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FARINE
Adieu le Maître Cornille d’Alphonse Daudet… Bienvenue au XXIe siècle ! Dans les moulins d’aujourd’hui, la
technologie est de rigueur. Avec un outil de production performant, les meuniers font des farines qui
répondent à de nombreux critères qualité pour fabriquer aussi bien du pain, des viennoiseries ou des biscuits.
Technologie et automatisme ne les empêchent pas de faire passer le blé par les mêmes étapes que jadis.
Le blé arrive au moulin le plus souvent en camion. Il est déversé directement de la benne dans la fosse à blé et
acheminé vers le silo. Il y a un silo dévolu à chaque variété de blé ou à chaque type de mélange.
La préparation : Le meunier assemble minutieusement les blés en fonction de la farine qu’il veut
obtenir. Le mélange choisi est débarrassé de toutes ses impuretés, qui peuvent être autant de vecteurs de
contaminants (pailles, petits cailloux, poussières, autres graines…). Différentes machines interviennent
lors du nettoyage qui est fondé sur deux principes physiques : séparation en fonction de la taille des
particules, et séparation en fonction de leur densité.
La brosse à blé décolle la balle du grain et les poussières, le “tarare” aspire ce qui est plus léger que le blé,
l’épierreur… porte bien son nom. Certaines machines font tout en même temps.
Il y a en outre des magnétiques avant les principales machines du moulin (jusqu’au conditionnement) : ils captent
tout ce qui est métallique. Le blé est ensuite mouillé avant de reposer au moins 24 heures dans un boisseau de
repos. Ce procédé permettra une meilleure séparation entre l’amande et l’enveloppe du grain de blé.
La mouture : La mouture consiste en plusieurs passages successifs du blé broyé dans un appareil à
cylindres suivis d’un tamisage : ces successions d’étapes sont répétées environ quatorze fois. À chaque
étape, après le tamisage, une partie de la farine est extraite et les autres produits sont orientés vers un
nouvel appareil à cylindres.
A. Le blé effectue plusieurs passages dans des appareils à cylindres en acier cannelé qui séparent
grossièrement l’amande du blé de ses enveloppes. Cette première étape est appelée « broyage » .
B. Les semoules sont ensuite écrasées par des cylindres lisses. Ce sont les opérations de “claquage”, puis de
“convertissage”, qui diminuent encore la taille des particules et continuent la séparation de l’amande
farineuse et des particules d’enveloppe.
C. Parallèlement au travail des cylindres, les plansichters sont des appareils mécaniques qui permettent de
tamiser les produits obtenus après chaque passage entre les cylindres. En fonction de leur taille, certains
de ces produits sont orientés vers d’autres appareils à cylindres, et une partie de farine est extraite.
D. La farine obtenue est envoyée dans une chambre à farine au fur et à mesure de son arrivée. Toujours
dans un souci de constance, la farine est mélangée et homogénéisée dans la chambre à farine où elle
est conservée, en attendant d’être tirée en sacs ou en vrac.
L’EMBALLAGE DE LA FARINE
Pour la mise en sacs, le poids de la farine conditionnée est contrôlé très précisément. L’utilisation des sacs de
farine de 25 kg se généralise progressivement. Des renseignements obligatoires figurent sur les sacs : nom et
adresse du meunier, dénomination de vente (“farine pour pain de tradition française”, “farine de seigle”…), type
de farine, date limite d’utilisation optimale (neuf mois en général) et numéro de lot, poids net et liste des
ingrédients. Le meunier peut justifier en toute transparence, grâce aux analyses d’échantillons prélevés tout au
long de la mouture, du parcours des produits qu’il travaille : aussi bien à partir du sac de farine (traçabilité
montante) que du grain de blé arrivé au moulin (traçabilité descendante).
Le boulanger peut aussi être livré en vrac. Chaque compartiment du camion-citerne contient la livraison d’un seul
boulanger. Il est scellé par un plomb, garantie que le poids est respecté.
Les informations citées ci-dessus sont portées sur une étiquette qui est attachée au plomb ou sur le document
d’accompagnement dans la cabine du camion. Arrivé à destination, le camion-citerne est raccordé à la chambre à
farine du boulanger. Celle-ci a une contenance de 10 à 50 quintaux.
