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Les facteurs naturels du comportement des feux de forêts ».

Article · January 2009

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Marielle Jappiot Thomas Curt


French National Institute for Agriculture, Food, and Environment (INRAE) French National Institute for Agriculture, Food, and Environment (INRAE)
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François Pimont Jean-luc Dupuy


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FE 185 10/04/09 12:09 Page 16

dossier Incendies de forêts : connaître pour prévenir

I - DÉCLENCHEMENTS ET PROPAGATIONS DES FEUX

Les facteurs naturels du comportement


des feux de forêts M. Jappiot*,T. Curt*, F. Pimont**, J.-L. Dupuy**(1)

L’éclosion d’un feu, puis sa propagation, sont conditionnées par un certain nombre de facteurs
naturels, tels que météorologie, topographie et nature du combustible. Cet article décrit
comment ces facteurs affectent les mécanismes d’éclosion et de propagation afin de mieux
comprendre leurs effets sur le comportement du feu.

L’ inflammabilité est la faci-


lité avec laquelle un maté-
riel végétal s’enflamme
sous l’action d’un apport
échantillons avec une source de cha-
leur comme une flamme, une cigarette
ou un cube de bois incandescent, qui
miment les situations réelles. Plusieurs
de combustible disponible pour le feu.
Les principaux modes de transferts de
chaleur associés à cette propagation
sont le rayonnement(2) et la convec-
de chaleur. Sa caractérisation est es- variables sont mesurées : la proba- tion(3). Ces transferts thermiques, et
sentielle pour prédire l’éclosion d’un bilité d’ignition, le délai d’apparition donc le comportement du feu, sont in-
feu. Elle dépend à la fois du mode des flammes, leur hauteur, le pourcen- fluencés par des facteurs environne-
d’ignition (nature du brandon et éner- tage de végétal consumé, etc. Ces me- mentaux, d’origines anthropiques
gie spécifique), des caractéristiques sures peuvent être intégrées dans des (prévention, lutte) ou naturels. On
propres du végétal (humidité, compo- modèles de prédiction de l’aléa d’éclo- classe généralement les facteurs natu-
sition, taille des particules) et des fac- sion des incendies en fonction des rels en trois groupes :
teurs externes comme le vent et conditions météorologiques et des fa-   Météorologie
l’humidité atmosphérique. ciès végétaux.   Topographie
  Végétation
Éclosion du feu et Les mécanismes de la
inflammabilité de la végétation propagation Facteurs météorologiques-
Il existe plusieurs méthodes pour éva- La propagation des incendies de fo- climatiques
luer l’inflammabilité de la végétation. rêts est due aux transferts thermiques Lorsque la force du vent devient suf-
En France, les mesures d’inflammabi- entre les sources de chaleur (flamme, fisamment importante par rapport aux
lité sont réalisées en laboratoire pour braises, etc.) et le combustible imbrûlé. forces de flottabilité (poussée
des questions de sécurité, sur des Ces transferts portent le combustible d’Archimède) qui font monter les gaz
échantillons végétaux prélevés sur le imbrûlé à une température d’ignition chauds dans le panache, la flamme
terrain. En forêt, comme dans les gar- (proche de 300°C), à laquelle le com- s’incline de plus en plus dans le sens
rigues ou les maquis, ces végétaux bustible dégage des gaz inflammables du vent (fig 1a, 1b). Ceci induit une
sont principalement des combustibles (pyrolyse). Ces gaz réagissent avec augmentation des transferts convec-
« morts » formés par des litières et des l’oxygène, en produisant une grande tifs et radiatifs, ainsi qu’une augmen-
débris de matériel végétal tombé au quantité de chaleur (combustion de tation de la turbulence (fluctuations de
sol (brindilles, écorce, feuilles). flamme), qui constitue à son tour une l’écoulement), qui favorisent la diffu-
Ils peuvent aussi être constitués de vé- source d’énergie pour échauffer le sion de la chaleur et conduisent à une
gétaux vivants : espèces herbacées de combustible encore imbrûlé : le feu accélération du feu. Les expériences
bord de route ou dans l’environne- se propage. La vitesse de déplace- de terrain établissent généralement
ment proche des habitations (interfa- ment de cette zone en combustion est une dépendance quasi-linéaire entre
ces habitat-forêt). la vitesse du feu. L’énergie libérée par la vitesse du feu et celle du vent. Il
Les expérimentations d’inflammabilité le feu (appelée intensité) dépend de s’agit donc d’un facteur essentiel de la
consistent à mettre en contact les cette vitesse, mais aussi de la quantité propagation. Il intervient notamment

