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Aux origines de

la métallurgie du fer
en Afrique
Une ancienneté méconnue
Afrique de l’Ouest et Afrique centrale

Directeur de la publication : Hamady Bocoum


ÉDITIONS UNESCO
2 J.F. Jemkur

Dans la même collection :


L’affirmation de l’identité culturelle et la formation de la conscience nationale dans
l’Afrique contemporaine
La christianisation de la Russie ancienne
Contact de civilisations en Martinique et en Guadeloupe
Destins croisés : cinq siècles de rencontres avec les Amérindiens
Les routes de la soie : patrimoine commun, identités plurielles
Spécificité et dynamique des cultures négro-africaines
Spécificités et convergences culturelles dans l’Afrique au sud du Sahara
La chaîne et le lien : une vision de la traite négrière
Les abolitions de l’esclavage
L’Afrique entre l’Europe et l’Amérique
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 3

Aux origines de la métallurgie du fer


en Afrique
Une ancienneté méconnue
Afrique de l’Ouest et Afrique centrale
Directeur de la publication : Hamady Bocoum

Mémoire des peuples

Éd iti o n s UN E SCO
4 J.F. Jemkur

Les auteurs sont responsables du choix et de la présentation des faits figurant dans cet
ouvrage ainsi que des opinions qui y sont exprimées, lesquelles ne sont pas nécessaire-
ment celles de l’UNESCO et n’engagent pas l’Organisation.
Les appellations employées dans cette publication et les données qui y figurent n’impli-
quent, de la part de l’UNESCO, aucune prise de position quant au statut juridique des
pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités, ni quant au tracé de leurs frontières
ou limites.

Publié en 2002 par l’Organisation des Nations Unies


pour l’éducation, la science et la culture
7, place de Fontenoy, 75732 Paris 07 SP

Composé par Desk, F-53940 Saint-Berthevin


Imprimé par Sagrafic, Barcelone
Photo de couverture : © J. Meniaud, Paris, É. Larose, 1912

ISBN 92-3-203807-2
© UNESCO 2002
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 5

Préface

Le Dialogue des cultures et des civilisations comme fondement durable de la


paix est une des plus fécondes intuitions des pères fondateurs de l’UNESCO. Ce
dialogue constitue un axe central pour, selon l’Acte constitutif de l’UNESCO,
« bâtir la paix dans l’esprit des hommes ».
L’urgence de promouvoir le dialogue des cultures et des civilisations s’impose
à l’UNESCO, notamment comme réponse à la théorie sur le clash des civilisa-
tions de Samuel Huntington. Le moment est donc venu d’une réflexion critique
et prospective sur la notion de civilisation qui a trop souvent fait l’objet de mani-
pulations intellectuelles et historiques destinées à légitimer toutes sortes de
dominations politiques et de discriminations. C’est dans ce contexte que se
situent la signification profonde et la portée du projet des Routes du fer en Afri-
que. Ce dont il s’agit, en dernière analyse, c’est, par une approche scientifique
rigoureuse, interdisciplinaire et internationale, de restituer au continent africain,
ce marqueur lourd de la civilisation qui lui a été nié jusqu’à présent : le fer.
Connaissance scientifique, science, savoir, et savoir-faire, technologie, société,
mythe, cosmogonie… tous ces « champs », dans le sens « bourdieusien » du
terme, sont structurés et signifiés par le fer. Les enjeux essentiels sont pour l’Afri-
que, vérité historique, reconnaissance de son patrimoine et ressourcement à tra-
vers ses capacités endogènes de maîtrise et de connaissance du fer.
L’Histoire générale de l’Afrique – contribution majeure de l’UNESCO à une
relecture objective de la mémoire longue du continent –, dans différents chapi-
tres relatifs à la métallurgie africaine du fer et aux recherches archéologiques
récentes, avait cependant étudié de nouveaux sites et fourni de nouvelles data-
tions dont l’exploitation renouvelait considérablement nos connaissances sur
l’ancienneté, la diversité et l’extrême longévité du complexe sidérurgique afri-
cain. Lors de sa première session (Abuja, 23-27 février 1995), le Comité scienti-
fique international du projet des Routes du fer en Afrique avait recommandé au
Directeur général de l’UNESCO de publier un ouvrage consacré à la métallurgie
africaine du fer et d’y inclure, notamment, le document présenté par le Nigéria
à cette réunion (Vingt-cinq siècles de travail du fer au Nigéria).
C’est également pour rendre compte de l’évolution de la recherche que le
présent ouvrage, au-delà des documents d’Abuja, accueille des contributions
ultérieures qui participent toutes de l’exigence permanente de mise à jour chère
6 Préface

à l’UNESCO. Dans cette perspective, les communications présentées sur ce


thème à l’occasion des rencontres scientifiques organisées au Siège de l’UNESCO,
le 12 novembre 1999, pendant la 30e session de sa Conférence générale, par
MM. Hamady Bocoum, Pierre de Maret, David Aremu, Gérard Quéchon et
Bruno Martinelli, ont permis d’élargir considérablement la portée de l’ouvrage
qui dépasse les frontières du Nigéria et rend aussi compte du développement des
recherches au Niger et, partiellement, en Afrique centrale, voire australe.
À cette série de documents issus de l’UNESCO et dans un souci d’équilibre,
nous avons jugé utile d’ajouter deux contributions. En effet, bien que le livre soit
consacré à l’Afrique de l’Ouest et à l’Afrique centrale, des contingences diverses
ont fait que l’essentiel des contributions recueillies porte sur l’Afrique de l’Ouest,
à l’exception notable du brillant tour d’horizon du professeur de Maret qui a
traité aussi bien de l’Afrique centrale que de l’Afrique australe. Aussi, le texte du
professeur Essomba, même s’il ne traite que du seul Cameroun remédie partiel-
lement au déséquilibre noté et marque la volonté de l’Organisation de revisiter
tous les espaces couverts par les Routes du fer en Afrique.
L’ouvrage a enfin été enrichi par la contribution de M. Fluzin, directeur de
recherche au CNRS, qui apporte son expertise dans le domaine de l’analyse de la
chaîne opératoire technique du fer illustrée par des exemples africains. Son texte
permet à la fois de se rendre compte de l’universalité des procédés physico-chi-
miques associés au développement de la sidérurgie et de la spécificité, même rela-
tive, des observations effectuées sur le continent. À cet égard, l’intérêt que
l’UNESCO porte à l’étude de la métallurgie du fer en Afrique, au-delà de la
dimension chronologique, dont le réexamen est absolument indispensable, vise
également à réhabiliter la contribution des métallurgistes africains au patrimoine
technologique de l’humanité.
En publiant l’ensemble de ces textes, nous sommes cependant conscients de
ne pas présenter un ouvrage exhaustif. L’urgence de corriger les thèses qui,
jusqu’à nos jours, reléguaient l’Afrique subsaharienne au rang de simple récipien-
daire d’une technologie aussi importante que celle du fer nous a cependant
conduits à aller de l’avant, en gardant à l’esprit l’objectif d’enrichir ce travail ulté-
rieurement par de nouvelles contributions portant sur d’autres régions de ce
continent. Il est en effet certain que l’immense champ de recherche ouvert par
les Routes du fer en Afrique permettra à l’UNESCO de renforcer son pari stra-
tégique sur le dialogue des cultures à travers une meilleure reconnaissance de la
contribution de chaque peuple au patrimoine universel de l’humanité.

Doudou Diène
Directeur
Division du Dialogue interculturel
UNESCO
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 7

Sommaire

Préface 5
Introduction générale, Hamady Bocoum 9

Première partie
Vingt-cinq siècles de travail du fer au Nigéria – Contribution du
Nigéria à la première session du Comité scientifique international
(Abuja, 23-27 février 1995)
Introduction 21
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest, J. F. Jemkur 23
La réduction du fer dans les bas fourneaux — Une industrie vieille de
2 500 ans au Nigéria, E. E. Okafor 35
L’impact du fer en Pays yoruba, I. A. Akinjogbin 49

Deuxième partie
Rencontres sur la métallurgie du fer en Afrique (UNESCO, Paris
12 novembre 1999)
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés.
Apport des études métallographiques, P. Fluzin 59
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource au
service du développement, H. Bocoum 93
Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) : leur fiabilité,
leur signification, G. Quéchon 105
Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit
— Matériaux graphiques pour l’étude des âges anciens du fer,
A. Person, G. Quéchon 115
L’Afrique centrale : le « savoir-fer », P. de Maret 123
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional,
J.-M. Essomba 133
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria, D. A. Aremu 147
8 Sommaire

Au seuil de la métallurgie intensive — Le choix de la combustion lente


dans la boucle du Niger (Burkina Faso et Mali), B. Martinelli 165
Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique
— L’enseignement qui s’en dégage, L.-M. Maes-Diop 189

Bibliographie 195

Annexes
• Liste des auteurs 217
• Consultation internationale de spécialistes (Maputo, 10-13 décembre
1991) – Extraits du rapport 219
• Membres du Comité scientifique international du projet « Les routes
du fer en Afrique » 225

Index
• Spécialistes 229
• Sites 233

Table des illustrations 239


Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 9

Introduction générale
Hamady Bocoum

À l’instigation de la Commission nationale du Mozambique pour l’UNESCO se


tenait à Maputo, du 10 au 13 décembre 1991, la première réunion consultative
des experts pour le lancement du projet « Les routes du fer en Afrique ». Il s’agis-
sait de faire le point sur les connaissances acquises dans ce domaine depuis la
parution de l’Histoire générale de l’Afrique et de lancer éventuellement de nouvel-
les initiatives en fonction des priorités établies par le Comité scientifique du pro-
jet dont les membres étaient dispersés à travers le monde.
Il a fallu, pour arriver à la parution du présent ouvrage, un important travail
de coordination que nous devons à Suzanne Diop, responsable du programme 1,
qui, sous la direction de Doudou Diène, directeur de la Division du dialogue
interculturel de l’UNESCO, s’est posée en véritable « liant » entre des spécialistes
aux profils fort différents. Elle a su, avec une rare lucidité, comprendre les préoc-
cupations des chercheurs, négocier les copyrights avec les éditeurs et faire trans-
crire, dans des conditions parfois difficiles, les communications aux Rencontres
sur la métallurgie du fer en Afrique tenues au siège de l’UNESCO le
12 novembre 1999. Il faut enfin signaler à son actif la coordination du laborieux
travail de collecte des documents fondateurs du projet, dont le directeur de la
publication avait souhaité la parution. Ces précautions étaient en effet indispen-
sables car les contributions qui suivent sont, avant tout, la somme d’efforts par-
fois collectifs, parfois solitaires, mais tendant tous vers un objectif commun : une
meilleure connaissance de la sidérurgie africaine. Ainsi, dès l’amorce du projet, il
a été certes, comme à l’accoutumée, question de diffusion de données techniques,

1. De 1991 à 1997, Mme Ana Elisa Santana Afonso, actuellement membre du person-
nel de l’UNESCO, puis M. Sedate Jobe, membre du Gouvernement de Gambie,
avaient successivement, avec l’aide de Mme Marie-Florette Lengue, assuré la mise
en œuvre du projet.
10 Hamady Bocoum

mais on s’est bien vite rendu compte que le plus important n’était pas seulement
de savoir d’où venait la sidérurgie africaine ; il s’agissait surtout, et c’est peut-être
ici que se trouvait l’essentiel, de savoir quelles étaient les caractéristiques techni-
ques de ce véritable corps de métier que la science moderne pouvait encore
observer in vivo comme une machine à remonter l’histoire des techniques sur
plusieurs millénaires. Il s’agissait également de chercher à comprendre quelles
conséquences sociales, économiques et culturelles une innovation technique
aussi impressionnante avait engendrées. Car, plus que toute autre analogie, elle
rend compte de l’issue, sans surprise, du choc entre le pot de terre et le pot de fer,
tant il est vrai que les sociétés qui ont adopté le fer — ou auxquelles le fer s’est
imposé — ont subi de profondes mutations.
À certains égards, les contributions rassemblées dans cet ouvrage tentent,
chacune à sa manière, d’apporter une réponse à l’une ou l’autre des questions
posées. Ces réponses nécessairement en devenir, tant est soutenu le rythme
auquel se font les découvertes et les remises en cause, doivent donc être considé-
rées comme autant d’étapes qui n’ont de signification que par rapport aux
contextes, parfois déjà anciens, qui présidèrent à leur production. Depuis dix ans
en effet, beaucoup d’encre a coulé à propos du fer en Afrique et dans le monde,
et bien des schémas diffusionnistes ont succombé sous le poids des évidences. Les
publications parues depuis la mise en place de ce projet rendent parfaitement
compte de cet engouement pour la métallurgie africaine et pour les métiers du
feu en général ; elles polarisent une bonne partie des publications archéologiques
et anthropologiques, témoignant de multiples bouleversements en cours 2. Parmi
les nombreux chantiers ouverts, certains méritent cependant un regard très
attentif, car il ne fait pas de doute qu’ils seront à l’origine de points d’inflexion
significatifs dans la conduite des recherches pour les années à venir. À cet égard,
on peut citer la chronologie, l’histoire technique de la sidérurgie et le renouvel-
lement du discours anthropologique qui n’a que trop souffert de comparaisons
de mauvais aloi.
Mais de toutes ces directions de recherche, c’est certainement dans le
domaine de la chronologie que les révélations de l’archéologie prennent place, et
ce dans une ambiance presque toujours suspicieuse. Il y a manifestement, sur ce
terrain, une difficulté à envisager ou à accepter une remise en cause d’hypothèses
diffusionnistes qui, paradoxalement, bien que posées il y a plus d’un demi-siècle,
ne trouvent pas encore la moindre confirmation. Il y a peut-être aussi une résis-
tance culturelle à accepter l’évidence alors que, à l’inverse, le fait de revisiter la
production anthropologique soulève moins de passions (McNaughton, 1988 ;

2. À côté des bibliographies de l’UNESCO (Bocoum, 1995 ; Killick, 1995 ; Miller et


Maggs, 1998), on note de nombreuses publications récentes qui accompagnent les
contributions publiées dans cet ouvrage et qui rendent compte du dynamisme des
recherches sur la sidérurgie africaine.
Introduction générale 11

Herbert, 1993 ; Tamari, 1997, par exemple). De ce fait, la chronologie du fer en


Afrique continue de tirer, comme un boulet, cet avatar qu’est le diffusionnisme
et qui apparaît historiquement comme un instrument de négation des cultures
que l’Europe conquérante rencontra sur son chemin. Celles-ci étaient ainsi pres-
que partout soit trop jeunes, soit trop rustiques ou encore insuffisamment raffi-
nées pour supporter la comparaison.
L’Afrique des ténèbres, cul-de-sac dans les bonnes traditions évolutionnistes,
devait tout au reste du monde, cela allait de soi, même si aucun argument crédi-
ble, aucune preuve ne venait soutenir la thèse. La plupart des précurseurs de
l’archéologie africaine ont donc buté sur cet obstacle sans que leurs positions
soient explicitement idéologiques ou objectivement conscientes. Ce fut le cas de
Mauny (1952, 1953 et 1971), d’Huard (1960, 1964 et 1969), d’Arkell (1966)
et même de Shinnie (1971). Aujourd’hui encore, malgré le poids des preuves, le
thème des origines du fer en Afrique soulève quelques interrogations qui trans-
paraissent dans certaines publications.
C’est dans cette perspective qu’il faut placer les contributions rassemblées
dans cet ouvrage qui se compose de deux parties. La première est consacrée pres-
que tout entière au Nigéria qui, après la consultation internationale de spécialis-
tes organisée par le Mozambique, abrita la première rencontre du Comité
scientifique du projet ; au cours de cette rencontre, la délégation nigériane fit le
point sur l’état des recherches dans ce pays. C’était avant que des publications
décisives ne viennent préciser des questions dont les réponses étaient encore assez
prudentes. Mais déjà les bonnes questions étaient posées. L’étude de Jemkur,
« Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest », alors que les dernières
découvertes de la recherche en Afrique centrale et au Niger, voisin du Nigéria,
étaient encore assez peu diffusées, indiquait déjà très clairement les limites objec-
tives de toutes les hypothèses diffusionnistes, qu’elles soient nord-africaines ou
méroïtiques. Jemkur précisait aussi, et ce n’est pas rien, que la filiation technique
entre le bronze et le fer n’était pas nécessairement pertinente pour l’Afrique.
Plus technique dans son objet, la synthèse d’Okafor, « La réduction du fer
dans les bas fourneaux — Une industrie vieille de 2 500 ans au Nigéria », est une
revue des différents modes opératoires mis au point par les métallurgistes des
régions étudiées sur plus de deux millénaires. C’est une remarquable contribu-
tion à l’histoire technique de la sidérurgie nigériane. À ce propos, la division
administrative de Nsukka apparaît comme un laboratoire particulièrement pro-
pice à l’étude de l’évolution des procédés techniques, en raison de la séquence
chronologique très longue couverte par son fonctionnement : plus de deux mil-
lénaires et demi, entre 760 av. J.-C. et 1950 apr. J.-C. L’auteur, à la suite d’une
analyse minutieuse des produits postréduction, parvient de manière pertinente à
identifier trois stades dans le développement des procédés sidérurgiques mis au
point par les métallurgistes de cette région, procédés qui se sont révélés être
autant de perfectionnements techniques. Partant du taux de wustite à l’état libre
12 Hamady Bocoum

dans les scories étudiées, l’auteur constate qu’il était très élevé durant le premier
stade et pratiquement absent dans le deuxième, ce qui suggère une amélioration
de la maîtrise technique et du rendement. Cette maîtrise ira se renforçant avec
l’utilisation de fondants et le perfectionnement de la soufflerie qui permettront,
d’une part, de réussir d’excellentes réductions avec les plus basses températures
possibles — entre 1 150 et 1 280 °C — et, d’autre part, de réaliser une économie
considérable de main-d’œuvre, les fourneaux fonctionnant désormais à induc-
tion naturelle. Ces observations sont révélatrices de l’état d’esprit des métallur-
gistes qui, loin d’être de simples imitateurs, étaient résolument tournés vers le
perfectionnement, ce qui suppose des capacités d’observation, de comparaison,
de déduction et d’anticipation, autant de marqueurs de l’esprit scientifique. Faire
parler le matériau postréduction conduit ainsi parfois à de surprenantes rencon-
tres qui remettent en cause bien des convictions.
Il est tentant, sur ce point, de rompre avec l’ordre chronologique de présen-
tation des contributions de cet ouvrage pour introduire celle de Fluzin sur « La
chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés. Apport
des études métallographiques » qui est un complément naturel du travail d’Oka-
for. Fluzin aborde ici la sidérurgie, et la sidérurgie directe en particulier, sous un
angle totalement nouveau. L’ingénieur, au contact des dimensions culturelles et
ethnographiques de la sidérurgie directe, a affiné sa démarche en montrant tout
l’intérêt qu’il y a à développer les synergies entre archéologues et ingénieurs du
fait de la complexité des questions posées par la sidérurgie ancienne.
Ainsi, la réduction, l’épuration et l’élaboration apparaissent comme trois
niveaux techniques qui laissent chacun une signature au cœur du produit final,
qu’il soit scorie, objet ou simple battiture. L’archéométrie des vestiges sidérurgi-
ques, qui permet l’élaboration et la mise en œuvre des instruments méthodolo-
giques indispensables à ce type de recherche, est une discipline en pleine
expansion. Elle permet une discrimination de plus en plus fine des indices de
réduction, d’épuration et d’élaboration, et contribue déjà à une meilleure inter-
prétation fonctionnelle non seulement des espaces techniques mais également de
l’efficacité des procédés mis en œuvre par les artisans, compte tenu, d’une part,
de la qualité et de la quantité des matières premières disponibles et, d’autre part,
des contextes sociopolitiques. Les articles d’Okafor et de Martinelli, dans le pré-
sent ouvrage, rendent compte de la fécondité de cette approche, ce qui fait de la
contribution de Fluzin, un véritable « discours de la méthode ».
Après les aspects chronologiques et techniques, le travail d’Akinjogbin, en
s’organisant autour de « L’impact du fer en Pays yoruba », achève de donner de
la cohérence à la contribution du Nigéria. Celle-ci touche ainsi à tous les aspects
de la sidérurgie, même si, pour des raisons évidentes de moyens et de temps, tout
le pays n’a pas pu être couvert. Chez les Yoruba, il semble incontestable que l’uni-
fication du pays sous la férule des partisans d’Oduduwa s’explique en très grande
partie par une supériorité militaire due à l’usage du fer, la forge devenant elle-
Introduction générale 13

même, par la présence d’Ogun Laadin dans le palais de l’ooni, un symbole de la


royauté. Du reste Ogun, dieu du fer, était aussi le dieu tutélaire de la royauté
yoruba, ce qui en dit long sur le rôle de la sidérurgie dans cette société où,
aujourd’hui encore, tous ceux qui ont un métier lié au fer et, par extension, à la
mécanique reconnaissent Ogun comme saint patron. De plus, comme dans de
nombreuses sociétés africaines, Ogun et la forge, notamment l’enclume, sont
invoqués au cours des épreuves destinées à la manifestation de la vérité.
La deuxième partie de cet ouvrage, introduite sous le thème « Rencontres sur
la métallurgie du fer en Afrique », est la synthèse des efforts produits par
l’UNESCO pour organiser les rencontres du 12 novembre 1999 au cours des-
quelles les contributeurs ont revisité les contours chronologiques et le renouvel-
lement des textes techniques et sociologiques que les recherches des dix dernières
années ont apportés à la connaissance du fer en Afrique3.
En Afrique de l’Ouest, notamment au Niger, Quéchon, dans sa contribution
intitulée « Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) : leur fiabilité,
leur signification », fait le point des recherches conduites aussi bien à Termit qu’à
Égaro et note, avec raison, la forte récurrence des dates qui exclut toute méprise
sur les contextes culturels associés aux premiers objets en fer dans ces régions.
L’ancienneté des objets en cuivre et en fer remonte à 1 500 ans avant l’ère chré-
tienne dans cette région où des installations techniques (fourneaux) ont été
datées de 800 av. J.-C.
Particulièrement didactique dans l’approche chronologique est la contribu-
tion commune de Person et Quéchon, « Données chronométriques et chronolo-
giques de la métallurgie à Termit — Matériaux graphiques pour l’étude des âges
anciens du fer ». Il s’agit d’une visualisation graphique des paquets de dates dis-
ponibles sur les sites les plus anciens de l’âge du fer, qui complète et amplifie les
conclusions de Quéchon. Les auteurs montrent de manière concluante l’homo-
généité de la série de Termit où l’on note une forte cohérence dans le recouvre-
ment des dates, entre 3300 et 1400 BP, en association avec une remarquable
continuité culturelle. Toujours dans le domaine chronologique, les données dis-
ponibles pour la région de l’Afrique centrale (Clist, 1995 ; de Maret, 1996 ;
Woodhouse, 1998) sont aussi anciennes que celles obtenues en Afrique de
l’Ouest, alors que le Gabon et le Cameroun présentent aussi des configurations
d’une grande ancienneté. La conclusion logique de cette présentation est que
ni l’Afrique du Nord ni Méroé ne peuvent être retenus comme points de pas-
sage pour la transmission du fer en Afrique, lequel, en raison des cohérences

3. Les rencontres du 12 novembre 1999 ont réuni, au siège de l’UNESCO, les auteurs
suivants : David Aremu, Hamady Bocoum, Pierre de Maret, Bruno Martinelli,
Alain Person et Gérard Quéchon. À ce groupe d’intervenants il faut ajouter ceux
qui, bien que programmés, n’ont pu présenter leur contribution lors de cette ren-
contre, mais ont eu l’amabilité de la faire parvenir à l’UNESCO. Il s’agit de Louise-
Marie Maes-Diop, de Joseph-Marie Essomba et de Philippe Fluzin.
14 Hamady Bocoum

chronologiques et culturelles relevées, est d’une ancienneté qui autorise l’hypo-


thèse d’une invention autonome.
Toujours dans le domaine de l’exploitation des données chronologiques,
Maes-Diop, qui avait déjà entrevu l’autonomie du foyer sidérurgique africain
dans un travail d’une grande rigueur méthodologique (Maes-Diop, 1968), tire
tout simplement la conséquence de l’accumulation des faits qui ne peut plus être
attribuée au hasard. Le Niger oriental a produit, à lui seul, près de la moitié des
dates antérieures à 1500 av. J.-C., lorsque le reste se répartit entre l’Anatolie,
l’Égypte et la Mésopotamie. Juste après le Niger, la région du lac Victoria-
Nyanza (Van Grunderbeek, 1982) se situe entre 1400 et 1200 av. J.-C., ce qui
en fait un foyer quasiment contemporain du Niger oriental, d’où une autonomie
probable. Suivent le Cameroun, la République centrafricaine et le Gabon, bien
avant Méroé et le monde carthaginois. Tirant toutes les conséquences d’une telle
répartition et s’appuyant sur la véracité des échanges anciens entre la vallée du
Nil et le reste de l’Afrique (expéditions d’Herkouf vers 2400 av. J.-C., par exem-
ple), l’auteur n’exclut plus la possibilité d’une introduction précoce du fer en
Égypte à partir du Soudan occidental et central par l’Ennedi. Pour Maes-Diop,
la moralité de cette inversion de la perspective est que toutes les dates trop rapi-
dement rejetées, parce que non conformes à ce que l’on attendait, devraient être
reprises et les résultats des nouvelles recherches diffusés, ce à quoi le présent
ouvrage répond en partie.
Dans « La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource au
service du développement », Bocoum fait le point sur les conceptions diffusion-
nistes à propos du fer en Afrique, du double point de vue culturel et technique,
pour relever qu’aucun des arguments avancés pour contester l’autonomie du
foyer sidérurgique africain ne repose sur un corpus scientifique fiable. Les suspi-
cions possibles sur la fiabilité de certaines mesures restent des cas isolés et maîtri-
sables tandis qu’en face, il existe des faisceaux convergents de dates et de
contextes qui couvrent l’Afrique de l’Ouest et centrale ainsi que la région des
Grands Lacs. Il n’existe aucune série comparable de par le monde à cette période
antique. La cause de l’autonomie du foyer sidérurgique africain semble enten-
due, même si des efforts considérables sont encore nécessaires pour en étudier les
aspects techniques, l’héritage contemporain et l’instrumentation ayant servi au
développement du continent.
La contribution de De Maret, « L’Afrique centrale : le “savoir-fer” », est une
approche transversale qui touche aux aspects aussi bien techniques que culturels.
En effet, par-delà la finesse du jeu de mots, l’auteur relève une série de lignes de
cohérence particulièrement forte dans le domaine du parallélisme symbolique,
qui balisent les routes du fer à travers le monde et renvoient simplement aux
catégories universelles de l’esprit humain. Il s’agit d’une leçon d’humilité en
direction des constructions qui ne voient, au travers des convergences, que le
binôme initiateurs-disciples. Sur le plan technique, l’auteur montre aussi, à tra-
Introduction générale 15

vers l’exemple des Luba, que les artisans-métallurgistes de ce groupe savaient


produire volontairement et affiner la fonte. Cette révélation est un apport
important à l’étude de la sidérurgie africaine où, jusqu’à une période récente,
l’on admettait, a priori, que les métallurgistes ne savaient pas fondre le fer mais
seulement réduire ses oxydes. Il se confirme donc que la sidérurgie africaine nous
réserve encore bien des surprises. Mais il est urgent d’agir avant qu’il ne soit trop
tard.
Comme pour faire écho à cet appel, Essomba, auteur de l’article « Bilan de
l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional », fait le point des résultats
acquis dans le sud du Cameroun, dans le cadre d’un programme systématique
alliant inventaire, fouilles, analyse, formation et restitution. Au bout de dix ans
de recherche, les résultats sont éloquents, avec la mise en évidence d’un âge du
fer daté du premier millénaire avant l’ère chrétienne et des indices de sédentarisa-
tion et de production alimentaire, le tout dans une ambiance culturelle au carre-
four des migrations bantu. Toutefois, malgré ces acquis, l’auteur note, avec justesse,
que beaucoup reste encore à faire pour arriver à une compréhension suffisante
des peuples et des cultures de l’âge du fer au Cameroun central et méridional.
Avec quelques années de décalage, la contribution d’Aremu, « Les routes du
fer en Afrique : une contribution du Nigéria », est une actualisation qui confirme
la pertinence des données livrées en 1995. Le Nigéria apparaît comme une zone
d’activité métallurgique ancienne (VIIIe siècle av. J.-C.) avec une continuité
remarquable car, de nos jours encore, les artisans du fer jouent des rôles actifs
dans la vie économique, sociale et culturelle du pays. Toutes les régions du pays
renferment des sites dont certains ont fait l’objet de recherches poussées. Aremu
confirme ainsi, comme le montraient déjà les études précédentes, que le Pays
yoruba est une fenêtre de lecture idéale pour comprendre les cultures métallurgi-
ques ainsi que les implications sociales, culturelles, économiques et politiques de
l’activité sidérurgique.
« Au seuil de la métallurgie intensive — Le choix de la combustion lente
dans la boucle du Niger (Burkina Faso et Mali) », introduit par Martinelli, est à
la fois une illustration du grand potentiel scientifique de la sidérurgie africaine et
une mise au point méthodologique. L’auteur montre en quoi les dérives autour
du mythe du forgeron ont constitué un obstacle à l’étude de l’univers, autrement
plus complexe, de la sidérurgie africaine qui, aussi longtemps que remontent nos
connaissances, a toujours été et reste un espace d’innovations et de perfectionne-
ments. Dans ce domaine, l’Afrique est un laboratoire sans équivalent. Le choix
de la combustion lente illustre parfaitement cette assertion, en ce sens que les
métallurgistes du Yatenga, tout comme leurs homologues du Nigéria (voir la
contribution d’Okafor dans cet ouvrage), en optant pour la combustion lente et
l’induction naturelle, ont fait le choix de l’efficacité pratique et de l’économie de
la main-d’œuvre qu’aurait nécessitée l’usage d’une soufflerie artificielle. La pers-
pective ouverte par Martinelli est, de plus, intéressante par son parti pris théorique
16 Hamady Bocoum

qui induit que la combustion lente est la résultante de mutations sociales dont
elle illustre les enjeux techniques, culturels et politiques.
Au terme de cette introduction, le lecteur se sera rendu compte, nous l’espé-
rons, de l’importance du chemin parcouru et du renversement de la perspective
qu’il induit. Il semble en effet établi qu’il n’est plus possible, sur cette question,
de continuer à penser que les Africains n’ont été que de simples consommateurs,
car, manifestement, il y a eu innovations. Des innovations multiples touchant à
tous les aspects de la chaîne opératoire technique (combustion lente, induction
naturelle, multiplicité des conceptions architecturales et des matériaux supports,
etc.). En réalité, aucun continent ne présente autant de variations dans la conduite
de la chaîne opératoire de la réduction directe que l’Afrique où les artisans ont
poussé l’ingéniosité jusqu’à produire du fer dans des fourneaux faits de troncs de
bananiers (Celis, 1991b).
C’est pourquoi, si la revue des textes anciens consacrés à cette question indi-
que clairement que leurs auteurs n’ont pas pu éviter le recours commode à la pro-
jection diachronique pour poser comme postulat que les Nègres, esclaves des
Berbères, ne pouvaient être des initiateurs4, les publications récentes prouvent
que les bouleversements en cours sont la conséquence d’un renversement radical
de perspective. Les archéologues africains, comme leurs collègues du reste du
monde, sont de plus en plus libérés des pesanteurs idéologiques, et une plus
grande harmonisation des méthodes de travail est en train de créer un contexte
nouveau fait de rigueur et d’expérimentations de toutes sortes sur la sidérurgie
ancienne. Des convergences très fortes, reposant sur une meilleure maîtrise des
données, autorisent à accréditer l’hypothèse de l’existence d’un ou de plusieurs
foyers d’invention de la sidérurgie en Afrique de l’Ouest et du Centre, ainsi que
dans la région des Grands Lacs.
En élargissant cette perspective, en rapport avec l’évaluation de la sidérurgie
dans le monde, il apparaît que l’histoire technique, où le génie de l’homme
prime sur toute autre considération, est fondamentalement différente de l’his-
toire biologique où la force des contingences détermine et encadre les passages
d’un stade à un autre. Sous ce rapport, le diffusionnisme, en tant que seule expli-
cation de la vulgarisation du progrès technique, trouve ici ses limites car le pos-
tulat de l’origine unique de la sidérurgie et celui, encore plus fonctionnaliste, du
passage obligé par la métallurgie du cuivre pour accéder à celle plus complexe du
fer ne reposent, en fait, que sur des hypothèses non vérifiables, de simples fabri-
cations supposées logiques et nécessaires. Se libérer de cette forme de scientisme
était assurément le premier tabou à dépasser et c’est bien ce qui semble être en
cours car, avec le recul, l’enseignement principal de l’histoire de la sidérurgie est

4. En réalité, tout cela relève de l’ambiance culturelle d’une époque où les colonisés, à
qui on indiquait la direction à suivre, ne pouvaient être perçus, en général, que
comme des consommateurs (Mauny, 1953).
Introduction générale 17

d’avoir établi que de par le monde, dans des contextes très différents, des com-
munautés humaines ont pu répondre avec efficacité aux questions posées par le
développement technique de leurs sociétés.
Au moment où nous terminons cette introduction, nous ne pouvons nous
empêcher d’émettre le souhait que l’UNESCO, en rapport avec la communauté
scientifique, maintienne et renforce « Les routes du fer », car les enseignements
présents et à venir de la sidérurgie africaine contribueront fortement, nous en
sommes persuadés, à l’enrichissement du patrimoine scientifique de l’humanité.
La petite fenêtre ouverte par ce volume ne fait que lever un coin du voile.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 19

Première partie
Vingt-cinq siècles de travail du fer
au Nigéria
Contribution du Nigéria à la première session
du Comité scientifique international
(Abuja, 23-27 février 1995)
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 21

Introduction

Cette première partie est divisée en trois grands exposés consacrés à la réduction
du fer au Nigéria pendant près de 3 000 ans.
Le premier exposé résume la genèse de la métallurgie du fer en Afrique avec
une référence particulière à la situation qui a prévalu au Nigéria. Il récapitule les
théories soutenues par les deux écoles de pensée sur la question des origines du
travail du fer en Afrique, à savoir l’école « diffusionniste » et l’école « autochtone ».
Vient ensuite un résumé des témoignages obtenus sur le Nigéria, à partir de la
culture nok. Des exemples d’activités métallurgiques plus tardives sont égale-
ment mis en relief. Ils concernent d’autres régions du nord du Nigéria (depuis
Daima et Samaru Ouest). Certains résultent de témoignages ethnographiques
actuels.
Le deuxième exposé décrit en détail les techniques de réduction du fer dans
des bas fourneaux au Nigéria, avec une référence plus particulière à la région de
Nsukka où subsistent encore de nombreux vestiges. Ces techniques ont été étu-
diées au cours de recherches archéologiques et ethnographiques. Les résultats des
microanalyses et des macroanalyses effectuées sur des résidus de fusion montrent
que la réduction du minerai de fer a été pratiquée, dans cette région, de 760 cal. 1
av. J.-C. environ, à 1950 cal. apr. J.-C. environ, soit pendant plus de 2 500 ans,
ce qui fait de la région de Nsukka l’un des centres les plus anciens de la métallur-
gie du fer en Afrique. En outre, ces résultats mettent au jour les constituants
minéraux des scories, leur basicité et leur viscosité, ainsi que les températures
auxquelles fonctionnaient les fourneaux. En dernier lieu, ils indiquent la propor-
tion de fer extraite de ces anciens résidus de minerai.
Le troisième exposé traite de l’impact sociopolitique des techniques du fer au
Nigéria en prenant cette fois comme exemple le Pays yoruba. Chacun comprendra,

1. Cal. = date calibrée


22 Introduction

nous l’espérons, que cet impact sociopolitique plus particulièrement mis en


lumière dans le Pays yoruba concerne également, mutatis mutandis, toutes les
autres régions du Nigéria.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 23

Les débuts de la métallurgie du fer


en Afrique de l’Ouest
Joseph Fazing Jemkur

Origine et expansion
Comparée à d’autres régions du continent africain, c’est incontestablement l’Afri-
que de l’Ouest qui, de l’époque du Mungo Park (1813) à nos jours, a fait l’objet
des recherches ethnographiques et archéologiques les plus nombreuses et les plus
fructueuses tant de la part des chercheurs européens que de celle des chercheurs
africains. Une foule de données concernant les techniques métallurgiques de
l’Ouest africain ont été réunies (Jemkur, 1989 ; Okafor, 1992a et b ; Tylecote,
1975). Les chercheurs considèrent depuis longtemps la région comme une zone
particulièrement propice à la métallurgie du fer (Lhote, 1952, p. 270). Toutefois,
jusqu’à la reconnaissance de la culture nok au centre du Nigéria, il n’existait que
très peu d’informations archéologiques à partir desquelles on pouvait établir une
quelconque échelle chronologique pour cette industrie, même si l’on supposait
que la production de fer en Afrique de l’Ouest remontait à des temps très anciens.
Les figurines de terre cuite retrouvées dans la vallée de Nok étaient mélan-
gées, dans les dépôts alluviaux, à d’autres matériaux tels que des haches en pierre
polie et des fragments de fer (Fagg, 1969). Des datations ultérieures de ces
dépôts au carbone 14 (14C) font remonter ces matériaux à une époque comprise
entre 500 av. J.-C. et 200 apr. J.-C. (Barendson et al., 1965). Le contexte archéo-
logique dans lequel ils ont été découverts était, bien entendu, discutable, car il
n’était pas avéré qu’ils appartenaient à la même période tant qu’un lien entre eux
n’était pas établi in situ. C’est ce qui arriva en 1960, avec les fouilles de Taruga et
la découverte de fer, de terres cuites nok et de débris d’objets domestiques bien
associés, datés de la fin du premier millénaire av. J.-C. (Fagg, 1969). Il est certain
que cette région (Fagg, 1969 ; Tylecote, 1975) produisait son propre fer depuis
au moins le IVe siècle av. J.-C., les dates 400 ± 140, ± 100, 280 ± 120, 210 ± 95
av. J.-C. ayant marqué des étapes déterminantes.
24 Joseph Fazing Jemkur

Ces dates précoces placent sans aucun doute (jusqu’aux datations d’Opi,
Okafor, 1991) les fourneaux de réduction du fer de Taruga parmi les plus
anciens découverts en Afrique de l’Ouest. Certains spécialistes de la question y
ont vu la preuve d’une invention indépendante de la métallurgie du fer en
Afrique de l’Ouest (Davies, 1966 ; Maes-Diop, 1968 ; Andah, 1979). Mais
d’autres, qui en ont étudié les aspects techniques, ont fait valoir qu’une telle
invention était peu probable puisque, à l’exception de la Mauritanie, l’Afrique de
l’Ouest n’avait pas connu d’âge du bronze. Partout ailleurs dans l’Afrique subsa-
harienne, l’utilisation du fer succède à l’utilisation de la pierre pour l’outillage,
les ustensiles ménagers et les armes. En l’absence d’une métallurgie intermédiaire
du cuivre et du bronze, l’on voit mal comment, à la fin de l’âge de la pierre, cer-
tains peuples auraient pu découvrir par eux-mêmes l’utilisation du fer et la maî-
triser si rapidement sans aucune influence extérieure (Coghlan, 1941 ; Shinnie,
1967 et 1971 ; Tylecote, 1975b). Certains soutiennent néanmoins que cela
aurait pu se produire accidentellement, du fait des températures obtenues lors de
la cuisson des poteries et de l’inclusion accidentelle de minerai de fer dans le feu.
Mais dans une telle éventualité, il n’y aurait certainement pas eu production
d’une loupe de fer puisque les températures de cuisson de la poterie ne sont com-
prises qu’entre 600 et 800 °C, et que l’on n’utilise, pour les atteindre, ni charbon
de bois, ni fourneau, ni ventilation (Coghlan, 1942).
Désormais, les archéologues qui travaillent dans la région du Nigéria s’inté-
ressent moins à la théorie diffusionniste qu’au degré exact de perfectionnement
de la métallurgie dans un groupe donné. L’étude des méthodes de production du
fer de diverses sociétés peut permettre de mieux préciser certaines similitudes et
contacts culturels à travers tout le continent africain. Toutefois, aux fins du
présent article, nous présentons ci-après les arguments pour et contre la diffusion
de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest et en Afrique subsaharienne en
général (Jemkur, 1992).

Les liens avec Méroé


Ce sont les Calybes d’Arménie, sujets de l’Empire hittite, qui auraient découvert
le fer et l’acier vers la fin de la première moitié du deuxième millénaire av. J.-C.
et la connaissance du travail du fer dans l’ensemble de l’Europe et de l’Asie occi-
dentale remonte, en dernière analyse, à cette source. Dès le Ier siècle av. J.-C., ce
savoir s’était plus ou moins généralisé à l’ensemble du Sud-Ouest asiatique
(Hawkes et Woolley, 1963, p. 564). En revanche, il fallut beaucoup plus long-
temps pour qu’il se propage en Égypte. « Avant le VIIe siècle av. J.-C., le fer sem-
ble avoir été rare en Égypte et utilisé essentiellement à des fins magiques ou
ornementales » (Trigger, 1969, p. 34). Ce n’est qu’à l’époque saïte (665-
525 av. J.-C.) que la réduction du minerai de fer est attestée en Égypte. Ce métal
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 25

est ensuite couramment utilisé dans le pays au Ve siècle av. J.-C. (Trigger, 1969,
p. 36).
Dans la partie du Soudan drainée par le Nil, le travail du fer semble avoir
débuté sous le règne d’Harsiyotef, qui gouverna la région de 416 à 398 av. J.-C.
(Trigger, 1969, p. 43 ; Arkell, 1966, p. 452). De 450 av. J.-C. jusqu’au IVe siècle
apr. J.-C., il existe pour Méroé une séquence archéologique complète, reposant
essentiellement sur les fouilles effectuées dans des nécropoles royales. Les objets
en fer datés d’environ 750 à 400 av. J.-C. sont plutôt rares et de petite taille. Sur
les 1 550 sépultures de Napata antérieures à 400 av. J.-C., 18 seulement contien-
nent des objets en fer (Arkell, 1966, p. 452). Trigger (1969, p. 42) pense que la
présence de tels objets à cette époque témoigne d’échanges commerciaux car il
n’existe aucun indice concret de production de fer. Ce n’est qu’après la chute du
pouvoir méroïtique, en 350 apr. J.-C., que les objets changent de nature. Les
bijoux en fer deviennent rares. De nombreux objets lourds apparaissent pour la
première fois, tandis que le nombre de types d’objets à caractère utilitaire aug-
mente. L’ensemble des outils découverts comprend des couteaux, des épées, des
mors pour chevaux, des haches, des houes et des marteaux. Un grand nombre de
ces objets sont emboîtés, contrairement aux outils pédonculés de la période
méroïtique. Il semblerait que ce soit seulement après la chute du royaume de
Méroé que la métallurgie du fer se soit orientée vers la fabrication d’outils et la
production à grande échelle, entraînant une augmentation de la productivité
(Trigger, 1969, p. 49). Trigger émet quelques réserves quant à cette interpréta-
tion, car les fouilles portent presque uniquement sur des sépultures et non sur
des sites habités. La représentativité des objets trouvés dans les tombeaux reste à
déterminer car ils peuvent être le reflet d’une panoplie d’outils ordinaire.
D’après une publication de Phillipson (1970, p. 5), un morceau de charbon
de bois trouvé en même temps que des fragments et scories de fer, ainsi que des
débris de poteries à la base du plus grand tas de scories, ou « Birmingham 97 »,
remonterait à 514 ± 73 av. J.-C. À son avis, c’est à cette époque que les Méroïtes
commencèrent à produire du fer. D’après Tylecote (1975b, p. 5), le premier âge
du fer à Méroé est représenté par de petits fourneaux bruns, retrouvés immédia-
tement au-dessus d’un niveau daté de 280 ± 120 av. J.-C., qui diffèrent tout à
fait des fourneaux à cuve de Taruga. Les conclusions de Trigger sur la succession
des techniques de la métallurgie du fer à Méroé, de la datation du travail du fer
à Taruga et à « Birmingham 97 », ajoutées aux différences entre les fourneaux de
Taruga et les premiers fourneaux méroïtiques utilisés pour réduire le minerai de
fer, rendent improbable le fait que Méroé ait été un centre de diffusion de la
métallurgie du fer vers l’Afrique de l’Ouest. En fait, Shinnie (1967, p. 14, et
1971, p. 99) estime que la culture méroïtique était exclusivement tournée vers le
Nil puisque l’on ne retrouve pas de matériaux méroïtiques plus à l’ouest que les
rives du ce fleuve. En outre, d’après Trigger (1969, p. 26), la première preuve
d’un contact entre les cultures nilotiques et du Darfur date de 550 apr. J.-C.
26 Joseph Fazing Jemkur

Enfin, Daima est l’un des rares sites archéologiques du Nigéria assez large-
ment décrit dans des publications. Il se trouve à proximité du corridor formé par
le lac Tchad et les monts de Mandara, par lequel des contacts est-ouest se sont
sans doute produits dans la région soudanaise. À ce jour, Daima est le seul site
connu au Nigéria à couvrir la transition entre l’utilisation de la technique de
la pierre — et de l’os — et la métallurgie du fer. Les couches archéologiques
qui y sont associées ont été datées comme suit : 980 ± 650 apr. J.-C. et 450
± 95 av. J.-C (Fagan, 1967, p. 518 ; Shaw, 1969 ; Connah, 1981). L’abondance
des assemblages de pierre polie qui y ont été retrouvés indique une structure néo-
lithique. Dans cette séquence, le morceau de fer le plus ancien a été découvert à
une profondeur de 6,5 m et devrait donc remonter au Ve siècle apr. J.-C. Trois
autres datations ont été publiées ultérieurement (Fagan, 1969, p. 153 ; Connah,
1981) : 1060 ± 90 apr. J.-C., 630 ± 190 apr. J.-C. et 570 ± 100 av. J.-C. En se
fondant sur l’avant-dernière date, Connah a révisé l’estimation qu’il avait faite de
l’introduction d’objets en fer dans la région, la repoussant du Ier au Ve siècle
apr. J.-C. Daniels a ultérieurement effectué une analyse statistique de l’ensemble
des dates concernant le site et en a conclu que le fer y aurait été introduit entre
le Ve et le VIe siècle apr. J.-C. (Willett, 1971, p. 355-356).
Si la métallurgie du fer était vraiment arrivée en Afrique de l’Ouest à partir
de Méroé, elle aurait dû transiter par Daima. Dans ce cas, il devrait y avoir des
témoignages de l’utilisation du fer à Daima à une date très antérieure à celle du
site de Taruga, appartenant à la culture nok, et qui se trouve à près de
1 000 kilomètres au sud-ouest. Or, aucun indice ne va actuellement dans ce sens.
En fait, les éléments disponibles semblent indiquer que l’on pratiquait la réduc-
tion du fer à Taruga quelque 600 à 800 ans avant que ce dernier fasse son appa-
rition à Daima. Ce dernier point et le fait qu’à Méroé les scories étaient coulées
à la romaine (Tylecote, 1975) sembleraient indiquer que, contrairement à ce que
l’on a souvent suggéré, il n’y a eu de diffusion vers les régions appartenant à la
culture nok ni d’objets en fer ni de la technique du travail du fer de Méroé
(Clark, 1969).

Les liens avec Carthage


D’aucuns considèrent que la métallurgie du fer aurait suivi une autre route, par-
tant de Carthage et traversant le Sahara, pour atteindre l’Afrique de l’Ouest
(Mauny, 1952, 1971 et 1978 ; Shaw, 1969, 1978 et 1981, entre autres). Car-
thage a été fondée vers la fin du IXe siècle av. J.-C. par les Phéniciens, qui avaient
déjà établi des comptoirs sur la côte méditerranéenne de l’Afrique à partir de
1100 av. J.-C. environ. Les premiers objets en fer apparaissent dans leurs tombes
dès le VIe siècle av. J.-C. et, dès le IIIe siècle av. J.-C., Carthage était devenue un
important centre de métallurgie et de commerce du fer. L’influence carthaginoise
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 27

s’est fortement exercée sur la côte d’Afrique du Nord, le long du golfe de Gabès,
là où, à l’intérieur des terres, vivait la puissante tribu des Garamantes. Les Car-
thaginois ont également exploré la côte africaine à l’ouest du détroit de Gibraltar
et l’on pense que c’est par le biais de leurs contacts avec les autochtones que les
techniques du travail du fer se sont progressivement répandues à travers le Sahara
jusqu’aux centres situés en Afrique de l’Ouest (Mauny, 1952 ; Shaw, 1969).
La connaissance des techniques métallurgiques pourrait s’être propagée le long
de deux routes qui traversent le Sahara et atteignent l’Afrique de l’Ouest. La pre-
mière part du golfe de Syrte pour rejoindre la boucle du Niger à Gao ; elle aurait
probablement trouvé son point de départ dans la région sous influence carthagi-
noise, la connaissance du fer arrivant alors jusqu’au Nigéria par l’intermédiaire des
Garamantes qui longeaient les rives du fleuve avec leurs chariots. La seconde route
part du sud du Maroc et traverse la Mauritanie en longeant l’escarpement des
dahrs Tichitt et Oualata jusqu’au cours moyen du Niger. Des peintures rupestres
découvertes le long de ces deux routes attestent que des chariots tirés par des che-
vaux ont emprunté ces itinéraires plus de 1 000 ans av. J.-C. (Mauny, 1971).
Il a été déduit de ce qui précède que, après avoir appris la métallurgie auprès
des Carthaginois, les peuples du désert de langue berbère l’ont eux-mêmes trans-
mise aux peuples du Sud parcourant ces routes (Mauny, 1971, p. 66-87). Il res-
sort des recherches archéologiques récentes menées en Afrique de l’Ouest pour
déterminer à quel moment le travail des métaux est apparu dans cette région que
ces explications sont beaucoup trop simplistes. On sait déjà, par les travaux de
Lambert dans le sud-ouest du Sahara, que le minerai de cuivre était extrait et tra-
vaillé aux environs d’Akjoujt, en Mauritanie, au milieu du premier millénaire
av. J.-C., voire avant (Lambert, 1971, p. 9-12). Des indices découverts il y a peu
dans d’autres régions de l’Afrique de l’Ouest, en particulier au Niger, conduisent
également à penser que le cuivre y est apparu avant le fer. On aurait daté au
carbone 14 des ouvrages en cuivre remontant au premier millénaire av. J.-C., et
même plus tôt, dans les régions de Sekkiret et d’Azelik au Niger (Calvocoressi,
1971). Il semblerait donc qu’au Niger, comme dans la région d’Akjoujt, en Mau-
ritanie, le minerai de cuivre ait été exploité dès le début du premier millénaire
av. J.-C. Les techniques métallurgiques pratiquées dans la région d’Azelik
auraient donc pu, en quelque sorte, préparer à l’apprentissage des processus plus
complexes de réduction du minerai de fer.
Des éléments attestant l’existence du premier âge du fer au Nigéria ont éga-
lement été signalés. Trois datations au carbone 14 indiquent l’utilisation
ancienne du fer dans la région du massif de Termit, au sud-est du Niger, à la fin
du premier millénaire av. J.-C. (Posnansky et MacIntosh, 1979, p. 184). Selon
trois autres datations au carbone 14, effectuées dans les mêmes régions du Niger,
la métallurgie du fer remonterait aux trois derniers siècles av. J.-C. à Teguef
n’Agar. Ces dates semblent confirmer l’opinion selon laquelle elle serait arrivée
en Afrique de l’Ouest par le nord.
28 Joseph Fazing Jemkur

Enfin, des datations au carbone 14 du premier âge du fer ont également été
signalées dans la zone de savane et, plus particulièrement, à Jenne-Jeno dans le
delta intérieur du Niger, au Mali. Ce site a fait l’objet de fouilles en 1977
(McIntosh et McIntosh, 1981, p. 1-22). On y a découvert des preuves de l’utili-
sation et de la fabrication du fer par la population qui l’occupait au IIIe siècle
av. J.-C. Les niveaux les plus anciens contenaient du fer et des scories, ainsi que
de grandes quantités de débris d’objets utilitaires. Six datations au carbone 14
ont été effectuées sur le site, dont deux — 210 av. J.-C. ± 50 ans —, qui concer-
naient les niveaux situés à la base, contenaient du fer et des scories. La présence
de scories à Jenne-Jeno a conduit les chercheurs à conclure que le minerai devait
avoir été importé dans la région puisque le site se trouve dans une plaine alluviale
dépourvue de pierres et de fer. Celui-ci pourrait y avoir été transporté via la route
du Sahara occidental, ce qui indiquerait que les régions du delta du Niger ont
très tôt participé à des échanges interrégionaux.
Les éléments actuellement disponibles semblent donc indiquer que le cuivre
était au moins travaillé dans deux centres importants au sud du Sahara, en Mau-
ritanie et au Niger, au premier millénaire av. J.-C. Il est possible que le centre
mauritanien se soit développé grâce à une technique importée de la région médi-
terranéenne par les Berbères libyens, à l’initiative des Phéniciens et des Carthagi-
nois qui cherchaient de nouvelles mines à exploiter dans le sud du Maroc
(Mauny, 1978). Le même processus a également pu s’être produit dans le Sahara
central, à partir de Carthage vers la boucle du Niger, à proximité de Gao, en don-
nant naissance, au Mali et au Nigéria, à une métallurgie du fer plus tardive mais
appartenant encore au « premier âge du fer ». Par ailleurs, le centre de la métal-
lurgie du cuivre de la région d’Azelik, au Niger, pourrait bien avoir facilité la dif-
fusion du fer au Nigéria, ce qui suggère une deuxième route de diffusion
possible. D’après la datation du travail du fer à Taruga et d’après celles, récentes,
effectuées au Niger et dans d’autres parties du Sahara, la route transsaharienne
est probablement, mais pas nécessairement, plus plausible que celle passant par
Méroé. La question de la façon exacte dont la métallurgie du fer est apparue dans
le sud du Sahara n’est pas encore éclaircie. Les nouveaux éléments qui tendent à
prouver que le travail du cuivre a précédé celui du fer au Niger pourraient se
révéler déterminants, mais nous sommes encore loin de comprendre le contexte
socio-économique qui a précipité cette transformation technologique décisive.

Les liens locaux


Il apparaît maintenant de plus en plus clairement que la théorie diffusionniste
telle qu’elle est présentée ci-dessus est beaucoup trop simpliste et, dans la plupart
des cas, dénuée de preuves concrètes pour l’étayer. À la lumière des travaux
archéologiques récemment entrepris sur ce sujet en Afrique subsaharienne, appa-
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 29

raît aujourd’hui une école de pensée selon laquelle la métallurgie du fer peut
avoir débuté de façon indépendante en Afrique de l’Ouest (et, à dire vrai, en
d’autres endroits de l’Afrique subsaharienne). Les auteurs de cette théorie
(Lhote, 1966 ; Maes-Diop, 1968 ; Trigger, 1969 ; Schmidt et Avery, 1978 ; Rus-
tad, 1980 ; Andah, 1979 et 1981) ont souligné les nombreuses lacunes de la
thèse diffusionniste. Par exemple, certains de ces savants (Maes-Diop, 1968 ;
Andah, 1979) s’accordent sur le fait que la réduction du minerai de fer ne néces-
site pas une température très élevée (de 1 100 à 1 300 °C) et que, par consé-
quent, la métallurgie du fer peut s’être développée directement à partir des
techniques de cuisson de la poterie (Okafor, 1992a et b). Le fait qu’aucun élé-
ment n’atteste l’antériorité de la connaissance de la métallurgie sur celle de la
métallurgie du fer dans les régions appartenant à la culture nok et opi ne peut
être utilisé comme argument pour réfuter la théorie du développement local de
la technique du travail du fer dans la région. Il a également été observé que la
latérite ferrugineuse est largement répandue en Afrique de l’Ouest, soit qu’elle
affleure à la surface du sol, soit qu’elle forme des gisements souterrains qui
auraient pu être connus et exploités il y a longtemps (Okafor, 1992a). Il est donc
possible qu’un âge du fer se soit développé sans avoir été précédé par un âge du
cuivre et du bronze. Les informations recueillies sur le terrain laissent à penser
que la métallurgie du fer était largement répandue dans de nombreuses régions
d’Afrique. Les quelques dates disponibles à cet égard pour certaines régions de
l’Afrique subsaharienne sont aussi anciennes, voire plus anciennes, que celles
obtenues pour les régions « donatrices ». Par exemple, en dehors de la région de
la culture nok pour laquelle on sait que la métallurgie du fer a été pratiquée au
moins dès le IVe ou le Ve siècle av. J.-C., d’autres datations anciennes, remontant
au Ve siècle environ av. J.-C. ont été obtenues en Éthiopie, à Matara, ainsi que
dans la région bahaya du lac Victoria, où la datation au carbone 14 semble indi-
quer qu’elle existait en 500 av. J.-C. (Schmidt et Avery, 1978).
Il a également été observé que l’argument en faveur d’une diffusion à partir
de l’Afrique du Nord repose uniquement sur la datation des cultures phéni-
cienne et carthaginoise dans cette région. Or, aucun matériau provenant de Car-
thage ou d’Utique, ni aucun site comportant des matériaux phéniciens, n’est
antérieur au VIIIe siècle av. J.-C. (Warmington, 1969). Bien que les Carthaginois
aient produit à grande échelle des armures dès le IIIe siècle av. J.-C., selon Mauny
(1971), « c’est seulement à partir du VIe siècle av. J.-C. que le fer apparaît dans
leurs tombes ; à partir du IIIe siècle, il remplace nettement le bronze comme
matériau d’usage courant ». Les 100 à 200 ans qui séparent la présence de la
technique du travail du fer à Carthage de son apparition dans la région apparte-
nant à la culture nok rendent sa diffusion possible mais néanmoins improbable
en raison de la brièveté de cet intervalle (Diop, 1973 ; Andah, 1979).
Étant donné que nous manquons actuellement d’indices concrets pour dater
les « débuts » de la métallurgie du fer dans la plupart des régions de l’Afrique
30 Joseph Fazing Jemkur

subsaharienne et que nous sommes conscients de ne savoir encore que peu de


chose sur l’époque et la façon dont elle a commencé en Afrique subsaharienne, il
nous est difficile de soutenir à tout prix la théorie selon laquelle il s’agit d’un
savoir-faire exogène.

