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Note obtenue: 15
Commentaires:
● Trop long
● Trop détaillé
● Essayer d’alléger et d’aller plus vite par moments
Louis-Ferdinand Céline, médecin et écrivain du 20e siècle, dit que “La conscience
n’est dans le chaos du monde qu’une petite lumière, précieuse mais fragile”. Cette citation
nous introduit au fait qu’une conscience au milieu du chaos est plus qu’intéressante. C’est
cette conscience, seule au milieu du chaos, qui est animée dans une des œuvres de
Louis-Ferdinand Céline: Voyage au bout de la nuit. Le texte soumis à notre étude est extrait
de ce roman, écrit en 1932. Alors que Bardamu, personnage principal et double littéraire de
Céline, s’engage dans l’armée de terre française sur un coup de tête, il se retrouve sur un
champ de bataille, “perdu” au milieu des soldats. Ayant vécu la première guerre mondiale, et
s’étant précédemment engagé dans l’armée de terre, Céline communique un récit au plus
près du réel, dans lequel il intègre des éléments pessimistes, anti-militaristes et
anti-nationalistes. Nous pouvons ainsi nous demander en quoi cet extrait constitue une
parodie de roman picaresque qui illustre le nihilisme radical de Bardamu, double littéraire de
son auteur Céline. Premièrement, nous analyserons la prise de conscience violente de
Bardamu. Nous verrons dans un second temps comment, selon Céline, la guerre incite et
autorise à tuer.
Dans un premier temps, nous pouvons nous focaliser sur la première étape de cet
extrait. S’étendant de “Serais-je donc” à “Ça venait des profondeurs et c’était arrivé.”, cette
étape illustre une description apocalyptique, perçue par Bardamu, puis dans un second
temps, les sentiments qui accompagnent le regret dont Bardamu nous fait part.
La description apocalyptique est introduite par la question rhétorique: “Serais-je donc le seul
lâche sur terre?”. Cette question rhétorique permet à Bardamu de se placer en marge: il
constitue un autoportrait par qualité péjorative. En effet, Bardamu est le double littéraire de
Céline, qui souhaite montrer la naïveté de ce personnage, choqué par l’horreur de la guerre.
Nous comprenons ainsi que la guerre révèle la lâcheté de l’humanité, dont Bardamu devient
la synecdoque. La phrase exclamative “Et avec quel effroi!” est manifeste de la spontanéité
de la pensée de Bardamu, qui exprime de manière directe ses pensées, sans filtre. Nous
comprenons alors que ce témoignage est un psycho-récit, ce qui ajoute à l’effet
autobiographique porté par ce personnage. Céline insiste d’ailleurs sur le côté péjoratif de
cet autoportrait en précisant que Bardamu est “Perdu” au milieu de ces soldats. Il est le seul
qui n’est pas fait pour la guerre. Il est incomparable à ces soldats, décrits par l’oxymore
“fous héroïques”, qui témoigne de l’anti-militarisme de Céline, submergé par le terrain
militaire dans lequel il est plongé. L’ampleur du champ de bataille est accentuée par la
polysyndète “et déchaînés et armés”, et par l’accumulation “Avec casques, sans casques,
sans chevaux [...]”, qui ne néglige pas l’aspect animalier des soldats, se déchainant face à
l’ennemi. Cette longue phrase exclamative de groupes verbaux, de noms, et d’adjectifs
entremêlés, ajoute à l’effet de spontanéité descriptive de la pensée. S’ajoute à cela les
antithèses: “avec casques, sans casques”, qui sont manifestes à la fois du chaos de la
guerre, et du chaos de ses pensées, qu’il ne prend pas soins de mettre en ordre dans son
récit. Nous faisons face à tout et son contraire, l’ensemble est désordonné, en métaphore au
champ de bataille. Nous pouvons également retrouver des allitérations en “t” et en “s” dans
cette phrase exclamative. Pouvant être assimilés aux sons des armes, l’amplification de
l’armement des soldats est pareillement menée par le détournement comique de
l’expression idiomatique: “armés jusqu’aux cheveux”. Ce détournement démontre un
surarmement des soldats, qui sont, au sens propre, armés des cheveux aux pieds. Puis
l’observation des termes adjacents “à genoux, creusant, se défilant” concluent en dessinant
une contradiction dans les valeurs humaines. En effet, ces termes contrastent fortement
avec ceux décrits précédemment, qui avaient plus tendance à décrire un ton barbare et
animalier, chez ces soldats à présent décrits plus calmement. Cette contradiction soudaine
est alors manifeste d’une contradiction dans les valeurs humaines, comme si les humains
étaient perdus, ne connaissaient pas leur raison d’être. Ainsi, la citation “pour tout y détruire”
s’y lie, tentant de trouver un but à cette guerre incompréhensible. Le but serait-il donc de
tout détruire, excluant toute possibilité d’honneur et de nationalisme? Céline forme ici un
questionnement chez le lecteur, qui tombe sous le chaos de ces pensées.
