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Gravure de Gustave Doré (1832-1883)

Le Loup et l'Agneau

La raison du plus fort est toujours la meilleure :


Nous l'allons montrer tout à l'heure.
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère.
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens :
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts
Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès.

La Fontaine, Les Fables, Livre I, 10 (1668)

Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=WmZKb5WlR8g
Le Loup et l'Agneau

La raison du plus fort est toujours la meilleure :


Nous l'allons montrer tout à l'heure.
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.
-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?
Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté
Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère.
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens :
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
On me l'a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts
Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès.

La Fontaine, Les Fables, Livre I, 10 (1668)


La raison du plus fort est toujours la meilleure :
Nous l'allons montrer tout à l'heure. (= nous allons le montrer tout de suite)
Un Agneau se désaltérait (se désaltérait = buvait)
Dans le courant d'une onde pure.(= dans le courant d’une rivière)
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure, (à jeun = qui n’avait pas mangé)
(qui cherchait aventure » = qui chassait)
Et que la faim en ces lieux attirait.
-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? (hardi = courageux, inconscient, insolent)
(breuvage = boisson, action de boire)
Dit cet animal plein de rage : (rage = colère)
Tu seras châtié de ta témérité. (châtié = puni) (témérité = courage, insolence)
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté (Sire, Votre Majesté = manières de dire
« Monsieur » à un roi)
Ne se mette pas en colère ; (« elle » est une marque de politesse pour parler au roi à qui on ne
dit pas « vous »)
Mais plutôt qu'elle considère (considère = constate)
Que je me vas désaltérant (= que je suis en train de boire)
Dans le courant, (= dans la rivière)
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle, / Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson. (je ne puis = je ne peux pas ; le « pas » de la négation n’est pas
exprimé) (troubler = rendre trouble ou déranger)
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle, (une bête = un animal) (cruel = méchant)
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.(médire = dire du mal) (l’an passé = l’an dernier)
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère. (tter = boire le lait de sa mère)
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens : (je n’en ai point = je n’en ai pas) (les tiens
= ta famille, ton entourage)
Car vous ne m'épargnez guère, (ne …guère = ne …. pas beaucoup) (épargner = ne pas faire de
mal à qqn) (= vous me faites beaucoup de mal)
Vous, vos bergers, et vos chiens. (berger = gardien des moutons)
On me l'a dit : il faut que je me venge. (se venger = faire du mal à qqn qui nous a fait du mal)
Là-dessus, au fond des forêts / Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès. (procès = jugement au tribunal)
« Le Loup et l'Agneau » est la dixième fable du livre I de Jean de La Fontaine situé dans le
premier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1668 sous le règne du
roi Louis XIV au XVIIème siècle.
Cette fable est inspirée de celles d'Ésope et de Phèdre.
« Le Loup et l’agneau » D’Esope, fabuliste grec (VIè-VIIè siècle av JC)

Λύκος θεασάμενος ἄρνα ἀπό τινος ποταμοῦ πίνοντα, τοῦτον ἐβουλήθη μετά τινος εὐλόγου αἰτίας
καταθοινήσασθαι. Διόπερ στὰς ἀνωτέρω ᾐτιᾶτο αὐτὸν ὡς θολοῦντα τὸ ὕδωρ καὶ πιεῖν αὐτὸν μὴ ἐῶντα.
Τοῦ δὲ λέγοντος ὡς ἄκροις τοῖς χείλεσι πίνει καὶ ἄλλως οὐ δυνατὸν κατωτέρω ἑστῶτα ἐπάνω
ταράσσειν τὸ ὕδωρ, ὁ λύκος ἀποτυχὼν ταύτης τῆς αἰτίας ἔφη· "Ἀλλὰ πέρυσι τὸν πατέρα μου
ἐλοιδόρησας." Εἰπόντος δὲ ἐκείνου μηδὲ τότε γεγενῆσθαι, ὁ λύκος ἔφη πρὸς αὐτόν· "Ἐὰν σὺ
ἀπολογιῶν εὐπορῇς, ἐγώ σε οὐχ ἧττον κατέδομαι."
Ὁ λόγος δηλοῖ ὅτι οἷα ἡ πρόθεσίς ἐστιν ἀδικεῖν, παρ' αὐτοῖς οὐδὲ δικαία ἀπολογία ἰσχύει.

