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Commentaire composé, 

« Le dormeur du val »

Réalisé par : Chaimae EL HILLALI, Ahmed EL AZZOUZY, Ouafae SELLAMI, Hiba


OUARRAD et Aymen Benseba

- Le texte que nous allons étudier est un poème intitulé ‘’Le Dormeur du Val’’, (1870)
écrit par Arthur Rimbaud (1854-1891) qui est l’un de grands poètes du XIXème siècle. Il
représente le mouvement symbolisme qui donne une conception spirituelle du monde et qui
vise à trouver d’autres moyens d’expression pour dépasser la simple représentation réaliste.
Ce poème est un sonnet, composé de 14 alexandrins répartis en 2 quatrains aux rimes
croisées, suivis de 2 tercets dont la disposition des rimes est plates, suivis de rimes
embrassées. Rimbaud met en scène un soldat mort au milieu d’une nature omniprésente et
accueillante, suscite effectivement l’indignation de Rimbaud. Alors, en quoi ce poème est-il
un hommage rendu au martyr ?

Afin de répondre à la problématique, on traitera le poème selon deux axes :

D’abord, nous verrons le tableau d’une nature vivante et protectrice, autrement dit idyllique.
Et nous soulignerons l’attitude ambigüe du soldat afin de déclarer sa fin tragique.

Le premier quatrain commence par le présentatif « C’est » afin de nous présenter


le cadre spatial « c’est un trou de verdure » qui évoque implicitement le val, il fait appel à la
périphrase. Rimbaud a recours à une image descriptive du cadre temporel « le soleil de la
montagne », cela coïncide avec l’aurore qui ressemble à un regard de tendresse infinie de la
nature envers le dormeur. La nature est en mouvement, elle est personnifiée afin de la rendre
plus vivante, en lui prêtant des attributions humaines « la rivière chante, accrochant », «
montagne fière », « Nature, berce ».

Ainsi que, la mise à profit du champ de la nature « rivière, petit val, herbes, soleil,
montagne » a servi Rimbaud pour dépeindre son tableau, éclairé par une lumière frappante «
luit », « rayons », « lumière pleut » et grâce à la répétition du « soleil », Rimbaud insiste sur la
chaleur de cette nature. Cela donne un aspect lumineux et chaleureux au paysage. Cette
description est menée par l’utilisation des adjectifs épithètes « montagne fière », « petit val »
et par des compléments du nom « de verdure » qui précise « trou » et aussi dans « soleil de la
montagne ». Une sorte de sérénité enveloppe ce paysage par l’emploie de l’alexandrin qui
donne un effet de calme et de majesté, ce val a une telle ressemblance à l’au-delà, précisément
au paradis dans « la lumière pleut » qui l’évoque implicitement, c’est une lumière qui vient du
ciel. La rivière est présente musicalement par son chant qui est imité par les allitérations en «
L » dans « le soleil de la montagne / luit / val » ce qui nous donne l’impression que cette
nature est en train de fêter la présence du dormeur, … du martyre. Enfin, il est évident que la
nature est dynamique, les verbes d’actions en sont témoins « chanter, accrocher » ou
l’adverbe « follement » qui s’applique à des humains au d’habitude.

Au 3 vers du premier tercet, le poète s’adresse directement à la nature comme étant un


personnage à part entière, vu l’utilisation de l’impératif (berce-le) et l’apostrophe
(interpellation de la nature), nous avons la métaphore de la mère avec son enfant. Ainsi que la
présence du champ de la maternité (lit, enfant, berce) afin de démontrer le rapport maternel
tissé entre la nature et le soldat, elle est présentée comme enveloppante, telle une figure
maternelle qui protège son fils du froid « berce-le chaudement :il a froid ». Dans la
mythologie grecque, cette métaphore réfère à Gaia, la mère protectrice. De même, elle est
toujours associée à la chaleur, avec l’adverbe « chaudement » au vers 14, ce qui marque un
contraste entre la froideur du soldat et la chaleur de son berceau « lit vert ».

Après avoir peint les points essentiels de ce tableau où une nature vivante pleines de
sensations prend sa place, Rimbaud avec son pinceau, peint le portrait du dormeur du val,
prenant une attitude ambigüe.

