mesmériser ne
peut plus analyser ! MESMER imposait les mains soit en touchant ou en faisant des passes
magnétiques près du corps. D'après lui, les guérisons étaient déclenchées par le biais de ses
"passes magnétiques." Et bien sûr, la douleur s'estompait et les gens se croyaient guéris. Il
pointait du doigt un patient se tenant quelquefois à plusieurs mètres de lui, et l'instant
d'après, le patient se retrouvait en convulsions au plancher. Et ses disciples accomplissaient les
mêmes prouesses. Il est à craindre que dans certaines réunions "évangéliques" on utilise
inconsciemment cette technique ! Soyons vigilants et ne craignons pas de dénoncer les
déviances, quitte à aller à contre courant.

Le Mesmérisme eut à subir une méthode nouvelle que l'on nomme le somnambulisme qui
supplanta le magnétisme progressivement. La Concorde ne faisait que suivre en cela les
fluctuations de la mode. Le somnambulisme rejeta très vite à l'arrière plan le mesmérisme
primitif ; les loges magnétisantes remisèrent leurs baquets et l'on ne s'occupa plus que
d'interroger les «crisiaques ».

Plongés dans l'étrange et merveilleux sommeil. Lorsque MESMER quitta la France en 1785, il
était plus qu'à moitié oublié.

Mais le MESMERISME oublié voilà que WILLERMOZ s'engage sur la nouvelle croisade du
somnambulisme magnétique, les procédés de MONSPEY et BARBERIN venaient à peine de
recevoir à Lyon la consécration quasi-officielle de l'Ecole Vétérinaire, qu'ils étaient déjà
éclipsés par le retentissement des succès du Marquis de PUYSEGUR.

Madame PROVENCAL et WILLERMOZ apprirent les découvertes de l'école de BUZANCY dès


avant la fin de septembre1784, où SAINT MARTIN leur envoya un long compte rendu qui les
mettait au fait des phénomènes surprenants que produisait le sommeil magnétique. Les
phénomènes observés par PUYSEGUR en mai 1784, parurent tout de suite atteindre une
importance primordiale et étendre le champ de l'expérimentation au domaine de l'esprit. On
se servit de la clairvoyance des sujets endormis, non plus seulement pour établir des
diagnostics, mais aussi pour trouver la solution des problèmes les plus divers, et même pour
prédire l'avenir. Un terrain d'investigations aussi vastes que passionnantes s'ouvrait aux
amateurs.

Définition du somnambulisme magnétique à notre époque

Au printemps de 1784, le marquis de PUYSEGUR, colonel d'artillerie et grand seigneur terrien,