Un loup, voyant un agneau qui buvait à une rivière, voulut alléguer un prétexte spécieux pour
le dévorer. C’est pourquoi, bien qu’il fût lui-même en amont, il l’accusa de troubler l’eau et de
l’empêcher de boire. L’agneau répondit qu’il ne buvait que du bout des lèvres, et que
d’ailleurs, étant à l’aval, il ne pouvait troubler l’eau à l’amont. Le loup, ayant manqué son
effet, reprit : « Mais l’an passé tu as insulté mon père. — Je n’étais pas même né à cette
époque, » répondit l’agneau. Alors le loup reprit : « Quelle que soit ta facilité à te justifier, je
ne t’en mangerai pas moins. » Cette fable montre qu’auprès des gens décidés à faire le mal
la plus juste défense reste sans effet.

« Le Loup et l’agneau » de Phèdre, fabuliste latin (14 av Jc et 58 ap JC)

Ad rivum eundem lupus et agnus venerant siti conpulsi ; superior stabat lupus longeque
inferior agnus. Tunc fauce improba latro incitatus jurgii causam intulit. « Cur, inquit,
turbulentam mihi fecisti aquam bibenti ? » Laniger contra timens : « Qui possum,
quaeso, facere quod quereris, lupe ? A te decurrit ad meos haustus liquor. » Repulsus ille
veritatis viribus : « Ante hos sex menses, ait, maledixisti mihi. » Respondit agnus :
« Equidem natus non eram. » « Pater, hercle ! tuus, inquit, maledixit mihi. » Atque ita
correptum lacerat injusta nec

Un loup et un agneau étaient venus au même ruisseau, poussés par la soif. Le loup se
tenait en amont et l'agneau plus loin en aval. Alors excité par son gosier avide, le brigand
invoqua un sujet de dispute. « Pourquoi, lui dit-il, as-tu troublé mon eau en la buvant ? »
Le mouton répondit avec crainte : « Comment puis-je, loup, je te prie, faire ce dont tu te
plains, puisque le liquide descend de toi à mes gorgées ? » L'autre se sentit atteint par
la force de la vérité : « Tu as médit de moi, dit-il, il y a plus de six mois. — Mais je
n'étais pas né, répondit l'agneau. — Par Hercule ! ton père alors a médit de moi, fait-
il. » Puis, il le saisit, le déchire, et lui inflige une mort injuste. Cette fable a été écrite à
l'intention de ces hommes, qui oppriment les innocents pour des raisons inventées

Au XVIIème siècle, il y a la querelle des anciens et des modernes : il y a les anciens comme
Lafontaine qui puisent leur inspiration dans les textes anciens (surtout les textes de l’Antiquité
grecque et romaine), la création étant un travail d’imitation ; il y a aussi les modernes comme
Perrault qui puisent leur inspiration dans la culture populaire ou dans la culture de leur siècle et
qui pensent que l’on peut admirer la culture antique tout en étant capable de créer quelque chose
de différent.
LES GENRES DE L’ARGUMENTATION

Une fable est un court récit en vers ou en prose qui vise à donner de façon plaisante une leçon
de vie. Elle se caractérise souvent par un récit mettant en scène des animaux qui parlent mais
pas toujours.

Une morale est exprimée à la fin ou au début de la fable. LA morale peut être explicite si elle
est donnée par l’auteur. Elle peut être implicite, si le lecteur doit la deviner lui-même.

La fable appartient à la littérature d’idée. C’est un genre argumentatif.

La fable fait partie des apologues, puisque l’on raconte une histoire pour faire passer un
message. Parmi les apologues, il y a les fables mais il y a aussi les contes.

…………………………………………………………………………………………………..
Au XVIIème siècle, Charles Perrault a mis par écrit des contes traditionnels populaires.
Pour écouter « Le Petit chaperon rouge » de Charles Perrault :
http://clpav.fr/lecture-chaperon.htm

Il y des similitudes avec des contes du monde entier.


Par exemple, on peut lire le conte du « Petit Chaperon rouge » des frères Grimm
(Allemands) : http://expositions.bnf.fr/contes/gros/chaperon/grimm.htm
De nos jours, le petit chaperon rouge est repris dans des publicités (images):
- Pour des parfums : https://www.youtube.com/watch?v=-0XVX-AHUbg
- Contre la violence : https://lareclame.fr/55381+armes
Le Loup et l'Agneau
La raison du plus fort est toujours la meilleure : (12)
Nous l'allons montrer tout à l'heure. (8)
Un Agneau se désaltérait (8)
Dans le courant d'une onde pure. (8)
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure, (12)
Et que la faim en ces lieux attirait. (10)
-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? (12)
Dit cet animal plein de rage : (8)
Tu seras châti é de ta témérité. (12)
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté (12)
Ne se mette pas en colère ; (8)
Mais plutôt qu'elle considère (8)
Que je me vas désaltérant (8)
Dans le courant, (4)
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle, (8)
Et que par conséquent, en aucune façon, (12)
Je ne puis troubler sa boisson. (8)
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle, (12)
Et je sais que de moi tu médis l'an passé. (12)
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ? (12)
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère. (10)
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. (8)
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens : (10)
Car vous ne m'épargnez guère, (7)
Vous, vos bergers, et vos chiens. (7)
On me l'a dit : il faut que je me venge. (10)
Là-dessus, au fond des forêts (10)
Le Loup l'emporte, et puis le mange, (8)
Sans autre forme de procès. (8)
La Fontaine, Les Fables, Livre I, 10 (1668)
Le Loup et l'Agneau

