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PARIS
LIBRAIRIE DE A. FRANCK
(i7 n IIE II 1 C II K Ll F. u
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:1 8 (i 8
,
HOMMAGE
MONSIEUR F. DE SAULCY
MEMBRE DE L INSTITUT, SENATEUR, ETC.
AUG. PARENT.
ce matin.
Au point du jour sont arrivés à notre campement les
'
toutes les agitations de la veille sont complètement oubliées
«
La vallée de l'ouest rejoint la vallée du lac Asphaltite 1
« après un parcours de 60 stades 2*(de ce côté le sommet
_
« de Machaerous atteint sa plus grande
élévation); celles
« du nord et du midi, tout en étant moins profondes,
«
pic s'abaissait jusqu'à 100 coudées 3, et Je bas-fond se
« terminait à la naissance de la montagne placée en face
de
«
Machoerous. »
Ce tableau correspond exactement au site dépeint dans
l'introduction de ce livre. Il faut tenir compte toutefois de
l'exagération orientale qui caractérise tous les écrits de
Josèphe. Encore ne s'agit-il que de la forteresse proprement
dite; l'historien juif fera plus tard, lorsqu'il parlera d'Hé-
rode, la distinction entre la citadelle et la ville. Cette der-
nière était dominée par le pic ; elle était bâtie à l'extrémité
de la vallée orientale, à la base de la montagne dont il est
«
bouillonnent des sources d'eau chaude, différentes les
« unes
des autres; leur saveur est douce ou amère. Un
« peu plus bas sont des sources jaillissantes d'eau froide ;
« mais le prodige le plus remarquable est une caverne
de
« peu de profondeur, dissimulée par une pierre en saillie,
«
d'où sortent comme deux mamelles rapprochées : de l'une
« s'échappe en
abondance une source glacée, de l'autre
« coule de l'eau bouillante; le mélange de ces deux, eaux
«
donne un bain exquis, remède excellent contre les ma-
« ladies, et recommandé surtout pour fortifier les
nerfs.
.«
Cet endroit renferme également des mines de soufre et
« d'alun. »
Or, en descendant le ouâd Zerka-Maïn, dans la direction
de la mer Morte, on rencontre, à peu de distance des
ruines de M'kaour, un large plateau qui coupe la pente pré-
cipitée des montagnes de Moab sur le lac Asphaltite. Le
spectacle est des plus pittoresques, des plus émouvants : de
tous côtés jaillissent, du sol et des rochers, des sources d'eau
minérale; des panaches perpétuels d'une vapeur blanche et
brûlante s'en échappent avec impétuosité; ailleurs, presque
côte à côte, bondissent des jets d'eau glacée. Bientôt des
MACHiGROUS. 33
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IXTIDX
Et Môsheh envoya (des hommes) pour explorer Et Môsheh envoya Kâlêb et Pinehàs pour explorer Et Môsheh envoya pour explorer Makouar; et ils
Ia'zêr; ils prirent les villes qui étaient sous sa dé- Makbar; et ils conquirent ses villes et exterminèrent conquirent ses villes et exterminèrentles Amoréens
pendance ; et il en chassa l'Amoréenqui s'y trouvait. les Amoréens de là. qui s'y trouvaient.
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• Tin nia'1?
Et les enfants de R'oubên et les enfants de Gâd Et les enfants de R'oubên et les enfants de Gâd ! et
;
possédaient une énorme quantité de bétail. Quand possédaientune énorme quantité de bétail ; et quand quand ils virent le pays de Makouar et le pays de
ils virent le pays de Ia'zêr et le pays de Ghil'àd," ils virent le pays de Mekouar et le pays de Ghil'àd, Ghil'àd, ils trouvèrent que c'était un lieu de pâtu-
ils trouvèrent ce lieu propre au bétail. ils trouvèrent le lieu propre pour (y construire) des rage.
étables.
1331 oa'sn nbi^xi paoem moai iwi pm .ni-itoi> nbvD ija^'in niai nna nm -npp xncmci xn^ao Dam n^i paoern pnea niai -iiapi xnu?3iD xnbVaD
•pai parn nt?Di rvmiap mai p->2? NID
Atârôth, Dîbôn, Ia'zêr, Nimrâh, Heshbôn, El'aleh, Maklêlthâ, Madbêshthâ Mekouar, » Beth-Nimrê, Maklêlthâ, Madbêshthâ, Makouar, Bêth-Nimrîn,
,
Schebàm, Nebô et Be'ôn. Beth-Hôshbanê, Ma'alath, Medâ-Shîran, le Tombeau Heschbôn, Lè'âleh, Schebâm, Nebô et Be'ôn.
de Moïse et Be'ôn.
