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2 Les régimes totalitaires

Le point sur le programme


Objectifs Ce chapitre vise à mettre en évidence les Points ●1937-1938 : la Grande Terreur
du de passage
chapitre caractéristiques des régimes totalitaires (idéologie, et d’ouverture en URSS.
formes et degrés d’adhésion, usage de la violence ●9-10 novembre 1938 : la nuit
et de la terreur) et leurs conséquences sur l’ordre de Cristal.
européen
● 1936-1938 : les interventions
On peut mettre en avant les caractéristiques :
étrangères dans la guerre civile
– du régime soviétique ;
espagnole : géopolitique des
– du fascisme italien ;
totalitarismes.
– du national-socialisme allemand.

L’objectif de ce chapitre est de souligner «  les caractéristiques des régimes totalitaires (idéologie, formes
et degrés d’adhésion, usage de la violence et de la terreur) et leurs conséquences sur l’ordre européen  ». Il
s’agit alors de mettre en avant « les caractéristiques du régime soviétique, du fascisme italien et du national-
socialisme allemand ». Contrairement au précédent programme de la classe de Première (2010) qui demandait
d’étudier ensemble les régimes totalitaires dans l’entre-deux-guerres (« genèse, points communs, spécificités »),
ce nouveau programme de Terminale demande explicitement d’étudier séparément les trois formes de totali-
tarisme. Les points de passage et d’ouverture sont : « 1937-1938 : la Grande Terreur en URSS », « 9-10 novembre
1938 : la nuit de Cristal », « 1936-1938 : les interventions étrangères dans la guerre civile espagnole : géopoli-
tique des totalitarismes ».
Aucun point de passage et d’ouverture n’est prévu pour le totalitarisme en Italie, où la terreur fut moins intense
(selon Hannah Arendt, « les condamnations politiques y furent très peu nombreuses et relativement légères »).
En revanche la violence fasciste est évidemment travaillée dans le point de passage et d’ouverture sur la guerre
d’Espagne. Il ne s’agit pas non plus de commencer le chapitre aux débuts de la prise de pouvoir fasciste de 1922,
au basculement vers la dictature totalitaire fasciste des années 1925-1926 ou à la prise du pouvoir en URSS par
Staline en 1927. Ces trois événements ne doivent être qu’évoqués sous forme de repères chronologiques, d’où
l’importance des documents chronologiques dans ce chapitre.

La logique du chapitre
Le chapitre propose une structure efficace pédagogiquement : une double-page d’ouverture contenant la pro-
blématique du chapitre (« Quelles sont les caractéristiques des régimes totalitaires et leurs conséquences sur
l’ordre européen ? »), deux grandes et riches images ainsi qu’une frise interactive.
Puis, une double-page « repères » propose deux cartes sur les régimes politiques et l’affirmation des tensions en
Europe dans les années 1930. Les élèves y verront clairement la poussée des régimes autoritaires et totalitaires
ainsi que la marche vers la Seconde Guerre mondiale.
Le chapitre propose ensuite un point sur le régime soviétique (étude présentant « le régime totalitaire sovié-
tique  » puis un point de passage sur «  1937-1938  : "la Grande Terreur" en URSS  »), un dossier étude sur «  le
fascisme italien », deux autres sur « l’arrivée d’Hitler au pouvoir » et sur « le régime national-socialiste », enfin
un point de passage sur « 1938 : la nuit de Cristal ». Une première leçon présente alors les « trois régimes tota-
litaires ». Cette leçon permet aux élèves de retrouver sous une forme synthétique les éléments travaillés dans
les pages précédentes.
Suivent un point de passage sur « les interventions dans la guerre civile espagnole », un dossier étude sur « la
marche vers la guerre  » ainsi qu’une seconde leçon permettant de comprendre comment les totalitarismes
mènent le monde vers la guerre.
Histoire Tle © Hatier, 2020.

Quatre pages « exercices bac » sont proposées : deux analyses de documents et une question problématisée
partiellement guidées, ainsi qu’un sujet blanc brut contenant une question problématisée (première partie) et
une analyse de documents (deuxième partie) correspondant aux attentes des E3C.
Le chapitre se termine par une double-page « révisions » comportant un schéma de révision synthétisant les
leçons, les biographies illustrées des principaux acteurs, les dates clés, les notions à maîtriser et dix questions
permettant aux élèves de commencer à réviser.

2•1 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


Pour aller plus loin
Bibliographie
• Livres d’histoire
– Johann Chapoutot, Le Nazisme. Une idéologie en actes, « Documentation photographique » n° 8 085,
La Documentation française, janvier 2012.
– François Godicheau, La Guerre d’Espagne, Gallimard, coll. « Découvertes », 2006.
– Guy Hermet, La Guerre d’Espagne, Seuil, 1989 (rééd. 1996).
– Paul Preston, Une Guerre d’extermination, Espagne, 1936-1945, Belin, 2016.
– Rémi Skoutelsky, L’Espoir guidait leurs pas. Les volontaires français dans les Brigades internationales
1936-1939, Grasset, 1998.
• Articles
– François Godicheau, « Guerre d’Espagne : la fin des légendes », L’Histoire n° 427, septembre 2016, p. 32-61.
• Romans et témoignages
– Margarete Buber-Neumann, Prisonnière de Staline et d’Hitler, T. 1 : Déportée en Sibérie, 1949 ;
T. 2 : Déportée à Ravensbrück, Seuil, 1988 (rééd. 2004).
– Ernest Hemingway, Pour qui sonne le glas, 1940.
– André Malraux, L’Espoir, 1937 (en film aussi).
Films
– Charlie Chaplin, Le Dictateur, 1940.
– Isabelle Clarke et Daniel Costelle, Apocalypse. Hitler, 2011.
– Isabelle Clarke et Daniel Costelle, Apocalypse. Staline (1re et 2e parties), 2015.
– Ken Loach, Land and Freedom, 1995.
– Leni Riefenstahl, Le Triomphe de la volonté, 1935.
– Leni Riefenstahl, Les Dieux du stade, 1938.
– Frédéric Rossif, Mourir à Madrid, 1963.
Site Internet
www.ina.fr

pp. 34-35 Ouverture peut noter toutefois que contrairement aux totalita-
rismes nazi et fasciste qui mettent en avant une figure
Cette double-page d’ouverture permet de commen-
seule (Hitler ou Mussolini), le totalitarisme stalinien doit
cer à problématiser le chapitre. La question posée ici
faire obligatoirement référence à la figure initiatrice de
est : « Quelles sont les caractéristiques des régimes tota-
Lénine, ce que l’on remarque bien sur l’affiche de propa-
litaires et leurs conséquences sur l’ordre européen ? ». gande p. 34. Par ailleurs la photographie du congrès du
L’affiche soviétique permet aux élèves de faire le lien parti nazi à Nuremberg fait clairement le lien entre tota-
avec le programme de Première grâce au buste de litarisme nazi, embrigadement, militarisme et marche
Lénine devant le drapeau rouge. Ensemble, les deux vers la guerre, association confirmée par les éléments de
images éclairent la volonté de contrôler totalement la la frise.
société mais aussi la propagande, l’embrigadement des
foules, le culte du chef, la violence et la marche vers la pp. 36-37 Repères
guerre (par les uniformes et les SA du congrès de Nurem-
berg). La frise permet de placer les grands repères et Les tensions en Europe
notamment les trois points de passage et d’ouverture qui Ces deux cartes permettent de comprendre les processus
portent sur la violence de ces régimes. en cours en Europe dans l’entre-deux-guerres : un affai-
blissement politique et numérique des démocraties au
Des éléments clés du totalitarisme soulignés par l’his-
profit des régimes autoritaires ou totalitaires d’une part,
torien Bernard Bruneteau (Les Totalitarismes, Armand
une marche vers la Seconde Guerre mondiale d’autre
Colin, coll. « U », 2014) apparaissent : il s’agit d’un régime
part. Les élèves doivent prendre conscience que l’espoir
souhaitant édifier «  une humanité nouvelle par l’élimi-
Histoire Tle © Hatier, 2020.

de paix durable forgé après 1918 disparaît peu à peu.


nation de toute différenciation au sein d’un grand Tout
sacralisé (nation, race ou classe)  ». Que ce soit dans
Réponses aux questions p. 37
un totalitarisme de gauche ou dans un totalitarisme
de droite, un culte est rendu au chef (Staline ou Hitler) Carte 1
par une foule censée être unanime (une classe unique 1. Les régimes totalitaires sont l’URSS, l’Italie, l’Alle-
à gauche, une race et une nation unique à droite). On magne. Les élèves vont, en lien avec le document fourni

2•2 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


dans le livre, choisir respectivement les dates suivantes : pp. 38-39 Étude
1917, 1922 et 1933. Pour autant les dates d’instauration
des régimes totalitaires sont sujettes à débat. Certes la Le régime totalitaire soviétique
révolution bolchevique a lieu en 1917 et Lénine n’hé- La double-page permet de comprendre les caractéris-
site pas à éliminer ses opposants, tandis qu’en Italie la tiques du totalitarisme soviétique dans les années 1930 :
marche sur Rome a lieu en 1922 et Hitler accède au pou- le dictateur Staline (doc. 1), le culte de la personnalité
voir en Allemagne en 1933. Mais pour Hannah Arendt et la propagande de masse (doc. 2), la collectivisation et
par exemple, l’URSS n’est totalitaire qu’à partir de 1929 la volonté de forger une économie et une société com-
avec le début de la collectivisation des terres, tandis que munistes sans les ennemis de classe (doc. 3), la quête
l’Allemagne n’est «  véritablement totalitaire que pen- d’un « homme nouveau » dans les usines et les kolkhozes
dant la guerre qui a fourni de grandes masses humaines (doc. 5) mais aussi une résistance populaire à la collec-
et rendu possibles les camps d’extermination ». D’autres tivisation (doc. 4). Il ne faut évidemment pas croire que
chercheurs pensent qu’il faut attendre les lois fascis- la théorie totalitaire est appliquée totalement et sans
tissimes de 1925-1926 pour parler de totalitarisme en heurts dans les trois pays étudiés  : «  Tout totalitarisme
Italie. C’est d’ailleurs en 1925 que le Duce affirme «  la est un totalitarisme manqué » (Michael Walzer).
farouche volonté totalitaire » fasciste.
VIDÉO Staline assiste à une grande
2. parade militaire à Moscou à l’occasion
Démocraties au début   Régimes   du 1er mai 1937
des années 1930 autoritaires
Questionnaire
France, Royaume-Uni, Portugal, Espagne,
Irlande, Islande, Belgique, Estonie, Lettonie, Lituanie, 1. Quels éléments montrent la puissance de l’URSS ?
Luxembourg, Danemark, Pologne, Autriche, Hongrie, L’ampleur du défilé militaire (nombre de soldats, chars,
Norvège, Suède, Finlande, Roumanie, Bulgarie,
avions…).
Tchécoslovaquie, Albanie Yougoslavie, Grèce
(+ URSS, Italie, Allemagne) 2. Qu’est-ce qui indique l’embrigadement du peuple ?
Komsomols, défilés de travailleurs, enthousiasme de la
3. La dynamique globale est à l’affirmation des régimes foule, panneaux de Staline, Lénine et Marx.
autoritaires et totalitaires comme l’indiquent les dates 3. En vous aidant de vos connaissances personnelles,
d’instauration de ces régimes. Peu à peu les démocraties pourquoi la fête du 1er mai est-elle importante pour ce
deviennent minoritaires en Europe et tendent à se faire régime communiste ?
remplacer par des régimes politiques forts : autoritaires, Fête des travailleurs et journée de lutte instaurée par la
dictatoriaux ou totalitaires. IIe Internationale communiste en 1889.
Carte 2
1. L’Allemagne est alliée à l’Italie dans le cadre de l’axe Réponses aux questions p. 39
Rome-Berlin (1er novembre 1936). Elle est aussi membre 1. Staline parvient progressivement à diriger seul l’URSS.
du pacte anti-Komintern aux côtés du Japon (1936), de Né en Géorgie en 1879, il devient un militant bolchevique
l’Italie (1937), de la Hongrie et de l’Espagne (1939). Enfin auprès de Lénine. En 1922, il est élu secrétaire général
elle signe un pacte de non-agression avec l’URSS le du Parti communiste de l’Union soviétique (PCUS). Après
23 août 1939. De leur côté, la France et le Royaume-Uni 1924, il se présente comme l’héritier de Lénine et élimine
signent en mars 1939 une alliance garantissant l’indé- tous ses adversaires au sein du parti (Léon Trotski est
pendance et le soutien de la Pologne en cas d’agression chassé du PCUS en 1927, exilé en 1929 et assassiné en
militaire. 1940) ou ceux qu’il accuse être des « ennemis de classe ».
Ainsi en 1927 il dirige seul le parti communiste et l’URSS.
2. L’Allemagne (Rhénanie en mars 1936, Anschluss en Il peut alors utiliser la propagande, l’embrigadement et
mars 1938, Sudètes en octobre 1938, Bohême-Moravie la surveillance comme outils de gouvernement dans un
et Memel en mars 1939), l’Italie (invasion de l’Albanie régime de terreur.
le 7 avril 1939) et la Hongrie (progressive occupation du
sud de la Slovaquie entre novembre 1938 et mars 1939) 2. Staline se montre comme un chef charismatique,
réalisent des coups de force. visionnaire et bienveillant. L’affiche de propagande de
1938 le montre comme le guide (le « Vojd ») d’un peuple
3. On peut parler de « marche vers la guerre » dans les enthousiaste et volontaire, qu’il s’agisse des Komsomols,
Histoire Tle © Hatier, 2020.

années 1930 puisque les régimes autoritaires et tota- de l’armée, des ouvriers et des paysans qui défilent devant
litaires préparent peu à peu la guerre en tissant des lui à Moscou. Le slogan signifie «  gloire au majestueux
alliances, en menant une politique belliciste et en n’hé- Staline  !  ». Évidemment cette affiche de propagande a
sitant pas à braver l’ordre international défendu par la pour objectif de stimuler le culte de la personnalité. Elle
Société des Nations (SDN), le traité de Versailles et les tait toutes les violences commises depuis 1927, dont la
démocraties occidentales. Grande Terreur en cours en 1937-1938.