La raison du plus fort est toujours la meilleure : (A)


Nous l'allons montrer tout à l'heure. (A)
Un Agneau se désaltérait (B)
Dans le courant d'une onde pure. (C)
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure, (C)
Et que la faim en ces lieux attirait. (B)
-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? (D)
Dit cet animal plein de rage : (D)
Tu seras châtié de ta témérité. (E)
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté (E)
Ne se mette pas en colère ; (F)
Mais plutôt qu'elle considère (F)
Que je me vas désaltérant (G)
Dans le courant, (G)
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle, (H)
Et que par conséquent, en aucune façon, (I)
Je ne puis troubler sa boisson. (I)
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle, (H)
Et je sais que de moi tu médis l'an passé. (J)
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ? (J)
Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère. (K)
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. (K)
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens : (L)
Car vous ne m'épargnez guère, (K)
Vous, vos bergers, et vos chiens. (L)
On me l'a dit : il faut que je me venge. (M)
Là-dessus, au fond des forêts (N)
Le Loup l'emporte, et puis le mange, (M)
Sans autre forme de procès. (N)

La Fontaine, Les Fables, Livre I, 10 (1668)


LA VERSIFICATION

A la lecture :

-On fait bien les liaisons

- On prononce certains –e en fin de mots qui ne se prononcent pas habituellement

 Les –e qui sont devant un mot commençant par une consonne


 Les –es et –ent qui sont devant des mots commençant par une consonne ou par une voyelle
(dans ce cas on fait la liaison)

-Attention, on ne prononce pas les –e, -es et –ent qui sont en fin de vers ou les –e qui sont en milieu
de vers mais devant un mot qui commence par une voyelle

La longueur des vers :

Vers de 12 syllabes = alexandrins

Vers de 10 syllabes = décasyllabes

Vers de 8 syllabes = octosyllabes

Vers de 7 syllabes = heptasyllabes

Vers de 4 syllabes

« Chati-é » = Une diérèse consiste à prononcer en deux syllabes une syllabe que l’on prononce
habituellement en une seule (c’est le cas quand on a un « i » devant une voyelle)

LA disposition des rimes :

AA : rimes suivies

ABBA : rimes embrassées

ABAB : rimes croisées


Explication linéaire de type bac (20 lignes):

Le Loup et l'Agneau

La raison du plus fort est toujours la meilleure :


Nous l'allons montrer tout à l'heure.
Un Agneau se désaltérait
Dans le courant d'une onde pure.
Un Loup survient à jeun qui cherchait aventure,
Et que la faim en ces lieux attirait.

-Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ?


Dit cet animal plein de rage :
Tu seras châtié de ta témérité.
- Sire, répond l'Agneau, que votre Majesté
5 Ne se mette pas en colère ;
Mais plutôt qu'elle considère
Que je me vas désaltérant
Dans le courant,
Plus de vingt pas au-dessous d'Elle,
10 Et que par conséquent, en aucune façon,
Je ne puis troubler sa boisson.
- Tu la troubles, reprit cette bête cruelle,
Et je sais que de moi tu médis l'an passé.
- Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né ?
15 Reprit l'Agneau, je tette encor ma mère.
- Si ce n'est toi, c'est donc ton frère.
- Je n'en ai point. - C'est donc quelqu'un des tiens :
Car vous ne m'épargnez guère,
Vous, vos bergers, et vos chiens.
20 On me l'a dit : il faut que je me venge.

Là-dessus, au fond des forêts


Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès.