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dossier
Figure 1 : Mécanismes de la propagation du feu

a) Sans vent ni pente b) En présence de vent c) En présence de pente

dans le calcul du risque de Météo- bustible de surface ; le transfert de combustibilité pour traduire l’ap-
France. convectif est alors maximal. Les effets titude d’un peuplement à propager
Un second facteur naturel est l’hygro- de pente peuvent induire des aug- l’incendie. La combustibilité d’une for-
métrie de l’air. En effet, plus l’air est mentations très importantes de la vi- mation végétale dépend de plusieurs
humide, plus il est nécessaire de lui tesse de propagation du feu. À facteurs :
fournir de l’énergie pour en augmen- l’inverse, un feu se propageant selon   la teneur en eau : plus un combus-
ter la température. Elle a aussi une in- une pente descendante voit sa vitesse tible est sec, moins l’énergie néces-
fluence indirecte sur la teneur en eau réduite, par réduction de l’efficacité saire pour l’amener à la température
du matériel végétal mort. Mais la mé- des transferts convectif et radiatif. d’ignition est grande. Ainsi, il va s’en-
téorologie influe également de ma- Lorsque la topographie devient réel- flammer plus rapidement produisant
nière globale sur le comportement du lement complexe (fig. 2), elle influe des feux plus rapides et plus intenses.
feu. La stratification verticale de la tem- également sur le comportement du   la biomasse et le pouvoir calorifi-
pérature de l’atmosphère, qui condi- feu de manière indirecte, au travers de que conditionnent la quantité de com-
tionne sa stabilité, peut déterminer des la météorologie. En effet, la présence bustible brûlée ainsi que l’énergie
changements de régime de feu. Par de relief modifie largement la météo- libérée par sa combustion.
exemple, lorsque le vent est relati- rologie locale (vent et turbulence).   l’épaisseur des particules : plus un
vement faible et que le soleil échauffe combustible est fin, plus les transferts
le sol, la température de l’air s’élève Facteurs liés à la végétation et thermiques induisant son échauffe-
au niveau du sol en provoquant des combustibilité d’une formation ment vont être rapides.
instabilités convectives. Cette instabi- végétale   la composition et la structure des
lité induit des feux « dominés par leur Si la végétation joue un rôle détermi- peuplements : la hauteur, le recouvre-
panache », en général assez lents ; un nant dans l’éclosion du feu, elle condi- ment, la continuité des strates, le ni-
effondrement de la colonne de tionne aussi sa propagation. On parle veau d’élagage influencent le passage
convection en cas de condensation de
l’eau due à l’air froid peut produire
Figure 2 : Simulation du feu de Cerro Grande (Californie) sur un relief
une accélération. À l’inverse, une at- complexe avec le modèle FIRETEC (1,3 x 1,3 km).
mosphère stable (vent fort, absence
de soleil) induit des feux « dominés par
le vent », dont le comportement est
rapide et stable. L’influence des fac-
teurs météorologiques est donc dé-
terminante, mais complexe.

