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Les obligations professionnelles du banquier et ses responsabilités

Introduction :

‘’Vous savez mieux que moi, quels que soient nos efforts, que l’argent est la
clef de tous les grands ressorts, et que ce doux métal qui frappe tant de têtes,
en amour, comme en guerre, avance les conquêtes’’. Molière, l’école des
femmes, acte I, scène 4.

Le droit bancaire marocain ne se cesse de se développer afin qu’il puisse


s’adapter à un contexte international marqué par l’accroissement de
l’internationalisation des économies nationales dont l’activité bancaire en
représente inéluctablement l’un des paramètres majeurs. D’autre part, le droit
bancaire puise ses règles dans une diversité de sources oscillant la législation,
le règlement, et la pratique bancaire.

Quoiqu’il en soit, le droit bancaire regroupe les règles juridiques régissant le


commerce de l’argent, c’est-à-dire l’ensemble des dispositions juridiques qui
réglementent aussi bien les établissements de crédit que les activités exercées
à titre de profession habituelle par ceux-ci.

Historiquement, pendant la période coloniale, la réglementation bancaire


française s’appliquait aux colonies en plus de certaines règles spécifiques (la loi
bancaire de 1941, la loi de 1945 qui a subsisté jusqu’à la loi bancaire de 1984).
Au Maroc, la première banque est née en 1802, elle fut l’œuvre de
l’imagination d’un commerçant juif de Tanger.

A partir de 1956, au lendemain de l’indépendance du Maroc, les bases


d’un système bancaire national ont été mises en place, dont les apports
principaux consistent en une définition plus précise de l’activité des banques, la
délimitation des attributions des autorités de tutelle, de surveillance et
l’institution d’une réglementation plus appropriée.

En 1993, le système bancaire marocain a fait l’objet d’une importante


réforme en l’exercice de l’activité des établissements de crédit et de leur
contrôle et ce dans l’objectif de hisser le taux de bancarisation de la société
marocaine ainsi que de doter le système financier et bancaire marocain d’une
forte immunité contre les risques susceptibles d’être engendrés par les crises
financières internationales éventuelles.

S’agissant des établissements de crédit ou des banques ; ils disposent


d’une administration dirigée par une personne appelée ‘’banquier’’.

Considérant le banquier comme un professionnel exerçant une activité


d’intérêt général, les juges imposent certaines obligations, comme le devoir de
conseiller son client, de veiller à la sauvegarde de ses intérêts, de garder le
secret. De même, qu’ils investissent d’une obligation de surveiller les
opérations traitées par ses clients. Cette servité de la jurisprudence dans
l’appréciation de la responsabilité du banquier, s’explique par les fonctions
qu’exerce ce dernier, par l’instruction et l’expérience qu’il a acquise et surtout
par la confiance qu’on lui prête.

L’intérêt du sujet présent consiste en savoir la responsabilité du banquier


à des ordres juridiques différents, vue qu’ils effectuent de multiples tâches et
dispose de plusieurs obligations. Dans ce sens également, l’expansion de
l’activité bancaire entraîne un accroissement des risques d’erreurs ou de fautes
commises par le banquier qui, en principe, devait mettre de plus en cause sa
responsabilité.

Le développement croissant de l’activité bancaire et son expansion


flagrante nous mène donc à poser des questions, parmi lesquelles : On quoi se
représente les obligations du banquier et quelles sont ses responsabilités en
cas de commission d’erreurs ?

Pour répondre à ces questions au niveau du développement, on va


mettre l’accent d’une part sur les obligations professionnelles du banquier
d’intérêt général et envers la clientèle (Partie I), d’autre part sur les
responsabilités du banquier (civiles et pénales) en cas de non-respect de ses
obligations (Partie II).
PLAN GENERAL :

INTRODUCTION

PLAN :

PARTIE I : Obligations professionnelles du banquier

CHAPITRE I : Les obligations envers la clientèle

Section 1 : Le principe de non-ingérence et le devoir de vigilance

Section 2 : Le devoir de secret et le devoir d’information

CHAPITRE II : Obligations d’intérêt général

Section 1 : Obligation de déclaration

Section 2 : Obligation de vérification

PARTIE II : La responsabilité du banquier

CHAPITRE I : les fondements de la responsabilité du banquier :