est au repos sur ses terres de BUSANCY, dans le soissonnais, quand on l'appelle au chevet du
fils de son régisseur, qui souffre d'une fluxion de poitrine. PUYSEGUR, qui est un adepte de la
nouvelle médecine de Mesmer, entreprend de magnétiser le jeune malade. Mais les choses lui
échappent.
Au lieu d'éprouver des convulsions, comme le prévoit l'enseignement de Mesmer, Victor
tombe dans un état de conscience différent, qui, au début, ressemble à la mort et dans lequel
semblent se manifester des capacités d'autodiagnostic et de perception extra-sensorielle. La
découverte de cet état de conscience, que le marquis nomme le "somnambulisme artificiel",
ou encore le "somnambulisme magnétique", déclenche l'année suivante une vaste polémique
qui va traverser tout le XIX° siècle et ébranler l'image de l'homme construite par l'âge des
Lumières. Les phénomènes psychiques étranges que semble susciter le somnambulisme
magnétique soulèvent un ensemble d'interrogations. Ont-ils été correctement décrits et
observés ? A-t-on affaire à des manifestations surnaturelles, ou à des ressources psychiques
encore inconnues de l'être humain ? Doit-on intégrer ces phénomènes dans une raison élargie,
ou bien les rejeter au nom de la Raison dans les ténèbres de la superstition ? A ces questions
cruciales, PUYSEGUR répond en homme des Lumières et en lecteur de Rousseau. Oui, les
phénomènes du somnambulisme ont bien été observés. Non, ils ne sont pas des
manifestations surnaturelles, mais témoignent de puissances encore inexplorées de l'âme
humaine. Oui, ils constituent un défi pour la raison et devront relever d'une approche
scientifique appropriée. La métapsychique, en France et en Angleterre, un siècle plus tard, se
situera dans le prolongement de ces choix décisifs ; elle ouvrira pour la pensée une voie que
l'oubli et la censure sociale, en France, sont en train de refermer. Par sa naissance, par sa
personnalité et ses convictions, PUYSEGUR va marquer de son empreinte le magnétisme
animal, et, au-delà, la naissance des sciences psychiques, comme la découverte de
l'inconscient. Aristocrate, appartenant de surcroît à une grande famille, il va faire pénétrer
d'entrée de jeu le magnétisme dans les débats de l'élite. Chercheur indépendant, il n'a de
comptes à rendre à personne, ni sur le plan matériel, ni sur le plan moral ; n'ayant pas à passer
sous les fourches caudines de l'Institution, il affiche ses observations et ses conclusions avec
une certaine hauteur, en dédaignant la polémique qui se développe autour de lui. Homme des
Lumières, lecteur assidu de Rousseau, il conçoit la transe somnambulique comme un état
d'autonomie pensé sur le modèle de l'Emile, et les facultés extrasensorielles et intellectuelles
qu'elle libère comme des puissances qui sommeillent en l'âme humaine. Militaire - mais un
militaire de l'Ancien régime, capable de lire Platon dans le texte - il sait cultiver le sens de
l'improvisation et de l'observation, et, quand le somnambulisme surgit, il colle à l'événement
sans état d'âme, au lieu de le censurer comme l'eussent sans doute fait un médecin ou un
psychologue ; de sorte que pour finir ses descriptions des phénomènes somnambuliques, on
s'en rend compte aujourd'hui, sont supérieures sur bien des points à celles que produiront, un
siècle plus tard, les disciples de Charcot.

1785 - Pendant l'année 1784, WILLERMOZ et ses amis se sont prêtés à ce nouveau sacerdoce
du somnambulisme et à faire des essais sur des femmes qui voulaient bien se prêter à cette
nouvelle médecine. Le 5 avril 1785, au soir parvint à WILLERMOZ l'annonce d'un phénomène
extrêmement voisin de ceux que BARBERIN observait sur Paris pendant le même temps. On lui
apporta des cahiers écrits sous une inspiration surnaturelle, analogue au sommeil magnétique.
Docile aux impulsions d'un Agent inconnu, ignorant les mots qu'elle écrivait, une main avait
tracé sans le vouloir, ces mystérieux messages. Ils donnaient l'ordre de fonder une nouvelle
association secrète qui porterait le nom de « Société des Initiés » et dont le but serait de
recevoir la doctrine que l'Agent se proposait de dicter par le moyen qu'il avait choisi.
WILLERMOZ était institué le Chef de l'Initiation et c'était parmi les seuls Frères de la
Bienfaisance que seraient choisis ceux qui seraient admis à y participer. Il accepta les cahiers
qu'on lui avait apportés et resta quatre jours à les étudier. Nous ne possédons pas les cahiers
autographes de l'Agent Inconnu ; ce sont seulement des copies ou extraits. Les uns sortent
morceaux choisis qui portent le nom de Livre des Initiés. Avec leur écriture « hiéroglyphique »
originale, déformée par l'impulsion mystérieuse, leurs bizarres dessins, ils devaient paraitre
tout à fait extraordinaires, WILLERMOZ fut confondu.

