Les traditions concernant le temple de Jérusalem ont fortement marqué la Franc-maçonnerie avec
les personnages de Salomon et d’Hiram, les deux colonnes de Bronze et la vocation universaliste du
Temple.
On rappellera que Salomon est un prénom qui vient de l’hébreu "Shalom" qui signifie "Paix" ou
plutôt "complétude", c'est-à-dire un état qui n’est atteint que dans la paix.
Quant au personnage lui-même, il est pour les trois religions monothéistes un roi, un prophète et un
mage, alliant ainsi le temporel au spirituel… c’est aussi un sage, et pour les francs-maçons
modernes, cette sagesse est devenue exemplaire : Ne dit-on pas en effet que le Vénérable de la Loge
est assis "dans la chaire du roi Salomon" pendant que les frères pratiquent "l’Art Royal ?"
- La réalisation du projet :
Le roi Salomon – dont l’époque se situe aux environs de 930 av. J. C. – en succédant à son père, le
roi David, sur le trône d’Israël, fit savoir à Hiram, roi de Tyr, qu’il voulait construire une maison au
nom de l’Eternel, suivant en cela la volonté de Dieu qui avait déclaré à David : "ton fils que je
mettrai à ta place sur ton trône, ce sera lui qui bâtira une maison à mon nom."
Par fidélité à la mémoire de David qui était son ami, Hiram s’empressa de mettre à la disposition de
Salomon des ouvriers ainsi que des matériaux et des artistes.
Il faut rappeler ici que Hiram, roi de Tyr, ne doit pas être confondu avec l’architecte chargé de
diriger les travaux, c'est-à-dire Maître Hiram qui était désigné sous le nom de Hiram-Abif - le
Maître au sens de celui qui a la maîtrise.
Ce dernier est présenté comme un homme plein de sagesse et de discernement ayant la maîtrise de
plusieurs métiers : métallurgiste, fondeur, et même tisserand, accessoirement traceur de plans.
Le Temple de Salomon est considéré dans la tradition hébraïque comme l’expression la plus
achevée de la grandeur et de la perfection… Et comme il avait été demandé par Dieu, il ne pouvait
pas avoir d’équivalent. Il était donc différent d’une église ou d’une synagogue et se différenciait de
la conception que les Romains, les Grecs ou les Egyptiens pouvaient avoir d’un Temple.
En réalité, ce bâtiment religieux avait pour finalité d’accueillir l'arche d'alliance qui était un
coffret en bois d’acacia comportant un couvercle (nommé propitiatoire) sur lequel
reposait deux chérubins en or se faisant face.
"Arche d’alliance" vient de l’hébreu "Aron" dont la racine AR signifie Lumière et du
suffixe "ON" signifiant "la force", soit ARON "la Force Lumière" ou "Lumière qui est
Force".
2
Elle aurait notamment contenu les tables de la loi (autrement dit le "Décalogue" c'est-à-dire
les "dix paroles" que l’on appellera les "Dix Commandements" et qui sont un ensemble écrit
d'instructions morales et religieuses d'origine divine et reçu, selon les traditions bibliques, par
Moïse au Mont Sinaï.
Ce qu’il faut souligner aussi, c’est que le Temple de Salomon a des correspondances avec des
éléments du passé.
a) Son architecture :
1ère remarque : les deux colonnes étaient deux pièces majeures du parvis où se faisaient les
holocaustes. Elles correspondaient aux colonnettes en bronze qui soutenaient les tentures du parvis
dans le temple du désert, et comme elles, marquaient la séparation entre le monde "hyper sacré de
l’intérieur du temple et l’espace "mi-sacré / mi-profane" du parvis lui même séparé de l’espace
profane de la ville.
2ème remarque : le Temple était orienté, pour les uns, selon un axe "Est-Ouest" et pour les autres,
selon un axe "Ouest-Est".
En fait deux éléments se combinent pour nous aider à répondre :
1. Dans le livre des Chroniques, on lit qu’on "dressa les colonnes devant le sanctuaire, l’une à
droite et l’autre à gauche de l’entrée. On appela celle de droite Jakin et celle de gauche Boaz"-.
Et plus loin on apprend que "la grande cuve ronde avait été placée sur le côté droit du temple,
tournée vers l’angle sud-est" (donc du côté de Jakin).
3
2. Selon la Bible, il ne devrait donc pas y avoir d'ambiguïté : l’orientation est tournée vers l'est
d’autant que selon le principe ancien de l’orientation, la façade était tournée vers l’orient.
Quand on fait un rapprochement avec les formes traditionnelles maçonniques on s’aperçoit que
dans les Rites Maçonniques Écossais et Français, la Loge est orientée selon l'axe "Ouest-Est" à
l'instar des églises du Moyen Âge, c'est-à-dire selon une orientation apparemment opposée à celle
du Temple Jérusalem.