Section 1 : le droit applicable

Section 2 : la justification de la responsabilité

CHAPITRE II : responsabilité du banquier à travers les types d’opérations


réalisées :

Section 1 : le banquier dépositaire

Section 2 : le banquier mandataire

CONCLUSION
PARTIE I : LES OBLIGATIONS PROFESSIONNELLES DU BANQUIER :

On parle essentiellement des obligations du banquier envers la clientèle


(chapitre I), qui repose sur le principe de non-ingérence et sa limite présentée en
devoir de vigilance. Ainsi qu’au devoir du banquier au secret bancaire et au
devoir d’information. Il est évident également de cerner l’obligation du banquier
d’intérêt général (chapitre II), qui se manifeste en déclaration et vérification.

CHAPITRE I : Les obligations envers la clientèle :

Section 1 : Le principe de non-ingérence et le devoir de vigilance :

Le principe de non-ingérence connaît des limites avec la nécessité pour le


banquier de rester vigilant.

Paragraphe 1 : Le principe de non-ingérence :

Le principe de non-ingérence, encore appelé principe de non-immixtion, impose


aux établissements de crédit de ne pas intervenir dans les affaires de leurs
clients, selon le principe, il revient au client et non au banquier d’apprécier
l’opportunité et la régularité d’une opération.

Ce principe connaît des applications multiples. Il concerne les services de caisse,


c’est-à-dire les dépôts, les retraits et encaissements. Par exemple, en principe,
l’établissement bancaire n’a pas à rechercher si cet investissement est opportun.
Les juges se réfèrent fréquemment au principe de non-ingérence pour rejeter la
responsabilité de l’établissement bancaire en cas de crédit excessif. Toutefois, le
désintéressement du banquier dans la gestion du client trouve un tempérament
jurisprudentiel dans l’obligation de vigilance. Pour autant, son champ
d’application reste vaste et revêt en pratique une importance considérable
puisqu’elle permet de réduire l’intensité de cette obligation de vigilance au
noyau dure de la détection des anomalies apparents, d’où le défaut s’apparente à
la commission d’une faute lourde permet d’engager la responsabilité du
banquier.

Paragraphe 2 : L’obligation de vigilance :

Le principe de non-ingérence n’a pas un caractère absolu. Il doit notamment


s’articuler avec le principe de vigilance. Le devoir de vigilance, ou obligation
générale de prudence, impose au banquier de procéder à certaines vérifications
pour détecter les anomalies et irrégularités manifestes. En bon professionnel, le
banquier ne peut, sous couvert du principe de non-ingérence, prêter son
concours à des opérations anormales. Par exemple en matière d’octroi de crédit,
le principe de non-ingérence permet au banquier de ne pas s’interroger sur
l’opportunité de l’investissement projeté. Mais sur le fondement du principe de
vigilance, l’établissement bancaire peut voir sa responsabilité engagée pour
avoir octroyer un crédit excessif par rapport à la surface financière de client.

La vigilance est l’attention que le banquier doit apporter à la situation de son


client afin de comporter à la situation de son client afin de se comporter en
professionnel diligent.

- L’obligation de vigilance du banquier à l’égard des clients s’inscrit dans


le cadre de la relation d’affaires nouée avec la clientèle. Cette relation se
manifeste dès lors que le banquier engage une relation professionnelle ou
commerciale qui est censée, au moment où le contact est établi, s’inscrire
dans une certaine durée, qu’elle soit ou non prévue par un contrat. Le
client de la banque n’est pas obligatoirement celui avec lequel elle est en
relation mais le bénéficiaire effectif, lequel s’entend de la personne
physique qui contrôle, directement ou indirectement, le client ou de celle
pour laquelle une transaction est exécutée ou une activité réalisée.
Certaines dispositions précisent le contenu des obligations de vigilance
que doit respecter le banquier à chaque étape de la relation d’affaires et
d’autres font varier ces exigences en fonction du risque de blanchiment
rencontré.

