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X Trace et norme, théorème des unités

X.1 Trace et norme


[Descombes p146.]
Soit K un corps de nombre K. A chaque élément α ∈ K, on va associer deux rationnels : sa
norme N (α) et sa trace T r(α) qui sont la trace et le déterminant de la multiplication par α sur
K. On verra que la trace et la norme s’expriment aussi en terme des conjugués de α.
Pour tout α ∈ K, l’application µα : K → K de multiplication par α définie par µα (x) = αx
est une application Q-linéaire.
Notons au passage quelques propriétés simples :
— µα est inversible dès que α ̸= 0,
— pour tout α, β ∈ K, µα et µβ commuttent.
— µα+β = µα + µβ et µαβ = µα µβ .
— L’ensemble {µα |α ∈ K} est un sous-ensemble de EndQ (K) qui est une Q-algèbre, com-
mutative, isomorphe à K.
Définition X.1. Pour tout α ∈ K, on définit la trace et la norme de α par

T rK|Q (α) = T r(µα ) et NK|Q (α) = det(µα ).

Par définition, ce sont des éléments de Q.


√ √ √
Exemple X.2. Soit K = Q[ 2]. Soit α = a + b 2. Sa matrice dans la Q-base (1, 2) de K est
√ √
 
a 2b
. Donc T rK|Q (α) = 2a, N (α) = a2 − 2b2 . T rK|Q (5 + 3 2) = 10, NK|Q (5 + 3 2) =
b a
25 − 18 = 7,
Remarque X.3. Lorsqu’il n’y a pas d’ambiguité sur l’extension de corps considérée, on note
simplement T r(α) et N (α) (mais ces nombres dépendent de K).
Notons que si α ∈ Q, µα est une homothetie, et T rK|Q = dα NK|Q = αd où d = [K : Q] est
le degré de l’extension.
Proposition X.4 (Propriétés evidentes mais utiles).
1. T rK|Q (α + β) = T rK|Q (α) + T rK|Q (β)
2. NK|Q (αβ) = NK|Q (α)NK|Q (β).
3. Le polynôme minimal de l’endomorphisme µα est le polynôme minimal de α.
Proposition X.5. Si α ∈ OK , alors T rK|Q (α) ∈ Z et NK|Q (α) ∈ Z.
De plus, |NK|Q (α)| = #OK /αOK (autrement dit |NK|Q (α)| = [OK : αOK ] est l’indice de
αOK dans OK ).
×
En particulier, pour α ∈ OK , α ∈ OK ssi N (α) = ±1.
Preuve. Soit β1 , . . . βd une Z-base de OK . Comme α.OK ⊂ OK ( 57 ), αβi ∈ OK est à coordonnées
entières dans la base β1 , . . . , βd . Du coup la matrice de µα est à coefficients entiers dans cette
base. Sa trace et son déterminant sont donc entiers.
On a vu que pour une matrice M ∈ Md (Z), #Zd /M Zd = | det(M )| (remarque III.68). En
l’appliquant à OK ≃ Zd et a l’application linéaire µα , on a #OK /αOK = | det(µα )| = |N (α)|.
×
Enfin, soit α ∈ OK . On a que α ∈ OK ssi α.OK = OK ssi |N (α)| = 1.

La formule suivante permet de calculer la trace et la norme en terme des plongements σi (ou
des conjugués de α) :
Proposition X.6 (2ème définition de la trace et de la norme). Soient σ1 , . . . , σd les plongements
de K dans C. On a :
57. puisque OK est stable par multiplication

116
1. T rK|Q (α) = di=1 σi (α),
P

2. NK|Q (α) = di=1 σi (α).


Q


Exemple
√ X.7. Soit K = Q[ 3]. Les 2 plongements sont σ1 (α) = α et σ2 (α) = ᾱ. Pour α =
x + y 3, on retrouve N (α) = αᾱ = x2 − 3y 2 . On a aussi T r(α) = α + ᾱ = 2x.
Remarque X.8. La formule fait bien intervenir les d plongements : les r1 plongements réels, et
les 2r2 plongements complexes (on n’en choisit pas un pour chaque paire).
Cette formule a quelque chose de surprenant : pour calculer le rationnel T r(α) ou N (α), on
additionne ou on multiplie des nombres complexes (irrationnels en général).
La proposition découlera du lemme technique suivant.