L’amidon est le principal composant de la farine. Il est insoluble dans l’eau froide mais, à partir de 55° C, les
grains d’amidon absorbent l’eau, gonflent et éclatent, se soudant les uns aux autres.
Le refroidissement de la pâte s’accompagne d’une transformation de l’amidon qui se prend en masse et se
solidifie. Les glucides jouent un rôle prépondérant dans la fermentation en tant que substance nutritive des
levures.
Pour 100 g de farine, voici les valeurs nutritionnelles correspondantes selon chaque catégorie :
Source: observatoire du pain
L’HOMME, LE BOULANGER
Boulanger est un métier de passion, de chair et de sang-froid ; l’inspiration du boulanger donne son empreinte
aux pains qui sortent de son fournil ; son choix de vie a des répercussions sur son rythme social. Boulanger,
c’est aussi un métier de contact avec la clientèle, un métier de partage, et bien souvent la vie privée des clients
s’insère dans la boutique. La reconnaissance et la mise en avant de l’unicité de chaque boulanger luttent à leur
façon contre l’uniformisation et la standardisation des saveurs.
À lui tout seul, le boulanger incarne l’exception française !
LA FORMATION DU BOULANGER
Le diplôme exigé pour fabriquer du pain est le certificat d’aptitude professionnelle (CAP), ou bien trois ans
d’expérience professionnelle. Pour reprendre une activité de boulangerie, il faut un CAP, diplôme qui donne à
son titulaire une qualification d’ouvrier ou d’employé qualifié. Le candidat au métier peut suivre différents
parcours pour l’obtenir :
La filière de l’apprentissage, plébiscitée par les professionnels ; le candidat est très motivé car il sera salarié
pendant deux ans ! Il touchera un pourcentage du SMIC lié à son âge et à son niveau de formation. Il peut choisir
d’intégrer cette filière avant la classe de 3e. L’apprentissage se fait via des centres de formation d’apprentis
(CFA) ; en deux ans, le candidat prépare son CAP boulanger en alternance. Il doit trouver un maître
d’apprentissage, qui signera un contrat avec le CFA. La cadence est généralement d’une semaine d’école pour
trois semaines d’entreprise. La filière de l’apprentissage est la plus populaire.
Le lycée professionnel, après la 3e. Le bac professionnel comporte trois années d’études et est de niveau 4.
L’enseignement met l’accent sur la gestion de l’entreprise et la commercialisation. Il intègre simultanément les
fondamentaux des fabrications de boulangerie et de pâtisserie. Après sa première année, le candidat peut choisir
de rejoindre une deuxième année de CAP de boulanger, ou de pâtissier.
De plus en plus d’adultes souhaitent aujourd’hui devenir boulanger ou pâtissier ; en reconversion professionnelle,
ils sont souvent porteurs d’un projet de création ou de reprise d’une affaire. Il leur est possible de suivre une
formation accélérée au métier de boulanger via une école de formation professionnelle. L’INBP, par exemple,
prépare au CAP en dix-sept semaines, l’EBP en un an pour les titulaires d’un diplôme de niveau V (au moins le
CAP).
Après son CAP, le boulanger peut continuer à progresser :
HISTOIRE DU PAIN
FRANCE, TERRE À BLÉ…
Nous appartenons à la civilisation du blé, comme d’autres à celles du riz ou du maïs. Sans blé, pas de farine, et
donc pas de pain. Mais comment sommes-nous passés de la céréale à sa mouture, pour arriver à la fermentation et
pour finir… au pain ? Voyage à travers les siècles.
Le blé est l’espèce végétale avec laquelle les hommes ont commencé à maîtriser la nature et à gérer leur milieu.
On sait que les hommes du Mésolithique (12000 ans – 7000 ans av. J.-C.) mangent des céréales en Mésopotamie
(Proche-Orient) : ils mâchent leur cueillette de graines d’épeautre ou d’amidonnier crue ou grillée.
Le premier moulin fut une pierre plate pour étaler le grain et un gros caillou rond tenu à pleines mains pour
l’écraser. En réduisant le grain en farine, l’homme invente le moyen d’en faire des bouillies, puis ensuite des
galettes. En 8000 avant J.-C., on sait que les Sumériens qui vivent sur les bords du Tigre et de l’Euphrate (Iran et
Irak actuels) fabriquent plusieurs sortes de galettes de céréales cuites – orge, blé, épeautre, millet, avoine… – en
les posant sur les parois des fours. Ils enrichissent la pâte avec de la graisse, des œufs ou du miel. La civilisation
Sumérienne connait, en 3000 av. J.-C., une période de prospérité agricole due à l’invention de la charrue.