La Fontaine, Les Fables, Livre I, 10 (1668)


Introduction :
Présenter l’œuvre rapidement :
« Le Loup et l'Agneau » est la dixième fable du livre I du premier recueil des Fables qui a été
édité pour la première fois en 1668. C’est une œuvre classique.
Cette fable est inspirée de celles d'Ésope et de Phèdre des fabulistes grecs et latins. Mais au
XVIIème siècle, on ne cherche pas forcément l’originalité dans le choix du sujet, l’imitation
des œuvres de l’Antiquité était en effet fréquente. Si Lafontaine n’a pas inventé l’histoire, en
revanche la fable n’est pas une simple traduction. Il y a un travail d’adaptation et de
versification. Mais si le thème n’est pas nouveau, il est intéressant de faire remarquer qu’il
prend une signification différente selon les époques. La figure du loup n’est pas sans rappeler
la figure du roi Louis XIV qui régnait quand Lafontaine a publié son œuvre.
Présenter le texte rapidement :
Dans cette fable, on voit en effet le loup, qui est le plus « fort » user de sa force pour manger
l’agneau sans avoir pour autant de raison valable. Le passage que nous allons étudier est situé
au milieu de la fable, il s’agit du dialogue entre le loup et l’agneau.
Lecture du texte (les 20 lignes à étudier).
Je vais vous lire le texte.
Projet de lecture (= problématique) :
Nous allons analyser le texte en montrant que le dialogue entre le loup et l’agneau discrédite le
loup qui mange l’agneau sans raison valable. Nous serons donc attentifs à l’argumentation et
aux rapports de force entre les personnages.
Mouvements du texte :
Dans cet extrait, on peut percevoir plusieurs mouvements qui s’enchaînent. Le loup va porter 4
accusations contre l’agneau qui saura toujours se disculper. Ceci étant, l’agneau ne répondra
que 3 fois aux accusations car pour la dernière accusation, le loup ne lui laissera pas le temps
de répondre et le mangera « sans autre forme de procès ».
Le premier mouvement du texte correspond au premier échange entre le loup et l’agneau qui se
situe des lignes 1 à 11. Le loup accuse l’agneau de troubler sa boisson. L’agneau ayant réfuté
cette accusation, le loup va essayer de trouver des accusations qui seront de plus en plus vagues
et de moins en moins crédibles.
Lignes 12 à 15, il y a le second échange entre le loup et l’agneau, l’accusation portée par le loup
se déplace dans le temps, il parle de « l’an passé ».
Lignes 16-17, on a un troisième échange, le loup cherchant un coupable dans la fratrie.
Lignes 17 à 20, le loup porte la 4ème accusation, encore plus vague « c’est donc quelqu’un des
tiens », en incriminant l’entourage de l’agneau. Mais là l’échange est tronqué puisque l’agneau
n’a pas le temps de répondre, il va être mangé.
Explication linéaire :
Je vais maintenant passer à l’explication linéaire. Dès le début, le rapport de force entre les
personnages est bien établi. Cela se voit dans la première accusation portée : l’agneau trouble
l’eau du loup, ce qui veut dire que le loup a des privilèges, il n’y a pas d’égalité de droits entre
les personnages.
Le loup commence avec une phrase interrogative qui est introduite par « qui te rend si hardi »,
ce qui est une manière de rappeler que personne n’est au-dessus de lui, qu’il est en position de
supériorité. Il se permet également de tutoyer l’agneau.
Le loup a tous les droits, dont le droit de vie et de mort sur ses sujets. Dès le début, il annonce
le verdict : « tu seras châtié », l’échange qui suivra n’étant qu’un simulacre de procès. Faisons
ici remarquer qu’à l’oral, il y a une diérèse sur le mot « châtié », ce qui permet de mettre en
évidence ce mot et l’idée que l’agneau est condamné d’avance.
Par ailleurs, le loup a un caractère belliqueux. Ligne 2 il est précisé qu’il est « plein de rage »,
et à la ligne 5 l’agneau le prie de ne pas se mettre « en colère ». Ces mots sont d’ailleurs mis en
évidence dans le texte en étant placés à la rime.
Cette colère se laisse entendre dans les paroles du loup car dans sa première réplique, comme
dans les suivantes, il utilise de nombreuses consonnes gutturales. Il y a même une allitération
en r, dans « qui te rend si hardi de troubler mon breuvage » par exemple, qui fait entendre son
grognement.
L’agneau de son côté, ne remet pas en cause la supériorité du loup. Il ne se montre en rien
insolent, comme le sous-entend le loup quand il utilise l’adjectif « hardi » et le nom
« témérité ».
Dans sa réponse, à partir de la ligne 4, il se montre au contraire très respectueux. Il utilise