D’un point de vue externe, Rimbaud décrit ce dormeur, en avançant son âge « soldat
jeune » et son état « pâle / comme un enfant malade). Pourtant, il se focalise sur sa position
sur laquelle il insiste « tête nue », « bouche ouverte », « il est étendu dans l'herbe ». La
présence d’un jeune soldat endormi, dès le deuxième quatrain, crée un effet de surprise chez
le lecteur. Même s’il est jeune, ce dormeur semble étranger à son décor apaisant. Aussi, le
thème de la tranquillité et la dominance du champ lexical du sommeil « dort, pâle dans son lit
vert, les pieds dans les glaïeuls, il dort, il fait un somme, il dort dans le soleil », et La
description de la bouche « bouche ouverte, souriant » indiquant la sérénité heureuse du
dormeur ont une certaine connotation positive qui nous trompe et nous mène sur la fausse
interprétation, celle d’un soldat endormi. Par ailleurs, la répétition du verbe ‘’dormir’’ tout au
long du poème, aussi la mise en valeur du mot « Dort » par l’enjambement et le signe de
ponctuation fort au niveau du premier quatrain, nous pousse à remettre en question cette
tranquillité initiale et réfléchir ainsi sur l’état initial du soldat.

On sent en tant que lecteur en lisant le poème et surtout la partie où il y’a l’évocation
du sommeil que Rimbaud joue sur les mots, on assiste donc à une double interprétation, celle
du soldat endormi (il recourt à la répétition pour insister sur le fait « dort ») et celle du soldat
mort. Ainsi, la « bouche ouverte », l’immobilité du dormeur, dont la même « narine » ne
frémit pas, ce qui donne une impression d’absence de signes de vie. Sa pâleur et la
comparaison avec « l’enfant malade », sont autant d’indices qui convergent vers une seule
interprétation possible. De même, certains détails sur sa position laissent à penser qu’il n’a
pas choisi d’être là car sa nuque « baignant dans le frais cresson bleu » indique qu’elle est
mouillée, ce qui n’est guère raisonnable, et par ailleurs, « il a froid ».

C’est au tout dernier vers que nous comprenons que le soldat est mort après avoir reçu
deux balles dans le cœur « du côté droit » c’est une métonymie avec laquelle Rimbaud vise à
nous concentrer sur une partie du corps. Ainsi que, tous les indices divergents nous mènent
vers l’interprétation la plus malheureuse, celle dont le poète nous avait éloignés par la
description d’une nature en fête. Le « trou de verdure » prend la forme d’un tombeau parsemé
de glaïeuls ; fleurs de deuil. D’ailleurs, « trou de verdure » à la base renvoie au val, ce dernier
n’est plus un endroit de paix et de sérénité mais il se transforme tout simplement en un convoi
(en comptant la rivière, la montagne, le soleil…) qui accompagne le cortège funèbre d’un
malheureux et brave martyr.

Pour bien accompagner sa description et pour masquer son jeu, Rimbaud a essayé
d’atténuer toute évocation de la mort, notamment par la litote dans « les parfums ne font pas
frissonner sa narine ». En plus, le contraste marqué par l’antithèse dans « nature berce le
chaudement, il a froid » il y’a une mise en relief de la froideur du soldat pour montrer qu’il est
mort mais en même temps l’utilisation du verbe bercer renvoie au sommeil, ce qui déconcerte
le lecteur.

Enfin, dans le vers de chute, on peut clairement voir que l’utilisation de l’euphémisme
a pour but d’atténuer la vision de la mort finale, l’utilisation de l’adjectif « Tranquille » vient
pour marquer l’absence du mouvement, afin de montrer qu’il y’a une impression générale de
paix dans le milieu où se trouve le soldat

En guise de conclusion, ce sonnet a pu rendre hommage au martyre, en focalisant


d’abord sur l’axe d’une nature vivante et protectrice où le jeune soldat retrouve son repos
éternel dans une nature accueillante, tendre et douce, une image tragique dans laquelle la
nature tient dans ses bras son enfant mort. Puis, l’annonce du salut de ce martyre qui s’est
délivré de toutes ses souffrances.

De même, ce poème est marqué par la dénonciation de la guerre, détournée d’une manière
subtile (l’absence des mots relatifs à la guerre) et renforcée par l’annonce atténuée de la mort
du soldat dans le vers de chute. Ce poème a la forme d’un jeu de devinettes, avec lequel
Rimbaud révèle la mort de ce jeune soldat par des indices, par exemple la répétition du « trou
» qui était le révélateur de la mort. Il a su comment conserver le moment de révélation jusqu’à
la fin. Le poème est si fort grâce à sa chute tardive.

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