Le début de la métallurgie du fer au Nigéria


L’on s’est aperçu que les vestiges de fourneaux de Taruga appartenaient à des
fourneaux à cuve où l’on ne pratiquait pas la coulée des scories fondues (Tyle-
cote, 1975a et b). Tous possédaient des cuves aux fines parois de boue surplom-
bant des fosses peu profondes. Tylecote a estimé que la hauteur totale des
fourneaux variait de 1 à 2 mètres ou davantage pour les plus grands, qu’ils étaient
indépendants les uns des autres car l’on a relevé la présence de plusieurs tuyères
à proximité de leur base (Tylecote, 1975b, p. 5). Ces dernières avaient un diamè-
tre de 20 à 30 centimètres environ mais étaient plus courtes que celles des four-
neaux méroïtiques. Tylecote a établi une distinction entre les fourneaux de
Taruga, qui sont à fosse, et ceux où l’on coule les scories fondues. Comme il avait
auparavant laissé entendre que la coulée constituait un progrès technique (Tyle-
cote, 1965, p. 193), on peut considérer que les fourneaux de Taruga représentent
l’une des premières étapes du développement de la métallurgie du fer en Afrique
de l’Ouest. On les considère comme appartenant au type B. De par leur datation
entre le Ve et le IIIe siècle av. J.-C., ils sont contemporains de ceux retrouvés dans
les fouilles méroïtiques. Tylecote en a conclu que le Nigéria ne tenait manifeste-
ment pas sa technique du travail du fer du Soudan mais d’ailleurs (Tylecote,
1975b, p. 4).
Il y a peu de temps encore, même les dates définies pour la zone de culture
nok semblaient sujettes à caution par rapport au reste des indices archéologiques
rassemblés, car il semblait exister un long hiatus entre la tradition nok du fer et
les témoignages ultérieurs, au Nigéria ou ailleurs (fin du premier millénaire ou
après). Comme on l’a toutefois fait observer précédemment, les premières pièces
de fer provenant du tertre de Daima, au nord-est du Nigéria, ont été datées de
630 ± 190 apr. J.-C. (Connah, 1971, p. 71). Les vestiges de fourneaux de réduc-
tion du fer exhumés sur la colline de Dala, dans la ville de Kano, sont eux aussi
datés de 635 ± 95 apr. J.-C. (Willett 1971, p. 368). Cette date semble corres-
pondre étroitement à celle des sites de Daima et de Zaria dans la vallée de
Kubanni. On a trouvé dans cette dernière, à Samaru Ouest, des vestiges de plu-
sieurs fourneaux datés de 685 ± 80 apr. J.-C., 750 ± 155 apr. J.-C., 930 ± 95
apr. J.-C. et 940 ± 75 apr. J.-C. (Sutton, 1976, p. 18). Ces ruines étaient accom-
pagnées de tas de scories, de fragments de tuyères et de ce qui semblait être des
fosses de coulée de scories. L’un des fourneaux a été complètement exhumé avant
d’être emporté pour être exposé. Il possédait une cuve cylindrique ressemblant à
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 31

un baril d’environ 1 mètre de haut et de moins de 1 mètre de diamètre (Sutton,


1976, p. 4). Une autre caractéristique de ces fourneaux était une buse cylindrique
sortant d’environ 20 centimètres de la base du mur. D’un calibre de 35 centi-
mètres de haut et de 25 centimètres de large, cette buse était inclinée vers le bas
en direction d’une fosse à scories. Sutton a suggéré qu’elle pouvait avoir servi de
conduit d’admission des orifices des tuyères dans le reste du fourneau.
Sutton a identifié deux types de tuyères dans la région : les unes, en prove-
nance de Samaru Ouest, étaient coniques et massives, d’un diamètre de
5 centimètres à une extrémité et de 12 centimètres à l’autre, leur diamètre exté-
rieur pouvant atteindre 30 centimètres. Elles contrastaient avec les tuyères plus
fines trouvées à Tsauni Nord et à Makera (Sutton, 1976, p. 5), d’un diamètre de
3 à 5 centimètres et de 10 centimètres seulement au maximum à l’extérieur.
Étant donné que les fourneaux de Samaru avaient environ 1 mètre de hauteur,
ils pourraient bien avoir appartenu au type C et l’on pourrait, par conséquent,
penser qu’ils étaient associés à des tuyères massives. Si toutefois la distinction
entre les deux types de tuyères représente à la fois un changement dans le temps
et une évolution technique, alors les indices provenant de Samaru et de Taruga
pourraient fournir des preuves de l’évolution progressive des fourneaux d’Afri-
que de l’Ouest du type B vers le type C.
De récentes études ethnographiques et historiques sur les techniques métal-
lurgiques dans les États actuels de Kaduna et du Plateau tendent à confirmer ce
qui précède. On y observe en effet très nettement la présence de fourneaux équi-
pés de tuyères massives (Jemkur, 1989), très semblables à ceux décrits à Samaru
Ouest par exemple. Ce type de fourneau (indépendant) est largement répandu
dans le sud de l’État de Kaduna où il existe des centaines de vestiges de ce genre.
À en juger par le nombre de fourneaux et la forte concentration de déchets, il est
évident que la région a connu dans un passé récent une activité métallurgique à
grande échelle. Les fourneaux indépendants que l’on y rencontre sont toujours
dans un mauvais état de conservation et se trouvent le plus souvent à l’air libre,
dans des vallées sablonneuses proches d’une rivière. Aujourd’hui, on y distingue
à peine, au niveau du sol, des cercles ne dépassant pas, pour la plupart, de 10 à
40 centimètres de haut. Dans certains endroits, ils couvrent une très large éten-
due de terrain et sont généralement regroupés par 6 ou 8. Cette configuration est
commune à de nombreuses régions du Nord du Nigéria et en particulier aux
États de Bauchi, du Plateau, de Kano, de Katsina et de Sokoto.
Les fourneaux encastrés constituent le second type de fourneaux de la région.
Ils sont mieux préservés puisque la plupart d’entre eux sont presque intacts. Ils
étaient construits le long des berges des cours d’eau, l’arrière étant naturellement
formé par la berge, parfois légèrement creusée, et l’avant par un mur ventru.
Cette préservation quasi parfaite s’explique par l’absence de l’activité animale et
humaine, à l’exception de celle des rongeurs, et de l’action de l’érosion. Ces four-
neaux mesuraient généralement 1 mètre de haut et chacun d’eux comportait
32 Joseph Fazing Jemkur

deux ouvertures. À de légères différences près dans les détails, les procédés utilisés
et le matériel de réduction du minerai collecté sur le terrain semblent être iden-
tiques dans la majeure partie de la zone de savane du Nigéria. On trouvera ci-
après la description des procédés gardés en mémoire par les anciens de Kurmin
Mazuga, de Nok et d’Ashafa (tous dans le sud de l’État de Kaduna). Kurmin
Mazuga et Ashafa sont habités par le peuple ikulu (bakulu), alors que Nok est
habité par les Jaba (Ham), groupes ethniques qui ont la réputation d’être des
experts en métallurgie dans la région et auxquels la plupart des autres groupes
ethniques achètent du fer malléable.
Le fer était généralement produit par réduction du minerai, lequel provenait
essentiellement de mines peu profondes qui, cependant, ont pu parfois atteindre
plus de 10 mètres de profondeur. On localisait le minerai riche en fer en obser-
vant le type de sable déposé par les eaux de ruissellement le long des chemins,
dans les fermes, le long des cours d’eau, etc. Le minerai de fer, qui se présentait
généralement sous la forme d’une roche relativement tendre, était concassé
manuellement à l’aide d’outils de pierre. Le minerai écrasé était alors mélangé
avec du charbon de bois qui fournissait la chaleur nécessaire à la réduction
directe. Ce charbon de bois était habituellement fabriqué à partir de bois dur
comme l’acacia ou le bishiya (chez les Hawsa), espèces que l’on trouve couram-
ment dans la région. Le mélange de minerai et de charbon de bois était alors
versé dans les fourneaux de réduction où il était allumé. Les fourneaux étaient
ventilés par la base. Une fois que le fourneau avait atteint une température éle-
vée, le métal fondu s’écoulait doucement par un trou pratiqué dans la paroi du
fourneau jusqu’au moule situé dans le sol. Celui-ci était une simple cavité creu-
sée en dessous du fourneau. On laissait alors le fer fondu se solidifier sous forme
de lingot (fer malléable) qui servait ensuite à fabriquer divers articles comme du
matériel et des outils agricoles. Les instruments utilisés pour le travailler et le
transformer en outils étaient tous en granit solide jusqu’à l’arrivée des Européens
qui en introduisirent de plus perfectionnés. Les différentes étapes de la réduction
du minerai de fer s’accompagnaient de nombreux rituels chez les Ikulu et les
Jaba. Les préparatifs exigeaient que l’on tienne compte de croyances selon les-
quelles certaines personnes auraient été susceptibles d’affecter spirituellement le
processus. Ces peuples préféraient construire leurs fourneaux sur les berges des
cours d’eau. Aux dires de l’un de leurs anciens : « Notre peuple fondait le fer près
des rivières et obtenait un métal différent de celui des Hawsa. Ces derniers cons-
truisaient leurs fourneaux comme des fourneaux à briques et ne les édifiaient pas
sur les berges des cours d’eau. »
Il ressort de nos recherches que dans la zone de savane du nord du Nigéria
et, en fait, dans la plupart des régions du Nigéria et de l’Afrique de l’Ouest en
général, la métallurgie du fer était largement répandue et a prospéré pendant
plus de 2 500 ans avant l’arrivée des Européens, contrairement à ce que préten-
dent certains des premiers ouvrages européens selon lesquels les Africains de
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 33

l’Ouest ne connaissaient pas le fer avant l’arrivée des Blancs (McPhee, 1926). Les
latérites de la plupart des régions de l’Afrique de l’Ouest se prêtaient à l’exploita-
tion du fer dans le passé, comme en témoignent les vestiges métallurgiques que
l’on peut observer. Le fer avait une grande importance économique dans ces
régions ; il était largement commercialisé jusque dans des contrées lointaines. Par
exemple, selon un entretien qui s’est déroulé à Daura (État de Katsina), la réduc-
tion directe a été pratiquée dans la région jusque dans les années 1940, époque
où il a fallu la stopper de force, alors qu’auparavant Daura vendait des quantités
considérables de fer au Territoire français.
L’instauration de l’autorité britannique au Nigéria mit fin à cette industrie
locale autrefois prospère. Partout les habitants furent contraints d’abandonner
l’art de la métallurgie traditionnelle et leur production fut remplacée par du fer
moins coûteux importé d’Europe. L’arrivée des Britanniques a réussi à détruire
les fondements industriels tellement nécessaires à notre développement culturel
et technique. En effet, le niveau de développement technique influe considéra-
blement sur la culture d’un peuple et constitue, par conséquent, l’un des aspects
de son développement culturel.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 35

La réduction du fer dans les bas fourneaux


Une industrie vieille de 2 500 ans au Nigéria
Edwin Eme Okafor

Comme le montre bien la première partie de cette exposition1, 2 500 ans se sont
écoulés depuis le début de la production, par les peuples d’Afrique, d’outils en
fer à partir de minerai qu’ils fondaient eux-mêmes. Ceci n’avait rien d’accidentel
puisque partout sur le continent africain, d’est en ouest et du nord au sud
(Andah, 1979), on trouve ce minerai de fer qui, quantitativement parlant, se
place au troisième rang des ressources minérales de ce continent après la silice et
l’alumine. Il existe sous forme d’oxydes : l’hématite, la sidérite, la goethite et la
magnétite (Tylecote, 1987). Chacun de ces oxydes a été exploité et réduit par-
tout où l’on en trouvait en Afrique (Okafor, 1984a, b et c). L’argile réfractaire,
autre élément nécessaire au travail du fer, qui servait à fabriquer les tuyères, les
fourneaux et le foyer, est elle aussi très répandue dans cette région du monde
(Childs, 1984). Le combustible, essentiellement du bois et/ou du charbon de
bois, était facilement disponible. Enfin, la main-d’œuvre n’était pas difficile à
trouver, notamment pendant la période qui a précédé la traite négrière transatlan-
tique (Okafor, 1992a).
Tous les éléments nécessaires à cette industrie étant facilement disponibles
en Afrique, il n’est pas étonnant que l’on y observe une grande diversité et une large
variété de techniques et de matériels destinés à sa pratique (Schmidt, 1977). Aucun
autre continent n’abrite une telle diversité de fourneaux, aux fonctions aussi variées
(Kense, 1983 ; Pole, 1985 ; Sutton, 1985). On observe la même diversité dans le
traitement et la production du combustible. Mais, point important, ce n’est qu’en
Afrique que l’on peut observer une production d’acier à forte teneur en carbone
dans des bas fourneaux (Schmidt et Avery, 1978 ; Bellamy et Harbord, 1904).

1. À l’occasion de la première réunion du Comité scientifique des routes du fer à


Abuja, le Comité d’organisation avait présenté une remarquable exposition sur le
fer au Nigéria, des origines à l’époque industrielle.
36 Edwin Eme Okafor

Pratiquement toutes les divisions administratives du Nigéria recèlent des ves-


tiges de réduction du minerai de fer dans des bas fourneaux. Ces vestiges ont fait
l’objet de relevés cartographiques et ont été étudiés notamment à Argungu,
Daura, Katsina, Zaria, Maïdi, Chawai, Ashafa, Kurmin Mazuga, Zagomida,
Nok, Taruga, Birom et Combe dans le Nord (Jemkur, 1989). Dans l’Ouest, on
en trouve à Oyo, Ola Igbi (Bellamy et Harbord, 1904), Igbira, Ogbomoso et
Esie (Aremu, 1990). De tels vestiges ont également été étudiés et cartographiés à
Awka (Okafor, 1976), Ukehe (Ekechukwu, 1989), Aku (Njoku, 1986), Opi,
Abakaliki, Orba, Umundu, Owerre-Elu, Lejja, Abiriba, Awgu et Okigwe (Oka-
for, 1984b et 1992a).
Bien que des vestiges de l’activité métallurgique du fer aient été trouvés dans
des régions du Nigéria autres que la division administrative de Nsukka (Bellamy
et Harbord, 1904 ; Effah-Gyamfi, 1981 ; Fagg, 1969 ; Nicklin, 1981 ; Okafor,
1983 ; Sassoon, 1964 ; Sutton, 1976 ; Tylecote, 1975), aucun ne peut être com-
paré à ceux de Nsukka, que ce soit en quantité ou du point de vue de la variété
des techniques employées. Dans la division administrative de Nsukka, des ter-
tres, des agrégats et des blocs cylindriques de scories datant du début de l’âge du
fer ont été découverts à Owerre-Elu, Opi, Orba, Umundu, Lejja, Aku et Ukehe.
Les recherches ethnographiques, ethno-archéologiques et archéologiques effec-
tuées par Njoku (1986), Okafor (1984a) et Onyeke (1986) montrent qu’il exis-
tait de nombreux systèmes de réduction du fer comportant des appareils et des
techniques différents au sein d’un seul et même groupe ethnique. Malheureuse-
ment, la dureté du climat a détruit la plupart des vestiges de cette industrie, si
bien que seuls ont pu subsister des tuyères, des fragments de fourneaux et des
scories, pratiquement indestructibles (Okafor, 1992b ; Tylecote, 1987). Il est
heureux que j’aie pu récemment utiliser les techniques scientifiques les plus
modernes pour étudier la réduction du fer dans des bas fourneaux de la région
de Nsukka (Okafor, 1992a). Les résultats de cette étude serviront de base de dis-
cussion sur les procédés employés pour ce travail au Nigéria et dans d’autres
régions d’Afrique.

Le procédé de réduction du minerai de fer au Nigéria


D’après 11 datations au carbone 14, effectuées par l’Accelerator Mass Spectro-
metry Laboratory (Laboratoire de spectrométrie de masse par accélérateur) de
l’Université d’Oxford, la réduction du fer dans la division de Nsukka a été prati-
quée probablement sans interruption depuis l’an 760 environ av. J.-C. jusqu’à
1950 apr. J.-C. (Okafor, 1992a et 1992b ; Okafor et Phillips, 1992). La datation
des sites de réduction du minerai de fer de Nsukka englobe toutes les dates mesu-
rées au carbone 14 acceptées et publiées pour les sites métallurgiques anciens
d’autres régions du Nigéria (Anozie, 1979 ; Calvocoressi et David, 1979 ;
La réduction du fer dans les bas fourneaux 37

Connah, 1968 et 1981 ; Fagg, 1969 ; Shaw, 1969, 1978 et 1981 ; Sutton,
1976). Au cours de la longue période où elle a été pratiquée dans la région, cette
industrie a subi quelques modifications techniques qui l’ont perfectionnée et en
ont progressivement accru l’efficacité. Durant la période la plus ancienne, les
méthodes d’extraction du fer étaient peu efficaces et exigeaient beaucoup de tra-
vail alors que, par la suite, elles sont devenues plus efficaces et ont exigé moins de
travail. D’après les données fournies par la recherche actuelle, la réduction du
minerai de fer à Nsukka se répartit chronologiquement en trois phases. Chacune
de ces phases correspond à un procédé spécifique.

LA PREMIÈRE PHASE DE LA RÉDUCTION DU MINERAI


DE FER À NSUKKA

La première phase de réduction du minerai de fer à Nsukka est représentée par


les sites d’Opi, de Lejja et d’Aku. Trois datations au carbone 14 —
2305 ± 90 BP, 2170 ± 80 BP et 2080 ± 90 BP2 — effectuées dans des condi-
tions sûres par spectrométrie de masse par accélérateur (Okafor et Phillips, 1992)
sont disponibles pour cette phase. Calibrées selon la courbe d’étalonnage de
Stuiver et Pearson (1986), en utilisant le programme d’étalonnage de Van der
Plicht et Mook (1989), ces dates se situent, avec une probabilité atteignant
98 %, entre 765 cal. av. J.-C. et 75 cal. apr. J.-C., ce qui correspond à la période
la plus ancienne de réduction du minerai de fer à Nsukka. Le fer était alors fondu
dans des fourneaux à tirage forcé, reliés par des rigoles à des fosses de coulée des
scories. Ces fourneaux mesuraient entre 0,85 et 1,25 m de diamètre et avaient de
fines parois d’environ 40 millimètres d’épaisseur. Les scories étaient coulées par
intermittence dans les fosses par le biais des rigoles de connexion et s’y solidi-
fiaient sous forme de blocs cylindriques.
Ces blocs pèsent de 43 à 47 kilos et ont une densité moyenne de 3,89 g au
centimètre cube. Leur couleur varie du brun foncé (MC 7,5 YR 4/4) au brun
soutenu (MC 7,5 YR 5/83). Ils ne sont pas rouillés et certains d’entre eux sont
légèrement magnétiques sur les surfaces fraîchement coupées. Ils ne comportent
pas d’inclusions. Les analyses des échantillons prélevés sur ces blocs montrent
que leur basicité est très faible, de 0,03 en moyenne, avec un écart type de 0,01.
Leur température de fusion varie entre 1 155 et 1 450 °C.
D’après les analyses effectuées au microscope électronique à balayage et avec
microanalyseur par rayons X à dispersion d’énergie sur des scories provenant des
sites de réduction du minerai de fer de Nsukka de la première phase, celles-ci se
composent essentiellement de fayalite. En dehors de la fayalite, les scories des
autres grandes phases sont constituées d’hercynite et de wustite. La leucite et les

2. BP : before present, 1950 étant considéré comme l’année 0 (NDLR).


3. D’après le code des couleurs de Mursell.
38 Edwin Eme Okafor

verres représentent les phases mineures des scories de cette période. Ces phases
sont représentées par différentes textures et formes structurelles.
Les scories d’Opi contiennent davantage d’hercynite (22,47 %) que toutes
les autres scories en provenance de Nsukka. L’hercynite a une température de
fusion élevée : 1 780 °C. Par conséquent, toutes les scories d’Opi qui ont une
forte teneur en silice (Al2O3) et qui contiennent de l’hercynite ont des points de
fusion variant de 1 350 à 1 450 °C. Il semble que pour tenter de liquéfier cette
gangue à forte teneur en silice, les fondeurs d’Opi aient produit des scories ayant
des températures de fusion élevées.
Le phénomène s’est produit fortuitement pendant la première phase de réduc-
tion du fer à Nsukka. Cette technique de liquéfaction des scories à haute tempéra-
ture a été améliorée, lors de la dernière phase, par l’utilisation de silice comme
fondant pour abaisser le point de fusion de la gangue et extraire davantage de fer
du minerai. La silice formait du silicate de fer et un peu d’oxyde, libérant ainsi du
fer réduit. L’opération produisait des scories dépourvues de wustite, caractéristique
de la phase tardive de réduction du minerai de fer à Nsukka étudiée ci-après.
La wustite, oxyde de fer à l’état libre, était présente dans tous les échantillons
de scories appartenant à la première phase de réduction du minerai de fer à
Nsukka (sauf trois). Dans les scories de Nsukka, les oxydes de fer à l’état libre, ou
wustite, présentent des structures dendritiques de taille variable. En tant
qu’oxyde de fer à l’état libre, la wustite constitue l’avant-dernier stade de la
réduction du minerai de fer en fer métal (Morton et Wingrove, 1969, p. 1557),
le pourcentage de wustite dans les scories est censé indiquer le degré d’efficacité
d’une opération donnée de réduction du minerai. Plus la teneur en oxyde de fer
à l’état libre d’une scorie est élevée, moins l’opération de fusion est efficace
(McDonnel, 1986, p. 86). Autrement dit, la teneur en wustite des scories variera
en fonction de l’habileté des fondeurs à en réduire le plus possible le taux résiduel
dans les scories. Les améliorations techniques intervenues au fil du temps expli-
queraient l’efficacité accrue de l’opération et la baisse de la teneur en wustite des
scories (Morton et Wingrove, 1972, p. 480). Partant de là, il semblerait que les
fondeurs des sites appartenant à la première phase utilisaient des procédés
d’extraction du fer moins efficaces que ceux en usage durant les phases moyenne
et tardive dans la division administrative de Nsukka. Bien que la wustite ne repré-
sente que 6,2 % des composants minéraux des scories d’Opi, ce pourcentage n’en
est pas moins le plus élevé comparé à celui des scories datant des autres phases.

LA PHASE MOYENNE DE LA RÉDUCTION DU MINERAI


DE FER DANS LE DISTRICT DE NSUKKA

La spectrométrie de masse par accélérateur a donné deux datations très précises,


1060 ± 69 BP et 570 ± 60 BP, pour la phase moyenne de la fusion du fer à
Nsukka. L’étalonnage de ces deux datations pour deux écarts types donne une
La réduction du fer dans les bas fourneaux 39

fourchette allant de 810 à 1 435 cal. apr. J.-C., ce qui permet de penser que la
phase moyenne de réduction du fer à Nsukka s’est probablement déroulée entre
ces deux dates (Okafor, 1992a et 1992b). Les sites de réduction du minerai de
fer correspondant à cette phase se trouvent sur l’axe Owerre-Elu-Nru-Isiakpu-
Edeoballa. À cette époque, l’opération se faisait encore dans des fourneaux à cuve
à tirage forcé. Les scories étaient encore coulées, mais non dans des fosses. On les
laissait s’écouler du fourneau et se répandre sur le sol, tout autour du fourneau,
où elles formaient ainsi des scories plates à surface régulièrement ondulée.
Ces scories sont typiques et ont subsisté jusqu’à nos jours sous forme
d’agglomérés plats pesant de 1,5 à 4,2 kilos. Elles sont très denses, leur densité
moyenne étant de 4,2 g par centimètre cube. Certaines sont faiblement magné-
tiques sur les surfaces fraîchement coupées. Elles ne sont pas rouillées et ne com-
portent pas d’inclusions. Elles sont entièrement de couleur mixte, brun foncé
(MC 7,5 YR 3/4) et noir (MC 7,5 YR 2/10). En coupe, elles ont une couleur gris
bleuté et une structure grossièrement vésiculaire à proximité de la surface. Les
résultats d’analyse des échantillons de ces scories montrent qu’elles ont une très
faible basicité (moyenne : 0,02, écart type : 0,01).
La plupart des scories appartenant à cette phase ne contiennent pas de wus-
tite à l’état libre, ce qui suggère une amélioration et une bonne maîtrise des tech-
niques d’extraction du fer réduit. L’amélioration a également été observée dans
la plupart des scories de cette période ayant un point de fusion relativement peu
élevé. Soixante-quinze pour cent de la quantité totale des scories analysées de
cette phase moyenne ont un point de fusion inférieur à 1 200 °C. Les analyses
effectuées au microscope électronique à balayage et au spectromètre à rayons X à
dispersion d’énergie sur des scories appartenant à la phase moyenne de la période
de réduction du minerai de fer à Nsukka montrent qu’elles sont constituées de
fayalite, d’hercynite et de quelques petits morceaux de verre qui se trouvent dans
les vésicules. Certaines contiennent également des dendrites blanches de wustite.
L’élément minéral le plus abondant dans les scories de la phase moyenne est le
silicate de fer ou fayalite (Fe2SiO4). Selon des calculs volumétriques effectués sur
les minéraux contenus dans ces scories, la teneur en fayalite est de 76,42 %.
Sur les 12 échantillons de scories provenant d’Owerre-Elu qui ont été étu-
diés, 5 seulement contiennent de la wustite. Les 7 autres en sont dépourvus. La
wustite existe sous forme de dendrite et entre, pour 3,92 %, dans la composi-
tion minérale des scories de la phase moyenne analysées au cours des présentes
recherches.
Le point où se situent les scories d’Owerre-Elu sur le diagramme de la phase
ternaire, FeOAl2O3SiO2, illustre les évidentes variations de composition des sco-
ries provenant de ce site. Sept d’entre elles ne contiennent pas de wustite et ont
un point de fusion inférieur à 1 150 °C, tandis que les 5 échantillons qui en
contiennent ont des points de fusion compris entre 1 150 et 1 325 °C. On com-
prendra peut-être mieux les informations fournies par les scories d’Owerre-Elu
40 Edwin Eme Okafor

en analysant les indications que l’on peut retirer de la datation radiométrique du


charbon de bois trouvé avec elles sur les sites. D’après les datations au
carbone 14, le site d’Owerre-Elu appartient à la phase moyenne de réduction du
fer à Nsukka, laquelle a probablement duré de l’an 800 environ à l’an 1430 cal.
apr. J.-C. La phase tardive (représentée par les sites d’Orba et d’Umundu étudiés
ci-après) a duré de 1430 à 1950 cal. apr. J.-C.
Ces éléments permettent de penser que les scories provenant d’Owerre-Elu,
qui ne contiennent pas de wustite et dont le point de fusion est relativement bas
(elles sont à ce titre très semblables à celles d’Orba et d’Umundu), appartiennent
plutôt à la fin de la phase moyenne, tandis que les autres échantillons, qui
contiennent de la wustite et ont un point de fusion plus élevé (elles sont à cet
égard analogues aux scories d’Opi), appartiennent au début de la même phase.

LA PHASE TARDIVE DE LA RÉDUCTION DU MINERAI


DE FER À NSUKKA

La phase tardive de la réduction du minerai de fer à Nsukka s’étend des environs


de l’an 1430 aux environs de 1950 cal. apr. J.-C., selon 6 datations de haute pré-
cision réalisées par spectrométrie de masse par accélérateur dans des conditions
sûres, soit 200 ± 80 BP, 205 ± 80 BP, 300 ± 90 BP, 215 ± 100 BP et 295 ± 85 BP
(Okafor et Phillips, 1992). Les sites appartenant à cette phase sont ceux de la
région d’Orba-Umundu-Eha-Ndi-Agu.
Bien que les fourneaux utilisés à cette époque soient restés des fourneaux à
cuve, ils fonctionnaient à induction d’air. Il n’était pas effectué de coulées pen-
dant la fusion. L’intégralité de la charge était sortie du fourneau à la fin de l’opé-
ration et la loupe de fer était séparée des résidus à l’aide de crocs à feu (Okafor,
1984a, b et c). Cette technique réduisait la main-d’œuvre nécessaire mais aux
dépens de la durée du procédé. En effet, l’utilisation de fourneaux à cuve à
induction d’air rallongeait la durée de l’opération de réduction, ce qui consti-
tuait un avantage pour les fondeurs puisque, comme ils pouvaient charger le
fourneau autant de fois qu’ils le souhaitaient, cela leur permettait de produire des
loupes de plus grande taille en une seule fournée.
Les scories de fer appartenant à la phase tardive de Nsukka ont subsisté sur
les sites de réduction du minerai sous forme d’agrégats. Étant donné la façon
dont elles ont été extraites du fourneau et séparées de la loupe de fer à l’aide de
crocs à feu, elles forment des agrégats irréguliers, amorphes, moins denses, com-
portant de nombreuses vésicules. La densité moyenne des échantillons de scories
provenant d’Orba est de 3,98 g par centimètre cube, tandis que celle des échan-
tillons d’Umundu est de 3,6 g par centimètre cube. La couleur de ces scories
varie du brun foncé (MC 7,5 YR 3/4) au noir total (MC 7,5 YR 2/10). Quel-
ques-unes d’entre elles comportent des inclusions de quartz mais n’ont aucune
trace de rouille. Aucun des échantillons de scories provenant de ces sites n’est
La réduction du fer dans les bas fourneaux 41

magnétique. Comme celles d’Opi et d’Owerre-Elu, les scories d’Orba et d’Umundu


sont faiblement basiques. En moyenne, la basicité des scories d’Orba est de 0,1
et celle des scories d’Umundu de 0,02. La température de fusion des échantillons
d’Orba et d’Umundu varie entre 1 150 et 1 280 °C.
L’analyse des scories de la phase tardive des sites de Nsukka au microscope
électronique à balayage et par rayons X à dispersion d’énergie montre qu’elles
sont composées de fayalite, d’hercynite et de verre. Les scories d’Umundu et
d’Orba contiennent du verre4 à forte teneur en silice. L’oxyde de fer à l’état libre
et la wustite sont totalement absents des scories de la dernière phase, preuve que
les fondeurs de Nsukka étaient alors parvenus à extraire le fer avec une très
grande efficacité. Comme on l’a observé précédemment, le taux d’oxyde de fer à
l’état libre dans les scories semble témoigner de la capacité du maître fondeur à
faire fonctionner son fourneau de façon à laisser le moins possible de fer dans les
scories (Morton et Wingrove, 1969 et 1972, p. 478).
Selon certaines informations ethnographiques provenant de la région, on
chargeait du sable dans le fourneau au cours du processus de fusion, peut-être
pour ajouter du fondant au métal en fusion (Okafor, 1984a, b et c, p. 24-25).
Tylecote (1987, p. 108) a fait observer que les minerais à forte teneur en oxyde
de fer nécessitent un fondant de sable pour améliorer le rendement en fer. Des
documents concernant de nombreux sites de la première phase de la métallurgie
attestent la pratique consistant à ajouter du sable en guise de fondant aux mine-
rais réduits dans les bas fourneaux (Fells, 1983, p. 132). Au cours de ses recher-
ches sur le site de Nebersdorf, en Autriche, qui appartiennent à la première
période de la métallurgie du fer, Sperl (1980, p. 61-74) a découvert dans les sco-
ries qui en provenaient un excès de quartz qui pourrait avoir servi de fondant. En
Afrique du Sud, les fondeurs du site proche de Phalaborwa ajoutaient de la silice
en guise de fondant (Van der Merwe et Killick, 1979, p. 89). Le sable chargé
dans le fourneau produisait l’excès de silice qui explique la forte teneur en verre
des scories provenant des sites d’Umundu et d’Orba. Dans celles d’Umundu, le
verre représente 27,33 % des constituants en minéraux et, dans celles d’Orba,
27,25 %.
La plupart des scories d’Orba et d’Umundu appartiennent au triangle de la
cordiérite fayalite-hercynite-fer, mais certains autres échantillons appartiennent
au triangle fayalite-hercynite-wustite, ce qui confirme de manière irréfutable les
résultats des microanalyses pratiquées sur ces scories, où l’on n’a pas détecté de
wustite.
Les températures de fusion des scories de ces deux sites varient, d’après les
estimations, entre 1 150 °C et 1 280 °C. Elles se situent donc dans la fourchette
des températures minimales nécessaires pour réduire le minerai de fer (Van der
Merwe, 1969, p. 17 ; Tylecote, 1987, p. 296). Ce qui a contribué à la produc-

4. Il s’agit du phénomène de vitrification (NDLR).


42 Edwin Eme Okafor

tion de ces scories sans wustite avec un faible point de fusion, c’est la silice que
les fondeurs d’Orba et d’Umundu utilisaient comme fondant. Elle abaissait le
point de fusion de la gangue et se combinait avec une partie de l’oxyde de fer
pour donner du fer réduit à l’état libre.
La phase tardive de la réduction directe du fer à Nsukka marque la phase
finale et ultime de cette activité dans la région, en termes d’efficacité du procédé
d’extraction et de réduction de la main-d’œuvre au strict minimum. Aucune des
scories de cette phase ne contient de wustite, ce qui semble indiquer que l’inté-
gralité du fer contenu dans le minerai fondu en était extrait. C’est également
durant cette phase que l’on assiste à l’utilisation de sable en guise de fondant
pour abaisser la température de fusion de la gangue. Le silicate de fer qui se for-
mait à partir du sable, en même temps que l’oxyde de fer, libérait ainsi du fer
réduit. Les scories appartenant à cette phase avaient les plus faibles températures
de fusion nécessaires à n’importe quelle opération de réduction du minerai de fer.

Discussion
L’évolution de la technique de réduction du fer à Nsukka, que l’on vient d’évo-
quer, semble indiquer un progrès constant allant dans le sens d’une économie de
main-d’œuvre. Durant la phase moyenne, les fosses à coulée des scories ont été
abandonnées et l’on a laissé les scories couler directement sur le sol. Lors de la
phase tardive, la mise en service de fourneaux à appel d’air rendit inutile l’utili-
sation de soufflets. À mesure que le procédé s’améliorait, la coulée des scories est
devenue inutile, de même que la main-d’œuvre employée pour cette tâche puis-
que l’on vidait désormais le contenu du fourneau à la fin du processus. De toute
évidence, des changements ont régulièrement été enregistrés à Nsukka qui ten-
taient, à chaque fois, de perfectionner la technique et réduire la main-d’œuvre
nécessaire.
Les analyses morphologiques et physiques des résidus trouvés dans la région
de Nsukka montrent clairement que ceux-ci se répartissent en trois groupes bien
définis, délimités par les trois phases évoquées plus haut, ce qui élimine toute
possibilité d’existence d’une quatrième. Étant donné que chacun de ces groupes
possède des caractéristiques techniques et ethno-archéologiques distinctes, les
renseignements recueillis à Nsukka témoignent des variations concrètes qu’a
connues la technique de réduction du minerai de fer dans la région de la division
administrative de Nsukka. Ces variations ont aussi existé isolément dans cha-
cune des trois phases susmentionnées. La question se pose donc de savoir com-
ment était organisée la réduction du minerai de fer à Nsukka. Les données
obtenues suscitent les interrogations suivantes :
• Existait-il, dans la région de Nsukka, des communautés productrices de fer
distinctes, pratiquant cette activité indépendamment des autres groupes ?
La réduction du fer dans les bas fourneaux 43

• Pourquoi chaque phase représente-t-elle une nouvelle étape technique de


cette activité ?
• Pourquoi, sur aucun des sites, les trois phases observées ne sont-elles pas
retrouvées toutes à la fois ?
La question de savoir si les diverses communautés qui produisaient du fer à
Nsukka travaillaient indépendamment impliquerait que chacune d’entre elles
l’ait fait uniquement pendant l’une des trois phases observées et n’ait produit de
fer ni avant ni après cette phase. Ceci est improbable car, d’après les éléments
fournis par les datations et les résultats d’analyse des résidus, il semble que la
métallurgie du fer à Nsukka ait connu un développement constant.
En ce qui concerne la deuxième question, deux points expliqueraient pour-
quoi chacune des phases de réduction du minerai de fer à Nsukka était techni-
quement différente des autres. Premièrement, d’après les éléments disponibles, il
est indubitable que, lors de la phase tardive, les opérations de réduction du mine-
rai étaient mieux maîtrisées et plus efficaces que lors des phases précédentes. Les
changements techniques qui différencient chaque phase peuvent en partie
s’expliquer comme étant le résultat de plusieurs décennies d’expérience. C’est
l’explication la plus probable étant donné que les datations au carbone 14 effec-
tuées sur des échantillons provenant des quatre sites étudiés démontrent un net
progrès entre 760 av. J.-C. environ et 1950 apr. J.-C. Ces mêmes progrès ont
également été mis en évidence par les résultats d’analyse des résidus.
Deuxièmement, on observe, d’après le mode de fonctionnement des four-
neaux associés à chaque phase, une tendance régulière à la réduction de la main-
d’œuvre. Deux facteurs d’ordre économique et d’ordre politique, qui ont été
identifiés par d’autres chercheurs (Afigbo, 1973a ; Oguagha, 1982 ; Shaw, 1970)
et se sont exercés dans le nord du Pays ibo entre la phase moyenne et la phase
tardive de la métallurgie du fer à Nsukka, pourraient avoir entraîné une pénurie
de main-d’œuvre dans la division administrative. Shaw (1970, p. 285) a relevé
qu’au IXe siècle apr. J.-C., les Ibo exportaient, entre autres, des esclaves chez leurs
voisins du Nord. Afigbo (1973a, p. 79-80) a également observé qu’au XIXe siècle,
la traite des esclaves était l’une des activités commerciales les mieux établies de
Nsukka. Il mentionne Nkwo-Ike et Ozalla (dans la division administrative de
Nsukka) comme de célèbres marchés aux esclaves. La crainte des rafles d’esclaves
et la diminution effective de la population en raison de l’exportation de jeunes
gens robustes doivent avoir affecté la quantité de main-d’œuvre indispensable
à l’industrie métallurgique.
La main-d’œuvre disponible à cette période dans la division administrative
de Nsukka était également menacée par des incursions et des guerres menées par
les Igala contre Nsukka. Les guerres entre ces deux peuples remontent aux XVIIIe
et XIXe siècles apr. J.-C. (Oguagha, 1982, p. 58). Elles durèrent longtemps et, à
leur paroxysme, Nsukka resta sous l’influence d’Igala. Il est probable que les
changements techniques qui différencient chacune des phases de la métallurgie
44 Edwin Eme Okafor

du fer à Nsukka représentaient les solutions concrètes trouvées par les forgerons
pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre.
C’est manifestement pendant la phase moyenne que les fosses de coulée des
scories ont été abandonnées et que l’on a laissé couler celles-ci directement sur la
surface du sol. Des années d’amélioration et d’expérience, auxquelles s’ajoutait la
pénurie de main-d’œuvre, ont conduit à abandonner les fourneaux à tirage forcé
et, ultérieurement, à renoncer à couler les scories au cours du processus de réduc-
tion du minerai. Le fourneau était vidé à la fin de l’opération.
C’est probablement en raison de la pénurie de main-d’œuvre et de l’insécu-
rité causée par les rafles d’esclaves et les guerres entre Nsukka et Igala que certains
fondeurs ont commencé à utiliser directement du bois, sans prendre le temps de
le brûler pour produire du charbon de bois. Selon des données ethnographiques
provenant d’Ama Orba, cette technique était celle qu’utilisaient les fondeurs de
cette région durant la phase tardive de la réduction du fer à Nsukka (Okafor,
1984a et b, p. 23). La main-d’œuvre nécessaire à cette activité s’en trouvait dimi-
nuée et la technique en usage modifiée.
Les différences de techniques observées au cours des trois phases reflètent
donc la situation qui prévalait pendant chacune d’entre elles. La première phase
semble avoir été paisible, raison pour laquelle cette branche d’activité était très
perfectionnée et complexe. Les fondeurs disposaient de suffisamment de main-
d’œuvre et de temps pour construire et utiliser des fourneaux à cuve à tirage
forcé. À cette époque, ils creusaient également des fosses de coulée des scories, les
tapissaient d’argile et construisaient des chenaux de connexion conduisant aux
fosses.
La grave menace que faisait peser sur la main-d’œuvre disponible la traite des
esclaves, atlantique et interne, ajoutée à l’insécurité due aux guerres entre
Nsukka et Igala, imposa d’autres changements techniques. Ces derniers sont évi-
dents durant la phase tardive. La pénurie de main-d’œuvre et l’insécurité entraî-
nèrent le remplacement de la technique du fourneau à cuve à tirage forcé par le
fourneau autoventilé, éliminant ainsi les manieurs de soufflets. On cessa progres-
sivement de couler les scories incandescentes au cours du processus de réduction
pour vider la totalité de la charge du fourneau à la fin de l’opération. Lorsque les
contraintes susmentionnées pesaient trop lourdement sur eux, les fondeurs de la
phase tardive adaptaient parfois encore leur technique, procédant directement à
la réduction du minerai avec du bois au lieu de charbon de bois, ce qui réduisait
la durée du processus et l’investissement de main-d’œuvre dans la production de
charbon de bois.
Afin de comprendre pourquoi ces trois phases ne sont pas représentées dans
un seul et même site, il est indispensable de savoir ce qui se passait dans le nord
du Pays ibo (qui comprend la division administrative de Nsukka) pendant le pre-
mier âge du fer. D’après des études glottochronologiques, les Ibo ont commencé
à former un groupe ethnique distinct au sein de la sous-famille linguistique kwa,
La réduction du fer dans les bas fourneaux 45

il y a environ 6 000 ans (Armstrong, 1962, p. 284, et 1964, p. 22-23 ; Afigbo,


1973b, p. 8). Ce point de vue est étayé par du matériel archéologique découvert
par Hartle sur des sites qui se trouvent au nord du Pays ibo, en particulier à
Nsukka, ce qui laisse supposer que la région a été occupée avant le troisième mil-
lénaire av. J.-C. L’étude de poteries récupérées lors des fouilles de ces sites montre
qu’il y a d’étroites similitudes de couleur, de forme et de décorations entre les tes-
sons de poterie découverts et les poteries encore utilisées aujourd’hui dans cette
région (Hartle, 1967, p. 134-143).
D’après les données historiques et ethnographiques disponibles sur le Pays
ibo, lorsqu’ils se constituèrent en tant que groupe ethnique, les Ibo s’installèrent
d’abord dans la partie nord de la zone. À partir de là, leur culture évolua et ils
essaimèrent vers les autres régions qu’ils habitent aujourd’hui. Il est intéressant
d’observer que, de nos jours, de nombreux groupes ibo proclament que leurs
ancêtres vivaient initialement sur le plateau situé au nord du Pays ibo avant de
partir à la recherche de terres inoccupées (Afigbo, 1973b, p. 9).
Un certain nombre de facteurs attirèrent les ancêtres des Ibo vers le plateau
du nord. La région, bien qu’initialement couverte de forêts, est à la limite de la
ceinture de la savane. D’après Uzoezie (1972), ceci leur permettait d’exploiter
des terres et de les cultiver avec l’outillage restreint dont ils disposaient. Là
encore, la région se trouvait, notamment pendant la période tardive, dans la zone
des principales routes commerciales reliant au pays ibo, Igala et Idoma au nord,
d’une part, et les régions d’Ijaw et de Cross River au sud, d’autre part.
Enfin, c’est sur ce plateau ibo du nord, et principalement sur la Cuesta
Nsukka-Udi, que se trouvent les plus riches gisements de minerai de fer. Ils coif-
fent les collines résiduelles de la région et la plupart d’entre eux contiennent
jusqu’à 50 % de fer (Umeji, 1980). Il est probable que, pendant la longue
période où ils ont vécu sur ce plateau, un certain groupe ibo ait appris à réduire
le minerai de fer. Afigbo (1973b, p. 16) a fait observer que « le plateau ibo du
nord et son extension vers Bende sont riches en gisements de minerai de fer et
que c’est dans cette région du Pays ibo que la réduction et le travail du fer étaient
les plus perfectionnés. Les outils et ustensiles en fer qu’ils produisaient sur le pla-
teau étaient très demandés dans le reste du pays et au-delà ».
D’après les datations au carbone 14, il semblerait que ce groupe de produc-
teurs ait pu s’être installé à cet endroit où il aurait exploité le minerai et les bois
de ces sites dès le VIIIe siècle av. J.-C., c’est-à-dire au cours de la première phase
de la métallurgie du fer (sites d’Opi, de Lejja et d’Aku). Les éléments fournis par
l’analyse des scories indiquent qu’à cette période, une partie du fer restait dans
les scories, ce qui laisse à penser que les producteurs tentaient encore d’améliorer
leur maîtrise technique et de tirer le meilleur parti possible du minerai. Cette
phase pourrait s’être achevée aux alentours du Ier siècle apr. J.-C., selon des data-
tions au carbone 14. Il est probable que l’épuisement des ressources (minerai et
combustibles) sur les sites de la première phase, ajouté à la nécessité de fabriquer
46 Edwin Eme Okafor

des outils en fer, a poussé les habitants à chercher de nouvelles sources de matières
premières. C’est pourquoi le groupe, ou ses descendants, s’est déplacé vers la
région correspondant à la phase moyenne (Owerre-Elu-Nru-Isiakpu), où du
minerai riche en fer coiffait la chaîne des monts de Nru-Isiakpu et où l’on trou-
vait aussi en abondance du bois dur susceptible de servir de combustible. Les
datations au carbone 14 qui ont été réalisées montrent que ces sites ont proba-
blement été exploités entre 800 et 1450 apr. J.-C.
C’est sans doute autour de 1430 apr. J.-C. que la diminution des ressources
nécessaires à la réduction du minerai de fer sur les sites de la phase moyenne,
conjuguée au besoin d’outils en fer, a conduit à l’exploitation des ressources des
régions appartenant à la phase tardive (Umundu-Orba-Eha-Ndi-Agu). Ainsi
qu’on l’a fait observer précédemment, c’était la dernière phase de la métallurgie
du fer dans la division administrative de Nsukka. Six datations au carbone 14
montrent que l’on fondait le fer dans cette région entre 1430 et 1950 apr. J.-C.
Nous concluons de ce qui précède que la réduction du minerai de fer dans la
région de Nsukka a été le fait d’un groupe spécialisé d’artisans qui se déplaçait
d’un site à l’autre à mesure qu’il épuisait les matières premières disponibles sur
place. Bellamy et Harbord (1904) ont observé que les fondeurs de fer d’Ola Igbi,
près d’Oyo, en Pays yoruba, se déplaçaient de même lorsqu’ils avaient épuisé les
ressources locales nécessaires à leur industrie. Les témoignages archéologiques
dont il a précédemment été question démontrent l’existence d’une continuité
culturelle dans la région depuis le troisième millénaire av. J.-C. jusqu’à
aujourd’hui (Hartle, 1967). C’est la preuve que les ancêtres des communautés
actuelles de Nsukka ont toujours vécu dans la région. Les indices ethno-archéo-
logiques recueillis au sujet des eguru (forgerons) montrent que le travail du fer
était pratiqué par des groupes à part, qui n’étaient pas ouverts à tous. C’était le
métier d’une caste fermée, qui protégeait jalousement ses fonctions et privilèges,
et qui évitait d’admettre en son sein des personnes de l’extérieur (Okafor, 1984a,
b et c, p. 69-76).
Les témoignages recueillis à partir de l’étude linguistique réalisée dans la
division administrative de Nsukka semblent étayer cette conclusion. Il existe des
mots communs à toutes les communautés de la division administrative pour les
principaux articles liés à la production du fer. Par exemple, le fourneau est géné-
ralement connu sous le nom d’itoro ou utu, la loupe de fer est appelée aga, les
scories afuru ou nsi igwe et le minerai de fer nne igwe ou nne ukwume. L’unifor-
mité terminologique de tous les éléments indispensables à la production du fer
indique nettement une « pratique de groupe » plutôt qu’une multiplicité de pra-
ticiens indépendants les uns des autres.
Cette conclusion est également étayée par le fait que même si tous les
Nsukka connaissent le nom de ces éléments essentiels à la réduction du minerai
de fer, ils ne savent pas quelle est leur origine. Ainsi, la plupart des gens qui
vivent dans les régions correspondant aux phases ancienne et moyenne ne savent
La réduction du fer dans les bas fourneaux 47

pas d’où proviennent les résidus de fusion qu’ils rencontrent autour d’eux. Le
plus âgé des anciens d’Opi même, Onyishi Abonyi Nnamani, du village d’Umu-
gedu appartenant au clan Idi Opi, a déclaré à l’auteur que les blocs cylindriques
de scories que l’on rencontre à Opi sont « de petits monticules poussant de
terre ». Il croit qu’ils n’ont pas été édifiés par l’homme. On raconte une histoire
analogue à Owerre-Elu, dont l’un des habitants, Onyishi Ozioko Ugwu, décrit
les scories plates issues des coulées sous le nom de nsi igwe et déclare que Dieu les
a données au peuple d’Owerre-Elu pour vaincre leurs ennemis edoballa, ce qui,
d’après ce que j’ai appris, se réfère à une bataille au cours de laquelle la population
d’Owerre-Elu a infligé des pertes sévères à ses ennemis en leur lançant des scories.
Enfin, selon une tradition rapportée par Onyeke (1986, p. 14), le clan Idi
Opi prétend que les Opi n’ont jamais été eux-mêmes des fondeurs de fer. Le tra-
vail aurait été fait par des étrangers qui venaient vivre parmi eux et qui repar-
taient une fois leur travail achevé. La réduction du fer dans un bas fourneau est
une activité hautement spécialisée. Dans de nombreuses communautés d’arti-
sans, comme celles du Pays ibo, la présence de fondeurs devait être très précieuse
parce qu’ils produisaient les matériaux nécessaires à la fabrication de la plupart
des outils utilisés par la communauté ; le clan n’aurait autrement pas admis que
les fondeurs campent et procèdent à la réduction du minerai de fer partout où ils
trouvaient des matières premières. La tradition consistant à installer les sites
métallurgiques à proximité de la source de minerai de fer expliquerait pourquoi
le groupe de fondeurs se déplaçait vers de nouvelles sources de minerai lorsque le
gisement disponible en un lieu était épuisé. Njoku (1986) a noté que dans le
nord du Pays ibo, on tenait davantage compte de l’emplacement du minerai dis-
ponible que de la présence de bois pour choisir le site. Cependant, là où les con-
ditions étaient favorables, on tenait compte des deux.

Observations
Les découvertes effectuées ont permis de tirer les conclusions ci-après, concer-
nant la réduction du fer dans les bas fourneaux à Nsukka.
La réduction du fer dans des bas fourneaux a commencé à Nsukka aux envi-
rons de l’an 765 cal. av. J.-C. et s’est poursuivie jusqu’à environ 1950 cal.
apr. J.-C. Pendant cette longue période, cette industrie a connu trois phases suc-
cessives différentes, chacune représentant un changement ethnologique.
Dans l’ensemble, la technique de réduction du fer dans des bas fourneaux
était très efficace en termes d’extraction du métal. Il restait très peu d’oxyde de
fer à l’état libre dans les scories. À cet égard, la période la plus ancienne a été la
moins efficace, et la plus récente a été la plus efficace, puisque l’on extrayait alors
du minerai le maximum de fer disponible en réduisant la main-d’œuvre néces-
saire à cette activité.
48 Edwin Eme Okafor

La réduction du fer à Nsukka s’est effectuée dans divers types de fourneaux


à cuve, ceux à tirage forcé ayant été utilisés dès le début et jusqu’à 1430 apr. J.-C.
environ. Lorsque le procédé de fusion s’est perfectionné, on a cessé de couler les
scories.
Aucun fourneau à fosse ou en cuvette n’a été trouvé dans la division admi-
nistrative de Nsukka. On s’est aperçu que ce que certains avaient pris pour des
fourneaux en cuvette (Anozie, 1979) étaient des fosses de coulée des scories dans
lesquelles elles étaient déversées au cours du processus de réduction du minerai.
Les fondeurs de Nsukka fondaient la goethite et l’hématite qu’ils trouvaient
sur place. Le minerai de fer de Nsukka était riche en alumine (Al2O3) et avait
une forte teneur en silice (SiO2). Initialement, la forte teneur en alumine du
minerai contraignait les fondeurs à utiliser une température de fusion élevée.
Plus tard, ils parvinrent à l’abaisser en utilisant du sable en guise de fondant. À
Nsukka, les principales formes de minéraux présentes dans les scories sont la
fayalite, l’hercynite et la wustite. Le verre, la leucite et la magnétite sont des
formes mineures présentes dans certaines d’entre elles.
Les scories de Nsukka ont une basicité très faible car les fondeurs n’utilisaient
ni chaux ni fondant riche en chaux pour réduire le minerai.
Les sites de production étaient fonction de la présence et de l’emplacement
du minerai de fer. On en changeait lorsque les ressources en minerai étaient épui-
sées. À Nsukka, la réduction du fer dans des bas fourneaux était pratiquée par des
groupes spécialisés d’artisans qui se déplaçaient lorsqu’ils avaient épuisé les
matières premières disponibles sur un site.
Les fondeurs de fer de cette région se contentaient de produire des loupes de
fer. Ils ne les affinaient ni ne les forgeaient eux-mêmes mais les vendaient à des
forgerons qui s’en chargeaient pour en faire des outils.
La situation économique et politique qui régnait dans la région a déterminé
l’évolution des diverses phases techniques de la métallurgie du fer. Les fondeurs
ont pu faire face à la menace qui pesait sur la main-d’œuvre nécessaire à cette
activité lors des phases moyenne et tardive en adoptant des techniques de réduc-
tion directe employant un minimum de personnes.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 49

L’impact du fer en Pays yoruba


Isaac Adeagbo Akinjogbin

L’incidence de la métallurgie du fer sur le système


sociopolitique
Nul ne sait combien de temps s’est écoulé entre le début de la connaissance du
fer par la société yoruba et la période où celle-là a pleinement influencé celle-ci.
Il est d’ailleurs peu probable que cet impact se soit fait sentir simultanément
dans tous les aspects de la vie des Yoruba. Cependant, il semblerait que les débuts
d’une forte influence de la métallurgie du fer sur le système sociopolitique
yoruba remontent à une période comprise entre le IXe et le Xe siècle apr. J.-C.
Auparavant, ce système reposait sur de petits villages, le summum de l’organisa-
tion politique étant constitué par des groupes de villages (Obayemi, 1977,
p. 255-322 ; Akinjogbin, 1981). Le rôle de chef, ou oba (roi), d’un groupe de
villages était assumé à tour de rôle par les chefs des différents villages composant
ce groupe selon un ordre prédéterminé. L’oba était le chef à la fois spirituel et
politique du groupe. L’une de ses principales fonctions consistait à se concilier les
faveurs de la terre.
Vers la fin du IXe siècle et au début du Xe, le chef Oduduwa amorça à Ile-Ife
un mouvement révolutionnaire qui rassembla les groupes de villages en une
grande ville composite. Les treize groupes de villages d’Ife devinrent une seule
cité ayant Oduduwa pour seul ooni (roi) (Adediran, 1981). Ceint d’une cou-
ronne de perles (ade ileke), il vivait dans un grand palais (aafin) au centre de la
ville. Les villages du groupe furent réunis de force et leurs anciens chefs devinrent
des chefs religieux (isoro) qui se conciliaient les faveurs de la terre pour le bien-
être de l’ooni. Bien que certains d’entre eux aient conservé dans leur nouveau
titre le préfixe oba, ils perdirent leur pouvoir politique et économique et furent
50 Isaac Adeagbo Akinjogbin

assujettis à l’autorité politique de l’ooni1. Dès lors, l’ooni administra les anciens
territoires comme des parties intégrantes de son royaume.
Une fois l’expérience réussie et la situation stabilisée à Ile-Ife, de nombreux
fils d’Oduduwa et capitaines de son armée se répandirent dans tout le pays en
usant du même procédé et en créant des royaumes sur le modèle de celui d’Odu-
duwa à Ile-Ife (Akinjogbin, 1981, chap. 12). C’est ainsi que la majeure partie du
Pays yoruba, jusque-là organisée en groupes de villages, se transforma en grands
royaumes gouvernés par les fils et associés d’Oduduwa et par leurs descendants.
Selon certaines traditions, il existait sept royaumes. D’autres affirment qu’il en
existait seize. Mais un recensement exact réalisé au début du siècle en dénombra
plus de vingt (Anon, 19032).
Or, quels sont les processus qui ont conduit à cette révolution, et quel fac-
teur clef a permis cette réussite hormis les qualités de chef et le sens du comman-
dement du roi ? Bien que les traditions se soient efforcées de l’estomper, le
processus de conversion des groupes de villages en royaumes est l’aboutissement
de conquêtes militaires. À Ile-Ife et dans tout le Pays yoruba, les groupes des par-
tisans d’Oduduwa, généralement les plus restreints au départ, supplantaient les
groupes les plus vastes et les plus forts en apparence ; le facteur décisif de leur
succès était l’utilisation du fer. C’est par nécessité de minimiser le rôle du recours
à la force que les traditions généralement ne mettent pas l’accent sur ce facteur
de manière explicite, mais un certain nombre d’indices témoignent de l’impor-
tance déterminante de l’utilisation du fer pendant toute cette révolution.
Tout d’abord, Ogun, dieu du fer, était la divinité tutélaire d’Oduduwa, chef
de la révolution. C’était aussi celle de tous ses fils et partisans qui devinrent ulté-
rieurement des oba. Aujourd’hui encore, un festival annuel est organisé en l’hon-
neur d’Ogun, qui porte différents noms suivant les diverses régions du Pays
yoruba. C’est l’occasion pour l’oba, qui vit normalement retiré du monde, de
sortir au grand jour la tête ceinte de la couronne sacrée (are). Partout où s’est éta-
blie la royauté yoruba, Ogun est devenu le dieu tutélaire. Détail instructif :
l’Empire ewuare portait en fait le nom d’Ogun.
Un autre indice du rôle décisif joué par le fer dans la révolution d’Oduduwa
est l’installation d’une forge à l’intérieur même du palais de l’ooni. Appelée ogun
Laadin (la forge de Laadin), elle existe encore aujourd’hui dans l’état où l’on sup-
pose qu’elle se trouvait à l’époque d’Oduduwa et constitue désormais une attrac-
tion touristique.
Troisième indice : un coutelas à courte lame, appelé ogbo ou, sous une forme
plus élaborée, ida (épée), est devenu le symbole de l’autorité et de la justice ; tout

1. Comme Obalesun à Ife et à Ado Ekiti, Obaluru et Obalara à Ife, etc. Le titre ooni a
été traduit de diverses manières, mais il est peut-être dérivé d’un mot oghene qui
signifiait « très grand ».
2. Voir les débats relatifs à ce nombre dans Adediran (1984).
L’impact du fer en Pays yoruba 51

nouvel Alaafin (chef du royaume yoruba) reçoit rituellement l’ida Oranyan (épée
d’Oranyan) lors de son intronisation. La plupart des oba du Pays yoruba font
encore porter devant eux soit l’ogbo, soit l’ida lors des cérémonies officielles
publiques.
Le fait qu’Oduduwa ait donné une chaîne de fer (epe) à son premier petit-
fils, qui devint Olowu (roi d’Owu), est la preuve que le fer était considéré comme
un métal de valeur inestimable. Une ligne de l’Oriki (ensemble des psalmodies
de la littérature religieuse traditionnelle yoruba) d’Olowu dit : « Omo ajifepe
sire » [L’enfant de quelqu’un qui joue avec une chaîne en fer].
Il est probable que l’importance du fer dans la révolution d’Oduduwa ne
tienne pas seulement au fait que ce métal a permis la fabrication d’un armement
de guerre si décisif, mais également à celui qu’il a favorisé la révolution agricole
en améliorant l’approvisionnement en nourriture. En atteste la tradition selon
laquelle, peu après la révolution d’Oduduwa, la population d’Ife augmenta rapi-
dement. En fait, elle devint trop nombreuse par rapport à l’approvisionnement
disponible, ce qui nécessita une émigration organisée3.
Étant donné l’importance du fer, qui servait à fabriquer des instruments
aussi bien pour se défendre et attaquer que pour rendre la justice et pratiquer
l’agriculture, il n’est guère surprenant que, sous la dynastie d’Oduduwa, chaque
royaume et même chaque centre urbain de chaque royaume ait possédé de nom-
breuses fonderies et autant de forges qu’il lui était nécessaire pour assurer son
autosuffisance. Au début du XVe siècle, tout le fer utilisé dans le Pays yoruba était
fondu dans le pays, à partir des fourneaux construits par les Yoruba : ceux-ci uti-
lisaient uniquement des roches sédimentaires ferrugineuses et des matériaux de
chauffe qu’ils se procuraient localement. Dans l’Afrique des XVIIe et XVIIIe siècles,
au plus fort de la traite transatlantique des esclaves, les Yoruba continuaient de
préférer le fer qu’ils produisaient eux-mêmes, considérant celui qui était importé
comme rituellement impur et « sourd ». La plupart des centres urbains yoruba
avaient leurs propres mines appelées oko ota ou oko eta (centre d’exploitation des
roches sédimentaires ferrugineuses) et au moins un petit fourneau (ile iponrin ou
ile isunrin) dans le district. Johnson note que certaines régions comme celle
d’Okemesi, dans l’État d’Ekiti et Ilorin, au Pays yoruba, étaient célèbres pour
leurs gisements de roches ferrugineuses (Johnson, 1921, p. 119). On suppose
qu’elles fournissaient celles dont l’approvisionnement n’était pas suffisant. Les
grands centres urbains disposaient de nombreux fourneaux et exportaient leurs
excédents. Malgré les guerres civiles, qui firent sombrer le Pays yoruba de 1793
à 1893, et la dislocation sociale, démographique et économique massive du pays,
en 1904, les visiteurs pouvaient encore voir onze bas fourneaux à Laagbe, près
d’Oyo (Williams, 1973). Tous travaillaient encore à plein rendement et employaient
environ une centaine d’ouvriers. De fait, un Yoruba cultivé, habitant de Lagos,

3. Ceci est conservé dans l’Odu Ofunsa.


52 Isaac Adeagbo Akinjogbin

qui suspectait ses contemporains d’avoir oublié, comme lui, qu’un tel savoir ait
jamais existé chez eux, s’est senti obligé de leur relater la surprise qu’il avait
éprouvée en découvrant ces fonderies.
La perte par les Africains de l’initiative politique et économique, conjuguée
à une politique de découragement au développement de ces entreprises indus-
trielles pour éviter la concurrence des produits locaux avec les produits importés,
a indubitablement contribué à faire péricliter la métallurgie du fer dans le Pays
yoruba. Celle-ci s’était poursuivie jusqu’aux environs de 1936. C’est à cette
époque que l’on produisit du fer pour la dernière fois. Cette ultime production
eut lieu à Isundunrin, près d’Ejigbo, ville qui semble avoir tiré son nom de son
activité.