VILLES DE GAD.
Nombres, xxxn, 34, 35, 36. — Josué, xm, 24, 25, 26, 27.
GAD.
Dîbôn.
'Atârôth.
'Aroêr. 'Aroêr.
'Atrôth-Shôphan.
Ia'zêr. Ia'zêr.
Iogbehâh.
Bêth-Nimrâh. Bêth-Nimrâh.
Bèth-Hàrân. Bèth-Hâràn.
Ràmôth-Mitspâh.
Betonîm.
Souccôth.
Tsâphôn.
Blahanaïm.
Debîr.
VILLES DE R'OUBÊN.
Nombres, xxxn, 37, 38. — Josué, xm, 46, 17, 48, 49, 20, 24.
R'OUBÊN.
Heshbôn. Heshbôn.
El'âlè.
Qiryathaïm. Qiryathaïm.
Bêth Pe'ôr.
, i
j Ashdôth de Pisgâh.
,
Ba'al Meôn. Bêth Ba'al Meôn.
Sibmàh. Sibmâh.
Dîbôn.
Bâmôth Ba'al.
Iahatsah.
Qedêmôth.
Mepha'ath.
Tsereth hash-Shahar.
Bêth Haïeshimôth.
4. Nombres, xxi, 2b, 26, 27, 28, 30, 34; jfxxn, 3, 37. — Deut., i, 4;
n, 24; ni, 2; iv, 46; xxix, 7.— Josué, ix, 10; xii, 2, b; xm, 10, 47, 24,
26, 27; xxi, 39.— Juges, xi, 1.9, 26. — I Chron., vi, 81.— Néhémie, u,
22. — Cantique, vu, 4.
— Isaïe, xv, 4; xvi, 8, 9.
—Jérémie, XLVIU, 2,
.
34, 45; XLIX, 3.
— Judith, îv, 5, 43.- I Macch., v, 26, 36.
4
50 MACHOEROUS.
4. Nombres, xxxn, 3, 37.— Isaïe, xv, 4; xvi, 9.— Jérémie, XLVIII, 34.
2. Genèse, xiv, 5.— Nombres, xxxn, 37.— Josué, xm, 19.— Jérémie,
XLVIII, 1, 23. — Ézéchiel, xxv, 9.
MACRSEROUS. 51
1. Nombres, xxi, 11, 20; xxin, 14; XXVII, 12; xxxn, 3, 38; xxxm,
47, 48. — Deut., ni, 17, 29; iv, 46, 49; xxxn, 49; xxxiv 4,6. — Josué,
xn, 3; xm, 20. — Isaïe, xv, 2. — Jérémie, XLVIII, 4, 22. — Josèphe, —
Eusèbe, Jérôme.
—
52 MACHOEROUS.
BA'AL-ME'ÔN 1, nommée également Be'ôn, Bêth-Ba'al-
Me'ôn, Bêth-Me'ôn. Du temps d'Eusèbe et de Jérôme elle
s'appelait BseX^aouç, à 9 milles de Heshbôn et près de la val-
lée du Baaras. Cette indication correspond à l'emplacement
des ruines de Main, visitées par Seetzen, Burckhardt, etc.
La source du Zerka-Maïn sort de ces ruines qui, en effet,
ne sont pas éloignées des célèbres sources d'eaux miné-
rales appelées par Josèphe Baaras.
Ba'al-Me'ôn devait donc se trouver près de Qiryathaïm
et au nord-est de M'kaour.'
SIBMAH2, dans le voisinage de Me'ôn et de Qiryathaïm.
Renommée pour ses vignes qui s'étendaient jusqu'à Ia'zêr,
à travers tout le plateau de Mêdebâ. Les textes des deux
prophètes font croire qu'elle n'était pas éloignée de Heshbôn.
Jérôme dit que Sabama était à peine à 500 pas de cette
ville (Comment, ad Is. xvi, 8).
..