En 1890, Auguste
Mariette découvre le tombeau de Ty (Ve dynastie – 2514/2374 av. J.-C.), sur le site de saqqara, en Egypte dans
lequelle on trouve la première iconographie de boulanger (appelé reteh) ainsi que de levain, appelé hesa. On voit
alors apparaître les premières corporations identifiées comme “boulangers” et “pâtissiers”.
Lors des conquêtes d’Alexandre le Grand (356/323 av. J.-C.), le pain fait son apparition chez les Athéniens qui en
raffolent.
Les Grecs font fermenter la pâte en y ajoutant de la soude ou du jus de raisin. Leurs pains sont généralement
ronds, mais ils savent aussi sculpter la pâte selon leur inspiration. En 300 ans av. J.-C., apparaisent les premières
boulangeries à Rome (appelées pistorias). Les boulangers sont d’origine grecque et le métier est héréditaire ; de
lourdes amendes pénalisent les fils qui ne veulent pas succéder à leur père.
Les Grecs apprennent aux Romains l’utilisation de la levure de bière en 200 ans av. J.-C. Les Romains améliorent
le système des moulins en utilisant la force de l’eau en 100 av. J.-C. : de grosses roues plongées dans le courant
actionnent les meules.
Jésus-Christ sacralise le pain qui devient le symbole de son corps immortel. Les Écritures saintes de la religion
chrétienne et ses prières recèlent de nombreuses références au pain.
En Gaulle, la fabrication et la cuisson du pain sont une activité domestique. Les premiers moulins à eau
apparaissent en France en 400 ap. J.-C. Le pouvoir de ceux qui sont en ville sur les berges des fleuves est grand
car le ravitaillement de la ville dépend d’eux. Le meunier achète alors le grain au détail chez le blatier ou en gros
chez le marchand de grains. Il emploie des porteurs de blé, des cribleurs pour le nettoyer et des mensureurs pour
vérifier les quantités à la sortie du moulin : pour 240 livres de blé, le meunier doit livrer entre 80 et 90 livres de
farine.
Vers 630, on attribue à Dagobert les premiers écrits concernant la règlementation de la vente du pain : les
boulangeries devaient se situer dans les cours royales, les villes fortifiées et les abbayes. Les boulangers
s’appellent alors “talmeliers”, du nom du tamis dont ils se servent pour débarrasser la farine de ses impuretés.
D’Orient, les preux chevaliers des Croisades rapportent l’idée d’utiliser le vent et de donner des ailes aux
moulins.
À partir de 1050, le pain devint la base de l’alimentation. Le rôle du christianisme dans sa promotion et sa
diffusion a été considérable pendant tout le moyen-âge. Pendant cette période, le meunier conduit le moulin banal,
propriété du roi, du seigneur ou de l’abbaye. Le paysan fait son pain : il paie une taxe à son suzerain pour moudre
son grain (les meules à bras dont on se sert chez soi pour faire le travail gratuitement sont déclarées illégales) et
une autre taxe pour se servir du four communal. Le pain est noir, il contient beaucoup de son. Au début du second
millénaire, les premiers textes qui réglementent la profession apparaissent.
En 1217, le boulanger doit obtenir une autorisation royale pour exercer. Au XIIIe siècle, Étienne Boileau rédige, à
la demande de Saint Louis, le livre des Métiers. On y lit la définition de la profession de “talmelier” : le grand
panetier du roi désigne un maître talmelier et des jurés chargés de la surveillance du pain. Jurés et syndics seront
élus par la confrérie ; ceux qui ne peuvent devenir maîtres se regroupent en associations de compagnons pour
défendre leurs droits et ceux des apprentis. L’apprentissage dure cinq ans et commence à quatorze ans. Après
avoir été vanneur, bluteur, pétrisseur, l’apprenti fait encore un stage de quatre ans avant de devenir patron. Il faut
alors, comme aujourd’hui, qu’il ait les moyens d’acheter un fonds de commerce et de payer régulièrement les
taxes en usage (hauban à la Saint-Michel, un demi-pain le mercredi…).