Section 2 : Le devoir de secret et le devoir d’information :

Paragraphe 1 : le secret professionnel :


Dans l’exercice de sa profession, le banquier est amené à recevoir de
multiples informations souvent confidentielles. Il est alors tenu au secret
sous peine de sanctions pénales en cas de manquement. Pour mesurer la
portée de cette infraction, il convient de cerner le domaine du secret,
auquel sont apportées des exceptions légales.
 Domaine du secret :

1° - Personnes soumises au secret :

Le législateur astreint au secret professionnel les dirigeants et


employés. En vertu de l'article 180 de la loi bancaire: Toutes les
personnes qui, à un titre quelconque, participent à l'administration, à la
direction ou à la gestion d'un établissement de crédit, d'un organisme
assimilé ou qui sont employées par celui-ci, les membres du Conseil
national du crédit et de l'épargne, du Comité des établissements de
crédit, de la Commission de discipline des établissements de crédit, de
la Commission de coordination et de surveillance des risques
systémiques, du conseil d'administration et le personnel de la société

gestionnaire, les personnes chargées, même exceptionnellement, de


travaux se rapportant au contrôle des établissements soumis à la
surveillance de Bank Al-Maghrib en vertu de la présente loi et, plus
généralement, toute personne appelée, à un titre quelconque, à
connaître ou à exploiter des informations se rapportant à ces
établissements, sont strictement tenus au secret professionnel pour
toutes les affaires dont ils ont à connaître, à quelque titre que ce soit,
dans les termes et sous peine des sanctions prévues à l'article 446 du
code pénal"'.

Nonobstant les dispositions de l'alinéa qui précède, les établissements


de crédit peuvent communiquer des informations couvertes par le
secret professionnel d'une part, aux agences de notation pour les
besoins de leur notation ou des instruments financiers qu'elles émettent
et, d'autre part, aux personnes avec lesquelles ils négocient, concluent
ou exécutent les opérations suivantes, dès lors que ces informations
sont nécessaires :

1) Opérations de crédit et opérations sur instruments financiers,

Ou d’assurance ;

2) Prise de participation ou de contrôle dans un établissement de crédit


;

3) Cessions, transferts ou maintien d'actifs, de fonds de commerce, de


créances ou de contrats ;

4) Contrats de prestations de services conclus avec un tiers en vue de


lui confier des fonctions opérationnelles en relation avec l'exercice de
son activité :

5) Étude, élaboration conclusion exécution et transfert de tout type de


contrat ou d'opérations, dès lors que les agences et les personnes
précitées ont avec l'établissement de crédit un lien de capital direct ou
indirect, conférant un pouvoir de contrôle effectif à l'une de ces
agences et personnes sur l'établissement de crédit, ou à l'établissement
de crédit sur lesdites agences et personnes.
Les agences de notation et les personnes susvisées recevant des
informations couvertes par le secret professionnel doivent les
conserver confidentielles.

Toutefois, elles peuvent à leur tour communiquer les informations se


rapportant aux opérations ci-dessus couvertes par le secret
professionnel dans les mêmes conditions que celles se rapportant aux
personnes avec lesquelles elles négocient, concluent et exécutent les
opérations énoncées ci-dessus.

Les personnes qui reçoivent ces informations sont alors tenues au


secret professionnel pour tous renseignements ou documents qu'elles
seraient ainsi amenées à recevoir ou à détenir. En outre, est tenue au
secret professionnel, toute personne qui participe ou a participé aux
délibérations, aux activités du comité des établissements de crédit et
des entreprises d'investissement ou aux contrôles de ces
établissements.

2° - Informations protégées par le secret :

L'atteinte au secret professionnel est, relative à, « la révélation d'une


information à caractère secret ». Ce manquement, d'ordre général,
souligne l'importance de la confidentialité qui doit être préservée pour
assurer notamment la protection de la vie privée de la clientèle et le
secret des affaires. Les magistrats apprécient le

•Caractère Confidentiel d'une information au regard des pratiques


professionnelles et des circonstances conduisant à sa validation. Ainsi,
par exemple, constitue le délit pénal, le fait, pour un conseiller
financier, de communiquer à un client la copie d'un procès-verbal de
réquisition concernant les comptes bancaires de ce dernier et adressé à
la banque par un officier de police judiciaire agissant dans le cadre
d'une enquête préliminaire. Doit être également considérée comme une
atteinte au secret professionnel, la diffusion par un banquier à des
commerçants d'une liste informatique de clients douteux.