2•3 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


3. Staline souhaite transformer l’économie et la société (1,8  million de déportés) et la grande famine favorisée
pour donner naissance à un pays pleinement marxiste- par l’État en Ukraine et au Kazakhstan en 1932-1933
léniniste. L’objectif est de façonner un Homme nouveau, (8  millions de morts). Parallèlement ont lieu de grands
totalement communiste, qu’il s’agisse du modèle kol- procès et des purges à Moscou permettant à Staline
khozien dans les campagnes ou ouvrier en ville. Pour cela d’éliminer tous ses adversaires politiques. La population
l’économie doit être transformée, planifiée, collectivisée tente de résister, notamment au sud-ouest de la Russie
sous la direction de l’État communiste soviétique (plan en se révoltant, en prenant les armes pour récupérer les
quinquennal en 1928 et collectivisation forcée en 1929). outils agricoles et les terres collectivisés. Mais la répres-
Cette mutation doit permettre de transformer l’URSS en sion soviétique est terrible pour les ruraux, accusés
un pays de « grande agriculture » et en « un pays indus- d’être des koulaks, des bourgeois ennemis de la classe et
triel et puissant, parfaitement libre et indépendant des réfractaires au changement.
caprices du capitalisme mondial » (une grande partie du
monde subit les conséquences de la crise de 1929). pp. 40-41 Point de passage
4. La terreur stalinienne s’accentue en 1929 avec le 1937-1938 : la « Grande Terreur »
début de la collectivisation des terres, la déportation et en URSS
l’élimination des koulaks à partir de 1930 (1,8 million de
Pour atteindre son objectif de mainmise sur le Parti com-
déportés) et la grande famine favorisée en Ukraine et au
muniste d’Union soviétique et sur l’URSS, Staline exerce
Kazakhstan en 1932-1933 (8 millions de morts). Parallè-
une terreur. Ces années 1937-1938 sont un tournant
lement ont lieu de grands procès et des purges à Moscou
permettant de comprendre comment s’est durablement
permettant à Staline d’éliminer tous ses adversaires
façonné l’appareil répressif soviétique. Pour autant la
politiques. La population tente de résister, notamment
terreur est légitimée en URSS depuis 1922 et l’article 58
au sud-ouest de la Russie en se révoltant, en prenant les
du code pénal. Cette Grande Terreur est décidée par Sta-
armes pour récupérer les outils agricoles et les terres
line (doc. 1), elle donne lieu à des arrestations arbitraires
collectivisés. Mais la répression soviétique est terrible (doc. 2) qui aboutissent à des crimes de masse (doc.  3)
pour les ruraux, accusés d’être des koulaks, des bour- dans toute l’URSS (carte 4 sur les goulags et les fosses
geois ennemis de classe et réfractaires au changement. communes) et pour toutes les catégories de population
Synthèse (doc. 5). Le bilan du document 6 permet de souligner
l’ampleur de la « purge ».
L’URSS est dirigée par un dictateur communiste, Joseph
Staline, au pouvoir à partir de 1927. Il se présente comme
VIDÉO La Grande Terreur
l’héritier de Lénine (qui avait déjà commencé à éliminer
les «  ennemis du peuple  » dès 1917) et écarte tous ses Questionnaire
adversaires au sein du parti (Léon Trotski est chassé du
1. Pourquoi les bourreaux du NKVD photographient-ils
parti communiste en 1927, exilé en 1929 et assassiné
les victimes avant leur mise à mort ?
en 1940) ou ceux qu’il accuse d’être des «  ennemis de
Pour ne pas se tromper d’individus.
classe ». Ainsi en 1927 il dirige seul le parti communiste
et l’URSS. Il peut alors utiliser la propagande, l’embriga- 2. Combien de victimes sont fusillées ?
dement, la surveillance et la répression comme outils de 750 000 exécutés et 800 000 déportés dans les camps du
gouvernement dans un régime de terreur. Goulag.

L’un de ses objectifs est de transformer l’URSS pour don- 3. Combien y a-t-il d’exécutions par jour en moyenne
ner naissance à un pays totalement marxiste-léniniste. pendant la Grande Terreur ?
Il veut façonner un Homme nouveau, totalement com- 1 600 exécutions par jour pendant 500 jours.
muniste, correspondant au modèle kolkhozien dans les 4. Quel est l’objectif de Staline ?
campagnes ou ouvrier en ville. L’économie doit être Purger la société soviétique de tous les mauvais élé-
transformée, planifiée, collectivisée sous la direction de ments supposés.
l’État communiste soviétique (plan quinquennal en 1928
5. Que font au quotidien les condamnés au Goulag ?
et collectivisation forcée en 1929). Cette mutation doit
Du travail forcé.
permettre de transformer l’URSS en un pays de « grande
agriculture » mais aussi en « un pays industriel et puis-
sant, parfaitement libre et indépendant des caprices
Réponses aux questions p. 41
du capitalisme mondial » (une grande partie du monde Parcours 1
Histoire Tle © Hatier, 2020.

subit alors les conséquences de la crise de 1929).


1. L’État soviétique met en place la Grande Terreur selon
Mais pour tenter de soumettre totalement le pays, une procédure secrète. C’est en imposant un secret d’État
Staline impose la terreur. Selon Hannah Arendt, le totali- que l’État soviétique planifie les arrestations d’oppo-
tarisme commence en 1929 en URSS avec le début de la sants réels ou supposés. Les corps des victimes doivent
collectivisation des terres. La terreur se prolonge avec la être camouflés pour réduire la résistance populaire.
déportation et l’élimination des koulaks à partir de 1930 La Grande Terreur donne aussi lieu à des arrestations

2•4 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


et éliminations plus pragmatiques comme le souligne tiré de L’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne.
le document 2. Cette terreur stalinienne est fondée sur Les victimes sont variées : hommes et femmes, jeunes et
l’exclusion et sur la croyance qu’une action politique vio- vieux, membres du parti communiste ou non, prolétaires
lente guidée par le chef peut changer la société. Bernard ou bourgeois, militaires, paysans, soviétiques ou étran-
Bruneteau rappelle que « la terreur serait un moyen pour gers, innocents ou non. La Grande Terreur stalinienne
le stalinisme, une finalité pour le nazisme » (Les Totali- peut finalement viser tout le monde. Staline se lance
tarisme, 2014)  : ce serait un outil permettant à Staline dans une grande entreprise de remplacement politique
d’éliminer des opposants et de se maintenir au pouvoir. des cadres soviétiques en tentant de purger la société à
Comme l’écrit Jean-Lambert Tallien, adversaire de Maxi- son avantage.
milien de Robespierre pendant la Révolution, « la terreur
La répression est de grande ampleur. Les historiens
ne peut être utile qu’à la minorité qui veut opprimer la
évaluent qu’1,6  million d’individus ont été arrêtés et
majorité ».
environ 750  000 tués, de l’été 1937 jusqu’en novembre
2. La salle applaudit Staline puisqu’une motion de fidé- 1938. L’Armée rouge est particulièrement touchée par la
lité au camarade Staline vient d’être adoptée par des violence puisque 3 maréchaux sur 5, 8 amiraux sur 9 et
représentants du parti dans une subdivision administra- 14 généraux sur 16 sont tués. Ces purges fragiliseraient
tive soviétique. Le chef de la fabrique est arrêté puisqu’il dangereusement l’URSS en cas de conflit armé extérieur.
a cessé le premier d’applaudir au bout de 11 minutes, ce Des régions d’URSS sont couvertes de fosses communes
qui est vu comme la preuve de son manque d’attache- ou de camps du Goulag. Pourtant certains territoires
ment à la politique de Staline. résistent particulièrement à la Grande Terreur, à l’ouest
de la Russie.
3. La Grande Terreur de 1937-1938 vise les opposants
réels ou supposés de Staline et de sa politique : hommes Parcours 2
et femmes, jeunes et vieux, membres du parti com- Le développement peut être le même que la synthèse du
muniste ou non, prolétaires ou bourgeois, militaires, parcours 1.
paysans, soviétiques ou étrangers, innocents ou non. La
Grande Terreur stalinienne peut finalement viser tout le pp. 42-43 Étude
monde… L’objectif est de purger la nouvelle société com-
muniste des éléments perçus comme nuisibles. Le fascisme italien
4. Les victimes peuvent être jugées arbitrairement ou Si certains intellectuels comme Hannah Arendt esti-
condamnées sans forme de procès. Elles peuvent être maient que le fascisme n’était pas un totalitarisme,
emprisonnées, déportées dans les camps du Goulag où les historiens d’aujourd’hui démontrent le contraire.
elles subissent le travail forcé (construction de canaux…), D’ailleurs Benito Mussolini utilise pleinement le terme
tuées par le NKVD, placées dans des orphelinats lorsqu’il « totalitaire », pour justifier notamment la mort du socia-
s’agit d’enfants de condamnés à mort, etc. Les historiens liste Giacomo Matteotti en 1924 par l’apologie de l’État
évaluent qu’1,6  million d’individus ont été arrêtés et totalitaire fasciste. Pour autant il est vrai que la répres-
environ 750  000 tués, de l’été 1937 jusqu’en novembre sion est moindre qu’en URSS ou qu’en Allemagne et
1938. que l’Italie bénéficie du contrepoids de l’Église et de la
monarchie, permettant de réduire la volonté totalitaire
Synthèse fasciste. Par la chronologie et le document 1, l’élève est
La Grande Terreur est organisée par Staline et l’État à même de comprendre l’origine du régime fasciste ainsi
soviétique durant l’été 1937 selon une procédure que les éléments clés de la vie de Mussolini. La doctrine
secrète. C’est un secret d’État qui permet de planifier les fasciste (doc. 2) et son implication dans la vie quotidienne
arrestations des ennemis réels ou supposés de la société italienne sont présentées, notamment son implication
communiste imaginée par Staline. La Grande Terreur économique en lien avec la crise de 1929 étudiée dans
stalinienne est fondée sur l’exclusion et sur la croyance le chapitre 1 (doc. 3). La page de droite porte davantage
que la politique active et violente guidée par le chef peut sur l’embrigadement (doc. 4), la dimension nationale du
changer la société. Les corps des victimes doivent être fascisme (doc. 5) et la propagande militariste (doc. 6).
camouflés pour réduire la résistance populaire. Certains
historiens pensent que « la terreur serait un moyen pour Réponses aux questions p. 43
le stalinisme », c’est-à-dire un outil pour Staline pour éli-
1. L’union nationale est fondamentale pour les fascistes
miner des opposants et se maintenir au pouvoir. C’est la
car ceux-ci pensent que la nation italienne, guidée par
Grande Terreur de 1937-1938 qui donne durablement à
Mussolini, est supérieure aux autres nations. Les fascistes
Histoire Tle © Hatier, 2020.

Staline des moyens répressifs jamais atteints jusqu’alors


sont donc guidés par le nationalisme et la volonté de
en Russie-URSS.
créer « les Italiens nouveaux » sans clivages de classes
La violence stalinienne est arbitraire. Elle est destinée mais à partir d’un « regroupement des Italiens » (doc. 5).
à éliminer tous les adversaires réels ou supposés. La Les fascistes se perçoivent «  au service de la nation  »
Grande Terreur donne lieu à des arrestations planifiées (doc. 5). En cela, le fascisme s’inscrit dans la continuité
ou plus pragmatiques, comme le souligne le document 2 de l’union nationale de la Première Guerre mondiale.