Le futur maître paie notamment 21 deniers de coutume avant Noël. Chaque fois qu’il encaisse cette taxe annuelle,
le receveur fait une encoche sur son bâton : au bout de quatre encoches – quatre années – l’apprenti est enfin
admis à s’installer. Une cérémonie est alors organisée par la confrérie des Talmeliers. La corporation des
boulangers voit le jour à Paris en 1260. La profession est organisée pour réglementer l’approvisionnement en blé
et en pain. Il est alors interdit de faire son pain à domicile.
Au XIIIe siècle toujours, il y a des centaines de milliers de moulins à eau en France et les ailes de quelques trois
mille moulins tournent dans les campagnes. Leur mécanisme est le même :
sur une grosse meule fixe – la gisante – un traquet pousse le grain écrasé par la meule mobile – la courante ou
traînante – qui tourne dessus.
Au XIVe siècle, les boulangers fabriquent principalement quatre sortes de pain : le pain blanc dit de Chailly, le
pain coquillé (pain bis blanc), le pain de chapitre (ou pain broyé ou brié) dont la pâte épaisse est battue avec deux
bâtons, et le pain bis, le plus grossier. Le 19 janvier 1322, une ordonnance permet aux boulangers de travailler la
nuit. Le boulanger est sévèrement contrôlé. Nobles et bourgeois achètent le pain chez lui et le dégustent blanc.
Les paysans se contentent d’un pain noir qu’ils fabriquent eux-mêmes à partir des céréales disponibles. Au XVIe
siècle, le client doit pouvoir peser lui-même le pain qu’il achète sur une balance installée “au plus clair de la
boutique”.
Sous Louis XIV, le pain s’allonge et devient plus blanc. Le premier pétrin est inventé par Solignac en 1751 et la
première école de boulangerie ouverte par Parmentier en 1780. Dans les années précédant la Révolution, le
manque de pain ou le pain de mauvaise qualité était fréquent. Après 1789, fini le pain noir pour les pauvres et le
pain blanc pour les riches : un pain de l’égalité est imposé. Les brimades administratives révolutionnaires
réduisent cependant les boulangers à la misère. La loi du 17 mars 1791 supprime les corporations et permet aux
boulangers d’exercer librement leur métier. La banalité (impôts sur l’utilisation obligatoire du four du seigneur)
est supprimée en 1793.
Les moulins font aussi partie de l’Histoire de France : pendant les guerres de Vendée, les moulins à vent sont
utilisés par les royalistes pour indiquer la position des troupes républicaines par le mouvement de leurs ailes.
Il faut attendre le XIXe siècle pour que les paysans et le petit peuple aient les moyens de s’offrir du pain blanc. En
1807, Napoléon fait construire un grenier de réserves et dote son armée de boulangeries ambulantes. Il envisage
même de faire des boulangers des fonctionnaires ! Les machines à vapeur apparaissent dans les moulins vers
1850, les cylindres commencent à remplacer les meules à partir de 1872 et les minoteries industrielles se
généralisent à la fin du XIXe siècle.
Le 2 juillet 1889, le Syndicat national de la boulangerie française est créé. Le métier de porteuse de pain apparaît
en 1880 pour disparaître en 1914. La technologie progresse à pas de géant : la guerre de 1914-18 accélère
l’utilisation du pétrin mécanique ; la panification directe à la levure apparaît en 1920 ; le façonnage mécanique
démarre en 1926 ; le pétrin à deux vitesses apparaît en 1955 et les premières diviseuses en 1958.
Depuis les années 1970, les pains spéciaux et de campagne font leur grand retour. Suivis par les pains bis,
complets, ou encore de tradition… réclamés démocratiquement par le peuple et fabriqués librement par l’homme
de l’art. L’Histoire n’est-elle pas un éternel recommencement ?
PAIN ET POLITIQUE
À Rome, les empereurs assuraient au peuple panem et circenses, “du pain et des jeux” pour maintenir la paix.
L’obligation de fournir gratuitement deux pains par jour à 300 000 Romains oisifs a affaibli l’Empire romain qui
s’effondre à l’arrivée des barbares en 476 ap. J.-C. Au fil des siècles, les gouvernants ont tout fait pour mettre
sous contrôle la fabrication du pain.