Lemme X.9 (Matrice de µα ). Soit d = [K : Q], α ∈ K et P = X l + pl−1 X l−1 + · · · + p0 ∈ Q[X]


le polynôme minimal de α.
Dans la base 1, α, . . . , αl−1 de Q[α], la matrice de µα est la matrice compagnon de P , ie.
 
0 ... ... 0 −p0
1 . . .
 .. 
 . −p1  
C(P ) = 0 . .
 . . . . ... .. 
. 
 .. . .
 
.. 
. . . 0 −pl−2 
0 ... 0 1 −pl−1

Si β1 , . . . , βe est une K[α]-base de K (avec e = [K : K[α]] = d/l), alors dans la Q-base


B = (αi βj )i≤l,j≤e de K, la matrice de µα est une matrice diagonale par blocs, formée de e blocs
de matrices compagnons de P .

Preuve. (exo). La matrice de µα dans la base des αi de Q[α] est claire.


Si Q[α] = K, le lemme en découle directement. Dans le cas où K ̸= Q(α), pour tout j ≤ e,
VectQ (βj , αβj , α2 βj , . . . αd−1 βj ) est un sous-espace µα -invariant, et la restriction de µα à ce sous-
espace a encore pour matrice C(P ) dans la base (βj , αβj , α2 βj , . . . αd−1 βj ). Ceci montre que dans
la base B, la matrice de µα est diagonale par blocs, formée de e blocs qui sont chacun égaux à
la matrice compagnon de P .

Corollaire X.10. En particulier, avec les notations du lemme précédent, on a T rK|Q (α) = −epl−1 ,
et NK|Q (α) = ((−1)l p0 )e .
Plus généralement, le polynôme caractéristique de µα est égal à son polynôme minimal à la
puissance e = [K : Q(α)].

Preuve de la proposition X.6. La trace de µα est la somme des coefficients diagonaux des ma-
trices compagnons, i.e. e × (−pl−1 ). Mais la somme des racines de P est −pl−1 . Comme
P les σi (α)
sont les racines de P comptées avec multiplicite e, on a bien T r(µα ) = −epl−1 = di=1 σi (α).
Pour le déterminant c’est pareil : det µα = det(C(P e l e l
Q)) = [(−1) p0 ] , et par ailleurs (−1) p0
est le produit des racines de P , ce qui donne N (α) = i σi (α).

On retrouve ainsi :

Corollaire X.11. Si a ∈ OK , sa trace et sa norme sont dans Z.

Preuve. En effet, le polynôme minimal est à coefficients entiers, donc pl−1 et p0 sont entiers.
(3ème preuve : les φi (a) sont des entiers algébriques, donc T rK|Q (a) et NK|Q (a) aussi, or ce
sont des rationnels donc des entiers.)

117
X.2 Enoncé du théorème des unités de Dirichlet
[ACL, Combes].

Théorème X.12 (Théorème des unités de Dirichlet). Soit K un corps de nombres et OK son
anneau d’entiers. Soient r1 et r2 le nombre de plongements réels et de paires de plongements
complexes.
×
Le groupe (multiplicatif ) des unités OK est isomorphe au produit direct d’un groupe fini UK
par un groupe abélien libre de rang r1 + r2 − 1 :
×
(OK , .) ≃ UK × (Zr1 +r2 −1 , +)

Le groupe fini UK est le groupe des racines de l’unité contenues dans K.


×
Si K est un corps quadratique imaginaire
√ (comme Q[i]), r1 = 0, r2 = 1, et OK est fini. Si√K
×
est un corps quadratique réel
√ (comme Q[ 2]), r1 = 2, r 2 = 0, et O K = {±1}×⟨ε⟩ ou ε = 3+2 2
Si on prend K = √ Q[ 3 2], √
il a un√plongement
√ réel (l’identité) et une paire de plongement
3 3 3 3
complexes donnés par 2 7→ j 2 et 2 7→ j̄ 2, donc le groupe des unités de OK est isomorphe
a Z × U , avec U = {±1} (car K est un sous-corps de R).