D'un autre côté, on lit dans Astori : « A une journée
de Ia'zêr se trouve Sibmah, appelée aujourd'hui Shabbah. »
Or, si Ia'zêr et M'kaour sont identiques, Astori donnerait à
Shabbah la véritable situation de la Sibmah des prophètes
Isaïe et Jérémie, entre Ia'zêr et Heshbôn. Cette ville est
appelée aussi Sebâm.
ÏAHATSAH 3 devait être située entre Heshbôn et les sources
de l'Arnôn, où les Hébreux avaient leur campement. Sîhôn
sortit de Heshbôn à leur rencontre; un combat eut lieu à
VILLES DE GAD.
— I Rois, iv, 13; xxn, 3, 4, 6,12, 15,20,29.-11 Rois, vm, 28, 29; ix,
1, 4,14.-11 Chron., xvm, 2, 3, 5, 11, 14, 49, 20; xxn, 5, 6.
62 MACHOEROUS.
partie de cette tribu ; il faudrait donc trouver un endroit
susceptible d'être identifié, sur la rive sud et tout près du
Iabboq, qui formait la limite entre Gâd et la demi-tribu de
Manassé.
IA'ZÊR *. Les Nombres et Josué sont tous deux d'accord
pour attribuer cette ville à la tribu de Gâd. Elle a donné
son nom à un district très-important que Moïse, après la
conquête du royaume de Sîhôn, se hâta de subjuguer
avant d'aller à la rencontre d'Og, roi de Bâschân.
Il est indispensable d'établir une distinction nettement
définie, radicale, entre les montagnes de Guil'âd et le pays
de Ia'zêr ; les versets de la Bible sont à ce sujet très-clairs,
très-précis : « Les enfants de R'oubên et les enfants de
Gâd ayant vu le pays de Ia'zêr et de Guil'âd... »
Le seul verset 31 du chapitre xxvi des Chroniques dit :
«
Ia'zêr en Guil'âd; » mais une lecture attentive de tout le
chapitre fait bien vite reconnaître que l'auteur s'est servi de
cette expression dans le sens le plus étendu, c'est-à-dire
qu'il a compris par le terme « en Guil'âd » toute la partie
transjordanique des. possessions israélites.
Il faut ne point perdre de vue, en outre, que dans les
récits bibliques Ia'zêr est toujours nommée dans le voisinage
de Dîbôn, 'Arô'êr, 'Attarôth, quand la nomenclature se fait
du sud au nord, tandis qu'elle est citée après Heshbôn
quand la mention a lieu du nord au sud.
Or, dans les détails fournis plus haut en ce qui concerne
les villes d''Arô'êr, Attarôth, Dîbôn, il a été suffisamment
prouvé qu'elles formaient une sorte de groupe sur le haut
1. Nombres, xxi, 32; xxxn, 1, 3, 35. —Josué, xm, 25; xxi, 37. —
I Chron., v, 26; vi, 81 ; xxvi, 31. — II Samuel, xxiv, 5. — Isaïe, xvi, 8,
9. — Jérémie, XLVIII, 32. — I Macch., v, 8.
MACHiEROUS. 63
«
des chefs de l'armée; Jbab sortit, ainsi que les chefs de l'ar-
ec
mée, de devant le roi, pour dénombrer le peuple d'Israël.
« 5. Ils passèrent le Jourdain et campèrent à
'Arô'êr,
« à la droite de la ville qui est au milieu de la vallée
de
« Gâd et près de Ia'zêr.
«
les villes des Hiviens et des Cananéens et sortirent vers
« le midi de Iehouda, à Beêr-Schebâ'.
«
droite de la ville qui est au milieu de la vallée de Gâd. »
Comparons ce verset avec les passages suivants :
Deut., ii, 36 : « 'Arô'êr, qui est sur le bord du torrent
«
d'Arnôn et la ville qui est dans le torrent. »
Josué, XII, 2 : « 'Arô'êr qui est sur le bord du fleuve
«
Arnôn et le milieu du fleuve...»
Josué, xm, 9,16 : « 'Arô'êr, au bord du fleuve Arnôn,
« et la ville qui est au milieu de la vallée... » 1.