Le schéma d’un fourneau yoruba


En 1956, lorsque le gouvernement de l’Ouest du Nigéria de l’époque lança le
Programme de recherches historiques sur les Yoruba, sous la direction de
S. O. Biobaku, le fourneau d’Isundunrin ne s’était pas complètement effondré.
Feu Pa David Adeniji, l’un des assistants de recherche de ce programme, qui
avait reçu, enfant, une formation de fondeur de fer et travaillait probablement au
fourneau d’Isundunrin avant d’aller à l’école, publia, en 1977, quelques années
avant sa mort, une description détaillée du schéma d’un fourneau de réduction
du fer typique du Pays yoruba. La description qui suit est intégralement reprise
de son ouvrage (Adeniji, 1977).
Selon Pa Adeniji, un fourneau typique de réduction du fer devait être situé
dans un bosquet, à distance de toute habitation mais à portée de voix. En géné-
ral, on l’installait sur un terrain d’environ 200 pieds carrés (ou 70 mètres carrés)
dont le sol dur bénéficiait d’un bon drainage. La fonderie était placée au centre
du terrain qui devait être débarrassé de toutes ses racines et de tous ses buissons.
Le bâtiment contenant le fourneau devait avoir soit une forme circulaire (style
antérieur au XIXe siècle), soit une forme rectangulaire. Quelle qu’ait été sa forme,
il avait 2 entrées, l’une face à l’est pour laisser entrer l’air frais et l’autre face à
l’ouest pour laisser sortir l’excédent de chaleur. Le bâtiment comportait 6 ou
8 fenêtres pour permettre aux ouvriers, obligés de rester à l’intérieur parfois pen-
dant 72 heures d’affilée ou davantage, de respirer. Le toit du bâtiment était beau-
coup plus haut que le toit normal d’une maison afin d’éviter que le chaume ne
prenne feu. Une plate-forme surélevée était édifiée au centre du bâtiment pour y
construire le fourneau proprement dit. Une petite tranchée peu profonde était
creusée face à l’entrée est et s’achevait à la base de la plate-forme supportant le
fourneau. Une autre tranchée, plus importante, (9 × 9 × 9 pieds ou 3 × 3 ×
3 mètres) était creusée face à l’entrée ouest. Les 2 tranchées étaient séparées par
6 pieds (2 mètres) de terre compacte. Au sommet de cet amas de terre reposait la
L’impact du fer en Pays yoruba 53

plate-forme portant le fourneau. Un trou étroit, de 2 pouces (5 centimètres) de


diamètre, était percé entre la large tranchée et la base du fourneau ; il permettait
à l’air de s’échapper et aux scories fondues de tomber goutte à goutte du four-
neau dans la tranchée.
Autour du fourneau, érigé sur une plate-forme, on pratiquait 6 ouvertures,
chacune de la largeur d’une main d’homme, reliées à la tranchée faisant face à
l’est. Une tuyère était insérée dans chaque ouverture pour réguler l’arrivée d’air.
Sept autres plates-formes plus petites étaient également édifiées autour de la base
sur laquelle reposait le fourneau afin que les ouvriers chargés de l’alimenter et d’y
verser les roches ferrugineuses à l’état brut puissent le faire commodément : le
fourneau devait en effet être rempli de minerai par le haut.

Le processus de réduction du fer


Une fois le fourneau installé, le processus de fusion pouvait commencer. Il y avait
trois catégories de roches sédimentaires ferrugineuses. Les plus grandes, appelées
sagodo, appartenaient à la première catégorie et contenaient le taux de fer le plus
élevé. Celles de la deuxième catégorie étaient appelées afuye (pierre légère) ou
oko, du nom de la ville où elles furent découvertes pour la première fois. Comme
leur nom l’indique, elles étaient plus légères et avaient une teneur en fer infé-
rieure à celle des roches sagodo. La troisième catégorie était dénommée agu-
nwinni (sable ferrugineux). Toutes étaient extraites soit verticalement, soit
horizontalement, en fonction de leur orientation sous terre. Certaines mines
étaient si profondes qu’il fallait des échelles pour les exploiter et que les mineurs
dormaient parfois sous terre pendant des jours entiers.
L’extraction de la matière première et la fonderie du minerai dans le four-
neau étaient effectuées par les hommes. Les femmes lavaient les roches de façon
qu’elles soient absolument propres, les concassaient et les apportaient jusqu’au
bâtiment où était édifié le fourneau, mais il leur était strictement interdit
d’approcher ce dernier pendant le processus de réduction lui-même.
Pour fabriquer le charbon de bois servant à obtenir la chaleur nécessaire à la
réduction du fer, trois espèces de bois dur étaient brûlées. Il s’agit de l’erun (tali),
également appelé obo (Erythrophleum guineense), de l’orupa dudu, également
appelé ako orupa, et du ponhan. Les noms botaniques de ces deux derniers restent
à ce jour inconnus. Pour faire démarrer le feu, on utilisait un mélange de char-
bon de bois et de bouse animale séchée réduit en poudre. Quand tout était prêt,
la poudre allume-feu était versée dans le fourneau, une courte cérémonie propi-
tiatoire était organisée en l’honneur d’Ogun et le feu était allumé. Le charbon de
bois et la roche ferrugineuse étaient versés dans le fourneau dans des proportions
convenues. Le feu était entretenu et brûlait à plein régime pendant 3 jours
(72 heures) au cours desquels on parvenait à produire une température de plus
54 Isaac Adeagbo Akinjogbin

de 1 050 °C. Puis on le laissait refroidir pendant 2 jours (48 heures) avant de
retirer le fer du fourneau. Pour produire de l’acier, le fer était réchauffé à la forge,
où le forgeron le débarrassait de toutes ses impuretés (appelées pepe irin) et y
introduisait du carbone. L’acier ainsi produit était largement utilisé pour fabri-
quer des outils volumineux et lourds.
Peut-être serait-il bon de souligner un certain nombre de caractéristiques de
la réduction du minerai de fer en Pays yoruba. Premièrement, tous les matériaux
utilisés du début à la fin du processus étaient intégralement produits localement
et disponibles dans pratiquement toutes les localités du Pays yoruba, même si
certaines régions étaient mieux loties que d’autres. Ils n’étaient jamais importés
car cela n’était pas nécessaire. Deuxièmement, même si la technique était simple,
elle était efficace et permettait de satisfaire totalement la demande en fer et pro-
duits dérivés des Yoruba. L’excédent de fer qu’il leur restait probablement était
exporté chez leurs voisins, preuve que complexité de conception n’est pas tou-
jours synonyme d’efficacité. Troisièmement, et cela ne ressort peut-être pas clai-
rement de la description qui vient d’en être faite, l’ensemble du processus n’était
pas uniquement considéré comme une opération « technique » ou « technologique » ;
il avait également une certaine valeur religieuse. À chaque étape du processus de
production, les fondeurs devaient respecter certains codes de conduite et des
offrandes propitiatoires étaient faites à Ogun, qui était révéré en sa qualité d’oni-
porin akoko (premier fondeur de fer). Avant d’enflammer l’allume-feu, la nature
même du feu était invoquée afin que celui-ci parvienne à produire la plus forte
chaleur possible. Le fer ainsi produit était à son tour considéré comme « pur » et
capable d’« entendre » lorsqu’on lui parlait dans le langage approprié. Il n’était ni
« impur » ni « sourd », comme le fer européen.

La fabrication d’ustensiles en fer


Selon Johnson (1921), « avant le commerce avec les Européens, tous les articles
en fer et en acier, depuis les armes de guerre jusqu’aux épingles et aiguilles »
étaient fabriqués par les Yoruba à partir du fer et de l’acier produits dans leurs
propres fourneaux. Adeniji (1977) a tenté, sans succès à notre avis, de dresser la
liste de tous les produits fabriqués dans les ateliers des forgerons yoruba. En fait,
ces derniers s’enorgueillissaient d’être capables de pouvoir fabriquer à peu de chose
près n’importe quoi, pour autant qu’on leur en fît une description claire4. Ils
n’étaient pas très loin de la vérité puisque, peu après l’introduction du fusil au Pays
yoruba, au XIXe siècle, ils en maîtrisèrent rapidement la fabrication ainsi que celle
de balles en fer en remplacement des balles en plomb apportées par les Européens.

4. Ce qui est résumé dans l’Uprina Sauomg : « Apejuwe ni alagbede ro » [Un forgeron
peut fabriquer n’importe quel objet pourvu qu’on le lui décrive].
L’impact du fer en Pays yoruba 55

La conception de l’atelier du forgeron qui produisait tous ces instruments


était encore plus simple que celle du fourneau5. Il s’agissait d’un abri ouvert, rec-
tangulaire, d’environ 2 mètres sur 4. Son élément principal était l’Ogun qui ser-
vait à la fois d’esprit protecteur et d’enclume pour le martelage lourd. L’akamo
(fixé au sol) était un autre appareil destiné au martelage d’objets plus petits. La
panoplie du forgeron se composait de l’emu (pince), de l’omo owu (petite masse
de fer), de l’iya owu (grosse masse de fer), du motaake (marteau de fer), de l’ilu
(poinçon) et d’un obe (couteau). L’ensemble pouvait être emballé dans une caisse
et emporté d’un endroit à l’autre, y compris sur le front en cas de guerre. Il y
avait deux types de soufflets (ewiri), verticaux et horizontaux. Les enveloppes de
palmistes (eesan) fournissaient le matériau nécessaire pour porter le fer à la tem-
pérature requise. Chaque ville yoruba avait autant de forges qu’en exigeaient son
agriculture et sa défense. Une petite ville pouvait en avoir 5 et une grande ville
comme Ibadan des centaines.
Contrairement aux fourneaux de réduction du minerai, le forgeage n’a pas
entièrement disparu du Pays yoruba. En fait, il a fait preuve d’une remarquable
capacité d’adaptation à l’évolution de la culture technique, bien qu’il ait été offi-
ciellement négligé et parfois même découragé. Aujourd’hui, les forgerons yoruba
fabriquent des boulons et des écrous pour les machines importées, des pièces déta-
chées pour les voitures et les moteurs, et parfois des machines simples comme des
égreneuses et des moulins (broyeurs). Ils pourraient faire bien d’autres choses
encore s’ils recevaient une formation appropriée et des encouragements officiels.

La technique du fer dans la culture yoruba


Comme nous l’avons déjà dit, la réduction du minerai de fer et sa fabrication
n’étaient pas uniquement considérées comme un ensemble de techniques, même
si c’en était un indubitablement. Du fait qu’elles touchaient la survie même du
Yoruba, tant du point de vue de son approvisionnement alimentaire que de sa
sécurité, elles sont devenues parties intégrantes de son bien-être spirituel.
Comme nous l’avons déjà fait observer, Ogun oniporin akoko (le premier fondeur
de fer et le premier forgeron) est la divinité royale du Pays yoruba. Et partout où
se répandait l’influence politique yoruba, Ogun était présenté comme l’orisha
royal. Nous avons également relevé qu’Ogun était le saint patron de tous ceux
qui travaillaient le fer, qu’il s’agisse des fondeurs ou des forgerons. Aujourd’hui,
les conducteurs de véhicules à moteur, les tailleurs, les soudeurs et quiconque
utilise du fer quotidiennement dans son métier ou sa profession reconnaissent
consciemment ou inconsciemment Ogun comme saint patron.

5. La description qui suit est entièrement tirée de mes propres observations sur le
terrain.
56 Isaac Adeagbo Akinjogbin

Comme dans la plupart des anciens métiers du Pays yoruba, les fondeurs de
fer et les forgerons appartenaient à des lignées spéciales (ebi). Ils portaient des
scarifications faciales particulières, appelées gombo, et ogun servait de préfixe à
leur nom6. Leurs couleurs favorites étaient le blanc et le noir. Le rouge était tout
particulièrement interdit. Leur boisson préférée était le vin de palme. Ils se
devaient d’être moralement droits parce que l’on prêtait à Ogun, leur dieu tuté-
laire, un tempérament emporté et qu’on le pensait capable de punir instantané-
ment ceux qui se seraient écartés du droit chemin. Les mineurs croyaient que
toute mauvaise action risquait d’entraîner l’effondrement du puits de mine sur
leur tête.
La capacité d’Ogun à punir instantanément continue d’être exploitée.
Jusqu’à ce jour, quand un oba siège pour écouter une affaire, un objet en fer sym-
bolisant Ogun est placé en face de lui. Le plaideur s’agenouille auprès du sym-
bole et, lorsqu’il a prêté serment au nom d’Ogun, on peut être sûr qu’il ne
mentira pas de façon éhontée. Dans les tribunaux modernes même, on pense
qu’un plaideur qui prête serment au nom d’Ogun dira la vérité, car il croit
qu’Ogun lui rendrait justice même si les tribunaux ne le faisaient pas.

6. Comme dans des noms tels que Ogunbayo, Ogunfansi, etc.


Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 57

Deuxième partie
Rencontres sur la métallurgie du fer
en Afrique
UNESCO, Paris,
12 novembre 1999
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 59

La chaîne opératoire en sidérurgie :


matériaux archéologiques et procédés.
Apport des études métallographiques
Philippe Fluzin

La chaîne opératoire en sidérurgie


En partant d’un minerai, substance naturelle, pour arriver à un objet fonctionnel
en fer, il faut passer par une succession d’étapes techniques au cours desquelles la
matière subit des transformations chimiques et physiques. Les études archéomé-
triques des objets et déchets métallurgiques visent à reconstituer cette chaîne
opératoire (figure 1).
La phase initiale de l’art des métaux consiste à séparer, au sein du minerai, le
métal des autres éléments auxquels il est associé. L’un des plus importants d’entre
eux est l’oxygène (le fer possède trois oxydes : l’oxyde ferrique — hématite,
Fe2O3, qui peut être hydratée, goethite, limonite… —, l’oxyde magnétique —
magnétite, Fe3O4 — et l’oxyde ferreux — wustite, FeO). Il faudra éliminer l’oxy-
gène à l’aide d’un autre composé chimique, par exemple le carbone que contient
le charbon de bois. L’obtention du métal passera donc par la réduction successive
de ces oxydes.
Les autres éléments contenus dans le minerai (gangue) seront plus ou moins
bien évacués sous la forme de scories.
On notera la tendance des métaux réduits à revenir à l’état d’oxydes (hormis
l’or) au contact de l’environnement : c’est ce qu’on appelle l’oxydation (corro-
sion). En effet, les métaux « vivent » dans un milieu qui contient précisément
l’élément (l’oxygène) dont on les a séparés pour les produire.
Quels que soient l’époque, le lieu et le procédé considérés, trois éléments
indissociables vont entrer en jeu au cours du processus de réduction (figure 1) :
• le minerai. Le fer est le quatrième élément de la croûte terrestre mais il existe
dans le minerai sous des combinaisons minéralogiques très variées. La valeur
et l’exploitation d’un minerai dépendent évidemment de sa teneur en oxydes
de fer mais également et surtout de la nature et de la concentration des
60 Philippe Fluzin

Approvisionnement des matières premières


Recherche, Forêts Gisements Air,
extraction de houilles oxygène

MINERAI COMBUSTIBLE COMBURANT

Préparation Bois Houille


Lavage
Concassage
Broyage Soufflerie :
Flottation Charbonnier Coke Charbon -naturelle
Triage Darby (1709) pulvérisé -manuelle
Grillage -hydraulique (XIIes.)
Calcination -copwer (XIXes.)
Agglomération

Élaboration DIRECTE RÉDUCTION INDIRECTE


(phase solide) (phase liquide)

BASSE TEMPÉRATURE MOYENNE TEMPÉRATURE HAUTE TEMPÉRATURE


Bas fourneau : -Hõganãs (1910) Haut fourneau (Hochofen) :
-2000 av J.-C, Termit, Niger -Wiberg (1919) -Europe (XIIe, XIVe-XVesiècles)
-1300 av J.-C, Anatolie -Krupp-Renn (1932) STÜCKOFEN -Chine (800 av J.-C)
-Four catalan -Hyl-Midrex (1957) -Bas fourneau électrique

ÉPONGE ÉPONGE DE FER RIBLONS


PRÉRÉDUIT FONTE FERRAILLES
FER-ACIER

Épuration
CINGLAGE AFFINAGE

Décarburation Forge Four Au vent Sur sole Four Seconde fusion,


à puddler électrique cubilot

Italie , -Wallon XVes. -Cort (1784) -Bessemer (1855) -Martin (1864) -Moissan (1892)
Val Gabbia, -Comtois XVIIIe s. -Thomas (1875) -Kjellin (1900)
Ve-VIe s. -Nivernais à l'oxygène (1948)

Cémentation
FER ACIER ACIER
Acier au creuset
Huntsman (1740)
Formage
FORMAGE FORMAGE
phase solide phase liquide

Forgeage Laminage Coulée Coulée continue Moulage


1550-1600 en lingotière (1942-1943)

Démoulage
Réchauffage
Laminage :
-blooming
-stabling

PRODUITS
SEMI-FINIS
ET FINIS

Figure 1. Le processus sidérurgique et son évolution historique (© P. Fluzin, 2000. En


collaboration avec V. Serneels, Institut de minéralogie, Université de Fribourg, Pérolles,
1700 Fribourg, Suisse)
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 61

éléments auxquels il est associé. Le minerai est donc rarement utilisé tel qu’il
est extrait de la mine. Sa préparation se fait par un certain nombre de traitements
préliminaires (lavage, concassage, triage, calibrage, grillage, calcination…) ;
• le combustible (charbon de bois, tourbe, coke…). Le carbone qu’il contient
est un agent triple : thermique, réducteur et se combinant avec le fer pour
donner l’acier et la fonte (planche VIII). La différenciation entre fer, acier et
fonte est fondamentale dans l’histoire de la sidérurgie. L’homme sait parfai-
tement les distinguer par leur aspect visuel et mécanique, mais il faudra
attendre les travaux de Roozeboom, en 1889, et d’Osmond, en 1898 (Che-
zeau et Fluzin, 1997), pour disposer de diagrammes d’équilibre qui permet-
tent de définir théoriquement le domaine d’existence du fer, de l’acier et des
fontes (fer pur : moins de 0,02 % de carbone, acier : de 0,02 à 1,7 % de car-
bone, fonte : de 1,7 à 6,67 % de carbone) ;
• le comburant (oxygène de l’air). C’est principalement ce facteur qui condi-
tionne le niveau des températures atteint dans les fours. Cherchant à amélio-
rer celui-ci, on abandonnera le tirage naturel pour des procédés à air pulsé
d’abord manuels (soufflets) puis hydrauliques (au XIIe siècle) et mécaniques.
Comme l’indique la figure 1, il est donc indispensable de considérer dans le pro-
cessus sidérurgique de nombreuses étapes : préparation, réduction, épuration,
forgeage et mise en forme… Nous résumerons certaines d’entre elles ci-après.

Les procédés d’élaboration du métal


et les principaux vestiges archéologiques associés
Sans chercher à entrer dans le débat des origines plus ou moins controversées de
la sidérurgie (Pleiner, 2000) — il n’y a sans doute pas qu’un seul centre d’origine
et de diffusion : 1300 av. J.-C. en Anatolie, 2000 av. J.-C. au Niger, site de Ter-
mit (nos récents travaux en RCA indiquent l’existence très ancienne de plusieurs
foyers en Afrique) —, il nous semble plus opportun de résumer les étapes de
l’évolution des procédés sidérurgiques (figure 1).
Ces derniers présentent de nombreuses variantes que l’on peut toutefois syn-
thétiser en prenant comme premier critère la température atteinte dans les fours
qui conditionne l’état physique des matériaux traités. Soit T la température per-
mise par le procédé utilisé et Tf la température de fusion du métal :
• si T est inférieure à Tf, nous sommes dans le cas de la filière dite directe (on
passe directement du minerai au fer et/ou à l’acier). Le métal issu de la réduc-
tion est encore à l’état solide (pâteux), seules les scories peuvent s’écouler du
fourneau ;
• si T est supérieure à Tf, nous abordons la filière indirecte. Les produits issus
de la réduction sont liquides : la fonte et le laitier. Bien que la fonte puisse
être moulée, elle n’est pas forgeable car trop cassante et devra être décarburée
62 Philippe Fluzin

pour obtenir l’acier selon deux grandes familles d’affinage ; l’affinage sans
fusion et l’affinage avec fusion. C’est à cause de cette étape supplémentaire,
l’affinage, que l’appellation indirecte a été retenue. Nous aborderons dans ce
texte essentiellement les aspects concernant la sidérurgie directe (pour la
sidérurgie indirecte, voir Fluzin, 1999 et 2000a et b ; Petrequin et al., 2000).

LA CHAÎNE OPÉRATOIRE EN SIDÉRURGIE DIRECTE


En sidérurgie directe, il est possible de distinguer trois étapes principales (réduc-
tion, épuration et élaboration de l’objet) qui sont ou non liées dans l’espace
(planche I).
Chacune de ces étapes implique un procédé et génère un produit et des
déchets plus ou moins spécifiques. Nous les résumerons sommairement en
n’entrant pas dans la description des processus physico-chimiques.

La réduction
La première étape consiste à transformer (par réduction) le minerai de fer en
métal brut dans un bas fourneau (planche I, photos 1 et 2). Cette opération, qui
combine minerai, charbon de bois et oxygène de l’air, s’effectue à une température
inférieure à celle de la fusion du métal. Le fer et l’acier issus d’une telle opération
demeurent à l’état pâteux. La gangue du minerai se transforme, quant à elle, en une
scorie plus ou moins liquide (suivant la composition du minerai ou l’emploi
d’ajouts : les fondants). Elle s’écoule ou s’accumule à l’intérieur ou à l’extérieur du
four (planche I, photos 4, 5 et 6). L’étude morphologique détaillée des scories
apporte des informations sur le fonctionnement et l’architecture du fourneau
(Groupe de travail suisse de l’archéologie du fer, 1997 ; Leroy, 1997 ; Serneels,
1993). On trouve principalement des scories ayant coulé à l’extérieur du fourneau
sous forme de plaques ou de cordons simples ou superposés (planche I, photo 4).
Elles peuvent mouler une dépression ou un chenal aménagés devant le fourneau
pour les recevoir (Biélenin et al., 1998). Les scories qui restent dans le fourneau se
présentent sous forme de blocs plus ou moins compacts moulant le fond de la cuve
ou imbriqués dans la masse du charbon de bois (planche I, photos 5 et 6). Les sco-
ries de réduction directe sont en général denses et constituées de silicates et d’oxy-
des de fer accompagnant une phase vitreuse plus ou moins abondante. Dans
certains cas, lors du refroidissement, la porosité est beaucoup plus importante (sco-
ries spongieuses, légères). Ces scories forment des accumulations parfois très
importantes (ferriers), souvent repérables sur le sol lors d’une prospection.
Il ne nous est pas possible de faire une typologie précise des bas fourneaux
tant leur diversité est grande, mais il est possible de les regrouper par exemple en
trois familles selon que la scorie se sépare plus ou moins facilement du métal et
qu’elle s’écoule à l’intérieur ou à l’extérieur du fourneau (Pelet, 1982 ; Biélenin
et al., 1998 ; Serneels, 1998 ; Pleiner, 2000).
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 63
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64 Philippe Fluzin

Planche I. La réduction directe et ses produits


Photo 1. Mission ethno-archéologique : bas fourneau contemporain au Burkina Faso,
site de Toungaré, province de Bulkiemdé, 1994 (© P. Fluzin).
Photo 2. Reconstitution expérimentale : bas fourneau sur le modèle de type 2 des
Clérimois (Yonne), archéodrome de Beaune, 1996 — C. Dunikowski, S. Cabboï,
P. Fluzin et A. Ploquin (© P. Fluzin).
Photo 3. Reconstitution ethno-archéologique : forges d’Agorregi, Pays basque (Espagne),
1999 — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach, V. Serneels et P. Dillmann
(© P. Fluzin).
Photo 4. Scories denses coulées en plaques (cordons successifs). Expérimentation bas
fourneau de type Aulnay-Truchet (Sarthe), 1997 — C. Dunikowski, S. Cabboï,
P. Fluzin et A. Ploquin (© P. Fluzin).
Photo 5. Scories coulées internes. Site archéologique de Danawel (Sénégal), 1995 —
H. Bocoum et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 6. Fond de four : fouille A 28. Site d’Aulnay-Truchet (Sarthe), 1997 —
S. Cabboï (© P. Fluzin).
Photo 7. Loupe contemporaine. Mission ethno-archéologique, site de Toungaré
(Burkina Faso), 1994. Poids 60 kg (© P. Fluzin).
Photos 8 et 9. Reconstitution ethno-archéologique : forge d’Agorregi, Pays basque
(Espagne), 1999, loupe n° 8, 21 kg — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach,
V. Serneels et P. Dillmann (© P. Fluzin).

Quel que soit le type de bas fourneau, on introduit dans sa partie supérieure
alternativement du charbon de bois et du minerai (ou des mélanges de minerais
et éventuellement des fondants). La combustion est assurée par une ventilation
naturelle et/ou artificielle en utilisant des soufflets.
Le nombre de paramètres intervenant dans la conduite de l’opération de
réduction est très important. Seul le savoir-faire permet de les maîtriser. Celui-ci
ne laissant hélas aucune trace archéologique, il est indispensable, pour tenter de
l’appréhender, d’effectuer de nombreuses expérimentations et, dans la mesure du
possible, d’observer in situ et in vivo les rares ethnies africaines appliquant encore
cette technique (en se méfiant d’une comparaison totale) (Celis, 1991 ; Fluzin
et al., 1995 ; Petrequin et al., 2000 ; Fluzin, Serneels et al., à paraître). À l’issue
de la réduction (dont la durée, qui varie avec le type de fourneau et les conditions
de ventilation, peut, selon nos expérimentations, aller de 4 à 24 heures), on
retire du fourneau (par une ouverture ou en détruisant le four) une masse plus
ou moins hétérogène et spongieuse : l’éponge de fer (massiot, loupe) (planche I,
photos 7, 8 et 9). Elle peut peser (suivant la taille du four et la quantité de mine-
rai introduit) de quelques centaines de grammes à 90 kilos pour des exemples
africains que nous connaissons. C’est un agglomérat plus ou moins compact de
métal (fer/acier) (planche I, photo 9), de scories et de charbon de bois. La maî-
trise de la conduite du procédé de réduction influence beaucoup sa « qualité » et
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 65

l’éponge de fer est donc rarement suffisamment dense et pure pour ne pas exiger
un travail d’épuration. Il est vraisemblable que, dans presque tous les cas, ce tra-
vail est indispensable.

L’épuration
L’épuration consiste en un martelage à chaud (cinglage) de la loupe afin de den-
sifier le métal en évacuant les impuretés (planche II). Suivant la qualité (homo-
généité, compacité de la loupe), nous pouvons distinguer au moins deux grandes
familles d’épuration (figure 2) :
• le travail à partir de la masse directement à la sortie du four ou après passage
dans un foyer ou un four spécifique (planche II, photo 10) ;
• la fragmentation de la loupe en morceaux plus ou moins importants afin
éventuellement de les trier (séparation des stériles mais aussi du fer et de
l’acier comme le pratiquent notamment certains artisans japonais) et de les
assembler ensuite à la forge (planche II, photo 11).
Il peut être tout à fait intéressant d’effectuer une première épuration (dégrossis-
sage) de la loupe dès la sortie du four de réduction. En effet, en profitant de
l’inertie thermique, cela favorisera l’agglomération du métal et sa compacité tout
en évacuant un certain nombre de stériles. Toutefois, un travail de forge d’épura-
tion plus poussé est souvent indispensable et s’effectue a priori dans un foyer ou
un four spécifique (planche II, photos 12 et 13). Il est à cet égard intéressant de
mentionner le cas où la loupe est introduite telle quelle (ou par gros fragments
suivant son volume) dans de tels fours afin de fluidifier au maximum les scories
associées (notamment dans le cas que nous appelons de loupe « sale »). Certains
exemples ethnologiques et archéologiques démontrent cette pratique (Martinelli
et al., 2000). L’éponge de fer (loupe) est ainsi « asséchée » plus ou moins effica-
cement de ses scories externes (et internes) en générant une configuration parti-
culière de vestiges : les scories coulées de type « canal » (Biélenin et al., 1998).
Notons que dans ce cas, suivant la nature plus ou moins réductrice de l’opé-
ration, on peut également contribuer à renforcer la carburation de l’éponge par
cémentation. Il n’est pas absurde de pouvoir ainsi obtenir des aciers très carbu-
rés, voire de la fonte (Fluzin, 1999), en repassant plusieurs fois la loupe dans le
même fourneau (il n’est pas exclu de réutiliser le bas fourneau pour ce type
d’opération).
En ce qui concerne les déchets associés à l’opération d’épuration — qui peut
comporter plusieurs étapes : dégrossissage primaire et secondaire (Mangin et al.,
2000b) —, ils peuvent être de nature très variée : fragments de scories coulées,
scories informes plus ou moins riches en métal, fragments métalliques déchique-
tés imbibés de scories… Ce sont ces derniers types de déchets que l’on qualifie
de gromps (Nosek, 1994) (planche II, photo 15). Ils sont caractéristiques de
l’activité même de « compactage » de la loupe. Leur proportion varie considéra-
blement d’une loupe à l’autre en fonction de la qualité de celle-ci (densité du
Figure 2. La chaîne opératoire du fer : l’épuration (© P. Fluzin, 1999)

66
ESSAI DE TYPOLOGIE DES PRATIQUES D'ÉPURATION
EN FONCTION - Des dimensions et de la qualité de l'éponge de fer, de la loupe (densité, hétérogénéité : loupe «sale ou propre»)
- Du savoir-faire
- De la destination et de l'usage du demi-produit (lingot, ébauche) puis du produit fini (objet)

DEUX GRANDES FAMILLES DEGRÉ CROISSANT D'ÉPURATION MISE EN FORME


➟ DE L'OBJET
A. Dans la continuité de la réduction (proximité de lieu)
➟ ➟
➟ demi-produit

DEGRÉ DE TRANSFORMATION
➟ ➟ ➟
ÉPONGE CHAUDE LOUPE LOUPE

Philippe Fluzin
ou fragment
Dégrossissage,
➟ ➟
de loupe
compactage, (gromps)
fragmentation éventuelle
Culot
Culot Scories Battitures
Scories Battitures
B. Après interruption (lieu différent) Gromps
THERMIQUE

Culot


Scories coulées
(type canal) ➟
➟ Réchauffage
Séparation- Culot
ÉPONGE FROIDE fluidification des scoriers LOUPE

Scories Battitures
MÉCANIQUE
➟ ➟ ➟ Soudure,
association directe
ou en creuset
Concassage, Fragmentation,
séparation métal-scorie tri sélectif fer-acier
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 67
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68 Philippe Fluzin

Planche II. L’épuration, pratiques et déchets


Photo 10. Reconstitution ethno-archéologique : forges d’Agorregi, Pays basque
(Espagne), 1999 — M. Urteaga, P. et S. Crew, P. Fluzin, R. Herbach, V. Serneels et
P. Dillmann (© P. Fluzin).
Photo 11. Procédés traditionnels japonais. réduction, épuration par fragmentation de la
loupe, forge de lames, polissage. Nancy, Jarville 1989 — O. Masami, W. Ryosui,
P. Merluzzo, C. Forrières, A. Thouvenin et A. Ploquin (© P. Fluzin).
Photo 12. Foyer de forge d’épuration contemporain. Mission ethno-archéologique, site
de Toungaré (Burkina Faso), 1994 (© P. Fluzin).
Photo 13. Foyer de forge d’épuration et de mise en forme d’objets. Expérimentation,
Nancy, 1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).
Photo 14. Culot (1,5 kg) après épuration d’une loupe de 4,7 kg. Expérimentation,
Nancy, 1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).
Photo 15. Gromps. Macrographie avant et après coupe. Agglomération antique de
Blessey-Salmaise (échantillon F104/06 : 109 g) (Côte-d’Or), 2000 — M. Mangin et
P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 16. Culot de forge (409 g), site de Cricket (Alexandrie, Égypte), époque
hellénistique — V. Pichot et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 17. Section de culot archéologique. Site de Ponte di Val Gabbia, Bienno (Italie),
Ve-VIe siècle apr. J.-C. ; poids 2,5 kg, 1998 — C. Cuccini-Tizzoni, M. Tizzoni et
P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 18. De gauche à droite : fragment de métal, scories, billes de scories récupérées au
fond du foyer d’épuration. Expérimentation, Belfort, 1995 — D. Leclère et P. Fluzin
(© P. Fluzin).

métal, propreté « inclusionnaire », porosité…). Divers matériaux fondus s’accu-


mulent au fond du foyer d’épuration (planche II, photo 14) et forment une sco-
rie en forme de calotte plus ou moins hémisphérique, ou culot (planche II,
photos 16 et 17).
Les culots ou calottes d’épuration sont généralement de taille importante et
sont hétérogènes, avec de nombreuses inclusions de fragments métalliques
témoignant d’une activité thermomécanique sommaire (Mangin et al., 2000b)
(planche II, photo 17). Cependant, l’aspect morphologique (masse) des culots
n’est pas un critère discriminant suffisant comme l’indiquent nos travaux concer-
nant les forges de Blessey (Mangin et al., 2000a). En effet, la taille d’un culot est
plutôt liée à la quantité de matière travaillée (avec ou sans ajouts).
Par ailleurs, l’étude archéométrique d’un culot synthétise une information
globale très importante en ce qui concerne l’activité de forge pratiquée dans le
foyer qui l’a engendré. Celle-ci peut être plurielle. Les chutes de métal (frag-
ments, ébauches, rebuts, produits de recyclage et de récupération d’objets…),
quant à elles, délivrent une information sélective sur l’objet technique qui est
d’un autre ordre que celles qu’apportent les déchets de type scorie : qualité du
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 69

métal travaillé, dextérité du travail (soudures, traitements thermiques, type


d’outil utilisé…).
Il convient d’être conscient de ces spécificités et de pratiquer des études croi-
sées aussi larges que possible lors de la sélection de l’échantillonnage compte tenu
de leur complémentarité.
La proportion de scories associées au travail d’épuration d’une loupe
« propre » ou d’une épuration secondaire peut être relativement faible. Il est clair
que ce n’est pas le cas pour une loupe comportant encore une grande proportion
d’éléments non métalliques (loupe « sale ») et lorsque l’on utilise des ajouts,
désoxydants ou fondants (sable, argile…).
D’après nos expérimentations, d’une part, et l’ethno-archéologie, d’autre
part, il s’avère que l’épuration d’une loupe considérée comme « sale » occasionne
des pertes d’environ 80 % de son poids initial pour obtenir un lingot (Crew,
1991 ; Dillmann et al., 1998 ; Fluzin, 1999 ; Leroy, 2000). Ces pertes se répar-
tissent comme suit : 50 % pour des éléments à forte teneur en métal déchiqueté,
enrobés de scories, qui pourront par extension être voisins de ce que l’on
dénomme des gromps, 10 % de battitures et 20 % de scories et de billes. Dans le
cas de l’épuration d’une loupe « propre », les pertes sont de l’ordre de 50 % seu-
lement, avec une forte proportion en début d’opération. Le poids du culot
obtenu, sans tenir compte d’éventuels ajouts, est proche de la moitié de la loupe
initiale. Ces données, si elles peuvent contribuer à estimer prudemment les
quantités produites (métal, déchets), indiquent surtout une perte importante de
fragments métalliques dont certains se retrouvent dans les culots ou les scories
informes (gromps).
L’utilisation d’une enclume massive en métal (acier) se révèle inappropriée
au début de l’opération d’épuration surtout dans le cas d’une loupe hétérogène
(compacité insuffisante, présence de fer et d’acier introduisant le problème des
paliers de soudabilité…). En effet, la propagation des ondes de choc contribue à
désolidariser le métal en cours d’agglomération et entraîne une perte importante.
C’est pour cette raison que nous avons, dans nos expériences, commencé l’épu-
ration au billot de bois (planche IV, photo 28) avant de la terminer à l’enclume
métallique. L’usage d’un maillet en bois est également favorable à ce stade.
Il convient donc toujours, lors de la fouille d’un site de forge, de ne pas
oublier qu’une enclume n’est pas nécessairement en métal. Outre la notion de
coût d’un tel outil, le bois et la pierre (planche IV, photos 29 et 30) peuvent être
employés avec pertinence pour de nombreux travaux de forge compte tenu de la
qualité intrinsèque de ces matériaux (ici aussi, l’apport de l’ethno-archéologie est
considérable). Ils atténuent la propagation de l’onde de choc et sont donc parti-
culièrement adaptés aux opérations de soudure (épuration, recyclage…). Le bois
n’est pas toujours conservé mais, en ce qui concerne la pierre, il est important
d’observer in situ les surfaces de celle-ci afin de déceler certains plans de frappe
ou d’oxydation superficielle (planche IV, photo 30). Par ailleurs, les dimensions
70 Philippe Fluzin

de l’enclume sont également à considérer. En fonction du travail à réaliser, il n’est


pas systématiquement nécessaire de posséder une enclume massive. Les enclu-
mes « Tas » en sont un bon exemple (planche IV, photo 31). Enfin, en l’absence
de vestiges matériels concernant l’enclume, il est souvent possible de localiser sa
position par rapport au foyer de forge compte tenu d’exigences fonctionnelles et
de différences de coloration du sol dues à la présence de battitures. L’atelier
F 104 de Blessey illustre parfaitement ces remarques (Mangin et al., 2000a).
Le produit issu de l’épuration est en principe un demi-produit (lingot) plus
ou moins bien manufacturé comme en témoignent quelques exemples archéolo-
giques et de reconstitution (planche III). La qualité de la mise en forme du lin-
got, compte tenu des efforts qu’elle nécessite, doit traduire la spécialisation d’un
atelier ou une destination particulière à caractère « commercial » (cas des lingots
bipyramidaux — planche III, photos 24 et 27 — ou des currency bars (sortes de
barres plates) — planche III, photo 21). En effet, les exemples africains nous
indiquent que pour une utilisation locale, on ne se soucie pas de produire des
formes particulièrement élaborées (Fluzin, 1994) (planche III, photo 19).
Il est intéressant de constater que dans la Gaule rurale, les demi-produits qui
circulaient n’avaient pas une qualité d’épuration excellente et étaient plus pro-
ches de fragments de loupes sommairement épurées (Mangin et al., 2000b).
Les lingots peuvent donc prendre l’aspect de fragments de loupes sommaire-
ment épurées (planche III, photo 19), de barres (planche III, photo 20), de
feuilles repliées sur elles-mêmes, de « saumons » (planche III, photos 22, 23, 25
et 26), de bipyramides effilées (planche III, photos 24 et 27), d’ébauches et de
currency bars (planche III, photo 21). Leur taille varie en fonction des loupes ini-
tiales, du degré d’épuration, de la nature du métal (fer/acier) et de la destination
du produit.

Le forgeage de l’objet
Cette troisième phase de la chaîne opératoire est pratiquée par le forgeron sur
l’enclume pour mettre en forme les objets (planche IV, photo 32). L’emploi du
terme forgeage devrait être limité aux traitements thermomécaniques de mise en
forme et aux traitements thermochimiques qui modifient la structure et la com-
position du métal. Le matériau de départ peut être un lingot ou une pièce de
métal correspondant à une ébauche de l’objet à produire, ou encore un lopin issu
du recyclage de différents fragments métalliques. Les déchets les plus caractéris-
tiques de cette étape sont les battitures, petites plaquettes d’oxydes de fer qui se
détachent de la surface du métal au cours du martelage (planche IV, photo 34).
Elles sont évidemment abondantes à proximité de l’enclume. Cela peut, comme
nous l’avons indiqué, signaler son existence même quand elle n’est plus là. Les
battitures sont en effet le résultat de l’oxydation du métal après son passage dans
le foyer de forge et son martelage. Pour la fabrication d’un objet donné, la pro-
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72 Philippe Fluzin

Planche III. Les demi-produits et les lingots


Photo 19. Loupe épurée considérée comme un lingot (époque contemporaine, 420 g).
Mission ethno-archéologique, site de Toungaré (Burkina Faso), 1994 (© P. Fluzin).
Photo 20. Lingot gallo-romain en forme de barre irrégulière : site de Touffreville
(Calvados), 1995. Poids : 2,410 kg ; longueur : 21 cm ; largeur maximale : 5,5 cm ;
section trapézoïdale : 5,5 × 5,4 × 4 cm — N. Coulthard et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 21. Barre ébauche du type currency bars : site d’Aulnat (Auvergne), 250-200
av. J.-C., 737 g — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photos 22 et 25. Lingot (probablement) gallo-romain : site de Coulmier-le-Sec (Côte-
d’Or), poids 4,7 kg, longueur 16,3 cm, section médiane 7,5 × 7,2 cm — J. Dumont
(© P. Fluzin).
Photos 23 et 26. Lingot de Carthage (IVe-IIIe siècle av. J.-C.). Poids : 1,77 kg ;
longueur : 20 cm ; largeur : 6,5 cm ; épaisseur : 4 cm — F. Essaadi et P. Fluzin
(© P. Fluzin).
Photo 24. Lingot bipyramidal (dragage de l’Oise). Poids : 4,3 kg ; longueur : 55 cm ;
section médiane : 6,3 × 5,3 cm (© P. Fluzin).
Photo 27. Quart de section de lingot bipyramidal. Poids total : 4,3 kg — M. Leroy,
P. Merluzzo et P. Fluzin (© P. Fluzin).

portion de battitures produites est indirectement liée au nombre de passages


dans le foyer (chaude). Le martelage est, quant à lui, dépendant du savoir-faire
du forgeron et de la complexité de l’objet à réaliser.
D’après nos expérimentations dans une forge, les pertes au feu pour produire
un objet (pointerolle, épée) sont de l’ordre de 10 % du poids initial du métal de
base (lingot). Il faut souligner, dans ce cas, d’une part que le demi-produit était
parfaitement épuré et, d’autre part, que la dimension des battitures était fonction
du métal travaillé ; l’élaboration d’un objet de petite dimension (un clou de
chaussure, par exemple) engendre de petites battitures, ce qui n’est pas le cas,
bien sûr, pour une épée. Cela dit, les battitures ont tendance à se fragmenter
compte tenu de leur faible épaisseur et de leur grande fragilité. Par ailleurs, il
convient de rappeler que l’emploi d’ajout (pour faciliter les soudures) modifie
leur morphologie et leur nature.
Il peut être intéressant, à titre indicatif, d’estimer la quantité de métal tra-
vaillé lors de la fouille d’une forge en effectuant un prélèvement et un tamisage
des battitures comme nous l’avons réalisé pour les forges de Blessey (Mangin et
al., 2000a). Dans le foyer, les diverses matières fondues peuvent s’accumuler et
former une scorie en forme de calotte (planche IV, photo 33). Fréquemment, les
désoxydants (sable, argile, etc.) apportent une contribution importante à la for-
mation des culots de forge. On trouve aussi des scories informes plus ou moins
riches en métal, souvent fortement oxydées. En principe, ce travail ne produit
pas de scories coulées ; si elles existent, c’est en petite quantité. Les autres déchets
caractéristiques correspondent à des chutes de métal plus ou moins travaillé
(planche IV, photos 35 et 36).
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Planche IV. La forge : pratique, outils et déchets


Photo 28. Épuration de loupe avec enclume en bois. Expérimentation, Belfort, 1995 —
D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 29. Épuration sur pierre, Yelwani (Niger) (d’après G. Célis, 1991a).
Photo 30. Enclume de pierre 0,33 × 0,20 m, hauteur 0,17 m, 18 kg. Agglomération
antique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — A. Faivre, M. Mangin et P. Fluzin
(© P. Fluzin).
Photo 31. Enclume ethnologique, Naudjèla, province du Bulkiemdé (Burkina Faso).
Longueur : 145 mm ; largeur : 69 mm ; poids : 1,6 kg — H. T. Kienon et P. Fluzin
(© P. Fluzin).
Photo 32. Fin d’épuration d’une loupe à l’enclume. Expérimentation, Nancy, 1997 —
D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).
Photo 33. Culot de forge gallo-romain (Saverne). Poids : 205 g, vue de dessus —
A. M. Adam et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 34. Battitures lors de la forge d’un objet — D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 35. Chutes de forge, site d’Aigueperse (Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C. —
L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 36. Chute de métal avec empreinte de tranche à chaud (30 × 22 mm, 24 g).
Agglomération antique de Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin
(© P. Fluzin).

On voit que si les déchets issus de la réduction et ceux produits par les opé-
rations d’épuration et de mise en forme peuvent être aisément distingués, l’iden-
tification de ceux issus des deux stades postérieurs à la réduction est plus difficile.
Ces deux stades peuvent se pratiquer dans le même atelier, en utilisant les mêmes
foyers ou des foyers analogues juxtaposés, et ils peuvent ne constituer qu’une
seule opération. L’éponge de fer dégrossie de ses scories est purifiée par cinglage
et immédiatement, ou très rapidement, transformée en demi-produit (barre, lin-
got) puis, éventuellement, en objet, dans le même cadre spatial et avec les mêmes
structures et les mêmes outils. Il faut signaler à ce sujet que la quantité de déchets
(scories), en proportions relatives à l’opération, décroît lorsque l’on passe de la
réduction à la forge (épuration, élaboration), tout en considérant bien entendu
que le nombre d’opérations réalisées ainsi que le volume des produits traités
l’influencent forcément.

ARCHÉOMÉTRIE DES VESTIGES SIDÉRURGIQUES

Méthodologie
Les méthodes d’investigation sur les matériaux archéologiques au laboratoire
peuvent contribuer de manière très significative à la compréhension des vestiges
métallurgiques. De nombreuses possibilités d’analyses sont offertes et apportent
des résultats complémentaires (Serneels, 1994 ; Ploquin, 1994 ; Mangin et al.,
2000b). La recherche dans ce domaine est en progrès constant.
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 75

Cependant, les résultats de ces examens, relativement lourds et coûteux,


dépendent étroitement de la qualité de l’échantillonnage et des autres données
fournies par les constats archéologiques de terrain. Lors de la fouille d’ateliers, la
répartition spatiale spécifique de certains déchets permet d’identifier des aires de
travail spécialisées (minerai non réduit dans les aires de chargement des bas four-
neaux, battitures autour d’une enclume, etc.).
En plus de l’étude des structures et des relations stratigraphiques, il est essen-
tiel de prendre en compte l’ensemble des déchets métallurgiques (répartition,
classification macroscopique, tri et quantification). C’est une condition indis-
pensable à la réalisation d’un échantillonnage réellement représentatif. Par
ailleurs, il convient de ne pas oublier l’éventuelle présence de déchets « exotiques »
associés à d’autres, plus « classiques », et qui peuvent correspondre à des échecs,
à des essais, à des mélanges. À l’échelle de l’échantillon, l’étude de laboratoire est
compliquée par l’hétérogénéité de la physico-chimie des matériaux résultant de
la métallurgie du fer en phase solide. La cinétique des procédés mis en œuvre est
en général très loin d’atteindre les conditions d’équilibre théoriques (gradient de
température et de pression dans les fourneaux, irrégularités dans les flux
gazeux…). Quelles que soient les méthodes d’investigation, l’observation devra
être effectuée sur des prélèvements suffisamment grands pour être représentatifs.
Dans bon nombre de cas, c’est l’échantillon entier qui devra être étudié, en par-
ticulier pour les méthodes reposant sur un examen microscopique (« examen
micro de l’ensemble macro »).
Les hypothèses élaborées à partir des observations sur les matériaux archéo-
logiques peuvent être confrontées en comparant ces derniers aux déchets et pro-
duits des reconstitutions expérimentales (Fluzin et al., 2001) et à ceux provenant
des procédés traditionnels tels que l’on peut encore les observer dans certaines
parties du monde. L’ethno-archéologie fournit ainsi des données d’intérêt
majeur sur les aspects sociaux et économiques de la sidérurgie : gestuelle techni-
que, transmission des savoir-faire, organisation du travail et des échanges avec les
autres activités… (Fluzin et al., 1999).

Les différentes approches


C’est empreint d’humilité que l’archéomètre essaiera honnêtement de considérer
tous les faits physico-chimiques observés pour tenter une interprétation pluridis-
ciplinaire. Les erreurs d’interprétation sont sans doute amoindries par l’expé-
rience, le nombre des échantillons traités, la confrontation des données obtenues
avec différentes méthodes, la collaboration transdisciplinaire (notamment en
association la plus étroite possible avec l’archéologue de terrain), mais elles
demeurent. Il faut rappeler que le problème de la représentativité de l’échantillon
étudié reste au centre de toute démarche de ce type.
Dans le cadre de cet article, seules les approches archéométriques visant à
interpréter les déchets métallurgiques en tant que témoignages d’une étape
76 Philippe Fluzin

technique seront discutées, mais d’autres démarches sont envisageables : data-


tion des scories par thermoluminescence ou archéomagnétisme, par exemple. De
même, il ne faut pas négliger la contribution des sciences naturelles à l’étude de
la métallurgie ancienne (identification des charbons et autres combustibles…).
L’étude au laboratoire des déchets métallurgiques porte essentiellement sur
l’identification des constituants (chimie et minéralogie) et l’observation des tex-
tures microscopiques qui témoignent du mode de formation de ces matériaux.
Plusieurs techniques sont mises à contribution, de la plus grande échelle d’obser-
vation à la plus petite (les spécialistes concernés, métallurgistes, géologues et physi-
ciens, peuvent parfois avoir certaines différences d’approche et d’interprétation).
La métallographie (Fluzin, 1999 ; 2000a et b) contribue de façon majeure à
l’identification des phases métalliques et aux observations portant sur l’aspect des
grains, les oxydes, les inclusions en relation avec leur environnement et les textu-
res macroscopiques (matrice).
En général, l’échantillon est coupé et la surface obtenue est finement polie
(jusqu’à 1 micromètre). L’étude se fait alors avec un microscope qui permet
d’observer la disposition et la forme des grains de métal en utilisant le fort pou-
voir réflecteur de ces matériaux (lumière réfléchie). L’utilisation de différents
réactifs facilite l’observation. La dureté du matériau peut être mesurée par poin-
çonnement ponctuel (indentation). Des sections polies de grandes dimensions
(supérieures à 100 centimètres carrés) peuvent ainsi être observées.
On soulignera que des résultats complémentaires peuvent être obtenus par
des méthodes plus fines. C’est en particulier le cas des analyses chimiques élé-
mentaires ponctuelles (microsonde électronique à balayage…). En général, on
utilise pour ce type d’étude des lames ou sections polies de petites dimensions.
Pour résoudre des questions spécifiques, le recours à des techniques de pointe
(rayonnement synchrotron) est parfois nécessaire, comme dans le cas de la
microanalyse (microdiffraction et microfluorescence X) des inclusions non
métalliques dans les matériaux (Dillmann et al., 1998) (voir ci-après).

L’illustration de quelques résultats


LES INDICES DE DISCRIMINATION
MÉTALLOGRAPHIQUES (PLANCHES V À VIII)

L’objectif est de préciser un certain nombre d’indices discriminants de la chaîne


opératoire pour tenter de cerner, d’un point de vue métallographique, ce qui se
passe entre la réduction (loupe) et la mise en forme d’un objet. À cet égard, il est
important de préciser que si la présence d’un indice peut être révélatrice d’une
opération, son absence est également une information très intéressante. En effet,
l’inexistence d’un faciès typique peut aussi être considérée comme une informa-
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 77

tion importante ; elle permet en quelque sorte un raisonnement par élimination.


Par ailleurs, compte tenu de leurs spécificités, certains indices peuvent « survivre »
(héritage) à plusieurs opérations (c’est par exemple le cas pour les replis et les glo-
bules concentriques lors de la réduction et de la première phase d’épuration…),
mais ils peuvent être « incompatibles » avec d’autres opérations : c’est le cas,
notamment, des structures d’écrouissage dans des scories de réduction…
En tout état de cause, c’est l’analyse de cohérence de la présence et/ou de
l’absence des différents indices qui permet d’élaborer les hypothèses les plus fia-
bles. Notons que la maîtrise de la conduite du procédé de réduction conditionne
la qualité du produit obtenu (loupe « propre » ou « sale » en fonction de la den-
sité de métal, de la proportion de scories et de charbon de bois, de l’abondance
des porosités…) et, par conséquent, la quantité et le type de déchets de postré-
duction (scories, gromps, culots de tailles et de morphologies diverses…).

LES INDICES DE RÉDUCTION (PLANCHE V)

Nous donnerons quelques exemples d’indices métallographiques observés dans


des scories « coulées », qui sont généralement les plus nombreuses, mais aussi
dans certains gromps et dans des culots d’épuration.
Comme nous l’avons déjà signalé (Fluzin, 1994), la proportion relative
d’espèces à faible degré d’oxydation doit être prépondérante, compte tenu de
l’atmosphère réductrice (rapport wustite/magnétite/hématite), sans toutefois
exclure des réoxydations marginales (superficielles ou localisées). Il s’agit bien de
considérer ici l’importance relative des différents oxydes car l’exemple isolé de la
wustite (FeO) peut ne pas être significatif dans la mesure où son domaine d’exis-
tence est relativement vaste. Une oxydation postopération (corrosion générali-
sée) ne peut faire apparaître cet oxyde dans la mesure où il n’y a pas eu de
réchauffage ultérieur (supérieur à 570 °C). La présence d’hydroxyde de fer est
dans ce cas l’indice prépondérant.
Le métal (fer/acier) peut prendre différents aspects tout en privilégiant un
« contact intime » avec la matrice (fayalite…) sans oxydation périphérique
majeure de l’élément métallique et sans indice de déformation thermomécani-
que. Il peut se présenter en globules souvent monocristallins, distribués en fila-
ments et/ou en chapelets localisés à proximité de vecteurs réducteurs (charbon de
bois, puits de diffusion, bulle gazeuse) (Fluzin, 1994). Cette configuration
(planche V, photos 37 à 40) peut même correspondre aux anciens grains de
minerai comme l’illustre le cas le plus « visuel » du minerai oolithique lorrain
(Leroy, 1997) (planche V, photo 37). L’agglomération de ces globules métalli-
ques est plus ou moins importante en fonction de l’élimination de la scorie
interstitielle (processus d’« assèchement de l’éponge de fer ») (planche V,
photos 39 à 41).
78
37 40 43

Philippe Fluzin
38 41 44

39 42 45
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 79

Planche V. Indices métallographiques : la réduction


Photo 37. Minerai oolithique lorrain. Au cours de la réduction, le métal apparaît en
gardant la forme de l’oolithe. Expérimentation de réduction et d’épuration, Nancy-
Belfort, 1995 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).
Photos 38 et 39. Agglomération et densification concentriques au milieu du lingot de
Carthage (voir photos 23 et 26) (© P. Fluzin).
Photos 40, 41 et 42. Agglomérations filamentaires et en chapelets avec évacuation de la
scorie. Début de formation des replis. Loupes expérimentales d’Agorregi (Espagne) (voir
photos 8 et 9) (© P. Fluzin).
Photo 43. Replis métalliques au cours de l’épuration d’une loupe. Expérimentation,
Belfort, 1995 — D. Leclère et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 44. Replis légèrement déformés. Loupe expérimentale d’Agorregi (Espagne) (voir
photos 8 et 9) (© P. Fluzin).
Photo 45. Agglomération centripète. Scorie coulée, site de Ponte di Val Gabbia (Italie)
(voir photo 17) (© P. Fluzin).