Il lui sembla qu'aucune intervention humaine ne pouvait produire de pareils effets, et y vit la
marque du doigt de DIEU... Déjà les premiers cahiers de l'Agent traitaient de l'œuvre
universelle, de la doctrine de vérité, de la matière des êtres de la nature, de l'histoire des
initiations anciennes et chrétiennes, des deux prévarications et donnaient un plan de
Réintégration, et ce n'était là qu'un petit début ! L'Agent Inconnu confirmait la doctrine
secrète des Réaux-Croix ; mieux encore, il confirmait les variations que WILLERMOZ y avait
introduites et l'histoire des initiations qu'il enseignait à ses Profès. L'évènement miraculeux
venait de transformer profondément le caractère des cercles secrets aux destinées desquels
présidait WILLERMOZ. Devant cette frénésie nouvelle que déclenchait l'importance que l'on
donnait à cet Agent Inconnu et qui remplissait les âmes mystiques de nos amis, WILLERMOZ se
sentait touché par la grâce puisque ayant été désigné comme l'interface entre l'Agent Inconnu
et ses prophéties et les Frères pressentis pour les recevoir. Pour être un véritable initié, il ne
suffisait pas d'avoir été désigné par l'Agent Inconnu, il fallait aussi venir recevoir des mains du
Pasteur des instructions particulières et peut être une sorte d'ordination. THURKEIM,
SALTZMANN, le Duc d'HAVRE avait pris date pour intégrer cette société des initiés. Même
SAINT MARTIN annonça son arrivée à Lyon, en effet l'entrée de celui-ci parmi les initiés de la
Loge Elue et Chérie, fut un évènement d'importance dans sa vie mystique, qui éclaire d'une
vive lumière son état d'esprit. Le magnétisme avait beaucoup rapproché les deux hommes et
SAINT MARTIN s'était rattaché à l'Ordre Rectifié en 1784 et il portait le nom de a LEONE
SIDERO. L'Agent inconnu par ailleurs confirma dans ses messages sa faveur aux travaux de
WILLERMOZ et condamnait celle de SAINT MARTIN. Celui-ci n'était pas homme à marchander
son repentir et son amende honorable fut humble et complète. « Cette information demande
plus amples détails que nous laissons le choix aux lecteurs de chercher par ailleurs ».

Pendant 1785, WILLERMOZ jouait dans l'instruction des Initiés un rôle primordial ; il recevait
les messages originaux, les déchiffrait et établissait des résumés ou les copies qui pouvaient
servir de texte d'instruction.

Pendant l'année 1785, 42 cahiers généraux et 4 cahiers personnels lui parvinrent, dont 31
seulement furent publiés. L'originalité de cette nouvelle doctrine était que l'Agent Inconnu
demandait simplement à ses élus de le suivre par la voie inconnue, jusqu'à la vérité les plus
instructives et significatives. « Ce message était accordé en amour à la forte armure des élus
en nourriture par Marie pour entrer en nombre 12, où ils vont être Élohim en soi des élus, qui
auront aimé à croire que la pure armure a uni à l'obéissance la voie en une souveraine
obéissance qui a animé la mort de la mère de Jésus Christ.
Les messages de l'Agent promettait non seulement la rédemption divine mais corrigeait la
doctrine de la Réintégration, promettait de meilleures formules d'invocation et des calculs
meilleurs destinés aux Coëns. Il refaisait, à sa mode, l'histoire des Ordres Monastiques et celle
de tous les peuples de la terre, et esquissait une Histoire Naturelle d'Origine. L'Agent s'était
avisé dès les premières instructions, que le mot TUBALCAIN, ne devait plus être toléré dans les
cérémonies de la Loge Elue et Chérie et devait être remplacé. WILLERMOZ décida de modifier
cette erreur dans les rituels du Régime Ecossais Rectifié mais sans pour autant dévoilé l'origine
de celle-ci. WILLERMOZ annonça donc que par suite d'une étude de la Vérité faite dans les
intentions pures, il avait découvert que le fondateur de la Maçonnerie était un descendant de
la race bénie de SEM. Il se trouvait donc à croire que ce descendant était PHALEG, fils d'HEBER
et qu'il devait se substituer à TUBALCAIN de peur de faire encourir aux vrais Maçons les suites
de l'antique malédiction de NOE. « Le 5 Mai 1785, invoquant la lignée Caïnite et le patronage
des forgerons et donc son lien aux métaux, Jean Baptiste Willermoz remplace Tubalcaïn par
Phaleg, sur décision de la Régence Ecossaise de Lyon et par Arrêté du Directoire d'Auvergne ».