La description apocalyptique, retrouvée dans cette première étape, est suivie du témoignage
direct des sentiments auxquels Bardamu fait face, dans le regret de son choix d’aller au
front. Ce témoignage de ses sentiments commence par une désolation: “On est puceau de
l’Horreur comme on l’est de la volupté.”. Bardamu fait ici une comparaison avec l’Horreur de
la guerre. Le H de “Horreur” étant majuscule, Bardamu parle ici de l’horreur par définition, et
ne fait référence à aucune situation particulière. De plus, l’utilisation du pronom indéfini “on”,
cible une audience générale, associé au verbe être, au présent de vérité générale. Nous
pouvons ainsi comprendre que ce qui est au fond de l’homme, c’est l’horreur. C’est une
expérience inévitable pour devenir un homme, et Bardamu est en train de la vivre. Il se
remet alors en question sur cet événement qu’il attendait: “Comment aurais-je pu me douter
moi de cette horreur en quittant la place Clichy?”. Cette phrase interrogative contient une
répétition inutile de pronoms personnels: “je”, “me”, “moi”. Cette répétition inconsciente
témoigne d’une forte remise en question, et d’un fort doute, qui motive ce sentiment de
regret et de mélancolie. La mélancolie est accentuée par la référence à la place Clichy, où il
avait l’habitude de passer, et d’où il a pris sa décision de rentrer dans l’armée. Cette phrase
semble répétée, en effet, la phrase suivante, également interrogative, est très similaire,
ayant la forme comme seule différence. Ainsi, nous faisons face à une polyptote: “Qui aurait
pu prévoir, avant [...] la guerre, tout ce que contenant la sale âme héroïque [...] des
hommes?”. Bardamu parait s’accabler sur son sort, ne plus penser à autre chose, il est
indigné, et en tire une conclusion. “À présent, j’étais pris dans cette fuite en masse, vers le
meurtre en commun, vers le feu… ”: cette phrase provoque un effet de rapprochement vers
la mort. En effet, les mots raccourcissent au cours de la phrase, qui est elle-même axée sur
la mort. Les termes “fuite en masse”, “meurtre en commun”, et “feu” sont manifestes du
champ lexical de la mort et de la souffrance, qui accentue cet effet de rapprochement
inévitable vers la mort. De plus, comme en est la spécialité de Céline, cette phrase se
termine par des points de suspension, laissant le lecteur imaginer la suite… S’ensuit le
pronom démonstratif “ça”, qui réfère à un sentiment décrit précédemment, mais lequel? Ce
pronom donne un ton énigmatique à la phrase, en laissant le lecteur imaginer.
Ensuite, nous pouvons observer une seconde étape, se déroulant de “Le colonel ne
bronchait toujours pas” à “J’étais dépucelé.”, décrit la façon dont la guerre incite et autorise à
tuer. Cette étape peut se décomposer en deux parties, la première étant une description
satirique et ironique de la guerre, et la seconde étant l’absurdité et la colère de Bardamu
envers cette tuerie organisée.
La première partie, décrivant la guerre de manière satirique et ironique, commence par
décrire le colonel, placé sur “le talus”, lisant des lettres. Bien que ce colonel soit bien à sa
place, et s’occupe de ce qu’il a à faire, on entend dans la pensée de Bardamu un aspect
satirique, de jalousie, et d’ironie. Il va continuer à décrédibiliser le colonel dans les phrases
suivantes, en décrivant les lettres: “des petites lettres du général qu’il déchirait ensuite
menu, les ayant lues sans hâte, entre les balles.”. Nous retrouvons ici un vocabulaire
précieux, un raffinement, en décalage total avec la guerre. Cette phrase se terminant par
“entre les balles”, laisse entendre à une ironie satirique de la part de Bardamu, qui souhaite
mettre en lumière le contraste entre le colonel sur le talus et le champ de bataille.