Il peut prendre l’aspect d’un polycristal avec agglomération centripète de


petits globules à proximité ou non d’une porosité (Fluzin et al., 1995)
(planche V, photo 45).
Il peut également se développer au sein de la wustite (réduction partielle ou
totale dans des globules), y compris lorsque celle-ci présente un aspect dendriti-
que (Fluzin, 1995). La structure de solidification dendritique qui nécessite loca-
lement une température supérieure au point de fusion est également un
indicateur des conditions thermodynamiques de l’environnement. Ainsi, la taille
et la morphologie des dendrites nous renseignent sur les conditions thermiques
du contexte (niveau de température, cinétique et sens du refroidissement). La
présence de dendrites de wustite de taille importante indique le maintien pro-
longé à des températures élevées et un refroidissement lent.
La morphologie des grains (éléments métalliques) est le plus souvent peu
anguleuse et ne présente pas d’écrouissage particulier dans le cas des polycristaux.
Il est possible d’observer (cas assez rare au stade de la réduction) la présence
de quelques globules apparaissant comme sphériques au niveau du plan de coupe
(mais qui peuvent être en fait plutôt cylindriques : filaments). Cette morpholo-
gie est d’autant plus vraisemblable que la teneur en carbone augmente, compte
tenu de l’abaissement du point de fusion de l’alliage fer-carbone. Elle est à asso-
cier à des niveaux de température élevés (tuyère). La ferrite peut toutefois se pré-
senter sous cet aspect dans la mesure où les températures atteintes sont
suffisantes pour la rendre « pâteuse » sans dépasser toutefois le liquidus
(1 536 °C). Notons que le dépassement de cette température en fonction des
conditions de refroidissement impliquerait l’existence de structures de solidifica-
tion (dendrites). La décarburation de l’acier pourrait également justifier ce faciès.
80 Philippe Fluzin

Sans exclure l’observation en réduction de telles configurations, elles sont toute-


fois plus fréquentes dans le cas des opérations de forge.
Il peut exister des porosités (de morphologie bien souvent caractéristique),
plus ou moins vides en fonction du degré d’élimination des stériles (issues de la
fusion de la gangue du minerai : fayalite…). Il n’est pas rare d’observer, associés
à certaines d’entre elles (notamment à celles qui sont vides), des replis en cours
de formation plus ou moins gros et bien formés (planche V, photos 42 à 44). Ces
derniers résultent des phénomènes de coalescence et d’agglomération progressifs
du métal qui se densifie au fur et à mesure de l’« assèchement » de la matrice sili-
catée. La scorie liquide s’écoulant, cela favorise la jonction des différents globules
et filaments métalliques qui engendre, suivant le contexte, la formation de ces
replis. Ils sont relativement gros et mal formés en début de processus et disparais-
sent progressivement au fur et à mesure des traitements thermomécaniques (épu-
ration, forge d’objet). Ils sont donc fréquemment observés dans le métal des
loupes mais aussi dans les divers déchets inhérents aux différentes phases de
l’épuration (gromps, culots).
Il est à noter que certains replis semblent également apparaître dans quelques
cas de forge d’objets (en particulier lors du recyclage de petits fragments métal-
liques). Une température de travail très élevée (fusion partielle) pourrait provo-
quer une dissociation du métal conditionnée par la mise en forme initiale (effet
de texture rémanent).

LES INDICES DE FORGE D’ÉPURATION


(TRAVAIL DU MÉTAL BRUT) (PLANCHE VI)

Ces indices sont sans aucun doute les plus difficiles à mettre en évidence (notam-
ment dans les culots), compte tenu de la persistance éventuelle d’indices de
réduction d’une part et de leur possible association avec les indices de forge d’éla-
boration d’objet d’autre part.
La prépondérance d’une atmosphère oxydante doit se manifester, comme
nous l’avons déjà signalé, par l’existence de degrés d’oxydation d’espèces plus
oxydées.
Il est nécessaire de considérer que l’opération de forge est conditionnée par
une succession de cycles thermomécaniques qui peut se traduire, indépendam-
ment du nombre de pièces traitées, par une certaine stratification au sein des
déchets (culots). Celle-ci est plus ou moins importante en fonction de la durée
et du niveau de température atteint lors d’un cycle thermique et peut être mise
en évidence de différentes façons (répartition et morphologie des porosités,
zonage de la matrice, nature et répartition des fragments métalliques…). En ce
qui concerne le métal, l’intensité des déformations thermomécaniques est per-
ceptible, suivant les températures atteintes, à travers les déformations structura-
les subsistantes (écrouissage, alignements d’impuretés…).
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 81

Le métal « perdu » au cours de l’opération d’épuration n’est pas négligeable


comme l’indiquent nos reconstitutions expérimentales (Leroy et al., 2000). Le
nombre et la taille des fragments sont plus importants en début d’opération.
Cela doit par exemple se traduire dans la répartition du métal au sein d’une
calotte. Compte tenu des spécificités thermomécaniques de cette opération, les
fragments métalliques se retrouvant au sein des scories (culot, calotte) peuvent
présenter différents aspects conjugués et/ou dissociés :
• une répartition aléatoire de fragments aux contours relativement déchiquetés
(angles vifs) dont la liaison avec la matrice n’est pas continue (planche VI,
photo 46) ;
• une masse métallique plus importante et plus compacte correspondant à la
perte de gros morceaux (début d’opération). Il est intéressant de caractériser
la nature du métal travaillé (fer/acier, pourcentage de carbone), cela donne
en effet des indications sur l’homogénéité du métal de base et sur l’utilisation
éventuelle de métaux de nature différente ;
• une réoxydation interne du métal (à proximité de puits de diffusion gazeux)
(planche VI, photo 50) ou périphérique, caractéristique de la prépondérance
de l’atmosphère oxydante de la forge (planche VI, photo 49). Cette réoxyda-
tion peut s’accompagner, dans le cas d’un acier, d’une décarburation superfi-
cielle (planche VI, photo 50). Nous rappelons pour mémoire que l’opération
inverse de cémentation nécessite des durées de traitement très longues (supé-
rieures ou égales à 10 heures) (Fluzin, 1994) et une atmosphère réductrice ;
• la présence de petits replis métalliques déformés, imparfaitement soudés au
sein d’un morceau de métal, dénotant un forgeage insuffisant (planche VI,
photos 52 à 54) ;
• la présence locale de métal écroui au contour irrégulier (planche VI,
photo 47). L’existence dans le métal d’alignements d’inclusions indique le
sens et l’intensité du martelage. Les inclusions se déforment plus ou moins
facilement selon leur composition et la température de travail ;
• la présence d’éventuelles battitures, ou de vestiges de battitures (planche VI,
photos 48 et 49), dans les culots, bien que celles-ci se situent majoritaire-
ment à proximité de l’aire de martelage ;
• la présence de billes (cylindres) ou de chapelets de métal (fer/acier) partielle-
ment ou non réoxydés. La non-réoxydation de ces éléments métalliques,
bien qu’étant dans un contexte oxydant de forge, peut s’expliquer par des
conditions locales limitant la diffusion de l’oxygène (le métal se situe dans un
environnement relativement protecteur de fayalite). Nos reconstitutions
expérimentales ont montré que ces billes se situaient préférentiellement à
proximité d’une source thermique élevée (tuyères).
La qualité du travail d’épuration, qui peut se faire en plusieurs étapes (phase 1 :
dégrossissage-compaction, phase 2 : élaboration d’un demi-produit), peut donc
être évaluée au sein du métal selon plusieurs aspects concomitants :
82
46 49 52

Philippe Fluzin
47 50 53

48 51 54
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 83

Planche VI. Indices métallographiques : l’épuration


Photo 46. Fragment de fer déchiqueté en inclusion dans une porosité. Culot
archéologique gallo-romain, site de Touffreville (Calvados), 1995 — N. Coulthard et
P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 47. Idem. Le métal est légèrement écroui (© P. Fluzin).
Photo 48. Réoxydation à chaud de filaments et globules de fer (ferrite). Culot : 125 g.
Oppidum de Condé-sur-Suippe (Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais, P. Pion et
P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 49. Réoxydation à chaud. Culot : 139 g. Agglomération antique de Blessey-
Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 50. Décarburation par oxydation autour d’une porosité. Scorie, site d’Aigueperse
(Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 51. Écrasement thermomécanique. Fragment de barre, de type currency bars,
132 g. Oppidum de Condé-sur-Suippe (Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais,
P. Pion et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 52. Replis métalliques presque complètement soudés, loupes expérimentales
d’Agorregi (Espagne) (voir photos 8 et 9) (© P. Fluzin).
Photo 53. Replis en cours d’écrasement. Scorie archéologique, site de Blessey-Salmaise,
forge F 104, échantillon 104/15 — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 54. Replis en cours d’écrasement avec remplissage partiel de silice. Centre d’un
lingot archéologique (photos 22 et 25), site de Coulmier-le-Sec (Côte-d’Or) —
J. Dumont, M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).

• propreté « inclusionnaire » (taux de porosité et d’inclusion) ;


• morphologie des porosités et des inclusions (déformation) ;
• nombre et morphologie des replis ;
• homogénéité de la répartition fer/acier…

LES INDICES DE FORGE D’ÉLABORATION D’OBJETS


(TRAVAIL DU MÉTAL ÉPURÉ) (PLANCHE VII)
Dans le cas d’une opération séparée de la forge d’épuration, nos expérimenta-
tions et observations nous conduisent à formuler les remarques suivantes.
Lorsqu’il cherche à élaborer des objets de bonne qualité, un forgeron a inté-
rêt à œuvrer avec un foyer le plus propre possible pour bien contrôler son travail
(estimation visuelle de la température, prévention des pollutions) et à concentrer
le feu en focalisant le foyer suivant le type d’objet à travailler. Cela incite donc à
un nettoyage régulier du foyer. Les déchets, qui sont déjà relativement faibles
(forge au charbon de bois), sont par conséquent de taille encore plus modeste,
hormis le cas d’ajout.
La fréquence des cycles thermiques est plus élevée (en fonction du type de
fabrication) et ceux-ci sont de durée relativement faible (il faut éviter que le
métal ne brûle dans le cas d’un acier et limiter les pertes au feu). Cela se traduit
par une meilleure homogénéité des déchets (scories, culot, atténuation de la
84 Philippe Fluzin

stratification). Le métal brûlé génère par ailleurs un faciès métallographique assez


caractéristique.
Signalons toutefois le cas particulier des soudures (Guilot et al., 1987) qui
présentent un certain nombre de spécificités techniques, notamment en fonction
de la teneur en carbone de l’alliage. En effet, pour réaliser une soudure fer/acier,
la température requise est celle du « blanc soudant », soit de 1 300 à 1 500 °C
pour le fer et de 1 100 à 1 300 °C pour l’acier. La période pendant laquelle le
métal est susceptible de se souder dans les conditions ordinaires est appelée palier
de soudabilité. Ce dernier est plus long pour le fer que pour l’acier. La soudure
acier sur fer est donc la plus difficile à réaliser car il faut que les deux métaux
soient amenés en même temps à leur palier de soudabilité, ce qui exige un gros
écart de température. De plus, la formation d’oxyde sur les surfaces à souder empê-
che le contact intermétallique. C’est pourquoi il est nécessaire, pendant la chauffe,
de parsemer de sable ou de décapant (poudre de minerai…) les surfaces à réunir,
de façon à limiter l’oxydation et à faciliter l’éclatement de la couche d’oxyde. Le
sable forme alors avec l’oxyde de fer un silicate fluide à haute température qui est
évacué par martelage sous forme de battitures et de scories de forge et qui constitue
les alignements d’inclusions au niveau des soudures (planche VII, photos 59 et
62). Par ailleurs, la réalisation de traitements thermochimiques (cémentation,
nitruration, trempe sélective…) nécessite l’emploi de substances appropriées
(matières organiques, argiles…) qui pourront se retrouver en partie dans les culots.
La proportion de métal perdu (dans les culots) est nettement plus faible
qu’en forge d’épuration et celui-ci, lorsqu’il existe, présente souvent, en fonction
de ses conditions de chauffage (niveau de température atteint) et de refroidisse-
ment, un écrouissage important en liaison intime avec la matrice (planche VII,
photo 55). Dans certains cas, il est même possible de constater un écrouissage
très important associé à un microdamas (Mangin et al., 2000a, échantillon
F 104/08 et 09). Celui-ci se traduit par un microcomposite fer/acier (de 0,02 à
0,4 % de carbone) dont la texture est parfaitement homogène (planche VII,
photo 63). Cette configuration microstructurale (à l’échelle du grain) est assez
exceptionnelle et devait conférer au métal des caractéristiques mécaniques
remarquables. Des observations équivalentes (à une échelle plus petite) existent
sur des nanomatériaux contemporains élaborés par mécanosynthèse (association
par chocs mécaniques de nanocristaux). Une des explications théoriques possible
concerne un phénomène d’agrégation (à partir d’un fragment d’éponge ou de
loupe) consécutif à la dissipation thermique de l’énergie de choc (martelage sur
un petit volume) associé au niveau de température de travail en forge. Il y aurait
alors formation (accidentelle ou intentionnelle ; trois échantillons concernés)
d’un damas de « microcristallisation ». Ce phénomène structural est remarqua-
ble car il est voisin des matériaux d’avenir que nous élaborons également dans
notre laboratoire (Fluzin et Gaffet, 1997). Il faut toutefois considérer l’exception
de la forge « de recyclage » où l’on procède à de nombreuses soudures d’éléments
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 85

de tailles et de natures (pourcentage de carbone) variables pouvant engendrer des


pertes de métal non négligeables dans le foyer de forge. Il n’est pas rare d’observer
une décarburation en périphérie des éléments métalliques les plus riches en carbone.
L’environnement de la forge (en dehors des culots et des battitures) peut éga-
lement livrer un matériel plus ou moins abondant constitué de fragments de
métal généralement oxydés. Il peut s’agir de chutes, d’ébauches d’objets, de soies
de préhension, de fragments d’outils ou de morceaux de métal éventuellement
destinés à être réutilisés (planche IV, photos 35 et 36). L’étude morphologique et
métallographique de ce matériel peut contribuer à préciser le type d’activité
comme l’indiquent particulièrement bien nos récents travaux dans la campagne
d’Alésia et sur le site de Blessey (Mangin et al., 2000). Ainsi, une petite chute de
métal (planche IV, photo 36) peut apporter des informations très importantes
concernant le travail effectué dans le foyer : on peut y observer une marque
d’outil (tranche à chaud). Cela indique que l’artisan a cherché à débiter (couper)
un petit morceau de métal de 6 (7 millimètres de section et de 30 millimètres de
longueur). Il est possible, compte tenu de sa taille, que celui-ci était destiné à la
fabrication d’un clou (de chaussure en l’occurrence). Par ailleurs, nous disposons,
grâce à cet échantillon, de quelques données sur l’outillage utilisé. La tranche à
chaud, dont l’empreinte est complète, était de même dimension (largeur
16 millimètres). La tenaille utilisée pour la préhension de cet élément possédait
des mors fermés et ses dimensions devaient être modestes. L’objet était néan-
moins difficile à saisir suffisamment fermement puisqu’il a été perdu. Pour cette
raison, la perte en forge de tels éléments métalliques devait être assez fréquente.
Il est en outre possible d’évaluer le degré de compétence technique des artisans
(traitements thermiques, etc.). À cet égard, il convient de faire remarquer que la
réalisation de simples tôles de métal (armure, fourreaux d’épée…) nécessite, de
la part du forgeron, une maîtrise technique plus grande (ainsi qu’un métal de
meilleure qualité) que pour l’élaboration d’objets massifs. En effet, l’amincisse-
ment d’une tôle est d’autant plus délicat que l’épaisseur sera faible et la surface
grande.
Les battitures se situent, comme pour la forge d’épuration, principalement à
proximité de l’aire de martelage (elles peuvent néanmoins subsister dans des
culots) (planche VII, photos 57 et 58). Elles sont généralement prédominantes
vis-à-vis des autres déchets. Leurs dimensions sont fonction de la surface du
métal travaillé : l’élaboration d’un objet de petite dimension engendre de petites
battitures, ce qui n’est pas le cas pour le travail de surfaces plus importantes
comme l’élaboration d’une épée telle qu’en témoigne la reconstitution que nous
avons effectuée pour les épées de Gournay-sur-Aronde (Oise). Dans le cas de
l’utilisation d’ajouts, les battitures peuvent avoir une morphologie « bulleuse »
(Dunikowski et al., 1996). Leur évaluation quantitative par prélèvement et tami-
sage permet d’avoir une idée sur l’importance et parfois sur le type d’activité de
l’atelier (Mangin et al., 2000a).
86
55 58 61

Philippe Fluzin
56 59 62

57 60 63
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 87

Planche VII. Indices métallographiques : élaboration de l’objet


Photo 55. Fragment de fer écroui dans un culot archéologique gallo-romain. Site de
Touffreville (Calvados), 1995 — N. Coulthard et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 56. Filament de fer presque complètement réoxydé. Scorie archéologique. Site de
Juude-Jaabe (Sénégal), 1995 — H. Bocoum et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 57. Vestige de battitures lamellaires. Culot oppidum de Condé-sur-Suippe
(Aisne), IIe-Ier siècle av. J.-C. — S. Bauvais, P. Pion et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 58. Vestige de battiture globulaire. Même culot que photo 57 (© P. Fluzin).
Photo 59. Inclusions primaires déformées dans le sens du martelage. Lingot d’Alésia
(F-XXIV-408), 1996 — M. Mangin, P. Fluzin et P. Dillmann (© P. Fluzin).
Photo 60. Inclusions dans un objet en cours de forgeage. Expérimentation, Nancy,
1997 — D. Leclère, P. Fluzin, M. Leroy et P. Merluzzo (© P. Fluzin).
Photo 61. Inclusions dans un fragment de barre (68 g). Agglomération antique de
Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 62. Soudure. Jonctions intermétalliques imparfaites. Chute. Site d’Aigueperse
(Auvergne), fin IIe siècle av. J.-C. — L. Orengo et P. Fluzin (© P. Fluzin).
Photo 63. Microdamas. Chute. Agglomération antique de Blessey-Salmaise (Côte-
d’Or) — M. Mangin et P. Fluzin (© P. Fluzin).

L’organisation de l’atelier est généralement assez précise (en fonction du type


d’activité). Cela doit se manifester par des traces archéologiques relativement
bien localisées dans une périphérie voisine du foyer de forge. Compte tenu,
d’une part, de la nécessité de forger l’objet avant qu’il ne se refroidisse trop et,
d’autre part, du nombre plus ou moins fréquent de passages dans le foyer (chau-
des), il est possible de situer l’endroit du forgeage (emplacement de l’enclume) à
environ 1 à 2 mètres du foyer. Cela se voit généralement à la coloration noirâtre
du terrain due à la présence de battitures.
Il ne nous est pas permis de détailler davantage les résultats obtenus à l’aide
de cette méthode (métallographie). Bien que se limitant à la « lecture du métal »
dans son environnement (objet, culot, scorie), elle permet de travailler sur de
gros échantillons, à moindre coût, et aussi bien de déterminer des indices propres
à identifier l’activité sidérurgique que de découvrir le mode de fabrication d’un
objet et la qualité du travail réalisé.
Les analyses chimiques globales (que nous ne détaillerons pas) portent tou-
jours sur un volume restreint du matériau (quelques dizaines de grammes) et ne
sont, à proprement parler, représentatives que de celui-ci. Par ailleurs, il n’existe
pas de méthode d’analyse à vocation universelle répondant à tous les souhaits des
archéologues. Chaque méthode d’analyse possède ses spécificités et, surtout, ses
limites et sources d’erreur propres qu’il convient de bien connaître afin de ne pas
faire des interprétations erronées. Rien ne sert en effet de compiler des données
si leur exactitude (intrinsèque ou extrinsèque) n’est pas assurée (Fluzin, 1983).
Par ailleurs, un physico-chimiste ou un métallurgiste d’aujourd’hui ne sera pas
toujours à même de comprendre et de bien interpréter la chimie particulière des
88
64 67 70

Philippe Fluzin
65 68 71

66 69 72
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 89

Planche VIII. La structure du métal : fer, acier, fonte, à partir de l’étude


métallographique d’échantillons archéologiques
Photo 64. Le fer pur, la ferrite (© P. Fluzin).
Photo 65. Le fer pur, ferrite écrouie par martelage (© P. Fluzin).
Photo 66. L’acier à 0,3 % de carbone, structure de ferrite aciculaire dite de
Widmanstätten (© P. Fluzin).
Photo 67. L’acier à 0,8 % de carbone, perlite lamellaire généralisée (© P. Fluzin).
Photo 68. Acier trempé, bainite nodulaire, troostite (© P. Fluzin).
Photo 69. Acier trempé, martensite (© P. Fluzin).
Photo 70. Fonte grise avec nodule de graphite (© P. Fluzin).
Photos 71 et 72. Fonte blanche, lédéburite (© P. Fluzin).

échantillons archéologiques en restant dans son laboratoire. Les scories ancien-


nes sont, du point vue chimique et minéralogique, fort différentes des roches
naturelles ; elles déroutent le géologue. Elles se distinguent aussi très nettement
des résidus de la métallurgie moderne et le métallurgiste s’interroge souvent
quant aux nombreuses « anomalies » qu’il peut remarquer. Certaines d’entre elles
offrent par ailleurs de nombreux intérêts pour une meilleure connaissance fon-
damentale des matériaux d’aujourd’hui ou de demain (liaison passé-présent-
avenir : étude du vieillissement des matériaux et élaboration de matériaux
nouveaux…).

L’ANALYSE PAR MICRODIFFRACTION


DU RAYONNEMENT SYNCHROTRON

Ce type d’analyse consitute un exemple de découverte récente (Dillmann et al.,


1998).
Un des axes de recherche de l’histoire de la sidérurgie concerne l’apparition,
en Europe, du procédé indirect (utilisation du haut fourneau) qui a remplacé
progressivement le procédé direct (bas fourneau). Les techniques de la métallo-
graphie donnent de nombreuses informations sur les traitements thermomécani-
ques et thermochimiques subis par le métal au cours de son élaboration. En
revanche, elles ne permettent pas de déterminer avec suffisamment de précision
le procédé utilisé pour la réduction du minerai. Il convient donc de caractériser
la nature et la structure cristalline des inclusions contenues dans la matrice
métallique, inclusions pouvant provenir de la réduction ou de l’épuration (affi-
nage). La compréhension de la thermodynamique de formation de ces inclusions
permet de mieux appréhender les procédés de réduction. C’est pourquoi une
étude a été entreprise en partenariat avec le Laboratoire de recherche des monu-
ments historiques (LRMH) de Champs-sur-Marne et le Laboratoire pour l’utili-
sation du rayonnement électronique (LURE) d’Orsay afin de déterminer la
composition et la structure des inclusions d’objets représentatifs de l’évolution
90 Philippe Fluzin

des techniques sidérurgiques considérées. Pour ce faire, nous avons réuni un cor-
pus (plus de 100 références) d’objets allant de la période gallo-romaine au
XIXe siècle. Leur collecte a été effectuée selon des critères stricts permettant de
restituer les contextes historiques et techniques de leur fabrication. Ce corpus a
été complété par un certain nombre d’échantillons provenant d’expérimenta-
tions faites avec deux types particuliers de minerais, dans des bas fourneaux
reconstitués. La comparaison des types d’inclusions identifiés en fonction des
procédés d’élaboration des différents objets du corpus a donné toute sa valeur
aux données analytiques. Les inclusions ont été systématiquement analysées à
l’aide de la microdiffraction et de microfluorescences X sous rayonnement syn-
chrotron. Les manipulations ont eu lieu sur la ligne D15 du LURE. Les données
analytiques obtenues ont permis de dégager quatre facteurs discriminants liant la
structure et la composition des inclusions à l’un ou à l’autre des procédés de
réduction du minerai de fer (direct ou indirect) :
• un type d’inclusions à forte teneur en silicium et faible teneur en fer a été
identifié uniquement dans les inclusions issues d’objets provenant de la
réduction directe. Ces inclusions ont toujours été observées au voisinage des
zones fortement carburées ;
• des phases aluminées de type « spinelle » ont été identifiées uniquement dans
les inclusions issues de la filière directe ;
• des phosphates semblent être présents uniquement dans les inclusions for-
mées lors de l’affinage (procédé indirect). En particulier, la présence de phos-
phate de calcium ne peut être due qu’à l’ajout volontaire de chaux lors de
cette étape. Cette configuration pourrait toutefois exister avec certains mine-
rais en réduction directe (Lorraine) ;
• des différences de teneur en chrome, vanadium et titane. Les teneurs maxi-
males observées dans les inclusions d’objets issus du procédé indirect sont de
10 à 100 fois supérieures à celles mesurées dans les inclusions de la filière
directe. Cette différence pourrait être expliquée par la concentration de ces
éléments sous forme de carbures dans les fontes et par leur oxydation lors de
l’affinage.
Ainsi, l’utilisation de techniques d’analyse locale, utilisant le rayonnement syn-
chrotron, a permis de remonter à la structure et à la composition des inclusions
non métalliques contenues dans les objets ferreux anciens. Les informations
dégagées éclairent d’un jour nouveau les questions d’histoire des techniques fon-
damentales portant sur l’apparition du procédé indirect pour la réduction du
minerai de fer. Ce type d’examen des inclusions permet de resituer l’objet
archéologique analysé dans son contexte historique et technique sans qu’il soit
pour autant assimilé à une nouvelle méthode de datation.
La chaîne opératoire en sidérurgie : matériaux archéologiques et procédés 91

Conclusion
Il est particulièrement difficile de décrire en peu de pages le champ relativement
vaste des investigations archéométriques permettant d’essayer de reconstituer les
différentes étapes de la chaîne opératoire en sidérurgie à partir des vestiges
archéologiques.
Les quelques exemples cités illustrent, d’une part, la pertinence des résultats
obtenus depuis plusieurs années et, d’autre part, la nécessité d’une collaboration
interdisciplinaire réelle (sciences de l’homme et de la société, sciences naturelles,
sciences des matériaux). Chaque méthode, chaque discipline a ses limites et seule
la confrontation scientifique permet de tenter de « faire parler » les vestiges
archéologiques en réduisant les sources d’erreur. Ces travaux enrichissent en
retour chacun des domaines scientifiques concernés. La compréhension des ves-
tiges sidérurgiques contribue à l’histoire des techniques mais ouvre aussi des
perspectives sur les dimensions économiques et sociales de cette industrie, donc
sur l’histoire en général. Au-delà des aspects techniques, ces études visent à
retrouver l’homme qui « se cache derrière » le fait technique ; l’apport de l’ethno-
archéologie est à ce point de vue fondamental et on ne le soulignera jamais assez.
Par ailleurs, les scories et les métaux anciens fournissent aux ingénieurs des ana-
logues réels permettant de comprendre les phénomènes de vieillissement des
matériaux, connaissances applicables dans les domaines du génie civil, de la
conservation du patrimoine ou encore de la gestion des déchets modernes. Des
anomalies structurales observées dans les métaux anciens laissent entrevoir de
nouveaux matériaux comme ceux élaborés par mécanosynthèse (Fluzin et Gaffet,
1997).
Cependant, malgré tous nos efforts et nos succès, il convient de rester
modeste tant « l’objet technique, traduction physique d’un système intellectuel,
n’est jamais complètement connu » (Simondon, 1969).
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 93

La métallurgie du fer en Afrique :


un patrimoine et une ressource
au service du développement
Hamady Bocoum

L’histoire de la métallurgie de l’Afrique subsaharienne, écrite trop rapidement au


début du siècle dernier à partir de quelques fragments de textes et de trop brèves
incursions archéologiques souvent destinées à confirmer ce que l’on croyait
savoir dans une ambiance diffusionniste généralisée, n’en est certainement pas
à une révision1 près ; avec l’accumulation de données de plus en plus cohéren-
tes en faveur de l’autonomie de la sidérurgie africaine, elle pourrait même pro-
céder de plusieurs foyers indépendants. L’intérêt de la métallurgie africaine ne
se situe cependant pas dans cette seule dimension chronologique. D’une part,
il réside aussi dans le continuum technique qui permet, aujourd’hui encore,
l’observation in vivo de traditions pyrotechnologiques qui offrent des possibi-
lités exceptionnelles d’études sur l’une des acquisitions techniques les plus
décisives de l’humanité : la maîtrise du fer. D’autre part, il réside, et ce n’est pas
rien, dans la remarquable capacité d’adaptation des artisans du fer qui, face aux
pénuries de toutes sortes, parviennent encore à entretenir le souffle d’une
Afrique ingénieuse.

1. En 1971, Mauny, un des fondateurs de l’archéologie ouest-africaine, publiait un


ouvrage assez pessimiste intitulé Les siècles obscurs de l’Afrique noire, dans lequel il
exprimait le désarroi du chercheur face à la rareté des sources dans certains
domaines. Quelque vingt ans plus tard, McIntosh et McIntosh (1988), dans leur
article « From siècles obscurs to revolutionary centuries on the middle Niger »,
répondaient partiellement aux préoccupations du pionnier en exposant tout ce que
la recherche archéologique avait pu apporter comme contribution à la connaissance
des sociétés du moyen Niger. En réalité, c’est dans tous les domaines de la recherche
que l’archéologie apporte chaque jour de nouvelles révélations qui, vu l’immensité
du travail à accomplir, ne sont pas près de s’estomper.
94 Hamady Bocoum

Le fer en Afrique : un patrimoine vieux de 4 000 ans


La problématique de l’origine de la métallurgie du fer en Afrique alimente,
depuis de nombreuses décennies déjà, un débat contradictoire qui divise la com-
munauté scientifique. La nature des informations disponibles et la gamme très
ouverte des interprétations possibles ne contribuent pas toujours, il est vrai, à
clore un débat plus que jamais ouvert sur de nombreux aspects. En effet, si des
datations de plus en plus nombreuses font remonter les débuts de la production
du fer en Afrique au milieu du deuxième millénaire av. J.-C. au moins, ce qui en
ferait l’une des métallurgies les plus anciennes au monde (d’où l’hypothèse d’un
foyer d’invention autonome), des observations et commentaires sur la fiabilité de
certaines mesures entretiennent une suspicion, parfois légitime, qu’il importe de
prendre en considération.
Les sources écrites n’étant d’aucun secours pour l’écrasante majorité de
l’Afrique subsaharienne pour des faits dont l’antiquité se compte en millénaires,
seule l’archéologie est en mesure d’apporter des réponses décisives aux questions
posées. C’est pour cette raison qu’il sera nécessaire, à chaque fois, de s’appuyer
sur des faits biens établis par la recherche archéologique pour apprécier les argu-
mentations qui fondent les hypothèses en concurrence.

Des hypothèses et des faits


L’analyse des arguments présentés par les partisans et les adversaires de l’autono-
mie du foyer sidérurgique africain montre qu’ils s’inspirent de considérations
méthodologiques difficilement conciliables. Dans les grandes lignes, les partisans
de l’emprunt privilégient l’hypothèse d’un foyer d’invention unique et sont plutôt
préoccupés par la mise en évidence de points de passage pertinents, tandis que ceux
qui défendent l’hypothèse d’une invention autonome, s’appuient beaucoup plus
sur les évidences archéologiques auxquelles ils tentent de trouver une cohérence
chronologique, technique et culturelle. Malgré tout, la mise en perspective des
deux approches articulée aux faits établis par la recherche permet d’identifier les
constantes autour desquelles s’organise la controverse (Holl, 2000, p. 8).

LES HYPOTHÈSES EXOGÈNES

L’origine exogène de la métallurgie du fer peut être considérée comme une ques-
tion récurrente de l’archéologie africaine tant elle traverse toute l’histoire de la
discipline sur le continent. Cette opinion, avant l’avènement massif des données
de la chronologie absolue, reposait sur deux idées directrices.
Partant de l’unicité supposée du foyer d’invention de la métallurgie, sa prin-
cipale préoccupation était la recherche de voies de transmission (Leclant, 1956 ;
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 95

Mauny, 1952 ; Huard, 1960 ; Tylecote, 1975 ; Phillipson, 1985,). Mais, incontes-
tablement, c’est Mauny (1952) qui a le plus systématisé cette hypothèse. Selon
lui, ce sont les Hittites qui auraient découvert les techniques de réduction au
cours du deuxième millénaire av. J.-C. Celles-ci auraient par la suite essaimé à
travers la Méditerranée pour prendre pied en Égypte par contact direct. Les lettres
d’Amarna adressées à Ramsès II et datant de 1300 av. J.-C faisaient état, en effet,
du retard d’une livraison de lingots de fer au pharaon. Malgré ce contact précoce,
la propagation technique proprement dite n’aurait été réelle, toujours d’après
Mauny, que vers le VIIe siècle av. J.-C., à la suite de l’invasion d’Assourbanipal.
Pour l’Afrique de l’Ouest, Mauny excluant toute transmission par le biais de
l’Égypte, c’est une propagation indirecte, par Phéniciens interposés, qui est rete-
nue. Le contact aurait eu lieu en Afrique du Nord. Ce sont les Berbères qui
auraient initié l’Afrique de l’Ouest de proche en proche postérieurement au
VIe siècle av. J.-C.
La contestation de l’autonomie du foyer sidérurgique africain s’inspire égale-
ment d’un argument technique selon lequel la production du fer suppose des
connaissances pyrotechnologiques nécessaires à la maîtrise des hautes tempéra-
tures. Elle établit de fait une relation de causalité entre la connaissance de la
métallurgie du cuivre et l’acquisition d’un potentiel technique pouvant conduire
à l’invention, autrement plus complexe, de la sidérurgie. À côté de ces deux
lignes de force, existe un troisième argument, nouveau celui-là parce que se rap-
portant aux données récentes (Killick et al., 1988), qui repose sur la contestation
de la fiabilité de certaines mesures au carbone 14 obtenues au Niger par
Grébénart (1983b, 1985 et 1988)2. En rapport avec ce problème, on note une
tendance à la contestation des dates au carbone 14 dans les zones arides où la
présence possible de vieux morceaux de charbon de bois peut entraîner un
décalage chronologique considérable.
Toutefois, dans leurs constructions archéologiques, c’est-à-dire dans l’élabo-
ration des hypothèses, ces auteurs ne s’écartent pas considérablement de celle
déjà évoquée (Mauny, 1952). En effet, même s’ils excluent l’idée d’une initiation
à la métallurgie de l’Afrique de l’Ouest à partir de la vallée du Nil, ils maintien-
nent celle de la transmission transsaharienne. Mais, fait notable, il n’existe plus
de fixation sur la cité punique de Carthage, car le Maroc ainsi que la Libye (le
golfe de Syrte) sont également envisagés comme voies de transmission possibles.

LES HYPOTHÈSES SUR L’ORIGINE AUTOCHTONE


Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’idée d’une origine autochtone de
la métallurgie du fer en Afrique est fort ancienne. Des auteurs comme Mortillet

2. Manifestement, cet auteur avait commis une méprise quant à l’identification


formelle de certains ecofacts (halos rubéfiés correspondant à des troncs d’arbres cal-
cinés) à des fourneaux destinés à la production du fer.
96 Hamady Bocoum

(1903), Von Luschan (1909), Reinach (1913) et De Pedrals (1950) l’ont avancée
dès la fin du siècle dernier ou dans la première moitié du XXe siècle. Leurs études
faites à partir d’une base de données très réduite s’appuyaient, pour la plupart,
sur l’originalité des procédés de réduction mis en œuvre par les Africains (Von
Luschan, 1909).
C’est probablement Lhote (1952) et Diop (1973, 1976) qui, les premiers,
tentèrent de renouveler la question dans une polémique croisée contre Mauny
(1952), lequel s’inspirait pour l’essentiel des positions de Leclant (1956). Dans
sa première publication, centrée sur l’Égypte ancienne, Diop (1973, p. 532)
défend l’hypothèse selon laquelle la métallurgie du fer est une invention africaine
qui remonterait à l’Ancien Empire. À l’appui de sa thèse, il cite plusieurs décou-
vertes in situ, notamment celle d’un morceau de fer de réduction près de l’orifice
du canal d’aération de la grande pyramide construite vers 2700 av. J.-C. Poursui-
vant ses investigations, Diop (1976) ouvre de nouvelles perspectives à la suite des
datations qu’il a réalisées sur le site de Termit au Niger (Dak. 145 : 678 ± 120
av. J.-C. et Dak. 147 : 974 ± 120 av. J.-C.). Ces datations rendaient difficile-
ment opératoire l’hypothèse d’une diffusion à partir de l’Afrique du Nord, y com-
pris l’Égypte. Cette révélation, assez froidement accueillie, marque avec le recul un
véritable point d’inflexion des recherches sur le fer en Afrique en ce sens qu’elle
remettait en cause de manière pertinente les hypothèses jusque-là dominantes. Il
s’ensuivra une accumulation considérable de datations.

Les données archéologiques récentes


et leur signification
Avec l’intensification des opérations archéologiques au Niger, au Nigéria et dans
la région des Grands Lacs (Rwanda, Burundi), un corpus relativement impor-
tant de mesures au radiocarbone est maintenant disponible. Les recherches de
Grébénart (1983a et b, 1985, 1988), même si elles ont donné lieu à des contes-
tations, parfois objectives (Killick et al., 1988), sont maintenant validées par des
travaux indépendants (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995). Les résultats obtenus
par ces derniers ont en effet permis la mise en place d’un faisceau convergent de
datations en chronologie absolue qui rendent inopérantes toutes les théories dif-
fusionnistes littéralement amputées de leurs bases chronologiques, ce qui est une
contestation rédhibitoire (Holl, 1988, 1993, 1997 et 2000 ; Okafor, 1992a et b
et 1993 ; Grébénart, 1983a et b, 1985 et 1988 ; Paris, 1992 ; Quéchon, 1995 ;
Van Grunderbeek, 1992 ; Wiesmuller, 1996 et 1997 ; Vignati, 1995). À ce pro-
pos, il est important de noter que les indices recueillis à Termit sont confirmés
par la série de Do Dimmi qui a fourni cinq dates comprises entre 1010 av. J.-C.
et 35 apr. J.-C. Pour valider le choix de cette borne inférieure, rappelons que la
station Termit ouest 9 a aussi fourni deux mesures comprises entre 1395 et 820
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 97

av. J.-C. en données corrigées (Paris et al., 1992, p. 58). Dans la même zone,
précisément à Égaro, deux mesures faites sur des poteries récoltées dans un con-
texte où l’on retrouve des objets en fer ont donné des dates comprises entre 2520
et 1675 av. J.-C. en données corrigées (Paris et al., 1992, p. 58). Une mesure a
même livré 4000 + 110 BP, soit entre 2900 et 2300 av. J.-C. 3
Toujours au Niger, dans la région de l’Azawagh, le site d’In Tékébrin, qui a
livré des objets en cuivre, a été daté entre 2531 et 1675 av. J.-C., dates obtenues
à partir de trois supports différents (ossements brûlés, charbons et céramiques),
toutes très proches les unes des autres, ce qui renforce considérablement l’hypo-
thèse de l’homogénéité supposée de l’assemblage étudié. Selon Paris et al. (1992,
p. 59) : « L’apparition des premiers objets en métal (fer et cuivre) se situe au-delà
de 1350 av. J.-C., dans un contexte encore largement ténéréen puisqu’ils sont
présents sur un site d’artisans spécialisés dans la fabrication de petits grattoirs. »
Ainsi, les dates obtenues en Afrique occidentale, centrale (Zangato, 1993 et
1999 ; Essomba, 1992a et b ; Holl, 1988, 1991 et 1997) et orientale constituent
aujourd’hui un corpus suffisamment consistant pour que tous les auteurs s’accor-
dent sur l’effondrement de l’hypothèse méroïtique. S’il en est ainsi, la contesta-
tion de l’autonomie du foyer sidérurgique africain se trouve totalement recentrée
sur la crédibilité de la voie nord-africaine, qui ne repose pas non plus sur des
données plus cohérentes (Holl, 2000). En effet, toutes les évidences archéologi-
ques actuellement disponibles sont en opposition avec les hypothèses nord-afri-
caines telles qu’elles apparaissent dans la publication de Miller et Van der Merwe
(1994, p. 8-9), qui ont proposé deux transmissions possibles : le golfe de Syrte
(Libye actuelle), via Gao jusqu’au Niger, ou du Maroc à Tombouctou, sans
qu’aucune découverte récente ne vienne les étayer. En réalité, elles ne diffèrent
guère de celles de Mauny (1952) qui, face à l’absence de preuves décisives, en
était réduit à faire remarquer à propos du monde punique que, à défaut d’ateliers
de réduction du minerai de fer, des objets finis se rencontrent dans les tombes du
VIe siècle av. J.-C.
Un demi-siècle plus tard, la situation n’a pas fondamentalement varié car,
pour la période concernée, aucun ensemble sidérurgique cohérent, d’une anti-
quité comparable au complexe nigérien n’a été mis au jour en Afrique du Nord.
On pourrait en déduire que, dans l’état l’actuel des connaissances, le débat est
clos faute de preuves décisives pouvant accréditer les voies de transmission
jusqu’ici envisagées4.

3. Voir Stuiver et Pearson (1986).


4. En réalité, la question n’est pas aussi simple car les réserves posées devraient être
prises en considération afin de renforcer la base analytique des travaux à venir, qui
devraient prendre en charge les différents aspects de l’environnement culturel et
technique des civilisations de cet âge ancien du fer. Ce n’est qu’ainsi que nous arri-
verons progressivement à une compréhension suffisante des mutations intervenues.
98 Hamady Bocoum

Divergences et hypothèses
Malgré l’apport considérable de la recherche archéologique à l’établissement
d’un cadre chronologique cohérent, toutes les questions relatives à la sidérurgie
ancienne en Afrique ne sont pas pour autant définitivement résolues et certaines
restent très discutées. Il s’agit, entre autres, de la culture pyrotechnologique, de
la fiabilité de certaines mesures au carbone 14 obtenues au Niger et de la problé-
matique des sites de transition pouvant renforcer l’hypothèse d’une invention
autochtone. Aussi nous voudrions les évoquer brièvement pour indiquer en
quoi, même si elles ne peuvent être totalement ignorées, ces hypothèses ne cons-
tituent pas, dans leur état actuel d’élaboration, des réserves de nature à valider un
doute substantiel quant à la vraisemblance des arguments en faveur d’un foyer
indigène de la sidérurgie africaine.

LA CULTURE PYROTECHNOLOGIQUE

Quelle que soit la problématique envisagée, la question de l’autonomie du foyer


sidérurgique africain peut être ramenée à une interrogation centrale. Les méca-
nismes oxydo-réducteurs étant régis par des principes stricts et universels centrés
sur la maîtrise des hautes températures, les métallurgistes africains étaient-ils en
possession de la culture technique leur permettant d’y accéder ?
Pour donner un contenu à cette interrogation, il y a lieu de s’inspirer des
aspects déjà évoqués dans cet ouvrage (contribution de Fluzin) et qui indiquent
que, de tous les paramètres impliqués dans la réduction des oxydes de fer, le plus
important reste la température. Car c’est elle qui déterminera l’état physique du
métal et permettra, sur le plan fonctionnel, de différencier le procédé direct du
procédé indirect suivant que la température atteinte est inférieure ou supérieure
au point de fusion du fer.
Partant de ces considérations et en articulation avec le cas précis du Niger, il
ne nous semble pas pertinent de défendre la thèse de la nécessité d’un long
apprentissage pour passer de la métallurgie du cuivre à celle, plus complexe, du
fer. L’accès aux hautes températures était en effet inscrit dans la logique de la
chaîne opératoire technique du cuivre, comme en rendent compte les études
expérimentales réalisées sur des scories associées à la production du cuivre à
Afunfun ; ces études suggèrent, d’après Killick et al. (1988), que des tempéra-
tures comprises entre 1 350 et 1 450 °C ont pu être atteintes. Celles-ci étant lar-
gement suffisantes pour produire du fer dans le cadre d’un processus de
réduction directe en phase solide, nous pouvons en déduire que la proximité
chronologique entre le fer et le cuivre est un argument décisif en faveur de l’exis-
tence d’un environnement technique propice à la réduction des oxydes ferreux,
donc à la production du fer, à son invention.
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 99

À PROPOS DES CHARBONS FOSSILES


ET DE LA CHRONOLOGIE

L’utilisation possible de charbons fossiles au Niger, dans la station métallurgique


Afunfun 175, a été envisagée par Killick et al. (1988, p. 390-391) pour expli-
quer la singularité du fourneau 8 (1710 + 50 av. J.-C., 2450-1750 av. J.-C.).
Pour cette raison, l’auteur a suggéré de considérer, avec raison, les charbons
récoltés dans cette installation comme n’étant pas nécessairement synchrones du
fonctionnement du fourneau suspecté. Mais, depuis lors, des données nouvelles
ont été accumulées (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995) qui indiquent que dans
la répartition des sites métallurgiques en question, celui d’Afunfun n’est plus
isolé. Il existe à présent plusieurs localités ayant fourni des dates comparables
comme nous l’avons déjà signalé. En conséquence, si l’on s’en tenait à la récurrence
des faits, celle-là même qui fonde l’approche statistique dans la construction
archéologique, la généralisation, pour ne pas être abusive, devrait accepter le
deuxième millénaire av. J.-C. comme début de la métallurgie dans cette région. Les
métallurgistes de la région d’Agadez auraient, dans ce cas, accédé par leurs propres
observations à la compréhension des principes techniques de la réduction. Ce bilan
d’étape, autrement mieux argumenté que toutes les hypothèses concurrentes, n’est
cependant pas exclusif de la poursuite des recherches et, notamment, du croise-
ment des mesures au carbone 14 avec des datations par thermoluminescence ou
encore par la méthode de l’archéomagnétisme. À cet impératif il faudrait aussi
ajouter la nécessité d’une approche plus contextuelle des dates obtenues 5.

LA PROBLÉMATIQUE DES CULTURES DE TRANSITION


La problématique des cultures de transition est un véritable serpent de mer en
archéologie. La recherche de l’apparition d’une innovation dans une commu-
nauté donnée et sa visibilité archéologique, suivant qu’elle est brusque ou pro-
gressive, conduit souvent à l’élaboration de deux hypothèses. Ainsi sont
communément interprétés comme les marqueurs d’une évolution progressive,
qui éventuellement peut rendre compte d’une invention, les cas où la nouvelle
technique prend pied dans une société qui l’adopte et parfois la perfectionne. À
l’opposé, l’apparition rapide d’une technique déjà bien constituée est souvent
perçue comme la manifestation d’un emprunt. Ainsi, même si cette variante de
l’évolutionnisme « technique » fortement ancrée dans les traditions historiogra-
phiques est un mal dont on a appris à s’accommoder, elle ne permet pas non plus
de contester l’ancienneté de l’apparition de la métallurgie au Niger. Car, malgré

5. Malgré les évidences déjà accumulées dans la définition du contexte culturel au sein
duquel apparurent les premières manifestations du fer au Niger, seule une datation
des artefacts associés à la production du fer (inclusions charbonneuses dans les sco-
ries, fourneaux, objets) apportera des arguments irréfutables. L’UNESCO devrait
favoriser la mise en place d’une équipe d’experts sur cette question.
100 Hamady Bocoum

les difficultés inhérentes à l’interprétation des sites de surface, il y a des indices


probants de l’existence de cultures de transition entre la fin du néolithique et le
début de l’âge du fer au Niger. Dans la région de Termit, les premiers témoins
métallurgiques sont associés à une industrie lithique en cours de définition que
Quéchon (1995, p. 309) appelle, avec toute la prudence requise, le « ténéréen »
de Termit. Cette industrie, qui s’est développée entre 3300 et 1500 av. J.-C., est
marquée par la prédominance dans la production lithique des disques, des trian-
gles bifaces, des pièces foliacées, des grattoirs, des rabots, des scies, etc. Quant à
la céramique, elle est de type soudano-sahélien, au début tout au moins car, vers
la fin de la période (2000-1500 av. J.-C.), apparaissent de nouvelles formes et de
nouveaux décors (jattes à encolure galbée soulignée d’une impression pivotante,
ou à rebord épaissi et décor géométrique partiel en composition) qui s’imposent
progressivement jusqu’à caractériser l’épisode « postérieur ». Sous cet éclairage, la
réserve de la transition culturelle nous semble aussi devoir être évacuée, d’autant
que c’est dans une « ambiance néolithique » que les techniques métallurgiques
font leur apparition au Niger.
On peut naturellement épiloguer encore longtemps sur la question de
l’invention dans les sociétés préindustrielles avant la mise en place progressive de
la science moderne. Elle se situe potentiellement à notre avis, au détour de cha-
que observation effectuée, dans un environnement contenant les germes d’un
saut qualitatif. De nombreux exemples de réduction accidentelle de certains
minerais sont ainsi signalés par Routhier (1963) qui rapporte qu’en Nouvelle-
Calédonie, les feux de brousse vont jusqu’à faire fondre et vitrifier, au pied des
arbres, des plaquettes de schiste. Ce type d’accident, par exemple, est tout à fait
plausible pour le Niger, notamment avec le cas de certains « fourneaux » dits
allongés et dont la configuration et le mode de fonctionnement ne semblent
obéir à aucune logique. Ainsi, même s’ils demeurent par ce fait essentiellement
des ecofacts, rien n’indique qu’ils n’ont pas pu inspirer les métallurgistes de l’épo-
que. On peut tout aussi bien se demander pourquoi la pomme est tombée sur la
tête de Newton en pleine cogitation, hasard ou nécessité ?

Le fer en Afrique : une longévité exceptionnelle


et une remarquable capacité d’adaptation
Si le fer est aussi ancien en Afrique, c’est aussi sur ce continent qu’il a été le plus
conservateur dans ses principes techniques. N’ayant participé qu’en qualité de
consommateurs au formidable renouveau de la sidérurgie6, les métallurgistes

6. Le passage de la réduction directe à la réduction indirecte a permis, avec la possibi-


lité technique de fondre le fer, des applications multiples qui auront un effet
d’entraînement sur tous les autres secteurs industriels. Parallèlement, le fonctionne-
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 101

africains ont néanmoins pu sauver de l’anéantissement un important patri-


moine7. Pour cette raison aussi, l’Afrique est aujourd’hui le seul endroit au
monde où il est encore possible d’observer, in vivo, le fonctionnement d’un four-
neau traditionnel de production du fer par la méthode dite de réduction directe.
Ainsi, ni la Traite atlantique avec l’arrivée de la barre de fer, qui a fait ici se croiser
les routes du fer et de l’esclave, ni les progrès de l’économie marchande ne sont
venus à bout de l’expertise africaine en matière de production du fer. Cette
remarquable capacité de résistance, au-delà de l’anecdote, est une magistrale con-
tribution des métallurgistes du continent au patrimoine technologique de
l’humanité. Ils ont eu l’immense mérite de l’avoir sauvegardé pour témoigner
devant l’histoire.
Plus près de nous, même si les succès de la récupération, notamment dans le
domaine artistique, ont tendance à éclipser le dynamisme de la forge tradition-
nelle qui paraît, pour l’observateur non averti, comme renaître de ses cendres, il
y a lieu de signaler que rien n’est plus faux. Ainsi, au XVe siècle avec l’établisse-
ment de relations régulières avec l’Europe, les forgerons furent les premiers arti-
sans dont l’expertise fut reconnue et même sollicitée, y compris dans l’entretien
des embarcations. Le navigateur Francisco de Coelho Lemos, qui en a fait l’expé-
rience, note avec assurance que s’il « était nécessaire de façonner quelques ferru-
res de gouvernail, comme cela m’arriva, il se trouvait ici de très bons forgerons
nègres indigènes ».
De même, la crise du début des années 1980 et les différents plans d’ajuste-
ment qui ont conduit à l’effondrement des politiques d’encadrement ainsi qu’à
l’arrêt brutal des efforts d’équipement dans la plupart des pays africains a eu un
effet particulièrement dopant sur les métiers de la forge. Car non seulement les
paysans mais également de plus en plus de citadins se tournent vers l’artisanat
local pour faire face aux besoins les plus pressants en équipements (Fall, 1985,
1995 et 1997). Cette évolution est aujourd’hui très sensible dans de nombreux
secteurs parmi lesquels l’agriculture, l’artisanat d’art et de récupération, l’indus-
trie. Car la fin annoncée du petit artisan face à l’intrusion des produits de
l’industrie n’a pas eu lieu8.

ment à flux continu des hauts fourneaux permettra une production de masse du fer
à des coûts réduits dont l’Afrique sera un des destinataires, notamment dans le
cadre de la Traite atlantique. La barre de fer s’imposera inexorablement au conti-
nent entraînant concomitamment le recul de la production locale. Il n’est d’ailleurs
pas exagéré de dire que le décrochage technique du continent date de cette période
(Bocoum, 2000).
7. Même s’ils ne réactivent guère plus leurs installations qu’à l’occasion de cérémonies
très spécifiques (reconstitutions, rites, etc.) ils auront au moins réussi à maintenir
opérationnel un patrimoine technique vieux de plus de 4 000 ans.
8. En effet, dès le début de l’introduction de la culture attelée, les artisans africains
vont très rapidement réussir à copier les modèles proposés et fréquemment les
102 Hamady Bocoum

En réalité, l’industrie de récupération elle-même est beaucoup plus ancienne


que l’on ne le pense car, pour bien comprendre l’histoire de la récupération en
Afrique, il est nécessaire de remonter plusieurs siècles en arrière. Des analyses
métallographiques réalisées sur des objets archéologiques africains établissent très
clairement que les forgerons avaient l’habitude de rassembler des fragments
métalliques d’origine et de composition différentes pour réaliser de nouveaux
objets n’ayant pas nécessairement la même destination que celle des pièces ini-
tiales (Bocoum, 1988, 2000). C’est dans la continuité de cette tradition que les
artisans africains ont commencé à utiliser les emballages métalliques comme sup-
ports à des réalisations utilitaires, ludiques ou décoratives. Dans ce registre, ils
ont aussi parfois excellé dans la reproduction des armes à feu introduites par les
Européens et même entrepris, sous l’impulsion de leurs souverains, un véritable
espionnage industriel telle l’aventure de Siakha Kuruma, forgeron de Samory,
qui avait séjourné à l’arsenal de Saint-Louis pour étudier le fonctionnement des
fusils à répétition. Sa réussite exceptionnelle lui valut d’ailleurs, dans la tradition,
le surnom de Siakha l’homme au fusil à dix coups (Person, 1970).
Dans le domaine de la manufacture enfin, les artisans du fer, une fois résolue
la question liée à la maîtrise des soudures, parviennent aujourd’hui, partout en
Afrique, à des applications qui, si elles sont encouragées, conduiraient dans un
proche avenir à une autonomie relativement poussée dans le domaine de l’équi-
pement. Cette activité quasi industrielle, tant son mode de fonctionnement s’est
adapté aux conditions modernes de production, couvre des domaines variés
allant de la menuiserie métallique à la production des engins agricoles, des mou-
lins à céréales, des presses à huile, des pompes à eau, etc. C’est sans doute ici que
les artisans du fer en Afrique sont en train de réaliser leur plus grande révolution
et de prendre une revanche inattendue sur ceux qui les avaient, sans doute trop
vite, classés parmi les reliques de l’histoire. Leur capacité à répondre, hier comme
aujourd’hui, avec efficacité à des sollicitations diverses et variées en fait en réalité
de puissants agents économiques dont la participation à l’effort de développe-
ment peut être considérable pour peu qu’ils soient bien encadrés.

Conclusion
Dans l’étude des faits techniques et des traits culturels, surtout quand ils sont
aussi anciens que ceux relatifs à l’apparition du fer en Afrique, la recherche d’une
cohérence chronologique sur la base des évidences archéologiques est un exercice

améliorer en les adaptant à la nature des sols, à la morphologie des hommes aux-
quels ils sont destinés et aux capacités de traction des bêtes. Il est incontestable que
les succès de la traction asine et équine doivent beaucoup aux artisans du fer. Ce
sont également eux qui assurent l’entretien, voire le renouvellement du parc
existant.
La métallurgie du fer en Afrique : un patrimoine et une ressource 103

inévitable. L’exploitation de la documentation disponible renforce considérable-


ment la crédibilité de l’existence d’un foyer autonome d’invention de la métal-
lurgie du fer en Afrique, qui pourrait procéder d’un phénomène de convergence.
Cette possibilité théorique — il s’agit de la convergence — est curieusement sou-
vent absente des préoccupations des chercheurs plutôt enclins à la mise au point
de modèles centrifuges. Heureusement que l’histoire commence à se peupler
d’exemples contraires. C’est le cas notamment des découvertes récentes sur la
sidérurgie indirecte qui établissent que les métallurgistes européens avaient réussi
de manière indépendante à maîtriser ce procédé contrairement aux théories dif-
fusionnistes qui la faisaient venir de Chine (Fluzin et al., 1998).
Les routes du fer ouvrent aussi un vaste champ de recherches dans des
domaines variés parmi lesquels figure en bonne place l’étude des conséquences
économiques, sociales et politiques de la métallurgie ainsi que de celles relatives
au développement urbain ; elles devraient toutes contribuer au renouvellement
des études sur l’histoire des techniques en Afrique jusque-là prisonnières de la
comparaison et de l’analogie, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elles sont
peu enrichissantes.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 105

Les datations de la métallurgie du fer


à Termit (Niger) : leur fiabilité,
leur signification1
Gérard Quéchon

Les résultats scientifiques, notamment en sciences humaines, sont directement


dépendants des choix méthodologiques de l’enquête, voire des conditions maté-
rielles dans lesquelles elle s’est déroulée. Cette remarque liminaire aux apparences
de lapalissade semble pourtant indispensable car elle n’est pas toujours prise en
compte dans la littérature archéologique.
En effet, la finalité du métier de chercheur étant de combler les lacunes du
savoir, il n’est pas surprenant que l’impossibilité de répondre à une question
apparaisse insupportable à beaucoup. De là à camoufler ce qu’on ne sait pas en
dessinant, comme au XVIe siècle, des monstres sur les blancs de la carte, il n’y a
qu’un pas, parfois franchi d’autant plus facilement que l’archéologie, discipline
frustrante, ne livre que des bribes de connaissances sous forme de puzzles mélangés
et toujours incomplets.
La question des débuts de la métallurgie en Afrique noire offre un bon exem-
ple de cette attitude : les raisonnements menés sur le sujet par tel ou tel archéo-
logue peuvent se révéler tout à fait cohérents voire convaincants en apparence,
mais ils recouvrent souvent une absence de documents avérés, la plupart des
régions évoquées comme routes possibles de diffusion de la métallurgie étant
alors terres inconnues. Les conclusions « scientifiques » s’apparentent à un pur
exercice de style.
C’est ainsi que nombre de cartes archéologiques dessinent les anciennes voies
migratoires où la densité du peuplement au travers de celle des sites traduit,

1. Cette communication a pour but de préciser la chronologie des origines du fer à


Termit et sa cohérence, dans une démarche méthodologique étroitement liée à ce ter-
rain précis et fondée sur des arguments internes. Il ne s’agit en aucune manière d’un
regard d’ensemble sur la métallurgie ancienne en Afrique. Il eût donc été incohérent
d’y associer une bibliographie générale que l’on trouvera aisément par ailleurs. Seules
ont donc été précisées les références indispensables à la compréhension du texte.
106 Gérard Quéchon

parfois de façon assez comique, davantage l’activité des préhistoriens que la pré-
sence des hommes préhistoriques.
Quand une région est vide sur la carte, il faudrait d’abord savoir si elle est
pauvre en témoins archéologiques ou pauvre en prospections et ne pas déduire
trop vite que les faits manquent, là où manquent seulement les informations.
Ainsi, la zone située immédiatement au sud de Termit n’a jamais été pros-
pectée, tandis que, encore plus au sud, la région de Zinder n’a fait l’objet que
d’une enquête préliminaire de J.-P. Maître, juste avant son décès subit ; celle-ci
n’a donc pas été publiée. Ce que j’en sais par mes conversations d’alors avec ce
collègue et ami, c’est qu’il s’agit d’une région difficile à interpréter, où les hiatus
éventuels avec la préhistoire du Ténéré sont probablement liés en bonne partie à
des climats et à des paléo-environnements différents. Rien, en tout cas, qui per-
mette d’écrire, par exemple, que les territoires de l’ouest du lac Tchad situés entre
Termit et Taruga n’ont commencé à utiliser le fer que près d’un millénaire après
ces deux régions2. Il faut vraiment arrêter, en préhistoire aussi, de confondre
l’absence de preuve et la preuve de l’absence.
Il faudrait également, pour présenter des résultats plus proches de la vérité,
que soient également publiées les prospections infructueuses, pratique qui reste
très exceptionnelle dans un contexte où « l’efficacité économique » est devenue
une priorité absolue.
Ces considérations, qui ont l’air de s’éloigner de la « science », sont pourtant
essentielles puisqu’elles gouvernent la fiabilité des résultats, alors qu’elles sont
rarement prises en compte dans les publications.
Il faut enfin souligner le décalage entre le souhaitable et le possible. La bonne
démarche à Termit aurait été de réunir sur le terrain l’équipe multidisciplinaire
la plus large, avec entre autres un paléométallurgiste. Les contraintes financières
qui pèsent désormais sur la recherche l’ont interdit. On ne peut que le regretter,
en soulignant que les résultats présentés ici relèvent donc d’une stricte archéo-
logie généraliste.