Dans son exaltation, WILLERMOZ parlait de bruler tous les livres et toutes les histoires des
Conciles, tant il se voyait assuré de renouveler l'histoire du Christianisme par l'opération du
Saint Esprit. Cette apocryphe démesuré et présenté comme surnaturelle de l'Agent Inconnu
connue son point culminant quand il institua une fête annuelle qui devait avoir lieu le 10 avril
jour anniversaire de l'Initiation. Elle fut célébrée le 10 avril 1786.

Mais une fois de plus les promesses de l'Agent Inconnu se faisaient attendre et le doute après
l'euphorie s'insinua dans les esprits. WILLERMOZ voulut en savoir plus et essaya avec Melle de
LA ROCHETTE par le somnambulisme et les dons de voyance qu'elle déclarait. Entre les deux
thèses, l'opposition fut rude et l'Agent Inconnu accepta de se dévoiler. Les cahiers secrets de
l'Agent Inconnu étaient rédigés par Madame de VALLIERE, Marie Louise de MONSPEY,
Chanoinesse de REMIREMONT, ainsi le mystère était éclairci.

Ces faits suffisent pour juger que WILLERMOZ exagérait lorsqu'il prétendait que la
«miséricorde divine » ayant choisi comme intermédiaire Madame de VALLIERE, avait pris la
voie la plus imprévue, la plus extraordinaire que l'esprit humain puisse concevoir.

Mais le 10 décembre 1788, WILLERMOZ convoqua une réunion générale, où il exposa ses
doutes et ses anxiétés à la Société «inquiète et troublée ». L'intervention de la somnambule
avait cependant modifié ses propres convictions. WILLERMOZ avait subit l'évolution commune,
malgré sa puissance de travail, son désir très vif de tout concilier et de rien négliger, et sa
faculté d'illusion ; à force d'assister aux sommeils de la ROCHETTE et de pâlir sur les cahiers de
l'Agent Inconnu, il avait oublié beaucoup de ses obligations, peut être même les croyances et
tout de même il avait gagné un peu plus de circonspection. Nous ne savons pas s'il avait
préservé du déluge des nouveautés ses devoirs de Réaux-Croix et s'il imitait SAINT MARTIN
toujours fidèle à observer les périodes d'équinoxes. En tout cas, ce fut à cette époque qu'il
rompit avec l'abbé FOURNIE et cessa de lui envoyer sa pension.
WILLERMOZ du rappeler les Frères à l'obéissance entre 1785 et 1788 et à la modération. Mais
était-il exempt de reproches, les grades, les rituels et les codes réformés à WILHEMSBAD
n'étaient pas encore publiés. C'est justement que les Frères pouvaient s'étonner de la lenteur
qu'on mettait à appliquer et publier les réformes du dernier Convent. La proscription du mot
TUBALCAIN n'avait pas non plus été acceptée sans murmures. En 1786, la confiance absolue
qu'il avait dans les révélations de l'Agent Inconnu l'empêchait de vouloir entrer sur ce point en
composition. Il répondit qu'il ne croyait pas que la Maçonnerie eût pour but d'être un lien pour
rapprocher les hommes et réclama seulement qu'on lui fit confiance, ajoutant que l'heure était
si importante pour les Sociétés de Maçons et que les débutants devaient se laisser guider, un
bandeau sur les yeux sans vouloir chercher à comprendre.

1788 - La Maçonnerie n'intéressait plus le public en cette année là, on s'occupait désormais de
politique, on critiquait les décisions du Roi et les projets des Ministres.

Après avoir suivi WILLERMOZ dans sa quête obstinée du secret de la Maçonnerie, connaissant
bien le bilan de ses multiples expériences au cours de plus de trente années de réflexions, de
recherches, nous pouvons rester songeur voire perplexe en voyant si facilement écrire «esprit
maçonnique», «idéal maçonnique » comme s'il n'y avait eu dans les loges à cette époque, un
seul esprit et un seul idéal : une doctrine optimiste et égalitaire, visant à réformer sociétés et
religions, à exalter l'orgueil de l'homme et sa foi dans le progrès matériel. Ce qu'il y a de plus
général dans les loges n'est pas d'ordre doctrinal ; leur unité est tout extérieure. Elle vient
seulement du cadre adopté. C'est le succès obtenu par les formes en usage dans l'association
anglaise des compagnons du bâtiment qui fait que les sociétés Francs Maçons se ressemblent
et que l'on peut parler de Franche Maçonnerie ; ce qu'il y a de permanent entre elles, est ce
qu'il y a de plus banal dans une société de chrétiens, gens de même métier etc.