Le doute n'est vraiment pas possible en présence de
telles preuves. La vallée de Gâd est donc bien celle qui est
formée par le fleuve Arnôn, et si ce torrent a porté le nom
de Gâd, c'est que cette tribu occupait toute la contrée,
1. On ne sait encore rien sur cette ville mystérieuse; elle était proba-
blement située dans un coude de l'Arnôn, ou bien à lajonction même d'un
affluent.
S
66 MACHOEROUS.
«
Personne n'a oublié que les villes phénico-syriennes
«
de Sidon et de Tyr, d'où sont sorties les colonies fonda-
«
trices de la célèbre Carthage, brillèrent pendant des siècles
« comme maîtresses de la mer.
«
Mais pour les lieux, comme pour les personnes, les
«
privilèges de nature et de position entraînent toujours des
«
inconvénients. Si l'étendue des côtes syriennes et palesti-
«
niennes de la Méditerranée a réservé à ces régions d'être
« un
des pivots nécessaires des grandes affaires du monde,
« ces mêmes avantages en ont fait un objet de
convoitise,
« un théâtre perpétuel d'invasion, de dévastation.
Toutes
«
les puissances conquérantes les plus célèbres et les plus
« redoutables des temps anciens et des temps modernes s'y
« sont
donné des rendez-vous de batailles. »
72 MACHOEROUS.
1. C'est ainsi que le raconte Josèphe (une des sources les plus auto-
risées à consulter sur les annales des Juifs), mais Strabon n'attribue ce
changement qu'à l'initiative d'Alexandre Jannoeus, son frère et son succes-
seur. Jusque-là les chefs du peuple, quoique rois de fait, avaient préféré
le titre de grand sacrificateur, avec le preslige de la suprématie religieuse
qu'il conférait.
Le livre des Macchabées arabe, ainsi qu'un fragment du Talmud (Kid-
douschîn 66, as), considèrent tous deux Hvrean comme roi.
90 MAC1LEROUS.
Syriens. Ils appelèrent à leur aide Ptolémée Lathyros, qui,
après avoir partagé le trône d'Egypte avec sa mère Cléo-
pâtre, avait dû se réfugier dans l'île de Chypre où il régnait
seul. Ce prince s'empressa de répondre à l'appel des habi-
tants de Ptolémaïs. Alexandre Jannoeus eut alors recours à
la ruse, en traitant ouvertement avec Ptolémée et secrète-
ment avec Cléopâtre qui commençait à s'alarmer des progrès
de son fils en Syrie.
Mais ces mystérieuses intrigues furent connues du roi
cle Chypre qui, brisant toute relation avec Alexandre, se
précipita sur la Judée, en brigand pour qui rien n'est sacré.
Une bataille sanglante s'engagea près du Jourdain, à Aso-
phon; d'après le récit de Josèphe, 30,000 Juifs perdirent la
vie et les troupes de Ptolémée firent de nombreux captifs.
La Judée se trouvait exposée presque sans défense aux
flots de l'invasion; mais Cléopâtre, inquiète des succès de
son fils, s'empressa d'envoyer une armée et une flotte au
secours du roi des Juifs. Cette intervention active décida la
conquête de Ptolémaïs, puis la retraite en Cilicie du roi de
Chypre, frappé d'impuissance. Alexandre Jannoeus ayant
repris l'offensive, s'empara de Gadara, d'Amathonte près du
Jourdain, de Raphia, d'Anthédon, et de Gaza près de la
mer; il détruisit même cette dernière ville pour la punir de
sa longue résistance et cle son ardeur à soutenir les efforts
de Ptolémée.
Cependant le royaume de Syrie était cle plus en plus bou-
leversé par la guerre civile que suscitaient des princes ressem-
blant à autant cle fléaux, secondés par des ministres pervers.
Cette désorganisation politique favorisait très-bien les projets
d'Alexandre,rassuré d'ailleurs par son alliance avec l'Egypte.
La paix et le repos semblaient devoir rendre aux Israé-
MACHyEROUS. .94
lites une prospérité dont ils étaient privés depuis plusieurs
années. Malheureusement, Alexandre ne sut pas donner à
son peuple la légitime réparation de tant de désastres, de
tant de calamités. Il tomba dans les fautes qu'avait commises
Hyrcan. Comme son père, il acheva d'exalter les ressenti-
ments des pharisiens, auxquels il imputait à titre de crime
leur indifférence pour ses victoires.