Le contexte géographique, climatique et archéologique


Situé autour du 16e degré de latitude nord, Termit s’est trouvé, durant l’holo-
cène, dans une zone particulièrement sensible en termes de changements clima-
tiques et de possibilités de peuplement, car la structure de ce petit massif tabulaire
s’organise autour d’une faille nord-sud générant une série de cuvettes endo-
réiques qui ont, périodiquement, constitué autant de réserves d’eau.

2. « But the lands west of Lake Chad lying between Termit and Taruga did not begin to use
iron for nearly a millenium after they did » (McIntosh, 1994).
Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 107

La séquence archéologique doit en permanence être évaluée à la lumière de


ces variations environnementales, avec l’idée bien présente que le rapport entre
les climats favorables et les densités de population est loin d’être simplement méca-
nique. Il se révèle extrêmement complexe à l’étude et doit au minimum faire l’objet
d’un examen macrorégional (Person et Quéchon, 1997 ; Quéchon et Person, 1997).
Les plus anciens témoignages sont apportés par une industrie à bifaces de
type acheuléen à laquelle succède une industrie à éclats de type paléolithique
moyen. Les sites, répandus dans tout le massif mais fréquents surtout dans la par-
tie nord, sont pour la plupart des épandages de piémonts livrant un outillage
abondant mais largement déplacé, sauf à de très rares exceptions près. Aucune
possibilité de datation absolue n’a été trouvée à ce jour et il est important de
noter l’absence de toute trace d’atérien dans la région, malgré le maillage serré de
la prospection.
La séquence holocène est celle qui a livré le plus de résultats, tant qualitatifs
que quantitatifs. On trouve d’abord, environ 9 000 ans avant nos jours, un néo-
lithique ancien à outillage lourd avec pics, bifaces, houes… qui témoigne d’une
activité agricole très ancienne, même si elle a probablement été provisoire. Lui
succèdent des industries lithiques et céramiques peu abondantes mais de la
même famille, plus ou moins apparentées à ce que l’on appelait autrefois néoli-
thique de tradition soudanaise (gouges, etc.). Les témoins archéologiques de ces
épisodes anciens sont, dans leur majorité, affectés d’une patine d’altération
hydromorphe qui atteste leur position antérieure aux plus hauts niveaux lacus-
tres et palustres locaux.
Le néolithique récent qui leur succède est caractérisé par une variante locale
du néolithique ténéréen dite « faciès de Gossololom », à outillage très spectacu-
laire (pièces foliacées bifaciales, disques, rectangles, scies, lames ovalaires unifa-
ces, tout à fait caractéristiques…) Mais l’intérêt principal de cet épisode réside
dans le fait que la grande majorité des gisements qui s’y rapportent sont restés
pour l’essentiel en place, quoique en surface. On peut très facilement y réperto-
rier des zones différenciées d’approvisionnement, de primo-débitage, d’ateliers,
de stockage, etc. Ils livrent dès lors une multitude de renseignements rarement
observables sur l’organisation de l’espace et, partant, sur l’organisation économi-
que et sociale de ses occupants. On s’aperçoit par exemple que les artisans fabri-
quaient pour ainsi dire à la chaîne certains types d’outils pour les échanger, tant
leur production dépasse de façon manifeste la simple satisfaction de leurs propres
besoins.
Cette tradition lithique se perpétue — en se modifiant légèrement —
jusqu’au moment où, dans un contexte qui reste celui d’artisans spécialisés dans
l’outillage lithique, l’on constate la présence sur les sites des premiers morceaux
de métal (fer et cuivre).
On entre alors progressivement dans une phase intermédiaire (« sidéro-
lithique ») où l’outillage de pierre joue encore un grand rôle bien qu’il y ait
108 Gérard Quéchon

production de fer par bas fourneaux. Peu après cet épisode, on enregistre l’aban-
don de la région, probablement en raison de la dégradation climatique.

Les datations
La séquence culturelle qui vient d’être esquissée ne devrait pas poser de problème
particulier. Elle est logique et s’inscrit dans un schéma de complexité croissante
et dans une sorte de cohérence interne. Cependant, au moment où furent obte-
nues les premières datations, elle surprenait par son ancienneté alors inattendue,
autant dans ses débuts — avec une « néolithisation » précoce, qui n’est pas l’objet
de l’exposé d’aujourd’hui — que dans sa fin, avec la présence, beaucoup plus tôt
que prévu, du métal sur les sites puis de fourneaux de métallurgie.
Rappelons les faits : en 1972, les premières mesures, à 2630 ± 120 ans BP
pour une base de fourneau à Do Dimmi, et à 2925 ± 120 ans BP pour un site
comportant des outils de fer et de cuivre nous avaient alertés, mais leur caractère
alors isolé obligeait à la prudence. Une des principales missions de la reprise des
opérations de terrain à partir de 1982 était de confirmer ou d’infirmer cette chro-
nologie ancienne. Les premiers résultats indiquant la contemporanéité du gros
site d’habitat de Do Dimmi avec les bas fourneaux voisins constituaient plutôt
une confirmation.
Néanmoins, la difficulté à obtenir des dates sur charbon et la relative incer-
titude de ces dates, s’agissant de sites de plein air, conduisirent à la mise sur pied
d’une tentative de datation sur dégraissants végétaux de céramique qui avait
l’avantage, en cas de réussite, de préciser la chronologie à partir du contexte
culturel lui-même, puisque les objets datés en font partie. Ce programme, mis
sur pied en collaboration par J.-F. Saliège, A. Person, F. Paris et moi-même, a
donné des résultats extrêmement positifs, notamment en ce qui concerne Ter-
mit. En effet, les mesures effectuées en aveugle par J.-F. Saliège sur des tessons de
céramique de diverses périodes se sont révélées étonnamment cohérentes et con-
formes à la logique archéologique (tableau 1). De plus, le croisement, chaque
fois que possible, des datations de céramiques et de charbon sur un même site a
donné des résultats très convaincants (tableau 2). À l’exception de deux sites sur
un ensemble d’une trentaine de mesures (ce qui semble plutôt de bon augure car
des résultats trop parfaits en matière de chronologie absolue pourraient avoir
tendance à inquiéter), on se trouve devant un corpus de datations qui délimite
un terrain temporel solide.
La signification calendaire de ces mesures pour la métallurgie ancienne en
Afrique fera l’objet d’un développement plus loin dans ce volume (Données
chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit, A. Person et
G. Quéchon). Elle peut être résumée ici en deux dates essentielles confirmées à
plusieurs reprises : les objets de fer et de cuivre font leur apparition à Termit à
Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 109

peu près en 1500 avant l’ère chrétienne et les premiers fourneaux de métallurgie
connus sont datés aux environs de 800 av. J.-C. (photo 73).
Tableau 1. Datations sur dégraissant végétal de céramiques
Ces datations ont été effectuées en aveugle par J.-F. Saliège. Les datations suivies d’un
astérisque indiquent la présence d’objets de métal sur le site. À l'exception des deux qui
figurent entre crochets, ces résultats sont conformes à la logique archéologique.

Sites Datations

Céramique ancienne
Termit ouest (dune sud) 7160 ± 300
Cheguelenga 84 6760 ± 100
Termit ouest 130 6085 ± 290
Termit ouest 131 5275 ± 180
Termit ouest (dune nord) 5240 ± 100
Bezi Yasko 134 5000 ± 120
Céramique « ténéréenne »
Gara Tchia Bo 200 4420 ± 200
Gara Tchia Bo 20 3625 ± 90
Gossololom Bo 151 3600 ± 100
Gara Tchia Bo 176 3510 ± 100
Gossololom Bo 152 3235 ± 120
Bézi Atchwa 3225 ± 90
[Gara Tchia Bo 75 1960 ± 150]
Céramique « post-néo phase 1 »
Tchiré Ouma 147 3300 ± 120
Gara Tchia Bo 48 ouest 3265 ± 100*
Gara Tchia Bo 48 est 3260 ± 100*
Tchiré Ouma 146 3230 ± 170*
Termit ouest 95-b 3100 ± 100*
Tchi Guiribé 127-b 2950 ± 100*
Termit ouest 8 b 2880 ± 120*
[Gara Tchia Bo 48 B 2430 ± 110*]
Céramique « post-néo phase 2 »
Do Dimmi 16 2270 ± 90*
Chegulenga 123 2095 ± 200*

Il faut, à ce propos, être tout à fait clair : l’écart entre ces deux dates ne sous-
entend en aucune manière qu’il aurait existé à Termit deux stades culturels suc-
cessifs, le premier dans lequel la population aurait connu le métal, mais non la
réduction des minerais, et le second où la métallurgie aurait été complète. Ce
scénario nous semble même très peu vraisemblable. Simplement, on doit s’en
110 Gérard Quéchon

tenir rigoureusement à l’exposé des faits observés et, jusqu’à présent, il y a un


décalage entre les premiers objets et la trace des premières opérations de réduc-
tion. Cet écart n’a d’ailleurs rien de surprenant dans la mesure où les restes de
fourneaux s’avèrent aussi rares que discrets et qu’on n’a trouvé que deux ensem-
bles, même pour la période où les outils de métal se sont multipliés. Il est donc
logique de ne pas en trouver dès le début de la période.

Tableau 2. Datations multiples


Chaque fois que possible, les mesures ont été multipliées sur un même site, soit avec un
nouvel échantillon de charbon, soit en datant un tesson de céramique au dégraissant
végétal. Cette opération avait pour but de contrôler la cohérence intrasite puis intersite
de la chronologie.

Résultats satisfaisants
Charbons
Site Charbons 1972 Dégraissant végétal
1982-1985
Do Dimmi 15 (bases de 2630 ± 120 2500 ± 700
fourneaux) 2065 ± 600
Do Dimmi 16 1745 ± 110 2590 ± 120 2270 ± 900
(habitat)
Termit ouest 8B (site avec 2925 ± 120 2880 ± 120
objets métal)
Gara Tchia Bo 176 3535 ± 200 3510 ± 100
(Ténéréen tardif )
Gara Tchia Bo 20 4100 ± 900 3625 ± 900
(Ténéréen tardif ) 3695 ± 800
Termit ouest (néolithique
moyen) :
– paléosol organique 6340 ± 100
– poterie niveau supérieur 5240 ± 100
Résultats incohérents
Âge obtenu
Âge attendu
Charbons Dégraissant végétal
Gara Tchia Bo 75 ± 3500/3000 445 ± 80 1960 ± 150
Gara Tchia Bo 172 ± 3700/3200 2530 ?
(problème de mesure)

Dans le même ordre d’idées, le fait que les datations des bas fourneaux s’éta-
lent sur plusieurs siècles ne doit pas être attribué à une imprécision de la
Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 111

méthode ; il était évident, dès la découverte, qu’il y avait eu plusieurs opérations


de réduction au même endroit et aussi que le grand site d’habitat voisin avait été
longuement occupé. Les datations postérieures ont confirmé la justesse de cette
observation, en vérifiant que ces deux gisements étaient contemporains sur une
longue durée : au moins les huit derniers siècles avant l’ère chrétienne.
L’ancienneté de cette chronologie exclut évidemment une origine méditerra-
néenne ou méroïtique de la métallurgie du fer au sud du Sahara, hypothèse éga-
lement battue en brèche, depuis une vingtaine d’années, par la multiplication,
pour des sites avec du fer, de datations africaines situées au dernier millénaire
avant Jésus-Christ.
On admettra donc, dans l’état actuel des connaissances, l’existence d’un
foyer autochtone africain de métallurgie du fer. Faut-il en fixer le berceau à
Termit ? Peut-être mais sans exclure qu’un prochain programme de recherches
oblige à une révision. On notera en particulier les dates encore plus anciennes
obtenues à Égaro, 70 km à l’ouest de Termit, mais sans l’appareil critique qui
permettrait d’être totalement affirmatif (Paris et al., 1992). L’important, c’est
que nous sommes désormais dans un cadre chronologique fiable pour les débuts
de la métallurgie régionale.
Bien que reposant, comme nous venons de le voir, sur des mesures nombreuses
et concordantes, ce cadre est néanmoins contesté, peut-être à cause de la diffi-
culté qu’il y a d’admettre des perspectives nouvelles, alors qu’il nous arrive
d’accepter sans broncher des données dont la fiabilité est loin d’être démontrée,
au seul titre qu’elles participent des idées reçues.
McIntosh (1994), en particulier, pense que les dates de Termit doivent être
envisagées avec un considérable scepticisme. Son argumentation repose sur deux
considérations :
• les premières mesures anciennes pour la métallurgie du Niger, les dates du
cuivre-1 avancées par Grébénart pour la région d’Agadès, ne sont plus accep-
tées (Killick et al., 1988) ;
• il y a des dangers de trouver des charbons fossiles sur les sites de surface du
Niger et peut-être sur beaucoup d’autres, ainsi que dans les fourneaux de
réduction.
Sur le deuxième point, il suffit de faire remarquer que, si tel était le cas, le corpus
des dates de Termit n’aurait aucune chance d’être cohérent, puisque les échan-
tillons datés n’auraient que des rapports aléatoires avec l’activité humaine de
l’époque. On voit bien, au contraire, que toutes les dates se coordonnent de
façon remarquable et corroborent en tous points le raisonnement purement
archéologique, qu’il s’agisse de charbons pris dans un fourneau ou de mesures sur
les dégraissants céramiques.
C’est bien la conscience des difficultés de datation sur les sites de surface qui
a conduit à attendre, pour publier les données, d’avoir multiplié et croisé les
résultats d’un même site à partir d’éléments différents et d’avoir ajouté le
112 Gérard Quéchon

Photo 73. Vue panoramique des 22 bases de fourneaux de Do Dimmi (Termit, Niger)
(© G. Quéchon).

maximum de mesures possibles de sites différents. Il se trouve que toutes les


dates obtenues sont pertinentes en elles-mêmes et cohérentes entre elles. Il fau-
drait donc, pour que la chronologie soit fausse, que toutes les mesures, quelle
que soit leur origine, soient affectées de la même erreur, ce qui est statistique-
ment invraisemblable.
Il est intéressant de noter que les datations céramiques prouvent a contrario
que les charbons de fond de fourneau ainsi que les charbons dunaires des sites
eux-mêmes ne sont ni des charbons fossiles ni des charbons exogènes sans rap-
port avec l’activité humaine car, dans ce cas, les datations croisées auraient été
inopérantes.
Quant au premier argument adressé à des archéologues qui ont été parmi les
premiers à souligner que la manière dont était posée la question du cuivre-1 d’Aga-
dès n’était guère satisfaisante, il pourrait prêter à sourire. Remettre en cause les
Les datations de la métallurgie du fer à Termit (Niger) 113

dates de la métallurgie à Termit sous prétexte que d’autres dates de métallurgie,


proposées par quelqu’un d’autre, lors d’un autre programme et dans une autre
région se sont révélées discutables semble un argument pour le moins spécieux !
À cette aune, on aurait vite fait de déclencher dans le petit monde des préhisto-
riens un nouvel épisode, inattendu, de la querelle des Bouffons.
Reste l’objection majeure, s’agissant de sites de surface, sur l’incertitude de la
contemporanéité des fragments de métal et du reste du matériel archéologique.
Il s’agit d’un point crucial : lors de la présentation de la séquence, nous avons
longuement insisté sur le fait que les documents prouvaient que les sites du néo-
lithique final de Termit étaient presque toujours totalement exempts de pertur-
bations et de mélanges. C’est dans ce contexte, en liaison avec des vestiges
organisés avec une logique aussi remarquable que récurrente, qu’apparaissent les
premiers objets de métal ; s’ils ont été semés ultérieurement, là où on les a
114 Gérard Quéchon

retrouvés, par un paléo-Toubou facétieux, celui-ci était également un préhisto-


rien remarquable puisqu’il les a systématiquement abandonnés dans le même
contexte culturel céramique et lithique, sur des sites de la même période (environ
2800 à 3300 BP) et jamais sur des gisements plus anciens. L’objection se renforce
encore si l’on essaie d’imaginer l’occupation de la région par une population his-
torique connaissant la métallurgie : elle n’aurait alors laissé aucune autre trace de
son existence que ces répétitives « offrandes » métalliques sur certains gisements,
triés avec soin, de ses prédécesseurs.
Il semble inutile d’insister davantage sur une série d’observations que nous
croyons solides. Pour autant, tous les problèmes de cette métallurgie ancienne ne
sont pas résolus. Si la chronologie est établie, nous ne connaissons pratiquement
rien de la technique, des processus de la création et de l’étendue de cette métal-
lurgie, pour n’évoquer que quelques points en suspens.

Conclusion
Indiscutablement, dans l’état actuel des connaissances, l’hypothèse d’une inven-
tion autochtone s’impose, d’abord pour des raisons chronologiques, mais aussi
parce que cette métallurgie arrive dans des cultures complexes et très
« techniciennes », donc dans une tendance favorable à l’innovation.
Je voudrais insister néanmoins sur le fait qu’il ne s’agit pas d’une position
définitive : les berceaux de l’humanité, de l’agriculture, de l’élevage, de la métal-
lurgie, etc. sont incontestablement des berceaux à roulettes et certains bébés peu-
vent s’attendre à un avenir agité. Peu enclin à la recherche obstinée du scoop et à
l’archéologie dite « de la fille du chef », je voudrais rappeler qu’il n’est pas impor-
tant, en soi, que la métallurgie africaine soit la plus jeune ou la plus vieille, endo-
gène ou allochtone. S’il s’avère que des dates plus anciennes trouvées ailleurs
indiquent que le fer s’est diffusé à partir d’une autre source, l’Afrique n’en sera ni
meilleure ni moins bonne : avoir des racines, ce n’est pas affirmer qu’elles sont
plus profondes que celles des autres.
Mais si toutes les positions scientifiques sont respectables, à condition d’être
fondées, celles de l’idéologie le sont parfois moins. Il est indéniable que, à l’instar
de toutes les opinions humaines, les avis scientifiques subissent l’influence du
contexte philosophique et politique dans lequel ils sont formulés. À cette aune,
la question des origines de la métallurgie africaine s’est souvent inscrite, dans le
passé (et parfois, hélas !, encore maintenant), au sein d’une logique intégrant les
rapports de force Nord-Sud, colonisateurs-colonisés.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 115

Données chronométriques
et chronologiques de la métallurgie à Termit
Matériaux graphiques pour l’étude des âges
anciens du fer1
Alain Person, Gérard Quéchon

Cette réflexion prolongeant celle de Gérard Quéchon (voir chapitre précédent),


nous ne reviendrons pas sur les raisonnements archéologiques qui y sont présen-
tés, mais nous tenterons de réaliser une approche chronologique de cette métal-
lurgie par des représentations graphiques, tout en nous interrogeant sur certains
des problèmes que posent les datations au carbone 14.
Dans le premier article et pour des raisons de clarté et de commodité de
l’exposé, l’ensemble des données chronologiques a été exprimé en données non
calibrées. En effet, le but principal étant de vérifier la pertinence des mesures de
diverses natures sur le même site où de même nature sur des sites différents, il
semblait plus adéquat de conserver la formulation la plus simple. En opérant
ainsi, nous étions bien conscients d’exprimer les données non pas en chronologie
vraie mais en termes de mesures radiométriques dont le rapport avec le temps
historique, si étroit soit-il, reste complexe. Il s’agit donc, dans un premier temps,
de chronométrie, c’est-à-dire de test de la validité archéologique de la mesure de
l’âge d’un échantillon sans l’inclure pour autant dans un référentiel temporel
général. Les comparaisons se font d’échantillon à échantillon (figure 3) ou de
groupe d’échantillons à groupe d’échantillons (figure 4). Dans un second temps,
une approche chronologique est envisagée pour Termit, avec calibration des
mesures (tableau 3) pour les faire entrer dans un référentiel chronologique
calendaire (figure 5) et pouvoir ainsi comparer en termes de données histori-
ques les débuts de la métallurgie à Termit à l’ensemble des autres événements
archéologiques.

1. Les auteurs tiennent à remercier Vincent Balter, pour l’aide aussi précieuse que
spontanée apportée dans la mise en forme des graphiques, ainsi que Jean Polet pour
ses conseils et sa relecture amicale.
116 Alain Person, Gérard Quéchon

1500

1650

1800

1950

2100

2250

2400

2550

2700

2850
Âge 14C

3000

3150

3300

3450

3600

3750

3900

4050

4200

4350

4500

Figure 3. Représentation graphique des mesures 14C BP, à Termit-Égaro. Histogramme


additionnant par classes de 50 ans les dates radiocarbones BP non calibrées selon
l’intervalle de confiance des mesures
Figure 4. Histogramme comparatif des âges 14C

Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit


NIGER
(Quéchon, 1999)
NIGÉRIA
(Woodhouse, 1998) MEROE
(Shinnie, 1985)
C
14
ÂGES

CAMEROUN GABON
(Mac Eachern, 1996) (Clist, 1995)

RWANDA-BURUNDI
(De Maret et Thiry, 1996)

117
Tableau 3. Datations sur dégraissant végétal des céramiques

118
Code Âge BP Âge av. J.-C. Calibration av. J.-C.
Sites (échantillons) Matériel Âge 14C BP
labo calibré apr. J.-C. calibré – apr. J.-C.
Gara Tchia Bo 200 Pa 547 Dégraissant végétal 4420 ± 200 – 4985 3036 av. J.-C. 3364-2789 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 20 a UPS Charbon 4100 ± 90 – 4564 2615 av. J.-C. 2871-2493 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 20 b UPS Charbon 3695 ± 80 – 4036 2087 av. J.-C. 2192-1947 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 20 c Pa 505 Dégraissant végétal 3625 ± 90 – 3919 1970 av. J.-C. 2131-1828 av. J.-C.
Gossololom Bo 151 Pa 539 Dégraissant végétal 3600 ± 100 – 3885 1936 av. J.-C. 2120-1776 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 176 a UPS Charbon 3535 ± 200 – 3780 1831 av. J.-C. 2136-1616 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 176 b Pa 484 Dégraissant végétal 3510 ± 100 – 3760 1811 av. J.-C. 1944-1686 av. J.-C.

Alain Person, Gérard Quéchon


Gossololom Bo 152 Pa 540 Dégraissant végétal 3235 ± 120 – 3461 1512 av. J.-C. 1629-1398 av. J.-C.
Bézi Atchoua Pa 511 Dégraissant végétal 3225 ± 90 – 3421 1472 av. J.-C. 1602-1407 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 75 Pa 643 Dégraissant végétal 1960 ± 150 – 1884 66 apr. J.-C. 114 av. J.-C.-235 apr. J.-C.
Tchiré Ouma 147 Pa 320 Dégraissant végétal 3300 ± 120 – 3476 1527 av. J.-C. 1734-1429 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 48 W M Pa 811 Dégraissant végétal 3265 ± 100 – 3468 1519 av. J.-C. 1673-1421 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 48 E M Pa 810 Dégraissant végétal 3260 ± 100 – 3467 1518 av. J.-C. 1671-1419 av. J.-C.
Tchir Ouma 146 M Pa 510 Dégraissant végétal 3230 ± 170 – 3460 1511 av. J.-C. 1683-1312 av. J.-C.
Termit ouest 96 b M Pa 481 Dégraissant végétal 3100 ± 100 – 3281 1332 av. J.-C. 1443-1219 av. J.-C.
Tchi Guiribé 127 b M Pa 669 Dégraissant végétal 2950 ± 100 – 3098 1149 av. J.-C. 1307-999 av. J.-C.
Termit W 8 a M IFAN Charbon 2924 ± 120 – 3067 1118 av. J.-C. 1300-924 av. J.-C.
Termit W 8 b M Pa 688 Dégraissant végétal 2880 ± 120 – 2971 1022 av. J.-C. 1257-901 av. J.-C.
Do Dimmi 15 a F IFAN Charbon 2630 ± 120 – 2752 803 av. J.-C. 898-601 av. J.-C.
Do Dimmi 16 a M UPS Charbon 2590 ± 120 – 2744 795 av. J.-C. 832-533 av. J.-C.
Do Dimmi 16 b M Pa 296 Charbon 2580 ± 80 – 2742 793 av. J.-C. 810-559 av. J.-C.
Do Dimmi 15 b F Pa 288 Charbon 2500 ± 70 – 2581 632 av. J.-C. 791-420 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 48 B1 M Pa 519 Dégraissant végétal 2430 ± 110 – 2399 450 av. J.-C. 772-391 av. J.-C.
Do Dimmi 16 c M Pa 504 Dégraissant végétal 2270 ± 90 – 2321 372 av. J.-C. 399-195 av. J.-C.
Gara Tchia Bo 181 F Pa 351 Charbon 2120 ± 60 – 2086 137 av. J.-C. 196-45 av. J.-C.
Cheguelenga 123 M Pa 662 Dégraissant végétal 2095 ± 200 – 2045 96 av. J.-C. 383 av. J.-C.-122 apr. J.-C.
Do Dimmi 15 c F UPS Charbon 2065 ± 60 – 1996 47 av. J.-C. 162 av. J.-C.-9 apr. J.-C.
Do Dimmi 16 d M IFAN Charbon 1745 ± 110 – 1665 285 apr. J.-C. 143-422 apr. J.-C.
Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit 119

14
Âge C calibré

– 3000

– 2750

– 2250

– 1000
– 3500

– 3250

– 2500

– 2000

– 1750

– 1500

– 1250

– 750

– 500

– 250

250

500
0
Gara Tchia Bo 200
– 3036
Gara Tchia Bo 20 a
– 2615
Gara Tchia Bo 20 b
– 2087
Gara Tchia Bo 20 c
– 1970
Gossololom Bo 151
– 1936
Gara Tchia Bo 176 a
– 1831
Gara Tchia Bo 176 b
– 1811
Gossololom Bo 152
– 1512
Bézi Atchoua
– 1472
Gara Tchia Bo 75
66
Tchiré Ouma 147
– 1527
Sites (échantillons datés)

Gara Tchia Bo 48 W M
– 1519
Gara Tchia Bo 48 E M
– 1518
Tchiré Ouma 146 M
– 1511
Termit ouest 95 b M
– 1332
Tchi Guiribé 127 b M
– 1149
Termit W 8 a M
– 1118
Termit W 8 b M
– 1022
Do Dimmi 15 a F
– 803
Do Dimmi 16 a M
– 795
Charbon métal

Céramique métal

Charbon néolithique

Céramique néolithique

Do Dimmi 16 b M
– 793
Do Dimmi 15 b F
– 632
Gara Tchia Bo 48 B1 M
– 450
Do Dimmi 16 c M
– 372
Gara Tchia Bo 181 F
– 137
Cheguelenga 123 M
– 96
Do Dimmi 15 c F
– 47
Do Dimmi 16 d M
285

Figure 5. Chronologie de la fin du néolithique et des débuts de la métallurgie à Termit


120 Alain Person, Gérard Quéchon

La critique scientifique d’une date au carbone 14 pose deux questions


préalables :
• le problème de la représentativité archéologique de la mesure, qui peut être dis-
cuté dans le cadre des travaux de Termit pour lequel on dispose de toutes les don-
nées. La méthode utilisée est celle de l’application de la mesure au carbone 14
aux matériaux anthropiques eux-mêmes : il s’agit de dégraissants végétaux inclus
dans des céramiques (Saliège et Person, 1991 ; Durand et al., 1999), de char-
bons provenant de sites archéologiques (par croisement des résultats avec les
datations céramiques) et de bases de structure de réduction (photo 73) ;
• la fiabilité de la mesure, liée par exemple à la quantité de carbone utilisable.
Elle est accessible ici de deux façons : d’une part, par les informations données
par les laboratoires de datation en fonction de l’étroitesse de l’intervalle de
confiance qu’ils fournissent, ce qui conduira à pondérer l’intervalle de temps
pris en compte dans les traitements graphiques, et, d’autre part, par son inté-
gration cohérente dans un corpus de mesures réalisées sur le même ensemble
archéologique.
Il paraît intéressant de traduire sous forme graphique (Gasco, 1985 ; Voruz,
1995) l’ensemble des 28 mesures réalisées pendant toute la durée du programme
par les laboratoires2 (tableau 3), pour avoir une première image des débuts de la
métallurgie du fer dans le massif de Termit (figure 3). Il s’agit d’un histogramme
cumulatif pondéré dans lequel la même surface est accordée à chaque date, de
telle sorte que les plus précises, celles qui ont un petit intervalle de confiance
n’aient pas une part moins importante que les autres dans les pics de fréquence
mais, au contraire, qu’elles y jouent un rôle prépondérant. Pour plus de lisibilité,
la présentation est ici sous forme de « poire » (Gasco, 1985 ; Evin et Oberlin,
1998) : l’axe chronologique en abscisse est figuré de façon verticale et l’histo-
gramme présenté avec son image en « miroir » de part et d’autre de cet axe.
L’homogénéité du graphique apparaît clairement. Il y a donc continuité dans
le recouvrement des datations, ce qui conforte déjà la réalité de la métallurgie
ancienne entre 3300 et 1400 BP. La période comprise entre 3300 et 2000 BP,
documentée par 26 mesures, correspond à l’essentiel de l’activité métallurgique
enregistrée sur les sites archéologiques. Pour refléter l’ensemble des mesures au
carbone 14 obtenues dans la région, nous avons fait figurer également les
2 données obtenues sur les sites d’Égaro (Pa 629) : 4000 ± 110 BP (Pa 661) et
3645 ± 150 BP (Paris et al. 1992). Ces dates ont pourtant été obtenues dans de
bonnes conditions de terrain et de laboratoire mais, dans la mesure où une seule
mission a pu être réalisée, la prudence reste de mise, surtout s’agissant de sites de

2. Laboratoire de datation de l’Institut fondamental d’Afrique Noire (Dakar), Labora-


toire de géochimie isotopique de l’Université de Paris Sud (Orsay) et Laboratoire
d’océanographie dynamique et de climatologie de l’Université Pierre-et-Marie-
Curie (Paris).
Données chronométriques et chronologiques de la métallurgie à Termit 121

surface. Il est facile de visualiser l’influence graphique de ces deux dates entre 4100
et 3300 BP (figure 3). Pour confronter visuellement ces informations à l’ensemble
des données bibliographiques disponibles sur la métallurgie du fer en Afrique,
nous avons établi, de la même façon, des histogrammes cumulés de datations pour
chaque grande région où existent des corpus de dates au-delà de 1 000 années BP
(Clist, 1995 ; MacEachern, 1996 ; de Maret et Thiry, 1996 ; Okafor, 1993, Wood-
house, 1998). Nous avons fait figurer aussi le peu d’informations chronologiques
existant sur Méroé (Shinnie, 1985), en raison du rôle de référence « mythique » que
ce site a joué dans la littérature (figure 4). Il va de soi qu’à propos des données publiées
par différents auteurs à différentes époques, il est impossible d’établir un appareil cri-
tique comparable à celui mis en place pour les gisements de Termit, car tous les élé-
ments scientifiques pour le faire ne sont pas accessibles. Il ne s’agit donc que d’une
compilation de résultats, exprimés en âge au carbone 14 BP, destinée à donner une
vue d’ensemble sommaire, mais la plus globale possible, des données publiées.
Un tel graphique confirme néanmoins en première analyse l’ancienneté de la
métallurgie du fer en Afrique. Il y a, d’évidence, une bonne concordance chro-
nologique de tous les histogrammes, y compris dans les régions les plus éloignées.
Une fois encore, l’hypothèse diffusionniste à partir de Méroé est visuellement
invalidée. Il semble en revanche que les dates proposées pour l’Afrique centrale
soient aussi anciennes que celles du Niger. Enfin, il existe au Gabon, au Nigéria
et au Cameroun un ensemble impressionnant de mesures concordantes.
Après avoir ainsi présenté une vision synthétique, si schématique soit-elle,
des débuts de la métallurgie du fer en Afrique subsaharienne, il est intéressant,
pour la région de Termit où nous disposons des informations nécessaires, de ten-
ter une approche plus fine de la chronologie réelle en regroupant, après les avoir
transformées en données calendaires, l’ensemble des datations de la période
concernée (figure 5). Il était impossible de présenter les résultats de cette opéra-
tion sous la même forme graphique que les données non corrigées. En effet, la
probabilité qu’une date calendaire se situe en un point donné de son intervalle
de confiance est régie par une formule complexe, liée, entre autres, au nombre
d’interceptions entre la mesure non corrigée et la courbe de calibration. La forme
de représentation adoptée jusqu’ici est donc inapplicable.
D’ailleurs il ne serait pas souhaitable, même si c’était possible, de garder le
même mode de présentation car il s’agit maintenant de définir une chronologie
vraie et il vaut mieux bien faire la distinction entre les deux démarches. Nous
avons donc adopté une présentation plus classique, où les résultats sont disposés
par groupes culturels à la suite les uns des autres, en regard d’une échelle tempo-
relle exprimée en années historiques. La barre d’erreur a été volontairement limi-
tée à 1 σ car la multiplication des dates convergentes justifie que l’on minimise
l’incertitude dans le cadre d’un traitement statistique et aussi parce que l’essai
que nous avons fait avec 2 σ alourdissait et compliquait le graphique sans appor-
ter d’informations nouvelles.
122 Alain Person, Gérard Quéchon

Le chiffre figurant à la droite de chaque date est celui de la valeur du sommet


de la courbe de probabilité calendaire la plus forte, il n’est donc presque jamais
au centre de l’intervalle de confiance. Il est noté à titre indicatif et pour donner
une vision plus imagée, sinon plus exacte, de la succession des événements.
Les conclusions s’imposent d’elles-mêmes : la continuité culturelle dans
laquelle s’inscrit l’arrivée des premiers objets de fer est aussi clairement visible sur
le graphique qu’elle l’a été sur le terrain ; il n’y a pas de rupture, à partir du néo-
lithique récent et jusqu’à la fin de l’occupation humaine antéhistorique du mas-
sif, mais seulement des évolutions.
On notera au passage, sans en surestimer la signification, la répétition de cer-
taines des valeurs figurées, tant pour les premières dates de présence du fer sur les
sites (1519, 1518, 1512) que pour celles des premiers bas fourneaux (803, 795,
793). Quoiqu’un tel degré de précision soit anecdotique, il est ainsi confirmé que
l’on se trouve dans un cadre chronologique solide. C’est d’autant plus vrai que
l’ensemble des dates est encore plus étroit qu’il n’apparaît au premier abord, si
l’on prend soin d’examiner séparément les trois mesures extrêmes du dispositif,
la plus ancienne et les deux plus récentes. Celle du site 200, 3036 av. J.-C.
(3364-2789 av. J.-C.) correspond en effet à un ensemble qui nous avait semblé
le plus ancien de la série ténéréenne : la panoplie lithique habituelle n’est pas
encore au complet et il existe des formes céramiques qui disparaissent par la
suite. Il est donc logique qu’elle soit antérieure aux autres de quelques siècles car
elle ne fait pas à proprement parler partie, même si elle l’annonce, du contexte
culturel dans lequel apparaîtront les premiers objets de métal.
Les deux dates les plus récentes posent un problème différent. La première
— site 75, 66 apr. J.-C. (114 av. J.-C.-235 apr. J.-C.) — est impossible pour du
ténéréen. Il s’agit probablement d’un problème de carbone allochtone plus
récent provenant d’un carbonate pédogénétique et s’étant déposé dans la poro-
sité de la céramique à la suite d’une phase d’immersion temporaire, par exemple ;
le prétraitement au laboratoire s’est révélé insuffisant pour l’éliminer. Le cas de la
seconde date est plus complexe : elle est relative à l’ensemble de Do Dimmi qui
comporte à la fois un habitat et des bas fourneaux et dont on sait qu’il a été
important et qu’il a perduré pendant plusieurs siècles. Les 6 mesures s’étalant
entre 800 et 50 av. J.-C. ne doivent donc pas surprendre. Mais la dernière, à
285 apr. J.-C., semble, dans le contexte de Termit, un peu tardive. Il ne saurait
bien sûr être question de l’écarter pour ce seul motif et nous l’avons gardée dans
le dispositif. Nous devons pourtant faire part de notre doute, surtout pour un
site traversé par la principale piste chamelière actuelle et, donc, plus susceptible
que d’autres de subir des rajeunissements.
Au terme de cette analyse graphique d’un corpus de dates qui sont validées à la
fois par le contexte archéologique local, par leur cohérence propre et par leur adé-
quation aux données bibliographiques disponibles, il semble difficile de contester,
tout au moins de bonne foi, l’ancienneté des débuts de la métallurgie africaine.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 123

L’Afrique centrale : le « savoir-fer »


Pierre de Maret

Certains d’entre vous se demandent sans doute pourquoi l’UNESCO a décidé,


il y a quelques années, de lancer un projet interculturel consacré aux « Routes du
fer en Afrique » et, surtout, en quoi cela concerne son département du Dialogue
interculturel et du pluralisme pour une culture de la paix.
En prenant cette initiative, l’UNESCO répondait à la demande insistante de
nombreux savants, diplomates, hommes d’État et intellectuels africains. Mais
cela ne procédait-il pas d’un intérêt rétrograde pour une technique emblémati-
que d’une Afrique à jamais révolue ? En quoi cela pouvait-il favoriser le dialogue
interculturel, voire promouvoir la paix ?
De tous les continents, l’Afrique est celui où le travail du fer a été le plus
répandu, présentant à la fois :
• un certain nombre de grandes caractéristiques communes qui font la spécifi-
cité, l’originalité de la métallurgie africaine ;
• une grande diversité technique, culturelle et symbolique, qui sont autant de
variations sur ce fond commun ;
• une continuité remarquable, qui remonte à plusieurs millénaires et qui per-
met même de penser que cette technique fondamentale peut trouver son ori-
gine sur le continent africain.
Les fondeurs et les forgerons africains témoignent, dans le dialogue interconti-
nental, des savoirs et des « savoir-fer » de leur continent dans un domaine qui eut
aussi un rôle fondamental dans bien d’autres civilisations de par le monde. Ce
n’est pas un hasard si tant d’Anglo-Saxons s’appellent M. ou Mme Smith. En
France, l’ouvrage de Robert Griffon (1999), Le dernier forgeron, évoque avec nos-
talgie l’importance qu’avait ce métier autrefois. Son auteur, qui a consacré une
thèse à la Sorbonne aux forgerons du Cher, montre combien la forge était un
haut lieu de convivialité villageoise. Cela évoque tout à fait mes expériences afri-
caines car, en effet, la forge a partout un rôle essentiel dans le dialogue. Elle était
124 Pierre de Maret

d’ailleurs souvent un lieu d’où toute violence était strictement bannie. Dans la
recherche de la paix entre les personnes ou les peuples, les forgerons ont souvent
joué un rôle essentiel ; marginalisés, détenteurs de pouvoirs extraordinaires, ils
furent souvent les intercesseurs entre groupes ennemis, les émissaires en cas de
conflit entre familles ou ethnies.
Plus largement, en matière de dialogue interculturel, ce qui me fascine
depuis longtemps c’est, à propos de la métallurgie, l’extraordinaire parallélisme
symbolique qui existe entre les différentes civilisations, que ce soit en Europe, en
Asie ou en Afrique. Cela nous renvoie aux catégories universelles de l’esprit
humain chères à Claude Lévi-Strauss, ancrage idéal pour le dialogue interculturel
comme pour la recherche scientifique. Car de ce point de vue, l’Afrique offre
aussi aux scientifiques un champ extraordinaire d’observation et d’analyse où
technologie, archéologie et anthropologie peuvent dialoguer et fournir des exem-
ples et des modèles interprétatifs dont l’importance déborde du cadre stricte-
ment africain.
Je voudrais aborder essentiellement deux ordres de problèmes au départ de
mon expérience de l’Afrique centrale où je travaille depuis une trentaine
d’années. Comme on parle beaucoup de l’ancienneté de la métallurgie en Afri-
que, mes collègues Hamady Bocoum et Gérard Quéchon viennent de le faire, je
voudrais, d’abord, discuter un peu cet aspect des choses puis aborder brièvement
quelques aspects liés à la technique avant de développer les rapports que la métal-
lurgie entretient avec les systèmes de pensée chez les Bantu.

À quand remonte la métallurgie en Afrique centrale ?


Il y a plus d’un siècle déjà, un géologue, archéologue amateur (Stainier, 1897),
avait eu l’intuition, vu l’importance et la sophistication de la métallurgie en Afri-
que centrale, que, contrairement aux conceptions racistes de l’époque, la métal-
lurgie devait y être très ancienne. Pendant longtemps on a lié de façon assez
mécanique l’expansion bantu à la métallurgie, l’une expliquant l’autre dans un
raisonnement circulaire.
Comment les Bantu s’étaient-ils propagés à travers l’Afrique centrale ? Grâce
à la supériorité agricole que leur conférait la métallurgie pour défricher la grande
forêt et à la supériorité militaire que leur procurait la possession d’armes en fer.
Comme la zone d’origine des langues bantu avoisinait celle de la culture nok où
l’on avait des dates parmi les plus anciennes pour des fourneaux de réduction du
fer, l’archéologie paraissait confirmer cette hypothèse, corroborée par le fait
qu’un linguiste, Guthrie (1970), avait cru pouvoir montrer que les Proto-Bantu
connaissaient la métallurgie avant que ne débute leur migration.
Reprenant les travaux de Guthrie, François Nsuka et moi-même (1980)
avons pu montrer que les reconstructions proto-bantu de Guthrie ne prouvaient
L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 125

pas la connaissance de la métallurgie à cette époque. En effet, les termes comme


hache, houe, et même forger ou minerai, avaient eu vraisemblablement à l’ori-
gine un sens qui n’était pas lié au métal.
Cela a amené à dissocier progressivement l’origine du fer des Bantu en Afri-
que centrale, d’autant plus que les recherches se multipliant, on a obtenu en dif-
férents points des dates aussi anciennes, voire plus anciennes, que celle de Taruga
en zone nok au Nigéria. Progressivement, les dates admises pour le début de la
métallurgie du fer en Afrique centrale ont reculé, passant du début de l’ère chré-
tienne au IVe, Ve, voire au VIIe siècle av. J.-C.1.
Il y a un consensus assez général pour dire que, entre la zone nok au Nigéria
(Okafor, 1993), le Cameroun, le Gabon (Clist et Lanfranchi, 1989 ; Lanfranchi
et al., 1991), la République centrafricaine (Essomba, 1992 et Zangato, 1993 et
1999) et le Rwanda (Van Grunderbeek, 1992), la métallurgie du fer est présente
à partir de la fin du IXe siècle avant notre ère. Il existe une série de dates plus
anciennes dans la même région, remontant jusqu’au XVe siècle avant notre ère,
mais, vu la grande ancienneté des échantillons, les différents chercheurs ont eu
tendance à les considérer comme contaminés et à les rejeter2.
N’empêche, en rejetant les dates très anciennes, on a eu tendance, comme je
l’ai dénoncé dans un texte récent (de Maret et Thiry, 1996), à postuler que la
métallurgie du fer ne pouvait pas être plus ancienne en Afrique que sur d’autres
continents. Toute date antérieure à 1500 av. J.-C. était donc rejetée. Les résultats
obtenus au Niger (Paris et al., 1992 ; Quéchon, 1995) tendent cependant à
prouver le contraire.
Il existe pour l’Afrique centrale un autre indice permettant de penser que
l’usage du fer est très ancien, peut-être aussi ancien qu’au Niger. En effet vers
3000 BP, voire 3500 ou même 4000 BP, on a une série de fosses profondes dont
la fonction première reste controversée (silo/tubercules ?) mais qui ont servi ulté-
rieurement de fosses à détritus. Or, elles ne contiennent quasiment pas d’éclats
de débitage ou d’outillage de l’industrie lithique. Alors que celle-ci était abon-
dante jusque vers 3500 BP, elle s’interrompt soudain sur des sites d’habitat de
plein air. Cette disparition brutale et attestée du Congo au Cameroun et même
jusqu’au Ghana s’explique difficilement. Qu’est-ce qui peut avoir remplacé la
pierre ? Il est tentant de penser que c’est le fer. Malheureusement, on n’en a pas

1. Vu les fluctuations de la teneur en carbone 14 dans l’atmosphère à ces périodes, la


calibration des dates les place dans un intervalle qui va du VIIIe au Ve siècle av. J.-C.
Cet intervalle de temps est trop large pour permettre de dresser une chronologie
fine permettant de déterminer la zone d’origine de la métallurgie et la façon dont
elle s’est diffusée.
2. Ainsi, au cours de mes recherches personnelles à Yaoundé, au Cameroun, une date
de cette époque pour une fosse renfermant des scories n’a pas été confirmée par
d’autres dates pour la même fosse et pour une série d’autres fosses datées une qua-
rantaine de fois dans une dizaine d’autres sites de la région.
126 Pierre de Maret

encore trouvé de trace à une époque aussi ancienne. Mais cela peut s’expliquer
par le fait que les objets en fer étant rares et précieux, ils étaient systématique-
ment récupérés et reforgés, et que le reste, rouillé, a disparu. L’absence jusqu’à
présent de fourneau, tuyère ou scories amène Lavachery (1997-1998) à faire
l’hypothèse que la population de ces régions utilisait le fer mais ne le produisait
pas.
Une de nos chercheuses (Thiry, 1996) a réexaminé les données linguistiques
et arrive à des conclusions très intéressantes et qui corroborent peut-être l’hypo-
thèse d’une connaissance et d’un usage anciens d’objets en fer à défaut d’une pra-
tique de la métallurgie. En effet, le terme signifiant fer semble finalement
d’origine proto-bantu, alors que celui signifiant minerai de fer serait, lui, d’ori-
gine plus récente et se serait diffusé d’est en ouest, de la région des Grands Lacs
vers l’Angola et la Namibie.
Tout cela semble de plus en plus indiquer une connaissance très ancienne de
la métallurgie du fer et, donc, sa probable découverte sur le continent africain
avec, pour certaines régions, un phénomène de frontière mobile, sur le modèle
de la conquête de l’Ouest américain. On aurait ainsi de vastes zones où la réduc-
tion du fer n’est pas bien connue mais où les outils en fer se répandent parfois
pendant longtemps avant que leurs habitants parviennent à la maîtrise de toutes
les étapes de la métallurgie.

Les aspects techniques de la métallurgie du fer


en Afrique centrale
Si les fourneaux et les techniques de réduction ont largement retenu l’attention
des anthropologues, des archéologues et des technologues, par contre le travail
du forgeron a été négligé. Les analyses métallographiques effectuées par ma col-
lègue Terry Childs (1991), à l’époque au MIT de Boston, de fer de haches et de
couteaux en provenance du Zimbabwe, notamment des ruines du grand Zimba-
bwe et d’objets archéologique datés du VIIIe au XIVe siècle provenant de la zone
d’origine des Luba, attestent de l’extraordinaire maîtrise technique des forgerons
bantu. Ainsi, souvent par soudage et corroyage, le forgeron fabriquait une lame
en acier à faible teneur en carbone sur laquelle il soudait une couche d’acier qui
donnait un bon tranchant, tandis que le centre de la lame, plus mou, permettait
d’absorber les chocs sur des objets durs.
Fréquemment, les Luba recyclaient les objets usés : les houes étaient refor-
gées pour faire des haches, les haches pour faire des couteaux, les couteaux pour
faire des rasoirs, les rasoirs enfin donnaient des scalpels.
Mes fouilles dans cette région ont permis d’établir la séquence archéologique
de l’âge du fer dans cette zone depuis le VIIe siècle jusqu’aux Luba contempo-
rains. C’est actuellement la plus longue fréquence connue et elle permet de sui-
L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 127

vre l’évolution non seulement du travail du fer mais aussi du cuivre (de Maret,
1979 et 1980 ; de Maret et Thiry, 1996). Les forgerons luba pratiquaient aussi le
tréfilage de ces deux métaux à des fins décoratives. D’une façon générale, les
techniques de tréfilage sont très mal connues et ont malheureusement pratique-
ment disparu.
Mais la plus grande surprise de l’analyse métallographique par T. Childs des
objets archéologiques luba, c’est la présence de fonte, de fer fondu (inclusion de
carbide) dans des bracelets, et cela dans une proportion croissante au fil du
temps. Cette production de fonte est confirmée par le témoignage ancien d’un
missionnaire qui parle de fonte mise dans un moule pour des houes et par les
traditions orales actuelles (Childs, 1991).
La présence de véritable fonte de fer est, comme vous le savez, extraordinaire
puisqu’elle implique une maîtrise technique et l’obtention systématique de tem-
pératures très élevées réputées impossibles à atteindre avec les techniques afri-
caines. D’où l’insistance de Jean Devisse et des spécialistes français pour que l’on
parle de réduction et pas de fonte. Eh bien, il faut désormais admettre que les
Luba fondaient le fer, et ce depuis plus d’un millénaire !
La seconde surprise de taille, c’est que la fonte étant trop cassante pour être
forgée, une étape de décarburisation est nécessaire pour transformer le métal afin
de pouvoir le forger. C’est manifestement ce que les forgerons luba faisaient car
les bracelets étudiés sont essentiellement de l’acier qui englobe des zones de
fonte. Comme le souligne Childs (1991), les techniques luba pour la métallurgie
du fer et du cuivre ont évolué parallèlement, et les techniques mises au point avec
un métal ont été adaptées à l’autre. Ils avaient aussi, par exemple, mis au point
une technique de séparation du minerai contenu dans le sable des rivières par ce
qu’on appelle, en métallurgie moderne, le hancok jigg, c’est-à-dire un processus
de sédimentation différentiel dans de l’eau courante.
Bref, dès que l’on prend la peine d’étudier de façon approfondie différents
aspects de la forge et qu’on ne se limite pas aux techniques de réduction/fonte,
on constate le niveau de perfectionnement poussé de nombreux aspects de
l’activité métallurgique qui devraient être étudiés avant leur disparition totale
et définitive.

Les aspects symboliques de la métallurgie du fer


en Afrique centrale
Venons-en maintenant, après l’aspect historique et technique, à l’aspect symbo-
lique de la métallurgie du fer.
Le symbolisme sexuel est dominant dans la réduction/fonte ; l’aspect symbo-
lique de l’opération est essentiel, comme l’avait montré Échard (1983a et b), et
128 Pierre de Maret

vise à corréler aussi étroitement que possible la production du métal et celle des
humains. Ces deux opérations cruciales relèvent toutes les deux d’une vaste
sphère qui englobe la procréation, la génération, la régénération, la transforma-
tion, la fertilité, la fécondité, le succès, un mélange particulier et subtil de force,
de savoir, de savoir-faire et de chance qui, comme dans beaucoup de cultures,
sont intégrés dans le concept très polysémique de pouvoir, de puissance.
En Afrique centrale bantu, la fonte est clairement, plus ou moins simultané-
ment, coït et accouchement. Le fourneau est orné de seins, de scarifications
comme une femme ; on lui met même parfois une ceinture comme chez les
Shona du Zimbabwe, et le vocabulaire utilisé pour désigner ses différentes parties
font référence au corps féminin. Soulignons au passage le parallèle avec les pote-
ries, faites aussi en argile et dont les parties sont désignées, comme dans beau-
coup de langues du monde, par des termes reprenant des éléments du corps :
panse, lèvre, postérieur, épaule… Ah, catégories universelles de l’esprit humain,
quand vous nous tenez !
Les soufflets avec leurs deux chambres sont souvent assimilés au pénis avec
ses testicules, leur rythme étant celui de l’acte sexuel.
Dans une vaste zone de l’Afrique centrale, on place des charmes à l’intérieur
du fourneau, souvent enterrés au centre, parfois dans un petit pot3. Cette der-
nière pratique est ancienne et largement attestée du Congo au Rwanda, comme
le montre l’archéologie.
Pour les humains aussi, les relations sexuelles provoquent un échauffement,
par exemple chez les Zulu ou les Thonga. Selon les Manyika du Zimbabwe, la
fusion d’un homme et d’une femme est particulièrement dangereuse et donc
brûlante. Elle abolit les frontières non seulement entre deux personnes mais aussi
entre les sexes, entre le haut et le bas. Pour eux, l’acte sexuel est clairement une
fonte, quelque chose de très « fusionnel » comme on dirait en français.
En matière de gestation aussi, les rapports entre la métallurgie, la poterie et
les humains sont multiples.
Érigé à l’écart du village, le fourneau est souvent protégé, en Afrique de
l’Ouest, par un auvent. Comme pour la poterie, la fonte est entourée de prohi-
bitions essentiellement à caractère sexuel : abstinence, interdiction de présence
féminine, surtout pour les femmes enceintes ou réglées.
Pour les Thonga, bien décrits par Junod (1910), « un enfant résulte d’une
cuisson réussie, et il est considéré comme une poterie qui a été cuite et ne s’est
pas fêlée à la cuisson ». En français aussi, on peut être un peu « fêlé ». Pour les
Thonga, comme l’observait mon maître de Heusch (1982), on doit veiller à une

3. En décembre 1997, cette pratique a encore été observée lors d’une opération de
reconstitution réalisée par des forgerons du Nord-Cameroun au cours de l’atelier
international sur les Métiers africains du feu (METAF) que j’avais organisé à
Yaoundé.
L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 129

cuisson bien contrôlée de l’enfant et éviter toute surchauffe soudaine. Ainsi la


femme enceinte doit éviter de manger trop chaud ou trop épicé.
Comme pour la fonte, la cuisson de la poterie oblige à respecter des interdits.
Il est interdit aux femmes enceintes ou réglées de s’en charger. Souvent, seule la
femme ménopausée peut s’occuper de la cuisson car, si elle ne l’est pas, elle ris-
que de devenir stérile.
En ce qui concerne la naissance, la fonte est plus ou moins explicitement
l’enfant de la femme/fourneau et les scories le placenta. Chez les Minyanka tout
comme chez les Lovedu ou les Sotho, l’enfant doit, après sa naissance, être
refroidi, fumé ou aspergé d’eau comme un morceau de métal forgé. Une vie nou-
velle est créée quand l’eau refroidit le feu, comme le forgeron refroidit avec de
l’eau le morceau de métal sans forme pour créer une forme nouvelle.
En ce qui concerne la cuisson des poteries, on n’attend pas qu’elles refroidis-
sent. Au contraire, on les retire du feu encore très chaudes et on les asperge d’eau,
d’une décoction d’écorces ou de cendres. Ce qui est frappant c’est que, dans la
zone où on procède ainsi, les nouveau-nés sont traités pratiquement de la même
façon, si bien qu’on peut se demander si les pots sont traités comme des enfants
ou inversement, si, quand on fume et asperge le nouveau-né, c’est pour le traiter
comme un pot.
On pourrait multiplier les exemples. Clairement la gestation, la fonte et la
cuisson de poteries sont des cuissons ; la naissance est assimilée à l’extraction de
la fonte ou des poteries. Il faut cependant souligner un paradoxe. Bien que les
pratiques rituelles soient beaucoup plus développées pour la réussite des opéra-
tions de fonte/réduction que pour la forge, la fonte, l’opération métallurgique
par excellence, n’est pas présente dans les rituels. Au contraire, le fait de forger
occupe une place importante dans des aspects clefs du système symbolique, alors
que les actes rituels n’y prennent pas une grande place. Chez les Bantu, le forge-
ron occupe souvent une place prépondérante dans les rites et les mythes. Il y
intervient souvent de façon métonymique, représenté par son nyundo, son mar-
teau-enclume. Le parallèle entre la fonte et l’accouchement peut expliquer ce
paradoxe. Les femmes, comme les fondeurs, se dissimulent pour « accoucher ».
Au contraire, la forge est un lieu public, convivial, au centre du village, où l’on
aime venir bavarder en observant le forgeron dans ses œuvres. La fonte et la forge
métamorphosent la matière et, cependant, ce sont des opérations très différentes,
techniquement et symboliquement. Si la fonte est une naissance, le contraire
n’est pas vrai. Un fourneau est comme une parturiente, mais une parturiente
n’est pas comme un fourneau. La métaphore n’est pas réversible.
Un autre thème que l’on rencontre d’un bout à l’autre de l’Afrique centrale,
là où se sont développées des royautés, est celui d’un roi forgeron qui est à l’ori-
gine à la fois de cette dynastie et de la connaissance de la métallurgie. Dans la
même zone qui va de l’Angola à l’Ouganda, il n’est pas surprenant de trouver,
dans les rituels d’intronisation, une étape où l’on entrechoque deux marteaux, ce
130 Pierre de Maret

qui renvoie probablement autant au roi/forgeron qu’à la transformation d’un


individu en roi sacré, selon un processus assimilé au forgeage et destiné à l’endur-
cir, à le rendre fort.
Pour conclure très provisoirement cette incursion dans l’univers symbolique
bantu, la masse-enclume du forgeron, dont l’aspect phallique est évident, fait
souvent l’objet de traitements particuliers, d’autant que par sa forme elle évoque,
comme chez les Luba, un autre objet également lié à la fécondité et également de
forme phallique, la poupée manipulée par les petites filles ou, parfois, par les
femmes stériles.
Ces masses-enclumes sont associées à la royauté et se rencontrent souvent
parmi les objets régaliens les plus sacrés, par exemple à la cour du mwami au
Rwanda et au Burundi. Ce qui est intéressant, c’est que dans mes fouilles dans la
dépression de l’Upemba, au cœur du grand royaume luba, on en a trouvé égale-
ment une dans la tombe d’un personnage manifestement important.
Pour revenir à ce vaste champ symbolique qui englobe la fertilité/l’infertilité,
la chance/la malchance, le froid/le chaud, la vie/la mort, le sec/l’humide, le dur/
le mou, l’ouvert/le fermé et le masculin/le féminin, l’analyse de la métallurgie
nous renvoie aussi aux rapports entre les sexes, dans tous les sens du terme.
Il serait assez réducteur et ethnocentrique de considérer les prohibitions que
l’on constate comme une façon de séparer les sphères masculines et féminines.
En fait, à différents moments, à différentes étapes, il peut y avoir coopération, y
compris pour remédier à des problèmes sexuels chez l’autre sexe (comme par
exemple, au Rwanda, ceux de la femme frigide). Les pouvoirs masculins et fémi-
nins sont complémentaires et sont nécessaires pour s’équilibrer, pour contrôler la
chaleur, pour définir des limites, pour aider à les franchir.
Les processus de transformation sont au centre des relations entre les sexes et
de la perpétuation de l’ordre social, naturel et symbolique. À travers leurs com-
plémentarités techniques, physiologiques et symboliques, il nous rappelle,
comme aux Bantu, l’interdépendance constante entre les hommes et les femmes.
C’est aussi une des bases du dialogue interculturel.