2•5 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


2. L’État fasciste est totalitaire comme l’explique Musso- Sa devise est « croire, obéir, combattre », son idéologie
lini : « Pour le fasciste, tout est dans l’État… En ce sens, le est profondément militariste et belliciste (« le fascisme
fascisme est totalitaire » (doc. 2). C’est à l’État de guider repousse le pacifisme. Seule la guerre porte au maximum
totalement la politique, l’économie, la société dans le de tension toutes les énergies humaines et imprime un
pays. Ainsi Mussolini lance des « batailles économiques » sceau de noblesse aux peuples qui l’affrontent » (doc. 2).
pour répondre à la crise de 1929 (assainissement de Ainsi le fascisme s’oppose aux démocraties occidentales
marais, mise en valeur agricole notamment céréalière, telles que la France ou le Royaume-Uni (imprégnées de
urbanisation, chantiers ferroviaires et autoroutiers…). pacifisme) mais aussi à l’URSS communiste marquée par
la lutte des classes.
3. Le fascisme s’oppose à la démocratie (puisque pour
les fascistes la majorité ne possède ni la raison ni la
légitimité à gouverner, contrairement à une minorité
pp. 44-45 Étude
agissante), au socialisme (dont l’idéologie repose sur la
L’arrivée d’Hitler au pouvoir
lutte des classes, surtout dans sa forme radicale com-
Cette double-page permet de comprendre comment
muniste). Le fascisme s’oppose donc aux démocraties
les nazis obtiennent tous les pouvoirs en Allemagne. La
occidentales telles que la France ou le Royaume-Uni,
chronologie et la biographie d’Hitler (doc. 1) explicitent
ainsi qu’à l’URSS.
l’accession au pouvoir du dictateur. Son idéologie raciste,
4. Le régime fasciste tente d’embrigader les Italiens dès eugéniste, antisémite et militariste est présentée dans le
le plus jeune âge : groupement des Balillas de 8 à 14 ans, document 2. La violence du NSDAP (doc. 3) ainsi que le
poids du Parti national fasciste, affiches de propagande, rapport entre la crise économique et les succès électo-
culte du chef, surveillance et répression. raux nazis (doc. 4) font le lien avec la nomination d’Hitler
à la chancellerie (doc. 5) et l’établissement rapide de la
5. Le régime fasciste est fondamentalement agressif. dictature (doc. 6).
Sa devise est « croire, obéir, combattre », son idéologie
est profondément militariste et belliciste (« le fascisme Réponses aux questions p. 45
repousse le pacifisme. Seule la guerre porte au maximum
de tension toutes les énergies humaines et imprime un 1. Hitler s’engage en politique après la Première Guerre
sceau de noblesse aux peuples qui l’affrontent », doc. 2). mondiale parce que, ancien soldat sur le front, il est indi-
À l’intérieur du pays, la police politique OVRA (Organi- gné par l’armistice et le traité de Versailles (mythe du
sation de vigilance et de répression de l’antifascisme) « coup de poignard dans le dos »).
mène la répression.
2. Les nazis souhaitent lutter contre tous ceux qui ne
Synthèse correspondent pas à leurs critères raciaux aryens. Ils
s’attaquent particulièrement aux Juifs et aux marxistes
Le régime totalitaire italien est une dictature dirigée par
parce qu’ils représentent pour eux le métissage, l’inter-
Benito Mussolini. Il devient président du Conseil italien
nationalisme et « la destruction raciale de l’Allemagne »
en 1922 et proclame les « lois fascistissimes » en 1925-
à l’origine de la défaite de 1918. Hitler développe une
1926 qui instaurent un État totalitaire de droite. C’est
pensée raciste  : il «  ne croit nullement à l’égalité des
à l’État dirigé par Mussolini de guider totalement la
races  » (doc. 2). Les Aryens auraient créé la civilisation
politique, l’économie, la société dans le pays. « Pour le
mais les populations jugées inférieures souhaiteraient la
fasciste, tout est dans l’État… En ce sens, le fascisme est
détruire. C’est pourquoi les nazis refusent le métissage et
totalitaire » (doc. 2) selon Mussolini. Une autre formule
souhaitent l’acquisition d’un espace vital permettant au
plus ancienne de Mussolini confirme ce texte  : «  Tout
peuple allemand d’assurer ses moyens d’existence. Les
pour l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État  » (dis-
historiens estiment que le nazisme est un mouvement
cours de 1927).
« biopolitique », c’est-à-dire défenseur d’une vision bio-
Son idéologie valorise la nation italienne. L’union natio- logique du citoyen et de la nation.
nale est fondamentale car Mussolini pense que la nation
italienne est supérieure aux autres nations. Les fascistes 3. Plus les chiffres du chômage augmentent –  en lien
sont donc guidés par le nationalisme et la volonté de avec la crise de 1929 – plus les résultats électoraux nazis
créer « les Italiens nouveaux » sans clivages de classes s’accroissent, passant de 2,6 % en 1928 à 37,7 % en 1932
mais à partir d’un « regroupement des Italiens » (doc. 5). car les partis républicains au pouvoir (SPD, parti démo-
Ils se perçoivent « au service de la nation » (doc. 5). En crate PPD, le centre catholique du Zentrum et le parti
cela, le fascisme s’inscrit dans la continuité de l’union populiste du DVP) ne réussissent pas à résoudre le chô-
Histoire Tle © Hatier, 2020.

nationale de la Première Guerre mondiale. mage et la crise économique. Au contraire, le NSDAP


promet un programme de lutte contre le chômage et la
Le régime fasciste tente d’embrigader les Italiens dès le crise économique.
plus jeune âge : groupement des Balillas de 8 à 14 ans,
poids du Parti national fasciste, affiches de propa- 4. Les nazis accèdent au pouvoir légalement par
gande, culte du chef, surveillance et répression menée le biais des élections législatives. À partir de 1932,
par l’OVRA. Ce régime est fondamentalement agressif. le NSDAP est le premier parti au parlement. Le pré-

2•6 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


sident de la République Hindenburg nomme alors psychologique. Les SA commettent de nombreux actes
Hitler chancelier, c’est-à-dire chef du gouvernement d’intimidation et de violence à l’encontre des adversaires
allemand le 30 janvier 1933. Pour autant, la violence politiques dans les rues allemandes. Les adversaires
physique, verbale et psychologique des nazis est politiques sont éliminés dans des camps de concentra-
intense dans ces années de conquête du pouvoir. Les tion dès mars 1933. Hitler fait passer des ordonnances et
SA commettent de nombreux actes d’intimidation et des lois antidémocratiques : le 28 février 1933 les liber-
de violence à l’encontre des adversaires politiques tés individuelles sont limitées dans le pays, le 24 mars
dans les rues allemandes. les lois du Reich peuvent déroger à la Constitution, le
14 juillet 1933 le NSDAP devient le parti unique et, à la
5. Hitler transforme la république de Weimar en dicta- mort du président Hindenburg, Hitler est seul au pouvoir
ture en faisant passer des ordonnances et des lois  : le et se proclame Reichsführer.
28 février 1933 les libertés individuelles sont limitées en
Allemagne, le 24 mars les lois du Reich peuvent déroger
pp. 46-47 Étude
à la Constitution, le 14 juillet le NSDAP devient le parti
unique et, à la mort du président Hindenburg, Hitler est Le régime national-socialiste
seul au pouvoir et se proclame Reichsführer.
L’étude du régime nazi doit être approfondie ici pour
Synthèse bien comprendre la suite de l’histoire et particulièrement
le chapitre 3 sur la Seconde Guerre mondiale. Les docu-
Les nazis parviennent à contrôler rapidement tous les
ments répondent à la question  : «  En quoi le IIIe  Reich
pouvoirs en Allemagne. Jeune parti fondé en 1920 par
est-il un régime totalitaire et antisémite  ?  ». Le docu-
Adolf Hitler indigné par l’armistice et le traité de Ver-
ment 1 montre le culte de la personnalité, le militarisme
sailles, le NSDAP propose une idéologie raciste. C’est
nationaliste et la quête de l’espace vital. Des lois anti-
un mouvement «  biopolitique  », c’est-à-dire défenseur
sémites (doc. 2), l’éducation de la jeunesse (doc. 3 et 4),
d’une vision biologique du citoyen et de la nation. Les
la fanatisation des foules (doc. 5) ainsi que la violence
nazis souhaitent lutter contre tous ceux qui ne corres-
contre les adversaires (doc. 6) permettent de souligner la
pondent pas à leurs critères raciaux aryens. Ils pensent
dimension totalitaire et antisémite du régime national-
trouver les causes de la défaite de 1918 dans le métis- socialiste.
sage et la dégénérescence raciale allemande. Ils
s’attaquent particulièrement aux Juifs et aux marxistes VIDÉO Le congrès de Nuremberg
parce qu’ils représentent pour eux le mélange des
races, les apatrides, l’internationalisme et « la destruc- Questionnaire
tion raciale de l’Allemagne ». Hitler « ne croit nullement
1. Combien y a-t-il de membres du parti nazi à ce congrès
à l’égalité des races  ». Les Aryens auraient créé la de Nuremberg ?
civilisation, les populations jugées inférieures souhai- Le congrès de 1935 rassemble plus de 20 000 représen-
teraient la détruire. C’est pourquoi les nazis refusent le tants du NSDAP.
métissage et souhaitent l’acquisition d’un espace vital
permettant au peuple allemand d’assurer ses moyens 2. Quel cadeau Hitler reçoit-il ?
d’existence. Hitler reçoit une épée de Charlemagne.

Dans un contexte de crise économique et sociale 3. Pourquoi peut-on dire qu’il s’agit d’un cadeau natio-
intense, le NSDAP conquiert démocratiquement le pou- naliste ?
voir. Les partis républicains au pouvoir (SPD, PPD du Car cela fait le lien entre l’empire de Charlemagne et le
parti démocrate, le centre catholique du Zentrum et le futur empire allemand en Europe.
parti populiste du DVP) ne réussissent pas à résoudre le 4. Quels éléments montrent le fanatisme et l’embrigade-
chômage et la crise économique. De son côté, le NSDAP ment des participants à ce congrès de Nuremberg ?
promet un programme radical de lutte contre le chô- Les défilés, l’enthousiasme collectif, les chants, la
mage et la crise économique. Ainsi plus les chiffres du discipline collective montrent le fanatisme et l’embriga-
chômage augmentent –  en lien avec la crise de 1929  : dement.
600 000 chômeurs en 1928 et 6 millions en 1932 – plus
les résultats électoraux nazis s’accroissent, passant de Réponses aux questions p. 47
2,6  % en 1928 à 37,7  % en 1932. Les nazis parviennent
1. Hitler organise son culte de la personnalité grâce à
alors à instaurer une dictature en accédant légalement
la propagande. L’affiche de 1935 le montre en tenue
au pouvoir par le biais des élections législatives. À par-
militaire, portant le drapeau à la croix gammée, devant
Histoire Tle © Hatier, 2020.

tir de 1932, le NSDAP est le premier parti au parlement.


une troupe de SA fanatisés et un ciel duquel émerge
Le président de la République Hindenburg nomme alors
l’aigle allemand. Hitler représente clairement le guide
Hitler chancelier, c’est-à-dire chef du gouvernement
censé conduire l’Allemagne vers la victoire. À Nurem-
allemand, le 30 janvier 1933.
berg, près de 500 000 membres du parti nazi sont réunis
Rapidement la dictature est instaurée. Les nazis peuvent chaque année au mois de septembre pour acclamer le
s’appuyer sur une intense violence physique, verbale et Führer. Ici la scénographie très travaillée montre Hitler