On entrait dans les loges pour faire une cure de mystère et d'absurdité. L'homme ne vit pas
que de raison, c'est un animal mystique qui s'attache on ne peut plus facilement aux mythes,
qui aime les symboles et se plait dans l'obscurité.

1791- La période de 1789 à 1791 fut une période troublée par la révolution française et son
intérêt est secondaire dans cette analyse. En 1791, la Bienfaisance conservait à peu près tous
ses anciens fidèles. On y relève les noms de : WILLERMOZ, RACHAIS, PAGANUCCI, GRAINVILLE,
SAVARON, PERISSE DULUC, CASTELLAS, MILLANOIS, BORY, MONSPEY etc. Bien que n'ayant
plus de fonction officielle, il était toujours le centre de l'association. Il réunissait tous les
vendredis son Collège de Grands Profès et tous les lundis par quinzaine, les Initiés appelés à
étudier les messages de l'Agent Inconnu qui continuait de produire ces fameux cahiers. D'après
ces tables, l'Agent Inconnu envoya dix cahiers en 1789, puis vingt cinq cahiers de1791 à 1794.
Mais les beaux jours d'entente fraternelle et de méditations en commun, sur des sujets de
morale, de thérapeutique ou de métaphysique, étaient bien passés.

La révolution a fait surgir une foule d'espoirs pour un meilleur avenir dans le domaine politique
et social, avait aussi éveillé de certains illuminés, l'idée que l'aube nouvelle aurait le sens le
plus étendu, qu'elle brillerait aussi dans le domaine spirituel. Au milieu de l'inquiétude
générale se fit jour l'espoir qu'une régénération universelle se préparait ; dans certains cercles
d'adeptes, quelques exaltés des deux sexes ne se firent pas faute de l'annoncer. Prophètes et
prophéties connurent le plus grand succès.

Pendant ces périodes troublées, SAINT MARTIN par sa sœur Claude de SAINT MARTIN amie de
Bathilde d'Orléans, sœur du Duc de Chartres, mère du Duc d'Enghien qui s'occupait aussi de
Franc Maçonnerie, essayait au mieux de purifier l'atmosphère et de diriger vers la perfection
cette femme de Désir(Bathilde) au jugement faible. Ce fut pour elle qu'il publia en 1792,
l'ouvrage qui a pour titre « ECCE HOMO ». Louis Claude SAINT MARTIN avait pourtant changé,
son dernier ouvrage « L'Homme de Désir » parut en 1790 avait des accents plus libres et plus
poétiques que tout ce qu'il avait écrit jusque là. Un moment soumis plus que convaincu par le
miracle de l'Agent Inconnu, il avait compris à quelques graves dangers s'exposent ceux qui
écoutent les professeurs de sciences occultes, évoquent les esprits, attendent des
manifestations extraordinaires et oublient DIEU pour les « gens à secrets ». A la fin de 1789, il
décida d'abandonner la Franc Maçonnerie et envoya sa lettre de démission de l'Ordre Rectifié.
Il ajoutait qu'il garderait jusqu'au tombeau le souvenir respectueux de Jean Baptiste
WILLERMOZ.

1793- Pendant la révolution et ce qui en suivit, nous ne rentrerons pas dans le détail de cette
manifestation. L'intransigeance de ROBESPIERRE et la chute de DANTON déchaina une vraie
guerre civile, le siège de Lyon dura du 8 août au 9 octobre 1793. WILLERMOZ écrivit que par la
fermeté de leurs principes, les Frères Grands Profès surent mieux lutter que les autres Maçons
avant d'être entrainés dans le torrent, espérons le. La décadence de la Maçonnerie est
pendant les premières années de la Révolution, un phénomène général.