X.3 Unités des anneaux d’entiers quadratiques imaginaires


[Adams-Goldstein p236]
On a vu que tout corps quadratique imaginaire a un nombre fini d’unités car ils sont de
norme 1, et que la norme est définie positive.

Proposition X.13. Soit D < 0 sans facteur carré, et OD l’anneau des entiers de Q[ D]. On a
×
OD = {±1} sauf
×
1. pour D = −1 : O−1 = {±1, ±i} (racines 4èmes de l’unité)
× i , i ∈ J1, 6K} (racines 6èmes de l’unité).
2. et pour D = −3 : O−3 = {ω−3

Preuve. On a déjà traité les cas D = −1,


√−2, −3. Montrons que dans les autres2 cas, il 2n’y a
que ±1. Si D ̸ equiv1 (mod 4), OD = Z[ D] et la norme
√ de tout élément est a + |D|b > 1
1+i |D|
pour b ̸= 0. Si D ̸ equiv1 (mod 4) et |D| ≥ 5, ωD = 2 est de partie imaginaire > 1, donc
a + bωD est de partie imaginaire > 1 pour b > 0 si |D| ≥ 5. Donc les seuls inversibles sont
réels.

X.4 Cas des corps quadratiques réels, et équation de Pell-Fermat


58

Soit D > 1 sans facteur carré, K = Q[ D]. Soit OD l’ anneau des entiers de K.
Remarque X.14. Les seules racines de l’unité dans OD sont ±1, puisque OD ⊂ R. Donc ici,
UK = {±1}.
Puisque D > 0, on a 2 plongements réels et pas de plongement complexe. Le théorème de
Dirichlet dit donc :

Théorème X.15. Le groupe des unités de OD est isomorphe à Z/2Z × Z .


Plus précisément, on peut écrire Od× = {±εk |k ∈ Z} = {±1} ⊕ εZ ≃ Z/2 ⊕ Z pour un unique
élément ε > 1 de OD . On appelle ε l’unité fondamentale de OD .
58. Pour une preuve directe, voir [Adams-Goldstein, chap 6.6 p174, th 3 p 177] : il existe une infinite de solutions.
En fait, il suffit qu’il en existe une > 1. Basé sur le lemme des tiroirs pour l’approximation diophantienne.

118

Exemple : D = 2. ε = 1 + 2, N (ε) = −1, 1/ε = −ε. ε engendre un groupe infini puisque
|ε| > 1. ça n’est pas evident, mais c’est
√ l’unité fondamentale.
Autre exemple : D = 3, ε = 2 + 3, N (ε) = +1. Il n’y a pas d’unité de norme −1.
Lien avec l’equation de Pell-Fermat x2 − Dy 2 = 1 (pas considérée par Pell, attribuée à Pell
par erreur par Euler, Fermat a travaille dessus sans donner de preuve, Lagrange a donné les
preuves). Ses solutions sont les unités de norme 1.
Corollaire X.16. Pour tout D > 1 sans facteur carré, l’équation de Pell-Fermat x2 − Dy 2 = 1
possède une infinité de solutions.