2•7 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


comme le chef naturel et incontesté d’une Allemagne L’affiche de 1935 le montre en tenue militaire, portant
fanatisée. De telles mises en scène sont fréquentes en le drapeau à la croix gammée, devant une troupe de
Allemagne sous l’action du ministère de la Culture et de SA fanatisés et un ciel duquel émerge l’aigle allemand.
la Propagande créé dès mars 1933 et dirigé par Joseph Cette image annonce le triomphe futur. Hitler représente
Goebbels. Aussi la culture officielle diffusée dans le clairement le guide censé amener l’Allemagne vers la
pays est-elle nazie. victoire. À Nuremberg, près de 500 000 membres du parti
nazi sont réunis chaque année au mois de septembre
2. Le IIIe Reich cherche à embrigader la population grâce pour acclamer le Führer. La scénographie très travaillée
à un programme éducatif nazi et à des outils de sur- montre Hitler comme le chef naturel et incontesté d’une
veillance. Dans son souci de régénérer la race aryenne, Allemagne fanatisée. De telles mises en scène sont fré-
Hitler veut que la jeunesse allemande soit essentielle- quentes en Allemagne sous l’action du ministère de la
ment athlétique mais peu intellectuelle. Les Jeunesses Culture et de la Propagande créé dès mars 1933 et dirigé
hitlériennes doivent façonner les jeunes allemands selon par Joseph Goebbels. Ainsi la culture officielle diffusée
des principes militaires et sportifs. Sur le document  4 est nazie.
nous voyons des membres des Jeunesses hitlériennes
La volonté d’encadrement idéologique est totale. Le
qui chassent des «  êtres nuisibles  » répondant aux cli-
IIIe Reich cherche à embrigader la population grâce à un
chés physiques antisémites des nazis. Après 1934, il est
programme éducatif nazi et à des outils de surveillance.
très difficile pour les parents de ne pas envoyer leurs
Dans son souci de régénérer la race aryenne, Hitler veut
enfants dans cette association, sous peine de passer
que la jeunesse allemande soit essentiellement athlé-
pour des opposants au régime nazi. Au-delà des Jeu-
tique et fort peu intellectuelle. Les Jeunesses hitlériennes
nesses hitlériennes, les nazis surveillent l’éducation des
doivent façonner les Allemands selon des principes mili-
jeunes allemands dans la famille, à l’école, dans toutes
taires et sportifs. Sur le document  4 nous voyons des
les autres associations de jeunesse (par exemple la Ligue
membres des Jeunesses hitlériennes qui chassent des
des jeunes filles allemandes) et à l’armée. Le cœur du
« êtres nuisibles » répondant aux clichés physiques anti-
message est que les nazis pourront régénérer l’Alle-
sémites des nazis. Après 1934, il est très difficile pour
magne.
les parents de ne pas envoyer leurs enfants dans cette
3. Le IIIe Reich est fondamentalement militariste puisque association, sous peine de passer pour des opposants
la jeunesse doit être formée selon des cadres militaires au régime nazi. Au-delà des Jeunesses hitlériennes, les
(Jeunesses hitlériennes). Par ailleurs la SA est structu- nazis surveillent l’éducation des jeunes allemands dans
rée comme une organisation paramilitaire dotée d’un la famille, à l’école, dans toutes les autres associations
état-major, d’un uniforme, etc. Enfin Hitler se considère de jeunesse (Ligue des jeunes filles allemandes) et à
comme un chef militaire à la tête d’un peuple allemand l’armée. Le cœur du message est que les nazis pourront
invincible. régénérer l’Allemagne.
Pour élaborer «  l’Homme nouveau  », Hitler agit en
4. Les Juifs sont peu à peu exclus de la société allemande
excluant et en réprimant. Les opposants réels ou sup-
par des lois antisémites couplées à des persécutions qui
posés sont enfermés dans des camps de concentration
commencent dès 1933. Le 1er avril 1933, une campagne
(opposants politiques communistes ou sociaux-démo-
de boycott des boutiques juives est lancée par Goe-
crates, Juifs, Tsiganes, homosexuels…). Le premier camp
bbels. Le 7  avril 1933, les non-Aryens sont exclus de la
de concentration est ouvert en Bavière à Dachau dès le
fonction publique. Cette loi définit comme aryen celui
20 mars 1933. Le 21 mars un tribunal spécial est créé pour
dont les quatre grands-parents ne sont pas juifs. Mais
juger les crimes politiques et dès le 10 mai ont lieu les
les principales lois antisémites sont celles de septembre
premiers autodafés de livres déconsidérés par les nazis.
1935 : « lois de Nuremberg » (les Allemands juifs perdent
Les Juifs sont peu à peu exclus de la société allemande
notamment leur nationalité, les mariages ou les rela-
par des lois antisémites couplées à des persécutions qui
tions sexuelles entre Juifs et Aryens sont interdits) et les
commencent dès 1933. Le 1er avril 1933 une campagne
ordonnances proclamées de juillet à novembre 1938.
de boycott des boutiques juives est lancée par Goebbels.
5. Le IIIe Reich est un régime répressif puisqu’il enferme Le 7 avril 1933 les non-Aryens sont exclus de la fonction
dans des camps de concentration ses opposants réels ou publique. Cette loi définit comme aryen celui dont les
supposés. Le premier camp de concentration est ouvert quatre grands-parents ne sont pas juifs. Mais les prin-
en Bavière à Dachau dès le 20 mars 1933. Le 21 mars un cipales lois antisémites sont celles de septembre 1935
tribunal spécial est créé pour juger les crimes politiques (« lois de Nuremberg ») et les ordonnances proclamées
et dès le 10 mai ont lieu les premiers autodafés de livres de juillet à novembre 1938.
Histoire Tle © Hatier, 2020.

déconsidérés par les nazis.


pp. 48-49 Point de passage
Synthèse
Le IIIe Reich est un régime totalitaire et antisémite. Il est 1938 : la nuit de Cristal
d’abord structuré par l’admiration du Führer. Hitler orga- Ce point de passage et d’ouverture éclaire sur le fonc-
nise son culte de la personnalité grâce à la propagande. tionnement et la nature profonde du IIIe Reich. Il explique

2•8 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


comment se déroule la persécution des Juifs lors de la Réponses aux questions p. 49
nuit de Cristal du 9-10 novembre 1938. Le prétexte de
l’attentat contre Ernst vom Rath (doc. 1) est à lire avant Parcours 1
de constater la violence du pogrom (doc. 2, 3, 4, 5, 6). Une 1. La nuit de Cristal du 9-10 novembre 1938 a plusieurs
chronologie permet à l’élève de bien comprendre l’en- causes  : fondamentalement l’antisémitisme profond du
chaînement des faits. IIIe Reich et précisément l’attentat commis sur le secré-
taire à l’ambassade d’Allemagne à Paris (Ernst vom Rath)
VIDÉO La nuit de Cristal le 7 novembre 1938 par un jeune Juif polonais (Herschel
Grynszpan). Cet acte sert de prétexte au déclenchement
Questionnaire
d’un pogrom organisé par Goebbels contre les Juifs alle-
1. Que se passe-t-il le 7 novembre 1938 ? mands.
Ernst vom Rath est assassiné par le Juif polonais Her-
schel Grynszpan dont la famille habitant en Allemagne 2. Cette violence est surtout commise par les SS et les SA,
vient d’être expulsée. en civil ou en uniforme. L’idée de Hitler était d’essayer
d’entraîner la population allemande dans une émeute
2. Que se passe-t-il dans la nuit du 9 au 10 novembre populaire antisémite spontanée.
1938 ?
Un vaste pogrom se déroule en représailles contre les 3. Lors de ce pogrom, des synagogues, des boutiques, des
Juifs d’Allemagne  : synagogues, appartements, maga- grands magasins, des appartements possédés par des
sins pillés, presqu’une centaine de morts, environ Juifs sont arbitrairement incendiés ou détruits. 91 Juifs
30 000 déportés. sont tués tandis que de nombreux autres sont blessés,
emprisonnés et torturés. Un climat de terreur physique
3. Pourquoi peut-on parler d’une manipulation des nazis
et psychologique s’installe durablement en Allemagne.
à l’occasion de la nuit de Cristal ?
Hitler utilise l’assassinat de vom Rath comme un prétexte 4. À la suite de cette nuit de Cristal, plus de 30 000 Juifs
à ce pogrom et il tente de faire croire à une manifesta- innocents sont déportés dans des camps de concentra-
tion spontanée des Allemands contre les Juifs. tion. Les Juifs qui survivent à ce pogrom doivent payer
4. Quelles sont les conséquences de la nuit de Cristal une contribution inique d’un milliard de reichsmarks
pour les Juifs en Allemagne ? imposée par Hitler. De nombreux Juifs, pris de peur,
Durcissement dans l’acharnement antisémite du décident dès lors d’émigrer pour quitter cette Allemagne
IIIe Reich pour isoler et exclure les Juifs d’Allemagne. antisémite et répressive (multiplication par deux du
nombre de Juifs émigrés entre 1938 et 1939).

Synthèse

➊ Antisémitisme du IIIe Reich
et dynamique d’exclusion des ➋ Attentat à Paris ➌ Organisation du pogrom
Juifs étrangers (exclusion de contre vom Rath
par l’État nazi
plus de 16 000 Juifs polonais le 7 novembre 1938
en octobre 1938)

➏ 91 morts, ➎ Synagogues, boutiques, ➍ Organisation du pogrom


nombreux blessés, grands magasins,
par l’État nazi
prisonniers, torturés. appartements détruits

➐ Jours suivants : plus de ➑ Contribution d’1 milliard ➒ Organisation du pogrom


30 000 déportés dans des de reichmarks payée par
par l’État nazi
camps de concentration les Juifs (12 novembre 1938)
Histoire Tle © Hatier, 2020.

➓ Climat de terreur et hausse


de l’émigration juive

2•9 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


Parcours 2 Réponses aux questions p. 53
La nuit de Cristal du 9-10 novembre 1938 est un pogrom Parcours 1
organisé par l’État nazi et notamment par Hitler et
Goebbels. Il a plusieurs causes  : fondamentalement 1. Les origines de la guerre civile résident dans le refus
l’antisémitisme profond du IIIe  Reich et précisément des forces nationales catholiques menées par le général
l’attentat commis contre le secrétaire de l’ambassade Franco d’accepter la victoire politique du Front popu-
d’Allemagne à Paris (Ernst vom Rath) le 7 novembre 1938 laire espagnol (réunissant communistes, socialistes et
par un jeune Juif polonais (Herschel Grynszpan). républicains de gauche) aux élections législatives du
16  février 1936. Le coup d’État, commencé le 17 juil-
Cet acte sert de prétexte au déclenchement du pogrom
let 1936 par un groupe d’officiers menés par Franco à
dans les grandes villes allemandes. Cette violence est
partir du Maroc espagnol, naît dans un contexte com-
surtout commise par les SS et les SA habillés en civil
pliqué pour la république espagnole, instaurée en 1931.
ou en uniforme. L’objectif est de susciter une émeute
La situation économique liée à la crise de 1929 est très
populaire antisémite par le ralliement de la population
difficile. Les réformes menées par les républicains ne
allemande à cette action nazie.
permettent pas de résoudre la crise.
Ce pogrom donne lieu à un déferlement de violence
mais la majorité des Allemands n’y participe pas. Des 2. Les fascistes italiens et les nazis allemands inter-
synagogues, des boutiques, des grands magasins, des viennent en raison de leur proximité idéologique avec
appartements possédés par des Juifs sont arbitrairement Franco, mais aussi parce qu’ils souhaitent mettre en
incendiés ou détruits. 91 Juifs sont tués tandis que de place un dictateur allié dans le bassin occidental de
nombreux autres sont blessés, emprisonnés et torturés. la Méditerranée, afin de réduire l’influence franco-
Un climat de terreur physique et psychologique s’installe britannique en mer Méditerranée. Italiens et Allemands
durablement en Allemagne. interviennent dès le 25  juillet 1936 en fournissant des
armes (avions, chars, blindés, canons, munitions), des
Le bilan et les conséquences sont dramatiques pour les
hommes (75  000 Italiens, 6  000 Allemands), en lançant
Juifs. À la suite de cette nuit de Cristal, plus de 30  000
des offensives (Baléares en 1937…) et en commettant des
Juifs innocents sont déportés dans des camps de concen-
bombardements et exactions (Guernica le 26 avril 1937 :
tration. Les Juifs qui survivent à ce pogrom doivent payer
plus de 2 000 morts). L’aide militaire italo-allemande est
une contribution arbitraire d’un milliard de reichsmarks
décisive pour Franco et ses troupes.
imposée par Hitler. De nombreux Juifs, pris de peur,
décident alors d’émigrer pour quitter cette Allemagne 3. L’URSS intervient plus tardivement que les Italo-Alle-
antisémite et répressive (multiplication par deux du mands. Son éloignement géographique, les purges au
nombre de Juifs émigrés entre 1938 et 1939). sein de l’Armée rouge qui commencent dès 1936 et la
Grande Terreur lancée en 1937 ralentissent son interven-
pp. 52-53 Point de passage tion. Mais Staline organise dès le 1er octobre 1936 l’arrivée
des Brigades internationales ainsi que la livraison de
Les interventions dans la guerre civile matériel et de cadres soviétiques du 7 octobre 1936 au
espagnole (1936-1939) printemps 1938. La France et le Royaume-Uni n’inter-
Les trois totalitarismes sont issus plus ou moins directe- viennent pas par pacifisme (ils refusent de déclencher
ment de la Première Guerre mondiale. Ils s’inscrivent dans une guerre mondiale) et par méfiance envers les commu-
un culte de la violence et se transforment rapidement en nistes révolutionnaires qui se battent du côté du Frente
idéocraties (Waldemar Gurian, 1953), c’est-à-dire en des Popular. En France, le socialiste et président du Conseil
régimes cherchant à appliquer leur idéologie coûte que Léon Blum est d’abord favorable à une aide apportée à la
coûte. république espagnole, mais il doit céder face à l’opposi-
tion parlementaire de la droite, de l’extrême droite et du
La guerre d’Espagne (1936-1939) offre la possibilité aux
parti radical. De son côté, le gouvernement britannique
trois régimes totalitaires de s’engager militairement
est profondément hostile au Front populaire espagnol et
dans la défense de leurs idéologies et aux totalitarismes
particulièrement au communisme.
fasciste et nazi de préparer la Seconde Guerre mon-
diale. Cette guerre d’Espagne permet aussi de mettre en 4. Les quelque 35 000 à 40 000 combattants volontaires
parallèle la victoire des franquistes avec la faillite des des Brigades internationales ont des opinions politiques
démocraties en Occident. variées mais leur point commun est leur refus de la vic-
L’intervention des volontaires des Brigades interna- toire des franquistes. Ces combattants étrangers peuvent
Histoire Tle © Hatier, 2020.

tionales cesse en 1938, sur décision unilatérale du être socialistes, communistes, républicains modérés,
gouvernement républicain, qui tente de favoriser enfin anarchistes, membres ou non de partis politiques. Cette
l’intervention militaire de la France et du Royaume-Uni, intervention des Brigades internationales ne doit pas
méfiants à l’égard de la présence de révolutionnaires faire oublier que les combattants étrangers ont été plus
communistes dans le camp républicain espagnol. Mais nombreux et plus efficaces du côté franquiste que du
c’est un échec. côté du Frente Popular.