Les Loges se fermaient les unes après les autres. Philippe Egalité le 5 janvier 1793 se démettait
de ses fonctions de Grand Maître du Grand Orient. On ne sait pas avec exactitude le rôle que
WILLERMOZ occupe pendant la révolution, plusieurs sources divergent. Il décida de se mettre à
l'abri avec sa sœur Madame PROVENSAL et il quitta cette maison Bertrand des BROTTEAUX
qu'il occupa 18 ans. Le 25 septembre, un logis de 4 pièces au 2ème étage fut loué au nom de
Madame PROVENSAL. Celle-ci avait perdu son fils Jean et elle élevait Jeannette PASCAL
orpheline, petite nièce d'un vieil ami qu'elle avait reçu dès l'âge de trois ans.

Nous retrouvons WILLERMOZ fugitif et traqué au mois de décembre 1793 pendant la période
de 5 mois de terreur de la région lyonnaise de novembre 1793 à avril 1794. Il échappa de
justesse à plusieurs arrestations et se réfugia à NERON près de SERMENAS dans l'Ain à deux
lieues de Lyon. Le 10 octobre 1794, Lyon se libérait de cette période ténébreuse et mortifiante.
WILLERMOZ n'était plus en danger ni sous le coup d'un mandat d'arrêt et il pouvait rentrer à
Lyon.

1794 - Tous ces évènements avait fait sentir à WILLERMOZ la chaleur de la famille constituée
de ces deux femmes, Madame PROVENSAL et Mademoiselle PASCAL qui s'étaient occupées de
lui et de ses affaires pendant son exil. L'attendrissement provoqué par la joie de retrouver sa
famille, de reprendre à vivre, WILLERMOZ se laissait aller à une humeur badine et il écrivit des
poèmes à Jeannette PASCAL.

Cette jeune femme fut sensible à ces attentions et l'encouragea par des petits mots en retour.
L'idylle eut sa conclusion seize mois plus tard. Au mois de mai 1796, WILLERMOZ âgé de 65
ans, épousait Jeanne-Marie PASCAL qui en avait 24.

Ayant perdu ses deux frères pendant la période troublée, il sut profiter de ce moment de
bonheur et de plénitude. Il installa sa sœur et sa nouvelle épouse sur les hauteurs de la Croix
Rousse, il était l'héritier de son Frère Docteur qui avait acquis un domaine rue des Forces.

1798 - WILLERMOZ tira profit de cet endroit calme, reposant et verdoyant. Il se retrouve
membre de la Société d'Agriculture et il devint un agriculteur passionné.

Lorsqu'à la suite du décret impérial du 30 décembre 1809, furent organisés à Lyon, les conseils
de fabrique chargés de l'administration des paroisses, WILLERMOZ fut appelé à rentrer dans
celui de Saint Polycarpe. Dans ces conseils, prêtres et laïcs étaient assemblés et désignés par le
Préfet et l'Evêque. Notre lyonnais fut un candidat de l'évêché.

1803 - Il dina chez le Préfet en 1803 avec le Cardinal FESCH ; en 1805 il fut convié à baiser la
main du Pape de passage à Lyon. A mesure que WILLERMOZ avançait en âge, il prenait un
plaisir de plus en plus vif à retrouver des témoins du passé, des collaborateurs d'autrefois et à
évoquer avec eux d'anciens souvenirs ; parmi ceux-ci, tout se qui tenait à la Franc Maçonnerie
occupait toujours la première place.

Car il ne regrettait rien et surtout pas d'avoir été fondateur de sociétés secrètes. Certes, la
Révolution bouleversant sa vie, détruisant les loges, décimant Maçons, Coëns, Profès, Initiés,
Illuminés de toutes classes et de tous ordres, sans compter les somnambules et les
magnétiseurs, avait mis un terme à son ambition de jouer le rôle d'un Prophète élu pour
rappeler aux hommes la Vérité ; mais il gardait intacte sa Foi occulte. Seulement il la gardait
avec une discrétion chaque jour accrue, comme on conserve un beau feu éclatant, en
recouvrant de cendres les tisons rouges du foyer.