Les pharisiens, comme on l'a vu plus haut, représen-
taient le parti du peuple, avec lequel il fallait s'entendre et
qu'il importait de rattacher à une dynastie nouvelle, tout en
le réconciliant avec l'aristocratie, dont les saducéens étaient
les champions. Un souverain au niveau de sa niissio'h doit
chercher un double point d'appui dans ces deux éléments
rivaux, qui se parent tantôt du masque de la religion, tantôt
du prétexte de la politique, mais qui, au fond, n'ont qu'un
but, celui de poursuivre l'un contre l'autre une lutte aussi
ancienne que l'origine des inégalités sociales. Adoucir ces
inégalités, contenir l'aristocratie en la rendant utile au pays,
protéger la démocratie en augmentant de plus en plus son
bien-être, en lui donnant des droits en échange des devoirs
qui lui sont imposés, voilà le mandat d'une royauté sortie
du sein même de la nation, comme celle des Macchabées.
C'est ce que ne surent pas comprendre ni pratiquer Hyrcan
et Alexandre Jannoeus.
A cette époque, la lutte entre les deux sectes rivales, ou
plutôt entre les deux partis, était parvenue à son apogée.
Les saducéens, forts de l'appui aveugle du roi et cédant à
la pente fatale qui entraîne et perd ordinairement l'aristo-
cratie, finirent par faire croire à Alexandre que les phari-
siens s'appuyaient sur le peuple dans le but de renverser le
trône et de s'emparer du pouvoir.
92 MACHyEROUS.
Une fois le soupçon entré dans l'âme du monarque, il
ne devait plus s'arrêter sur la voie des excès, des cruautés
qui se rencontrent si souvent parmi les dynasties orientales
et qui ont écrit en lettres de sang presque toutes les
pages de la Bible. Le peuple se contint pourtant, tout en
faisant comprendre par son attitude sombre, menaçante, les
haines et les ressentiments que la conduite du roi amassait
dans tous les coeurs. C'était l'incendie couvant sous la cendre.
Furieux de rencontrer cette résistance encore muette,
Jannoeus redoubla de mesures de rigueur, et sa rage ne
connut plus de bornes contre ceux qu'il appelait les courti-
sans du peuple.
A son tour la multitude entra en scène et choisit, pour
faire éclater son mécontentement, le retour d'une grande
solennité religieuse. Ce fut à l'occasion des fêtes dites des
Tabernacles, qui ont une durée cle neuf jours. Dans la pre-
mière journée, selon l'antique usage, chaque Israélite récite
des prières en tenant d'une main un. rameau de palmier
(loulab), garni de feuilles de myrthe et de saule, et de
l'autre un citron (ethrog). Au moment où le roi s'approcha
de l'autel pour y accomplir les sacrifices, la multitude lança
contre lui une grêle de citrons, en s'écriant qu'il était indigne
du rang de pontife puisqu'il était le fils d'une esclave.
A cet outrage, Alexandre répondit par le massacre de
six mille Israélites *. -
« pharisiens ne devient claire que par une relation du Talmud, qui men-
« tionne le même événement, mais sans indiquer le nom du roi.
Une
« s'agit bien d'un seul et même fait. Josèphe raconte : Un jour qu'à la fête
« des
Tabernacles il se tint à l'autel, le peuple jeta sur lui les cédrats con-
« sacrés par le culte. La source talmudique porte : Un
saducéen, à la fête
« des Tabernacles, au lieu de verser l'eau de la libation sur l'autel, rayant
« répandue à ses pieds, tout le peuple présent lui lança les
fruits de fête.
« Dans la Boraïta (Tosefta), il est remarqué que ce même jour un coin
« de l'autel fut si. fortement détérioré, que le vide dut être rempli par un
« bloc de sel.
« Il serait singulier que le même fait se fût passé deux fois de la môme
« manière. Il est à remarquer encore que la relation de Josèphe reste non
« peuple n'a lancé ses cédrats que lorsque Jannoeus se trouvait sur l'autel :
1. Ces chiffres sont reproduits d'après Josèphe, qui est toujours era-
.
jneinl, à cet égard, d'une grande exagération.
126 MACHJEROUS.
dans les murs d'Alexandrium avec le reste de son armée,
bien décidée, ainsi que le prince, à opposer la plus éner-
gique résistance.