2•10 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


5. Le conflit est très violent : plus de 600 000 soldats et côtés : aux annonces d’atrocités commises par les adver-
civils sont tués jusqu’à la victoire finale des franquistes saires répondent des vengeances réalisées par l’autre
le 1er avril 1939. Des exactions sont commises des deux camp. Dans les territoires aux mains des républicains, les
côtés : aux annonces d’atrocités commises par les adver- premières victimes sont des prêtres, des propriétaires,
saires répondent des vengeances réalisées par l’autre des patrons, des militants de droite et d’extrême droite
camp. Dans les territoires aux mains des républicains, (exactions autour de Madrid…). Les franquistes favorisent
les premières victimes sont des prêtres, des proprié- l’extermination des syndicalistes, francs-maçons, élus et
taires, des patrons, des militants de droite et d’extrême militants de gauche (massacre à la mitrailleuse dans les
droite (exactions autour de Madrid dès l’été 1936…). Les arènes de Badajoz du 15 au 17 août 1936…). On estime
franquistes favorisent l’extermination des syndicalistes, que l’épuration commise par les républicains a fait près
francs-maçons, élus et militants de gauche (massacre de 50 000 victimes, celle des franquistes entre 130 000 et
à la mitrailleuse dans les arènes de Badajoz du 15 au 150 000 victimes.
17 août 1936…). On estime que l’épuration commise par
les républicains a fait près de 50 000 victimes, celle des Parcours 2
franquistes entre 130 000 et 150 000 victimes. La présentation orale reprend en grande partie les infor-
mations contenues dans la synthèse du parcours 1.
Synthèse
Arguments Informations tirées des documents
La guerre d’Espagne est autant une guerre civile entre
Espagnols qu’une guerre européenne. L’insurrection • Insurrection des 17-18 juillet 1936
franquiste • Italie : 75 000 hommes, 700 avions,
À la suite du coup d’État commis par Franco et une par- soutenue par 170 blindés, 1 000 canons et munitions
tie de l’armée le 17 juillet 1936 contre le gouvernement les fascistes et • Allemagne : 6 000 hommes,
républicain du Frente Popular, les fascistes italiens et les les nazis 800 avions, 120 blindés, 600 canons
nazis allemands interviennent dès le 25 juillet aux côtés et munitions
de Franco. Italiens et Allemands sont proches idéolo- • Proximité idéologique entre
giquement des rebelles et souhaitent mettre en place dictatures
• Offensives importantes : Baléares,
un allié dans le bassin occidental de la Méditerranée,
Pays basque, Andalousie, Madrid
afin de réduire l’influence franco-britannique en mer • Préparation, entraînement, test de
Méditerranée. Fascistes et nazis fournissent des armes l’armement et des tactiques en vue
(avions, chars, blindés, canons, munitions), des hommes de la future guerre mondiale
(75 000 Italiens, 6 000 Allemands), lancent des offensives
Les républicains • URSS, par proximité idéologique
(Baléares en 1937…), commettent des bombardements et leurs soutiens avec les communistes espagnols :
et exactions (Guernica le 26 avril 1937  : plus de 2  000 2 000 hommes, 670 avions,
morts). L’aide militaire italo-allemande est décisive pour 500 blindés, 1 500 canons et
Franco et ses troupes qui parviennent à déborder les armements
troupes gouvernementales espagnoles. • Brigades internationales :
communistes, socialistes, républicains
L’aide étrangère aux républicains est moindre. L’URSS modérés, sans parti… mais opposés
organise dès le 1er  octobre 1936 l’arrivée des Brigades aux franquistes, fascistes et nazis. Près
internationales et la livraison de matériel et de cadres de 40 000 volontaires à l’armement
soviétiques du 7 octobre 1936 au printemps 1938. Les insuffisant
35  000 à 40  000 combattants volontaires des Brigades • Rôle important pour défendre
Madrid ou Barcelone.
internationales ont des opinions politiques variées
mais leur point commun est leur refus de la victoire des La violence • Exactions des deux côtés :
franquistes. Ces combattants étrangers peuvent être de la guerre bombardements civils et mises à mort
socialistes, communistes, républicains modérés, anar- et la victoire arbitraires
franquiste finale • Avril 1937 : Guernica bombardée par
chistes, membres ou non de partis politiques. La France
l’aviation allemande et italienne
et le Royaume-Uni gardent leur neutralité par paci- • Fin 1937 : la moitié de l’Espagne est
fisme : ils refusent de déclencher une guerre mondiale et aux mains des franquistes
respectent le pacte de non-intervention du 8 août 1936. • 1939 : derniers bastions républicains
En France, le socialiste et président du Conseil Léon en Nouvelle-Castille et Catalogne
Blum est d’abord favorable à une aide apportée à la • 1er avril 1939 : victoire finale de Franco
république espagnole mais il doit céder face à l’opposi- • Plus de 600 000 morts soldats et
civils en tout
tion parlementaire de la droite, de l’extrême droite et du
Histoire Tle © Hatier, 2020.

parti radical. De son côté, le gouvernement britannique


est profondément hostile au Frente popular et particu- pp. 54-55 Étude
lièrement au communisme.
Le conflit est très violent  : plus de 600  000 soldats et La marche vers la guerre
civils sont tués jusqu’à la victoire finale des franquistes La dernière double-page d’étude mène à la veille de la
le 1er avril 1939. Les exactions sont commises des deux Seconde Guerre mondiale à l’aide d’une chronologie,

2•11 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


du projet militariste hitlérien (doc. 1), d’une carte de la Synthèse
politique nazie agressive (doc. 2), de la préparation du Les totalitarismes entraînent l’Europe dans la guerre
camp de l’Axe à l’affrontement armé avec leurs adver- en commettant des coups de force. Parmi les trois pays
saires (doc. 3 et 4), d’un document présentant la faillite totalitaires, le plus radical est l’Allemagne. Selon Hitler,
des démocraties et du camp de la paix à Munich en 1938 la guerre est nécessaire car tous les germanophones
(doc. 5), enfin du pacte de non-agression germano-sovié- («  85  millions d’hommes  ») doivent être réunis en un
tique du 23 août 1939.
même pays, au sein d’un «  espace vital  » «  vaste  » à
conquérir. Seule «  la violence  » pourra «  apporter une
Réponses aux questions p. 55 solution au problème allemand  » (doc. 1). Grâce à son
1. Selon Hitler, la guerre est nécessaire car tous les ger- armée moderne, le IIIe  Reich se tient prêt à agir rapi-
manophones («  85  millions d’hommes  ») doivent être dement. Après avoir remilitarisé la Rhénanie le 7 mars
réunis en un même pays, au sein d’un «  espace vital  » 1936, Hitler annexe l’Autriche le 12 mars 1938, la région
«  vaste  » à conquérir. Seule «  la violence  » pourra des Sudètes le 1er octobre 1938 (en Tchécoslovaquie), la
« apporter une solution au problème allemand ». Grâce Bohême-Moravie le 15 mars 1939 ainsi que le territoire
à son armée moderne, le IIIe  Reich se tient prêt à agir de Memel le 22 mars 1939. De son côté, Mussolini annexe
rapidement pour éviter l’obsolescence de ses armes et le l’Éthiopie le 9 mai 1936 et l’Albanie le 7 avril 1939.
renforcement militaire de ses adversaires. La référence
Les démocraties française et britannique se montrent
aux autres pays qui «  se barricadent  » renvoie direc-
faibles. Elles ne se donnent pas les moyens de stop-
tement à la ligne Maginot française (commencée en
per la marche vers la guerre mondiale. La France et le
1928-1929 et achevée en 1939) destinée à protéger la
Royaume-Uni laissent faire dans une logique d’apaise-
France de toute invasion allemande.
ment destinée à éviter tout nouveau conflit mondial. Ainsi,
2. Entre mai 1936 et le 1er septembre 1939, les coups de en septembre 1938, lors de la conférence de Munich réu-
force réalisés par Mussolini sont l’annexion de l’Éthio- nissant Hitler, Mussolini, Chamberlain (Premier ministre
pie le 9 mai 1936 et de l’Albanie le 7 avril 1939. De son britannique) et Daladier (président du Conseil français),
côté, après avoir remilitarisé la Rhénanie le 7 mars 1936, ni le Royaume-Uni ni la France ne souhaitent, par paci-
Hitler annexe l’Autriche le 12 mars 1938, la région des fisme, déclencher une guerre mondiale pour « une petite
Sudètes le 1er octobre 1938 (en Tchécoslovaquie), la nation » comme celle des Tchécoslovaques, habitant un
Bohême-Moravie le 15 mars 1939 ainsi que le territoire territoire si lointain. Il s’agit d’une démission des grandes
de Memel le 22 mars 1939. démocraties occidentales qui refusent la défense de
l’ordre mondial instauré après 1918.
3. Les démocraties occidentales laissent faire dans une
logique d’apaisement destinée à éviter tout nouveau Ainsi à la veille de la guerre, les alliances militaires sont
conflit mondial. Ainsi, en septembre 1938, lors de la confé- prêtes en cas de conflit mondial. L’Allemagne et l’Ita-
rence de Munich réunissant Hitler, Mussolini, Chamberlain lie sont réunies au sein de l’axe Rome-Berlin. Le Japon,
(Premier ministre britannique) et Daladier (président du l’Allemagne, l’Italie, la Hongrie et l’Espagne font partie
Conseil français), ni le Royaume-Uni ni la France ne sou- du pacte anti-Komintern destiné à empêcher l’expan-
haitent, par pacifisme, déclencher une guerre mondiale sion du communisme et de l’URSS. Enfin l’Allemagne et
pour «  une petite nation  » comme celle des Tchécoslo- l’URSS sont alliées par le pacte germano-soviétique de
vaques, habitant un territoire si lointain. Il s’agit d’une non-agression du 23 août 1939. De leur côté, la France
démission des grandes démocraties occidentales qui et le Royaume-Uni font partie depuis mars 1939 d’une
refusent la défense de l’ordre mondial instauré après 1918. alliance garantissant l’indépendance et le soutien de la
Pologne en cas d’agression militaire.
4. En 1939, des alliances sont prêtes en cas de conflit mon-
dial. L’Allemagne et l’Italie sont alliées au sein de l’axe
pp. 58-60 Exercices BAC
Rome-Berlin. Le Japon, l’Allemagne, l’Italie, la Hongrie
et l’Espagne font partie du pacte anti-Komintern destiné
à empêcher l’expansion du communisme et de l’URSS. Analyse de document p. 58
Enfin l’Allemagne et l’URSS sont alliées par le pacte ger- Introduction
mano-soviétique de non-agression du 23 août 1939. De
Ce document est un texte rédigé en 1938 par le prêtre
leur côté, la France et le Royaume-Uni font partie depuis
catholique et professeur de philosophie italien, Luigi
mars 1939 d’une alliance garantissant l’indépendance et
Sturzo (1871-1959). C’est un observateur clé du totalita-
le soutien de la Pologne en cas d’agression militaire.
risme puisqu’il est le premier à parler d’une « conception
Histoire Tle © Hatier, 2020.

5. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne totalitaire de l’État  » en 1922, dans ce pays touché de
nazie vise d’autres cibles : la Pologne et Dantzig. Par ail- plein fouet par la crise économique, sociale et politique
leurs Hitler, dans son livre Mein Kampf (1925), énonce de l’entre-deux-guerres. Adversaire déclaré du président
clairement la nécessité de soumettre militairement la du Conseil Mussolini, Sturzo est contraint à l’exil en 1924
France et le Royaume-Uni pour permettre au peuple car sa vie est menacée. Mais il poursuit sa réflexion et
aryen d’obtenir durablement son espace vital. met en parallèle les trois totalitarismes soviétique, fas-

2•12 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


ciste et nazi, dans cet article de 1938 intitulé « Politique En Allemagne, les boucs émissaires sont surtout les Juifs,
et morale  » et tiré de la revue française Cahiers de la persécutés au nom de la défense de l’aryanisme. Les
nouvelle journée, afin de mettre en évidence leurs points magasins juifs sont boycottés dès avril 1933, les lois de
communs et leurs différences. Nuremberg de 1935 les privent de la nationalité alle-
Comment ce fin observateur de la vie politique de l’entre- mande et leur interdisent tout mariage avec des citoyens
deux-guerres analyse-t-il les trois régimes totalitaires ? allemands. En 1938 ils sont exclus de nombreux emplois
Il explique que ces régimes sont contrôlés par un pou- et subissent le pogrom de la nuit de Cristal (91  morts,
voir central absolu et un parti unique qui imposent une plus de 30 000 déportés dans des camps de concentra-
violence extrême afin d’embrigader et de soumettre tion, 267 synagogues détruites…).
totalement la population.
En URSS, toute opposition envers l’État, le PCUS ou Sta-
Partie I. line est passible d’une répression. Au nom de la lutte des
Un régime totalitaire est contrôlé par un pouvoir central classes et de la volonté de faire disparaître les «  bour-
absolu et un parti unique. À la suite de la révolution bol- geois capitalistes malfaisants  », près d’1,8  million de
chevique de 1917 puis de la prise du pouvoir par le Vojd koulaks sont déportés dans les camps du Goulag dès
Staline en 1927, de la marche sur Rome du Duce Musso- 1929 lorsque la collectivisation est imposée. Le NKVD
lini en 1922 puis des lois fascistissimes de 1925-1926 et fait régner la terreur, pourchassant les adversaires
de la nomination du Führer Hitler à la chancellerie en réels ou supposés. Lors de la Grande Terreur, environ
1933, un parti unique est imposé dans chaque pays : le 750 000 personnes sont tuées en 16 mois (1937-1938).
PCUS en URSS, le PNF en Italie, le NSDAP en Allemagne. Finalement, dans chacun de ces régimes totalitaires, des
« L’accession au pouvoir » diffère mais, dans les trois cas, groupes sociaux « de citoyens sans droits » sont combat-
un pouvoir central absolu et un parti unique sont impo- tus.
sés. L’économie est contrôlée par l’État afin de répondre
aux besoins idéologiques. Dans les trois cas, l’écono- Partie III.
mie libérale capitaliste est fortement critiquée dans le La société doit être embrigadée. L’objectif des trois dic-
contexte de crise économique d’entre-deux-guerres et tateurs est de soumettre totalement leur pays. La seule
les trois pays se lancent dans une politique économique liberté qui existerait encore dans le IIIe Reich serait celle
protectionniste voire autarcique. Mais l’économie est de rêver selon le dirigeant nazi Robert Ley  : «  La seule
davantage militarisée en Allemagne et en Italie, forte- personne en Allemagne qui a encore une vie privée est
ment collectivisée en URSS. celle qui dort. »
Trois « pénibles expériences » se développent. La chasse La jeunesse est embrigadée et le contenu de l’enseigne-
aux boucs émissaires fait rage, qu’il s’agisse des purges ment est contrôlé par l’État. Les Jeunesses hitlériennes,
staliniennes de 1936 ou de l’action du NKVD en URSS, de les Balillas et les Komsomols sont destinés à former
la lutte des Chemises noires fascistes contre les oppo- de futurs serviteurs de l’ordre totalitaire et national.
sants en Italie, des violences de rue des SA et des SS en Ces garçons et ces filles doivent devenir des adultes
Allemagne. Partout la «  faction armée  » impose une au service des ambitions dominatrices  : «  ambitions de
autorité de fer au service de la dictature dans la « Russie revanche  » vis-à-vis de la France et du Royaume-Uni
bolcheviste », dans « l’Italie fasciste », dans « l’Allemagne pour Hitler et Mussolini, conquête de l’«  espace vital  »
nazie » (« un peuple, un État, un chef »). pour les Allemands, restauration du prestige national
Ces dictatures ont une volonté expansionniste mais leur italien, révolution communiste mondiale en URSS.
cadre politique premier est national  : ce sont bien des Tous subissent la propagande totalitaire marquée par
«  États totalitaires nationaux  ». D’ailleurs, pour Staline le culte de la personnalité  : chaque dictateur est mon-
la révolution prolétarienne mondiale doit partir d’URSS, tré comme le sauveur de son peuple, de sa race ou de
pour Mussolini la supériorité de la nation italienne ne sa classe. Tout citoyen est destiné à devenir un croyant,
fait pas de doute, et pour Hitler les Aryens, et parmi eux fidèle à sa nouvelle religion civile totalitaire  : «  Croire,
en priorité les Allemands, représentent une race supé- obéir, combattre » est la devise du fascisme italien ; sous
rieure qu’il s’agit de mener vers la victoire. le IIIe Reich, le mot « fanatique » passe d’un sens négatif
Partie II. à un sens positif. Et chaque totalitarisme a ses martyrs et
ses apôtres : de Stakhanov pour les ouvriers soviétiques
La violence est au cœur des trois régimes totalitaires.
aux 16 compagnons d’Hitler morts en connaissant selon
L’ennemi supposé ou réel est à la fois à l’intérieur et à
lui un martyre en 1923 lors de l’échec de son putsch
l’extérieur de chaque pays.
de la Brasserie (Mein Kampf leur est dédié et chaque
Histoire Tle © Hatier, 2020.

Le militarisme domine en Allemagne ou en Italie, où la 9 novembre a lieu une fête en l’honneur de ce martyre).
devise du Parti national fasciste est « Croire, obéir, com-
battre  ». En s’appuyant sur un État policier, Mussolini Conclusion
élimine ses adversaires, notamment le catholique Sturzo En somme, Sturzo nous montre bien que les trois régimes
qui est contraint à l’exil pour échapper à la violence, et totalitaires ont des points communs, à savoir la défense
les militants socialistes sont pourchassés. d’un pouvoir central absolu symbolisé par un dictateur,

2•13 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


un parti unique, une violence extrême, un embrigade- succès et de durée, comme le montrent par exemple
ment de la population et la volonté de la soumettre la résistance des koulaks à la collectivisation dans le
totalement à l’autorité du chef. Pour autant, Sturzo est sud de l’URSS ou les difficultés de Mussolini à contrôler
amené à accentuer certains points et il ne perçoit pas totalement la population au sein d’une Italie où l’Église
certains éléments mis en évidence depuis par les histo- catholique et la tradition régionaliste pèsent d’un poids
riens. Par exemple, malgré la volonté dominatrice totale important.
exprimée par Staline, Mussolini et Hitler, ceux-ci n’ont
«  L’accomplissement totalitaire n’existe peut-être que
jamais pu construire une adhésion totale de la popu-
dans le monde imaginé par Orwell » dans le roman 1984
lation à leur idéologie. Les degrés d’adhésion varient
selon l’historien Bernard Bruneteau (Les totalitarismes,
en fonction du temps, des acteurs et des lieux. Partout
2014).
les habitants peuvent s’opposer avec plus ou moins de
pouce-blanc.pdf 1 12/04/2019 16:38

Coup de pouce !
Voici un tableau qui permet de puiser les connaissances tirées du texte et de les relier à des connaissances person-
nelles. Vous voyez qu’à l’intérieur des trois grandes parties, il est impossible car illogique de suivre la progression du
texte d’une manière totalement linéaire.

Parties Connaissances tirées du texte Connaissances personnelles que l’on peut mobiliser
I. Un pouvoir central Circonstances d’accession au pouvoir Révolution de 1917, marche sur Rome de 1922, nomination
absolu et un parti de 1917 à 1933 d’Hitler par Hindenburg en 1933
unique
Trois pénibles expériences Souffrances, violence des SA ou des Chemises noires
fascistes dans la rue
Russie bolchevique, Italie fasciste, Régimes dirigés par les dictateurs Staline, Mussolini, Hitler
Allemagne nazie
États totalitaires nationaux Régimes développés dans le cadre de chaque pays : par
exemple le totalitarisme fasciste n’est pas exportable car
fondé sur la supériorité historique de la nation italienne
États centralisés « Ein Reich, Ein volk, Ein Führer », Duce, Vojd
Économie fermée Tendance protectionniste dans le cadre de la crise
des années 1930
Pouvoir central absolu Terreur stalinienne, capacité d’Hitler à prendre
des décisions anticonstitutionnelles dès 1933
Parti unique PNF, PCUS, NSDAP
Suppression des libertés 1933 en Allemagne...
Faction armée NKVD, SA/SS, Chemises noires
Suppression/exclusion des Purges staliniennes, nuit des Longs Couteaux, Mussolini
adversaires contre les socialistes, nécessité de trouver un ennemi
intérieur/bouc émissaire
II. Une violence Militarisme IIIe Reich, « Croire, obéir, combattre », etc.
extrême
Suppression des classes en URSS Marxisme-léninisme contre les koulaks et les bourgeois
Refus des partis d’opposition en Italie Contre le parti socialiste
Refus des races différentes en Pour les Aryens
Allemagne
Criminalisation des mariages avec Lois de Nuremberg
des Juifs
Création de citoyens sans droits Apatrides, dénaturalisés, Juifs
Violence et tribunaux d’exception Grande Terreur, arbitraire de la nuit de Cristal…
Histoire Tle © Hatier, 2020.

Camps, internement, prisons, Goulag, camps de concentration dès 1933…


déportations, travaux forcés
Exilés, bannis Sturzo…
Meurtres et disparitions Bilan de la nuit de Cristal…

2•14 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


III. L’embrigadement Monopole de l’enseignement Italie : éducation nationaliste, exclusion des enseignants
et la soumission juifs en Allemagne, pensée unique
totale de la
Jeunesse militarisée Jeunesses hitlériennes, Balillas, Komsomols
population
Ambitions de revanche Italie, Allemagne après 1918
Ambitions de domination et de luttes « Espace vital », « révolution communiste mondiale »,
extérieures prolongement de l’Empire romain en Italie
Ambitions de luttes intérieures, Élimination des koulaks et résistance à la Grande Terreur,
guerres civiles contre les Juifs en Allemagne, contre les socialistes en
Italie
Soumission complète Seul le rêve est libre dans le IIIe Reich : « La seule personne
en Allemagne qui a encore une vie privée est celle qui
dort », selon le dirigeant nazi Robert Ley…
Trois religions Nuremberg, culte de la personnalité, fanatisme

Analyse de documents p. 59 Cette affiche, validée par le ministère de l’Information et


de la Propagande du Reich, dirigé par Joseph Goebbels,
Introduction montre une caricature dépréciative d’un Juif éternel.
Le premier document est une affiche de propagande Le terme est noté en rouge en bas du document  : Der
antisémite réalisée en novembre 1937 pour l’exposition ewige Jude. Le Juif est vêtu d’un long manteau noir, pro-
nazie tenue à Munich « Le Juif éternel » (Der ewige Jude), pice à la dissimulation, porté sur une chemise sale et en
titre d’origine du document intitulé ici «  La propagande mauvais état, signe de sa bassesse sociale. Son nez est
antisémite ». Le second document est un témoignage de crochu et ses yeux à demi fermés soulignent sa fourberie.
Karl E. Schwabe, un commerçant allemand confronté à la Si sa longue barbe mal taillée renvoie à une habitude de
violence de la nuit de Cristal des 9-10 novembre 1938. Ce certains rabbins imprégnés de tradition religieuse kab-
récit est tiré du livre d’Uta Gerhardt et de Thomas Karlauf, balistique et biblique (« Tu ne supprimeras pas le bord
Jamais nous ne retournerons dans ce pays, publié en 2010. de ta barbe », Lévitique, 19, 27), les nazis utilisent cette
Ces deux sources renvoient au contexte de l’Allemagne pratique culturelle pour rabaisser le Juif, identifié à un
nazie de l’entre-deux-guerres : un régime totalitaire anti- mendiant incapable de soigner son apparence. Nous
sémite, dirigé par Adolf Hitler depuis le 30 janvier 1933. retrouvons ici les clichés sur le Juif errant, apatride et
L’idéologie d’État cherche à soumettre totalement la dégénéré. Les mains du Juif apparaissent énormes, dis-
société et à exclure tous les éléments censés mettre en proportionnées et comme dangereuses. Sa main droite
danger la race aryenne. Selon la philosophe Hannah contient des pièces d’or qui renvoient à sa cupidité héri-
Arendt (Les Origines du totalitarisme, 1951), le totali- tée de Juda, apôtre ayant trahi Jésus pour 30 deniers.
tarisme doit toujours être en mouvement  : c’est «  un La partie occidentale de l’URSS (c’est-à-dire européenne)
mouvement constamment en mouvement ». Cela signi- est portée sous son bras gauche tandis que sa main tient
fie qu’il doit toujours aller plus loin dans son application fermement le manche d’un fouet. Ces deux attributs ren-
idéologique et violente afin de se maintenir au pouvoir. voient à la certitude nazie que les Juifs sont des outils de
Les Juifs servent alors de boucs émissaires au service diffusion du communisme et de sa violence à travers le
de la « révolution permanente » nazie : en 1937-1938 la monde, et prioritairement à destination de l’Europe. Cette
répression antisémite s’accentue et le totalitarisme nazi caricature est bien en accord avec la pensée d’Hitler qui
s’affirme à l’extérieur (conférence de Munich de sep- explique dans Mein Kampf que « la presse des boursiers
tembre 1938) et à l’intérieur (nuit de Cristal). «  Il n’y a juifs et des marxistes a attisé systématiquement la haine
que la violence qui puisse apporter une solution au pro- contre l’Allemagne ». Ces clichés antisémites sont desti-
blème allemand » déclare Hitler le 5 novembre 1937 lors nés à embrigader le public afin d’accentuer l’exclusion
d’une réunion à la chancellerie (Les Archives secrètes de sociale et nationale des Juifs en Allemagne.
la Wilhelmstrasse, T. I, 1950).
Partie II.
Comment dès lors la politique antisémite du régime nazi
est-elle appliquée en Allemagne en 1937-1938 ? C’est ce qui se produit particulièrement lors de la nuit de
Cristal relatée dans le document 2. Ce témoignage par-
Nous verrons qu’elle diffuse une idéologie antisémite, ticulièrement éloquent aborde la question des origines,
Histoire Tle © Hatier, 2020.