C’est d’ailleurs la pénurie de pain qui a poussé le peuple de Paris à marcher vers Versailles pour en ramener “le
boulanger, la boulangère et le petit mitron” (Louis XVI, Marie-Antoinette et le Dauphin). Le pain reste la mesure
du bien-être quotidien : tant que le peuple peut en acheter, tout va bien. Et encore aujourd’hui : en témoignent les
tollés médiatiques que provoquent les moindres infimes augmentations du prix du pain !
LA FABRICATION DU PAIN
Tous les jours et depuis des siècles, le boulanger met dans son pétrin quatre ingrédients: farine, eau, sel, levure
ou levain… Son savoir-faire s’est accoutumé des modes, de l’Histoire vécue (pain noir pendant les guerres) et il
continue de s’adapter. Aujourd’hui, la demande qualitative est forte. Et le boulanger est là pour subvenir aux
besoins du XXIe siècle !
• Les adjuvants sont des substances d’origine naturelle permettant de corriger, d’améliorer ou de faciliter la
fabrication d’un produit(exemple : la farine de fèves).
• Un auxiliaire technologique est une substance qui sert à améliorer la fabrication d’une denrée alimentaire
mais qui n’est pas retrouvée dans le produit fini car détruite pendant la fabrication (exemple : les enzymes
dans la pâte à pain durant la cuisson).
• Les additifs se retrouvent dans le produit fini (exemple : lécithines). Leur autorisation est réglementée selon
le type de produit fini considéré. Le pain courant français peut contenir jusqu’à quatorze
additifs (l’acide ascorbique E 300, la lécithine de soja E 322, etc.). Aucun additif n’est autorisé pour le
pain de tradition française.
LES HUIT ÉTAPES DE LA FABRICATION DU PAIN
Les artisans assurent l’ensemble du processus de fabrication du pain jusqu’à la vente au consommateur
final. Chaque boulanger a son tour de main, mais les grandes étapes de la
panification restent les mêmes.
1. Le pétrissage
Le boulanger mélange tous les ingrédients de la pâte. Le gluten contenu dans la farine fixe l’eau versée
dans le pétrin. La pâte devient élastique et emprisonne l’air. Si le pétrin mécanique facilite cette étape décisive,
le boulanger doit rester vigilant et surveiller précisément son déroulement. Différentes méthodes de pétrissage
sont possibles. Le pétrissage à vitesse lente permet de fabriquer un pain peu développé, à la mie crème ; le
pétrissage intensifié, plus long avec une vitesse de rotation plus grande, permet de fabriquer un pain très
développé, à la croûte fine ; le pétrissage amélioré, compromis entre ces deux méthodes, dure de 10 à 15 mn. et
est entrecoupé de périodes de repos de 2 à 3 mn. Pour que la pâte fermente dans de bonnes conditions, le
boulanger doit veiller à obtenir une température finale de la pâte comprise entre 23 et 25° C ; si besoin, il refroidit
l’eau.
2. Le pointage
Avant de diviser la pâte, le boulanger la laisse reposer dans le pétrin : cette fermentation dans une cuve, le
pointage (aussi appelée piquage), est importante pour la formation des arômes du pain. La production de gaz
carbonique commence. La pâte lève, ses qualités se renforcent, elle devient plus tendre, plus élastique. Pour le
pain de tradition, cette étape est plus longue.
L’expérience du boulanger lui permet de décider quand la pâte est prête : chaque pâte réagit différemment, en
fonction de paramètres qui varient chaque jour (humidité de l’air, etc.). Le boulanger touche la pâte du bout des
doigts, et décide si le moment est venu de passer à l’étape suivante. Aucune machine, aussi sophistiquée soit-elle,
ne peut remplacer sa main.
3. La pesée
Quand la pâte a fini de pointer, le boulanger la divise en pâtons pour donner à chacun le poids voulu. Il se sert
pour cela d’une diviseuse, qui a le petit défaut de diminuer la souplesse de la pâte. Pour pallier cet inconvénient,
le boulanger laisse encore un temps de repos à la pâte pour la détendre. Le poids des pains et la précision des
balances font l’objet de contrôles systématiques et réguliers de la DGCCRF.