X.5 Preuve du théorème des unités


Preuve. On regarde le plongement canonique σ : OK → V = Rr1 × Cr2 (morphisme d’anneau).
×
OK s’envoie dans le groupe multiplicatif V × = (R∗ )r1 × (C∗ )r2 .
Pour x = (x1 , . . . , xr1 +r2 ) ∈ V , on note
Ñ (x) = x1 x2 . . . xr1 |xr1 +1 |2 . . . |xr1 +r2 |2 ∈ R+ .
Ceci définit une application Ñ : V → R+ qui est multiplicative, et elle étend la norme usuelle
de OK : Ñ (σ(α)) = N (α) pour α ∈ K.
Du coup, on identifie OK avec son image par σ, donc OK ⊂ V . Comme groupe additif, c’est
un réseau, comme groupe multiplicatif, la multiplication se fait coordonnée par coordonnée.
Soit L ⊂ (R∗ )r1 × (C∗ )r2 le noyau de |Ñ |, 59 , c’est à dire le sous-ensemble d’équation
|x1 |.|x2 | . . . |xr1 |.|xr1 +1 |2 . . . |xr1 +r2 |2 = 1.
×
Les unités de OK étant de norme ±1 (Proposition X.5), σ(OK ) ⊂ L.
On passe alors au logarithme : on regarde
Ψ : (R∗ )r1 × (C∗ )r2 → Rr1 +r2
définie par
Ψ(x) = (log |x1 |, . . . , log |xr1 |, log |xr1 +1 |2 , . . . , log |xr1 +r2 |2 ).
C’est un morphisme du groupe multiplicatif (V × , .) versP le groupe additif (Rr1 +r2 , +).
L’image de L est l’hyperplan H ⊂ R r1 +r2 d’équation coordonnes = 0 qui est de dimension
×
r1 + r2 − 1. On va montrer que Ψ(σ(OK )) est un réseau dans H, donc isomorphe à Zr1 +r2 −1 . On
× ×
va aussi montrer que le noyau de Ψ ◦ σ : OK → H ( 60 ) est un sous-groupe fini UK ⊂ OK . Il en
découle que tous les éléments de UK sont des racines de l’unité de OK . Réciproquement, puisque
(H, +) n’a pas d’élément d’ordre fini, toutes les racines de l’unité de OK sont d’image triviale
donc dans UK , ce qui montre que UK est exactement l’ensemble de toutes les racines de l’unité
× ×
de OK . Comme OK est abélien, on en déduit facilement que OK ≃ UK × Zr1 +r2 −1 (exercice).

Noyau de Ψ ◦ σ. Comme σ est injective, on peut identifier OK avec son image σ(OK ) ⊂ V , et il
×
suffit de voir que σ(OK ) ∩ ker Ψ est fini. Mais le noyau de Ψ est l’ensemble des x ∈ V × tq toutes
les coordonnées (réelles ou complexes) sont de module 1. C’est donc un ensemble compact (et
borné) de Rr1 × Cr2 , donc ker Ψ ∩ OK est fini puisque OK est un réseau de V . Donc ker Ψ ◦ σ
est un sous-groupe fini.

×
Ψ(σ(OK )) est un réseau de H : discrétude. OK étant discret dans Rr1 × Cr2 , il est facile
×
de voir que Ψ(σ(OK )) est un sous-ensemble discret de Rr1 +r2 (donc de H) : si R > 0, et si
×
y ∈ [−R, R]r1 +r2 est dans Ψ(σ(OK )), on écrit y = Ψ(x) avec x ∈ σ(OK ) tel que log |xi | ∈ [−R, R]
pour tout i ≤ r1 +r2 , donc |xi | ≤ eR , donc x reste dans un ensemble borné, et comme x ∈ σ(OK )
×
est un réseau, ceci laisse un nombre fini de possiblités pour x donc pour y. Du coup, σ(OK ) est
discret dans Rr1 +r2 .

59. dans le cas quadratique de Q[ d], c’est une hyperbole dans R2
60. ou plus précisément de la restriction Ψ ◦ σ|O×
K

119
×
Ψ(σ(OK )) est un réseau de H : cocompacité. Nous allons montrer qu’il existe une constante C
×
telle que tout point de H est a distance ≤ C de Ψ(σ(OK )). Admettons pour l’instant l’énoncé
suivant.
×
Proposition X.17. Il existe un compact B ⊂ Rr1 × Cr2 tel que pour tout x ∈ L, il existe α ∈ OK
tel que σ(α).x ∈ B.
La proposition implique le théorème : en effet, L∩B est compact, contenu dans (R∗ )r1 ×(C∗ )r2 ,
et Ψ(L ∩ B) est donc compact. Pour tout h ∈ H, on peut écrire h = Ψ(x), avec x ∈ L, et la
×
proposition donne α ∈ OK tel que σ(α).x ∈ B, donc σ(α).x ∈ L ∩ B donc Ψ(σ(α)) + Ψ(x) =
×
Ψ(σ(α)) + h ∈ Ψ(L ∩ B). Ceci montre que Ψ(σ(OK )) est cocompact dans H et donc que
c’est un réseau (Corollaire VII.7). Ceci termine la preuve du théorème des unités modulo la
proposition.