Cependant, dans le Rite Écossais Ancien et Accepté, Jakin et Boaz sont respectivement placées au
sud-ouest et au nord-ouest. Ainsi, Jakin pouvait être assimilée au solstice d'hiver et Boaz au solstice
d'été. En dehors du fait que les colonnes sont face au soleil couchant plutôt que levant, il n'y a pas
de réelle différence avec la disposition du Temple de Salomon.
Dans le Rite Français, au contraire, Jakin et Boaz sont situées respectivement au nord-ouest et au
sud-ouest. En conséquence, Jakin est associée au solstice d'été et Boaz au solstice d'hiver.
Nous pouvons trouver, dans l'identification de Jakin et Boaz respectivement à la porte des dieux et à
la porte des hommes une confirmation de leur dénomination.
Boaz – qui signifie "en lui est la force" - traduit la force, mais autre que physique. Elle évoque
une force supérieure, la force spirituelle de conscience de l'indestructibilité de l'être réel,
l'Esprit.
Jakin – qui signifie "il établit" exprime la solidité, la stabilité; elle signifie que l'initié a dépassé
le stade des fluctuations humaines et atteint l'état de l'Être se tenant dans l'éternel présent.
Le Vestibule était éclairé par la pleine lumière du soleil visible (lumière extérieure), le Saint lieu par
la lumière indirecte du soleil (lumière réfléchie) et le Saint des Saints par le soleil invisible ou
spirituel (lumière intérieure). De sorte que les soleils visible et invisible ne pouvaient être
respectivement associés qu'à la lumière (Est) et à l'obscurité (Ouest).
Le lien entre le Saint des Saints et l'initiation aux grands mystères fait comprendre pourquoi son
accès était restreint au(x) Prêtre(s) en tant que représentant(s) du pouvoir spirituel.
L'admission du postulant au Saint lieu s'effectuait par une double porte frontale située entre les deux
colonnes. Placé au “centre” du Saint lieu et se tournant vers l'est, il était en mesure de voir le soleil
se lever, à toute époque de l'année, dans l'intervalle défini par les colonnes. Autrement dit, les
colonnes touchaient extérieurement les côtés de l'angle délimité par les deux directions des levers
du soleil aux solstices.
b) Après le symbolisme que peut-on dire du Temple de Salomon dans le domaine des
idées ?
Le Temple offre la caractéristique de ne pas être couvert… ce qui autorise à dire que la voûte
étoilée ouvre symboliquement, selon la verticale, un espace qui est clos sur le plan horizontal. Les
officiants sont ainsi invités à lever les yeux et à porter plus haut leurs attentes et leurs prières.
Le symbolisme de la voûte étoilée invite à la méditation et témoigne de ce qu'il reste à connaître en
invitant à l'humilité.
Le Temple apparaît comme le lieu sacré situé dans l'intemporel et le vaste espace. A partir de cet
endroit on peut tout observer, tout ressentir à la jonction de la terre et du ciel.
La Franc-Maçonnerie qui se propose de retrouver le véritable Centre de l'Union s'emploie
activement à la construction spéculative du Temple qui est une tâche spirituelle infinie et très
lourde.
4
L'initié doit se mettre à l'ouvrage en sachant qu'il ne parviendra pas à achever sa mission
édificatrice. Mais qu'importe, car comme le disait Guillaume d'Orange : "Point n'est besoin
d'espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer".
Ainsi la construction du Temple vise symboliquement à la fois l'Etre intérieur et l’Etre extérieur…
l'édification de l'un ne pouvant se faire sans l’édification de l’autre dans un mouvement permanent
qui devient une sorte de lutte contre la mort pour atteindre l'éternité.
Pour conclure,
Je dirai que ce qui est important, ce n’est pas la précision de la description du Temple de Salomon,
son orientation, ses dimensions ou même sa réalité historique.
Ce qui mérite d’être retenu :
C’est d’abord, la double image à laquelle nous renvoie l’édifice :
- celle de l’Univers et celle de l’homme perçu comme une représentation en réduction de ce
même univers,
- le Temple à la fois symbole du macrocosme universel et du microcosme humain avec cette
idée que l’homme et le monde sont des chantiers figurant notre histoire personnelle en
même temps que notre histoire collective, autant de constructions lentes et inachevées.
Ce qui mérite d’être retenu, c’est aussi :
- Le symbole du Temple idéal et inachevé dont chaque maçon est une Pierre,
- La spiritualité de l’œuvre, enfin, dans sa perfection et son inaltérabilité.
® AT