4. Le façonnage
À la main ou à l’aide d’une machine, le boulanger façonne ensuite chaque pâton, lui donnant la forme du
pain qu’il veut obtenir. Ce geste savant s’appelle “la tourne”. Les pains façonnés sont déposés sur des supports
en toile de lin appelés couches, ou sur des filets. Ils sont parfois placés dans des petits paniers garnis de toile,
adaptés à leur forme (longs pour les baguettes, ronds pour les miches) : les bannetons ou panetons.
5. L’apprêt
L’apprêt est un autre temps de repos, une autre fermentation des pâtons une fois façonnés. Il permet à la
levure de bien se nourrir des sucres contenus dans la pâte. Le gaz carbonique se dégage. Prisonnier du gluten, il
fait gonfler la pâte qui le retient. Chaque pâton triple de volume. Le temps de l’apprêt dépend de la température,
de la dose de levure, de la méthode de pétrissage, du temps de pointage et peut aller de une à quatre heures.
Certains boulangers placent les pâtons dans des armoires de fermentation à température contrôlée, qui favorisent
la maîtrise du développement du pain.
6. L’enfournement
Pendant ce temps, le four a chauffé. Sa température s’élève à 250° C. Avant d’y enfourner les pâtons, le
boulanger l’humidifie en y injectant de la vapeur. Ainsi, le pain cuit sans se dessécher et la croûte se forme, fine
et dorée. Avant de mettre le pain au four, le boulanger donne des coups de lame à la surface du pain. Ces
“grignes” permettent au gaz carbonique de sortir de la pâte. Dans les fournils modernes, des tapis enfourneurs
remplacent la pelle de bois à long manche pour déposer les pâtons dans le four.
7. La cuisson
Sa durée varie en fonction de la forme et du poids des pains à cuire : elle va de 12 minutes pour une ficelle à
50 minutes pour une boule de 1 kg. En début de cuisson, les pâtons continuent à gonfler. La mie se crée et cuit
pendant que le pain prend sa forme définitive. La croûte durcit et prend sa couleur. Le boulanger surveille
attentivement cette étape décisive.
8. Le défournement
Le pain est sorti du four avec précaution : tout chaud, il est très fragile. Le ressuage consiste à le laisser
refroidir, le temps que la vapeur d’eau et le gaz carbonique qu’il contient s’en échappent. Pendant cette période,
les pains doivent être gardés dans une pièce sèche et bien aérée. Ils sont ensuite placés dans des corbeilles
pour être portés à la boutique.
Le travail du boulanger est très bien cadré. Les boulangeries-pâtisseries (définies ci-dessus) sont soumises à de
nombreuses réglementations, notamment à propos de l’hygiène et de la sécurité. Un nouveau “Paquet hygiène” a
vu le jour en 2006. Il s’agit d’un ensemble de règlements européens (food law 178/2002, 852/2004, 853/2004)
fixant les exigences relatives à l’hygiène des denrées alimentaires et animales. Il vise à harmoniser et à simplifier
les dispositions en matière d’hygiène (caractère sûr et sain des denrées, protection de la santé du consommateur),
et fait notamment référence au stockage, aux principes HACCP (système qui identifie, évalue et maîtrise les
dangers significatifs au regard de la sécurité des aliments), et au guide des bonnes pratiques d’hygiène qui
propose un ensemble de moyens adaptés aux structures artisanales (dont l’efficacité a été reconnue par les
administrations de contrôle).
La sécurité alimentaire du pain est potentiellement menacée par quatre types de dangers : physiques (corps
étrangers : éclats de bois, de verre…), chimiques (erreur de produit employé, présence de contaminants),
allergiques et microbiologiques.
Pour éviter les contaminations, les employés d’une boulangerie respectent la règle des cinq “M”, qui sont autant
de champs d’application de la vigilance :
• Main d’œuvre (lavage des mains, les vêtements de travail sont propres et nettoyés le plus souvent
possible, port d’un masque en cas de rhume…)
• Matériel (les plans de travail sont en bois dur, le matériel est propre et conforme)
• Méthodes de travail (maîtrise des températures pendant la fabrication, les produits de nettoyage sont
stockés loin des produits alimentaires)
• Matières premières (la farine ne doit pas être stockée au sol)
• Milieu (locaux aérés, entretenus, propres, les néons sont protégés…)