Il reste donc a prouver la proposition.

Preuve de la proposition X.17. Soit R assez grand par rapport au covolume de OK dans Rr1 ×Cr2
(R = 2r1 +2r2 × coVol(σ(OK )) convient). Soit x ∈ L, donc Ñ (x) = ±1. La multiplication par x
est donc de déterminant Ñ (x) = ±1 car elle s’écrit comme la multiplication par (x1 , . . . , xr1 +r2 )
coordonnée par coordonnée. On en déduit que x.σ(OK ) est un autre réseau de même co-
volume que σ(OK ). Le théorème de Minkowski s’applique au compact convexe symétrique
BR = {x|∀i, |xi | ≤ R}, puisque R est assez grand, donc x.σ(OK ) contient un élément non
nul dans BR , on peut noter cet élément y = xσ(α) avec α ∈ OK \ {0}.
On a donc montré : pour tout x ∈ L, il existe α ∈ OK \{0} tel que σ(α).x est dans le compact
BR .
×
Si on avait α ∈ OK (c’est à dire si on avait N (α) = ±1), on aurait fini. On a que N (α) =
Ñ (σ(α)) = Ñ (xσ(α)) = Ñ (y) ≤ Rr1 +2r2 . En posant Nmax = ⌈Rr1 +2r2 ⌉, on a donc N (α) ≤ Nmax ,
et N (α) ne prend donc qu’un nombre fini de valeurs.
×
On va utiliser le lemme suivant pour upgrader notre α en un élément de OK .
×
Lemme X.18. Soient α, β ∈ OK de même norme M , et tel que α − β ∈ M.OK . Alors α/β ∈ OK .
On admet le lemme pour l’instant, et on continue la preuve de la proposition. On regarde
RR OK /(Nmax !)OK , et pour chacune des classes [α]F ∈ OK /(Nmax !)OK et
l’ensemble fini F =
chaque entier n ∈ −Nmax , Nmax , on choisit (s’il en existe) un représentant β tel que [β]F =
[α]F et N (β) = n. Ceci nous donne un ensemble fini d’éléments β1 , . . . , βk ∈ OK tels que pour
tout α ∈ OK tel que |N (α)| ≤ Nmax , il existe iα ≤ k tel que N (βiα ) = N (α), et α − βiα ∈
(Nmax !)OK . En particulier, le lemme s’applique à la paire α, βi (avec M = N (α) = N (βi )) et
×
implique que α/βiα ∈ OK .
On prend maintenant le compact B = ∪ki=1 β1i BR . On a vu que pour tout x ∈ L, il existe
α ∈ OK tel que αx ∈ BR . Donc en considéreant l’élément βiα correspondant, on a βαi x ∈ B et
α
α ×
βiα ∈ OK . Ceci démontre la proposition X.17.

Preuve du lemme X.18. α/β est un élément de K, de norme 1. Donc il suffit de voir que c’est
un élément de OK .
β + Nγ N
Ecrivons α = β +N γ, avec γ ∈ OK . Ainsi, α/β = = 1+ γ sera un entier algébrique
β β
si on sait que N/β entier algébrique. Choisissons un plongement σi0 : K → C (i0 ∈ J1, r1 + 2r2 K,
par exemple i0 = 1). Comme N/β et σi0 (N/β) ∈ C ont le même polynôme minimal, il suffit de
voir que σi0 (N/β) est un entier algébrique (dansQC). Q
Comme N est la norme de β, N = σi0 (β) × i̸=i0 σi (β), donc N/σi0 (β) = σi ̸=id σi (β) est
produit d’entiers algébriques (dans C), donc entier algébrique.