Facteurs liés à la topographie


Lorsqu’un feu remonte une pente, l’in-
clinaison relative entre la flamme et le
sol se réduit, induisant une augmen-
tation des transferts de chaleur (fig. 1c).
Un attachement de la flamme au sol
peut même se produire, avec une
flamme en contact direct avec le com-

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dossier Incendies de forêts : connaître pour prévenir

du feu en cime(4). lequel on puisse agir au titre de la pré- 3275 Route de Cézanne-CS 40061-
13182 Aix-en-Provence cedex 5
Ces différents facteurs peuvent être tra- vention. Ces facteurs interagissent de **INRA, URFM - Écologie des forêts
duits au travers de modèles de com- manière complexe. Leur connaissance méditerranéennes, UR 629 Domaine Saint Paul,
bustibles, correspondant chacun à un permet de définir des niveaux d’in- Site Agroparc, 84914 Avignon cedex 9
comportement du feu différent. flammabilité et de combustibilité, qui (2) Transfert de la chaleur sous forme d’ondes ou
de particules par rayonnement électromagnétique,
sont des paramètres de l’aléa feu de de la flamme et des charbons, vers le combustible
En conclusion forêt. Leur évaluation est une aide pré- solide.
Les facteurs naturels d’éclosion et de cieuse pour la gestion du risque d’in- (3) Transfert de la chaleur vers le combustible
propagation du feu sont donc d’or- cendie de forêt. I solide par transport des gaz chauds.
(4) Un feu de cime, par opposition à un feu de
dre météorologique et topographique, surface, brûle toute la végétation y compris les
mais dépendent aussi du végétal, qui (1)*Cemagref d’Aix-en-Provence arbres. Son intensité et sa sévérité sont très élevées ;
demeure le principal facteur naturel sur Unité écosystèmes méditerranéens et risques - il est très difficile à maîtriser.

Modélisation du feu : une technologie


puissante pour la simulation et la
prédiction de la propagation
Jean-Luc Dupuy, François Pimont(1)

L’observation scientifique des incendies en conditions naturelles constitue une tache ardue en
raison de la multiplicité des facteurs (voir article précédent) et de la dangerosité du phénomène.
La modélisation du feu permet de réduire le nombre d’observations nécessaires pour la
compréhension et la prédiction du comportement du feu.

T rois approches de modé-


lisation ont été dévelop-
pées : empirique, semI-phy-
sique et physique.
loppé des modèles similaires, notam-
ment au Portugal et en Espagne.
L’intérêt de ce type de modèle pro-
vient de leur proximité avec les don-
sur une représentation complète des
mécanismes de la physique n’ont été
obtenues qu’à la fin des années 1990.
Ces modèles simulent la propagation
Les modèles empiriques sont établis nées de terrain. Cependant, ils ne d’un feu en trois dimensions à l’échelle
sur la base d’un large échantillon d’ob- permettent pas de comprendre les d’un peuplement forestier ou d’un pe-
servations de feu. Ils établissent des mécanismes et sont incapables de tit paysage (20-50 ha). L’intérêt des
formules mathématiques simples per- fournir de réponses dans des configu- modèles physiques provient de la ri-
mettant de calculer la vitesse de pro- rations complexes, qu’elles soient na- chesse de leurs prédictions et de la
pagation en fonction de quelques turelles (relief, hétérogénéité complexité des scénarios qu’ils per-
paramètres représentant les facteurs spatiale, etc.) ou anthropisées (gestion mettent d’envisager. Leur description
du milieu (vitesse du vent, pente, te- sylvicole, ouvrages de prévention des spatiale détaillée du combustible per-
neur en eau et hauteur du combusti- incendies). met de prendre en compte des traite-
ble, etc.). Les modèles canadiens et Les modèles physiques sont fondés ments fins de la végétation, comme
australiens sont les plus aboutis et sont sur les principes de la physique du feu. un élagage, une éclaircie ou du dé-
largement utilisés par les forestiers. Cette discipline est très récente, puis- broussaillement (figure 1). Ils peuvent
Les européens ont récemment déve- que les premières prédictions basées aussi intégrer des scénarios de

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