A l'inverse, il a été jugé que les mentions apposées au verso d'un


chèque et concernant des tiers ne présentent, à l'égard du tireur (celui
qui tire les chèques), aucun caractère confidentiel et sont exclues du
secret bancaire. La relativité de ce secret apparaît également à travers
la possibilité qui s'offre au banquier de communiquer certaines
informations avec l'autorisation du client.

Dans le cadre des procédures civiles ou commerciales, le banquier peut


opposer le secret professionnel, sauf s'il est partie au procès ou si une
disposition expresse l'en délie. Tel est le cas, par exemple, en matière
de procédures collectives.

B. les exceptions :

C'est principalement l'article 181 de la loi bancaire qui prévoit d'une


manière non exhaustive les exceptions au secret bancaire. Ainsi, les
établissements de crédit ne peuvent pas s'abriter derrière le secret
professionnel lorsqu'elles sont interrogées par certaines administrations
comme les services fiscaux, les douanes, les autorités judiciaires dans
le cadre d'une procédure pénale ou par Bank Al

Maghrib. Ainsi que par certaines autorités ressortissantes d'États ayant


conclu avec le Royaume du Maroc, une convention bilatérale
prévoyant un échange d’informations en matière fiscale.

Paragraphe 2 : L'obligation d'information :


Les devoirs d'information et de conseil sont à l'origine une création de
la jurisprudence, ils varient selon la nature de l'opération bancaire et le
degré de qualification du cocontractant (novice ou averti).

Le devoir d'information, bien que souvent confondu avec le devoir de


conseil doit être distingué. En effet il semble que l'obligation
d'information porte sur les conditions de l'opération projetée, il s'agirait
en quelque sorte d'une obligation de renseignement. Le devoir de
conseil, quant à lui, vise plutôt l'opportunité de la décision.

Quoiqu'il en soit, dans le cadre de ces devoirs, c'est une obligation de


moyen qui repose sur le banquier. La responsabilité qui pèse sur ce
dernier est en principe une responsabilité pour faute. Si le banquier
doit faire tout son possible pour informer son client, c'est à ce dernier
qu'il appartient de tout mettre en œuvre pour parvenir au résultat qu'il
escompte.

Dès lors qu'il s'agit d'une obligation de moyen, il appartient au client


qui estime que son banquier a manqué à son devoir d'information de
prouver la faute de celui-ci. Ainsi le client de la banque doit rapporter
la preuve que l'information était due et n'a pas été donnée ; elle précise
en outre que l'étendue de l'obligation d'information de la banque sera
déterminée en fonction de la qualité du client : professionnel ou simple
consommateur.

Toutefois, si la charge de la preuve d'une information incomplète ou


inexacte pèse sur le client du banquier, l'absence totale d'information
est, quant à elle, présumée, le banquier devant prouver qu'il a exécuté
son obligation.

Ainsi, lorsque la banque a eu connaissance du caractère


irrémédiablement compromis de la situation financière de la société
emprunteuse et qu'elle n'en avise pas celle-ci, elle manque à son
obligation d'information et de conseil. Par ailleurs, il a été jugé qu'un
banquier agit avec une légèreté blâmable lorsqu'il consent à un
emprunteur un prêt dont la charge annuelle est supérieure à ses revenus
et si les renseignements qu'il a obtenus confirmaient sa situation
financière précaire et les risques d'insolvabilité.

Si le banquier a une obligation générale d'information et de conseil à


l'égard de sa clientèle, celle-ci cesse dès lors que le client était
parfaitement au courant de sa situation. Il a ainsi été jugé que la
banque qui avait renseigné son client en lui précisant qu'il s'agissait
des seules informations en sa possession n'engage pas sa
responsabilité.

La question du devoir de conseil pose plus de difficulté. S'il a pu être


jugé que le banquier manque à son devoir de conseil lorsqu'il consent
un prêt excessif eu égard aux facultés contributives de l'emprunteur, la
jurisprudence a parfois considéré que la responsabilité du banquier
dispensateur de crédit ne saurait être engagée au motif qu'il aurait
manqué à son obligation de conseil, dès lors que le banquier n'a pas à
se substituer à son client dans l'appréciation de l'utilité du crédit
demandé.

L'obligation de conseil du banquier est ainsi limitée par son devoir de


non-ingérence qui lui interdit de s'immiscer dans les affaires de son
client.

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