puis qu’elle donne lieu à de véritables pogroms tels que du déroulement et des conséquences du pogrom.
la nuit de Cristal, enfin que les Juifs servent de boucs
émissaires. Il est intéressant de noter d’abord que le fils du Juif alle-
mand Karl E. Schwabe, vivant à Francfort, est bouleversé
Partie I. par l’action décidée par Hitler les 27 et 28 octobre 1938
Le régime totalitaire nazi diffuse une idéologie antisé- d’expulser vers la Pologne environ 16  000  Juifs polo-
mite comme le souligne le document 1. nais d’Allemagne. Ici l’auteur s’égare dans ses souvenirs

2•15 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


puisqu’il croit se rappeler que cela a eu lieu au début du de la cupidité est un moyen pour les nazis d’identifier le
mois d’octobre. Dans tous les cas, cela s’inscrit dans la Juif au capitaliste étranger et rapace. Finalement appa-
politique antisémite hitlérienne destinée à purger l’Alle- raît clairement le double cliché nazi du Juif errant et
magne de la « race inférieure » juive. Cela montre aussi oriental, dont le destin est d’affaiblir l’Allemagne tant à
le climat d’inquiétude dans lequel vivent les Juifs en travers sa participation à un complot judéo-bolchevique
Allemagne depuis les premières persécutions de 1933. anti-allemand qu’au capitalisme mondial à l’origine de
Il est intéressant de noter que toute la population alle- la crise économique et sociale des années 1930.
mande, juive ou non, n’adhère pas à cette expulsion : « il
Dans le document 2, Schwabe écrit que les Juifs arrê-
s’était même trouvé des non-Juifs pour manifester leur
tés sont vus comme de « dangereux criminels » par les
indignation  ». Les historiens comme Saul Friedländer
fonctionnaires de la Gestapo (la « police secrète d’État »,
(L’Allemagne nazie et les Juifs, 1997) montrent que dans
abréviation de Geheime Staatspolizei, créée en 1933).
des villes où les mariages mixtes sont fréquents et où
Ceux-ci sont donc arbitrairement accusés d’être à la fois
les Juifs sont bien intégrés, la population allemande se
collectivement responsables de l’assassinat de vom Rath
désolidarise en majorité de cette violence nazie.
(comme l’indique aussi la contribution d’un milliard de
Mais l’événement déclencheur du pogrom de la nuit de reichsmarks imposée le 12 novembre à l’ensemble des
Cristal est l’attentat contre le secrétaire de l’ambassade Juifs) et eux-mêmes responsables de ce pogrom. C’est un
d’Allemagne à Paris, Ernst vom Rath, par le Juif polonais moyen machiavélique trouvé par Hitler pour poursuivre
habitant à Paris Herschel Grynszpan le 7 novembre 1938. tant le dénigrement que l’exclusion sociale des Juifs. De
Karl E. Schwabe n’en parle pas. Pourtant l’action de même, l’insulte de « bande de cochons » utilisée par les
Grynszpan est directement liée à l’expulsion de Juifs SS pour forcer les prisonniers à descendre du camion les
polonais d’Allemagne puisque les parents de Grynszpan menant à Buchenwald est une injure fréquemment utili-
font partie de ces expulsés. C’est donc par vengeance sée par les nazis pour humilier les Juifs. Le cochon étant
que le Juif polonais agit. Schwabe raconte qu’il ne perçu comme impur par les Juifs, traiter ainsi un Juif est
connaît initialement rien des exactions de la nuit de Cris- évidemment un moyen de le rabaisser, de le moquer et
tal. Il les apprend des autres Juifs arrêtés (« nous avons de l’accuser de l’impureté de l’Allemagne.
appris là que les synagogues avaient été incendiées… »).
Cela signifie que le pogrom à l’origine de la mort de Conclusion
91  personnes, de la destruction de 267  synagogues, de En somme nous voyons que la politique antisémite
nombreux grands magasins, boutiques et appartements appliquée dans le IIIe  Reich en 1937-1938 évolue vers
n’est pas généralisé à toute l’Allemagne. Schwabe n’en plus de radicalité, allant jusqu’à l’organisation d’un vaste
est informé que le lendemain, au matin du 10 novembre pogrom par Hitler et Goebbels. La défense de la race
1938. C’est alors que des policiers viennent le chercher et aryenne s’affiche de plus en plus dans ces années-là en
le déportent arbitrairement, sans aucune raison ni juge- Allemagne. Ainsi en 1937 a lieu une double exposition
ment, dans le camp de concentration de Buchenwald artistique à Munich  : l’une destinée à montrer le génie
(camp créé en 1937 en Thuringe, près de Weimar). Près de l’art aryen à l’aide notamment des statues monumen-
de 30 000 Juifs subissent alors le même sort. tales du sculpteur Arno Breker, l’autre consacrée à « l’art
Schwabe ne comprend pas bien la cause de cette vio- dégénéré  » et destinée à dénigrer les œuvres d’un art
lence subite. En réalité elle est organisée par Hitler et moderne « judéo-bolchevique ».
Goebbels qui mobilisent les SS, les SA et les Jeunesses
hitlériennes pour s’attaquer aux lieux symboliques et Question problématisée p. 60
aux Juifs qui leur tombent sous la main. Cette «  nuit
de Cristal  », comme la nomment avec euphémisme les Partie I. Des points communs
hauts dignitaires nazis, est un tournant dans la violence A. Un pouvoir unique et dictatorial
de masse exercée par les nazis à l’encontre des Juifs. Elle
Les trois totalitarismes ont comme premier point com-
est destinée à favoriser dans la population allemande
mun d’être des dictatures. Benito Mussolini accède au
une participation massive au massacre (ce qui n’a pas eu
pouvoir comme président du Conseil après la marche
lieu par refus de la majorité de la population allemande)
sur Rome de 1922. Il instaure ensuite une dictature en
et de favoriser l’émigration des Juifs puisqu’Hitler s’ins-
1925-1926 grâce aux lois fascistissimes. Joseph Staline
crit encore à cette date dans la volonté d’exclure les
prend seul la tête de l’URSS à partir de 1927, après
Juifs. Il n’a pas encore mis en place de plan d’extermi-
avoir éliminé ses concurrents au sein de l’appareil
nation en 1938 selon les historiens. Le passage suivant :
communiste (Léon Trotski est exclu du parti com-
« les événements bien plus graves qui se préparaient » ne
Histoire Tle © Hatier, 2020.

muniste en 1927). Adolf Hitler devient chancelier le


renvoient pas encore au génocide mais bien au pogrom
30 janvier 1933 sur décision du président Hindenburg,
de la nuit de Cristal.
avant d’instaurer la dictature dès le 27 février 1933 en
Partie III. suspendant les libertés individuelles.
Dans tous les cas, les Juifs jouent le rôle de boucs émis- Chaque régime totalitaire est instauré dans un
saires. Nous le voyons dans le document 1 où le cliché contexte de crise, dans une «  situation de détresse  »

2•16 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


(Pierre Milza) qui pousse à chercher dans chaque pays 7,8  millions d’Italiens sont ainsi réunis dans la Jeu-
une nouvelle voie politique : en 1917 en Russie en pro- nesse italienne du Licteur en 1939. En URSS ce sont les
fitant des troubles provoqués par la Première Guerre Komsomols qui organisent la jeunesse du Parti com-
mondiale pour les bolcheviques, en 1922 en Italie à la muniste d’Union soviétique depuis 1918.
faveur d’une crise économique et sociale qui fait suite Pour les adultes, le totalitarisme encadre le monde du
à la Première Guerre mondiale, en 1933 en Allemagne travail avec de nouvelles structures censées réconci-
en profitant des succès électoraux obtenus dans un lier ouvriers et patrons (syndicat en URSS, corporations
contexte de troubles économiques et sociaux suscités en Italie, Front allemand du travail). Les loisirs, la vie
par la crise de 1929. familiale et l’école n’échappent pas non plus à la
Ces dictateurs gouvernent grâce à un parti unique mainmise officielle. La société est contrôlée : la seule
(PCUS en URSS, PNF en Italie, NSDAP en Allemagne) et liberté censée encore exister dans le IIIe Reich serait
à une idéologie qui rejette le système démocratique et celle de rêver selon le dirigeant nazi du Front du tra-
particulièrement le parlementarisme. Leur idéologie vail Robert Ley : « La seule personne en Allemagne qui
condamne le pluralisme, le libéralisme et la tolérance. a encore une vie privée est celle qui dort ». La jeunesse
Les dictateurs se voient comme des chefs charisma- est embrigadée et le contenu de l’enseignement est
tiques qui s’affirment comme des guides infaillibles, contrôlé par l’État.
gardiens de la doctrine et capables de construire ou Enfin les régimes totalitaires reconstruisent des
de redonner sa grandeur à chaque pays. Ils flattent et structures productives dans le cadre d’une politique
galvanisent les foules lors de grandes manifestations autarcique. En URSS, l’industrialisation se fait à marche
(congrès du parti nazi à Nuremberg, défilés sur la place forcée. L’Italie et l’Allemagne relancent l’emploi avec
Rouge, anniversaire de la naissance de Rome le 21 avril une politique de grands travaux (« bataille du blé » en
associé au « jour du travail fasciste ») destinées à susci- Italie, construction d’autoroutes en Allemagne…) et de
ter et à montrer l’adhésion populaire envers un dictateur réarmement massif.
fusionnant avec son peuple. Dès lors toute concurrence
dans la représentativité populaire disparaît (14 juillet C. La répression et l’usage de la violence
1933 : le NSDAP devient le parti unique ; 2 mars 1939 : Tout adversaire est combattu, pourchassé et violenté.
suppression de la Chambre des députés en Italie). Ces régimes sont des « idéocraties » (Waldemar Gurian,
1953), c’est-à-dire des régimes cherchant à appliquer
B. Un encadrement total pour construire un «  Homme
leur idéologie coûte que coûte.
nouveau »
En URSS, toute opposition envers l’État est passible
L’objectif des trois dictateurs est de soumettre totale-
d’une répression arbitraire sous la forme de procès,
ment leur pays pour construire un « Homme nouveau ».
d’arrestation, de condamnation, de mise à mort ou
Ils le font en utilisant notamment la propagande. En
de disparition. Environ 1,8  million de koulaks sont
URSS, l’accent est mis sur le dévouement productiviste
déportés dans les camps du Goulag dès 1929 et la col-
des ouvriers. Le modèle est Stakhanov, capable, selon un
lectivisation provoque en Ukraine une grande famine
discours officiel s’arrangeant avec la réalité, d’extraire
entretenue par l’État (plus de 8 millions de morts en
tout seul 14  fois plus de charbon que le quota indivi-
1933). La police politique Guépéou, remplacée par le
duel demandé. En Allemagne, la puissance visuelle de la
NKVD en 1934, sert de fer de lance de la répression.
photographie et du cinéma est particulièrement utilisée
pour affirmer la discipline, l’ordre, la grandeur du peuple En Italie, l’OVRA (Organisation de vigilance et de
aryen guidé par le Führer (film de Leni Riefensthal, Le répression de l’antifascisme) réprime les opposants en
Triomphe de la volonté sur le congrès de Nuremberg s’appuyant notamment sur une réforme répressive du
de 1934 et sorti en 1935). En Italie, l’objectif est de faire code pénal (le communiste Antonio Gramsci meurt en
aimer la nation, la patrie et la grandeur historique ita- prison en 1935). L’État subit une épuration des fonc-
liennes. La couverture d’un cahier d’école des années tionnaires démocrates, les journaux sont censurés ou
1930 demande aux jeunes Italiens : « Aime ta patrie, étu- supprimés.
die l’histoire, parce qu’aucune au monde n’est plus belle, En Allemagne, la terreur nazie pèse sur tous les adver-
plus intéressante, plus grande que celle de notre Italie ». saires. Dès mars 1933, le camp de concentration de
Formatés par cette propagande, les modèles du véritable Dachau est ouvert pour emprisonner les opposants
communiste, du parfait aryen et de l’Italien nouveau sont politiques, initialement surtout les sociaux-démo-
censés s’affirmer dans chaque société. crates du SPD et les communistes du KPD. Dans
Partout la jeunesse est embrigadée. Hitler veut façon- chaque régime totalitaire, la violence est montrée
ner les futurs combattants du IIIe  Reich dans ses comme la solution aux problèmes, dans la continuité
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Jeunesses hitlériennes fondées en 1926 et destinées de la dynamique de « brutalisation » en œuvre depuis


aux jeunes de 15 à 18  ans. Y appartenir devient une la Première Guerre mondiale.
obligation à partir de 1936  : l’organisation regroupe Pour autant, les trois régimes totalitaires ont d’im-
alors 5,5  millions de membres dévoués au régime. portantes différences d’ordre idéologique. Les boucs
En Italie, l’Opera Nazionale Dopolavoro (OND) struc- émissaires divergent et la politique extérieure n’est
ture l’embrigadement de la population de 6 à 21 ans : pas toujours la même.

