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Questions approfondies de psychopathologie ; Fouchet 2 ;

Nous en étions au mouvement de branchement-débranchement entre objets et Autre chez


Donna Williams.

Cette connexion aux objets peut être comprise en tant qu’entrée dans le symbolique,
découpant ainsi le réel.

Ok pour les non lacaniens ; Réel, Symbolique, Imaginaire c’est du Lacan quand Fouchet en
parle donc faut que j’explique vite fait vu que les lacaniens tiennent tellement à leur
hermétisme ;

La première chose à comprendre c’est que la théorie de Lacan part d’un principe de base ;

1) Il y a un inconscient.
2) Cet inconscient est « structuré comme un langage » c’est-à-dire qu’il a des lois, des
axiomes, des règles, comme une « nouvelle langue » en quelque sorte.
3) Il existe 3 mondes, dimensions disons, Réel/Symbolique/Imaginaire.

On va faire très simple ;

(OK donc signifiant = le son « Table » , signifié = concept d’une table »

 Symbolique ; Le langage, les signifiants


 Imaginaire : les sens en général, le signifié
 Réel ; ce qui est inaccessible, impensable, ce que le monde Symbolique et Imaginaire
ne peuvent pas représenter.

Le Réel n’existe que par rapport au Symbolique et Imaginaire, c’est leur opposé en quelque
sorte, tout ce qui ne peut être pensé, « l’impossible ».

Un exemple ; on est tous d’accord pour dire que on voit le monde selon notre perception,
selon notre expérience, selon notre subjectivité, il n’y a pas de « réalité objective absolue » à
proprement parler.

Bah le Réel c’est ce qui reste si on enlève notre perception, notre construction, quelque chose
d’impossible et qui n’a pas de sens donc.

Donc si on revient sur la phrase de Fouchet ; « en tant qu’entrée dans le symbolique,


découpant ainsi le Réel ». On comprend que pour Donna, regarder un motif de papier peint
est une façon de rentrer dans le monde symbolique, c’est-à-dire de « mettre du sens » sur
quelque chose qui à la base n’en a pas pour elle. (Le monde du Réel n’a pas de sens), Donna
vient mettre du sens, elle « découpe le Réel par le Symbolique ».

J’espère que c’est clair si vous avez des questions, démerdez vous.

L’expérience de Donna est quelque chose qu’on retrouve dans les activités artistiques au
fond. L’expérience de Donna est donc quelque chose que d’autres gens peuvent
expérimenter, on n’est pas dans la singularité absolue non plus.

Au fur et à mesure du temps, ces inventions vont devenir de plus en plus complexes et la
production aussi va changer.

Une invention remarquable : Willie ;

Il s’agit d’un personnage qi a surgit dans son existence, qui s’est mit à parler, elle utilise une
expression ;

J’allais alors sur mes trois ans. Willie devint mon incarnation extérieure,
mon préposé aux affaires étrangères : une créature au regard flamboyant de
haine, à la bouche pincée, aux poings serrés, arborant une posture à la
rigidité cadavérique.

Donc qui est Willie ? c’est son incarnation extérieur ; il s’agit d’elle, de Donna , mais aussi
pas d’elle, de Willie. Il est évident que la relation avec l’extérieur, répondre à quelqu’un qui
s’adresse directement à elle, c’est impossible.

Le « Je » de l’énonciation : « Moi, j’ai quelque chose à vous dire » qui est toujours difficile
pour tout le monde, se présenter au monde.

(On peut prendre l’évaluation d’examen ; quand on passe un examen ou qu’on écrit un papier
à remettre aux professeurs, on se fait évaluer et on attend d’être évaluer. C’est un peu pareil
quand on s’adresse à quelqu’un, on attend une réponse, une évaluation et on sait qu’on
l’attend. On se présente « Je » devant l’autre.)

Donc Willie, apparait quand ce « Je » est difficile pour Donna, Willie prend la place du « Je »
de l’énonciation dit Fouchet.

(Il prend un exemple pour donner une similarité ; elle fait quelque chose qu’on pourrait
mettre en parallèle avec le métier de ventriloque ; utiliser une marionnette, une poupée pour
parler à sa place.)
Le mode de communication de Willie est littéralement le « Vas te faire foutre » envers les
autres. Il y a une rigidité et même une « haine ».

Cette invention « Willie » est connectée à la nature Branchement-Re branchement. Quand ca


va pas avec le monde (Débranchement) , une manière de s’extraire est de faire venir Willie (
Re branchement via Willie ).