La Franc Maçonnerie française put se reconstituer grâce à ROETTIERS de MONTALEAU qui dès
1795 à peine sorti de prison s'employa à réanimer le Grand Orient de France. En 1800, près de
cent loges reconnaissaient l'autorité ressuscitée.

L'ordre rectifié essaya également de renaitre mais avec grandes difficultés malgré les bonnes
attentions. WILLERMOZ essaya d'y participer comme il l'a écrit en 1810.
Il annonça le réveil de la Bourgogne dont le siège était à Besançon et qui avait pris l'initiative
de faire accepter par CAMBACERES, déjà Grand Maître du Grand Orient, le titre de protecteur
du Régime Ecossais Rectifié. L'impression est que sous cette situation, l'Ordre des Chevaliers
Bienfaisants de la Cité Sainte reprenait vie.

Suite à la réactivation de la Triple Union de Marseille sous l'égide du Frère ACHARD son ancien
Vénérable Maître, dès 1803 il demanda à Lyon et à WILLERMOZ des autorisations, des
instructions et des directives. Ce fut une longue correspondance qui dura 6 années et où
WILLERMOZ par la main de ses secrétaires composa un véritable cours de Franche Maçonnerie
à l'usage des Marseillais. Pour pénétrer les Marseillais, il s'astreignit au long travail de
reprendre encore une fois, les codes, les rituels, les cahiers des grades et les instructions
secrètes.

Ce fut en leur honneur qu'il termina le travail de synthèse de WILHEMSBAD délaissé au profit
de l'ère du magnétisme. Mais ce nouvel effort pour instruire les Frères de Marseille se solda
par un échec. Les Frères de la Triple Union trouvaient fastidieux, ennuyeux les rituels codes et
autres maximes que WILLERMOZ s'évertuait à leur transmettre. Vu la situation, il leur proposa
de se rallier au Grand Orient pour se débarrasser d'eux. Mais cela ne se fit pas, Marseille
conserva son affiliation à l'ordre rectifié et continua de correspondre avec Lyon. Pendant ce
temps là une nouvelle loge se constitua à Avignon sous le nom de la Bienfaisance dont la
composition et l'esprit donna satisfaction à WILLERMOZ qui délaissa les Frères Marseillais au
profit des Frères Avignonnais.

1808 - Il reçu les Frères d'Avignon pour les initier aux grades de la classe symbolique mais
également dans l'Ordre intérieur et dans la Profession.

Parallèlement, il reçut une missive de BACON de la CHEVALERIE le 27 avril 1808 qui se signalait
de nouveau à WILLERMOZ pour lui annoncer le rétablissement de l'Ordre Rectifié à Paris, à
Besançon, à Montpellier. La lettre ajoutait et annonçait que le Prince de CAMBACERES avait
été nommé Grand Maître de l'Ordre Rectifié en 1802.

Il enjoignait le directoire d'Auvergne de se réunir et de rejoindre cette nouvelle formation avec


NEUSTRIE sixième directoire.

WILLERMOZ n'accepta pas de gaieté de cœur d'être traité avec tant de désinvolture, il
demanda à ses amis SALTZMAN et VERNETY sur Paris de se renseigner sur cette information.
Malgré plusieurs refus, il finit par transmettre aux parisiens et à leur loge « Le Centre des Amis
», les rituels et les documents nécessaires.

1810- Les renseignements que nous possédons sur le développement de l'Ordre Rectifié et des
Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte sont fort rares. En 1811, l'affaire avec le Grand Orient
se trouvant totalement rompue. VERNETY avait dès 1809 exprimé son découragement et ses
doutes « les Hommes de Désir deviennent rares ». De 1804 à 1810, WILLERMOZ eut à subir des
drames familiaux à répétition.

Sa jeune femme mis au monde une petite fille qui mourut quelques jours après. L'année
suivante, de nouveau sa femme accoucha d'un garçon le 20 septembre 1805, mais son épouse
se rétablissait très mal de cette naissance et la mise au monde d'un troisième enfant la tua.
Elle succomba le 9 mai 1808. Madame PROVENSAL mourut en 1810 le laissant seul.
WILLERMOZ se trouvait à 80 ans avec un petit garçon de 5 ans à élever. Mais de nature
optimiste, WILLERMOZ se remet au travail sur la Franche Maçonnerie, encouragé qu'il est par
son jeune fils Francis et il s'inquiétait déjà de sa capacité à pouvoir l'élever. Ce bonheur et cette
espérance furent de courte durée, Francis attrapa la fièvre à 6 ans et il mourut le 23 octobre
1812.