L’agacement de Bardamu est mis en valeur dans la phrase suivante. Cette phrase
interrogative est une question rhétorique, qui tient à critiquer le choix des officiers, de ne pas
cesser le feu. Les phrases suivant cette interrogative sont également interrogatives, et
semblent seulement reformuler ce qui a été dit. Nous faisons donc face à des polyptotes:
ces phrases sont les mêmes, sous des formes différentes. Toutes visent à critiquer le choix
des officiers. Bardamu parait alors penser qu’à ça, ce questionnement incessant de
pourquoi la guerre continue-t-elle, il s’indigne. “Mais non!”: cette courte exclamation violente
cesse cette longue série de questions rhétorique. Bardamu tente de reprendre ses esprits,
mais il s’indigne de plus en plus, au point d’en faire de l’ironie. “Continuez, colonel, vous
êtes dans la bonne voie!”: ici, comme si Bardamu avait deviné le contenu de la lettre
destinée au colonel, nous avons accès à cette phrase. Cette invention de Bardamu
témoigne de son indignation: il invente une phrase totalement ironique et disproportionnée,
là où le général qui envoie la lettre n’est pas ironique, bien au contraire. S’ensuit un réel
compte rendu des pensées de Bardamu: “Voilà sans doute ce que lui écrivait le général”.
Nous pouvons observer ici une réelle mise en valeur du narrateur interne, ce qui accentue
l’effet de psycho-récit. Enfin, il termine cette partie par un moment d’émotions, qui contraste
avec le champ de bataille: “J’en aurais fait mon frère peureux de ce garçon-là”. Décrivant ici
le messager qui porte les lettres au colonel, Bardamu indique une peur flagrante. Sachant
que le messager a sûrement plus d’informations que les soldats, nous pouvons comprendre
que cette peur est concrète, basées sur le colonel et le général. Enfin, le terme “garçon”,
aide à spécifier la source de cette peur. Nous comprenons ici que le messager n’a pas
passé l’étape du dépucelage de la guerre, qu’il passe en temps réel, et qui justifie sa peur.
La seconde partie met en valeur l’absurdité de la guerre, personnifiée comme une tuerie
organisée. “Donc pas d’erreur?”: dès les premiers mots, Bardamu utilise l’ironie pour mettre
en valeur son agacement. En suivant avec :“Ce qu’on faisait à se tirer dessus”, Bardamu
mêle tous les camps, qui se tirent tous dessus entre eux, sans même savoir pourquoi, sans
même savoir sur qui. Nous ressentons ici une exaspération, comme s'il n’y avait plus rien à
faire. Avec effervescence, Bardamu critique le manque de logique dans la guerre: “Cela
faisait partie des choses qu’on peut faire [...] C’était même reconnu, encouragé”. La mise en
valeur de la guerre est ici fortement critiquée, faisant paraitre la guerre comme une tuerie
organisée. Enfin, cet extrait est conclu avec les citations suivantes: “Rien à dire”, “J’étais
dépucelé”. Nous avons ici l’impression que Bardamu va cesser tout effort, qu’il en avait fini,
en vain. L’expression “Rien à dire”, est une expression explicite du nihilisme, que Céline met
en valeur tout au long de son roman. La dernière phrase, bien qu’elle soit très courte, a un
rôle primordial: elle définit la morale que Bardamu a tiré, de son expérience au front. Le
dépucelage de la guerre, est selon lui, une expérience inévitable que tout homme doit vivre
dans sa vie. En clôturant avec “J’étais dépucelé”, Bardamu met officiellement fin à cette
étape de sa vie, et en ressort plus fort.
En conclusion, cet extrait met en valeur une conscience dans le chaos du monde.
Céline utilise cette conscience unique sur le champ de bataille pour mettre en valeur sa
satire ironique de la guerre. Ainsi, cet extrait constitue une parodie de roman picaresque, en
utilisant un double littéraire, qui parodie l’aspect autobiographique, accompagné d’une satire
ironique, qui renforce l’aspect parodique. Le nihilisme radical de Céline est ainsi décrit par
son double littéraire, qui nous communique ses pensées par un psycho-récit, qui met en
scène sa conscience violente et sa critique de la guerre.