120

X.6 Détermination de l’unité fondamentale dans Z[ D] (optionnel)
Soit D > 1, sans facteur carré. √ √
On définit l’unité fondamentale ε de Z[ D] comme le plus petit élément de Z[ D]× ∩]1, ∞[
(le théorème de Dirichlet dit que ça existe). Il peut être de norme 1 ou −1.
Lorsque D = 1 mod 4, on définit de manière analogue l’unité fondamentale de OD . On ne
traite pas ce cas ici, il√marche essentiellement de la même manière.
On note Γ = σ(Z[ D]) le réseau obtenu via le plongement canonique √ σ√: α 7→ (α,√ᾱ). On a
une base B0 = (⃗u0 , ⃗u1 ) de Γ donnée par ⃗u1 = (1, 1) = σ(1), et ⃗u0 = ( D, − D) = σ( D).
σ(ε) est un point de l’hyperbole H d’equation xy = 1 ou H ′ : xy = −1.
On définit le quadrant positif d’une base de R2 comme l’ensemble des vecteurs dont les deux
coordonnées sont > 0 dans cette base. On a que σ(ε) est dans le quadrant positif de la base B0 :
en effet, ε ∈]1, ∞[×R et H∩]1, ∞[×R et H ′ ∩]1, ∞[×R sont contenus dans le 1er quadrant de B0
car H et H ′ intersectent les axes en (1, 1) et (1, −1). 61 √
• on va construire par récurrence une suite de vecteurs de Z[ D] de la façon suivante. On
note
√ ⃗ui √ = (xi , yi ) les coordonnées dans la base canonique de R2 de ⃗ui . On a donc (x0 , y0 ) =
( D, − D), (x1 , y1 ) = (1, 1).
On commence par définir
⃗u2 = ⃗u0 + λ1 ⃗u1
où λ1 est le plus grand entier tel que ⃗u2 soit dans le demi-plan inférieur, autrement dit, que √ l’axe
(Ox) reste dans le quadrant positif de (⃗u1 , ⃗u2 ). On vérifie facilement que λ1 = ⌊ −y
y1
0
⌋ = ⌊ D⌋.
Ensuite on recommence : On suppose qu’on a déja construit ⃗u0 , . . . , ⃗ui avec xj > 0 pour tout
j, yj du signe de (−1)j+1 . Le fait qu’on a choisi λ maximal a l’étape précédente dit que yi + yi−1
est du signe oppose à celui de yi . On définit

⃗ui+1 = ⃗ui−1 + λi ⃗ui

où λi ∈ N est le plus grand entier ⃗ui+1 soit dans le même demi-plan (superieur/inferieur) que
⃗ui−1 , autrement dit que yi+1 soit de même signe que yi−1 . La condition sur le signe de yi + yi−1
dit que λi ≥ 1. √
Notons que puisque (⃗ui−1 , ⃗ui ) est une Z-base de Z[ D], (⃗ui , ⃗ui+1 ) aussi.

Proposition X.19. Il existe i ≥ 2 tel que ε = ⃗ui .

Preuve. • Affirmation 1 : Si ε est dans le quadrant positif de ⃗ui−1 , ⃗ui , alors soit ε = ⃗ui+1 , soit ε
est dans le quadrant positif de ⃗ui , ⃗ui+1 ,
Preuve : la fonction |N (x, y)| = |xy| est strictement concave sur R+ × R+ , et sur R+ × R− .
(en restriction a une droite, c’est un polynôme de degré 2 qui s’annule aux points d’intersection
avec les axes, et qui est positif entre les 2).
Donc si |N (ui+1 )| > 1, N (x, y) > 1 sur le segment [ui−1 , ui+1 ]. Donc le fragment d’hyperbole
H compris dans le cone convexe porté par ⃗ui−1 , ⃗ui+1 est contenu dans l’interieur du triangle
0, ui−1 , ui+1 . Or les points de ce triangle ne peuvent pas etre a coordonnées entières dans la base
ui−1 , ui car ils s’ecrivent sui−1 + s′ ui+1 avec 0 ≤ s + s′ < 1, et

sui−1 + s′ ui+1 = (s + s′ )ui−1 + s′ λi ⃗ui .

• Affirmation 2 : xi → +∞, et yi → 0.
En effet, on a toujours λi ≥ 1, donc xi+1 ≥ xi−1 + xi , et donc, xi → ∞. De plus le covolume
des bases ui−1 , ui étant indépendant de i, on a |xi yi+1 − xi+1 yi | = Cte et en fait, comme les
signes de yi alternent, et que les xi > 0, |xi yi+1 | + |xi+1 yi | = Cte donc yi < Cte/xi+1 → 0.
• Conclusion : il faut bien qu’un jour on depasse ε, donc on va avoir ⃗ui = ε a un moment.
√ √
61. Cas de OD = Z[ωD ] : ça marche encore si on prend ωD = −1/2 + D (et pas 1/2 + D).