1812 - Privé de ceux qu'il avait le mieux aimés, il ne restait plus qu'au vieil homme que
l'affection de ses amis. Après tant d'années, ces hommes se retrouvèrent bien peu changés.
Charles de HESSE, Jean de THURKEIM, WILLERMOZ tous les trois ayant conservé leurs chimères
et leurs enseignements personnels.

WILLERMOZ n'avait pas oublié les inconséquences du mage bordelais et les épreuves de son
pénible apprentissage de Réaux-Croix ; mais il avait trouvé le moyen de concilier son juste
ressentiment avec la confiance qu'il gardait au prophète inspiré, qu'il tenait pour le dernier
héritier de la haute science de Moïse.

Ses convictions de 1768 à 1822, avaient en somme bien peu varié. Il restait inébranlablement
fidèle à la religion des Coëns.

1821- Pendant ces 9 années passées, WILLERMOZ s'occupa à ses affaires agricoles et
également à sa France Maçonnerie mais en décalé. Il sentit ses forces renaitre passées les
lourdes chaleurs d'été.

1822- Il rédigea le 31 décembre 1822 son testament qui instituait ses neveux légataires
universels avec une particularité de faire donner après sa mort pendant trois ans des messes
dont les dates étaient soigneusement fixées. Il devait aussi prendre une décision pour les
volumineuses archives maçonniques et occultistes, dont il était dépositaire et cela le troublait
sur qui pourrait assumer la conservation. Ce trouble est il l'indice d'une plus profonde angoisse
?

Au terme d'une carrière bien remplie, examinait-il le bien fondé de ses convictions, s'inquiétait
il de la valeur de son œuvre. Tout ce qu'il avait cru, tout ce qu'il avait rêvé, tout ce qu'il avait
organisé au prix de tant de peines et de si long travaux n'était plus que ruines; il n'en subsistait
plus rien que quelques vains souvenirs bientôt oubliés et déformés. Il n'avait travaillé que pour
la plus irréelle des chimères en pensant édifier le Temple Maçonnique comme une école de
perfectionnement spirituel où, de grades en grades, le Maçon s'élèverait vers de plus simples
vertus morales à la méditation des mystères et, de cette étude fervente, aux communications
des esprits célestes jusqu'à son DIEU, le Grand Architecte de l'Univers. Mais il pouvait
cependant se donner à lui-même l'assurance que cette faillite d'un grand espoir n'était pas de
sa faute, que lui du moins n'avait pas manqué à sa vocation et qu'il était resté obstinément
fidèle à ce qu'il avait pris pour un message divin.

1824 - Il mourut le 29 mai de cette année, son neveu veilla à ce qu'il lui fut fait un bel
enterrement. Il prévient la société d'agriculture, les bureaux de Bienfaisance, les anciens et
nouveaux administrateurs des Hôpitaux de Lyon. Le cortège fut très nombreux. Douze
vieillards de la Charité portaient les torches et dix huit prêtres officièrent dans Saint Polycarpe
aux deux tiers tendus de noir. La tombe de WILLERMOZ est au cimetière de LOYASSE.

La mort faucha petit à petit tous les mystiques survivants du XVIIIème siècle et de ses loges
mystiques. Personne ne garda plus le souvenir de Jean Baptiste WILLERMOZ en dehors des
Membres de sa famille et fort heureusement en France depuis 1913, tous les Hommes
profanes et orphelins de cette science qui remplit les âmes et éveille les consciences
spirituelles. Amen.

Cette analyse non partisane est terminée et elle a pris sa source dans le travail bibliographique
et historique d'Alice JOLY et le souci de son détail, la qualité de ses précisions est un bonheur
pour le Franc Maçon Rectifié et Chrétien que je suis.

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