Conclusion
Au sein d’une Afrique, et particulièrement d’une Afrique centrale, déchirée par
trop de conflits atroces et face aux manipulations de l’histoire et de l’identité aux-
quelles on assiste, il est temps de montrer à ces peuples, aux hommes et aux
femmes qui les composent, que bien plus de choses les rassemblent qu’elles ne les
séparent, que leurs ressemblances l’emportent largement sur leurs différences.
L’analyse comparée des techniques, du vocabulaire, des rites et des mythes
liés à la métallurgie l’illustre bien. Quand on sait le rôle crucial que jouaient le
fer et sa métallurgie en matière économique, politique et symbolique dans les
L’Afrique centrale : le « savoir-fer » 131

civilisations africaines, on comprend mieux l’intérêt manifesté par les chercheurs


et les décideurs africains.
L’ingéniosité, la créativité et l’excellence dont ont fait et dont font encore
preuve nombre d’artisans africains et la très haute antiquité de cette pyrotechno-
logie sont aussi source de fierté légitime. À l’heure de la mondialisation, si l’on
veut favoriser le dialogue interculturel et le pluralisme, il importe que s’établisse
une certaine réciprocité culturelle entre les peuples. Rien n’est plus pernicieux
que l’absence d’échange, l’assujettissement de façon univoque à un modèle
dominant. C’est ça aussi le combat pour l’exception culturelle.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 133

Bilan de l’archéologie de l’âge du fer


au Cameroun méridional1
Joseph-Marie Essomba

C’est en mars 1983 que, conformément aux recommandations de la réunion de


Garoua, nous avons élaboré un programme de recherches archéologiques dans le
centre et le sud du Cameroun, principalement axé sur l’âge du fer. Il s’inscrivait
dans le cadre des projets de l’ancien Ministère de l’enseignement supérieur, de
l’informatique et de la recherche scientifique (MESIRES), du Centre de recher-
ches et d’études anthropologiques de l’ex-Institut des sciences humaines et de
l’Université de Yaoundé. Il a été exécuté en partenariat avec l’ORSTOM pen-
dant une période de trois ans à partir de 1989.

La problématique du programme et les objectifs


L’histoire du Cameroun précolonial, notamment dans la partie sud du pays, reste
encore très mal connue. Les tentatives de reconstitution exigent un effort de
recherche où l’archéologie de l’âge du fer devra contribuer à l’étude du peuple-
ment et de l’évolution des sociétés. De plus, ce type d’archéologie est très impor-
tant pour l’histoire ancienne d’une bonne partie de l’Afrique centrale forestière,
au regard de la question du peuplement bantu, ce qui nous reporte à quatre mil-
lénaires avant l’époque actuelle. On notera que dès l’origine des recherches sur
l’identité culturelle des bantuphones, le berceau probable de ces peuples a été
situé aux confins du Nigéria et du Cameroun, d’où ils auraient essaimé à travers
l’Afrique centrale au cours de la période de l’âge du fer. Quelques travaux accom-
plis en archéologie ont montré l’importance des voies de migration ou d’expan-

1. Ce texte est, avec l’accord de l’éditeur, une version remaniée d’un article publié en
1999 dans Paléo-anthropologie en Afrique centrale. Un bilan de l’archéologie au Came-
roun, de M. Delneuf, J.-M. Essomba et A. Froment (Paris, L’Harmattan).
134 Joseph-Marie Essomba

sion qu’ils auraient suivies, voies naturelles que sont les savanes de la côte
atlantique, les cours d’eau de la forêt équatoriale, l’interface forêt-savane septen-
trionale et les savanes d’Afrique centrale, comme le suggèrent les analyses de Van
Noten (1982).
Il est incontestable que le centre et le sud du Cameroun demeurent, en la
matière, l’une des zones de passage et de sédentarisation des premiers locuteurs
bantu, dont il s’agit de restituer l’histoire économique, sociale et des techniques
par l’archéologie, les traditions orales et l’étude des cultures matérielles. Cette
restitution passe par l’établissement d’une grille chronologique et par l’étude de
l’environnement dans lequel ont évolué ces peuples et leurs civilisations en Afri-
que centrale. Le programme comporte donc :
• l’identification et la cartographie des sites de l’âge du fer au Sud-Cameroun ;
• la fouille des sites identifiés et l’étude scientifique du mobilier archéologique ;
• l’établissement d’une grille chronologique pour l’histoire ancienne de la
région ;
• l’étude de l’environnement, de son impact sur l’évolution des sociétés dans
la zone forestière, d’où l’importance de l’apport futur du programme
ECOFIT (Écosystèmes forestiers intertropicaux) ;
• la restitution des aspects historiques de l’histoire des techniques (métallurgie
du fer et de la céramique ; leurs chaînes opératoires) et de l’histoire
économique ;
• la mesure de l’ampleur des migrations bantu au Sud-Cameroun (de l’archéo-
logie à la biologie des peuples).
Un deuxième volet, culturel celui-là, intéresse ce programme. Il s’agit de :
• procéder à la collecte des documents d’intérêt historique et archéologique
pour le Musée national ;
• donner à de jeunes chercheurs camerounais une formation en archéologie ;
• procéder à une animation scientifique et culturelle par des séminaires,
conférences, colloques, publication et expositions.

Méthodologie
Sur le plan méthodologique, nous rattachons l’étude du fer en tant que procédé
technique, acteur économique et phénomène de société, aux différents contextes
de l’étude du passé des sociétés du Sud-Cameroun. L’étude du fer et de l’âge du
fer exige donc une approche interdisciplinaire. Elle fait appel aux sciences de la
terre, aux sciences exactes et aux analyses de laboratoire en prenant pour maté-
riau de base les données archéologiques et chronologiques.
Les sources orales constituent un instrument privilégié pour la bonne
compréhension de bien des questions dans ce domaine. Par les enquêtes, des
approches nouvelles sont ouvertes sur les procédés techniques ainsi que sur le
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 135

rôle économique et social du fer. Ce choix méthodologique est largement expli-


qué dans l’ouvrage Civilisation du fer et sociétés en Afrique centrale (Essomba,
1992b).

Le bilan et le résultat des recherches


LE BILAN DES TRAVAUX (1983-1988)

Depuis 1983, nous avons mené des recherches dans les départements de la Lékié,
du Nyong et Kellé, de la Sanaga maritime et du Mfoundi. Ces recherches nous
ont amenés à identifier et à fouiller les sites de Nkometou et de Pan-Pan. Un pre-
mier bilan de ces travaux a été établi en 1988 (Essomba, 1988). Il a permis de
mettre en évidence l’importance de l’archéologie de l’âge du fer dans l’histoire
ancienne de la région (figure 6).
Trois zones, dans les sites étudiés, ont apporté des informations inédites et
précieuses. Il s’agit des sites de Nkometou et Pongsolo (Lékié) et de Pan-Pan
(Nyong et Kellé). En parallèle, il faut mentionner le gisement d’Obobogo étudié
par de Maret (1992), celui d’Okolo, étudié par Atangana (1988) et celui de
Ndindan, étudié par Mbida (1992). Ces sites ont permis d’estimer le début de
l’âge du fer dans la région vers le IVe siècle avant l’ère chrétienne.

Le site de Nkometou
Nkometou, à 20 kilomètres au nord de Yaoundé, où les fouilles ont débuté en
1983, s’est révélé important par la quantité de structures en fosses identifiées et
par les éléments prélevés dans quelques-unes d’entre elles. D’une manière géné-
rale, les informations apportées par ce site témoignent de deux stades de civilisa-
tion. Le premier, néolithique, est fondé sur une économie alimentaire établie à
partir des noix de palme et de l’utilisation des meules, des broyeurs et des usten-
siles en poterie. Le second est celui de l’âge du fer dont les témoins métallurgi-
ques (scories) sont datés du Ve siècle avant l’ère chrétienne (Essomba, 1992a).

Les sites de Pongsolo


Situés dans la Lékié, ces gisements ont apporté des informations intéressantes sur
la question de la production du fer dans la région. Outre les informations
recueillies oralement sur la production du fer et la technique traditionnelle de
réduction, les datations au radiocarbone effectuées sur les sites de Pongsolo I et
Pongsolo II, ont permis de situer ces derniers entre le XVe et le XVIe siècle de l’ère
chrétienne (Essomba, 1988 et 1992a et b). Cette chronologie est corroborée par
certaines données de la tradition orale relatives à l’occupation de la région par les
anciens Beti qui peuvent ainsi être considérés comme les occupants de ces ateliers.
136 Joseph-Marie Essomba

NIGERIA

TCHAD

Neboya C.A.

a ga
Nituku Bafia San Yaoundé
+

Massangui (G.É.)
Nguilmulen Meboma
+

Ngock Lekukua (G.É.) GABON CONGO


Douala Pongsolo
Nkometou
Pan- Okolo Abong
Manguenda Oliga Ndindan Mbang
Edéa Yaoundé
+

Eseka
+

Obobogo
+

Ngongtem
ng Pan-Nsas
OCÉAN ATLANTIQUE

N yo

Sangmelima
Kribi
Ebolowa
+

Nkolebengue
Ntem

GUINÉE ÉQUATORIALE GABON CONGO


Site à caractère néolitique Frontière
Site de réduction du fer Limite de la région étudiée
fouillé 0
non fouillé 300
900 0 100 km
Ancienne forge
+

1500 m

Figure 6. Localisation des principaux sites étudiés par l’auteur dans la région

Les sites de Pan-Pan


Ces sites apportent des informations intéressantes sur le peuplement récent de la
région et sur l’étude des techniques de réduction du fer. Ils ont été datés entre le
XIVe et le XVe siècle de notre ère. Leurs fours à réduction sont imposants et
offrent une architecture particulière faite de petites briques de terre cuite. Ils sont
exceptionnels en Afrique centrale forestière. La datation, ici, permet les situer à
la période d’occupation de la région par les anciens Bassa (Essomba, 1985, 1988,
1989 et 1992b).
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 137

Ces recherches ont nécessité de nouvelles orientations, notamment l’ouver-


ture des prospections vers d’autres zones et l’intensification de l’archéométrie.

LES NOUVELLES DONNÉES (1989-1991)

De 1989 à 1991, nos recherches sur l’archéologie de l’âge du fer se sont poursuivies
dans le cadre de la problématique et des objectifs définis plus haut, avec l’interven-
tion de l’ORSTOM en partenariat. Au cours de cette période, des travaux ont été
réalisés à Yaoundé sur le site d’Oliga et sur celui de Saka à Awae, et dans l’arrondis-
sement de Zoétélé.

Le site d’Oliga
Situé dans la zone nord de Yaoundé, Oliga a été fouillé entre 1989 et 1990. C’est
la toute première structure de four à réduction enfouie examinée au Sud-Came-
roun. Ce gisement a apporté des informations inattendues sur la question de
l’âge du fer dans cette région et en Afrique centrale forestière (Essomba, 1989 et
1992b). Il a été daté du premier millénaire avant l’ère chrétienne.
Plusieurs échantillons de charbon de bois ont été prélevés à différents
niveaux stratigraphiques de la structure. Douze de ces échantillons ont fait
l’objet de datations au radiocarbone dont quatre par le Laboratoire de radiocar-
bone de l’Université Claude-Bernard de Lyon-I (par J. Evin) et huit par le Labo-
ratoire Beta Analytic de Miami, en Floride (États-Unis d’Amérique). Les
résultats de ces analyses chronologiques figurent dans les tableaux 4 et 5.

Tableau 4. Datations radiocarbones du site d’Oliga (Laboratoire de Radiocarbone. Beta


Analytic, Miami, Floride)

N° N° Carré et niveau
Dates (B.P.) Dates calibrées
échantillon laboratoire archéologique (en cm)
1 Beta 31 411 2710 ± 130 B.P. 1256-500 A2 (–90) NA7
av. J.-C.
2 Beta 31 412 1860 ± 70 B.P. 0-334 av. J.-C. A1-B1 (–50) NA1-2
3 Beta 31 413 1960 ± 80 B.P. ± 70 av. J.-C B2 (–60) NA3
70 apr. J.-C.
4 Beta 31 414 2820 ± 70 B.P. 1300-800 A2 (–50) NA2
av. J.-C.
5 Beta 31 410 2810 ± 100 B.P. 1300-800 A2 (–90) NA7 (–100)
av. J.-C.
6 Beta 31 534 2110 ± 60 B.P. 367 av. J.-C. A2 (–90) NA7
10 apr. J.-C.
7 Beta 32 228 2150 ± 80 B.P. 400 av. J.-C. A2 (–100) NA7
22 apr. J.-C.
8 Beta 32 264 2200 ± 60 B.P. 400 av. J.-C. A2 (–110) NA10 (–120)
90 apr. J.-C.
138 Joseph-Marie Essomba

Tableau 5. Datations radiocarbones du site d’Oliga (Laboratoire de Radiocarbone,


Université Claude Bernard, Lyon I)

N° N° Carré et niveau
Dates (B.P.) Dates calibrées
échantillon laboratoire de fouille (en cm)
9 Ly-4976 2150 ± 60 B.P. 365-68 A2 NA11 (–130)
av. J.-C.
10 Ly-4977 2185 ± 110 B.P. 539 av. J.-C. B2 NA10 (–120)
26 apr. J.-C.
11 Ly-4978 2380 ± 110 B.P. ± 773-212 B2 NA11 (–130)
12 Ly-4979 1945 ± 250 B.P. 831 av. J.-C. B2 NA4 (–70)
567 apr. J.-C.

Quelles réflexions entraînent cet ensemble de dates ? L’analyse critique de ces


données repose sur la position stratigraphique des échantillons dans les niveaux
archéologiques et sur leur profondeur dans le temps, par rapport à ce qui est
connu jusqu’ici dans la région.
D’une manière générale, on doit noter que les dates obtenues par les deux
laboratoires situent la structure entre la fin du deuxième millénaire et le début du
premier avant l’ère chrétienne. Par ailleurs, du point de vue stratigraphique, il
faut noter que les dates sont relativement concordantes par rapport au niveau de
prélèvement des échantillons.
Ainsi, le fourneau remonte au premier millénaire selon trois des dates obte-
nues au laboratoire de Lyon (Ly-4976, Ly-4977 et Ly-4978 (tableau 5). Ces
dates peuvent être considérées comme étant en concordance avec cinq de celles
du Laboratoire Beta Analytic : Beta 32264, Beta 31410, Beta 32228, Beta 31411
et Beta 31534 (tableau 4). La date Ly-4979 : 1945 ± 250 BP, soit 831 av. J.-C.-
567 apr. J.-C., au niveau archéologique 4, semble entachée d’une importante
marge d’erreur et doit être prise avec une grande réserve, sans toutefois la rejeter
complètement. En effet, il y a lieu de considérer qu’au niveau 6, qui n’est pas très
loin du niveau 4, on a obtenu la date Beta 31411 : 2 710 ± 130 BP, soit 1 256-
500 av. J.-C., proche de celle du niveau 7 (Beta 31410 : 2820 ± 100 BP).
L’examen de ces dates permet de retenir que, sur les douze obtenues, trois
placent le fourneau à la fin du deuxième millénaire et au début du premier mil-
lénaire avant J.-C. Elles peuvent paraître pour le moment excessives et être prises
avec circonspection. Sept dates le situent au premier millénaire avant l’ère chré-
tienne et une seule remonte au début du premier millénaire.
Toutefois, et comme nous l’avons déjà souligné, si les dates des XIVe, XIIIe et
e
XII siècles avant notre ère peuvent aujourd’hui paraître trop anciennes pour les
débuts de la métallurgie du fer en Afrique centrale forestière, il ne saurait en être de
même de celles comprises entre le IXe et le VIIIe siècle avant l’ère chrétienne. Ces der-
nières rentrent parfaitement dans le contexte actuel de la chronologie de l’âge du fer
en Afrique de l’Est, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale (Essomba, 1992b).
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 139

Ces dates, qui vont de la fin du deuxième millénaire avant J.-C. au début du


premier millénaire de l’ère chrétienne, posent un problème : celui de la durée de
l’utilisation du fourneau. Malheureusement, il manque des éléments concrets
permettant de mieux déterminer cette durée. Tout ce qu’on peut dire, c’est que ces
dates font reculer les débuts de l’âge du fer dans la région au cours de cette
période. Ceci est d’autant plus intéressant qu’elles proviennent de deux laboratoires
différents et qu’elles ont été prises dans une véritable structure de réduction.
Ce qui apparaît encore plus important, en ce qui concerne ces dates comme
le site en général, c’est que celles-là font du fourneau d’Oliga la plus vieille struc-
ture de réduction du fer connue aujourd’hui en Afrique centrale forestière. Il est
intéressant de noter qu’au Gabon, les dates aujourd’hui connues situent entre
450 et 600 av. J.-C. d’anciens sites de réduction du fer (Clist, 1989). En effet, les
recherches archéologiques entreprises dans ce pays récemment ont permis de
mettre en évidence de nombreux témoins de la paléométallurgie du fer avec des
dates comparables à celles enregistrées au Sud-Cameroun, à Obobogo, Ndindan,
Nkometou et Oliga (Clist et al., 1986).
De nouvelles recherches sont envisagées sur le site d’Oliga pour élargir nos
connaissances, notamment sur l’occupation successive du site et sur les change-
ments possibles de l’environnement. Ce site est donc capital dans l’étude de l’âge
du fer aujourd’hui en Afrique centrale.

Le site de Saka
En mars 1990, une prospection dans l’arrondissement d’Awae (département de
la Mefou) a permis l’identification du site de Saka chez les Mvele. Un sondage a
mis en évidence les éléments caractéristiques d’un atelier de réduction du fer :
des scories, des fragments de tuyères et des tessons de poterie. Les premières data-
tions au radiocarbone de cet atelier le situent aux XVIe et XVIIe siècles ap. J.-C.
Cette période correspond à celle de la mise en place de la population beti dans la
région. Les études sur ce site doivent se poursuivre.

LA RECONNAISSANCE ARCHÉOLOGIQUE
DANS L’ARRONDISSEMENT DE ZOÉTÉLÉ

De juillet à août 1990, nous avons effectué une mission de reconnaissance


archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé (département du Dja et Lobo),
situé dans la zone forestière du Sud-Cameroun à une centaine de kilomètres légè-
rement au sud-est de Yaoundé. Y prenaient part R. Asombang, archéologue (Ins-
titut des sciences humaines), et J. P. Ossah Mvondo (École normale supérieure de
Yaoundé). L’objectif était d’identifier et de localiser les gisements archéologiques
possibles dans l’arrondissement de Zoétélé et, notamment, ceux de l’âge du fer.
Malgré les efforts consentis dans le cadre de la recherche archéologique au
Cameroun méridional, la province du Sud et, en particulier, le département du
140 Joseph-Marie Essomba

Dja et Lobo sont restés pratiquement inconnus à ce point de vue. Les données
archéologiques actuelles demeurent insuffisantes. Cette situation justifie la pros-
pection menée à Zoétélé, étape préliminaire du long travail de recherche devant
être mené dans l’ensemble du département, d’une part, et dans la province du
Sud, d’autre part. Cette mission de reconnaissance nous a conduits à des villages
tels que Nkooveng, Nkolmebong, Fibot, Nkumadzap, Otetek Etoto, Zoétélé-
Brousse et Zoétélé-Village (figure 7).
La méthode de recherche a été fondée sur l’étude de la carte de la région au
1/200 000 sur laquelle nous avons identifié certains villages à partir d’éléments
toponymiques. Des enquêtes ont été ensuite menées auprès de certaines personnes
âgées et des autorités traditionnelles. Elles comportaient un questionnaire sur les
anciens villages et les vieux ateliers de production du fer. En outre, nous avons
procédé à la prospection systématique des champs et des habitations actuelles
afin de repérer et de localiser les vestiges d’activités anciennes. Deux types de
gisements ont été identifiés : les sites préhistoriques et les sites de l’âge du fer.

LES SITES PRÉHISTORIQUES

L’abri-sous-roche d’Akok-Oveng (NK1)


Ce site se trouve en fait à la limite de l’arrondissement de Zoétélé et du départe-
ment du Nyong et Mfoumou. Il demeure toutefois important pour notre analyse
parce qu’il est frontalier de notre zone d’étude. Il est localisé à 1 kilomètre de la
route d’Edjom et à 12 kilomètres du village de Fibot, soit à 3° 28’ 02” de latitude
nord et à 11° 57’ 06” de longitude est. La façade de l’abri mesure 140 mètres de
long et sa profondeur à partir du centre 21 mètres environ. La hauteur, mesurée
à partir de l’axe central, approche 50 mètres ; le sol, incliné de gauche à droite,
forme une pente de près de 4 mètres de dénivelée. Le site a été aménagé pour des
besoins cultuels. On y a placé une statue de la Vierge Marie, un autel et des
bancs. D’après nos informateurs, la mission catholique y organise souvent des
cultes.
Aucun vestige n’a été récolté en surface, peut-être à cause de l’aménagement
du site qui les aura fait disparaître. Étant donné ses fonctions religieuses, nous
avons jugé inopportun d’y faire des sondages. D’autres abris-sous-roche ont été
signalés dans la région. Ils feront l’objet de prospections et d’études lors de mis-
sions futures.

Nkolmebong (NKM1)
Ce gisement est situé à 3° 26’ 03” de latitude nord et à 11° 05’’ au nord-ouest de
Fibot. Il est à 3,4 km de Fibot-centre, sur la route d’Eboman, à Yemfok, dans le
village de Nkolmebong. Son altitude est de 690 mètres. Notre attention a été
attirée par la légende racontant qu’on y trouvait des traces de genoux sur le
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 141

Ny
o ng

Obout
Akokoven

Meret Nkolmebong

Fibot

Ngomedjap
So Ngolbang
o

Elolo

Site préhistorique Zoétélé Brousse


Ololok
Site de l'âge du fer Zoétélé
Route goudronnée

Route secondaire Kumu


Nkumodjap
Piste praticable pour
véhicules tout terrain 0 10 km

Figure 7. Prospection archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé. Localisation des


principaux sites identifiés par l’auteur (juillet-août 1990)
142 Joseph-Marie Essomba

rocher. Nous y avons constaté l’existence de concavités circulaires et ovales, res-


pectivement au nombre de 14 et 6. Celles qui sont rondes ont en moyenne des
diamètres compris entre 10 et 15 centimètres maximum pour une profondeur
variant entre 3 et 12 centimètres. La longueur des concavités ovales varie de 32 à
90 centimètres et leur largeur de 12 à 25 centimètres. La disposition générale des
éléments est circulaire. Toutefois, l’ensemble relève bien d’une action anthropi-
que mais, dans l’état actuel des recherches, nous ne sommes pas en mesure d’en
donner une interprétation valable. Celle-ci reste une voie de recherche ouverte
(figure 7, site de Nkolmebong).

Les trois abris-sous-roche d’Akok-Oveng


À la différence de l’abri-sous-roche d’Akok-Oveng (NK1), ce site est situé, lui,
au nord-est de Nkolmebong. Les coordonnées ne sont pas indiquées à cause
des difficultés particulières d’orientation rencontrées dans la brousse pendant la
prospection. De la route principale à l’abri, on a compté 50 minutes de marche.
Cet abri tire son nom de l’arbre Oveng situé devant son ouverture. Sa structure
se compose de trois cavités formant un demi-polygone (figure 7, site d’Akok-
Oveng). La première cavité, sur la gauche, est la moins profonde et ne mesure
pas plus de 2,62 m au plus profond, pour 9,5 m de long. Le sol est plat et colo-
nisé par la végétation. La deuxième cavité, au centre, laisse présager des dépôts
anthropiques. Le sol d’occupation est celui de la zone d’érosion de la cavité supé-
rieure. Les dépôts ont une épaisseur de 15 centimètres. Un tesson non décoré a
été ramassé en surface, à côté d’une rigole. Il présente des traces d’usure et un
dégraissant de quartz. Deux autres tessons, également non décorés, ont été récol-
tés à une profondeur de 10 centimètres environ du niveau du sol d’occupation.
Au point le plus profond, cette deuxième cavité mesure 6,20 m. La pente est
inclinée de façon uniforme de l’avant vers l’arrière, la hauteur est de 8 mètres et
l’ouverture mesure 19,7 m de largeur.
La troisième cavité, à droite, possède une ouverture de 13,4 m de longueur
et mesure, au point le plus profond, 7,45 m de long. Le sol est incliné de la droite
vers la gauche et couvert de rochers ; il n’offre aucune possibilité de fouille. Ces
rochers semblent provenir du plafond de la grotte. Il est à noter que cet abri-
sous-roche est continuellement utilisé par la population actuelle.
Tous ces abris suscitent des recherches futures. Aucun d’entre eux n’ayant été
daté, il est encore difficile de situer leur occupation à l’âge du fer.

LES SITES DE L’ÂGE DU FER

Les sites de Zoétélé


On distingue Zoétélé-Village et Zoétélé-Brousse. Des enquêtes ont été menées
sur l’origine de Zoétélé auprès de Thomas Ngane Oyono (né vers 1916) et de
Célestin Oyono (né vers 1933). Il en ressort que le nom de Zoétélé avait été
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 143

donné à Lucien Oyono Eyamo (né vers 1888 et mort vers 1933), du groupe Fong,
par ses parents à cause de ses nombreuses richesses, de ses capacités et de ses
prouesses guerrières ainsi que de ses réalisations matérielles. Tous ses exploits ont
conduit à ce qu’on le compare à un éléphant. Ses parents avaient trouvé en lui leur
éléphant. C’est de ce nom que vient celui du site Zoétélé, ou « éléphant debout ».
Avant l’arrivée des Allemands au Cameroun, les parents d’Oyono Eyamo, dit
Zoétélé, ont d’abord habité la localité aujourd’hui connue sous le nom de Zoétélé-
Brousse. Ce site est à 10° NE de Zoétélé-Ville et à 1 500 mètres du village Eteto. La
distance entre Eteto et Zoétélé-Ville est de 11,8 km. C’est de Zoétélé-Brousse qu’est
parti Oyono Eyamo pour fonder Zoétélé-Village. Suivant nos informateurs, le fer
était produit dans ces localités aux temps anciens. Une prospection nous a permis
de repérer et de localiser des sites archéologiques dans ces deux endroits.

Zoétélé-Brousse (ZB1)
Le site est identifié à partir de scories ramassées en surface à 500 mètres du lieu
indiqué par l’informateur. Cette découverte nous a amenés à faire des prospec-
tions dans les environs et à trouver le site de ZB1-locus A (point de fouille A), ou
ZB1-LA.

Zoétélé-Brousse (locus A) ou ZB1-L.A.


Ce site, à l’ouest de ZB1, est constitué par une butte ronde de 52 centimètres de
hauteur et de 4,3 m de diamètre. Il se situe à 12° NO de Zoétélé-Ville, dans la
cacaoyère d’Ebene Mengue. Son entrée se trouve à Otetek sur la route de Meba,
dans le village du chef Jacques Oyono. Il est distant de 1 kilomètre de la route.
Un sondage de 1 mètre carré a été effectué sur ce site. L’apparition en surface
de terre brûlée et de charbon de bois a orienté le sondage. Cette terre brûlée res-
semblait à des fragments de briques. Avant de déterminer la nature de la struc-
ture, qui devait être un atelier de production du fer, le sondage a été poursuivi
sur 90 centimètres de profondeur. Au cours de la fouille, l’on a observé de petites
perturbations dans la structure, causées par des trous de rats palmistes dans les
parties supérieure et inférieure, et par des nids de fourmis. On a régulièrement
trouvé de gros morceaux de charbon de bois tout au long de la fouille, plus par-
ticulièrement concentrés vers l’ouest. Quatre échantillons ont donné des dates
comprises entre le XVIe et le XVIIe siècle apr. J.-C. Un fragment de tuyère d’une
longueur de 5 centimètres a également été prélevé. Ceci a confirmé l’hypothèse
d’un atelier de réduction du fer, bien qu’il n’y ait pas été trouvé pour l’instant de
dépôt de scories. Les recherches doivent s’y poursuivre.

Zoétélé-Village
Ce site se trouve à 1 kilomètre de la sous-préfecture Zoétélé-Ville, sur le côté
droit de la route qui mène à Meba, dans la cour de Joseph Aba Bilunga, décédé
144 Joseph-Marie Essomba

en 1958 et frère d’Oyono Eyamo de Zoétélé-Ville. On a observé, en surface uni-


quement, des scories dispersées sur une étendue de 6 mètres carrés. Elles sont de
petite taille. La proximité de la route et des habitations peut indiquer que ce site
a subi des transformations pour devenir un atelier de forge. Aucun sondage n’y a
été effectué.

Le site d’Otetek (OT1)


OT1 se situe à 3° 14’ 06” de latitude nord et 11° 54’ 05” de longitude est, à
3 kilomètres au sud-est de Zoétélé-Ville, sur la route de Nkomadzap. Le site
métallurgique est précisément à 52° au sud-est de Zoétélé-Ville, à une centaine
de mètres du carrefour Minkoumou-Nkoumadzap, dans la cour de la Mission
évangélique chrétienne.
Nous avons été conduits à Otetek à la suite d’une étude toponymique. Au
cours de notre enquête, notre informateur, le pasteur Josué Mezang Mezang
(68 ans), nous a indiqué que la première appellation de cette localité était Vele-
mekon et les premiers habitants étaient les « Yetchang », qui ont séjourné là
avant l’arrivée des Fong. Ce sont eux qui ont donné à cette localité le nom
d’Auxerre, qui signifie doucement en langue béti.
S’agissant du fer, nos informateurs nous ont fait savoir que leurs grands-
parents en produisaient. Toutefois, ils n’étaient pas en mesure d’indiquer l’empla-
cement des anciens ateliers. Pourtant, la prospection dans le village nous a per-
mis d’identifier un site de production dans la cour de la Mission chrétienne. Des
scories apparaissent sur près de 100 mètres carrés, puis du charbon de bois. La dis-
persion de fragments de poterie et de scories de petite taille indiquerait qu’il s’agit
d’un atelier de forge. La fouille de ce site a été réservée pour une autre mission.

Koumou (KM1)
Le site de Koumou se trouve dans le village de Nkoumadzap, à 10 kilomètres de
la sous-préfecture de Zoétélé, près de la rivière Lobo et à 475 mètres des chutes
de Koumou. Il est dans une plantation, aujourd’hui exploitée par Thomas Akoa
Jean, paysan âgé de 27 ans qui nous a servi de guide. Selon nos informateurs, ce
lieu a été habité anciennement par les ancêtres de la population de Nkoumadzap.
Le site a souffert des travaux de construction de la route effectués avec un bull-
dozer. Le sondage effectué, sur 1 mètre carré de surface jusqu’à une profondeur
de 1 mètre, a permis de prélever des fragments de briques, de scories, des mor-
ceaux de tuyères et du charbon de bois. Les datations au radiocarbone en sont
attendues.
D’une manière générale, les résultats de cette mission de reconnaissance
archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé se sont avérés intéressants. Huit
sites ont été identifiés dont trois préhistoriques et cinq de l’âge du fer. La mission
a été centrée particulièrement sur les zones nord et sud-est de l’arrondissement.
Cette orientation ressort de la pratique de l’ethno-archéologie qui a conduit à
Bilan de l’archéologie de l’âge du fer au Cameroun méridional 145

l’identification des anciens sites dans ces secteurs. Les gisements se retrouvent en
fait en dehors des lieux d’habitation actuels. On comprend, dès lors, les diffi-
cultés d’une prospection à grande échelle dans cette zone forestière et la justifi-
cation de l’approche ethno-archéologique dans ce milieu.
Par ailleurs, la mission a permis de mettre une fois de plus en évidence le
riche patrimoine archéologique du Cameroun méridional en sites tant préhisto-
riques que de l’âge du fer. L’exploitation des sites répertoriés devient donc
urgente. Leur étude devrait sans aucun doute apporter des données permettant
de mieux se documenter sur l’histoire ancienne du Cameroun. Cette urgence
réside aussi dans l’intensification des enquêtes orales dans la région qui se révè-
lent d’une aide précieuse pour la cartographie de ces gisements, tant que les
informateurs demeurent en vie.

Conclusion et perspectives
Le bilan des dernières recherches effectuées par le programme consacré à l’âge du
fer et à la métallurgie du fer dans le centre et le sud du Cameroun se révèle inté-
ressant de par la dimension historique des informations apportées sur les plans
chronologique et technique ; ces recherches ont été d’un apport particulier au
colloque de 1986 ; elles ont fait par ailleurs l’objet de conférences publiques à
l’Université de Yaoundé en mars 1990, à l’Université de Bangui en avril 1990, au
Centre culturel français de Yaoundé et à Akwa Palace de Douala en avril 1991
(Essomba, 1992b).
On peut dire aujourd’hui que, dans le centre et le sud du Cameroun, les
débuts de l’âge du fer remonteraient au premier millénaire avant notre ère. Cette
période est marquée par la sédentarisation, la production alimentaire, le regrou-
pement des habitants dans des villages et le peuplement de la région par les ban-
tuphones. Les dernières recherches mettent en évidence la concordance entre les
datations des ateliers de production du fer et les données de la tradition orale sur
l’occupation de la région par les anciennes communautés beti entre le XVIe et le
XVIIe siècle (sites de Nkometou, de Saaka et de Zoétélé-Brousse). Elles permet-
tent aujourd’hui d’établir sans conteste que le sud du Cameroun se situe au car-
refour des chemins des migrations des anciens bantuphones dès le premier
millénaire avant notre ère. Un fait historique très important dans l’histoire du
peuplement ancien de l’Afrique centrale se fait ainsi jour.
Si le bilan de ces recherches semble globalement positif, beaucoup reste
encore à faire. Il s’agit de l’extension des travaux à travers tous les départements
du Cameroun méridional. Par ailleurs, des questions relatives à l’environnement
n’ont pas encore été abordées : elles devraient intéresser l’économie ancienne,
l’occupation de l’espace, la couverture végétale et son évolution. Elles devraient
être abordées à l’aide de la palynologie, de l’anthropologie et de la paléoclimato-
logie. Elles doivent permettre d’aboutir à l’établissement d’une grille chronologique
146 Joseph-Marie Essomba

solide sur l’âge du fer au Sud-Cameroun, en rapport avec les recherches effec-
tuées dans le Woleu-Ntem au Gabon et celles à entreprendre dans l’Adamaoua et
sur la côte atlantique. C’est le vaste projet d’étude de l’évolution de l’homme et
de l’environnement dans l’aire bantuphone de l’Afrique centrale qui devrait en
analyser les informations essentielles. Une fois de plus, la palynologie, l’anthro-
pologie et la paléoclimatologie devraient participer à ces recherches. L’histoire
ancienne de l’Afrique centrale sera ainsi mieux comprise pour ce qui concerne la
période de l’âge du fer.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 147

Les routes du fer en Afrique :


une contribution du Nigéria
David A. Aremu

Les premiers indices de la métallurgie du fer au Nigéria


L’ÉTUDE HISTORIQUE
Actuellement, l’un des indices les plus anciens de métallurgie du fer au Nigéria,
provient de Taruga et date d’environ 2500 BP1. Ces datations concernent de
véritables fours de réduction du fer qui ont été dégagés lors de fouilles. Il en
existe qui pourraient être antérieurs, mais l’association de charbon de bois daté
avec des objets archéologiques n’est pas certaine, car ceux-ci proviennent de
dépôts alluviaux : les matériaux ont été entraînés dans un cours d’eau par lessi-
vage et sont restés dans son ancien lit sans que l’on ait la certitude qu’ils datent
tous de la même époque.
Si, toutefois, les dates associées à cet ensemble de figurines (de la culture nok)
servent de point de repère, alors, la métallurgie du fer pourrait remonter à
3000 BP, voire à 3500 BP au Nigéria. Quoi qu’il en soit, même si nous nous
limitons à la date la plus récente, soit 500 av. J.-C., elle est encore trop proche de
la datation du fer à Méroé et à Carthage pour que l’idée de la propagation de
la métallurgie du fer à partir de l’une ou l’autre de ces deux régions soit
vraisemblable.
Si l’expansion du fer dans l’État du Plateau ou à Nok a reçu une impulsion
extérieure, celle-ci, probablement partielle, aurait tout aussi bien pu venir de
Mauritanie, à l’ouest, et indirectement seulement, voire pas du tout, du nord-
ouest ; cette impulsion aurait en outre pu être liée au développement antérieur
de l’extraction minière de cuivre en Mauritanie. Ce qui est significatif à cet
égard, c’est le fait que :

1. Années BP : before present. Le zéro correspond par convention à l’année 1950


(NDT).
148 David A. Aremu

• les mines et l’outillage de la région d’Akjout, en Mauritanie, remontent à


3500 BP ;
• la tradition métallurgique dans cette région s’est développée de façon plus ou
moins continue, augmentant lorsque les circonstances étaient favorables, ce
qui, une fois encore, remonte à 400 ou 500 av. J.-C., soit 2400 ou 2500 BP
(Andah, communication personnelle).
Dans la région de Kastina Ala, Andah a exploré un certain nombre d’abris-sous-
roche le long d’un escarpement rocheux, ainsi qu’un espace habité ouvert sur une
pente adjacente. L’un des abris-sous-roche, Tse Dura, a fait l’objet de recherches
et les indices recueillis à ce jour suggèrent deux principales phases d’occupation.
La première correspond à un groupe qui utilisait des outils en pierre abrasée et
polie et de la poterie, mais ne disposait pas de fer. Lors de la seconde phase en
revanche, les habitants de l’abri utilisaient le fer et le travaillaient peut-être. Pour
cette époque, huit dates obtenues par datation au carbone 14 semblent indiquer
que la métallurgie du fer avait atteint la région dès le IVe siècle av. J.-C. (Calvo-
coressi et David, 1979).
Le fer pourrait avoir fait son apparition à Daima (figure 8) aux environs du
Ve ou du VIe siècle apr. J.-C. (c’est-à-dire un millier d’années après Nok). Plus
récemment, des sites où se pratiquait la métallurgie du fer ont été datés dans la
région de Dalla Hill, à Kano (635 ± 95 ans apr. J.-C.,) et à Samaru-Ouest, site 1,
Zaria (685 ± 80 ans apr. J.-C.) (Posnansky et al., 1979 ; Sutton, 1976 ; Calvo-
corressi et David, 1979). Il existe d’autres sites similaires, datant de la même épo-
que, c’est-à-dire entre le IVe et le XIe siècle apr. J.-C., sur une distance de
1 kilomètre le long de la rivière Kubanni. Ces dates indiquent clairement que la
métallurgie du fer a été intensément pratiquée dans cette région au cours de la
seconde moitié du premier millénaire de notre ère.
Thurstan Shaw (1976) a exploré un certain nombre de tertres situés entre
Bida et Zungeru. On connaît depuis de nombreuses années l’existence de jarres
funéraires mises au jour par l’érosion. Des fouilles de contrôle réalisées dans
diverses parties du tertre Rafiu Ndoko ont révélé une série de niveaux d’occupa-
tion datant de l’âge du fer. Des échantillons de morceaux de charbon de bois
composites provenant de trois emplacements situés au centre du tertre indiquent
une occupation allant du IIIe au VIIe siècle apr. J.-C. Les échantillons prélevés par
sondage aux abords du site fournissent des dates plutôt tardives, aux environs de
la période allant du VIIIe au Xe siècle apr. J.-C. À Uffe Ijumu, où Ade Obayemi a
effectué des fouilles sur le site d’Ado, la réduction du fer y est datée du IXe au
XIVe siècle apr. J.-C. (Aremu, 1990).
Anozie (1979) a effectué des fouilles à Umundu près de Nsukka et à Umu-
kete Aguleri, dans la vallée de l’Anambra. Trois datations faites à Umundu
concernent une période beaucoup plus tardive, les XVIIIe et XIXe siècles. Dans
la localité d’Afikpo, Chikwendu a fouillé le site d’une habitation abandonnée
à Ugwuagu (site 2). Les découvertes archéologiques qui y ont été faites, à
savoir de grandes quantités de poteries ainsi que du fer, des ossements d’ani-
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 149

NIGER

Lac
Tchad
Illela
Daima
Kano

Zaria Yankari
BÉNIN

Zungeru Sukur
Jos

Bida NIGERIA
Abuja Yelwa
Ilorin Taruga
Idofin Uffe-Ljumu
Oyo Yauri
Okemesi
Akata Ibila-Alukpo
Ijebu-Ode Isunehinrin Oturkpo
Ife Umundu
Offa Igbo-Ukwu Afikpo
Agege Opi
Bénin Ikom CAMEROUN

Golfe
de Guinée 0 300 km

Figure 8. Principaux sites de réduction du fer et leur localisation dans les États du
Nigéria

maux et des sépultures humaines, datent d’une époque tout à fait différente et
sont d’une tout autre nature que les découvertes réalisées sur le site 1
d’Ugwuagu. Trois d’entre elles, provenant de la tranchée A, datent des XVe et
XVIe siècles apr. J.-C. et deux, provenant de la tranchée B, des XIIIe et IXe siècles
(Calvocoressi et David, 1979).
150 David A. Aremu

Il existe d’autres sites où l’on trouve en abondance des indices de production


du fer, mais il n’a été possible d’y procéder ni à des fouilles ni à des datations.
C’est le cas des sites d’Ampara, de Delimiri et de Shaushau qui se trouvent dans
le parc national de Yankari et possèdent plus de 60 fourneaux, bases de four et
tas de scories de fer (photos 74 à 83). Le complexe métallurgique d’Igede
(figure 8), situé à Ibila-Alukpo, collectivité locale d’Oju, dans l’État de Benue,
couvre une vaste région d’environ 2 kilomètres carrés à l’est du siège du gouver-
nement local, sur la route d’Ibila à Ilache. Le site compte plus de 30 fours à cuve
dont 13 en bon état de conservation, tandis que les autres se sont effondrés
jusqu’à la base.
Il existe 5 fourneaux et tas de scories à Ijaye, près de Moniya, dans l’État
d’Oyo. Le département d’archéologie et d’anthropologie de l’Université d’Iba-
dan y effectue ses études sur le terrain. Tous ces sites, et d’autres, nécessitent que
des études approfondies y soient menées avant de pouvoir arriver à une conclu-
sion valable sur les débuts de la métallurgie du fer au Nigéria par rapport au
reste de l’Afrique.

LES SITES DE RÉDUCTION DU FER AU NIGÉRIA


Le rapport ci-après se fonde sur le travail effectué sur le terrain par l’auteur et
sur ses comptes rendus écrits relatifs aux sites de réduction nigérians (tableau 6
et figure 8). Des indices de production du fer existent dans la plupart des États
du Nigéria, mais leur concentration est plus forte dans certains d’entre eux. Un
grand nombre de ces sites, qui faisaient partie du patrimoine culturel, ont été
détruits lors de la construction de routes, de l’édification de bâtiments, d’acti-
vités minières ou agricoles et par des chasseurs de trésors. Il est nécessaire de
procéder à des études holistiques de tous les sites identifiés pour avoir une
meilleure idée des rapports entre la route du fer au Nigéria et le reste de l’Afri-
que. Les scories de fer, les tuyères, les bases et les parois de four ainsi que des
objets en fer sont des indices courants de l’existence de sites de réduction là où
ils ont été découverts. La langue parlée par les habitants, leurs noms, leurs
titres honorifiques, le nom de leurs villages et de leurs villes, leurs chansons et
leurs proverbes révèlent qu’ils pratiquaient la métallurgie dans le passé. Les
sites répertoriés ci-après ne sont pas les seuls à exister au Nigéria : ce sont ceux
connus de l’auteur à ce jour2.

2. Nous prions nos lecteurs de bien vouloir contacter l’auteur, ou n’importe quel
département d’archéologie, ainsi que la Commission nationale pour les musées et
monuments du Nigéria, s’ils ont connaissance de sites similaires qui ne sont pas
encore recensés dans la liste en question. Il ressort de ce qui précède que de nom-
breux sites ont été détruits. Il sera nécessaire d’appliquer les lois relatives à la présen-
tation des sites appartenant au patrimoine culturel du Nigéria et de procéder à des
fouilles sur des sites qui n’en ont pas encore fait l’objet, ce qui exigera des crédits de
la part des instances gouvernementales compétentes et de l’UNESCO.
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 151

Tableau 6. Sites de réduction du fer au Nigéria


États (fig. 8) Sites Observations
Abia
Adamawa Sukur Grands tas de scories, débris de tuyères et
des parois de fours
Anambra Akwa
Igbo Ukwu Xe siècle apr. J.-C.
Umukete Aguleri
Akwa Ibom
Bauchi Parc national de Yankari Plus de 60 parois de fours et tas de scories
Ampara Fouilles non encore effectuées
Delimiri, Shaushau, Panguru
Autres
Schiri, Fagam, Fele, Fali,
Baura, Muta, Kagalam, Mia
Bin, Kirifi, Kantara, Kariya
Wuro
Bayelsa
Benue Tse Dura IVe siècle av. J.-C., 17 bases et 12 fours
Ibila Alukpo, Otukpo
Utonkon 5 fours à cuve
Edumoga
Borno Daima Vesiècle apr. J.-C.
Cross River Mbak Itam Parois de four, tuyère et scories
Ikom Tas de scories d’environ 3 m de haut
Eyanga
Delta
Ebonyi Amagu Ugwu 150-50 av. J.-C.
Afikpo Découverte d’une petite quantité de fer
dans l’abri-sous-roche d’Ukpa
Edo Bénin 1180 apr. J.-C. ± 105
Aldja Complexe métallurgique et sidérurgique
Ekiti Okemesi Scories de fer
Enugu Lejja Tuyères, four d’égalisation et scories
Aku (près de Lejja) IIe siècle apr. J.-C.
Umundu 1625-1775 apr. J.-C.
Opi VIIIe siècle apr. J.-C.
FCT Abuja
Taruga 440 ± 140 av. J.-C.
Gombe Panguru
Imo Abiriba
Jigawa
Kaduna Samaru West env. 685 ± 80 apr. J.-C.
Madakiya
Kagarko Tas de scories
Kano Colline de Dalla 635 ± 95 ans apr. J.-C.
Katsina
Kogi Odo Ere-Akata Un four et des scories
Ijomu Scories et tuyères
Uffe Ijumu IXe-XIVe siècle apr. J.-C., un four et un tas
de scories
Ajaokuta Scories et restes de fourneaux ; industrie
du fer et de l’acier
152 David A. Aremu

États (fig. 8) Sites Observations


Itakpe Scories et restes de fourneaux
Kebbi
Kwara Ilorin Signifie : « Où nous aiguisons le fer »
Iponrin Ce qui signifie : « Aiguisage du fer »
Mont Idofin-Ojokolo Scories de fer, tuyères et bases de fours
Idofin-Igbo Aawo Tas de scories
Olla Site de réduction du fer détruit situé face
au commissariat de police de la ville
Obo Ayegunle Tas de scories
Owa Kajola Tas de scories de fer, fours à tuyères
Owa Onire Scories de fer, fours à tuyères
Oba 1310 ± 140 et 1585 apr. J.-C. ± 80 ans
Lagos Agege
Nassarawa Yelwa 100 apr. J.-C. – 700 apr. J.-C.
Niger Bida
Makera Takunpata
Kongo Makeri Makera signifie « fer » en hausa
Zungeru
Rafiu Ndoko
Ogun Otta, Ilaro, Ilobi; Oke Odan,
Ljebu Ode
Ondo Ondo
Osun Isundurnin Signifie : « Où nous avons fondu pour
devenir du fer. » Four en forme de dôme,
scories de fer
Ile-Ife à Woye Asiri 1135 apr. J.-C.
Olaigbi, Ogunro, Ogbomoso
Oyo Oyo (ville) Dans cette ville se trouvent de nombreux
sites de fusion du fer détruits, par exemple
Isokun, Fatunke
Ancien parc national d’Oyo
Agunrin « Où ils martèlent le fer »
Iseyin
Igunrin « Martelage du fer »
Ogunremi
Iponrin « Affûtage du fer »
Ijaye Cinq fours et tas de scorie de fer
Moniya Site détruit situé en ville, en face de
l’Allied Bank
Plateau Dusten Kongba Objets en fer découverts dans l’un des
niveaux datés de 2780 av. J.-C. ± 100 ans
Jos
Nok 3500 av. J.-C. (Y-142-3)
Samun Dukya 1520 av. J.-C. ± 115 ans
Rivers Ke 1335 apr. J.-C. ± 85 ans
Onyoma
Sokoto Sawuni
Ulaira 220 apr. J.-C.
Taraba
Yobe Dix fours et tas de scories
Collectivité locale de Gujba
à Ligdir
Zamfara Zamfara
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 153

74 76

75 77
154 David A. Aremu

78

79 80
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 155

81 82
Photo 74. Trou de 5 cm servant à vérifier la
réduction du minerai de fer dans le fourneau
(© Aremu).
Photo 75. Tuyères dans les trous prévus à cet effet
(© Aremu).
Photo 76. Porte de fourneau (© Aremu).
Photo 77. Site de réduction du minerai de fer,
parc national de Yankari, État de Bauchi
(© Aremu).
Photo 78. Tas de scories de fer sur le site de
réduction du minerai de fer d’Ampara (© Aremu).
Photo 79. Revêtement extérieur écaillé d’un
fourneau à cuve (© Aremu).
Photo 80. Vue latérale d’un fourneau à cuve
(photographie prise du nord) (© Aremu).
Photos 81, 82 et 83. Divers stades de destruction
de fourneaux à cuve (© Aremu).

83
156 David A. Aremu

Il est important de noter que des indices de production du fer à l’époque préco-
loniale existent à Ajaokuta, à Aladja et à Itakpe, et se trouvent à l’emplacement
actuel d’un complexe métallurgique et sidérurgique. Cette coïncidence permet
de penser que dans les autres régions du Nigéria et d’Afrique où existe ce type
d’indices, il est peut-être possible de trouver du minerai de fer en quantité et
qualité suffisantes pour alimenter un complexe métallurgique et sidérurgique
moderne.

La réduction du fer et les techniques de forge


au Nigéria
LA PRODUCTION DU FER

Pour comprendre les techniques de fusion du fer, les archéologues s’interrogent


notamment sur : la manière dont le fourneau était utilisé, son mode de construc-
tion et sa forme ; le procédé de réduction du minerai dans les fours ; l’agence-
ment du site ; les rites traditionnels, les tabous et les aspects sociaux liés à la
réduction du minerai ; l’époque où l’on a commencé à procéder à cette opération
et celle où elle a cessé dans chaque région connue.
Lorsqu’on étudie un continent ou une région particulière, comme l’Afrique
ou l’Afrique de l’Ouest, il faut également savoir quels groupes ethniques sont
spécialisés dans les divers types de métallurgie du fer, quelles similitudes ou dif-
férences sont les plus apparentes en matière de construction du four, de proces-
sus de fusion et au niveau d’autres éléments ; cette étude doit être faite dans les
différentes parties de chaque région, ou sous-régions, et dans la région ou sur le
continent tout entier.
Le processus de réduction comprend la préparation du four, des tuyères et
du charbon de bois qui servira de combustible. Il comprend également la pros-
pection du minerai de fer, son extraction et sa préparation.
Lors de la prospection, un jeune (garçon ou fille vierge) accompagne les fon-
deurs. Rechercher du minerai de fer accompagné d’un garçon ou d’une fille
vierge a une signification spirituelle particulière, dépassant le simple fait que les
fondeurs, qui sont âgés, ont besoin d’un jeune aux yeux plus perçants que les
leurs pour les accompagner dans leur recherche du minerai.
Les traces laissées par certains insectes fouisseurs fournissent une piste. Les
fondeurs recherchent ces traces au sol qui, lorsqu’elles contiennent des matériaux
ferreux, leur permettent de savoir qu’il y a de fortes chances de trouver du mine-
rai de fer à cet endroit. Ils sont également tributaires de l’observation visuelle et
de leur expérience, les meilleurs moyens de localiser le minerai.
Avant de commencer à extraire le minerai, ils préparent de la nourriture pour
la durée de leur séjour sur le site, ainsi que pour le sacrifice propitiatoire au dieu
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 157

Ogun. Le matériel nécessaire à l’extraction du minerai se compose de coutelas


pour éliminer broussailles et buissons, de pioches servant à creuser, de lourds pics
avec lesquels on extrait le minerai, de houes utilisées pour rassembler et retirer la
terre. Les fondeurs utilisent des paniers et de petites calebasses légères aux mêmes
fins. Ils utilisent des échelles pour descendre dans le puits ou dans le tunnel où se
trouve le minerai, et pour en remonter, et des lampes pour s’éclairer si le puits
qu’ils creusent est profond et obscur (Aremu, 1990).
Pour extraire le minerai, le sol est creusé à la fois verticalement et horizonta-
lement. Les mineurs redoutent beaucoup cette dernière opération car c’est en
procédant aux coupes horizontales que beaucoup d’entre eux périssent. Ils res-
pectent certains tabous lorsqu’ils creusent le sol à la recherche de minerai de fer.
Il leur est interdit de vouloir du mal à quelqu’un, d’avoir des relations sexuelles
avec la femme d’un autre homme et de voler. Selon la croyance, si les mineurs
brisent l’un de ces tabous, le plafond du tunnel qu’ils sont en train de creuser
risque de s’effondrer et de les tuer en les ensevelissant, d’où le dicton :
« Quiconque s’apprête à fondre du fer ne doit pas se livrer au mal… Quiconque
fond du fer ne doit pas accepter de charmes maléfiques destinés à nuire à autrui »
(Adeniji, 1977, p. 12 ; Aremu, 1999, p. 187-188).
Pour extraire le minerai de fer, les travailleurs opèrent en équipe, travail
d’équipe qui se poursuit lors des phases ultérieures du processus.
Lors de la phase de préparation, une fois ramené à la surface, le minerai de
fer est trié et concassé jusqu’à l’obtention de morceaux de la taille de gravillons.
Ensuite, soit il est transporté jusqu’à une rivière pour y être lavé, soit les mineurs-
fondeurs vont chercher de grandes quantités d’eau pour le laver. Après le lavage,
le minerai est versé sur un matelas grossier, étendu sur le sol et laissé au soleil
jusqu’à ce qu’il devienne absolument sec, puis il est broyé et réduit en poudre.
La préparation du combustible implique la fabrication du charbon de bois
qui permettra de faire le feu pour réduire le fer. Ce charbon de bois ne peut pas
être fabriqué à partir de n’importe quel bois. Il ne peut l’être qu’à partir des
variétés ci-après :
• Talí (Obo), Erythrophleum quineense ;
• Aformosia laxifora (Shedun) ou Pericolpsis laxiflora ;
• Lophir lanceolata (Liponhan).
Ces trois variétés sont des bois durs préparés selon des techniques particulières
(Aremu, 1990, p. 190-191). La forme ronde du four offre une enceinte où l’on
produit la chaleur nécessaire à la réduction. Les parois sont construites en argile.
Il existe différentes sortes de fours au Nigéria : en forme de dôme, à cuve et à
soufflets. Les trous des tuyères sont aménagés à la base du four pour permettre
à l’air d’y entrer pendant la fusion soit par appel d’air naturel, soit à l’aide de
soufflets.
Lors de la réduction, après séchage du minerai, un petit feu de charbon de
bois est allumé dans le four et une charge mixte constituée alternativement de
minerai et de combustible y est placée. La température du four augmente par un
158 David A. Aremu

appel d’air qui est soit naturel, soit produit par des soufflets ; l’alimentation en
air est contrôlée lors des phases ultérieures par observation de la couleur de la
flamme qui s’échappe de la charge. La réduction dans des fours en forme de
dôme et à cuve, telle qu’elle est pratiquée aussi bien à Isundunrin qu’à Yankari
(Bauchi), dure au minimum de 18 à 20 heures. Après la fusion, on laisse le four-
neau refroidir et l’on en retire la masse spongieuse de fer métallique appelée
loupe3. Celle-ci est normalement réchauffée et martelée en une masse compacte,
opération qui doit être répétée plusieurs fois pour éliminer toutes les scories 4.
Il existe encore, au Nigéria, des artisans capables de réduire le fer. Ils repré-
sentent une période qui appartient à l’histoire et c’est l’une des raisons pour les-
quelles nous les avons enregistrés sur cassettes vidéo avant que leur savoir-faire ne
se perde.