Sauf que Willie est très radical, dans le rentre dedans, très violent dirons-nous.

On remet en jeu une dynamique de l’attention de l’Autre qui nous écoute quelque part ; la
dimension « choquante » de Willie vient refocaliser l’attention de l’Autre.

Cette parole a donc une fonction ; celle de se connecter à l’Autre. Mais elle se connecte pour
envoyer un message particulier qui est ; « casse toi ».

Donc Il y a un avantage supplémentaire à ce Willie ; dans l’invention du papier peint, l’Autre


n’existait pas, elle reste focaliser sur les motifs et rien d’autre. Mais ici, il y a une étape en
plus ; on arrive à faire exister l’Autre mais il passe par Willie.

(On pose alors la question ; est ce que Donna change d’invention parce qu’elle a épuisé toutes
les possibilités ? Oui et Non, elle ne peut pas rester à regarder les motifs tout le temps et
répéter infiniment, on ne sait pas non plus ce qui fait émerger « Willie » mais cela revient
quelque part à se dire que nous aussi, dans nos vies, on rencontre des gens qui font qu’on
change, c’est un peu pareil ici.)

« Cela me permit néanmoins d’entrer en relations avec le monde


extérieur, en tant que Willie. Ce nom-là dérivait sans doute de mon propre
nom de famille, et le comportement du personnage donnait exactement la
réplique à celui de mon ennemie jurée : ma mère.
Willie apprit à retourner aux gens leurs propres phrases d’une façon
apparemment sensée bien qu’agressive. Mais c’était encore le silence qui
portait les coups les plus délétères. Ma mère se mit en tête que j’étais
l’incarnation du mal et du démon. Il aurait été plus facile de lui pardonner si
elle avait été victime d’un délire de persécution. Ce n’était pas le cas. Le
manque d’instruction et d’éducation comme l’isolement et l’alcoolisme
éclairaient mieux ses réactions qu’une prétendue paranoïa »

La relation avec la mère n’est pas accusatrice mais elle témoigne aussi de quelque chose.
Plus loin, on lit :

« Quand j’étais enfant, ce qui me perturbait et brisait la sécurité de


mon petit monde, pour s’imprimer ensuite douloureusement dans mon
esprit, était cela même que tout un chacun considère comme une
bénédiction : la gentillesse, la compréhension et l’amour. »

Au fond, il n’y a pas d’intérêt à chercher un accusé ou une raison pour quelque chose, elle est
très claire et dit elle-même que ce n’est pas la brutalité des rapports familiaux qui a créée tout
cela. Elle indique qu’il y avait une violence mais qui était prise dans sa façon de traiter la
violence en générale, le monde est violent pour Donna, ses parents aussi, il n’y a pas
vraiment de différence pour elle.

Pour elle, ce que nous considérons comme une bénédiction, était quelque chose d’impossible,
impraticable.

Elle veut se saisir de ce qui va donner une orientation à son existence, elle veut repérer ce qui
lui permet de se positionner, de choisir les voies praticables pour elle.

 Bcp de questions pendant 30 minutes

Willie va permettre à Donna de faire quelques pas de plus vers des choses qu’elle n’a pas
encore explorées, notamment avec l’Autre. Willie lui permet d’aller vers le monde de
l’apprentissage à sa façon.

Elle est allé à la rencontre du monde de l’apprentissage, il faut donc dans ce monde , savoir y
faire, savoir répondre aux exigences de l’Autre souvent.

Ca a marché pour Donna, elle arrive à s’engager dans un monde d’apprentissage malgré ses
difficultés avec la relation à l’Autre, elle y aura évidemment son propre style.

Elle rencontre quelque chose du champ de l’Autre, cette phrase de Miller « On a toujours
raison de se révolter », c’est une phrase qui vient de l’Autre fondamentalement. La manière
dont on est traversé par l’Autre vient ouvrir des possibilités. Pour Donna c’est sa mère qui
vient jouer ce rôle ;

Ma mère utilisait sa virtuosité verbale pour lire à toute vitesse des


romans de série noire. J’aimais lire moi aussi, mais plutôt les annuaires du
téléphone et les indicateurs de rues.
Donc elle fait la connexion directement sans passer par une analyse qui dirait plutôt « c’est
par le fait de regarder ma mère que j’ai su apprendre à m’intéresser, etc… » non, elle fait une
connexion plus brutale, directe en disant « J’aimais lire moi aussi mais plutôt les
annuaires ».