l’appellatif « Sire », et « Votre Majesté », dont il faut noter la majuscule à l’écrit ; et il emploie
la troisième personne de politesse pour s’adresser au loup, « plus de vingt pas au-dessous
d’elle », dit-il.
Il lui parle avec douceur. L’impression de douceur tient au fait que dans son discours, il y a
beaucoup de consonnes liquides et de consonnes nasales. On peut même relever une allitération
en « m », « que votre majesté/ne se mette pas en colère/ mais plutôt qu’elle considère/ que je
me vas désaltérant », et cela peut nous faire penser au bêlement de l’agneau.
L’agneau répond longuement à l’accusation portée contre lui, sans perdre son calme. Il se
justifie mais sans agressivité. Il réfute l’argument du loup et explique pourquoi celui-ci n’est
pas valide. Pour cela, il utilise un lien de cause à effet « par conséquent », pour expliquer qu’il
ne peut troubler la boisson du loup. La preuve qu’il apporte est géographique ou topographique
disons set ne peut être démentie : il se trouve 20 pas « au-dessous » du loup ; la précision
spatiale est importance car s’il est au-dessous du loup, cela veut dire qu’il est plus bas que le
loup par rapport au sens du courant et que même s’il boit en même temps que le loup, il ne peut
pas salir son eau.
-Le deuxième échange, à partir de la ligne 12, montre la mauvaise foi du loup. Tout d’abord
parce qu’il ne tient pas compte de l’argumentation de l’agneau en concluant de manière
péremptoire « tu la troubles ». Il invente ensuite une deuxième accusation introduite par la
conjonction « et » : « et je sais que de moi tu médis l’an passé ». Le loup accuse l’agneau de
diffamation. Il déplace également l’accusation dans le temps, et le verbe « savoir » est ici utilisé
sans preuve à l’appui. L’agneau va une nouvelle fois réfuter l’accusation en en montrant
l’absurdité. Il utilise pour cela une interrogation rhétorique « comment l’aurais-je fait ? » et il
apporte la preuve de son innocence : « il n’était pas né car il tète encore sa mère ».
-Aux lignes 16-17, on a le troisième échange. Le loup veut vraiment incriminer l’agneau et va
jusqu’à l’accuser d’un crime commis par qqn d’autre : « si ce n’est toi c’est donc ton frère ».
L’utilisation du « donc » n’est pas du tout logique et est même abusive.
L’agneau n’a aucun mal à réfuter l’argument en utilisant simplement la négation : « je n’en ai
point ».
Ce troisième échange est encore plus court que le précédent et on voit qu’il y a une accélération
du rythme, ce qui montre que les arguments du loup ne tiennent pas et qu’il sont de plus en plus
faciles à démonter.
-Pour la dernière partie du dialogue, à partir de la ligne 17, le loup s’acharne en élargissant les
coupables du crime à l’entourage de l’agneau « qqn des tiens », c’est-à-dire les autres moutons,
désignés dans le texte par « vous », mais aussi les « bergers » et les « chiens », l’appartenance
au groupe étant soulignée par le possessif « vos bergers et vos chiens ». L’agneau serait ainsi
responsable d’un crime commis par sa communauté.
Quant au crime, on ne sait pas trop de quoi il s’agit : « vous ne m’épargnez guère » se contente
de dire le loup, qui se place en position de victime.
« on me l’a dit, il faut que je me venge », conclut-il. Le pronom indéfini « on » dans on me l’a
dit, montre encore qu’il n’y a aucune preuve apportée à l’accusation. Pourtant, le loup présente
la vengeance comme nécessaire puisqu’il dit « il faut que je me venge». Faisons remarquer pour
finir qu’ « il faut que je me venge » rime avec « mange », un peu plus loin dans le texte, et c’est
ainsi que le loup va justifier son crime, par une argumentation qui n’est pas du tout
convaincante.
Conclusion :
J’en arrive maintenant à la conclusion. Nous avons vu que dans ce dialogue, les accusations du
loup sont infondés et de mauvaise foi. Ceci étant, malgré la pertinence des arguments avancés
par l’agneau pour se défendre, il n’obtient pas gain de cause. Il est victime d’une injustice. La
dialogue permet de relativiser la morale qui est affirmée au début de la fable : « La loi du plus
fort est toujours la meilleure ». Si la loi du plus fort, c’est-à-dire celle des puissants, celle de
ceux qui ont le pouvoir, n’est pas toujours « la meilleure », car elle est injuste, elle reste quand
même celle qui l’emporte en fin de compte. Et on peut voir dans cette fable une satire de la
société et de la monarchie absolue.
La question de grammaire qui m’a été posée est la suivante :

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