LES TECHNIQUES DE FORGE

Les techniques de forge comprennent le forgeage, la trempe et la soudure, ces


trois activités devant en principe être pratiquées dans un atelier de forgeron. Pour
certains, l’atelier fait partie de la forge avec son feu et son enclume sur lesquels le
métal est chauffé et façonné. Une fois le fer obtenu, le forgeron le porte au rouge
puis, lorsqu’il est incandescent, il procède par martelage et coupe pour lui don-
ner la forme désirée.
La trempe aide à durcir le fer et s’obtient en chauffant et martelant à plu-
sieurs reprises le fer pour en éliminer les scories. La soudure consiste à réunir
deux ou plusieurs morceaux de fer. Là encore, il faut chauffer le fer au rouge, puis
marteler les différents éléments pour les assembler et leur donner la forme
voulue. Ces trois opérations sont répétées à plusieurs reprises dans le four et sur
l’enclume par martelage.
Dans le passé, les forgerons étaient tributaires du fer produit localement. De
nos jours, ils se procurent le métal dont ils ont besoin en utilisant de vieilles
pièces détachées d’automobiles et autres morceaux de ferraille. Ils emploient éga-
lement du charbon de bois et des coquilles de noix de palmier pour alimenter le
four.
Leur panoplie d’outils se compose d’énormes blocs de pierre utilisés comme
enclumes, de pierres plus petites, à la surface lisse, qui servent de pierres à
aiguiser, de soufflets fabriqués à partir de tuyaux de bois évidé, de peau de chèvre

3. Bloom en anglais (NDLR).


4. Cinq films vidéo ont été dirigés par l’auteur, dont deux concernent les processus de
réduction du fer : Démonstration de fusion du fer à Isundunrin (Pal, 80 min) ; Fusion
du fer à Wikki, Parc national de Yankari, Bauchi (Pal, 60 min) ; Coulage du laiton à
Obo Aiyegunle (NTSC,100 min) ; Sites bauchi de fusion du fer à Ampara, Parc
national de Yankari (Pal, 40 min) ; Construction d’un four à cuve à Wikki, Parc
national de Yankari, Bauchi (Pal, 60 min).
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 159

ou de mouton et de baguettes de bambou, de marteaux en pierre de diverses


tailles selon le travail à faire.
Un long marteau, plus léger que les autres, et une barre de fer servent à
façonner les coins par martelage tandis que les aspérités du métal incandescentes
sont coupées à l’aide d’une herminette. Un ciseau à froid et un marteau sont uti-
lisés pour ébarber le fer à froid. Un rocher à la surface concave peut servir à
façonner des lames de houes. Le forgeron doit également posséder un rocher
creusé en surface et contenant de l’eau pour y tremper le fer chaud au cours du
forgeage. Des tenailles ou pinces en fer servent à tenir le métal chaud.
Autrefois, les forgerons fabriquaient tous les outils en fer utilisés : lames de
houes, coutelas, haches, couteaux, ciseaux, rasoirs, tiges, chaînes, bracelets, épin-
gles à cheveux, herminettes, mors et étriers pour chevaux, pour n’en mentionner
que quelques-uns.
Parmi toutes les industries traditionnelles du Nigéria, celle du forgeron est
particulièrement importante, comme en témoigne sa large diffusion dans tous
les lieux de peuplement humain, des villages aux grandes villes. Bien que l’on ait
cessé de produire le fer dans la plupart des communautés nigérianes, il existe tou-
jours des forgerons dans chaque ville ou village.

Le fer dans la vie quotidienne des sociétés nigérianes


Le fer offre de nombreux avantages par rapport au cuivre, au bronze et au laiton.
Il est beaucoup plus solide et peut être mieux aiguisé que ces derniers, plutôt des-
tinés à la fabrication d’objets utilitaires ou ornementaux, et sert à fabriquer divers
types d’outils et d’armes de guerre. Doté de nombreux et grands avantages par
rapport aux outils de pierre et aux bâtons, il offre une efficacité très supérieure à
celle de la pierre, du cuivre et du bronze. L’on peut beaucoup plus efficacement
et facilement défricher des forêts, travailler le bois, cultiver le sol et abattre des
animaux ou tuer des personnes (ennemies) lorsqu’on est équipé d’outils et
d’armes en fer. Les différents modes d’utilisation du fer ont contribué à l’expan-
sion rapide de la technique du fer en Afrique.
La connaissance et la possession du fer ont valu un grand prestige à de nom-
breuses sociétés africaines. Des États se sont formés et développés à partir du
moment où l’on a commencé à travailler et à utiliser le fer. C’est le fer qui a per-
mis aux militaires assyriens de remporter la victoire sur les Kushites vers 660
av. J.-C., pour ne citer que ce cas célèbre.
Le travail du fer au Nigéria a pris son essor à partir de la découverte soudaine
des techniques de réduction et, plus récemment, de la diffusion des techniques
industrielles modernes de production de fer et d’acier à Ajaokuta, Aladja et
Itakpe. La gamme de produits fabriqués par les artisans depuis l’époque des pre-
mières communautés utilisant le fer jusqu’à nos jours s’est élargie et contribue à
satisfaire actuellement de nombreux besoins de la vie quotidienne.
160 David A. Aremu

On trouvera ci-après sept tableaux indiquant certains des domaines, — écono-


mie, ménage, culte ou religion, politique ou arts militaires — où le fer est très cou-
ramment utilisé par la société nigériane dans la vie quotidienne (tableaux 7 à 13).
Tableau 7. Outils destinés à la fabrication de produits marchands

Catégories Objets Observations


Outils du forgeron Grattoirs Utilisés pour fabriquer
des modèles à l’échelle
Coupoirs Spatules
Couteaux Pinces
Poinçons Limes
Enclumes de fer, marteaux
Outils des fondeurs Ils diffèrent de tous ceux
de bronze et de laiton précédemment cités
Outils des graveurs sur bois Coutelas Aboros (grands et petits)
Haches Scies
Couteaux
Outils agricoles Houes Petites et grandes
Coutelas, couteaux à
igname, couteaux servant à
couper le blé de Guinée
Outils de chasse Pièges dotés de flèches Petits ou grands
Pièges dépourvus de flèches Petits ou grands
Pièges à rat Ils diffèrent de ceux
précédemment cités
Flèches, montures de fusil,
massues
Outils de pêche Hameçons
Outils servant à inciser les Coutelas, haches pour
palmiers pour récolter la palmiers à vin
sève nécessaire à la
fabrication du vin de palme
Couteaux pour palmiers à Aha : Yoruba
vin
Instruments destinés au Tige servant à l’égrainage du Omo Obibo : Yoruba
tissage d’étoffes coton

Tableau 8. Ustensiles et appareils ménagers

Objets Observations
Couteaux à okras
Haches
Braseros ou fourneaux Ifonna Yoruba
Séchoir à viande Ayanra : Yoruba
Assiettes en métal
Chaînes
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 161

Tableau 9. Objets à vocation religieuse et cultuelle


Catégorie Objets Observations
Religion Symboles d’Ogun
Symboles de Sango
Symboles d’Osanyin
Symboles d’Egungun
Symboles d’Obalufon Premier artiste travaillant le métal
(bronze ou laiton)
Objets à vocation cultuelle Culte d’Ogboni Essentiellement en bronze/laiton
Mère infinie Iya
Bâton d’Ogboni Edan

Tableau 10. Objets cérémoniels pour le mariage


Objets
Bâton de cérémonie destiné aux mariages
Assiettes de mariage en laiton

Tableau 11. Objets à vocation politique et militaire

Catégorie Objets Observations


Politique Épées royales, assiettes royales,
siège royal
Sceptre royal Il pouvait être en laiton ou en
bronze
Matériel militaire Dagues, épées de fer
Aba Cadenas, verrou ou serrure de
métal permettant de se protéger
des ennemis
Flèches empoisonnées, coutelas

Tableau 12. Motifs représentant des êtres humains et des animaux

Objets Observations
Motifs artistiques destinés à représenter
des êtres humains et des animaux
Têtes en bronze ou en laiton Exemple : les têtes d’Ife et du Bénin
Animaux, serpents et oiseaux en bronze Exemple : le serpent de bronze d’Igbo
ou en laiton Ukwu

Tableau 13. Divers : Tôlerie, Serrurerie à titre d’exemple

Objets
Montants et châssis de Volkswagen
Moulage de clés, de serrures, etc.
162 David A. Aremu

Croyances liées au fer


Les études ethnographiques réalisées dans le Pays yoruba montrent que forgerons
et « utilisateurs » du fer croient en Ogun — le dieu du fer — et le vénèrent. Ces
croyances et coutumes sont peut-être antérieures aux indices archéologiques dis-
ponibles au Nigéria. Ogun est considéré comme la divinité à laquelle appartien-
nent le fer et l’acier, et, par conséquent, tous les articles et outils fabriqués à partir
de ces deux éléments. Les principaux symboles d’Ogun sont le fer, l’enclume, le
chien et des mariwo (de jeunes feuilles de palmier), ainsi que certains arbres
(Aremu, 1990). Le fer symbolise Ogun et Ogun symbolise le fer.
Le trait distinctif d’Ogun est sa relation au fer et aux autres éléments relevant
de la technique des matériaux. Ogun est presque universellement associé à des
techniques potentiellement dangereuses (armes, véhicules à moteur, trains, élec-
tricité) et à des professions plutôt masculines et risquées : la fabrication du fer, la
chasse, la guerre dans le passé, les transports, la construction, la mécanique et
l’ingénierie de nos jours (Sandra, 1980, p. 6-7). Les aspects dangereux aussi bien
que bénéfiques de ces associations sont reconnus dans le système de croyances en
Ogun.
Les Yoruba croient qu’étant donné sa maîtrise artistique, c’est Ogun (le fer)
qui donne la touche finale au travail créatif de l’homme de chair et de sang. Il
incombe à Ogun de procéder à la circoncision, aux scarifications du visage, aux
tatouages ou à toute autre opération chirurgicale qui peut s’avérer nécessaire
pour préserver la bonne santé des gens. Cette conception vient de la croyance
selon laquelle tous les outils en fer et en acier appartiennent à Ogun et que tous
ceux qui les utilisent le font sous son autorité (Idowu, 1975, p. 88 ; Alabede,
1993, communication personnelle).
En Pays yoruba, de manière générale, Ogun symbolise le fer. C’est parce
qu’on le croit maître du fer et de l’acier qu’Ogun est reconnu comme le dieu de la
guerre et des guerriers, des chasseurs et de la chasse, de tous les artisans-forgerons,
des ingénieurs, des mécaniciens , de tous les conducteurs de machines à moteur et
de tous les réparateurs de machines, en fait de tous ceux qui ont affaire à quelque
objet en fer ou en acier. Tous sont réputés devoir le vénérer ou se le concilier par
des offrandes propitiatoires, notamment avant d’entrer dans leur atelier le matin
pour entreprendre un nouveau travail comme l’ouverture d’une forge, ou avant
une expédition de chasse ou l’achat d’un nouveau véhicule, ou encore lui rendre
grâce après avoir échappé à une catastrophe tel un accident de voiture ou de chasse.
On rappelle souvent aux Yoruba l’adage ci-après : « Bi Omode bada’le, ki o
ma da Ogun oro Ogun kewo » [Si l’on rompt un engagement, que ce ne soit pas
avec Ogun ; avec Ogun c’est strictement interdit]. Jusqu’à aujourd’hui, les non-
chrétiens prêtent serment au tribunal sur un instrument en fer plutôt que sur la
Bible, comme le font les chrétiens. Jésus-Christ enjoint toutefois les chrétiens à
ne pas jurer du tout, mais à simplement dire « oui ou non » (Mat., 2 34-37).
Les routes du fer en Afrique : une contribution du Nigéria 163

La coutume était de vénérer Ogun avant et après chaque guerre (Ojo, 1971,
p. 169-170). Désormais cette célébration a lieu tous les ans à l’occasion des pre-
mières récoltes d’ignames entre juin et septembre, et le chien a remplacé l’être
humain comme principale victime sacrificielle. À Idofin et Obo Ayegunle, c’est
en août que l’on célèbre la consommation de la nouvelle moisson d’ignames.
Alors qu’il était autrefois vénéré dans tout le pays, Ogun ne l’est plus que par
quelques dévots et forgerons disséminés sur la quasi-totalité du territoire du Pays
yoruba. Ire, dans l’État d’Ekiti, reste le principal lieu où se pratique ce culte.
Ikole, Ondo, Ado-Ekiti et Otun célèbrent le festival annuel avec raffinement. Le
christianisme en particulier et l’islam ont, de manière générale, entraîné la dimi-
nution du nombre d’adorateurs d’Ogun dans le Pays yoruba.
La nature masculine d’Ogun se traduit par le fait que, contrairement à ce qui
se passe dans la plupart des autres religions yoruba, les femmes ne peuvent pas
assumer les fonctions de prêtresses, même si elles peuvent désormais participer
aux cérémonies. Les sacrifices et les prières visent à apaiser le côté destructif
d’Ogun afin que ses disciples évitent le danger, notamment les accidents. Ce
n’est qu’à titre secondaire qu’on se tourne vers lui pour lui demander de favoriser
des objectifs individuels liés à la richesse, au pouvoir, à la fertilité, etc.
Ainsi qu’on l’a fait observer précédemment, il est instructif de voir à quel
point le fer a influencé les croyances et la vie spirituelle de la population de diver-
ses régions du Nigéria et de l’Afrique en général. Ce n’est peut-être pas sans rap-
port avec le fait que la connaissance du travail du fer venant de l’intérieur des
êtres, l’on peut aisément comprendre qu’il soit enraciné dans leurs croyances et
dans la manière dont ils pratiquent leur culte. La description des routes du fer en
Afrique ne serait pas complète si l’on ne mentionnait pas les croyances et cou-
tumes des différents peuples liées à Ogun. Tout travail de production et de for-
geage exige, du début à la fin, des offrandes propitiatoires à Ogun et l’on
considère que c’est lui qui assure le succès de toutes les activités.
Pour prendre pleinement conscience des contributions des diverses sociétés
nigérianes aux routes du fer en Afrique, il reste encore beaucoup de recherches à
faire. Elles devront être planifiées, programmées, financées de façon satisfaisante
et porter aussi bien sur l’archéologie et l’ethnographie que sur les autres disci-
plines qui s’y rattachent.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 165

Au seuil de la métallurgie intensive


Le choix de la combustion lente dans la boucle
du Niger (Burkina Faso et Mali)1
Bruno Martinelli

La production préindustrielle de fer parcourt l’histoire de l’Afrique de l’Ouest


dans la longue durée, depuis plus de 2 500 ans. Tant du point de vue archéolo-
gique qu’historique et anthropologique, l’Afrique subsaharienne apparaît
comme détentrice d’un patrimoine historique général de la métallurgie. La
réduction directe du minerai de fer y a perduré et s’y est diversifiée, multipliant
les choix techniques à un degré inégalé par les autres parties du monde. Cette
diversité est l’une des questions les plus importantes qui se pose aujourd’hui si
l’on veut définir, comprendre et comparer l’ensemble de ces techniques en
n’oubliant jamais que des techniques d’une telle complexité, engagées dans une
quête de l’efficacité, sont d’abord des systèmes de connaissance. Pour l’ensemble
des sciences humaines intéressées par la métallurgie comme fait technique et
social (archéologie, histoire et anthropologie), l’Afrique constitue un laboratoire
de recherches comparatives sans équivalent. Les recherches contemporaines sur
les métallurgies du fer en Afrique modifient notre regard sur le passé des sociétés,
des États et des civilisations dans cette partie du monde.
Jusqu’au début du XXe siècle, les artisans ont fourni des instruments métalli-
ques à de vastes aires régionales, contribuant à structurer les espaces politiques et
économiques. Entre les XVe et XIXe siècles, l’activité métallurgique a contribué à
la genèse d’États et de royaumes malinke, soninke, songhay et moose dans les aires
soudano-sahéliennes de la boucle du Niger. Parallèlement à la fourniture d’arme-
ment pour les activités militaires, la production de fer y permit l’extension des
défrichements et l’évolution technique de l’agriculture céréalière (mil, sorgho).

1. Ce texte est, avec l’accord de l’éditeur, une version remaniée d’un article publié en
2000 dans P. Pétrequin, P. Fluzin, J. Thiriot et P. Benoît (dir. publ.), Arts du feu et
productions artisanales, XXes Rencontres internationales d’Archéologie et d’Histoire
d’Antibes, Antibes, éditions APDCA.
166 Bruno Martinelli

On commence seulement à mesurer les conséquences de la fourniture


d’équipements métalliques sur les écosystèmes et l’évolution des végétaux exploi-
tés, alors qu’on connaît depuis longtemps son incidence sur le commerce et
l’activité des marchés. La production métallurgique a été un facteur important
de différenciation régionale et de mutation sociale. Bien des États précoloniaux
de l’Ouest africain ont cherché à attirer, administrer et protéger des métallur-
gistes de divers statuts, sans nécessairement restreindre leur indépendance et leur
mobilité. Ce fut le cas dans la vallée du Sénégal, sur le plateau de Jos et Taruga,
au Nigéria, dans plusieurs zones du delta intérieur du Niger, dans les monts
Mandingue au Mali, au Fouta-Djalon en Haute-Guinée, au Kenedougou, au
Pays songhay et dans la région d’Agadez au Niger. Le Yatenga, situé dans le nord
du Burkina Faso, a été l’un de ces centres de production intensive à rayonnement
de grande amplitude (figure 9).
Ce royaume, fondé à la fin du XVIe siècle, connut son plein essor aux XVIIIe
et XIXe siècles avec une intensification exceptionnelle de la production métallur-
gique et de l’activité commerciale. Si l’activité traditionnelle d’exploitation du
minerai et de réduction a complètement cessé depuis les années 1950-1960, la
forge y reste active. Elle répond aux multiples besoins de la population rurale et
urbaine en utilisant les métaux de récupération. Le Yatenga possède de riches tra-
ditions significatives de la place qu’occupait cette industrie dans la culture histo-
rique et matérielle des habitants de cette région.
Ce chapitre propose deux axes de réflexion sur la métallurgie du fer du
Yatenga, articulés par les notions de mutation technique et de mutation sociale.
Compte tenu de nos observations sur le terrain, nous avançons l’idée qu’il existe
d’étroites relations entre un changement technique majeur, saisissable dans un
contexte ethnographique théoriquement restitué, et un processus de stratifica-
tion sociale et politique qui s’est développé de la fin du XVIIIe siècle au début du
XXe siècle. L’un des enjeux les plus importants de ce processus fut la définition
statutaire du forgeron, maître de la production et organisateur de la commercia-
lisation du fer forgé, en contrepartie de règles contraignantes d’enclosure sociale.
Les études menées au Yatenga permettent de démontrer que, contrairement à un
schéma de constance transculturelle trop souvent reçu au nom de l’évidence, le
statut de métallurgiste a évolué, passant par des états successifs. Il est, dans cette
région, le produit d’une mutation sociale globale dont il est possible de suivre les
incidences techniques, économiques et politiques. « Le choix de la combustion
lente » relève de cette triple interrogation.

Les deux systèmes techniques et sociaux


Dans les sociétés africaines, la métallurgie est un révélateur de la complexité des
sociétés et des échanges matériels et humains qu’elles entretenaient. Le statut
Au seuil de la métallurgie intensive 167

MALI
MAURITANIE

Niger

NIGER

BURKINA-FASO
GUINÉE

BÉNIN

TOGO
CÔTE-
D'IVOIRE NIGERIA
GHANA

LIBERIA

Golfe de Guinée

Yatenga

0 250 km Aire de métallurgie moose

Figure 9. Le Yatenga et l’aire de métallurgie moose


168 Bruno Martinelli

d’artisan spécialisé dépend de configurations sociales différentes, même


lorsqu’elles sont spatialement et historiquement en contact, comme ce fut le cas
dans la boucle du Niger au cours des siècles derniers. La notion même de
« forgeron », dont on ne saisit pas assez qu’elle est, de prime abord, le produit de
traductions discutables, exprime cette remarquable variabilité. L’image du forge-
ron a été abordée de manière stéréotypique dans une littérature ethnologique qui
ne l’a appréhendée que sous l’angle des mythes et des fonctions rituelles, restant
aveugle à la métallurgie en tant que telle. L’ouvrage de Griaule, Dieu d’eau
(1948), qui place le forgeron civilisateur au centre du système cosmogonique des
Dogon (Mali), est l’archétype de cette orientation. Il vaut la peine de signaler
qu’un site très important de mine et de production métallurgique, celui de Wol
(Woru), était situé à quelques kilomètres de Sanga, où Griaule et son équipe
menèrent leurs recherches durant plus de trente ans. Aucun de ces chercheurs
n’en a signalé l’existence. Il faut dire que les métallurgistes qui y produisaient du
fer à cette époque n’étaient pas des forgerons mais de simples agriculteurs. Ces
métallurgistes étaient incompatibles avec le forgeron du mythe présenté comme
un modèle commun à l’ensemble des Dogon. Faut-il y voir la raison de cet
étrange silence ?
Pour des raisons à la fois techniques et sociales, le statut des forgerons est
d’une extrême variabilité en Afrique de l’Ouest. Il est déterminé par l’ensemble
des rapports que les artisans entretenaient avec les fournisseurs ou détenteurs de
matière première comme avec les destinataires du travail de la forge, l’ensemble
des catégories de fonctions et de pouvoirs qui définissaient la société dans son
ensemble. Pour ces différentes raisons, la métallurgie du fer apparaît comme
l’une des clefs d’interrogation comparative des sociétés ouest-africaines, tant du
point de vue du développement des structures sociales que de celui des systèmes
techniques et des écosystèmes. Plusieurs catégories de forgerons coexistaient sou-
vent au sein de la même région, témoignant de critères discriminants propres à
chaque communauté. Par extension, l’application de la notion d’artisanat, plus
particulièrement pour les « arts du feu », doit satisfaire à des exigences de défini-
tion et d’ajustement. La transformation du minerai implique la maîtrise du feu
dans des fours dont on connaît de nombreux types, structures et systèmes de
fonctionnement (avec ou sans ventilation). Ceux qui en sont les utilisateurs
n’ont pas toujours le statut d’artisan au sein de leur société. Dans des régions
métallurgiques suffisamment importantes pour avoir fait l’objet d’études (nord
de la boucle du Niger — Burkina Faso, Mali, nord du Togo et du Bénin, nord
du Cameroun — et Niger), des agriculteurs maîtrisaient et monopolisaient la
technique des fours (hauts ou bas fourneaux). Ils fournissaient ensuite le métal à
des forgerons, simples fabricants. L’existence de ce système dualiste a été nette-
ment signalée par l’ethnologue allemande Renate Wente-Lukas (1977) pour les
sociétés matakam, sukur ou kirdi du Nord-Cameroun. La question d’une dis-
tinction catégorielle entre métallurgistes et forgerons avait aussi été posée par
Au seuil de la métallurgie intensive 169

Echard (1965) à partir de données concernant les Hawsa du Niger. Elle le fut
encore par Dupré (1981) en ce qui concerne l’Afrique centrale. Dans d’autres
sociétés, les forgerons réalisaient l’intégralité de la chaîne opératoire, de l’extrac-
tion du minerai jusqu’à la fabrication des objets. Si l’on considère les agriculteurs-
métallurgistes comme des « artisans », ce ne peut être qu’au nom d’un concept
importé dont la définition est en partie théorique. Dans l’ensemble de ces socié-
tés, les artisans reconnus comme tels par la terminologie vernaculaire sont les for-
gerons. « Gens des soufflets » ou « de l’enclume », ils sont identifiés par l’activité
de fabrication et la livraison de leurs produits aux utilisateurs locaux. Dans de
tels contextes, la distinction n’est jamais seulement technique et économique,
elle est aussi rituelle, symbolique et sociale. L’attribution systématique de la
métallurgie à la catégorie des forgerons par des auteurs aussi bien anciens que
contemporains est préjudiciable à la connaissance des anciennes sociétés afri-
caines. La difficulté résulte aussi de l’absence de terme spécifique pour désigner
localement les agriculteurs-métallurgistes, alors qu’il en existe toujours un pour
nommer les forgerons. Les documents d’archives doivent donc être systémati-
quement critiqués et confirmés sur le terrain.

Les sociétés segmentaires, les États et la métallurgie


Pour simplifier, sans négliger l’existence de situations intermédiaires, il est possi-
ble de distinguer deux systèmes techniques, sociaux et politiques. De nombreu-
ses sociétés connaissent un modèle dualiste dans lequel les activités d’élaboration
primaire (extraction et réduction du minerai) sont entre les mains d’agriculteurs,
le métal étant livré selon des modalités contractuelles diverses à des forgerons
pour la fabrication. D’autres sociétés présentent un modèle d’organisation
métallurgique où l’ensemble de la chaîne opératoire est réalisé par la seule caté-
gorie des forgerons, de la mine à la forge.
Le premier modèle est caractéristique de sociétés segmentaires qui sont res-
tées sans pouvoir politique centralisé jusqu’au début du XXe siècle. Ce système
social a une ossature de parenté lignagère, l’autorité juridique et territoriale étant
dévolue aux doyens ou aux représentants de lignages. Le lignage est une unité à
la fois économique, religieuse et politique. J’ai étudié des sociétés lignagères
d’agriculteurs-métallurgistes en Pays bassar occidental (Nord-Togo) puis en Pays
dogon (Mali). Le second modèle semble avoir connu son expression la plus ache-
vée dans le contexte de formations étatiques du passé précolonial. Il se fonde sur
une double articulation entre système de spécialisations techniques et système
hiérarchisé d’assignations identitaires et statutaires. Les forgerons sont au centre
d’un système catégoriel (cordonniers, tisserands, teinturiers, boisseliers, bateliers,
griots, etc.) qui les astreint à l’endogamie, en contrepartie d’une spécialisation
techno-économique exclusive et d’une assignation de pouvoirs sociaux et religieux.
170 Bruno Martinelli

Les anciens royaumes malinke, peul et songhay de l’Ouest africain en fournissent


de remarquables illustrations (McNaughton, 1988 ; Olivier de Sardan, 1982).
J’ai, pour ma part, étudié ce second type de production métallurgique au
Yatenga, dans le nord du Burkina Faso (figures 9 et 10).
Les mutations techniques de la métallurgie du fer dans cette partie de
l’Afrique sont indissociables de la formation de sociétés complexes, tendanciel-
lement stratifiées. Nullement refermées sur elles-mêmes (comme on l’a cru
parfois) car insérées dans des circuits d’échanges marchands (fer, or, sel, kola,
textiles) et à la mobilité humaine, les sociétés segmentaires n’ont pas échappé à
cette tendance. Elles ont assimilé une partie des distinctions catégorielles de
sociétés étatiques voisines (c’est le cas des Dogon par rapport aux Bambara).
Produits d’histoires spécifiques, les situations sociales observables sur le terrain
sont encore diverses. Elles témoignent de la complexité des étapes franchies par
ces sociétés. La région dans laquelle je poursuis des recherches en est l’illustra-
tion remarquable, aussi bien du côté moose burkinabé que du côté dogon
malien. En examinant les relations entre métallurgie du fer, formation poli-
tique globale, agriculture et échanges, il est possible de circonscrire les condi-
tions sociales et politiques d’émergence de statuts spécifiques de « forgerons »
en tant qu’artisans reconnus du feu et du fer. Produit de l’histoire sociale, ce
statut a enregistré d’importantes variations selon les sociétés africaines. Pour
chacune d’entre elles, il importe de savoir comment et quand il s’est constitué,
quelles formes il a prises, à partir d’un état social où la différenciation entre
artisan et non-artisan était moins marquée qu’actuellement. Cette évolution
s’est parfois faite dans un climat de contrainte, des chefferies guerrières sou-
mettant de petits groupes de forgerons puis contrôlant la production des
armes. Ce fut le cas au Yatenga sous le règne de Naaba Wumtanângo
(XVIe siècle). Cette forme de recrutement ne pouvait s’effectuer ni à grande
échelle, ni sur des périodes prolongées. Si le pouvoir politique cherchait à atti-
rer les forgerons en nombre pour contribuer à la production d’armes, il devait
ménager leur sens de l’indépendance, leur opposition à l’usage de la contrainte.
Maints exemples démontrent que les forgerons disposaient d’une échelle de
réponses adaptées aux conflits avec le pouvoir politique : la grève, la malédic-
tion, l’émigration. Le développement de l’artisanat s’est plus généralement
effectué en s’adaptant à la stratification interne et à la complexification de
sociétés agricoles et urbaines, dans des contextes favorables de peuplement, de
structuration politique, d’échanges de produits, de circulation des hommes et
des idées.
La coexistence des métallurgies de réduction d’agriculteurs et de forgerons,
de non-artisans et d’artisans (si l’on s’en tient aux critères locaux) s’est traduite
par des formes de complémentarité technique, de contacts et d’échanges à travers
lesquelles chaque groupe, selon les ressources dont il disposait, apparaissait
comme spécialiste par rapport à ses voisins. Ainsi en est-il en ce qui concerne la
Au seuil de la métallurgie intensive 171

Hombori
Dalla-Boni
Delta Dwênza
interieur Tabi
du Niger
Do g ô n
T ôm bori
Okoyeri

Mopti D og ôn M A L I
Do g ô n / Te lle m
Sanga
P la in e d u S é n o Djibo
Bandiagara Gondo
Somadougou
Wol Do g ô n
Koro
Bankas Kâyn

Aru
P l ai n e d u S én o Kibsi
D og ôn Yatenga
Sege Tyu fulse/mosi
Mêngao
Rônga

Ouahigouya

Ségénéga
Womsum
B U R K I N A - FA S O
Kwêere
Samo Gursi
0 50 km Kalsaka

Sites forgerons Systèmes dunaires Localités

Sites métallurgistes Zones humides Routes

Sites mixtes Escarpements Frontières


internationales

Figure 10. Agriculteurs métallurgistes et forgerons au Yatenga et dans la plaine de Séno

production directe d’acier que les forgerons nomment généralement « fer dur »,
destiné à la réalisation des tranchants des lames de haches ou de sabres. Jusqu’au
XXe siècle, une partie des forgerons du Yatenga, gros producteurs de métal, se
fournissait en « fer dur », ou acier siècle, dans le nord du Pays samo ou même,
plus loin, en Pays dogon, auprès d’agriculteurs-métallurgistes. Ces derniers ont
conservé le monopole d’une production stratégique puisque ce métal était utilisé
pour les tranchants de haches ou de sabres jusqu’à son remplacement par l’acier
importé d’Europe.
172 Bruno Martinelli

L’antériorité et la complexité
Ces données soulèvent des questions de divers ordres : historique, technique et
social. Y a-t-il antériorité d’un système sur l’autre ? Si les datations permettent de
distribuer chronologiquement les métallurgies africaines, nous ne savons presque
rien des organisations sociales correspondantes. Les deux systèmes ont coexisté et
subsisté jusqu’au XXe siècle. À défaut de faits, un modèle explicatif transféré du
néolithique méditerranéen vers l’Afrique subsaharienne a souvent conduit à hié-
rarchiser historiquement les systèmes. Il définit l’artisanat métallurgique comme
un témoin privilégié de « libération du technicien » et de passage de sociétés
« polyvalentes » à des sociétés complexes (Leroi-Gourhan, 1964, p. 238). Il
pousse à considérer les systèmes dualistes comme plus anciens ou plus archaïques
que les systèmes unitaires. Pour décider d’un éventuel passage du proto-artisanat
vers l’artisanat proprement dit, l’argumentation peut-elle se déplacer sur le ter-
rain technique ? Le critère typologique n’est pas décisif, du moins en ce qui con-
cerne l’ensemble de la boucle du Niger. Un essai de classification des fours à
induction, réalisé sur plus d’une centaine de sites de réduction de cette région
(Martinelli, 1993a et b), ne permet pas d’établir de relation univoque entre tech-
nique utilisée et identité sociale des producteurs (figure 11).
Des techniques analogues de fours fonctionnant par induction étaient prati-
quées, dans des régions proches aussi bien qu’éloignées les unes des autres, par
des forgerons dans certains cas, par des agriculteurs-métallurgistes dans d’autres
(photos 84 et 85). Rien n’interdit de penser que des emprunts aient eu lieu, dans
les deux sens, entre ces groupes. L’exemple des métallurgies dogon, échelonnées
du nord au sud de la falaise, est l’un des exemples les plus remarquables de conver-
gences techniques et de divergences sociales (Martinelli, 1995b). Le critère de
complexité technique ne peut être récusé a priori, mais il relève d’une analyse
théorique des processus qu’en l’état actuel des connaissances, nous ne pouvons
encore mener avec toute la rigueur nécessaire. Les complexités ne se trouvent pas
forcément où on les attend. Pour la qualité des métaux, la supériorité de certains
agriculteurs-métallurgistes était si reconnue par les forgerons voisins qu’elle a pu
amener ces derniers à en abandonner la production. Tel fut le cas du Yatenga à la
fin du XIXe siècle et au début de la période coloniale. Le critère d’échelle de pro-
duction est-il moins discutable ? Dans ses travaux sur les forgerons hawsa et
touareg, Echard (1965 et 1992) avait fort justement insisté sur l’impact des
métallurgies africaines sur l’espace social tant pour le fonctionnement d’unités de
production dans des aires territorialisées que pour les transferts de matériaux, les
échanges de produits finis, la mobilité des hommes et les cycles marchands.
Intensité de production et emprise sur des espaces de distribution des produits et
de mobilité humaine dépendent de facteurs sociaux et politiques globaux. Les
comparaisons (bien peu nombreuses encore) que nous pouvons faire entre des
Au seuil de la métallurgie intensive 173

160 170
130 140
185
200
180 190 160 140
Dogon, Pignari Kurumba, Oursi Hawsa (Niger) Malinké
(Mali) (Burkina Faso) (d'après Échard 1965) (Côte d'Ivoire)
(d'après Célis 1991)
80
Zarma Tillaberi 90 Malinké et senufo
(Niger) (Côte d'Ivoire)

200 200 200 230

(?) Fouta-Djalon Mande,


(d'après Appia 1952) Bendougou
(?) Tyanfala (Mali) (Mali)
70/80 100 100
Basar (Togo) (d'après Gouletquer 1983) Bâmbara (?), Bamako (Mali)
(d'après photo Zeltner, 1935,
240
Musée de l'Homme)

180

165 200
160

130/140
120 130 140 Nînsi/Samo, Kweere Daro
Dogon (?), Séno (Mali) Dogon, Aru (Mali) Dogon, Wol/Woru (Mali) (Burkina Faso)

480 2
1 600/650

450 500

400

130 140
130
Ninsi/fulse, Ronga, 1. Moose tikare ziitenga
Yatenga (Burkina Faso) (Burkina Faso) fulse/moose, 120
2. fulse fulogi yïngane, Yatenga Yatenga central Fulse/moose, Yatenga occidental (Burkina Faso)
(Burkina Faso) et Seno et reconstitution kâyn (Burkina Faso)

50/60

170 220/250 180/200

Bobo (Burkina Faso) Bwa, Ouarkoye (Burkina Faso)


(d'après photo Meniaud 1912) (d'après photo Palausi 1951)
Minyânka, Sikasso (Mali)

Figure 11. Principaux types de fours à induction dans la boucle du Niger


174 Bruno Martinelli

Photo 84. Fours de métallurgistes dogon à Vol et Sege (© C. Desplagnes, 1906).

systèmes dualistes, montrent que si beaucoup étaient d’échelle microrégionale


(Pays dogon), certains ont pu alimenter des exportations à grande échelle. Ce fut
le cas du Pays bassar, dans le nord du Togo, qui produisait des lames de houe
pour les exporter vers le Royaume dagomba à l’ouest et vers la côte de Guinée,
par voies caravanières.
En conclusion, les questions posées par la pluralité des systèmes de produc-
tion métallurgique restent largement ouvertes. On retiendra qu’il a existé des
correspondances structurelles entre systèmes de production métallurgique et for-
mations sociales et politiques. Les sociétés où les activités de mines et de réduc-
tion étaient réalisées par des agriculteurs, sans spécification artisanale, sont en
général de type segmentaire, alors que les organisations métallurgiques intégrale-
ment contrôlées par des forgerons se sont développées au sein de sociétés strati-
fiées à structure étatique. Il faudrait déterminer à quels substrats sociopolitiques
ont renvoyé ces « tendances » pour juger de leur extension et de leurs consé-
quences dans l’histoire comparée des sociétés ouest-africaines.
Au seuil de la métallurgie intensive 175

Photo 85. Anciens fours (bôn-daagha) au Yatenga (© B. Martinelli).

La mutation technique au Yatenga


L’étude particulière des processus sociaux qui se sont développés autour de la
métallurgie au Yatenga permet de répondre à certaines de ces questions. Ce ter-
rain est d’un double intérêt. Cette région minière et métallurgique d’impor-
tance majeure est, depuis plus de trois siècles, sous le contrôle de forgerons
endogames pratiquant une forme de coexistence technique avec les agriculteurs-
métallurgistes de régions voisines, fournisseurs d’acier pour des productions
valorisées telles que sabres et instruments les plus tranchants (haches et hermi-
nettes). Dans l’espace politique moose, le Yatenga est la seule région où s’est
accomplie une mutation sociale au terme de laquelle les producteurs de métal
furent contraints de choisir entre le métier métallurgique, en devenant des
« forgerons » à part entière, et l’agriculture, en abandonnant toute activité
métallurgique. Cette transition, qui n’a probablement rien de très exceptionnel
en Afrique de l’Ouest, pose particulièrement la question des limites techni-
ques, sociales et symboliques dont dépend le statut de forgeron dans certaines
sociétés. La définition de limites est d’autant plus précise et consciente qu’elle
met en présence des groupes complémentaires, dont les anciennes relations ne
176 Bruno Martinelli

sont pas effacées des mémoires lignagères. Devenir forgeron alors que l’on était
métallurgiste est un franchissement de seuil aussi important que devenir forge-
ron alors qu’on était agriculteur ou guerrier. Le passage du statut de métallur-
giste à celui de forgeron s’est accompli dans un climat de rupture sociale, si ce
n’est de déchirement, puisque son principal enjeu était le mariage endogame et
l’ensemble des interdits qui l’accompagne. Les données de l’histoire orale
abondent et convergent sur ce point. Elles permettent de situer les principales
étapes d’une transition qui a commencé au XVIe siècle, sous le règne de Naaba
Wumtanângo, et qui s’est achevée sous le règne de Naaba Kângo (1757-1787)
(Izard, 1980, 1983 et 1985). Ce dernier souverain joua un rôle décisif dans
l’édification du royaume et la codification du statut des forgerons. Son règne
est caractérisé par la constitution d’un État centralisé et d’une société stratifiée,
la sécurisation des axes de commerce et l’accroissement des échanges avec les
pays voisins, l’accélération de la sédentarisation agricole, toutes conditions
favorables à l’intensification de la production métallurgique.
Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle s’est accomplie, parallèlement à ce
processus social, une mutation importante de la technique métallurgique. Les
témoins archéotechnologiques en fournissent les jalons. Les anciens fours étaient
de type cellulaire à aération continue et à fosse. Ils donnaient des métaux en
quantité limitée mais à forte proportion d’acier. Ils mettaient en œuvre une tech-
nique voisine de celle qui a subsisté jusqu’à une période récente en Pays samo
septentrional. Ils sont appelés bôn-daase (au singulier : bôn-daagha), ce qui signi-
fie « fours mâles ». À partir de la fin du XVIIIe siècle, s’est mis en place un nou-
veau mode de réduction directe original à partir de l’invention d’un type de four.
La séquence innovatrice a pu être reconstituée à partir de plusieurs témoins
matériels archéologiques. Elle est attribuée à un groupe de forgerons d’une zone
circonscrite du Yatenga central. Du fait de son rôle dans l’histoire sociale et tech-
nique de la région, ce groupe exerce des pouvoirs éminents sur l’ensemble des
forgerons du Yatenga en ce qui concerne les droits d’installation d’atelier de
forge. Les nouveaux fours ont la forme de colonnes hautes tronconiques ou
cylindriques plus ou moins cintrées ou galbées (photo 87). L’écoulement des
scories est latéral et se fait par l’extérieur. L’étude comparative de ces fours met
en évidence une tendance au surdimensionnement qui prend son sens dans un
contexte de production intensive. Ce four, appelé bônga (au pluriel : bômse), est
considéré comme un « four femelle » avec tout le symbolisme de parturition affé-
rant. Il est conçu pour traiter d’importantes quantités de minerai (environ
1 tonne) à chaque opération. Il produit environ 150 kilos de loupes par opéra-
tion. Les fours bômse ont une hauteur moyenne de plus de 5 mètres, bien que
nombre d’entre eux atteignent 6,50 m.
Au seuil de la métallurgie intensive 177

Photo 86. Fours contemporains (bônga) au Yatenga (© B. Martinelli).

Le système technique de réduction des forgerons moose du Yatenga ne se


limite pas à ce four de grande taille. Il comprend deux autres fours équipés de
soufflets. Le plus petit est le fôn-doogho, qui permet de faire un traitement
d’affinage pour épurer et carburer le fer du bônga par petites quantités, en vue
178 Bruno Martinelli

d’opérations déterminées de forge. Le plus imposant des fours à soufflets est le


bwaagha, de forme tubulaire inclinée. Il est multifonctionnel mais, au Yatenga,
il a surtout été utilisé pour produire des aciers à partir de minerais fer-manganèse
(sidgha) extraits dans un unique site situé près d’Ouahigouya, le chef-lieu de la
province. Ce dernier four est d’un type commun à l’ensemble des peuples du
centre et du sud du Burkina Faso (Bisa, Lobi, Dagara, Kasena) jusqu’au nord du
Ghana.
Ce système de réduction fractionnée avec plusieurs fours est la conséquence
d’un choix de production massive initiale, puis d’affinage et de transformation
par étapes en fonction des exigences de la forge, du marché et des possibilités de
vente dans des aires locales, régionales et extrarégionales. Les loupes du bônga
étaient des composés hétérogènes ayant dissous le carbone en proportion varia-
ble selon le temps et la zone de combustion dans le four. Les forgerons distin-
guaient des types de fer commun — le fer mou ou « frais » (kutu masgha) et le fer
très mou ou « acide » (kutu misgu) — pour des matériaux peu carburés à des tem-
pératures maximales de 900 à 1 000 °C. Cette hétérogénéité du produit impli-
quait un tri mécanique et une réduction complémentaire d’affinage. Une partie
de ce fer était directement forgée pour la production d’instruments aratoires ou
domestiques. Il s’agissait de types de fer commun assez sensibles à l’oxydation. Ils
pouvaient suffire pour des outils fréquemment renouvelés mais ils ne pouvaient
être utilisés pour des armes de guerre et des outils agissant en percussion sur des
matières dures et résistantes. Le fer de la plus mauvaise qualité, qualifié
d’« acide » (kutu misgu) car rapidement oxydable en raison de sa très faible teneur
en carbone, était aussi forgé. Dans le cadre de pratiques commerciales peu scru-
puleuses, certains forgerons trouvaient un bénéfice à vendre ce fer sur des mar-
chés éloignés à la faveur de leurs déplacements commerciaux. Ils connaissaient
l’art de la contrefaçon. Dans le cas des haches et des herminettes, on pouvait for-
ger toute la lame dans un métal dur obtenu au four bwaagha, mais il s’est avéré
plus économique de souder un tranchant de fer dur sur un support (âme) de fer
ordinaire. Les forgerons, qui possédaient la technique d’élaboration des types de
fer dur (kutu kyênga ou kyeghênga), la délaissèrent lorsqu’ils purent s’approvision-
ner en fer chez les métallurgistes samo nînsi (branche de l’ethnie samo), au sud
du Yatenga. Bien que l’activité de production ait sensiblement diminué au début
du XXe siècle, quelques-uns de ces fours fonctionnaient encore à la fin des années
1950 dans les régions périphériques septentrionale et occidentale du Yatenga.
C’est dans l’une de ces régions, à la frontière du Mali (figure 9), que j’ai effectué
plusieurs reconstitutions. D’après des observations du début du XXe siècle (rele-
vées dans les archives d’administrateurs coloniaux d’avant 1914), les fours en
activité étaient au nombre de 1 000 à 1 500. Au rythme de 2 ou 3 réductions par
saison de production (février-avril), ils fournissaient donc, à cette époque de
régression de la métallurgie, suffisamment de métal pour forger plus de
1 000 tonnes de fer par an.
Au seuil de la métallurgie intensive 179

Photo 87. Batterie de fours de forgerons moose au Yatenga, avec soldat donnant
l’échelle (© J. Meniaud, Paris, É. Larose, 1912).

LA MARCHE RÉDUCTRICE EN COMBUSTION LENTE

La durée des opérations de réduction était remarquablement longue comparati-


vement aux données qui ont été enregistrées pour d’autres régions d’Afrique de
l’Ouest. En fonction du volume des fours et du nombre de leurs ouvertures (de
9 ou 11), les temps de réduction duraient de 3 à 7 jours. Les réductions de 7 jours
sont attestées par des enquêtes menées dans plusieurs parties du Yatenga éloi-
gnées les unes des autres afin de garantir la fiabilité de l’information. J’ai réalisé
en 1988, dans la localité de Kâyn située sur la frontière avec le Mali,
2 réductions : l’une de 3 jours (70 heures), l’autre de 4,5 jours (100 heures).
Certaines loupes obtenues au terme de ces opérations ont été récupérées, soumi-
ses à l’affinage, puis forgées par plusieurs forgerons. En ce qui concerne la durée
des reconstitutions, une précision doit être apportée. Les maîtres-forgerons de
l’opération avaient pratiqué leur dernière réduction au bônga en 1962, près de
30 ans plus tôt. Ils avaient manifesté l’intention de réaliser un four à
11 ouvertures et une réduction de 7 jours dont ils m’avaient expliqué le déroule-
ment au cours de nombreux entretiens. La construction achevée, c’est en taillant
les ouvertures qu’ils se rendirent compte que si le four avait la hauteur requise, il
180 Bruno Martinelli

n’avait pas le diamètre nécessaire à la base. Ils réalisèrent alors un four à


9 ouvertures d’un volume supérieur à la moyenne. Les impératifs de durée de la
réduction s’imposèrent ensuite en fonction des quantités de minerai et de com-
bustible. Cette erreur d’estimation présenta l’avantage de pouvoir comparer les
résultats de 2 opérations et d’en évaluer les résultats. Elles révélèrent une marge
de liberté et de décision dès la conception du four. Cette expérience conduit, en
général, à relativiser les résultats obtenus en situation de reconstitution mais
fournit de précieuses informations complémentaires pourvu qu’elles contribuent
à une critique technique. Une reconstitution réalisée par des acteurs techniques
expérimentés n’a rien d’artificiel mais elle fait intervenir les variables aléatoires de
la mémoire dont il faut tenir compte pour l’interprétation.
Quelle que soit la durée de l’opération, le four bônga est chargé une seule
fois, avant l’allumage. On n’ajoute ni minerai ni charbon de bois (seul combus-
tible tiré de Prosopis africana ou, à défaut, de Boscia angustifolia, de Pterocarpus
lucens ou d’Anogeissus leiocarpus). Les ouvertures sont obturées avant l’allumage
et le restent jusqu’au matin du jour choisi pour l’évacuation des matériaux. Les
scories sont tout d’abord évacuées par un orifice d’où elles « urinent » (dûnleere)
vers l’extérieur du four durant 6 à 8 heures. Les loupes de fer sont positionnées
derrière chaque ouverture, par où elles sont dégagées. Elles ont l’apparence
d’éponges métalliques de 10 à 30 kilos selon l’ouverture. Dans de bonnes condi-
tions techniques, 9 ou 11 loupes permettent d’obtenir de 150 à 200 kilos de
matière métallique hétérogène. La matière finalement utilisable, constituée des
trois qualités de fer déjà mentionnées, ne représente que de 30 à 60 % de la
matière récupérée. Cette différence du simple au double témoigne d’une impor-
tante variation de compétence entre les forgerons. Au camp de brousse où se pra-
tiquent les opérations de réduction, cette compétence s’exprime immédiatement
par vérification mécanique de la qualité du métal. Elle fait l’objet d’un jugement
collectif. Le choix technique se traduit par une tendance à ce que l’on pourrait
appeler du « gigantisme » si l’on considère la hauteur qu’atteignaient certains
fours (photo 87). Il met en valeur une expérience des limites techniques au prix
d’une perte des performances techniques. C’est un indicateur d’inachèvement
du processus innovant qui, si la période coloniale n’était venue le contrarier,
aurait pu se poursuivre au cours du XXe siècle.
L’ensemble de ces indicateurs techniques singularise la métallurgie du
Yatenga par rapport à celle des régions voisines, et même de régions africaines
plus éloignées. Elle se caractérise comme le choix d’une marche réductrice en
combustion lente du fait de l’obturation des ouvertures pendant 90 % du temps
de réduction. C’est moins la taille, la forme ou la structure de leur construction
que ce processus de « combustion lente » que les forgerons considèrent comme
pertinente de leur identité technique. Ils sont relativement conscients que ces
critères d’identité mettent l’accent sur la maîtrise des températures et le progrès
que représente selon eux la capacité à contenir des températures de plus en plus
Au seuil de la métallurgie intensive 181

élevées pendant un temps prolongé dans une zone circonscrite de combustion. Il


est possible de s’interroger sur les raisons et la signification de ce « choix » tech-
nique. En quel sens y a-t-il choix alors que l’ensemble des déterminants techni-
ques est considéré comme particulièrement contraignant ? Lenteur et rapidité
n’ont aucune signification en elles-mêmes. Les critères de conscience technique
proviennent aussi bien de l’enquête orale sur la connaissance d’autres techniques,
acquises au cours de voyages d’apprentissage (Martinelli, 1995a, 1996 et 1998)
que des reconstitutions avec les enregistrements de la température, des matières
et des opérations. Ils mettent en évidence des concepts de seuil, de marge de
sécurité et de décision technique. L’hétérogénéité des zones et des phases de com-
bustion dans le four peut être observée et interprétée en termes de gestion et de
représentation, tant perceptive que cognitive, des rapports entre matière et feu.

LA CONDUITE DU PROCESSUS THERMIQUE

Ce système de réduction par induction présente la particularité de n’exiger


aucune intervention humaine durant 90 % du processus, entre l’allumage, tous
orifices obturés, et l’évacuation des scories qui commence une demi-journée
avant l’ouverture générale du four. Pour comprendre ce qui se passe à l’intérieur
d’un tel four dont les forgerons parlent de manière métaphorique (gestation,
accouchement), tout en en maîtrisant les phases, il est nécessaire d’étayer le rai-
sonnement hypothético-déductif par des mesures. Il s’agit de pesée et de prélève-
ment des matériaux avant et après l’opération, ainsi que d’enregistrement des
températures dans les différentes parties du four durant la réduction. Cet enre-
gistrement a été effectué afin de comparer les résultats de réductions de durées
différentes.
Les courbes de température ont été établies au moyen de sondes thermiques
(platine-rodium) d’une précision allant de 400 à 1 400 °C. L’une d’elles était
placée à la base du four, au-dessus de l’orifice d’évacuation des scories, les autres
à 1,5 m, 2,5 m et 3,5 m de hauteur (figure 12). Cette disposition a permis de
relever un double principe de chauffage et de combustion déterminant du point
de vue de la conduite du feu.
La diffusion de monoxyde de carbone à une température supérieure à
600 °C dans la partie haute du four durant une période de 60 heures est essen-
tielle à ce processus de réduction avant que le minerai descende dans la zone de
combustion. L’oxyde ferreux serait ainsi préréduit à une température assez élevée.
Il ramollirait et dissocierait le minerai. L’état fissuré de morceaux de minerai
« non transformé » récupérés en fin du processus semble le confirmer. Il s’agit
aussi de réguler la propagation des gaz en évitant tout effondrement anarchique
de la charge. Ces conclusions semblent rejoindre les observations de Leroy
(Leroy et al., 2000, p. 37-51) à partir d’une étude expérimentale de fours et de
processus de réduction utilisés avec des minerais lorrains.
182
Figure 12. Yatenga, Kâyn ; réductions comparées 70/100 h. Courbes de température

°C 1 600

1 400

1 200
Sonde 1 – base du four

1 000

Bruno Martinelli
800
Sonde 2 – 1,5 m

600

400
Sonde 3 – 2,5 m
200

Sonde 4 – 3,5 m
0

1 4 7 10 13 16 19 22 25 28 31 34 37 40 43 46 49 52 55 58 61 64 67 70 73 76 79 82 85 88 91
heures
Au seuil de la métallurgie intensive 183

Les températures relevées dans la zone focale de combustion (entre le fond et


1,5 m de haut) indiquent qu’une réduction prolongée des oxydes de fer s’y réa-
lise à une température stabilisée, après une vingtaine d’heures de combustion,
entre 800 et 950 °C. Cette phase dure de 50 à 70 heures (toutes ouvertures bou-
chées). La comparaison entre les opérations montre qu’un gain d’environ
100 °C, en température moyenne, semble obtenu en allongeant de 30 % le
temps de réduction. Cette observation rejoint celles qui ont été faites, pour
d’autres régions, sur des fours à induction de conception différente, telles que
celles de Goucher (1984) et de Barros (1985) en Pays bassar, au Togo.
En suivant les courbes de température, le déroulement du processus de
réduction peut être décomposé en trois phases :
• une montée rapide de la température durant 20 heures dans la partie infé-
rieure avec un premier pic qui se répercute dans toutes les parties du four.
Celui-ci est un indicateur objectif de la fin de la phase du « coup de feu » ini-
tial et du déplacement des zones de combustion. Il marque le palier à partir
duquel la température se stabilise dans chaque zone ;
• une évolution ascendante lente de la température moyenne dans les différen-
tes parties du four pour produire l’effet de chauffage (de 600 à 800 °C) en
atmosphère carbonée. Les couches de minerai descendent lentement, soumi-
ses à une combustion contrôlée et à une température constante (de 800 à
1 000 °C) durant plus de 50 heures ;
• une brutale augmentation de la température durant les 10 dernières heures,
dès le début de l’évacuation des scories par un petit orifice inférieur appelé
dûnleere (l’endroit par lequel le four « urine »). La température moyenne
s’élève immédiatement à plus de 1 250 °C dans la partie inférieure du four.
Lors de l’une des reconstitutions, la sonde inférieure a été retirée, endomma-
gée, à une température de 1 450 °C, 5 heures après le début de l’évacuation
des scories. Les tuyaux sont débouchés par intermittence pour observer la
couleur de combustion. Les forgerons interviennent mécaniquement avec
des bâtons, durant plusieurs heures, pour activer le flux de scories sortant par
ces tuyaux. La température se stabilise alors à plus de 1 200 °C dans la zone
focale durant les 6 dernières heures, jusqu’au dégagement des loupes.

LE BILAN COMPARATIF DES MATIÈRES

Après une première réduction de 70 heures, près de 40 % du minerai concassé


qui avait été chargé est récupéré à l’état non réduit. En mettant ce résultat en
relation avec le volume du four dont on a dit plus haut qu’il était un compromis
entre un four à 9 ouvertures et un four à 11 ouvertures, il a été décidé de pra-
tiquer une seconde réduction en se fiant à nouveau, en ce qui concerne la
durée, au savoir des forgerons. Cette seconde opération a duré 100 heures. Le
bilan comparatif des matières permet de mettre en évidence plusieurs faits
184 Bruno Martinelli

(tableau 14). L’allongement de 30 heures du temps de réduction a permis de réa-


liser un gain de rendement de 6,17 % et d’atteindre ainsi un taux de 22 % du
poids de métal par rapport au minerai initialement chargé, déduction faite du
minerai non réduit. Par ailleurs, la quantité de minerai non transformé a été
diminuée de moitié, passant de 328 à 158 kilos. Tout aussi significative est l’aug-
mentation importante des scories vitrifiées (nwâre) évacuées hors du four. La
superposition des courbes met en évidence le fait que la différence pertinente
n’était pas l’augmentation des températures mais l’allongement de la seconde
phase du processus au cours de laquelle se produisent les effets de chauffage et de
combustion. La comparaison entre ces deux opérations confère toute sa perti-
nence au concept empirique et vernaculaire de combustion lente. L’allongement
de la durée de réduction a probablement recoupé (au moins partiellement) une
phase cruciale d’un processus dont la préoccupation essentielle des forgerons est
de déterminer le terme.

Tableau 14. Yatenga. Reconstitutions réalisées à Kâyn. Bilan comparatif des matières

Valeur +/–
Durée totale (jours) 3,5 4,5
Durée combustion (heures) 70 100
Matériaux
Charbon :
– total (kg) 910,00 925,00 15,00
– nombre paniers (paniers) 91,00 93,00 2,00
– couche 1 (kg) 420,00 412,00 – 8,00
– couche 2 (kg) 170,00 192,00 22,00
– couche 3 (kg) 160,00 170,00 10,00
– couche 4 (kg) 160,00 180,00 20,00
– reste\fin réduction (kg) 176,00 36,00 – 140,00
– consommé (kg) 734,00 889,00 155,00
Minerai :
– brut (kg) 958,50 973,00 14,50
– concassage 1 (kg) 910,00 903,00 – 7,00
– concassage 2 (kg) 837,00 846,00 9,00
– nombre paniers (paniers) 131,00 133,00 2,00
– couche 1 (kg) 422,10 412,00 – 10,10
– couche 2 (kg) 100,80 125,00 24,20
– couche 3 (kg) 314,10 309,00 – 5,10
– total charge (kg) 837,00 846,00 9,00
Paille non tassée (m3) 3,00 3,00
Résultats de la réduction
Minerai non transformé (kg) 328,00 158,00 – 170
Loupe (fer non raffiné) :
Au seuil de la métallurgie intensive 185

Valeur +/–
– ouverture 1 (kg) 23,20 27,20 4,00
– ouverture 2 (kg) 8,20 21,30 13,10
– ouverture 3 (kg) 6,10 13,50 7,40
– ouverture 4 (kg) 6,10 12,10 6,00
– ouverture 5 (kg) 3,10 9,60 6,50
– ouverture 6 (kg) 6,80 18,30 11,50
– ouverture 7 (kg) 7,30 18,60 11,30
– ouverture 8 (kg) 18,50 29,10 10,60
– ouverture 9 (kg) 0,80 1,00 0,20
– total (kg) 80,10 150,70 70,60
Scories :
– vitrifiée, nwâre (kg) 90,00 175,00 85,00
– blocs, rângo (kg) 70,90 92,00 21,10
– fond four (kg) 34,00 65,00 31,00
– total (kg) 194,90 332,00 137,10
Récapitulations et quotients*
M, total charge (kg) 837,00 846,00 9,00
MNT (kg) 328,00 158,00 – 170,00
M2 > M-MNT transformé (kg) 509,00 688,00 179,00
C consommé (kg) 734,00 889,00 155,00
S totales (kg) 194,90 332,00 137,10
L totales (kg) 80,10 150,70 70,60
Restes (cendres, gaz, etc.) calculés par déduction
M2-L-S total (kg) 234,00 205,30 – 28,70
M2-L-S (%) 27,96 24,27 – 3,69
Réduction +/–
Ratios
70 h 100 h 30 h
M/C 1,14 0,95 – 0,19
M2/C 0,69 0,77 0,08
M/S 4,29 2,55 – 1,75
M2/S 2,61 2,07 – 0,54
C/S 3,77 2,68 – 1,09
M/L 10,45 5,61 – 4,84
M2/L 6,35 4,57 – 1,79
L/M 0,10 0,18 0,08
* M : minerai ; MNT : minerai non transformé ; M2 : minerai concassage 2 ; C :
charbon ; S : scories ; L : loupes.