Gabinius l'avait poursuivi sans lui laisser le temps de
respirer. Un corps de Juifs avait établi un camp retranché
au-devant de la citadelle. Le général romain fit des propo-
sitions d'arrangement qui furent rejetées. Irrité de ce refus,
il fit immédiatement attaquer cet avant-poste; malgré leur
courage, les Juifs furent vaincus après des pertes considé-
rables; les survivants se réfugièrent dans la citadelle. La
lutte avait été très-ardente, car Josèphe signale la valeur
extraordinaire que dut déployer dans cette circonstance
Marc-Antoine, le commandant de la cavalerie romaine.
L'investissement d'Alexandrium eut lieu, et, pendant
qu'une partie de son armée continuait le siège, Gabinius,
avec des forces imposantes, parcourut la Judée, dispersa les
partisans d'Aristobule et remédia aux ravages de la guerre
en faisant reconstruire les villes qui avaient été saccagées et
en y rappelant leurs habitants. Après avoir pris ces mesures,
dans le but de calmer l'irritation publique, il vint en per-
sonne activer le siège poursuivi par les légions.
Alexandre, environné d'ennemis, pressé avec vigueur
dans sa dernière place de refuge, réduit aux plus dures
extrémités, envoya sa mère auprès du général romain. Cette
princesse entama des négociations qui fléchirent enfin le
vainqueur. Les principales conditions de la capitulation
consistèrent dans l'abandon des places fortes d'Alexandrium,
d'Hyrcanium et de Machaerous, qui tenaient encore pour
le parti national.
Ces forteresses furent démantelées aussitôt, d'après le
voeu de la mère d'Alexandre; elle craignait que ces postes
MACHiEROUS. 127
«
après avoir ordonné de l'attacher à un poteau, traitement
«
qui n'avait jamais été infligé à aucun roi par les Romains.
«
Puis il le fit mettre à mort. Ces choses se passèrent de la
« sorte sous le consulat de Claudius et de Norbanus. »
que les jeunes princes fussent élevés dans les principes qui
dirigeaient sa conduite politique.
Tant de dévouement et de déférence ne pouvait manquer
d'appeler sur le roi des Juifs les plus hautes faveurs du chef
de l'empire. Auguste tint à récompenser Hérode en ajoutant
aux provinces de la Judée la Trachonite, la Batanée,. et
l'Auranite. Il profita même de son voyage en Syrie pour
ordonner aux différents chefs romains de ne rien entre-
prendre sans consulter le souverain des Juifs et de lui obéir.
Jamais, depuis le règne de Salomon, pareille puissance
n'avait été exercée par les rois d'Israël.
Indépendamment des forces militaires de ses États,
Hérode pouvait disposer du concours de plusieurs légions,
entraînant en sa faveur le prestige et même l'appui direct de
l'empire. Mais les Juifs, loin d'être éblouis par tout cet
éclat, ne dissimulaient pas leur mécontentement; ils voyaient
avec peine les honneurs rendus par leur roi à des maîtres
étrangers; ils souffraient surtout d'actes sacrilèges, impies,
commis contre leurs croyances antiques et sacrées, contre
leurs institutions les plus respectables et si profondément
gravées dans leurs moeurs.
Inquiet des conséquences redoutables que pouvait entraî-
ner l'indignation générale, Hérode chercha à désarmer les
ressentiments par la remise du tiers des impôts; mais cette
mesure de soulagement fiscal fut accompagnée d'un surcroît
d'espionnage et d'ordres despotiques punissant de mort qui-
conque s'occupait d'affaires publiques. Toute manifestation
était interdite en fait d'opinion et la moindre réunion
défendue. La tyrannie s'étalait sans voile en Judée, bri-
sant toutes les volontés, courbant tous les fronts, comme
si le pasteur du peuple n'était plus qu'un boucher, tgujours
180 MACHAEROUS.
prêt à frapper, au lieu de diriger dans la route du bonheur
et du bien-être des hommes intelligents.
A cette recrudescence de patriotisme, Hérode voulut
aussi opposer, comme palliatif, comme remède, la vibration
même de l'esprit judaïque. Le Temple de Jérusalem était le
centre religieux, le sanctuaire unique de tous les Juifs, sans
exception de résidence. Depuis des siècles on y célébrait, au
retour des grandes époques de l'année, les fêtes solennelles,
instituées par l'ordre de Dieu. De père en fils, de généra-
tion en génération, chaque Israélite accourait alors dans
l'édifice consacré à Jéhovah. Par ces pèlerinages se retrem-
paient la ferveur des croyants, l'espoir dans l'avenir; la
piété y consolait des épreuves du présent par lesquelles Dieu
châtiait son peuple.