2•17 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


Partie II. Des différences pure et écrivent que « les Juifs n’appartiennent pas à
la race italienne ». Des mesures d’exclusion des Juifs
A. Idéologiques
sont alors prises par Mussolini en octobre-novembre
En URSS, le régime totalitaire de gauche célèbre les
1938 : exclusion de l’armée, de la fonction publique, de
valeurs d’égalité et d’union sociale autour du proléta-
la propriété, interdiction des mariages mixtes…). Mais
riat. Pour cela les Soviétiques essentialisent les classes
aujourd’hui les historiens pensent que Mussolini n’est
(alors que les nazis par exemple essentialisent les
pas fondamentalement antisémite  : il fait plutôt un
races). L’objectif est de purger la future société socia-
choix antisémite final dans la recherche permanente
liste des éléments nuisibles. La révolution permanente
d’un ennemi permettant d’offrir au régime de nou-
doit permettre d’abolir la domination bourgeoise et
velles batailles sous l’influence de l’allié allemand.
d’établir une société égalitaire sans classes sociales.
En URSS, les «  bourgeois  » sous toutes leurs formes
En Italie, Mussolini exalte la nation et l’État au sein
sont stigmatisés. Mais sous ce vocable se cachent tous
d’un totalitarisme de droite. Le fascisme veut créer
les adversaires réels ou supposés de Staline. Ainsi
une société unanime qui aurait réglé une fois pour
tout «  déviationniste  » est nommé bourgeois, qu’il
toutes la question des luttes sociales. Le fascisme est
s’agisse des koulaks de la campagne ou des commu-
une idéologie communautaire luttant contre l’indivi-
nistes partisans d’une autre ligne politique que celle
dualisme libéral et contre le matérialisme marxiste. Il
de Staline. Lors de la Grande Terreur de 1937-1938,
veut résoudre l’atomisation de la société moderne par
environ 1 600 000 personnes sont arrêtées et 750 000
une vision organique du peuple.
sont tuées en 16  mois dont 3 maréchaux, 8  amiraux,
La primauté de la nation est alors le fil conducteur du
14 généraux et 98 membres du Comité central du Parti
régime. L’État tout-puissant doit aussi affirmer la gran-
communiste.
deur du pays. Mussolini déclare en 1927 : « Tout pour
l’État, rien hors de l’État, rien contre l’État ». Une nou- C. Des politiques extérieures opposées durant la guerre
velle Rome est à construire avec à sa tête son nouveau d’Espagne
César  : Mussolini avec une armée de croyants que Les trois puissances totalitaires participent à la guerre
seraient les « Italiens nouveaux ». L’unité de la nation d’Espagne (1936-1939) : l’Italie et l’Allemagne du côté
derrière son chef est donc indispensable. des nationalistes de Franco, l’URSS du côté du gouver-
En Allemagne, le régime totalitaire de droite glorifie nement du Frente Popular.
la race aryenne à laquelle appartiennent les Alle- Mussolini et Hitler se reconnaissent logiquement
mands. Il attribue les échecs économiques, militaires dans la lutte de Franco contre le bolchevisme et la
et politiques récents de l’Allemagne aux mélanges démocratie. Ils jugent aussi qu’une alliance avec une
génétiques opérés entre les Allemands purs et les future dictature espagnole permettrait d’étendre leur
Juifs. Il veut alors régénérer l’Allemagne et lui offrir un influence en Méditerranée occidentale aux dépens de
espace vital en suivant une idéologie raciste, antisé- la France et du Royaume-Uni. Dès juillet 1936, ils sou-
mite, militariste et eugéniste. tiennent les franquistes en envoyant des hommes et
B. Des boucs émissaires différents du matériel (75  000 Italiens et 6  000 Allemands, des
Ainsi les Juifs subissent en priorité la fureur nazie. Les milliers d’avions, des centaines de blindés…).
magasins juifs sont boycottés dès avril 1933, les lois L’URSS soutient les républicains espagnols à l’aide du
de Nuremberg de 1935 les privent de la nationalité Komintern qui organise dès octobre 1936 le transfert
allemande et interdisent tout mariage entre Juifs et de volontaires internationaux vers les zones de com-
citoyens allemands, de nombreux emplois leur sont bat. Près de 40 000 hommes participent ainsi au conflit
interdits. au sein des Brigades internationales. Plus de 2  000
Lors du pogrom de la nuit de Cristal du 9 au hommes, 670 avions, 500 chars et 1  500 canons sont
10 novembre 1938, 267 synagogues, des centaines de fournis par l’Armée rouge aux troupes républicaines.
boutiques et d’appartements occupés par des Juifs Mais en vain puisque ce sont les franquistes et leurs
sont incendiés ou détruits par des SA et des SS aux alliés italo-allemands qui remportent la guerre le
ordres de Hitler et de Goebbels. 91 Juifs sont tués 1er avril 1939.
et plus de 30 000 sont déportés arbitrairement dans Pour autant, afin de préparer la guerre mondiale à
les camps de concentration. Face à cette violence venir, des alliances diplomatiques sont tissées entre
étatique, les Juifs qui le peuvent émigrent pour fuir les trois régimes totalitaires. L’Italie et l’Allemagne
l’Allemagne nazie (525  000 Juifs en Allemagne en s’allient logiquement au sein de l’axe Rome-Berlin du
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1933, 200 000 en 1939 – dans les frontières de l’Alle- 1er  novembre 1936 puis du pacte anti-Komintern en
magne de 1933). 1937. Mais l’URSS et l’Allemagne nouent une alliance
En Italie les Juifs ne sont pas les principaux boucs plus surprenante le 23 août 1939 afin de se donner
émissaires, ce sont les démocrates. Certes en 1938 mutuellement un répit : il s’agit du pacte de non-agres-
des universitaires fascistes publient le Manifeste de sion germano-soviétique qui prévoit le partage futur
défense de la race dans lequel ils exaltent l’italianité de la Pologne, dépecée entre l’URSS et le IIIe Reich.

2•18 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


p. 61 Sujet blanc B. La propagande
Contexte de planification, mobilisation des foules
Première partie : question problématisée rurales par les représentants locaux du Parti commu-
niste au service de la propagande officielle (doc. 1) ;
Partie I. Des dictatures dangereuses (début des années
action discrète (doc. 2).
1930-1936)
A. Des idéologies violentes Partie II. Une terrible violence
– URSS : éloge de la révolution armée universaliste. A. La volonté d’éliminer les koulaks
– Allemagne et Italie  : éloge de la force militaire «  Liquidation des koulaks  », construction de boucs
(Jeunesses hitlériennes et Balillas), nationalisme belli- émissaires nécessaires à la défense de l’idéologie offi-
queux, volonté de revanche et de conquêtes militaires cielle et au maintien du PCUS et de Staline au pouvoir
(espace vital allemand, Empire romain italien). (doc. 1).
B. Des régimes totalitaires de droite militaristes B. Une violence sans limites
Réarmement allemand, restauration du service Faux témoignages et manipulation des aveux, poli-
militaire obligatoire en 1935, remilitarisation de la tique arbitraire du chiffre, victimes jeunes ou vieilles,
Rhénanie (7  mars 1936)  ; Italie  : conquête et terreur concurrence entre les différents comités de ville du
en Éthiopie. NKVD, 7-10 affaires ou 12-15 affaires par jour (doc. 2).
C. Des régimes en opposition-tension idéologique (droite
vs gauche) p. 63 Révisions
Anti-marxisme des nazis et des fascistes, axe Rome-
Berlin (1er novembre 1936), pacte anti-Komintern (Alle- Répondre et mémoriser
magne-Japon en 1936) ; antifascisme de l’URSS.
1. Qu’est-ce que la collectivisation des terres ?
La collectivisation est la mise en commun des terres agri-
Partie II. Une participation à la guerre d’Espagne (1936-
coles dans les kolkhozes d’URSS à partir de 1929.
1939)
2. Qu’est-ce qu’un koulak ?
A. Les fascistes et les nazis
Un koulak est un mot russe utilisé par les communistes
Proximité idéologique avec Franco, soutien militaire pour désigner théoriquement les paysans aisés mais
et logistique des franquistes, exactions et actions mili- en réalité tout paysan opposé à la collectivisation des
taires. terres.
B. L’URSS et les Brigades internationales 3. Combien y a-t-il de morts lors de la Grande Terreur de
Proximité idéologique avec le Frente popular, soutien 1937-1938 ?
militaire et logistique des républicains, mobilisation La «  Grande Terreur  » provoque la mort de plus de
des Brigades internationales, actions militaires et 750 000 morts de 1937 à 1938.
échec.
4. Qu’est-ce que le fascisme en Italie ?
Fascisme vient de l’italien fascismo. C’est une forme de
Partie III. Une marche vers la guerre dans le reste
totalitarisme fondée sur la dictature d’un parti unique et
de l’Europe (1936-1939)
d’un guide (le Duce) cherchant à soumettre et guider la
A. Les coups de force population à travers l’exaltation de la nation italienne.
Allemagne : Anschluss, Sudètes, conférence de Munich, 5. Que sont les Balillas ?
Bohême-Moravie, Memel ; Italie : Albanie ; échec de la Les Balillas désignent les garçons italiens âgés de 8 à
SDN. 14  ans, membres de la principale organisation de jeu-
B. Les alliances nesse fasciste : l’Opera Nazionale Balilla (ONB).
Pacte d’acier germano-italien en mai 1939, pacte 6. Que signifie « Führer » ?
anti-Komintern, pacte de non-agression URSS-Alle- Führer est un mot allemand signifiant « guide ». Il est uti-
magne et projet de partage de la Pologne, prétentions lisé pour désigner Hitler sous le IIIe Reich.
italiennes sur la Corse et Nice.
7. Où les nazis enferment-ils les individus jugés dange-
reux à partir de 1933 ?
Deuxième partie : analyse de documents À partir de 1933, les nazis enferment les individus jugés
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Partie I. Une action organisée par l’État dangereux dans des camps de concentration.

A. La planification 8. Combien de synagogues sont incendiées ou détruites


lors de la nuit de Cristal ?
«  Plan de collecte  », organisation de l’action par le
267  synagogues sont incendiées ou détruites en Alle-
parti (PCUS), le gouvernement (Staline), le NKVD et
magne lors de la nuit de Cristal du 9 au 10 novembre 1938.
leurs représentants locaux (doc. 2).

2•19 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires


9. Que sont les Brigades internationales ?
Les Brigades internationales désignent les groupes de
volontaires étrangers (communistes, socialistes, anar-
chistes) encadrés par Moscou qui viennent combattre les
nationalistes de Franco lors de la guerre d’Espagne.
10. Que se passe-t-il à la conférence de Munich en 1938 ?
Les 29 et 30  septembre 1938, les représentants de la
France (Édouard Daladier), du Royaume-Uni (Neville
Chamberlain), de l’Italie (Benito Mussolini) et de l’Al-
lemagne (Adolf Hitler) réunis à Munich acceptent
l’annexion des Sudètes par les Allemands au nom d’une
politique d’apaisement.

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2•20 CHAPITRE 2 Les régimes totalitaires

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