J’ai envisagé l’hypothèse selon laquelle, en raison de l’obturation des ouver-


tures du four, une réduction prolongée et poussée des oxydes de fer, favorisant la
diffusion du carbone à l’intérieur du fer, rendrait possible une production directe
d’acier. Elle se révèle ne pas être en adéquation avec les résultats obtenus au cours
186 Bruno Martinelli

de ces reconstitutions (tableau 14). Cela ne veut pas dire qu’elle ne l’est pas par
rapport à ce type de technique si l’on se réfère à certains témoignages de forge-
rons. Bien qu’il y ait un peu d’acier (fer « dur » — kutu kyênga) au centre des plus
gros blocs, sa proportion reste peu importante. La combustion lente semble
avoir d’autres objectifs. Interrogeons les forgerons. La combustion lente est
nécessaire, selon eux, pour plusieurs raisons :
• les quantités de minerai à réduire et de combustible à brûler ;
• la résistance de l’édifice. Les parois du four ne sont pas conçues pour résister
à des températures prolongées supérieures 1 000 °C. Les forgerons affirment
que si les ouvertures sont obturées durant 85 % du temps de réduction, c’est
pour que le four « ne se fende pas ». Maints récits se rapportent à des forge-
rons inexpérimentés (Martinelli, 1996) dont les fours se sont brisés. Il n’est
pas envisagé de modifier la technique de construction, par exemple en ren-
forçant les parois avec des blocs de scories et des soutènements d’argile
comme c’est le cas de certains fours dogon et samo connus des forgerons du
Yatenga ;
• le contrôle de la dynamique des matériaux et des gaz durant la réduction. Les
montées en température de cuisson se traduisent par des modifications de
répartition des matériaux dans le four. Il peut se produire des effondrements
de la charge créant des brèches à travers le minerai et le charbon qui entraî-
nent l’échappement direct au lieu d’une diffusion prolongée du carbone.
Une combustion prolongée permet une descente régulière de la charge de
combustible et une certaine homogénéisation de l’action du carbone sur
l’oxyde de fer ;
• la maîtrise des températures. Le progrès technique est représenté, pour les
forgerons, par la capacité de contrôler la montée de la température et de
contenir les températures les plus élevées dans une zone focale de cuisson.
L’un des objectifs de cette technique est de limiter l’hétérogénéité des zones
et des phases de combustion, par conséquent, celle des métaux finalement
produits ;
• les proportions croissantes de fer « dur » (kutu kyênga) et de fer commun, dit
« frais » (kutu masgha), directement utilisables à la forge par rapport à celles
de fer « acide » (kutu misgu). Pour les forgerons, les trois qualités de fer cor-
respondent à des durées de réduction variables à la base du four, le fer « dur »
étant associé aux durées les plus longues, le fer « acide » aux plus courtes
durant la phase terminale de l’ouverture du four.

La transmission et la maîtrise du savoir métallurgique


Les représentations de la combustion lente qu’énoncent les forgerons sont préci-
ses et variées. Elles évoquent une gestion normative des marges de sécurité qui
doivent être préservées à chaque franchissement de seuils repérable par identi-
Au seuil de la métallurgie intensive 187

fication perceptive (auditive, visuelle, olfactive) ou cognitive. Pour connaître et


contrôler la technique de ces fours à induction, observer ne suffit pas. Le four
est un milieu clos et opaque. La connaissance de la structure du four renvoie à
celle de son fonctionnement. Cet ensemble de techniques exige la maîtrise du
processus physico-chimique de transformation des minerais et la capacité
d’anticiper des processus irréversibles. Les interventions correctrices sont très
limitées, ce qui fait dire aux forgerons qu’une fois le four chargé, « tout dépend
de dieu Wênde ».
La maîtrise cognitive de la chaîne, qui s’achève par la réduction des minerais,
est longue à acquérir. Au Yatenga, on devait apprendre à forger avant de com-
mencer l’apprentissage de la réduction, considéré comme l’aboutissement de la
transmission du métier (Martinelli, 1996). Ainsi se systématisaient des savoirs
compartimentés. L’apprentissage du travail au four bônga s’étendait sur une
grande partie de la vie professionnelle. Les aînés des lignages interposaient des
secrets en des points stratégiques du processus opératoire. Les normes d’entraide
lignagère et communautaire, d’une part, et d’assistance nécessaire des anciens,
d’autre part, conditionnaient la transmission des savoirs. Dans des unités ligna-
gères plurigénérationnelles, des forgerons de 30 à 40 ans pouvaient être canton-
nés aux tâches subalternes d’extraction du minerai et de fabrication du charbon
de bois. Ils n’assistaient qu’en tant qu’observateurs ou manœuvres aux opérations
clefs de la réduction du minerai. Certains savoirs (aussi bien techniques que sym-
boliques) relatifs au processus de combustion lente étaient exclusivement trans-
mis sur un mode initiatique entre aînés. Les jeunes forgerons étaient ainsi
conditionnés à considérer l’élaboration initiale du fer comme un processus de
haute complexité, exigeant le respect de règles et normes particulièrement strictes.

Le choix technique, le choix économique


Le système technique des forgerons du Yatenga est caractérisé par la volonté de
produire des excédents et de livrer les surplus dans d’autres régions du Pays
moose ainsi que dans les pays voisins, jusqu’à la frontière du Ghana. Le choix de
la combustion lente par ces forgerons a tendu, dès la phase de recherche innova-
trice et durant tout le XIXe siècle, à répondre à un choix économique, celui d’un
saut quantitatif de la production permettant d’insérer la métallurgie dans les
échanges et le commerce de longue distance. La plupart des familles de forgerons
se sont organisées pour permettre à des groupes d’hommes jeunes d’effectuer des
déplacements avec des caravanes d’ânes et de bœufs portant les charges, afin
d’aller vendre, dès la fin de la saison sèche, au moment des travaux agricoles dans
l’Est et le Sud-Est, des lames aux types adaptés à la clientèle de ces régions (Oua-
gadougou, Pwitenga, Tenkodogo et Pays moose et gurûnsi méridionaux). Cer-
tains revenaient directement au Yatenga après avoir accumulé des cauris ou
188 Bruno Martinelli

acheté des produits alimentaires et manufacturés, mais beaucoup d’autres conti-


nuaient avec leurs ânes en direction du Ghana ; ils s’inséraient dans les réseaux et
cycles d’échanges des commerçants moose. Ils revenaient avec de la kola quel-
ques mois plus tard. Toujours organisés en caravanes, certains continuaient, pour
vendre cette kola, jusqu’à Mopti et Tombouctou et ne revenaient qu’ensuite au
Yatenga, chargés de poissons séchés et fumés. Les produits de la forge fournis-
saient, pour ceux qui étaient engagés dans les échanges de longue distance, le
capital initial du cycle commercial.
Au Yatenga, la mainmise des forgerons sur la chaîne opératoire du fer est un
processus indissociable de la stratification et de la dynamique externe de la
société moose. Ayant désinvesti les lieux et les fonctions du pouvoir, au prix d’un
régime contraignant d’endogamie, les forgerons se sont orientés vers une pro-
duction et une commercialisation à grande échelle. Ils se sont trouvés de plus en
plus mêlés aux commerçants, sur les routes caravanières qui mettaient le nord de
la boucle du Niger en communication avec les pays de la côte de Guinée. Ils
connurent, jusqu’au début du XXe siècle, un certain enrichissement, tout en
continuant de distinguer les échanges avec les agriculteurs locaux, fournisseurs
de denrées alimentaires, régis par une logique de troc et des échanges lointains
régis par les lois du mercantilisme.
Le choix de la combustion lente est indissociable d’une transition identitaire
qui a fait de ces anciens producteurs polyvalents, agriculteurs et métallurgistes,
des « forgerons » selon les critères imposés par le pouvoir des souverains du
Yatenga. La mutation technologique a consacré et concrétisé ce statut d’« artisans »
à part entière. La soumission des métallurgistes au pouvoir puis leur consente-
ment à ce régime d’enclosure sociale ont eu pour compensation un monopole
accru sur la production du fer dans un contexte favorable à l’expansion démogra-
phique, spatiale et sociale. Par contraste, les agriculteurs-métallurgistes des pays
voisins, samo et dogon, ont conservé une activité essentiellement sédentaire et
locale. Les acheteurs (forgerons et agriculteurs) ont continué à venir à eux pour
s’approvisionner en fer « dur ». Tout autre étaient l’espace et le monde des forge-
rons. Leur existence comme leur activité étaient, dès l’apprentissage, caractérisées
par une grande mobilité économique et migratoire. Ils reconquéraient ainsi une
liberté. Le dynamisme de cette métallurgie, marqué par l’invention de fours
d’une capacité exceptionnelle pour l’ensemble de l’Afrique subsaharienne, s’est
fondé sur une intense circulation des savoirs, des individus et des produits. Cette
mobilité exigeait l’ouverture et la sécurité des communications. C’était le fonde-
ment du compromis entre les souverains et les métallurgistes du Yatenga. Les
causalités sociales de cette mutation sont donc nombreuses et corrélées : le déve-
loppement général de l’agriculture, le renforcement du pouvoir politique au cen-
tre comme à la périphérie des territoires administrés, la sécurisation des voies de
circulation et des marchés, la dynamique sociale sur le plan aussi bien local que
global.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 189

Bilan des datations des vestiges anciens


de la sidérurgie en Afrique
L’enseignement qui s’en dégage
Louise-Marie Maes-Diop

À l’encontre de « la théorie carthaginoise », en 1968, nous terminions l’article


intitulé « Métallurgie traditionnelle et âge du fer en Afrique » par la phrase suivante :
« S’il semble donc prouvé aujourd’hui que la métallurgie traditionnelle du fer en
Afrique était très ancienne, largement répandue et autochtone, il reste, par contre,
à déterminer les foyers d’origine de cette métallurgie, leur datation exacte et les
hypothétiques routes du fer à travers le continent » (Maes-Diop, 1968).
Depuis une trentaine d’années, plusieurs dates particulièrement importantes
ont été acquises, qui permettent de préciser très notablement l’ancienneté de la
métallurgie du fer en Afrique noire. Le point de nos connaissances sur le début
de l’âge du fer en Afrique et dans le monde est présenté dans le tableau 15.
Tableau 15. Ordre chronologique et localisation des plus anciens vestiges de minerai
réduit dans le monde

Dates Localisation Nature des échantillons


– 2900 –2300 Niger oriental Objets divers
– 2565 –2440 Égypte Morceau de minerai (houe)
– 2520 – 1675 Niger oriental Objets divers
– 2450 – 2100 Mésopotamie et Anatolie Lames de poignards et fragments
– 2345 – 2181 Égypte Bloc de minerai réduit
– 1991 – 1786 Basse Nubie égyptienne Fer de lance
(Moyen Empire)
– 1870 – 1130 Niger oriental Objets divers
– 1810 – 1375
– 1800 – 1750 Chypre Perle grossière
– 1400 – 1200 Région du lac Victoria-Nyanza
– 1300 – 800 Cameroun
Vers – 1100 Chine
Vers – 950 Grèce, Nigéria (peut-être
beaucoup plus tôt)
190 Louise-Marie Maes-Diop

Dates Localisation Nature des échantillons


– 903 – 796 Centrafrique
– 713 Napata (Nubie)
VIIe siècle Gabon, monde carthaginois,
Inde
VIe siècle Méroé

J. P. Mohen (1990 et 2001) signale également un instrument en fer (ne com-


portant pas de pourcentage de nickel) découvert dans une tombe datée de
5000 av. J.-C. à Samarra, en Iraq, au sujet duquel on s’interroge. Par ailleurs, la
lame du poignard de Tell Asmar (en Mésopotamie) a disparu par oxydation ; ce
qui fut analysé ce sont quelques parcelles adhérant au manche, c’est-à-dire des
parcelles d’oxyde provenant de la décomposition de la lame. Dans ce cas, la cons-
tatation de l’absence de nickel n’est guère probante. Remarquons que les dates
obtenues à Égaro permettent de considérer comme possible l’origine ouest-afri-
caine des quelques échantillons de minerai de fer trouvés en Égypte et datant de
l’Ancien Empire (2565-2181 av. J.-C.), d’autant qu’en Mésopotamie et en Ana-
tolie, les dates sont comprises entre 2450 et 2100 av. J.-C., sauf à confirmer celle
de Samarra. Notons que les vestiges de fer sont généralement rouillés.
Après les dates capitales du Niger oriental (Quéchon et al., 1992) et celles
des régions proches des rives ouest et sud du lac Victoria-Nyanza (Van Grunder-
beek, 1982), des dates significatives ont été obtenues en 1998-1999 : au Came-
roun, pour le site d’Oliga (zone nord de Yaoundé), une série de dates s’échelonnant
de 1300 av. J.-C. à 567 apr. J.-C. (Delneuf et al., 1999, chap. XIV ; Essomba,
1998). En Centrafrique, dans la région mégalithique de Bouar sur le site de Gba-
biri (site 77), les dates corrigées tombent vers 800 av. J.-C. (Zangato, 1995,
1999). Ainsi l’ancienneté et l’endogénéité de la paléosidérurgie africaine sont-
elles maintenant indiscutables et indiscutées. La carte schématique ci-après
(figure 13) résume la répartition des sites du fer antérieurs au VIe siècle av. J.-C.
La civilisation de Nok-Taruga (Nigéria, au nord de la basse Bénoué) est
caractérisée principalement par ses figurines en terre cuite associées à une indus-
trie du fer ; les dates au carbone 14 s’échelonnent de – 3500 à + 200. En fait,
faute de fouilles assez nombreuses et systématiques, il n’existe que peu de dates
pour la région de Nok. Depuis 40 ans, les deux dates les plus anciennes, 3500 et
2000 av. J.-C., sont jugées inacceptables et ce, sans justification valable. Actuel-
lement, les dates généralement admises pour la civilisation de Nok ne remontent
pas au-delà du IXe ou Xe siècle av. J.-C. L’ancienneté du fer dans le massif de Ter-
mit (elle pourrait dépasser 2500 av. J.-C.) oblige à reconsidérer cette question.
De plus, Aremu fait état, dans sa contribution, d’objets en fer trouvés à Dusten
Kongba (État du Plateau, au nord de la Bénoué), dans une couche datée de
2780 ± 100 av. J.-C. On ne saurait trop insister sur la priorité qu’il faudrait
accorder à cette région comme lieu de fouilles approfondies, d’autant que dans
Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique 191

le Niger oriental, les objets en fer sont plus anciens que les vestiges de fourneaux
(voir plus haut la contribution d’H. Bocoum).
En Zambie, le fer est présent au moins au début de l’ère chrétienne. En Afri-
que du Sud (rive méridionale du Limpopo), la métallurgie du fer est attestée au
IIIe siècle de notre ère.
La présence même de cette industrie du fer qui se développe, en Afrique sub-
saharienne, parallèlement à celle de la pierre et des autres métaux (cuivre, or,
étain, bronze…) implique une population relativement nombreuse. Le com-
merce existait déjà en Afrique noire à cette haute époque : « Un certain nombre
d’objets trouvés en fouilles montrent que, dès l’âge du fer ancien, il existait de
vastes réseaux d’échange » (Van Noten, 1981). Le même auteur observe que ce
commerce devait être « principalement limité » aux zones proches des grands
fleuves car les sites éloignés des axes fluviaux ou de la région interlacustre four-
nissent fort peu d’objets importés.
Ces réseaux d’échanges étendus existaient au troisième millénaire av. J.-C.
(rappelons sur ce point les quatre expéditions conduites par l’Égyptien Herkouf
au XXIVe siècle av. J.-C.), ce qui prouve la possibilité d’un commerce du fer entre
les différentes régions de l’Afrique. Les modes de désignation du fer sont appa-
rentés dans les langues soudanaises et bantu et en égyptien ancien 1. Le fer a pu
arriver en Égypte à partir du Soudan occidental et central par l’Ennedi où la pré-
sence ancienne de lances a été remarquée par Huard (1964).
Seule la multiplication des fouilles et des datations permettra d’en savoir
plus, quoique la vitesse de disparition du fer sous les climats chauds et humides
empêche probablement de découvrir exactement ce qu’il en a été dans bien des
cas.
En conclusion, il apparaît que la technique de réduction du minerai de fer a
été inventée en Afrique noire dès le milieu du troisième millénaire environ, c’est-
à-dire en même temps qu’en Asie occidentale et peut-être même avant. Il semble
que ces deux foyers d’invention aient été indépendants. Mais ce n’est pas absolu-
ment certain. À noter que ni l’Égypte ni la Mésopotamie ne possédaient de
minerai de fer sur leur propre territoire. Mais, connaissant déjà la fonte d’autres
métaux, elles pouvaient faire venir le minerai. Toutefois, le résultat des fouilles et
des datations laisse plutôt supposer que la sidérurgie, dans l’histoire de l’huma-
nité, est née d’une part en Afrique occidentale et d’autre part en Anatolie.
Cependant, d’autres régions nous réservent peut-être des surprises.
Des recherches systématiques devraient être effectuées non seulement dans la
région de Nok, et dans l’espace compris entre Nok et le massif de Termit, mais
aussi au Tchad (à Korotoro et dans la région de l’Ennedi) ainsi que dans les oasis
qui le relient à l’Égypte (Nukheila/Merga, Bir Abu Husein, Selima, Kharga,

1. Alors qu’au contraire, la racine commune du mot fer dans les langues sémitiques est
très différente (Lhote, 1952).
192 Louise-Marie Maes-Diop

Carthage

Giseh
Amarna
Abydos
Thèbes Tropique du Cancer

Nil
Tigidit Buhen

Egaro Napata

Méroé
Nig
ga

Termit
l

er

Cha
Nok ri

Taruga
Gbabiri

Oliga Co
Équateur ng
o
Otoumbi
Mubuga

OCÉAN
Katuruka
OCÉAN
INDIEN
ATLANTIQUE

bèze
am
Z

ne
Tropique du Capricor

O r a nge

0 1 000 km

Métallurgie africaine du fer, du IIIe millénaire au Ve siècle avant J.-C.


Sites connus
IIIe millénaire avant J.-C. Xe siècle avant J.-C.
Egaro, Niger oriental -2900/2300, -2520/1675 Nok, Nigeria -925/+70 (A. Fagg 1972)
(G. Quéchon & al. 1992) IXe siècle avant J.-C.
Giseh, Égypte -2700, (C. A. Diop 1973) Oliga,Cameroun -1256/500(J. M. Essomba 1999)
-2565/2440 (J. P. Mohen 1990) Taruga, Nigeria -880/400(R. Vernet 1993)
Abydos, Égypte -2345/2181 (J. P. Mohen 1990) Gbabiri, Rép. centrafricaine -903/796(E. Zangato 1999)
IIe millénaire avant J.-C. VIIIe siècle avant J.-C.
Buhen, Nubie Égyptienne -1991/1786? Napata, Soudan, fin VIIIe siècle,
(J. P. Mohen 1990, 1996) Pianthy-713
Termit, Niger oriental -1870/1130 (J. P. Mohen 1990, 1996)
(G. Quéchon & al. 1992) Tigidit, Niger (D. Grébénart 1988)
Amarna, Thèbes, Égypte -XIVe
siècle
18e/19e dynasties (C. A. Diop 1973, J. P. Mohen 1996)
VIIe siècle avant J.-C.
Carthage, Tunisie (R. Niemeyer 1952)
Mubuga, Burundi -1230/1210, Otoumbi, Gabon (R. Oslisly & al. 1992)
Katuruka, Tanzanie -1470/1030
(M. Cl. Van Grunderbeek) VIe siècle avant J.-C.
Oliga, Cameroun -1300/800(J. M. Essomba 1999) Méroé, Soudan (P.L. Shinnie & al. 1982)

Figure 13. La métallurgie africaine du fer du IIIe millénaire au Ve siècle av. J.-C., pour
les sites connus
Bilan des datations des vestiges anciens de la sidérurgie en Afrique 193

Dakhla, Farafra), autour du lac Victoria-Nyanza et entre Nok et le Sine-Saloum


(Sénégal). Ajoutons que les mines de Télénugar, au Tchad, attendent d’être
datées ainsi que l’apparition du fer dans les couches postérieures à 2000 av. J.-C.
du Nachikoufien (Zambie).
Il serait souhaitable que les fondations et organismes à vocation culturelle
favorisent directement les fouilles et les datations ainsi que l’insertion, dans les
manuels scolaires et universitaires, des nouvelles données qui modifient considé-
rablement la vision erronée — encore actuellement très répandue — tant du
passé de l’Afrique que de la contribution de ce continent au développement
technique et culturel de l’humanité.
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 195

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Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 217

Liste des auteurs

David A. Aremu
Université d’Ibadan
Department of Archaeology and Anthropology
Ibadan, Oyo State, Nigéria

Isaac Adeagbo Akinjogbin


Université Obafemi Awolowo, Ile-Ife
Ile Road, Ile Ife, Osun State, Nigéria

Hamady Bocoum
Directeur du Patrimoine de la République du Sénégal
Ministère de la culture, avenue Léopold Sédar Senghor, Dakar
Université Cheikh-Anta-Diop, BP 206, Dakar, Sénégal

Joseph-Marie Essomba
Université de Yaoundé-I
Département d’histoire, arts et archéologie
BP 755, Yaoundé, Cameroun

Philippe Fluzin
Directeur de l’UMR 5060 CNRS
Laboratoire de métallurgies et cultures
Université de technologie de Belfort-Montbéliard,
90010 Belfort Cedex, France
218 Annexes

Joseph Fazing Jemkur


Centre for Nigerian Cultural Studies
Ahmadou Bello University
Zaria, Kaduna State, Nigéria

Louise-Marie Maes-Diop
Géographe et historienne, Paris
Association « Khepera »
BP 11, 91192 Gif-sur-Yvette, France

Pierre de Maret
Université libre de Bruxelles
44, avenue Jeanne, 1050 Bruxelles, Belgique
Université Léopold-Sédar-Senghor d’Alexandrie
1, place Ahmed Orabi El Mancheya, BP 21111, 415 Alexandrie, Égypte

Bruno Martinelli
Maison méditerranéenne des sciences de l’homme
5, rue du Château de l’Horloge, 13024 Aix-en-Provence, France

Edwin Eme Okafor


Department of Archaeology
University of Nigeria,
University Road, Nsukka, Enugu, Nigéria

Alain Person
Laboratoire de recherches sur l’Afrique
Maison René-Ginouvès, CNRS-UMR 7041
allée de l’Université, 92023 Nanterre Cedex, France
Université Pierre et Marie Curie
Laboratoire de géologie des bassins sédimentaires
75252 Paris Cedex 05, France

Gérard Quéchon
Laboratoire de recherches sur l’Afrique
Maison René-Ginouvès, CNRS-UMR 7041
allée de l’Université, 92023 Nanterre Cedex, France
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 219

Consultation internationale de spécialistes


(Maputo, 10-13 décembre 1991)

Extraits du Rapport
À l’invitation de la Commission nationale du Mozambique pour l’UNESCO,
s’est tenue à Maputo (Mozambique) du 10 au 13 décembre 1991 une réunion
internationale consultative de spécialistes sur le lancement du projet des Routes
du fer en Afrique.

I Recommandations issues de la réunion en vue de l’étude


de faisabilité
Les spécialistes recommandent :
• de dégager deux objectifs principaux : l’évaluation du rôle du fer dans le déve-
loppement en Afrique et la construction d’une image positive de l’Afrique à
travers ce projet ;
• de créer une banque de données reliée à des systèmes similaires dans le monde
sur le thème du fer en Afrique ;
• d’établir une bibliographie annotée portant sur les disciplines académiques
(archéologie, histoire, métallurgie, anthropologie, sociologie, développement,
environnement, géologie, etc.) ;
• de faire un inventaire des thèses non publiées en rapport avec le sujet du fer en
Afrique ;
• d’établir des liens avec les entreprises du fer en Afrique pour solliciter leur
appui financier pour les projets de recherche sur le terrain ;
• de définir des aires culturelles et de mettre en valeur les similitudes en se réfé-
rant à la tradition orale ;
• d’étudier le lexique du fer dans les langues africaines ;
220 Annexes

• de faire une étude comparée des coûts et de la rentabilité entre les techniques
modernes importées et la réhabilitation des techniques anciennes de fabrica-
tion du fer pour l’artisanat ;
• de réaliser des publications (livres d’histoire, bandes dessinées et livres pour
enfants) ;
• de classer le monument Casa dos Mabyaias (La Maison des Mabyaias) comme
patrimoine du Mozambique ; réalisé par le maître-sculpteur Malangatana,
essentiellement à partir du fer comme matériau de sculpture, il symbolise plei-
nement la place et les objectifs du projet des Routes du fer en Afrique ;
• d’adopter ce monument comme logo du projet des Routes du fer en Afrique ;
• de réaliser toutes opérations techniques destinées à la préservation de ce
monument menacé à terme par la rouille ;
• de faire procéder à des études sur les thèmes suivants :
- le fer dans la tradition orale,
- le fer dans les échanges matrimoniaux,
- le fer et la mythologie,
- le fer et la musique,
- le statut social du forgeron,
- le fer et le pouvoir,
- le fer comme monnaie d’échange,
- le fer dans le développement de l’agriculture,
- le fer et la technologie,
- le fer et le développement industriel : la rentabilisation des industries du fer
en Afrique,
- l’histoire du chemin de fer en Afrique,
- les premières voitures en Afrique,
- le fer et l’environnement,
- le fer et la santé publique,
- le fer dans les musées,
- la répartition géographique du fer en Afrique,
- les minerais de fer,
- le fer dans la vie quotidienne,
- le fer et l’expansion bantu,
- le fer et l’architecture,
- l’industrie du fer et l’intégration régionale.
Ces recommandations ne sont pas limitatives et s’ajoutent à celles déjà con-
tenues dans le document d’avant projet.
Annexes 221

II Communications à caractère scientifique et technique


Les spécialistes ont entendu et discuté 13 (treize) communications portant
sur des thèmes spécifiques liés à la thématique du fer. Les communications
(Appendice III) ont permis de découvrir la richesse et la diversité des travaux de
recherche déjà réalisés sur le thème commun du fer dans plusieurs régions
africaines.

Appendice I
Ordre du jour
1. Ouverture de la réunion
2. Élection du bureau de la réunion
3. Adoption de l’ordre du jour
4. Réflexion sur la problématique du fer en Afrique
5. Histoire et anthropologie du fer (histoire, culture, philosophie, religion et
développement)
- histoire du fer en Afrique : état de la recherche, problèmes et perspectives ;
- l’homme et le métal : mythes, traditions et religions ;
- les artisans du fer : leurs modes de vie, confréries, statut social ;
- le fer dans la vie : alimentation, pharmacopée et thérapies traditionnelles.
6. Technologies et industries du fer
- les techniques du travail du fer en Afrique ;
- la métallurgie et les industries du fer en Afrique.
7. Fer, patrimoine culturel, environnement
- archéologie, géologie et géographie des minerais de fer en Afrique ;
- exploitation des mines de fer et protection de l’environnement ;
- le fer dans les ouvrages de génie civil (monuments, bâtiments, ponts) élé-
ments du patrimoine culturel.
8. Examen du projet de document des routes du fer en Afrique (CNUM/RF/
02/91/Rev.1)
9. Mécanisme de la mise en œuvre et coordination du projet des routes du fer
en Afrique
10. Approbation du rapport final et recommandations
11. Clôture de la réunion
222 Annexes

Appendice II
Liste des participants
BACCAR, Mounira : Secteur de la culture, UNESCO
CHAMBAL, Frederico Jeremias (Mozambique) : Instituto Nacional de Geologia,
Dep. Laboratorio Maputo, Mozambique
FAYE, Safi (Sénégal) : Ethnologue, Réalisateur, Dakar, Sénégal
JOSÉ, Alexandrion (Mozambique) : Universidade Eduardo Mondlane – Centro
de Estudos Africanos, Maputo, Mozambique
KARAYENGA, Athanase (Burundi) : Directeur général de Boneica (Société de
communication multimédia), Paris
KIPRÉ, Pierre (Côte d’Ivoire) : École Normale Supérieure, Direction de la recher-
che et de la coopération scientifique, Abidjan, Côte d’Ivoire
KOSSOU, Basile (Bénin) : Secrétaire de la Décennie mondiale du développement
culturel, UNESCO
LAIFA, Embarek (Algérie) : Conseiller technique (géologie minière) au Ministère
des ressources minérales, Maputo, Mozambique
LEYTEN, Harrie M. (Pays-Bas) : Conservateur, Tropenmuseum, Amsterdam,
Pays-Bas
LEISEGANG, Gerhard (Mozambique) : Departamento de História, Faculdade de
Letras, U.E.M., Maputo, Mozambique
LUCAS, Carlos (Mozambique) : Engenheiro químico, Dep. De Engenharia Quí-
mica, Faculdade de Engenharia, Universidade Eduardo Mondlane, Maputo,
Mozambique
MACHUNGO, Inês Beatriz Fernandes (Mozambique) : Assistante, Universidade
Eduardo Mondlane, Faculdade de Letras, Dep. de Letras Modernas, Maputo,
Mozambique
M’BOKOLO, Elikia (Zaïre) : Directeur d’études, École des Hautes Études en
Sciences Sociales, Paris
MEDEIROS, Eduardo (Mozambique) : Instituto Superior Pedagogico, Dep. De
Antropologia, Maputo, Mozambique
NGUNGA, Armindo (Mozambique) : Faculdade de Letras, Universidade Eduardo
Mondlane, Maputo, Mozambique
SANTANA AFONSO, Ana Elisa (Mozambique) : Coordinatrice du projet des Rou-
tes du fer en Afrique, CNUM, Maputo, Mozambique
SIBANDA, Eric (Swaziland) : Sandile University of Swaziland, Dept. of African
Languages and Lit., Swaziland
Annexes 223

SIMBI, David Jambuwa (Zimbabwe) : Président and professeur, Dep. of Metal-


lurgical Engineering, University of Zimbabwe, Mount Pleasant, Harare,
Zimbabwe

Secrétariat
COVANE, Luis Antonio Covane (Mozambique) : Departamento de História,
Universidade Eduardo Mondlane, Maputo, Mozambique
MANUENSE, Herminia (Mozambique) : Ministérió da Cultura, Projecto ARPAC
(Arquivo do Património cultural), Maputo, Mozambique
RIBEIRO, Fatima (Mozambique) : Departamento de Português, Instituto Supe-
rio Pedagógico, Maputo, Mozambique

Appendice III
Liste des interventions
Allocution de bienvenue : Ana Elisa Santana Afonso, Secrétaire générale de la
CNUM
Allocution de Graça Machel, Présidente de la Commission nationale du Mozam-
bique pour l’UNESCO (CNUM)
Allocution de Basile Kossou, Secrétaire de la Décennie mondiale du développe-
ment culturel (DMDC), représentant du Directeur général de l’UNESCO
Allocution d’ouverture : S.E. le Ministre de la culture Dr. José Mateus Kathupa
Introduction générale des travaux : Ana Elisa Santana Afonso
Chapitre I – Réflexion sur la problématique du fer en Afrique
Thème 1 – La problématique du fer au Mozambique : problèmes et perspectives
Alexandrino José (Mozambique)
Thème 2 – Cadre général de la problématique du fer en Afrique : Harrie M. Ley-
ten (Pays-Bas)
Thème 3 – Interdisciplinarité, histoire et anthropologie du fer : les ambiguités du
fer dans l’aire Kongo-Teke : Elikia M’Bokolo (Zaïre)
Examen du document du projet des routes du fer en Afrique
Examen du document : Lignes générales sur les mécanismes de coordination et
de la mise en exécution du projet des routes du fer en Afrique
Chapitre II – Histoire et anthropologie du fer en Afrique
Thème 4 – The Iron smelting process in Africa and Mozambique and its docu-
mentation – Produçao e trabalho do ferro na Provincia do Niassa : Gerhard
Leisegang (Mozambique)
224 Annexes

Thème 5 – The Growth and spread of Iron technology in Northern Mozambique


Adamowicz ( Mozambique)
Chapitre III – Fer, héritage culturel et environnement
Thème 6 – Le savoir fer au Burundi : Athanase Karayenga (Burundi)
Thème 7 – Anthropologie et filmographie du fer en Afrique de l’Ouest : Safi Faye
(Sénégal)
Thème 8 – O léxico do ferro em algumas línguas moçambicanas : Armindo
Ngunga (Mozambique)
Chapitre IV – Technologies et industries du fer
Thème 9 – Technology and iron industries in Africa : David J. Simbi (Zimbabwe)
Thème 10 – Generalidades sobre o proçesso tecnológico da fabricação do ferro e
Aço : Carlos Lucas (Mozambique)
Thème 11 – Iron in Yorubaland : T. A. Akinjogbin (Nigéria)
Thème 12 – Les routes du fer dans la structuration de l’espace ouest africain au
XXe siècle : l’exemple ivoirien : Pierre Kipre (Côte d’Ivoire)
Thème 13 – Mining and Iron work in the ancient agricultural communities of
Mozambique : Eduardo Medeiros (Mozambique)
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 225

Membres du Comité scientifique


international du projet
« Les routes du fer en Afrique »

M. Frank Aig-Imoukhuede, président du Comité


ancien directeur de la culture au Ministère fédéral de l’information
et de la culture
Lagos, Nigéria

M. Herman M. Batibo, linguiste


président de l’Association des linguistes d’Afrique orientale et australe
directeur du Département de langues et littérature africaines
Université du Botswana
Gaborone, Botswana

M. Hamady Bocoum, archéologue


spécialiste de l’histoire technique et sociale de la métallurgie du fer
en Afrique de l’Ouest
directeur du patrimoine culturel du Sénégal
responsable du Laboratoire de préhistoire et de protohistoire
de l’Université Cheikh-Anta-Diop
Dakar, Sénégal

M. Pierre de Maret, archéologue, anthropologue


recteur de l’Université libre de Bruxelles (ULB)
directeur du Centre d’anthropologie culturelle de l’ULB
professeur à l’Université Léopold-Sédar-Senghor d’Alexandrie
Bruxelles, Belgique

M. Jean Devisse, historien, archéologue ✞


ancien professeur d’histoire et d’archéologie africaine à la Sorbonne, Paris
226 Annexes

M. Melvin Edwards, plasticien


The State University of New Jersey
Department of Visual Arts
Mason Gross School of the Arts
New Brunswick, New Jersey, États-Unis d’Amérique

M. Martin Eno Belinga, géologue


chef du Département des sciences de la terre
Faculté des sciences
Université de Yaoundé
Yaoundé, Cameroun

M. Pierre Kipré, historien


spécialiste de l’histoire de l’Afrique de l’Ouest
ancien Ministre de l’éducation nationale et de la formation de base
Abidjan, Côte d’Ivoire

M. Joseph Ki-Zerbo, historien


spécialiste de la méthodologie de l’histoire africaine
directeur du Centre d’études pour le développement africain (CEDA)
Ouagadougou, Burkina Faso

M. Lech Krzyzaniak, archéologue


directeur du Musée d’archéologie
Poznan, Pologne

M. Alberto Lescay Merencio, artiste plasticien


président de la Fondation Caguayo
pour les arts monumentaux et appliqués
Santiago de Cuba, Cuba

M. Harrie Leyten, ancien conservateur du Musée royal des tropiques


ancien vice-président du Comité scientifique international
des routes du fer en Afrique
Amsterdam, Pays-Bas

M. Elikia M’Bokolo, historien et sociologue


spécialiste de l’histoire africaine, notamment de l’Afrique de l’Est,
directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales
(histoire et civilisations de l’Afrique)
Paris, France
Annexes 227

M. José Mateus Muaria Katupha, linguiste


spécialiste des langues bantu
ancien Ministre de la culture, de la jeunesse et des sports
député de l’Assemblée de la République
vice-président du Comité scientifique international des routes du fer
en Afrique
Maputo, Mozambique

M. Théophile Obenga, historien


spécialiste des langues africaines
ancien directeur du Centre international des civilisations bantu
ancien Ministre des affaires étrangères du Congo
Department of Black Studies
San Francisco State University
San Francisco, Californie, États-Unis d’Amérique

M. Bethwell Allan Ogot, historien


spécialiste de l’histoire africaine, notamment de l’Afrique de l’Est,
pionnier des techniques de l’histoire orale
directeur de l’Institut de recherche et d’études supérieures
Maseno, Kenya

M. Mohamed Ould Khattar, archéologue


ancien délégué permanent adjoint de la Mauritanie auprès de l’UNESCO
spécialiste du programme à la Division du Patrimoine culturel
de l’UNESCO
Paris, France

M. Kléna Sanogo, archéologue


Directeur de l’Institut des sciences humaines (ISH)
Ministère de la culture et de la recherche scientifique
Bamako, Mali

Dr D. J. Simbi, ingénieur métallurgiste


Département d’ingénierie métallurgique
Université du Zimbabwe
Harare, Zimbabwe
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 229

Index des spécialistes

A Celis 16, 64
Célis 74
Aba Bilunga 143 Chezeau 61
Adam 74 Chikwendu 148
Adeniji 54, 157 Childs 35, 126, 127
Adeniji (Pa) 52 Clark 26
Afigbo 43, 45 Clist 13, 121, 125, 139
Agadès 111 Coelho Lemos 101
Akinjogbin 12 Coghlan 24
Akoa Jean (Thomas) 144 Connah 26, 30, 37
Alabede 162 Coulthard 72, 83, 87
Andah 24, 29, 35, 148 Crew 64, 68, 69
Anozie 36, 48, 148 Cuccini-Tizzoni 68
Aremu 15, 36, 148, 157, 162, 190
Arkell 11, 25 D
Armstrong 45
Asombang 139 Daniels 26
Atangana 135 David 36, 148, 149
Avery 29, 35 David Adeniji 52
Davies 24
B De Barros 183
De Maret 14, 127
Barendson 23 Delneuf 133, 190
Bauvais 83, 87 Devisse 127
Bellamy 35, 36, 46 Dillmann 64, 68, 69, 76, 87, 89
Benoît 165 Diop 29, 96
Biélenin 62, 65 Dumont 72, 83
Biobaku (S.O.) 52 Dunikowski 64, 85
Bocoum 10, 14, 64, 87, 101, 102, 124 Dupré 169
Durand 120
C
E
Cabboï 64
Calvocoressi 27, 36, 148, 149 Echard 169, 172
Calvocorressi 148 Échard 127
230 Index des spécialistes

Effah-Gyamfi 36 J
Ekechukwu 36
Essaadi 72 Jemkur 11, 23, 24, 31, 36
Essomba 15, 97, 125, 133, 135, 136, 137, Johnson 51, 54
138, 145, 190 Junod 128
Evin 120
K
F Kense 35
Fagan 26 Kienon 74
Fagg 23, 36, 37 Killick 10, 41, 95, 96, 98, 99
Faivre 74
Fall 101 L
Fells 41
Fluzin 12, 61, 62, 64, 65, 68, 69, 70, 72, Lambert 27
74, 75, 76, 77, 79, 81, 83, 87, 89, 91, Lanfranchi 125
98, 103, 165 Lavachery 126
Forrières 68 Leclant 94, 96
Froment 133 Leclère 68, 74, 79, 87
Leroi-Gourhan 172
G Leroy 62, 68, 69, 72, 74, 77, 79, 81, 87,
181
Gaffet 84, 91 Lévi-Strauss 124
Gasco 120
Lhote 23, 29, 96, 191
Goucher 183
Grébénart 95, 96, 111
Griaule 168 M
Griffon 123 MacEachern 121
Groupe de travail suisse de l’archéologie Macintosh 27
du fer 62 Maes-Diop 14, 24, 29
Guilot 84 Maggs 10
Guthrie 124 Mangin 65, 68, 70, 72, 74, 83, 84, 85, 87
Maret 121, 125, 135
H Maret (de) 13
Harbord 36, 46 Martinelli 12, 15, 65, 172, 181, 186, 187
Hartle 45, 46 Masami 68
Hawkes 24 Mauny 11, 16, 26, 27, 28, 29, 93, 95, 96,
Herbach 64, 68 97
Herbert 11 Mbida 135
Herkouf 191 McDonnel 38
Heusch 128 McIntosh 111
Holl 94, 96, 97 McIntosh et McIntosh 28, 93
Huard 11, 95, 191 McNaughton 10, 170
McPhee 33
I Merluzzo 68, 72, 74, 79, 87
Idowu 162 Mezang Mezang (Pasteur Josué) 144
Izard 176 Miller 10, 97
Index des spécialistes 231

Mohen 190 Ploquin 64, 68, 74


Moock 37 Pole 35
Mortillet 95 Posnansky 27, 148
Morton 38, 41
Mungo Park 23 Q
N Quéchon 13, 96, 99, 100, 115, 124, 125
R
Ngane Oyono 142 Reinach 96
Nicklin 36 Roozeboom 61
Niger 111 Routhier 100
Njoku 36, 47 Rustad 29
Nosek 65 Ryosui 68
Nsuka 124
S
O
Saliège 108, 120
Obayemi 148 Sandra 162
Oberlin 120 Santana Afonso (Ana Elisa) 9
Oguagha 43 Sardan (Olivier de) 170
Ojo 163 Sassoon 36
Okafor 11, 12, 15, 23, 24, 29, 35, 36, 37, Schmidt 29, 35
39, 40, 41, 44, 46, 96, 121, 125 Serneels 62, 64, 68, 74
Onyeke 36, 47 Shaw 26, 27, 37, 43, 148
Onyishi Abonyi Nnamani 47 Shinnie 11, 24, 25, 121
Onyishi Ozioko Ugwu 47 Simondon 91
Orengo 72, 74, 83, 87 Sperl 41
Osmond 61 Stainier 124
Ossah Mvondo 139 Stuiver 37
Oyono 142, 143 Sutton 30, 31, 35, 36, 37, 148
Oyono Eyamo 143, 144
T
P
Tamari 11
Paris 96, 97, 99, 108, 120, 125 Termit 111
Pearson 37 Thiriot 165
Pedrals 96 Thiry 121, 125, 126, 127
Pelet 62 Thouvenin 68
Person 13, 102, 107, 108, 120 Tizzoni 68
Petrequin 62, 64 Trigger 24, 25, 29
Pétrequin 165 Tylecote 23, 24, 26, 30, 35, 36, 41, 95
Philips 37
Phillips 36, 40 U
Phillipson 25, 95
Pichot 68 Umeji 45
Pion 83, 87 Urteaga 64, 68
Pleiner 61, 62 Uzoezie 45
232 Index des spécialistes

V W
Van der Merwe 41, 97 Warmington 29
Van der Plicht 37 Wente-Lukas (Renate) 168
Van Grunderbeek 14, 96, 125 Wiesmuller 96
Van Noten 134, 191 Willett 26
Vignati 96 Wingrove 38, 41
Von Luschan 96 Woodhouse 13, 121
Voruz 120 Woolley 24
Z
Zangato 97, 125, 190
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 233

Index des sites

A Angola 126, 129


Argungu 36
Abakaliki 36 Arménie 24
Abia 151 Ashafa 32, 36
Abiriba 36, 151
Aulnat (Auvergne) 72
Abuja 35, 151
Aulnay-Truchet (Sarthe) 64
Adamawa 151
Autriche 41
Ado 148
Auxerre 144
Ado-Ekiti 163
Awae 137, 139
Afikpo 148, 151
Awgu 36
Afunfun 98, 99
Awka 36
Agadès 112
Azawagh 97
Agadez 99, 166
Azelik 27
Agege 152
Agorregi 64, 68 B
Agorregi (Espagne) 79, 83
Agunrin 152 Basse Bénoué 190
Aigueperse (Auvergne) 74, 83, 87 Basse Nubie égyptienne 189
Ajaokuta 151, 159 Bauchi 151, 158
Akjoujt 27 Baura 151
Akjout 148 Bayelsa 151
Akok-Oveng 140, 142 Beaune 64
Aku 36, 37, 45, 151 Belfort 68, 74
Akwa 151 Bende 45
Akwa Ibom 151 Bénin 151, 161, 168
Aladja 159 Bénoué 190
Aldja 151 Benue 150, 151
Alésia 85, 87 Bida 148, 152
Alexandrie 68 Bienno 68
Ama Orba 44 Bir Abu Husein 191
Amagu Ugwu 151 Birmingham 25
Ampara 150, 151, 158 Birom 36
Anambra 151 Blessey 68, 70, 72, 85
Anatolie 14, 61, 190, 191 Blessey Samaise (Côte-d’Or) 74
234 Index des sites

Blessey-Salmaise 68, 83 Dogon 188


Blessey-Salmaise (Côte-d’Or) 74, 83, 87 Douala 145
Borno 151 Dusten Kongba 152, 190
Boston 126
Bouar 190 E
Boucle du Niger 28, 165, 168, 172, 188
Boucle du Niger à Gao 27 Ebene Mengue 143
Bulkiemdé 64, 74 Eboman 140
Burkina Faso 15, 64, 68, 72, 74, 166, 168, Ebonyi 151
170, 178 Edjom 140
Burundi 96, 130 Edo 151
Edumoga 151
Égaro 13, 97, 111, 120, 190
C
Eguru 46
Cameroun 13, 14, 15, 121, 125, 133, Égypte 14, 24, 68, 95, 96, 189, 190, 191
134, 139, 143, 145, 168, 189, 190 Ejigbo 52
Carthage 26, 28, 29, 72, 79, 95, 147 Ekiti 51, 151, 163
Centrafrique 190 Ennedi 14, 191
Chawai 36 Enugu 151
Cher 123 Esie 36
Chine 103, 189 Espagne 64, 68
Chypre 189 État de Kaduna 32
Clérimois (Yonne) 64 États de Bauchi 31
Collectivité locale de Gujba à Ligdir 152 Eteto 143
Colline de Dala 30 Éthiopie 29
Colline de Dalla 151 Eyanga 151
Combe 36
Condé-sur-Suippe (Aisne) 83, 87 F
Congo 125, 128 Fagam 151
Coulmier-le-Sec (Côte-d’Or) 72, 83 Fali 151
Cricket 68 Farafra 193
Cross River 45, 151 Fatunke 152
Cuesta Nsukka-Udi 45 FCT 151
Fele 151
D Fibot 140
Fluzin 72
Daima 21, 26, 30, 148, 151
Fouta-Djalon 166
Dakhla 193
France 123
Dalla Hill 148
Danawel 64 G
Darfur 25
Daura 33, 36 Gabon 13, 121, 125, 139, 190
Delimiri 150, 151 Gao 28, 97
Delta 151 Garoua 133
Dja 139, 140 Gaule 70
Do Dimmi 96, 108, 122 Gbabiri 190
Index des sites 235

Ghana 125, 178, 187, 188 Isundunrin 52, 158


Gibraltar 27 Isundurnin 152
Golfe de Gabès 27 Itakpe 152, 159
Golfe de Syrte 27, 97 Italie 68
Gombe 151
Gournay-sur-Aronde (Oise) 85 J
Grands Lacs 96 Jarville 68
Grèce 189 Jenne-Jeno 28
Guinée 160, 174, 188 Jigawa 151
Jos 152, 166
H Juude-Jaabe (Sénégal) 87
Haute-Guinée 166
K
I Kaduna 31, 151
Ibadan 55 Kagalam 151
Ibila 150 Kagarko 151
Ibila Alukpo, Otukpo 151 Kano 30, 31, 148, 151
Ibila-Alukpo 150 Kantara 151
Ibo 43, 44, 45 Kariya Wuro 151
Idofin 163 Kastina Ala 148
Idoma 45 Katsina 31, 33, 36, 151
Ife 49, 51 Kâyn 179
Igala 43, 44, 45 Ke 152
Igbira 36 Kebbi 152
Igbo Aawo 152 Kellé 135
Igbo Ukwu 151, 161 Kenedougou 166
Igede 150 Kharga 191
Igunrin 152 Kirifi 151
Ijaw 45 Kogi 151
Ijaye 150, 152 Kongo Makeri 152
Ikole 163 Korotoro 191
Ikom 151 Koumou 144
Ilache 150 Koumou (chutes de) 144
Ilaro 152 Kubanni (rivière) 148
Ile iponrin 51 Kurmin Mazuga 32, 36
Ile isunrin 51 Kwa 44
Ile-Ife 49, 50 Kwara 152
Ile-Ife à Woye Asiri 152 L
Ilobi 152
Ilorin 51, 152 Laagbe 51
Imo 151 Lac Tchad 26, 106
In Tékébrin 97 Lac Victoria 29
Iponrin 152 Lac Victoria-Nyanza 14, 193
Iseyin 152 Lagos 152
Isokun 152 Lejja 36, 37, 45, 151
236 Index des sites

Lékié 135 Napata 25, 190


Libye 95 Nassarawa 152
Libye actuelle 97 Naudjèla 74
Ljebu Ode 152 Ndindan 135, 139
Lobo 139, 140 Nebersdorf 41
Lobo (rivière) 144 Niger 11, 13, 14, 24, 27, 28, 61, 95, 96,
LURE d’Orsay 89 97, 98, 99, 100, 111, 121, 125, 152,
166, 168, 169, 191
M Niger oriental 14, 189, 190
Nigéria 11, 12, 15, 21, 23, 26, 27, 28, 30,
Madakiya 151 32, 33, 35, 36, 52, 96, 121, 125, 133,
Maïdi 36 147, 150, 151, 157, 158, 159, 162,
Makera 31 163, 166, 189, 190
Makera Takunpata 152 Nkolmebong 140, 142
Mali 15, 28, 166, 168, 169, 178, 179 Nkomadzap 144
Malinke 165, 170 Nkometou 135, 139, 145
Mandara 26 Nkooveng 140
Maputo 9 Nkoumadzap 144
Maroc 27, 28, 95, 97 Nkumadzap 140
Matara 29 Nkwo-Ike 43
Mauritanie 24, 27, 28, 147, 148 Nok 21, 32, 36, 124, 125, 147, 148, 152,
Mbak Itam 151 190, 191, 193
Meba 143 Nok-Taruga 190
Mefou 139 Nord du Cameroun 168
Méroé 13, 25, 26, 28, 121, 147, 190 Nord du Nigéria 31
Mésopotamie 14, 190, 191 Nord du Pays ibo 43
Mésopotamie et Anatolie 189 Nord du Togo 168
Mfoumou 140 Nord-Cameroun 128
Mfoundi 135 Nord-Togo 169
Mia Bin 151 Nouvelle-Calédonie 100
Minkoumou-Nkoumadzap 144 Nru-Isiakpu 46
Monde carthaginois 190 Nsukka 11, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43,
Moniya 150, 152 44, 45, 46, 47, 48, 148
Mont Idofin-Ojokolo 152 Nukheila/Merga 191
Monts Mandingue 166 Nyong 135, 140
Moose 165
Mopti 188 O
Mozambique 9, 11
Muta 151 Oba 49, 152
Obo Aiyegunle 158
Obo Ayegunle 152, 163
N Obobogo 135, 139
Nachikoufien 193 Odo Ere-Akata-Ijomu 151
Namibie 126 Oduduwa 49
Nancy 68, 74, 87 Ogbom so 152
Nancy-Belfort 79 Ogbomoso 36
Index des sites 237

Ogun 152 Pays moose et gurûnsi méridionaux 187


Ogundo 152 Pays samo 171
Ogunremi 152 Pays samo septentrional 176
Oise 72 Pays songhay 166
Oju 150 Pays yoruba 12, 15, 50, 51, 52, 54, 55, 56,
Oke Odan 152 162, 163
Okemesi 51, 151 Peuls 170
Okigwe 36 Phalaborwa 41
Oko 53 Plateau 31, 147, 152, 190
Okolo 135 Plateau ibo 45
Ola Igbi 36, 46 Pongsolo 135
Olaigbi 152 Pongsolo I 135
Oliga 137, 139, 190 Pongsolo II 135
Olla 152 Ponte di Val Gabbia 68
Ondo 152, 163 Ponte di Val Gabbia (Italie) 79
Onyoma 152 Pwitenga 187
Opi 24, 29, 36, 37, 38, 41, 47, 151
Orba 36, 40, 41, 42 R
Orba-Umundu-Eha-Ndi-Agu 40 Rafiu Ndoko 148, 152
Osun 152 Région bahaya 29
Otetek 144 Région d’Azelik 28
Otetek Etoto 140 Région de Nsukka 21
Otta 152 Région des Grands Lacs 14, 16, 126
Otun 163 Région du lac Victoria-Nyanza 189
Ouagadougou 187 République centrafricaine 14, 125
Ouahigouya 178 Rive méridionale du Limpopo 191
Oualata 27 Rivers 152
Ouganda 129 Royaume dagomba 174
Owa Kajola 152 Rwanda 96, 125, 128, 130
Owa Onire 152
Owerre-Elu 36, 39, 40, 41, 47 S
Owerre-Elu-Nru-Isiakpu 46
Owerre-Elu-Nru-Isiakpu-Edeoballa 39 Saaka 145
Oyo 36, 46, 51, 150, 152 Sahara 26, 28
Oyo (ville) 152 Sahara central 28
Ozalla 43 Saint-Louis 102
Saka 137, 139
Samarra 190
P
Samaru 31
Panguru 151 Samaru Ouest 21, 30, 31
Pan-Pan 135, 136 Samaru West 151
Pays basque 64, 68 Samaru-Ouest 148
Pays bassar 174, 183 Samo 188
Pays bassar occidental 169 Samory 102
Pays ibo 45, 47 Samun Dukya 152
Pays moose 187 Sanaga maritime 135
238 Index des sites

Sanga 168 Umukete Aguleri 148, 151


Saverne 74 Umundu 36, 40, 41, 42, 148, 151
Sawuni 152 Umundu-Orba-Eha-Ndi-Agu 46
Schiri 151 Upemba 130
Sekkiret 27 Utique 29
Selima 191 Utonkon 151
Sénégal 64, 193
Shaushau 150, 151 V
Sine-Saloum 193
Vallée de Kubanni 30
Sokoto 31, 152
Vallée de l’Anambra 148
Songhay 165, 170
Vallée du Nil 14, 95
Soninke 165
Vallée du Sénégal 166
Soudan 25, 30, 191
Victoria-Nyanza 190
Soudan occidental et central 14
Sud du Sahara 28
Sud-Cameroun 134, 137, 139 W
Sukur 151 Wikki 158
Woru 168
T
Taraba 152 Y
Taruga 23, 24, 25, 26, 28, 30, 31, 36,
Yankari 150, 151, 158
106, 125, 147, 151, 166
Yankari (Bauchi) 158
Tchad 191, 193
Yaoundé 125, 128, 135, 137, 139, 190
Teguef n’Agar 27
Yatenga 15, 166, 170, 171, 172, 175, 176,
Télénugar 193
Ténéré 106 177, 178, 179, 180, 186, 187, 188
Tenkodogo 187 Yelwa 152
Termit 13, 27, 61, 96, 100, 106, 108, 111, Yelwani (Niger) 74
113, 115, 120, 121, 122, 190, 191 Yemfok 140
Tichitt 27 Yobe 152
Togo 174, 183 Yoruba 49, 50, 51, 54, 55
Tombouctou 97, 188
Touffreville (Calvados) 72, 83, 87 Z
Toungaré 64, 68, 72
Zagomida 36
Tsauni Nord 31
Zambie 191, 193
Tse Dura 148, 151
Zamfara 152
Zaria 30, 36, 148
U Zimbabwe 126, 128
Uffe Ijumu 148, 151 Zinder 106
Ugwuagu 148, 149 Zoétélé 137, 139, 140, 142, 143, 144
Ukehe 36 Zoétélé-Brousse 140, 142, 145
Ukpa 151 Zoétélé-Village 140, 142, 143
Ulaira 152 Zoétélé-Ville 143, 144
Umugedu 47 Zungeru 148, 152
Les débuts de la métallurgie du fer en Afrique de l’Ouest 239

Table des illustrations

Figures
Figure 1. Le processus sidérurgique et son évolution historique 60
Figure 2. La chaîne opératoire du fer : l’épuration 66
Figure 3. Représentation graphique des mesures 14C BP, à Termit-Égaro.
Histogramme additionnant par classes de 50 ans les dates
radiocarbones BP non calibrées selon l’intervalle de confiance
des mesures 116
Figure 4. Histogramme comparatif des âges 14C 117
Figure 5. Chronologie de la fin du néolithique et des débuts de la
métallurgie à Termit 119
Figure 6. Localisation des principaux sites étudiés par l’auteur dans
la région 136
Figure 7. Prospection archéologique dans l’arrondissement de Zoétélé.
Localisation des principaux sites identifiés par l’auteur (juillet-août
1990) 141
Figure 8. Principaux sites de réduction du fer et leur localisation dans les
États du Nigéria 149
Figure 9. Le Yatenga et l’aire de métallurgie moose 167
Figure 10. Agriculteurs métallurgistes et forgerons au Yatenga et dans la
plaine de Séno 171
Figure 11. Principaux types de fours à induction dans la boucle du Niger 173
Figure 12. Yatenga, Kâyn ; réductions comparées 70/100 h. Courbes de
température 182
Figure 13. La métallurgie africaine du fer du IIIe millénaire au Ve siècle
av. J.-C., pour les sites connus 192
240 Table des illustrations

Photos
Planche I. La réduction directe et ses produits 63
Planche II. L’épuration, pratiques et déchets 67
Planche III. Les demi-produits et les lingots 71
Planche IV. La forge : pratique, outils et déchets 73
Planche V. Indices métallographiques : la réduction 78
Planche VI. Indices métallographiques : l’épuration 82
Planche VII. Indices métallographiques : élaboration de l’objet 86
Planche VIII. La structure du métal : fer, acier, fonte, à partir de l’étude
métallographique d’échantillons archéologiques 88
Photo 73. Vue panoramique des 22 bases de fourneaux de Do Dimmi
(Termit, Niger) 112
Photo 74. Trou de 5 cm servant à vérifier la réduction du minerai de fer
dans le fourneau 153
Photo 75. Tuyères dans les trous prévus à cet effet 153
Photo 76. Porte de fourneau 153
Photo 77. Site de réduction du minerai de fer, parc national de Yankari,
État de Bauchi 153
Photo 78. Tas de scories de fer sur le site de réduction du minerai de fer
d’Ampara 154
Photo 79. Revêtement extérieur écaillé d’un fourneau à cuve 154
Photo 80. Vue latérale d’un fourneau à cuve 154
Photos 81, 82 et 83. Divers stades de destruction de fourneaux à cuve 155
Photo 84. Fours de métallurgistes dogon à Vol et Sege 174
Photo 85. Anciens fours (bôn-daagha) au Yatenga 175
Photo 86. Fours contemporains (bônga) au Yatenga 177
Photo 87. Batterie de fours de forgerons moose au Yatenga, avec soldat
donnant l’échelle 179

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