Fouchet fait aussi une analyse en disant ; tiens sa mère s’intéresse aux romans noirs, c’est-à-
dire un genre de roman qui tient à dévoiler l’intention des gens (que veut le criminel, qui est
le tueur, etc. ) donc c’est évident que quelqu’un comme Donna ne s’intéresse pas à ce genre
de romans vu qu’elle ne s’intéresse pas au champ de l’Autre comme nous. Elle préfère
l’annuaire.

L’annuaire est quelque chose de très ordonné et Fouchet nous dit « tout le monde n’est pas
capable de s’engager dans la lecture d’un annuaire téléphonique », lui-même aurait du mal.
Mais est ce pour autant vrai qu’un livre sur la psychanalyse serait « mieux » qu’un annuaire ?

(A mon avis, c’est mieux l’annuaire mais soit on comprend l’argument qualitatif).

Donna Williams fera ensuite la découverte d’autres ouvrages qui, plutôt que de mettre en jeu
les dynamiques récurrentes de nos cultures, amour, crime, etc., elle va s’intéresser aux
ouvrages qui touchent au plus près au séquençage, à la mise en ordre la plus technique qui
soi.

Il est important de comprendre que toutes nos façons de faire sont par nature singulière, elles
prétendent tout à une forme de subjectivité, on a tous nos préférences pour les lectures et des
modalités propres pour aborder les choses.

« Car à la longue je m’étais rendu compte que je ne tirais aucun profit des
romans qu’on nous donnait à lire à l’école. Je pouvais les déchiffrer
correctement et sans difficulté, mais j’étais incapable de saisir de quoi il
s’agissait. »

On voit bien ici cet univers, cette dynamique si particulière de Donna, quelque chose de
fondamentalement subjectif, le roman lui est inconnu mais pas l’annuaire.

À moins de les rechercher et de les


assimiler par moi-même, la culture et l’instruction m’étaient aussi
inaccessibles que toute autre intrusion venue du monde extérieur
C’est elle qui décide de ce qui rentre ou pas dans son monde ; « A moins de les
rechercher… » , et bien au-delà de la clinique de l’autisme, il est particulièrement important
de manière générale au niveau des savoirs et de leurs acquisitions de considérer cette forme
de « décision » qu’on fait de se construire. On se construit par des choix et l’acquisition de
savoir mais qui passe aussi par des discours qui portent toute la violence de « comment faire
pour que l’Autre soit plié à ma volonté » même si cette volonté est basée sur de bonnes
intentions. Ce que l’on remarque très vite, c’est au niveau de l’apprentissage des enfants,
comment cette violence s’installe : comment vont-ils faire pour traiter cette assignation de
volonté ? chacun le fera à sa manière, brutalement, par l’humour, par un style différent, etc…

Tous les enfants sont confrontés à cela, Donna aussi. On peut donc extrapoler le témoignage
de Donna vers des questions qui nous concernent chacun/chacune.

Cette nouvelle invention va lui permettre de prendre gout aux choses, à quelque chose et
finalement à la vie peut être. Elle s’y intéresse réellement à cet annuaire, ça lui donne un sens.
On le voit dans le passage qui suit ;

« Je me passionnais pour les classements et collections en tout genre. Je


rapportais à la maison les ouvrages spécialisés de la bibliothèque qui
traitaient des différentes espèces de chats, d’oiseaux, de fleurs, de maisons,
de travaux artistiques – en fait tout ce qui pouvait faire partie d’ensembles
plus vastes et trouver sa place dans une hiérarchie classificatrice. Mes
travaux scolaires ressemblaient à cela, eux aussi. On nous demandait
d’écrire quelque chose à propos des vaches. J’élaborais un tableau
exhaustif, agrémenté d’illustrations détaillées, spécifiant chaque type de
vache »

Cette classification va avoir des répercutions par rapport aux autres enfants, aux professeurs,
etc…:

« Ma curiosité pouvait sembler répétitive et manquer de créativité, il


n’empêche que c’était ma façon de reprendre goût à ce qui m’entourait.
J’avais atteint une phase que j’ai comparée par la suite à ce qu’on pourrait
appeler « le réveil du mort ». Ces petits pas étaient de véritables exploits. »

Cette invention vient donc la « vitaliser » contrairement aux précédentes, ça la dynamise, ça


appelle son intérêt, son corps se met à vivre à travers ces activités.
Elle dit finalement ;

« L’annuaire devint la salle de classe la plus impersonnelle et la plus commode que j’eusse
jamais trouvée ».

Impersonnelle et commode, la débranche, et puis un « Je » qui intervient ensuite qui la


rebranche sur l’objet de l’annuaire.

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