Avant Hérode, le Temple avait donc été le foyer religieux
et national auquel aboutissaient et d'où partaient tous les
sentiments, toutes les résolutions, toutes les résistances
contre le joug de l'étranger. Là se trouvaient surtout le
point d'appui et le levier contre l'idolâtrie, le paganisme, en
un mot contre toutes les erreurs condamnées par la Loi. En
affaiblissant, en cherchant même à détruire cette forte base
de concentration, Hérode avait fourni auxjuifs un grief bien
grave contre ses tendances essentiellement romaines; il
imagina de tourner la difficulté et de résoudre le pro-
blème en annonçant au peuple le projet qu'il avait conçu
de reconstruire dans toute sa splendeur l'ancien temple de
Salomon.
A cette communication répondit un étonnement mêlé de
stupeur; puis se manifesta une défiance générale. Si les
Juifs laissaient démolir le sanctuaire actuel, le roi rempli-
rait-il sa promesse ? chacun en doutait ; cependant il parvint
MACHAEROUS. 181
.
« homme parce
qu'il avait tué ses frères qui valaient beau-
ce coup mieux que lui, et aussi parce qu'il avait amené son
«
père à commettre une telle abomination et à souiller sa
« bonté antérieure.
Mais, continuant comme il avait com-
« mencé,
Antipater s'attaqua aussi à son père pour recueillir
« plus
vite sa succession. Il se procura du poison venu
d'Egypte. Mais un des conjurés fit des révélations. On ap-
«
«
pliqua la question à ses serviteurs ; ceux-ci révélèrent tout,
«
firent connaître qu'il voulait faire disparaître sa tante, ses
«
frères encore en vie, et les enfants des frères tués. Il avait
« tramé
aussi quelque crime contre la maison de César, crime
« plus grave encore que ceux
accomplis dans sa famille.
«
Varus, gouverneur de la Syrie, arriva avec les autres pro-
« curateurs;
Hérode convoqua un tribunal. Au milieu on
186 MACHAEROUS.
«
plaça le poison, les dépositions des esclaves, et les lettres
«
écrites de Rome (par Antipater). Le roi confia l'accusation
« à
Nicolas. Celui-ci attaqua, Antipater se défendit. Varus
«
était juge avec ses amis. Antipater fut condamné et con-
« duit au
supplice. Nicolas conseilla encore au roi d'envoyer
« son
fils à César, puisqu'il s'était aussi rendu coupable
« envers ce
dernier; et de faire ce qu'il déciderait. Mais il
«
arriva une lettre de César qui donna à Hérode la faculté
«
de punir son fils. Il fut en effet exécuté. César exigea
«
aussi la mort de l'affranchie qui avait été la complice
«
d'Antipater. Il n'y avait personne qui ne louât Nicolas de
«
la remarquable accusation qu'il avait prononcée contre le
«
parricide et le fratricide. »
A la suite de ce coup foudroyant, reparut plus intense,
aggravée par l'âge, soixante-dix ans, l'ancienne maladie
dont" Hérode avait tant souffert. Le mal fit de rapides pro-
grès, conséquence forcée des tortures morales venant s'ajou-
ter à tant, de désordres physiques. Épouvantable fut son
agonie.
On eût dit que le feu lui rongeait les entrailles ; ses
membres se crispaient tordus par la douleur; son corps
couvert d'ulcères se décomposait, une putréfaction antici-
pée en détachait des lambeaux, tandis que de ses plaies
effrayantes surgissaient des larves dévorant cette espèce de
cadavre vivant, qui dégageait une infection pestilentielle,
insupportable à soutenir pour les tempéraments même les
plus robustes et les dévouements les plus exaltés.
Les soins des meilleurs médecins et le climat si salubre
de Jéricho n'apportèrent aucun soulagement à ce supplice.
La science dans son impuissance eut recours à la nature;
on tenta une dernière épreuve. Dans le voisinage"de Machae-
MACHAEROUS. 187