121
Lien (rapide) avec le developpement en fractions continue.

Théorème X.20.√Si on calcule le développement en fractions continues pi /qi de D, le premier
i tel que pi − qi D = ±1 est l’unité fondamentale.

Renvoyer a [Beker] Concise introduction to theory of numbers.


On se donne θ ∈ R+ , irrationnel, disons θ > 1. On écrit θ = [θ] + {θ}, avec {θ} ∈ [0, 1[, et on
pose a0 = [θ]. Pour pouvoir recommencer, on remplace θ par θ1 = 1/{θ} > 1. Ainsi θ = a0 + θ11 .
Puis θ1 = [θ1 ] + {θ1 } = a1 + θ12 en posant a1 = [θ1 ], et θ2 = 1/{θ1 }.
On définit ainsi par récurrence :
θ0 = θ
an = [θn ] ≥ 1
et
1 1
θn+1 = = .
{θn } θn − an
1
Ainsi, θn = an + θn+1 , et

1 1 1
θ = a0 + = a0 + = a0 + 1 .
θ1 a1 + 1/θ2 a1 + a 1
2+ θ
3

Notations : on note les nombres rationnels


1
pn /qn = a0 + 1 = [a0 , . . . , an ].
a1 + a2 +···+ 1
an−1 + a1
n

(on les prend premiers entre eux et positifs, ce qui les détermine de manière unique). On verra
qu’ils approximent θ.
Pour n = 0, on obtient pq00 = a10 .
En fait,
√ il est facile de vérifier par récurrence qu’on a une formule du genre ⃗ui = qi ⃗u0 +pi ⃗u1 =
σ(pi + qi √D). √
Pour 61, on trouve que ε = 29718 + 3805 61 (de norme -1) celle de norme 1 (corresondant
a l’equation de Pell-Fermat) étant (1 766 319 049, 226 153 980).
Il y a un problème fameux le pb des boeufs d’Helios, attribué a Archimede, découvert sur
un manuscrit grec en 1773, resolu seulement 100 ans plus tard :
[Cf Wikipedia] Dénombre, Ami, les troupeaux du Soleil qui couvraient jadis les
plaines de la Sicile, divisés en quatre groupes selon leurs couleurs, les blancs, les
noirs, les pies et les jaunes. Il y avait plus de taureaux que de vaches, et les relations
entre leurs nombres étaient les suivantes :
 
1 1
T aureauxblancs = + taureauxnoirs + taureauxjaunes,
2 3
 
1 1
T aureauxnoirs = + taureauxpies + taureauxjaunes,
4 5
 
1 1
T aureauxpies = + taureauxblancs + taureauxjaunes,
6 7
 
1 1
V achesblanches = + troupeaunoir,
3 4
 
1 1
V achesnoires = + troupeaupie,
4 5

122
 
1 1
V achespies = + troupeaujaune,
5 6
 
1 1
V achesjaunes = + troupeaublanc.
6 7
Si tu peux donner, Ami, le nombre de chaque sorte de vaches et de taureaux, tu n’es
pas un novice en matière de nombres, mais on ne peut encore te considérer comme
ayant un talent supérieur. Apprends, cependant, qu’il y avait aussi les relations sui-
vantes entre les taureaux du Soleil :

T aureauxblancs + taureauxnoirs = uncarrparf ait,


T aureauxpies + taureauxjaunes = unnombretriangulaire.
Si tu peux calculer également ces nombres, Ami, et trouver ainsi la taille totale du
troupeau, exulte, car par ta conquête, tu as montré que tu as atteint le degré
suprême dans la science des nombres.
On montre assez facilement que le pb se ramène a une equation de Pell-Fermat p2 −(4)(609)(7766)(46572 )q 2 =
1. La solution la plus petite est 7, 76 × 10206544 qui a donc plus de 200,000 chiffres.

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